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Le Carnisme

par Melanie Joy

"Je veux dire, il y a tant de choses mortifères dans notre culture et notre société, mais
celle-là (tuer des animaux pour les manger) est certainement l'une des pires et à
laquelle la plupart des gens font le moins attention car ils pensent que les animaux
n'ont aucune importance...Moi j'ai beaucoup de compassion pour ces animaux. C'est
bouleversant rien que d'y penser...j'en pleure."

Alors qu'il est probable que nombre de lecteurs de VegFamily s'identifient avec les propos
rapportés ci-dessus, ce qui est surprenant c’est qu’ils proviennent non pas d’un végétarien
mais d’un mangeur de viande. Ce qui est peut-être encore plus surprenant c'est que les
sentiments exprimés dans cette phrase apparaissent comme étant la règle plutôt que
l’exception. Des recherches ont montré que le fait de manger d’autres animaux provoquait
un sentiment de malaise et d’incohérence dont la plupart des gens ne sont pas conscients.
Aussi la question est-elle : comment l’américain moyen qui se considère lui-même
probablement comme non-violent envers les animaux peut-il manger leurs corps sans
paraître en ressentir un malaise?

Une réponse est donnée, du moins en partie, par la compréhension du concept de carnisme.
«Carnisme» est le mot que j’ai commencé à utiliser, il y a plusieurs années, pour désigner
l’idéologie de la consommation de viande. Les idéologies sont des systèmes de pensée ayant
l’énorme pouvoir de façonner nos attitudes et nos comportements. Les idéologies sont
souvent enracinées si profondément dans une société que leur influence est en grande partie
inconsciente - et de ce fait, elle n'est pas remise en question. En règle générale, les
idéologies sont reconnues comme telles lorsqu'elles constituent des exceptions à la façon de
penser courante, "normale", ce que nous appelons "idéologie dominante". C’est pourquoi il
existe un nom, végétarisme, pour l’idéologie qui considère inapproprié et non-éthique de
consommer la viande d’autres animaux. L’idéologie dominante de notre société affirme que
manger d'autres animaux est normal et même nécessaire. Il n’y a cependant pas de nom pour
cette idéologie. A cause de cela nous avons tendance à voir le fait de manger d’autres
animaux, non pas comme un choix, mais plutôt comme un fait acquis. Cette façon de
penser fait que la société voit la consommation d’animaux comme normale, naturelle et
légitime.

Les idéologies peuvent cacher les contradictions qui existent entre le comportement et les
valeurs des individus. Elles permettent aux gens de faire des exceptions à ce qu’ils
considèreraient habituellement comme éthique, sans même le réaliser. Voilà comment nous
pouvons comprendre le carnisme. Si l’on considère le carnisme comme une idéologie on
peut alors expliquer comment il est possible d’aimer certains animaux et d’en manger
d’autres. Nous avons été tellement conditionnés à croire que le carnisme était légitime et
nécessaire que la plupart des gens ne pensent même pas à leur viande comme ayant été un
jour un animal. En effet, la plupart des individus commencent à manger de la viande avant
même de savoir parler et le processus qui consiste à entretenir l’invisibilité des animaux
destinés à devenir de la nourriture continue pour le restant de leurs jours.

Durant mes recherches, j'ai découvert que certaines façons de penser soutenaient le
carnisme. En interviewant des carnistes (mangeurs de viande) et des ouvriers d'abattoirs
chargés de découper la viande j’ai appris que, pour manger ou découper les corps d’autres
animaux, les individus devaient pratiquer un certain degré "d’engourdissement psychique" -
qui sépare la pensée des sentiments, et les convictions des pratiques. Cet engourdissement
psychique s’exprimait à travers une variété de mécanismes de défenses. Parmi les plus
notables :

- Le déni : ("les animaux ne souffrent pas réellement quand ils sont élevés et tués pour la
viande")
- La justification : ("il est acceptable de manger certains animaux parce qu’ils sont élevés à
cette fin").
- L' évitement : ("ne me dis pas ça, tu va gâcher mon repas.")
- La dichotomie : ("je pense à certains animaux comme à des compagnons et à d’autres
comme à de la nourriture.")
- La dissociation : ("quand je regarde la viande, je ne fais pas le lien avec un animal - si je
le faisais, je serais dégoûté et incapable de la manger")

Si de tels mécanismes de défenses doivent être mis en place afin de manger de la viande on
peut légitimement se demander : pourquoi continuer à en manger ? Pourquoi ne pas
simplement devenir végétarien ? La réponse à cette question est complexe. Pour faire court
on peut dire que les carnistes restent carnistes à cause d'un certain nombre de facteurs, le
plus évident étant peut-être la peur. On peut trouver une liste exhaustive de ces facteurs
dans le merveilleux livre de Carol Adams, Living among meat eaters (2003). Les idéologies
tendant à se perpétuer, il n'est pas étonnant que le système carniste travaille dur pour
s’assurer la fidélité de ses membres, utilisant à cette fin l’outil efficace qu’est la peur.Par
exemple, on a fait croire à la plupart d'entre nous que si nous arrêtions de manger de la
viande nous ne serions pas en bonne santé, et serions perçus comme asociaux, faibles, moins
«virils», bizarres, entres autres stéréotypes. Ces notions sont véhiculées par les médias dans
lesquelles les végétariens sont souvent dépeints comme étranges ou radicaux. Elles sont
également diffusées à travers des campagnes et du marketing “pédagogiques” carnistes où la
viande est associée à la santé, à la force, à la convivialité et à la normalité.

Alors que la compréhension de l'engourdissement psychique peut nous aider à établir de


meilleures relations avec les carnistes, cela peut aussi nous aider à mieux apprécie notre
choix d'être végétariens. L'engourdissement psychique, lorsqu'il est utilisé pour permettre
des pratiques violentes telles que le carnisme est, sans aucun doute, psychologiquement
malsain. Malheureusement, le champ de la psychologie a généralement soutenu, plutôt que
questionné, le statu quo. Ainsi, l'utilisation de défenses psychologiques massives pour
permettre la participation à des pratiques violentes contraires à nos valeurs les plus
profondes n'est, en général, pas considérée comme discutable sur le plan psychique. Par
contre, ceux qui résistent à cette idéologie dominante (c-a-d les végétariens) ont tendance à
être soit ignorés, soit pathologisés – par exemple, un psychologue peut partir du principe
que le végétarisme d'une personne n'est qu'une façade servant à dissimuler un trouble du
comportement alimentaire.

Par conséquent, un des points les plus importants que les végétariens doivent garder à
l'esprit est que la santé mentale ne résulte pas d'une participation aveugle à ce qui nous à été
inculqué comme étant normal, (pensez au citoyen allemand pendant le régime nazi) mais en
se comportant selon ce que nous estimons être juste. La santé mentale ne peut venir qu’en
vivant en accord avec nos valeurs les plus profondes, telles que l’authenticité, l'intégrité,
l’empathie et la compassion pour tous les êtres. Quel meilleur modèle pour une planète où
régnerait la paix ? Quelle plus belle leçon à enseigner à nos enfants ?

Texte original : Carnism


http://veganity.wordpress.com/2008/02/25/carnism/

Traduit de l'américain par Natascha Verbrakel, avec la permission de l'auteur

Références

Adams, C.J. (2003). Living among meat eaters: The vegetarian’s survival handbook, New York:
Continuum

Joy, M. (2001). From carnivore to carnist: Liberating the language of meat. Satya, 8(2), 26-27

Joy, M. (2003). Psychic numbing and meat consumption: The psychology of carnism. Unpublished
doctoral dissertation, Saybrook Graduate School, San Francisco, CA

Lifton, R. J. (1986). The Nazi doctors: Medical killing and the psychology of genocide. New York:
Basic Books.

Rostler, S. (2001). Vegetarian diet may mask eating disorder in teens. Journal of Adolescent Health,
29, 406-416.

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Melanie Joy, Ph.D, Ed.M, est professeur de psychologie à l’Université du Massachusetts, à Boston.
Elle a étudié la psychologie du spécisme pendant un certain nombre d’années et a fait sa thèse de
doctorat sur la psychologie du carnisme. Elle est l'auteur de " Strategic Actions for Animals : A
Handbook on Strategic Movement Building, Organization, and Activism for Animal Liberation "
(Lantern Books, 2008) et de "Why we Love dogs, Eat Pigs and Wear Cows : An Introduction to
Carnism" (Conari Press, 2010)

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