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Notice parue dans le

Dictionnaire des littératures hispaniques. Espagne et Amérique latine, Jordi Bonells (dir.),
Paris, R. Laffont (col. Bouquins), 2009, p. 612-613.

GONZÁLEZ PRADA, Manuel. – Essayiste, pamphlétaire et poète péruvien, né à Lima le 5


janvier 1844, mort dans la même ville le 22 juillet 1918.
Refuge des sentiments intimes, matière des expérimentations esthétiques et arme de
combat, la poésie est chronologiquement le premier et le dernier mode d’expression de cet
intellectuel engagé. Ses adaptations de formes étrangères à la versification espagnole,
théorisées dans un traité de métrique, font de lui un précurseur du modernisme, qui insuffle
une vie nouvelle aux lettres péruviennes. Hormis Minúsculas (1901), Presbiterianas (1909) et
Exóticas (1911), le reste de sa production poétique est édité après sa mort : Trozos de vida
(1933); Baladas peruanas (1935); Grafitos (1937); Libertarias (1938); Baladas (1939);
Poemas desconocidos (1973); Letrillas (1975); Cantos del otro siglo (1979).
C’est par devoir moral, à plus de quarante ans, qu’il investit l’arène politique. A partir
de 1885, le poète s’efface devant le sociologue positiviste pour disséquer un pays humilié par
la défaite de la guerre du Pacifique (1879-1883). En une vingtaine d’années, évoluant du
libéralisme vers l’anarchisme à la faveur d’un long séjour en France et en Espagne (1891-
1898), il crée une œuvre critique intransigeante, significative d’une révolte croissante, d’abord
contre sa propre classe, l’aristocratie, puis contre toutes les injustices et oppressions. Le
prolétaire, tout particulièrement l’Indien, est au cœur d’une espérance régénératrice, qui
dépasse peu à peu le patriotisme initial pour acquérir une dimension universaliste.
Faisant de la connaissance l’instrument privilégié de l’émancipation et de l’élévation
morale, González Prada exhorte l’élite intellectuelle à transformer une société engluée dans la
mentalité coloniale. Il fonde en 1891 un parti fédéraliste et socialisant, l’Union nationale, qui
propose une alliance entre la classe moyenne et les couches populaires, mais refuse d’en être
le caudillo et embarque pour l’Europe, où il publie un livre réunissant les essais parfois
considérablement remaniés de cette période, Pájinas libres (1894).
A son retour, il tente en vain de radicaliser ce parti et le quitte définitivement en 1902.
L’anticléricalisme constitue alors la clef de voûte d’une entreprise systématique d’éreintement
des corporations, des institutions et de la politique même, couronnée par Horas de lucha
(1908). Ce second recueil se distingue du précédent par le caractère satirique de la majorité
des textes, dont plus aucun n’est consacré à la littérature. Cependant, il ne reflète
qu’imparfaitement la pensée de l’auteur qui, de 1904 à 1909, dans l’anonymat, s’adresse à la
classe ouvrière dans le mensuel anarchiste Los Parias (Lima). Ses articles ont été rassemblés
dans trois ouvrages posthumes, Anarquía (1936), Propaganda y ataque (1939) et Prosa
menuda (1941).
Devant le détournement du système représentatif et la résistance du capitalisme
soutenu par l’Etat, González Prada juge légitime la violence révolutionnaire et fait l’apologie
du tyrannicide. Son anarchisme, très proche du communisme libertaire malgré des traits
individualistes, apparaît comme le dépassement du christianisme et du libéralisme. Malgré ses
idées radicales, il est sollicité en 1912 pour diriger la Bibliothèque nationale du Pérou et il
accepte ce poste. Il est vrai qu’à partir de 1909, il abandonne la polémique pour se consacrer à
son œuvre poétique. Toutefois, il s’insurge encore avec force contre le coup d’Etat militaire de
1914 (Bajo el oprobio, 1933).
Trois autres livres doivent être mentionnés : Nuevas páginas libres (1937) et El tonel
de Diógenes. Seguido de Fragmentaria y Memoranda (1945) rassemblent des articles, essais
et fragments non inclus dans d’autres ouvrages, tandis que Figuras y figurones (1938), réunit
les portraits de quatre dirigeants politiques péruviens.
Homme intègre, et plus réaliste qu’on ne l’a dit, González Prada traite au fer rouge les
plaies du Pérou, c’est pourquoi il demeure une référence politique essentielle jusque dans les
années trente. Ce n’est pas le moindre de ses mérites que d’avoir lancé l’indigénisme en
réfutant le darwinisme social alors en vogue.

Bibliographie :
Manuel González Prada, Obras, pról. y notas de Luis Alberto Sánchez, 7 vol. , Lima, Ed.
Copé-Petroperú, 1985-1989.
Hugo García Salvatecci, Visión de un apóstol, Lima, Emisa, 1990.
ThomasWard, La anarquía inmanentista de Manuel González Prada, New York, Peter Lang,
1998.

Joël Delhom
Université de Bretagne-Sud, Lorient

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