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DELIT

FANTASME
PULSION:
L'EXPERT
DANS
L'ESPACE
PARANOIAQUE
Rouault: «La Cour», 1908.

U. Kobbe
Westfälisches Zentrum für Forensische Psychiatrie Lippstadt Postfach 6100, D-59541

L
e Code Penal allemand* fait, dans ses para- compte par le tribunal dans le jugement et dans ses
graphes 20 et 21, une difference entre les attendus. Cette disculpation qui, dans la majorite
criminels qui, lors de la commission de des cas, s'exprime d'une maniere defensive, prend
l'acte sont, en raison d'un trouble psychopatholo- une grande importance du fait que, suite ä ces
gique, d'un trouble profond de la conscience, ombres au tableau, les malades — et plus particu-
d'une faiblesse d'esprit ou de tout autre affaiblis- lierement ceux ayant des troubles de la personnali-
sement intellectuel, incapables d'en appr6cier le te — sont condamnes ä etre internes dans les
caractere illicite (§ 20) et ceux qui en sont ca- institutions de psychiatrie legale du «Maßregel-
pables. II prevoit aussi une categorie supplemen- vollzug»' alors que dans un autre «Land» ou avec
taire (§ 21): celle des criminels dont la capacite de un autre expert, ils auraient ete internes en prison.
comprendre le caractere illicite de l'acte ou d'agir Dans un autre article, en ce qui concerne les inter-
selon leur discernement est, lors de la commission actions entre l'avis de l'expert, le jugement pro-
de l'acte, diminuee de fafon importante. Les nonce par le tribunal et la dynamique institution-
causes sont mentionnees dans l'article 20. nelle, nous avons dejä souligne (Kobbe, 1994b)
Cette particularite du Code Penal allemand revet que les delinquants, et plus particulierement les
encore plus d'importance du fait que l'expert n'est delinquants sexuels presentant des perversions
pas oblige de porter un jugement definitif sur violentes ou des psychopathies soi-disant «non
l'existence de l'une des conditions enoncees ci- traitables» soulevent des questions fondamentales
dessus. II peut egalement se limiter ä constater que du fait que :
l'existence de conditions prealables, telles une di-
minution importante de la responsabilite ou une ir-
* Traduction franfaise M. Delmotte relue et corrigee par B. Gravier.
responsabilite, ne peut etre exclue. Cet avis est — (1) Note du trad. : en Allemagne, instilulions panicuUeres avec des me-
in dubio pro reo — la plupart du temps pris en sures de soins et de securite propres.

NERVURE Tome VIII. n°7 - Octobre 1995


- l'expertise stigmatisante et mystificatrice du psy- sexuel ou plutöt le viol de ce malade ä Tage de 11
chiatre älteste des le debut que la personnalite en ou 12 ans par des enfants plus äges du foyer fait
tant que teile est malade et en meme temps non certainement partie de ses experiences les plus
guerissable ; marquantes. Cette experience a du contribuer ä son
- l'institution mobilise — au-delä des resistances orientation homosexuelle et la fixer, tout comme
psychologiques du sujet — des resistances structu- eile a, aussi, conduit ä des attentes et Schemas
relles ä tout progres ou succes d'une psychothera- comportementaux tels que la satisfaction de ses
pie de ces individus ; besoins de proximite, de tendresse, d'attention et
- les conditions sont dominees et contaminees par d'amour ne peut etre obtenue qu'au moyen de sä
des options d'efficience et de defense sociale ce propre Prostitution. Ce malade est donc emprison-
qui entrame une reduction de la complexite et une ne dans une dialectique ambivalente de type domi-
orientation vers des strategies d'Intervention tech- nance-soumission, une thematique qui est elle-
nico-sociale ; (Kobbe, 1994c, 222-223) meme assujettie ä des angoisses de perte et aux
- la tentation precipitee de cibler exclusivement sur themes honte-culpabilite.
le Symptome delinquant mene ä une confrontation Dans le cas present, un expert renomme a pos6 le
(auto)-punitive du sujet ä ses perversites et actes diagnostic de trouble de la maturation psycho-
destructeurs, mutilants et torturants. sexuelle chez ce malade atteint de troubles narcis-
Notre propos est d'aborder le probleme de l'exper- siques manifestes avec un developpement paranoi-
tise des delinquants sexuels ayant des troubles pul- de latent. C'est pourquoi il a conseille une therapie
sionnels en correlation avec une dynamique para- ambulatoire en se basant en particulier sur l'opi-
noide, car ces derniers posent manifestement un nion que les institutions du «Maßregelvoüzug» ne
probleme de plus en plus frequent. Dans ce contex- pourraient que contribuer ä rendre l'etat du malade
te, Fintroduction des categories diagnostiques F chronique. La repetition quasiment «ineluctable»
60.30 (troubles de la personnalite avec instabilite du Symptome de delinquance sexuelle lors de Fat-
emotionnelle et de type impulsif), F 63.8 ainsi que tente d'une possibilite de traitement ambulatoire
F 63.9 (troubles des impulsions) dans 1'ICD- \02, adequate a donc — en toute logique juridique —
tout comme l'introduction de la categorie 312.34 cependant conduit ä un internement.
(trouble explosif intermittent) dans le DSM-III R Compte tenu des explications ä la fois contradic-
sont symptomatiques. toires et mystifiantes postulant:
A titre d'introduction ä la problematique de l'ex- - pour un etat de non dangerosite, d'une part, et
pertise, nous nous proposons, en premier lieu, de d'autre part, pour un internement necessaire
faire une evaluation des possibilites et des limites comme mesure de securite,
des psychotherapies telles qu'elles apparaissent - pour un retard de la maturation, d'une part, et
dans les expertises. d'autre part, pour une indication therapeutique,
la Situation de depart induite par l'expertise se re-
vele donc problematique, en raison de la decision
prealable et des prejuges. Ceci vaut precisement
lre sequence clinique dans le cas des delinquants sexuels presentant une
dynamique paranoide ou destructive.
De plus, l'institution elle-meme contribue large-
II s'agit d'un jeune homme de 24 ans interne en ment ä cette Situation et en rajoute meme «Oü vais-
raison d'agressions sexuelles et de tentatives je pouvoir nie «debarrasser» de mes malades diffi-
d'agression repetees, perpetrees entre 14 et 16 ans. ciles et non desires ? » : tel est le titre du reve du
Dans sä biographie, on note que ce malade fut se- psychiatre, du moins en Allemagne.
pare de sä mere ä l'äge de quelques semaines et La question qui se pose est donc la suivante : «Oü
qu'il grandit, par la suite, dans une creche. II fut va-t-on pouvoir continuer ä rejeter les malades
ensuite interne dans un foyer d'enfants, puis dans difficiles, derangeants et agressifs ?» L'incessante
un foyer de jeunes et, plus tard, dans un foyer d'ap- ritournelle de ce modele structurel correspond au
prentis. Ces divers internements en foyer sont ca- deplacement dialectique sujet-objet et entrame du-
racterises par des changements frequents du per- rablement chez ces malades une dynamique para-
sonnel soignant servant de figures parentales ; noide reactionnelle ayant pour consequence une
c'est-ä-dire une infidelite reelle du personnel soi- mise en scene repetitive sous forme «d'acting-
gnant qui, si l'on se rapporte au descriptif meme de outs» pendant l'internement et des tentatives d'In-
sä täche, se doit d'etre «fidele». En outre, Tabus tervention therapeutique n'ayant absolument

142
Rouauh : «Trois juges», 1913.

aucun resultat. A ce niveau, il semble que la pre- des agissements de nature impulsive et arbitraire
sentence negative de l'expert se confirme. A cet de la part du malade,
expert, on devrait d'autre part poser la question entraina un cercle vicieux d'hospitalisme allant de
dans quelle mesure il a contribue ä cette Situation. l'intervention therapeutique utile ä l'aggravation
De ces stereotypes d'attentes et de reactions ä la du trouble puis ä l'intensification de la therapie
fois contradictoires et inadequates, resultent des jusqu'ä la pharmacotherapie.
relations figees de haut en bas, c'est-ä-dire des re- La dynamique formee par l'angoisse de destruc-
lations non dialectiques de type «Maitre-Esclave». tion et par l'insecurite existentielle, par la punition
Face ä un tel tableau, la seule solution ne peut resi- et la vengeance, par la honte et la culpabilite, a, par
der que dans l'emploi de la force afin de pouvoir moments, mobilise d'intenses sentiments de pro-
faire face ä cette angoisse (Kobbe, 1995b). tection envers le therapeute et a active des fan-
tasmes paranoides : le malade se prit pour le
double de lui-meme tout comme celui de son the-
rapeute et pour fmir, pour celui d'autres personnes
2e sequence clinique impliquees. II finit par servir de miroir aux autres
— un miroir qui renvoyait cependant une image
Dans le cas du malade decrit plus haut, comme quasi inexistante ou irreelle — reagissant, de son
Ton peut s'en douter, ceci eut pour consequence cöte, comme par reflexe vis-ä-vis de ces images ir-
l'aggravation et la repetition des voies de fait entre reelles. L'institution, de son cöte, hesitait ä trans-
les infirmiers et lui lorsque ceux-ci, en tant que re- ferer le malade du Service d'admission dans un
presentants de l'ordre et exercant leur pouvoir, in- Service de soins, ce qui induisait chez le malade la
tervenaient dans la vie communautaire quotidien- supposition qu'il devait etre uniquement garde
ne du Service. mais en aucun cas soigne.
La profonde disparite entre : Le fosse qui se creuse ici de fa9on frappante — et
- d'une part, la perception subjective d'une mena- qui, du reste, ne pourra jamais etre completement
ce vitale ä travers la personne d'un infirmier et - comble —, ce fosse entre le principe de plaisir sou-
en reaction — une attaque de nature defensive de mis ä l'anarchie et celui de la realite regle par les
la part du malade, lois sociales, est penju sur le terrain de la psychia-
- d'autre part, l'impression subjective d'un poten- trie legale comme etant une menace du discours
tiel dangereux latent ressenti par les infirmiers et aussi bien i n s t i t u t i o n n e l que t h e r a p e u t i q u e
(Kobbe, 1992b, 44). Cela veut dire que les dis- pellante sans que le therapeute n'ait pu avoir l'oc-
cours juridique, psychiatrique et psychotherapeu- casion d'y faire allusion et encore moins de clari-
tique sont ici en etroite relation avec le principe fier la Situation. Au moment meme oü le therapeu-
d'une norme et meme definis par lui. Dans cette te prend conscience de ce trouble, le malade
norme, le Symptome se trouve reduit ä un signe, ä appuie — ä sä grande surprise — sur la sonnette
une marque distinctive servant ä definir l'alterite d'alarme qui se trouve sur le bureau. L'infirmier
du sujet delinquant ou dangereux que l'on doit re- qui se presente aussitöt ä la porte est rassure, puis
duire ou maintenir dans un cadre defini. (Lefort, renvoye par le therapeute. Au moment oü le thera-
1976, 237). peute veut de nouveau se consacrer au malade afm
Ce sont precisement les malades souffrant de de discuter avec lui de cet incident, le malade se
graves troubles qui induisent de tels mecanismes met soudain ä le fixer ou plutöt le «transperce» du
de defense de nature institutionnelle et individuel- regard tout en arrachant du mur — d'un seul coup
le. Ceci entraine du cöte de l'institution et meme — le cäble de la sonnette ; pratiquement en meme
du cöte des therapeutes engages les appreciations temps, il saute les «pieds en avant» sur son thera-
suivantes : les malades sont «imprevisibles», peute et rimmobilise en lui nouant ses jambes au-
«dangereux», «intraitables», «mechants», etc... tour des hanches, dans un mouvement ressemblant
celles-ci servent de base ä la justification de ä celui d'une paire de ciseaux. Apres que le thera-
l'agressivite chronique propre ä l'institution peute se soit libere ä l'aide d'un collegue accouru
((Kobbe, 1992a, b). La dialectique existant entre la ä la rescousse et que le malade ait pu egalement se
projection agressive et le fantasme de la menace detacher de cette petrification tonique et se de-
risque d'etre en permanence perfue par l'institu- nouer de cette etreinte corporelle, il se dessine
tion comme le detonateur d'une explosion possible dans la discussion qui s'en suit, le tableau suivant:
ä tout moment. A son tour, cette menace provoque La reconstitution de l'incident montre que le mala-
la mise en marche d ' u n mecanisme permanent de a eu le sentiment:
d'agressions et de contre-agressions qui doit etre - que le therapeute s'eloignait de lui,
compris comme un exemple psychodynamique - que, d'une certaine fa9on, il le perdait; c'est alors
illustrant ce phenomene de balance penchant soit qu'il ressentit soudain l'impulsion de lui sauter
vers la relation de maitre, soit vers la relation d'es- dessus et de se cramponner ä lui.
clave (Hoppe, 1986). II ne fut pas vraiment possible de tirer au clair
Dans le cadre de la pratique institutionnalisee du comment cette impression de distance, d'eloigne-
«Maßregelvollzug », on se trouve donc face ä une ment ou de detournement d'attention est nee : on
relation d'interdependance humaine qui ne peut repasse le film de la vie de ce malade marquee par
etre dissoute. Celle-ci conduit ä un cercle vicieux des experiences de perte et de Separation vecues en
oü s'enchament des actions reliant «l'auteur ä la etroite correlation avec des sentiments de peur,
victime» ce qui induit beaucoup de confusion chez voire de menace. II s'ensuit que la «maree mon-
les therapeutes avec pour corollaire des irritations tante» des sentiments de peur survenant lors d'une
emotionnelles et intellectuelles (Lazarus, 1983, perte ainsi que les pulsions agressives et sexuelles
21). Le therapeute sent une colere monter en lui, que cette peur reactive de facon quasi contra-pho-
resultant de cette Situation de «double-bind», mais bique, ne peuvent plus etre — de fafon süffisante
qui est niee de facon soit autoritaire, soit honteuse. — inhibees, contrölees ou dirigees sur une autre
Les malades ne peuvent pour leur part, reagir que cible. On doit, en outre, se demander si le thera-
d'une facon defensive ce qui perennise le cercle peute n'etait pas trop proche du malade, de son
vicieux decrit ci-dessus. vecu emotionnel et si la dynamique homosexuelle
Les incidences de ce processus sur la therapie sont avec, en toile de fond, son contenu d'angoisses et
illustrees ä l'aide de la sequence therapeutique sui- d'agressions ne fut pas reactivee par le desir du
vante : therapeute et la peur de son omnipresence. Cet
«acting-out» proviendrait-il de l'autre pole consti-
tue par la problematique «proximite-distance», le
malade a-t-il seulement deplace ceci sous la forme
3e sequence clinique d'une comprehension qui lui est plus accessible
parce que la dynamique «proximite-distance» en
Au cours de la therapie, entre la 90' et la 95e sean- tant que dynamique de la honte et de la culpabilite,
ce environ, le malade semblait quelque peu trou- doit etre repoussee ?
ble, adoptant une attitude ä la fois distante et inter- La dynamique specifique inherente ä l'institution
pose, en elle-meme, de nombreux problemes au maternelle qui a ete inevitablement ressentie
therapeute de formation psychanalytique en ce comme insuffisante, soit de la part de la mere veri-
sens qu'il doit tendre ä se presenter comme «l'avo- table, soit des meres de Substitution, a certaine-
cat du sujet» en essayant de garder une attitude ment provoque chez ce malade un exces de haine
neutre et qui est, de ce fait, enclin ä prendre egale- orale. Ces pulsions agressives precoces auraient
ment parti «contre» la societe (Schorsch, 1992). cependant eu besoin d'une mere pouvant remplir
Un tel incident est source d'irritations supplemen- la fonction de contenant en faisant face aux ele-
taires du cöte du therapeute. Car desormais, il a — ments agressifs de la projection, du clivage et de
dans le sens le plus absolu du terme — une täche Fintegration. Au lieu de cela, Fangoisse pre-objec-
impossible ä remplir du fait qu'au-delä de toutes tale et l'agression furent projetees lors du stade de
ideologies de traitement explicites, existe l'attente la perception d'objets partiels sur ceux-ci pour etre
implicite d'une nouvelle imposition de regles. Ces plus tard, de fafon analogue, deplaces sur les ob-
conditions representent des situations therapeu- jets entiers comme structure de perception polaire.
tiques aptes ä seduire le therapeute et precisement D'autre part, ces introjects restent des fragments
dans le cadre ferme et limitant d'un «setting» qui de nature destabilisante et qui ne sont pas integres
considere le malade du point de vue de ses capaci- dans le Soi ; cependant, ils servent ä boucher les
tes de changement. Celles-ci sont propres ä inten- trous dans le Soi oü ils produisent une inquietude
sifier la tentation agressive du therapeute (Hin- latente permanente qui doit etre frequemment pro-
richs, 1988) en tant qu'element faisant partie jetee sur des objets exterieurs sous forme d'impul-
integrante d'un Systeme potentiellement «manipu- sions agressives. Au niveau des sentiments. Fin-
lateur». Ceci induit l'inclusion de la coercition et trojection de ces mauvaises images maternelles
de la violence dans la psychotherapie meine provoque la Sensation d'etre poursuivi, d'etre en-
(Kobbe, 1992c, 146-147). cercle ce qui explique la disposition paranoide de
Comme on l'observe dans ce cas clinique, nous ces malades. Certes, les images maternelles aident
avons ä faire ä des irruptions pulsionnelles ou ä des ä atteindre un certain niveau de stabil ite sociale et
perte de contröle de natures extremement diffe- elles protegent les introjects des sentiments de vide
rentes et en tous cas ä des fantasmes intrapsy- et d'abandon ; certes, elles tiennent les pulsions
chiques precoces, ontogenetiques, ainsi qu'ä des agressives en echec et permettent temporairement
formes agressives visant ä la mattrise des senti- un contröle pulsionnel mais, cependant, ces ma-
ments de frustration et de peur. Les fantasmes me- lades essaient toujours de se debarrasser de leurs
nacants de ces malades et la dynamique d'agres- mauvaises images afin de pouvoir vivre sans ces
sion et de frustration activee par la Situation introjects. Comme cette liberation ne peut pas
therapeutique ou encore la desintrication incom- avoir lieu sous forme d'une prise de distance Inte-
plete des pulsions entre sexualite et agression sont rieure puisque les introjects fönt partie integrante
certes des determinants essentiels du cöte du Syste- du Soi — meme s'ils ne sont pas integres —, les
me des pulsions et des impulsions; pourtant, cela tentatives de liberation ont le caractere d'une ex-
n'explique pas pourquoi le Systeme de contröle pulsion violente ; il s'ensuit des conflits situation-
fonctionne de fa$on si insuffisante dans de telles nels charges d'agressivite avec les objets de l'en-
situations ou en general. vironnement (Schorsch et Becker, 1977).
Visiblement, ceci a semble precisement poser pro-
bleme ä l'expert hautement experimente.
II a, sans aucun doute, evalue correctement la dy-
namique institutionnelle et ses bases structurelles Perspectives
avec leur caractere d'artefact antitherapeutique
(Kobbe, 1992a, 150). D'un autre cöte, cette eva- Ainsi, les delits sexuels criminels pourraient etre
luation l'a entraine ä prendre une position de dis- compris comme representant l'effondrement des
culpation comme etant soi-disant une position plus mecanismes de defense contre ces desirs de fusion
charitable. Mais ainsi, il n'a plus du tout effectue qui sont aussi bien de nature erotique et nostal-
de psychodiagnostic adequat dans le sens d'une gique que de nature d'incorporation agressive.
comprehension d'Inspiration psychodynamique de Manifestement, ceci n'a pu etre suffisamment
la Symptomatologie agressive et sexuelle si bien per9u et compris dans le cadre de l'expertise si
qu'il finit par nier tout particulierement le röle des bien que cette composante qui revet une grande
experiences traumatiques de ce malade lors de la importance du point de vue pronostic, n'a pu etre
phase d'individuation et de Separation. L'empathie prise en compte. Nous insistons sur ce point, car

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les experts prennent frequemment, en apparence, tives : l'accentuation du potentiel d'actions aussi
des positions partiales qui, malgre un diagnostic bien impulsives que dystones du Moi chez des per-
differentiel exact, les conduisent a de fausses sonnes qui, par ailleurs, n'ont pas un comportement
conclusions (Kobbe, 1994a). perturbe, ainsi que 1'accroissement des tendances
D'autre part, cette comprehension semble essen- paranoi'des au niveau des reactions et de la maitrise
tielle : des conflits soulevent la question des conditions so-
- car les sequences aussi bien de nature agressive et ciales. A ce sujet, Ziehe (1975) a esquisse un nou-
sexuelle que «paranoide» semblent de plus en plus veau type de socialisation concernant les structures
frequentes, narcissiques dont il justifie l'emergence par le vide
- car cette reconstruction revet, dans le cadre de laisse par la generation parentale en mauere
l'expertise, une importance particuliere au niveau d'orientations. Ce vide est certes partiellement com-
du pronostic. ble par de nouvelles fixations pulsionnelles ä une
La question de l'evolution de la maladie a ete peu societe orientee vers les biens de consommation ; il
discutee, mais celle-ci prend, ä notre avis, une im- est aussi lie ä une desorientation des parents de na-
portance croissante : les delits qui, au niveau juri- ture cognitive et affective. Cette desorientation en-
dique, sont definis soit comme des delits passion- gendree par la societe actuelle se manifeste specia-
nels, soit comme des delits sexuels, presentent — si lement au niveau de la fixation symbiotique
on les compare au niveau structurel et psychodyna- mere-enfant. par des troubles narcissiques et infan-
mique (Duncker 1988) — de considerables analo- tiles dans l'education. Trescher et Finger-Trescher
gies dans ce sens oü l'evolution de la maladie — en (1993) en faisant allusion ä l'erosion des projets de
tant que phenomene pathologique et psychodyna- vie commune, specifiques ä chaque couche sociale
mique commun — est ä la base de ces deux delits dans un contexte general denotant une tendance ä la
(Schorsch, 1988). Ceci permet de juger, de fa?on disparition des barrieres entre les generations ont re-
appropriee, les irruptions pulsionnelles ä travers le cemment emis l'opinion que ces phenomenes sont
Symptome principal de l'evolution de la maladie, et en etroite relation avec une augmentation massive
ceci, malgre l'absence du critere de «trouble pro- de l'agression et de la destruction chez les jeunes.
fondde la conscience». Ce Symptome est en effet un L'individualisation des manieres de vivre suppose
phenomene psychopathologique qui caracterise le precisement une structure du sujet:
degre de gravite et dont le caractere peut revetir une - pour regier les relations interpersonnelles et la
certaine objectivite pour apprecier l'evolution de la vie quotidienne, et ceci de fafon personnelle, auto-
maladie. nome et auto-responsable associee ä des capacites
Cependant, de ce fait, Fexpert est egalement plus d'adaptation contractuelles,
ou moins oblige de reconnaitre l'objectivite scien- - pour non seulement pouvoir faire face aux
tifique et la neutralite professionnelle comme fic- blessures et aux refus survenant au cours de la
Rouault: «Le Tribunal», 1909.
vie q u o t i d i e n n e mais aussi pour prendre ac- du s'est intriquee dans la parano'ia de l'Institution.
tivement pari ä leur maitrise et ä leur changement. Cependant, il est important de debattre sur les mul-
Ces deux auteurs constatent egalement que, dans le tiples questions concernant l'expertise :
cadre des conditions sociales actuelles, on trouve Est-ce que l'expert a le droit de prendre explicite-
de moins en moins de constellations conflictuelles ment parti pour ou contre des mesures penales de-
de nature oedipiennes mais plutöt des structures de terminees d'essence etatique et ä partir de cela, le
personnalite avec des deficits structurels, comme cas echeant, d'en deduire une indication soit d'in-
ils sont presentes ci-dessus dans le modele analy- ternement, soit de traitement ? Ou est-il tenu de
tique du nouveau type de socialisation. Ils exposent nier — en apparence — les questions concernant
qu'une structure exterieure süre procure un senti- la morale sexuelle, F Ideologie du traitement et la
ment de clarte et de securite. Cependant, la dispari- reaction etatique ? Si bien qu'il serait ainsi permis
tion successive de cette structure exterieure menace de prendre une position soi-disant neutre ä la fa-
justement ces personnes generalement jeunes dont veur de declarations objectives basees sur un curri-
les systemes de regulation internes sont instables ä culum «ä mots couverts»?
cause de conditions de vie et de socialisation trau- Quelle est l'influence exercee par le pouvoir medi-
matisantes, insuffisantes et mauvaises. cal face ä la competence professionnelle des psy-
D'un cöte, les limites internes et la stabilite ont be- chologues ? La definition de cette question d'ori-
soin de structures exterieures et d'un soutien exte- gine historique, en Allemagne, est vraisem-
rieur ; d'un autre cöte, cependant, les obligations blablement betonnee au niveau politique pour
dans le domaine socioculturel se restreignent de longtemps. En d'autres termes, dans quelle mesure
plus en plus. Si l'on retire de plus en plus ä la les fonctionnaires politiques et medicaux ne fi-
norme sociale le röle de contröle et de sanction, de gent-ils pas au moyen d'un discours scientifique
la maniere de vivre, du sens de la vie, du projet de un pouvoir qui serait perturbe dans son efficience
vie commune, de l'Organisation de la vie quoti- socio-technologique par l'integration — sur un
dienne, de la sexualite et de la morale, il en resulte pied d'egalite — d'experts de formation psycholo-
alors la disparition des regles explicites d'obliga- gique ?
tions collectives, regles qui figent les formes de vie Un autre versant de ce debat:
commune. Ceci a egalement des repercussions Quelle influence aurait la comprehension empi-
chez les malades : de la menace constante et laten- rique et methodique des experts de formation psy-
te de perte du Soi nait l'angoisse et la destruction ; chologique sur la pratique de l'expertise ? Est-ce
cette derniere remonte ä un stade precoce de la bio- que cela ne signifierait pas precisement la mise ä
graphie en tant que produit de la desintegration du mort des techniques projectives ? Ceci aurait pour
developpement du Soi, un developpement ä la fois consequence que les modeles cliniques psychana-
rate et condamne. lytiques seraient egalement, par la suite, mis en
Dans cet ordre d'idees, nous rencontrons de plus disponibilite. Cela ne devrait-il pas, ä son tour,
en plus souvent des troubles du contröle pulsionnel exercer une influence sur la psychodynamique du
en tant que Symptome general revelateur de la fai- proces penal ? (Goldschmidt, 1984 ; BeckerTous-
blesse du Moi et, par voie de consequence, une saint, 1984).
augmentation des actes impulsifs de nature agres- Quelle relation existe-t-il entre l'expert et l'institu-
sive et sexuelle qui posterieurement, apparaissent tion de psychiatrie legale ? A-t-on besoin —
difficilement explicables ä la personne concernee. comme cela est reclame par certains «insiders» —
De ce fait lä, c'est non seulement la question de d'une interdependance plus etroite, voire eventuel-
l'instance de socialisation qu'est le «Maßregel- lement d'une union personnelle entre l'expert et le
vollzug» mais encore celle de Fexpert qui se po- therapeute afin de pouvoir proceder ä des juge-
sent sous un jour totalement nouveau. ments, des pronostics el des indications sur une
Si l'on se rapporte au cas clinique ci-dessus, il de- base relevant du professionnalisme ? Ou est-ce que
vient ulterieurement impossible de savoir : l'Institution repressive ne se procure pas eventuel-
- si la therapie ambulatoire recommandee — ä lement elle-meme sä clientele si bien qu'elle se
I'origine — par l'expert etait indiquee, ou si Fin- preoccupe de sä propre survie, d'une part, et
ternement ayant eu Heu, en definitive en milieu qu'elle tient ä l'ecart les malades non desires au
stationnaire etait indique. moyen de declarations appropriees concernant la
On ne peut pas plus determiner si, lors des inci- question de «l'etat de diminution importante de la
dents survenus avec le malade, on eu ä faire ä des responsabilite», d'autre part ?
artefacts au cours desquels la parano'ia de l'indivi- Dans quelle mesure Finstitution du «Maßregel-
Vollzug» ne devient-elle pas, au-delä de la defense
sociale, une institution de reeducation avec des Bibliographie
mesures de privation de liberte qui enrichit les ins- 1l) BECKER-TOUSSAINT H. 1984 : Der Angeklagte vor seinem Gutachter. Zur-
titutions d'assistance sociale educative d'une Va- Psychod\namik und rechtlichen Problematik psychiatrischer und psychoanalyti-
xher Gutachten in der Hauptverhandlung. In: Menne. K. (cd.) op. cit., pp. 41-54.
riante psychosociale (Kobbe, 1994c, 423) en (2) DUNCKER H. 1986 : Pornographie und Sucht. Zwei Wege in der Verelendung
menschlicher Befriedigungsmoglichketlen. In : Fragmente n" 22 (1986) pp. 203-220.
amont de la prison, comme le montre le cas cli- (l)GOLDSrHMIDTO. 1984 : Der Stellenwert des psychoanalylischen Gutachtens
innerhalb der Psvchodynümik des Strafprozesses. In : Menne. K (ed.)op. cit., pp. 23-
nique ? Est-ce que les experts et le personnel de 39.
cette institution clinique peuvent et «sont autori- (4) HINR1CHS R. 1988 : Indirekte Farmen lalmgener Gewalt in der klinischen Psy-
chiatrie. In . Psychiatrische Praxis, vol. 15 (1988) n° 5, pp. 165-170.
ses» ä emettre leur opinion sur cette täche «impos- (5) HOPPE K.D. 1986 : Die Herrscher-Sklaven-Wippe : Eine besondere Form der
Aggression. In : Pohlmeier, H.
et al. (ed.) Forensische Psy-
chiatrie heute. Ulrich Venzlaff
zum 65 Geburstag. Springer.
BerlitWHcidelbcrg/New York
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zug : Diskursive Bemühungen
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einer Klinischen Psychothera-
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Westfalen-Lippe, M u n s t e r
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Patienten oder Wie.frau eine
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den B e r g h , W.M. (ed.) Im
Zentrum : MaBregelvollzug.
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sichen Psychiatrie. Festschrift
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chiatrie Lippstadt (1992) pp.
41-73.
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chotherapie im Maßregelvoll-
zug. In : Schumann, V.; Dim-
mek, B. (ed.) «Die wurde des
Rouault: «En pleine envolee», 1908. Menschen ist unantastbar».
Ethische Fragen im Maßregelvollzug. Werkstattschriften zur Forensichen Psychia-
sible» et, le cas echeant, ä en discuter egalement trie, n" 3 (1992) pp. 141-173.
dans un cadre politique ? (9) KOBBE U. 1994a : Zur Biologik der Delinquenz - Kasuistik eines gutachterli-
chen Monologs. In : Recht & Psychiatrie, vol. 12 (1994) n° l, pp. 22-25.
Comme cela se laisse facilement demontrer, les (10) KOBBE U. I994b : L'expert du pervers & la perversion therapeutique. Texte
d'une communication non publiee. Journees d'etudes europeennes «Responsabilite,
conditions prealables aussi bien legales qu'institu- droits et protection dans le champ de la sante mentale en Europe». CEDEP, Madrid,
7-9.10.1994.
tionnelles et sociales ont, selon les circonstances, (i 1) KOBBE U. 1994c : L'agoniedu progres dans lapsychiatrie judiciaire, Resume
une influence plus importante sur l'expertise psy- de la Situation allemande. In : Revue internationale de criminologie et de police
technique, vol. XLVII (1994) n° 4, pp. 419-427.
chiatrique legale qu'on avait jusqu'alors supposee. (12) KOBBE U. 1995a : Im Pulse der Angst und Aggression : Wenn die Impulskon-
trolle versagt. Texte d'une communication non publie. Westf. Klinik für Psychiatrie
Dans ce sens, on est en droit de se demander si und Neurologie Lengerich, 3.02.1995.
(13) KOBBE U. 1995b : Die vertikale Richtung der narzißtischen Apokalypse. Psy-
l'expert peut et a le droit de «se payer le luxe» de choanalytisch-phüosophischer Essay zur Sozialpsychologie des Verbrechens. In :
vouloir ignorer ces conditions determinantes, dans Forensische Psychiatrie und Psychotherapie WsFPP, vol. 2 (1995) n° I (sous presse)
(14) LAZARUS A. 1983 : Prison et psychialrie. In : CCI Centre de Creation Indus-
le sens d'un purisme scientifique. En particulier, trielle (ed.) Folie et environnement. Paris ( 1983) pp. 21-22.
(IS)LEFORTR. 1976: Questions politiques. In : Mannoni, M. (ad.) Un lieu pour
c'est dans le domaine des delits sexuels qui ne vivre. Les enfants de Bonneuil, leurs parents et l'equipe des «soignants». Seuil, Paris
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franchissent pas le seuil de l'emploi direct de la (16) MENNE K. (eU) 1984 : Psychoanalyse und Justiz. Zur Begutachtung und Re-
force que s'ouvre — du reste — un champ nou- habilitation von Straftatern. Nomos, Baden-Baden 1984.
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pp. 10-19.
exemple ä la morale sexuelle rigide — ou bien au (18) SCHORSCH E. 1988b : Affekttaten und sexuelle Perversionstaten im struktu-
contraire inexistante — et aux pratiques sadoma- rellen und psychodynamischen Vergleich. In : Pfafflin, P.; Appell, H.; Krausz, M.,
Mohr M. (ed.): Der Mensch in der Psychiatrie. Für Jan Gross. Springer, Berlin/Hei-
sochistes dans les medias. La desorientation et le delberg/New York ( 1988) pp. 344358.
(19) SCHORSCH E. 1992 : Psychoanalyse und Justiz. In : Zeitschrift für Sexualfor-
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(20) SCHORSCH E. Becker. N. 1977 : Angst, Lust. Zerstörung. Sadismus als so-
plus en plus l'individualisme impliquent de nou- ziales und Kriminelles Handeln. Zur Psychodynamik Sexueller Tötungen. Rowohlt,
veau troubles de nature pre-oedipienne qui ont des Reinbek 1977.
(21) TRESCHER H.-G. ; FInger-Trescher, U. 1993: Sating und Holding-Function !
consequences aussi bien sur l'expertise que sur la Über den Zusammenhang von äußerer Struktur und innerer Strukturbildung. In :
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(22) ZIEHE Th. 1975 : Pubertät und Narzißmus. Sind Jugendliche entpolitisiert ?
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