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S E X O A N A LY S E

CRÉPAULT C. (2004) Rev. Europ. Sexol ; Sexologies ; (XIII), 48 : 12-19

Nouvelles hypothèses
en sexoanalyse
C. CRÉPAULT Le professeur Claude Crépault est cofondateur du Département de Sexologie de l’Uni-
versité du Québec à Montréal (UQAM). Il y enseigne depuis 1969. Ses travaux de recherche
sont centrés sur l’imaginaire sexuel, sur les liens entre les fantasmes, les rêves et la réalité.
Il a développé un nouveau chapitre de la sexologie, à savoir la sexoanalyse qui a comme
RÉSUMÉ : Après avoir présenté les hypothèses objet d’étude l’inconscient sexuel et qui est aussi une approche sexothérapeutique. Il a
sexoanalytiques centrales concernant le formé plusieurs dizaines de sexoanalystes à l’UQAM.
développement psychosexuel, l’auteur établit
une distinction entre la maturité et la santé

D
sexuelle. Il précise les liens entre les ans les années soixante-dix, la sion ! Quelle naïveté !
fantasmes, les rêves et la réalité. Il propose sexologie clinique était presque Par la suite, j’ai constaté que les résultats
ensuite une classification des désordres entièrement sous l’emprise des cliniques si spectaculaires des interven-
sexuels. Une nouvelle typologie des comportementalistes. À l’aide de tech- tions comportementalistes étaient, dans
homosexualités est suggérée. niques de rééducation sexuelle et de per- bien des cas, assez éphémères. Au mieux,
missions thérapeutiques, on libérait les on rendait possible une meilleure fonc-
inhibitions superficielles et on améliorait tionnalité génitale sans changer vérita-
la fonctionnalité génitale. Les stratégies blement la dynamique sexuelle de l’indi-
thérapeutiques étaient fort simples : par vidu. Tout cela reposait sur une
exemple, en neutralisant l’anxiété de per- conception réductionniste de la sexualité
formance de l’homme impuissant, on humaine. D’où mon intérêt pour l’explo-
rétablissait ses capacités érectiles; par la ration des couches plus profondes du psy-
technique de “compression pénienne”, chisme et des conflits inconscients, dont
on facilitait un meilleur contrôle éjacula- les troubles sexuels sont porteurs. Je trou-
toire; par des dilatations vaginales, on vais plus instructif d’aller du côté des éga-
permettait à la femme vaginique de s’ou- rements de la mémoire, de la répression,
vrir physiologiquement au coït; par une du refoulement, bref dans les voies
autorisation à l’auto-érotisme, on per- secrètes du psychisme, pour comprendre
mettait à des femmes anorgastiques d’ac- vraiment la sexualité humaine dans toute
céder à la jouissance. son étrangeté et sa complexité. Il me sem-
Les premières applications cliniques de blait de plus en plus évident que, pour
mes recherches sur l’imaginaire érotique résoudre un trouble sexuel, on ne pouvait
au début des années quatre-vingt faire l’économie des forces inconscientes.
m’avaient aussi laissé croire à la pertinence Cette conviction m’a amené, au début des
d’une intervention de surface focalisée sur années quatre-vingt, à créer la sexoana-
le réseau strictement conscient. Je croyais lyse, un nouveau chapitre de la sexologie
alors qu’il était possible de refaçonner ayant comme objet d’étude l’inconscient
MOTS-CLEFS :
l’imaginaire et le mode d’érotisation par sexuel. Depuis lors, plusieurs cliniciens
• Sexoanalyse
• Santé sexuelle
de simples prescriptions ou par un travail se sont intéressés à ce nouveau champ
• Inconscient sexuel de rééducation. Les comportementalistes d’études. Même si elle est encore bien
• Désordres sexuels m’avaient influencé et j’ai cru un moment jeune, la sexoanalyse a son histoire. Cer-
• Homosexualités aux métamorphoses magiques. Quelle illu- taines hypothèses que j’ai formulées il y a
une dizaine d’années doivent être révi-
Tableau 1 : Combinaisons des fantasmes et des rêves sexuels. sées et nuancées. C’est ce que je tenterai de
Rêves sexuels Fantasmes sexuels Comportements sexuels faire dans cet article.
+ + + L’hyperérotique
+ + - Le non-réalisant Définition
- + - Le fantasmant
+ - - Le rêveur
de la sexoanalyse
+ - + Le non-fantasmant
Initialement, j’ai forgé le mot sexoanalyse
- + + Le non-rêveur
pour désigner une nouvelle approche
- - + L’opératoire sexothérapeutique. La sexoanalyse se
- - - L’anérotique démarquait des autres sexothérapies par

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l’accent qu’elle mettait sur les significa- lyse. La “genralité” – un néologisme que précoce fortement culpabilisé pourront
tions inconscientes des troubles sexuels j’ai forgé au début des années quatre-vingt- en être la cause principale.
et sur le travail correctif sur l’imaginaire. dix – est la quantité de masculinité et de
L’objectif central était d’amener le patient féminité dont est porteur un individu.
à comprendre la genèse de son trouble Quant au rapport à l’autre sexe, la troi-
Hypothèses sur
sexuel et les facteurs inconscients qui sième sphère du sexuel en sexoanalyse, il le développement
contribuent à son maintien pour ensuite fait référence à l’ensemble des perceptions
faire une expérience corrective sur l’ima- conscientes et inconscientes concernant
de la genralité
ginaire et le réel afin de rétablir la fonc- l’autre sexe. Jusqu’ici, nous avons passa-
tionnalité sexuelle et de permettre l’ac- blement occulté le rapport au même sexe. S’appuyant, entre autre, sur les travaux
quisition d’une meilleure maturité et santé On aurait toutefois avantage à l’inclure de Stoller (1978, 1989), la théorie sexoa-
sexuelle. Par la suite, la sexoanalyse s’est dans la troisième sphère du sexuel. nalytique reconnaît l’existence d’une
appuyée sur ses propres référentiels onto- phase de féminité primaire, d’une proto-
géniques en suggérant des hypothèses féminité commune aux deux sexes. Pour
originales en ce qui concerne le dévelop-
Le sexuel comme accéder à la masculinité, le garçon doit se
pement de la genralité et ses liens avec la noyau étiologique désidentifier “genralement” de l’élément
fonction érotique. La sexoanalyse est maternel et renoncer, du moins tempo-
devenue à la fois une thérapeutique et Les troubles sexuels ne se limitent pas aux rairement, à ses composants féminins. Il
une “théorie” du développement psy- dérèglements de la fonction érotique ; ils doit en plus trouver un modèle identifi-
chosexuel (Crépault, 1986, 1997; Crépault englobent aussi les désordres de la gen- catoire masculin (habituellement le père).
et Côté, 1999; Crépault et Lévesque, 2001). ralité et du rapport à l’autre sexe. Dans le La masculinité est donc vue comme une
Actuellement, je dirais que la sexoanalyse tableau clinique, il n’est pas rare de retrou- construction secondaire facilitée par la
est avant tout l’étude de l’inconscient ver en juxtaposition ces trois anomalies. Le mise en veilleuse de la féminité de base
sexuel et de ses manifestations. trouble sexuel est mis en relation avec et par l’émergence de l’agressivité phal-
l’histoire sexuelle et les conflits qui ont pu lique. L’agressivité phallique serait une
en résulter. Autrement dit, on tente d’ex- force masculinisante, une sorte de prin-
Le sexuel pliquer le sexuel par le sexuel. On a donc cipe additif que j’ai appelé le facteur Y.
en sexoanalyse un regard essentiellement sexologique sur Elle renvoie à l’ensemble des fantasmes
les troubles sexuels. Prenons à titre et des conduites manifestes visant à
Dans les écrits sexologiques, le sexuel est d’exemple le travestisme fétichiste chez démontrer la puissance phallique et à
habituellement associé à la sexualité et à la l’homme. Pour en comprendre la genèse, imposer une domination intersexuelle ou
fonction génitale. La pensée psychanaly- il faut regarder du côté de l’histoire intrasexuelle. Elle ne doit pas être confon-
tique freudienne a donné une plus grande sexuelle, c’est-à-dire du développement due avec l’agressivité destructrice qui est
extension à la notion de sexualité en l’as- de la genralité, du rapport à l’autre sexe et alimentée par la haine et le désir de faire
similant, du moins dans l’enfance, à l’en- des accidents de parcours dans l’éroto- mal. Dans son excellent article, Trempe
semble des plaisirs et des excitations liés à genèse, par exemple une sexualisation (2001) a toutefois montré que les frontières
l’assouvissement des besoins physiolo- défensive précoce, un conflit œdipien non entre ces deux formes d’agressivité ne
giques fondamentaux (respiration, faim, résolu. D’autres facteurs non sexuels, par sont pas toujours aisées à délimiter.
fonction d’excrétion). Pour Freud, la sexua- exemple une relation parentale défec- D’ailleurs, certains troubles sexuels mas-
lité n’est pas réductible au génital; tout tueuse, une carence narcissique, des expé- culins sont liés à cette difficulté de dépar-
plaisir est en lien direct avec la sexualité. riences d’abandon, pourront maximiser tager ces deux formes d’agressivité;
Dans la vision freudienne, la sexualité des perturbations sexuelles, sans être tou- l’homme réprimera son agressivité phal-
semble se confondre avec l’“hédonicité”. tefois suffisants en eux-mêmes pour les lique de crainte que celle-ci se transforme
Comparativement à la théorie psychana- induire. Ainsi, pour reprendre notre en agressivité de destruction.
lytique freudienne, la sexoanalyse donne exemple du travestisme fétichiste, nous La fille n’a pas à changer de modèle
un sens plus large à la notion de sexuel, avons de bonnes chances de retrouver d’identification pour développer sa fémi-
mais définit plus étroitement la notion de dans ce désordre un traumatisme genral nité. Mais le renforcement de la féminité
sexualité. et, plus spécialement, des attaques mas- suit aussi un principe additif que j’ai
En sexoanalyse, le sexuel renvoie à la sives à la masculinité et une forte anxiété appelé le facteur X. Cette force fémini-
sexualité, à la “genralité” et au rapport à de castration. On sera aussi susceptible sante est la désirabilité, c’est-à-dire l’en-
l’autre sexe. La sexualité désigne l’en- de retracer des expériences perturbantes semble des conduites imaginaires ou
semble des productions fantasmatiques et dans la relation à l’autre sexe (mépris, réelles qui poussent la fille à être désirée
des conduites réelles qui sont une source rejet, abandon par des femmes). Pour corporellement.
potentielle ou manifeste de plaisir érotique. d’autres anomalies sexuelles, par exemple Étant donné que la masculinité est une
Le plaisir érotique est défini comme une l’incapacité à érotiser un lien fusionnel (ce construction secondaire, cela a pour consé-
impression subjective spécifique suscep- que nous appelons en sexoanalyse l’ané- quence de rendre plus vulnérable l’iden-
tible de provoquer une excitation génitale. rotisme fusionnel), des expériences tité masculine. Cette plus grande fragilité
On voit ici que les concepts de sexualité et sexuelles atypiques (abus sexuel, inceste de l’identité masculine pourrait expliquer
génitalité sont assez proches en sexoana- fantasmatique ou réel) ou un éveil sexuel pourquoi les hommes utilisent davantage

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la sexualité à des fins défensives et pour- hender que dans ses manifestations. librement dans l’espace imaginaire que
quoi ils ont une plus grande propension Généralement, il se déguise pour mieux se dans la réalité. À l’abri du regard et du
aux érotisations atypiques. La plus grande dissimuler. Il apparaît souvent sous forme jugement social, le sujet-fantasmant peut
vulnérabilité de l’identité masculine pour- symbolique et même, à la limite, sous une transgresser plus aisément les interdits
rait aussi rendre compte de la tendance configuration totalement contraire à sa (Crépault, 1981). Mais l’imaginaire a aussi
plus marquée chez l’homme à opérer un vraie identité. Freud a fait du rêve la “voie ses contingences. Les contenus manifestes
clivage entre son objet d’amour et son royale” de l’inconscient. On peut présu- que le Moi ne peut tolérer seront bloqués
objet de désir. Son rapport à la femme mer que le rêve sexuel est lui aussi la voie ou rapidement évacués. D’autres pro-
serait aussi plus conflictualisé : l’homme par excellence qui mène à l’inconscient ductions érotiques imaginaires seront
pourra craindre que la femme le féminise sexuel. Une autre voie “princière” serait le acceptables à la condition d’être symbo-
et le dépouille de ses attributs masculins. fantasme sexuel éveillé, dans son contenu lisées ou transformées en leur contraire.
L’angoisse de castration traduit corporel- manifeste et latent. Deux chemins qui Moins sous l’emprise du système défen-
lement la menace plus fondamentale pour s’entrecroisent et qui, finalement, se sif, les rêves sexuels sont davantage por-
l’homme de perdre son identité mascu- confondent, d’où la nécessité de saisir les teurs de désirs inconscients. Des désirs
line. Quand cette angoisse est trop forte, continuités et les discontinuités entre les qui seraient intolérables, anxiogènes à
l’homme a du mal à concilier les courants rêves et les fantasmes sexuels. L’incons- l’état de veille, peuvent avoir une valeur
fusionnel et antifusionnel de l’érotisme. cient sexuel se cache, se camoufle, se tra- d’excitation érotique dans le rêve. À titre
Voici en résumé les hypothèses sexoana- vestit. Une des meilleures façons de le d’exemple, le tabou de l’inceste est plus
lytiques centrales concernant le dévelop- démasquer, c’est par l’analyse minutieuse facilement transgressé dans les rêves.
pement de la genralité: du réseau conscient. Éclairer la nuit avec D’autres thèmes pourront au contraire
1. L’existence d’une féminité primaire (pro- la lumière du jour : voilà une règle d’or générer de l’angoisse dans le rêve et sus-
toféminité) commune aux deux sexes ; en sexoanalyse. Par exemple, en amenant citer de l’excitation dans le fantasme
2. La masculinité comme construction le sujet à décrire dans le moindre détail éveillé. Qu’on pense au fantasme de viol,
secondaire ; ses fantasmes sexuels éveillés, ce qui équi- qui possède chez certaines femmes une
3. L’agressivité phallique en tant que force vaut somme toute à une surconscientisa- forte valeur érogène, mais qui est habi-
masculinisante (facteur Y) ; tion, on en arrive paradoxalement à tuellement angoissant quand il apparaît
4. La désirabilité comme force féminisante rejoindre l’“arrière conscience”. dans les rêves nocturnes. Rares sont les
(facteur X) ; La nécessité d’explorer l’inconscient sexuel femmes qui voudraient traduire ce fan-
5. La plus grande vulnérabilité de l’iden- dans la clinique sexologique s’appuie sur tasme dans le réel. Ce qui est excitant dans
tité masculine et ses répercussions sur les quatre propositions suivantes : ce fantasme, c’est l’illusion ou plutôt le
la vie érotique de l’homme : 1. Les anxiétés et les désirs sexuels insup- risque d’être violée ; si le risque devenait
a. Plus grand usage de la sexualité à portables pour le Moi conscient sont trop grand, ce que le réel viendrait confir-
des fins défensives ; susceptibles d’être rejetés hors du mer, l’excitation aurait de bonnes chances
b. Plus forte propension aux érotisa- champ de la conscience ; de disparaître ou de se convertir en
tions atypiques ; 2. Les troubles sexuels reposent en géné- angoisse. Dans le fantasme, il n’y a pas
c. Tendance plus marquée à opérer un ral sur des anxiétés et des désirs sexuels de véritables menaces dans la mesure où
clivage entre l’objet d’amour et l’ob- inconscients. D’où la nécessité de les la femme contrôle le scénario.
jet de désir. conscientiser et d’en comprendre la Des désirs et des conflits inconscients peu-
signification afin de déconflictualiser le vent être décodés par l’analyse du rêve
mode d’érotisation et de résoudre les sexuel manifeste. Les rêves à contenu non
La spécificité de troubles sexuels ; sexuel peuvent avoir une forte valeur
l’inconscient sexuel 3. Les anxiétés et les désirs sexuels incons- symbolique au plan sexuel. En général,
cients peuvent être décodés par l’ana- les désirs les plus inconscients peuvent
et sa pertinence en lyse des fantasmes éveillés et des rêves ; être décodés dans ces rêves sexuels sym-
clinique sexologique 4. Une fois conscientisées, les anxiétés boliques. Quand un désir apparaît dans
inhérentes aux troubles sexuels peu- un rêve à contenu sexuel, c’est parce qu’il
Non seulement la sexoanalyse reconnaît vent être endiguées par la création de est plus près du préconscient. Un désir
l’existence de l’inconscient, mais elle sup- nouvelles ouvertures fantasmatiques et solidement enterré dans l’inconscient est
pose aussi l’existence d’un inconscient par l’adaptation au réel. plus susceptible de s’introduire dans un
sexuel spécifique ayant ses propres conte- rêve sexuel symbolique, c’est-à-dire dans
nus, ses propres mécanismes d’action, ses un rêve très chargé au plan affectif, mais
propres lois, bref un inconscient sexuel
Fantasme, dont le contenu manifeste n’est pas sexuel.
autonome ou, à tout le moins, doté d’une rêve et réalité Le rêve est l’expression de la “mémoire
certaine autonomie. Pour le moment, on du passé”. Mais il est aussi une “mémoire
peut dire que l’inconscient sexuel n’a pas La sexoanalyse s’intéresse particulière- du futur”, dans la mesure où il peut pro-
de domicile précis. On peut supposer sim- ment aux interrelations, aux concordances poser des solutions à un conflit. Les trans-
plement qu’il fait partie du “cerveau- et discordances entre les manifestations formations du mode d’érotisation dans le
esprit”, pour reprendre la terminologie sexuelles fantasmatiques, oniriques et cadre de la cure sexoanalytique passent
de Hobson (1992). On ne peut l’appré- réelles. Les désirs érotiques circulent plus habituellement par le rêve avant de s’ins-

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taller dans la fantasmatique éveillée. C’est ser à l’individu qui a des conduites exclu- ment. Hélas, on ne dispose pas de mar-
comme si le changement était moins sivement hétérosexuelles, mais dont les queurs aussi précis en ce qui concerne le
menaçant dans le rêve. Une fois rêvé, le désirs, les fantasmes et les rêves sont à développement psychosexuel. Pour cette
changement peut être imaginé. Une fois prédominance homosexuelle. Le contraire, raison, il serait hasardeux de définir d’une
imaginé, il peut être réalisé. quoique moins fréquent, est aussi vrai. façon stricte la maturité psychosexuelle. Je
Le fantasme a tendance à s’effriter ou à Dans un article paru dans la revue Sexo- me suis contenté de dégager certains
s’affaiblir quand il est réalisé. La réalité logies, j’ai rapporté le cas d’une femme qui jalons de maturité au plan de la genralité
fait souvent perdre au fantasme une par- se définissait comme homosexuelle (son et de la sexualité. L’investissement de sa
tie de sa magie. Cela est surtout vrai identité et ses conduites étaient homo- spécificité sexuelle (mâle ou femelle,
lorsque le fantasme ne comporte pas la sexuelles), mais dont les fantasmes et les homme ou femme) et l’intégration des
transgression d’un interdit. L’acte insa- rêves étaient à prédominance hétéro- composantes masculines et féminines me
tisfaisant ou culpabilisant a de bonnes sexuelle. Cette femme avait une conjointe semblent de bons indices de maturité gen-
chances d’appauvrir le fantasme, du stable. Elle consultait, car elle trouvait rale. Sur le plan de la sexualité, la matu-
moins temporairement. Chez les déviants intolérable de recourir obligatoirement à rité serait liée à la capacité d’investir les
sexuels — les paraphiles dans la termi- des fantasmes hétérosexuels pour parve- différences sexuelles (la complémentarité
nologie moderne —, il existe générale- nir à l’orgasme lors de ses activités homo- entre les sexes), d’intégrer les érotismes
ment une forte synergie entre le fantasme sexuelles (Crépault, 2002). En règle géné- fusionnel et antifusionnel, d’utiliser la
et l’agir réel : d’une part, le fantasme rale, les femmes, comparativement aux sexualité, surtout dans sa fonction com-
devient à ce point envahissant qu’il doit hommes, se sentent moins menacées par plétive (pour combler des besoins psy-
être actualisé; d’autre part, le passage à l’homosexualité imaginaire ou réelle. On choaffectifs). Comme on peut le consta-
l’acte a pour effet de réactiver l’activité retrouve ainsi plus de fantasmes bisexuels ter, le lien hétérosexuel a été privilégié,
fantasmatique. Certains psychanalystes, chez les femmes. Fait intéressant, les éro- non pas tellement en raison de sa valeur
Joyce McDougall (1996) entre autre, ont tismes fusionnel et antifusionnel peuvent normative, mais surtout parce que l’ou-
affirmé que les déviants et les délinquants être clivés en fonction de l’orientation verture au différent permet à l’humain de
sexuels passaient à l’acte, car ils n’avaient sexuelle. Par exemple, les femmes qui ont se dépasser, d’aller au-delà de son unidi-
pas de fantasmes ou qu’ils avaient un ima- des fantasmes hétérosexuels de soumis- mensionnalité. Il fallait s’y attendre, cette
ginaire très pauvre. Il est vrai que, chez sion excessive (soumission pouvant ver- conception a été critiquée à maintes
certains déviants sexuels, le passage à ser dans le masochisme) ont tendance à reprises par les défenseurs de l’homo-
l’acte résulte d’une incapacité à traduire le avoir en plus des fantasmes homosexuels sexualité. On y voyait une “pathologisa-
désir atypique sous forme de fantasmes; de type fusionnel. tion”, une “diabolisation” politiquement
le réel se substitue alors au fantasme. Mais Les personnes qui ont plus souvent des incorrecte de l’homosexualité. Pourtant,
cette forme de pensée opératoire ne fantasmes sexuels sont en général plus j’ai toujours insisté pour dissocier l’ho-
semble pas spécifique aux déviants réceptives à la sexualité. Ont-elles aussi mosexualité de la psychopathologie. Par
sexuels; on la retrouve aussi chez les non- plus de rêves sexuels nocturnes? Nos contre, je croyais – et je n’ai pas changé
déviants sexuels. Selon Curnoe et Lange- résultats préliminaires de recherches ne d’avis – que l’homosexualité est princi-
vin (2002), bon nombre (au moins le tiers) semblent pas confirmer l’hypothèse de la palement le résultat d’une rupture dans
de délinquants sexuels avouent avoir des concordance entre la fréquence des fan- le processus d’individuation sexuelle,
fantasmes paraphiliques. Une exploration tasmes et des rêves sexuels (Crépault et d’une perturbation de la genralité ou du
clinique plus poussée montrerait sans Samson, 1999). Dans bien des cas, nous rapport à l’autre sexe. En ce sens, je vois
doute que la plupart d’entre eux ont des avons observé une corrélation négative, mal comment elle pourrait être compa-
fantasmes assez peu diversifiés, et que c’est-à-dire des fantasmes fréquents et peu tible avec la maturité sexuelle.
ceux-ci correspondent à leurs conduites. de rêves sexuels ou encore des rêves Au cours des dernières années, j’ai toute-
Une des fonctions du fantasme est de faire sexuels fréquents et peu de fantasmes fois été amené à établir une distinction
l’économie du réel. Chez les déviants sexuels éveillés. Nous avons aussi noté entre la maturité et la santé sexuelle. Si la
sexuels manifestes, le fantasme devient de nombreuses variations individuelles maturité est l’aboutissement d’un pro-
tellement envahissant qu’il exaspère le quant à la fréquence des rêves, des fan- cessus de développement sexuel, la santé
désir, un peu comme l’eau de mer fait de tasmes et des comportements sexuels sexuelle renvoie à un état de bon fonc-
la soif. manifestes. Les différentes combinaisons tionnement sexuel et à la capacité, entre
Pour déterminer le mode d’érotisation (le + indique une forte fréquence et le - autre, d’investir érotiquement une per-
d’un individu, il faut aller au-delà des une faible fréquence) sont présentées dans sonne humaine consentante. Dans cette
conduites sexuelles effectives et tenir le tableau 1. perspective, l’homosexualité serait com-
compte des désirs, des fantasmes et des patible avec la santé sexuelle.
rêves sexuels. Une concordance absolue La santé sexuelle ne se limite pas à la
entre ces différents modes d’érotisation
Maturité sexualité; elle englobe aussi la genralité
est rare et pourrait d’ailleurs être consi- et santé sexuelle et la vie amoureuse. La santé érotique est
dérée comme suspecte. Par contre, une associée aux critères suivants :
discordance marquée est un signe de En biologie, la notion de maturité désigne 1. Capacité de désirer, d’imaginer, de
conflit et amène habituellement un incon- l’étape de croissance finale, le moment où jouir ;
fort, une égodystonie. On n’a qu’à pen- l’organisme a complété son développe- 2. Capacité d’érotiser une personne

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humaine consentante ; 1.1. Identité de genre inversée (transgen- 2. Misogynie-Misoandrie


3. Absence de perversions ou de ralisme) IV. Désordres de la vie amoureuse
déviances majeures (perversion : hos- 1.2. Identité de genre ambivalente 1. Inaptitude à l’investissement amoureux
tilité massive érotisée; déviance : objet 2. Troubles de l’orientation genrale 2. Inaptitude à transformer un lien amoureux
non humain, non adulte, incestueux, 2.1. Travestisme non fétichiste en une relation affective sexualisée durable
non consentant) ; 2.2. Gynémimétisme chez l’homme
4. Aptitude à la polyvalence dans les 2.3. Andromimétisme chez la femme Les troubles de la genralité ont été regrou-
modes de désir, d’excitation et de jouis- 3. Genralité déficiente pés sous quatre rubriques : les troubles
sance (intégration des érotismes fusion- 3.1. Hypomasculinité chez l’homme de l’identité de genre, les troubles de
nel et antifusionnel) ; 3.2. Hypoféminité chez la femme l’orientation genrale, la genralité déficiente
5. Capacité d’harmoniser l’imaginaire et le 4. Genralité hypertrophiée et la genralité hypertrophiée. L’identité
réel ; 4.1. Hypermasculinité chez l’homme de genre fait référence au sentiment d’ap-
6. Capacité d’autorégulariser ses désirs 4.2. Hyperféminité chez la femme partenance à l’un ou l’autre sexe. Cette
érotiques (non-addiction érotique) ; II. Troubles de la sexualité identité peut être contraire au sexe biolo-
7. Prédominance de la fonction complé- 1. Troubles de l’orientation sexuelle gique. Le transgenralisme renvoie préci-
tive de la sexualité sur la fonction défen- 1.1. Orientation sexuelle discordance et sément à cette inversion de l’identité de
sive (l’existence de microperversions et égodystonique genre par rapport au sexe biologique. Le
d’érotisations défensives sporadiques Discordances entre l’identité d’orien- transgenral a la conviction (non délirante)
serait néanmoins compatible avec la tation sexuelle, les désirs, les fan- d’appartenir à l’autre sexe. Pour des rai-
santé érotique). tasmes, les rêves, les conduites réelles sons d’ordre idéologique (entre autres
Sur le plan de la genralité, la santé serait 1.2. Orientation sexuelle ambivalente pour ne pas stigmatiser les personnes qui
associée à la capacité d’investir sa spéci- 2. Érotisations atypiques souffrent de cette contradiction entre leur
ficité sexuelle anatomique (être fier d’être 3. Érotisations perverses identité et leur réalité biologique), le terme
un homme ou une femme) et d’intégrer Érotisation massive de l’hostilité, de la de transsexualisme a été éliminé comme
ses composantes masculines et féminines. haine catégorie diagnostique dans le DSM-IV.
Dans nos sociétés occidentales modernes, 4. Érotisation antifusionnelle exclusive La notion de transgenralisme me semble
l’homme en bonne “santé genrale” serait 5. Addiction érotique mieux décrire le conflit fondamental entre
suffisamment masculin, “assez”, mais “pas 6. Sexoses le corps et l’esprit que vivent ces indivi-
trop” féminin. De son côté, la femme serait 6.1. Trouble du désir sexuel dus. Ils ont le “mauvais corps”, car leur
suffisamment féminine, “assez”, mais “pas 6.1.1. Aversion sexuelle identité de genre est contraire à leur corps
trop” masculine. Évidemment, les 6.1.2. Manque de désir sexuel (Côté et Wilchesky, 1996).
adverbes “assez” et “pas trop” devraient 6.2. Imaginaire érotique hypoactif Certains individus ont une identité de
être mieux opérationnalisés. La percep- 6.3. Troubles de l’excitation sexuelle genre conforme à leur sexe biologique et,
tion intrasubjective, le langage corporel et 6.3.1. Excitation sexuelle déficiente sur ce plan, ne manifestent pas d’ambi-
l’aisance à exercer des rôles traditionnel- 6.3.1.1. Impuissance érectile valence. On parlera toutefois de troubles
lement dévolus à l’autre sexe peuvent être 6.3.1.2. Frigidité de l’orientation de genre quand il y a trop
des marqueurs utiles pour évaluer cette 6.3.2. Excitation anhédonique de féminité chez l’homme et trop de mas-
flexibilité sur le plan de la genralité. 6.4. Troubles orgastiques culinité chez la femme. Cette quantité
En ce qui concerne la santé amoureuse, 6.4.1. Anorgasmie excessive d’éléments de l’autre sexe peut
deux indices peuvent être identifiés : 6.4.1.1. Généralisée se traduire par des conduites de traves-
- la capacité d’éprouver un sentiment 6.4.1.2. Relationnelle tissement sans que cela soit associé à un
amoureux; 6.4.1.3. Relationnelle partielle plaisir érotique. C’est ce qu’on observe
- la capacité de transformer un lien amou- 6.4.2. Pseudo-orgasmie dans le travestisme non fétichiste. En met-
reux en une relation affective sexualisée 6.4.2.1. Éjaculation anhédonique tant des vêtements de l’autre sexe, l’indi-
durable. 6.4.2.2. Contractions vaginales anhédo- vidu a un sentiment de bien-être intérieur.
niques Un mouvement dépressif important peut
6.4.3. Dysorgasmie néanmoins l’amener à douter de son iden-
Classification 6.4.3.1. Orgasme prématuré tité de genre. L’excès de masculinité chez
des troubles sexuels 6.4.3.2. Orgasme retardé la femme et de féminité chez l’homme
6.5. Sexoses coïtales peut aussi être décodé à travers le langage
Il y a une dizaine d’années, j’ai proposé 6.5.1. Coïtisme corporel ou par l’attrait pour les rôles
une classification sexoanalytique des 6.5.1.1. Vaginisme sociaux privilégiés par un ou l’autre sexe.
désordres psychosexuels (Crépault, 1993). 6.5.1.2. Impuissance coïtale Ce dernier marqueur est toutefois beau-
Une révision de cette classification noso- 6.5.2. Hypoérotisme coïtal coup plus labile dans les sociétés
graphique s’imposait. Avant de discuter 6.5.3. Anorgasmie coïtale modernes.
des changements, je me permets de vous 6.5.4. Dysorgasmie coïtale À ces inversions de l’identité et de l’orien-
la présenter dans son ensemble. 6.5.5. Coïtalgie psychogène (dyspareunie) tation de genre viennent s’ajouter deux
I. Troubles de la genralité III. Dysphories intersexuelles autres désordres : la genralité déficiente
1. Troubles de l’identité de genre 1. Hétérophobie et la genralité hypertrophiée. Dans le pre-

- VOL.XIII, N°48
17

mier cas, les composantes de son propre port à son orientation sexuelle et il en tiellement à des troubles psychiatriques.
sexe sont déficientes : l’homme est insuf- souffre. Il est rare que l’ambivalence de
fisamment masculin (hypomasculinité), l’orientation sexuelle soit égosyntonique.
et la femme insuffisamment féminine En ce qui concerne l’orientation sexuelle
Typologie
(hypoféminité). Cette défaillance est assez concordante égodystonique, elle ne consti- des homosexualités
souvent ressentie intérieurement; tue pas en soi un désordre sexuel. Si des
l’homme aura l’impression profonde de individus consultent pour leur malaise Plusieurs facteurs déterminent l’orienta-
n’être pas assez masculin et la femme aura par rapport à leur homosexualité concor- tion sexuelle. En sexoanalyse, nous avons
le sentiment de n’être pas suffisamment dante, il faut plutôt y voir une inaptitude au début mis l’accent sur les facteurs stric-
féminine. Ces insuffisances de genralité à supporter le rejet social. Une démarche tement sexologiques qui contribuent au
peuvent aussi être déduites à partir des thérapeutique visant à amener ces indi- développement de l’hétérosexualité. Deux
troubles de la fonction érotique. À titre vidus à l’égosyntonie par rapport à leur variables ont été retenues : la genralité et
d’exemple, il n’est pas rare que l’impuis- homosexualité concordante serait alors le rapport à l’autre sexe. Traduit sous
sant coïtal ait un manque d’agressivité indiquée. forme d’hypothèses complémentaires, cela
phallique, et donc une hypomasculinité. Un autre changement dans la classifica- avait pour nous une valeur prédictive.
Dans la nouvelle classification, nous avons tion sexoanalytique des troubles sexuels Voici comment cela était formulé : est sus-
aussi retenu les situations extrêmes de a trait à l’incapacité de concilier les éro- ceptible de devenir hétérosexuel le garçon
masculinité et de féminité. Compte tenu tismes fusionnel et antifusionnel. Avait qui se sent suffisamment masculin et qui
de l’évolution des rôles de genre dans les été retenue dans la précédente nosogra- ne se sent pas trop menacé par la femme;
sociétés occidentales modernes, nous phie l’érotisation antifusionnelle hyper- est encline à devenir hétérosexuelle la fille
croyons que trop de masculinité chez un trophiée, c’est-à-dire la nette prédomi- qui est bien installée dans sa féminité et
homme et trop de féminité chez une nance de l’érotisme antifusionnel sur qui ne sent pas trop menacée par l’homme.
femme peut être non seulement l’indice l’érotisme fusionnel. Nos recherches sur Dans la même ligne de pensée, on pou-
d’une formation défensive, mais aussi l’imaginaire érotique nous ont toutefois vait en déduire qu’une genralité défaillante
l’expression d’une rigidité et d’un manque permis de constater que l’érotisation anti- et une peur excessive du sexe opposé
d’adaptation. fusionnelle est largement dominante, en créaient un terrain propice à l’homo-
Les changements les plus notables dans particulier chez les hommes. La majorité sexualité. Le garçon sera susceptible de
la nouvelle classification ont trait à l’orien- des hommes – et bon nombre de devenir homosexuel s’il a trop de compo-
tation sexuelle. Seules ont été retenues femmes – auraient pu ainsi avoir un tel santes féminines, s’il ne se sent pas suffi-
l’orientation sexuelle discordante égo- diagnostic. Pour cette raison, il nous samment masculin et si son rapport à la
dystonique et l’orientation sexuelle ambi- semble plus approprié de réserver le dia- femme est trop conflictualisé et empreint
valente. L’orientation sexuelle est discor- gnostic aux individus qui ne peuvent de menaces inconscientes, par exemple la
dante quand il existe des discontinuités s’érotiser que dans un contexte antifu- crainte d’être démasculinisé et même
majeures entre l’identité d’orientation sionnel. On peut alors parler d’érotisation d’être réenglouti par la femme. La fille sera
sexuelle (le sentiment d’être hétérosexuel, antifusionnelle exclusive, ou encore d’ané- susceptible de devenir homosexuelle si
bisexuel ou homosexuel), les désirs, les rotisme fusionnel. elle possède trop de composantes mascu-
fantasmes, les rêves et les conduites Un autre trouble de la sexualité a été lines, si elle ne sent pas suffisamment fémi-
sexuelles réelles. À titre d’exemple, l’in- ajouté dans la classification sexoanaly- nine et si l’homme est pour elle trop mena-
dividu qui aurait une identité hétéro- tique. Il s’agit de l’anorgasmie relation- çant. Bref, nous émettions l’hypothèse
sexuelle et des conduites exclusivement nelle partielle. La personne est capable de qu’une genralité défaillante et une hété-
hétérosexuelles, mais avec des désirs et parvenir à l’orgasme dans un contexte rophobie constituaient les facteurs sexo-
des fantasmes à prédominance homo- masturbatoire. Mais dans un cadre rela- logiques déterminants de l’homosexualité
sexuelle, serait discordant. Un autre tionnel, elle ne peut “orgasmer” quand (Crépault, 1997). La typologie suivante
exemple de discordance : un individu qui elle est stimulée par son ou sa partenaire; était ainsi proposée :
aurait une identité et des conduites homo- elle doit elle-même induire sa jouissance Homme :
sexuelles, mais dont les fantasmes et les en se caressant ou en se frottant sur son 1. Homosexuel efféminé
rêves seraient à prédominance hétéro- ou sa partenaire. Cela est une forme d’au- 2. Homosexuel non suffisamment mas-
sexuelle (Crépault, 2002). L’individu à toérotisme. Ce désordre se rencontre prin- culin
orientation sexuelle discordance peut s’ac- cipalement chez les femmes. 3. Homosexuel hétérophobe (gynéphobe)
commoder de ses contradictions. S’il est Enfin, parmi les troubles de la vie amou- Femme :
égosyntone, cela ne justifie pas un dia- reuse, nous en avons retenu seulement 1. Homosexuelle virile
gnostic. De toute façon, il ne sera pas deux : l’inaptitude à l’investissement 2. Homosexuelle hétérophobe (andro-
motivé pour consulter un sexologue cli- amoureux et l’incapacité de transformer phobe)
nicien. Par contre, s’il vit mal ses incon- un lien amoureux en une relation affec-
gruences, s’il est égodystonique, il tive sexualisée durable. L’érotomanie (syn- Dans la nouvelle classification sexoana-
convient alors de poser un diagnostic. Il y drome de Clérambault) et la jalousie lytique des homosexualités, les deux pre-
a aussi trouble de l’orientation sexuelle sexuelle morbide, que l’on retrouvait dans mières catégories ont été conservées. Il
lorsque celle-ci est ambivalente : l’indi- l’ancienne classification sexoanalytique, m’apparaît de plus en plus clair qu’une
vidu est incapable de se situer par rap- ont été exclues, car elles renvoient essen- perturbation de la genralité doublée d’une

- VOL.XIII, N°48
18

hétérophobie potentialise le développe- une troisième catégorie d’homosexuels. grand-chose à leur offrir, si ce n’est que
ment de l’homosexualité. Par ailleurs, mes Nous les appelons “homosexuels aclivés”. soulager la souffrance engendrée par l’op-
observations cliniques, et celles d’autres Quand on interroge un homosexuel sur probre social. En ce qui concerne les trois
sexoanalystes, m’ont permis de constater ses premières attirances homosexuelles, autres catégories, la sexoanalyse peut être
que certains homosexuels n’ont jamais il n’est pas rare qu’il les situe très préco- d’un précieux recours, quand il existe bien
opéré un clivage entre la femme désirée et cement, vers l’âge de cinq ans. Et ces pre- sûr une véritable motivation au change-
la femme aimée. On sait que ce clivage miers souvenirs sont souvent très vifs. Les ment (Crépault, 1995). Et l’objectif de la
défensif fait partie intégrante du déve- hétérosexuels ont tendance à faire remon- cure sexoanalytique n’est pas nécessaire-
loppement psychosexuel du garçon à ter leurs attirances hétérosexuelles ini- ment de changer l’orientation sexuelle,
l’adolescence. Dans son imaginaire, la tiales un peu plus tard, vers l’âge de sept mais d’amener à un mieux-être sexuel, de
femme désirée n’est qu’un instrument de ou huit ans. En supposant que cette dif- consolider au besoin la masculinité et de
plaisir ; elle est déshumanisée, ce qui est férence soit statistiquement significative favoriser une concordance entre les désirs,
propice à l’érotisation de l’agressivité – encore faudrait-il la confirmer par une les fantasmes, les rêves et la réalité.
phallique. Par contre, la femme aimée, recherche empirico-quantitative —, je Étant donné qu’elle porte moins atteinte
renvoyant à l’image de la “Bonne Mère”, doute qu’elle soit tributaire d’une à son identité de genre, l’homosexualité
est vidée de ses composantes érotiques. meilleure capacité mnémonique des circule plus librement dans l’imaginaire
Un tel clivage permet au garçon d’assurer homosexuels. J’ai plutôt l’impression que de la femme. On sait que les fantasmes
sa puissance érectile en érotisant sans dan- les souvenirs des homosexuels sont le bisexuels ne sont par rares chez les
ger son agressivité phallique. Dans son reflet d’un développement plus précoce femmes qui se définissent comme hété-
excellent article portant sur les rabaisse- du Moi. Cela aurait pour effet d’ampli- rosexuelles. Les femmes dont l’identité
ments de la vie amoureuse, Freud (1912) fier certaines angoisses archaïques, par est homosexuelle ont plus souvent que
a bien décrit ce clivage dans la sexualité exemple les angoisses de défusion et de les hommes à identité homosexuelle des
des hommes : “Là où ils aiment, ils ne castration. Pour se protéger contre ces îlots d’hétérosexualité dans leur fantas-
désirent pas, et là où ils désirent, ils ne menaces terrifiantes, le garçon aurait alors matique et même dans leurs conduites
peuvent aimer.” (p. 59). Ce complexe de la tendance à investir érotiquement son sem- réelles. La bisexualité chez les femmes à
madone et de l’antimadone (la putain) blable, son double. D’où la naissance pré- identité hétérosexuelle et chez les femmes
serait tout à fait normal à l’adolescence. coce des premiers désirs homosexuels. à identité homosexuelle est donc nette-
Chez l’homme adulte, il doit être résolu Ces désirs s’imprégneraient dans le psy- ment plus fréquente que chez les
par une intégration des représentations chisme et envahiraient l’imaginaire. Cela hommes. La femme peut être définie
de la madone et de l’antimadone, de la s’apparente à une forme de fétichisme où comme homosexuelle si elle a une identité
femme aimée et de la femme désirée. Cela l’objet-fétiche est érotisé et s’inscrit de homosexuelle et si ses désirs, ses fan-
constituera un critère de maturité sexuelle. façon quasi indélébile dans l’imaginaire. tasmes et ses conduites sont à prédomi-
Quand le garçon ne parvient pas à opé- On ne peut aussi exclure la possibilité que nance ou exclusivement homosexuels.
rer un tel clivage à l’adolescence, cela a ces attirances homosexuelles précoces Dans la classification sexoanalytique anté-
pour effet de bloquer son investissement soient influencées par des forces d’ordre rieure des homosexualités féminines, nous
érotique de la femme et, donc, de l’hété- biologique. Les travaux de LeVay (1991) avions retenu deux types : l’homosexuelle
rosexualité. Ce raté ontogénique ouvre la sont à cet égard très instructifs. Il faudra virile et l’homosexuelle androphobe.
voie à l’homosexualité. On peut suppo- toutefois attendre que la science nous Nous avions émis l’hypothèse que trop
ser que la plupart des homosexuels exclu- apporte des données plus éclairantes. En de masculinité et pas assez de féminité
sifs n’ont pas effectué un tel clivage à attendant, nous pouvons inférer l’exis- prédisposent la femme à l’homosexualité.
l’adolescence. Pour eux, la femme repré- tence d’une quatrième catégorie d’ho- Nous avions aussi souligné que l’homo-
sente à la fois un être pur et impur, un être mosexuels. Nous pourrions les appeler sexualité féminine pouvait être le résul-
sexualisé et désexualisé, ce qui a pour “homosexuels primaires”, en raison de la tat d’une crainte excessive de l’homme
conséquence de maximiser chez eux les précocité de leurs investissements éro- (peur d’être détruite, contaminée, morce-
menaces de démasculinisation et l’anxiété tiques. La dénomination “homosexuels lée par l’homme et son “mauvais pénis”).
de castration. Certains homosexuels n’ont engrammés” nous semble plus juste dans Ces deux hypothèses nous semblent
pas de troubles majeurs sur le plan de la la mesure où elle renvoie à cette sexuali- encore très pertinentes. Toutefois, nous
genralité et ne montrent pas des signes sation précoce et à l’imprégnation qui en ne croyons pas qu’elles rendent compte
importants d’hétérophobie. Par contre, ils découle. Ces homosexuels n’ont pas de toutes les formes de l’homosexualité
n’ont jamais réussi à érotiser la femme nécessairement un trouble de la genralité féminine. Pour cette raison, nous avons
parce qu’ils ne l’ont jamais clivée. L’in- et ne sont pas hétérophobes. Pour eux, la ajouté deux autres catégories : l’homo-
vestissement érotique du semblable femme n’a pas de résonance érotique, non sexuelle de repli et l’homosexuelle
devient alors pour eux l’issue la plus sécu- pas parce qu’elle est potentiellement engrammée. Nous avons constaté que cer-
ritaire. Pourquoi n’ont-ils pas développé, menaçante ou parce qu’ils ne se sentent taines femmes initialement hétéro-
comme formation défensive, une érotisa- pas suffisamment masculins, mais tout sexuelles ou bisexuelles passent du côté
tion hétérosexuelle atypique, par exemple simplement en raison de leur imprégna- de l’homosexualité à la suite de décep-
un fétichisme ? C’est une question qui tion homosexuelle précoce. Ils ne tions hétérosexuelles. Ces femmes n’ont
demeure encore pour nous sans réponses. devraient pas constituer une catégorie cli- pas nécessairement d’anomalies sur le
Quoi qu’il en soit, nous pouvons établir nique. D'ailleurs, la sexoanalyse n’a pas plan de la genralité et ne sont pas andro-

- VOL.XIII, N°48
19

phobiques. Elles sont surtout désillu- est un chapitre de la sexologie. Dire que - CRÉPAULT C. (1995) The sexoanalytical
sionnées de leurs relations intimes avec j’ai un biais sexologique serait assez juste. treatment of ego-dystonic homosexuality. Jour-
les hommes à la suite de plusieurs aban- Comment ne pas en être porteur après nal of Sex and Marital Therapy, vol. 21, n° 2,
dons. Déçues de leurs relations hétéro- plus de trente années d’enseignement et p. 53-63.
sexuelles, elles concentrent alors leur éro- de recherches au sein du département de - CRÉPAULT C. (1997) La sexoanalyse. Paris,
tisme et leur vie affective sur les femmes. Sexologie de l’Université du Québec à Payot.
On peut parler d’une homosexualité de Montréal? Mon autre biais a trait à ma - CRÉPAULT C. (2002) Réflexions sexoanaly-
repli. Nous n’avons pas retrouvé l’équi- méthode de recherche. Contrairement à tiques sur certaines formes d’érotisme féminin.
valent chez l’homme. Quand l’investis- beaucoup de psychanalystes qui trans- Sexologies (France), vol. XI, n° 39, p. 52-62.
sement érotique du double anatomique cendent, parfois avec un certain mépris, le - CRÉPAULT C., SAMSON C. (1999) Fan-
remonte aux premières années de la vie, registre conscient pour se réfugier dans tasmes et rêves sexuels. In : C. Crépault et H.
on peut parler d’une homosexualité un champ interprétatif abstrait, je préfère Côté (dir.) : Imaginaire et sexoanalyse (p. 127-
engrammée ne laissant aucune place pour explorer le conscient, le contenu mani- 142). Montréal, Éditions IRIS.
les investissements hétérosexuels. Tout feste dans ses moindres détails avant d’ac- - CRÉPAULT C., CÔTÉ H. (dir.) (1999) Ima-
comme chez le garçon, ces premiers désirs céder au registre non conscient. C’est la ginaire et sexoanalyse. Montréal, Éditions IRIS.
homosexuels précoces (vers l’âge de 5 ans) méthode que j’utilise pour analyser les - CRÉPAULT C., LÉVESQUE G. (dir.) (2001)
chez la fille viseraient à surmonter des fantasmes et les rêves sexuels. Éros au féminin, Éros au masculin : nouvelles
angoisses archaïques, par exemple l’an- Dans le cadre de cet article, je n’ai pas explorations en sexoanalyse. Sainte-Foy, Presses
goisse de défusion ou encore l’angoisse parlé de la cure sexoanalytique et de son de l’Université du Québec.
de réengloutissement. On peut supposer évolution au cours des dernières années. - CURNOE S., LANGEVIN R. (2002) Perso-
que ces désirs homosexuels précoces chez Je dois toutefois mentionner que les résul- nality and deviant sexual fantaisies : an exami-
la fille seraient activés par une forte envie tats thérapeutiques (les miens et ceux nation of the MMPIs of sex offenders. Journal of
du pénis. Dans cette forme d’homo- d’autres sexoanalystes) sont suffisamment Clinical Psychology, Vol. 58, n° 7, p. 803-15.
sexualité, la possibilité de facteurs d’ordre encourageants pour légitimer la perti- - DSM-IV (1994) Diagnostic and statistical
biologique n’est pas à exclure. nence du traitement sexoanalytique. manual of mental disorders. Washington, Ame-
Voici sous forme schématique la nouvelle D’ailleurs, je crois que la valeur d’une thé- rican Psychiatric Association.
typologie sexoanalytique des homo- rapie se juge par son efficacité. Il serait - FREUD S. (1912) Sur le plus général des
sexualités : toutefois très utile de faire une recherche rabaissements de la vie amoureuse. In : La vie
Homme systématique sur les indications et les sexuelle (p. 55-65). Paris, Presses universi-
1. Homosexuel avec trouble de la genra- contre-indications de la cure sexoanaly- taires de France, 1969.
lité (trop de féminité ou pas assez de tique et sur le taux d’efficacité en fonction - HOBSON J.A. (1992) Le cerveau rêvant.
masculinité) des objectifs thérapeutiques. Paris, Gallimard.
2. Homosexuel gynéphobe En ce qui concerne le modèle théorique - LEVAY S. (1991) A difference in hypothala-
3. Homosexuel aclivé de la sexo-analyse, je fais référence ici en mic structure between heterosexual and homo-
4. Homosexuel engrammé particulier aux hypothèses sur l’ontoge- sexual men. Science, vol. 253, p. 1034-1037.
Femme nèse sexuelle et sur les liens entre les fan- - MC DOUGALL J. (1996) Éros aux mille et
1. Homosexuelle avec trouble de la gen- tasmes, les rêves et le réel – il serait néces- un visages. Paris, Gallimard.
ralité (trop de masculinité ou pas assez saire qu’il soit révisé régulièrement à - STOLLER R.J. (1978) Recherches sur l’identité
de féminité) partir d’observations cliniques et de sexuelle. Paris, Gallimard.
2. Homosexuelle androphobe recherches portant sur des populations - STOLLER R.J. (1989) Masculin ou féminin?
3. Homosexuelle de repli non cliniques, tout en tenant compte des Paris, Presses universitaires de France.
4. Homosexuelle engrammée données ethnologiques. - TREMPE J.P. (2001). Le concept d’agressivité
phallique dans la théorie sexoanalytique et psy-
RÉFÉRENCES
Conclusion chanalytique. In : C. Crépault et G. Lévesque
(dir.) : Éros au féminin, Éros au masculin : nou-
Certains psychanalystes m’ont posé la - CÔTÉ H., WILCHESKY M. (1996) The use velles explorations en sexoanalyse (pp. 25-44) ;
question : pourquoi la sexoanalyse? Pour- of sexoanalysis for patients with gender identity Sainte-Foy, Presses de l’Université du
quoi ne pas utiliser le modèle psychana- disorder. The Canadian Journal of Human Québec.
lytique? Je leur ai répondu : je ne suis pas Sexuality, vol. 5, n° 4, p. 261-70.
psychanalyste, je suis sexologue et mon - CRÉPAULT C. (1981). L’imaginaire érotique
projet est d’essayer de comprendre le et ses secrets. Sainte-Foy, Presses de l’Uni-
sexuel dans une perspective interdisci- versité du Québec.
plinaire en m’attardant sur les zones - CRÉPAULT C. (1986) Protoféminité et déve- Pr Claude Crépault
cachées, secrètes, non conscientes. Bien loppement sexuel. Sainte-Foy, Presses de l’Uni- Université du Québec à Montréal,
sûr, je me suis inspiré des réflexions et des versité du Québec. Département de Sexologie
recherches de certains psychanalystes (en - CRÉPAULT C. (1993) Une classification Case postale 8888,
particulier Freud, Stoller, Mahler). Mais des désordres psychosexuels. Contraception, succursale Centre-Ville
j’ai tenté d’apporter un éclairage plus spé- Fertilité, Sexualité (France), vol. 22, n° 2, Montréal (Québec), H3C-3P8
cifiquement sexologique. La sexoanalyse p. 177-183. Canada

- VOL.XIII, N°48
S E X O A N A LY S I S

CRÉPAULT C. (2004) Rev. Europ. Sexol ; Sexologies ; (XIII), 48 : 20-21

New hypotheses
in sexoanalysis
exoanalysis is a sexotherapeutic dances between the erotic/sexual, imagi-

C. CRÉPAULT S approach that aims at uncovering


the conscious and unconscious
meaning of sexual disorders and focuses
nary, nocturnal dream manifestations and
also the ones originating in reality. The
modification of the eroticization mode
on the corrective experience of the ima- throughout the course of sexoanalytic cure
SUMMARY: After a brief overview of the main ginary world and the reality. The correc- take usually form in the content of a dream
sexoanalytic hypothesis concerning the tive experience is defined as the modifi- before appearing in the conscious ero-
psychosexual development, the author cation of maladaptive/dysfunctional erotic tic/sexual fantasy world contents. It is really
describes and differentiates the concepts of imagery and sexual behaviours in reality. as if the change was much less threate-
maturity and health in terms of their sexual
The main objective is to help patient gain ning in the dream. Once dreamed, the
paths. He demonstrates the importance of the
intertwined connections between the worlds
insight on the factors underlying and at change can be imagined. Once imagined,
of fantasies, dreams and reality that come the roots of his/her problem: the genesis it can be realized.
into play in his new conceptualization of the of his/her sexual disorder about the anxie-
dynamic of sexual disorders. Resulting from ties, the secondary gains and intrapsychic Diagnostic
this original understanding of sexual/erotic issues. During the sexoanalytic process,
disorders, a new diagnostic classification is the therapeutic resolution and modifica-
classification
proposed. Finally, from his sexoanalytic tion of conflictual affects, behaviours, and of sexual disorders
theoretical framework, the author further sexual/erotic imagery constitutes the cor- Sexual orientation disorders are among
clarifies the continuum about the typology of
rective experience for the ultimate change. the most noticeable changes in the new
homosexualties (1).
The sexoanalytic approach offers an ori- sexoanalytic diagnostic classification of
ginal conceptualization of the sexothera- various sexual disorders. For the purpose
peutic intervention and is mostly inspired of this article, egodystonic discordant
by various psychoanalytic theories and sexual orientation and ambivalent sexual
clinical concepts about pathological and orientation are the categories closely exa-
adapted psychosexual ontogenesis and mined. There is a discordance of the sexual
moreover the development of gendera- orientation when major discontinuities are
lity (2). Below, we summarize the main identified between the sexual orientation
The author wish to express appreciation hypothesis: identity (4), desires, erotic/sexual fanta-
to Hélène Côté, M.A. for the translation 1. The existence of a primary femininity sies, dreams and the actual sexual
of this article: (protofeminity) (3) common to both conducts, attitudes and behaviours. For
Hélène Côté, M.A. is a sexoanalyst, sexes ; example, a person who claims having a
clinical sexologist and psychotherapist. 2. Masculinity as a secondary construc- clear heterosexual identity and exclusive
She is a senior member of the Human tion ; heterosexual behaviours, with neverthe-
sexuality unit at the Mc Gill University 3. Phallic aggression as a masculinizing less predominant desires and erotic/sexual
Health Centre and International Institute driving force (Factor Y) ; fantasies would portray a typical case of
of Sexoanalysis. 4. Desirability as a feminizing driving force discordant sexual orientation. The same
Address : 1001 Sherbrooke East, (Factor X) ; example prevails for the one presenting
suite 500, Montréal, (Québec), H2L 1L3. 5. The greater vulnerability of masculine with a clear identity and behaviours as
Tél.: (514) 844-4491. identity and its repercussions on the ero- homosexual but expresses predominant
tic development and life of men: heterosexual desires and erotic/sexual
- Greater tendency to use more sexua- fantasies.
lity as a defensive manoeuvre ;
- Greater propensity to atypical erotici- Typology of
zation (ex. paraphilia, perversions) ;
- Marked tendency to operate a clea-
Homosexuality
vage between love/lust, especially the Many factors determine the sexual orien-
love object and erotically desired object. tation. From a sexoanalysis perspective,
at the beginning, we strictly put the
KEY WORDS :
• Sexoanalysis Fantasy, emphasis on sexological factors, which
contribute to the development of the
• Sexual health
• Sexual unconscious
dream and reality homosexual orientation. Two important
• Sexual disorders Sexoanalysis involves the study of the variables seemed more prominent than
• Homosexualities interrelations, concordances and discor- others: genderality and the relationship

- VOL.XIII, N°48
21

to the opposite sex. hood. Simply, such a massive homosexual or bisexual orientation will adopt a homo-
We proposed an unusual hypothesis: a imprinting at an early psychosexual deve- sexual lifestyle. They don’t necessarily pre-
disturbed genderality and an excessive lopmental stage causes this homosexual sent themselves with some gender anoma-
fear of the opposite sex creating the pro- orientation. This category should not be lies or disturbances and are not androphobic.
pitious basic ground for the emergence of considered in a diagnostic classification Theses women accept this alternative solu-
homosexuality. or as a clinical syndrome. In other respects, tion as a “refuge” (defence) against their
In sexoanalysis, the new diagnostic clas- the sexoanalytic approach can only offer disillusion about their relationship with men
sification brings up two other significant the relief of the social discrimination. and the abandonment issues. Their disap-
factors that characterize homosexuality: However, sexoanalysis can be a valuable pointment or sense of betrayal will invite
absence of objectal cleavage (splitting) and therapeutic avenue for the three remai- them to invest all their egotism and emotio-
early sexual/erotic imprinting. ning categories, especially if there is a nal or intimate life in women. This form of
For some homosexuals, we noticed a mis- good intrinsic motivation for change. The female homosexuality is diagnosed as the
sing capacity to split the love/lust object. goal of the sexoanalytic treatment is not withdrawn homosexual type.
In other words, it is the capacity to diffe- aimed at converting the sexual orienta- There is no equivalent found in men. When
rentiate between the erotically desired and tion but at reaching a more adapted and the eroticization (narcissistic object) of the
the fusionnal/loved object. From an onto- harmonious sexual life and sense of well- Self originates from childhood, it is seen as
genic perspective, we know this is an being, at consolidating the gender identity an imprinting (ingrained homosexual) that
essential phase and defence mechanism (sense of masculinity or femininity), as well will not allow any heterosexual investments.
during the psychosexual development and as achieving a congruity between ero- The precocious homosexual desires, for
the establishment of a non conflictual gen- tic/sexual desires, fantasies, dreams and boys and girls (around 5 years old) is desti-
der identity. Such a cleavage empowers the actual reality. ned to overcome archaic anxieties, for
the boy to access his erectile power to ero- As homosexuality is less threatening for example, the separation anxiety (defusion
ticize his phallic aggression without risks. the integrity of gender identity in woman, anxiety) or the engulfment anxiety. Penis
This Madonna/antimadona (whore) com- some homosexual content can be more envy is supposedly the activator of such pre-
plex should be considered normal and easily allowed in her erotic/fantasy world. mature homosexual desires in the girls. Here,
healthy. As observed in our clinical and empirical a possible biological etiology as a causing
In adult man, this complex must be resol- researches, bisexual fantasies are often factor cannot be excluded.
ved throughout a series of different inte- found in woman who strongly identified Here is the new sexoanalytic classification of
grations of the psychological representa- with a heterosexual identity. Women with homosexualities for men and women :
tions of the Madonna and the antimadonna a homosexual identity fantasize, more than - Man :
with the loved women and the sexually homosexual men, about heterosexual 1. Gender disturbed or dysphoric homo-
desired one. This process is a criterion of scenes even in their actual conducts. sexual;
what is considered as the sexual maturity. Contrarily to men, bisexuality in hetero- 2. Gynephobic homosexual;
When the boy is unable to achieve such a sexual and homosexual women is clearly 3. Uncleaved (unsplit) homosexual;
cleavage of those representations during more frequent. A woman can be identi- 4. Ingrained homosexual;
adolescence, it creates a blockage of the fied as a homosexual if she defines herself - Woman :
erotic investment of the opposite sex and with a sense of the correspondent identity 1. Gender disturbed or dysphoric homo-
therefore the heterosexuality. This failure and if her desires, erotic/sexual fantasies sexual;
of this important ontogenic stage opens and her behaviour are predominantly or 2. Androphobic homosexual;
the gate to a homosexual orientation. exclusively homosexual. 3. Withdrawn homosexual;
Among homosexuals, some don’t present In the first sexoanalytic classification of 4. Ingrained homosexual.
major indications of gender distur- female homosexuality, we identified two
bances/dysphoria and heterophobia. different types: virile and androphobic NOTES
Nevertheless, the absence of this cleavage homosexuals. We hypothesized that insuf- 1. Continuum about the typology of homo-
demonstrates why they never eroticized a ficient femininity and an excess of mas- sexuality for both sexes.
woman. The erotic investment of the same culine gender orientation, predispose a 2. Genderality is a sexoanalytic concept
sex then becomes the safe outlet. woman to homosexuality. We also empha- associated to the ontogenesis of gender
During the evaluation process, it is not unu- sized the hypothesis of the homosexual identity and sexual orientation identity and
sual to hear an early age of onset (about 5 orientation as the result of a possible its conscious and unconscious related
years old) for the first homosexual sexual excessive fear of man: fear to be des- aspects.
attractions or interests. They often report troyed, contaminated and mortified by a 3. The first neonatal developmental period
vivid memories or experiences at that age. man with his “bad penis”. Those two hypo- wherein infants, despite their biological
Those premature erotic desires create an theses still remained very pertinent until sex, share the mother’s femininity through
imprinting in the psyche and predominate today. Nevertheless, we believe that these the extensive psychosomatic relationship
in the erotic imaginary world of the homo- categories are not taking into consideration they have with her.
sexual men. They don’t necessarily suffer all the spectrum of female homosexuality. 4. The sense of identity as a heterosexual,
of heterophobia and of a disturbance of For this reason, we added two others cate- bisexual or homosexual.
their genderality. For them, a woman has gories: withdrawn homosexual and the
no erotic connotation, not because she imprinted one. We have noticed that fol- Pr Claude Crépault
represents a possible threat or because lowing heartbreaks or repetitive relation- Université du Québec à Montréal,
those men have a poor sense of their man- ship failures, women with a heterosexual Département de Sexologie

- VOL.XIII, N°48

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