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ECOLE POLYTECHNIQUE

FEDERALE DE LAUSANNE

r m a t i q u e
s h info L – C P 121
– CH 1
015 LA
USANN E – TEL. +41
-21 693 2211 – FAX +41-21 693 2220

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AVANT-PROPOS

– Non ! Non ! je ne veux pas d’un éléphant dans un boa...


– Dessine-moi un mouton.
– Le mouton que tu veux est dedans.
– C’est tout à fait comme ça que je le voulais ! Crois-tu qu’il faille
beaucoup d’herbe à ce mouton ?
– Pour voir dans cette figure un cube ; il nous faudrait y
voir d’abord une figure plane, puis y ajouter une impres-
sion de profondeur.

– et l’exacte représentation d’une paire de chaussu-


res, s’appliquera en outre à res- sembler aux pieds
nus qu’elle doit recouvrir.

– la mise à jour, par soustraction, de la statue contenue dans le bloc


de marbre.
– d’abord ne conserver de
la matière que son fan-
tôme...

Un bloc de marbre était si beau


– recoudre avec la réalité. Qu’un Statuaire en fit l’emplette,
«Qu’en fera, dit-il, mon ciseau ?
Sera-t-il dieu, table ou cuvette ?

A. de St-Exupéry Le petit prince L.Wittgenstein Le cahier Bleu et le cahier Brun M.Foucault


Ceci n’est pas une pipe R. Magritte Modèle-rouge Michel-Ange L’esclave des jardins Boboli
IRE Cheval H.Bergson, Matière et mémoire Le Bernin Le rapt de Proserpine De La Fon-
taine Le Statuaire et la statue de Jupiter GA

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TABLE DES MATIÈRES

1 avant-propos par Georges Abou-Jaoudé


3 Editorial par Jacqueline Dousson
La perception du 3D
4 Les enjeux du visible: perspective, piège, passage par René Berger
13 En attendant Le Bernin par Georges Abou-Jaoudé
17 Vision et mesures stéréoscopiques par Otto Kölbl
26 Maquette, panorama et rendering par Ulrich Doepper
30 Mon ordinateur voit double par Jean-François Rolle
Les humains réels et virtuels
41 Serveur WEB d’images parallèles pour le projet Visible Human par Samuel
Vetsch, Vincent Messerli, Oscar Figueiredo, Benoit Gennart, Roger Hersch, Laurent
Bovisi, Ronald Welz & Luc Bidaut
47 Humains Virtuels sur le WEB par Christian Babski, Ronan Boulic
56 Des avatars aux humains virtuels autonomes et perceptifs par Daniel Thalmann
Le paysage
66 Outils de la photogrammétrie pour visualiser des projets par Matthias von Moos
72 colophon
73 Génie rural & environnement: modélisation 3D et animation virtuelle par Jean-
François Monnet
83 Construction de panoramas photographiques à l’aide de plusieurs images par
David Hasler
94 L’institut européen d’étude, de recherche et d’application du paysage alpin
(IDERALPE) par Jacques Monnier-Raball & Michel Bécholey
98 Techniques 3D pour le bureau d’ingénieurs par Mauro Pedretti
La modélisation 3D
103 La modélisation numérique du climat: un outil en pleine évolution par Hervé Le
Treut
109 HAEDB: base de données de l’aérothermodynamique hypersonique par Silvio
Merazzi, Richard Schwane & Jan Vos
versos Flip-book par Georges Abou-Jaoudé
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EDITORIAL

Flatland [1]: un petit jeu d’esprit écrit déjà dépassé son rôle de simple calculatrice
en 1844 par le Docteur Edwin Abbott ; géante est devenu un outil de création de
dans ce monde, des êtres intelligents volumes :
(triangles, polygones, cercles) se meuvent ❚ pour se rapprocher du réel, comme dans
sur une surface plane; ils ne prennent cons- la synthèse de paysages ou d’humains ;
cience de la 3ème dimension que quand ❚ pour l’analyser comme dans le Visible
une sphère traversant leur espace les re- Human ou comme avec l’équipe de re-
pousse au-delà d’un cercle de plus en plus cherche d’IBM qui a reconstitué sur
grand, puis progressivement disparaît. 80 GB une pietà de Michel-Ange dont
Dans ces 150 pages de pré-science-fiction le maître avait cassé des membres afin
l’auteur avait voulu montrer la difficulté de connaître le mystère du geste de l’ar-
de percevoir une dimension nouvelle à tiste [2] et tenter de visualiser l’œuvre
notre univers quotidien et ce thème fut telle qu’elle aurait pu être ;
repris au début du siècle pour aider le pro- ❚ pour simuler des phénomènes comple-
fane à sentir ce qu’était cette 4ème dimen- xes comme la modélisation du climat ou
sion apparue dans les travaux des physi- les phénomènes aérodynamiques.
ciens. Les articles de ce journal traitent de
Notre monde réel n’est pas Flatland, tous ces aspects liant volumes et informa-
il a de la profondeur, du volume, tout tique, et abordent la problématique qui va
comme ce journal que vous tenez entre vos prendre de plus en plus d’ampleur dans
mains et que nous avons voulu particuliè- les années à venir : comment l’ordinateur
rement volumique pour que son épaisseur nous permet de créer un réél différent.
atomique fasse comme un contrepoids à Bonne lecture ! ■
toute cette informatique impondérable.
L’ordinateur, qui a depuis quelques années

[références en page 118] FI - 4


LES ENJEUX DU VISIBLE:
PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE
René Berger, professeur honoraire de l’Université de Lausanne

La Flagellation (1455) – Piero della Francesca – Galerie nationale d’Urbino

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LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

La perspective naît de l’effort conju- espace donné : c’est un espace engendré par
gué d’artistes, d’ingénieurs, de savants, de une construction. [1] Et le sens de cette cons-
géomètres, de mathématiciens souvent réu- truction est de substituer à la conception
nis dans les mêmes personnes : Alberti, religieuse du Moyen Age une conception
Piero della Francesca, Brunelleschi (Léo- humaniste. La symbolique de Dieu fait
nard de Vinci reste le parangon légendaire), place à une symbolique humaine qui tou-
qui appartiennent aux milieux en pleine tes deux constituent leurs propres systè-
effervescence intellectuelle qu’animent les mes.
grands de l’époque, les Sforza à Milan, les
Médicis à Florence, les Montefeltre à Ainsi la construction en 3 dimensions
Urbin, les Gonzague à Mantoue, les Ur- de la perspective établit que :
bain VIII et Léon X à Rome, les Alde
❚ le tableau est constitué par l’intersection
Manuce, les Francesco Colonna à Venise.
La perspective n’est donc pas une in- du cône optique avec un plan vertical,
ce que l’on obtient empiriquement en
vention isolée ; elle est le fruit de rencon-
traçant sur une vitre le contour des ob-
tres et d’échanges qui témoignent de
l’émergence d’une vision nouvelle du jets qu’on perçoit à travers elle ;
monde. Au sens technique, il s’agit de ❚ le tableau se divise ainsi en deux par-
mettre au point un système de projection ties : en haut le ciel, en bas, la terre, l’un
sur un plan bidimensionnel des objets à et l’autre séparés par la ligne d’horizon
trois dimensions ou, pour reprendre les qui est à la hauteur de l’œil du specta-
termes mêmes d’Alberti : Le tableau est une teur ;
intersection plane de la pyramide visuelle. Un
tel dispositif établit et valide le système de ❚ les lignes horizontales des objets paral-
représentation qui fait de l’objet représenté lèles au plan d’intersection restent hori-
l’équivalent de l’objet perçu, ou plutôt zontales ; de même les verticales restent
l’équivalent de l’objet conçu. Ainsi que le verticales. En revanche les lignes qui ne
souligne Erwin Panofsky dans son ouvrage sont pas parallèles au plan d’intersection
intitulé à dessein La Perspective comme se dirigent vers un même point appelé
forme symbolique: L’espace homogène (ce- point de fuite ; d’où leur nom de lignes
lui de la perspective) n’est donc jamais un fuyantes ;

[références en page 118] FI - 6


LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

❚ plus la distance des objets augmente, formations prennent tout leur sens dans
plus ils paraissent petits et indistincts, l’espace cubiste.
et inversement ; leur dimension est ré- A la différence du Moyen Age et des
glée par l’échelle fuyante comme leur civilisations orales qui ont précédé, la pers-
degré de netteté est réglé par l’échelle pective inventée à la Renaissance inaugure
aérienne. avec l’avènement de la troisième dimen-
sion le règne de l’œil et, partant, la pri-
Dès qu’on quitte les idées toutes fai- mauté du visuel. Elle se prolonge pendant
tes, on se rend compte à quel point l’es- quelque quatre siècles, avec de nombreux
pace, en art, mais aussi bien dans notre avatars dont témoignent les expressions
existence quotidienne que dans nos con- artistiques tels que le baroque, le rococo,
ceptions intellectuelles, est chose arbitraire. le romantisme, le néo–clacissisme etc.
Arbitraire ne signifie nullement sans rai- Néanmoins, quels que soient les change-
son, mais qu’il est construit à partir de con- ments, la structure perspective en trois di-
ventions. De même convention ne signifie mensions se maintient. Le dispositif a beau
nullement fantaisiste ou gratuit, mais ce multiplier les transformations, anamor-
qui résulte d’un accord entre plusieurs per- phoses et trompe-l’œil, il reste inféodé à
sonnes, un groupe ou une société tout en- l’ordre du visible que les hommes de la
tière. Tout système implique donc l’adop- Renaissance ont institué au seuil des temps
tion d’un ensemble de règles dont le modernes.
fonctionnement établit la correspondance
entre le système et l’image ou l’idée de la
réalité qu’il construit. En ce sens, on peut PASSION OU IMPATIENCE ?
dire que les formes ont droit à ce terme
dans la mesure où elles sont compatibles Me trompé-je en risquant l’hypothèse
avec le type d’espace choisi alors qu’elles qu’au 19e siècle le prestige de la perspec-
apparaissent comme autant de déforma- tive tend à s’essouffler et que, les inven-
tions dans un espace qui leur est étranger. tions techniques aidant, une certaine im-
Qu’on se rappelle les cris qu’ont soulevés patience naît à son égard ? Me trompé-je
les portraits de Picasso, atteintes sacrilèges en conjecturant que la machine 3D va s’hy-
à la tradition du portrait, alors que ses dé- brider avec un engin qui, fruit de l’opti-

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LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

que et de l’ingéniosité, va permettre d’élar- dotent en effet le visible du mouvement


gir encore notre vue ? Gardons-nous de qui ajoute à la visée réaliste de la représen-
croire à un progrès purement linéaire qui tation. Défilant au rythme de 24 images
ferait de l’appareil photographique le suc- par seconde pour le cinéma et de 25 pour
cesseur désigné du peintre. Plus profon- la télévision, le spectacle reproduit l’action
dément, mais c’est encore conjecture de dans son déroulement même. Le specta-
ma part, je crois que le visible revendiqué teur coïncidant avec l’action par un méca-
par la perspective ne peut plus guère se con- nisme d’hallucination générale et prolon-
tenter de la mise en œuvre purement hu- gée, toutes les fictions sont désormais vraies
maine quand l’automatisation permet d’un et concrètement possibles. Jusqu’à CNN
seul coup de naturaliser l’immensité du qui nous fait croire que les événements du
visible au moyen de la nouvelle technique. monde coïncident avec les informations
On comprend que la photographie dévore que son réseau diffuse 24 heures sur 24.
pays, villes, personnages, scènes témoigna- Le piège omniprésent capture en perma-
ges de tous genres, introduisant pour la nence tout de ce qui est susceptible d’être
première fois, du moins à un tel degré, visibilisé. Cette manière d’arraisonner le
l’étendue séquencée par la somme des ins- réel pour en faire des images-événements
tantanés. Entreprise prodigieuse qui piège en continu marque l’une des limites extrê-
toute la réalité dans les filets du Visible mes de l’instance visuelle, l’horizon au-delà
mécanisé. Entreprise sans limite ? duquel il n’y a vraisemblablement plus rien
à appréhender. La contingence elle-même
devient pré-visible. Elle se débite en caté-
LES RUSES DU MOUVEMENT gories que la technique se borne à rem-
plir : news, sports, business, entertainment.
Non pas tout à fait sans limite puis- Les contenus sont variables, mais les struc-
que l’image en trois dimensions reste sta- tures contractent un formalisme qui, pri-
tique. C’est à cette contrainte que vont s’en vant la communication de l’oxygène que
prendre deux inventions, l’une du 19e siè- constitue l’échange, est menacé d’asphyxie,
cle, le cinéma, l’autre du 20e, la télévision, en tout cas de sclérose.
si importantes qu’elles donnent ensemble
leur marque à notre époque. L’une et l’autre

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LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

DE L’ANALOGIQUE AU NUMÉRIQUE le pas sur la représentation, le calcul sur le


faisceau de lumière. Tout devient possible
Mais voici qu’une invention nouvelle à partir d’une matrice de nombres. L’objet
bouleverse la situation, même si ses effets peut être vu sous tous les angles, dans tou-
ne se font sentir que progressivement et, tes les positions, dans toutes les situations.
comme toujours en pareille occurrence, en Volumes et mouvements, couleurs et éclai-
entraînant préjugés, malentendus et dévia- rages sont affaire d’algorithmes. Le corps
tions. C’est ainsi que l’ordinateur est humain se débite en tranches que l’on peut
d’abord tenu pour un supercalculateur, ce mouvoir, agrandir, déformer en tous sens.
qu’il est d’ailleurs, mais ce à quoi il ne se The Visible Human consacre le triomphe
réduit pas. C’est ainsi que l’ordinateur est du Visible modélisé affecté à notre iden-
bientôt considéré comme un supergestion- tité la plus profonde [3], comme le site de
naire, ce qu’il est, mais ce à quoi il ne se Microsoft qui prodigue ses 108 millions
réduit pas. Ni sa puissance de calcul, ni d’images de la terre à coups de
son aptitude à gérer stocks, actions, mar- teraoctets [4].
chandises, données, jusqu’au mariage, et, Et surgit la question, inouïe jusqu’ici,
pourquoi pas, jusqu’au bonheur (salut inaudible aussi : sommes-nous prêts à nous
compris !) ne suffisent à le définir. C’est à identifier avec l’homme visible, dont les
un changement beaucoup plus radical qu’il détails et les secrets peuvent être multipliés
nous invite. Pour s’en tenir au visuel, qui à l’infini, mais dont la condition est de ne
intéresse plus particulièrement notre pro- pas franchir la limite du visible ? Autre-
pos, c’est l’avènement de l’ordre numéri- ment dit se pose, pour la première fois sans
que à la place de l’ordre optique qui cons- doute, la question de la nature de l’ordre
titue le fait majeur. Mutation qu’Edmond du visible. Et c’est paradoxalement à la
Couchot résume en ces termes : L’image de suite des progrès de l’informatique, en par-
synthèse n’est plus l’empreinte d’une gerbe de ticulier de la simulation, que la question
photons émis par l’0bjet à représenter qui revêt une telle urgence, une telle acuité.
s’inscrit sur un support chimique ou magné- Tout se passe comme si Méphisto, fort
tique, c’est une matrice de nombres calculés d’une technologie sans limite, pouvait
par l’ordinateur à partir d’instructions pro- jouer avec nous en simulant tous les as-
grammées [2]. Dès lors, la simulation prend pects du visible désirable pour nous tra-

[références en page 118] FI - 9


LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

quer dans l’aveu : Verweile doch, du bist so velle par-delà même nos performances
schön, qui signerait notre techno-damna- démiurgiques, simulation, modélisation,
tion. Même clones de Faust, nous ne cé- réalité virtuelle, intelligence et vie
derons pas à la tentation. Une mutation artificielles comprises ?
décisive se prépare. Plus qu’un changement
de paradigme, c’est d’un changement d’or-
dre de réalité qu’il s’agit. LEIBNIZ VS. DESCARTES:
L’AVÈNEMENT DES INTERPLIS

FIN D’UNE ILLUSION ? Puis-je avancer pour finir une hypo-


thèse dont je trouve les prémices chez Des-
On peut en effet se demander si la troi- cartes et Leibniz, deux modèles philoso-
sième dimension amorcée à la Renaissance phiques fondamentaux dont la fortune a
n’est pas en train de s’épuiser, même si elle été très inégale ? Le premier modèle con-
a eu recours à des raffinements aussi sub- siste à croire que la distinction réelle entre
tils que la photographie, le cinéma, la té- parties entraînait la séparabilité...en posant
lévision, l’informatique. Propos étrange, des minima séparables, soit sous la forme
sinon contradictoire. Jamais la production de corps finis, soit à l’infini sous la forme de
d’images n’a été aussi abondante, aussi va- points... [5]. Ainsi la résolution des problè-
riée. Aucune activité qui n’y soit étroite- mes qui se décomposent en difficultés tou-
ment associée. Mais là est peut-être le si- jours plus petites jusqu’à épuisement et re-
gne comminatoire. Se pourrait-il donc sommation selon les règles que Descartes
qu’il y ait autre chose que le spectacle ? L’in- énonce dans le Discours de la méthode
quiétude qu’on perçoit à notre époque et s’établit sur une conception discrète du
dont témoignent tant de pratiques religieu- réel, qui aboutit à l’acceptation d’un Réel
ses ou semi-religieuses marque-t-elle un calculable. A n’en pas douter, c’est de ce
retour ? Ou serait-ce qu’un nouveau type modèle que s’inspire l’espace introduit par
de réalité se mette à émerger ? la perspective de la Renaissance et dans
Se pourrait-il qu’au-delà des dimen- lequel les trois dimensions correspondent
sions qui constituent notre réalité visuelle à l’idée d’une étendue à la fois sommable
depuis des siècles s’amorce une vision nou- et discontinue. A quoi s’oppose le modèle

[références en page 118] FI - 10


LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

Détail du manuscrit
de Gottfried Wilhelm
Leibniz daté du
15 mars 1679 –
Niedersächsischen
Landesbibliothek
Hannover

FI - 11
LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

que Leibniz expose à partir de la métaphore l’architecture japonnaise on trouve un élé-


du pli : La division du continu ne doit pas ment appelé véranda qui court le long du
être considérée comme celle du sable en grains, bord extérieur pour former une sorte de cor-
mais comme celle d’une feuille de papier ou ridor dans toit. Cette véranda est donc à
d’une tunique en plis, de telle façon qu’il l’extérieur de la maison, mais comme si-
puisse y avoir une infinité de plis, les uns plus multanément elle n’est séparée de l’inté-
petits que les autres, sans que le corps se dis- rieur que par une porte de verre, elle est
solve jamais en points ou minima. Contrai- aussi considérée comme faisant partie de
rement au découpage cartésien, la concep- l’intérieur de la maison [6]. L’architecture
tion leibnizienne du pli à l’infini met l’ac- échappe à la structure pour se muer en ré-
cent sur la continuité, non pas indistincte, seau qui nous implique dans sa dynami-
mais modulée à la manière d’ondes dont que. La logique de la perspective, même si
le mouvement intérieur échappe aussi bien elle s’est prêtée à d’innombrables variations
à la rupture qu’à l’indétermination étale. au cours du temps, se heurte finalement à
Ecartant l’objectivation quantitative, elle sa propre limite : au-delà de l’ordre de la
prévient la séparation de l’ob-jet, (jeté de- représentation existent d’autres ordres de
vant, donc séparé) comme elle prévient la réalité.
division du tout en parties discrètes. Le pli
et le repli sont l’interface même du Sujet A l’atome de Descartes, Leibniz subs-
et de l’Objet qui s’enlacent en une spirale titue la monade, unité substantielle origi-
indéfinie, réfractaire aux mesures granu- nale, sans étendue, sans divisibilité, un in-
laires de l’étendue cartésienne. Ce qu’éclai- décomposable dynamique, précise Cassirer.
rent à leur manière d’autres cultures. Ainsi Celle-ci ne se définit pas par elle-même par
la culture japonaise dont le MA est au cœur des propriétés intrinsèques, mais par ses
de toutes les activités, poésie, musique, rapports avec les autres monades. Au sta-
théâtre. Opposant l’architecture euro- tut d’atome se substitue celui de situs, de
péenne qui met l’accent sur les matériaux site, comme si une logique sensible du re-
solides et durs comme la pierre et la brique lationnel animait l’univers divin. Chaque
qui ont été utilisés pour créer la séparation monade sans portes ni fenêtres exprime un
entre l’intérieur et l’extérieur des bâti- point de vue qui s’harmonise aux points
ments…, Akira Miyoshi souligne que dans de vue des autres monades. Sans forcer
[références en page 118]
FI - 12
LES ENJEUX DU VISIBLE: PERSPECTIVE, PIÈGE, PASSAGE

l’analogie avec Leibniz, il me semble que Et Mallarmé d’en fournir l’illustration


notre idée de la réalité, longtemps domi- ultime Je dis: une fleur! et, hors de l’oubli où
née par le modèle cartésien, gagne, avec le ma voix relègue aucun contour, en tant que
développement des réseaux, singulière- quelque chose d’autre que les calices sus,
ment d’Internet, une nature nouvelle, faite musicalement se lève, idée même et suave,
de flux sans cesse en mouvement. A la con- l’absente de tous bouquets. La béance signi-
ception d’un monde soumis au visible, et, fie la limite intrinsèque de toute langue
par-delà les dimensions qui le captait en réduite aux mots de la tribu, la limite in-
objets, s’ouvre le monde du mouvant qui, trinsèque de toute formalisation qui se
toutes dimensions dissoutes, s’articule en prend pour sa propre fin… l’absente que
spirales des plis et des replis des réseaux en la poésie suggère rend plu sensible la pré-
acte. sence que ne le feraient les mots employés
à la décrire, les images à la représenter.■

FI - 13
EN ATTENDANT LE BERNIN
Georges Abou-Jaoudé, EPFL-DA-IRE, Chaire d’’informatique,
e-mail : Georges Abou-Jaoude@epfl.ch

Vous m’avez demandé un article sur la la question de la profondeur et de la troi-


3D, j’ai compris dessine-moi un mouton. sième dimension pour nous amener à l’en-
droit où notre cerveau et l’univers se rejoi-
A chaque fois que j’entends 3D, je gnent [1] et écarte ce qui se rapporte à la
comprends illusion de profondeur ; par réa- recette ou à l’algorithme qui fera illusion.
lité virtuelle, c’est souvent de la stéréosco- Ne faisons pas de même pour l’ins-
pie interactive et de quelques marionnet- tant et regardons de plus près ce simulacre
tes aux ficelles électroniques qu’il s’agit ; de profondeur, que l’on se plaît à appeler
quant au multimédia, j’ai peur de ne pas simulation, pour établir les bases de notre
comprendre, dans la mesure où l’intérêt réflexion.
fondamental de l’espace numérique élec- Pour commencer il s’agit de ne con-
tronique réside en sa capacité à tout ré- server de la matière que son fantôme [2] et
duire à une écriture monomédia. construire dans l’espace numérique élec-
Face à l’informatique, et grâce à elle, tronique, un modèle géométrique. A ce
deviennent encore plus fondamentales à modèle géométrique, disons un cheval,
comprendre les questions de dimension, nous allons attribuer une description de
de virtualité et de notre rapport au monde ; surface, images ou algorithmes, qui vont
en tous cas d’un point de vue régir sa manière de faire illusion de ma-
phénoménologique. tière au contact de la lumière,
Quatre siècles après la Renaissance et algorithmique bien sûr.
trois siècles après Descartes, la profondeur est Une fois décrit, le modèle de surface
toujours neuve, et elle exige qu’on la cherche, et de lumière, qu’il provienne d’un enre-
non pas une fois dans sa vie, mais toute une gistrement au moyen de capteurs simili ou
vie.C’est ainsi que Merleau-Ponti aborde ultra sensoriels, d’une modélisation ou

[références en page 118] FI - 14


EN ATTENDANT LE BERNIN

d’un processus, devient une écriture binaire chaque représentation, va nécessiter un


qui réside en mémoire, une mémoire autre modèle, avant de sortir.
capacitive ou magnétique. Cette mémoire, Pour sortir, il faudra recoudre avec la
à l’image de notre cerveau, sera le lieu uni- réalité [2]. Un programme a récupéré vo-
que qui contiendra tout aussi bien une tre geste à la souris ou le signal d’un cap-
image rétinienne qu’un son ou un texte. teur; ce signal est devenu signe ; un pro-
Se pose alors immédiatement la question cessus devra maintenant passer du signe
du rapport entre matière et mémoire, pour au signal pour gérer l’un ou l’autre robot
établir la relation entre l’objet matériel et qui va donner matérialité au fantôme nu-
son écriture numérique. L’objet numéri- mérique.
que est déjà une représentation du monde A titre d’exemple, et puisque nous dis-
matériel ou idéel et, en tant que représen- cutons de profondeur comme illusion op-
tation, établit avec ses références un rap- tique, prenons la première image, celle de
port similaire à celui qui lie le mot à la l’écran. Pour générer cette image, nous
chose. Ce n’est pas une copie, mais une commençons par un calcul de perspective
transsubstantiation qui porte les traces du à la Renaissance, une simulation de la
moyen qui a permis de la construire et qui camera obscura, et nous utiliserons l’om-
définit sa similitude à la matérialité de l’ob- bre, la lumière, la profondeur de champ et
jet de référence. Le modèle va donc dé- tous les artifices propres à la perspectiva
pendre de cette relation et, pour ce qui artificialis. Toujours à l’écran, et puisque
nous concerne, contrairement à un mo- l’homme n’est pas un cyclope à l’œil fixe,
dèle de vérification de caractéristiques phy- nous allons utiliser deux écrans, ou un seul
siques, le modèle ne devra en tous cas pas en alternant les images pour calculer deux
être une copie de la géométrie construc- images du même modèle. Une image pour
tive pour faire illusion de réalité dans le l’œil droit, une autre pour l’œil gauche, et
visible, au sens étroit du terme. C’est le vous êtes dedans, car ainsi la vision binocu-
geste du peintre qui va extraire, générer l’es- laire et la stéréoscopie vous sont restituées.
sence qui permettra de représenter. Con- Rien de nouveau, dans notre labora-
trairement à l’idée d’une informatique qui toire les outils stéréoscopiques contempo-
permet de rentrer les données sans concept rains cohabitent avec un appareil photo-
de représentation a priori, chaque image, graphique de 1891 et un autre de 1940

[références en page 118] FI - 15


EN ATTENDANT LE BERNIN

qui porte bien son nom, The Realist. Les Si vous êtes déçus, croyant que la techni-
prospectus de Brewster ou de Kodak ven- que n’est pas assez avancée pour faire illu-
daient déjà la stéréo comme réalité vir- sion, je vous invite à faire un petit voyage
tuelle ; est-ce si différent des premiers des- à Rome pour toucher du regard le rapt de
sins de l’homme pour apprivoiser et s’ap- Proserpine du Bernin. Là, ce ne sont ni les
proprier le monde ? contraintes techniques, ni le matériau qui
Notre siècle ajoute l’interactivité à la entravent la sensation de chaleur dans le
stéréoscopie. Plusieurs modèles de capteurs marbre et ces traces légères de la main que
vont suivre vos Le Bernin im-
mouvements à la prime dans la dou-
trace, repérer l’en- ceur des chairs,
droit où vous re- sensuelles au sens
gardez afin de cal- propre du terme.
culer une image Reprenons
pour chaque œil notre modèle nu-
en temps réel, ce mérique du che-
temps de l’illusion val, dont nous al-
de l’instantané. lons modifier les
Une autre façon données pour en
de recoudre avec faire une sculpture
nos sens grâce à et non une image
nos connaissances picturale qui rap-
organoleptiques, à pelle une photo-
l’électronique et à graphie d’une
l’algorithmique. sculpture. La sur-
Pour parfaire l’il- face deviendra le
lusion, je vous in- le rapt de Proserpine – Le Bernin volume qu’elle dé-
vite à regarder limite pour en-
aussi un hologramme dans un laboratoire suite produire les strates nécessaires à une
d’optique tout en lisant l’hologramme de machine organe, un robot de découpe au
Baudrillard dans Simulacre et Simulation. laser et de laminage. Strate après strate,

FI - 16
EN ATTENDANT LE BERNIN

découpées puis laminées, les feuilles de parence/essence par le couple conjonctif


papier deviennent un objet que vous te- apparition/sens, dans une atmosphère ra-
nez au creux de votre main. C’est de nou- dicalement nouvelle depuis Kant [3].
veau un volume, disons un cube, qui con- Sans prétendre débattre de l’effort de
tient la forme du cheval. Vous devrez en- Kant pour distinguer la présentation de la
lever les résidus de matière pour le décou- représentation, nous pouvons aller à la
vrir, un moment magique qui nous rap- quête d’une nouvelle dimension, celle d’un
pelle Michel-Ange, pour qui la caractéris- acte esthétique, proposé par Leibniz
tique essentielle de la sculpture consiste à comme quelque chose à l’image de Dieu mais
la mise à jour, par soustraction (per levare), en plus petit.
de la statue contenue dans le bloc de mar- Une quête qui pourrait commencer
bre. par dessine moi un mouton du Petit Prince
Le mimétisme, sens/senseur, esprit/ ou un morceau de bois qui crie pas si fort à
processus, main/machine-outil, est facile maître Cerise avant de devenir le Pinocchio
à établir. Mais si l’œil est ce qui a été ému de Collodi.
par un certain impact du monde et le resti- Si ces textes ne sont pas pour les gran-
tue au visible par les traces de la main [1], à des personnes, alors l’informatique non plus,
notre chaîne électromécanique manquera car
toujours une dimension, celle de l’émotion. Les enfants n’ont l’âme occupée
De dimension en dimension, il man- que du continuel souci
quera inéluctablement la suivante, celle qui qu’on ne fâche point leur poupée...[4]
sera désir ou frustration. Entre science et ■
art, désir plutôt que frustration, empiri-
que plutôt qu’algorithmique, c’est l’artiste
derrière la machine qui apportera cette di-
mension de l’émotion indépendamment
des prouesses techniques et de la sapience.
C’est en ce sens, même et surtout dans
l’espace numérique électronique, que nous
pouvons commencer un autre débat, celui
de la substitution du couple disjonctif ap-

[références en page 118] FI - 17


VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

Otto Kölbl, EPFL-DGR-Institut de Photogrammétrie


e-mail : Otto.Koelbl@epfl.ch

LA VISION STÉRÉOSCOPIQUE On se rend facilement compte de l’im-


NATURELLE portance de la vision spatiale si l’on regarde
avec un seul œil. Dans ce cas, verser par
L’homme dispose de deux yeux qui lui exemple le contenu d’une bouteille dans
permettent de percevoir son environne- un verre cause des difficultés réelles, sauf
ment de deux points de vue légèrement si l’on se sert de moyens auxiliaires comme
différents. La fusion mentale de ces deux par exemple le recouvrement des objets afin
vues permet d’engendrer une image spa- d’évaluer la distance entre la bouteille et le
tiale de notre environnement, un proces- verre.
sus purement psychologique. La percep- La vision stéréoscopique est une apti-
tion spatiale représente une aptitude typi- tude naturelle chez l’homme et part de ses
que d’un chasseur, d’un carnivore. Par con- sens comme par exemple aussi le sens de
tre, les yeux des herbivores (cheval, bovi- palper qui permet également de reconnaî-
dés), sont déplacés latéralement afin de tre l’environnement de manière spatiale.
permettre un angle de vision beaucoup Cependant, le faible écartement des yeux
plus étendu, ce qui est notamment utile ne permet une vision spatiale que pour
pour détecter des prédateurs arrivant par notre environnement proche à moins
derrière. Dans ce cas-là, le faible recouvre- qu’on essaie d’agrandir cette base de ma-
ment des deux champs de vision ne per- nière artificielle comme pour les jumelles
met guère la perception de la profondeur. ou les télescopes d’artillerie.

FI - 18
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

fig. 1: position des yeux des herbivores (latérale avec champ de vision de 360°) et des carnivores
(sur le front, avec écartement pour permettre la vision stéréoscopique)

VISION STÉRÉOSCOPIQUE différents (dessins ou prises de vues pho-


ARTIFICIELLE tographiques de différents points de vue).
L’octaèdre de la fig. 3 a été dessiné en pers-
Une autre possibilité de voir stéréos- pective correcte à partir 2 points de vue
copiquement consiste à présenter aux deux différents et peut être observé stéréoscopi-
yeux deux images prises de 2 points de vue quement. Cependant, il faut veiller à ce

FI - 19
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

que l’image gauche ne soit vue que de l’œil ou auxiliaire optique afin de focaliser la
gauche et l’image droite que de l’œil droit. vision vers l’infini et déplacement laté-
Comme les deux figures sont espacées ral des images (stéréoscope).
d’une distance correspondant à la base des D’autre part, il convient de respecter
yeux, il est important de les observer avec les conditions suivantes :
les axes oculaires parallèles (!) et évidem- ❚ Une éventuelle différence d’échelle en-
ment d’une distance assez courte, environ tre les deux images ne devrait pas dépas-
25 cm. Du point de vue physiologique, la ser 10%.
convergence des axes oculaires est cepen- ❚ La parallaxe dans la direction de la base
dant rigoureusement liée à la distance de des yeux (différence géométrique des
focalisation et contrer ce réflexe exige un images) ne devrait pas être trop élevée.
certain effort. Le moyen le plus simple de
voir cette figure en relief est de séparer les
deux images en mettant la main entre les
deux yeux et de décontracter les yeux afin
d’arriver à un parallélisme des axes oculai-
res (cf. fig. 2).
On peut ainsi définir quelques condi-
tions pour la vision stéréoscopique artifi-
cielle :
❚ Séparation des images homologues afin
que chaque œil ne puisse observer
qu’une des deux images (par séparation
physique des images, par des couleurs
selon le principe de l’anaglyphe ou par
polarisation)
❚ Arrangement des images afin que la dis-
tance de focalisation et la convergence fig. 2: précaution pour séparer les champs de
des yeux correspondent : superposition vue avec la main, afin de faciliter la vision
des images selon le principe de l’anagly- stéréoscopique de l’octaèdre ci-dessous
phe ou selon le principe de polarisation (cf. fig. 3)

FI - 20
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

Pour des objets étendus, on devrait res- de couleurs ou leur apparence; il est pos-
pecter un rapport base/distance de 1/5 sible de fusionner deux images teintées
à 1/20. Il s’agit là de la relation entre la l’une en rouge et l’autre en vert (anagly-
base des prises de vue (distance entre les phe), mais il n’est pas possible de fusion-
deux positions de la caméra) et la dis- ner un négatif et un positif. De la même
tance des caméras à l’objet. manière, il est difficile de fusionner une
❚ Les parallaxes perpendiculaires à la base image d’hiver avec une image d’été.
des yeux devraient être faibles, l’œil to- Le stéréoscope représente le dispositif
lérant difficilement de telles déviations optimal pour l’observation d’images pho-
(effet de strabisme). tographiques (cf. fig. 4). Au moyen de deux
❚ Les deux images devraient être sembla- systèmes optiques, on regarde les deux ima-
bles en ce qui concerne la reproduction ges en veillant que les yeux soient focalisés

fig. 3: dessins d’un octaèdre en perspective montrant deux vues différentes permettant une
observation stéréoscopique

FI - 21
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

fig. 4: stéréoscope à miroirs permettant la vision de deux images photographiques jusqu’à la


dimension 23 x 23 cm (format standard des photographies aériennes). Le système optique permet
d’agrandir les images en focalisant à l’infini ; il offre des conditions optimales pour la vision
stéréoscopique des photos: bonne qualité optique, séparation complète des deux images partielles,
bon confort pour l’observateur après une brève adaptation

à l’infini. La base des yeux peut être agran- d’un agrandissement de 3 fois. Il est en-
die par des prismes ou des miroirs afin de tendu que des images peuvent aussi être
permettre aussi l’observation d’images de affichées sur un moniteur stéréo ; cepen-
grand format. De bonnes images transpa- dant, il faut dans ce cas-là compter avec
rentes supportent un agrandissement op- une certaine réduction de qualité et il faut
tique jusqu’à 20 fois. D’autre part, un bon surtout veiller à une large séparation opti-
stéréoscope offre un champ de vision par que des deux images homologues.
exemple jusqu’à 7 cm et même plus lors

FI - 22
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

fig. 5: l’ordinateur analogique du restituteur photogrammétrique Kern PG2 (construit en 1960 à


environ 1000 exemplaires) permettant de suivre des lignes en stéréo sur deux photos homologues à
l’aide d’une marque-repère et de dessiner ces lignes géométriquement correctes pour l’élaboration
d’une carte topographique. La complexité résulte de la nécessité de corriger, outre les déformations
perspectives, d’éventuelles inclinaisons des photos

FI - 23
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

MESURES STÉRÉOSCOPIQUES grande expérience en mécanique de haute


D’OBJETS précision, a su conquérir une position do-
minante au niveau mondial dans la cons-
La reconstruction spatiale d’un objet truction de ces instruments photogrammé-
tridimensionnel à l’aide de deux prises de triques.
vues photographiques permet aussi de
prendre des précautions pour effectuer des Dans les années 70, on a commencé à
mesures. En principe, il suffit d’introduire remplacer les ordinateurs analogiques par
dans les images photographiques une mar- des composantes digitales mais on a con-
que de référence (marque-repère) et d’ob- tinué à mesurer sur l’image originale, c’est-
tenir coïncidence entre ce point artificiel à-dire que seule l’opération de l’intersec-
et le point de l’objet à mesurer. Si les coor- tion était effectuée par ordinateur, en pre-
données de trois points dans l’espace-ob- nant en considération l’inclinaison des
jet sont connues, on peut d’abord déter- images et leur distorsion. Ce n’est que dans
miner la position spatiale, y inclus les an- les années 90 que les ordinateurs ont at-
gles d’orientation des prises de vues, à l’aide teint une performance suffisante permet-
d’un simple relèvement ; par la suite, on tant d’afficher les images stéréoscopiques
peut déterminer par intersection les coor- sur un moniteur et de réaliser des restitu-
données 3D des différents points de l’ob- tions photogrammétriques (cf. fig. 6 et 7).
jet.
En photogrammétrie, on utilise déjà La transition vers le traitement numé-
depuis le début du siècle des instruments rique des images a permis aussi l’automa-
permettant une restitution par lignes des tisation des diverses opérations de mesure,
images photographiques. La première gé- comme par exemple la combinaison de
nération d’instruments a résolu l’intersec- plusieurs images en un bloc qui, par la
tion à l’aide de tiges mécaniques (cf. fig. 5); suite, peut être orienté de manière uni-
l’application principale était surtout l’éta- forme par rapport à des points de référence
blissement de cartes topographiques à par- terrestres. On a aussi commencé à auto-
tir de photographies aériennes ; venait en- matiser les mesures des distances d’objets
suite l’élaboration de plans de façades pour à l’aide de la corrélation d’images ou de la
l’architecture. L’industrie suisse, avec sa reconnaissance automatique d’objets.

FI - 24
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

fig. 6: restituteur digital


d’Intergraph (Etats-Unis)
pour la production de
cartes numériques à partir
de photographies en stéréo
visualisées sur écran
d’ordinateur

fig. 7: principe de la
séparation des images avec
les Liquid crystal eye
shutters, un système actif
synchronisant les lunettes
par un faisceau lumineux

FI - 25
VISION ET MESURES STÉRÉOSCOPIQUES

APPLICATIONS ET PRÉCISION PERSPECTIVES

Comme on l’a déjà laissé entendre, un Les progrès en traitement numérique


large domaine de la photogrammétrie est d’image ouvrent aussi de nombreuses nou-
consacré à la restitution topographique et velles possibilités pour la saisie d’objets et
à l’élaboration de cartes à différentes échel- leur représentation, notamment grâce à la
les ainsi qu’à l’acquisition de données de réalité virtuelle. Dans ce cas, on modélise
base pour diverses tâches de planification. d’abord le paysage et l’on remplit les sur-
D’autre part, la photogrammétrie est uti- faces avec des textures appropriées. Par la
lisée pour la surveillance de l’environne- suite, on peut créer un fly through. De tel-
ment, jusqu’à la mesure de l’épaisseur de les séquences vidéo sont utiles pour étu-
neige sur les pentes d’avalanches. dier par exemple l’impact sur l’environne-
ment de nouvelles constructions ou de
D’autres domaines d’activité impor- nouvelles voies de circulation mais aussi
tants sont représentés par la robotique, les pour l’analyse de la sécurité routière. Des
mesures industrielles et la médecine. Dans films impressionnants peuvent être obte-
ces domaines, la photogrammétrie se nus par combinaison de séquences vidéo
trouve en concurrence avec les mesures d’objets existants avec des objets en plani-
géodésiques, les mesures de distance par fication.
laser ou aussi les procédés de moiré. De grandes nouveautés peuvent aussi
être obtenues par l’utilisation de camésco-
En photogrammétrie aérienne, on uti- pes numériques et de vidéos numériques
lise des caméras grand format de pour la saisie de l’objet et en particulier en
23 x 23 cm avec lesquelles on obtient des combinant divers capteurs comme des
précisions de 3 à 10 µm (1 µm = 0,001 mm). scanneurs lasers avec des systèmes d’enre-
Cela signifie qu’avec des vues prises d’une gistrement d’image. ■
altitude de 1000 m sur sol on obtient une
précision au sol de ± 5 cm en planimétrie
et de ± 10 cm en altimétrie (environ
1 :10’000 de l’altitude de vol).

FI - 26
MAQUETTE, PANORAMA ET RENDERING

Ulrich Doepper, EPFL-DA-IRE, Chaire d’informatique,


e-mail : Ulrich.Doepper@epfl.ch

La 3D passionne l’architecte, mais Ainsi, un exercice dont l’ordinateur se


celui-ci continue à s’exprimer de préfé- charge très bien, c’est celui, routinier, du
rence au moyen de dessins en deux di- photomontage, imposé par l’organisateur
mensions. L’objet en 3D est une maquette d’un concours qui veut pouvoir comparer
numérique. Elle représente une sorte de différents travaux, ou par l’autorité sou-
matière brute, dont on pense pouvoir ti- cieuse d’évaluer l’impact d’une opération
rer les différentes représentations du pro- immobilière. L’ordinateur est un outil de
jet, mais selon un mode qui n’est pas en- vérification.
core résolu de manière acceptable. ❚ L’ordinateur est magique. Ce qui s’y
passe est mystérieux, le résultat échappe
Les architectes se sont intéressés à l’in- aux explications. La cotation des plans
formatique sur le tard. Dans leurs rangs se est automatique, l’orthographe vérifiée
trouvent, à côté du dernier carré d’irréduc- sans savoir lire. Le dessinateur rentre le
tibles, indifférents, sceptiques et hostiles, projet dans la machine, et celle-ci sort
de nombreux enthousiastes, parfois victi- les plans.
mes de divers préjugés qui concernent l’in- Les plans : tout est dit. Un plan est
formatique. plat, 2D. Vitruve distinguait trois modes
❚ L’ordinateur est objectif ; il ne ment pas. de représentation de l’architecture. L’ichno-
La rigueur du Nombre permet à son graphia, c’est-à-dire le plan, l’orthographia,
usager de rester honnête. Il le soustrait à le rabattement de l’élévation, et la
la possibilité de tricher, puisque ce qui scaenographia qui est la représentation de
passe par lui, étant scientifique, est tout l’objet architectural depuis un point de vue
à fait reproductible, donc vérifiable. déterminé. La stéréographie, comme on

FI - 27
MAQUETTE, PANORAMA ET RENDERING

appelle l’écriture des solides, est précisé- ture d’une maquette en font un outil de
ment leur représentation, leur projection communication et de séduction, de pro-
orthogonale sur un plan, elle ne se conçoit pagande et de vulgarisation ; sa nature vo-
qu’ainsi. lumique permet l’étude d’aspects du pro-
L’écriture est codifiée, régie par une jet que les plans ne montrent pas. Michel-
grammaire et s’appuyant sur un vocabu- Ange expose au pape son projet de Saint-
laire reconnu de tous. La géométrie, la Pierre sous forme de maquette ; Masséna,
matérialité, la spatialité du projet d’archi- craignant de devoir livrer bataille en pleine
tecture sont représentées au moyen de co- montagne pour empêcher la jonction de
des graphiques soigneusement contrôlés et l’ennemi, confectionne, afin de s’y prépa-
diffusés par les écoles, les traités, la prati- rer, un plan-relief du massif du Susten.
que professionnelle. Le concept précède Alberti a défini ce double aspect de la ma-
son expression, on le tient avant de passer quette. Le bâtiment est défini par la linea-
à l’acte. Le dessin est l’expression du des- menta, qui est quelque chose comme la
sein. définition, au sens premier de délimitation
C’est à ce titre que la 3D représente géométrique de l’espace occupé par la ma-
une révolution, un chambardement véri- tière, la définition stéréométrique de
table des conventions en matière de repré- l’édifice [1]. Elle permet d’appréhender
sentation. Entendons-nous : la moindre l’objet dans sa plastique totale, et surtout,
qualité de l’architecte n’est pas de voir dans elle constitue un outil de projet et non une
l’espace ; tout est tridimensionnel, et si la fin en soi, comme l’aurait été une sorte de
représentation du projet ne l’est pas, le but modèle réduit du chantier. L’exhortation
ultime de son travail, le chantier, l’est à d’Alberti, de ne pas céder à la tentation
nouveau. d’une maquette trop détaillée, trop belle,
La représentation volumique d’objets dont la raison d’être n’est que de séduire,
architecturaux ne date bien sûr pas de l’ère illustre à l’envi une préoccupation qui est
informatique. Le modèle réduit, la ma- évidemment la nôtre aujourd’hui.
quette, existent depuis la nuit des temps Si la maquette de Saint-Pierre était
comme objets symboliques, et leur usage accessible à l’intérieur, elle ne parvenait
reçut les bases théoriques à la Renaissance. cependant pas à tromper l’observateur et
La haute intelligibilité, la simplicité de lec- faire croire qu’il pût se trouver dans la vraie

[références en page 118] FI - 28


MAQUETTE, PANORAMA ET RENDERING

Roger de Piles. Illustration du principe de clair-obscur sur des cercles plats. Tiré de: Cours de
peinture par principes, 1708

église. Mais le principe d’immersion dans sur le point de mourir, à l’exemple du sau-
un espace suggéré n’a pas tardé à se déve- vetage in extremis du panorama des
lopper. Le XIXe siècle notamment a connu Bourbakis de Lucerne) trouve son prolon-
l’essor d’un type architectural populaire, gement dans le développement de la vi-
de masse, le panorama [2]. Une iconogra- sion stéréoscopique, panoramique et inte-
phie touristique, historique, naturaliste et ractive d’aujourd’hui.
patriotique permettait de visiter des lieux Le produit 3D pour architecte prévoit
inaccessibles ou de revivre des événements évidemment la finalité du travail de celui-
passés. Ce principe illusionniste (qui fut ci. Quelle que soit la philosophie du logi-

[références en page 118] FI - 29


MAQUETTE, PANORAMA ET RENDERING

ciel, le résultat sera bi-dimensionnel. Que sion. Trente ans après avoir été démasquée,
l’on raisonne en volumes, solides, primiti- la pratique Beaux-Arts du rendu –pour le
ves formées de boîtes ou de groupements moins suspecte, refus d’une représentation
de surfaces, les éléments doivent être qua- objective de l’objet, tromperie par la sé-
lifiés, posséder une matérialité, leurs rap- duction – cette logique du beau dessin
ports respectifs doivent être définis : ils at- nous revient (les deux événements sont
tendent d’être coupés et projetés. C’est une contemporains) par l’obsession photoréa-
logique d’aspic, une logique de Visible liste de l’image de synthèse. En 1968, Ar-
Human Project. L’objet est. Il préexiste à thur Appel avait déjà formulé l’essentiel de
sa représentation, et le problème de celle- ce qui est nécessaire pour définir le
ci reste entier. rendering d’un solide, et l’ouvrage n’a pas
L’infographie 3D raisonne toujours quitté le métier depuis.
dans les trois catégories de l’antique Vi- La course au réel et à l’hallucination
truve. La scaenographia d’une cuisine réaliste est sans issue car, quand l’objet est
IKEA, réalisée à l’écran en temps réel sur la exactement semblable à un autre, il ne l’est
base de votre croquis et de votre budget, pas exactement, il l’est un peu plus. (…) Ce
prétend – et là est la naïveté de notre épo- qui est exact est déjà trop exact, seul est exact
que – à l’objectivité. Dès qu’elle fut décou- ce qui s’approche de la vérité sans y préten-
verte et théorisée par un Brunelleschi, la dre [3]. L’image de synthèse qui tend vers
loi de la perspective ne fut plus bonne qu’à le réalisme – le photoréalisme – est con-
être enfreinte, nuancée. On dut d’emblée damnée à être hyperréaliste.
reconnaître que la perspective constitue Ce n’est pas une fatalité : on a dit que
toujours une réduction de la réalité. Dès Manet ne savait pas peindre un centimètre
la découverte de la photographie, le débat de peau (…) on oubliait seulement qu’avant
autour de son statut d’art témoigne aussi de vouloir (…) peindre la chair, il voulait
de la relativité de cette notion objectivité, peindre des tableaux [4].■
de l’innocence du doigt qui a actionné l’ob-
turateur.
Le concept même de rendering engage
l’artiste qui restitue, reproduit, représente :
le rendu est avant tout celui d’une impres-

[références en page 118] FI - 30


MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE
Jean-François Rolle, EPFL-GR-IGEO-Photogrammétrie
www.wiesmann-rolle.com, rolle@wiesmann-rolle.com

AVANT PROPOS aux relevés des formes et des dimensions d’ob-


jets très divers, est par définition concernée
Par un phénomène de mode remar- par l’application de ces techniques, au
quablement orchestré, le consommateur de même titre que des branches telles que
matériel informatique voit son vocabulaire l’imagerie spatiale, les systèmes d’informa-
technique irrémédiablement s’étoffer. tion géographique, la DAO et CAO, la
Tout, du moniteur à son jeu préféré, sans robotique, l’imagerie médicale et les tech-
oublier les composantes principales de son niques d’animation, de visualisation et de
système, se voit décrit et spécifié en ter- modélisation 3D.
mes plus ou moins neutres ou racoleurs
tels que : tridimensionnel, stéréo-compa-
tible, 3D ou Virtual Reality (VR). UN PEU D’HISTOIRE [1]
A la base de ce phénomène, on re-
trouve le principe de la vision stéréosco- Recréer la perception visuelle de la
pique, établi il y a plus de 150 ans déjà. Il profondeur a été le souci de chercheurs dès
nous a semblé important de profiter de l’apparition des premiers postes de télévi-
cette édition spéciale du Flash Informati- sion. Des pionniers essayèrent de visuali-
que pour dresser un historique et une liste ser des images stéréoscopiques sur ce nou-
des solutions techniques retenues pour af- veau média dès la fin des années 40.
ficher sur un écran d’ordinateur plat, l’il- Il semble que la première application
lusion de la perception de la profondeur. commercialisée soit apparue en 1950 ; elle
La photogrammétrie, application de la consistait en un système de deux écrans
stéréophotographie aux levés topographiques, conçu sur le principe des anaglyphes

[références en page 119] FI - 31


MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

(Dumont’s dual CRT system de Logie yeux duquel on a collé des prismes, man-
Baird). A la même époque apparaissent des que sa proie pour une distance correspon-
systèmes d’affichage d’images côte à dant exactement à la distance théorique
côte devant être observées au travers de sté- calculée.
réoscopes binoculaires. Leur inventeur, L’acuité visuelle de l’être humain s’est
James Butterfield, fut également le premier dégénérée génétiquement et il est fréquent
à utiliser des verres polarisés pour obser- de constater la perte de la perception sté-
ver des anaglyphes créés en plaçant des po- réo. La grande majorité possède une bonne
lariseurs dichroïques sur la face du CRT perception, mais des tests mettent en évi-
(cathode ray tube). Cette technique, en dence de grandes disparités. La vision sté-
premier lieu appliquée grâce à la combi- réoscopique, phénomène psychique, peut
naison de deux écrans, évolua vers l’utili- être exercée. On constate alors de rapides
sation d’un seul écran en combinaison avec progrès sous la forme d’une fusion plus
des images stéréoscopiques imbriquées rapide et d’un plus grand confort de vi-
(interdigitated). sion.
Finalement, Shmakov développa les Il apparaît qu’environ 12% des indi-
bases théoriques des techniques Field vidus sont incapables de percevoir un
sequential. Pour des raisons techniques modèle stéréo [1]. Il s’agit d’un manque
(écrans plats en particulier), le premier de coordination dans le travail des yeux,
produit de ce type n’apparut qu’au début c’est-à-dire une vision binoculaire dé-
des années 80. faillante (strabisme, amblyopie…). Au
contraire, 10% des êtres humains présen-
tent des facultés exceptionnelles pour la
LA VISION STÉRÉOSCOPIQUE vision stéréo. Ces facultés, fusion rapide,
prolongée et confortable d’images, leur
GENÈSE permettent de percevoir des scènes qui res-
La vision stéréoscopique s’est dévelop- teraient très inconfortables, voire impos-
pée chez les invertébrés, il y a plusieurs sibles, pour un individu moyen. Des phé-
centaines de millions d’années, pour des nomènes de variation dus à l’âge doivent
raisons de survie. Des démonstrations ré- encore être pris en considération.
centes ont montré qu’un insecte, sur les

[références en page 119] FI - 32


MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

DÉFINITION DE LA PERCEPTION BINOCULAIRE tance, nommée parallaxe, produit la sen-


DE LA PROFONDEUR sation de profondeur stéréoscopique.

Les conditions de la vision stéréosco-


pique (fig.1) sont successivement :
❚ une bonne vision binoculaire, les deux
yeux fonctionnent en équipe, sans à-
coup, précisément et simultanément ;
❚ la vision stéréoscopique, le cerveau fu-
sionne les deux images reçues en une
seule image tridimensionnelle ;
❚ la perception binoculaire de la profon-
deur, résultat des étapes précédentes, est
la faculté de percevoir visuellement l’es-
pace tridimensionnel.

PERCEPTION MONOCULAIRE DE LA
PROFONDEUR
La perception de la profondeur est
avant tout le fait de notre anatomie. Mais
fig. 1: principe de la vision stéréoscopique il serait faux de ne considérer que ce seul
élément. Un seul œil reçoit différents sti-
Lorsque nous regardons un objet de- muli qui lui permettent d’interpréter la
vant nous, nous le voyons naturellement profondeur d’une scène. Une personne ne
en volume car les pupilles de nos yeux (es- bénéficiant pas de la vision stéréoscopique
pacées en moyenne de 64 mm) perçoivent développe des processus cognitifs d’inter-
deux points de vue à peine différents de prétation de ces différents stimuli. Cette
l’objet. Le cerveau combine ces deux ima- interprétation lui permet d’évoluer tant
ges en une seule. Le même point, repéré bien que mal dans l’univers 3D nous en-
sur l’image de gauche, subit un léger dé- tourant. Les éléments de la perception
placement sur l’image de droite. Cette dis- monoculaire sont :

FI - 33
MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

lumière et ombrage La texture, étant plus apparente au pre-


mier plan, provoque un sentiment de
profondeur ;

interposition
Un objet en cachant partiellement un
autre est automatiquement interprété
comme étant devant ;
Une ombre permet de donner un vo-
lume à l’objet et les surfaces claires sem-
blent plus proches que les foncées ;

taille relative

parallaxe du mouvement
Dans une voiture en mouvement, les po-
teaux téléphoniques se déplacent plus ra-
pidement que les collines éloignées ;
Les objets apparaissent plus grands lors-
qu’il sont près et la mémoire permet de perspective
juger de la distance vers des objets fami-
liers ;

gradient de texture

Ce stimuli est très important car il per-


met de donner un facteur d’échelle à la
perception binoculaire de la profondeur ;

FI - 34
MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

la perspective est la relation entre le pre- mesurée sur le couple d’images, se trans-
mier plan et l’arrière plan ; forme sur la rétine en une disparité qui
produit le sentiment de profondeur. La
depth cuing parallaxe peut également être exprimée
sous forme angulaire en tenant compte de
la distance à l’observateur. L’appareil opti-
que permettant de visualiser un couple
d’images stéréophotographiques se nomme
stéréoscope.

TRANSPOSITION NUMÉRIQUE
Le principe énoncé ci-dessus ne peut
Réduction de l’intensité d’un objet en se reproduire sur le moniteur d’un ordi-
fonction de la distance à l’observateur. nateur que par l’émission simultanée de
deux images, l’une à destination de l’œil
Des images présentant de nombreux gauche et l’autre de l’œil droit. De manière
éléments de perception monoculaire de la générale, en émettant en alternance les
profondeur, seront d’autant plus faciles à deux images (pour autant que le balayage
interpréter en vision stéréoscopique. soit suffisamment élevé: >60Hz), il est pos-
sible de tromper notre cerveau en profitant
de notre aptitude visuelle relativement li-
VISUALISATION DES IMAGES mitée. Pour être capable de recevoir cor-
STÉRÉOSCOPIQUES rectement cette information sur la paral-
laxe, l’observateur doit encore être muni
LA MÉTHODE ANALOGIQUE d’un obturateur (shutter), synchronisé de
Reproduire la perception de la pro- manière à cacher l’image non désirée et/
fondeur est possible en forçant l’œil gau- ou au contraire permettre la visualisation
che à regarder une image et l’œil droit une de la bonne image par le bon œil.
autre, tout en prenant garde que ces deux Visualiser un couple d’images
images montrent des parallaxes sur les stéréoscopiques est également possible en
points de l’image. La parallaxe, distance projetant l’information de parallaxe non

FI - 35
MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

plus sur un seul écran, mais sur deux. Ce Il faut que le balayage vidéo soit relative-
principe est appliqué pour les casques de ment élevé (>100 Hz) pour reproduire de
réalité virtuelle (HMD, Head Mounted bonnes conditions d’observation.
Display). Ce périphérique se compose de L’observateur doit être muni de lunet-
deux petits moniteurs LCD montés en face tes pour interpréter correctement le signal
des yeux. Chaque œil reçoit l’information émis par l’écran. On distingue deux tech-
nécessaire à la fusion des deux images, ce niques différentes, le mode actif et le mode
qui permet l’interprétation de la profondeur. passif. En mode actif, les lunettes se com-
posent d’un obturateur à cristaux liquides
LES TYPES DE FORMATS [2, 3] commandé par un signal infrarouge de
Par définition, un format electro-sté- synchronisation avec l’affichage alterné du
réoscopique est la méthode utilisée pour moniteur. Dans le cas du système passif,
définir l’appartenance des pixels à l’image on applique à la surface du moniteur un
de gauche ou droite, pour que le couple modulateur à cristaux liquides (obturateur
stéréo affiché à l’écran apparaisse aux yeux segmenté de Byatt). Il suffit à l’observa-
de l’observateur selon le principe du sté- teur de se munir de lunettes à verres pola-
réoscope binoculaire. risants (directions de polarisation différen-
On dénombre un certain nombre de so- tes de 90°) pour recevoir correctement l’in-
lutions différentes, mais seules les plus cou- formation.
rantes sont décrites ici. Il n’est pas fait cas
de systèmes tels que les anaglyphes ou l’uti-
lisation de stéréoscopes à miroirs.

Field sequential
Cet affichage encode l’image de droite
puis celle de gauche en alternance dans les
champs successifs de l’affichage vidéo. Ce
multiplexage temporel a pour avantage de
ne demander que très peu de modification
du matériel ; ce dernier argument est à la
base du succès commercial de ce format. système passif (Z-Screen de StereoGraphics Corp.)

[références en page 119] FI - 36


MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

On retrouve sur de nombreuses sta- niteur pour entrelacer les deux images sur
tions de travail graphiques (SGI, Sun, les lignes paires et impaires. Cette méthode
DEC, IBM et HP) une prise jack permet- permet d’utiliser des périphériques d’affi-
tant de connecter l’émetteur contrôlant le chage traditionnels tels que téléviseur ou
signal vidéo et produisant le signal IR. écran d’ordinateur. D’autre part, l’équipe-
ment de multiplexage est simple et bon
marché.

Above-and-Below

système actif (CristalEyes de StereoGraphics


Corp.)
Interlaced stereo

Ce format a été conçu pour permet-


tre la visualisation stéréo sur des équipe-
ments standards (moniteur PC, télévision
ou vidéo). A chaque rafraîchissement de
l’écran, le champ se compose des deux
images disposées l’une sous l’autre, com-
pressées d’un facteur deux dans le sens de
la hauteur.
A un taux de rafraîchissement de
60 Hz, il faut exactement 1/120 de se-
Ce format utilise le balayage du mo- conde pour afficher une image. En utili-

FI - 37
MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

sant un moniteur travaillant avec une fré- gnes n’est alors plus un problème. Sur une
quence de 120 Hz, les deux images juxta- vidéo, le rafraîchissement n’étant que de
posées spatialement deviennent alors jux- 30 Hz, il est nécessaire de diffuser les ima-
taposées temporellement. En portant les ges deux fois plus rapidement qu’elles n’ont
lunettes obturatrices adéquates, l’observa- été saisies.
teur reçoit à chaque seconde 60 champs
d’une image et 60 champs de l’autre.
Quand un œil voit une image, l’autre n’en
voit pas et vice versa.
Cette méthode est encore appliquée
pour les ordinateurs (PC), mais a disparu
pour la vidéo. La vision est confortable
pour peu que les images soient de résolu-
tion suffisante (au minimum 300 à 350
lignes par champ). Dans le cas de la vidéo,
le nombre de ligne est insuffisant (480 di-
visé par 2).
Pour les PC (et les cartes graphiques White-Line-Code WLC
travaillant à des taux de rafraîchissement Ce format offre une solution bon
de l’ordre de 60 Hz), il est nécessaire d’uti- marché pour les PC. Il permet de se sous-
liser un émetteur (synch doubling emitter) traire au taux de rafraîchissement pour jux-
dont le but est de créer un signal vidéo taposer temporellement les images. Une
propre en ajoutant les pulsations de syn- ligne blanche est affichée au bas de cha-
chronisation manquantes (vertical cun des champs, l’interprétation par les
blanking). lunettes de cette ligne permet de savoir si
ce champ est destiné à l’œil gauche ou
Side-by-Side droit.
Ce format résout le problème décrit Cette méthode, par sa simplicité et son
précédemment appliqué à la vidéo. En af- prix, est particulièrement adaptée pour le
fichant les images non plus l’une sous développement de jeux.
l’autre mais côte à côte, le nombre de li-

FI - 38
MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

passives (verres polarisants). Celles-ci ont


l’aspect d’une paire de lunettes de soleil
traditionnelle.
Dans les deux cas, ces lunettes permet-
tent une vision normale de l’environne-
ment en dehors du champ de l’écran. Ce
n’est pas tout à fait le cas avec un système
simple comme les anaglyphes (lunettes
avec filtres de couleur différents).

LES PROBLÈMES
Différents problèmes connus peuvent
être une source d’entrave à une bonne vi-
sion stéréoscopique en application avec les
formats décrits ci-dessus.

Flicker
Le flicker, ou scintillation, est le pro-
WLC blème le plus contraignant pour une ob-
servation agréable en vision stéréoscopique.
LES LUNETTES (SHUTTERS) Les images reçues donnent l’impression de
L’observateur est contraint de porter scintiller ou de trembloter.
des lunettes dont la fonction est de sépa- Ce problème, qui peut varier en fonc-
rer les signaux reçus de l’écran vers chacun tion principalement de la brillance et de la
des yeux. taille de l’écran, est fréquemment rencon-
En mode actif, les lunettes reçoivent tré sur des systèmes ayant une fréquence
leurs ordres d’ouverture et d’obturation par de balayage faible (60 Hz).
un signal infrarouge qui doit être émis à Il faut distinguer deux types de scin-
proximité de l’écran. Cet équipement est tillation, due soit à l’illumination ambiante
moins agréable à porter que les lunettes (room flicker) soit à l’affichage proprement

FI - 39
MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

dit (image flicker). On peut atténuer les L’image de droite est censée disparaître
effet de la première en réduisant l’illumi- pour permettre l’affichage du champ sui-
nation du local. Pour la deuxième, il faut vant. Dans les faits, elle ne s’estompe pas
intervenir au niveau des réglages de l’affi- complètement et persiste, c’est particuliè-
chage vidéo en contrôlant les fonctions de rement vrai dans le cas du phosphore vert.
brillance et de contraste de l’écran. Son Cette rémanence provoque en mode sté-
élimination complète est réalisable en uti- réo un effet de ghosting. Il peut être mis en
lisant des fréquences supérieures (120 Hz). évidence en utilisant des images avec de
très grandes valeurs de parallaxes ou alors
Illumination asymétrique très contrastées.
Des différences dans l’illumination des
images stéréo transmises à l’observateur Absorption du signal
augmentent l’effet de flicker. Ce phénomène ne gêne pas le confort
Même faibles (de 3 à 6 dB), ces diffé- de vision, mais altère les possibilités de
rences peuvent déjà entraîner une augmen- mesures. La densité lumineuse de l’image
tation. Une différence de l’ordre de 3% émise par l’écran n’est pas complètement
dans l’illumination des images transmises transmise à l’œil. L’obturateur à cristaux
à gauche et à droite est déjà trop impor- liquides, comme tout élément placé entre
tante pour garantir une vision confortable l’émission et la réception, absorbe une par-
[1]. tie du signal.
C’est particulièrement ennuyeux pour
Crosstalk (Ghosting) le photogrammètre qui est amené à effec-
Dans le cas de l’affichage stéréo, on tuer des mesures en mode stéréo.
retrouve le phénomène du Crosstalk (in-
terférence entre deux signaux). Ce phéno-
mène pourrait se retrouver soit au niveau PERSPECTIVE ET CONCLUSION
de l’obturation (les lunettes) soit à l’écran.
Les techniques de fabrication des lunettes Le format le plus utilisé est le mode
excluent cependant une obturation impar- Field sequential. Par définition, ce standard
faite. En pratique, cet effet est dû à la per- nécessite l’utilisation d’un périphérique de
sistance du scintillement du phosphore. sélection des images (lunettes). Il conser-

[références en page 119] FI - 40


MON ORDINATEUR VOIT DOUBLE

vera très certainement sa place de leader Si les tendances exprimées ci-dessus


ces prochaines années grâce aux progrès laissent entrevoir une utilisation toujours
combinés des moniteurs et des cartes gra- plus efficace de la vision stéréoscopique,
phiques (résolution et rafraîchissement). on peut d’ores et déjà affirmer que la tech-
Une avancée technologique remarqua- nologie actuellement disponible sur le
ble pourrait concerner les systèmes passifs. marché permet un très bon confort de vi-
L’intégration par les fabriquants de moni- sion pour un investissement limité (de l’or-
teurs LCD d’une technologie nommée dre de quelques centaines à quelques mil-
µPol (MicroPolarizer Array / Parsell liers de francs).
Matrix) développée par la firme VRex pour
un prix inférieur à 20$/pièce permettrait
ORGANISMES ET SITES INTERNET
de démocratiser la visualisation stéréosco-
pique de très bonne qualité (flicker free)[4].
❚ Stereographics Corporation :
Les applications de la réalité virtuelle
www.stereographics.com
seront très certainement le moteur de dé-
❚ NuVision Technologies, Inc. :
veloppements nouveaux. Comme on peut
www.nuvision3d.com
déjà en faire l’expérience aujourd’hui, les
❚ Dimension 3 :
systèmes de casques incluant la vision sté-
www.3dcompany.com
réoscopique et le positionnement ne pour-
❚ VRex, Inc. :
ront que se démocratiser et profiter d’avan-
www.vrex.com
cées technologiques.
❚ Divers :
Des travaux sont menés pour obtenir
3D Glasses :
une image stéréoscopique visible sans pé-
www.hut.fi/Misc/Electronics/docs/pc/
riphérique (à œil nu). Ce système, nommé
3dglass.html
affichage autostéréoscopique, bute actuel-
la vision stéréo :
lement sur le problème lié à la séparation
www.vision3d.com ■
des deux images. D’autre part, l’observa-
teur serait contraint de se positionner très
précisément devant l’écran et ne pourrait
pas bouger sa tête sans perdre la vision sté-
réoscopique.

[références en page 119] FI - 41


SERVEUR WEB D’IMAGES PARALLÈLES
POUR LE PROJET VISIBLE HUMAN
Samuel Vetsch, Vincent Messerli, Oscar Figueiredo, Benoit Gennart, Roger Hersch,
EPFL-DI-Laboratoire de Systèmes périphériques, e-mail: RD.Hersch@epfl.ch,
Laurent Bovisi, Ronald Welz, WDS Technologies SA, Genève
& Luc Bidaut, Hôpital Cantonal Universitaire, LFMI, Genève,

La visualisation d’images médicales la coupe, nous utilisons une présentation


3D obtenues par coupes c’est-à-dire par miniature 3D de l’image complète.
l’intersection d’un volume 3D avec un Accéder et extraire des coupes depuis
plan d’orientation et de position quelcon- les images du Visible Human [1] exige un
ques est un outil de choix pour la forma- espace de stockage important (13Goctets
tion en anatomie et l’aide au diagnostic. pour le jeu de données de l’homme) et
Dans cet esprit, nous avons déve- beaucoup de puissance de calcul. Nous
loppé, dans le cadre du projet Visible avons donc décidé de construire un ser-
Human, un serveur de coupes offrant aux veur sur la base de 5 PC Bi-Pentium Pro.
intervenants la possibilité de spécifier Un PC Bi-Pentium II supplémentaire sert
interactivement la position et l’orientation de serveur Web. Tous les PC sont inter-
de la coupe désirée et de l’obtenir à partir connectés à travers un switch Fast Ethernet.
d’un volume tomographique 3D, qui se Au total, 60 disques sont distribués entre
compose d’images CT, IRM (imagerie par les 5 PC.
résonance magnétique) ou obtenues par Le volume Visible Human est seg-
cryosection (images numériques en cou- menté en volumes élémentaires de
leur de sections du corps congelé). Pour 32x32x17 (51 KB en couleurs) qui sont
l’interaction avec l’utilisateur dans le but répartis sur les différents disques associés
de spécifier la position et l’orientation de aux PC. L’application Serveur de Coupes

[références en page 119] FI - 42


SERVEUR WEB D’IMAGES PARALLÈLES POUR LE PROJET VISIBLE HUMAN

fig. 1: spécification à l’aide d’une applet Java 1.1 du plan de coupe dans l’image tomographique
3D miniaturisée

FI - 43
SERVEUR WEB D’IMAGES PARALLÈLES POUR LE PROJET VISIBLE HUMAN

Visible Human convertit une requête de L’application serveur d’images paral-


coupe donnée par sa position et son orien- lèles se compose d’une interface résidant
tation en un ensemble de requêtes d’accès sur le PC serveur Web et de processus ser-
parallèles aux sous-volumes qui intersec- veurs qui s’exécutent sur le réseau des 5 PC.
tent la coupe désirée (sous-volumes distri- L’interface interprète les paramètres d’em-
bués sur les disques) et de requêtes d’ex- placement et d’orientation de la coupe dé-
traction et de projection de morceaux de finis par l’utilisateur et détermine les élé-
coupes (fig. 2). Les morceaux de coupes ments d’images qui devront être accédés.
ainsi obtenus sont ensuite assemblés pour Il envoie aux serveurs concernés (ceux dont
former la coupe finale qui est compressée les disques contiennent ces éléments) les
par le serveur Web et envoyée au client Web. requêtes de lecture de sous-volumes et d’ex-
Le serveur d’images parallèles utilise traction de coupe. Ces serveurs exécutent
l’outil de parallélisation CAP [2] et les les requêtes et transfèrent à l’interface les
composants pour systèmes de fichiers pa- morceaux de coupes résultants. L’interface
rallèles [3], ce qui nous a permis de cons- en fait l’assemblage pour engendrer l’image
truire des applications parallèles combinant de la coupe finale (fig. 3).
une performance de calcul élevée ainsi L’application serveur d’images paral-
qu’un grand nombre d’opérations d’entrée- lèle est décrite dans le diagramme de la
sorties asynchrones. fig. 4 et par le programme de la fig. 5. Le

Assemblage des
différents morceaux
de coupe et projection
Spécification du plan Extraction d'une Les différents dans la grille de
de coupe coupe du volume 3D morceaux de coupe visualisation
fig. 2: extraction des morceaux de coupe d’un volume 3D divisé en extents

[références en page 119] FI - 44


SERVEUR WEB D’IMAGES PARALLÈLES POUR LE PROJET VISIBLE HUMAN

programme de la fig. 5 décrit l’application figurations. Chaque accès à une coupe est
parallèle à un niveau d’abstraction élevé décomposé en 437 requêtes d’accès de
selon le formalisme CAP (Computer- sous-volumes (total : 22 Moctets de don-
Aided Parallelization). Ce programme est nées pour les sous-volumes intersectés). Le
précompilé en code C++ qui est ensuite goulet d’étranglement est toujours le dé-
compilé pour s’exécuter sur les serveurs PC bit effectif d’entrée/sortie sur le disque
et sur le PC d’interface. (pour des blocs de 51KB: ~1.88 Moctets/s).
La performance du serveur a été tes- Avec 4.8 images de coupes /seconde, le PC
tée en distribuant le volume des données agissant comme serveur Web peut recevoir
du Visible Human (jeu de données pour à travers le Fast Ethernet 4.8 x 437 mor-
l’homme : 13Goctets) sur 1 à 5 PC Bi- ceaux de coupes, chacun de taille 3.8 Koc-
Pentium Pro et sur 1 à 12 disques par PC tets, ce qui donne 7.8 Moctets de données
(maximum 60 disques). La figure 6 mon- en provenance des 5 PC serveurs d’image.
tre le nombre de coupes couleurs 512x512 Pour engendrer un débit de coupes cor-
extraites par seconde pour différentes con- respondant à 7.8 Moctets/s, 60 disques
Client: Applet SCSI-2
Java 1.1 Serveur Web: Serveurs PC
Microsoft IIS 4.0

Requête
d’extraction
d’une coupe Requêtes de
lecture d’extents

SCSI-2
Image de la coupe Internet
finale (JPEG) Intranet
Morceaux de Fast
coupe extraits Ethernet
et projetés

fig. 3: envoi des requêtes de lecture d’extents et réception des morceaux de coupe

FI - 45
SERVEUR WEB D’IMAGES PARALLÈLES POUR LE PROJET VISIBLE HUMAN

t u te
te n mp ]
E x ve r [] Co r ve r[ morceau
e nt Ser Se e nt
Cli requête de de coupe Cli
lecture d'un extent extraction du morceau de extrait et
lecture de volumique coupe de l'extent & projeté
extent
l'extent du projection dans la grille de
paramètres disque

calcul des extents touch és par le plan

assemblage des diff érents morceaux


visualisation
d'orientation du

de coupe dans l'image finale


plan de coupe, pointeur
descripteur de sur la en t
l'image coupe Cli
tomographique 3D visualisation
de coupe

extraite
de la coupe
extraite
t u te
te n mp ]
E x ve r [ ] Co r ve r[ morceau
requête de S er Se de coupe
lecture d'un extent extrait et
lecture de extraction du morceau de
extent volumique projeté
l'extent du coupe de l'extent &
disque projection dans la grille de
visualisation

fig. 4: représentation graphique de l’application parallèle et pipelinée d’extraction et de visualisa-


tion de coupes
1 leaf operation Ps2ComputeServerT::ExtractAndProjectSlicePart
2 in ExtentT* InputP
3 out SlicePartT* OutputP
4 { // C++ code }
5
6 int SplitSliceRequest(SliceExtractionRequestT* FromP, ExtentReadingRequestT* &ThisP)
7 { // C++ code }
8 thread où MergeSlicePart
9 void MergeSlicePart(SliceT* IntoP, SlicePartT* ThisP) est executée
10 { // C++ code }
11
12 operation Ps2ServerT::ExtractSlice fonction de subdivision fonction de réassemblage
13 in SliceExtractionRequestT* InputP message de sortie de la
14 out SliceT* OutputP construction CAP parallel while
15 {
16 parallel while (SplitSliceRequest, MergeSlicePart, Client, SliceT Output)
17 (
18 ExtentServer[thisTokenP->ExtentServerIndex].ReadExtent
19 >->
20 ComputeServer[thisTokenP->ComputeServerIndex].ExtractAndProjectSlicePart
21 );
22 }

fig. 5: spécification CAP de l’application parallèle et pipelinée d’extraction et de visualisation de


coupes

FI - 46
SERVEUR WEB D’IMAGES PARALLÈLES POUR LE PROJET VISIBLE HUMAN

sont lus à un débit de 105.6 Moctets/s lèle, en enchaînant les structures de con-
(4.8 x 22Moctets). trôle les unes après les autres ou en utili-
Les performances sont proches de cel- sant des structures de contrôle parallèles
les offertes par le matériel, le système d’ex- imbriquées.
ploitation (Windows NT) et les protoco- Pour interfacer l’architecture parallèle
les réseau (TCP/IP). du serveur avec le serveur WEB nous avons
L’outil d’aide à la parallélisation CAP utilisé le protocole ISAPI de Microsoft.
simplifie la création des applications pa- Une applet Java tourne sur les clients Web
rallèles à mémoire distribuée. Les program- et permet aux utilisateurs de spécifier la
meurs créent séparément les parties sé- position et l’orientation de la coupe et donc
quentielles du programme et expriment le d’engendrer les requêtes d’accès. Les répon-
comportement parallèle du programme à ses du serveur Web sont compressées (stan-
l’aide de CAP. La partie parallèle du pro- dard JPEG) et renvoyées aux clients Web
gramme peut être facilement modifiée en pour l’affichage. L’interface Web est opé-
changeant la séquence des opérations à l’in- rationnelle à l’adresse :
térieur d’une structure de contrôle paral- http://visiblehuman.epfl.ch/ ■
5
4.5
1 PC serveur
4 2 PC serveurs
coupes extraites/seconde

3.5 3 PC serveurs
4 PC serveurs
3 5 PC serveurs
2.5
2
1.5
1
0.5
0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
Nombre de disques par PC serveur

fig. 6: performances de l’application d’extraction et de visualisation de coupes selon différentes


configurations du serveur, avec cache des disques désactivés

FI - 47
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB
Christian Babski, EPFL-DI, e-mail: Christian.Babski@epfl.ch
& Ronan Boulic, EPFL-DI, e-mail:Ronan.Boulic@epfl.ch

INTRODUCTION grand public de VRML fut d’autant plus


facilitée que le développement des jeux sur
De la même manière que le langage PC amenèrent les constructeurs à intégrer
HTML s’est imposé pour la représentation des cartes accélératrices 3D dont bénéfi-
des pages WEB, VRML (Virtual Reality cièrent les applications utilisant VRML
Modeling Language) [http:// www.vrml. (principalement des plug-ins pour Netscape
org/]est devenu un standard pour repré- ou Internet Explorer comme CosmoPlayer
senter des données 3D sur le WEB. Dans de Silicon Graphics, [http://cosmosoftware.
un premier temps, ce langage fut créé et com/ ], mais également des applications in-
soutenu par Silicon Graphics. L’unique dépendantes comme Community Place
manière de profiter de ce langage était de [http://sonypic.com/]).
posséder une machine onéreuse bénéficiant Afin d’augmenter la portabilité des
d’accélérateurs hardware pour traiter la mondes VRML sur le WEB, un ensemble
troisième dimension. A l’inverse, la se- de groupes de travail apparut, afin de stan-
conde mouture de ce langage fut mise au dardiser la manière de représenter certai-
point par un ensemble de constructeurs, nes données à l’intérieur des mondes
plutôt que par un seul, ce qui permit à VRML. Là où certains groupes de travail
VRML de passer d’un statut de produit à étudient la mise au point d’une version
celui de standard supporté par un consor- binaire de VRML ou une manière généri-
tium de constructeurs/développeurs. Ceci que d’utiliser VRML afin de réaliser des
permit de voir apparaître les outils néces- mondes 3D partagés par un ensemble de
saires à la visualisation des fichiers VRML participants, un groupe de travail
sur la majorité des plates-formes disponi- (HANIM [http://ece.uwaterloo.ca:80/~h-
bles sur le marché. La diffusion auprès du anim/]) a défini une manière générique de

FI - 48
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

représenter des humains virtuels avec cuisse, mollet, etc.) ou être formée d’une
VRML. La première version fut partielle- seule et même partie qui sera déformée
ment basée sur un modèle d’humain syn- dynamiquement en temps réel confor-
thétique mis au point à l’EPFL au labora- mément à la position du squelette sous-
toire d’infographie (LIG) dirigé par Da- jacent.
niel Thalmann [http://ligwww.epfl.ch/] et
sur un autre modèle développé au Etats DÉFINITION DE LA HIÉRARCHIE
Unis par Norman Badler. Une nouvelle C’est sur cette partie très importante
version est en passe de voir le jour, résultat que porte le travail de standardisation de
de discussions faites à travers des groupes la représentation d’humains dans les mon-
de discussions via e-mail, où toute per- des VRML. Nous avons défini une liste
sonne peut apporter sa contribution. exhaustive des articulations dignes d’inté-
rêts en fonction de la précision désirée des
animations (fig. 1). A chaque articulation,
PRÉSENTATION DE LA STRUCTURE un ensemble de degrés de mobilité est dé-
DE L’HUMAIN VIRTUEL fini allant de un jusqu’à trois degrés de li-
berté (uniquement des rotations, les trans-
La définition d’un humain virtuel lations, quand elles sont présentes au ni-
passe par 2 étapes principales : veau d’une articulation, sont toujours de
❚ mise en place d’une hiérarchie : ceci cor- faibles amplitudes et donc, négligeables).
respond à l’ossature de l’humain. Cette Cette hiérarchie reste un sous-ensem-
hiérarchie est aussi proche que possible ble de la hiérarchie complète adoptée par
du véritable squelette humain afin de le groupe de standardisation. Cette der-
s’assurer, par la suite, des comportements nière inclut un modèle anatomique com-
réalistes du corps modélisé. plet de la colonne vertébrale. Une telle hié-
❚ définition d’une enveloppe corporelle (la rarchie représente l’ensemble maximal de
peau) qui suivra les mouvements du degrés de liberté supporté par le standard.
squelette précédemment défini. Cette Toute hiérarchie possédant un sous-ensem-
enveloppe peut être subdivisée en plu- ble de ces points d’articulation est valide.
sieurs parties (correspondant aux diffé- Loin de limiter les possibilités, la défini-
rentes parties du corps : bras, avant-bras, tion d’un tel standard va permettre la com-

FI - 49
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

head_top
head
r_scapula(2) vc8(3)
vt6(3) vc7(3) l_scapula(2)
r_shoulder(3) l_shoulder(3)
r_elbow(2) l_elbow(2)
r_wrist(2) r_clavicle(2) l_clavicle(2) l_wrist(2)
vt5(2)
r_hand_center l_hand_center
vt4(3)
vl3(2)
vl2(2)
pelvis (3); vl1 (1)

r_hip(3) l_hip(3) Joint(nb dof)


Functional
location (not
a joint)

r_knee(2) l_knee(2)

r_ankle(1) l_ankle(1)
r_subtalar(1) l_subtalar(1)
r_mid_foot(1) l_mid_foot(1)
r_toe(1) l_toe(1)
fig. 1: le squelette humain défini au LIG

FI - 50
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

patibilité des humains virtuels à travers les modeleurs 3D qui l’exporteront vers
mondes VRML. Comme nous allons le VRML. De notre côté, la génération de
voir dans la section suivante, cela permet- cette enveloppe est automatisée, via la dé-
tra principalement d’animer un humain finition d’un ensemble de couches qui vont
virtuel avec une animation qui aura pu être s’additionner sur le squelette afin d’obte-
produite ailleurs mais qui suivra les spéci- nir l’enveloppe finale (fig. 2).
fications du standard.

DÉFINITION DE L’ENVELOPPE

fig. 2: Génération automatique de l’enveloppe


corporelle – [http://ligwww.epfl.ch/~shen/ fig. 3: le squelette nu (gauche) permettant de
bb.html ] visualiser les articulations et le même
squelette (droite) , mais habillé par un
Cette enveloppe peut évidemment ensemble de segments rigides – [http://
être générée manuellement en utilisant des ligwww.epfl.ch/~babski/StandardBody/]

FI - 51
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

Une première couche composée d’un ces statiques peuvent être calculées pour
ensemble de metaballs (sorte de sphères chaque segment. Cette solution visuelle-
déformables) modélisant les muscles vient ment moins agréable, permet de déchar-
s’additionner au squelette de départ. Ces ger la machine du calcul de la déforma-
primitives possèdent des caractéristiques tion lors de l’animation.
qui définissent leurs comportements (dé-
formation) lorsque le squelette va bouger. ANIMATION D’HUMAINS VIRTUELS
L’enveloppe est alors générée à partir de
ces primitives pour obtenir le résultat final. Toujours en exploitant les possibilités
De même qu’une seule surface couvrant liées à VRML, il est possible de gérer des
la totalité du corps, un ensemble de surfa- animations afin de donner un peu de vie à

fig. 4: humains virtuels en VRML mis en situation

FI - 52
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

ce qui fut longtemps un simple format sup- Nous avons développé un ensemble
plémentaire pour données 3D. Evidem- d’outils qui permettent de bénéficier en
ment, VRML peut être utilisé comme tel, VRML des capacités dont nous disposons
mais sa spécificité apparaît dans sa capa- déjà pour contrôler un humain virtuel. Il
cité à gérer des événements (qui peuvent est ainsi possible d’appliquer des anima-
s’apparenter aux événements XWindow tions basées sur la technique des temps clé
par exemple) et à intégrer du code (com- (on définit seulement la position du corps
pilé ou non) afin de piloter les mondes à certains moments, les positions intermé-
VRML depuis un véritable programme. diaires étant calculées automatiquement)
Simplement en déclarant une dépen- ou des animations issues d’une capture en
dance entre un événement et un autre (hor- temps réel des mouvements d’une vérita-
loge et tableau d’interpolation par exem- ble personne (fig. 5). La standardisation
ple), il est possible de créer des animations permet d’appliquer une animation sur
sans faire appel à aucune programmation. n’importe quel humain virtuel suivant les

fig. 5 : un humain virtuel et son squelette animé via une animation capturée en temps réel
[http://ligwww.epfl.ch/~babski/StandardBody/]

FI - 53
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

spécifications. Avec l’aide du système de APPLICATION DES HUMAINS


prototypes de VRML, l’application d’une VIRTUELS SUR LE WEB
animation réalisée par une compagnie sur
un humanoïde étranger peut se faire de La troisième dimension devenant aussi
manière complètement transparente, évidente à intégrer dans une page WEB
quelle que soit la différence entre le nom- que la 2D (hypertexte HTML), cela de-
bre d’articulations présentes dans l’anima- vient un outil qui peut aider à rendre plus
tion et le nombre d’articulations incluses intuitif des interfaces qui ne le sont pas du
au niveau du squelette (fig. 6). tout pour des personnes étrangères au
monde de l’informatique : il est possible
de définir sa propre interface 3D pour la
navigation (ajout d’un plan affichant la po-
sition actuelle de l’utilisateur, interface
d’interaction avec les acteurs de synthèses,
etc.). D’autre part, la nouvelle dimension
peut permettre certaines choses qui
n’étaient pas réalisables auparavant.
A partir de données de la première
tranche de construction de l’EPFL, nous
avons obtenu un modèle partiel de l’EPFL
en VRML. Cette simple conversion de for-
mat 3D en VRML peut permettre à des
personnes planifiant de venir à l’EPFL de
pouvoir s’y balader virtuellement et repé-
rer les lieux depuis leur PC, via l’accès à
fig. 6: une même animation impliquant les une page WEB donnée. Mais la visite peut
doigts appliquée à un humain virtuel incluant encore être plus attrayante si l’on y ajoute
les doigts dans sa hiérarchie et à une souris ne quelques guides. Nous avons très logique-
possédant que des mains statiques [http:// ment peuplé cette EPFL virtuelle de quel-
ligwww.epfl.ch/~babski/StandardBody/ ques humanoïdes ayant chacun une tâche
Animation.html] précise. Un premier ensemble d’humanoï-

FI - 54
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

des est chargé de montrer les différentes se mouvoir en accord avec la dernière re-
voies de circulation ; l’utilisateur peut les quête du visiteur. Avec ce principe, l’ac-
suivre afin de mémoriser un éventuel par- teur de synthèse en VRML peut se trans-
cours pour se rendre dans un laboratoire former en secrétaire virtuel (Fig. 8) don-
donné (Fig. 7). nant des renseignements administratifs ou
De plus ces acteurs peuvent être doués même enregistrant les nouveaux étudiants
de parole. Ajouté à un ensemble d’outils dans un service académique virtuel.
permettant d’analyser les demandes de VRML possède également la capacité
l’utilisateur, l’acteur peut alors répondre et d’établir un lien avec une application JAVA

fig. 7: un plan classique, comme nous pouvons le trouver actuellement sur les pages WEB de
l’EPFL et une visite guidée à travers les coursives de l’EPFL comme elle est actuellement réalisable
avec les acteurs de synthèses

FI - 55
HUMAINS VIRTUELS SUR LE WEB

fig. 8: simulation d’un service académique virtuel. Les différents documents présents sur le
comptoir font l’objets d’une présentation de la part de l’humain virtuel

externe. Il est alors possible de contrôler le des fichiers VRML par exemple, qui reste
monde VRML depuis JAVA. Cette passe- un obstacle face à la saturation des réseaux
relle ouvre la porte au langage compilé classiques (malgré l’utilisation d’outils de
qu’est JAVA, les langages de programma- compression de fichiers classique) et grâce
tion script interprétés étant d’une puissance à l’augmentation de la puissance des ma-
et d’une rapidité limitée. Cette solution chines grand public dans le domaine de la
ferme cependant certaines portes, la liaison 3D, VRML peut devenir un complément
JAVA/VRML n’étant pas implémentée par pour les pages WEB classiques. Le déve-
tous les navigateurs VRML. loppement de standard pour la représen-
tation de certaines données en VRML peut
permettre de donner une nouvelle dimen-
CONCLUSION sion à la diffusion de résultats de recher-
che en 3D en s’affranchissant de la dépen-
VRML est désormais totalement in- dance du matériel qui était omniprésente
tégré au WEB. Malgré certaines petites im- auparavant. ■
perfections résiduelles comme le volume

FI - 56
DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS
AUTONOMES ET PERCEPTIFS
Daniel THALMANN, EPFL-DI-Laboratoire d’Infographie,
e-mail: thalmann@lig.di.epfl.ch, www:http://ligwww.epfl.ch

La Téléprésence est l’avenir des systè- pliquer où en sont les recherches actuelles
mes multimédia et elle permettra à des par- dans le domaine des humains virtuels, et
ticipants de partager des expériences pri- en particulier au Laboratoire d’Infographie
vées et professionnelles telles que des réu- (LIG). Le LIG a été un des pionniers dans
nions, des jeux, des TV shows, des parties. ce domaine qui est resté longtemps le
Les humains virtuels ou acteurs de synthèse thème de recherche d’une poignée de la-
ont un rôle clé à jouer dans ces Environne- boratoires. Aujourd’hui, le domaine a pris
ments Virtuels partagés et une interaction une grande importance, comme en témoi-
réelle avec eux est un grand défi. gnent les films, les jeux, les efforts de stan-
dardisation des Humains Virtuels dans
MPEG4 et VRML, efforts auxquels le LIG
INTRODUCTION participe activement, et le prochain pro-
gramme cadre de l’Union Européenne [1]
Les nouvelles technologies nous ont qui s’y intéresse aussi fortement.
permis depuis quelques années de créer des Pour expliquer les différents types
êtres virtuels et de les animer. Plus récem- d’humains virtuels et leur évolution, nous
ment, la Réalité Virtuelle nous a amené la allons nous servir de la nouvelle classifica-
possibilité de s’immerger dans les mondes tion [2] des humains virtuels que nous
virtuels et d’y rencontrer des êtres virtuels. avons proposée avec quatre types :
Enfin grâce aux recherches en intelligence ❚ les avatars
artificielle et en vie artificielle, les êtres vir- ❚ les acteurs guidés
tuels sont capables d’une certaine autono- ❚ les acteurs autonomes
mie. Dans cet article, nous essayons d’ex- ❚ les acteurs perceptifs interactifs

[références en pages 119 et 120] FI - 57


DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

LES AVATARS (voir plus loin : les humains virtuels dans


les environnements virtuels distribués).
Dans notre terminologie, les avatars
correspondent à des représentations fidè-
les de l’usager. La technique consiste à en- LES ACTEURS AUTONOMES
registrer directement les mouvements de
l’usager et à les transposer sur un humain Leur rôle est de représenter un service
virtuel qui devrait avoir aussi son appa- ou un programme comme par exemple
rence. Pour implanter de tels avatars, il est pour naviguer. Comme ces acteurs virtuels
nécessaire d’avoir des séries de capteurs ne sont pas guidés par les utilisateurs, ils
comme les Flock of Birds. doivent avoir des comportements leur per-
mettant d’agir de manière autonome pour
accomplir leurs tâches. Cela requiert de
LES ACTEURS GUIDÉS bâtir des comportements pour le mouve-
ment, ainsi que des mécanismes appropriés
Les acteurs guidés sont des acteurs qui pour l’interaction. Ce domaine est celui
sont conduits par l’utilisateur mais sans que où la recherche de pointe se fait. A titre
leurs mouvements ne correspondent direc- d’exemple, nous allons prendre le cas de
tement à ceux de l’utilisateur. Ils sont ba- l’évitement d’obstacles, un problème que
sés sur le concept de la métaphore directe chacun d’entre nous résout chaque jour un
temps réel [3]. Pour comprendre le con- très grand nombre de fois. Les roboticiens
cept, prenons un exemple de métaphore ont introduit des techniques mathémati-
traditionnelle : le contrôle d’une marion- ques qui permettent d’évaluer, à partir
nette. Une marionnette peut être définie d’une configuration donnée le ou les che-
comme une poupée avec des membres dé- mins possibles, pour aller d’un point à un
placés par des fils ou des ficelles. Les doigts autre en évitant les obstacles. Cette démar-
humains sont employés pour diriger le che très valable pour un bras de robot se
mouvement de la marionnette. En Réalité déplaçant mécaniquement dans un envi-
Virtuelle, le meilleur exemple de guidage ronnement connu et statique, est peu ap-
d’acteurs est la navigation réalisée dans les plicable au comportement d’un humain
systèmes d’Environnements Distribués dans un environnement souvent mal

[références en page 120] FI - 58


DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

connu et parfois dynamique. Lorsqu’on se Le principe repose sur une boucle dite
déplace sur un trottoir, il ne faut pas seu- de perception-action. A chaque instant,
lement éviter de se cogner aux parcomè- pour chaque être virtuel, on crée une per-
tres, mais surtout éviter le piéton qui vient ception de l’espace virtuel, c’est-à-dire que
en face ; sans oublier que ce piéton va aussi l’on simule dans l’ordinateur ce que cha-
tenter de vous éviter. Ce type de compor- que être peut voir, entendre et toucher à
tement, de nature dynamique, ne peut être l’aide de sens virtuels. Ainsi l’humain vir-
simulé en animation qu’avec une démar- tuel aura un vrai champ de vision, il pourra
che de type sensorielle. C’est effectivement entendre les bruits produits par d’autres
le sens de nos recherches. Nos humains êtres ou se cogner à une table. Sur la base
virtuels ont maintenant une vision, une de ce que ces êtres ressentent, ils sont ca-
audition et un toucher de synthèse. Ils pables de prendre des décisions simples.
peuvent se diriger vers un bruit déterminé Par exemple, un être virtuel, attiré par un
ou éviter la table qu’ils voient ou enfin réa- son en dehors d’une pièce, pourra cher-
gir même dans l’obscurité en reconnais- cher la porte et lorsqu’il l’aura aperçue,
sant qu’ils ont cogné un mur. Ils peuvent pourra trouver le chemin jusqu’à cette
même jouer au tennis en basant leur jeu porte et sortir et ceci sans aucune inter-
sur celui de l’adversaire. vention d’un vrai humain.

LES ACTEURS PERCEPTIFS ET


INTERACTIFS

Nous définissons un acteur perceptif


et interactif comme un acteur conscient
d’autres acteurs et des gens réels. Un tel
acteur est aussi supposé être autonome bien
sûr. De plus, il est capable de communi-
quer interactivement avec les autres acteurs
fig. 1: acteurs autonomes (Design: Mireille quel que soit leur type et avec les gens réels
Clavien) (fig.2).

FI - 59
DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

consciemment une communication non-


verbale, mais ils la comprennent instincti-
vement de manière étonnante et sont ca-
pables d’y répondre sans raisonnement
explicite. Cette communication non-ver-
bale est essentielle pour diriger l’interac-
tion entre des gens avec ou sans contact.
Dans notre cas, nous avons récemment
développé des simulations d’intercommu-
nication non-verbale entre des êtres de syn-
thèse. Le principe est le suivant, pour cha-
que être virtuel, on définit son état
fig. 2: interaction entre deux acteurs émotionnel qui peut aller de 0 (triste et
aucun désir de communiquer) à 1 (joyeux
et désirant vivement entrer en communi-
INTERCOMMUNICATION ENTRE ACTEURS DE cation). On définit également pour cha-
SYNTHÈSE que paire d’êtres leur intensité relationnelle
Les comportements peuvent être aussi allant de 0 (se détestent) à 1 (s’adorent).
dépendant de l’état émotionnel de l’acteur. On laisse alors une dizaine d’êtres virtuels
C’est ainsi qu’un modèle de communica- se déplacer au hasard dans un parc public.
tion non verbale a été développé au LIG Lorsque deux êtres se rencontrent, ils vont
[4]. La crédibilité des acteurs virtuels est s’ignorer ou communiquer en fonction de
améliorée par leur aptitude à interpréter leurs états émotionnels respectifs et leur
et employer un langage non-verbal. Une intensité relationnelle. Les états émotion-
communication non-verbale est basée sur nels et les intensités relationnelles ne sont
les postures et l’information sur ce que les pas constants et évoluent en fonction de
gens ressentent. Les postures sont des la communication. Ainsi, un être joyeux
moyens de communiquer et sont définies qui rencontre un être qu’il n’aime pas verra
par des positions spécifiques des bras et des une diminution de son état émotionnel à
jambes et certaines orientations du corps. cause de la rencontre qu’il a fait. On no-
Habituellement, les gens n’emploient pas tera également que l’état émotionnel a une

[références en page 120] FI - 60


DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

influence directe sur la manière de se com- tar jouant au tennis avec un acteur per-
porter, de marcher par exemple (fig. 3). ceptif interactif. Concernant le sens tac-
tile, nous pouvons considérer l’exemple
suivant : une lutte entre une personne réelle
et un acteur autonome. Le mouvement de
la personne réelle est capturée avec un Flock
of Birds. Les gestes sont reconnus par le
système [5] et l’information est transmise
à l’acteur virtuel qui est capable de réagir
aux gestes et décider quelle attitude adop-
ter. La fig. 4 montre un exemple.

fig. 3: marche avec état émotionnel triste et


joyeux

COMMUNICATION ENTRE PERSONNES RÉELLES


ET VIRTUELLES
Les gens réels sont bien sûr aisément
conscients des actions des acteurs de syn-
thèse grâce aux outils de la Réalité Virtuelle
tels que les casques de visualisation. Le
problème majeur à résoudre est de rendre
les acteurs virtuels conscients du compor-
tement des gens réels. Les acteurs virtuels
devraient percevoir les vraies personnes ou fig. 4: combat entre avatar et acteur perceptif
leurs avatars par leur sens virtuels. Les ac- interactif
teurs perceptifs et autonomes peuvent
avoir des degrés différents d’autonomie et Comme application, nous sélection-
des canaux différents pour ressentir l’envi- nons un jeu virtuel de tennis avec un ac-
ronnement. Pour les sens visuel et auditif, teur guidé, l’actrice perceptive interactive
nous pouvons considérer le cas d’un ava- Marilyn, et un arbitre perceptif interactif,

[références en page 120] FI - 61


DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

les deux avec une vision virtuelle. La fig. 5 suivant la balle avec son système de vision.
montre une séance interactive. Les carac- Marilyn peut aussi entendre des événe-
téristiques géométriques du court de ten- ments sonores et obéit aux décisions de l’ar-
nis font partie de la connaissance des bitre.
joueurs. Pour la simulation de la dynami-
que de la balle, la gravité, le filet, le sol et LES HUMAINS VIRTUELS DANS LES
la raquette, nous employons des calculs ENVIRONNEMENTS VIRTUELS
basés sur la physique. Le dépistage de la DISTRIBUÉS
balle par le système de vision est contrôlé
par un automate spécial qui suit la balle, VLNET (Virtual Life Network) ) [6]
estime le temps de collision et le point de [7] a été développé en Suisse conjointe-
collision de la balle avec la raquette et ef- ment par le Laboratoire MIRALab de
fectue le coup avec la force donnée et dans l’Université de Genève et le Laboratoire
la direction voulue. L’arbitre juge le jeu en d’Infographie de l’EPFL. L’avantage de

fig. 5: jeu de tennis


avec avatars et
acteurs perceptifs
interactifs temps-
réel

[références en page 120] FI - 62


DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

VLNET sur les autres systèmes est qu’il les tâches dans un seul environnement vir-
offre le plus grand réalisme dans la repré- tuel avec une interface naturelle sembla-
sentation des humains virtuels. VLNET ble à ce qu’offre le monde naturel. Notre
supporte un environnement virtuel distri- environnement virtuel doit d’ailleurs ré-
bué et partagé permettant à des utilisateurs pondre au critère de généralité, permettant
multiples d’interagir avec chacun et leur ainsi d’être utilisé dans des applications et
environnement en temps réel. Les usagers des circonstances très différentes.
sont représentés par des avatars 3D les plus Le système continue à être développé
réalistes possibles. Les utilisateurs peuvent pour d’une part augmenter le nombre
aussi guider des acteurs humains virtuels d’usagers et d’autre part permettre des
3D. Ces acteurs guidés ont des comporte- communications entre usagers utilisant
ments et une apparence similaire aux hu- différentes plates-formes comme UNIX et
mains réels, et aident à soutenir le sens de WINDOWS NT. Pour que l’Environne-
présence des utilisateurs dans l’environne- ment Virtuel soit réaliste, il faut que le sys-
ment. En plus d’acteurs guidés, l’environ- tème soit suffisamment rapide pour four-
nement peut aussi inclure des acteurs per- nir une interaction naturelle. Pour un affi-
ceptifs interactifs et autonomes qui servent chage rapide, nous utilisons l’environne-
surtout comme interface amicale pour les ment IRIS Performer de Silicon Graphics
utilisateurs désirant accéder à certains ser- qui fournit un environnement facile à uti-
vices. Les humains virtuels peuvent aussi liser pour le développement d’applications
être employés pour représenter les parte- temps réel. Pour les communications, nous
naires actuellement indisponibles, permet- pouvons utiliser Internet, mais ATM est
tant ainsi une coopération asynchrone en- nécessaire pour les communications de-
tre des partenaires distants. L’environne- mandant une plus grande bande passante.
ment virtuel peut renfermer plusieurs Nous exploitons un modèle distribué
médias différents: du son, des modèles 3D, de communication, ainsi chaque utilisa-
des interactions faciales représentées par teur est responsable pour la mise à jour de
des textures du visage et des films diffusés l’ensemble des données locales nécessaires
en temps réel. A la place d’utiliser des fe- au rendu et à l’animation des objets. Il y a
nêtres multiples ou des applications pour toujours un usager qui détermine l’envi-
chaque média, on préfère intégrer toutes ronnement. Les autres usagers sont invités

FI - 63
DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

fig: 6: jeu de tennis entre Lausanne et Genève (Interactive Telecom 97)

et n’ont pas besoin de donner tous les pa- que les actions surviennent. Des actions-
ramètres. Toutes les données sont initiale- type peuvent changer la position ou
ment chargées à travers le réseau dans la l’orientation des acteurs, ou saisir ou lâ-
machine locale dès qu’un usager se bran- cher un objet. Les actions sont diffusées
che à l’environnement partagé. La com- aux autres utilisateurs en termes de nou-
munication est asynchrone. Les informa- velles orientations des objets dans l’espace
tions sur les actions des utilisateurs sont ou d’autres changements possibles.
transmises aux autres utilisateurs à mesure

FI - 64
DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

Parmi les applications, on citera l’utili- 97. C’était un jeu de tennis (fig. 6) entre
sation de VLNET entre Genève et Singa- Genève et Lausanne où chaque joueur por-
pour permettant à des personnes des deux tait un casque de réalité virtuelle pour être
sites de visualiser et de manipuler des mon- immergé dans un court virtuel. Les joueurs
tres de luxe. Dans le domaine des loisirs, étaient également équipés de capteurs
VLNET a aussi été utilisé pour jouer aux magnétiques pour enregistrer en temps réel
échecs ou pour résoudre un casse-tête. leurs mouvements et les représenter par des
avatars dans le monde virtuel, donc sur le
court. Un arbitre autonome (fig. 7),
Marilyn, était capable de juger le jeu de
ses propres yeux.

CONCLUSION

Notre objectif ultime est de créer des


acteurs de synthèse crédibles et réalistes,
des humains virtuels intelligents, autono-
mes avec faculté d’adaptation, perception
et mémoire. Ces acteurs devraient être ca-
pables d’agir librement et avec émotion.
Idéalement, ils devraient être conscients et
imprévisibles. Mais, sommes-nous loin
d’une situation aussi idéale ? Nos acteurs
perceptifs interactifs sont capables de per-
cevoir le monde virtuel, les gens vivant
dans ce monde et dans le monde réel. Ils
fig. 7: l’arbitre autonome Marilyn peuvent agir en se basant sur leur percep-
tion de façon autonome. Leur intelligence
Mais l’application la plus complexe a est contrainte et limitée aux résultats ob-
été inaugurée lors de Interactive Telecom tenus dans le développement de nouvelles

FI - 65
DES AVATARS AUX HUMAINS VIRTUELS AUTONOMES ET PERCEPTIFS

méthodes d’Intelligence Artificielle. Les acteur peut être considéré comme libre si
acteurs intelligents sont capables d’appren- son comportement futur est imprévisible
dre ou de comprendre des situations très aux autres.
simples. La mémoire est généralement dé-
finie comme le pouvoir de reproduire ou
de se rappeler ce qui a été appris et retenu REMERCIEMENTS
surtout par des mécanismes d’association.
L’auteur est reconnaissant aux gens qui
Nous avons vu que des aspects émo- ont contribué à ce travail, en particulier
tionnels peuvent être importants dans l’in- Pascal Bécheiraz, Ronan Boulic, Tolga
tercommunication non-verbale. Les émo- Çapin, Amaury Aubel, Tom Molet, Luc
tions sont aussi essentielles dans l’anima- Emering et Hansrudi Noser. Le système
tion faciale. Cependant, une émotion réelle VLNET et le tennis interactif ont été dé-
devrait être considérée comme un état de veloppés conjointement avec MIRALab à
ressentir, une réaction physique et psychi- l’Université de Genève. Les recherches ont
que subjectivement ressentie comme une été financées par le Fonds National Suisse
sensation forte et entraînant physiologi- de la Recherche Scientifique, le Pro-
quement des changements qui préparent gramme Prioritaire SPP et l’Office Fédé-
le corps pour une action vigoureuse im- ral de l’Education et de la Science dans le
médiate. Dans ce cas, nous sommes loin cadre de plusieurs projets Européens : ES-
de réaliser des acteurs véritablement émo- PRIT Humanoid-2, ESPRIT VISTA,
tionnels. ACTS COVEN, ACTS VPARK.■
Enfin, les acteurs dans l’avenir de-
vraient être flexibles, conscients et libres.
Un acteur est flexible aussi longtemps qu’il
peut survivre dans des environnements plus
ou moins imprévisibles et dangereux. Se-
lon Alexander [8], un acteur conscient
devrait être conscient surtout de quelque
chose en lui-même ou caractérisé par une
sensation, une émotion, ou une pensée. Un

[références en page 120] FI - 66


OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR
VISUALISER DES PROJETS
Matthias von Moos, EPFL-DGR-Photogrammétrie,
Institut de géomatique,
e-mail : Matthias.VonMoos@epfl.ch

INTRODUCTION réel est trop complexe pour être modélisé,


que la réalité virtuelle est perçue comme
Les architectes et les ingénieurs appor- trop artificielle. Le concept magique s’ap-
tent par leurs travaux des changements ir- pelle réalité augmentée : la réalité telle
réversibles à notre environnement. Afin de qu’elle se présente aujourd’hui est modi-
mener à bien leurs planifications, ils ont fiée afin de représenter l’état futur. La vi-
besoin d’outils de visualisation perfor- déo est le moyen de capter l’état existant
mants. Dans certains cas, c’est la loi qui avec tous les détails nécessaires pour être
impose une étude d’impact, afin de four- perçu comme réel ; la végétation, les ob-
nir la preuve que la future construction ne jets et personnes qui bougent, les éléments
nuit pas au paysage. Souvent, les visualisa- placée aléatoirement, etc. On n’intervient
tions sont aussi un outil de promotion du qu’aux endroits où apparaissent des élé-
projet. En fonction des contraintes et des ments nouveaux et où d’autres disparais-
exigences, on a le choix entre différents sent.
moyens de visualisation : maquette, pho- La photogrammétrie est bien placée
tomontage, animation 3D sur ordinateur, pour faire de la réalité augmentée, car cette
etc. Les techniques des visualisation ne tâche est semblable aux travaux tradition-
cessent d’évoluer. A peine établie, la réa- nels du photogrammètre qui est d’orien-
lité virtuelle – la modélisation d’une scène ter des images et d’en extraire des infor-
entièrement par ordinateur – est déjà mise mations métriques. Le Laboratoire de pho-
en question. On constate que le monde togrammétrie est équipé de stations de

FI - 67
OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR VISUALISER DES PROJETS

photogrammétrie numérique et possède les nir la photogrammétrie. La technique la


logiciels nécessaires pour la création d’ima- plus complète est l’approche par la photo-
ges de synthèse. grammétrie, en créant un modèle 3D à
partir des images et en le combinant avec
les plans du projet.
COMBINAISON D’IMAGES
COPY & PASTE
Pour produire des images de synthèse La technique copier & coller est large-
à partir d’images vidéo et de plans de pro- ment utilisée dans l’industrie cinématogra-
jets on peut utiliser plusieurs techniques. phique, et les résultats sont souvent plus
La plus simple est de faire une sorte de col- valables qu’on ne le pense. A l’aide d’effets
lage numérique, qui ne fait guère interve- spéciaux, il est même possible d’ajouter des

fig. 1: combinaison de deux images par la méthode Copy & Paste

FI - 68
OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR VISUALISER DES PROJETS

ombres. Ces images sont très naturelles et IMAGE DRAPING


on les considère comme réalistes car on n’y L’image draping peut être considéré
trouve que des objets réels. Pour le Copy comme un stade plus évolué de la méthode
& Paste il suffit de disposer d’images de précédente. Au lieu d’utiliser les paramè-
fond et d’une image de l’objet à implan- tres d’orientation pour générer des images
ter. Il est même possible que les deux ima- virtuelles, on mesure à partir des images
ges montrent la scène et l’objet sous des orientées un modèle de faces 3D, sur les-
angles différents, ceci peut être corrigé par quelles on projette par la suite les images
de simples transformations géométriques. comme texture. En combinant ce modèle
Cette technique est très simple, mais on avec les données du projet à visualiser on
est tributaire d’images existantes d’un ob- obtient une scène complète dans laquelle
jet similaire. Pour des applications à des on peut bouger librement le caméscope
études d’impact on aimerait une représen- virtuel.
tation qui soit aussi métriquement cor-
recte, ce qui n’est pas le cas pour les ima-
ges ainsi obtenues. L’ORIENTATION DES IMAGES

COMBINAISON EXACTE Du point de vue photogrammétrique,


Cette technique utilise l’image réelle la détermination de l’orientation externe
comme fond et la combine avec un mo- est la question la plus intéressante. Pour
dèle 3D d’un nouvel objet. Pour cela, on résoudre ce problème, nous avons testé
détermine avec précision l’orientation ex- deux méthodes ; un système multi-anten-
terne de l’image de fond et on calcule com- nes GPS [1] et l’aérotriangulation.
ment on verrait l’objet à implanter sous le
même point de vue. L’image ainsi générée ÉLÉMENTS D’ORIENTATION
est parfaitement superposable à l’image Pour des applications photogrammé-
réelle. Cette technique rejoint celle de la triques, il faut faire la distinction entre
photogrammétrie classique, où l’orienta- l’orientation interne et l’orientation ex-
tion d’image est une tâche de routine, seul terne. L’orientation interne consiste à fixer
le grand nombre d’images (25 par seconde) la position du centre de projection par rap-
pose un problème nouveau. port au support de l’image (pellicule pho-

[références en page 120] FI - 69


OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR VISUALISER DES PROJETS

tographique, capteur CCD, etc.) et à chif- tifs des images de synthèse doivent paraî-
frer la distorsion, ce qui correspond au ca- tre cohérents. On profite de la forte corré-
librage de la caméra. L’orientation externe lation entre les éléments d’orientation. De
détermine la position et l’orientation de la faibles déplacements latéraux du centre de
caméra dans l’espace-objet. Selon nos ex- projection peuvent être compensés par des
périences, il suffit pour des applications en rotations autour des axes passant par le plan
réalité augmentée de déterminer les six de l’image.
paramètres de l’orientation externe (trois
pour la position et trois pour l’orientation L’AÉROTRIANGULATION
dans l’espace).
La triangulation aérienne est un pro-
cédé de la photogrammétrie classique, qui
est utilisé pour orienter un grand nombre
d’images avec peu de points d’ajustage. Il
existe plusieurs logiciels d’aérotriangula-
tion, avec différents degrés d’automatisa-
tion. Sous certaines conditions, ces logi-
ciels rendent aussi service pour orienter des
images vidéo.

LE SYSTÈME MULTI-ANTENNES GPS


Pour déterminer l’orientation d’un
objet – en l’occurrence le caméscope – on
mesure la position de trois points de l’ob-
jet. Leurs positions relatives étant connues,
on peut calculer l’orientation de l’objet.
fig. 2: orientation externe d’une image Malheureusement les limitations de cette
technique sont nombreuses (basse fré-
La précision avec laquelle on doit con- quence des mesures, pertes du signal du
naître les éléments d’orientation est subor- satellite, etc.), on préfère alors l’aérotrian-
donnée au fait que les éléments réels et fic- gulation.

FI - 70
OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR VISUALISER DES PROJETS

MODÉLISATION ET RENDU DES RÉSULTATS


IMAGES
On a appliqué ces méthode dans plu-
Des logiciels de dessin assisté par or- sieurs cas où l’impact visuel est un élément
dinateur (DAO) comme AutoCAD® ou essentiel de la planification :
MicroStation®, qui sont conçus surtout
Construction d’une ligne à haute tension
pour le dessin technique 2 et 3D, sont sou-
vent utilisés par les architectes et les ingé- L’intégration des pylônes dans le paysage
est le point sensible qui était à exami-
nieurs. Leurs fonctions de base sont accom-
ner. Les images ont été prises avec un
pagnées d’outils pour appliquer des textu-
res, créer des animations etc. Mais leurs petit caméscope numérique. Pour leur
superposer les pylônes, on a utilisé la
possibilités restent limitées pour le rendu
technique copier & coller. Si l’on observe
d’images, alors que les logiciels
Softimage®|3D, 3D Studio Max® ou image par image, on peut estimer l’im-
pact des pylônes, mais s’ils sont groupés
Explorer® sont beaucoup plus perfor-
dans un film on constate des déplace-
mants dans ce domaine. Il s’agit de logi-
ciels DAO du cinéma qui sont orientés vers ments relatifs entre l’image de fond et
les pylônes. On en a conclu que cette
l’animation et le rendu de scènes. On peut
technique était difficile à mettre en œu-
y importer en format dxf des scènes qui
ont été construites par un logiciel de DAO vre pour des séquences avec un mouve-
ment irrégulier de la caméra et qu’elle
technique. La combinaison des images vir-
était à éviter pour des telles séquences.
tuelles avec les images réelles se fait à l’aide
du logiciel de montage Softimage|Eddie®. Nouvelle Transversale Ferroviaire Alpine
Au Laboratoire de photogrammétrie, Un tronçon de la nouvelle transversale
on dispose des logiciels Softimage®|3D et ferroviaire alpine traversera la plaine dans
Softimage|Eddie®. L’entreprise Softimage la région de Biasca TI. La vidéo origi-
a été créée en 1986 à Montréal, en 1994 nale est un panoramique filmé avec un
elle était achetée par Microsoft et elle em- caméscope professionnel. La détermina-
ploie maintenant 300 personnes. Ses logi- tion de l’orientation a été faite pour une
ciels ont contribué à des films comme image sur 10, par aérotriangulation. Les
Jurassic Park, The Lion King ou Titanic. objets virtuels vus du même point ont

FI - 71
OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR VISUALISER DES PROJETS

été par la suite superposés aux images sur la base des plans. Comme on vou-
réelles. Le film qui en résulte montre lait simuler la vue du conducteur égale-
bien la nouvelle ligne de chemin de fer, ment pour un tracé alternatif, il a fallu
respectivement son environnement. utiliser la technique Image Draping.
Contrairement au exemples précédents,
Sécurité Routière on n’a pas utilisé la vidéo, mais une di-
La route Cossonay - La Sarraz est répu- zaine d’images aériennes. Le résultat est
tée être un tronçon dangereux. Le pro- très satisfaisant, seule la résolution est
jet [2] a mis en évidence des problèmes trop faible pour les objets au premier
de visibilité, qui est à plusieurs endroits plan. D’où l’intérêt d’utiliser des ima-
largement en dessous de celle calculée ges vidéo.

fig. 3: image aérienne projetée sur la maille du modèle numérique de terrain. Les barres noires
aident à estimer la distance de visibilité [2]

[références en page 120] FI - 72


OUTILS DE LA PHOTOGRAMMÉTRIE POUR VISUALISER DES PROJETS

CONCLUSION Les séquences vidéo montrent qu’il


s’agit d’une véritable alternative aux tech-
L’utilisation de la vidéo permet une niques de visualisation déjà établies. Il s’agit
modélisation très simple pour un résultat maintenant de se détacher de l’aspect pu-
qui est perçu plus réaliste que celles qu’on rement visualisation et de simuler des ac-
peut obtenir par d’autres méthodes de vi- tions dans cet environnement modifié.
sualisation. La modélisation se limite à Ce sujet a fait l’objet d’un travail de
l’objet nouveau et aux objets qui obstruent diplôme EPFL [3]. ■
la vue sur cet objet. La vidéo filmée sur
place contient tous les éléments qui exis-
tent déjà.

COLOPHON
FLASH INFORMATIQUE
Les articles de ce journal ne reflètent que l’opinion de leurs auteurs. Toute reproduction, même
partielle, n’est autorisée qu’avec l’accord de la rédaction et des auteurs.

Rédacteur en chef : Jacqueline Dousson, fi@epfl.ch


Comité de rédaction : Jean-Daniel Bonjour, Jean-Michel Chenais, Milan Crvcanin, Laurent Desimone,
Jean-Jacques Dumont, Pierre-André Haldy, Catherine Jean-Pousin, Hervé Le Pezennec,
François Roulet, Christophe Salzmann & Jacques Virchaux
Mise en page et graphisme : Appoline Raposo de Barbosa
Impression : Atelier de Reprographie EPFL
Tirage : 4000 exemplaires
Adresse Web : http ://sawww.epfl.ch/SIC/SA/publications/
Adresse : SIC-SA EPFL, CP 121, 1015 - Lausanne
Téléphone : 021/693 22 46 & 22 47

ISSN 1420-7192 9<HSMENA=hbjaab>


[références en page 120] FI - 73
GÉNIE RURAL & ENVIRONNEMENT:
MODÉLISATION 3D ET ANIMATION
VIRTUELLE

Jean-François Monnet, Gester SA Sion

Ces dix dernières années ont été le des objets numériques. Cette nouvelle
théâtre d ’une évolution foudroyante dans technique nécessite de la part des proje-
le domaine de l’informatique. teurs une connaissance accrue du dessin
Ce secteur d’activité a passablement assisté par ordinateur (DAO), de la mo-
modifié l’approche pratique des métiers délisation tridimensionnelle (3D), la créa-
techniques, notamment les métiers tou- tion d’images de synthèse ainsi que des
chant à la construction et à l’élaboration connaissances en montage vidéo et anima-
de projets environnementaux. tion d’images.
Cette nouvelle manière de présenter
les projets simplifie la compréhension et Suite à cette évolution, on peut donc
la lecture des informations. A l’heure du parler aujourd’hui d’une nouvelle branche
multimédia, les projets de tous genres peu- de métier que l’on pourrait nommer
vent être consultés de façon plus facile, plus technico-artistique étant donné que les des-
rapide et plus conviviale par l’image nu- sinateurs-projeteurs doivent maîtriser les
mérique. Le profane est ainsi plus impli- connaissances de plusieurs logiciels :
qué dans la critique. ❚ dessin technique
Actuellement, les projets d’études ❚ modélisation
d’impacts sur l’environnement amènent les ❚ animation
bureaux techniques à présenter au public ❚ traitement d’images

FI - 74
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

Bien sûr, il existe des sociétés


spécialisées dans le monde virtuel
très bien équipées, qui travaillent
surtout dans le domaine artistique
(cinéma, publicité, presse spéciali-
sée) et qui n’ont pas forcément les
compétences pour traiter des pro-
jets techniques bien souvent nor-
malisés.
Nous parlons ici de projets tels
que :
❚ constructions architecturales
❚ génie civil
❚ aménagements du territoire
(plans de quartiers etc.).

MODÉLISATION 3D

PROJETS DE CONSTRUCTION
Les projets destinés à être re-
présentés de façon imagée ou ani-
mée devront tout d’abord être dé-
finis en trois dimensions. En outre,
les divers matériaux seront séparés
par couches distinctes. De même,
les parties de construction qui uti-
lisent une inclinaison ou une rota-
tion (toitures, escaliers, rampes etc.)
seront également séparées par cou-
ches. fig.1: modélisation 2D

FI - 75
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

Une fois que le modèle 3D est con- tés les éclairages, les caméras et les autres
forme au plan architectural, ces données éléments du décor (effets visuels, particu-
sont transférées dans un logiciel de traite- les, ondulations des surfaces, effets de vent,
ment visuel 3D tel que Autodesk 3DStudio explosions, fumées, brouillard, véhicules,
ou plus récemment Kinétix 3DStudioMax. personnages, animaux etc.).
Les divers matériaux sont alors appli- Les figs 1 et 2 montrent un projet de
qués sur le modèle. Sont également ajou- bâtiment public à Evolène.

fig.2: modélisation 3D

FI - 76
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

fig. 3

fig. 4

FI - 77
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

GÉNIE CIVIL
Lors d’un projet de cons-
truction de Génie civil, la re-
présentation par images virtuel-
les facilite l’interprétation des
plans et le montage étant donné
que toutes les pièces et structu-
res sont visuellement reconnais-
sables.

Les figs 3 et 4 montrent le


rendu tridimensionnel d’un
projet de chambre de vannes
pour l’alimentation en eau po-
table d ’une commune. fig.5
A Sion, suite aux déborde-
ments de La Sionne, des ouvra-
ges de protections spéciaux ont
du être entrepris.

Sur la fig. 5, à l ’entrée aval


d’une chambre les angles vifs se-
ront atténués par des protec-
tions incurvées afin d ’éviter
que les gravats ne se bloquent
et obstruent la galerie. Sur la fig.
6, on voit la protection de
tuyaux et conduites souterrai-
nes traversant la galerie.

fig.6

FI - 78
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

IMAGES DE SYNTHESE AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET URBANISME


Dans le cadre de projets de construc-
Les images de synthèse sont compo-
tion, une vue d’ensemble du projet per-
sées de prises de vues traditionnelles mé-
met d’évaluer rapidement l’impact paysa-
langées avec un modèle tridimensionnel.
ger des constructions.
L’intégration du modèle dans l’image se fait
Il permet en outre aux initiateurs du
par positionnement d’une caméra terres-
projet d’évaluer visuellement certains pro-
tre ou aérienne dont la position et l’ouver-
blèmes tels que :
ture sera la même que l’image de base.

fig.7: exemple de projet d ’implantation de chalets de vacances dans une station valaisanne

FI - 79
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

❚ occupation des surfa-


ces par rapport aux
parcelles
❚ hauteurs
❚ répartition
❚ orientation

PLANS DE QUARTIER
Les plans de quar-
tier issus d’études con-
juguées entre le plan
d’aménagement local,
les architectes, les urba-
nistes, les paysagistes,
peuvent également être fig. 8: avant
représentés par photo-
montage. Toutes les
structures du projet peu-
vent ainsi être regrou-
pées sur une seule
photo. Pour le projet des
Frisses à Ayent, les figs
8 et 9 montrent l’inté-
gration par photomon-
tage de l’aménagement
de quartier, réalisé sur
une prise de vue aé-
rienne.

fig. 9: après

FI - 80
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

PROJETS DE fig. 10: avant


CONSTRUCTIONS DIVERSES
Un projet de cons-
truction d’un télésiège
exige une attention toute
particulière face aux pro-
blèmes d’environne-
ment. Lors d’une étude
d’impact, les photomon-
tages sont très explicites
et parlent parfois bien
mieux qu’un rapport.
Ce mode de faire
remplace avantageuse-
ment la construction
d’une maquette étant fig. 11: après
donné que parfois, la
surface à représenter est
très élevée.

FI - 81
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

fig. 12: image intérieure tirée de


l’animation du projet de la maison
de la forêt aux Mayens de Riddes

fig. 13: projet d’ un bâtiment public

FI - 82
GÉNIE RURAL ET ENVIRONNEMENT – MODÉLISATION 3D ET ANIMATION VIRTUELLE

ANIMATIONS VIRTUELLES La densité d’images définie pour le


Si un modèle 3D est destiné à des ani- modèle sera fonction de la vitesse des dé-
mations vidéos, les caméras pourront être placements de la caméra, de son ouverture
et de la rotation du trajet afin de garantir
mobiles et suivront un cheminement dé-
fini par l ’opérateur. De même, les diver- une vidéo fluide. ■
ses focales peuvent être générées indépen-
damment des positionnements.

fig. 14: image tirée d’une animation virtuelle

FI - 83
CONSTRUCTION DE PANORAMAS
PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE
PLUSIEURS IMAGES
David Hasler, EPFL-DE-Laboratoire de commmunications
audio-visuelles, e-mail: David.Hasler@epfl.ch

Ne vous est-il pas déjà arrivé, lors d’un marqué qu’il s’agit là d’une tâche labo-
voyage à l’étranger, de traverser des con- rieuse. Ce que nous exposons dans cet ar-
trées magnifiques et de vouloir les immor- ticle est une méthode qui effectue le col-
taliser sur une magnifique photo?! Quelle lage des photos automatiquement. Evi-
frustration cependant, lorsqu’on rentre au demment, il faudra avoir scanné les ima-
pays et montre les images des vacances à ges auparavant, et disposer d’une bonne
nos amis : la photo n’arrive souvent pas à imprimante pour pouvoir profiter du ré-
restituer l’impression du moment. Une des sultat.
raisons à ce phénomène –mais évidem- Le problème est le suivant : on dispose
ment pas la seule– est que la photo ne con- de 2 images (voir fig. 1) ; on remarque qu’il
tient pas tout le paysage visible à l’œil nu. y a une partie de recouvrement entre les
Techniquement, l’angle de vue de notre œil images, sans quoi la méthode ne marche-
est nettement supérieur à celui de l’appa- rait pas.
reil photo, ce qui nous force à choisir un Rappelons qu’une image peut être re-
élément particulier de la scène. Pour pa- présentée par une matrice dont les élé-
lier à cet inconvénient, il est possible de ments représentent l’intensité de chaque
prendre une multitude de photos du même point de l’image (pour une image en noir
endroit, puis de les recoller pour ne for- et blanc). Par exemple, si un point est blanc
mer qu’une seule grande image. Ceux d’en- sur l’image, il sera représenté par la valeur
tre vous qui l’avez tenté ont sans doute re- 100 dans la matrice, s’il est noir il aura la

FI - 84
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

image 1 image 2

fig. 1: la partie de la fresque qui se trouve sur les 2 images permet d’estimer le
déplacement entre les images

FI - 85
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

valeur -100, s’il est gris il sera égal à 0, et connaît à peu près. Puis, on va le modifier
ainsi de suite. légèrement afin de faire décroître la fonc-
Dans l’exemple des deux images ci- tion objective et ainsi de suite jusqu’à l’ob-
dessus, le mouvement peut être représenté tention du mouvement correct.
par une translation. Supposons que cette Le problème peut être vu d’une ma-
translation soit connue. Pour vérifier son nière totalement différente :
exactitude, on bouge l’image 1 sur l’image 2, Oublions un instant ce qui a été écrit
et fait une comparaison point par point : jusqu’à présent et supposons que nous
on soustrait les éléments des deux matri- sommes à la montagne. Supposons égale-
ces correspondant aux images. Idéalement, ment que le but de la journée soit de trou-
on devrait obtenir zéro à chaque soustrac- ver le point le plus bas du massif monta-
tion. En pratique, à cause des perturba- gneux. Pas de chance, il fait un temps
tions introduites par le dispositif d’acqui- maussade et le brouillard ne permet pas
sition (film, développement, scanner, etc.) de voir à plus de 2 mètres. Une stratégie
leur différence n’est pas nulle (voir fig. 2). possible pour atteindre un point de basse
On introduit alors un critère – appelé altitude consiste à suivre la pente vers le
fonction objective – qui nous permet de dé- bas. Malheureusement, on procédant ainsi,
terminer si l’hypothèse de mouvement est le risque est de se retrouver au fond d’une
satisfaisante. S’il n’y a pas d’objets qui se vallée d’altitude.
sont déplacés dans les images, on choisira Pour en revenir au problème des pho-
généralement la moyenne du carré de la tos, on peut considérer la fonction objec-
différence de chaque point des images. tive comme étant l’altitude du massif mon-
Bref, pour savoir si on a déplacé les images tagneux. Notre position (longitude, lati-
correctement, on choisit de les déplacer un tude) représente le déplacement (transla-
peu différemment, et la fonction objective tion verticale, translation horizontale) né-
devrait augmenter. Le problème se résume cessaire à superposer l’image 2 sur
ainsi à trouver le déplacement qui donnera l’image 1. Le problème qui consiste à trou-
le minimum de la fonction objective. ver le minimum de la fonction objective
Que faire maintenant si on ne con- est similaire à celui qui trouve l’endroit le
naît pas le déplacement a priori? Eh bien plus bas du massif montagneux. La mé-
on va tout simplement supposer qu’on le thode qui consiste à suivre la pente est une

FI - 86
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

fig. 2a: image 1 de la figure 1 à laquelle on a fig. 2b: image 2 de la fig. 1, filtrée
appliqué un mouvement et un filtrage

FI - 87
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

fig 2d: résultat de l’estimation

approche adoptée par les algorithmes dits


de descente de gradient. Ces méthodes souf-
frent du risque d’aboutir dans un mini-
mum local ou, de façon analogue, dans le
fond d’une vallée d’altitude. Pour que cette
méthode fonctionne, il faut soit partir d’un
bon endroit, c’est-à-dire disposer d’une as-
fig. 2c: différence des images (a) et (b). On sez bonne estimation de départ du mou-
constate que la différence dans la zone de vement, soit supprimer les minimums lo-
recouvrement n’est pas tout à fait nulle (i.e caux, ce qui reviendrait à lisser le terrain
grise et uniforme). Ce phénomène est dû au pour ne plus rester coincé au fond des val-
bruit d’acquisition lées. Cette dernière technique est utilisée

FI - 88
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

par les méthodes multi-résolution, c.à.d. rotation de l’appareil n’occasionne pas une
des méthodes qui estiment d’abord le mou- simple translation au niveau de l’image
vement sur une version floue de l’image et (voir fig. 3).
contenant moins de pixels que l’originale, On introduit souvent les changements
pour ensuite disposer d’un meilleur point de focale (zooms) dans les modèles ci-des-
de départ pour l’estimation de l’image sus.
finale. Le modèle le plus général est le dépla-
cement libre dans l’espace. La grande dif-
ficulté liée à ce modèle est l’apparition du
LES DIFFÉRENTS MODÈLES DE phénomène de parallaxe : si un objet est
MOUVEMENT près du photographe, il se déplacera plus
rapidement dans son champ de vision
Pour savoir comment glisser l’image 2 qu’un objet éloigné. Ce phénomène occa-
sur l’image 1, il faut disposer d’un modèle sionne des difficultés majeures lors de la
de mouvement. reconstruction de l’image finale, et fera
Le plus simple est le modèle bi- l’objet de recherches plus approfondies.
dimensonnel. On ne fait que reproduire
l’action de recoller les images avec des ci-
seaux et de la colle. En réalité, ce modèle LES DIFFICULTÉS
suppose que les images proviennent de la
photographie d’un grand poster collé sur Le procédé qui consiste à construire
un mur plat, et que l’appareil photo s’est un panorama constitué d’objets se trou-
déplacé parallèlement à ce mur. Ce mo- vant loin du photographe avec un appa-
dèle est surtout approprié pour recons- reil de bonne qualité dont on connaît les
truire une grande image numérisée avec caractéristiques ne pose pas de problèmes
un petit scanner en plusieurs fois. majeurs, si ce n’est pour égaliser les cou-
Le modèle le plus courant est le mo- leurs entre les différentes photos. Par con-
dèle rotationnel. On suppose que le pho- tre, dès qu’il faut estimer une longueur
tographe prend ses photos en tournant focale, corriger les aberrations de l’optique
l’appareil, mais ne se déplace pas. Contrai- de l’objectif, ou lors d’apparition d’objets
rement à ce qu’on pourrait penser, une mobiles dans la scène, le problème d’esti-

FI - 89
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

fig 3a: modèle translationnel appliqué à une rotation

fig. 3b: modèle projectif appliqué à une rotation. Les images sont superposées en transparence. On
constate que le modèle translationnel est peu adapté pour restituer une image prise en effectuant
une rotation avec l’appareil photo. Sur cette image on peut apercevoir le phénomène de parallaxe:
la lampe qui se trouve en bas de l’image apparaît double.

FI - 90
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

mation se complique considérablement. de l’objectif. Sur la fig. 4a, on peut voir


Ces problèmes peuvent être classés en deux une image recollée sans estimation de lon-
catégories : ceux qui ont trait aux caracté- gueur focale, celle-ci étant supposée être
ristiques de l’appareil photo, et ceux qui égale à 90mm. Sur la fig. 4b, la même
concernent la scène photographiée. image avec estimation de la longueur fo-
cale, dont le résultat a donné 70mm. On
constate une certaine amélioration sur la
ESTIMATION DES PARAMÈTRES DE fig. 4b : la discontinuité de la trace de
L’APPAREIL PHOTOGRAPHIQUE l’avion dans le ciel a disparu.

Lors d’une rotation de l’appareil, il est


important de connaître la longueur focale

fig. 4a fig. 4b

FI - 91
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

INFLUENCE DE LA SCÈNE timation utilisant le critère des moindres


PHOTOGRAPHIÉE carrés ne donnent plus satisfaction. En ef-
fet, ce dernier critère est approprié lors de
Dès qu’un objet a bougé entre la prise perturbations de type gaussiennes (c.à.d.
des différentes images, les méthodes d’es- causées par une multitude d’événements

fig. 5a: illustration de la sensibilité de la méthode aux objets mobiles– Estimation des moindres
carrés. On voit le même skieur à deux instants différents. La méthode n’a pas réussi à aligner la
porte correctement.

fig. 5b: estimation robuste. La porte n’apparaît plus double.

FI - 92
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

fig. 6a: projection d’un paysage sur un plan

fig. 6b: projection du même paysage sur un cylindre

FI - 93
CONSTRUCTION DE PANORAMAS PHOTOGRAPHIQUES À L’AIDE DE PLUSIEURS IMAGES

indépendants et de même nature), alors


qu’un objet mobile n’entre pas dans cette
catégorie. Pour estimer le mouvement do-
minant dans l’image, il faut alors utiliser
un estimateur robuste, par exemple un
estimateur moindre médian (la fonction
objective est alors la médiane du carré de
l’erreur entre les pixels). La fig. 5 compare
le résultat d’une estimation robuste avec
une estimation des moindres carrés.

REPRÉSENTATION DU RÉSULTAT
Lorsque tous les paramètres de mou-
vement ont été identifiés, l’image finale
peut être synthétisée sous plusieurs formes. fig. 7: scène reconstruite à partir d’une
Dans le cadre d’un panorama, on aura ten- séquence vidéo. La double flèche montre la
dance à projeter les images sur un cylindre taille d’une image vidéo
(ou une sphère). Si on veut simuler un
appareil à très grand angle, on aura ten-
dance à faire une projection sur un plan est la création de données destinées à être
(c.f. fig 6). L’avantage de ce dernier est qu’il regardées à l’aide d’un visualiseur, dont
conserve les lignes droites. La représenta- l’application principale serait le tourisme.
tion finale peut également être conservée Les techniques présentées ici peuvent aussi
dans l’ordinateur pour être visualisée en être appliquées à la vidéo, comme l’illus-
réalité virtuelle. tre la fig. 7. Ce dernier exemple montre
qu’il est tout à fait possible d’agrandir l’an-
gle de vue de certaines séquences vidéo,
APPLICATIONS
ou de modifier leur cadrage.■
La plus évidente des applications est
la photographie de panoramas. Une autre

FI - 94
L’INSTITUT EUROPÉEN D’ÉTUDE, DE
RECHERCHE ET D’APPLICATION DU
PAYSAGE ALPIN (IDERALPE)
Jacques Monnier-Raball & Michel Bécholey, IDERALPE, PSE-EPFL

Né en 1992 à Lausanne, de l’initia- l’apanage, dans nombre de pays, des mi-


tive de ses actuels président et secrétaire nistères des armées.
général, soit Jacques Monnier-Raball et Or, s’agissant de cartographie, l’abs-
Michel Bécholey, l’Institut européen traction des signes conventionnels est le
d’étude, de recherche et d’application du prix à payer pour la souplesse d’emploi du
paysage alpin, IDERALPE, a pour finalité support de papier. Mais elle représente une
une meilleure intelligence des divers para- obstacle à la compréhension d’une situa-
mètres qui induisent notre perception d’un tion donnée, notamment pour le profane
paysage, alpin en particulier, mais non ex- peu familier avec la lecture de documents
clusivement, et pour objectif premier la topographiques plans. Aussi a-t-on
conception, le développement et la mise
au point d’un instrument informatique
interactif d’aide à la décision.

DES PLANS-RELIEFS À LA RÉALITÉ


VIRTUELLE
Si «la géographie, ça sert d’abord à
faire la guerre» (Yves Lacoste, 1977), la
carte topographique est devenue l’instru-
ment privilégié des états-majors. Poste de St.-Pierre-de-Chartreuse (Isère) –
Aujourd’hui encore, la cartographie reste Restitution des textures

FI - 95
L’INSTITUT EUROPÉEN D’ÉTUDE, DE RECHERCHE ET D’APPLICATION DU PAYSAGE ALPIN (IDERALPE)

éprouvé le besoin, dans les milieux mili- découvrir, connaître et parcourir des ré-
taires, de rendre les plans plus éloquents gions plus vastes, de manière virtuelle, de
et de leur restituer leur volumétrie, jusqu’à pénétrer des espaces et ce à plusieurs échel-
valoriser leur dimension tactile. Dès le les, par le truchement de l’effet zoom.
XVIIe siècle, la construction des fameux Mieux encore, l’interactivité qu’autorise
plans-reliefs (conservés à Paris, aux Invali- l’ordinateur permet de modifier une situa-
des) n’a pas d’autre origine que la volonté tion initiale à vue, voire en temps réel.
d’illustrer, de la façon la plus concrète, soit S’agissant d’un projet d’aménagement spa-
sous la forme de grandes maquettes en trois tial, d’ingénierie civile, d’urbanisme ou
dimensions, des sites urbains à défendre, à d’architecture, l’observateur a le loisir de
fortifier et à aménager en vue d’opérations comparer plusieurs variantes de solutions
de guerre, défensives et offensives. L’échelle à un problème donné, en examinant cha-
même desdites maquettes –qui peut varier que proposition de plusieurs points de vue,
du 50ème au 100ème– leur interdisait de de près et de loin, dans son ensemble et
couvrir des régions entières. Leur valeur dans le détail, et même de pénétrer à l’in-
descriptive, tant au niveau du bâtiment, térieur du bâtiment A la différence des
qu’à celui de la voirie, de la végétation et maquettes traditionnelles, faites de balsa,
du terrain, était naturellement fonction de bristol ou de sagex, et généralement
d’une élévation suffisante, pour que l’on monochromes, qui se contentent de mon-
pût, sans inconvénient, préparer des affûts, trer la construction dans ses alentours im-
concentrer et déplacer virtuellement des médiats, de façon relativement abstraite,
troupes, élever des redoutes, des saillants la maquette infographique permet au con-
ou des redans… Il fallait suffisamment de traire une vue extensive du projet, dans son
détails pour que le cavalier, l’artilleur ou le contexte paysager le plus large. En plus,
fantassin aient une vision quasi immédiate grâce à la précision des relevés photogram-
du terrain, des obstacles et des matériaux métriques, photographiques et vidéogra-
qu’ils allaient rencontrer en cours de mou- phiques, comme au degré de résolution des
vements d’attaque ou de repli. images, l’accent peut être porté, pour un
Aujourd’hui, l’infographie, c’est-à-dire bâtiment par exemple, sur l’articulation des
l’image de synthèse et l’imagerie assistée volumes, le traitement des façades, le choix
par ordinateur, offre le moyen idoine pour des matériaux, l’expression des textures, qui

FI - 96
L’INSTITUT EUROPÉEN D’ÉTUDE, DE RECHERCHE ET D’APPLICATION DU PAYSAGE ALPIN (IDERALPE)

représentent autant de paramètres et d’ar- dont les compétences sont requises en


guments pour le choix d’un parti vraiment fonction des programmes d’étude et de
pertinent. recherche.
IDERALPE a mis au point un logi-
ciel intégré à sa station ONYX Reality
UN RÉSEAU DE COMPÉTENCES
Engine 2, le logiciel IDEVISU. IDEVISU
L’Institut européen d’étude, de recher- permet d’obtenir des effets de zoom et
che et d’application du paysage alpin donc de passer d’une échelle de figuration
(IDERALPE) est installé au Parc scientifi- à une autre sans solution de continuité.
que de l’EPFL depuis septembre 1996. Il
est notamment partenaire de la Chaire des
L’AIDE À LA DÉCISION
systèmes d’information à référence spatiale
(SIRS, Prof. François Golay), de l’Institut L’instrument informatique interactif
de géomatique du DGR-EPFL, de l’Unité d’aide à la décision que conçoit et déve-
d’information géographique et d’aide à la loppe IDERALPE s’adresse d’abord à des
décision territoriale IGADT (Prof. Pierre collectivités publiques et privées, qui sont
Dumolard), du Laboratoire de la monta- parties prenantes dans des projets impli-
gne alpine (LAMA, CNRS), de l’Univer- quant l’aménagement d’un territoire. Dans
sité scientifique Joseph Fourier de Greno- une société comme la nôtre, où la prépa-
ble, et de l’Institut de géographie de la ration des décisions relève généralement de
Faculté des lettres de l’Université de Lau- commissions ad hoc, souvent constituées
sanne (Prof. Laurent Bridel). Il collabore de tous milieux, profanes pour la plupart
également avec le Laboratoire d’informa- en matière de lecture de plans et de cartes
tique théorique du DI-EPFL (Prof. Gio- géographiques, la présentation de projets
vanni Coray), ainsi qu’avec l’Institut de sous la forme de maquettes infographiques
géobotanique et de botanique systémati- est accessible à tous. Autrement dit, les
que (Prof. Pierre Hainard), de la Faculté intéressés consultés peuvent prendre leur
des sciences de l’UNIL. décision, ou donner leur préavis, en par-
Enfin, IDERALPE élargit son réseau faite connaissance de cause des résultats
de relations de travail à divers indépen- prévisibles, probables ou escomptés. L’ins-
dants, spécialistes de tel ou tel domaine, trument informatique interactif d’aide à la

FI - 97
L’INSTITUT EUROPÉEN D’ÉTUDE, DE RECHERCHE ET D’APPLICATION DU PAYSAGE ALPIN (IDERALPE)

Massif des Diablerets Projet de «métro» des Diablerets: Viaduc

Cabane des Diablerets Projet de la station terminale du «métro»


d’accès au glacier des Diablerets
décision ne concerne donc pas que les pro- celles, prochaines, de notre économie ru-
moteurs, publics ou privés, appelés à juger rale, il importe de disposer d’un outil per-
d’un projet restreint, n’entraînant que des formant, apte à montrer, de manière pros-
conséquences localisées et à court terme. pective, l’évolution possible, probable ou
A la veille de transformations de plus en souhaitable du paysage, par la mise en
plus sensibles de notre environnement œuvre simulée de différents scénarios.■
naturel, transformations consécutives à

FI - 98
TECHNIQUES 3D POUR LE BUREAU
D’INGÉNIEURS
Mauro Pedretti, Bureau d’ingénieurs Passera & Pedretti SA, e-mail:apedretti@ppeng.ch

Le secteur informatique a toujours nateur et de l’imprimerie pour garantir à


constitué pour le bureau d’ingénieurs Pas- ses clients un service d’avant-garde et de
sera & Pedretti SA un point fort. Pour res- grande précision.
ter en harmonie avec l’évolution rapide du Le graphique 2D a été soumis à des
marché, ces moyens techniques ont été développements successifs, visant à amé-
constamment augmentés. liorer le niveau qualitatif du produit fini.
Dès sa fondation, l’entreprise s’est En particulier l’introduction de la cou-
dotée d’appareils spécifiques dans les do- leur et l’augmentation de la précision tech-
maine de la conception assistée par ordi- nique ont facilité l’interprétation de plans

Gare CFF de Bâle

FI - 99
TECHNIQUES 3D POUR LE BUREAU D’INGÉNIEURS

Concours Nibelungstrucke

FI - 100
TECHNIQUES 3D POUR LE BUREAU D’INGÉNIEURS

Tente 700ème Ascona

Station d’essence

FI - 101
TECHNIQUES 3D POUR LE BUREAU D’INGÉNIEURS

Théâtre Kunsaal Lugano

Patinoire de Saas-Grund

FI - 102
TECHNIQUES 3D POUR LE BUREAU D’INGÉNIEURS

spécialement complexes en permettant de existante ; en opposition à celle du photo-


réaliser des documents de haute qualité et montage ou sur une photo déjà prise, est
de compréhension aisée. superposé un objet de synthèse.
En 1995, l’accroissement de la com- Ces deux techniques sont actuelle-
plexité des structures nous a forcé à dessi- ment les plus utilisées dans nos bureaux
ner nos projets en trois dimensions ; en ef- car elles permettent de réaliser un produit
fet, le bi-dimensionnel, malgré les amélio- qualitativement élevé sans dépenser trop
rations continues, n’était pas assez parlant. de ressources informatiques et humaines.
Cette technologie révolutionnaire per- Pour les œuvres particulièrement im-
mettait avant tout d’obtenir une simplifi- portantes ou juste pour la publicité on est
cation efficace du dessin tout en facilitant à même de réaliser aussi des animations:
la visualisation du projet. l’ordinateur doit calculer 25 images par se-
En effet, cette technique garantit la conde où le point de vue est légèrement
possibilité de positionner l’œuvre virtuel- modifié; après, on les visualise en séries suc-
lement dans le paysage, en simplifiant cessives rapides, en obtenant, de cette fa-
l’étude de l’impact visuel. Cette nouvelle çon, l’effet du mouvement. Cette techni-
méthode nous a permis d’obtenir une sé- que est la même que celle utilisée dans les
rie de succès, notamment dans de nom- productions cinématographiques mais le
breux concours importants dans notre coût en temps nous force à en faire une
secteur, nous encourageant à poursuivre utilisation parcimonieuse.
dans cette direction. Comme le secteur informatique est en
Dans notre domaine on utilise des rapide évolution, on doit toujours être at-
techniques semblables à celles du cinéma tentifs aux nouveautés du marché et re-
(Terminator 2, Jurassic Park, Toy Story,…) chercher constamment à améliorer nos
mais moins complexes afin de réduire les connaissances pour réaliser des produits
temps de travail et les coûts de production innovateurs.■
(temps de calcul). Une des méthodes la
plus utilisée est celle de l’image de synthèse,
où tous les composants de l’image sont in-
tégralement rendus par l’ordinateur sans
apport de photo extérieure ou image

FI - 103
LA MODÉLISATION NUMÉRIQUE DU CLIMAT:
UN OUTIL EN PLEINE ÉVOLUTION
Hervé Le Treut, Laboratoire de Météorologie Dynamique du CNRS,
Université Pierre et Marie Curie, Paris, e-mail: letreut@lmd.ens.fr

L’étude de notre environnement pla- d’une prévision du temps, sous la conduite


nétaire, au cours des dernières décennies, d’un chef d’orchestre. Les modèles numé-
a été tributaire de développements tech- riques ont donc bénéficié dès le début de
nologiques nouveaux. L’observation concepts scientifiques déjà établis, et dès
satellitaire a constitué un premier outil qui les années 50, l’ENIAC, premier ordina-
a entièrement modifié la perception du teur installé au MIT sous la direction de
monde qui nous entoure. Mais la météo- von Neumann, était utilisé par J. Charney
rologie, l’océanographie, la climatologie et ses collègues pour des applications mé-
ont aussi été marquées par l’apparition téorologiques. Dans les années 60, de vrais
d’un outil de compréhension, d’analyse, modèles globaux de la circulation générale
dans certains cas de prévision, entièrement de l’atmosphère étaient développés par
nouveau: la modélisation numérique. C’est Y. Mintz et A. Arakawa à UCLA, par
la disponibilité d’une puissance de calcul J. Smagorinski et S. Manabe à Princeton.
sans précédent qui a permis cette émer- Le développement de ces modèles
gence rapide. L’idée de modéliser l’écoule- numériques, toutefois, n’a pas été immé-
ment atmosphérique à partir des équations diat : il s’est heurté à de nombreux problè-
de la mécanique des fluides, elle, est déjà mes qui ont occupé et occupent encore une
ancienne. Elle date au moins de 1922, communauté scientifique nombreuse.
quand le physicien anglais L. Richardson Pour donner une idée du travail accompli,
imaginait un système -resté à l’état de pro- il faut rentrer un peu dans le détail. Les
jet- où plusieurs milliers d’opérateurs hu- modèles numériques d’atmosphère et
mains, rassemblés dans un immense am- d’océan ont d’abord été créés pour simu-
phithéâtre, coopéraient à la réalisation ler les régimes de vent ou de courant à

FI - 104
LA MODÉLISATION NUMÉRIQUE DU CLIMAT: UN OUTIL EN PLEINE ÉVOLUTION

l’échelle du globe, que l’on appelle encore physiques de formation des nuages, de l’in-
circulation générale de l’atmosphère ou de teraction avec la surface continentale pour
l’océan. Pour cela ils utilisent les équations ne prendre que quelques exemples. Les
très classiques de la mécanique des fluides. simplifications nécessaires pour représen-
La composante atmosphérique, par exem- ter ces processus dans les modèles climati-
ple, calcule ainsi aux nœuds d’un maillage ques constituent à la fois une faiblesse des
qui couvre la planète avec une résolution modèles, et l’aliment d’une recherche ac-
de quelques centaines de kilomètres, l’évo- tive et multidisciplinaire, comme nous le
lution, toutes les demi-heures environ, de verrons plus loin.
paramètres tels que le vent, la température, Outre les équations du mouvement,
l’humidité, l’eau nuageuse, les précipita- les échanges d’énergie, en particulier sous
tions, ou l’eau du sol. Pour l’océan la maille forme de rayonnement électromagnétique,
d’espace retenue est souvent plus petite que entre la terre, l’océan, l’atmosphère et l’es-
pour l’atmosphère, mais l’évolution est gé- pace, sont calculés de manière explicite par
néralement calculée de jour en jour. La ré- les modèles. Il s’agit de décrire comment
solution des équations pose des problèmes l’énergie reçue du soleil, est compensée par
difficiles en grande partie parce que cette une énergie terrestre, émise dans le do-
échelle spatiale du maillage est trop lâche maine infrarouge par la surface des océans
pour retenir tous les processus qui ont une ou des continents, les nuages, ou les gaz
importance significative et un grand nom- absorbants de l’atmosphère. L’étude du
bre d’entre eux doivent être représentés de transfert radiatif dans l’atmosphère cons-
manière simplifiée, ou paramétrée. C’est titue aussi un problème physique étudié
le cas des écoulements convectifs respon- depuis longtemps, mais où subsistent en-
sables de la formation des cumulonimbus, core de nombreux processus mal compris
qui ont une taille de quelques kilomètres, – par exemple l’absorption de la lumière
des rouleaux turbulents de quelques cen- solaire dans des nuages aux géométries
taines de mètres qui se forment dans les complexes.
basses couches de l’atmosphère et sont à Le développement des modèles se
l’origine de nuages tels que les strato-cu- poursuit donc. Mais leur niveau de réalisme
mulus, des zones de formation d’eau pro- en fait déjà des outils performants qui sont
fonde dans l’océan, des processus micro- devenus indispensables pour des tâches mul-

FI - 105
LA MODÉLISATION NUMÉRIQUE DU CLIMAT: UN OUTIL EN PLEINE ÉVOLUTION

Représentation schématique d’un modèle de circulation générale atmosphérique

FI - 106
LA MODÉLISATION NUMÉRIQUE DU CLIMAT: UN OUTIL EN PLEINE ÉVOLUTION

tiples: prévision du temps à des échéances ques et océaniques sont couplés pour ne
qui atteignent désormais plusieurs jours, constituer qu’un seul modèle intégré de no-
compréhension fine des différents régimes tre environnement physique. La prise en
de circulation atmosphérique, sensibilité de compte de la dynamique de l’océan
ces circulations à des fluctuations climati- modifié complètement l’échéance des pré-
ques naturelles ou provoquées par la pollu- visions climatiques. Au bout de quelques
tion d’origine humaine. Au cours des der- jours, en effet, l’écoulement atmosphéri-
nières années l’augmentation des ressour- que devient chaotique et oublie ses condi-
ces en temps de calcul a permis de modifier tions initiales : il devient alors impossible
radicalement le type de problèmes aborda- de réaliser des prédictions météorologiques
bles par la simulation numérique. Pour si- précises. Mais l’évolution de l’atmosphère
tuer par un chiffre les progrès accomplis en reste guidée par des processus plus lents
matière de calcul au cours des dernières qui, eux, sont prévisibles. Et c’est le cas en
années, mon laboratoire, le Laboratoire de particulier de la circulation océanique.
Météorologie Dynamique du CNRS, uti- Dans les Tropiques le phénomène appelé
lisait encore en 1982 un CYBER 760 du El-Niño-Southern-Oscillation offre
CNES, pour lequel une simulation d’un l’exemple d’une fluctuation climatique
mois d’évolution de la circulation atmos- naturelle associant étroitement l’atmos-
phérique réclamait plus de 30 heures de phère et l’océan, qui se répète de manière
calcul. A résolution égale, la même simula- irrégulière toutes les quelques années, avec
tion réclame aujourd’hui environ 15 minu- des modifications importantes des régimes
tes de temps de calcul sur un processeur de climatiques locaux. Des études récentes
Cray 90, probablement 8 fois moins sur les montrent aussi qu’une variabilité plus lente
processeurs qui deviendront disponibles encore de l’océan ou du système couplé
l’année prochaine. océan/atmosphère, à l’échelle de la dizaine
Cette différence est considérable et d’années, se manifeste dans l’Atlantique ou
ouvre des domaines de recherches entière- le Pacifique Nord.
ment nouveaux. En particulier il devient Ces fluctuations naturelles du système
possible d’étudier des processus se déve- climatique sont au moins partiellement
loppant sur une durée de plusieurs années, prévisibles, et constituent une première
et pour lesquels les modèles atmosphéri- motivation forte pour le développement

FI - 107
LA MODÉLISATION NUMÉRIQUE DU CLIMAT: UN OUTIL EN PLEINE ÉVOLUTION

des modèles couplés océan-atmosphère. fois difficile à bien comprendre.


Une autre motivation très forte est liée aux D’une part les modèles constituent
risques de plus en plus clairs que l’activité notre seul outil cohérent d’analyse des pro-
humaine puisse modifier irréversiblement cessus environnementaux. Leurs prédic-
cette variabilité climatique naturelle. La tions se font dans le respect de contraintes
modification de la composition chimique physiques fortes (conservation de l’éner-
de l’atmosphère, avec l’augmentation des gie, de l’eau, de la quantité de mouvement)
gaz à effet de serre, ou celle des aérosols, et elles concentrent une expertise considé-
pose un problème à l’échelle d’un ou plu- rable. En outre, la quinzaine de modèles
sieurs siècles : pour essayer de comprendre développés de manière indépendante sur
ce qui peut se passer, il faut pouvoir analy- la planète donne une réponse qualitative-
ser ce qui s’est produit au cours du ving- ment convergente au problème de l’effet
tième siècle, qui a vu l’apparition de ces de serre – aucun ne prévoit que le système
formes de pollutions nouvelles, et l’extra- climatique va demeurer insensible à cette
poler aux siècles futurs. augmentation, et tous manifestent une sen-
La modélisation offre un outil irrem- sibilité plus grande des régions polaires en
plaçable pour étudier ces problèmes et la terme de température, et une sensibilité plus
prévision d’un réchauffement de 1.5 à grande des régions tropicales au niveau hy-
4.5 degrés Celsius associée à un double- drique.
ment du gaz carbonique atmosphérique a Mais par ailleurs, des facteurs d’incer-
constitué l’une des bases scientifiques sur titudes subsistent. On peut peut-être dis-
lesquelles se sont appuyées les conférences tinguer trois grandes familles de problè-
de Rio ou de Kyoto pour réaliser des pré- mes. La première source d’erreur est rela-
visions climatiques. Le problème que po- tive à toutes les simplifications qui sont né-
sent ces simulations est celui de leur crédi- cessaires dans la construction des modèles
bilité, ou, pour le dire d’une autre manière, eux-mêmes, et que nous avons évoquées
le problème des incertitudes qui y sont as- plus haut. La deuxième est intrinsèque au
sociées. Face à des monstres informatiques système climatique lui-même, qui n’est
dont la conception reste récente, un cer- tout simplement pas un système entière-
tain scepticisme peut être de rigueur. Il y a ment prévisible. C’est l’effet bien connu
là un débat qui est légitime et qui est par- sous le nom d’effet des ailes de papillon, qui

FI - 108
LA MODÉLISATION NUMÉRIQUE DU CLIMAT: UN OUTIL EN PLEINE ÉVOLUTION

exprime que tout battement d’ailes, aussi festations initiales de l’effet de serre. Cette
minime soit-il, modifie irréversiblement intégration de toutes les composantes chi-
l’histoire de l’atmosphère. Il en résulte que miques, biochimiques ou physiques du
toute prévision climatique est une prévi- système climatique constitue l’un des
sion statistique. La nature profondément grands chantiers ouverts dans le domaine
aléatoire de ces processus n’est pas toujours de la modélisation.
bien admise : chaque année les interroga- L’accumulation de ces facteurs d’in-
tions sur le pourquoi d’un hiver particuliè- certitude rend sans doute illusoire, pour le
rement froid reviennent à la une des jour- moment, la prédiction détaillée d’une évo-
naux. Malgré tout, nous nous sommes lution du climat futur. On peut même dire,
habitués à l’idée que deux hivers successifs en grossissant un peu le trait, que plus la
ne sont pas identiques mais qu’un hiver recherche progresse, plus l’énorme com-
est en moyenne plutôt plus froid qu’un été, plexité des processus qui participent à
et c’est ce type de raisonnement qui doit l’évolution de notre environnement glo-
être transposé dans le domaine climatique : bal apparaît de manière évidente, et plus
l’effet de serre va guider lentement l’évo- reculent ainsi les possibilités de prévoir en
lution du climat, mais il va se superposer détail l’évolution future du climat.
une variabilité naturelle qui rend le sys- En conclusion, si le système climati-
tème partiellement imprévisible. Un troi- que n’est pas nécessairement prévisible
sième facteur vient limiter la portée prati- dans le détail, l’ensemble convergeant des
que des modèles: c’est qu’en dépit des pro- résultats obtenus reste un facteur fort, qui
grès affichés dans ce domaine, ce sont en- explique que la communauté scientifique
core le plus souvent des modèles physiques, ait ressenti le devoir d’alerter l’opinion sur
qui négligent les composantes biologiques les risques climatiques liés à une
ou chimiques du système, dont le rôle es- modification de la concentration atmos-
sentiel apparaît pourtant de plus en plus phérique en gaz à effet de serre. Mais cette
clairement. Au cours des dernières années exploitation des modèles doit se faire en
les aérosols soufrés ont ainsi été reconnus réalisant qu’elle transmet une expertise
comme l’un des facteurs importants sus- sophistiquée sur un problème complexe,
ceptibles de masquer, dans l’hémisphère plutôt qu’une prédiction précise de ce qui
Nord tout au moins, les premières mani- peut se passer. ■

FI - 109
HAEDB
BASE DE DONNÉES DE
L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE
Silvio Merazzi, SMR S.A., Bienne, CH, merazzi@smr.ch, Richard Schwane, ESTEC/ESA,
Noordwijk, NL, schwane@euler.jsc.nasa.gov & Jan Vos EPFL-DGM-LMF, jan.vos@epfl.ch

INTRODUCTION rité et la localisation des données, ceux qui


touchent aux fonctions de compression des
Dans cet article, nous décrivons le données, et ceux qui concernent la présen-
concept et les fonctionnalités du système tation graphique des résultats.
de base de données HAEDB (Hypersonic
Aerothermodynamic Engineering Data- LE CONTEXTE DU PROJET
base - base de données de l’aérothermo-
dynamique hypersonique) qui vient d’être Durant le programme de construction
installé à ESTEC (European Space Research de la navette spatiale européenne HER-
& Technology Center) et qui est à présent MES et les programmes technologiques
accessible à la communauté européenne de qui ont suivi, un très grand nombre de
l’aéronautique spatiale. Tout d’abord, nous données aérothermodynamiques ont été
décrirons les raisons qui ont conduit aux récoltées, provenant de la conception aé-
principes et à l’implémentation de rothermodynamique du véhicule et de la
HAEDB. Ensuite, nous décrirons le con- détermination des points critiques sur les
cept de la base de données qui est issu des différentes variantes des formes du véhi-
fonctionnalités demandées et des limita- cule ou sur les formes dites génériques. En
tions techniques, par exemple pour les taux général, les formats de données utilisés par
de transfert de données. A la fin de l’arti- les différents collaborateurs européens au
cle, nous rentrerons plus en détail sur les programme HERMES sont tout aussi di-
outils utilisés, ceux qui touchent à la sécu- vers que leurs méthodes de travail ou les

FI - 110
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

modèles qu’ils utilisent. La conséquence est d’années auparavant ne sont plus utilisés,
qu’il est très difficile de comparer deux jeux malgré le fait qu’une grande quantité de
de résultats expérimentaux ou numériques ces résultats peut être encore de valeur.
sans un pré-traitement important. L’utilisation d’un système de base de
Par conséquent, un des efforts du pro- données peut aider à résoudre ce problème.
gramme de la conservation de la techno- A la place d’un processus de sélection basé
logique MSTP (Manned Space Transport- sur les besoins du moment et en écartant
ation Programme), était de se concentrer les données brutes, toutes les données sont
sur l’harmonisation des formats et la syn- à présent conservées et préservées.
thèse des données brutes afin que l’infor- Les documents de synthèse sont tou-
mation soit accessible à la communauté jours disponibles chez les experts, mais ils
d’utilisateurs non directement impliqués ne sont plus la seule source de données.
dans les travaux techniques d’HERMES. Les données brutes sous forme d’enregis-
En considérant que les rapports de trements expérimentaux ou de résultats
synthèse écrits par des experts, en général tridimensionnels de simulation sont aussi
les personnes qui ont effectué le travail stockées avec un jeu d’outils de post-trai-
technique, sont très utiles, car ils permet- tement, qui permettent de générer de fa-
tent à une personne qui n’est pas forcé- çon semi-automatique les courbes de syn-
ment directement impliquée dans le pro- thèse, par exemple des coupes planes à tra-
jet d’utiliser les résultats d’une expérience vers des champs 3D aux positions des ins-
et/ou d’un calcul CFD qui s’est déroulé truments de mesures expérimentaux. Dans
pendant le programme, le risque existe ce cas, en se basant sur les données brutes
d’une méconnaissance des hypothèses de toujours disponibles et sur la génération
départ ou du fait que certains résultats ont automatisée des données de synthèse, la
été invalidés par la suite. Dans ce cas, la connaissance de nouvelles incertitudes ou
synthèse devrait être refaite, ce qui souvent de données brutes mises à jour permet de
dans la pratique n’est pas possible, car les générer des nouveaux documents de syn-
experts ont entre temps changé de projet. thèse basés sur de nouveaux critères de sé-
Nous sommes donc dans la situation où le lection de données.
travail technique devient rapidement ob- Le système HAEDB a été développé
solète et où les résultats même produits peu pour l’ESA (European Space Agency) par un

FI - 111
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

consortium suisse composé de l’EPFL, stockées sur disque. Ce sont des don-
l’Entreprise Suisse d’Aéronautique et de nées résultant de post-traitement, par
Systèmes à Emmen, et SMR. exemple coupes ou surfaces à partir d’un
calcul CFD tridimensionnel, des fichiers
postscript contenant des textes de syn-
LES CONCEPTS thèse – ceux des chairmen des groupes
de travail tests – et des données expéri-
Le concept de cette base de données mentales dans un format graphique ou/
se déduit des objectifs qui ont été décrits et texte.
dans le paragraphe précédent. De plus, on Les données de synthèse qui sont crées
a dû tenir compte de certaines limitations à la demande d’un utilisateur sont en gé-
et contraintes, par exemple la disponibi- néral gardées sur disque jusqu’à ce qu’elles
lité du personnel pour maintenir la base soient invalidées par de nouvelles données
de données ou les taux de transfert des brutes. La quantité de données directement
données à travers le réseau. Afin d’offrir accessibles sur le net va donc augmenter,
aux utilisateurs d’HAEDB un maximum et l’intervention humaine décroître avec le
d’informations utiles, des temps de réponse temps.
rapides et un minimum de données ren- Les utilisateurs peuvent se connecter
dues obsolètes par le fait que les papiers de à HAEDB à travers le Web. Une interface
synthèse ne sont pas immédiatement mis par menus successifs guide l’internaute
à jour avec les nouveaux résultats, la struc- jusqu’à l’information désirée. Si celle-ci
ture suivante a été choisie, basée sur deux n’est pas encore disponible, parce que per-
catégories de stockage différentes : sonne n’a encore demandé le post-traite-
❚ les données brutes (par exemple en pro- ment de ce jeu de données brutes, l’utili-
venance de calculs CFD ou de campa- sateur est invité à envoyer un e-mail au
gnes expérimentales) sont stockées sur manager de la base de données, qui initia-
des cartouches et peuvent être copiées lisera le post-traitement nécessaire à l’ob-
sur disque à la demande d’un utilisateur tention de l’information demandée. Tou-
ou dans le but d’un post-traitement ; tes les fonctionnalités sont accessibles à
❚ les données qui sont immédiatement ac- travers une interface Web ou par le biais
cessibles aux utilisateurs d’HAEDB sont d’une interface utilisateur locale (écrite en

FI - 112
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

tcl/tk) en tenant compte du degré de pri- préparation en batch d’un graphique, suivi
vilèges d’accès (voir fig.1) : par une copie ou un affichage sur le poste
de travail du client.
ACCÈS DE NIVEAU 1
réservé aux personnes qui maintien- ACCÈS DE NIVEAU 3
nent la base de données. Elles ont plein C’est l’accès public par le Web. Les
pouvoir pour créer, mettre à jour la base. requêtes peuvent être faites en consultant
Les manipulations de données sont acces- les tables autorisés à ce niveau, c’est-à-dire
sibles graphiquement en interactif. L’accès les résultats de synthèse, à travers l’inter-
au serveur à ce niveau n’est possible qu’à face Web. Les sorties graphiques sont li-
travers une connexion locale au serveur. mités à des bitmaps prédéfinis.
Les comptes utilisateurs des niveaux
ACCÈS DE NIVEAU 2 1 et 2 sont protégés par mots de passe afin
cet accès offre des possibilités limitées d’assurer que seuls les utilisateurs autori-
à un client distant. Les sorties graphiques sés peuvent travailler sur les données. Ceci
sont limitées à des bitmaps fournis par l’in- garantit aussi les droits de propriété des
terface Web et les courbes sont générées différents contributeurs à la base de don-
par le système de traitement de données nées.
distant, c’est-à-dire le serveur. L’informa- Dans certains cas exceptionnels, les
tion est affichée sous format bitmap ou données brutes qui ne peuvent être envoyées
postscript. Cela peut être, par exemple, la par le réseau à cause de taux de transfert

Non-privileged Acess Privileged Acess


(Remote Clients) (Local)
Access level 2 and 3 Access level 1

Remote client 1 Server Platform Server maintenance


Level 3 via WWW only

Remote client Privileged client fig.1: Schéma de principe


Level 2 via WWW HAEDB pour l’accès à la base de
and client-based tools Data Base données

FI - 113
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

insuffisants peuvent être demandées au tème fournira en plus, des données en


manager HAED par e-mail. Dans ce cas les liaison avec celles demandées et avec les-
données seront envoyées sur cartouche. quelles il peut être utile de travailler. Un
exemple de requête et du résultat de la re-
quête sont montrés sur la fig. 2.
LES OUTILS Toutes les personnes qui contribuent
à la base en envoyant des données peuvent
Nous avons développé des outils de utiliser une interface interactive qui de-
travail dans le cadre du projet HAEDB. mande des informations décrivant les don-
Certains, comme ceux de la boîte à outils nées. Ces informations sont ensuite trans-
du gestionnaire de la base de données ou formées en interne en mots-clés qui res-
les outils de conversion et traitement des tent associés aux données tant que celles-
données sont destinés au gestionnaire ci résident dans la base, et qui sont utilisés
HAEDB pour lui permettre de modifier par le moteur de recherche pour identifier
des données ou d’en introduire de nouvel- les données.
les. D’autres, comme l’outil de recherche
de données et ceux d’extraction sont des- LA BOÎTE À OUTILS DU GESTIONNAIRE
tinés aux clients. Une description plus dé- Cette boîte à outils contient les fonc-
taillées de certains outils est donnée plus tions nécessaires pour importer de nou-
loin. veaux jeux de données, générer des docu-
ments de synthèse (voir fig. 3), indexer les
LE MOTEUR DE RECHERCHE DE DONNÉES données et maintenir la base. On y accède
L’utilisateur qui veut travailler avec les par une interface Web sur le réseau
données afin par exemple de valider ses intranet.
propres calculs avec des résultats précédents
déjà stockés dans HAEDB, doit au préa- LES OUTILS DE TRAITEMENT DES DONNÉES
lable faire une extraction de données. Dans Ce sont les instruments pour créer,
ce but, nous avons implémenté un sys- maintenir et interroger la base. En font
tème de mots-clés. Les données peuvent partie les fonctions de manipulation et vi-
être localisées en spécifiant des mots-clés, sualisation de données. Les outils de ma-
par exemple la vitesse du véhicule. Le sys- nipulation de données sont les outils de

FI - 114
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

fig. 2: Exemple d’une requête à HAEDB et


résultat de la requête

FI - 115
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

lecture de données et de conversion dans dans un mode différé. Pour le niveau 3 les
le format standard (fichier fortran) ainsi données ne sont accessibles qu’à travers une
que les outils d’insertion, extraction, et interface Web. Les résultats d’une requête
mise à jour. consistent aux données réclamées (princi-
Dans les fonctions de visualisation, on palement des données de synthèse) et à des
retrouve des outils pour la représentation pointeurs vers les fichiers de la base de don-
graphique des modèles de calculs en dy- nées où les données détaillées résident. Les
namique des fluides et des outils pour la clients qui ont accès aux données de ni-
présentation graphique des données. veau 2 ont la possibilité de consulter, au
L’extraction des données est possible moins partiellement, les fichiers contenant
à tous les niveaux d’accès. Le niveau 1 per- les données détaillées.
met d’accéder à toutes les données, à tra- En général, tout type de données peut
vers l’interface locale pour accéder aux être extrait en fonction de n’importe quel
outils d’extraction. Le niveau 2 permet critère d’extraction. Cependant, du fait que
d’accéder à un nombre limité de données les calculs sont liés aux informations géo-
Model HALIS, Mach= 9.80, Alpha= 40.00, Beta=0.000000
1.8

1.6 EPFL, Field=Q1, Comp=Cp


AS, Field=Q1, Comp=Cp
ONERA, Field=Q1, Comp=Cp
1.4 VUB, Field=Q1, Comp=Cp
DLR, Field=?, Comp=Cp
1.2 EXP, Field=?, Comp=Cp
1

0.8

0.6
fig.3: Exemple de
0.4
document de synthèse:
0.2 Cp dans le plan de
symétrie du cas test
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3 0.35 0.4 HALIS

FI - 116
HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

fig. 4: Exemple des outils d’extraction


de données: les contours de Cp sur la
surface du modèle HALIS

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HAEDB: BASE DE DONNÉES DE L’AÉROTHERMODYNAMIQUE HYPERSONIQUE

métriques et physiques, la plupart du phe complet à partir d’un calcul fait sur la
temps les données seront extraites suivant moitié du modèle. C’est réalisé en copiant
les critères tels que: les données géométriques et les champs de
❚ géométrie : on extrait les nœuds, les élé- solution. Un autre cas d’augmentation de
ments, les facettes ; on peut spécifier des données consiste à calculer les quantités
critères supplémentaires comme flags de dérivées. Certaines quantités dérivées sont
sélection de nœud, d’élément ou de fa- relativement faciles à obtenir par extrac-
cette ; tion des données depuis la base, en effec-
❚ champs de solution : on extrait un tuant les calculs et en insérant les nouveaux
champ de solutions et on l’ajoute à la champs dans la base. Exemple : intégrer le
géométrie dans la forme voulue. Voir cœfficient de pression Cp sur la surface
l’exemple en fig. 4 ; d’un avion. D’autres quantités dérivées
❚ attributs : on extrait les attributs, comme sont des lignes ou bandes de courant et
le nombre de Mach du calcul, etc. des lignes de frottement.

LA RÉDUCTION DES DONNÉES


Elle concerne les données expérimen- CONCLUSION
tales et calculées. La plupart de ces outils
de réduction sont utilisés par le gestion- Le système HAEDB est à présent ac-
naire pour mettre à jour les données de cessible pour une utilisation générale. C’est
synthèse. Il peut s’agir de réduction 3D, une collection dynamique de données bru-
2D ou 1D des données calculées (voir tes, de données traitées et de documents
exemples de diagrammes de synthèse sur de synthèse, ce qui implique que la quan-
la fig. 3). tité de données accessibles interactivement
va augmenter avec le nombre d’utilisateurs
L’AUGMENTATION DES DONNÉES de la base de données. Le système HAEDB
Cette fonction est régulièrement ap- est accessible à l’adresse :
pliquée par le gestionnaire pour mettre à http://haedb.estec.esa.nl:8080/ ■
jour les données de synthèse du système
HAEDB. Cela peut être la duplication de
données, par exemple pour créer un gra-

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RÉFÉRENCES

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