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Revue La Licorne
Numéro 50
Le vocabulaire à...

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Index des auteurs
des articles langue : l’exemple LES AUTEURS
Index des auteurs d’Andromaque Bénédicte LOUVAT
cités dans les
Publié en ligne le 20 mai 2009 Maître de Conférences
articles
à l’Université de
Montpellier III
REVUE LA LICORNE Par Bénédicte LOUVAT (littérature française
Dernier numéro du XVIIe siècle).
Auteur d’une thèse
Sommaires détaillés sur Théâtre et
En texte intégral musique. Dramaturgie
SOMMAIRE de l’insertion musicale
APPROCHES DU
dans le théâtre
ANDROMAQUE ET LA CRITIQUE LINGUISTIQUE (1668-1768) français de (1550 à
CONTEMPORAIN PAUVRETÉ LEXICALE ET EFFET DE RÉSONANCE 1680), Champion,
Hors série créations 2002. S’intéresse au
Ressources théâtre et à la théorie
dramatique du XVIIe
siècle ; a donné une
TEXTES RARES La sobriété du vocabulaire de Racine est devenue, comme le rappelle Poétique de la
Ouvrages parus Charles Bernet dans la partie liminaire de son Vocabulaire des tragédies tragédie classique
de Jean Racine. Analyse statistique 1 , un lieu commun de la critique (SEDES, 1997), ainsi
HORS-SÉRIES racinienne depuis la fin du XIXe siècle. Remis en cause en 1955 par la qu’une édition des
publication des premiers index portant sur l’ensemble du théâtre Discours de Corneille
Colloques
classique, parus sous la direction de P. Guiraud 2 , ce lieu commun a (en collaboration avec
néanmoins perduré puisque « selon une idée reçue, qui survit encore M. Escola ; GF-
A PROPOS aujourd’hui, Racine aurait employé entre 800 et 1200 vocables dans Flammarion, 1999),
Politique éditoriale l’ensemble de ses tragédies et environ 1400 dans l’ensemble de son d’Antigone de Rotrou
et de Sophonisbe de
Comité éditorial œuvre » 3 . Jacques-Gabriel Cahen, auteur de l’avant-dernière étude Mairet (STFM, 1999).
Pour se procurer La sur la question 4 , fixe à 2000 le nombre de mots utilisés dans la
Licorne totalité du théâtre racinien. Le recours aux méthodes et aux outils de la
Feuille de style statistique lexicale ainsi que la prise en compte du théâtre tragique
Licorne cornélien, sans cesse mobilisé pour comparaison, permettent à Ch.
Bernet de nuancer considérablement l’idée d’une pauvreté du
vocabulaire de Racine comme marque propre de son théâtre, et ce
doublement : en revoyant à la hausse les chiffres jusqu’alors proposés
et en établissant une analyse comparée des différentes pièces, qu’il
classe selon la richesse (ou la pauvreté, tout étant affaire de point de
vue) relative de leur vocabulaire. Le nombre total de vocables utilisés
dans le théâtre de Racine est ainsi fixé à 3719 dont 375 noms propres
(2626 vocables, dont 252 noms propres, pour les tragédies profanes).
Quant au classement des pièces, il est essentiellement établi à partir de
quatre indices : le nombre de vocables (les noms propres étant
distingués des termes qui relèvent du vocabulaire commun et, au sein
de ce deuxième groupe, les adjectifs, substantifs et verbes des mots
fonctionnels), le nombre de vocables de fréquence 1 (ou à occurrence
unique dans l’œuvre considérée), le nombre d’hapax ou vocables de
fréquence 1 dans l’ensemble du théâtre de Racine et le nombre de
vocables exclusifs (apparaissant dans une seule pièce,
indépendamment du nombre d’occurrences dont ils font l’objet).
Le palmarès des pièces classées en fonction de la richesse de leur
vocabulaire, et ce dans l’ordre décroissant, donne Esther, Athalie et
Phèdre en rangs 1, 2 et 3 et Andromaque en dernière position. Sans
reprendre dans le détail les analyses de Ch. Bernet, on citera encore
quelques chiffres permettant d’appréhender de plus près cette sobriété
du vocabulaire d’Andromaque : Racine y utilise 1269 vocables (dont 31
noms propres) ce qui, de ce point de vue, place la pièce au troisième
rang après La Thébaïde et Alexandre ; parmi ces mots, on relève 420
vocables de fréquence 1 (contre 617 dans Phèdre) et 21 vocables
exclusifs (le plus petit nombre de tout le théâtre racinien, quand Phèdre
en compte 116) 5 ; son faible nombre d’ hapax (19 vocables
communs) la situe au premier rang du groupe des pièces (dans l’ordre :
Bérénice, Mithridate, La Thébaïde , Alexandre, Iphigénie et Bajazet )
« dont le vocabulaire se distingue le moins du “fonds commun
racinien��? » 6 . La section « Bilan et conclusions » radicalise encore
le propos : « la pièce est celle qui se distingue le moins du fonds lexical
de Racine, son vocabulaire n’est pas original » 7 , et fournit quelques
explications. Cette sobriété est due, en premier lieu, à une économie
dans le choix des mots — et le propos n’est pas redondant — : « Racine
utilise le vocabulaire des passions qui apparaît déjà dans les pièces
précédentes et qui reviendra par la suite » ; elle ressortit, ensuite et
surtout, à la distribution des parties du discours : alors que les noms
propres sont en excédent (peu de vocables, mais qui font l’objet
d’occurrences nombreuses), on note un déficit important des adjectifs
et des substantifs (soit les parties de la langue qui apportent le plus
grand nombre de vocables) et un excédent des mots fonctionnels 8 .
Par la place qui lui est assignée dans le corpus racinien autant que par
sa valeur d’emblème du lexique spécifiquement racinien, le vocabulaire
d’Andromaque est ainsi doublement remarquable. Les rares vocables
excédentaires appartiennent en effet, pour leur grande majorité, au
lexique senti comme typiquement racinien, et ils relèvent du champ des
passions ; ce sont notamment les termes œil (ou yeux) , charme et
attrait 9 . On aurait donc affaire, avec Andromaque, non seulement à
la pièce dont le vocabulaire est le plus pauvre (ou le plus sobre), mais
encore et peut-être surtout au modèle archétypal du vocabulaire de
Racine, à ce qu’on pourrait appeler l’essence du lexique racinien. En
réalité, les deux propositions sont intimement liées : c’est parce qu’elle
est la pièce dont le vocabulaire est le plus pauvre qu’Andromaque est
au plus près du vocabulaire essentiel ou de ce que Ch. Bernet appelle
encore plus justement « le fonds commun du lexique racinien » ; on
peut dès lors considérer que ce n’est pas le vocabulaire de Racine dans
son ensemble qui est pauvre, mais seulement ce fonds commun dont
les pièces au vocabulaire pauvre s’écartent peu et qu’elles
n’enrichissent pas de vocables exclusifs ou d’hapax.
Les relevés de Ch. Bernet ainsi que les conclusions auxquelles il aboutit
nous serviront ici de point de départ pour réfléchir sur l’utilisation qui
est faite dans Andromaque de ce vocabulaire simple, pour articuler, en
d’autres termes, une analyse du lexique avec une analyse de l’écriture
et de la langue raciniennes telles qu’elles sont actualisées dans cette
tragédie. La question de la langue, sinon de l’écriture raciniennes, est
en effet au cœur de La Folle Querelle de Subligny, créée au Palais-Royal
le 25 mai 1668, soit six mois après la tragédie de Racine. La préface
comporte ce jugement sans appel :
… si l’on se veut donner la peine de lire l’Andromaque avec quelque
soin, on trouvera que les plus beaux endroits où l’on s’est écrié et qui
ont rempli l’imagination de plus belles pensées, sont toutes
expressions fausses ou sens tronqués qui signifient tout le contraire ou
la moitié de ce que l’Auteur a conçu lui-même, et que parce qu’un mot
ou deux suffisent à faire souvent deviner ce qu’il y veut dire, et que ce
qu’il veut dire est beau, l’on y applaudit, sans y penser, tout autant
que s’il était purement écrit et entièrement exprimé. 10

Après avoir nommé quelques-unes de ces « expressions fausses »,


Subligny dit enfin en avoir compté « près de trois cents ».

En passant des conclusions de Ch. Bernet au jugement de Subligny, on


ne revient pas seulement trois siècles en arrière ; on quitte le relevé
statistique des vocables et des occurrences pour une réflexion sur
l’agencement de ces vocables dans le discours. Il y va dès lors, non
seulement d’une grammaire complète, qui prend notamment en
compte la syntaxe et la sémantique, mais encore d’une interrogation
sur la correction de la langue de Racine et, à terme, sur sa « pureté ».

ANDROMAQUE ET LA CRITIQUE LINGUISTIQUE (1668-1768)

La langue d’Andromaque a donné lieu, dans l’intervalle d’un siècle


exactement (de 1668 à 1768), à cinq commentaires ; seul le premier,
celui de Subligny, est exclusivement consacré à la troisième tragédie de
Racine, les quatre suivants, qui datent du XVIIIe siècle, prenant place
dans des ouvrages dévolus à l’ensemble de l’œuvre de Racine 11 .

La Folle Querelle de Subligny

La singularité du texte de Subligny ne tient d’ailleurs pas au fait qu’il


s’intéresse uniquement à Andromaque, mais bien plutôt à la forme
même de ce texte : comédie bâtie sur le modèle de La Critique de
l’Ecole des Femmes et destinée d’abord à la représentation, il est le fait
d’un adversaire de Racine, qui juge sans ménagement une tragédie
dont le succès a été immense ; la critique de la langue y est cantonnée
au troisième acte uniquement (même si la préface fait une large place à
la question), et certains tours sont condamnés sans véritable
explication. Le maître-mot de la critique, formulé par l’auteur dans la
préface et placé à plusieurs reprises dans la bouche des personnages
dont il a fait ses porte-parole, est en effet celui de « galimatias ».
On peut cependant classer les expressions condamnées par Subligny
en deux groupes relativement imperméables : d’un côté les expressions
qui contiennent quelque obscurité de sens et qui, dans certains cas,
confinent à l’absurdité ou au non-sens ; de l’autre les expressions qui
pèchent contre l’usage, et où se trouvent notamment associés deux
termes (un substantif sujet ou objet et un verbe par exemple) que la
langue n’associe jamais. De ce deuxième groupe relèvent par exemple
« rabaisser des attraits » 12 , « exécuter des vœux » 13 , « venger
des mépris » 14 , « Hector tomba » et « Troie expira » 15 , « le
courroux de ma fortune » 16 ; Subligny conteste la légitimité de telles
constructions : « on dit bien rabaisser le vol, rabaisser l’orgueil, le prix,
etc. mais point du tout rabaisser des attraits », « exécuter des ordres »
et non pas « des vœux », « punir » et non « venger » des mépris ; il eût
mieux valu dire « Hector expira » et « Troie tomba » 17 , c’est-à-dire
conserver la construction habituelle du verbe expirer avec un substantif
animé humain et celle du verbe tomber avec un inanimé ; enfin on ne
doit pas dire « le courroux de la fortune » lorsque « la fortune signifie la
condition, la misérable posture de quelqu’un » 18 , soit une entité
abstraite (distincte de l’allégorie de la Fortune qui peut pour sa part
avoir du courroux). Au sein du deuxième groupe, on relèvera quelques
expressions qui, isolées de leur contexte d’origine — et l’efficacité de la
critique de Subligny tient précisément à son parti-pris anthologique —
et prises au pied de la lettre, résonnent comme de véritables non-sens
ou à tout le moins comme des adynaton ; il en va ainsi de « avares du
sang prodigué » 19 , « courir au piège que j’évite » 20 ou « voir ses
yeux sans pouvoir » 21 . La première expression pèche doublement
contre le bon sens, comme l’expliquent deux des personnages de La
Folle Querelle : tout d’abord, « pour devenir avare d’un sang, il faut en
avoir usé auparavant sans avarice » — mais Oreste n’a jamais été
prisonnier des Scythes, qui lui ont « fermé leur Temple » — ; ensuite,
« Oreste vivant encore, son sang n’était point prodigué » 22 . On
comprend aisément ce qui peut choquer dans la deuxième expression,
et il fallait dire : « courir au piège que je voulais éviter », c’est-à-dire
faire précéder le verbe central de la proposition relative d’un semi-
auxiliaire modal. Pour le troisième exemple, la critique de Subligny se
fonde sur le refus de la lecture figurée — « de quel œil » fonctionnant
comme catachrèse et signifiant simplement « de quelle manière » et
« ses yeux » désignant, de façon métonymique, les charmes
d’Hermione — : prise en son sens littéral, l’expression devient non
seulement fautive mais tout à fait ridicule.
C’est en grande partie à cause des critiques de Subligny que Racine
réécrit, dès l’édition de 1675, certains vers d’Andromaque. Le vers 124
fait partie de ceux-là : à « ses attraits offensés et ses yeux sans
pouvoir », Racine substitue : « son hymen différé, ses charmes sans
pouvoir ». A la scène 2 de l’acte II, ce sont douze vers (les vers 505-508
et 515-520) qui sont réécrits en considération des critiques massives
émises par Subligny. La docilité du poète à l’égard d’un juge si sévère
et, disons-le, souvent injuste, ne laisse pas de surprendre. Pour
Georges Forestier, cette attitude s’explique par le fait que l’expression
était considérée, au XVIIe siècle, comme le moins important dans la
tragédie 23 — on se souvient du mot célèbre rapporté par Louis
Racine : « Quand il entreprenait une Tragédie, il disposait chaque Acte
en prose. Quand il avait ainsi lié toutes les scènes entre elles, il disait :
Ma Tragédie est faite , comptant le reste pour rien » 24 . On peut
cependant contester, ou nuancer au moins le jugement : Racine, en
effet, ne réécrit pas tous les vers ou expressions condamnés par
Subligny, et il conserve bon nombre de formules accusées de n’être que
« galimatias » — parmi lesquelles, notamment, « avares de mon sang
prodigué » et « courir au piège que j’évite ». S’il fait donc quelques
concessions — et l’on peut gager qu’il n’aurait pas été aussi « docile » si
la critique s’était exercée sur des pièces plus tardives, lorsque son
magistère de dramaturge était fermement établi —, il garde bon
nombre d’expressions imagées qui font incontestablement violence à
l’usage et, parfois, au bon sens.
C’est de ce dialogue attesté entre le texte d’ Andromaque et le
métatexte de La Folle Querelle que le commentaire de Subligny tire, a
posteriori au moins, une autre de ses particularités — et l’intéressant
est que ce dialogue est postulé par la comédie et par sa préface,
puisque Subligny conçoit en partie sa critique comme une série de
conseils donnés à un jeune poète qui, quoique brillant, doit encore
progresser 25 . Rien de tel, évidemment, chez les commentateurs du
XVIIIe siècle : c’est à un texte figé, statufié, qu’ils ont affaire, et la
posture critique qu’ils adoptent à son égard est déjà celle de l’historien
de la langue et / ou de la littérature. Dans ces conditions, on comprend
aisément qu’ils s’appuient sur le texte de la dernière édition collective
et qu’ils ne commentent pas, par conséquent, exactement le même
texte que celui que commentait Subligny.

De la faute de grammaire à la licence poétique : l’abbé


d’Olivet et Louis Racine

Mais il y a plus : entre 1668 et 1738, date de parution des premières


Remarques de grammaire sur Racine , c’est l’orientation et la
signification même du commentaire linguistique de l’œuvre du
dramaturge qui se sont transformées. La prolifération des
« remarques » sur la langue de Racine a en effet partie liée avec la
classicisation du théâtre de Racine et de sa langue, conçue comme
modèle de la langue française. L’abbé d’Olivet, auteur des Remarques
de 1738 et membre de l’Académie, ne cache pas, ainsi, l’enjeu de son
ouvrage : puisque Racine doit servir de modèle à la postérité « et pour
bien penser, et pour bien écrire » 26 , il importe de relever les
obscurités et les fautes de grammaire qu’il a pu commettre, pour les
expliquer et les justifier parfois, pour les condamner en certaines
occasions. La méthode suivie est simple : l’auteur passe en revue
l’ensemble du théâtre, en relevant, acte par acte et scène par scène,
les tours, phrases ou vers qu’il estime condamnables ; il exclut
néanmoins de son commentaire La Thébaïde , « essai d’un jeune
homme » 27 qui ne savait pas encore écrire et Athalie, que
l’Académie avait entrepris de commenter comme elle avait commenté
Le Cid, dans un but bien différent cependant, puisqu’il s’agissait
d’ériger la pièce en modèle de la langue française dans la catégorie de
la poésie. L’abbé d’Olivet fut sévère, et c’est ce qui explique la parution,
la même année, du Racine vengé ou Examen des remarques
grammaticales de M. l’abbé d’Olivet de Guyot Desfontaines 28 , qui
contestait en bloc le bien-fondé des critiques de l’académicien.
Avec la parution, en 1752, des Remarques sur les tragédies de Jean
Racine de Louis Racine, la critique grammaticale connaît une nouvelle
mutation, que l’on n’imputera pas seulement à l’admiration d’un fils. En
nommant la partie de ses remarques qui concerne la langue non plus
« remarques de grammaire » mais « notes sur la langue », Louis Racine
ouvre en réalité un champ nouveau, celui-là même qui annonce le plus
nettement les études de style. Pour autant, ses présupposés de départ
ne diffèrent pas de ceux de l’abbé d’Olivet : la langue de Racine et, au
sein même de la langue, le vocabulaire dont il use, ont contribué à fixer
la langue française dans sa perfection et sa pureté. Racine a entendu la
leçon de Bouhours et des remarqueurs de son temps ; il a banni de son
théâtre les archaïsmes de vocabulaire et de syntaxe et a su, de surcroît,
saisir les expressions du « bel usage » alors en passe d’être intégrées à
la langue :
Il est d’autant plus nécessaire d’examiner cet Auteur sur la Langue,
qu’il a plus contribué qu’un autre, à lui donner cette forme constante,
qu’elle n’avait pas encore lorsqu’il commença à écrire. C’était alors
qu’on cherchait à la perfectionner, qu’on rejetait les mots anciens, et
qu’on en admettait d’autres, qui n’avaient pas encore été reçus dans
le bel usage. Quand nous lisons les Entretiens d’Ariste et d’Eugène,
nous sommes surpris d’y voir compter au nombre des termes
nouveaux, ou depuis peu en usage, des termes que nous croyons très
anciens, comme emportement , intrépide, intrépidité , férocité, etc. Le P.
Bouhours, qui écrivait ces Entretiens en 1670, c’est-à-dire dans le
temps de Bérénice, donnait pour modèles du style pur, les écrits de
Giroud, de Costar, de La Chambre, et de plusieurs autres où nous
n’allons plus chercher la beauté de notre Langue, que nous trouvons
toujours dans Andromaque et dans Britannicus. 29

Louis Racine ne se contente pas de reprendre, en les radicalisant, les


présupposés de d’Olivet ; il reprend aussi en partie sa méthode. Mais en
partie seulement : les « notes sur la langue » de Racine ne forment
qu’une partie des Remarques, le second versant du commentaire étant
de nature poétique. Chaque pièce fait donc l’objet d’une étude
complète, où l’analyse dramaturgique succède à l’analyse linguistique
selon un protocole identique à la première (acte par acte et scène par
scène). S’il semble se donner pour tâche, comme ses prédécesseurs,
d’examiner la correction de la langue de Racine au regard de l’usage,
Louis Racine est en réalité guidé par un souci bien différent ; loin d’être
considérées comme des fautes à l’égard de la grammaire, les
expressions jusqu’alors condamnées font l’objet d’une amnistie, ce au
nom d’un principe qui n’est jamais explicitement formulé mais qui
s’impose comme leitmotiv du commentaire : la licence poétique. Plus
encore, les audaces grammaticales de Racine sont placées au
fondement de sa langue et lui confèrent non pas sa pureté mais son
originalité ou, pour reprendre les termes mêmes de Louis Racine, sa
« nouveauté ». Or c’est précisément avec Andromaque que cette
« langue nouvelle » s’impose, puisque aussi bien elle est constitutive du
succès des tragédies de Racine :
Lorsqu’ Andromaque parut, on crut entendre parler une nouvelle
langue, non qu’il y eût des mots nouveaux, l’Auteur n’en a jamais
hasardé un seul : elle était pleine de tours nouveaux, qui étonnèrent
d’abord, qui plurent, et devinrent depuis familiers à la Langue. 30

Le propos revient au début des « Notes sur la langue » d’ Andromaque,


et il sert alors de fer de lance contre les commentaires grammaticaux
les plus rigoristes :
On voit par la critique de Subligny que la pureté du langage procura à
cette Pièce une partie des applaudissements qu’elle reçut à sa
naissance. On s’aperçut que le Poète, en inventant, non des mots,
mais des alliances de mots, et des tours de phrase, faisait, pour ainsi
dire, une Langue nouvelle, et ces tours qui ne nous étonnent plus
aujourd’hui, parce qu’ils sont devenus familiers à la Langue, furent
critiqués et applaudis ; critiqués par ceux qui étaient servilement
attachés à la Grammaire, et applaudis par ceux qui sentirent que
c’était donner à la Langue de la grâce et de la noblesse, que de
l’affranchir quelquefois de la servitude Grammaticale. La vivacité des
Passions peintes dans cette Tragédie, inspira à l’Auteur cette vivacité
de style. 31

De ce point de vue, les « Notes sur la langue » sont pour une large part
un dialogue avec l’abbé d’Olivet, dont Louis Racine conteste, sur pièces,
les jugements.
Deux cas sont particulièrement intéressants et permettent de mesurer
les différences de méthode et d’optique entre les deux commentaires.
Le premier concerne le groupe nominal « le déplorable Oreste » 32 .
L’abbé d’Olivet commente en ces termes le tour racinien :
On dit bien, Mon sort est déplorable : mais on ne dira pas, je suis
déplorable . C’est un mot qui ne s’applique qu’aux choses ; et le
Dictionnaire de l’Académie en avertit expressément. Il y a cependant
encore trois autres endroits où Racine l’applique à des personnes, et
même dans ses dernières 33 Tragédies. Quand une faute ne se
trouve qu’une seule fois dans un Auteur, il est naturel de la croire
l’effet d’une simple inadvertance, qui ne prouve rien. Mais, si
l’expression est répétée dans des ouvrages différents, et qui ont été
faits à dix ou douze ans l’un de l’autre, cela prouve que c’était une
expression avouée par l’Auteur : et dès lors, quand il s’agit d’un
Auteur tel que Racine, il est toujours à propos d’observer quelles sont
les manières de parler, qui ont pu ne lui déplaire, quoique l’usage ne
les eût pas autorisées. 34

En lui-même, le tour est condamnable, puisqu’il contrevient à l’usage


qui veut qu’on rapporte l’adjectif à un inanimé ; mais la tâche du
commentateur est rendue difficile, dans ce cas précis, par la multiplicité
des occurrences du tour chez Racine. Doit-on, en considération du
nombre, excuser le dramaturge ? C’est ce que l’abbé d’Olivet refuse de
faire ouvertement — la concessive finale garde cependant une part
d’ambiguïté — et que Louis Racine fera avec fermeté :
Quoique suivant la décision de l’Académie, cette épithète ne doive
s’appliquer qu’aux choses et non aux Personnes, on trouve encore
[suivent les trois exemples déjà donnés par l’abbé d’Olivet, auxquels
L. Racine ajoute un exemple tiré du premier chœur d’Esther, v. 132 :
« Déplorable Sion, qu’as-tu fait de ta gloire ? »].
Ces exemples n’ont-ils pas autant d’autorité, qu’une décision dont la
raison ne frappe pas ? 35

Renforcée par le nombre des occurrences, l’autorité du tour s’impose


non seulement dans ce qu’on pourrait appeler l’idiolecte racinien mais
encore dans la langue, qui se trouve enrichie d’une construction
nouvelle.
Le second exemple est encore plus connu : il s’agit de la célèbre ellipse
que Racine place dans la bouche d’Hermione : « Je t’aimais inconstant,
qu’aurais-je fait fidèle ? » 36 . Parce qu’il y a là une obscurité voulue,
revendiquée comme telle par le poète, parce que le commentaire d’une
telle expression oblige le grammairien à traiter avec le stylisticien,
l’abbé d’Olivet ne formule pas, cette fois non plus, de jugement
tranché :
Voilà, de toutes les ellipses que Racine s’est permises, la plus forte et
la moins autorisée par l’usage. Mais, avant que de la condamner, il y a
trois réflexions à faire.
1° Souvent, et presque toujours, la Poésie demande un style plus serré
que la prose ; car si la pensée ne souffre pas qu’on fasse deux vers, il
faut trouver le secret de dire tout en un seul.
2° Ce qui rend l’Ellipse, non seulement excusable, mais digne même
de louange, c’est lorsqu’il s’agit, comme ici, de renfermer beaucoup
de sens en peu de paroles : et surtout, lorsqu’une violente passion
agite la personne qui parle. Hermione, dans sa fureur, voudrait
pouvoir dire plus de choses, qu’elle n’articule de syllabes.
3° Il y a de certaines fautes, que le meilleur écrivain peut faire par
négligence, ou même sans s’en apercevoir mais une ellipse, telle que
celle-ci, quand un grand maître l’emploie, c’est volontairement, et
après y avoir bien pensé. 37

Quoique justifiée par les contraintes propres à l’écriture poétique et


plus encore par l’expression des passions, la faute reste donc toujours
faute, même si elle est volontaire. Mais c’est surtout le magistère de
Racine — et non celui du poète en tant que tel — qui, en dernière
instance, pousse le grammairien à la clémence. Avec Louis Racine, il ne
s’agit plus d’excuser ou de justifier la « faute » : c’est en termes
exclusivement esthétiques que la construction est jugée, et elle devient
même une sorte d’emblème à la fois de la licence poétique et de la
sublime concision : « Ce Vers si connu est l’exemple qu’on doit opposer
à toutes les chicanes des Grammairiens, et des Puristes. On a toujours
bien dit, quand on a dit si bien, qu’il est impossible de mieux
dire » 38 .

La critique de Luneau de Boisjermain

Lorsqu’il publie, quinze ans après les Remarques de Louis Racine, ses
Commentaires sur les œuvres de Jean Racine , Luneau de Boisjermain
prend acte du changement initié par son prédécesseur. A propos de
cette même ellipse, il écrit ainsi : « Il est certain qu’on ne peut briser
plus heureusement les entraves étroites dont la langue française
enchaîne la poésie » 39 . Nombreux sont les cas où il se contente
d’ailleurs de reprendre, en les citant explicitement ou en les plagiant,
les propos de Louis Racine. Mais s’il recourt fréquemment, lui aussi, à la
notion de licence poétique, il n’a pas la même indulgence ni, en réalité,
la même admiration pour l’écriture de Racine. On peut ainsi déceler
chez Luneau de Boisjermain deux nouveaux infléchissements dans le
commentaire de la langue racinienne : le premier concerne la langue au
sens le plus étroit du terme, et il tient dans le relevé des formes qui,
considérées au moment de la création des pièces comme des entorses
ou des libertés à l’égard du bon usage, sont passées dans la langue. Au
nombre de ces expressions « naturalisées » se trouve la construction
« Tu lui parles du cœur » 40 , à propos de laquelle Luneau de
Boisjermain écrit laconiquement : « Expression neuve et hardie, dont
Racine a embelli la langue » 41 . Le second infléchissement concerne
plus explicitement le style racinien, et il a à voir avec l’étude du lexique.
Sont ainsi pointés quelques « défauts » de l’écriture racinienne — qui
ne se confondent plus, et c’est là l’essentiel, avec des fautes de
grammaire —, au premier rang desquels une forme de familiarité ou de
« naturel » poussé jusqu’à l’excès et un usage abondant du lexique
galant et, partant, du style poétique au sens péjoratif du terme. Racine
est donc parfois trop « naturel », parfois trop peu, et il est accusé alors
de verser dans le style du madrigal.

Le caractère familier de certains vers ou hémistiches raciniens avait


déjà été noté par les prédécesseurs de Luneau de Boisjermain, et
notamment par Louis Racine ; mais cette familiarité était réputée sans
tache parce que, limitée à quelques mots, elle se fondait aisément dans
le style tragique. Louis Racine commente ainsi le premier hémistiche du
vers 375 : « Et peut-être, après tout » 42 : « Cet après tout est du
style de la Conversation, et ne semble pas devoir trouver place dans le
style noble. Il en trouve une si naturelle dans ce Vers, qu’il ne paraît
plus du style simple » 43 .

Luneau de Boisjermain est plus sévère à propos d’un autre vers :


« Phœnix vous le dira, ma parole est donnée. » 44 : « Le premier
hémistiche est un peu trop familier, il tient trop de la conversation.
Racine, à force d’être naturel, tombe quelquefois dans ce défaut » 45 .
Ce qui frappe ici, c’est que les deux commentateurs recourent au même
vocabulaire (« naturel », style de la « conversation ») pour juger bien
différemment les tours familiers ; mais tout est affaire de nuance : avec
Luneau de Boisjermain, ce qui était naturel (ou plus exactement
naturellement inséré dans le contexte tragique) devient trop naturel.
Parmi les commentateurs de Racine, Luneau de Boisjermain n’est pas,
loin s’en faut, le premier à l’accuser de verser dans le style galant. Il
suffit, pour s’en convaincre, de relire les textes écrits par ses
détracteurs ou par ses juges les plus sévères au moment de la création
de ses tragédies, et l’on peut citer notammer la Dissertation sur le
Grand Alexandre de Saint-Evremond ou la Critique de Bérénice de
l’abbé de Villars 46 . Il nous semble cependant que la critique ne
s’exerce plus de la même manière, ni exactement sur les mêmes
objets, ni encore dans la même perspective : au XVIIe siècle, seuls les
contempteurs de Racine l’accusaient de galanterie, et c’était pour
opposer le traitement galant de la matière historique ou légendaire de
Racine au traitement proprement tragique de cette même matière chez
Corneille ; plus encore, l’accusation portait sur la composition des
caractères et assez peu, en définitive, sur l’écriture au sens étroit du
terme. Le propos de Luneau de Boisjermain est tout autre : ses
Commentaires sur les œuvres de Racine , qui comportent, comme les
Remarques de Louis Racine, des analyses linguistiques et stylistiques
au côté d’analyses plus explicitement poétiques, ont été originellement
conçus comme des préfaces rythmant une nouvelle édition des œuvres
de Racine ; loin d’être polémique, le commentaire s’attache à mesurer
la spécificité de l’écriture de Racine en recensant certains de ses
stylèmes, au nombre desquels la galanterie. Aussi l’accusation de
galanterie, comme celle de familiarité, se trouvent-elles circonscrites à
l’étude de quelques vers ou répliques, et Luneau de Boisjermain
cherche à distribuer avec autant d’objectivité les blâmes que les
louanges. Enfin, et c’est peut-être là l’essentiel, la galanterie de Racine
est vue comme un trait d’archaïsme : elle constitue ce qui est, dans le
théâtre de Racine, le moins éternel, le moins immuable et, finalement,
le moins « classique ». Ainsi dans ce commentaire du vers 292 : « Me
faudra-t-il combattre encor vos cruautés ? » 47 : « Ce vers se ressent
encore de la galanterie qui avait tenu si longtemps la place de la
véritable passion » 48 . Plus encore, la composante galante est
marginalisée comme non racinienne, ou pour le dire autrement :
lorsqu’il devient galant (ou trop galant), Racine n’est plus Racine. Et
lorsqu’il écrit « Mener en Conquérant sa nouvelle Conquête » 49 ,
Luneau de Boisjermain peut dire : « Cette sorte de jeux de mots n’est
pas dans le goût de Racine » 50 .

Dans le commentaire d’Andromaque, l’accusation de galanterie, même


ainsi adoucie, s’exerce néanmoins régulièrement sur les vers prononcés
par Oreste et peut-être plus largement sur le langage d’Oreste.
Lorsqu’il en vient à la scène 2 de l’acte II, Luneau de Boisjermain
considère que le langage d’Oreste contient trop de « jeux de mots
puérils », que le ton qu’il emploie est « langoureux et fade » et ses
plaintes « peu naturelles » 51 et il conclut son analyse en ces
termes :
La puissance des yeux, la constance d’un amant : ces expressions ne
trouvent guère place que dans l’élégie, ou quelquefois dans le
madrigal.
Nous trouvons qu’Oreste en veut un peu trop auxbeaux yeux
d’Hermione. Il a déjà dit qu’il cherchait la mort dans ses yeux, que les
yeux d’Hermione éprouvaient sa constance, que ces mêmes yeux
voudraient bien voir Pyrrhus mépriser leur pouvoir comme Oreste,
c’est-à-dire aussi peu qu’Oreste. En mettant ainsi en prose les beaux
vers de Racine, c’est quelquefois le moyen d’apercevoir les
négligences que dérobait la magie du style. 52

L’accusation de galanterie n’est pas éloignée, on le voit, de celle de


pauvreté lexicale : non seulement Racine a placé dans la bouche de son
personnage des expressions relevant du style galant, mais ces
expressions reviennent avec trop de fréquence et parmi elles celles qui
utilisent le vocable « œil » (ou « yeux ») au sens métonymique. Mais
l’accusation de galanterie rejoint aussi celle d’artificialité. La mention
de deux genres poétiques — qui sont, soit dit en passant, ceux-là
mêmes que mentionnait l’abbé de Villars dans sa critique de
Bérénice — est ici importante ; elle va de pair, à d’autres endroits, avec
l’évocation de procédures d’écriture spécifiques à la poésie et donc
normalement étrangères à la tragédie. C’est dans cet esprit que Luneau
de Boisjermain commente ces vers célèbres :
Je souffre tous les maux que j’ai faits devant Troie.
Vaincu, chargé de fers, de regrets consumé,
Brûlé de plus de feux que je n’en allumai… 53

L’amour peut bien exagérer, mais il ne peut comparer ses tourments à


ceux d’une ville embrasée ; et cette idée, si peu naturelle, est
continuée dans les deux vers suivants, que l’on a toujours justement
repris comme un concetto indigne de la majesté de la tragédie et du
goût excellent de Racine.
A propos de « Brûlé de plus de feux… », il écrit encore, reprenant
presque à la lettre les propos de Louis Racine : « Le mot de feux est ici
au propre et au figuré ; il n’y a aucun rapport entre les feux réels et les
feux imaginaires de l’amour » 54 . C’est d’ailleurs, dans Andromaque,
ce vers seul qui gêne Louis Racine, même s’il n’ose pas le condamner
tout à fait et esquive en partie la critique en en appelant à l’autorité du
critique italien Muratori, pour conclure avec lui que le sentiment de
Pyrrhus est exprimé « avec trop d’esprit » 55 .
A l’issue de ce parcours chronologique, il apparaît que l’étude du
vocabulaire est indissociable, chez les commentateurs des XVIIe et
XVIIIe siècles, de l’étude de la langue racinienne, c’est-à-dire de
l’actualisation des vocables dans l’écriture. Sont dès lors commentées
les libertés prises par le poète à l’égard de l’usage établi, libertés qui
sont progressivement excusées puis explicitement louées comme
licences poétiques. Avec Louis Racine, ces licences poétiques sont
même ouvertement rattachées à l’expression des passions : faisant
parler des personnages en proie aux passions, Racine non seulement
pouvait mais même devait s’émanciper parfois des règles de la
grammaire pour atteindre le « naturel ».

La question de la pauvreté du lexique racinien n’a donc pas, en tant


que telle, droit de cité dans les textes que nous avons décrits. Cette
absence ne s’explique pas uniquement, en réalité, par le fait que le
vocabulaire n’est presque jamais dissocié de la syntaxe ; plus
fondamentalement, cette pauvreté qui est d’abord, pour les
commentateurs, une économie, est l’un des éléments constitutifs de la
pureté et du « classicisme » de la langue racinienne. C’est parce qu’il
est évident 56 que ce présupposé n’est pas rappelé, et que sont
seulement pointés les écarts lexicaux. Ils sont au nombre de trois : ce
sont d’une part les rares archaïsmes de vocabulaire, d’autre part les
quelques mots nouveaux (enregistrés par les remarqueurs
contemporains de Racine et notamment par Bouhours) et enfin les mots
à connotation ou à usage non tragique (c’est-à-dire essentiellement
familier et galant). Nous avons déjà évoqué les deux dernières
catégories de vocables, respectivement mentionnées par Louis Racine
et Luneau de Boisjermain ; la première n’est représentée, dans
Andromaque, que par deux termes : le substantif d’origine verbale
penser 57 et la locution conjonctive devant que 58 au sens
temporel d’« avant que », tous deux relevés par les commentateurs
depuis l’abbé d’Olivet jusqu’à Luneau de Boisjermain.

PAUVRETÉ LEXICALE ET EFFET DE RÉSONANCE

Rapportée à l’étude de la langue racinienne telle qu’elle commence à se


mettre en place au XVIIIe siècle, la question de la pauvreté du lexique
mène donc à une forme d’aporie, puisque c’est précisément la
simplicité du lexique qui explique la pureté et le caractère classique ou
« classicisable » de Racine et que les commentateurs ne s’attachent
qu’à ce qui, dans cette langue, s’éloigne de l’usage. Et c’est à Louis
Racine qu’il faut alors revenir pour comprendre ce qui fait, aux yeux des
commentateurs, le prix de la langue racinienne : la langue de Racine
est réputée à la fois pure — parce que l’auteur n’invente pas de mots
nouveaux — et poétique — parce qu’il combine de manière nouvelle des
mots qui relèvent de l’usage : « le Poète, en inventant, non des mots,
mais des alliances de mots, et des tours de phrase, faisait, pour ainsi
dire, une Langue nouvelle ».

La proposition peut sembler banale aujourd’hui ; elle ne l’était


probablement pas au XVIIIe siècle, et elle permet surtout d’articuler la
question du lexique non seulement avec celle de la langue, mais encore
avec celle du style, jamais abordée comme telle mais toujours postulée
par Louis Racine et Luneau de Boisjermain. Dans deux des exemples
que nous avons donnés précédemment, l’analyse linguistique est
dépassée par l’analyse stylistique : il s’agit de l’ellipse « Je t’aimais
inconstant… » et de la syllepse « Brûlé de plus de feux… ». Alors que la
première a toujours recueilli des éloges — avec plus ou moins de
chaleur, comme nous l’avons vu —, la seconde a été condamnée tout
au long du XVIIIe siècle. Comme l’ont montré deux critiques
contemporains 59 , ce vers n’est pourtant que l’aboutissement d’une
longue tradition issue du lyrisme amoureux et qui trouve ses sources à
la fois dans la poésie antique et dans le lyrisme néo-renaissant. Mais
cette syllepse audacieuse peut se lire également comme la
radicalisation d’un trait d’écriture propre à Racine, et qui permet
justement de pallier la pauvreté effective du vocabulaire : la polysémie
qui, poussée jusqu’à sa forme extrême, peut constituer le nœud d’une
syllepse mais qui, présente dans des tours apparemment non topiques,
donne à la langue et au sens une profondeur, une épaisseur
particulières.
A l’« effet de sourdine » spitzérien, il nous semble en effet possible
d’opposer, pour l’étude du lexique, ce qu’on pourrait nommer l’« effet
de résonance » produit par la répétition des vocables et par les
faisceaux de sens qu’ils prennent en contexte et dans la mise en
relation des occurrences. Dans le cadre étroit de cette étude, nous nous
attacherons à quelques termes qui, par leur fréquence dans le théâtre
racinien et plus particulièrement dans Andromaque, constituent des
exemples significatifs du « fonds commun du vocabulaire racinien »
défini par Ch. Bernet. Parce que le vocabulaire amoureux tient une
place essentielle dans ce « fonds commun », nous nous en tiendrons à
trois vocables historiquement rattachés au lexique galant : « cruel »,
« ingrat » et « charme ». Rappelons enfin, avant d’entrer dans l’analyse
détaillée, que « charme » est l’un des rares vocables excédentaires
d a n s Andromaque (13 occurrences, contre 9 dans Phèdre, située
immédiatement après Andromaque pour la fréquence d’emploi du
terme) et que la fréquence d’emploi de « cruel » (23) place Andromaque
en rang 3 (après La Thébaïde et Iphigénie, et avec Bérénice) 60 .

Le Dictionnaire de Furetière donne, à l’article « cruel », deux séries de


synonymes : d’un côté « barbare, inhumain », de l’autre « douloureux »
voire simplement « fâcheux ». Pour le sens de « fâcheux », Furetière
offre cet exemple : « les amants disent que l’absence est une chose
cruelle ». C’est dire que le terme appartient de plein droit au lexique
galant et qu’il a subi, comme de nombreux vocables à l’époque
classique, un affaiblissement de sens. La chose est bien connue, et
Racine suit, le plus souvent, le mouvement sémantique de son temps :
une proportion écrasante des occurrences de « cruel » se trouve en
contexte amoureux et a priori donc avec un sens affaibli. Aussi Racine
peut-il, lorsque l’équilibre du vers ou la rime le demandent, substituer à
« cruel » « inhumain » voire « ingrat » dans la mesure où ces deux
derniers adjectifs sont eux aussi entrés dans le lexique galant au prix
d’un affaiblissement de leur sens premier. Une constellation
d’occurrences se trouve à la scène 1 de l’acte III, où Oreste réagit en
ces termes à la décision de Pyrrhus d’épouser Hermione :
Non, non, je le connais, mon désespoir le flatte.
Sans moi, sans mon amour il dédaignait l’Ingrate.
Ses charmes jusque-là n’avaient pu le toucher.
Le Cruel ne la prend que pour me l’arracher.

L’adjectif « ingrat » fait retour neuf vers plus bas : « Hé quoi ? Ce


courroux enflammé / Contre un Ingrat… » ; enfin « inhumain » paraît,
sous sa forme féminine, lorsque Oreste formule son projet
d’enlèvement :
C’est trop gémir tout seul. Je suis las qu’on me plaigne.
Je prétends qu’à mon tour l’Inhumaine me craigne,
Et que ses Yeux cruels à pleurer condamnés,
Me rendent tous les noms, que je leur ai donnés. 61

Si l’on peut bien rapporter les emplois de « cruel » et d’« ingrat » à des
manifestations réelles de cruauté et d’ingratitude (de Pyrrhus à l’égard
d’Hermione et d’Hermione à l’égard d’Oreste), il n’en va pas de même
pour la forme « inhumaine », dont la charge hyperbolique ne se fait plus
sentir comme telle. Plus fondamentalement, les trois termes
apparaissent ici comme interchangeables, et c’est ce caractère
interchangeable qui les désigne comme vocables galants. Il n’en
demeure pas moins que, dans le contexte de la scène, ces termes
possèdent une indéniable charge affective ; mais l’essentiel tient
précisément au fait que cette charge affective réside dans le contexte
d’emploi, dans la situation d’énonciation, bien plus que dans le
sémantisme propre des adjectifs.
Si la « couleur » émotionnelle du discours d’Oreste donne ici à des
termes vidés de leur sens premier une force qu’ils n’avaient plus, c’est
ailleurs que joue, cependant, l’effet de résonance. Il touche alors au
personnage de Pyrrhus, « cruel » aux yeux d’Hermione parce qu’il a
manqué à sa promesse et qu’il ne l’aime plus, mais surtout « cruel »
véritablement, c’est-à-dire barbare et sanguinaire, au moment de la
guerre de Troie :
La Victoire, et la Nuit, plus cruelles que nous,
Nous excitaient au meurtre, et confondaient nos coups.
Mon courroux aux Vaincus ne fut que trop sévère.
Mais que ma Cruauté survive à ma Colère ? 62

En ce sens, « cruel » a à voir avec l’évocation douloureuse du passé de


la guerre et avec la qualification de ce passé. En quittant le champ de la
guerre pour celui de l’amour, l’adjectif a perdu sa signification première,
mais on doit aussi considérer que de tels emplois lestent le terme d’une
charge sémantique qu’il garde même en contexte amoureux. C’est ici
que se situe, selon nous, l’effet de résonance : implicite dans la majorité
des occurrences du terme en contexte galant, cet effet devient explicite
lorsque Racine joue de la polysémie de l’adjectif, ainsi dans ce vers
prononcé par Pyrrhus à l’intention d’Andromaque : « Hélas ! fus-je
jamais si cruel que vous l’êtes ? » 63 où la cruauté amoureuse
d’Andromaque est confrontée, mesurée à la cruauté guerrière du
vainqueur de Troie. Il est encore un cas où, mis en relation avec celui
de « sang », le terme reprend son sens étymologique :
J’ai mendié la Mort, chez des Peuples cruels
Qui n’apaisaient leurs Dieux que du sang des Mortels :
Ils m’ont fermé leur Temple, et ces Peuples barbares
De mon sang prodigué sont devenus avares. 64

L’adjectif est, en réalité, doublement resémantisé : par le parallélisme


formel et sémantique de « Peuples cruels » et « Peuples barbares » et
par la répétition de « sang », qui rappelle l’origine latine de « cruel »,
hérité de « crudelis » (lui-même formé à partir de « crudus » soit « cru,
saignant ») : « qui fait couler le sang ». Cette plongée dans l’évocation
d’un passé sinon effectivement violent du moins voulu comme tel a
pour conséquence, ici encore, de lester le lexique galant dont le
langage d’Oreste est saturé, d’une épaisseur nouvelle : préparée par
cette évocation, la quête d’une mort amoureuse (« […] je me vois réduit
/ À chercher dans vos yeux une mort, qui me fuit. ») doit être prise au
pied de la lettre.

Le faisceau de sens de l’adjectif « ingrat » est moins riche et donc


moins propre à de tels effets de polysémie ; on peut néanmoins
considérer qu’il donne lieu à deux types d’emploi relativement
distincts : ceux dans lesquels il peut permuter avec d’autres adjectifs
relevant du lexique galant ; ceux dans lesquels il doit être rapporté à
une ingratitude effective. Ainsi dans la première scène du deuxième
acte, où le spectateur voit paraître Hermione pour la première fois.
L’adjectif a déjà été employé au premier acte, et l’on citera notamment
le vers 85 —où il est utilisé par Oreste pour qualifier Hermione, après
celui d’« inhumaine » (v. 26) et avant celui de « cruelle » (v. 141) — et
le vers 371, où il désigne, dans la bouche de Pyrrhus, Andromaque et
son fils. A la scène 1 du deuxième acte, l’adjectif est utilisé trois fois
(aux vers 399, 436 et 440), et l’on trouve également « ingratitude » au
vers 393. Cette concentration fait nécessairement sens : au lieu de leur
faire perdre progressivement de leur intensité, la répétition des termes
creuse leur signification ; il apparaît en réalité qu’« ingrat » forme le
mot matriciel de la scène et, plus encore, qu’il contribue à dessiner, lors
de sa première apparition sur la scène, l’éthos du personnage et de son
discours.
On comparera, pour l’étude de « charme » et de ses dérivés (l’adjectif
« charmant » et le verbe « charmer »), ces quatre exemples :
1. Par quels charmes, après tant de tourments soufferts,
Peut-il vous inviter à rentrer dans ses fers ?

2. Elle pleure en secret le mépris de ses charmes.

3. Que charmés l’un de l’autre, ils retournent à Sparte.

4. Un espoir si charmant me serait-il permis ? 65

Sans rappeler en détail l’évolution sémantique du terme, on se


contentera d’indiquer que Furetière enregistre encore, à la fin du XVIIe
siècle, le sens ancien de « puissance magique par laquelle avec l’aide
du Démon les Sorciers font des choses merveilleuses, au dessus des
forces, ou contre l’ordre de la nature » ; il ajoute que ce mot est aussi
associé à la poésie et à l’amour dans son acception figurée. Dans les
emplois raciniens, le terme et ses dérivés oscillent donc logiquement
entre le sens premier ou littéral, qui n’est pas encore archaïque mais
qui est en passe de le devenir, et le sens figuré, rattaché, comme pour
les termes vus précédemment, au lexique galant. En réalité, l’oscillation
sémantique touche principalement le substantif et le verbe, l’adjectif
ayant, dans la totalité des emplois raciniens, son sens figuré. Si la
polysémie du « charme » racinien est chose bien connue, il n’est peut-
être pas inutile de montrer, à partir de nos quatre exemples, comment
cette polysémie est mise en œuvre à l’échelle d’une scène ou de deux
répliques qui, n’appartenant pas à la même scène, se succèdent. Notre
premier exemple constitue la toute première occurrence du terme dans
la pièce et, au sein de la scène d’exposition, la première d’une série de
quatre. On fera ici trois observations : le substantif est employé, dans
les quatre cas, au pluriel, ce qui a pour conséquence de brouiller les
nuances sémantiques — pour l’édition de 1697, Racine a d’ailleurs
substitué le singulier au pluriel — ; le sens ancien est actualisé
uniquement dans la première occurrence, « charmes » signifiant, dans
les trois autres (parmi lesquelles notre deuxième exemple), « attraits » ;
la dernière observation découle des deux précédentes : introduit dans la
pièce avec le sens de « pouvoir magique » — pouvoir attribué à la figure
allégorique de l’Amour —, le terme trouve, dans les occurrences
suivantes mais aussi dans l’ensemble de la pièce, une épaisseur
sémantique supplémentaire, qui pallie le double risque d’érosion du
sens dû à la fréquence d’emploi et à l’appartenance du terme au
lexique galant. La même remarque peut être faite à propos des deux
autres exemples : les deux vers sont en effet prononcés par Pyrrhus et
prennent place, respectivement, dans la dernière réplique de la scène 3
et dans la première de la scène 4 de l’acte I : l’adjectif « charmant »,
inscrit dans la première réplique que Pyrrhus adresse à Andromaque,
substitue, aux yeux du spectateur, l’image d’un Pyrrhus galant à celle
reçue de l’Histoire et transmise en partie dans les scènes précédentes.
Mais la proximité de l’occurrence de « charmer » au sens premier (et
dans une construction particulièrement remarquable) a pour effet de
faire résoner l’adjectif dérivé.
Ces effets de résonance sont par ailleurs renforcés, dans le travail de la
rime, par la proximité non plus sémantique mais phonique qui existe
entre « charmes » d’une part, « larmes » « armes » et « alarmes »
d’autre part. Le couplage à la rime de deux de ces termes peut se faire
selon six combinaisons : alarmes / charmes ; alarmes / larmes ; alarmes
/ armes ; charmes / larmes ; charmes / armes ; larmes / armes. Une
seule combinaison n’est pas utilisée dans Andromaque : alarmes /
larmes. Nous donnons ici un tableau des occurrences des différentes
rimes, avec pour comparaison la fréquence d’emploi dans Bérénice :

Rimes Andromaque Bérénice

alarmes 2 (v. 49-50, 401-402) Ø


/
charmes

alarmes 6 (v. 13-14, 265-266, 525-526, 4 (v. 151-152, 479-480,


/ larmes 1129-1130, 1409-1410, 1529- 1403-1404, 1495-1496)
1530)

alarmes Ø 1 (v. 387-388)


/ armes

charmes 3 (v. 129-130, 449-450, 865-866) 4 (v. 439-440, 803-804,


/ larmes 995-996, 1359-1360)

charmes 1 (v. 533-534) Ø


/ armes

larmes / 4 (v. 281-282, 361-362, 949-950, 2 (v. 211-212, 511-512)


armes 1025-1026)

Total 16 11

La comparaison avec Bérénice permet de mesurer la fréquence de ces


combinaisons rimiques chez Racine — et l’expérience pourrait
probablement être reproduite sur d’autres pièces sans modification
sensible du résultat — : de même que les termes de « charme », de
« cruel » ou d’« œil » sonnent comme des vocables raciniens, il y a,
dans cette série de rimes, une couleur qui se laisse appréhender
aujourd’hui comme proprement racinienne. Or l’intérêt de telles
combinaisons, et l’intérêt surtout de leur fréquence nous semble résider
dans le fait qu’en couplant à la rime deux termes qui appartiennent à
une série de quatre, Racine fait entendre à l’auditeur les deux termes
absents et théoriquement substituables aux deux autres. Très proches
phoniquement, ces quatre termes relèvent par ailleurs de champs
lexicaux distincts : celui de l’amour, même au sens fort de « pouvoir
magique » pour « charme », celui de la guerre (« armes »), celui du
pathos (« larmes ») et enfin celui de la crainte (« alarmes »). Les
coupler deux à deux en conduisant l’auditeur à entendre, comme ligne
de basse pourrait-on dire, les deux absents, c’est lier fermement deux
champs lexicaux qui fonctionnent comme thèmes matriciels et deux
émotions dès longtemps désignées comme les deux émotions
tragiques.
Tardivement établi par la critique racinienne, le constat de pauvreté
lexicale a pu sembler a priori contradictoire avec le relevé des
inventions linguistiques proposé par les commentateurs des XVIIe et
XVIIIe siècles. Nous avons tenté de montrer que ces inventions
linguistiques étaient, en réalité, un moyen de pallier la simplicité et
l’appauvrissement effectif du lexique poétique qui se fait à partir des
années 1660-1670 : la poéticité de la langue racinienne s’impose ainsi,
en dépit de sa pauvreté lexicale, par des alliances de mots et des
constructions nouvelles qui, formant écart par rapport à l’usage établi,
constituent des tropes. Elle s’impose encore grâce aux effets de
résonance produits par la fréquence d’emploi des termes les plus
communément reconnus comme « raciniens » et par la mise en
concurrence, dans les emplois de ces termes, des différents sens
enregistrés par la langue. Chez Racine en effet, il apparaît que la
répétition d’un terme ou d’une combinaison de termes à la rime n’a pas
pour conséquence d’éroder le signifié mais au contraire de le pluraliser,
comme si le mot s’enrichissait, dans le déroulement de la pièce, de ses
différents sens autant que des connotations prises en contexte.

Notes

1. Ch. Bernet, Le Vocabulaire des tragédies de Jean Racine. Analyse


statistique, Genève-Paris, Slatkine-Champion, 1983.

2. P. Guiraud, W. T. Bandy et R. W. Hartle, Index du vocabulaire du théâtre


classique : Racine, Klincksieck, 1955-1960 (8 vol.).

3. Op. cit., p. 35.

4. J.-G. Cahen, Le Vocabulaire de Racine, Paris, 1949 ; reprint Slatkine, 1970.

5. Op. cit., p. 40-41.

6. Ibid., p. 129.

7. Ibid., p. 197.

8. Ibid.

9. Ibid., p. 200.

10. Subligny, Préface de La Folle Querelle ou la critique d'Andromaque (Paris,


Th. Jolly, 1668), texte reproduit par G. Forestier dans Racine, Œuvres
complètes, vol. I, Gallimard, « Bibl. de la Pléiade », 1999, p. 259.

11. Pour une étude d'ensemble des commentaires grammaticaux de l’œuvre


de Racine au XVIIIe siècle, nous renvoyons à G. Siouffi, « Les tragédies comme
représentation de la langue française », dans Jean Racine 1699-1999. Actes du
colloque du tricentenaire (25-30 mai 1999), éd ; G. Declercq et M. Rosellini,
PUF, 2003, p. 415-435.

12. Andromaque, I, 1, v. 55 : « Détestant ses rigueurs, rabaissant ses


attraits », éd. cit., p. 200.

13. Ibid., II, 2, v. 507-508 : « Mais vous-même, est-ce ainsi que vous exécutez
/ Les vœux de tant d'Etats que vous représentez ? », p. 215.

14. Ibid., I, 1, v. 51-52 : « Tu sais de quel courroux mon cœur alors épris /
Voulut, en l'oubliant, venger tous ses mépris. », p. 200. Racine tiendra compte
de la critique et corrigera, dès 1675, « venger » en « punir ».

15. Ibid., I, 2, v. 148 : « Hector tomba sous lui ; Troie expira sous vous », p.
203.

16. Ibid., I, 1, v. 1-3 : « Oui, puisque je retrouve un Ami si fidèle, / Ma Fortune


va prendre une face nouvelle ; / Et déjà son courroux semble s'être adouci »,
p. 199.

17. Préface de La Folle Querelle, éd. cit., p. 260-261.

18. La Folle Querelle, III, 3, p. 293.

19. Andromaque, II, 2, v. 494-495 : « […] et ces Peuples barbares / De mon


sang prodigué sont devenus avares. », éd. cit., p. 214.

20. Ibid., I, 1, v. 65-66 : « Mais admire avec moi le Sort, dont la poursuite / Me
fait courir moi-même au piège que j'évite. », p. 201.

21. Ibid., v. 123-124 : « Mais dis-moi, de quel œil Hermione peut voir / Ses
attraits offensés, et ses yeux sans pouvoir ? », p. 202.

22. La Folle Querelle, III, 6, p. 289.

23. Dans la notice d'Andromaque, éd. cit., p. 1324.

24. Mémoires contenant quelques particularités sur la vie et les ouvrages de


Jean Racine, éd. cit., p. 1148.

25. On lit ainsi dans la préface : « quelque chagrin que puissent avoir contre
moi les partisans de cette belle Pièce, de ce que je leur veux persuader qu'elle
les a trompés quand ils l'ont cru si achevée ; je soutiens qu'il faut que leur
Auteur attrape encore le secret de ne les pas tromper, pour mériter la louange
qu'ils lui ont donnée d'écrire plus parfaitement que les autres. », éd. cit., p.
259.

26. Abbé d'Olivet, Remarques de grammaire sur Racine, Paris, Gandouin,


1738, p. 5.

27. Ibid.

28. L’ouvrage fut publié à Avignon.

29. Louis Racine, Remarques sur les tragédies de Jean Racine, Amsterdam,
M.-M. Rey et Paris, Desaint et Saillant, 1752 (3 vol.), t. I, p. 8.

30. Ibid., p. 11.

31. Ibid., p. 130.

32. Andromaque, I, 1, v. 46, éd. cit., p. 200.

33. Phèdre , II, 2, 67 [i . e . 529 : « Vous voyez devant vous un Prince


déplorable » et IV, 1, 14 [i.e. 1014 : « Phèdre épargnait plutôt un Père
déplorable »] ; Athalie, I, 1, 149 [« Déplorable héritier de ces Rois
triomphants »] (note de l'abbé d'Olivet).

34. Op. cit., p. 19-20.

35. Op. cit., p. 131-132.

36. Andromaque, IV, 5, v. 1373, p. 246. Boileau a le premier commenté ce


vers : « Où en serait M. Racine si on allait lui chicaner ce beau vers […]. Ces
sortes de petites licences de construction non seulement ne sont pas des
fautes, mais sont même assez souvent un des plus grands charmes de la
Poésie, principalement dans la narration où il n'y a point de temps à perdre. Ce
sont des espèces de Latinismes dans la Poésie française qui n'ont pas moins
d'agréments que les Hellénismes dans la Poésie latine » (Boileau, Lettres à
Brossette, XXXVIII, cité par G. Forestier, éd. cit., p. 1365).

37. Op. cit., p. 25-26.

38. Op. cit., p. 147.

39. Luneau de Boisjermain, Commentaires sur les œuvres de Jean Racine,


Paris, Panckoucke, 1768, t. I, p. 193.

40. Andromaque, IV, 5, v. 1387, éd. cit., p. 246.

41. Op. cit., p. 191.

42. Andromaque, I, 4, éd. cit., p. 210.

43. Op. cit., p. 138-139.

44. Andromaque, III, 6, v. 910, p. 230.

45. Op. cit., p. 179. On pourra rapprocher de la critique de Luneau de


Boisjermain ce propos de Ch. Bernet (qui se fonde en partie sur la scène 6 de
l'acte III) : « L'on ne peut parler [à propos de la langue d'Andromaque], au
sens strict, de familiarité du style ; en revanche, il y a parfois un mélange de
tons ou, plus précisément, de situations dans lesquelles Racine ne craint pas
d'utiliser des “ficelles��? du genre comique tout en préservant la dignité et
le pathétique qui sont propres à la tragédie » (op. cit., p. 198).

46. Pour une étude du style galant chez Racine, nous renvoyons à A. Viala,
« Racine galant ou l'amour au pied de la lettre », Les Cahiers de la Comédie-
Française, automne 1995, n° 17, p. 39-48.

47. Andromaque, I, 4, éd. cit., p. 208.

48. Op. cit., p. 156.

49. Andromaque, V, 2, v. 1442, éd. cit., p. 248.

50. Op. cit., p. 198.

51. Ibid., p. 164.

52. Ibid., p. 166.

53. Andromaque, I, 4, v. 318-320, éd. cit., p. 209.

54. Op. cit., p. 157.

55. Op. cit., p. 170.

56. Sur ce point, nous renvoyons encore à la communication de G. Siouffi


précédemment citée, dont une large partie est consacrée aux conséquences
sur l'écriture racinienne de l'appauvrissement de la langue à l'époque
classique. Sont progressivement bannis de la langue poétique au moins les
termes renvoyant aux parties du corps et plus généralement les mots qui
désignent des réalités concrètes.

57. Andromaque, V, 1 : « Je tremble au seul penser du coup qui le


menace ? », éd. cit., p. 247.

58. Ibid., v. 1437 : « […] Ah devant qu'il expire… », p. 248.

59. R. C. Knight, « Brûlé de plus de feux », dansStudies offered to R. L. G.


Ritchie, Cambridge, 1949, p. 107sq . et J. Pommier [même titre],Mélanges D.
Mornet, 1951,
p. 83 sq .

60. Tous ces chiffres sont tirés de Ch. Bernet,op. cit., annexe II.

61. Andromaque, III, 1, v. 741-744, 751-752 et 765-768 (p. 223-224).

62. Ibid., I, 2, v. 211-214, p. 205.

63. Ibid., I, 4, v. 322, p. 209. Pour de telles analyses des télescopages entre
ce qu'il nomme le « métaphorique » et l'« historique », on pourra encore se
reporter à A. Viala, art. cité, p. 45 sq .

64. Andromaque, II, 2, v. 491-494, p. 214.

65. Ibid., I, 1, v. 31-32 et 130 ; I, 3, v. 254 ; I, 4, v. 259 (p. 200, 202 et 207).

Pour citer cet article :


LOUVAT Bénédicte (2009). "Le vocabulaire à l’épreuve de la langue: l’exemple
d’Andromaque". Revue La Licorne , Numéro 50 .
En ligne : http://licorne.edel.univ-poitiers.fr/document4394.php
(consulté le 15/02/2018).

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