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EO LA PHILOSOPHIE ANALYTIOUE sous la direction de Sanpra LAUGIER et Sapine PLAUD wil Chapitre 4. La philosophie du langage ordinaire 2u 3. J. R. Searle! Raoul Moati Le philosophe américain J. R. Searle a été I’éleve & Oxford de J. L. Austin et de P. F, Strawson dans les années 1950, Son approche en philosophic du langage a été trés nettement influencée par ces deux maitres. Dés 1969, inscrivant sa démarche dans la filiation de la philosophic du langage ordi- naire d’Austin, Searle composa un « Essai de philosophie du langage » incitulé précisément Speech Acts (Les Actes de langage). On peut dire, malgré la nouvelle orientation prise par sa pensée dés le début des années 1980, plus nettement engagée du coté de la philosophie de l’esprit — tournant que consacre la paru- tion de Intentionality’ en 1983 — que Searle ne se départit jamais entiérement de la problématique des actes de langage et que, par bien des aspects, celle-ci continua de nourrir ses élaborations jusque dans la description plus tardive des phénoménes sociaux, que consacre son étude désormais célébre La Construction de la réalité sociale’ (1995). On voudrait dans ce texte souligner 'ambiguité de la position de Searle & 'endroit de la critique du descriptivisme qu’impliquait, chez J. L, Austin, Pintroduction de la notion d’« acte de langage ». Nous trai terons ainsi du « prisme descriptiviste » de la théorie des actes de langage de Searle. Qu’entendons-nous par « prise descriptiviste » ? Dans la mesure ott Searle se réclame explicitement de la démarche d’Austin, on yoit mal 4 premiere vue comment sa théorie pourrait transgresser ce q\ ¢ présente, chez le philosophe d’Oxford, comme la condition fondamentale de l’éude de ces phénomenes linguistiques par le biais desquels le langage ne sert plus restrictivement & représenter le monde, mais y réaliser un certain nombre dactes, Chez Austin, la découverte des « énoncés performatifs » a pour corollaire la critique de ce que le philosophe britannique appelle, dans How To Do Things with Words (Quand dire, cest faire), « Villusion descriptive [descriptive fallacy|* ». Tant que Yon sien tient une conception exclusivement descriptiviste/représentationna- lisce du langage, on ne peut manquer de passer a cété des énoncés relevant d'un régime alternatif qu’Austin appelle les énoncés « performatifs , lesquels sone bien distinets des énoncés ayant vocation a décrite le monde, ceux qu’Austin appelle, dans la premigre conférence de son maitre-livre, les « constatifi ». Comment des lors, si Searle vise & I’établissement d'une théorie des actes de langage, celle-ci pourraicelle céder en quoi que ce soit au préjugé descriptiviste, 1. Je remercie les participants du SEPL de Patis | pour leurs remarques stimulantes 2. J.R. Searle, Intentionality, an Essay in the Philosophy of Mind, Cambridge (UK), Cambridge UP, 1983, trad. fr. C. Pichevin, L'Intentionalité. Essai de philosophie des étaus mentauc, Patis, Minuit, 1985. 3. J.R. Searle, The Construction of Social Reality, New York, ‘The Free Press, 1995, trad. fi. . Tiercelin, Paris, Gallimard, 1998. 4. J.L. Austin, How To Do Things with Words[HTW1, éd, J. O. Urmson et M. Sbisi, Cambridge (MA), Harvard UP, 1962, p. 3, tad. fr. G. Lane, Paris, Seuil, 1970, p. 39. en es errrr—s—i<‘isSOSSS 212 La philosophic analytique alors méme que le recours ati concept d’« actes de langage » suppose celui-ci au moins dépassé, sinon contredit ? La légitimité d’une telle question suppose en réalité une entente fortement restrictive de la notion d’« illusion descriptive », celle d’aprés laquelle il suffit qu'un énoncé ne décrive pas directement le monde pour qu’il ne relaic pas le préjugé descriptiviste. C’est malheureusement cette entente que se fiérent nombre d’auteurs ~ au premier chef Searle — ay: ne pu se réclamer de prés ou de loin des innovations prodigieuses du philosophe d’Oxford La suite de Quand dire, cist faire vémoigne en effet par bien des endroit d'une défiance élargie d’Aus vis de toutes les formes rampantes de bleaux actes de langage eus-mémes. Lacuité de sa vigilance nous offre les moyens de prévenir toute relecture visant descriptivisme malencontreusement appl A restituer l’intelligibilité de la théorie des actes de langage dans les coordon- nées d'un descriptivisme indu. Crest cette prévention qui pourra servir ici de branle-bas de combat & Pencontre de la recomposition, & nos yeux probléma ngage que Searle propose aprés Austin. Pourtant, ce qui frappe & premiere lecture de Speech Acts reste la fidélité théorique a Austin clairement affichée par Searle, plus particuliérement tiquement descriptiviste, de la théorie des actes de la (nous y reviendrons) dans sa critique decisive de la théorie de la signification de Grice, réhabilitant contre ce dernier la distinction fondamentale de Quand dire, cest faire entre «actes illocutoires » et « actes perlocutoires ». Searle n'a cu de cesse de se réclamer positivement de Papport au inien dans sa compré- hension des actes de langage, et cest encore ce qu'il rappelle dans les pages de son « autoportrait philosophique » : Mon premier travail sest fait en philosopbie du langage, et Vun des enjewx de celui-ci consistait dans une tentative de développer une théorie générale des actes de langage, J'ai tenté une utilisation approfondie [extensive use] des intuitions déjie développées par d'autres philosophes d’Oxford, a premier chef Austin’. Néanmoins, il semble que l’injection d’une contrainte explicitement austi- nienne dans la compréhension de la théorie de la signification de Grice ne soit pas suffisante pour que Searle parvienne & épouser complétement les consé- quences de l'anti-descriptivisme propre au conventionnalisme de son maitre oxonien, cest-i-dire impliquées par la théorie de I’«illocutoire » développée par ce dernier. Searle, a la suite de Grice’, continuera de raisonner dans les termes d’un renouvellement de la théorie de la signification, et cela & partir dune refonte conventionnaliste du dispositif communicationnel proposé par Grice. Cette derniére refonte agerave les risques descriptivistes contenus dans le J. R. Searle, « A Philosophical Self-Portrait », in T. Mautner (6d.), The Penguin Dictionary of Philosophy, Londtes, New York, Penguin Books, 1997, p. 512. Searle, revenant sus sa premiére ceuvre, pourra rappeler le point auquel sa pensée « fucinspirée parle travail de Grice sur la signification » (J. R. Searle, « Meaning, Communication and Representation », in R. Grandy et R. Warner (éd.), p. 210). Chapitre 4. La philosophie du langage ordinaire 213 propos gricien, en ce qu’a partir d’elle, la phrase se met d étre considérée comme le sidge de Vacte de langage’, Nous essaierons de montrer qu’il n'y a aucun €onnement a avoir quant au tournant apparent, lexical, pris par Searle & partir des années 1980*, passant d’une conception pragmatique de la signification & une position plus nettement sémantique’, qu’il avait pourtant trés vivement critiquéc en 1969. Un tel revirement était en un sens prévisible, dans la mes re oit ce que l'on entend par « pragmatique » n’a souvent que peu de chose a vo avec le tournant résolument anti-descriptiviste pris par Austin dans sa théorie des actes de langage', Comme nous chercherons a le montrer, la pragmatique, dans l'inflexion que Searle lui donne dans Speech Acts, vise moins & renoncer aux exigences de la sémantique qu’a produire une théorie de la signification plus complete par rapport a celle-ci. Nous procéderons en deux temps afin de renter d’élucider, par un biais critique, les enjeux fondamentaux de la théorie searlienne des actes de langage. Nous chercherons & examiner dans un premier temps le sens explicitement in de la critique que Searle adresse & Grice, avant d’interroger dans un deuxigme temps, d'une part ce que nous appellerons le « conventionnalisme descriptiviste » de Searle, et d’autre part, la viabilité de articulation proposée par le philosophe américain entre les actes illocutoires ct les actes propositionnels en vue de la clarification exhaustive de la notion d’acte de langage qu'une telle distinction permettrait d’aprés Searle. I. Searle critique de Grice Avant d’aborder ce que nous appellerons la « contrainte austinienne » que Searle objecte & la théorie de Grice, il est utile de rappeler la théorie de la signi- fication communicationnelle développé par ce dernier dans son fameux article « Meaning » (1957)*. Dans ce texte, Grice distingue entre deux conceptions de la signification : la signification naturelle ct la signification non naturelle (Signification (nn)). La premiere seraic de nature causale, tandis que la seconde 1. CEJ. R, Seatle, Speech Acts, An Essay in the Philosophy of Language, Cambridge, Cambridge UP, 1969, p. 18 sg, trad. fir. Les Actes de langage, Paris, Hermann, 1972, p. 54 sq. 2. Nous nous opposonsen cela ila lecture de]. Rust. Cf. J. Rust, « On the Meaning of Meaning; Critical Remarks », in John Searle, ch. 7, Londres, New York, Continuum Contemporary American Thinkers, 2009, p. 107-118, Cf. « Meaning, Communication and Representation », op. ci Surce point, nous renvoyons aux critiques importantes formulées par Sandra Laugier dans «Acte de langage ou pragmatique ? », Revue de métaphysique et de morale, 200412, Paris, PUE, p. 279-303. CE. également B, Ambroise, Quist-ce qucun acte de parole ?, Paris, Vrin, 2009. 5. Cf. Speech Acts, op. cit, p. 17, trad. fr, p. 53 « on peut dire bien des choses sur le langage sans parler des actes de langage, mais route théorie purement formelle de ce gente est forcément incomplete » {nous soulignons). 6. P. Grice, « Meaning» The Philosophical Review 66, p. 377-88. Republié dans P. Grice, Studies in the Way of Words, Cambridge (MA), Harvard UP, 1989, p. 213-223, Pour une présentation de la pensée de Grice, voir la contribution de C. Al-Saleh dans le présent volume. RE 214 La philosophie analytique aurait une portée spécifiquement intentionnelle. Grice forge cette distinction notamment en réaction a la conception intégralement causaliste de la signifi- cation, celle de la psychologie béhavioriste, par le biais dune polémique avec Charles Stevenson'. Au début de son article, Grice propose de revenir aux acceptions courantes du concept de « signification » [meaning] et de distinguer ainsi entre deux facons dont le mot est habituellement employé. Le premier s ot la signification n’a de valeur que purement causale : « ces boutons signifient la rougeole [thoses spots mean measles), « le usage renvoie a des énonc récent budget signifie que nous aurons une année difficile [the recent budger means that we shall have a hard year? ». Dans ces exemples donnés par Grice une relation exrerne de entre en jeu aucune intention de signification, mais cause & effet, ott le second renvoie plus qu’il ne signifie au sens précis que Grice veut dégager, & Vexistence de la premiére : les boutons a la rougeole de méme que, par extension de ce modéle naturel, la rigueur du budget laisse présager une année difficile. Au contraire, la signification non naturelle (777) réalise une relation interne ; elle traduit existence d'une intention de signifier quelque chose qui dispose d’un rapport constitutif 4 ce qui est signifié. En effet, et Cest [8 tout Penjeu du modéle communicationnel impliqué par le concept de signification non naturelle gricien, Pobjectif de l’intention de signification dans la signification non naturelle est autane de signifier quelque chose que de se voir comprise dans l'interaction comme cette intention de signifier méme. La signification non naturelle se distingue de la signification naturelle en ce quelle ne se manifeste en aucune maniére comme le symptéme de lintention de signification qui la détermine. C'est pourquoi il n'y de signification non naturelle (au sens que Grice donne a cette notion) qu’a la condition expresse que soit reconnue, avec ce oo est signifig, intention de sigr principe, I! faut done que lintention de signi seulement & signifier quelque chose, mais surtout & se faire reconnaitre comme fier qui est & son fication non naturelle vise non la raison de cette signification. Crest \ ce titre que le concept de signification non naturelle implique l'interaction communicationnelle ; la possibilité de communiquer mon intention de signification a un interlocuteur représente la condition d’intelligibilité pour une conception zon causale de la signification. C'est pourquoi Grice soutient que son concept de signification non naturelle exclut un cas comme celui oi: « je montre une photographie 4 M. X de M. Y faisant preuve d’un comportement excessivement familier envers Mme X° ». Dans un tel cas de figure, dans la mesure oit je ne cherche pas & manifester & mon interlocuteur que j'ai l’intention de lui montrer la photographie en ques- tion pour lui signifier l’écart de conduite de sa femme, la signification ne pent pas étre considérée comme non naturelle. Montrer une photographie produit son effet (Pact ation du comportement de Mme X) indépendamment du fait 1. CLC.L. Stevenson, Ethics and Language, New Haven, Yale UP, 1944. 2. P.Grice, op ct, p. 213. 3. Id p. 218. thapitre 4. La philosophie du langage ordinaire 215 que jai intention de le signifier 4X, Certe indépendance de l'effet obtenu par rapport la reconnaissance deI’intention qui vise 4 son obtention, laquelle nest ire dans un tel cas de figure, implique qu'on ne puisse ici parler au sens strict (non naturel), de signification, C’est seulement dans la justement pas néce: mesure of je parviens a faire reconnaitre 4 X que mon intention est bien de lui signifier que sa fernme le trompe, que nous nous trouvons en présence d'un cas de signification non naturelle. A ce titre, si je lui dessine un croquis, il devient inévitable qu’en plus de lui faire prendre conscience des errements moraux de son épouse, je lui manifeste mon intention de les lui faire comprendre, autrement dit, je lui signifie au sens non naturel I’écart de conduite auquel sa ferme s'est livrée : dans ce cas de figure, la reconnaissance de mon intention est incontournable pour la transmission de l'information. On devra donc di dun point de vue gricien, que je ne suis parvenu & signifier & X au sens strict Je comportement adultérin de sa femme, que dans la mi faire reconnaitre mon intention de le lui signifier! Dans sa théorie des actes de langage, Seatle se réclame du dispositif gricien, sure ott j'ai réussi a lui héritée d’Austin concer- rout en soumettant celui-ci 4 l’épreuve d'une exigen nant la portée de V'illocutoire, essentielle d’aprés Searle & la réalisation du processus communicationnel impliqué par la signification (xn). Avant d’en- trer dans le détail de cette réforme d’apparence austinienne, il est 4 rappeler que l’daboration de Grice ne se concilie en réalité que fort difficilement avec la théorie d’Austin, et réciproquement®, Si Particle de Grice est paru en 1957, il avait été présenté dans sa forme déja achevée en 1948, lors d'une rencontre de la Société Philosophique d’ Oxford, soit quelques années avant l'exposition par Austin de son travail sur les actes de langage (1955). L'élaboration de Grice dépend moins de celle d’Austin quelle n'est le fruit de sa collaboration importante 4 Oxford avec Warnock et Strawson, lequel cherchera 4 pondérer le conventionnalisme d’Austin par un certain nombre d'arguments d’inspiration gricienne®. On se représente ainsi par avance le caractére risqué, sinon complé- tement aventureux, du pari théorique searlien prenant pour objectif de reera- duire la théorie de Grice dans le lexique de l'illocution hérité d’Austin’, Searle commence par rappeler la conception gricienne de la signification (nz) + 1. Pour exposition des limites d’une telle théorie de la signification, voir l'essai impor- tant de Jocelyn Benoist : « Grice sous la lune », in Sens et sensibilieé, Paris, Cerf, 2009, p. 179-199. 2. Latentation de leur articulation a pu écre celled’un Strawson qui placa problématiquement Austin du cété de Grice dans ce qu'il décrit comme « l'épopée homeérique » qui oppose «les théoriciens de intention de communication » & ceux de la « sémantique formelle ». CF. P. F, Strawson, « Meaning and Truth », in Logico-linguistic Papers, Londres, Methuen, 1971, p. 171-72, « Signification et vérité », in Etudes de logique et de linguistique, trad. fe J. Milner, Paris, Seuil, 1977, p. 197. 3. CEP. F, Strawson, « Intention et convention dans les actes de langage », ap. cit p. 173-194. Voir aussi J. Benoist, Les Limites de I'intentionalité, Paris, Vrin, 2005, p. 39-66. 4, Tentative dont Grice ne pouvait que lucidement mesurer les limites, lui qui réprouva non sans virulence le conventionnalisme austinien 1 obscur pour expliquer Vobscur » (P. Grice, conversation avec R, Warner et J. Baker, 29 janvier 1983, in Grice Papers, BANC ne 216 La philosophie analytique Grice analyse la notion de « signification non naturelle » de la fagon suivante ; dire qu'un locuteur a voulu signifier [meant] quelque chose par X, cest dire que L. a en l’intention intended], en énoncant X, de produire un effet sur Lauditeur A grice a la reconnaissance (recognition) par A de cette intention’. Aussi, par rapport 4 un tel modéle, Searle peur-il commencer par soutenir en faveur de Grice quill est « trés utile [...] d’envisager la signification sous cet aspect [...] parce que cette formulation met en rapport signification et intention? », Se réclamant du protocole gricien, Searle peut ainsi souligner que « lorsque je parle, jessaie de transmettre [communicate] certaines choses & mon interlocuteur en I’amenant 4 reconnaitre mon intention de lui ‘ommun er précisé: ces choses’ », Searle s‘ id I ception de Grice quer précisément ces choses? », Searle s‘entend avec la conception de Grice sur ce point. Sa critique vise non pas le modéle communicationnel qu'il défend A son tour (et qu'un point de vue résolument austinien, conventionnaliste, en revanche, ne peut en aucune maniére cautionner’), mais Voblitération du facteur illocutoire qu'un tel modéle implique nécessairement pour intelligi- bilité de la signification (nn). La révision « illocutoire » proposée par Searle implique quaux deux conditions susmentionnées (« transmettre cert. choses en l'amenant & reconnaitre mon intention de lui communiquer ces choses ») il faille en ajouter une troisiéme : Pintention de produire la reconnais- sance de mon intention auprés de Pinterlocuteur en vertu de la connai dont celui-ci dispose des régles gouvernant l'emploi de la phrase mobilisée & cet effer, Searle reproche & Grice d’avoir sous-estimé le fai 8 que les moyens linguistiques sont particuligrement adaptés & Vexigence communicationnelle de la signification non naturelle. Grice aurait ainsi réduit le langage a un moyen parmi d'autres de signifier ~ cest-i-dire en termes griciens : que effet recherché par le locuteur soit obtenu via la reconnaissance par Vauditeur de intention du locuteur d’obtenir cet effet sur lui — dans lequel inévitablement « il semblerait que n’importe quelle phrase puisse étre utilisée pour renvoyer & n'importe quelle signification’ », MSS 90/135 c, The Bancroft Library, University of California, Berkeley, cité par S. Chapman in Paud Grice, Philosopher and Linguist, New York, Palgrave, 2005, p. 76.). Strawson se fit en partic le porte-parole de cette critique du conventionnalisme austinien. Il considére en effet la théorie de Grice comme le levier théorique permettant de mener 4 son terme Pélaboration austinienne prenant pour objet la question de I's sprake » (CE. « Intention et convention dans les actes de langage, op. cit). Nous reviendrons plus loin sur la pertinence contestable d’une telle retraduction intentionnaliste, d’inspiration gricienne des uptake » d’Austin, Sur ce point, il est néanmoins A souligner que Searle s‘inscrit pleinement dans la filiation de son maitre Strawson, malgré la critique conventionnaliste qu'il formule dans une note 3 son endroit (Cl. Speech Aets, op. cits p. 47, trad. fr, p. 88). Id. p. 43, trad. fr, p. 83. Ibid. Ibid. Sur ce point, voir & nouveau J. Ben , Les Limites de l'intentionalite, op. cit Speech Acts, op. cit, p. 45, trad. fr. p. 85, modifige Chapitre 4. La philosophie du langage ordinaire 217 Searle regrette chez Grice que le niveau de la phrase ne soit jamais reconnu comme le vecteur essentiel de la signification : celle-ci étant réduite 8 un moyen parmi bien d'autres de signifier (Cest-i-dire de produire un certain effet par la ance de l’intention de le produire), Searle reproche ain reconnai: ii Grice, par le biais de la distinction héritée d’Austin entre l'illocutoire et le perlocutoire', d avoir réduit la signification non naturelle & Pobtention d’un effet perlocutoire, cest-A-dire d'un effet obtenu par des moyens qui ne sont pas conventionnels et par li seulement accessoirement linguistiques. Au contraire, Searle défend Vidée que signifier implique nécessairement la réalisation d’un acte illocu- toire?, Cest par lutilisation conventionnellement’ définie d’une phrase T que je parviens & faire reconnaitre mon intention I d’obtenir Veffet E. sur Vaudi- teur A: le procédé que jutilise & cette fin, soutient Searle, « appartient & ce type de procédés employés conventionnellement’ ». Si cette éeape, que Searle appelle illocutoire, est manquée, alors leffet obtenu ne pourra qu’étre naturel, dans le lexique austinien repris ici par Searle, perlocutoire, puisque les moyer pour obtenir l’effet E par la reconnaissance de I par A ne conventionnels requis sont pas pris en compte par Grice (seul compte pour ce dernier impact que Pénoncé exerce sur Vauditeur). Crest done bien dans le but de proposer un dispositif conformed l'exigence de Grice (I’édification d'une théorie non naturelle de la signification) que Searle thématise impossibilité de se passer de la catégorie austinienne de « valeur illocutoire », laquelle coincide dans son dispositif avec la valeur convention- nelle de la phrase, Aussi la conception de Grice ne peut-elle manquer d’étre défectueuse aux yeux de Searle, en ce qu’ elle ne dit pas dans quelle mesure la signification peut dépendre de régles ou de conventions, elle ne rend pas compte de la relation [connexion] existant entre ce que l'on veut signifier [meaning] en disant quelque chose et ce que cette chose signifie effectivement dans la langue (language)? ». A la différence de Grice, Searle souligne qu il y a entre ce que l'on veut signifier en pronongant une phrase et ce que cette phrase signifie dans la langue qu’on utilise, une relation qui n'est pas quelconque [when one utters a sentence is more than just randomly related to what the sentence means|° ». Soucietix d’articuler l’intentionnel au conventionnel, Searle considére la signi- fication comme un phénoméne de part en part linguistique, l'effer visé par la signification (Vobtention d’un effet par la reconnaissance de intention de le 1, Rappelons la nature de la distinction forgée par Austin entre deux types d'actes acc par la parole, cclui qui consiste & faire quelque chose « en disant quelque chose [in saying something] » (illocutoire) et Pacte accompli « par le fait de dire quelque chose [by saying something] » (perlocutoire), HTW p. 94, trad. fr. p. 109. 2. Speech Acts, op. cit., p. 44, trad. fire, p. 84, 3. Searle s'appuie sur lassertion d’Austin d’aprés laquelle Pacte illocutoire « est un acte conventionnel ; effectué en tant que conforme & une convention », HTW’p. 105, trad. fr p. 117. Speech Acts., p. 45, trad. fr., p. 86. Id p. 43, trad. fe p. 84 Ibid., p. 45, trad. ft, p. 86. plis aye ee 218 La philosophie analytique ire) étant réalisé au moyen du langage, via la mobilisation d’éléments istiques prescrite par des régles déterminées. Il existe pour Searle un lien entre la signification conventionnelle des phrases et essentiel, négligé par Gric Pintention de signifier que le locuteur cherche & communiquer a son interlocu- aarle, parfaitement erroné de minimiser eur, Aussi est-il, du point de vue de S le niveau linguistique dans le dispositifcommunicationnel comme le fait Grice. Pour Searle, Peffer visé par la signification doit étre compris comme illocutoire et non perlocutoire, il s'agit d’un effet intégralement conventionnel. d'un méme geste critique & Grice et & Strawson le para- Searle objecte ai digme de la comprehension (illocuroire) & celui adopté par eux de la croyance et de la réaction (perlocutoire)', Le risque, dans la perspective de Grice, est en effet de manquer /’intention comme raison de la signification, et par li, & Vautre bout de la chaine, que l’énonciation permette de fournir 4 Pauditeur « une raison de croire » dans le cas dune affirmation, « une raison d’exécuter Pacte » dans le cas d’un ditectif, une raison pour l'auditeur de sfattendre ce que le locuteur accomplisse sa promesse, dans le cas d'un acte promissif® Comme Searle le rappelle contre Grice, « parler une langue, c'est adopter une forme de comportement régi par des régles », cest « accomplir des actes selon des régles® ». Le lexique de la régle se révéle toutefois plus wittgensteinien dans sa facture, qu’austinien (attendu qu'Austin insiste beaucoup plus sur la notion de « conventions »), Pourtant, dans opposition quelque peu sommaire que Searle dresse entre « les théories de la communication comprise comme institution [institutional theories of communication] » et les « théories naturelles de la signification [naturalistic theories of meaning) », le philosophe américain place Austin et Wittgenstein dans la premiére catégorie, et sa propre quéte dans leur prolongement. Loin d’opposer les régles aux conventions, Searle cherche a les articuler, rapportant les régles au fonctionnement du langage, et les conventions & la mise en ceuvre particuliére de ces régles dans la langue. Aussi la diversité des langues, et par la des systémes conventionnels, traduitelle la diversité des moyens de mettre en ceuvre les régles consticutives du langage. Si parler (Cest-a-dire accompli des actes de langage (illocutoires)) cest suivre un certain nombre de régles, les modalités du respect de ces régles ne sont pas les mémes d'un systéme conventionnel & un autre : On peut considérer que, dans la mesure oit elles ont inter-traduisibles des langues naturelles différentes représentent des applications convention- nelles différentes (different conventional realizations] des mémes régles sous-jacentes. Que le francais dise « je promets » pour faire une promesse, quand Vanglais dit « 1 promise », cst lit une affaire de conventions. Mais Le fait qu'employer certains procédés pour exprimer une promesse (dans une Ibid. p. 47, trad. fr. p. 88 Sur-ce point, ef. Intentionality, op. cits, p. 178-179, trad. fr. p. 215-216, Id, p. 22, trad. fr. p. 59. 4. CE ibid, p. 71, wad. fe p. 14, EE ee Chapitre 4. La philosophie du langage ordinaire 219 situation appropriée) revienne d se soumettre a une obligation, est ici affaire de régles et non de conventions propres au francais ou a Vanglais'. Aussi Grice manqueraitil, d’aprés Searle, la composante illocutoire, cest-i- dire conventionnelle, des éléments linguistiques mobilisés en vue de Pobtention d'un effet sur l’interlocuteur. Or il est bien vrai, $ tle le reconnait, que certains verbes illocutoires ont vocation & produire un effet perlocutoire (« sorter », par exemple, rattache sa signification & « un effet perlocutoire particulier qu’on a Pintention de produire, a savoir faire sortir ’interlocuteur? »), mais ce n'est en aucun cas vrai de tous (promettre par exemple). C'est pourquoi Searle peut ajourer de maniére décisive que si nous pouvions « fournir une analyse de tous les actes illocutoires (au moins de la plupart d’entre eux) en termes d'effets perlocutoires, les chances de pouvoir faire cette analyse sans faire référence aux régles seraient grandement accrues’ », auquel cas Grice aurait raison. Dans la mesure oit le matériau linguistique n’a d’intérét pour Grice qu’a la mesure de sa capacité & produire des effets naturels il devient inévitablement possible de se passer de la langue pour V‘obtention de ces mémes effets, ces derniers n’étant rattachés & la mobilisation d’aucune convention. Ainsi, il deviendrait problématiquement « possible d’effectuer Pacte soit & lintéricur d'une langue, soit en dehors [én or out of a language), et le faire & Vintérieur d'une langue, ce serait faire au moyen d'un procédé conventionnel, ce qui pourrait étre fait sans ce recours* », iste résulte de la Cet affadissement de la problématique conventionnal présupposition problématique selon laquelle le langage aurait pour unique vocation de produire des réactions ou des effers dordre naturel. C'est cette sous-caractérisation du langage que la pensée d’Austin, par sa distinction entre |'illocutoire ct le perlocutoire, permet de conjurer. Autrement dit, Searle soutient que la distinction héritée d’Austin, et cela malgré les réserves de Grice sur la question, offre en réalité le seul moyen conceptuel d’accoucher d'une conception non contradictoire de la signification non naturelle. IL. Actes de langage ou signification ? Le descriptivisme conventionnaliste de Searle La critique de Searle & Pendroit de Grice et de Strawson consistait préci- sément a démontrer qu'une liaison fondamentale unit la manifestation de nos intentions aux expressions conventionnelles, 12 oit pour Strawson, dans la continuité de Grice, le régime de intention n’appartenait justement pas & Ihid., p. 39-40, trad. fi, p. 80. Ihid., p. 46, trad. fe., p. 87. Ibid., p. 71, trad. fr, p. 114, modifi Ibid. a 220 La philosophic analytique celui des conventions', lesquelles se révélaient insuffisantes & la détermination illocutoire de l'acte de langage effectué par leur biais, insuffisance que Searle, défendant Austin contre Strawson, réprouve. Searle ajoute une condition fondamentale au schéma de la signification mm : que l’interlocuteur obtienne la reconnaissance de l’intention de signification du locuteur par des moyens intégralement conventionnels. La mobilisation par le locuteur d'une expression conventionnellement dérerminée représente le moyen par lequel celui-ci fait reconnaitre 4 son interlocutcur son intention de lui signifier quelque chose. ste ici sa dette &l’égard d’Austin contre On peut done penser que Searle mani les détives griciennes de Strawson. Pourtant, il n’en est rien : en préservant le modéle communicationnel de la signification zn, Searle ne peut manquer de réhabiliter un conventionnalisme de la phrase des plus problématiques, en ce i n'a plus tien de commun avec le conventionnalisme du rituel non tique de lacte de langage proprement austinien, en que celui exhaustivement lingu tant précisément que ce dernier n’a jamais pour finalité quant & sa réalisation, de signifier au sens non naturel, cest-a-dire de communiquer une intention, A ce titre, il n'est pas certain que l'on n’altére pas en profondeur la théorie d’Austin en 'adaptant au modeéle significationnel gricien comme le propose Searle, Pourtant, le philosophe américain prétend bien se réclamer, & la suite de Strawson, d’un phénoméne décrit par Austin lui-méme dans Quand dire, cest faire, & savoir celui de l'« uptake », lequel implique que lexécution d’un acte illocutoire inclue « Passurance d’avoir été bien compris [the securing of uptake]? ». lest d’autane plus troublant de constater qu’Austin traite de ce phénomene sous la forme d'un effet & réaliser, lequel conditionne l’accomplissement de int que ce dernier dépend de la capacité du locuteur Vacte illocutoire, en « provoquer la compréhension de la signification et de la valeur de la locution lthe force of the locution) » auprés de Vauditeur concernant la valeur illocutoire de Vacte : « un effet doit étre produir sur Pauditoire pour qu'un acte illocutoire q puisse étre renu pour achevé [is to be carried out)’ ». Diautre part, Searle se réclame de la possibilité mise en valeur par Austin d expliciter le performatif’. Searle retraduit pourtant cette dernidre clause dans un principe qui n'a plus rien austinien, a savoir le « principe d’exprimabilité » selon lequel « tout ce que Yon peut vouloir signifier peut étre dit [whatever can be meant can be said)’ ». Toure la difficulté reste ainsi de confondte la clause d’explicitation du performatif chez Austin avec celle de lexpression d'une intention & quoi renvoie le principe dexprimabilité searlien. Lacte de langage dans sa version austinienne requiert la conjonction des mots 4 des circonstances extra-linguistiques, alors que le principe searlien implique la possibilité — par la vocation communicationnelle ie CE « Intention et convention dans les actes de langage », ap. cit., ainsi que J. Benoist, Les Limites de l'intentionalité, op. cit. ATW p. 117, trad. fi, p. 124. Id. p. ING, trad, fr, p. 124. CE. ibid., p. 32, crad. fr. p. 62. Speech Acts, op. ett, p. 19, trad. fr. p. 55. Chapitre 4, La philosophie du langage ordinaire 221 que Vacte de langage revét dans sa doctrine — d'un traitement intégralement linguistique de l'acte illocutoire. Rappelons la condition Al exposée par Austin dans la deuxiéme conférence de Quand dire, cest faire, d'aprés laquelle le succes d'un performatif dépend d’une procédure conventionnelle et acceptée quia un certain effet conventionnel, cette procédure incluant la profération de certains mots par certaines personnes dans certaines circonstances', Cette conjonction des mots aux circonstances extra-linguistiques n’a plus de portée des lors que la réalisation du performatif se confond avec la communication d’une inten- tion, laquelle peut trés bien se passer du détour par les circonstances, au profit de inclusion dans la phrase de marqueurs linguistiques renvoyant, en vertu des ragles du langage, & intention de signification du locuteur. De sorte que, soutient Searle, « tour acte de langage, réalisé ou réalisable, peut done, en principe étre déterminé de fagon univoque a partir d’une phrase donnée? ». Le recours aux circonstances dans lesquelles la phrase est énoncée est par prin- cipe une procédure éliminable, les régles de la phrase permettant d’associer utilisation d’éléments linguistiques déterminés (les marqueurs de la force pragmatique) avec ce que veut signifier Ie locuteur par l'emploi de cette phrase. Laccomplissement de l’acte de langage se confond ainsi avec 'expression d’un vouloir-dire que le langage doit nécessairement permettre de réaliser en vertu de la mobilisation réglée d’éléments linguistiques ayant vocation & traduire Pintention du locuteur : Ce principe nous permet de poser comme équivalentes les régles qui portent sur la réalisation des actes de langage {to equate rules for perfor- ming speech acts}, et les rigles qui portent sur U'énonciation de certains éléments linguistiques (with cules for uttering certain linguistic éléments}. Cette équivalence peut étre poste puisque, pour tout acte de langage possible, il existe un élément linguistique possible, dont la signification sufit (les conditions de production étant définies) a établir [determine] que le simple énoncé de cet élément, sous sa forme littérale [litteral utterance], constitue la réalisation [performance] de cet acte de langage’. On passe done, entre Austin et Searle, d'une logique conventionnelle prenant forme dans un ricuel n’ayant rien d’exclusivement linguistique (Austin), & une procédure conventionnelle qui concerne les éléments de la phrase compléte Gearle). Le paradoxe de la position « néo-austinienne » de Searle se caractérise par le fait que tandis qu'Austin combattait le descriptivisme par le biais du conventionnalisme, le dispositif searlien est inévitablement amené & réhabi- HTW p. 14, trad. fi, p. 49. Speech Acts, op. cits. p. 18, trad. fi, p. 54. Frangois Récanati a proposé d’« affaiblir » ce principe, en marquant l'irréductibilité d'une clause contextuelle dans identification de la force pragmatique de l’énoncé. Cf. F. Récanati, Les Enoncés performatifi, Paris, Minuit, 1981, p. 206 59 3. Speech Acts, op. cit. p. 20-21, trad. fr, p. 57. RR 222 La philosophie analytique liter celui-la par Pintermédiaire de celui-ci!, C'est en cela que la théorie des actes de langage de Searle ne sétablit pas dans la conjonetion des mots aux circonstane: dela phrase. Searle peut en effet soutenir quis une étude de la signification d phrases ne se distingue pas en principe d'une étude des actes de langage" ». ‘Autrement dit, alors que chez. Austin il est essentiel, et cela en vertu de sa critique du descriptivisme, de sortir de Pabsolutisme de la signifi phrase, la retraduction searlienne de la critique du descriptivisme implique “omme chez Austin, mais dans I’élucidation de la signification es tion de la au contraire une compréhension & nouveaux frais des enjeux de celle-ci’, en vertu de Pidentification réciproque pour Searle de la signification de la phrase or de Pacte de langage que celle-ci permet d’accomplir. C'est du reste ce qui manifeste toute Voriginalité de la pragmatique searlienne, laquelle implique au licu de sen démarquet, une approche renouvelée de la signification. Loin d’en étre distincte, l’écude de la signification de la phrase est complémentaire de l'étude des actes de langage, et les désolidariser l'une de autre reviendrait& commettre une erreur d’appréciation aussi bien sur 'une que sur autre, erreur que commettrait aux yeux de Searle 'approche sémantique + Isensuit que l'étude de la signification des phrases et l’érude des actes de langage ne forment pas deux domaines indépendants, mais seulement un seul, vue sous deus aspects différents, Searle croit & tort pouvoir inscrire sa critique du formalisme sémantique dans la continuité de la critique de I’« illusion descriptive » d’Austin, En réa la critique searlienne cible le caractére ultimement abstrait du point de vu é, sémantique portant sur la signification. En effet, d'apres le philosophe amé cain, le contenu propositionnel demeure totalement opaque tant que Yon ne sa ‘sit pas 4 quel acte de langage il se rattache. Autrement dit, la critique prag. matique de la sémantique par Searle consiste moins & récuser cette derniére qu’a critiquer son incomplétude “en tenir & Vadoption d’une perspective séman- tique sur la phrase ne permet pas de cerner la signification de celle-ci, laquelle requiert nécessairement l’identification de P'acte de langage (illocutoire) qui sfaccomplit & travers elle, C’est pourquoi la signification de la phrase au sens de Searle n'a rien de seulement sémantique, elle représente phis fondamen- talement Particulation dun contenu propositionnel (niveau sémantique) et une force illocutoire (niveau pragmatique). La pragmatique bien comprise représente, selon Searle, le seul moyen de parvenir & capturer la signification 1. Il parait alors inévitable de qualifier la démarche de Searle de « conventionnalisme descriptiviste ». 2. Id, p. 18, trad. fr, p. 54. 3. C'est pourquoi il est important de noter que Searle modifie le paradigme des actes de langage de la parole la dangue :« on pourrait encore croire que mon point de vue représente nplement, au sens que Saussure a coné 3 ces termes, une étude de la “parole” plutdt que de la langue. Je prétends cependant, quiune étude appropriée des actes de étude de la dangue [a study of langue] » Gbid., p. 17, tad. fr, p. 53-54). 4, bide p. 18, trad. fry p. 55. ngage est une _— Chapitre 4. La philosophie du langage ordinaire des phrases, elle réalise ainsi Vobjectif de la sémantique en adjoignant a celle-ci ce supplément d'intelligibilicé nécessaire & la réalisation de sa viche quest la dimension illocutoire : On peut bien dire des choses sur le langage sans parler des actes de langage, mais toute théorie purement formelle de ce genre est forcément incomplete. C'est ici sans aucun doute que l'on couche au plus prés du descriptivisme rampant de la théorie searlienne. Celle-ci, au lieu de procéder a a mino- ration, sinon a abandon pur et simple (ainsi que Quand dire, cest faire en appelait) du modéle prédicatif pour Panalyse des actes de langage, se révéle au contraite procéder a sa générali tion, Il faut cependant d’emblée prévenit un contresens : la théorie de Searle ne revient pas & articulation dun niveau sémantique constitué 4 un niveau pragmatique secondaire, comme si une force venait s‘appliquer extérieurement & un contenu indépendant. Searle soutient au contraire que laissé 4 lui-méme, est ire soustrait & son articulation a une force illocutoire, le contenu propositionnel est parfaitement inintelligible. Crest donc exclusivement par le biais de l'accomplissement d’un acte illocutoire qu'un acte de prédication se réalise, celui i étant fondamentalement solidaite de celui-la, de sorte que contrairement ce que soutient l’approche sémantique, il neexiste pas de niveau prédicatif indépendant de Vacte illocutoire qui se réalise 4G travers lui, Autrement dit, pour Sea le, seule une conception pragmatique de la signification permet de mener a son terme lanalyse de la prédication. Cela signifi qu'il n'est selon lui pas possible de cerner le contenu prédicatif d’une phrase sans identifier la forme illocutoire qui s'articule & celui-ci. Reprenons les exemples de Searle, & savoir les quatre phrases suivante 1. Jean fume beaucoup. 2. Jean fume-t-il beaucoup ? 3. Fume beaucoup, Jean ! 4, Plitt au ciel que Jean fumat beaucoup? ! Cet exemple permet & Searle de déplier ensemble des actes de langage contenus par une méme phrase, afin de bien mettre en évidence le fait que si Pacte illocutoire n'est pas le méme dans tous les cas ici exposés (puisque 1. représente un cas d’assertion, 2. une question, 3. un ordre, 4. Lexpression d'un souhait), en revanche au niveau de base, ces quatre phrases « comportent la méme référence et la méme prédication® ». Searle distingue a si entre le niveau propositionnel, qui inclut la référence et la prédication, et le niveau pragma- tique ot saccomplissent, par le biais des actes réalisés au premier niveau, des actes illocutoires, Si la réalisation d'un acte illocutoire émplique la réalisation Ibid., p.17, trad. fe p. 5: Thid., p. 22, trad. ft p. 60. Ibid., p. 23, wad. fr. p. 60. 224 La philosophie anatytique d'actes propositionnels (la référence et la prédication), il demeure toutefois possible d’effectuer des actes illocutoires distincts a partir des mémes actes propositionnels, comme dans les exemples ici proposés, ot la méme référence et la méme prédication se trouvent réalisées dans des actes illocutoires nette- ait que la phrase comprend Paccomplissement étagé de différents actes de langage, propositionnel et illocu- ment différents les uns des autres. Searle déduit du fi toire, la dépendance constitutive de Pacte prédicatifa 'égard de la réalisation d'un acte illocutoire, Dans la mesure oit il définit lacte de référer, dans les i-dessus, comme celui de renvoyer un certain objet, en Poccur- «Vexpression “fume beaucoup™ », le philosophe américain soutient que ce dernier acte (« fume beaucoup ») reste parfaitement inintelligible tant qu'il n’est pas articulé a un acte illocutoire décerminé. Aussi prédiquer ne représente-til jamais un acte indépendant par rapport 4 'acte illocutoire qui vaccomplit travers lui, « Jean fume beaucoup » cas exposés rence «Jean », et lacte de prédiquer ne représente en rien un acte prédicatif potentiellement indépendant de Pap- plication sur lui d'une force illocutoire ; en tant que tel, ce cas est parfaite ment intelligible en raison du fait que son contenu est pris dans la réalisation d'un acte illocutoire déterminé de nature assertive, « Jean fume beaucoup » représente la réalisation d’un acte prédicatif par le biais de la réalisation d'un acte assertif, et il n'est jamais possible, selon Scarle, d’isoler le premier niveau du second, Lintelligibilicé d'un acte propositionnel prédicatif® requiert ainsi, contre 'approche exclusivement sémantique, l'identification de la force prag- matique & laquelle il est systématiquement articulé : Les actes propositionnels ne peuvent jamais ce présenter tout seus [occur alone] cést-i-dire qu'on ne peut pas uniquement référer ou prédiquer sans faire une assertion, poser une question, ou exécuter quelque autre acte illocutoire’. Dans la mesure oit l'approche sémantique ne se dote pas des outils permet- tant de mener a son terme l’analyse de la phrase, elle ne peut manquer de confondre le niveau assertif avec le niveau prédicatif, et ainsi de prendre pour une proposition pragmatiquement neutre une assertion illocutoirement déter- minée. Il est essentiel, pour Searle, de ne pas confondre le niveau propositionnel avec celui de la phrase, le premier représentant une composante abstraite et incomplete de la seconde, laquelle constitue 'accomplissement d’actes propo- itionnels articulés 4 un acte illocutoire. A ce titre, croyant suivre son maitre 1. bid. 2. En effet, Searle soutient que parmi les actes propositionnels, Pacte de référer est indépen- dant, méme s'il prend sa place dans un acte de langage complet, lequel implique un acte de prédication (propositionnel) et un acte illocutoire. Searle soutient que Vacte de référer est indépendant de Pacte illocutoire en ce que son incelligibilité ne dépend pas de eelui-ci, au contraire de Vacte prédicatif. Selon lui, nous référe acte de langage mis en ceuvre, en revanche nous ne prédiquons pas de la méme fagon en s de la méme manigre quel que soit fonction du type de force illacutoire mise en aeuvre. 3. Ibid., p. 25, trad. fr. (modi ge) p. 63. Chapitre 4, La philosophie du langage ordinaive 225 ‘Austin, Searle récuse la possibilité qu'un contenu propositionnel puisse subsister indépendamment de tout investissement pragmatique. Selon toute apparence, il retourne contre Papproche sémantique la critique qu’Austin avait formulée 4 Fencontre du descriptivisme. Or il n'est pas sir que le modéle présenté par Searle échappe & la « mise en pice » austinienne du « fétiche vérité-fausseté! », dans la mesure ott un tel modéle confirme un modle prédicatif/propositionnel qui n'a plus aucune pertinence pour Austin une fois articulée la portée des énoncés constatifs 4 la problématique illocutoire. En effet, en défendant la thése d'aprés laquelle « la prédication n’est, en aucun cas, un acte de langage indépen- ¢ [is not a separate speech act at all|* », Searle soutient que Vacte de prédiquer obéit 4 un certain nombre de régles, notamment celle de référer, et celle qui prescrit que le contenu articulé par la proposition doit étre prédicable, tel qu’il soit logiquement possible pour P d’étre vrai ou faux de X°, Or Pune des regles exposées par Searle — la régle 4 — stipule fondamentalement que « l’énoncé de Previent a soulever la question de la vérité, ou de la fausseté, de Pa propos de X (selon un certain mode illocutoire, déterminé par le procédé du marqueur de force illocutoire contenu dans la phrase)* ». Cette régle est d'une importance cruciale pour cerner ce qui différencie soralement la démarche de Seatle de celle d’Austin, au-dela du probléme de la communication intentionnelle, Croyant ici prolonger la critique du descriptivisme d’Austin, Searle succombe entigrement i erreur dénoncée par le philosophe britannique, en soutenant contre l’ap- proche sémantique que l'activité prédicative n'est pas réservée aux seuls actes de langage constatifs. Cela signifie, pour Searle, que nous ne prédiquons pas seulement lorsque nous disons que « la porte est fermée » par exemple, mais aussi et tout autant lorsque nous ordonnons « ferme la porte », bref, 8 chaque fois qu'un acte illocutoire est accompli (selon des modalités de prédication & chaque fois distinctes en fonction de l'acte illocutoire mis en ceuvre). Une telle position implique ainsi quien ordonnant « ferme la porte » 4 quelqu’un, nous « souleverions » la question de la vérité ow la fausseté de son contenu proposi A mettre tionnel, sans pourtant aucunement l’asserter. Le modéle de Searle v' tout acte de langage en situation d’avoir a répondre d'un contenu, et ainsi de la question apophantique de la vérité qu'il souleverait systématiquement (des lors que la phrase implique larticulation d'un contenu propositionnel 4 un acte illocutoire). Or il est 4 noter que l'antidescriptivisme d’Austin se caractérise par une défiance assez explicite a l’endroit de toute reconduction du niveau de la signification d’un acte de langage (Ie niveau locutoire) & son identification avec un contenu propositionnel. Au contraire, Searle interpréte lantidescriptivisme de son maitre comme le moyen de mettre en question ’exclusivisme concernant HTW p. 151, trad. fr. p. 153. Id., p. 12, trad. ft. p. 171 Ibid. p. 126, trad. fe, p. 177. Ibid., trad. fr. modifie. pepe nn 226 La philosophie analytique la possibilicé de « souleyer » Ja question de la vérité aux seuls énonct Searle soutient que la portée de la prédication n'est précisément pas s dassertion, qu'elle disposerait d'une pertinence bien plus large. Aussi Searle généralise-til le modéle prédicatif la oft Austin procéde & son aux seuls ca extinction par la distinc n fondamentale a ’intelligibilité des actes de langage entre les niveaux locutoire ct illocutoite, Il n’est donc pas étonnant que Searle récuse, pour forger son modéle, la distinction austinienne : Ce n'est pas sans appréhension que j adopte expression « acte illocu- toire », étant donné que je refuse la distinction faite par Austin entre les actes locutoires et les actes illocutoires'. En un sens, Searle a bien pressenti l'incompatibilité de principe entre sa démarche et celle d’Austin, méme s'il I'a minimisée. En substituant & l'acte Jocutoire décrit par Austin, Pacte propositionnel, il ne pouvait manquer de passer acété de I’éradication du descriptivisme qu implique la distinction austinienne entre les niveaux locutoire et illocutoire, laquelle ne revient justement pas & la distinction entre niveau sémantique (propositionnel) et niveau pragmatique (illocutoire). En effet, il est constitutif de la distinction entre le locutoire et Pillocutoire qu'il ne soit plus pertinent de raisonner sur le niveau de la signifi- cation (locutoire) en termes de vérité et de fausseté, et par la que ces catégories soient vidées de leur portée absolve aussi bien au niveau du locutoire qu’au niveau de Pillocutoire. Dans la pensée d’Austin, il n'est pas vrai que tout acte illocutoite « souléve » la question de la vérité ou de la fausseté de la signific tion qu’il articule, et ainsi qu'un acte illocutoire accomplisse simultanément un acte propositionnel d’ordre prédicatif, Non seulement, pour Austin, la distinction sémantique du vrai et du faux nest pas applicable & 'acte locutoire, mais une telle distinction ne revér justement plus la pertinence absolue quelle revét en régime descriptiviste concernant l’étude des actes (illocutoires) ayant vo. ation 4 décrire le monde? : on ne peut manquer de se demander par rapport a la réalisation de quelles attentes contextuelles précises on sera légitimé & se demander si un énoncé peut étre décrit comme vrai ou faux, mais dans l’ab- solu cette question n’a jamais aucun sens. C’est pourquoi Austin peut soutenir que « dans la vie courante, par opposition aux situations cnvisagées dans la théorie logique, il n'est pas toujours possible de donner une réponse simple & la question de savoir si un constatif est vrai ou faux’ », La polarité vrai/faux 1, Mbid., p. 23 note 1, trad. ft. modifiée p. 60. CF. également J. R. Searle, « Austin on Locutionary and Illocutionary Acts », Philosophical Review, vol. LXXVI, octobre 1968, p. 405-424, repris dans J. F. Rosenberg et C. Travis (éd.), Readings in the Philosophy of Language, Englewood “liffs, N.J., Prentice- Hall, 1971. 2. Selon un idéal décrit par Austin comme étant plus de « conformité » que de « véracité » au sens strict. 3. HT Wp. 143, trad. fr, p. 146. ——————————— Chapitre 4. La philosophie du langage ordinaive 227 est donc sans pertinence pour analyser Farticulation des niveaux locutoire et illocutoire dans le cas des actes performatifs, et d’une pertinence qui n’a plus rien de représentationnel dans le cas des énoncés constat Ainsi, il nest nullement certain qu’accomplir un ordre ou une promesse revienne A également réa liser un acte prédicatif, ni méme que le modéle prédi- catif soit encore en quoi que ce soit pertinent pour comprendre le fonctionne- ment des énoncés constatifs. Pour Searle, au contraire, il est inévitable que la réalisation d’un acteillocutoire implique (dans un acte de langage « complet »), Vaccomplissement d'un acte prédicatif du type « Pest vrai ou faux de X ». Dans un tel modéle, quelle que soit la force illocutoire mobilisée (qu’il sagisse d'une promesse, d'un ordre etc.), la phrase « souleve » nécessairement la question de la vérité ou de la fausseté du contenu quelle articule. Tandis que la distinc- it A Austin de congédier la pertinence absolue de la polarité classique entre vérité et faus- seté, Searle généralise au contraire le modéle prédicatif & tout acte illocutoire comme sa réalisation /atérale. Tout acte illocutoire, pour lui, réalise eo ipso un tion que rejette Searle entre le locutoire et V'illocutoire permet acte propositionnel d’ordre prédicatif, de sorte que V'erreur du point de vue descriptiviste serait d’avoir manqué cette dépendance essentielle. Or il rest p vrai pour Austin, et cela pour des raisons consticutives de sa démarche, que les actes performatifs s faux. Et il n'est pas non plus vrai qu'une telle polarité soit encore absolument pertinente pour |’évaluation des énoncés & teneur illocutoire constative. Tandis que pour Searle, l'acte illocutoire complete ct par la rend possible la réalisation d'un acte prédicatif, pour Austin au contraire, lirréductible affectation de la signification locutoire par un acte illocutoire renvoie la « complétude » propo- sitionnelle (comme contenu sémantique) de la signification 4 un horizon idéal, vient essentiellement concernés par le partage du vrai et du oi le contenu serait pur de tout coefficient pragmatique, de tout investissement illocutoire, et ot pour cette raison il pourrait se présenter sous une forme prédicative. Il semble en effet, soutient Austin, que « l'affirmation “pure” soit plurdt un but, un idéal, vers quoi tend I’évolution de la science, comme elle tend vers un idéal de précision (goal of precision]! » ; comme il P’écrit plus loin dans la onzi¢me conférence ; « dans I’énonciation cons ive, nous négligeons pects perlocutoires) de ge, pour concentrer notre attention sur ses aspects locutoires. abstract] les aspects illocutoires (sans compter les a Pacte de lan; Dailleurs, nous avons alors recours a une conception simpliste de la correspon- dance de l’énonciation avec les faits [an over-simplified notion of correspondence with the fact — laquelle implique forcément l'aspect illocutoire®. » les Austin souligne ici deux aspects absolument cruciaux pour ce qui concerne les actes de langage en général et I’énonciation constative en particulier : non seulement on ne peut pas abstraire le niveau locutoire de tout engagement illocutoite, mais surtout, lorsque nous braquons notre attention sur le lien 1. [d.p. 72-73, wad. fr, p. 93. 2. Ibid., p. 145-146, trad. fr. modifige p. 148. Nous soulignons. ae 228 La philosophic analytique dimensi ion illo- descriptif de ’énoncé au monde, nous oblitérons le fait que cutoire est tout aussi nécessai ité d'une telle relation. Auss eal intelligi seulement on ne peut niveau locutoire, mais surtout la dimension illocutoire nous conduit 4 remettre ion la pertinence absolue de la polarité vrai/faux pour examiner la « correspondance de l’énonciation avec les faits ». Il existe en effet d’autres gradients contextuellement plus pertinents pour mesurer le degré de conformité de I’énonciation avec les faits en fonction des buts, intentions et intéréts pour- mais faire l'économie de lillocutoire pour exami en ques suivis par Pagent. II n'est pas vrai qu‘en toute situation oit nous mobilisons un énoncé descriptif, d'autres termes ne soient pas beaucoup mieux ajustés i l’éva- luation de celui-ci. A ce titre, Austin récuse l'abstractionnisme d’un contenu dont l’évaluation serait isolable par rapport & l’inscription située de celui-ci La question de la pertinence d’une description par rapport aux faits nes épui done pas dans la polarité vrai/faux. C’est pourquoi Austin peut soutenir que « des expressions adverbiales comme “avec raison”, “a tort’, “correctement” et se “incorrectement” sont aussi bien employées avec des affirmations [...] quand on confronte un constatif aux faits, on Vestime appraise] en ayant recouts & nme grande variété de termes qui recouvrent ceux qu’on utilise dans Pappréciation des performatifs' », Linclusion irréductible de la clause illocutoire pour l'analyse des énoncés descriptifs implique donc, de la part d’Austin, une remise en question profonde de la pertinence de tout traitement représentationnaliste concernant les actes de langage descriptifs: la polarité vrai/faux pour le contextualisme austinien ne dispose jamais de la simplicité qui est la sienne dans le cadre prédicatif classique auquel le propositionalisme de Searle sen tient (et qui demeure pour Austin un état idéal de la locution). Pour le dire autrement, la distinction austinienne entre la locution et Pillocution implique qu'il n'existe jamai degré zéro de l'illocution : il n’existe pas d’acte locutoire qui ne soit pris dans un usage dérerminé, autremenc dir, il n'existe pas de niveau locutoire saisissable APétat neutre sous la forme d'un contenu, II faut routefois souligner que Searle de montre, contre une certaine représentation non austinienne de la pragmatique, qu'il demeure respectueux de cette clause puisque, pour lui, il est absolument crucial qu’aucun acte propositionnel ne se réalise indépendamment de son articulation & un acte illocutoire. Toutefois, Ia ott il pense que acte illocu- toire complete la composante propositionnelle, Austin pense fondamentale. ment qu'un tel niveau propositionnel demeure un idéal locutoire : il n'est pas possible d’obtenir quoi que ce soit comme un contenu propositionnel dés lors quest mise en ceuvre une force illocutoire, et celle-ci affecte toute locution: Suivant Austin, Searle soutient qu'il est impossible d’isoler le premier niveau par rapport au second, mais [4 ott Austin considare que le caractére non auto- nome de celui-ld par rapport A celui-ci implique I’évacuation du traitement du 1. Wbid., p. 142-143, trad. fr, p. 146. Nous soulignons Chapitre 4. La philosopbie du langage ordinaire 229 premier niveau (locutoire) en termes de contenu propositionnel, Searle consi- dere quanta lui, que Ja clause d’autonomie représente la condition de réalisation d'un tel contenu. Autrement dit, I’a pproche searlienne ne peut éviter de suivre un certain nombre de prescriptions héritées d’Austin, tout en les retraduisant dans une conceptualité problématiquement descriptiviste. Rappelons que pour Austin, Varticulation des niveaux locutoire et illocu- toire a deux conséquences consécutives Pune de Fautre. La premiére implique ee de reconduire la signification locutoire 4 un contenu propo- sitionnel, La dépendance du niveau locutoire vis A-vis du niveau illocutoire entrave sa reconduction au statut de contenu propositionnel, et renvoie ai ce dernier & un idéal linguistique. Deuxiéme conséquence impliquée par la premiere : il n’est plus vrai que le critére d’évaluation des énonciations & valeur (illocucoire) descriptive dépende du partage apophantique cla Jique entre vérité et fausseté. Cette derniere distinction est fortement relativisée par Austin, fi oit elle est généralisée ec absolutisée comme ce qui est corrélé & la réalisation de rout acte de langage complet par Searle. Pour chaque volume de la collection Lectures de..., ’éditeur a fait Er OUC Ube eet cm Cm EMS treo C ee Cont MsUssisty au public francophone un ensemble d’études — hors de tout parti Fede Me OTD era tee Tete age) Torte) ) teas CCOUAUENS etc WoW Lot tase POraesNelas Mec COM eN iti Coste eSovTCMr-VeeeVA ets CCMEM Cotten TCM tTS MCSOTUTE-Wat ene) Corot FeJetCeLO Met PEW es tat Cle Cistevar Te iso, cartTate lesa trent CeMe event Cena nant aujourd’hui dans le champ philosophique anglophone, voire international, Il est courant de l’opposer, par ses objets et par ses méthodes, a la philosophie dite « continentale ». A premiere vue, la philosophie analytique se distingue par les questions qu'elle privi Acre Eg clon ste LeM E-teteretexetream Natl toys) svCeas CM EW eraTetttMeel stl tetcte ste Cele bers vet ciate Le Melos VoL vee ON CRCCCST eTan TRA TTiney ta) traitement qu’elle en propose : l’analyse, comprise comme adoption Chereictay CNet omelet Ttm eae octane mea netec toe Wore eC tal ime (Re lelslehole-MerTustme(e Me cctieme CM leeba (oberrtel tales commun et a la connaissance ordinaire. ee ieee La philosophie analytique est cependant loin d’étre unifiée, et Frosets ro Ce eyeroutcren ar Crm C TTOmsyure eri east n Cee ey OR ets mn Oe champ analytique s’étend au-dela de la philosophie de la logique, du langage ou de l’esprit : la méthode analytique s’applique a des questions éthiques, esthétiques, politiques, métaphysiques. Elle est également marquée, de ses origines au temps présent (de Frege, Wittgenstein, A Quine, Rawls, Brandom), par des figures philoso- phiques majeures, qui demeurent irréductibles & tout dogme. Enfin, la confrontation rituelle entre philosophie analytique et philosophic FecereYetatesen eV CM atmrcists eT ttre ote WMsestiteaelsyertelcoceM (CMe TTeTter atic acbsaetetact Sev eeu et eratcntatesc as Catemay- Cie Cor meme meteors Tae PSR M Conner steve VieteMe tet Meree ria ares eye cette Ica oaectererel ano) ereCeMMel tT Meccan este CoM vee TUTE CoE Me Mey Ceo ye reconnus du domaine, propose un tableau de la philosophie analytique dans sa diversité — ses grandes thématiques, ses theses peratiter seit Rc etree) crease tC Ree eT Werte Mesh} sur l’importance et loriginalité philosophiques de la philosophie analytique. 009. 27299864323 ill RRC Tones Toa

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