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Dans ce chapitre on étudie les applications (rélations) entres deux espaces vectoriels et qui
sont compatibles avec la structure d’espace vectoriel. Ces fonctions sont appelées appli-
cations (transformations) liéaires. Dans les chapitres précédents, on a vu plusieurs
exemples d’applications linéaires dont le produit d’une matrice par un vecteur est une il-
lustration.
i. A0 = 0;
Des propriétés (i)-(iii) on dit que l’application A est linéaire. De manière générale on a la
définition suivante :
Definition 4.1.1. Soit E et F deux espaces vectoriels sur un même corps K (on prend
K = R). Une application linéaire de E dans F est une fonction T de E à valeurs dans
E satisfaisant les trois propriétés suivantes pour tous u et v dans E et pour tout scalaire
c∈R:
i. T (0) = 0
51
4. LES APPLICATIONS LINÉAIRES 52
Une application linéaire bijective (en tant que application bijective) est appelée isomor-
phisme.
Remarque 4.1.2. La condition (i) indique que l’application linéaire T transforme le vecteur
nul de l’espace E en vecteur nul de l’espace F .
Exemple 4.1.3. Etant donné une matrice A de type m × n, l’application
T : Rn −→ Rm
x �−→ Ax
estlinéaire de Rn dans Rm . Elle est injective si rg(A) = n, surjective si rg(A) = m et
bijectitive si rg(A) = m = n.
Exemple 4.1.4. L’application
T : R2 −→ R3
(x, y) �−→ (2x, x + y, x − y)
est linéaire, car
i. T (0, 0) = (2 × 0, 0 + 0, 0 − 0) = (0, 0, 0)
ii.
T ((x, y) + (x� + y � )) = T (x + x� , y + y � )
= (2(x + x� ), (x + x� ) + (y + y � ), (x + x� ) − (y + y � ))
= (2x, x + y, x − y) + (2x� , x� + y � , x� − y � )
= T (x, y) + T (x� , y � )
iii. T (c(x, y)) = T (cx, cy) = (2cx, cx + cy, cx − cy) = c(2x, x + y, x − y) = cT (x, y).
Remarque 4.1.5. Sous forme de vecteur colonne on a
2x 2 0
x + y = x 1 + y 1 = Ax,
x−y 1 −1
2 0 � �
x
avec A = 1 1 et x = . On dit que A est la matrice de l’application linéaire
y
1 −1
T.
Exemple 4.1.6. Pour un vecteur non nul u = (u1 , ..., un ) de Rn , on a défini la projection
orthogonale sur u comme étant l’application
Pu : Rn −→ Rn
u·v
v �−→ Pu (v) = |u|2
u
Telle que définie, la projection Pu est une application linéaire injective de Rn dans Rn . La
propriété (i) des applications linéaire est trivialement vérifiée car u · 0 = 0 pour tout vecteur
u ∈ Rn , et les propriétés (ii) et (iii) découlent respectivement des propriétés (b) et (c) d’un
produit scalaire dans le théorème 1.2.3.
4. LES APPLICATIONS LINÉAIRES 53
[ ]B : E −→ Rn
,
u �−→ [u]B
où
u1
[u]B = ... .
un
En effet, on a
� �
0
i. [0]B = . = 0
..0
u1 + v 1 u1 v1
.
. .. ..
ii. [u + v]B = . = . + . = [u]B + [v]B
un + v n vn vn
cu1 u1
.. ..
iii. [cu]B = . = c . = c[u]B .
cun un
Exemple 4.1.8. Soit E un espace vectoriel. Alors l’aplication de E dans E qui a un
vecteur fait correspondre ce même vecteur, appelé application identique et notée Id (ou
IdE ), est une application linéaire. C’est un isomorphisme.
Théorème 4.1.9. Soit T une application linéaire d’un espace vectoriel E dans un espace
vectoriel F . Alors, pour tous vecteurs u et v de E et pour tous scalaires c et d, on
Plus généralement, pour toute famille (u1 , · · · , up ) de vecteurs de E et pour tous scalaires
c1 , ..., cp , on a
T (c1 u1 + · · · + cp up ) = c1 T (u1 ) + · · · + cp T (up ).
Definition 4.2.1 (Image et Noyau d’une application linéaire). Soit T une application
linéaire d’un espace vectoriel E dans un espace vectoriel F .
Ker(T ) = {u ∈ E | T (u) = 0} .
Exemple 4.2.2. Soit T l’application linéaire de l’exemple 4.1.4 : T (x, y) = (2x, x+y, x−y).
Alors
� �
Im(T ) = (w1 , w2 , w3 ) ∈ R3 | (w1 , w2 , w3 ) = T (x, y), pour un certain (x, y) ∈ R2
� �
= (w1 , w2 , w3 ) ∈ R3 | w1 = 2x, w2 = x + y, w3 = x − y, pour certain x, y ∈ R
� �
= (2x, x + y, x − y) ∈ R3 | x, y ∈ R
= V ect {(2, 1, 1), (0, 1, −1)} .
(2x, x + y, x − y) = (0, 0, 0) ⇔ 2x = 0, x + y = 0, x − y = 0 ⇔ x = y = 0.
Exemple 4.2.3. Soit T l’application linéaire de l’exemple 4.1.3, T (x) = Ax. Alors, Im(T )
est le sous-espace de Rm engendré par les colonnes de A et Ker(T ) est l’ensemble de
solutions de l’équation matricielle Ax = 0.
Théorème 4.2.4. Soit T une application linéaire d’un espace vectoriel E dans un espace
vectoriel F . Alors, Im(T ) est un sous-espace de l’espace vectoriel F et Ker(T ) est un
sous-espace de l’espace vectoriel E.
Proof:
1. Montrons que Im(T ) est un sous-espace de F . Il est clair que Im(T ) est un sous-
ensemble de F . On a :
2. Montrons que Ker(T ) est un sous-espace de E. Il est clair que Ker(T ) est un sous-
ensemble de E. On a :
Le théorème suivant donne une caractérisation des applications linéaires injectives, surjec-
tives et bijectives (isomorphismes).
Théorème 4.2.5. Soit T une application linéaire d’un espace vectoriel E dans un espace
vectoriel F . Alors :
Proof: (Admise)
.
Théorème 4.2.6. Soit T une application linéaire d’un espace vectoriel E dans un espace
vectoriel F et (u1 , ..., up ) une famille de vecteurs de E. Alors,
1. Si T est injective et si la famille (u1 , ..., up ) est libre dans E, alors la famille (T (u1 ), ..., T (up ))
est libre dans F .
3. En particulier, si T est bijective alors l’image d’une base de E par T est une base de
F.
Proof:
4. LES APPLICATIONS LINÉAIRES 56
1. Si T est injective et si la famille (u1 , ..., up ) est libre dans E, alors pour des scalaires
c1 , ..., cp tels que
c1 T (u1 ) + · · · + cp T (up ) = 0,
on a, d’aprés la caractérisation des applications linéaires,
T (c1 u1 + · · · + cp up ) = 0 = T (0)
et l’injectivité de T implique que c1 u1 + · · · + cp up = 0. La famille (u1 , ..., up ) étant
libre on déduit que c1 = · · · = cp = 0, ce qui implique que (T (u1 ), ..., T (up )) est une
famille libre.
2. Si T est surjective et si la famille (u1 , ..., up ) est génératrice de E, alors pour tout
vecteur w dans F la surjectivité de T implique qu’il existe v ∈ E tel que w = T (v)
et puisque la famille (u1 , ..., up ) est génératrice de E on a v = c1 u1 + · · · + cp up , pour
des scalaires c1 , ... , cp . Par conséquent, on a
w = T (v) = T (c1 u1 + · · · + cp up ) = c1 T (u1 ) + · · · + cp T (up )
et on déduit que la famille (T (u1 ), ..., T (up )) engendre F . Donc (T (u1 ), ..., T (up )) est
une famille génératrice de F , car les vecteurs T (u1 ),..., et T (up ) sont des éléments de
F.
3. On considère seulement le cas où E et F sont de dimension finie ; le résultat découle
immédiatement des parties (1) et (2).
la famille correspondante des vecteurs des composantes estt libre dans R4 . Dans la base
canonique de P3 on a :
1 0 1
0
3 ] = 4 , [1 + 2t − 2t2 ] = 2 ; avec
[1 − 2t2 − t3 ] =
−2 , [4t + t 0 −2
−1 1 0
1 0 1 1 0 1 1 0 1 1 0 1
0 4 2 2 1
∼ 0 4 ∼ 0 1 1 ∼ 0 1 .
−2 0 −2 0 0 0 0 4 2 0 0 −2
−1 1 0 0 1 1 0 0 0 0 0 0
� 2 3 3 2
�
Donc la famille [1 − 2t − t�], [4t + t ], [1 + 2t − 2t ] des vecteurs � de composantes est libre
dans R ; on en déduit que 1 − 2t − t , 4t + t , 1 + 2t − 2t est libre dans l’espace P3 .
4 2 3 3 2
4. LES APPLICATIONS LINÉAIRES 57
Donc B est une base de Im(T ) et on déduit que rg(T ) = n − k = dimE − dimKer(T ).
Exemple 4.3.4. Pour l’application linéaire T de l’exemple 4.2.2, on a montré dans l’exemple
4.2.7 que rg(T ) = 2, avec E = R2 . D’après le théorème de rang on doit avoir dimKer(T ) =
dimR2 − rg(T ) = 2 − 2 = 0. Ce qui est très bien justifié car le noyau de T est le sous-espace
nul.
Théorème 4.4.1. Soit T : Rn −→ Rm une application linéaire. Alors il existe une unique
matrice A telle que
T (x) = Ax, pour tout x ∈ Rn .
Plus précisement, la matrice A est de taille m × n dont la j e colonne est le vecteur T (ej ),
où ej est le j e vecteur de la base canonique de Rn :
� �
A = T (e1 ) · · · T (en ) (4.4.1)
x1
Proof: Soit x = x2 un élément de Rn . Dans la base canonque de Rn on a x =
x3
x1 e1 + x2 e2 + x3 e3 et on déduit de la linéarité de T que
� �
T (x) = T (x1 e1 + x2 e2 + x3 e3 ) = x1 T (e1 ) + · · · + xn T (en ) = T (e1 ) · · · T (en ) x = Ax.
D’où l’existence de A. Pour montrer que A est unique on suppose qu’il existe une autre ma-
trice B telle que T (x) = Bx, pour tout x ∈ Rn . Alors on aura Ax = Bx, pour tout x ∈ Rn .
En particulier, Ae1 = Be1 , ..., Aen = Ben et on déduit que les colonnes de A et B sont
identiques. D’où A = B.
Definition 4.4.2. La matrice A définie par la rélation (4.4.1) est appelée matrice canon-
ique associée à l’application linéaire T.
On peut regarder chaque matrice comme une application linéaire et parler de leur
image, noyau et rang. On a la définition suivante :
a. Déterminer les entiers p et q tels que ImA soit un sous-espace de Rp et KerA et LigA
soient un sous-espace de Rq .
Solution :
a. La matrice A étant de type 3×5, elle est associée à une application linéaire T : R5 −→
R3 . Donc ImA = Im(T) est un sous-espace de R3 tandis que KerA = Ker(T ) et
LigA sont des sous-espace de R5 . C’est-à-dire que p = 3 et q = 5.
- Puisque les colonnes pivots d’une matrice A forment une base du sous-espace
−3 −1
engendré par ses colonnes, on déduit qu’une base de ImA est
1 , 2 .
2 5
- Les lignes non nulles d’une forme échelonnée quelconque d’une matrice
A forment une base du sous-espace engendré par les lignes de cette
matrice ; on déduit qu’une base de LigA est ((1, −2, 0 − 1, 3), (0, 0, 1, 2, −2)).
- De la forme échelonnée réduite de la matrice A on déduit que l’équation ma-
tricielle Ax = 0 a pour solution x1 = 2x2 + x4 − 3x5 , x3 = −2x4 + 2x5 . En
écrivant la solution générale de cette équation matricielle sous-forme vectorielle
paramétrique on déduit que
La famille génératrice de KerA ainsi trouvée est libre par construction, elle
constitue une base de ce sous-espace.
Comme pour les applications linéaires, on définit le rang d’une matrice A comme étant
la dimension de son image : rg(A) = dimImA. Le thérème du rang peut encore s’énoncé
de la façon suivante :
n = rg(A) + dimKerA.
Les versions du théorème 4.2.5 dans le cas d’une matrice A vue comme une application
linéaire s’énoncent de la manière le suivant :