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Langages

Avant-propos
Almuth Grésillon, Jean-Louis Lebraye

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Grésillon Almuth, Lebraye Jean-Louis. Avant-propos. In: Langages, 17ᵉ année, n°69, 1983. Manuscrits-Écriture. Production
linguistique. pp. 5-10;

http://www.persee.fr/doc/lgge_0458-726x_1983_num_17_69_1138

Document généré le 31/05/2016


AVANT-PROPOS

fût-ce
« C'est qu'une
un acteligne
illicited'un
et immoral
écrivain qu'il
que den'apublier
pas lui-
ne
même destinée au grand public. »
(Heinrich Heine)
« La poésie n'est pas dans les recueils poétiques (...) ;
la poésie se trouve dans les brouillons acharnés de
ceux qui espèrent, qui militent pour une nouvelle
étreinte de la réalité. »
(Francis Ponge)

Entre les termes macrosémiotique et mass-media, on lit dans le Dictionnaire sémioti-


que de J. Rey-Debove (P.U.F., 1979, p. 93) :
« Manuscriptologie
Littér. Étude des manuscrits, et plus particulièrement des textes de travail et documents
littéraires d'un auteur (par opposition aux livres manuscrits fabriqués par les copistes du
Moyen- Age).
La m. comprend l'analyse matérielle des documents, l'établissement et la publication du
texte, l'étude des faits d'écriture et de langage, des significations individuelles et collectives
que fait apparaître l'histoire de l'écrit.
V. Écriture, Génétique, Texte. »
Ce qui apparaît ainsi comme une discipline constituée, définie par un objet et une
méthode spécifiques, n'a en réalité encore qu'une existence toute jeune, toute fragile.
Si les collections de manuscrits modernes sont apparus au début du XIXe siècle
(L. Hay, 1976 !), l'exploitation des fonds ainsi collectés n'a réellement commencé en
France qu'à la fin des années 60. Sans doute, F. Beissner publie dès 1943 le premier
volume d'une édition critique de Holderlin intégrant l'exploitation de documents
manuscrits et inaugure ainsi une pratique éditoriale qui se poursuit de nos jours.
Mais ces travaux s'inscrivent dans une perspective classificatoire qui vise uniquement
à l'obtention d'un couple texte- appareil critique aussi fidèle que possible et prolonge
la tradition des éditions critiques où les philologues allemands étaient passés maîtres.
Ils laissent à d'autres le soin d'exploiter les matériaux ainsi révélés 2. Telle a été
précisément l'ambition première de la manuscriptologie, qui, lorsqu'elle apparaît en
France, se propose de jeter un nouveau regard sur l'objet littéraire à un moment où
la critique littéraire traditionnelle donne des signes d'essoufflement manifestes. Dans
l'enthousiasme des débuts, l'abord des manuscrits fut généralement spontané et
fortement influencé par les particularités « génétiques » des brouillons étudiés. C'est pro-

1. Tous les titres cités en abrégé figurent dans la bibliographie générale.


2. Cette tendance semble être en train de se renverser. Cf. le volume consacré à Édition et
interprétation dans la bibliographie générale.
gressivement que la confrontation des expériences parallèles acquises sur Heine,
Proust, Flaubert, Valéry, Joyce ou Zola (la liste n'est pas limitative) a permis de
construire une démarche plus reflexive.
A l'intérieur du travail manuscriptologique intense qui s'est ainsi progressivement
mis en place, on peut distinguer trois moments. En premier lieu, ont été mises au
point des procédures d'analyse permettant de « saisir et exploiter (...) l'information
matérielle que contient le document » (L. Hay, 1980, p. 40) : analyse du papier et
des filigranes, étude des tracés, etc. En second lieu, le chercheur doit déchiffrer et
transcrire le matériau textuel contenu dans ces documents, il doit « traiter un
ensemble de signes graphiques (...) que l'écriture a figés et dispersés : il s'agit d'en
reconstituer l'enchaînement pour retrouver le mouvement de l'écriture et lui rendre sa
réalité de processus temporel » (ib., p. 43). Enfin, si l'on a réussi à mener à bien ces
deux étapes préalables, l'interprétation peut alors commencer. Elle s'opère dans des
directions très diverses, de la critique littéraire (traditionnelle ou non) à la
linguistique en passant par la psychanalyse, la socio- critique ou la critique des idéologies.
Ce vaste domaine de recherche dont la bibliographie générale donne un aperçu
n'existerait pas sans l'intuition, la clairvoyance et la ténacité de Louis Hay, qui a le
premier pressenti l'importance aujourd'hui incontestée de ce nouveau champ de la
connaissance, qui l'a révélé au public savant par ses publications et qui a su lui
insuffler la vie à l'intérieur d'une formation du C.N.R.S. (l'Institut des Textes et
Manuscrits Modernes, anciennement Centre d'Histoire et d'Analyse des Manuscrits
Modernes) dont nous faisons nous-mêmes partie.

Or, il n'a pas suffi que l'« objet manuscrit » soit constitué pour que la
linguistique se penche immédiatement sur son berceau. Une autre aventure devait, pendant
longtemps, entraver cette rencontre ; on se souvient de cette histoire d'amour qui, au
cours des années soixante, a uni linguistique et littérature et pendant laquelle Roland
Barthes pouvait écrire, pour ouvrir un numéro de Langages : « Linguistique et
littérature : ce rapprochement paraît aujourd'hui naturel ». Or, l'euphorie de la première
étreinte passée, l'heureuse symbiose opérée sur fond structuraliste connut rapidement
les difficultés et la crise. Les linguistes allaient découvrir les « vertus » de la
grammaire generative. Quant aux littéraires, la notion de « texte clos », inhérente aux
« applications » structuralistes, eut vite fait de décevoir ceux qui ne pouvaient se
résigner à concevoir la pratique littéraire en dehors de son inscription historique et
sociale. Si bien que chacun rentra au bercail. Les uns pour écrire des manuels de
linguistique, les autres pour retrouver leurs chers textes. Certes, il y eut, çà et là, des
exceptions ou de nouvelles tentatives : Jakobson a poursuivi sa voie riche
d'enseignements ; des sémioticiens ont cherché à adapter les concepts linguistiques à la
dimension textuelle (cf. Langages n° 31) ; des grammairiens de texte ont essayé, un peu
désespérément, de construire des modèles d'engendrement textuel ; et la grammaire
generative a donné naissance en France à des analyses de textes littéraires (cf. la
revue Change). Il n'empêche que le devant de la scène fut à nouveau dominé par
l'existence d'un fossé entre linguistique et littérature. Il aura fallu toute la décennie
des années soixante-dix avant que ne s'esquisse quelque chose de l'ordre d'un retour
du refoulé.
Est-ce pure coïncidence qu'aujourd'hui le nouvel intérêt des linguistes pour le
texte littéraire se révèle au moment même où la linguistique semble traverser une
crise d'identité ? Au moment où pour bien des phénomènes langagiers les modèles de
grammaires de phrase s'avèrent inopérants ? Est-ce pur hasard que des revues
françaises de linguistique comme Langages et Langue Française, qui en 1968 et 1970
avaient consacré des numéros spéciaux (Langages 12, Langue Française 7) au
problème « linguistique et littérature », ne rouvrent qu'aujourd'hui leurs colonnes à la
question de fond qu'implique ce rapport (cf. le présent numéro de Langages et
Langue Française 49) ?
Quoi qu'il en soit, ce nouvel épisode de ce qui apparaît désormais comme un
rapport conflictuel aux multiples rebondissements a eu comme effet secondaire de réunir
ici- même quelques linguistes prêts non seulement à se confronter de nouveau à
l'analyse des textes littéraires, mais même à cet objet aux mille facettes qu'est le
manuscrit. Certes, tous n'avaient pas attendu la faveur de cette nouvelle conjoncture.
Les signataires de ces lignes avaient bien tenté, contre vents et marées et en dépit de
leur relatif isolement, de cerner l'intérêt spécifique que l'« objet manuscrit » peut
recouvrir aux yeux du linguiste. Tout d'abord, au cœur du problème : un matériau
passionnant et quasiment unique en son genre pour quiconque s'intéresse à une
linguistique de la production. Le manuscrit est en effet cette partie qui émerge de
l'iceberg en donnant accès concrètement à ce qui préexiste à la parole polie, lisse et
linéaire du texte fini. Matériau brut, chaotique, multiforme, voire difforme, d'un
processus auquel les théories existantes sur la production ne peuvent toucher que par
abstraction ou reconstruction. Et, par là-même, contre- argument massif à cet
obstacle de taille que rencontrent les recherches sur renonciation et que T. Todorov a
présenté jadis sous forme de paradoxe :
« Nous ne connaîtrons jamais que des énonciations énoncées, c'est-à-dire un discours dont
renonciation restera toujours à énoncer ; celle-ci constitue ainsi l'archétype même de
l'inconnaissable. » (Langages 17, p. 3).
Ce qui est ainsi nommé « archétype de l'inconnaissable » apparaît soudain sous un
jour différent, vrai et faux à la fois. Vrai parce que rien, même pas les manuscrits,
ne saurait révéler le comment, le pourquoi, bref la véritable origine d'une écriture.
Faux parce que l'« inconnaissable » perd son pouvoir absolu dès lors que le regard
voyeuriste jeté sur le manuscrit retire une partie du voile et découvre subrepticement
des bribes d'une énonciation in statu nascendi.
Grâce au manuscrit s'ouvre donc un nouvel axe de recherche non seulement à la
critique littéraire, mais aussi à la réflexion linguistique elle-même. Décrire, analyser
et interpréter avec les outils propres de la linguistique les cheminements, parcours,
retours et détours qu'a connus un énoncé ou groupe d'énoncés avant d'aboutir à la
forme consacrée par le texte imprimé (ou de retomber dans la nuit des temps par un
trait de biffure définitif ! ), n'est-ce pas élucider chaque fois un peu plus ce que Ben-
veniste a appelé « l'homme dans la langue » ?
*
* *

II est temps de préciser un certain nombre de termes qui apparaîtront au fil des
articles de ce numéro et dont la valeur s'est progressivement fixée au cours des dix
dernières années. D'abord la dénomination de l'objet dans sa matérialité. Depuis
J. Bellemin-Noël (1972), on appelle avant-texte l'ensemble des documents qui sont
produits au cours de la genèse du texte dans la « fabrique », l'« atelier », le « cabinet
de travail » de l'auteur. Si le document est écrit à la main, c'est un manuscrit. S'il
est dactylographié, c'est un dactylogramme, ou une dactylographie, ou, en formant
un terme sur le modèle de manuscrit, un tapuscrit. Le dossier constitué par les
avant-textes peut comporter des notes, des plans, des brouillons, des mises au net,
des jeux d'épreuves corrigées. Si le texte a connu des remaniements dans des éditions
postérieures à l'édition originale, il faut ajouter des états imprimés à cette liste. On
voit que nous sommes déjà en train de quitter le plan purement matériel en
introduisant la notion d'état, inséparable de l'idée que les documents précédents sont les
témoins d'un cheminement textuel et impliquent donc une chronologie interne.
Le choix d'une terminologie est encore plus crucial dans l'étape suivant la
description du contenu de ces documents. Le terme le plus utilisé est celui de variante,
hérité de la tradition philologique. Le plus controversé, en raison de cette tradition
même dont il est nécessaire de se démarquer, mais aussi en raison du poids de ses
connotations téléologiques : il risque de faire croire à l'existence d'un texte de
référence, doté d'une vie indépendante et faisant autorité, par rapport auquel la variante
serait par nature de médiocre importance. Toutefois, ce terme a survécu à toutes les
tentatives pour l'éliminer de l'usage manuscriptologique (cf. par exemple Bellemin-
Noël, 1977. Cf. aussi, ici même, la critique de J. Fourquet). Aussi le conserverons-
nous en l'enfermant dans une définition précise : nous appellerons variante tout ce
qui change à un moment quelconque de lavant-texte, du premier jet aux épreuves et
aux éditions successives, et nous poserons que toute variante est signifiante.
Autre terme aux fortes connotations téléologiques, celui de correction. Nous
restreindrons sa valeur en l'affectant aux seules variantes grammaticales, pour lesquelles
il y a bien correction d'énoncés défectueux, et en l'éliminant dans tous les autres
cas. En revanche, nous rejetterons purement et simplement le terme de
transformation, qui risque de faire croire que les variantes sont justiciables d'un
traitement génératif et sont dérivables les unes des autres dans le cadre de la grammaire
generative transi ormationnelle (avec en particulier l'implication de la stabilité du
sens, particulièrement dangereuse dans le cas d'une genèse textuelle). Reste une
notion neutre, celle de changement, employé concurremment avec variante. Que sont
ces changements, ces variantes ? Tous les manuscriptologues s'accordent à distinguer
les cas suivants : Y addition (ou ajout) ; la biffure sans remplacement du terme biffé
(suppression) ou avec remplacement (substitution) ; le déplacement ou la
permutation d'éléments. D'un point de vue linguistique, on peut considérer que toutes les
variantes sont des substitutions (l'addition et la suppression ayant la particularité de
comporter un terme nul) orientées par une chronologie et ne préservant pas le sens .
La différence peut paraître tranchée avec la notion strictement linguistique de
substitution (non orientée et posant une équivalence entre les termes de la substitution).
On notera toutefois que même dans son usage linguistique étroit, la substitution
comporte une part de mouvement et de variation 4.
L'avant-texte le plus spectaculaire est le brouillon. C'est le plus massivement
intéressant pour un linguiste, et c'est pratiquement le seul dont il sera question dans ce
numéro. Rappelons pour mémoire que 1 'etymologie de brouillon est à chercher du
côté de bouilli et de brou, ce qui s'accorde bien avec l'aspect chaotique de ces avant-
textes. Il est devenu banal d'associer désordre et genèse ; le problème se pose en
termes propres à propos de la génétique textuelle, et nous ne l'éluciderons pas dans le
cadre limité de cette introduction. On ne peut toutefois qu'être frappé par le retour
lancinant de deux métaphores à propos des brouillons : d'une part, les observateurs
parlent du vertige provoqué par le désordre et le chaos des brouillons ; d'autre part,
la prolifération dans tous les sens des fragments textuels suscite la comparaison avec
une nébuleuse ou un nuage. Indétermination et caractère non fini — au double sens
d'inachevé et de non délimitable — que résume par exemple Vin-fini dont parle
J. Anis à propos de F. Ponge. Toutes ces caractéristiques opposent fortement le
texte, fondamentalement uni-dimensionnel, au brouillon, dont le désordre proliférant
est nettement perçu comme pluri-dimensionnel, même s'il est enfermé matériellement
dans les limites de la page à deux dimensions.
Reste à fixer une terminologie en ce qui concerne celui qui est à l'origine des
avant-textes et qui les produit. Un terme s'impose de plus en plus, et il est largement
représenté dans ce numéro : c'est celui de scripteur. Plus neutre qu'écrivain ou
auteur, il ne préjuge pas de la qualité littéraire du document étudié et ne traîne après

3. Pour une présentation plus détaillée, cf. par exemple Grésillon-Lebrave (1982 a).
4. « La substitution aboutit toujours à modifier quelque chose par rapport à la séquence
initiale — et cette modification rend manifeste les différences latentes entre les deux
paraphrases. » (C. Fuchs : La paraphrase, Paris, P.U.F., 1982).

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lui aucune connotation téléologique. Il présente en outre l'avantage de s'inscrire dans
plusieurs couples d'oppositions qui permettent de bien cerner la spécificité des
documents manuscriptologiques. En premier lieu, le scripteur écrit comme le locuteur
parle. En second lieu, le scripteur s'oppose au lecteur. Cette opposition à son tour est
double en raison du dédoublement du statut du lecteur : il peut s'agir en effet soit de
l'analyste qui « lit » le brouillon, soit du scripteur lui-même en tant qu'il est son
premier lecteur. Il nous paraît important de dégager la position spécifique qu'occupe le
lecteur- analyste, car c'est à lui qu'incombe la responsabilité de constituer l'objet
d'étude. Cet objet n'est pas donné tout fait dans les avant-textes comme pourrait le
faire croire une attitude inspirée de la critique littéraire traditionnelle, où l'analyste
cherche à s'identifier à l'« auteur » ; il doit être construit sous le signe de Valtérité,
en instaurant un rapport de différence. Il est tout aussi important de tenir compte de
l'opposition qui joue à l'intérieur de l'« auteur » entre les deux positions radicalement
différentes que sont l'écriture et la lecture. Le passage constant d'une position à
l'autre au cours de la genèse textuelle provoque une multiplication des rôles chez le
sujet-auteur, multiplication dont les effets énonciatifs sont mal connus, mais très
certainement considérables. Et la prolifération désordonnée que nous avons évoquée
plus haut tient certainement pour une large part à cette poly-locution (force est bien
ici de reprendre le terme traditionnellement admis, malgré son etymologie) : l'auteur
est à la fois le JE qui écrit, qui se lit, qui s 'auto- commente et s 'auto- censure, qui
réécrit, etc.

Certes, l'opposition scripteur/lecteur est une autre forme de l'opposition


locuteur/co-locuteur, généralement admise en linguistique. Mais le fait qu'elle
fonctionne ici avec les moyens de l'écriture entraîne un certain nombre de particularités
non négligeables, dont la multiplication des rôles nous paraît être la plus importante.

L'altérité qui nous paraît constitutive de la construction de l'objet manuscriptolo-


gique est implicitement présente dans tout le numéro. Nous commençons par trois
articles généraux sur les problèmes posés par la constitution de l'objet d'étude :
qu'elle porte sur les contraintes de lecture et d'écriture dans l'appréhension des
brouillons (J. L. Lebrave), sur la « mouvance » du manuscrit médiéval (B. Cerqui-
glini) ou sur les reformulations d'un même texte par des sujets autres que le scripteur
(P. Delcambre), l'analyse montre à quel point les notions de texte et d'auteur sont
fragiles du point de vue de la genèse textuelle, y compris dans des domaines où on
n'aurait pas contesté d'emblée leur validité, et propose des notions plus souples
prenant en compte l'instabilité d'un matériau textuel variable à plusieurs dimensions où
l'auteur- scripteur et l'auteur-lecteur se répondent en un chant constamment alterné.

À ces réflexions d'ordre général succèdent des analyses de corpus effectuées à


partir d'avant-textes de statut hétérogène : dans le cas de Heine (J. Fourquet), Hugo
(A. Nicolas), Proust (A. Grésillon), Valéry (D. Maingueneau), il s'agit d'avant-textes
(brouillons ou épreuves) non destinés à publication à propos desquels toute
interrogation sur les processus concrets d'écriture est définitivement confinée à l'examen des
documents conservés. Ponge au contraire (J. Anis) exhibe l'écriture contemporaine et
annule la frontière entre avant-texte et texte en publiant côte à côte le texte et son
brouillon. La dernière analyse enfin porte sur un dossier à l'intérieur duquel le
linguiste M. Arrivé étudie l'écriture de son homonyme romancier. Certaines études
(M. Arrivé, J. Anis) se placent plutôt sur le terrain de la sémiotique, ce qui, pour
reprendre les remarques de J. Fourquet, plaiderait en faveur d'une « linguistique au
sens large » pour rendre compte des phénomènes de genèse textuelle. Chez d'autres
(J. Fourquet, A. Grésillon, D. Maingueneau), la démarche passe plutôt par la
perception intuitive de phénomènes langagiers ponctuels, voire de ponctuation (A.
Nicolas), phénomènes à partir desquels une interprétation de l'avant-texte peut être
proposée, qui du même coup éclaire d'un jour nouveau le texte imprimé.
Un dénominateur commun relie d'une façon assez paradoxale toutes ces études :
bien que tous les auteurs soient avant tout des linguistes qui pour la plupart n'étaient
pas des manuscriptologues, on constate dans l'ensemble une absence surprenante :
celle de toute référence explicite aux théories linguistiques existantes. Personne n'est
enclin à se placer sous le signe d'un modèle totalisant par où les analyses prendraient
sens, sans que ce vide empêche pour autant de recourir aux concepts et à la
méthodologie linguistiques dans la démarche d'ensemble comme dans les analyses de détail.
Est-ce un signe des temps, qui prendrait racine dans le relatif effondrement des
grands systèmes à vocation universelle (il paraît significatif à ce propos qu'aucune des
études ne recoure au modèle génératif ) ? Ou bien faut- il y voir une caractéristique de
l'objet étudié, à la fois « corpus contraint » (A. Culioli) et corpus littéraire, qui
bloquerait par sa complexité même toute référence systématique ? À moins encore que
les analyses linguistiques réunies dans ce numéro ne soient les signes annonciateurs
d'une nouvelle linguistique, celle de la production ?

CONVENTIONS DE TRANSCRIPTION DES DOCUMENTS MANUSCRITS

— Les parties biffées sont entre crochets droits [].


— Les corrections effectuées en surcharge à l'intérieur d'un mot sont notées à la
suite de la première variante en les séparant l'une de l'autre par un « / ».
— Si le manuscrit comporte plusieurs lignes biffées en même temps, l'ensemble
du passage biffé est placé entre grands crochets verticaux.
— Les lectures incertaines de lettres ou de mots sont signalées par des points
souscrits.
— Le point d'insertion d'un ajout est matérialisé par un becquet.
— Lorsqu'il est nécessaire de reproduire un fragment important de manuscrit,
celui-ci est donné dans une transcription diplomatique, reproduction
dactylographique de l'original respectant aussi fidèlement que possible l'emplacement des éléments
dans l'espace, dans la ligne et dans la page.

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