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Dopage et Diffusion dans le Silicium

Daniel MATHIOT
Daniel.Mathiot@iness.c-strasbourg.fr
Institu d'Électronique du Solide et des Systèmes
(InESS, UMR 7163, Laboratoire Commun CNRS - ULP)
23 rue du Loess, B.P. 20
67037 STRASBOURG cedex

1. Introduction

Le dopage des semi-conducteurs est un élément clef pour la fabrication des composants électroniques. En effet, un
semi-conducteur pur (intrinsèque) est quasiment un isolant à la température ambiante, avec une bande de valence pres-
que entièrement pleine, et une bande de conduction presque entièrement vide. A titre d'exemple, la densité intrinsèque
de porteurs libres dans le silicium est seulement de l'ordre de 1010 cm-3 à 300 K. Les propriétés électroniques intéres-
santes sont donc liées à la possibilité de "doper" le matériau par l'introduction d'impuretés adéquates (les dopants) per-
mettant d'introduire des porteurs libres. En fait, le fonctionnement de l'ensemble des composants électroniques actifs
repose en grande partie, si ce n'est en totalité, sur la possibilité de former des jonctions P/N, c'est à dire de mettre en
contact des zones dopées avec un accepteur (impureté ayant un déficit d'électrons par rapport à la matrice, entraînant
une conduction par "trous" dans la bande de valence) et des zones dopées avec un donneur (impureté ayant un excès
d'électrons par rapport à la matrice, entraînant une conduction par "électrons libres" dans la bande de conduction). Dans
le silicium (élément de la colonne IV de la classification périodique), les donneurs sont les éléments de la colonne V
(les plus utilisés étant le phosphore et l'arsenic), tandis que les accepteurs sont les éléments de la colonne III (le plus
utilisé étant le bore).
Le détail du comportement électrique d'un composant semi-conducteur dépend donc d'une manière très forte de la
répartition des dopants à l'intérieur de la structure. Pour s'en convaincre, il suffit de comparer, par exemple, le schéma
électrique équivalent d'un transistor MOS à canal N (figure 4.1a) avec la structure schématique du même composant
réalisé en technologie ULSI standard (figure 4.1b) : comme le montre la figure 4.1 (cf. les chiffres indiquant les corres-
pondances sur la figure), tous les éléments contrôlant le fonctionnement du dispositif (résistances d'accès, conductance
et trans-conductance, capacités,...) sont directement associés à la présence des dopants.

Figure 4.1. Transistor N-MOS :Schéma électrique équivalent (a) et structure technologique correspondante (b).

Bien que dans les technologies modernes les dopants soient introduits par implantation ionique (cf. le chapitre cor-
respondant de cet ouvrage par J.J. Grob), des recuits à haute température sont nécessaires, ne serait-ce que pour restau-
rer la qualité cristalline du matériau endommagé par l'implantation ionique et "activer" les dopants (c'est-à-dire les po-
sitionner en site substitutionnel où ils sont électriquement actifs). Au cours de ces traitements à haute température les
profils de dopants (c'est-à-dire leur répartition dans le matériau) sont déformés à cause du phénomène tout à fait général
de la diffusion thermique. Entre autres choses, ces phénomènes de diffusion sont particulièrement critiques pour le
contrôle des paramètres clefs suivants :
D. Mathiot 2/27

• Dopage du canal : le profil du dopant dans la zone du canal, sous l'oxyde de grille, détermine l'importance des
courbures de bande en fonction des différentes tensions appliquées. Les profils de dopants dans cette zone conditionnent
donc directement la valeur de la tension de seuil du dispositif.
• Longueur du canal : c'est la distance horizontale séparant le drain de la source. Définie géométriquement par les
étapes de photo-lithogravure, la longueur réelle du dispositif fini est contrôlée par la diffusion latérale des dopants de-
puis les zones de drain et source.
• Profondeur des jonctions drain et source : la diminution des dimensions latérales nécessitent également d'utiliser
des jonctions de plus en plus fines, et donc de contrôler au mieux la pénétration des profils de dopants.
Il ressort clairement des quelques exemples ci-dessus qu'un bon contrôle des propriétés électriques d'un composant
électronique à semi-conducteur nécessite une parfaite maîtrise des profils des dopants dans la structure, et donc un
contrôle aussi précis que possible des étapes de diffusion (recuits haute température) subies par le circuit tout au long de
sa fabrication. Ceci passe donc par la compréhension et la modélisation des mécanismes élémentaires régissant la diffu-
sion des dopants, ce qui est l'objet de ce qui suit. Dans un premier temps (§ 4.2) on présentera la théorie générale de la
diffusion dans les solides appliquée au cas des semi-conducteurs, puis (§ 4.3) on s'intéressera plus particulièrement au
cas des dopants dans le silicium, tant du point de vue expérimental (§ 4.3.1) que du point de vue théorique (modélisa-
tion, § 4.3.2) en insistant sur quelques problèmes pratiques pour la réalisation des composants (§ 4.3.3).

2 Diffusion dans les solides

2.1. Généralités

2.1.1. Première loi de Fick

Considérons un élément A dissout à l'intérieur d'une matrice cristalline. A basse température le système est figé et
l'impureté est immobile. Par contre, si la température est suffisamment élevée, sous l'effet de l'agitation thermique, les
atomes de A sont mobiles et ils peuvent se déplacer à l'intérieur de la matrice. Ils sont alors soumis au phénomène de
diffusion : une non-uniformité des variables thermodynamiques (une variation de la concentration de A, toutes choses
égales par ailleurs, en étant le cas le plus fréquent) entraîne un transport de matière (un déplacement des atomes A) à
l'intérieur du solide. La diffusion est donc un processus non réversible dont le "moteur" est le gradient de potentiel chi-
mique et qui a pour objectif d'uniformiser ce potentiel chimique. La description phénoménologique générale de ce pro-
cessus n'est possible qu'à l'aide de la théorie de la thermodynamique des processus irréversibles, ce qui sort du cadre de
cet exposé.
Cependant, dans le cas le plus simple d'une seule espèce diffusante soumise uniquement à son gradient de concen-
tration, le phénomène se décrit très simplement à l'aide de la première loi de Fick, qui stipule que le flux d'impureté J
(nombre d'atomes traversant l'unité de surface par unité de temps) est proportionnel (en valeur absolue) au gradient de
concentration C de l'impureté :
r r
J = − D∇(C) [1]

Le signe "–" de l'équation précédente traduit simplement le fait que la diffusion a lieu des zones à fortes concentra-
tions vers les zones à faibles concentrations, ce qui est naturel pour pouvoir homogénéiser les concentrations.
Par définition, le coefficient de proportionnalité D est le coefficient de diffusion. Le flux étant généralement exprimé
en atomes par centimètre carré et par seconde (cm-2s-1) et les concentrations en nombre d'atomes par centimètre cube
(cm-3), D rs'exprime 2 -1
r pratiquement en cm s . On peut noter l'analogie de cette loi ravec rla loi der Fourrier du transfert de la
chaleur ( JQ = −κ∇ (T ) ) ou avec la loi d'Ohm élémentaire du courant électrique ( J = σE = −σ∇(V) ).
Il faut bien réaliser que le flux est une grandeur vectorielle et que donc, dans le cas le plus général (milieu aniso-
trope), D est un tenseur. De ce fait, le flux n'est pas nécessairement parallèle au gradient de concentration. Ceci peut se
produire dans des matériaux non cubiques, ou déformés sous l'effet d'une contrainte par exemple. Néanmoins, dans le
cas du silicium qui nous préoccupe ici et qui est un matériau cubique, et donc isotrope en absence de déformation, le
D. Mathiot 3/27

coefficient de diffusion est un scalaire. Le flux donné par la première équation de Fick est alors parallèle au gradient de
concentration. De ce fait nous pourrons considérer dans la suite, sans perte de généralité, uniquement le cas unidimen-
sionnel pour lequel la première loi de Fick se réduit à :

∂C
J = −D [2]
∂x

2.1.2. Flux généralisé : termes d'entraînement

Dans ce qui précède nous avons considéré que l'impureté diffusante n'était soumise qu'à son gradient de concentra-
tion. Considérons maintenant le cas plus général où l'impureté est soumise à des forces motrices d'origines diverses
(gradient de concentration, champ de contrainte, champ électrique, ...) et que sous l'effet de ces forces (et de ses interac-
tions avec le réseau cristallin) l'impureté acquiert une vitesse stationnaire moyenne u. Il est alors aisé de montrer que le
flux des impuretés est donné par l'équation :

J = uC [3]

Le problème général revient donc à identifier la nature des différentes forces et à établir la relation entre force et vi-
tesse. Dans l'hypothèse où la force motrice est due uniquement au gradient de concentration, la thermodynamique des
processus irréversible permet de montrer que la force motrice est le gradient de l'entropie partielle de mélange et les
calculs conduisent alors à l'équation (2). Dans le cas général d'un ensemble de forces motrices, en admettant intuitive-
ment que la vitesse moyenne de l'impureté est la somme des vitesses élémentaires qui seraient induites par chacune des
forces motrices prises séparément, il est commode d'écrire le flux d'impureté sous la forme :

∂C
J = −D + uC [4]
∂x

Dans l'équation qui précède, le premier terme (terme "fickien") traduit la contribution du gradient de concentration
seul, le deuxième terme (terme '"nernstien" ou "d'entraînement") renferme la contribution de toutes les autres forces
motrices. Un cas important est celui d'une espèce chargée en présence d'un champ électrique. Dans ces conditions la
vitesse d'entraînement est donné par :

u = ±µE [5]

où µ est la mobilité et E le champ électrique, le signe ± dépendant du signe de la charge portée par l'impureté. Dans ces
conditions le flux s'écrit simplement :

∂C
J = −D ± µEC [6]
∂x

Comme on le verra plus loin, cette expression du flux, bien connue en théorie du transport des charges électriques, a
aussi son utilité pour le problème de la diffusion des dopants dans un semi-conducteur.

2.1.3. Deuxième loi de Fick et calcul de profils simples

Établie pour un système conservatif, c'est à dire où il n'y a ni perte ni création d'atomes de l'espèce diffusante, la
deuxième loi de Fick permet de décrire l'évolution temporelle de la concentration en espèce diffusante en un point don-
né. Un simple bilan de matière conduit à l'équation de conservation (ou équation de continuité) suivante :
D. Mathiot 4/27

∂C ∂J
=− [7]
∂t ∂x

d'où l'on tire :

∂C ∂ ∂C
= (D ) [8]
∂t ∂ x ∂x

Si D peut être considéré comme constant, c'est à dire indépendant de la concentration, et donc indépendant de x et de
t, dans l'hypothèse d'une diffusion sous le seul effet d'un gradient de concentration, l'équation (2) donne :

∂C ∂2C
=D 2 [9]
∂t ∂x

Pour une espèce soumise à des forces d'entraînement supplémentaires, l'équation (4) avec D constant conduit à :

∂C ∂2C ∂C ∂u
= D 2 −u −C [10]
∂t ∂x ∂x ∂x

Lorsque le système n'est pas conservatif, par exemple en cas de réaction chimique induisant la formation ou l'élimi-
nation d'impuretés, ou de piégeage d'impuretés, etc ..., ces équations sont modifiées par l'addition de termes de généra-
tion ou recombinaison qui dépendent des mécanismes mis en jeu. On en verra plus loin un exemple indispensable pour
décrire certaines situations hors-équilibre.
L'équation (9) (deuxième équation de Fick) n'est donc valable que pour des conditions très restrictives qui, nous le
verrons ultérieurement, sont rarement réunies pour les problèmes de diffusion dans les semi-conducteurs. Les équations
(9) ou (10) permettent le calcul de C(x,t), mais s'agissant d'équations aux dérivées partielles, du premier ordre en t et du
second ordre en x, leurs solutions ne sont pas uniques. La solution adéquate pour une situation donnée est déterminée
par la connaissance d'une condition initiale et de deux conditions aux limites traduisant la réalité expérimentale. En
général la résolution de ces équations n'est pas possible analytiquement, ce qui implique la nécessité d'avoir recours à
des résolutions numériques par ordinateur.
Néanmoins, l'équation (9) a des solutions analytiques simples pour des conditions initiales et aux limites particuliè-
res. Ces conditions sont généralement imposées d'un point de vue expérimental afin de pouvoir déterminer les valeurs
de coefficients de diffusion par comparaison entre les profils mesurés et ces lois simples. Nous donnerons ici ces solu-
tions pour trois cas pratiques, le lecteur pouvant se reporter aux ouvrages de référence de Carslaw et Jaeger [1] ou
Cranck [2] pour un catalogue plus complet et la démonstration des résultats ci-dessous.
• Diffusion depuis une couche mince : Il s'agit du cas pratique où l'espèce diffusante est déposée à l'instant initial
sous forme d'un film mince à la surface (x=0) d'un échantillon très épais. S'il n'y a pas d'évaporation de l'impureté, dès
que la profondeur de pénétration est très grande devant l'épaisseur du film initial le profil de concentration suit une loi
gaussienne à l'intérieur de l'échantillon :

Q x2
C(x,t ) = exp(− ) [11]
πDt 4Dt

où Q est la quantité totale d'impureté déposée (et donc dissoute dans le matériau) :


Q = C (x)dx [12]
0
D. Mathiot 5/27

• Diffusion avec une concentration superficielle constante : Il s'agit du cas où une source extérieure infinie per-
met de maintenir à la surface de l'échantillon une concentration constante C0. La solution fait alors appel à une fonction
classique des statistiques, la fonction erreur complémentaire :

x
C( x,t ) = C0erfc ( ) [13]
2 Dt

avec

u
2
erfc (u) = 1 −
π ∫ exp(−η2 )dη [14]
0

a) Echelle linéaire b) Echelle semi-logarithmique

1 1
erfc(u)
erfc(u)

0.8 0.1
0.6
0.01
0.4

0.2 0.001

0 0.0001
0 1 2 3 0 1 2 3
u u

Figure 4.2. Fonction erreur complémentaire

Des tables donnent les valeurs de la fonction erreur complémentaire. Sa variation en fonction de u = x / 2 Dt est
donnée sur la figure 4.2, en échelle linéaire et semi-logarithmique. Comme on le constate sur la figure 2a, la tangente à
l'origine coupe l'axe des abscisses au point u=1, c'est à dire x = 2 Dt . La dose d'impuretés comprise entre ce point et
la surface de l'échantillon représente environ 90% de la dose totale pénétrée dans l'échantillon ( Q = (2 / π )C0 Dt ).
On peut donc considérer avec une bonne approximation que la profondeur affectée par la diffusion est de l'ordre de
2 Dt , ce qui explique pourquoi cette quantité est souvent appelée profondeur de diffusion.
• Redistribution d'une gaussienne enterrée : il s'agit de l'approximation la plus simple de la redistribution d'un
profil de dopant introduit par implantation ionique. En première approximation le profil initial correspondant est gaus-
sien :

max ( x − Rp)2
C( x,0) = Ct=0 exp( − ) [15]
2ΔRp2

Rp est le parcours projeté moyen et ∆Rp l'écart type. Si Rp est suffisamment grand pour que le profil d'impureté
n'interagisse pas de façon significative avec la surface au cours de la diffusion, et si le coefficient de diffusion peut être
considéré constant, le profil obtenu au bout d'un temps t est toujours une gaussienne centrée en x=Rp, donc donné par
une relation analogue à l'équation (15), mais dont la valeur maximale et l'écart type varient au cours du temps selon les
lois suivantes :
D. Mathiot 6/27

ΔRpt=0
C tmax = Ctmax
=0 [16]
ΔRpt

et

ΔR pt2 = ΔRpt=0
2
+ 2Dt [17]

2.1.4. Analyse de Boltzman – Matano

Lorsque D dépend de la concentration ou plus généralement varie avec les coordonnées d'espace ou de temps, les
équations (9) ou (10) ne sont plus valables, et l'équation de continuité générale (8) ne peut plus être intégrée simple-
ment. Cependant, une estimation de la variation du coefficient de diffusion avec C peut être obtenue à partir du profil de
diffusion expérimental par la méthode de Boltzman-Matano : par le changement de variable λ = x / t , l'équation aux
dérivées partielles (8) se transforme aisément en une équation différentielle simple :

dC d dC
λ = −2 (D ) [18]
dλ dλ dλ

Si les conditions aux limites s'expriment simplement en fonction de la seule variable λ (ce qui est le cas par exemple
pour une diffusion à concentration superficielle constante, mais pas de la redistribution d'un film mince ou d'une gaus-
sienne), une double intégration conduit à la relation suivante :

C*

∫ xdC
1 0
D(C *) =− [19]
2t (dC / dx)C*

Comme on le constate sur la figure 4.3, le numérateur de cette expression


est l'aire comprise entre le profil C(x,t), l'axe des x et la droite C=C*, tandis
que le dénominateur est la tangente au profil au point C=C*. Cette interpré-
tation géométrique de la relation (19) permet donc la détermination de D par
des moyens graphiques à partir du profil expérimental.
D. Mathiot 7/27

2.2. Mécanismes élémentaires

2.2.1. Les mécanismes atomiques

La figure 4.4 récapitule les variations en fonction


T fusion 1000°C 600°C de la température des coefficients de diffusion de
10-4 différentes impuretés mesurés expérimentalement
Co Cu dans le silicium intrinsèque. On constate que suivant
le type d'impureté les valeurs expérimentales ont des
10-6 ordres de grandeurs très différents, allant, pour une
température de l'ordre de 900°C, de 10-5 / 10-4 cm2s-1
D (cm 2s -1)

Fe
pour des impuretés comme le cuivre ou le cobalt,
10-8
jusqu'à des valeurs de l'ordre de 10-16 / 10-15 cm2s-1
Au pour les dopants usuels (P, B, As). Corrélativement,
les énergies d'activation mises en jeu varient de l'ordre
10-10 Ti
de 0,2 / 0,5 eV à 4 ou 5 eV. Cette diversité des ordres
de grandeur du coefficient de diffusion reflète sim-
10-12
plement les différents mécanismes microscopiques
par lesquels un atome d'impureté peut se déplacer
dans un solide cristallin. Ces mécanismes sont inti-
10-14 B mement liés à la structure atomique (réseau) du solide
P O concerné et à la position d'équilibre de l'impureté dans
Si le réseau cristallin de la matrice. Suivant cette posi-
As
10-16 tion d'équilibre (site stable), on distingue les impure-
5 6 7 8 9 10 11 12 13
104 /T

Figure 4.4. Coefficients de diffusion dans Si

tés substitutionnelles, dont le site stable est un site du réseau cristallin


de la matrice, et les impuretés interstitielles, dont le site stable se
situe entre les sites du réseau (dans un interstice entre les atomes de la
matrice).
• Impuretés interstitielles : Il s'agit du mécanisme le plus sim-
ple, illustré sur la figure 4.5, au cours duquel l'impureté "saute" de
proche en proche de site interstitiel en site interstitiel et peut ainsi
parcourir aisément des distances importantes. Ce mécanisme conduit
donc à des coefficients de diffusion élevés. Dans le silicium, les élé-
ments légers (H, He, ...) et les métaux de transition de la 4ème ligne de
la classification périodique (Ti, V, Cr, etc...) se comportent suivant ce
schéma. Bien que cela sorte du cadre de cet exposé, consacré essen-
tiellement au comportement des dopants, il faut néanmoins signaler
que la diffusion interstitielle directe est souvent ralentie par des inte-
ractions de l'espèce diffusante avec les autres impuretés présentes (en
particulier les dopants) conduisant à la formation de complexes plus
ou moins stables et à une réduction importante du coefficient de dif-
fusion effectif. Le lecteur intéressé pourra se reporter, par exemple,
aux références [3,4] traitant respectivement du cas de l'hydrogène et
du cuivre. Dans le cas des métaux de transitions, ces interactions
doivent nécessairement être prises en compte pour une bonne com-
préhension des étapes technologiques ayant pour but de piéger ces Figure 4.5. Diffusion interstitielle simple
impuretés ("gettering").
D. Mathiot 8/27

• Impuretés substitutionnelles : La diffusion de ces impu-


retés n'est possible qu'en mettant en jeu les défauts ponctuels
structuraux du silicium. Ces défauts sont soient des lacunes (sites
vacants dans le réseau), soit des auto-interstitiels (atomes de
silicium en surnombre dans le réseau), ce qui donne lieu à deux
types de mécanismes élémentaires de diffusion :
* Le mécanisme lacunaire est illustré sur la figure 4.6 :
pour diffuser, l'impureté doit attendre qu'une lacune arrive à son
voisinage et la diffusion s'effectue par échange de sites entre
l'impureté et la lacune. Dans le cas le plus général, cette lacune
peut ensuite s'éloigner de l'atome d'impureté par échange avec les
atomes de silicium voisins, et l'atome d'impureté doit attendre
l'arrivée d'une autre lacune pour effectuer un saut supplémen-
taire. Par contre il peut arriver, à cause d'une forte énergie de
liaison entre la lacune et l'impureté, que la lacune considérée
reste au voisinage immédiat de l'impureté et que le complexe
correspondant diffuse en tant que tel dans le réseau. Nous re-
viendrons plus loin sur ce concept de diffusion par "paires".
* La figure 4.7 illustre le mécanisme de diffusion assis-
tée par les auto-interstitiels. Dans le réseau du silicium, les auto-
interstitiels ont la structure schématisée en (1) : l'interstitiel reste
lié au réseau et c'est en fait un "auto-interstitiel dissocié", c'est à
dire que deux atomes de silicium se partagent un site unique du
réseau. Quand cet auto-interstitiel arrive au voisinage d'une im-
pureté substitutionnelle, un des atomes de silicium peut interagir
Figure 4.6. Diffusion lacunaire
avec l'impureté et l'on a alors formation d'une impureté intersti-
tielle (schématisée en (2)), qui est en fait un "interstitiel mixte
dissocié" qui peut ensuite diffuser suivant la séquence de sauts
décrite sur la figure 4.7. Dans l'exemple illustré ici, l'interstitiel mixte se dissocie (avec re-formation de l'auto-
interstitiel) après un saut de l'impureté. En fait, dans le vrai réseau du silicium à trois dimensions, l'interstitiel mixte
(l'impureté interstitielle) peut effectuer plusieurs sauts et donc diffuser sur de longues distances, avant de se dissocier.
Tout se passe alors comme si on avait la diffusion d'une "paire" impureté / auto-interstitiel.

• Mécanismes dissociatifs : Ces mécanismes se produisent pour des impuretés dont le site stable est un site subs-
titutionnel (où elles sont relativement immobiles), mais qui ont une probabilité non négligeable d'existence en site in-
terstitiel (avec un coefficient de diffusion très élevé). Le coefficient de diffusion effectif, dont les valeurs sont intermé-
diaires entre celles des impuretés substitutionnelles et interstitielles pures, est déterminé en grande partie par le méca-
nisme permettant à l'impureté considérée de passer d'un type de site à l'autre. Selon le type de défaut ponctuel impliqué
dans ces échanges (figure 4.8), on distingue deux mécanismes dissociatifs :
D. Mathiot 9/27

(1) (2)

(3) (4)

Figure 4.7. Diffusion assistée par les auto-interstitiels

* Mécanisme de "Frank-Turnbull" : Schématisé sur la figure 4.8a, ce mécanisme a été proposé initialement pour
expliquer la diffusion du cuivre dans le germanium [5]. Il met en jeu l'échange impureté substitutionnelle / impureté
interstitielle par l'intermédiaire des lacunes du réseau, suivant la réaction :

Ai + V ↔ As [20]

* Mécanisme "kick-out" : Le mécanisme précédent a longtemps été considéré comme s'appliquant aux métaux
de transition "lourds" (Pt, Au, ...) dans le silicium. Cependant il a été ensuite démontré qu'il ne permettait pas une des-
cription correcte de l'ensemble des observations expérimentales. Un nouveau mécanisme, mettant en jeu les auto-
interstitiels, dit "kick-out", a été proposé par Gösele [6]. Dans ce mécanisme, illustré sur la figure 4.8b, un auto-
interstitiel peut éjecter une impureté substitutionnelle de son site, conduisant à la formation d'une impureté interstitielle.
La réaction inverse permet le retour de l'impureté en site substitutionnel :

I + As ↔ S is + Ai [21]
D. Mathiot 10/27

(a)

(b)

Figure 4.8. Mécanismes dissociatifs. (a ) : "Frank-Turnbull"; (b) : "kick—out"

Dans les équations précédentes, A désigne l'impureté (l'indice renseignant sur son site), V désigne une lacune et I un
auto-interstitiel. Sans entrer dans les détails, signalons que seule une combinaison des deux mécanismes précédents
permet une description complète des profils de diffusion d'or dans le silicium [7].
Il est par ailleurs intéressant de remarquer que le mécanisme de diffusion des impuretés substitutionnelles assistée
par les auto-interstitiels est identique au mécanisme de kick-out si on fait l'hypothèse que l'impureté interstitielle reste
liée au réseau. De fait, ces deux mécanismes, introduits et décrits dans des contextes différents, conduisent aux mêmes
équations de continuité et il n'est en général pas aisé (ni souvent même pertinent) de les distinguer.

2.2.2. Théorie atomique du coefficient de diffusion

Comme on peut le constater sur la figure 4.4, les variations expérimentales des coefficients de diffusion avec la tem-
pérature peuvent en général être aisément décrites par une loi d'Arrhenius :

Q
D = D0 exp(− ) [22]
kT

T est la température absolue (en Kelvin) et k est la constante de Boltzman. Le paramètre Q s'appelle l'énergie d'acti-
vation de la diffusion. Si on considère qu'au cours de son déplacement l'espèce diffusante saute d'un site stable à un
autre avec une fréquence ν , cette énergie Q est également l'énergie d'activation de ν :

Q
ν = ν 0 exp(− ) [23]
kT
D. Mathiot 11/27

Cette notion d'énergie d'activation s'illustre aisément à l'aide de la figure 4.9 qui décrit schématiquement la variation
de l'enthalpie libre de Gibbs (G) du cristal au cours du déplacement de l'espèce diffusante. Quand l'espèce diffusante est
sur son site stable (S), G est minimum (situation d'équilibre thermodynamique). A cause de l'agitation thermique,
l'atome vibre avec une fréquence ν0, proche de la fréquence de Debye du cristal (de l'ordre de 1013 s-1). Ce déplacement
s'accompagne obligatoirement d'une déformation du réseau, et donc d'une augmentation de G. En un certain point, ap-
pelé point col (C), à mi-distance entre deux sites stables, G passe par un maximum. Si grâce à l'agitation thermique
l'espèce diffusante atteint ce point col, elle peut alors "basculer" vers l'autre site stable sans coût énergétique supplé-
mentaire. L'énergie d'activation est donc la différence d'enthalpie libre de Gibbs du cristal entre sa valeur au point col et
celle d'équilibre.

Figure 4.9. Notion d'énergie d'activation

Pour un mécanisme atomique donné, l'énergie d'activation, ainsi que le terme pré-exponentiel D 0, peut être reliée
aux paramètres physiques décrivant le saut élémentaire. Il faut tout d'abord, indépendamment du mécanisme mis en jeu,
établir la relation existant entre le coefficient de diffusion et la fréquence de saut. Il est évident que, quel que soit le
mécanisme élémentaire, un atome ne peut se déplacer dans un cristal que par une succession de sauts élémentaires. Si
ces sauts ont lieu d'une façon aléatoire (chaque saut étant indépendant du saut précédent), on parle de "marche au ha-
sard". On peut alors montrer (par exemple, réfs.8, 9) que, dans un cristal cubique, le coefficient de diffusion est relié à
la fréquence de saut par la relation :

1 2
D= a ν [24]
6

où a est la longueur du saut élémentaire, c'est à dire la distance entre atomes premiers voisins (a = 2,35 Å pour le sili-
cium). Dans la réalité, les sauts atomiques ne se produisent pas d'une façon purement aléatoire, un saut pouvant être
corrélé au saut précédent. Ceci se traduit par l'introduction d'un facteur multiplicatif correctif f dans l'équation (24). Ce
facteur de corrélation est inférieur à l'unité, et sa valeur dépend de la structure du réseau cristallin et du mécanisme
atomique de diffusion. Nous pouvons maintenant comprendre l'origine microscopique des ordres de grandeur des éner-
gies d'activation pour les différents mécanismes de diffusion.
• Impureté substitutionnelle : Que ce soit pour le mécanisme lacunaire ou celui assisté par les auto-interstitiels,
pour qu'un saut atomique de l'impureté ait lieu, deux conditions doivent être remplies. Tout d'abord, il est nécessaire que
le défaut soit au voisinage immédiat (1er voisin) de l'impureté, ce qui est caractérisé par une probabilité PX . Il est ensuite
nécessaire que le défaut échange son site avec l'impureté, ce qui se produit avec une fréquence νX. La fréquence de saut
de l'impureté est donc le produit de ces deux termes :

ν = PXν X [25]
D. Mathiot 12/27

avec, suivant l'approche déjà expliquée (cf. figure 4.9) :

ΔGXm ΔSm ΔH m
ν X = ν 0 exp(− ) = ν 0 exp( X )exp(− X
) [26]
kT k kT

ΔG Xm est l'enthalpie libre de migration du défaut X, qui se décompose naturellement (G=H-TS) en une entropie de
m m
migration ( Δ SX ) et une enthalpie de migration ( ΔH X ). Si on suppose les défauts répartis d'une façon purement statisti-
que dans le cristal, la probabilité d'avoir un défaut X au voisinage de l'impureté est simplement la proportion de sites du
b
cristal occupés par un défaut X. Cependant, pour la majorité des impuretés, il existe une énergie de liaison ( EX ) entre
l'impureté et les défauts, de sorte que la probabilité PX est donnée par :

CX Eb
PX = exp( X ) [27]
NS kT

où CX est la concentration atomique volumique du défaut X à la température T et NS la densité volumique de sites du


réseau (5x1022 cm-3 pour le silicium). Des considérations simples de thermodynamique permettent de montrer qu'à une
température T ≠ 0 tout cristal contient une concentration d'équilibre non nulle de défauts, donnée par :

ΔG FX ΔS F ΔH XF
C *X = N S exp( − ) = N S exp( X ) exp(− ) [28]
kT k kT
F F F
où ΔG X est l'enthalpie libre de formation du défaut X, Δ SX et ΔH X étant l'entropie et l'enthalpie correspondantes.
En combinant les diverses relations précédentes, on montre alors aisément que le coefficient de diffusion est bien
décrit par la relation (22) avec :

1 2 ΔS F + ΔSXm
D0 = a ν 0 exp( X ) [29]
6 kT

et

Q = ΔH XF + ΔH m
b
X − EX [30]

2
En introduisant le coefficient de diffusion du défaut ( DX = (1 / 6)a ν X ), on obtient aisément le coefficient de diffu-
sion de l'impureté substitutionnelle en fonction des paramètres macroscopiques du défaut :

DX C X Eb
D= exp( X ) [31]
NS kT

ce qui prouve que le coefficient de diffusion d'une impureté substitutionnelle est directement proportionnel à la concen-
tration du défaut ponctuel qui lui sert de "véhicule". Cette notion fondamentale est à la base d'une interprétation rigou-
reuse des "anomalies" de diffusion que l'on verra ultérieurement.
• Impureté interstitielle : Dans ce cas l'analyse est beaucoup plus simple. En effet les défauts ponctuels ne sont
pas mis en jeu et l'impureté a une probabilité égale à 1 de trouver un site vacant à son voisinage. On obtient alors sim-
plement :

1 2 ΔS m
D0 = a ν 0 exp( i ) [32]
6 kT
D. Mathiot 13/27

et

Q = ΔHim [33]

ΔSim et ΔHim étant l'entropie et l'enthalpie de migration de l'impureté interstitielle.

2.3. Spécificités des semi-conducteurs

Tout ce qui précède décrit la diffusion d'une impureté dans un solide cristallin, indépendamment du type de solide
considéré. Dans la suite de ce paragraphe nous abordons les spécificités à prendre en considération dans les cas de la
diffusion dans les semi-conducteurs. Ces effets supplémentaires sont essentiellement liés à la modulation de la position
du niveau de Fermi dans la bande interdite sous l'effet du dopage.

2.3.1. Influence du dopage

Il a été très rapidement observé expérimentalement que la valeur des coefficients de diffusion dans les semi-
conducteurs est affectée par le niveau de dopage du matériau. Un exemple typique et parfaitement interprété est l'in-
fluence d'une forte concentration de dopant sur le coefficient d'auto-diffusion du germanium [10]. Dans ce cas particu-
lier, un dopage de type N augmente le coefficient de diffusion, alors qu'un dopage de type P le diminue. Ce phénomène
s'explique aisément en considérant la spécificité de l'état semi-conducteur en ce qui concerne la structure des défauts
ponctuels. L'état semi-conducteur est caractérisé par l'existence d'une bande interdite, c'est à dire un domaine d'énergie
où la densité d'états électroniques est nulle. Mais il faut bien réaliser que cette structure de bande interdite parfaite est
intimement liée à la périodicité du réseau cristallin. De sorte que toute rupture locale de cette périodicité (induite par
exemple par la présence d'une impureté ou d'un défaut ponctuel) peut induire un état électronique possible à l'intérieur
de la bande interdite, confiné spatialement au voisinage immédiat du défaut. On dit que le défaut introduit un "niveau
profond". L'occupation de ce niveau par un électron est, bien évidemment, donné par la statistique de Fermi-Dirac et
dépend donc de la position du niveau de Fermi dans la bande interdite (elle-même contrôlée par le dopage). Par exem-
ple, on sait que la lacune dans le germanium introduit un niveau accepteur dans la moitié supérieur de la bande interdite,
de sorte que la lacune peut être neutre (V0) ou négativement chargée (V-) suivant que le niveau est vide ou occupé. A
partir de la statistique de Fermi-Dirac, on obtient aisément les concentrations relatives de ces états de charge en fonction
du dopage :

E − EF n
[V − ] = [V 0 ]exp(− A ) = δ − ( )[V 0 ] [34]
kT ni

avec

E A − EFi
δ − = exp(− ) [35]
kT

Dans les équations précédentes, EA est la position du niveau profond introduit par la lacune, EF est le niveau de Fer-
mi, et n la densité d'électrons libres dans la bande de conduction, l'indice i indiquant les valeurs intrinsèques. La
concentration totale de lacune est donc donnée par :

 n 
[V]tot = [V 0 ] + [V − ] = [V 0 ]1 + δ − ( ) [36]
 ni 

Comme l'équilibre thermique impose la valeur de la concentration de lacunes neutres, il découle de la relation pré-
cédente que la concentration totale de lacunes dépend fortement du niveau de dopage. Les défauts servant de "véhicule"
D. Mathiot 14/27

à la diffusion quel que soit leur état de charge, il résulte de ce qui précède que le coefficient de diffusion dépend du
niveau de dopage.
On peut maintenant facilement interpréter les résultats concernant l'auto-diffusion du germanium : un fort dopage
avec des donneurs augmente la valeur de n, et donc la concentration totale de lacune est augmentée, tandis qu'un dopage
avec des accepteurs diminue n, induisant une réduction de la concentration totale de lacunes. Ceci est parfaitement en
accord avec les variations observées expérimentalement [10].
Dans le cas du silicium la situation est légèrement différente. En effets les défauts ponctuels du silicium (lacunes ou
auto-interstitiels) ont un comportement amphotère : ils introduisent des niveaux profonds accepteurs et donneurs, de
sorte que la concentration totale de défaut est augmentée par les deux types de dopage, donneur ou accepteur. On verra
plus loin que ces effets interviennent directement pour expliquer les profils de diffusion des dopants du silicium.

2.3.2. Influence du champ électrique induit

Un autre effet important doit impérativement être pris en compte dans les semi-conducteurs en présence d'un gra-
dient de dopant. Considérons par exemple un échantillon de silicium non polarisé contenant du phosphore (élément
donneur) en concentration variable. Ce gradient de concentration de donneurs implique nécessairement l'existence d'un
gradient de concentration d'électrons libres. Afin de maintenir l'équilibre (absence de courant électrique), le flux d'élec-
trons induit par ce gradient de concentration est équilibré par l'établissement d'un champ électrique de charge d'espace
donné par la formule classique :

k T 1 ∂n
E=− [37]
q n ∂x

Considérons maintenant le flux de dopants. A haute température (condition nécessaire pour que le dopant soit mo-
bile), les atomes de donneur sont entièrement ionisés, de sorte que le phosphore est un ion chargé positivement (P+). En
présence d'un champ électrique, il est donc nécessaire d'utiliser la forme général du flux donné par l'équation (6), en
utilisant l'équation (37) on obtient alors :

 ∂[P + ] [P+ ] ∂n 
J P = −D +  [38]
 ∂x n ∂x 

où la relation d'Einstein (D/µ = kT/q) a été utilisée pour exprimer la mobilité en fonction de D. Par ailleurs, en absence
de polarisation extérieure, la concentration d'électrons libres est localement reliée à celle de phosphore par l'équation de
neutralité électrique :

n2
n = i + [P+ ] [39]
n

de sorte que le gradient de n s'exprime en fonction de celui de [P+], et on peut alors mettre l'équation du flux sous la
forme de la première loi de Fick avec un coefficient de diffusion effectif dépendant du dopage local :

∂[P + ] ∂[P + ]
J P = −Deff = −hD [40]
∂x ∂x

avec

2n2
h= 2 [41]
n + ni2
D. Mathiot 15/27

Le terme correctif h est le facteur d'accélération lié au champ électrique induit par le gradient de dopant, et sa valeur
varie de 1 à faible dopage (n = ni) à 2 au maximum à très fort dopage (n >> ni).
Dans le cas d'un gradient d'accepteur (par exemple du bore dans Si), on obtient une relation tout à fait analogue, en
remplaçant la concentration d'électrons libres par celle de trous (p) :

2 p2
h= 2 [42]
p + ni2

Enfin, il faut bien noter que les deux effets décrits ci-dessus (influence du dopage et champ électrique induit) ne sont
sensibles que pour des concentrations de dopants supérieures à la densité de porteurs intrinsèques à la température de
diffusion (de l'ordre de quelques 1018 à 1019 cm-3 vers 900 – 1000°C dans Si). Pour les concentrations inférieures, la
concentration de porteurs libres reste égale à la densité de porteurs intrinsèques et les termes correctifs sont égaux à 1.

3. Diffusion des dopants dans le silicium mono-cristallin

3.1. Principales observations expérimentales

3.1.1. Prédépôts en atmosphère neutre

Un des faits marquants concernant la diffusion des dopants dans le silicium est l'énorme influence de la concentra-
tion en dopant sur la forme des profils de diffusion. Cette influence se met facilement en évidence sur les profils expé-
rimentaux correspondant à des "prédépôts" diffusés. Rappelons que cette technique a été longtemps utilisée pour intro-
duire les dopants dans le silicium. Bien que maintenant complètement abandonnée au profit de l'implantation ionique
(du moins pour les technologies ULSI de la microélectronique), les résultats correspondants ont permis d'asseoir la
majorité de nos
connaissances sur
les mécanismes
fondamentaux régis-
sant la diffusion des
dopants. C'est pour-
quoi nous rappelons
ici ces résultats. Le
prédépôt désignant
une étape de diffu-
sion pendant la-
quelle la concentra-
tion superficielle est
maintenue cons-
tante, les lois de
Fick indiquent que
le profil de concen-
tration devrait être
simplement une
fonction erreur
complémentaire si
le coefficient de
diffusion était une
Figure 4.10. (a) Profils de prédépôt de phosphore à 1000°C. (b) Analyse de Boltzmann-Matano pour les constante. En réalité
très fortes concentrations de surface
les résultats expéri-
mentaux sont bien
D. Mathiot 16/27

plus complexes :

• Phosphore : Par exemple la figure 4.10a montre les différents profils obtenus après un prédépôt d'une heure
à 1000°C pour différentes concentrations superficielles (d'après Booth [11]). Pour les concentrations superficielles infé-
rieures à la densité de porteurs intrinsèques, le profil est conforme à celui attendu pour un mécanisme de diffusion
simple (fonction erreur complémentaire). Par contre, lorsque la concentration superficielle augmente, de fortes non-
linéarités sont mises en évidence. Dans un premier temps (concentrations superficielles de l'ordre de quelques 1019 cm-3)
il y a une augmentation locale du coefficient de diffusion aux fortes concentrations, conduisant à des profils "rectangu-
laires" en échelle semi-logarithmique, puis, petit à petit, une inflexion apparaît sur les profils, avec une zone à fort gra-
dient en surface, suivie par une "queue" de courbe correspondant à une augmentation importante du coefficient de diffu-
sion effectif. Quand la concentration de surface dépasse 2 à 3x1020 cm-3, un phénomène supplémentaire apparaît : un
plateau de concentration, correspondant à une diffusion très rapide, est visible dans la zone de surface, suivi par la zone
à fort gradient et la queue de courbe comme précédemment. La variation du coefficient de diffusion effectif en fonction
de la concentration locale de phosphore, obtenue par la méthode de Boltzmann-Matano, est reportée sur la figure 4.10b,
pour ces concentrations superficielles les plus élevées. Cette figure met bien en évidence la forte accélération de la dif-
fusion en volume par rapport au coefficient de diffusion extrait des conditions à faible concentration de surface (diffu-
sion intrinsèque), ainsi que la forte accélération en surface. Ces deux extrêmes sont séparés par une zone où l'on observe
une diminution locale du coefficient de diffusion, correspondant à la zone d'inflexion sur le profil expérimental.

• Arsenic : Comme dans le cas du phosphore, les profils de prédépôt d'arsenic aux basses concentrations su-
perficielles ont une forme correctement décrite par une simple fonction erreur complémentaire, permettant d'extraire le
coefficient de diffusion intrinsèque de l'impureté. Cependant, lorsque la concentration superficielle dépasse le densité de
porteurs intrinsèques, on observe des déviations par rapport à la courbe idéale différentes de celles observées avec le
phosphore. En effet les diffusions aux températures de l'ordre de 1000°C conduisent à des profils d'allure sensiblement
rectangulaire (en échelle semi-logarithmique), comme celui de la figure 4.10a (d'après Fair et Weber [13]). De plus,
comme on peut le constater sur la figure, il existe un écart important entre la concentration totale d'arsenic et la concen-
tration électriquement
active, mesurée par
"spreading resistance".
Le résultat de l'analyse
de Boltzman-Matano de
ce profil expérimental
est donné sur la figure
4.11b., et met en évi-
dence une nette décrois-
sance du coefficient de
diffusion effectif aux
fortes concentrations
d'arsenic, précédée par
un domaine où le coeffi-
cient de diffusion est
sensiblement propor-
tionnel à la concentra-
tion locale d'arsenic, le
coefficient de diffusion
effectif tendant vers le
coefficient de diffusion
intrinsèque aux plus Figure 4.11. Profil typique de prédépôt d'arsenic en forte concentration (1000°C, 1 hr) (a) et
faibles concentrations analyse Boltzmann-Matano corresopondante. (b)
d'arsenic.
D. Mathiot 17/27

• Bore :
Comme pour les au-
tres dopants, les pro-
fils de prédépôt de
bore sont conformes à
la fonction erreur
complémentaire pour
les conditions intrin-
sèques, tandis que des
non-linéarités existent
aux concentrations
supérieures. Dans le
cas du bore ces non-
linéarités se manifes-
tent par des profils de
forme sensiblement
rectangulaire comme
ceux de la figure 4.12a
(d'après Quoirin [14]).
L'analyse Boltzman- Figure 4.12. Profil typique de prédépôt de bore à forte concentration superficielle à 1000°C (a) et
analyse Boltzmann-Matano correspondante pour le profil à 60 min. (b)
Matano correspon-
dante (figure 4.12b)
révèle une légère accélération du coefficient de diffusion en volume, par rapport aux valeurs intrinsèques, et une varia-
tion sensiblement proportionnelle à la concentration de bore aux concentrations plus élevées.

3.1.2. Couplages entre impuretés

Des renseignements intéressants concernant les mécanismes mis


en jeu lors de la diffusion des dopants sont obtenus quand on observe
les effets de couplage entre impuretés. A titre d'exemple, nous consi-
dérerons la séquence des traitements nécessaires pour fabriquer un
transistor "planar" N-P-N. Une première diffusion localisée d'accep-
teur (bore par exemple) est effectuée dans un substrat de type N pour
former la base du transistor. L'émetteur est ensuite formé par diffu-
sion localisée, à travers une fenêtre plus petite, d'un donneur (phos-
phore ou arsenic) en forte concentration. Au cours de la deuxième
étape, il y a bien entendu diffusion simultanée du donneur et de l'ac-
cepteur. Les interactions ayant lieu lors de ces diffusions séquentiel-
les peuvent se séparer en deux effets distincts, mais qui se produisent
en même temps :
• Le premier de ces effets est causé par le champ électrique in-
duit par la diffusion du donneur, conformément à ce qui est expliqué
au § 4.2.3.2, et se traduit par l'apparition d'un creux dans le profil de
bore au voisinage de la jonction, comme illustré sur le figure 4.13
(d'après [15]). Pour comprendre la formation de ce creux, il suffit de
réaliser que le champ électrique induit par le gradient d'arsenic est
orienté positivement, et il induit donc une contribution négative au Fig.4.13. Diffusion couplée bore-arsenic
flux total de bore, chargé négativement (cf. l'équation 6). L'entraîne-
ment peut être suffisamment fort pour drainer les atomes de bore vers
D. Mathiot 18/27

la surface. Par contre, au delà de la jonction, les concentrations sont relativement faibles de sorte que la concentration
de porteurs a sa valeur intrinsèque et il n'y a plus de champ induit. Les atomes de bore diffusent donc exclusivement
sous l'effet de leur gradient, donc vers le volume. Ces effets opposés en surface et en volume induisent nécessairement
un appauvrissement en bore au voisinage de la jonction.

• Le deuxième effet, illustré sur la figure 4.14a, est connu sous le nom "d'effet de poussée par l'émetteur" et il est
essentiellement observable pour des structures N-P-N à émetteur de phosphore : la diffusion de phosphore à forte
concentration servant à la fabrication de l'émetteur s'accompagne d'une avancée de la jonction base-collecteur plus im-
portante dans les zones subissant la diffusion de phosphore en surface. Il est maintenant établi (voir par exemple [16])
que cet effet de poussée a la même origine physique que l'apparition des queues de courbe dans les profils de phos-
phore, et que ces effets sont associés à une augmentation locale du coefficient de diffusion des impuretés due à une forte
sursaturation de défauts ponctuels liée à la diffusion de P. Cette interprétation en terme de défauts ponctuels est confor-
tée par les études d'accélération de la redistribution d'une couche enterrée de bore, causée par une diffusion de P en forte
concentration à la surface (figure 4.14b). Ce type d'expérience démontre que l'accélération se produit sur de grandes
distances (plusieurs dizaines de microns), sans aucune interaction directe entre la couche de bore et le phosphore super-
ficiel, et que l'ordre de grandeur de cette accélération est le même que celui observé dans les queues de profil de P. Il est
donc maintenant parfaitement admis que la diffusion du phosphore dans Si, à forte concentration, génère des défauts
ponctuels hors équilibre thermique. Comme des effets de même nature, bien que de moindre intensité, sont également
observés avec des émetteurs en arsenic, ou en bore pour les transistors P-N-P, on considère que le mécanisme induisant
ces sursaturations de défauts est tout à fait général pour l'ensemble des dopants usuels.

Figure 4.14. Influence d'une diffusion localisée de phosphore sur la redistribution du bore. (a) : effet de poussées par l'émetteur. (b)
Élargissement d'une couche enterrée.

3.1.3. Influence de l'oxydation

La diffusion des dopants dans le silicium est fortement affectée par l'atmosphère dans laquelle s'effectue les recuits.
En particulier, un recuit oxydant entraîne généralement une accélération de la diffusion (OED, de l'anglais Oxydation
Enhanced Diffusion) des dopants usuels (B, P, As) et un ralentissement (ORD, de l'anglais Oxydation Retarded Diffu-
sion) de l'antimoine. Une diffusion retardée est également observée pour le phosphore, l'arsenic et le bore dans certaines
D. Mathiot 19/27

conditions expérimentales : oxydation de Si (111) à température très élevée pendant des temps très longs [17]. Les prin-
cipaux résultats sont les suivants :
• Pour chacun des dopants, l'effet dépend de l'orientation du substrat, l'OED étant plus prononcée pour les faces
(100) que (111).
• L'OED est plus importante pour une oxydation en atmosphère humide que pour une atmosphère d'oxygène sec,
ce qui est directement lié à l'augmentation de la vitesse d'oxydation.
• L'addition de composés chlorés diminue l'OED
• L'importance relative de l'OED augmente quand la température diminue
• Enfin l'OED (ou l'ORD) est un effet à longue portée, associé à une sursaturation (ou sous-saturation) de défauts
ponctuels.
En fait Hu [18] a mis en évidence que toutes ces informations sont en corrélation parfaite avec celles concernant le
comportement (croissance ou décroissance) des fautes d'empilement induites par l'oxydation. On en déduit donc que les
deux phénomènes sont liés aux mêmes perturbations sur les défauts ponctuels. Comme on sait, grâce à la microscopie
électronique, que les fautes d'empilement induites par l'oxydation sont de nature "extrinsèque" (dues à un excès d'auto-
interstitiels), il en découle que l'oxydation injecte des auto-interstitiels dans le silicium et que la diffusion du bore, du
phosphore et de l'arsenic est assistée, au moins partiellement, par les auto-interstitiels (mécanisme schématisée sur la
figure 4.7). De plus, par le biais de la recombinaison entre les défauts, une sursaturation d'auto-interstitiels induit néces-
sairement une sous-saturation de lacunes, ce qui explique le ralentissement de la diffusion de l'antimoine dont la diffu-
sion, à cause de sa taille, est presque exclusivement lacunaire. Cependant, comme la diffusion des autres dopants peut
également être retardée par l'oxydation, il est maintenant admis que la diffusion des dopants est assistée par les deux
types de défauts ponctuels, lacunes et auto-interstitiels, l'apparition de l'OED ou de l'ORD dépend simplement de l'im-
portance relative de chacun des mécanismes pour le dopant considéré et du taux de sur-saturation d'auto-interstitiels (ou
de sous-saturation de lacunes) propre à chaque condition expérimentale.

3.2. Modélisation

3.2.1. Diffusion "normale"

Tant que les caractéristiques expérimentales observées sur les profils de diffusion ne mettent pas en jeu de défauts
hors-équilibre, il est possible de modéliser la diffusion des dopants simplement à l'aide des mécanismes décrits précé-
demment. En particulier, les profils aux concentrations inférieures à la densité de porteurs intrinsèques se décrivent
parfaitement à partir de la deuxième loi de Fick avec un coefficient de diffusion constant. Ce coefficient est appelé
coefficient de diffusion intrinsèque et est habituellement noté Di. La variation de ces coefficients intrinsèques avec la
température est reportée sur la figure 4.4 et les valeurs correspondantes des énergies d'activation et des termes pré-
exponentiels sont données dans le tableau I pour les dopants usuels. Ces valeurs représentent la moyenne de différentes
sources expérimentales [réf. 19 et références incluses].

Tableau I : Diffusion intrinsèque


Dopant D0 (cm2s-1) Q (eV)
P 3,19 3,66
As 31,65 4,14
B 2,64 3,60

Les effets liés à la modulation de la position du niveau de Fermi (variation de D avec le dopage, champ électrique
induit, cf. § 4.2.3) sont suffisants pour rendre compte de ce qui se passe aux concentrations plus élevées, tant qu'il n'y a
pas injection de défauts hors-équilibre. Cette modélisation simplifiée est donc assez bien adaptée pour l'arsenic et le
bore dans une vaste gamme de conditions expérimentales. On arrive alors à des expressions du coefficient de diffusion
effectif de la forme :
D. Mathiot 20/27

 n 
DAs = h D0 + D − ( )  [43]
 ni 

 p 
DB = h D 0 + D + ( )  [44]
 ni 

où h est le facteur d'accélération dû au champ électrique induit (équations 41 ou 42) et D0, D-, D + représentent les
contributions individuelles des différents états de charge des défauts. Dans les conditions intrinsèques (n=p=ni, et h=1)
ces équations se ramènent à :

pour As : Di = D0 + D- [45]

pour B : Di = D0 + D+ [46]

de sorte que les coefficients de diffusion effectifs peuvent se mettre finalement sous la forme couramment utilisée :

1 + β − (n / ni )
DAs = h Di [47]
1+ β −
et
1 + β + ( p / ni )
DB = h Di [48]
1+ β +

où les β représentent le poids relatif de la contribution à la diffusion des défauts chargés, par rapport à celle des défauts
neutres.
Enfin, pour être complet, signalons que pour simuler la diminution du coefficient de diffusion effectif aux plus for-
tes concentrations d'arsenic, associée à l'existence d'une proportion non négligeable d'arsenic électriquement inactif, il
est nécessaire d'admettre l'existence de défauts complexes, neutres et immobiles, incluant plusieurs atomes d'arsenic.
Ceci se traduit par un terme supplémentaire dans l'expression du coefficient de diffusion effectif. Par exemple, si on
considère le complexe As2V, souvent envisagé, associant deux atomes d'arsenic à une lacune [13], on obtient :

1 + β − (n / ni ) Di
DAs = h − [49]
1+ β 1 + KCV [A s+ ]

où K est la constante de loi d'action de masse de la réaction de formation du complexe immobile.


Pour pouvoir décrire l'influence de l'oxydation, il faut en outre introduire les perturbations sur les populations de dé-
fauts ponctuels. En tenant compte du fait que les coefficients de diffusion sont proportionnels à la concentration de
défaut ponctuel servant de véhicule à la diffusion, pour des impuretés comme les dopants dont la diffusion est assistée
par les deux types de défauts on peut exprimer le coefficient de diffusion effectif en condition oxydante (ou plus géné-
ralement en présence d'une perturbation homogène des populations de défauts ponctuels), et pour des faibles concentra-
tions de dopants (conditions intrinsèques), sous la forme :

CI CV
Diox = fI Di * + (1 − f I )Di [50]
CI CV*

Dans l'équation précédente CI et CV sont les concentrations d'auto-interstitiels et de lacunes, les astérisques indiquant
les valeurs d'équilibre thermique, et fI représente le poids relatif du mécanisme assisté par les auto-interstitiels pour la
diffusion intrinsèque (0 < fI < 1). Les valeurs de fI pour chacun des dopants, et donc la nature du défaut assistant préfé-
rentiellement leur diffusion, a été longtemps l'objet d'une controverse. Cependant des résultats récents obtenus par le
D. Mathiot 21/27

groupe de l'université de Stanford (USA) [20] permettent maintenant de conclure sans ambiguïté que, aux alentours de
1000°C, la diffusion du bore et du phosphore est assistée presque exclusivement par les auto-interstitiels (fI > 0,97), que
celle de l'antimoine est presque purement lacunaire (fI < 0,02), l'arsenic ayant une situation intermédiaire avec une
contribution significative des deux types de défauts (0,35 < fI < 0,55).
On pourrait croire que pour modéliser l'influence de l'oxydation en conditions extrinsèques (fortes concentration de
dopants) il suffit de remplacer dans les équations (47) ou (48) le coefficient de diffusion intrinsèque D i par la valeur
donnée par l'équation (50) en intégrant l'ensemble des états de charge dans les concentrations de défauts ponctuels. Bien
que cette approche ait été parfois utilisée, elle fait l'hypothèse implicite que le poids relatif des mécanismes lacunaires
ou assistés par les auto-interstitiels (c'est à dire la valeur de fI) n'est pas affecté par le dopage. Ceci n'est a priori pas
justifié, dans la mesure où les niveaux profonds introduits par chacun des défauts ne sont pas les mêmes. Des indica-
tions expérimentales semblent d'ailleurs indiquer que l'amplitude relative de l'OED dépend du niveau de dopage [21,
22].
On voit là un exemple de limitation de la description de la diffusion des dopants en terme de coefficients de diffu-
sion effectifs. Malgré la complexité croissante introduite dans l'expression des coefficients de diffusion effectifs, ce type
d'approche ne permet pas de traduire totalement l'ensemble des couplages existant entre les défauts ponctuels et les
dopants, et il ne permet donc pas une interprétation rigoureuse des différentes "anomalies" de diffusion. Une modélisa-
tion correcte passe par la prise en compte explicite des mécanismes microscopiques. Ceci fait l'objet du paragraphe
suivant.

3.2.2. Diffusion "anormale" : diffusion par paires

Nous avons vu dans le paragraphe 4.3.1 qu'une caractéristique essentielle de la diffusion des dopants, particulière-
ment visible dans le cas du phosphore, est de causer la création de défauts ponctuels hors équilibre. Le mécanisme le
plus approprié pour en rendre compte a été initialement proposé par Yoshida [23] et Fair et Tsai [24] dans le contexte
d'une diffusion lacunaire. On sait maintenant que le mécanisme dominant est assisté par les auto-interstitiels [20], mais
le concept de base reste le même, et on le présentera donc ci-dessous indépendamment de la nature du défaut. En fait
une description complète passe par la prise en compte des deux types de défauts [19].
L'idée fondamentale de ce type de modèle est que, en raison d'une très forte énergie de liaison entre l'atome de do-
pant et les défauts ponctuels, c'est toujours le même défaut X (lacune ou auto-interstitiel) qui reste au voisinage d'un
atome de dopant donné (A) pour assurer ses sauts successifs. On peut alors considérer que l'on a une "paire" défaut /
dopant (AX) diffusant en tant que telle dans la matrice, et que la diffusion du dopant n'est due qu'à la migration de ces
paires AX. Notons, par exemple, que de tels complexes phosphore lacune (PV) sont observés expérimentalement dans
le silicium irradié et sont connus sous le nom de "centres E" [25]. Si l'on suppose que ces paires sont en équilibre local
avec les atomes isolés de dopants substitutionnels et les défauts libres, leur concentration est proportionnelle à celle de
dopant. Un gradient de dopants entraîne donc nécessairement un gradient de paires dopant / défauts et donc une diffu-
sion de ces paires sous l'effet de leur gradient. Le flux de paires vers l'intérieur de l'échantillon occasionne une aug-
mentation locale de la concentration de paires dans des zones à faible concentration de dopant libre, et donc un désé-
quilibre entre les diverses espèces. Afin de rétablir l'équilibre, une fraction des paires doit se dissocier pour libérer des
atomes de dopant substitutionnels. Dans le même temps cette dissociation entraîne une libération du défaut ponctuel
constitutif de la paire, et donc une génération de défauts libres hors équilibre. Lorsque la concentration de dopant est
élevée, la concentration de paires AX qui se dissocient est beaucoup plus importante que la concentration d'équilibre
thermique des défauts libres et on a donc création d'une forte sursaturation locale de défauts libres.
Comme les monocristaux de silicium sont de très bonne qualité cristalline, il n'existe quasiment pas de sites d'anni-
hilation pour ces défauts hors-équilibre, qui peuvent donc diffuser loin dans le volume du cristal, ce qui explique la
grande portée de l'accélération de la diffusion associée à la présence de ces défauts en sursaturation. Cependant, une
forte proportion des défauts libérés va diffuser vers la surface de l'échantillon où ils vont s'annihiler. Au premier ordre
on peut considérer la surface comme un "puits" parfait qui maintient en permanence à cet endroit l'équilibre thermique
des concentrations de défauts libres. La sursaturation en volume s'accompagne donc d'un flux important de défauts
ponctuels en direction de la surface. A cause du fort couplage entre les défauts et les atomes de dopant, par l'intermé-
diaire des paires AX, ce flux de défauts entraîne avec lui une proportion non négligeable d'atomes de dopants, créant
D. Mathiot 22/27

ainsi une contribution négative au flux total d'impuretés, ce qui explique l'apparition de l'inflexion dans les profils de
phosphore avec la zone à fort gradient en surface (cf. figure 10a) [26].
Pour bien comprendre ce qui se passe, il est pour une fois plus simple de passer par la transcription mathématique du
modèle. Par soucis de simplification, on néglige ici toute influence des états de charges et autres effets de champ induit
pour se focaliser sur la spécificité de la diffusion par paire. On considère donc une impureté A formant des paires sta-
bles et mobiles par réaction avec un défaut ponctuel X suivant la réaction :

A+ X ↔ AX [51]

La concentration de paires, dans l'hypothèse de l'équilibre local, est alors liée à celles de dopant substitutionnel et de
défaut libre par :

[A X] = K[ A][X] [52]

Si on fait l'hypothèse que seules les paires sont mobiles, le flux total de dopant est égal à celui des paires, soit :

∂ [AX]
J A = J AX = −DAX [53]
∂x

où DAX est le coefficient de diffusion de la paire AX. Par dérivation de la relation (52), on obtient donc :

∂ [A] ∂ [X]
J A = −DAX K[X] − DAX K[A] [54]
∂x ∂x

Cette équation met en évidence un terme d'entraînement tout à fait analogue à celui créé par le champ électrique
quand on considère l'influence des états de charges (c'est à dire la formation de "paires" dopants / électrons"), le gra-
dient de concentration de défauts jouant ici un rôle équivalent au gradient de porteurs (champ électrique). Une factori-
sation de la relation précédente permet de la mettre sous la forme de la première loi de Fick reliant le flux de A à son
gradient de concentration, avec un coefficient de diffusion effectif donné par :

 [A] ∂ [X] / ∂ x 
Deff
A = DAX K[X]1+ [ X] ∂[A] / ∂ x  [55]
 

Le terme avant la parenthèse est le coefficient de diffusion effectif accessible par les modèles classiques et on re-
trouve bien la proportionnalité à la concentration en défauts libres qui rend correctement compte de l'accélération (ou du
ralentissement) de la diffusion en présence d'une sursaturation (ou sous-saturation) de défauts. Par contre la relation
(55) met nettement en évidence le couplage supplémentaire par l'intermédiaire des gradients de défauts ponctuels, qui
seul permet une description correcte des observations expérimentales. En particulier, pour les prédépôts de phosphore, il
est clair qu'à cause de la recombinaison des défauts à la surface de l'échantillon, les gradients de défaut et de dopant sont
de signes opposés dans la région superficielle. Le terme correspondant dans la parenthèse de la relation (55) induit donc
une contribution négative au coefficient de diffusion effectif, ce qui explique l'apparition de l'inflexion sur les profils.
On verra plus loin que seule la prise en compte de ce couplage par les gradients de défauts (entraînement par le "vent"
de défauts ponctuels) permet d'expliquer des "anomalies" de diffusion ayant des conséquences notables sur le compor-
tement électrique des composants.
Une modélisation correcte de la plupart des observations expérimentales concernant les prédépôts de dopants est
faisable à partir du concept de diffusion par paires, à condition de prendre en compte les deux types de paires, dopant /
lacune et dopant / auto-interstitiel, et de tenir convenablement compte des effets d'états de charge des différentes
espèces en jeu et du champ électrique induit. Les simulations correspondantes passent alors par la résolution simultanée
des équations de continuités pour le dopant et les deux types de défauts ponctuels, couplées entre elles par des termes de
génération / recombinaison correspondant à la formation / dissociation des paires et à la recombinaison entre lacunes et
auto-interstitiels. La présentation complète de ces simulations sort du cadre de cet exposé et le lecteur intéressé pourra
se reporter à la référence [19].
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Cependant le modèle présenté ci-dessus ne permet en aucun cas


de modéliser l'apparition du plateau aux très fortes concentrations de
phosphore, correspondant à une accélération très forte de la diffu-
sion. Au contraire, dans le cadre du modèle de diffusion par paires
seules, plus la concentration de dopant est importante, plus le cou-
plage par les gradients est accentué, et donc plus l'inflexion devrait
être marquée [26]. Un autre mécanisme de diffusion doit donc inter-
venir pour les concentrations supérieures à 2-3x1020 cm-3. Ceci est
dû au fait que, dans ce domaine de concentration, les paires phos-
phore / lacune (PV) ne peuvent plus être considérées comme des
entités isolés pendant tout leur cycle de diffusion [27]. Pour com-
prendre le mécanisme de diffusion de ces paires PV, considérons la
figure 4.15a qui représente une telle paire dans le réseau du silicium
: une lacune est située en (1) au voisinage immédiat d'un atome de
phosphore substitutionnel. Tant que la lacune et l'atome de phos-
phore échangent alternativement leurs sites il n'y a pas déplacement
macroscopique du phosphore. Pour qu'un tel déplacement ait lieu, il
est nécessaire que la lacune vienne jusqu'au site (1') en passant suc-
cessivement par les sites (2), (3) et (2'), puis s'échange finalement
avec l'atome de phosphore. Cette séquence peut ensuite se repro-
duire sur l'un des autre hexagones gauches entourant le phosphore,
assurant ainsi le diffusion macroscopique de la paire PV. On voit
donc que pour pouvoir diffuser, la paire PV doit se dissocier par-
tiellement : le point col correspond à la lacune en position de troi-
sième voisin par rapport au phosphore substitutionnel. Si la concen-
tration en phosphore est suffisamment faible, l'énergie de liaison
Figure 4.15. Diffusion de la paire PV. résiduelle assure la cohérence de la paire PV et la lacune reste liée à
(a) faibles concentrations de phosphore. (b) l'atome de phosphore considéré. Supposons maintenant que la
très fortes concentrations de phosphore concentration d'atomes substitutionnels est assez élevée pour que
l'on ait la situation schématisée sur la figure 4.15b (pour des raisons
de simplicité, on a représenté un réseau hexagonal bidimensionnel,
mais le raisonnement reste vrai pour le réseau du silicium) : une paire PV est formée par l'association d'une lacune V et
d'un atome d'impureté P1, mais un second atome P2 (ou P2') se trouve en position de cinquième voisin par rapport à P1.
Dans ce cas, le site (3), en position de troisième voisin par rapport à P1, est aussi en position de deuxième voisin (2') par
rapport à P2. Le système a donc la même énergie, que la lacune soit dans ce site ou dans le site (2), et cette lacune peut
donc diffuser directement de P1 à P2 avec une barrière de potentiel plus faible que celle existant pour la diffusion d'une
paire PV isolée.
Considérons le "réseau" des atomes de phosphore dans la matrice de silicium. Deux atomes de phosphore sont
considérés connectés par un chemin de diffusion lacunaire facile s'ils se trouvent en position de cinquièmes voisins ou
plus proche dans le réseau de silicium. En reliant de cette façon les atomes substitutionnels, on produit des amas dans
lesquels les lacunes peuvent se déplacer avec une grande mobilité. Bien que ce réseau de cinquièmes voisins ne soit pas
un réseau régulier, il est évident que, pour des concentrations d'impureté suffisamment élevées, des amas de grande
dimension peuvent être obtenus et on s'attend à des phénomènes de percolation [28] : pour des concentrations dépassant
un seuil C*, un amas "infini" d'atomes de phosphore en position de cinquièmes voisins les uns par rapport aux autres
existe à travers le réseau de silicium. A l'intérieur de cet amas, les lacunes peuvent se déplacer librement d'un atome
d'impureté à l'autre et cette diffusion accélérée des lacunes induit une accélération de la diffusion du dopant par un mé-
canisme de diffusion lacunaire classique (figure 4.6).
Des estimations géométriques simples permettent de montrer que le seuil de percolation sur le "réseau" des cin-
quièmes voisins est de l'ordre de quelques 1020 cm–3. On voit donc que le plateau apparaissant sur les profils de prédépôt
de phosphore s'explique aisément par ce phénomène de percolation. Facilement observable dans le cas du phosphore, à
cause de la forme caractéristique des profils, ce phénomène est tout à fait général et se produit pour les autres dopants si
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la concentration excède la concentration seuil. Dans le cas de l'arsenic il est plus difficilement observable à cause de la
formation des complexes immobiles, de sorte que les profils expérimentaux sont le résultat d'un compromis entre les
deux mécanismes [29]. Pour le bore, le phénomène de percolation n'est pas habituellement observable pour les condi-
tions standard de diffusion, car la limite de solubilité de cette impureté est inférieure au seuil de percolation; par contre
ces phénomènes peuvent probablement jouer un rôle pour les conditions hors-équilibre correspondant à l'introduction de
très fortes doses par implantation ionique, comme c'est de plus en plus souvent la cas dans les technologies modernes de
fabrication de circuits intégrés. Des calculs théoriques récents par la méthode de Monte Carlo confirment par ailleurs le
bien fondé du modèle de percolation en mettant en évidence un comportement coopératif créant une très forte augmen-
tation de la composante lacunaire pour des concentrations de dopants excédant quelques 1020 cm-3 [30, 31]. Il faut par
ailleurs bien réaliser que l'accélération de diffusion s'applique aussi à toute autre espèce substitutionnelle présente dans
le matériau, même en faible concentration, à partir du moment où la percolation est induite par une forte concentration
de phosphore, ou autre impureté substitutionnelle ayant une forte interaction avec les lacunes, comme cela est mainte-
nant bien établi expérimentalement [32].

3.3. Exemples de problèmes d'ingénierie associés

3.3.1. Jonctions fines et diffusion transitoire

Un des problèmes majeurs auquel sont confrontés les


technologues est la réalisation de jonctions ultra fines, de
profondeurs bien inférieures à 100 nm pour les composants
très fortement sub-microniques (de longueur de grille infé-
rieure à 0,1 µm). Le problème est particulièrement marqué
pour les jonctions P/N réalisées par implantation ionique de
bore. En effet les recuits nécessaires à l'activation du dopant
s'accompagnent d'une redistribution anormalement élevée du
profil de dopant. Ce phénomène est illustré sur la figure 4.16
(d'après réf.33) montrant l'évolution au cours de recuits à
950°C de profils de bore implanté dans Si. Cette figure met
nettement en évidence une forte redistribution du profil après
un recuit de 10 secondes. Une telle redistribution correspond
à un coefficient de diffusion effectif dépassant de plusieurs
ordres de grandeur la valeur d'équilibre. Par contre, on voit
que le profil reste inchangé pour des recuits ultérieurs (le
profil à 30 s est presque identique à celui de 10 s), jusqu'au
Figure 4.16. Diffusion accélérée transitoire du moment où, pour des durées nettement plus élevées, on re-
bore implanté trouve la diffusion thermique normale (profil à 20 minutes).
Ces résultats, confirmés par de nombreuses autres études,
montrent que cette accélération de la diffusion est un phéno-
mène transitoire. La durée de ce transitoire dépend de la température de recuit, avec une énergie d'activation proche de
celle de l'auto-diffusion (environ 4,5 – 5 eV) [34].

Compte tenu de son immense impact techno-logique, ce phénomène est étudié par de nom-breux auteurs et il est
maintenant bien établi que cette diffusion accélérée est associée aux auto-interstitiels créés par l'implantation ionique
qui ont survécu à la recom-binaison directe avec les lacunes. En particulier de nombreux auteurs ont noté une corréla-
tion entre la diffusion transitoire et un certain type d'amas d'interstitiels, les défauts "{113}", dont la dissolution au
cours des recuits semblait être la source d'auto-interstitiels induisant la diffusion transitoire [35]. Cependant, des phé-
nomènes de diffusion transitoire ont également été observés en absence de défauts {113} [36], de sorte que le phéno-
mène est probablement plus complexe. En fait les études les plus récentes semblent indiquer que la diffusion transitoire
est bien le résultat de la sursaturation d'auto-interstitiels créés par l'implantation, mais qu'il y a ensuite compétition entre
l'exodiffusion des défauts vers la surface où ils s'annihilent, leurs couplages avec le bore, et la nucléation puis l'évolu-
D. Mathiot 25/27

tion des amas d'interstitiels, différents types d'amas (simples agrégats, {113}, fautes d'empilements parfaites ou fautées)
entrant en compétition les uns avec les autres [37].
Une simulation prédictive de la diffusion accélérée transitoire, indispensable au technologue, passera donc par l'ad-
dition de termes de génération / recombinaison dans les équations de continuité des dopants et des défauts capables de
décrire les évolutions mentionnées. Compte tenu de la complexité des phénomènes physiques à prendre en compte, des
modèles complets permettant ce type de modélisation ne sont pas encore disponibles et font l'objet de recherches inten-
ses. Ce qui est sûr, c'est qu'ils s'appuieront nécessairement sur un modèle qui, à la base, est capable de décrire les cou-
plages entre les dopants et les défauts ponctuels, comme celui présenté ci-dessus (§ 4.3.2.2).

3.3.2. Effet canal court inverse

Cet exemple est donné pour illustrer l'importance technologique que représentent les phénomènes de couplage diffu-
sionnel par le biais des gradients de défauts pour l'optimisation des composants fortement sub-microniques. Rappelons
que la tension de seuil d'un transistor MOS, contrôlée entre autre chose par la concentration du dopant présente dans la
zone de canal située juste sous l'oxyde de grille, évolue avec la longueur du dispositif. Des considérations d'ordre pure-
ment électrostatique impliquent que cette tension de seuil, toutes choses égales par ailleurs, doit diminuer avec une
diminution de la longueur du MOS. Ceci est dû au fait que les largeurs des zones de déplétion induites par les jonctions
de drain et de source ne sont plus négligeables devant la longueur du MOS, de sorte que la quantité de porteurs du
substrat à "évacuer" par la polarisation de grille est réduite pour les dispositifs de petite dimension. Par contre, les ré-
sultats expérimentaux montrent dans la plupart des cas une augmentation de la tension de seuil avec une réduction de la
longueur de grille, avant la chute naturelle attendue. Cet "effet de canal court inverse" (RSCE, de l'anglais reverse short
channel effect) ne peut s'expliquer qu'en considérant des perturbations du profil de dopage du canal induites par l'étape
de fabrication des sources / drains [38].
En effet ces jonctions sont fabriquées par implantation ionique de dopant (As pour un N-MOS) à forte dose, suivie
d'un recuit d'activation. Pendant ce recuit d'activation, les auto-interstitiels en excès introduits par l'implantation évo-
luent d'une façon complexe, comme décrit précédemment. Ceci étant, la longueur de diffusion des défauts libres est
relativement importante, de sorte que la sursaturation d'interstitiels s'étend sur des distances dépassant très largement les
zones de jonction. Il y a en particulier une injection très forte de défauts jusque dans la zone de canal, où ils vont induire
des effets non négligeables sur les atomes de dopant présents (bore pour un N-MOS).

(a) (b)
Concentrations

Concentration en bore

interstitiels
Bore initial

δL
Bore final

0 profondeur 0 distance de la jonction source L

Figure 4.17. Coupe schématique des profils de dopants et de défauts dans la zone de canal au cours du recuit d'activation des jonc-
tions implantées. (a) coupe verticale au voisinage de la jonction source. (b) coupe longitudinale au voisinage de l'interface avec
l'oxyde de grille.

Considérons une coupe verticale du dispositif en un point d'abscisse z le long du canal (cf. figure 4.17.). Dans le
volume il y a une sursaturation d'interstitiels en provenance des zones de source et drain, alors que la surface maintient
la concentration d'équilibre thermique, et il y a donc un fort gradient de défauts entre le volume et la surface. Ce gra-
dient induit nécessairement une diffusion des atomes de bore vers la surface (§ 4.3.2.2, équation 54), de sorte que même
D. Mathiot 26/27

si le profil de bore est initialement plat, le profil final montrera une accumulation de bore à la surface (figure 4.18a).
Cependant le taux de sursaturation d'auto-interstitiels en provenance des zones de source et drain varient avec z le long
du canal, et l'intensité du phénomène varie donc le long du canal. On aboutit ainsi à une répartition inhomogène du
profil de la concentration de bore, comme schématisé sur la figure 4.18b montrant une coupe longitudinale le long du
canal, au voisinage de l'interface. A l'aide de cette figure on comprend aisément l'apparition de l'effet de canal court
inverse. Si le canal est suffisamment long, la distance (δl) affectée par la perturbation latérale de la concentration en
bore est négligeable, la concentration moyenne de dopant dans le canal n'est pas changée, et la tension de seuil n'est pas
affectée. Par contre, avec la diminution de la taille du dispositif, toutes choses égales par ailleurs, cette zone de transi-
tion n'est plus négligeable, et le dopage moyen du canal augmente, entraînant l'augmentation de la tension de seuil
comme observé expérimentalement.

4. Conclusion

Tout au long de cet exposé l'accent a été mis sur la nécessité, pour une modélisation correcte de la diffusion des do-
pants dans le silicium, de prendre en compte des phénomènes de couplages de plus en plus complexes entre les atomes
de dopant et les défauts ponctuels du matériau. En particulier, les deux derniers exemples montrent l'extrême impor-
tance que jouent ces phénomènes de couplages dans la détermination des profils de dopants réels à l'intérieur de la
structure des dispositifs.
De plus, il est évident qu'avec la réduction systématique de la taille des composants, une simple description uni-
dimentionnelle n'est plus suffisante, les simulations 2D, ou même 3D, devenant indispensables pour une description des
réalités expérimentales (l'effet canal court inverse en est un exemple typique). On comprend donc pourquoi l'optimisa-
tion des composants élémentaires est de plus en plus exigeante en ce qui concerne la modélisation de la diffusion des
dopants, afin d'avoir des outils prédictifs fiables dans le domaine de la simulation technologique.

Références

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