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MEDICAMENTS ET PRATIQUE MEDICALE

Vie et utilisation des médicaments

J. DANGOUMAU

Dépôt légal - 4e trimestre 1998


Tous droits de reproduction réservés (article 40 de la loi du 11 mars 1957)
Copyright ISBN N° 2 - 909176 - 16-9
Département de Pharmacologie
Hôpital Pellegrin - Université Bordeaux 2
33076 Bordeaux Cedex

Faculté de Médecine de Strasbourg, Module de Pharmacologie Générale DCEM1 2005/2006 1


« Médicaments et pratique médicale – Vie et utilisation des médicaments » - Pr. J Dangoumau, Université de Bordeaux 2
Dépôt légal : 1998
Chapitre 14-1
ADMINISTRATION ET REGLEMENTATION

1. QU'EST CE QU'UN MEDICAMENT ?

1.1. La définition réglementaire

Elle résulte de deux textes presque identiques :


– la directive de l’Union Européenne 349/65 CEE qui s'impose aux Etats Membres;
– l'Article L.511 du Code de la Santé Publique qui la reprend, mais l'étend par assimilation à d'autres produits.

"On entend par médicament toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou
préventives à l'égard des maladies humaines ou animales, ainsi que tout produit pouvant être administré à l'homme
ou à l'animal en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions
organiques".

(bien évidemment le cours de pharmacologie médicale ne se préoccupe pas des médicaments vétérinaires).

Les médicaments englobent donc les produits pour "soigner", ceux pour prévenir les maladies (vaccins, par
exemple), les agents de diagnostic in vivo (produits de contraste, par exemple), et des substances administrées en
dehors de toute pathologie pour modifier des fonctions organiques (contraceptifs, par exemple).
Sont, de plus, en droit français, assimilés à des médicaments, c'est-à-dire relevant de la même réglementation :
– les produits cosmétiques ou produits d'hygiène contenant des substances vénéneuses;
– les produits diététiques qui renferment des substances ne constituant pas elles-mêmes des aliments, mais dont la
présence confère des propriétés spéciales recherchées en thérapeutique diététique ou en faisant des repas
d'épreuve.

1.2. Les principes

On distingue trois approches permettant de dire si un produit est un médicament :


– le médicament par présentation, notion essentielle. Est médicament, ce qui est "présenté" au public comme étant
destiné à traiter une maladie. C'est la revendication du fabricant qui fait le médicament. Bien évidemment cette
revendication doit être validée en raison du risque de charlatanisme;
– le médicament par fonction résulte des qualités intrinsèque du produit et des effets qu'il provoque sur
l'organisme. Ces propriétés doivent, bien sûr, être vérifiées. Au delà des effets sur les processus
physiopathologiques, ce principe étend la notion de médicament au diagnostic et aux modifications des fonctions
organiques;
– le médicament par composition est exclu par la définition. La présence d'une substance déterminée ne suffit pas à
qualifier le produit de médicament (par exemple : l'eau oxygénée n'est pas un médicament en soi; elle l'est en
tant qu'antiseptique, elle ne l'est pas en tant que produit capillaire).

1.3. Les frontières et les difficultés

Les frontières du médicament avec les cosmétiques et les produits diététiques sont en général claires, car ceux ci
sont eux-mêmes définis par la réglementation. Par contre, elles sont beaucoup plus floues avec des produits
présentés comme "compléments alimentaires", notion n'ayant pas de définition reconnue. Elle l'est encore plus avec
les produits présentés comme "bénéfiques pour la santé", la remise en forme, l'hygiène, etc., car on est là à la
frontière entre la pathologie, le bien-être, le confort et l'hygiène usuelle. Il n'est donc pas étonnant que des conflits
apparaissent, car la santé est un vaste marché dont le médicament n'est qu'une partie. Mais le déplacement de la
frontière a de graves conséquences économiques : selon qu'un produit est ou non un médicament, il peut être vendu
en pharmacie ou en grandes surfaces. Des conflits juridiques opposent donc pharmaciens et distributeurs, à propos
notamment des antiseptiques et des vitamines. La jurisprudence française et européenne a maintenu ces produits
dans le cadre des médicaments. Mais d'autres en ont été sortis : c'est ainsi que la Cour de Justice Européenne a
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estimé que la présence de menthol et camphre dans les pastilles VALDA et PULMOL ne suffisait pas à en faire un
médicament, car en quantité insuffisante par rapport au sucre et aux aromatisants.

Certains ont essayé de contourner la réglementation pharmaceutique en ne revendiquant pas d'effet dans les
maladies ou en les revendiquant dans des prospectus ou livres indépendants du conditionnement du produit (plantes,
vitamines). Ces procédés ont été généralement condamnés par les tribunaux. La jurisprudence se fonde sur un arrêt
de la cour de justice européenne (arrêt Van Bennekom) qui dit qu'un produit est un médicament "... chaque fois qu'il
apparaît, de manière même implicite mais certaine, aux yeux d'un consommateur moyennement avisé, que le dit
produit devrait, eu égard à sa présentation, avoir un effet tel...".

1.4. Typologie
L'Article L 511-1 du Code de la Santé Publique donne les définitions de 11 types de médicament.

1° Préparation magistrale, tout médicament préparé extemporanément en pharmacie selon une prescription destinée
à un malade déterminé;
2° Préparation hospitalière, tout médicament préparé sur prescription médicale et selon les indications de la
pharmacopée en raison de l'absence de spécialité pharmaceutique disponible ou adaptée, dans la pharmacie à
usage intérieur d'un établissement de santé et destiné à être dispensé à un ou plusieurs patients dans ledit
établissement;
3° Préparation officinale, tout médicament préparé en pharmacie selon les indications de la pharmacopée et destiné
à être dispensé à un ou plusieurs patients approvisionnés par cette pharmacie;
4° Produit officinal divisé, toute drogue simple, tout produit chimique ou toute préparation stable décrite par la
pharmacopée, préparés à l'avance par un établissement pharmaceutique et divisés soit par lui, soit par la
pharmacie d'officine qui le met en vente, soit par une pharmacie à usage intérieur;
5° Spécialité pharmaceutique, tout médicament préparé à l'avance, présenté sous un conditionnement particulier et
caractérisé par une dénomination spéciale (tout médicament n'est donc pas une "spécialité". Bien noter les 3
critères qui font la spécialité : la fabrication en série, industrielle; le conditionnement, boitage, notice…; le nom
de marque, déposé, commercial (nom de fantaisie));
6° Médicament immunologique, tout médicament consistant en :
a) allergène, défini comme tout produit destiné à identifier ou provoquer une modification spécifique et acquise
de la réponse immunologique à un agent allergisant;
b) vaccin, toxine ou sérum, définis comme tous agents utilisés en vue de provoquer une immunité active ou
passive ou en vue de diagnostiquer l'état d'immunité;
7° Médicament radiopharmaceutique, tout médicament qui, lorsqu'il est prêt à l'emploi, contient un ou plusieurs
isotopes radioactifs, dénommés radionucléides, incorporés à des fins médicales;
8° Générateur, tout système contenant un radionucléide parent déterminé servant à la production d'un
radionucléide de filiation obtenu par élution ou par toute autre méthode et utilisé dans un médicament
radiopharmaceutique;
9° Trousse, toute préparation qui doit être reconstituée ou combinée avec des radionucléides dans le produit
radiopharmaceutique final;
10° Précurseur, tout autre radionucléide produit par le marquage radioactif d'une autre substance avant
administration;
11° Médicament homéopathique, tout médicament obtenu à partir de produits substances ou compositions appelés
"souches homéopathiques" selon un procédé de fabrication homéopathique décrit par la pharmacopée
européenne ou à défaut par les pharmacopées actuellement utilisées de façon officielle dans un Etat Membre.

On utilise essentiellement les spécialités pharmaceutiques et les médicaments immunologiques. Les préparations
magistrales sont tombées en désuétude, sauf exception, notamment en dermatologie. Les préparations hospitalières
licites ne se sont pas développées, car le formulaire n'a pas vu le jour. Les quatre dernières catégories concernent les
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radio-isotopes. Certaines pharmacies fabriquent encore des préparations officinales, tandis que les produits
officinaux divisés sont préparés industriellement.

2 L’ADMINISTRATION DU MEDICAMENT

2.1. En France

Le ministère de la Santé a une compétence générale au point de vue réglementaire et sanitaire. Il est le garant de la
Santé Publique. D’une manière plus particulière dans le domaine du médicament, il est directement en charge de sa
distribution (grossistes et pharmacies). L’administration centrale compétente est la Direction Générale de la Santé
(DGS).

L’Agence de Sécurité Sanitaire (ou AFSSAPS - Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé -
remplaçant l’Agence du Médicament depuis 1999) a des compétences techniques d’enregistrement, de contrôle et
d’inspection. Elle est en charge notamment des autorisations de mise sur le marché (AMM) et de la
pharmacovigilance des médicaments, des autorisations et de la surveillance des établissements de fabrication, du
contrôle des essais et de la publicité. Elle a une mission de police sanitaire en matière de pharmacie (hors les
officines). Elle s’appuie sur les avis de nombreuses commissions d’experts.
L’Agence est un établissement public à caractère administratif, jouissant de l’autonomie budgétaire et de gestion,
sous la tutelle ministérielle. Elle est administrée par un Conseil d’Administration (Etat, personnel, personnalités) et
dirigée par un Directeur Général.

Le ministère de l’Emploi et de la Solidarité a une compétence en matière de protection sociale et d’assurance


maladie, notamment en ce qui concerne le remboursement des médicaments. L’administration centrale
correspondante est la Direction de la Sécurité Sociale (DSS).
Dans ce domaine, les caisses nationales gèrent l’assurance maladie dans un cadre d’objectifs définis annuellement
par le parlement et le gouvernement, et de conventions conclus avec les professions de santé.

La compétence économique est d’une manière générale assurée par le ministère de l’économie et des finances, et sa
Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes. Le ministère de
l’Industrie (Direction Générale des Stratégies Industrielles) est en charge des aspects proprement industriels.
Pour les médicaments remboursables, les conditions économiques de mise sur le marché et de remboursement sont
fixés par le Comité Economique du Médicament, organisme administratif qui rassemble les ministères concernés
(Santé, Affaires sociales, Economie, Industrie) et les caisses nationales.

Cette organisation administrative, qui date de 1993 dans sa forme actuelle, souffre de l’absence d’un maître
d’oeuvre administratif, ce qui rend plus difficile la conception et la coordination d’une politique du médicament.

2.2. Dans l’Union Européenne

Le médicament est entré dans le traité de Rome en tant que marchandise (libre circulation des biens). Il faut attendre
le traité de Maastrich pour voir une coordination des politiques sanitaires (“ la Communauté contribue à assurer un
niveau élevé de la santé humaine ”).
Il a fallu de nombreuses années pour passer de marchés pharmaceutiques nationaux cloisonnés à un marché unique
à travers un harmonisation réglementaire et technique. Aujourd’hui le marché est à ce point de vue totalement
harmonisé (les règles et les procédures sont identiques dans toute l’Union), ce qui ne veut pas dire qu’il soit
uniformisé, notamment en ce qui concerne l’économique et le social.
Les règles européennes visent essentiellement à la libre circulation des médicaments, à l’absence de duplication des
procédures administratives, à la validité des décisions administratives pour l’ensemble de l’Union et à la non
discrimination entre les fabricants selon leur origine nationale. En matière d’économie, l’Union n’intervient pas
dans la formation des prix (libres ou contrôlé), mais exige l’utilisation de critères économiques objectifs et connus
(directive “ transparence ”). La protection sociale (ici le remboursement des médicaments) reste de compétence
purement nationale.

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Une Agence Européenne du Médicament (ou EMEA), située à Londres, dispose d’une compétence technique en
matière d’autorisation de mise sur le marché et de pharmacovigilance. C’est un organisme d’évaluation. Les
décisions sont du ressort de la Commission de Bruxelles.
Celle-ci élabore la réglementation européenne, soumise au parlement européen et au conseil des ministres. Elle
bénéficie des avis de comités d’experts, pharmaceutique pour les questions techniques, de transparence pour les
économiques.
Les contentieux sont du ressort de la Cour Européenne de Justice qui siège à Luxembourg.

2.3. Le Conseil de l’Europe

Siégeant à Strasbourg, le Conseil de l’Europe dont la composition est plus large que celle de l’Union Européenne,
élabore la Pharmacopée Européenne dont les normes s’imposent aux états de l’Union.

3. LES ETAPES DE LA VIE D’UN MEDICAMENT

3.1. Le schéma

On distingue dans la vie du médicament différentes phases : la recherche qui aboutit à la découverte, le
développement (le développement préclinique, le développement clinique, le développement industriel et
pharmaceutique, le développement commercial et économique), l’enregistrement suivi de la commercialisation,
l’exploitation et les réévaluations, enfin la disparition. Ces phases sont largement intriquées et interdépendantes.
Pour un produit original international, une douzaine d’années séparent le début de la recherche de l’enregistrement,
dix mille substances ont été examinées pour une commercialisée, pour un coût d’environ 1 500 millions de francs.

3.2. La recherche et le développement (R&D)

On englobe classiquement sous le nom de R&D deux démarches différentes :


– la recherche comprend tout ce qui conduit au choix d'une substance susceptible de devenir un médicament;
– le développement comprend les études de toutes sortes qui font de cette substance en devenir, un médicament à
qui il ne manque que l'autorisation administrative pour pouvoir être utilisée en thérapeutique.
Il est souvent difficile de distinguer si un travail est une recherche, ou entre déjà dans le cadre du développement.
Aussi, très souvent les industriels et les économistes parlent de R. et D.

La R. et D. pharmaceutique est essentiellement assurée et autofinancée par l'industrie. La part de financement public
est inférieure à 1%. Encore que, l'industrie profite beaucoup des recherches académiques.
En 1994, en France, la R. et D. représentait en moyenne 13% du chiffre d'affaires (CA) des laboratoires, soit près de
13 milliards de francs (ce qui est considérable : l'industrie pharmaceutique occupe le troisième rang après
l'aéronautique et l'électronique, les pourcentages sont en règle beaucoup plus bas). Ce ratio est très variable entre les
firmes françaises (pouvant atteindre 25%) et les filiales étrangères (quelques pour-cent). Sa signification est diverse
: le rapport R/D est de l'ordre de 1/4 au moins et il faudrait savoir ce que l'on y met (il y a dans le développement
une part de marketing).
Le budget de R. et D. des grandes firmes internationales est de plusieurs milliards de francs par an. On a souvent
essayé de déterminer une "masse critique", mais c'est discutable. Pour exister mondialement, cependant, un milliard
par an paraît un minimum.

3.2.1. La recherche pharmaceutique


Il est classique de distinguer :
– la recherche fondamentale, au niveau des concepts, sans applications pratiques directes qui est le fait
d'organismes de recherche ou d'universités, sans but lucratif;
– la recherche appliquée, qui serait plus le fait de l'industrie et qui utilise les résultats de la recherche
fondamentale.
Les choses ne sont évidemment pas si simple et la frontière souvent difficile à tracer. Les deux types d'activité
peuvent se rencontrer au sein d'un même organisme ou même d'une équipe.
Il est certain par contre, que l'industrie pharmaceutique est d'autant plus partie prenante que la recherche est
appliquée. Elle aura tendance à utiliser, plutôt qu'à faire, la recherche "fondamentale" en orientant ses applications
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vers ses préoccupations. Elle fera ou fera faire, et fera d'autant plus que le caractère appliqué sera grand. Ceci
dépend aussi de la taille de la firme : plus elle est importante et plus la part fondamentale sera grande; les petites
firmes ne feront pas beaucoup, sinon pas du tout, de recherche.
Ainsi, la recherche pharmaceutique peut se faire :
– dans des centres propres et on discute depuis longtemps de leur taille, grande ou petite;
– par contrat avec les organismes publics de recherche;
– par accord avec des sociétés de recherche qui vendent à un stade plus ou moins élaboré leurs découvertes qu'elles
sont incapables de développer.

Pour les méthodes :


– longtemps cela s'est borné au criblage ("screening"), ... ou pêche à la ligne, consistant à synthétiser des milliers
de molécules et à les essayer sur une batterie de tests;
– actuellement plutôt par ciblage : à partir de concepts physiopathologiques, on cherche à intervenir sur un
récepteur, une enzyme..., et à "modéliser" la molécule selon l'interaction recherchée.
Ce qui est essentiel pour l'industriel, c'est la propriété industrielle, le brevet de produit (20 ans + jusqu'à 7 ans de
prolongation éventuelle).

3.2.2. Le développement
Le développement est une activité essentielle de l'industrie pharmaceutique. Il consiste à établir que la molécule
sélectionnée est capable de devenir un médicament utilisable en thérapeutique. Sa finalité est d'obtenir l'autorisation
administrative de mise sur le marché.
C'est une activité structurée, codifiée où comptent :
– la qualité du travail (normes, assurance de qualité);
– la rapidité (le temps, c'est de l'argent, il faut devancer les concurrents);
– la mondialisation (pouvoir accéder le plus vite possible au maximum de marchés).
Le développement laisse peu de place à l'imagination. C'est un art d'exécution. Les choix se posent à chaque étage,
lourds de conséquences financières : arrêter / continuer, dans quel ordre opérer, . ..

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3.2.2.1. Le développement industriel et pharmaceutique

Fabrication du principe actif : – couverte par des brevets de procédés, souvent en partie
par le secret industriel;
– fait en permanence l'objet d'une recherche
d'amélioration de productivité.

Production industrielle du principe actif : – pilote industriel suivi de changements d'échelle


successifs jusqu'à l'usine;
– il y a en règle une ou deux usines chimiques pour les
besoins mondiaux.

Détermination de la forme galénique : – parfois couverte par brevet;


– conditionne voie et rythme d'administration;
– recherche active, facteur de succès important.

Fabrication pharmaceutique : – usine pharmaceutique (souvent une par pays, mais en


voie de concentration en Europe);
– constituant en France un établissement pharmaceutique
(autorisation et inspection par l'Agence du
Médicament).

Contrôle du principe actif : – méthodes de détermination et d'analyse;


– nature des impuretés et taux maximum tolérés.

Contrôle du médicament fini : – méthodes d'analyse chimiques et / ou biologiques.

Essais de stabilité : – d'où découlent les conditions de conservation


(température ordinaire, réfrigérateur,...) et les dates de
péremption (en règle 3 ans).

Ce développement débouche :
– sur la construction d'usines chimiques et / ou pharmaceutiques;
– sur le dossier pharmaceutique de demande d'autorisation de mise sur le marché qui doit justifier de l'existence
d'une méthode d'analyse quantitative et qualitative, d'une méthode de fabrication et d'un procédé de contrôle de
nature à garantir la qualité de la fabrication en série.

3.2.2.2. Le développement préclinique


C'est la partie expérimentale in vitro et in vivo chez l'animal. Elle étudie la pharmacodynamie, la
pharmacocinétique, et les éventuels effets indésirables et toxiques. Le problème est évidemment celui de
l'extrapolation à l'homme. La décision de passer aux essais chez celui-ci est toujours extrêmement délicate. La
tentation peut être d'accumuler les données précliniques, mais on ne peut pas supprimer totalement l'incertitude, et
retarder indéfiniment est économiquement coûteux (investissements, diminution du temps d'exclusivité
commerciale), tandis que pour les produits innovants il n'est pas éthique de ne pas les mettre à la disposition des
patients le plus tôt possible.

– Pharmacodynamie : détermination des effets pharmacodynamiques sur des cellules, systèmes biologiques,
organes isolés, animal entier... à partir de quoi, on anticipe les effets intervenants en clinique. Les batteries de
tests sont validées et codifiées;
– Pharmacocinétique : détermination des paramètres pharmacocinétiques chez au moins deux espèces animales,
autant que possible métabolisant le produit comme l'homme;
– Toxicologie : recherche d'effets nocifs sur les systèmes biologiques et l'animal en fonction des doses, de manière
à anticiper les manifestations nuisibles chez l'homme :

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• toxicité aiguë : recherche de la mortalité animale due à une dose unique sert à déterminer la fourchette de
doses utilisables;
• toxicologie subaiguë et toxicité chronique : administration continue pendant quelques jours à quelques années
suivant le produit et la durée de son utilisation chez l'homme. Permet d'apprécier la tolérance d'un traitement
à terme. On étudie 3 doses chez au moins 2 espèces;
• toxicité locale : nocivité éventuelle suivant la voie retenue;
– Mutagenèse : effets du produit sur l'ADN. Il existe de multiples tests in vitro de mutagenèse;
– Cancérogenèse : recherche de l'apparition de tumeurs chez l'animal. Ces études sont longues (3 à 5 ans),
coûteuses, difficiles et leur fiabilité est loin d'être assurée. L'interprétation des résultats et leur extrapolation à
l'homme sont souvent difficiles. Ainsi, elles ne sont entreprises que si le produit appartient à une série chimique
suspecte, s'il est mutagène, s'il doit être utilisée de manière prolongée;
– Fonctions de reproduction : on étudie les effets du produit sur :
• la fertilité (nombre d'accouplements, résorption in utero...);
• la tératogenèse (malformations);
• les pathologies du foetus, l'accouchement et les troubles en néonatologie.
L'existence d'une toxicité particulière, de tests de mutagenèse, cancerogénèse ou tératogenèse positifs est à mettre en
balance avec l'intérêt thérapeutique potentiel du produit compte tenu des difficultés de transposition à l'homme. Les
décisions sont toujours délicates.
Le développement préclinique aboutit lorsqu'il est fructueux à la réalisation d'un "dossier pharmaco-toxicologique"
qui sera versé à l'appui de la demande d'A.M.M.

3.2.2.3. Le développement clinique


C’est la partie expérimentale chez l’homme. Inévitable (l’expérimentation animale ne permet que des prévisions) et
indispensable (on ne peut pas administrer un médicament dont on ne connaît pas les effets), il est fait d’études
appelées “ essais cliniques ”.

Ces essais relèvent d’une méthodologie stricte, internationalement reconnue, "les bonnes pratiques cliniques
(BPC)", qui assurent qu’ils sont scientifiques (c’est-à-dire mesurables et reproductibles) et éthiques. Ils sont l’objet
de contrôles des autorités de santé. C’est à ces conditions que leurs résultats sont crédibles et internationalisables.

Classiquement, on les répartit en trois phases successives :


– les essais de phase I : ce sont les premières administrations chez l’homme. Ils ont pour objectifs de déterminer
les effets toxiques dose-dépendants et la dose maximale tolérée. Ils concernent des volontaires sains, consistent
en l’administration unique de doses croissantes chez des sujets différents et ne sont autorisés qu’en des lieux
spécialisés et sous la responsabilité de médecins qualifiés;
– les essais de phase II : ce sont les premières administrations chez les malades. Ils ont pour objectifs d’abord de
mettre en évidence les effets pharmacodynamiques et la tolérance en administration unique ou de courte durée
(phase II précoce ou IIa), puis un éventuel effet thérapeutique et de déterminer la relation entre la dose et la
réponse afin d’en déduire la posologie optimale utilisable en clinique (phase II tardive ou IIb). Ils concernent des
volontaires malades;
– les essais de phase III sont destinés à prouver l’efficacité (ou la non efficacité) de la substance chez des malades
atteints de l’affection concernée. C’est la partie essentielle des essais cliniques, car elle est directement liée avec
l’utilisation thérapeutique; c’est elle qui convaincra d’abord les autorités d’enregistrement, puis les prescripteurs
(cf. chapitre 14.2.).

3.2.2.4. Le développement commercial et économique


Le médicament est aussi un bien de consommation. Comme tel, il a un coût et il est aussi une source de profit. Il
n’est donc pas étonnant que ce point de vue soit pris en compte au cours du développement :
– au niveau des choix : les études de marché, les prévisions de rentabilité interviennent dans les choix de voies de
recherche et de développement à chaque étape. Un produit non, ou trop peu, rentable (étroitesse du marché, prix
de revient, concurrence) sera abandonné, quelque soit son intérêt potentiel. Ceci concerne, par exemple, les
médicaments hors de la stratégie du laboratoire ciblée en règle sur quelques classes pharmaco-thérapeutiques (il
seront parfois revendus), les produits en autoconcurrence (sauf à la chute du brevet du premier produit), les
médicaments pour maladies rares (médicaments orphelins) ou pour populations non solvables.
Tout cela relève de stratégies économiques d’entreprise, en dehors de considérations sanitaires.
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– au niveau de la stratégie de lancement et de promotion, les pays et les marchés visés influeront au cours du
développement sur le choix des experts (leaders d’opinion), l’orientation des études vers des arguments
exploitables en promotion (indications, propriétés, comparaisons, etc.) ou la réalisation d’études cliniques ou
économiques susceptibles d’influencer les acheteurs.

3.3. L’enregistrement

Avant d’être commercialisée et prescrite, toute spécialité doit obligatoirement être enregistrée par l’autorité
compétente.

3.3.1. Les critères de l’enregistrement

Ils sont au nombre de trois, nécessaires et suffisants. Ils sont techniques et en aucun cas économiques :
– qualité pharmaceutique : le produit est fabriqué et contrôlé selon des normes, les bonnes pratiques de fabrication
(BPF), assurant que la qualité fixée dans le dossier pharmaceutique d'enregistrement est bien atteinte;
– efficacité : les essais cliniques prouvent que le produit a un intérêt thérapeutique (rend un service médical) dans
les indications revendiquées;
– sécurité : l'innocuité est assurée dans les conditions usuelles d’emploi (ce qui ne veut pas dire qu’il ne présente
aucun risque).

En fait, c’est le rapport entre le bénéfice escompté et les risques encourus qui est évalué; le risque acceptable
dépend de la gravité de l’affection traitée. Ce rapport bénéfice/risque résulte clairement d’une estimation, d’une
évaluation et non d’un calcul.

Ce qui importe pour l’enregistrement, c’est le bénéfice thérapeutique tel qu’il ressort des essais cliniques, et non les
propriétés pharmacodynamiques ou le mécanisme d’action.

3.3.2. L’autorisation de mise sur le marché (AMM)

L’autorisation de mise sur le marché (AMM) est obligatoire pour toute spécialité pharmaceutique préalablement à
sa commercialisation. C’est un acte administratif délivré par une autorité d’enregistrement. Elle est publiée au
Journal Officiel (mais le dossier de demande, propriété du pétitionnaire, reste confidentiel).
L’AMM est délivrée à un titulaire, personne physique ou morale, habituellement une firme industrielle
pharmaceutique, mais qui n’est pas forcément le fabricant ou l’exploitant.
L’AMM est temporaire (cinq ans) et renouvelable. Elle est modifiable selon les mêmes procédures à la demande du
titulaire ou des autorités. Elle peut être suspendue pour un an renouvelable ou supprimée lorsque les conditions de
son octroi ne sont plus remplies.
L’AMM est accompagnée d’un “ résumé des caractéristiques du produit ” qui en fait partie intégrante. Etabli par
l’autorité d’enregistrement, il ne peut être modifié que par elle. Il comporte 21 rubriques apportant les
renseignements indispensables au prescripteur et figure dans les publicités et dictionnaires de spécialités (s’y
ajoutent alors les données étrangères à l’AMM, relatives au prix et au remboursement).

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RÉSUME DES CARACTÉRISTIQUES DU PRODUIT (R.C.P.)

a) dénomination de la spécialité
b) forme pharmaceutique
c) composition qualitative et quantitative en principes actifs et en constituants de l'excipient dont la
connaissance est nécessaire à une bonne administration
d) nom ou raison sociale et domicile ou siège social du titulaire
e) nature du récipient
f) conditions de délivrance au public
g) durée de stabilité
h) précautions particulières de conservation
i) incompatibilités
j) propriétés pharmacodynamiques et éventuellement éléments de pharmacocinétique
k) indications thérapeutiques
l) effets indésirables (fréquence et gravité)
m) mises en garde spéciales
n) contre-indications
o) précautions d'emploi, notamment en cas de grossesse et d'allaitement, chez les enfants et les personnes âgées,
en cas de pathologies particulières; s'il y a lieu précautions de manipulations
p) effets sur la conduite de véhicules ou de machines
q) interactions
r) posologie et mode d'administration
s) surdosage : symptômes, conduite d'urgence, antidotes
t) précautions d'élimination des produits non utilisés et des déchets
u) date d'établissement du R.C.P.
3.3.3. Les procédures

3.3.3.1. L’enregistrement européen


L’AMM européenne est délivrée (ou refusée) par la Commission de l’Union Européenne qui siège à Bruxelles, sur
avis de l’Agence Européenne du Médicament (EAM) située à Londres. Cette agence est un établissement
administratif européen dont l’activité technique est assurée par le Comité des Spécialités Pharmaceutiques (CSP)
composé de deux représentants par état des autorités nationales d’enregistrement et assisté d’un collège d’experts
internationaux.

L’AMM européenne, y compris le RCP, s’impose à tous les états membres en termes identiques. Les suspensions,
les suppressions, les renouvellements et les modifications d’AMM s’opèrent de la même façon. Il existe deux
procédures :

- la procédure centralisée est obligatoire pour les produits issus des nouvelles technologies telles les
biotechnologies, le génie génétique, etc. (liste A) et facultative, à l’initiative du demandeur, pour les produits dits
d’innovation telle une nouvelle molécule chimique, une nouvelle voie d’administration, etc. (liste B). La demande
est déposée auprès de l’agence européenne pour arbitrage et débouche directement sur une AMM européenne;

- la procédure décentralisée concerne tous les autres produits. Elle commence par la délivrance d’une AMM
nationale par l’autorité d’enregistrement d’un état membre. Le titulaire de l’autorisation qui désire exploiter son
produit dans un ou plusieurs autres pays de l’Union, demande alors à leurs autorités d’enregistrement d’accepter
l’AMM initiale (procédure de la reconnaissance mutuelle). Au cas où l’une d’entre elles s’y refuserait ou
demanderait des modifications, la demande est transmise à l’agence européenne pour arbitrage. Ceci conduit
comme précédemment à une AMM européenne (ou à son refus). Cette procédure assure progressivement
l’uniformisation des AMM en Europe.

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3.3.3.2. L’enregistrement français
Les AMM françaises sont délivrées par l’Agence Française du Médicament (à partir du 1er Janvier 1999 par
l’Agence de Sécurité Sanitaire qui la remplace). Elles sont signées, au nom de l’Etat, par son directeur général sans
recours possible auprès du ministre. Le dossier est instruit par un groupe d’expert, la Commission d’Autorisation de
Mise sur le Marché.
Il ne persiste comme AMM françaises que celles antérieures à l’enregistrement européen si elles ne font pas l’objet
d’une demande d’extension à d’autres états, et celles résultant de nouvelles demandes si elles restent purement
nationales.

3.3.4. Les cas particuliers

3.3.4.1. Les copies


Le terme de copie est une source permanente de confusion (sans parler des copies-copies et des copies plus); le
mieux serait de l’oublier au plus vite et de se contenter des termes suivants mieux définis. Le problème posé est
celui d’une spécialité pharmaceutique identique ou proche d’une autre existante; dans quelles conditions pourrait-
elle obtenir une AMM, en quoi s’en distinguerait-elle ?

A - En cours de protection industrielle


Trois cas de figure sont possibles :
– le codéveloppement : deux firmes se partagent les frais de développement d’une même molécule et demandent,
en même temps ou non, une AMM soit unique grâce à une filiale commune, soit chacune pour son compte;
– le comarketing : une firme propriétaire d’une molécule autorise un deuxième laboratoire à utiliser son dossier
pour obtenir une AMM qui sera strictement identique; ceci a pour but d’élargir le marché. Le comarketing peut
être simultané ou retardé. Il se double d’accords commerciaux;
– la copromotion : deux firmes pharmaceutiques font en commun la promotion d'une spécialité dont l’une est
propriétaire.

B - Après la fin de la protection industrielle


Un demandeur peut obtenir une AMM pour une spécialité contenant le même principe actif et pour les mêmes
indications qu’une spécialité existante, soit en déposant un dossier complet, soit en bénéficiant de l’autorisation du
premier industriel d'utiliser son dossier d'enregistrement, soit avec un dossier partiel en bénéficiant de dispenses par
référence à la bibliographie, ou s’il s’agit d’un produit “ essentiellement similaire ” au premier (mêmes principe,
forme et dosage, bioéquivalence). Il ne faut alors pas confondre des catégories voisines :

– les génériques sont définis par le code de la santé publique. Un générique est une spécialité pharmaceutique
ayant le même principe actif (ou les mêmes), la même forme pharmaceutique, le même dosage qu’une spécialité
existante dite “ princeps ” dont elle est bioéquivalente (ceci étant démontré par une étude de biodisponibilité). Ne
sont génériques que les spécialités inscrites sur le répertoire des génériques de l’Agence de Sécurité Sanitaire
(AFSSAPS) (qui servira de base à l’éventuel droit de substitution). Ces spécialités sont désignés soit par la DCI
suivi du nom du laboratoire, soit par un nom de fantaisie suivi du suffixe “ GE ”;
– les “ même, même, même ” ou “ 3M ”, spécialités ayant la même composition qualitative et quantitative, sous la
même forme pharmaceutique, mais ne remplissant pas les conditions juridiques nécessaires pour être reconnus
comme génériques;
– les spécialités de même dénomination commune internationale, ayant le même principe actif mais différant par
leurs dosages, leurs formes pharmaceutiques ou leurs voies d'administration. Elles forment, avec les génériques
et les 3M, la base du répertoire de la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) qui sélectionne les moins
chères afin d’aider les médecins à prescrire au moindre coût.

Enfin, en élargissant le champ, et ceci sort du cadre des copies, le cercle suivant est constitué par l’ensemble des
spécialités ayant la même indication, censées pouvoir se substituer avec le même résultat thérapeutique et en général
de même mécanisme d’action. Il inclut les catégories précédentes, mais s’y ajoutent des spécialités de principes
actifs différents. Ce sont les équivalents thérapeutiques.
Enfin, le cadre ultime est celui de la classe pharmacothérapeutique basé sur le traitement d’une pathologie et
incluant éventuellement plusieurs sous-classes d’équivalents thérapeutiques.
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3.3.4.2. Les autorisations temporaires d’utilisation (ATU)
Dans certains cas, la lourdeur de l’évaluation scientifique et de la procédure administrative entraîne des délais qui
retardent la mise à la disposition d’un médicament pour des malades dont on peut penser qu’ils en tireraient un
bénéfice notable dans une pathologie sévère. Dans l’attente de l’AMM, il est donc possible, en France, d’accorder
des autorisations temporaires d’utilisation, délivrées par l’Agence du Médicament, pour une durée limitée et
pouvant être suspendues ou retirées à tout moment. On distingue :
– les ATU produits (improprement dits cohortes), qui sont de deux sortes :
• les ATU pour pathologies graves (compassionnelles) lorsqu’il n’y a pas d’alternative thérapeutique et que
l’efficacité est présumée sur les premiers résultats d’essais;
• les ATU pour les maladies rares (orphelines) pour lesquelles les essais classiques sont rendus difficiles par le
faible nombre de malades, et dans les même conditions que ci-dessus;
– les ATU individuelles, autorisations d’importation accordée à un patient donné, sous la responsabilité du
prescripteur, pour un médicament autorisé dans un pays étranger.

3.3.4.3. L’homéopathie
Les médicaments homéopathiques suivent les mêmes règles d'enregistrement que les autres, y compris la nécessité
de démontrer leur efficacité par des essais contrôlés, et ont des AMM.
Toutefois, ils peuvent bénéficier d’un enregistrement simplifié les dispensant de ces essais s’ils relèvent d’une
pratique homéopathique reconnue par un état membre de l’Union, s’ils sont administrés par voie orale ou externe et
si leur degré de dilution est suffisant pour en garantir l’innocuité.

3.4. Les re-évaluations

L’AMM n’étant délivrée que pour une durée de cinq ans, son renouvellement pourrait donner lieu à une re-
évaluation des critères d’enregistrement. Il n’en est rien et le renouvellement n’est en pratique qu’une formalité
administrative.
Cependant, tout au long de sa vie le médicament va évoluer. Le fabricant va procéder à de nouvelles études visant à
mieux le connaître ou à élargir son marché. Les effets indésirables sont particulièrement surveillés et peuvent
motiver de nouvelles contre-indications ou précautions d’emploi. Les autorités peuvent demander au fabricant des
études (plus rarement y procéder). Les nouvelles connaissances qu’elles proviennent du fabricant, de la
pharmacovigilance ou de l’observation des prescriptions ou du marché, entraînent souvent des modifications du
RCP.

3.5. La disparition

Peu de médicaments sont éternels. Dans le monde occidental, la pharmacologie traditionnelle a presque entièrement
disparu, à l'exception de quelques plantes en tisanes (la phytothérapie actuelle est rarement traditionnelle). Elle
survit le plus souvent à travers les principes actifs qui en ont été extraits, eux-mêmes souvent modifiés. C'est ainsi
que l'aspirine a supplanté le salycilate qui venait de l'écorce de saule, la morphine et ses dérivés ont remplacé les
extraits ou teintures d'opium, etc. Mais tout a une fin : la réserpine isolée de rauwolfia serpentina utilisée en Inde de
toute antiquité a connu son heure de gloire pharmacologique et thérapeutique après la seconde guerre mondiale,
pour être aujourd'hui totalement délaissée. Le renouvellement rapide de la pharmacologie frappe tous les
observateurs. Au cours de sa carrière, le médecin qui prend maintenant sa retraite, aura renouvelé plusieurs fois ses
prescriptions; des produits essentiels l'auront cependant accompagné, souvent sous des formes améliorées
(penicillines, tonicardiaques, etc.), mais leur place dans l'arsenal thérapeutique aura souvent changé.
Trois grands types de raisons entraînent la disparition d'une spécialité pharmaceutique :

– l'obsolescence scientifique
Un médicament peut être surclassé ou remplacé par un médicament plus actif. En principe, cette différence
d'efficacité est démontrée par des essais cliniques comparatifs. Ce remplacement peut se produire dans la même
classe pharmacologique. D'autre fois, pour le même effet thérapeutique, les médicaments les plus efficaces ont
un nouveau mécanisme d'action. C'est ainsi que parmi les antihypertenseurs, les diurétiques et les bétabloquants
ont remplacé les réserpiniques.

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En fait très souvent, plus que l'efficacité proprement dite, c'est le rapport bénéfice / risque qui est pris en compte.
L'amélioration de la tolérance est le principal facteur de substitution d'un produit par un autre. Cet argument
invoqué constamment par les laboratoires pharmaceutiques, doit reposer sur des faits établis. Or, souvent on
compare la pharmacovigilance de terrain parfaitement connue d'un produit éprouvé, à celle d'essais cliniques
expérimentaux non programmés pour cela. D'où des révisions ultérieures. Il convient donc d'être circonspect en
ce domaine.
Enfin, le produit initial peut être délaissé en raison de progrès galéniques. La réalisation de formes-retard permet
d'espacer les administrations, ce qui est toujours appréciable.

Entre 1985 et 1996, la "validation" a consisté à évaluer les produits antérieurs à la réglementation sur les AMM à
la lumière des nouveaux critères imposés par celle-ci. Bon nombre de spécialités ont disparu ou ont dû supprimer
ou remplacer des principes actifs jugés inefficaces ou dangereux. En principe, à partir du 1er janvier 1997,
n'existent en France que des A.M.M. modernes.

– la pharmacovigilance
La découverte de nouveaux effets indésirables (ou une meilleure appréciation de leur fréquence ou de leur
gravité) conduit à reévaluer le rapport bénéfice / risque. Si on estime qu'il est devenu défavorable, le produit
disparaîtra. La décision est prise par le laboratoire ou les autorités, souvent les deux ensemble. Ceci se produit en
règle pendant les premiers mois ou les premières années de commercialisation.

L'appréciation du rapport bénéfice / risque dépend évidemment de la gravité de l'affection traitée et de l'existence
d'alternative thérapeutique. Un produit jugé acceptable ne le sera plus si apparaissent des produits récents mieux
tolérés, et il disparaîtra éventuellement pour des raisons de pharmacovigilance, même s'il est commercialisé
depuis longtemps (exemple en 1997 de la terflunazine, parmi les antihistaminiques).

– les raisons économiques


Le fabricant retirera son produit s'il n'est pas ou n'est plus rentable (au mieux il le cédera à un autre laboratoire
mieux à même de l'exploiter). Il y a des échecs commerciaux immédiats, surtout parmi les classes "encombrées".
Généralement, les ventes passent par une phase de croissance (estimée en moyenne à 3 ans), de stabilité, puis de
décroissance plus ou moins rapide. Ce cycle peut être accéléré par l'apparition de concurrents et après la fin du
brevet (en règle 6 à 12 ans après commercialisation) par celle des génériques.
Le fabricant pourra tenter de renouveler l'intérêt des prescripteurs en proposant un produit équivalent encore
sous protection industrielle (effet structure).

La disparition d'un produit est pratiquement toujours accompagnée de protestations de malades, quelquefois de
médecins. L'attachement des patients à leur médicament est souvent très fort lorsqu'il s'agit de traitements au long
cours. Ils se plaignent de "ne pas pouvoir vivre sans", que "ils ont tout essayer et que c'est le seul produit qui les
soulage", etc. La fixation peut se faire sur un principe actif, mais aussi sur une marque. Le rôle pédagogique du
médecin est difficile mais essentiel, encore faudrait-il qu'il sache pourquoi le produit disparaît. Il n'est d'ailleurs pas
toujours heureux de changer d'habitudes de prescription, surtout si le médicament le satisfaisait, même si c'est là
parfois un point de vue peu scientifique.

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4. LA DISTRIBUTION

Il existe essentiellement deux circuits de distribution des médicaments en France, l'hôpital et la ville. Dans quelques
cas particuliers, des organismes à caractères social peuvent délivrer certains produits.

4.1. L'hôpital

4.1.1. La pharmacie à usage intérieur


Chaque établissement de soin d'une taille suffisante, dispose d'une pharmacie, appelée “ pharmacie à usage
intérieur ”, placée sous la responsabilité de pharmaciens (hospitaliers dans le secteur public). Cette pharmacie assure
l'approvisionnement en médicaments, leur stockage et leur dispensation aux services cliniques. Elle peut également
fabriquer certains médicaments (préparations magistrales et préparations hospitalières).

4.1.2. La liste des collectivités


Ne peuvent être achetés par l'hôpital et utilisés au bénéfice des malades hospitalisés (sauf dérogation ministérielle),
que les spécialités bénéficiant d'une AMM et inscrits sur une liste dite "liste des collectivités". Cette inscription
relève d'un arrêté ministériel après avis de la Commission de la Transparence. Les textes n'indiquent pas de critères
particuliers pour cette inscription et dans la pratique, cette liste est très proche de celle des médicaments
remboursables.

4.1.3. La liste des médicaments


Beaucoup d'hôpitaux établissent une "liste des médicaments en usage dans l'établissement". Cette liste n'est pas
réglementaire et résulte d'un consensus interne. Elle évite la dispersion des prescriptions entre des médicaments
équivalents. Elle sert de base aux achats de la pharmacie et permet de procéder à des appels d'offre lorsqu'il existe
une concurrence entre fabricants de produits identiques ou équivalents. Elle est établie annuellement par un "Comité
du médicament".

4.1.4. La rétrocession
Dans certains cas, la pharmacie hospitalière peut "rétrocéder", c'est-à-dire vendre, des médicaments à des malades
non hospitalisés. Les produits concernés sont ceux qui sont placés en "réserve hospitalière" et non disponibles dans
les officines de ville. Ils sont cédés avec une marge de 15 %. L'extension de la réserve à de nombreux produits n'a
pas toujours eu des justifications sanitaires évidentes et a entraîné des contraintes pour les malades ambulatoires.
Actuellement, on assiste à la "sortie" de beaucoup de produits de la réserve. Il est prévu que la rétrocession ne soit
qu'exceptionnellement possible, pour des spécialités figurant sur une liste spéciale.

4.2. La ville

La distribution des médicaments en ville comporte deux étapes, la répartition et l'officine.

4.2.1. La répartition
La répartition constitue le commerce de gros entre le fabricant et le détaillant (officine). Elle emprunte trois circuits.

4.2.1.1. Les grossistes-répartiteurs


C'est le circuit principal. Il s'agit de sociétés ayant le statut d'établissements pharmaceutiques (autorisation
d'ouverture, présence d'un pharmacien responsable, contrôle par l'inspection de la pharmacie). Elles achètent les
médicaments aux fabricants et les revendent aux pharmaciens.
Les grossistes-répartiteurs sont soumis à des obligations de service public : secteur géographique délimité, livraison
en moins de 24 heures, détention d'au moins les 9/10 des présentations effectivement exploitées, stock minimum de
deux semaines.
La marge et les remises sont réglementairement limitées pour les spécialités remboursables, libres pour les autres et
la parapharmacie.
Le secteur a connu une concentration et une internationalisation rapides.

4.2.1.2. Les dépositaires


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Ce sont aussi des établissements pharmaceutiques. Ils répartissent les médicaments pour le compte de certains
fabricants, mais ils n'en sont pas propriétaires. Ils n'ont pas d'obligations de service public.

4.2.1.3. La vente directe


…des fabricants aux officines. En évitant le passage par un intermédiaire, elle est avantageuse pour les
pharmaciens, surtout lorsqu'ils constituent des groupements d'achat capables de négocier des remises pour quantité.
Par contre, elle ne satisfait pas aux obligations de service public.

4.2.2. L'officine
On appelle "officines" les pharmacies, au sens usuel du terme. Elles sont tenues par des "pharmaciens d'officine".
C'est une profession libérale (et juridiquement non commerciale), extrêmement réglementée.

4.2.1.1. Le monopole pharmaceutique


Seuls les pharmaciens d'officine ont le droit de vendre les médicaments au public, et éventuellement d'en fabriquer
certains (préparations magistrales et officinales). Les médicaments doivent être placés hors de portée des clients.

4.2.1.2. La dispensation
Le pharmacien dispense les médicaments, c'est-à-dire qu'il fait l'analyse pharmaceutique de l'ordonnance, qu'il
délivre les produits et qu'il donne des "conseils pharmaceutiques". L'ensemble de ces opérations fait la spécificité de
l'acte pharmaceutique.

4.2.1.3. La parapharmacie
En dehors des médicaments, et hors monopole, le pharmacien est autorisé à vendre des marchandises figurant sur
une liste établie par arrêté ministériel sur proposition du Conseil de l'Ordre. C'est la parapharmacie qui peut être en
libre accès. Dans ce domaine, les officines sont soumises à la concurrence de la grande distribution.

Insecticides et anti-acariens (de contact)


Produits pour lentilles oculaires
Médicaments vétérinaires
Plantes médicinales et aromatiques
Huiles essentielles (toxiques)
Produits d'Hygiène bucco-dentaire
Produits diététiques et de régime
Pastillage et confiserie pharmaceutiques
Eaux minérales
Articles d'orthopédie
Produits d'hygiène médicale
Accessoires indispensables à l'administration des médicaments
Articles d'optique et d'acoustique médicales
Cosmétiques et produits d'hygiène corporelle
Produits et articles servant au diagnostic médical
Produits d'Oenologie
Produits de Droguerie
Produits de désinsectisation et de dératisation et de désinfection
Produits Phytosanitaires

4.2.1.4. Les conditions d'exercice


Une officine ne peut être la propriété que d'un pharmacien "titulaire" ou d'une société de pharmaciens "associés"
(impossibilité en France de chaînes capitalistiques de pharmacies). Un pharmacien ne peut exercer que dans une
pharmacie et une seule ("exercice personnel") et ne peut exercer aucune autre profession de santé (exercice
exclusif).
Par dérogation, peuvent être propriétaires d'une officine les sociétés mutualistes ("pharmacies mutualistes") et les
sociétés minières ("pharmacies minières"), dont l'accès est réservé à leurs adhérents.

4.2.1.5. Le personnel
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En dehors des pharmaciens titulaires ou associés, une pharmacie peut employer :
– des pharmaciens assistants, salariés, dont le nombre est réglementairement fixé en fonction du chiffre d'affaire;
– des préparateurs en pharmacie, titulaires d'un diplômes national, autorisés à délivrer les médicaments sous la
responsabilité d'un pharmacien;
– des employés de pharmacie qui ne doivent pas délivrer les médicaments.
Le public peut identifier ces personnels grâce au port obligatoire d'un badge distinctif.

4.2.1.6. Le numerus clausus


Toute création d'officine doit être autorisée par l'Etat qui délivre au titulaire une licence. Les possibilités de création
sont limitées en fonction de l'importance de la population résidente locale, avec d'éventuelles dérogations (sources
de nombreux contentieux). Les transferts de pharmacies sont aussi soumis à conditions et à autorisation.

4.2.1.7. Déontologie et discipline


Le pharmacien doit respecter un code de déontologie qui régit notamment ses relations confraternelles avec ses
collègues. Toute publicité ou pratique commerciale lui sont interdites. Il adhère obligatoirement au Conseil de
l'Ordre des Pharmaciens qui joue un rôle de défense morale de la profession et d'instance disciplinaire. L'Etat
contrôle le respect de la réglementation grâce à l'Inspection de la Pharmacie.

4.2.1.8. Economie
Pour les médicaments remboursables, la marge du pharmacien est fixée réglementairement. Elle diminue lorsque le
prix du médicament augmente ("marge dégressive lissée"). Elle est en moyenne de 26 % environ, variable selon les
officines.
Pour les médicaments non remboursables et pour la parapharmacie, le pharmacien fixe librement le prix qui peut
donc varier d'une officine à l'autre.

4.2.3. La pro-pharmacie
Lorsqu'il n'y a pas d'officine dans un secteur géographique, rendant l'accès au médicament difficile (par exemple en
montagne, en hiver, du fait des distances et des difficultés de circulation), le médecin peut être autorisé à vendre des
médicaments aux malades habitant dans des communes désignées : c'est le médecin pro-pharmacien. Cette pratique
est marginale.

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