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Nous voudrions remercier le Pr Pierre Carpentier, les Dr Caroline Bertrand, Stépane Escure,

Michel Pompignoli, Mesdames Catherine Nardari, Sophie Nithard,


Messieurs Jean-Yves Ciers, Bruno Dumeignil, Guy Pennequin
pour l'aide directe et indirecte qu'ils nous ont apportée
dans la réalisation de cet ouvrage.

© Quintessence International, 2004


11 bis, rue d'Aguesseau
75008 Paris
ISBN 2-912550-30-0

La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, d'une part, que les «copies ou repro-
ductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part,
que les analyses et courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation intégrale ou partielle
faite sans le consentement de l'auteur, de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1 e r de l'article 40).

Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanc-
tionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal.

Conception graphique : STDI, Lassay-les-Châteaux


Impression et façonnage : EMD, Lassay-les-Châteaux

Imprimé en France
N° 11421 - Dépôt légal : novembre 2003
Préface IX
Foreword X

Préambule XI

Épidémiologie des patients édentés totaux ou chronique d'une mort annoncée


Le vieillissement de la population 1
L'augmentation de l'espérance de vie 1
La santé bucco-dentaire 2
L'état de santé et la dépendance des patients âgés 2
La longévité et le renouvellement des prothèses 3

Les tissus de soutien


Le tissu osseux 5
La muqueuse buccale 8
L'articulation temporo-mandibulaire 12
La salive 14

La fonction chez l'édenté total


La mastication 17
La déglutition 18
La gustation 19
La phonation 20
Prothèse complète

L'examen clinique
La composante psychologique 23
La composante physique 25
La composante prothétique 35
Le bilan 36
Le plan de traitement 36

Les traitements préprothétiques


Les thérapeutiques non chirurgicales 41
Les thérapeutiques chirurgicales 43

Les principes d'empreintes


Le respect de l'intégrité tissulaire 49
Les qualités mécaniques 51
L'esthétique 56

Les théories de prise d'empreinte


Les empreintes anatomo-fonctionnelles 59
Les empreintes semi-compressives 60
Les empreintes mucostatiques 60

Empreintes et matériaux
Les paramètres cliniques 63
Les paramètres techniques 66

Les empreintes préliminaires


L'examen clinique et le concept d'empreinte 69
Le porte-empreinte 69
Les techniques de prise d'empreinte 72
Le traitement des empreintes 76
Le porte-empreinte individuel 76

Les empreintes secondaires


La phase préparatoire 81
L'adaptation du porte-empreinte 81
La phase d'empreinte 86
Le traitement au laboratoire 92
L'occlusion
L'occlusion statique 95
L'occlusion dynamique 108

Les articulateurs
Les critères de choix 111
Les articulateurs actuels 112
La mise en articulateur des modèles 117
La programmation des articulateurs 120

Esthétique et prothèse complète


Le patient et l'esthétique 123
Le praticien et l'esthétique 124

Choix et montage des dents antérieures


Le choix des dents antérieures 131
Le montage au laboratoire 136
Les contrôles au cabinet 139

Le choix et le montage des dents postérieures


Le montage et l'examen clinique 141
Les montages et les dents prothétiques 143
Les montages : réalisation pratique 149

La finition des cires


Le rôle des surfaces polies 155
Les volumes prothétiques 155
La gencive cervicale 158

L'essai fonctionnel
Les contrôles en l'absence du patient 161
Les contrôles en présence du patient 163
L'envoi au laboratoire 169

La polymérisation des prothèses


La conservation de l'occlusion 171
Les matériaux 172
Les mises en moufle 173
La finition des prothèses 176
L'analyse critique 177
L'envoi au cabinet dentaire 177

L'insertion prothétique
L'analyse critique 179
Les contrôles des prothèses 179
Les préalables aux corrections occlusales 182
Les techniques de corrections occlusales 182
Les conseils 188

Les doléances
Les doléances immédiates 191
Les doléances à court terme 194
Les doléances à long terme 197

La réhabilitation des tissus de soutien


Le traitement des tissus des surfaces d'appui 199
Traitements des problèmes musculo-articulaires 208

La prothèse unimaxillaire
Le problème 211
La phase préprothétique 212
Les thérapeutiques 215

Le passage de l'édentement partiel à l'édentement total


Les problèmes ................................................................................................................................................................. 221
L'examen clinique 222
La prothèse de transition 223
Définition 223
Les indications thérapeutiques 223
La réalisation technique........................................................................................................................................... 223
Les prothèses à recouvrement radiculaire 224
Définition 224
Les indications thérapeutiques 224
Les techniques 225
Les avantages, les inconvénients 231
La prothèse immédiate 232
Définition 232
Les principes et indications 233
Les temps de réalisation 233
Le pronostic 239
Les bases prothétiques renforcées
Le renforcement des bases en résine 241
Les bases métalliques 242

Implantologie et prothèse complète


L'étape pré-implantaire 247
L'étape implantaire post-chirurgicale 253
L'étape post-implantaire 260

Le laboratoire
Le maquillage des dents prothétiques 263
La personnalisation de la gencive artificielle 264
Les rebasages 265
Les réfections 266
Le duplicata 267
Les bases souples 269
Les réparations 270
L'hygiène au laboratoire 271

Les conseils d'hygiène


La motivation du patient 275
Hygiène et prothèse 276
Conclusion 279

La gériatrie
Patient et gériatrie 281
Le choix thérapeutique 282
Les aspects cliniques 285
Alimentation et sujets âgés 287

Ouvrages à consulter 291


Les milieux de l'enseignement clinique ont de bonnes cliniques fondatrices de Brånemark sur l'ostéo-intégration.
raisons de saluer la publication d'un nouvel ouvrage consa- Associé à celui de nombreux autres domaines scientifiques
cré à l'enjeu singulier que représente le traitement des éden- - épidémiologie, neurosciences, psychologie et santé géria-
tés totaux. trique - son travail a ouvert une thérapeutique entièrement
Depuis dix à vingt ans, l'amélioration des matériaux de nouvelle, l'implantologie, qui a déjà élargi et enrichi les pers-
dentisterie adhésive, la quasi obsession de la dentisterie cos- pectives thérapeutiques de ce qui n'était a priori qu'un para-
métique, et bien sûr la science de l'ostéo-intégration ont digme thérapeutique limité.
quasiment éclipsé la question pourtant essentielle de l'ap- Les auteurs de ce texte solidement étayé sont pleine-
proche thérapeutique de l'édentement. C'est bien dom- ment conscients de telles implications, et offrent aux lecteurs
mage, puisque relever le défi de l'édentement demande la les informations nécessaires à des prises de décisions cli-
prise en compte de paramètres contraignants qui influen- niques éclairées, ainsi que les moyens de les mettre en
cent tous les aspects de la réhabilitation orale. Quelques-uns oeuvre.
de ces éléments me viennent immédiatement à l'esprit - Ils parviennent à ce résultat en associant les données de
aspects psychosociaux et biologiques du vieillissement, base, à la fois scientifiques et comportementales, à des pro-
adaptation du système masticatoire aux divers compromis tocoles techniques détaillés. En ceci, ils équilibrent l'art de la
morpho-fonctionnels, bases de l'organisation esthétique des prise en compte du patient et les sciences physiques et bio-
dents, et dans le contexte d'une surface d'appui défavorable logiques intervenant dans la fabrication des prothèses. Ils
et évolutive, les changements de l'occlusion dus au temps. soulignent la conviction émergente des enseignants cli-
De fait, peu de recherches thérapeutiques peuvent reven- niques, pour qui la mise en place des règles de l'élaboration
diquer la simplicité relative d'exécution, l'efficacité et le carac- d'une prothèse complète est, dorénavant, plus que jamais
tère définitif des techniques d'élaboration d'une prothèse nécessaire, puisqu'il est manifeste que les thérapeutiques à
complète, presque toujours appropriée. supports implantaires sont le prolongement des protocoles
Profondément conscients de l'impact de tels paramètres prothétiques traditionnels.
sur l'ensemble du spectre de la thérapeutique prothétique, Comme enseignant clinicien et comme praticien, je me
Olivier Hue et Marie-Violaine Berteretche nous offrent une réjouis d'un texte qui plaide avec une telle vigueur pour la
excellente synthèse des connaissances actuelles sur le sujet. reconnaissance de l'intérêt du milieu édenté. C'est une
C'est une feuille de route claire et compréhensible, de celles contribution de grand prix, à compter parmi les œuvres
qui associent les réalités cliniques inhérentes à cet état aux majeures de la littérature prothétique.
stratégies thérapeutiques spécifiques à sa mise en œuvre. George A. Zarb
Aujourd'hui, la recherche et l'enseignement en matière Professeur, responsable du département de prothèse,
de prothèse ont évolué radicalement depuis les recherches Faculté de dentisterie, Université de Toronto, Canada
The arrivai of a new book which addresses the unique numerous other scientists in epidemiology, neurosciences,
treatment challenges of the edentulous patient is arguably a psychology and gériatric health, has ushered in an entirely
good cause for celebration in clinical education circles. In the new clinical implant treatment dimension which has already
last decade or two, the development of better adhesive res- enlarged and enriched management scope for what was
torative materials, a quasi-obsession with cosmetic dentistry arguably a limited therapeutic paradigm.
techniques, and of course the science of osseointegration, The authors of this well argued text are fully cognizant of
have virtually eclipsed the ongoing fundamental concerns such developments and provide the reader with the requi-
implicit in managing the edentulous predicament. This is red information to make informed clinical decisions, as well
indeed a pity since meeting the challenge of edentulism as how to implement them. They achieve this objective by
demands recognition of compelling determinants which pro- correlating basic and behavioural scientific information with
foundly influence all aspects of oral rehabilitation. A few of detailed technical protocols. In so doing, they balance the art
these issues corne to mind right away - psychosocial and of patient management with the physical and biological
biological aspects of ageing, adaptation of the masticatory sciences involved in prostheses fabrication. They underscore
system to diverse morpho-functional compromises, funda- the emergent clinical educators' conviction that principles in
mentals of esthetic teeth arrangement, and time-dependent complete denture fabrication are now more necessary than
changes in occlusion in the context of variable adverse sup- ever since it is clear that implant supported treatment is an
port. In fact few therapeutic endeavours can claim the same outgrowth of traditional prosthodontic protocols.
relative simplicity of execution, efficacy and effectiveness of As a clinical teacher and practitioner I am grateful for a
quasi-universal techniques of complete denture fabrication. text which articulates such a strong case for recognizing the
Oliver Hue and Marie-Violaine Berteretche are pro- significance of the edentulous milieu. This is one very wor-
foundly aware of the impact of such determinants on the thy contribution to the canon of outstanding prosthodontic
entire spectrum of prosthodontic therapy and have provided literature.
us with an excellent synthesis of current knowledge on the
subject. This is a clear and comprehensive roadmap, one
which marries clinical realities implicit in the condition with
therapeutic strategies for its management.
Today, prosthodontic research and education have evol- George A. Zarb
ved dramatically as a resuit of Brånemark's seminal clinical Professor and Head, Prosthodontics
research on osseointegration. His work, together with that of Faculty of Dentistry, University of Toronto
Aborder le traitement de l'édentement total par la prothèse tances officielles à tenir compte de cette réalité tant au niveau
adjointe complète peut, en 2003, paraître paradoxal car l'état des cursus universitaires que des objectifs de santé publique,
d'édenté total va disparaître. Cette discipline est donc, dans et aux praticiens de répondre aux exigences et espérances
l'esprit de certains praticiens, de censeurs, d'institutions plus des patients en accord avec les solutions actuelles.
ou moins officielles, vouée à l'extinction. Mais, n'en déplaise Alors comment se retrouver parmi tous ces paradoxes?
aux différents caciques et pythies qui discourent, régissent Tout d'abord en acceptant cette réalité princeps : l'éden-
notre profession, nous n'en sommes pas à un paradoxe près. tement total existe.
Paradoxe, car que penser, qu'écrire sur un sujet aussi lar- Puis, dans un deuxième temps, en offrant une réponse
gement traité par nos maîtres, ne serait-ce que Merrill thérapeutique à la fois technique et physiologique adaptée
Swenson, dont le premier ouvrage : « Complete Denture », aux conditions cliniques.
en date de 1940, demeure très actuel? La réponse technique doit incorporer les nombreux pro-
Paradoxe, car la transmission des opinions et des solu- grès technologiques qui nous sont offerts, en particulier l'im-
tions thérapeutiques résulte plus souvent d'une tradition plantologie, les nouveaux matériaux et matériels.
orale d'un apprentissage manuel que de données basées La réponse physiologique correspond à l'adaptation de
sur un véritable fond scientifique. Aux dires de nos détrac- nos options thérapeutiques aux exigences et réalités phy-
teurs, nous manquons d'« Evidence Based Dentistry », terme siopathologiques des malades, en particulier l'autonomie, le
officiel qui régit nos thérapeutiques. Mais existe-t-il des vieillissement et ses conséquences, la présence de patho-
« Evidence Based Dentistry » sur le traitement des échecs logies générales et leurs incidences directes ou indirectes
therapeutiques? sur la cavité buccale.
Paradoxe, car depuis de nombreuses années, voire Enfin, la réponse finale à ces paradoxes ne peut exister
décennies, la prévention et la parodontologie auraient dû éli- sans un long apprentissage culturel et manuel que nous ont
miner tout risque d'édentation. Mais combien de parodon- offert nos maîtres, en particulier Joseph Lejoyeux, André
tologistes se sont-ils tournés vers l'implantologie, confirmant Pastant, que nous remercions ici. Ils nous ont transmis leur
ainsi la limite des thérapeutiques entreprises? expérience, leur connaissance, leurs gestes et surtout leur
Paradoxe qui amène l'ensemble de la profession à volonté pour ce qui est le sujet de cet ouvrage : traiter les
importer sur notre territoire entre 16 et 18 millions de dents patients présentant un édentement total.
prothétiques pour compenser l'édentement de nos patients.
Mais le paradoxe le plus flagrant résulte de l'existence
même de cette pathologie qui représente l'échec patent de Olivier HUE, Marie-Violaine BERTERETCHE
nos thérapeutiques. Cette constatation doit conduire les ins- Paris, novembre 2003
En 1915, G.W.Gillet écrivait:
« The next decade will see the end of removable prosthesis and fixed bridgeworks »
J Nat Dent Ass, 1915; 2:215-217

Depuis, cette assertion ou prédiction a toujours trouvé de Mais un second paramètre doit aussi être pris en compte,
nombreux échos auprès des odontologistes. Par exemple, celui de l'allongement de la durée de vie.
au Royaume-Uni, cette disparition est annoncée vers 2038,
soit 123 ans après celle annoncée par Gillet. Évolution de la population (des 60 ans et plus) de la
La prévalence des patients édentés est en constante France métropolitaine de 1950 à 2050.
diminution, et ce résultat escompté est probablement à
mettre en relation avec les changements d'attitude des
patients vis-à-vis des soins dentaires : diminution de
l'anxiété, de la peur, rôle de la prévention, influence de l'in-
formation et de l'efficacité des traitements de la maladie
carieuse et parodontale.
Ces progrès ne peuvent être remis en cause. Cependant,
l'édentement total n'est pas une pathologie en voie de dis-
parition et ce pour les cinq raisons suivantes.

Une étude de l'INSEE traitant de la projection de la popula-


tion française en 2050 démontre qu'un vieillissement iné-
luctable de celle-ci est prévisible1. Ce vieillissement sera très
marqué jusqu'en 2035, puis s'atténuera sensiblement en
raison de l'arrivée à des âges élevés de générations moins
nombreuses. Ainsi, en 2035, les personnes âgées de plus C'est une réalité physiologique essentielle. Ainsi, si en l'an
de 60 ans représenteront 1/3 de la population française soit 2000 l'espérance de vie était de 75,2 ans pour les hommes
21 millions, alors qu'en 2000 elles ne représentaient que et 82,7 ans pour les femmes, en 2035 elle devrait s'élever
1/5 de la population totale. Cette étude permet d'estimer respectivement à 81,9 ans et 89 ans1. Ces valeurs corres-
qu'en 2050 les plus de 60 ans représenteront 35 % de la pondent à un gain annuel variant entre 1,5 et 3 mois selon
population, soit une augmentation de 85 % par rapport à l'hypothèse choisie. Ainsi en 2050,3 fois plus de personnes
l'an 2000 (tableau 1-1). seront âgées de plus de 75 ans et 4 fois plus seront âgées
Ces chiffres s'expliquent par l'arrivée dans ces tranches de plus 85 ans. Cet accroissement de la population âgée se
d'âge de la génération des enfants de l'après-guerre. traduira ainsi par une augmentation très nette dans l'avenir
du rapport entre le nombre de personnes âgées et la popu- Par ailleurs, après une augmentation de l'enfance à l'âge
lation en âge de travailler (fig. 1-1). adulte, les dépenses en soins dentaires diminuent chez les
personnes âgées. Cette diminution des dépenses reste une
spécificité du secteur dentaire. Cela doit nous interpeller car,
Rapport 65 ans et plus / 20-64 ans
malgré une évolution positive vis-à-vis de l'accès aux soins
depuis 1970, la fréquentation du cabinet dentaire pour un
groupe de patients entre 65 et 74 ans est faible, 44,8 %
d'entre eux n'ayant pas consulté un praticien depuis au
moins deux ans.

Fig. 1-1 Courbe du nombre de personnes âgées/nombre de per-


Le vieillissement est presque toujours associé à une dété-
sonnes en âge de travailler (Ordonnée : chiffres rapportés pour
1 000 personnes en âge de travailler ; abscisse : années, entre rioration des facultés physiques et intellectuelles. Si entre 60
2000 et 2050). et 75 ans un relatif bien-être existe, il s'oppose à la fragilité
qui atteint les patients à partir de 80 ans (tableau 1-2). 28 %
de ces patients, en majorité des femmes, vivent chez eux,
mais pour la plupart manquent d'autonomie4. Cette perte
d'autonomie résulte surtout des difficultés à se déplacer, à
marcher, 72 % de ces personnes ont besoin d'aide pour les
tâches domestiques, dont 40 % à un degré élevé ou très
Un rapport sur l'état de la santé bucco-dentaire en France élevé.
permet d'évaluer la proportion des patients porteurs de pro- Cette tranche de la population est aussi la plus directe-
thèses adjointes en fonction de leur âge, et les dépenses en ment concernée par les traitements prothétiques de l'éden-
soins dentaires de l'enfance à l'âge adulte2. tement total, car il existe une relation directe entre l'âge et
Il apparaît ainsi que sur une population âgée de 65 à le nombre de dents absentes. Les besoins de ces patients
74 ans, 61,5 % de ces sujets sont porteurs de prothèses sont élevés (un grand nombre sont édentés complets)
adjointes (partielles ou complètes), parmi eux 16,3 % ont même si ces patients eux-mêmes n'en ont pas toujours
une prothèse complète maxillaire ou mandibulaire et conscience. Leurs traitements ne doivent pas être oubliés,
14,3 % une prothèse complète bimaxillaire (fig. 1-2). et ils répondent à une approche spécifique pour chacun.
Ces chiffres révèlent un taux d'édentement total non Selon Ettinger5, ceux-ci peuvent être classés en trois
négligeable, venant corroborer les données de l'industrie, groupes :
qui constate que 16 à 18 millions de dents prothétiques ont - Les patients âgés indépendants - Ils vivent de manière
été vendues en France en 2000. totalement autonome, ils sont parfaitement intégrés
Enfin, une étude très récente réalisée aux États-Unis dans une vie sociale, ils représentent 70 % de la popu-
révèle que, si l'édentement total va diminuer de 10 % par lation âgée. L'importance des soins dentaires n'est limi-
décade à partir de l'an 2000, en raison du vieillissement de tée que par des problèmes socio-économiques.
la population (augmentation de 79 % des plus de 55 ans - Les patients fragilisés - Ils ont en partie perdu leur indé-
pour les 30 années à venir), le besoin en prothèse adjointe pendance et une aide leur est nécessaire, mais leur vie
complète va augmenter, passant de 33,6 millions en 1991 sociale n'est que partiellement limitée. Ce groupe repré-
à 37,9 millions en 2020 3 . sente environ 20 % des patients de plus de 65 ans.

Tableau 1-2 Répartition de la dépendance domestique des per-


sonnes âgées en fonction de l'âge (en %).

Fîg. 1-2 État prothétique chez les patients âgés de 65 à 74 ans.


- Les patients dépendants - Les patients ne sont plus du pour le praticien. Ces patients sont alors handicapés tant
tout autonomes, ils représentent 10 % de la population socialement que fonctionnellement.
âgée. La moitié de ces patients vit en institution, l'autre
Ainsi, l'ensemble de ces éléments nous conduit à une
à domicile.
constatation essentielle : l'édentement total ne disparaî-
tra pas.

La réalisation d'une prothèse adjointe complète ne doit être,


ni pour le patient ni pour le praticien, considérée comme un
simple acte technique, mais au contraire être reconnue, 1. Brutel C. Projections de la population à l'horizon 2050. INSEE
comprise comme un véritable acte thérapeutique. Cela Première, mars 2001 ; n° 762.
sous-entend, non seulement un suivi et une maintenance 2. La santé bucco-dentaire en chiffre. Dossier COME ADR Paris:
annuelle, mais aussi, avec le temps, un renouvellement des 1998.
3. Douglass CW, Shih A, Ostry L. Will there be a need for complete
prothèses si nécessaire.
dentures in the United States in 2020? J Prosthet Dent, 2002 ;
Après seulement 5 années, environ 50 % des prothèses 87: 5-8.
existantes devraient être remplacées. En dépit de ces consta- 4. David MG, Starzec D, Starzec C. Aisance à 60 ans, dépendance
tations, les patients continuent à porter des prothèses qui et isolement à 80 ans. INSEE Première, avril 1996; n° 447
deviennent inadaptées, polluées, entraînant à long terme 5. Ettinger RL, Beck JD. Geriatric dental curriculum and the needs
non seulement des problèmes pour le patient mais aussi of the elderly. Spec Care Dentist, 1984 ; 4: 207-213.
Chez les patients édentés totaux, le port d'une prothèse site, l'os nouvellement formé remplit l'alvéole mais n'atteint
adjointe complète implique un appui et une participation, pas le niveau osseux original pré-extractionnel, premier signe
directe ou indirecte, des tissus de la cavité buccale. Ces tis- de la résorption1. Puis, pendant les quatre mois suivants, le
sus sont au nombre de trois : le tissu osseux, la muqueuse, phénomène se poursuit, plus de 50 % du taux global de la
et l'articulation temporo-mandibulaire, tissus auxquels résorption osseuse est alors atteint.
s'ajoutent la salive et son parenchyme. Selon les patients, selon les conditions cliniques, l'am-
plitude de ce phénomène varie d'environ 3 mm ; au pre-
mier rang des causes de ces variations, le geste chirurgical
est fondamental. En effet, tout traumatisme lors de l'extrac-
tion dentaire (fracture de la corticale externe, alvéolecto-
mie...) provoque une résorption immédiate très marquée,
L'os alvéolaire joue un rôle très spécifique dans le soutien suivie d'une résorption similaire à celle associée à une extra-
de l'organe dentaire au sein des maxillaires. En effet, il fait ction simple : la perte osseuse reste ainsi toujours supérieure
partie du parodonte et sert d'attache au ligament alvéolo- lorsque le trauma chirurgical est important (fig. 2-1).
dentaire. Ce « processus » alvéolaire s'est développé sous À ce stade de la cicatrisation alvéolaire, le processus de
l'influence de la croissance de la dent et de l'éruption den- résorption osseuse immédiate est terminé, mais il se pro-
taire. Lors d'une extraction, le phénomène de cicatrisation longe par une résorption à moyen et à long terme impli-
de l'alvéole déshabitée se développe pour se terminer quant alors la crête édentée.
douze semaines plus tard. La résorption osseuse se révèle ainsi être un phénomène
Cette phase de cicatrisation met en jeu deux phéno- chronique, progressif, cumulatif et irréversible.
mènes totalement opposés, d'une part un phénomène
d'apposition visant à combler l'alvéole mais aussi un phé-
nomène de résorption.
En effet, dès l'extraction d'une dent, la résorption com-
Les facteurs étiologiques
mence. Elle se déroule en deux temps : la résorption immé-
diate suivant le geste chirurgical et la résorption à moyen et
Les facteurs généraux
long terme qui se poursuit de façon chronique et qui est
influencée par des facteurs généraux et locaux. - Le vieillissement est le fadeur étiologique principal de la
résorption osseuse à long terme. L'os est en perpétuel
remaniement, et si l'ostéogenèse est supérieure à l'os-
téolyse jusqu'à l'âge de trente ans, au-delà le phéno-
Après l'extraction, la cicatrisation alvéolaire s'effectue sous mène s'inverse, la résorption s'installe alors de manière
l'influence des processus d'apposition et de résorption. Deux inexorable. En effet, le vieillissement s'accompagne d'ef-
mois après l'extraction, la muqueuse kératinisée recouvre le fets secondaires importants comme des changements
Fig. 2-1 Amplitude de la résorption.
Accentuation de la résorption provo-
quée par une extraction chirurgicale.
(D'après Watt et Mc Gregor)

métaboliques, l'apposition minérale osseuse diminue - Les cytokines, substances protéiques sécrétées au
avec un allongement des cycles de remodelage. niveau osseux par les lymphocytes ou les monocytes
- Avec l'âge, un autre risque apparaît, le défaut d'absorp- activés, par les plaquettes ou les cellules osseuses elles-
tion du calcium. Il peut être dû à un déficit en vitamine mêmes, participent à la régulation ostéogenèse-ostéo-
D, à une production réduite de 1,25-dihydroxy-vitamine lyse. Cependant, mis à part le TGFβ (Transforming
D ou à une résistance intestinale à son absorption, enfin, Growth Factors β), la plupart des cytokines inhibent la
à une sécrétion réduite de calcitonine (tableau 2-1). formation osseuse, parmi lesquelles l'interleukine 1 (IL-1)
- Ces altérations du métabolisme de la vitamine D, spéci- et l'interleukine 6 (IL-6) sont de puissants stimulateurs de
fiques de la personne âgée, entraînent un défaut de la résorption.
minéralisation des os, d'où une fragilité accrue, mais, - Les neuropeptides, produits par les cellules inflamma-
aussi, une résorption et une diminution de la masse toires sont aussi mis en cause dans la réponse à une
osseuse. agression externe (pression excessive, déséquilibre
- Par ailleurs, le taux des hormones parathyroïdiennes, qui occlusal...), et ces facteurs tendent à accroître la résorp-
stimulent la résorption osseuse, augmente avec l'âge et tion osseuse. Enfin, une utilisation prolongée de cortico-
leur sécrétion est également stimulée par le défaut d'ab- stéroïdes entraîne une réduction de la densité osseuse
sorption du calcium. Ainsi, cet excès de parathormone par une inhibition de l'ostéogenèse.
contribue aussi à une perte accrue de tissu osseux2.
- L'ostéoporose sénile, résorption de l'os cortical et de l'os
Les facteurs locaux
trabéculaire, touche tous les individus. Mais, chez les
femmes après la ménopause, le remodelage osseux L'extraction dentaire réalisée, les paramètres cités comme
augmente en raison du nouvel équilibre hormonal qui localement impliqués dans la résorption sont nombreux:
conduit à une réduction accentuée de la masse osseuse. durée de l'édentement, adaptation de la prothèse, habitudes
On parle alors d'ostéoporose postménopausique, où la concernant le port continu ou discontinu de la prothèse,
perte des trabéculations prédomine. La déficience en occlusion et forces exercées sur les surfaces d'appui, para-
œstrogènes est mise en cause, cependant, malgré des fonctions, hygiène4...
thérapeutiques préventives, cette résorption persiste ; en - La durée de l'édentement fut longtemps reliée au degré
réalité, la progestérone semble également impliquée de résorption des crêtes. Mais, si la résorption est un phé-
dans ce phénomène3. nomène continu, élevé durant la première année suivant
les extractions, elle décroît ensuite de façon très nette5.
Tableau 2-1 Hormones impliquées dans le remodelage osseux.
Cela explique qu'il n'existe pas de relation statistique-
ment significative entre le niveau de résorption et la
durée de l'édentement6.
- Une mauvaise adaptation prothétique, une occlusion non
équilibrée ou des parafonctions surchargent certaines
zones de la surface d'appui augmentant la résorption.
De même, lorsqu'une prothèse complète maxillaire est
opposée à un édentement partiel mandibulaire, avec pré-
sence du groupe incisivo-canin, une résorption très marquée
est presque toujours observée dans la région antérieure
maxillaire.
Fig. 2-2a Comparaison du degré de
résorption, dans le plan horizontal,
après insertion d'une prothèse immé-
diate comparativement à une prothèse
classique après cicatrisation (Rouge:
prothèse immédiate - Jaune : pro-
thèse mise en place après la cicatrisa-
tion). (D'après Watt et Me Cregor)

Fig. 2-2b Comparaison du degré de


résorption, dans le plan vertical, après
insertion d'une prothèse immédiate
comparativement à une prothèse
classique après cicatrisation (Rouge :
prothèse immédiate - Jaune : pro-
thèse mise en place après la cicatri-
sation). (D'après Watt et Mc Cregor)

Si un stress mécanique important accentue le remode- Au terme de l'année ayant suivi les extractions, 72 % de
lage osseux, l'absence de stimulation de l'os par la prothèse la résorption sont déjà intervenus; durant les deux ans et
n'est pas, a contrario, un environnement favorable. Cette demi qui suivront, le taux de résorption ne représente plus
absence rompt le couplage ostéogénèse-ostéolyse, et cette que 8 % de la résorption totale (tableau 2-2).
« non-fonction » des surfaces d'appui accroît la résorption Des différences très nettes existent également entre le
répondant à une atrophie du tissu osseux7. maxillaire et la mandibule. La résorption à la mandibule est
La comparaison du taux de résorption après pose telle qu'elle perd 60 % de sa masse osseuse ; de plus, com-
d'une prothèse immédiate ou insertion ultérieure d'une parativement au maxillaire, dans la région antérieure, le taux
prothèse classique montre que la résorption est légère- de résorption mandibulaire est quatre fois plus important9
ment diminuée lorsqu'une prothèse immédiate est mise (fig. 2-3).
en place. Mais, à long terme, deux ans et demi après les Enfin, le sens de la résorption diffère :
extractions, la différence du niveau de résorption est négli- - Au maxillaire, seule la partie centrale de la voûte palatine
geable (fig. 2-2a, b). est épargnée par la résorption, qui intéresse de façon
Cette évolution des structures osseuses sous l'effet de prédominante les versants vestibulaires des crêtes éden-
stress mécaniques a été décrite sous l'intitulé « lois de Wolf », tées : la résorption est centripète.
qui relient directement le développement et l'adaptation des
structures osseuses aux forces mécaniques exercées8. Tableau 2-2 Taux moyen de résorption des crêtes édentées dans
le temps par rapport à la résorption totale. (D'après Watt et Mc Cregor)
En conclusion, il n'existe pas un facteur étiologique domi-
nant vis-à-vis de la résorption des crêtes édentées. Ce phé-
nomène résulte de la combinaison de facteurs généraux
(métaboliques, hormonaux...) et de facteurs locaux (ana-
tomiques, mécaniques...).

L'aspect quantitatif
À la suite des extractions dentaires, l'importance de la résorp-
tion osseuse varie d'un patient à l'autre, et selon le site consi-
déré.
Pour simplifier ces descriptions Atwood (1965) a pro-
posé une classification définissant 6 groupes, selon l'impor-
tance de la résorption de l'arcade mandibulaire (fig. 2-4).
Vingt ans plus tard, Zarb et Lekholm (1985) ont à leur
tour proposé une classification combinant le degré de
résorption à la mandibule et au maxillaire, mais appréciant
aussi la qualité osseuse en vue de faciliter l'analyse pré-
implantaire10 (fig. 2-5 ; tableau 25-3).

La cavité buccale est recouverte, selon la région considérée,


par « trois types » de muqueuses distinctes : la muqueuse
masticatoire (le palais dur et les crêtes), la muqueuse de
recouvrement (la face interne des joues, les lèvres, le plan-
Fig. 2-3 Résorption osseuse maxillaire et mandibulaire, groupe A
cher de la bouche et la muqueuse alvéolaire) et la
pendant les 13,5 premières années, groupe C entre 10 et 25ans.
muqueuse spécialisée (la face dorsale de la langue). Ces
Après les extractions: la résorption est nettement plus élevée à l'ar-
cade mandibulaire. (D'après Tallgren5) muqueuses présentent des structures histologiques diffé-
rentes, caractéristiques de leur fonction.
Leur rôle est triple : un rôle de protection des tissus sous-
- À la mandibule, la résorption intéresse d'une façon égale jacents vis-à-vis des agressions externes mécaniques, chi-
l'os spongieux et l'os cortical, la réduction importante en miques et microbiennes; un rôle sensoriel de transmission
hauteur des crêtes édentées entraîne un « élargissement» des informations thermiques, tactiles (texture des aliments)
de l'arc mandibulaire : la résorption est dite centrifuge. et gustatives (muqueuse dorsale de la langue) ; enfin, un
rôle plus limité de régulation thermique et hydrique.
Avec la perte des organes dentaires et le port d'une pro-
thèse amovible, la structure histologique de la muqueuse
évolue, et ses caractéristiques biomécaniques « participent»
La résorption osseuse entraîne des changements de la
aux réactions tissulaires engendrées par l'application de
dimension et des profils des arcades ainsi que des relations
forces. Par ailleurs, des lésions muqueuses très diverses peu-
inter-arcades. Il existe une grande diversité de forme et de
vent être observées, lésions dont la fréquence augmente
taille des crêtes résiduelles; l'étude céphalométrique des
avec le port d'une prothèse amovible.
téléradiographies de profil permet d'évaluer cette évolution.

La muqueuse buccale se compose d'un épithélium et d'un


tissu conjonctif sous-jacent richement vascularisé. La jonc -
tion entre ces deux tissus est assurée par la membrane
basale (fig. 2-5).

L'épithélium
C'est la partie la plus superficielle de la muqueuse. Composé
de 3 à 5 couches cellulaires, l'épithélium buccal est du type
pavimenteux pluristratifié kératinisé ou non.
Au niveau de la voûte palatine et des crêtes, la couche
la plus externe est kératinisée et deux types de kératinisa-
tion sont décrits: l'orthokératose et la parakératose.
L'orthokératose se distingue par une couche cornée où tous
les organites cellulaires ont disparu, à la différence de la para-
kératose où des organites cytoplasmiques sont encore
Fig. 2-4 Classification d'Atwood : phases d'évolution de la crête
antérieure à la suite des extractions. - Phase I avant l'extraction. - visibles.
Phase II après l'extraction. - Phase III crête haute arrondie. - Phase IV Mais surtout, le maintien de l'intégrité de l'épithélium
crête en lame de couteau. - Phase V crête basse arrondie. - Phase VI dépend des cellules de la couche la plus profonde, la couche
crête déprimée. basale. Partant de cette dernière les cellules se renouvellent,
passant par les différents stades de maturation pour arriver
à la surface. La durée de ce cycle ou turn-over est d'environ
21 jours.

La jonction épithélio-conjonctive
La membrane basale joue un double rôle. D'une part, elle
assure la jonction et l'ancrage entre l'épithélium et le tissu
conjonctif et d'autre part, elle.crée l'herméticité entre ces
deux mêmes tissus. Cette membrane n'est pas une struc-
ture inerte. En effet, son architecture caractéristique dite en
doigts de gants peut être modifiée par des pressions exces-
sives. Dans ce cas, le nombre de digitations diminue et leur
taille se réduit (fig. 2-5). Mais surtout, en présence d'un état Fig. 2-6 Coupe histologique de la muqueuse buccale : mise en
inflammatoire cette membrane qui a aussi un rôle de filtra- évidence des différentes orientations des faisceaux de fibres de col-
tion, s'épaissit et se rompt en de nombreux points laissant lagène, apparaissant vert ou jaune sous la lumière polarisée.
passer certains métabolites qui contribuent à la résorption. (Coloration de Junqueira, grossissement x 64)

L'élasticité résulte de la présence de fibres élastiques.


Elles sont peu nombreuses au niveau des muqueuses de la
surface d'appui, mais beaucoup plus fréquentes au niveau
des muqueuses de recouvrement non kératinisées (joues,
zones de réflexion, lèvres).
La sous-muqueuse contient des amas graisseux et des
glandes salivaires mineures, elle sépare la muqueuse des
tissus musculaires ou osseux sous-jacents. Elle est particu-
lièrement présente dans les régions latérales de la voûte
palatine au niveau des zones dites de Schroeder.

L'innervation et la vascularisation
de la muqueuse buccale
L'innervation sensorielle de la muqueuse buccale est extrê-
mement riche. En dehors de la température, les différents
récepteurs présents au sein de la muqueuse analysent pré-
cisément les caractéristiques des pressions et de la douleur.
De plus, il existe un gradient de sensibilité dans la cavité
buccale, les régions antérieures présentant une plus grande
Fig. 2-5 Coupe histologique de la muqueuse buccale : 1) épithé-
densité de terminaisons nerveuses.
lium pluristratifié kératinisé ; 2) jonction épithélio-conjonctive à l'as-
L'ensemble de ces informations gagne les centres supé-
pect caractéristique en doigts de gant ; 3) lamina propria. (Coloration
hématoxyline éosine - grossissement x 25) rieurs par des voies multiples, qu'elles soient trigéminales,
faciales VII, dépendantes du IX ou du X.
La vascularisation résulte d'un réseau relativement com-
Le tissu conjonctif plexe ayant pour origine les artères situées dans la sous-
muqueuse. Si celles-ci sont absentes comme dans certaines
Les propriétés biomécaniques du tissu conjonctif découlent régions du palais dur, le réseau vasculaire émerge d'artères
de ses caractéristiques histologiques. localisées dans la partie profonde du tissu osseux.
Il se subdivise en deux zones: la lamina propria et la
sous-muqueuse.
La lamina propria correspond au tissu conjonctif situé sous L'incidence de l'âge
la membrane basale. Elle comprend des éléments cellulaires Il est communément admis que le vieillissement s'accom-
(fibroblastes, macrophages, cellules inflammatoires...) et une pagne de changements conduisant à des altérations irré-
matrice extracellulaire dont la composition détermine les pro- versibles au niveau tissulaire et fonctionnel.
priétés de résistance et d'élasticité de ce tissu. En réalité, l'âge n'est pas un paramètre responsable des
La résistance aux contraintes mécaniques découle de la modifications de la muqueuse buccale12. Celle ci apparaît plus
présence et du nombre de fibres de collagène. Regroupées lisse, plus sèche, revêtant un aspect satiné, mais cet aspect
en faisceaux, ces fibres créent un réseau parfaitement orga- doit être imputé à l'incidence des maladies systémiques, de
nisé jouant un rôle « tampon » (fig. 2-6). leurs effets cumulatifs et des traitements médicamenteux13.
Sur le plan histologique, les variations d'épaisseur de des altérations est directement liée à l'intensité et à la durée
l'épithélium ne sont pas significatives, et le renouvellement de la force exercée. Alors que le recouvrement, sans pres-
cellulaire ne semble pas être affecté par le vieillissement sion, de la muqueuse palatine par une base prothétique
(fig. 2-7); seule l'architecture de la jonction épithélio- n'entraîne pas de modification tissulaire, l'application de
conjonctive semble se modifier ainsi que la lamina propria pressions entraîne des changements proportionnels à leur
qui comporterait des faisceaux de fibres collagène plus intensité16,17.
denses avec des liaisons croisées plus nombreuses.
Viscoélasticité et vieillissement
L'âge est aussi un paramètre important quant au comporte-
ment de la muqueuse vis-à-vis des charges occlusales. En
effet, les résultats montrent que si les courbes concernant
la compression sont identiques, le comportement des tissus
dans la phase de récupération est fonction de l'âge : plus le
patient est âgé, moins la récupération élastique immédiate
est importante, et plus la récupération différée est lente.

Viscoélasticité et microcirculation
Les pressions exercées sur la muqueuse entraînent un
déplacement, une déformation des tissus et, par consé-
quent, elles engendrent des perturbations de la microvas-
Fig. 2-7 Coupe histologique de la muqueuse buccale : mise en cularisation muqueuse. Dès l'application d'une pression, le
évidence du renouvellement cellulaire au sein de la couche basale flux sanguin est réduit, la muqueuse blanchit, phénomène
de l'épithélium à l'aide de la bromo-désoxyuridine (BrDu), mar- qui persiste tant que la pression est maintenue'8.
queur de la division cellulaire. Les cellules en division apparaissent Cette atteinte de la vascularisation est importante vis-à-
brunes. (Grossissement x 64) vis du développement d'un état inflammatoire. En effet, le
système vasculaire est impliqué au premier plan dans la libé-
ration des neuromédiateurs, qui seront engagés dans l'éta-
blissement de l'inflammation, et au-delà dans les phéno-
mènes de résorption osseuse.
À l'arrêt de la pression, le flux sanguin retrouve immé-
Lorsqu'une force est appliquée au niveau de la muqueuse diatement son niveau initial, la « récupération » est donc
buccale, le comportement des tissus dépend de leurs pro- beaucoup plus rapide qu'au niveau muqueux.
priétés viscoélastiques et du comportement hémodyna-
mique de la microcirculation tissulaire.
La viscoélasticité résulte de la combinaison des caracté-
ristiques élastiques et visqueuses de la muqueuse. Si une
force est appliquée sur un matériau élastique, le déplace- Muqueuse buccale et prothèse
ment est immédiat jusqu'à l'arrêt de l'application de la force.
À l'opposé, un matériau visqueux est déformé progressive- L'association entre le port d'une prothèse amovible corn-
ment jusqu'à atteindre son état d'équilibre. La viscoélasticité plète et des modifications de la muqueuse buccale est fré-
se caractérise par la combinaison des deux comportements quente. Les variations portent essentiellement sur l'épais-
précédents14. seur de l'épithélium et de la couche cornée, le degré de
Les propriétés hémodynamiques concernent l'écoule- kératinisation, et sur la nature de la jonction épithélio-
ment du sang et des éléments figurés dans les artérioles et conjonctive.
les veinules ainsi que le comportement des fluides de la La stimulation mécanique liée au port d'une prothèse
matrice extracellulaire. entraîne tout d'abord un épaississement de l'épithélium et
une kératinisation accentuée19. Mais ensuite, la couche cor-
née diminue et l'orthokératose habituelle laisse place à une
Viscoélasticité et comportement tissulaire parakératinisation. De plus, un aplatissement de la mem-
Les études de base concernant la viscoélasticité muqueuse brane basale et une réduction du nombre des digitations
ont été réalisées par Kydd et col (1976), elles rapportent épithélio-conjonctives s'installent20. Cette évolution est
que l'application de toute pression sur la muqueuse interprétée comme une adaptation tissulaire aux charges
entraîne une déformation élastique immédiate, suivie d'une appliquées sur la surface d'appui (fig. 2-8a, b). Une corré-
déformation différée15. Cette déformation s'accompagne lation élevée existerait ainsi entre les changements histo-
d'une réduction d'épaisseur de l'épithélium, et d'un apla- pathologiques observés et l'intensité des pressions appli-
tissement de la jonction épithélio-conjonctive. L'importance quées21.
Fig. 2-8 Coupe histologique de la muqueuse buccale : aspect de la jonction épithélio-conjonctive. Marquage (de couleur marron) à l'aide
d'un anticorps anti-laminine, protéine caractéristique de la membrane basale. (Grossissement x 25)

Fig. 2-8a Jonction épithélio-conjonctive chez un patient non por- Fig. 2-8b Chez un patient porteur d'une prothèse amovible, un
teur de prothèse caractérisée par un aspect en doigts de gant. net aplatissement de la membrane basale est observé.

Les lésions de la m u q u e u s e buccale Les hyperplasies


Le développement de lésions muqueuses associées au port Les hyperplasies sont une réaction inflammatoire chronique
d'une prothèse amovible complète est fréquent. Des réac- des tissus due à une prothèse inadaptée, présentant des
tions allergiques à l'un des constituants de la prothèse ont sous-extensions, des bords trop fins... Elles sont localisées
été évoquées, mais les lésions résultent le plus souvent d'un au niveau des bords prothétiques, dans le vestibule gingivo-
trauma mécanique ou d'une irritation chronique liée à la labial ou gingivo-jugal. Ces proliférations hyperplasiques,
plaque microbienne présente sur la prothèse. replis flottants quelque peu fermes, sont simples ou mul-
Les réactions allergiques sont les moins fréquentes. Elles tiples (fig. 2-10).
sont le plus souvent provoquées par un excès de monomère
résiduel dans la résine de la base prothétique, excès présent
dans les résines auto-polymérisables ou lors d'un défaut de
polymérisation à chaud.
Les lésions traumatiques sont de plusieurs types : les
ulcérations, les hyperplasies muqueuses, les crêtes flot-
tantes, les chéilites angulaires.

Les ulcérations

Les ulcérations sont des lésions apparaissant le plus souvent


quelques jours après l'insertion de nouvelles prothèses pré-
sentant des zones en surextension ou un défaut d'équili-
bration occlusale. Ce sont des lésions localisées au contour
net et au fond jaunâtre (fig. 2-9).
Fig. 2-10 Prolifération hyperplasique située dans le vestibule en
relation avec un bord prothétique erroné.

Les crêtes flottantes

Les crêtes flottantes sont composées d'un tissu fibreux


épais, non adhérent au(x) plan(s) profond(s), qui com-
pense la fonte osseuse. Il n'y a pas de changement de
volume mais un changement dé nature des tissus sous-
jacents (fig. 2-11 et 2-12).
Elles se situent le plus souvent dans les régions antéro-
supérieures, lorsque des pressions importantes s'exercent à
ce niveau, par exemple en présence de dents naturelles
Fig. 2-9 Ulcération muqueuse à la face interne de la tubérosité. antagonistes.
- Stomatite de type 3 - Hyperplasie papillaire de la voûte
palatine
Plusieurs facteurs étiologiques sont évoqués : le recou-
vrement de la muqueuse par la prothèse (trauma prothé-
tique, hygiène réduite), des réactions inflammatoires ou
allergiques à différents composants de la prothèse, enfin,
une infection fongique (Candida Albicans).

L'articulation temporo-mandibulaire est décrite comme une


Fig. 2-11 Crête flottante antérieure maxillaire.
diarthrose bicondylienne constituée par le processus condy-
lien, l'éminence temporale et, entre les deux, le disque arti-
culaire. Il s'agit d'une articulation siamoise, où les deux com-
plexes disco-condyliens s'articulent avec les éminences
temporales (fig. 2-13a).

L'articulation cesse sa croissance vers l'âge de vingt ans. Les


surfaces articulaires sont alors arrondies et lisses. Cependant,
cette morphologie se modifie au cours de la vie en réponse
aux surcharges fréquentes auxquelles sont soumises les ATM.
Ces modifications sont liées au nombre, à la morphologie
Fig. 2-12 Coupe histologique d'une crête flottante mettant en évi- occlusale des dents restantes, à l'âge, au type squelettique.
dence un abondant tissu cellulo-graisseux dans les couches pro- Ces changements sont une adaptation physiologique
fondes. Les cellules adipeuses apparaissent comme des « bulles » aux contraintes auxquelles les structures articulaires sont
gris clair. (Coloration bleu de toluidine - grossissement x 63) soumises. Ces contraintes se traduisent par des phéno-
mènes de remodelage qui portent essentiellement sur le
Les chéilites angulaires processus condylien. Ces remodelages sont progressifs,
régressifs, périphériques. Les processus condyliens chan-
Ces lésions, qui affectent les commissures labiales, ont sou- gent de forme, ils s'aplatissent, s'ovalisent, présentent des
vent une origine infectieuse, mais le port d'une prothèse méplats24 (fig. 2-13b).
amovible compte parmi les facteurs prédisposants, notam- Les études radiologiques des structures articulaires
ment des prothèses anciennes avec un effondrement de la démontrent que les altérations condyliennes s'accroissent
dimension verticale d'occlusion. avec l'âge25. Vers 50-60 ans la surface condylienne apparaît
irrégulière (présence d'ostéophytes, de concavités...), au-
delà de 70 ans, l'aspect général est caractérisé par un apla-
tissement des structures (tableau 2-3).
Des études réalisées chez les lapins ont mis en évidence
Le terme de stomatite prothétique est utilisé pour désigner
une corrélation directe entre l'importance des surcharges arti-
une inflammation des muqueuses qui supportent une pro-
culaires et les altérations histologiques observées au niveau
thèse amovible; ce type de lésion atteint plus de la moitié
des patients porteurs de prothèses.
La stomatite sous-prothétique est caractérisée par un Tableau 2-3 Répartitions et types des altérations de la morpholo-
érythème et un œdème d'une partie ou de la totalité de la gie du processus condylien.
muqueuse palatine et des crêtes alvéolaires en contact avec
la prothèse22.
Trois types de stomatites prothétiques ont été décrits par
Newton (1962) 2 3 :
- Stomatite de type 1 - Inflammation simple localisée, se
manifestant par de petites aires d'inflammation locale de
la voûte palatine.
- Stomatite de type 2 - Érythème diffus en relation uni-
quement avec la prothèse.
Fig. 2-13 Évolution de la morphologie condylienne. (Documents J.P. Yung, P. Carpentier)

Fig. 2-13a Articulation temporo-mandibulaire chez un sujet jeune. Fig. 2-13b Articulation temporo-mandibulaire chez un sujet âgé
édenté.

Cliniquement ces altérations évoluent avec des phases


plus ou moins algiques sur une durée de moins d'un an.

Il n'existe pas, en réalité, d'études concluantes sur l'efficacité


des traitements occlusaux dans la prévention ou le traite-
ment des désordres temporo-mandibulaires28.
L'influence de la perte des dents sur l'étiologie des dys-
fonctions doit donc être reconsidérée. Ainsi, si les change-
ments morphologiques augmentent avec l'âge et la perte des
dents, il n'existe pas de corrélation significative avec la pré-
sence de signes ou symptômes de dysfonctions temporo-
mandibulaires29. Bien que de nombreuses études aient
Fig. 2-14 Ostéoarthrose condylienne chez un patient édenté total. considéré l'édentement, et la perte du calage postérieur,
comme un facteur étiologique important, en réalité, une
discal et au niveau du cartilage condylien26. Ces changements adaptation de la fonction intervient grâce au remodelage
répondent jusqu'à un certain seuil au phénomène de remo- osseux30,31. Seuls 5 % de patients édentés, ne portant pas
delage et représentent une adaptation fonctionnelle. de prothèse, présentent des signes moyens de désordres
Cependant, les capacités d'adaptation sont quelquefois temporo-mandibulaires et aucun des dysfonctions sévères.
dépassées, les disques articulaires sont perforés, se déplacent, Par contre, l'instabilité des prothèses, le manque de
mais surtout les phénomènes d'ostéo-arthrose s'installent. Les rétention semblent s'associer avec la présence de bruits arti-
surfaces articulaires deviennent éburnées27 (fig. 2-14). culaires (claquement, crépitation) (fig. 2-15a, b).

Fig. 2-15a Fréquence des bruits articulaires en fonction de la Fig. 2-15b Fréquence des bruits articulaires en fonction de la sta-
rétention de la prothèse mandibulaire. bilité de la prothèse mandibulaire.
Par conséquent, l'édentement total et le port de pro- niques, directement ou indirectement liées au port de la pro-
thèses complètes ne doivent pas être considérés comme thèse, mais aussi un rôle d'adhésion et de rétention. De plus,
des facteurs étiologiques entraînant l'apparition de la présence de mucines facilite la mastication, la déglutition
désordres temporo-mandibulaires. Leur fréquence chez et la phonation33.
l'édenté total est inférieure à celle des patients dentés. Enfin, Les parotides sont des glandes salivaires dites séreuses,
un nouveau traitement prothétique ne doit pas être entre- les glandes sublinguales et sous-mandibulaires sont des
pris uniquement dans le but de traiter une dysfonction, l'étio- glandes mixtes. La salive produite est « plus aqueuse ».
logie de ces désordres restant en fait plurifactorielle. Le flux salivaire n'est pas constant, il existe une grande
variabilité selon les individus, selon les moments de la jour-
née et selon la présence ou non d'une stimulation (3 types :
mécanique ou masticatoire, gustatif, olfactif). Le rythme cir-
cadien régit le flux salivaire avec une sécrétion minimale la
nuit, maximale après une stimulation. Seules les glandes
Chez les patients porteurs de prothèses complètes, la salive salivaires mineures conservent un niveau de sécrétion
remplit des fonctions aussi capitales que nombreuses. Ces inchangé.
fonctions sont bien sûr la préservation et le maintien de l'in- Avec le vieillissement, des changements de structure des
tégrité des tissus de la cavité buccale, mais aussi des rôles glandes salivaires interviennent. La proportion des cellules
biomécaniques et fonctionnels. acineuses, cellules sécrétrices du parenchyme glandulaire,
La réponse à ces fonctions dépend de la quantité et de est réduite, remplacée par du tissu adipeux34. Ces transfor-
la qualité du fluide salivaire sécrété. mations concernent indifféremment les glandes salivaires
majeures et mineures.
Cependant, de façon étonnante, il n'existe pas de modi-
fication évidente du flux salivaire chez les personnes âgées
La salive ou salive totale est un liquide physiologique sécrété en bonne santé35. Au niveau des glandes parotides, qui pro-
partrois paires de glandes salivaires majeures (parotides, sub- duisent de 50 % à 65 % du volume salivaire stimulé, le flux
linguales et sous-mandibulaires) et par des glandes mineures stimulé et non stimulé reste identique quel que soit l'âge
(labiales, buccales, linguales et palatines) (fig. 2-16). des patients36. Mais des études ont montré une diminution
significative de la concentration en mucines salivaires, bien
qu'aucune altération des cellules sécrétoires muqueuses
n'ait été mise en évidence37,38.
Finalement, il reste difficile d'apporter une conclusion
générale sur l'incidence de l'âge vis-à-vis de la sécrétion sali-
vaire, car d'autres paramètres comme l'équilibre alimentaire
et la santé des patients sont des facteurs influant sur la phy-
siologie salivaire39.
La salive possède aussi une activité antibactérienne
grâce à la présence de facteurs immunologiques (IgA sécré-
toires, IgM et IgG) et non immunologiques tels des pro-
téines, des peptides et des enzymes. Elle possède un pou-
voir tampon par l'intervention des bicarbonates (HCO-3 et
H2C03). Enfin, la salive a un rôle important dans la gusta-
tion et elle assure le début de la digestion des aliments.
Fig. 2-16 Glandes salivaires mineures palatines nettement objec-
tivables sur une empreinte à l'alginate dans les secteurs latéraux
postérieurs.
L'existence de pathologies et leurs traitements peuvent être
Les glandes majeures produisent près de 90 % du flux à l'origine de perturbations fonctionnelles des glandes sali-
total en absence de stimulation. vaires. Ces altérations, plus ou moins sévères, sont ou non
Mais la qualité de la salive produite par les glandes sali- réversibles, il s'agit le plus souvent d'une hyposialie (dimi-
vaires mineures est très différente. Ce sont des glandes dites nution de la sécrétion salivaire), voire d'une asialie (absence
muqueuses, sécrétant une salive riche en mucines (glyco- totale de sécrétion).
protéines) qui jouent un rôle capital pour la prothèse Chez les patients âgés, un nombre croissant de patho-
adjointe complète. Ces mucines possèdent une faible solu- logies est observé, et les traitements médicamenteux pres-
bilité, une haute viscosité et élasticité et, enfin, un coefficient crits possèdent des effets secondaires, parmi lesquels fré-
d'adhésion élevé32. Ainsi, elles donnent à la salive quemment une xérostomie (altération de la sécrétion
muqueuse des propriétés essentielles de lubrification et de salivaire) (chapitre 4). Cet effet est plus ou moins transitoire
protection de la muqueuse vis-à-vis des agressions méca- et il disparaît à l'arrêt de la prise du médicament; mais, dans
le cas de pathologies chroniques, une xérostomie perma- 13. Mackenzie IC, Holm-Pederson P, Karring T. Age changes in the
nente due au traitement pharmacologique peut s'installer. oral mucous membranes and periodontium. In : Geriatric den-
De même, après ablation chirurgicale ou atteinte irré- tistry. Copenhagen : Munksgaard, 1986.
versible des tissus glandulaires due à une radiothérapie de 14. Picton DCA, Wills DJ. Viscoelastic properties of the periodontal
ligament and mucous membrane. J Prosthet Dent, 1978 ; 40 :
la sphère oro-faciale, la sécrétion salivaire est réduite défini-
263-272.
tivement.
15. Kydd WL, Daly CH, Waltz M. Biomechanics of oral mucosa. Front
Les conséquences cliniques sont nombreuses et concer- Oral Physiol, 1976; 2: 108-129.
nent simultanément les tissus, les fonctions et le port des 16. Nakashima K, Sato T, Hara T, Minagi S. An expérimental study
prothèses amovibles40 (tableau 2-4). on histopathological changes in the tissue covered with den-
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Chez un patient édenté total, certaines des fonctions physio- de celle des patients dentés, et les forces alors exercées
logiques telles que la mastication, la déglutition, la gustation et représentent seulement 15 % de celles obtenues en den-
la phonation sont plus ou moins altérées. Leur rétablissement ture naturelle2.
est un des objectifs majeurs de nos restaurations prothétiques. L'appréciation de la capacité masticatoire peut être appré-
hendée par la forme du cycle masticatoire, par la force de
morsure, et par l'efficacité masticatoire à proprement parler.

La restauration de la mastication est un des principaux sou- La mastication se caractérise par un cycle de mouvements
haits exprimés par le patient à la fois lors de l'insertion d'une rythmiques tridimensionnels, décomposé en trois temps
première prothèse et lors du renouvellement d'une (abaissement, élévation, contact interdentaire). Chez les
ancienne prothèse. Cette fonction dépend en grande partie sujets édentés, la mastication se déroule comme chez le
du comportement musculaire, qui lui, est altéré par l'âge et patient denté, mais, dans le plan frontal, le cycle de mastica-
l'édentement. tion est plus large et plus court3 (fig. 3-1). De plus, lors de la
phase de fermeture, l'angle du mouvement est plus petit
(fermé) par rapport au plan horizontal (tableau 3-1 ) ; à l'ou-
verture du côté non travaillant le déplacement est plus impor-
Comme tous les autres tissus, les muscles subissent l'in-
fluence du vieillissement. Vers 80 ans la masse musculaire
a diminué d'environ un tiers. En particulier, la densité des
muscles masséter et ptérygoïdien médial est plus faible et
leur section est réduite d'environ 30 %1. De plus, si les sujets
sont édentés, cette réduction de la section musculaire s'ac-
centue de façon significative ; mais l'édentement n'est pas
accompagné de modification de la densité des fibres.
Ainsi, ces évolutions liées à l'âge, mais aussi à l'édente-
ment des patients contribuent aux modifications de la fonc-
tion masticatoire observées chez les édentés totaux.

Fig. 3-1 Cycle de mastication chez un patient denté (a), chez un


La capacité masticatoire des patients porteurs de prothèses patient édenté (b) (angles α,α1 > θ,θ 1 ) ; cycle plus fermé chez
complètes est fortement réduite. Elle équivaut à un sixième les patients dentés.
Tableau 3-1 Valeurs des angles d'entrée et de sortie du cycle de
mastication chez un patient denté et édenté.

tant, le mouvement mandibulaire est plus large. Dans le plan


sagittal, les angles de fermeture et d'ouverture diffèrent entre
les patients dentés et édentés. Enfin, la durée du contact inter-
dentaire est plus longue chez les patients édentés.
Par ailleurs, si chez certains patients le cycle de mastica- Fig. 3-3 Force de morsure en fonction du nombre de dents res-
tantes.
tion est influencé par la morphologie occlusale des dents
prothétiques, chez d'autres patients ce cycle n'est pas modi-
fié, restant spécifique au patient (fig. 3-2) 4 .

La mesure de l'efficacité masticatoire repose sur l'analyse


granulométrique du bol alimentaire mastiqué. Cette effica-
cité est directement liée au nombre des contacts occlusaux
en intercuspidie, et au nombre de dents présentes sur l'ar-
cade.
Il existe des différences importantes entre les sujets den-
tés et les sujets porteurs de prothèses complètes7. Si la taille
des particules alimentaires passées au tamis occupe tou-
jours les mêmes distributions logarithmiques, par contre,
quantitativement chez les patients édentés, les particules de
taille supérieure sont majoritaires. De même, le nombre de
cycles de mastication doit être nettement plus élevé chez le
patient édenté appareillé pour obtenir des particules d'une
taille similaire à celle obtenue chez un patient denté.
Enfin, la dureté et la texture des aliments sont des para-
mètres qui influencent directement l'activité masticatoire.
Dans le groupe des patients édentés, si l'activité musculaire
est réduite, a contrario, la perception de la texture reste pré-
sente. Elle peut être analysée par électromyographie, qui
démontre alors l'adaptabilité de la fonction musculaire. Mais,
chez les porteurs de prothèses, l'adaptation de la fonction
au bol alimentaire reste limitée, malgré la perception de la
texture des aliments8.

Fig. 3-2 Chez un édenté total le cycle de mastication est soit non
modifié (a) ou modifié (b) par la morphologie cuspidienne des
dents prothétiques.

La mastication prépare le bol alimentaire à la déglutition.


Cette dernière fonction est, elle aussi, altérée par le vieillis-
sement et la perte des dents.
Elle varie selon les individus. Avec l'âge, il est communément
admis qu'elle décroît; par contre, une corrélation significa-
tive existe entre le nombre de dents restantes et la force
maximale développée5 (fig. 3-3). Avec le vieillissement, les performances motrices s'altèrent
Chez les porteurs de prothèses complètes les forces notamment au niveau des muscles linguaux, labiaux, man-
occlusales diminuent de 50 %, en particulier par une réduc- ducateurs, avec une diminution de la puissance musculaire9
tion de l'activité des masséters et des temporaux antérieurs6. (fig. 3-4).
devient plus symétrique et, après six mois de port des pro-
thèses, les forces développées par les muscles masticateurs
ont une amplitude plus élevée démontrant ainsi une adap-
tation à la prothèse.
La durée de la déglutition est cependant toujours supé-
rieure par rapport à un patient denté.
Enfin, la qualité des prothèses réalisées est essentielle,
car non seulement elle intervient sur le seuil de stéréogno-
sie mais aussi sur l'activité musculaire et sur les forces déve-
loppées 14,16 .

Fig. 3-4 Fréquence des altérations de la fonction linguale en fonc-


tion de l'âge.

Des troubles de la déglutition s'installent, atteignant les La gustation, ou perception de goûter, est un sens complexe
temps buccal, pharyngien et œsophagien10. Le temps buc- qui résulte non seulement de la mise en jeu d'un appareil
cal est le plus souvent concerné. De plus, le temps de réac- neuro-sensoriel, l'appareil gustatif, mais aussi d'informations
tion des patients âgés s'allonge, la déglutition est plus lente. somesthésiques (pressions exercées, température des ali-
Enfin, la pression exercée par la langue sur la voûte palatine ments, voire nociception)17. Enfin, la perception gustative
diminue 11 . dépend aussi des récepteurs olfactifs, on parle alors d'une
sensation mixte, ou flaveur, répondant à l'association gusta-
tion et olfaction.

La perte des organes dentaires engendre une évolution de


la déglutition.
Les muscles faciaux s'ils participent à la déglutition, Les récepteurs gustatifs, ou bourgeons du goût, sont des
notamment au niveau des lèvres, n'ont pas un rôle essen- structures anatomiques constituées de 20 à 30 cellules
tiel. C'est l'ensemble des muscles linguaux qui domine, la allongées et organisées sous forme d'une structure en « ton-
langue venant s'appliquer d'abord latéralement en gouttière nelet ». Ces cellules réceptrices ont une durée de vie de
contre la voûte palatine. Le bol alimentaire, alors rassemblé 10 jours environ, les plus anciennes sont les plus proches
sur le dos de la langue, va être laminé et « chassé » vers l'oro- du centre du bourgeon et un renouvellement constant existe
pharynx, alors que la langue se plaque contre la voûte pala- par les cellules épithéliales périphériques (fig. 3-5a).
tine d'arrière en avant. Mais avec l'âge, l'habileté motrice de Les bourgeons du goût sont localisés principalement au
la langue décroît, et la position vestibulo-linguale des dents niveau des papilles linguales.
mandibulaires revêt alors une incidence essentielle vis-à-vis La face dorsale de la langue présente, effectivement, de
de la langue et par conséquent, de la stabilité prothé- petites saillies de l'épithélium pavimenteux, les papilles lin-
tique 12,13 . guales. On distingue 4 types morphologiques de papilles:
Si la déglutition est basée sur un ensemble de réflexes - les papilles filiformes;
acquis, elle peut également être perturbée par la perte des - les papilles fongiformes dispersées sur les 2/3 antérieurs
organes dentaires, notamment par l'absence des informa- de la langue, avec une densité maximale à sa pointe
tions issues des propriocepteurs parodontaux. En denture (fig. 3-5b) ;
naturelle, le patient peut détecter des épaisseurs interocclu- - les papilles caliciformes qui dessinent le « V » lingual ;
sales de l'ordre de 10 à 20 µm, de 100 µm chez un porteur - les papilles foliées situées au niveau des bords de la
de prothèse. Par ailleurs, les propriocepteurs parodontaux langue.
participent au contrôle moteur fin des mouvements mandi- Les bourgeons, « organes récepteurs » de la fonction gus-
bulaires; chez l'édenté appareillé, il existe des altérations tative, possèdent une innervation sensorielle spécifique pro-
marquées du contrôle de la direction des mouvements venant de la corde du tympan (VII) pour les 2/3 antérieurs
effectués, des forces exercées, enfin, du contrôle des dépla- de la langue, et du glosso-pharyngien (IX) dans son tiers pos-
cements du bol alimentaire entre les arcades14,15. térieur.
Le port de prothèses complètes permet de restaurer la L'existence d'une sensibilité gustative palatine a été dis-
fonction de déglutition du type adulte, influencée par les cutée par certains auteurs. Mais, la présence de bourgeons
muscles innervés par le trijumeau (V) ; mais elle dépend du goût au niveau du palais dur a été écartée; par contre,
aussi du comportement neuromusculaire du patient et, en dans la région limitrophe entre le palais dur et le palais mou,
particulier, de son niveau de stéréognosie et d'intégration il existe une perception gustative dont les seuils sont très
prothétique. Après l'insertion des prothèses, la déglutition élevés 18,19 .
Fig. 3-5a Bourgeon gustatif, de forme ovoïde, constitué de cel- Fig. 3-5b Papille fongiforme de la langue, caractérisée par un épi-
lules réceptrices allongées). (Coloration hématoxyline éosine) thélium (1) fin et une partie centrale de tissu conjonctif
(2). (Coloration hématoxyline éosine)

perçues dans l'appréciation des caractéristiques des ali-


ments (texture, viscosité, dureté...). Les mécanorécep-
L'origine de la perte du goût (agueusie), de la diminution teurs palatins se trouvent isolés et l'écrasement des ali-
(hypoagueusie) ou distorsion (dysgueusie) de la perception ments entre la langue (donc les bourgeons du goût) et la
gustative est multifactorielle. muqueuse palatine a lieu sur une surface lisse: la voûte
- Sur le plan général, au-delà d'affections neurologiques, palatine prothétique. La reproduction sur l'extrados pro-
des troubles du goût peuvent survenir, notamment lors thétique des reliefs palatins, pour stimuler le caractère sté-
de traitements médicamenteux (antidiabétiques, anti- réognosique de la gustation, reste néanmoins sans résul-
inflammatoires, antiparkinsoniens, psychotropes...). Les tat20.
médicaments peuvent entre autres dégrader le système La température des aliments est aussi un des paramètres
des récepteurs périphériques, modifier la transmission de la sensation gustative. Or, la plaque prothétique en résine
nerveuse des messages, influer sur le renouvellement représente un isolant parfait ne laissant passer ni le froid ni
des cellules réceptrices du bourgeon du goût. Par contre, le chaud. L'apport d'une plaque base métallique améliore ce
le nombre de bourgeons gustatifs ne semble pas décli- phénomène, mais elle ne modifiera en rien la sensation du
ner avec l'âge. patient21.
- Sur le plan loco-régional, la salive est un des facteurs
déterminants de la gustation. En effet, seuls les liquides
et les substances dissoutes peuvent être goûtés. La sti-
mulation doit être fugace, la langue est rincée par la
Sur le plan physiologique, sensations gustatives et sensa-
salive qui, par effet tampon, neutralise la substance
tions olfactives sont très difficilement dissociables. Il est alors
sapide. Par conséquent, toute réduction du flux salivaire
préférable de parler de flaveur, une sensation mixte, et non
influe négativement sur la perception du goût. De
de goût au sens strict.
même, les problèmes d'hygiène, qu'elle soit insuffisante
Comparativement au seuil gustatif, le seuil de percep-
ou excessive, contribuent à modifier les sensations gus-
tion olfactive est très bas et prédomine ainsi sur la fonc-
tatives.
tion gustative. Mais avec le vieillissement, les capacités
Enfin, l'écrasement du bol alimentaire participe à une per- olfactives diminuent, puis chutent brutalement après 70
ception gustative optimale. Or, la diminution des forces mus- ans22. Cette réduction, supérieure à celle observée pour la
culaires et des capacités masticatoires peut expliquer une per- gustation, pourrait ainsi être directement responsable des
ception gustative rapportée comme réduite avec l'âge. doléances des patients âgés. La préférence de ces patients
pour les aliments aux flaveurs accentuées confirme ces
données23.

L'insertion d'une prothèse adjointe complète maxillaire est


presque toujours accompagnée pour les patients d'une forte
anxiété de « perdre le goût ». La voûte palatine est incons-
ciemment associée à la notion de goût, alors que les récep-
teurs gustatifs y sont absents. La phonation est un phénomène complexe, les sons sont
Par contre, le recouvrement du palais par la prothèse émis par le larynx grâce aux vibrations des cordes vocales
entraîne une altération des informations somesthésiques dans le courant d'air respiratoire.
Ils sont modulés par le voile du palais, la langue, les lèvres Les éléments dynamiques
et le positionnement de la mandibule. Les nerfs V, VII, IX, X
En dehors des fricatives, la contraction simultanée des lèvres
et XII assurent le fonctionnement normal de ces éléments de
inférieure et supérieure permet d'émettre les bilabiales (b, p).
modulation des sons24.
Le voile du palais participe au mécanisme vélo-pharyngé
du système de résonance.
La langue n'intervient pas non plus directement dans
l'élaboration des sons, mais elle recherche des appuis sur
En dehors des cordes vocales, l'articulation des phonèmes les dents, les procès ou la voûte palatine. Ces appuis s'ac-
résulte d'un jeu complexe entre des éléments statiques (les compagnent toujours d'une légère pression.
dents, les procès alvéolaires, la voûte palatine) et des élé- Ces éléments dynamiques représentent les modulateurs
ments dynamiques (la langue, les lèvres, le voile du palais)25. des sons.

Les éléments statiques


L'émission des labio-dentales met en jeu les dents, et/ou les
procès alvéolaires mandibulaires et la langue. Cette dernière La perte des dents correspond à une disparition partielle ou
rentre en contact avec les faces linguales des dents ou bien totale des éléments statiques et leur remplacement par une
avec la partie cervicale des procès alvéolaires. prothèse adjointe complète peut se traduire par des modi-
Pour les fricatives (f, v), les dents antérieures maxillaires fications ou des altérations de l'articulation des sons26.
viennent effleurer de leur bord libre la partie supérieure de Ainsi le recouvrement de la voûte palatine par la base
la lèvre inférieure ou zone de Klein. prothétique modifie les appuis linguaux lors de la pronon-
La voûte palatine et les procès alvéolaires sont particuliè- ciation des linguo-palatales, des linguo-dentales et des lin-
rement impliqués dans la prononciation des linguo-palatales guo-alvéolaires. L'importance de l'épaisseur et du profil de
(j, ch), des linguo-dentales (d, t, n), et par des appuis partiels, la base prothétique apparaît ici évidente27.
dans la prononciation des linguo-alvéolaires (s, z) (fig. 3-6a, b). De même, la position des dents antérieures sera déter-
minante dans la prononciation des labio-dentales et des fri-
catives.
Dans de nombreuses techniques, la détermination de la
dimension verticale d'occlusion fait appel à des références
phonétiques25. Les tests phonétiques utilisent l'aspect arti-
culatoire correct des phonèmes pour établir une position
mandibulaire : à un son correct correspond une dimension
verticale phonétique (DVP) optimale - à une dysphonie cor-
respond une DVP sur- ou sous-évaluée. Cependant, ces
techniques restent discutables et semblent utiles surtout au
stade de l'essai fonctionnel lorsque les dents sont présentes
et lorsque l'ensemble des organes paraprothétiques sont
dans une position optimale.
En effet, toutes les sensibilités participent à la régulation
de la phonation. La sensibilité musculaire est essentielle
pour le fonctionnement et la coordination des différents
Fig. 3-6a Lieu d'articulation des consonnes (selon J. Lejoyeux) ;
muscles impliqués; l'ensemble des extérocepteurs de la
les zones en vert clair sont des points d'articulation communs à ces
cavité buccale (des lèvres, de la langue...) participent à cette
différentes consonnes.
régulation. Le rôle du modelage des extrados prothétiques
est ici déterminant, quant au rétablissement d'un espace
phonétique satisfaisant28.

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13. Kawano K, Najb K, Inoue S, Matsumoto N. Influence of the buc- alteration in the oral environment on speech production. J Oral
colingual position of artificial posterior teeth on the pressure dis- Rehabil, 1995;22:295-299.
tribution on the support tissue under a complete denture. J Oral 28. Hue 0, Berteretche MV. Les extrados prothétiques en prothèse
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14. Preti G, Gassino G, Lombardi M, Mazzone P. Monitoring of the Stomatol, 1992; 177: 179-201.
discrimination threshold for interocclusal thicknesses in rehabi-
litated edentulous patients. J Oral Rehabil, 1994; 21 : 185-190.
En prothèse adjointe complète, l'examen clinique est com- thétiques. Ces éléments sont parfaitement distincts, mais ils
plexe, car il doit englober tous les éléments qui concourent peuvent à tout instant s'interpénétrer, pondérant l'effet de
à l'élaboration et à la réussite du traitement de l'édentement l'un sur les deux autres (fig. 4-1).
total, éléments à la fois psychologiques, physiques et pro-

Fig. 4-1 Les composantes de l'examen


clinique permettent d'établir le bilan phy-
siopathologique du patient puis d'élabo-
rer le plan de traitement.

En dehors de l'aspect technique, la réponse à ces ques-


tions découle de la prise en compte de quatre paramètres :
la personnalité du patient ; l'entourage du patient; la cau-
Il peut sembler paradoxal de débuter l'examen clinique par
salité de la maladie ; la relation praticien-patient.
cet élément. Mais, dès le premier rendez-vous, une somme
d'interrogations assaille le patient et le praticien, interroga-
tions qui peuvent se résumer en deux phrases :
- pour le patient la question est la suivante :
« Le praticien est-il susceptible de répondre à mes espé- Le terme « personnalité » dérive du mot latin « persona », qui
rances ? » signifie masque de l'acteur, masque qui donne une image
- de la même manière, pour le praticien : constante, figée de l'individu. Cependant, cette notion de
« Quels sont les désirs et les espérances du patient? » personnalité a fortement évolué. Elle correspond en réalité
à l'organisation dynamique des aspects cognitifs (intellec- de l'examen initial, ce qui peut aboutir à décliner la prise en
tuels), affectifs, conatifs (pulsionnels, volitionnels), physio- charge du patient.
logiques et morphologiques de l'individu.
Cliniquement, pour le praticien, cerner la personnalité L'indifférent
d'un patient, c'est découvrir ce qui se cache derrière le
masque de l'acteur, et ainsi prévoir quelle sera la réaction Tant pour le patient que pour le praticien, le traitement d'un
d'un individu dans une situation donnée. patient indifférent n'offre habituellement que peu de chances
Dans l'Antiquité, deux doctrines furent développées pour de succès. Le patient, qu'il soit jeune ou vieux est apathique,
décrire la personnalité : celle d'Hippocrate, basée sur le tem- n'est en aucun cas concerné par le traitement. Il est simple-
pérament, et celle de Galien, basée sur la physiologie, doc- ment inerte. Sa coopération est purement passive, il ne per-
trines qui donnèrent naissance à la théorie des quatre sévère pas, ne suit pas les conseils prodigués, reporte sur ses
humeurs : les tempéraments sanguin, colérique, mélanco- anciens praticiens l'état dans lequel il se trouve. Le plus sou-
lique et lymphatique. Depuis, tout en subissant l'influence vent, il accepte le plan de traitement, non à cause des expli-
des doctrines d'Hippocrate et de Galien, les typologies ont cations, mais sur l'insistance d'un membre de sa famille. Il
évolué, faisant appel à des aspects plus ou moins spéci- convient cependant de prendre en charge ce type de patient,
fiques tels que la morphologie ou la psychologie. Plus en adaptant la thérapeutique au niveau de l'exigence du
récemment, des typologies plus spécifiquement destinées patient, sans pour autant oublier les règles de base.
à évaluer l'aspect clinique du patient ont été proposées.
Celle exposée par House (1937) se base sur le comporte- À cette classification, Anderson ajoute une cinquième
ment psychologique du patient vis-à-vis des soins dentaires catégorie :
et prothétiques en particulier1. Elle classe les patients en 4
catégories : L'anxieux
Si le traitement n'est pas douloureux, il n'en demeure pas
Le philosophe moins désagréable. La peur et l'anxiété sont les éléments
qui guident le comportement du patient. Les explications
C'est le patient qui présente le meilleur état d'esprit pour
peuvent compenser ces sentiments ou sensations. Mais ce
accepter une prothèse adjointe totale. C'est un patient qui a
type de patient ne peut définir vraiment la cause réelle de
perdu ses dents à la suite de traitements dont il était satis-
son anxiété, qui peut résulter d'une surcharge de travail, de
fait. Il est habituellement rationnel, calme, compréhensif,
l'âge, de la mise à la retraite, de l'isolement ou du change-
coopératif vis-à-vis des exigences techniques inhérentes au
ment de son image personnelle. Tous ces facteurs contri-
traitement. Les informations, les explications permettent au
buent à produire une réponse que l'on peut qualifier de
patient d'accepter facilement les propositions thérapeu-
démesurée.
tiques, de comprendre le rôle de la prothèse dans le réta-
blissement de ses fonctions physiologiques et de son aspect.
Le patient s'implique, organise son emploi du temps,
coopère. Il s'adapte rapidement à sa nouvelle situation pro-
thétique. Heureusement, ce type de patient « idéal » repré- À cette analyse du comportement psychologique propre au
sente la majorité des patients. patient, s'ajoute le rôle joué par l'entourage2. Ceci concerne
les patients qui se rendent à deux à la consultation, l'ac-
compagnant ayant un rôle actif. Il se crée alors un triangle
Le suspicieux
clinique entre le praticien, le patient et l'accompagnant, que
Bien qu'il possède toutes les qualités du patient précédent, le patient soit ou non autonome. Dans ces conditions, l'éva-
le suspicieux requiert beaucoup d'attention et de soins. En luation et la compréhension de la demande thérapeutique
raison de sa recherche de la précision, il réclame de la part doivent tenir compte du type de relations établies entre le
du praticien temps et patience. Ce type de patient demande patient et son accompagnant.
à connaître les détails de chaque temps opératoire, le prati- À ce titre, la composition du couple est très révélatrice,
cien doit se préparer psychologiquement à faire face à ses ce peut être l'époux et l'épouse, la personnalité décision-
exigences. nelle étant souvent l'épouse si l'époux est le patient. Mais,
les couples enfants-parents sont aussi révélateurs, le couple
« fils-père » est peu fréquent et il entraîne rarement un désé-
L'agressif quilibre décisionnel. Par contre, le couple « fille-mère »
Le patient est instable, non coopératif, excitable, très craintif, domine largement, leurs relations sont souvent plus tendues
agressif. Il semble impatient, irritable, exprime des voire opposées. Le rôle, le pouvoir décisionnel du praticien
demandes impossibles à satisfaire, réagissant défavorable- se trouvent réduits, le conduisant à agir avec souplesse.
ment à la prothèse et réclamant de nombreux rendez-vous Les positions affectives qui existent au sein du couple sont
pour des retouches. Le pronostic de succès est limité. Il est donc adoucissantes ou aggravantes. Le praticien doit, alors,
souhaitable de diagnostiquer ce type de comportement lors favoriser les premières et réduire l'influence des secondes.
Mais on doit toujours se remémorer la phrase de
Stoetzel 13 : « La satisfaction du patient tient à ce qu 'il trouve
Sous cette terminologie, les causes physiques de l'édente- chez le praticien ce qu'il attend. »
ment ne sont bien évidemment pas abordées3. Mais cet
aspect de l'anamnèse est très révélateur de l'état d'esprit du
patient, il consiste à lui faire expliquer les événements ou
circonstances qui l'ont conduit à cet état.
Deux types d'explications sont proposés, mettant en évi-
dence la notion de responsabilité, notion à laquelle s'ajoute L'analyse de la composante physique correspond à l'éva-
celle de culpabilité : luation des données objectives du patient. Elle dépend des
D'une part, le patient estime que son état lui est totale- quatre facteurs suivants.
ment imputable, qu'il est responsable, allant même jusqu'à
s'excuser des problèmes posés; il pourra s'exprimer ainsi:
« Je n'ai pas de crête, mon cas est difficile, je sais que vous
faites pour le mieux. » Bien que les motifs soient, au premier abord, évidents
D'autre part, certains patients présentent un discours très concernant le traitement de l'édentement total, ils diffèrent
différent : « J'ai perdu mes dents car un dentiste a fait tels selon qu'il s'agit d'un premier traitement de l'édentation
gestes, voire telles erreurs » au premier rang desquelles on totale ou du renouvellement d'une prothèse existante.
peut retrouver : « On a nettoyé mes dents, depuis, elles bou-
gent fortement. » Le patient n'éprouve non seulement Dans le premier cas, le praticien doit mettre en évidence
aucune responsabilité, mais surtout reporte la responsabi- les aspirations et espérances du patient, ses craintes et ses
lité de son état sur le praticien traitant avec le cortège de appréhensions.
revendications que cela implique, et impliquera. Souvent, les motivations du patient revêtent deux
formes : les unes exprimées immédiatement, les autres non.
Les premières sont la suppression de gènes, de douleurs
liées aux dents restantes, à une prothèse instable, le réta-
Les trois éléments précédents trouvent leur concrétisation blissement de l'esthétique, de la mastication. Les secondes,
dans l'établissement de la relation praticien-patient4-7. Deux non exprimées, ont un rôle très important, car elles tradui-
questions se posent alors : comment s'établit-elle et quelle sent les réelles aspirations du patient. Elles peuvent être
est son importance dans la réussite prothétique? d'ordre esthétique, fonctionnel etc. Seule la prise en compte
L'établissement de cette relation est complexe et résulte de cette double motivation permettra au praticien de réel-
de la communication verbale et non verbale qui s'établit lement répondre aux aspirations du patient. D'autre part, le
entre le patient et le praticien. mode d'expression, le vocabulaire employé, les termes uti-
La communication verbale découle de la manière dont lisés permettent de caractériser le profil psychologique de
les échanges s'établissent entre le patient et le praticien celui-ci.
grâce aux substantifs, aux adjectifs employés, mais aussi de Le patient est ensuite invité à préciser :
la manière dont s'organisent ces échanges : le patient intro- - les circonstances qui l'ont conduit à perdre ses dents
verti dont on doit « arracher » des précisions, informations, (caries, mobilités, négligence, peur) ;
ou le patient extraverti atteint d'une logorrhée délicate et dif- - depuis quand? (La durée de l'édentement est très
ficile à stopper. importante car elle donne, en fonction du volume res-
La communication non verbale résulte de l'influence de tant des crêtes, des indications sur la résistance ou non
différents paramètres qui interagissent. Ceux concernant la à la résorption.)
vision, la posture, la gestuelle du praticien vis-à-vis du patient - les différents traitements qui ont été effectués, ainsi que
sont fondamentaux. le type des éventuelles prothèses adjointes partielles.
En général, la communication verbale est plus particu- L'examen des anciennes prothèses fournit de nom-
lièrement dévolue aux problèmes techniques et cognitifs breuses indications sur la position initiale du plan occlu-
alors que la communication non verbale a une influence sal, la position des dents antérieures ou postérieures.
importante sur le comportement émotionnel de la relation
praticien-patient. Dans le deuxième cas, il s'agit du renouvellement des
L'incidence clinique de cette relation sur le succès thé- prothèses existantes. En dehors d'événements majeurs tels
rapeutique est diversement interprétée. Elle est pour certains que perte ou fractures, le renouvellement d'une prothèse
auteurs essentielle dans le succès prothétique. À l'opposé, est effectué à partir de l'analyse des qualités et défauts des
pour d'autres elle n'a aucune influence. L'ensemble de ces prothèses existantes. Cependant, les critères d'évaluation
opinions est sans aucun doute excessif. Mais il semble qu'il varient entre le praticien et le patient. Les souhaits du patient
n'existe aucune corrélation entre la personnalité et l'insatis- sont plus précis, fonctionnels (66 %), esthétiques et fonc-
faction, et seulement une faible corrélation entre l'insatis- tionnels (21 %) ou esthétiques (6 %). Alors que les critères
faction et l'acceptation psychologique du patient8"12' du praticien sont plus orientés vers la rétention 14, 15.
Les affections articulaires (fig. 4-2)
Trois d'entre elles doivent retenir plus particulièrement notre
L'âge du patient attention 20 (tableau 4-1).
Il ne s'agit pas de l'âge dit légal du patient, mais, en réalité,
de l'âge physique qui résulte de la somme des altérations
et maladies auxquelles le patient a été soumis, au cours de
sa vie. Il convient d'avoir à l'esprit que le traitement d'un
patient édenté jeune et en bonne santé tend à disparaître
au « bénéfice » de patients beaucoup plus âgés dont l'état
de santé est largement amoindri. La prise en compte des
difficultés liées à l'âge, aux différentes affections, aux effets
secondaires de la pharmacopée prescrite est capitale dans
l'établissement du plan de traitement (chapitre 28).

Les maladies générales


Elles sont nombreuses et certaines d'entre elles ont des
conséquences directes sur la réalisation et le pronostic de la
prothèse16-19. Fig. 4-2 Aspect d'une main arthrosique.

Tableau 4-1 Affections articulaires et conséquences prothétiques.

Les affections des organes de la vision (fig. 4-3 a, b, c, d)


L'altération de la vision revêt différentes formes mais toutes ont la même conséquence : un contrôle de l'hygiène difficile21
(tableau 4-2).

Tableau 4-2 Affections ophtalmiques et conséquences prothétiques.

Fig. 4-3a Vision normale d'une barre. Fig. 4-3b Vision avec cataracte.
Fig. 4-3c Vison avec atteinte maculaire. Fig. 4-3d Vision avec glaucome.

Les affections neurologiques


Elles se manifestent essentiellement par des tremble- Le praticien évalue successivement les éléments sui-
ments dont les formes sont variées. Contrairement au par- vants28, 29 : le visage, les tissus mous, les articulations.
kinsonisme, le tremblement d'attitude n'existe pas au
repos. Il se manifeste de manière sélective dans le main- Le visage
tien d'une attitude mettant en jeu une activité tonique.
L'épreuve du verre vide et du verre plein est à ce titre par- De face, le visage peut être symétrique, asymétrique, de
ticulièrement révélatrice22. Un patient n'éprouve aucune forme carrée, allongée, ovoïde; le profil peut-être convexe,
difficulté pour tenir un verre vide mais il tremble lorsque rectiligne, concave, enfin le type facial hyperdivergent, bra-
le verre est plein, en raison de l'effort d'attention que cela chycéphale ou mésocéphale. Conjointement, l'évaluation de
implique. Cela contre-indique toutes les techniques qui la hauteur respective des étages moyen et inférieur du visage
requièrent l'attention précise du patient, que ce soit lors de permet au praticien d'apprécier de manière rapide la dimen-
l'élaboration ou du port de la restauration prothétique sion verticale d'occlusion fixée par les dents naturelles res-
(tableau 4-3). tantes ou les prothèses existantes. L'attention se porte enfin
sur la vitalité du regard, la présence ou l'absence de ptose
Les altérations systémiques des paupières, autant de facteurs indirects qui traduisent le
degré d'attention du patient.
Elles sont importantes, car nombre d'entre elles présentent
non seulement des manifestations buccales, mais surtout,
Les tissus mous
hypothèquent le port de la prothèse23 (tableau 4-4).
Ceux-ci jouent un rôle capital dans la rétention et la stabilité
des prothèses. Chez les patients dentés jeunes ou porteurs
Les effets secondaires de la pharmacopée d'une prothèse immédiate, le tonus des muscles mastica-
La prise de médicaments s'accompagne de nombreux effets teurs et des muscles de l'expression est le plus souvent
secondaires dont les conséquences au niveau de la cavité « normal », favorisant de manière directe et indirecte la réten-
buccale sont importantes : parmi celles-ci la sécheresse buc- tion prothétique. Par contre, le tonus musculaire s'affaiblit
cale, les manifestations neurologiques, les altérations du chez les patients âgés ou édentés de longue date, ce qui
goût24"27 (tableau 4-5). provoque une diminution de la rétention. À l'affaiblissement

Tableau 4-3 Affections neurologiques et conséquences prothétiques.


Tableau 4-4 Altérations systémiques et conséquences prothétiques.

Tableau 4-5 Liste (très restreinte) des médicaments ayant des du tonus, s'ajoutent la diminution de la puissance muscu-
effets secondaires au niveau de la cavité buccale. laire et la réduction du rôle des extérocepteurs.
Le contour et le volume des lèvres sont souvent altérés
par la perte des dents ou par une prothèse mal réalisée. Cela
entraîne l'apparition de lèvres trop rentrées, l'augmentation de
l'angle naso-labial, l'accentuation du sillon labio-mentonnier,
la disparition de la gouttière philtrale et de la zone vermillon.
La future prothèse devra compenser ces altérations tout
en respectant l'équilibre musculaire. La longueur de la lèvre
supérieure est évaluée, car elle influe sur la stabilité prothé-
tique : les lèvres courtes exercent d'importantes pressions sur
l'extrados de la prothèse, alors que les lèvres longues en exer-
cent moins. Ces éléments doivent être complétés par la
détermination du type de sourire qui est un élément capital,

Fig. 4-4 Perlèche et DVO sous-évaluée.


non seulement comme facteur stabilisateur ou déstabilisa- La voûte palatine
teur de la prothèse, mais aussi dans l'esthétique, la ligne du
Ses caractéristiques conditionnent la stabilité prothétique.
sourire pouvant présenter une concavité supérieure, infé-
Les voûtes plates ou en « U » sont très favorables, ce qui
rieure ou être rectiligne30. Enfin la présence de perlèche tra-
n'est pas le cas des voûtes arrondies, ogivales, qui n'offrent
duit une fuite salivaire liée entre autres facteurs à une dimen-
sion verticale d'occlusion sous-évaluée ou à un montage trop que peu de stabilisation.
lingualé des canines et prémolaires mandibulaires, mais aussi De plus, au niveau de la suture intermaxillaire, la voûte
peut traduire l'existence d'une carence martiale31 (fig. 4-4). palatine peut présenter différentes caractéristiques mor-
phologiques :
- Soit une fissure centrale qui part du voile du palais et se
L'examen articulaire prolonge vers l'avant (fig. 4-5).
L'examen des articulations temporo-mandibulaires se fait par - Soit des reliefs osseux, les torus palatins, qui sont de cinq
simple palpation au niveau des pôles externes, de la zone types, le type 5 étant le plus défavorable car il réduit de
rétro-condylienne et du méat acoustique32-34. Ces palpa- manière importante la surface d'appui (fig. 4-6).
tions peuvent révéler des douleurs qui traduisent successi-
vement une altération des insertions condylo-discales, une Les crêtes
capsulite ou une compression de la zone bilaminaire.
La crête idéale est large, avec des parois relativement paral-
Cependant, chez un édenté total, ces manifestations
lèles, d'une hauteur de 6 à 8 mm par rapport au fond du
algiques sont extrêmement rares. A contrario, les bruits arti-
culaires, tels que des crépitements qui traduisent l'altération vestibule. Par contre, des crêtes de faible hauteur traduisant
des surfaces articulaires du type ostéoarthrose, sont relati- l'importance de la résorption, généralisée ou localisée,
vement plus fréquents, mais en absence de douleurs ils offrent une sustentation et stabilisation réduites. Distalement,
n'ont que peu d'incidence sur le traitement. chaque crête se prolonge par les tubérosités.

Les tubérosités
Elles sont favorables à la sustentation et à la stabilisation si elles
L'examen endobuccal sont arrondies, bien marquées, recouvertes par un tissu ferme
et adhérent, et enfin si leur partie la plus basse se situe à 2 mm
L'examen est conduit en trois temps :
au-dessus du plan occlusal. Inversement, elles sont défavo-
- Examen visuel
rables si elles présentent des contre-dépouilles vestibulaires
- Examen par palpation
consécutives à une mauvaise conception de l'ancienne pro-
- Examen du jeu musculaire fonctionnel
thèse, un volume très important suite à des diapneusies, si
elles sont recouvertes de tissus dépressibles non adhérents,
L'arcade maxillaire ou enfin si elles sont très peu marquées, voire absentes.
L'examen visuel évalue successivement:
L'aspect des tissus
La forme de l'arcade
Idéalement, la muqueuse est de couleur rose, traduisant une
Elle peut être carrée, triangulaire, ovoïde, symétrique ou muqueuse saine orthokératosique, alors qu'un aspect blan-
asymétrique en raison des phénomènes de résorption. Les châtre traduit une hyperkératose. Par contre, les muqueuses
arcades symétriques, peu résorbées, et la présence des émi- rouges, érodées, hyperhémiées, la présence de papules signent
nences canines assurent une meilleure stabilité. une dyskératose voire une stomatite prothétique35 (fig. 4-7).

Fig. 4-5 Voûte palatine avec fissure centrale. Fig. 4-6 Torus palatin.
même manière, latéralement, le frein canin peut atteindre
le sommet de la crête. Distalement, en avant de la tubéro-
sité on découvre quelquefois un frein correspondant aux
insertions postéro-supérieures du buccinateur. Il doit être
systématiquement recherché, car il est particulièrement apte
à déstabiliser une prothèse adjointe (fig. 4-8).

Fig. 4-7 Ortho et hyperkératose muqueuse.

L'examen par palpation digitale ou instrumentale concerne


les tissus mous :
La résistance à la pression des tissus qui recouvrent la voûte
palatine est estimée à l'aide de la pulpe du doigt ou d'un bru-
nissoir en « T ». Elle permet de délimiter la situation et l'éten-
due des zones dépressibles, comme les zones de Schroeder, Fig. 4-8 Frein buccinateur postéro-supérieur : 1) le frein buccina-
ou des zones particulièrement dures comme les tori. teur ; 2) la zone de réflexion ; 3) le raphé ptérygo-mandibulaire.
La texture des crêtes et des tubérosités est ensuite éva-
luée de manière à découvrir les parties éventuellement
dépressibles ou flottantes. Sur le versant vestibulaire des Le voile du palais
crêtes, la muqueuse attachée s'arrête en principe à mi-hau- C'est une région capitale pour la rétention de la prothèse
teur, puis se poursuit par une muqueuse libre non attachée, maxillaire, car elle permet la création du joint postérieur qui
pour aboutir à la zone de réflexion qui est plus ou moins s'étend entre les deux tubérosités. Prolongeant le palais dur,
large selon le degré de résorption. le palais mou est constitué de fibres aponévrotiques qui s'in-
sèrent fermement sur la partie postérieure des lames hori-
L'examen du jeu musculaire évalue: zontales du palatin (fig. 4-9). Cette aponévrose présente
quelquefois un renforcement médian qui s'étend entre
La zone de réflexion l'épine nasale postérieure et l'aponévrose du tenseur du
Elle est marquée par trois freins : au niveau antérieur, le frein voile, parfaitement visible sous forme d'une bandelette
de la lèvre unique, multiple ou en nappe s'insère plus ou blanche. Latéralement, le voile du palais est limité par le
moins bas, atteignant quelquefois la papille incisive. De la raphé ptérygo-mandibulaire (ligament ptérygo-mandibu-

Fig. 4-9 Coupe dans le plan sagittal médian du


voile du palais:
a) lame horizontale du palatin ;
b) voile du palais et tenseur du voile ;
c) ptérygoïdien médial ;
d) releveur du voile.
(Document P. Carpentier)
- La ligne de vibration postérieure se place à la jonction
entre l'aponévrose du tenseur du voile et la partie mus-
culaire du palais mou. Elle correspond à la jonction entre
la partie du voile qui présente de faibles déplacements
et la partie qui effectue de forts déplacements lors de la
fonction (fig. 4-11).
La manœuvre de Valsalva met en évidence les trois types
de voile du palais (fig. 4-12):
- Classe I - Au repos le palais mou s'étend horizontalement,
ses déplacements fonctionnels sont limités. Cette situa-
tion est très favorable à la réalisation d'un joint postérieur.
- Classe II - Il correspond à une position intermédiaire
entre le voile de classe I et le voile de classe III.
- Classe III - Ce type de voile est certainement le plus déli-
Fig. 4-10 Brunissoir en forme de T évaluant la tension du raphé
cat à gérer, deux types peuvent être distingués :
ptérygo-mandibulaire.
- Classe llla - Au repos, le voile est fortement incliné,
lors de la manœuvre l'inclinaison s'accentue. Il s'as-
socie à des voûtes palatines profondes.
laire). La tension de ce dernier est évaluée en appliquant un - Classe lllb - Au repos le voile est fortement incliné,
brunissoir en « T » sur son insertion alors que le patient est mais lors de la manœuvre l'inclinaison s'accentue,
bouche grande ouverte (fig. 4-10). sauf dans la partie centrale où il se soulève, provo-
Cliniquement, il est préférable d'analyser le comporte- quant un manque d'étanchéité dans le joint posté-
ment fonctionnel du voile du palais pour déterminer la rieur. Les voûtes palatines ogivales avec une fissure
position du joint postérieur. Celui-ci se place entre deux centrale s'associent à ce type de voile (fig. 4-5).
lignes repères, les lignes de vibration antérieure et posté-
rieure: Les fossettes palatines, plus antérieures, se situent de part
- La ligne de vibration antérieure se situe à la jonction des et d'autre du plan sagittal médian. Elles correspondent aux
tissus qui recouvrent le palais mou et le palais dur. Elle canaux d'excrétion des glandes salivaires accessoires situées
est déterminée par la manœuvre de Valsalva. Le patient dans les tissus de la partie postérieure du voile. Elles ne doi-
est invité à souffler par le nez alors que le praticien pince vent pas être systématiquement utilisées comme repère pour
les narines. Cela provoque un abaissement du voile; déterminer la position du joint postérieur.; Si elles se situent

Fig. 4-11 a) Voile au repos;


b) position de la ligne de vibration
antérieure 1) position de la ligne de
vibration antérieure ; 2) position de la
ligne de vibration postérieure.

Fig. 4-12 a) Voile de classe I ; voile de classe II ; b) voile de classe llla et b.


en moyenne à 1,31 mm en avant de la ligne de vibration Les limites de la surface d'appui
antérieure, cette valeur est peu fiable36-38. En effet, d'une part
Du côté vestibulaire, dans la région antérieure, la zone de
elles ne sont pas toujours présentes et d'autre part leur posi-
réflexion est marquée par les insertions des muscles men-
tion n'est pas constante (tableau 4-6; fig. 4-13).
tonniers. Dans les régions latérales, la largeur des plan-
chettes d'Ackermann ou « buccal shelf », qui assurent en pre-
Tableau 4-6 Fréquence du nombre des fossettes palatines. mier la sustentation de la prothèse, est d'environ 4 à 6 mm,
mais quelquefois elles peuvent être beaucoup plus étroites
(fig. 4-14). Dans la région postérieure, la surface d'appui est
limitée par les insertions basses du masséter sur la partie
externe du trigone, distalement par les insertions basses du
raphé ptérygo-mandibulaire (fig. 4-15). En fonction de la
tonicité et de la position des insertions basses du masséter,
cette limite présente trois formes (tableau 4-7).

—Fig. 4-13 Position des papilles palatines par rapport à la ligne de


vibration antérieure.

L'arcade m a n d i b u l a i r e
Comme à l'arcade maxillaire l'examen clinique est conduit
Fig. 4-14 Les planchettes d'Ackermann ou appuis vestibulaires
en trois temps:
(Buccal shelf) se situent entre le site d'avulsion des dents posté-
L'examen visuel évalue : rieures mandibulaires et la ligne oblique.

La forme de l'arcade

Elle dépend de la forme du corps de la mandibule. Sa forme


générale est comparable à celle décrite pour l'arcade maxil-
laire, ovalaire, triangulaire, symétrique ou asymétrique.

Les crêtes

La crête idéale dans le sens antéro-postérieur est parallèle


au plan occlusal, dans le sens frontal sa forme est arrondie
du type 3 d'Atwood. Mais la crête peut être beaucoup plus
résorbée voire négative. Dans ce dernier cas, le praticien doit
toujours rechercher deux éminences osseuses situées au Fig. 4-15 Formes de la partie disto-vestibulaire de la limite du tri-
niveau incisif de part et d'autre du plan sagittal médian. Ces gone induites par les insertions du masséter.
éminences correspondent à l'insertion des fibres des
muscles mentonniers (fig. 4-18a).
Distalement, les crêtes se prolongent par les trigones
Tableau 4-7 Incidence de la tonicité des insertions masséterines
rétromolaires.
sur la forme de la limite disto-vestibulaire de la surface d'appui au
niveau du trigone rétromolaire.
Les trigones rétromolaires

Ce sont des structures triangulaires plus ou moins résis-


tantes, recouvertes d'un épithélium fin qui, lui, recouvre un
tissu alvéolaire lâche. À ce niveau les fibres du buccinateur
et du constricteur supérieur du pharynx, les fibres basses du
temporal convergent sur le raphé ptérygo-mandibulaire.
Du côté lingual, les limites de la surface d'appui ne peu-
vent être appréhendées par l'examen visuel, elles seront
appréciées par palpation.

L'aspect des tissus


Les tissus de recouvrement sont examinés pour en déter-
miner les aspects physiologiques ou pathologiques grâce à
leur couleur, leur apparence, la présence ou l'absence de
lésions ou de blessures. Les critères de jugement sont iden-
tiques à ceux précédemment exposés pour le maxillaire.
L'examen se poursuit par la palpation du sommet et des
versants vestibulaires et linguaux de l'arcade.

Le sommet des crêtes


Fig. 4-17 Tori linguaux
La pulpe du doigt détermine les caractéristiques de la
muqueuse de recouvrement, l'idéal étant une muqueuse
ferme et adhérente sur l'ensemble de l'arcade. La présence Le côté vestibulaire
de reliefs ou d'épines osseuses saillantes, de points ou de
Dans la région antérieure en cas de résorption importante,
régions douloureux comme la proximité du nerf alvéolaire
si elles ne sont pas visibles, les deux éminences osseuses
inférieur en cas de forte résorption, doit être détectée.
para-sagittales sont recherchées par palpation. Leurs ver-
Distalement, l'examen se termine par l'évaluation des tri-
sants vestibulaires correspondent aux limites antérieures de
gones rétromolaires, qui dans l'idéal doivent être bien des-
la surface d'appui prothétique (fig. 4-18a, b).
sinés, fermes et recouverts par une muqueuse adhérente.

Le côté lingual Fig. 4-18 Éminences osseuses bilatérales correspondant à l'in-


Son évaluation est capitale, elle s'adresse successivement: sertion du muscle mentonnier.
- aux épines génioglosses pour en déterminer la hauteur.
En effet, en cas de forte résorption elles se situent au-
dessus du sommet des crêtes, les insertions du génio-
glosse, allant même jusqu'à devenir saillantes, dures à la
palpation (fig. 4-16);
- aux exostoses ou tori mandibulaires (fig. 4-17). Ceux-ci
se situent le plus souvent entre la première et la deuxième
prémolaire au niveau du plancher buccal et en cas de
forte résorption pratiquement au même niveau que la
crête. Chez les patients édentés, ils sont souvent placés
à la partie linguale des crêtes au niveau canine;
- aux lignes mylohyoïdiennes, qui peuvent être saillantes
ou non, irrégulières ou lisses. Les crêtes saillantes, dou-
loureuses à la palpation sont un élément négatif car elles
peuvent s'opposer à l'insertion d'une prothèse39. Fig. 4-18a Vue intra-buccale des insertions du muscle mentonnier.

Fig. 4-T6 Épines génio-glosse très développées associées à une


résorption très forte de l'arcade mandibulaire. Fig. 4-18b Dissection des muscles mentonniers
Latéralement, l'émergence inférieure du nerf alvéolaire L'examen des relations inter-arcades
inférieur est déterminée, son degré de sensibilité est évalué
La mandibule est guidée en relation centrée pour évaluer
par pression digitale. Latéralement, la ligne oblique limite la
les difficultés que cette recherche implique, difficultés qui
partie vestibulaire externe de la prothèse.
peuvent conduire le praticien à choisir une méthode plus
adaptée aux conditions cliniques lors de la phase de l'enre-
Les organes périphériques gistrement des relations intermaxillaires. Le praticien place
la mandibule dans une position voisine de la dimension ver-
La langue ticale d'occlusion et examine le type de relation qui s'installe
C'est certainement l'élément qui joue le rôle le plus important entre les crêtes40. Le parallélisme entre les crêtes supérieure
dans la rétention et la stabilité de la prothèse mandibulaire. et inférieure est un élément favorable alors que les diver-
Les langues basses larges assurent une bonne stabilisation et gences, qu'elles soient dues à l'une des arcades ou aux deux,
rétention de la prothèse mandibulaire alors que les langues sont défavorables.
étroites, les positions rétractées, la langue faisant le « gros dos »
ne favorisent pas la rétention prothétique (fig. 4-19). La salive
L'évaluation sa de qualité est réalisée par une palpation des
surfaces d'appui ; la sensation d'adhérence entre la pulpe du
doigt et la muqueuse signe une asialie ou une importante
diminution du taux en mucine, de même l'étirement de la
salive entre deux doigts permet d'évaluer la teneur en
mucines de la salive41 (fig. 4-21). Le volume salivaire est
plus difficile à réellement évaluer. De façon simple, il est pos-
sible de placer un morceau de sucre sous la langue.
Normalement en 2 minutes il doit avoir fondu.

Fig. 4-19 Langue défavorable avec une posture dite « faisant le


gros dos ».

Les lèvres

La position, le volume, le tonus et la longueur des lèvres


contribuent de manière capitale à la stabilité prothétique. Les
lèvres courtes, peu souples, toniques sont défavorables. De
même, la présence d'un pli horizontal qui barre la région du
philtrum traduit une lèvre supérieure courte.
L'orientation de la lèvre inférieure, au repos et lors de
l'ouverture, est aussi analysée car elle conditionne l'orienta- Fig. 4-21 Évaluation de la qualité de la salive en l'étirant entre le
tion du bourrelet du porte-empreinte puis du montage de doigt et la prothèse.
dents prothétiques (fig. 4-20).

Les examens radiographiques

La radiographie panoramique
Chez les patients édentés totaux ou partiels, la réalisation
d'un cliché orthopantomographique s'impose. Il permet
d'évaluer les volumes osseux dans les régions latérales, le
volume des sinus, la position du nerf alvéolaire inférieur et
de son émergence au niveau du trou mentonnier, l'épais-
Fig. 4-20 Orientation très défavorable de la lèvre inférieure en seur ou la dimension du corps de la mandibule 42,43 , l'épais-
haut et en arrière lors de l'ouverture. seur de la corticale, l'importance de l'os spongieux et ses
caractéristiques (le type de trabéculation, son aspect, sa den- Chez les patients partiellement dentés l'examen radio-
sité). De plus, il met en évidence les dents incluses, encla- graphique rétro-alvéolaire doit venir en complément de
vées, les apex « oubliés », les tumeurs bénignes ou malignes. l'examen clinique. Il permet d'évaluer la morphologie radi-
La fréquence des découvertes « fortuites » varie selon les culaire des dents présentes, et de définir leur valeur intrin-
auteurs de 18 % à 41 %. Dans ces études, les éléments le sèque.
plus fréquemment retrouvés sont des racines restantes, des
radio-opacités, des dents incluses (tableau 4-8). La téléradiographie
Cet examen ne s'impose en aucune façon lors de la phase
Tableau 4-8 Fréquence des éléments intra-osseux découverts lors
diagnostique. Il peut secondairement être demandé en pré-
d'un examen panoramique.
sence d'un fort décalage des bases osseuses, de fortes asy-
métries et devra être réalisé dans des conditions bien pré-
cises: présence de maquettes d'occlusion réglées en
occlusion de relation centrée, à la dimension verticale d'oc-
clusion la plus exacte possible avec des objectifs thérapeu-
tiques bien définis.

La cinématique mandibulaire
Les altérations morphologiques condyliennes entraînent
souvent une modification des trajectoires lors des diffé-
rents mouvements d'excursions.L'évaluation de la forme
et de l'inclinaison des déplacements condyliens peut se
révéler particulièrement significative. Les enregistrements
Cependant la découverte de dents incluses, d'apex res- graphiques type axiographie simplifiée sont très révéla-
tants, ne doit pas entraîner leur avulsion systématique. Les teurs de l'inclinaison et de la forme des trajectoires46, 47
dents profondément incluses, en l'absence de toute réac- (fig. 4-23a, b).
tion, doivent être conservées. Cependant, le patient doit être
informé de la présence de ces éléments, et prévenu des
risques et bénéfices de l'intervention ou de l'absence d'in-
tervention.
La symétrie des branches montantes, la forme de la tête
condylienne sont recherchées, l'asymétrie pouvant être liée
à une fracture condylienne ancienne, un remodelage impor-
tant par aplatissement consécutif à un phénomène d'os-
téoarthrose (fig. 4-22). Ces constatations peuvent expliquer
certaines difficultés qui apparaîtront lors de l'enregistrement
des relations intermaxillaires et lors du montage 44,45 . Fig. 4-23 Trajectoires condyliennes chez le patient édenté total :
a) trajectoire normale ; b) trajectoire pathologique.

Les prothèses existantes doivent être examinées avec soin 48 .


Le but est de relier les différentes remarques et critiques
exprimées par le patient, aux qualités et aux défauts relevés
par le praticien sur les prothèses, et ainsi de déterminer les
points à l'origine de difficultés ou au contraire favorables.
L'examen porte sur cinq points essentiels.

La surface d'appui
Fig. 4-22 Fracture sous-condylienne basse entraînant une forte
asymétrie mandibulaire : 1 ) éminence temporale ; 2) fragment frac- Au maxillaire, l'absence de rétention est-elle due à une mau-
turé; 3) processus condylien. vaise conception et réalisation (épaisseur, forme, position)
du joint vestibulaire et du joint postérieur, voire d'une sur-
face d'appui sous étendue (absence de recouvrement des
tubérosités par exemple)?
Lorsque l'examen clinique est terminé le praticien doit éta-
De même, à l'arcade mandibulaire l'absence de joint
blir un bilan objectif et complet du cas clinique selon les trois
sublingual, le non-franchissement des lignes mylohyoï-
volets précédemment décrits, de manière à établir son plan
diennes, le non-recouvrement des trigones rétromolaires
de traitement.
peuvent expliquer le manque de rétention, de stabilité de la
prothèse mandibulaire.

L'occlusion
Il se compose essentiellement de questions :
Les caractéristiques occlusales sont examinées; le type de Dans quelle catégorie se situe le patient? Est-ce un cas
dents employé (dents cuspidées, non cuspidées), le maté- favorable ou un cas défavorable? Si oui, quel est le pro-
riau (dents porcelaine, dents résine) et leur degré d'usure; blème, comment le traiter?
l'aspect général du montage, asymétrique ou non, la pré- Quels sont les espérances et désirs du patient? Pouvons-
sence des molaires sur les trigones ou tubérosités. Le niveau nous y répondre et comment? Doit-on contourner le pro-
et l'orientation du plan occlusal sont évalués au niveau de blème?
l'arcade mandibulaire, en vérifiant si la langue occupe une
position basse et étalée, position stabilisant la prothèse. La
dimension verticale d'occlusion, la qualité de l'occlusion d'in-
tercuspidie maximale, la mise en évidence de contacts pré-
maturés en occlusion de relation centrée, sont aussi contrô- Quels sont les points ou zones de difficultés? Altérations de
lées. la surface d'appui, présence de blessures liées au port de la
prothèse existante, problèmes muqueux, relations squelet-
tiques erronées, position et forme de la langue, nature et flux
Les extrados salivaire, problèmes généraux...
La forme des extrados vestibulaires et l'épaisseur de la voûte
palatine sont examinées, autant de paramètres qui sont à
l'origine de gênes insidieuses. Cet examen est réalisé à la
fois de manière extra-buccale et intra-buccale pour évaluer Des erreurs existent-elles sur la prothèse existante? Justifient-
le comportement des muscles, en particulier au maxillaire elles les doléances du patient? Si oui, comment y remédier?
supérieur dans la région du buccinateur et de l'orbiculaire Quelle technique d'empreinte choisir? Quelle esthé-
des lèvres. tique? L'occlusion est-elle erronée? Quel schéma occlusal,
quelles dents utiliser?
L'esthétique Si les questions sont nombreuses, les réponses se doi-
vent d'être précises et sûres.
Les qualités esthétiques des prothèses existantes sont esti-
mées, selon des critères purement techniques, par rapport
à d'éventuels documents que possède le patient et en fonc-
tion de l'opinion qu'exprime ce patient. Aucune de ces ana-
lyses ne doit avoir une prédominance sur l'autre. En effet,
malgré le jugement du praticien, certains patients sont satis-
faits de l'esthétique existante, d'autres ne veulent rien chan- L'établissement du bilan permet d'élaborer le plan de traite-
ger de peur que cela soit remarqué, enfin certains exigent ment. Celui-ci se compose de trois grandes phases ou pos-
un profond changement. Dans ce cas, le praticien doit expli- sibilités : la phase préprothétique, la phase prothétique, et la
quer au patient les limites techniques, les avantages et phase post-prothétique49.
inconvénients de son choix. La phase préprothétique comprend la correction
préalable de certaines anomalies ou altérations osseuses et
muqueuses des surfaces d'appui. Mais elle concerne aussi
L'hygiène des prothèses
les problèmes occlusaux, esthétiques, le décalage des bases
L'examen des prothèses traduit immédiatement les soins osseuses, la prise en charge des problèmes psychologiques.
apportés ou non à leur entretien : présence de tartre au La phase prothétique correspond à l'élaboration pro-
niveau des collets, usures localisées par un brossage intem- prement dite de la prothèse. Elle se compose d'une phase
pestif,- coloration provoquées par le tabac le thé ou tout autre clinique consacrée aux choix des techniques, des matériaux
substance; enfin, décolorations provoquées par certains d'empreinte, au choix du montage des dents prothétiques
types de produits de nettoyage. et d'une phase technique: la prise d'empreinte, l'occlu-
sion etc. L'ensemble de ces choix dépend des données ana-
tomiques et physiologiques du patient.
La phase post-prothétique est consacrée au rétablis- En fonction du bilan l'approche thérapeutique est diffé-
sement et à la concrétisation de l'équilibre prothétique, qu'il rente (fig. 4-24, 4-25a, b, c, d).
soit psychique, tissulaire ou biomécanique.

Fig. 4-24 Bilan et solutions


thérapeutiques.

Fig. 4-25a, b Plans de traitement envisageable en fonction des conditions cliniques.


Fig. 4-25c, d Plans de traitement envisageable en fonction des conditions cliniques.

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Lors de l'examen clinique, si certaines anomalies tissulaires, Les médicaments
musculaires, osseuses, squelettiques ont été mises en évi-
L'action de l'hygiène peut être complétée par la prescription
dence, celles-ci doivent être, dans certaines conditions, trai-
de médicaments anti-fongiques tels que :
tées et corrigées avant l'élaboration de la prothèse définitive
- Nystatine (Mycostatine®, comprimés ou suspension) :
lors d'une phase dite phase préprothétique. Elle comprend
en comprimés, 1 à 2 comprimés à chaque prise, 3 à
des thérapeutiques non chirurgicales ou chirurgicales.
4 fois par jour en dehors des repas, ou bien pour per-
mettre une action directe, les comprimés seront écra-
sés et déposés sur les lésions pour une action directe
sur celles-ci ; la suspension est utilisée en badigeonnage
4 à 6 fois par jour, pendant 3 semaines.
- Amphothericine (Fungizone suspension orale®) sous
Les thérapeutiques non chirurgicales s'adressent à certaines forme de suspension ; le patient réalise 3 à 4 bains de
altérations des muqueuses de la surface d'appui, au com- bouche par jour pendant 4 semaines.
portement des muscles masticateurs et linguaux. Elles - Micozalone (Daktarin gel buccal®) sous forme de gel
concernent le patient et la prothèse. appliqué sur l'intrados prothétique pendant 15 jours.
Cette durée ne doit pas être dépassée car la Micozalone
est absorbée au niveau de la cavité buccale et peut inter-
agir avec les anticoagulants.
Elles sont tout particulièrement destinées à la surface d'ap- - Lactacyd® à 1 6 % dans lequel la prothèse est immer-
pui et aux muscles. Elles font appel aux techniques suivantes : gée pendant au moins 10 minutes. En 2 à 4 jours, cela
provoque une disparition complète des Candida
Albicans par l'établissement d'un pH 5,2. Par contre, il
L'hygiène est capital de parfaitement rincer la prothèse pour éviter
Le brossage soigneux des surfaces d'appui, de la prothèse, de modifier ensuite le pH salivaire2-4.
en particulier au niveau de l'intrados, est la méthode la plus
simple et la plus efficace pour supprimer les manifestations
inflammatoires muqueuses, manifestations liées à la plaque Le port de la prothèse
bactérienne1. La brosse à dents souple associée à l'emploi Il est bien sûr impossible de prescrire la suppression des pro-
de dentifrice, l'enduction des surfaces d'appui avec des gels thèses pendant 72 heures, temps nécessaire théoriquement,
contenant des anti-inflammatoires entraînent la diminution au rétablissement de l'homéostasie des tissus épithélio-
de l'inflammation; les bains de bouche à base de chlor- conjonctifs qui recouvrent la surface d'appui. Mais le patient
hexidine contribuent aussi à la restauration de l'intégrité tis- est invité à réduire au maximum la durée du port de sa pro-
sulaire. thèse dans la journée, et surtout la nuit si le port est habituel.
De plus, laisser la prothèse à l'air libre, au sec, pendant la nuit ment utilisée. Il est préférable de réhabiliter les tissus lésés
est particulièrement indiqué en cas d'infection candidosique, lors de la phase post-prothétique. Les détails des séquences
car cela entraîne la destruction des Candida Albicans5. opératoires sont décrits et abordés ultérieurement6 (chapitre
21).

L'équilibre occlusal
Les corrections des dents prothétiques, que ce soit par meu-
Dans la mesure où les prothèses existantes sont corrigées,
lage des faces occlusales ou par adjonctions de résine sur
modifiées, et ce de manière irréversible, ces thérapeutiques
celles-ci, permettent au praticien de rétablir en priorité la
ne peuvent être conduites que si les conditions suivantes
dimension verticale d'occlusion, le plan occlusal, et l'occlu-
sont respectées :
sion de relation centrée. Il est conseillé de conserver un relief
- Le patient doit être, au préalable, informé de cet état de
cuspidien sur les dents maxillaires, mais de réaliser un plan
fait et doit donner son accord. Il est cependant préférable
occlusal lisse à l'arcade mandibulaire. Cette technique contri-
de conduire cette phase préprothétique à l'aide du dupli-
bue à supprimer les réflexes d'évitement et, ainsi, participe
cata de la prothèse existante, de manière à ne pas alté-
au rétablissement d'une bonne coordination des muscles
rer la prothèse du patient (chapitre 27).
élévateurs et propulseurs (fig. 21-19).
- La prothèse existante ne doit pas être trop inadaptée,
c'est-à-dire que l'étendue de la surface d'appui, la dimen-
sion verticale d'occlusion, le plan occlusal, l'esthétique Le comportement neuromusculaire
sont relativement satisfaisants (fig. 5-1). Aux corrections occlusales, il est possible d'ajouter des exer-
- Le patient doit coopérer, être informé de la durée et des cices musculaires. Pour symétriser l'action des muscles masti-
objectifs du traitement proposé. cateurs, effacer les réflexes acquis erronés, le patient est invité
- Le patient doit être parfaitement autonome, de manière à à effectuer des mouvements de propulsion, de latéralités selon
se rendre aux rendez-vous de manière sûre, pour garantir des séquences décrites en leur temps par Boos7. Pour facili-
la rapidité du traitement et surtout éviter la dégradation des ter ces exercices, l'utilisation d'un point d'appui central s'avère
matériaux employés, dégradation dont les conséquences très utile. Celui-ci est fixé sur des maquettes d'occlusion qui
sur la surface d'appui sont particulièrement néfastes. sont confiées au patient. Le patient est invité à exécuter des
Les corrections de la prothèse permettent de restaurer mouvements de propulsion, de latéralité, 2 fois par jour pen-
l'intégrité des tissus de la surface d'appui, de rétablir l'équi- dant 10 à 15 minutes. L'amplitude, la coordination, la précision
libre occlusal, et de coordonner le comportement musculaire. des mouvements s'accroissent, traduisant la disparition des
altérations du comportement musculaire8,9 (fig. 5-2).

Fig. 5-1 Prothèse inadaptée à la réalisation d'un traitement pré-


prothétique.

Fig. 5-2 Point d'appui central fixé sur des maquettes qui sont
confiées au patient.
La surface d'appui
La suppression de blessures plus ou moins étendues, de La langue doit aussi être prise en compte lors des trai-
lésions inflammatoires, la recherche de la stabilité de la pro- tements préprothétiques. En effet, le plus souvent elle se
thèse existante font appel aux techniques de réhabilitation place en position haute et postérieure pour maintenir la pro-
tissulaire. Celles-ci peuvent être réalisées au stade prépro- thèse maxillaire ou pour éviter la gène provoquée par un
thétique ou post-prothétique. L'inconvénient majeur de l'ap- montage erroné des dents prothétiques mandibulaires,
proche préprothétique est d'allonger de manière importante dents antérieures trop en arrière, dents postérieures trop lin-
la longueur du traitement sans que cela n'amène réellement guales. Pour pallier cette parafonction, le patient est invité à
un plus thérapeutique. Elle ne doit être qu'exceptionnelle- placer la pointe de la langue sur des petits reliefs créés sur
l'extrados lingual, au niveau des collets des incisives de la toujours être réalisées avec prudence et réserve, car les
prothèse existante10. De même, les faces linguales des dents freins contribuent de manière importante à la stabilisation
mandibulaires sont meulées pour augmenter l'espace et à la rétention de la prothèse. Les interventions se feront
dévolu à la langue. Ces deux techniques favorisent l'étale- le plus souvent selon le principe de la plastie en Z, dont
ment de la langue et sa position basse. Certains auteurs les berges sont, ensuite, suturées en première intention.
comme Stracke cité par Lejoyeux invitent le patient à tenir - De supprimer les tubérosités proéminentes qui parfois
un crayon avec la langue. Cet exercice force la langue à dépassent le plan occlusal. Elles correspondent le plus
s'aplatir, à s'étaler, et ainsi, contribue à la stabilisation de la souvent à un excès de tissus fibro-conjonctifs, ce qui per-
prothèse mandibulaire 11,12 . met une plastie en quartier d'orange (fig. 5-3a, b, c).

Ces techniques concernent les tissus muqueux recouvrant


la surface d'appui, la zone de réflexion, les tissus osseux
sous-jacents à la surface d'appui et les bases osseuses.
Ces actes chirurgicaux ont, bien sûr, pour objectif d'amé-
liorer la stabilité, la sustentation, la rétention, l'esthétique, mais
ce sont toujours des interventions importantes, lourdes, sur-
tout chez les patients âgés. Cela conduit le praticien à devan-
cer les interrogations du patient et bien sûr à y répondre. Pour
cela, les précautions suivantes doivent être prises13-17 :
- Le praticien doit être parfaitement conscient des désirs Fig. 5-3a Aspect de la tubérosité avant l'intervention.
et espérances du patient et de son entourage vis-à-vis
de la prothèse.
- Les limites techniques de la restauration prothétique doi-
vent être parfaitement exposées, car souvent les patients
attendent de retrouver le confort que leur offraient leurs
dents naturelles.
- Les risques, les séquences opératoires, le suivi post-opé-
ratoire doivent être parfaitement exposés et expliqués.
- Psychologiquement, le patient doit accepter la proposi-
tion. Les patients sceptiques ou critiques ne sont justi-
ciables de ces approches thérapeutiques qu'après avoir
été parfaitement informés de l'importance de leur parti-
cipation au succès. Tout manque de coopération pro-
voque un échec.
- Le risque opératoire est toujours présent, les suites opé-
Fig. 5-3b Plastie en quartier d'orange l'incision allant jusqu'au
ratoires parfois délicates. contact osseux tubérositaire. (Intervention Philippe Casamajor)
- Les interventions ne devront être entreprises que dans
la mesure où toutes les indications, les contre-indica-
tions, d'origine générale ou locale, auront été prises en
compte et présentées au patient.
Le praticien doit avoir pour devise :
«Avant le traitement, les explications font partie du dia-
gnostic... Après le traitement, les explications sont des
excuses » G.R. PARR17
- De corriger les hyperplasies muqueuses qui n'ont cédé d'un joint périphérique efficace. Cependant, l'analyse
ni aux techniques de brossage, ni aux techniques de visuelle rapide qui met en évidence des contre-dépouilles
réhabilitation tissulaire. En particulier, les doubles, voire ne suffit pas. En effet, les tissus composant la contre-
triples lèvres, provoquées par une situation erronée d'un dépouille peuvent être soit un tissu fibro-conjonctif dense et
bord prothétique, cèdent rarement aux traitements par épais, soit un tissu osseux recouvert d'un épithélium mince.
résine à prise retardée. Le diagnostic final impose l'évaluation par sondage de
- De supprimer l'hyperpapillomatose liée aux stomatites l'épaisseur des tissus de recouvrement, complétée éven-
de classe III de Newton qui n'ont pas répondu aux trai- tuellement par des examens radiographiques (fig. 5-4).
tements pharmacologiques. Pour cela, la lésion est éli-
minée avec un bistouri électrique lorsqu'elle est de
faible étendue, ou érodée ou cruentée à l'aide d'une
pointe diamantée montée sur turbine, si elle est éten-
due 18 .
- D'éliminer les crêtes flottantes : leur ablation chirurgicale
n'est indiquée que si le tissu flottant altère la stabilité
prothétique et si les techniques d'empreinte spécifiques
à ces conditions cliniques ne s'avèrent pas satisfai-
santes19.
- D'augmenter la hauteur des crêtes: l'approche impli-
quant les tissus mous vise à approfondir le vestibule.
Pour cela différentes techniques de greffes épithéliales,
d'épithélialisation secondaire, de vestibuloplastie sous-
muqueuse ont été proposées. Cependant, l'ensemble
de ces techniques n'a pas procuré des résultats béné-
fiques à long terme, mais de nombreux inconvénients
tels que des paresthésies du nerf alvéolaire inférieur
Fîg. 5-4 Diagnostic différentiel entre la contre dépouille d'origine
(25 % des cas), une augmentation de la résorption, muqueuse ou osseuse: a) aspect externe de la tubérosité; b) en
40 à 50 % de plus lors de la première année 20-22 . De présence d'une contre dépouille d'origine muqueuse, l'aiguille à
plus, ce sont des interventions traumatiques, particuliè- anesthésie pénètre profondément pour retrouver le contact
rement chez les patients âgés et fragiles. C'est pour cela osseux; c) en présence d'une contre dépouille d'origine osseuse
qu'elles sont rarement utilisées. l'aiguille pénètre peu.

Dans tous les cas, immédiatement après l'intervention,


les sutures réalisées, la prothèse adjointe doit être réinsérée En présence de tissu fibreux épais, l'intervention est
de manière à protéger les zones de l'intervention et guider contre-indiquée, car la dépressibilité des tissus autorise, le
la cicatrisation. La mise en place de résine à prise retardée plus souvent, l'insertion de la prothèse. En présence de tissu
dans la prothèse existante y contribue. L'occlusion, la dimen- fibreux mince, les corrections doivent être limitées de
sion verticale, le plan d'occlusion doivent être parfaitement manière unilatérale sur un segment restreint. Par contre, ce
rétablis pour répartir au mieux les charges occlusales et sta- type d'approche chirurgicale ne doit jamais être réalisé dans
biliser les prothèses. Le patient conserve la prothèse entre la région antérieure. En effet, la préservation de cette région
24 et 36 heures sans l'enlever de manière à favoriser une est capitale pour assurer la stabilité et la sustentation de la
parfaite cicatrisation. Huit jours après, les points de suture prothèse. De plus, c'est une région fortement soumise à la
sont enlevés, le matériau à prise retardé éliminé dans sa tota- résorption.
lité, puis remplacé par un matériau neuf.
Les tori
À l'arcade supérieure, la suppression des tori palatins
n'est indiquée que si le volume de l'exostose gêne la parole,
Les interventions osseuses sont soustractives ou additives. si son extension postérieure s'oppose à l'établissement du
joint postérieur, si l'étendue compromet la stabilité de la pro-
Les techniques soustractives thèse (fig. 5-5a, b). À la mandibule, la suppression des tori
mandibulaires est indiquée dans la mesure où ils créent des
Les plasties osseuses permettent de corriger les structures
contre-dépouilles et s'opposent à l'établissement d'un joint
osseuses suivantes : sublingual. L'élimination de certaines épines osseuses, de
petites exostoses, de spicules doit être pratiquée avec beau-
Les contre-dépouilles
coup de précautions et de réserves, car la chirurgie osseuse
Elles ne doivent être corrigées que si elles s'opposent, d'une s'accompagne de phénomènes de résorption variés mais
part à l'insertion de la prothèse et, d'autre part, à l'obtention souvent importants.
Fig. 5-5 Tonus palatin.

Fig. 5-5a Torus palatin et tubérosités hyperdéveloppés, imposant Fig. 5-5b Scanner 3D préchirurgical, permettant l'analyse qualita-
une chirurgie préprothétique. tive et quantitative des tissus et composants du tonus.

Les dents incluses - Les apex « oubliés »

Leurs avulsions ne sont indiquées que s'il y a effraction Les corrections chirurgicales des anomalies squelettiques
de la table osseuse ou de la muqueuse. Par contre, si l'élé- s'imposent parfois. Aux précautions exposées précédem-
ment est profondément inclu dans l'os spongieux, sans ment s'ajoutent d'autres paramètres.
lésion périphérique, il est préférable de le laisser. Cette atti- Cela implique:
tude impose bien sûr l'accord du patient, selon le principe - Un patient parfaitement motivé et totalement informé
du consentement éclairé, et cliniquement, des contrôles selon les principes du consentement éclairé.
périodiques pour éviter tout accident. - La consultation de deux chirurgiens, le patient effectuant
En cas d'intervention, celle-ci devra toujours être réalisée lui-même le choix.
avec une destruction osseuse minimale pour éviter d'ac- - Une coopération rigoureuse entre le praticien, le chirur-
centuer la résorption. gien et le patient.
- La réalisation d'un cliché céphalométrique, la mandibule
Les techniques additives placée en occlusion de relation centrée, à la bonne
dimension verticale grâce à des maquettes d'occlusion.
Pendant de nombreuses années les praticiens ont tenté de
Les clichés confirment l'origine squelettique des pro-
restaurer, d'augmenter la hauteur des crêtes en plaçant des
blèmes rencontrés.
greffons osseux d'origine iliaque ou costale ou bien des sub-
- La simulation de l'intervention sur articulateur.
stituts osseux. Cependant, à long terme, les résultats ne sont
- La préparation par le praticien, en accord avec le chirur-
pas satisfaisants. Ces techniques sont actuellement aban-
données dans le cas de port de prothèse adjointe conven- gien, d'un guide chirurgical.
tionnelle, à la différence des cas où la mise en place d'im- - Une intervention chirurgicale soigneuse où le praticien
plants est prévue (fig. 5-6). est présent.
- Un suivi post-opératoire rigoureux.
- Le respect des indications et contre-indications médi-
cales propres à toutes interventions chirurgicales.
Les approches de chirurgie orthognathique peuvent trai-
ter les anomalies squelettiques dans les trois sens de l'es-
pace 23, 24 .

Traiter les supraclusies


En cas de prothèse unimaxillaire, les fortes égressions du
bloc incisivo-canin mandibulaire, associées à une classe II
div. 1 majeure, ou provoquées par l'absence d'antagonistes,
aboutissent à une morsure de la muqueuse palatine. Ces
conditions cliniques s'opposent à l'insertion d'une prothèse
adjointe. L'intervention du type Koële permet une impaction,
accompagnée ou non d'un mouvement de version de l'en-
Fig. 5-6 Hydroxyapatite en voie de désinclusion ou expulsion. semble du bloc incisivo-canin (fig. 5-7).
laire. Pour cela l'intervention du type Lefort I libère l'arcade
maxillaire de la base du crâne et, grâce au guide chirurgical,
le segment osseux est placé dans la position recherchée
(fig. 5-8a, b, c et d).

Rétablir l'espace prothétique


En absence de contacts occlusaux antagonistes, les prémo-
laires et molaires maxillaires égressent, dépassant le plan
occlusal pour finalement entrer en contact avec la crête anta-
goniste. L'espace prothétique est alors fortement diminué,
voire absent et le plan occlusal particulièrement perturbé.
Les interventions sectorielles du type Schuchardt permettent
de remonter les segments égressés, corrigeant le plan occlu-
sal et rétablissant l'espace prothétique (fig. 5-9a, b, c) 26 .
Fig. 5-7 Intervention dite de Köehle.
Ces différentes approches chirurgicales imposent d'une
part de simuler les déplacements souhaités sur les modèles
d'études montés en articulateur, puis dans un deuxième
Compenser les décalages des bases osseuses temps de préparer des guides chirurgicaux. Ceux-ci permet-
Les décalages très importants des bases osseuses rendent tent au chirurgien lors de l'intervention de replacer, après
impossible la stabilité de la prothèse. Ces décalages peu- l'ostéotomie, les différents fragments de manière précise,
vent être compensés par un déplacement de l'arcade maxil- répondant ainsi aux objectifs thérapeutiques.

Fig. 5-8 Correction du décalage des bases osseuses :

Fig. 5-8a Cas de classe III squelettique nécessitant une correction Fig. 5-8b Simulation sur articulateur de l'avancée maxillaire.
chirurgicale.

Fig. 5-8c Guides chirurgicaux préparés sur articulateur. Fig. 5-8d Schéma d'une intervention de Lefort I d'avancée maxil-
laire.
Fig. 5-9 Rétablissement de I'espace prothétique en vue de la rea-
lisation d'une prothèse complete.

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En 1947, à propos des empreintes, Merril Swenson écrivait : Partant des plans profonds, les artérioles remontent à tra-
« Les techniques, les méthodes, les matériaux, changent, vers la matrice extracellulaire pour aboutir dans les digitations,
disparaissent, mais les principes fondamentaux demeurent au niveau de l'anse capillaire, lieu des échanges métabo-
constants. Les effets d'annonce en faveur d'une technique liques avec les couches germinatives épithéliales. La vascu-
sensationnelle, de matériaux magnifiques peuvent se révé- larisation artériolaire franchit l'anse capillaire, et se poursuit
ler trompeurs car les résultats ne sont pas toujours specta- ensuite par des veinules qui regagnent les plans profonds
culaires. La revendication de la perfection pour toutes les pour rejoindre la vascularisation veineuse (fig. 6-1).
techniques ou méthodes dans la construction d'une pro-
thèse complète doit se baser sur la conception et non sur
la technique et le matériau. »1 Épithélium
En dehors de l'obtention d'un simple modèle qui repré-
sente les caractéristiques morphologiques des surfaces
Membrane
d'appui maxillaires et mandibulaires permettant d'élaborer
basale
une prothèse, la prise d'empreinte doit répondre aux trois
objectifs suivants :
- Respecter l'intégrité tissulaire, pour assurer la pérennité
de la restauration.
Conjonctif
- Répondre aux qualités mécaniques indispensables au
rétablissement des fonctions.
Fig. 6-1 Artérioles (a) remontant vers les plans superficiels au
- Rétablir l'esthétique. niveau de l'anse capillaire (b) puis redescendant vers les plans pro-
fonds par les veinules (c).

Les échanges métaboliques effectués au niveau de


Proposé par Paul Housset en 1931, le principe du respect l'anse capillaire sont perturbés par les altérations vasculaires,
de l'intégrité tissulaire fut ensuite repris par De Van, qui écri- les modifications de la rhéologie sanguine, les perturbations
vait « Il est plus important de maintenir ce qui reste plutôt métaboliques (fig. 6-2). En particulier, les affections d'origine
que de remplacer ce qui manque. » générale telles que le diabète, l'hypertension artérielle, les
Au stade de l'empreinte, le respect de l'intégrité tissu- phénomènes locaux tels que des compressions plus ou
laire concerne essentiellement les tissus muqueux qui moins localisées, plus ou moins longues, plus ou moins
recouvrent la surface d'appui. Lors de cette phase clinique, fortes des tissus, provoquées, par exemple, par la prise d'em-
les pressions exercées sur les tissus ne doivent pas altérer preinte, le port d'une prothèse adaptée a fortiori inadaptée
la circulation sanguine au niveau des anses capillaires ou uni- ont une incidence directe sur les trois facteurs qui partici-
tés micro-circulatoires2. pent aux échanges métaboliques (fig. 6-3).
Fig. 6-2 Interactions réciproques entre 3 groupes de facteurs sur
l'unité microcirculatoire : U.M.
S.V. : système vasculaire.
E.S. : éléments figurés du sang.
T.S. : tissu de soutien.

Fig. 6-3 Incidence des pathologies générales sur la physiopathologie microcirculatoire au niveau de l'anse capillaire.

Fig. 6-4 Incidence de l'insertion prothétique (temps 0) sur le débit


sanguin (7 jours : forte diminution, 40 jours : légère augmentation,
suppression de la prothèse : retour au débit initial).
Le ralentissement du débit sanguin provoque une stase,
associée à une hypoxie plus ou moins étendue, plus ou
moins longue, avec son cortège de conséquences directes Définition
et indirectes. En effet, les neurotransmetteurs libérés, telle la
On appelle sustentation la résistance des tissus ostéo-
substance P, ont un effet direct sur l'état inflammatoire et la
muqueux à l'enfoncement de la prothèse.
résorption des tissus de soutien (fig. 6-4, 6-5) 3-7 .
La sustentation est effective si :
- La surface d'appui est maximale sans pour autant entra-
ver le libre jeu des muscles et leurs insertions.
- Les tissus les plus aptes à résister à la résorption sont
incorporés et spécifiquement sollicités durant la fonction.
- Les tissus les plus aptes à résister aux mouvements d'en-
foncement procurent une parfaite résistance aux forces
fonctionnelles.
- Les caractéristiques viscoélastiques et hémodynamiques
des tissus de soutien sont évaluées de manière à offrir
une résistance homogène vis-à-vis des bases prothé-
tiques lors de la fonction.
La sustentation maintient la constance des relations
entre l'intrados et les structures osseuses et muqueuses qui
constituent la surface d'appui, garantissant ainsi la précision
des relations occlusales.
Chez un patient édenté total, la surface d'appui offerte
par la muqueuse est en moyenne de 24 cm 2 au maxillaire
et 14 cm 2 à la mandibule12. Mais en dehors de la simple
évaluation de l'étendue de la surface d'appui, il convient
d'analyser les caractéristiques des tissus qui permettent
d'obtenir une sustentation immédiate et à long terme.
La sustentation immédiate découle principalement des
Lors des phases d'empreintes, la prise en compte, la com- caractéristiques intrinsèques des tissus muqueux et osseux
préhension, l'obtention des qualités mécaniques (sustenta- alors que la sustentation à long terme résulte surtout de leur
tion, stabilisation, rétention) sont le préalable indispensable résistance à la résorption.
à la réalisation d'un traitement de l'édentement total. Ces
facteurs contribuent de manière directe et immédiate non
Le tissu muqueux
seulement à l'obtention des qualités techniques de la pro-
thèse, mais aussi au confort psychologique du patient8"11 La sustentation immédiate offerte par la muqueuse dépend
(fig 6-6). de sa composition histologiques, de son orientation vis-à-vis
Lors des phases d'empreintes, les qualités mécaniques des forces fonctionnelles et de ses propriétés viscoélastiques
successivement recherchées sont la sustentation, la stabili- ou hémodynamiques.
sation et la rétention. Ainsi, C.O. Boucher divise la surface d'appui muqueuse
en trois régions13:
- La surface d'appui primaire - Elle se compose d'un tissu
ferme, adhérent, peu vascularisé, recouvert d'un épithé-
lium kératinisé. Ce type de tissu est par nature capable
de résister aux charges fonctionnelles.
- La surface d'appui secondaire - Les tissus sont peu épais,
richement vascularisés, ce qui explique leur couleur plus
rosée. Ces tissus sont moins résistants aux pressions que
les précédents.
- La surface de non-appui - Elle comprend trois types de
tissus : les zones où l'épithélium et le tissu conjonctif sous-
jacent sont très minces et ne peuvent en aucune façon
supporter une quelconque pression comme au niveau
des tori, des exostoses ; les zones où les tissus recouvrent
des émergences vasculaires comme au niveau de la
Fig. 6-6 Interrelations entre les qualités mécaniques de la pro- papille incisive et du trou mentonnier; certaines zones
thèse et les incidences psychologiques et physiologiques. (D'après des crêtes où les tissus muqueux recouvrent des struc-
Jacobson)6 tures osseuses dont la corticale a disparu (fig. 6-7a, b).
Levin conçoit la sustentation de manière différente, et l'existence de techniques d'empreinte qui déplacent sélec-
propose une classification qui se base sur l'orientation des tivement certaines parties de la muqueuse de manière à
tissus de soutien par rapport aux forces fonctionnelles14. répartir la charge occlusale harmonieusement.
Trois parties sont à nouveau identifiables :
- Surface d'appui primaire - Zones des crêtes édentées Le tissu osseux
qui sont orientées à angle droit par rapport aux forces
occlusales et qui habituellement ne se résorbent pas, La sustentation immédiate offerte par les structures
- Surface d'appui secondaire - Zones qui ne sont pas per- osseuses maxillaires et mandibulaires est sûre. Les seules
pendiculaires aux forces occlusales ou bien qui sont per- difficultés résultent de la présence de reliefs tels que des
pendiculaires aux forces occlusales mais qui se résorbent. tori, des émergences vasculo-nerveuses (foramen menton-
- Surface d'appui fragile - Zones où les tissus sont très nier - canal incisif) qui peuvent altérer la muqueuse par pin-
mobiles, c'est-à-dire toutes les régions vestibulaires qui cement ou générer des douleurs par compression.
n'offrent aucune possibilité de sustentation mais qui sont À la mandibule, une zone est particulièrement dévolue
requises pour la rétention (fig. 6-8a, b). à la sustentation, les planchettes d'Ackermann ou appuis
À cela s'ajoutent les propriétés hémodynamiques et vis- latéraux (buccal shelf) 14 (fig. 4-14). Ces zones osseuses
coélastiques des tissus qui recouvrent la surface d'appui. s'étendent entre les sites d'extraction des molaires et la ligne
Celle-ci se déforme plus ou moins sous l'effet des pressions oblique. À ce niveau, l'os du type cortical lisse résiste parti-
fonctionnelles. Mais l'importance de ces déformations varie culièrement aux phénomènes de résorption, en raison de la
selon les régions concernées15 (fig. 6-9). Ceci justifierait stimulation des insertions postéro-inférieures du buccina-

Fig. 6-7 Répartition des surfaces d'appui primaires, secondaires et de non-appui, selon Boucher.

Fig. 6-7a Au maxillaire : a) surface d'appui primaire ; b) surface Fig. 6-7b À la mandibule : a) surface d'appui primaire ; b) surface
d'appui secondaire; c) surface de non-appui-, d'appui secondaire.

Fig. 6-8 Répartition des surfaces d'appui primaires, secondaires et de non-appui, selon Levin.

Fig. 6-8a Au maxillaire : a) surface d'appui primaire; b) surface Fig. 6-8b À la mandibule : a) surface d'appui primaire; b) surface
d'appui secondaire, c) surface de non-appui. d'appui secondaire.
Fig. 6-9 Au niveau des
points A et B, sous l'action
d'une pression le compor-
tement de la muqueuse est
similaire, mais l'amplitude
des déplacements varie
entre ces deux points à la
fois lors de l'application de
la pression et lors de la
phase de récupération.

teur. Leur largeur varie de 4 à 6 mm sur une arcade de ovoïdes, triangulaires ou les arcades dont les proéminences
dimension moyenne et de 2 à 3 mm sur une petite arcade. canines ont disparu. Les voûtes ovoïdes ne fournissent
À long terme, la sustentation résulte de la résistance des aucune stabilité, contrairement aux voûtes plates ou ogi-
tissus au phénomène de résorption, que cette dernière soit vales.
d'origine physiologique ou pathologique accentuée par les À la mandibule, les structures anatomiques favorisant la
différents facteurs prothétiques 16,17 . stabilité prothétique sont peu nombreuses. Les crêtes sont
souvent peu élevées voire négatives. L'utilisation par la pro-
thèse des régions rétro-mylohyoïdiennes est alors capitale
car ce sont les seuls éléments qui diminuent efficacement
les déplacements de la prothèse mandibulaire18 (fig. 6-10).
Définition
La stabilité prothétique correspond à la résistance offerte par Le facteur musculaire
les reliefs et la forme générale des arcades, aux forces de
Le rôle stabilisateur des muscles de la cavité buccale résulte
renversement.
de l'action conjuguée de l'orientation des fibres musculaires,
Contribuant de manière majeure au confort physiolo-
et de l'équilibre qui s'établit entre les pressions linguales et
gique, elle est fonction de facteurs anatomiques, muscu-
vestibulaires.
laires et occlusaux.
Les muscles dont les fibres sont parallèles au plan occlu-
sal, tels que l'orbiculaire des lèvres, le buccinateur, stabilisent
Les facteurs anatomiques la prothèse, alors que les muscles dont les fibres sont per-
Ils correspondent à l'ensemble des caractéristiques mor- pendiculaires au plan occlusal, le modiolus, sont déstabili-
phologiques des arcades. Les crêtes larges avec des versants sateurs19. En conséquence, les profils, les formes et les
relativement parallèles offrent une meilleure stabilité que les volumes des extrados prothétiques doivent faciliter l'action
crêtes petites, étroites, triangulaires. De même, les arcades stabilisatrice des muscles. Enfin, l'établissement d'un équi-
carrées procurent une meilleure stabilisation que les arcades libre entre les pressions exercées d'un côté par la langue et
de l'autre par les lèvres et les joues améliore la stabilité en
particulier de la prothèse mandibulaire 20,21 .

Le facteur occlusal
Il dépend du praticien et du patient. Les éléments propres
au praticien correspondent à l'orientation, au niveau du plan
occlusal, à la morphologie des dents prothétiques choisies,
à l'organisation du montage. Un plan occlusal mandibulaire
trop haut, des dents prothétiques en position trop vestibu-
laire, ou trop linguale contribuent fortement à l'instabilité de
la prothèse.
Les éléments stabilisateurs ou déstabilisateurs inhérents
au patient dépendent du type de relation intercrêtes : angu-
lations intercrêtes accentuées, distances intercrêtes impor-
tantes, présence d'une relation squelettique de classe III, dif-
Fig. 6-10 Incidence des extensions mylohyoïdiennes sur les dépla- ficultés dans la répartition des charges occlusales en
cements verticaux et horizontaux de la prothèse mandibulaire présence de classe II div.1, et d'un comportement neuro-
(Ordonnée : déplacements). musculaire altéré.
Fig. 6-11 Aspect de la mouillabilité.

Définition
La rétention d'une prothèse correspond à la résistance à l'éloi-
gnement dans une direction opposée à l'insertion. La réten-
tion assure une résistance aux forces de gravité et aux forces
associées. Cette propriété est très certainement l'élément le Fig. 6-11 a En fonction de ses caractéristiques, un liquide peut, sur
plus important aux yeux du patient et du praticien22-25. une surface plane, ne pas s'étaler si son angle de mouillabilité est
négatif (a) ou s'étaler si son angle de mouillabilité est positif (a 1 ).
Historiquement, différents facteurs ont été avancés pour
expliquer et obtenir la rétention. Dès 1800, Gardette met-
tait en avant le rôle de la pression atmosphérique, en 1820
Ambler l'adhésion, ce n'est qu'en 1917 qu'un consensus
s'est établi, la rétention résultant de l'action combinée de
ces deux facteurs physiques (Wilson 1917 - Hall 1919 ) .
Cependant, aux facteurs physiques s'ajoutent les facteurs
neurophysiologiques et anatomiques.

. Fig. 6-11 b Sur un plan incliné, le même liquide avance sur un


Les facteurs physiques milieu sec en fonction de son angle d'avancé (β1) et quitte un
milieu humide avec un angle de recul (β).
À l'origine de la rétention, ils comprennent les phénomènes
d'interface, la pression atmosphérique, la gravité.
Ils traduisent mieux les capacités d'un liquide à s'étaler
Les phénomènes d'interface en surface (fig. 6- 11 a, b).
La salive s'étale très facilement sur la muqueuse, car elle
Au nombre de quatre, ils découlent des réactions qui s'ins-
présente une très faible tension de surface. Par contre, par
tallent entre le fluide salivaire et l'intrados de la base pro-
rapport à l'intrados de la base prothétique, la valeur de l'angle
thétique 26,27 .
de mouillabilité est capitale, car elle conditionne la force de
- L'adhésion - Elle correspond à la force physique qui attire
rétention (fig. 6-12a, b, c). Il est possible de l'améliorer en
les molécules de deux corps différents. L'adhésion de la
choisissant des matériaux de nature différente, en traitant l'in-
salive à la muqueuse et à la base prothétique résulte des
trados par sablage, silanisation, polissage28-31 (tableau 6-1).
forces d'attraction ionique qui s'établissent entre les gly-
Cliniquement, pour évaluer la force de rétention fournie
coprotéines salivaires chargées et la surface de l'épithé-
par les phénomènes physiques, différentes formules ont été
lium ou de l'intrados. Les forces ainsi développées sont
proposées.
proportionnelles à l'étendue de la surface.
Stanitz 32 : Selon cet auteur, la rétention dépend de la
- La cohésion - Elle correspond aux forces électromagné-
tension superficielle (C), de la surface de contacts (A) et de
tiques qui agissent entre les molécules d'un même
l'épaisseur du film salivaire (a).
matériau. C'est une force rétentive qui s'établit à l'inté-
rieur d'un liquide, ici la salive, force qui tend à maintenir
l'intégrité du liquide.
* - La viscosité - Au repos, l'attraction intermoléculaire pré-
Craig33 : L'élément le plus important de cette concep-
vaut à l'intérieur d'un fluide. Par contre, le mouvement
tion réside dans la prise en compte de la tension superfi-
neutralise cette attraction et provoque une friction inter-
cielle de la salive (γ), de la mouillabilité de la salive vis-à-vis
moléculaire plus ou moins importante qui correspond à
de la surface de l'intrados de la base prothétique (θ1) de la
la viscosité.
muqueuse (θ2) et de la gravité (G).
- La capillarité - Elle correspond à la force qui s'établit
entre deux surfaces parallèles entre lesquelles une
couche de liquide est interposée. Pour analyser ce phé-
nomène, il convient de tenir compte d'un paramètre
Cependant, les approches de Stanitz et Craig analysent
essentiel, la mouillabilité du matériau vis-à-vis d'un
la rétention de manière purement statique, contrairement à
liquide. Celle-ci se définit comme la capacité d'un liquide
la conception suivante.
à s'étaler à la surface d'un solide. On définit ainsi un angle
de mouillabilité qui varie selon le liquide et selon le maté- O'Brien - Stéphan34 : Cette formule implique l'en-
riau. La mouillabilité est positive si l'angle est inférieur à semble des paramètres physiques qui régissent les forces
90 °, négative si l'angle est supérieur à 90 °. Mais plus développées à l'interface prothétique, à la fois dans des
encore que l'angle de mouillabilité, ce sont les angles conditions statiques et dynamiques. En particulier, cette for-
dits d'avancée et de recul qui sont les plus importants. mule tient compte d'une part de la surface (A), de l'épais-
Fig. 6-12 Schéma des rôles de l'interface liquide solide dans la seur du liquide (h), de la viscosité (Η), et d'autre part de la
rétention. vitesse de séparation ou de l'accroissement de l'espace en
fonction du temps (dh/dt). Cliniquement, cela explique
pourquoi une prothèse tend à descendre très progressive-
ment lorsque le patient parle de manière prolongée alors
qu'elle résiste mieux en présence d'un contact brusque.

Fig. 6-12a Au repos une plaque est au contact d'un liquide qui
s'étale à sa surface.
La pression atmosphérique
Le rôle ou la contribution de la pression atmosphérique à la
rétention a souvent été discuté, surtout au niveau de l'ar-
cade maxillaire. Pour certains auteurs comme Page la pres-
sion atmosphérique ne participe pas à la rétention prothé-
tique. À l'opposé, pour Boucher, la pression atmosphérique
joue un rôle d'urgence. La pression n'agit que si la prothèse
est soumise à des forces de désinsertion, et uniquement si
un véritable joint s'est installé à la périphérie de la pro-
thèse35. En effet, lorsque la prothèse se déplace, il se crée
une dépression à la jonction muqueuse-base prothétique,
dépression qui favorise la rétention. La rétention est direc-
Fig. 6-12b Soulèvement de la plaque sous l'effet d'une traction : tement liée à l'étendue de la surface recouverte et à la pres-
la résistance opposée est liée à la force d'adhésion entre le liquide sion atmosphérique existante.
et la plaque, à celle de la cohésion et la viscosité du liquide, à la Par contre, il n'existe pas de phénomène de succion, sou-
capillarité, à la création d'un ménisque et à une dépression. vent exploité par la mise en place de ventouse au niveau de
la voûte palatine, ventouse qui aspire la muqueuse créant
d'importantes lésions de la muqueuse palatine. Par ailleurs,
la création de chambres à vide non seulement n'augmente
pas la rétention mais la diminue et, à ce titre, elles doivent
être éliminées36.
À l'arcade maxillaire, cliniquement, ce joint périphérique
existe. Il se compose d'un joint vestibulaire qui implique
toute la zone de réflexion vestibulaire et d'un joint postérieur
au niveau du voile du palais.
Fig. 6-12c La traction est trop importante, l'un des paramètres À la mandibule, on ne peut parler réellement de joint
atteint sa limite de rupture, la plaque se détache. périphérique mais il existe trois zones qui assurent une her-
méticité relative de la base prothétique vis-à-vis de la sur-
face d'appui.
Tableau 6-1 Angle de mouillabilité de différents matériaux de la - Le joint sublingual - Il est créé par l'extension distale, le
base prothétique. plus souvent horizontale, du bord lingual de la prothèse
mandibulaire. Cette extension libère le jeu du frein de la
langue, mais surtout permet à la langue, à la frange sub-
linguale de s'enrouler autour du bord prothétique, enrou-
lement qui assure l'herméticité37.
- Le joint labio-incisif - Il est formé par le contact qui s'éta-
blit entre la zone de réflexion incisivo-canine vestibulaire,
la face interne de la lèvre inférieure, les bords de la base
prothétique et les faces vestibulaires des dents mandi-
bulaires (fig. 6-13).
Ces deux joints agissent en totale synergie, synergie
découlant de la position vestibulo linguale des dents anté-
rieures.
- Le joint linguo-masseterin - Il correspond au contact qui
s'établit entre la base de la langue et la face interne de
la joue au niveau des insertions basses du masséter. La
dibulaire, stabilisant celle-ci, et assurant ainsi une réten-
tion indirecte. Les muscles les plus importants sont le
buccinateur, les orbiculaires des lèvres, les muscles
extrinsèques et intrinsèques de la langue.
- Rétention active - Les extérocepteurs des surfaces
muqueuses jugales, labiales et linguales captent les
déplacements des prothèses. Les informations trans-
mises par le VII via les interneurones aboutissent au
noyau moteur trigéminal avec des réactions musculaires
réflexes qui contribuent à améliorer la rétention39. Ce
rôle de l'extéroception a été parfaitement mis en évi-
dence, l'anesthésie de surface de la muqueuse au
niveau de la zone de réflexion provoque une diminution
d'environ 50 % de la rétention prothétique (fig. 6-14) 40 .
Les mêmes muscles que ceux précédemment cités
contribuent à la rétention prothétique active.

Fig. 6-13 Aspect schématique du joint labio-incisif (a) et du joint Les facteurs a n a t o m i q u e s
sublingual (b).
En raison de la résilience des tissus muqueux, recouvrant
l'os sous-jacent il est possible d'utiliser de faibles contre-
base prothétique qui englobe le trigone rétronnolaire est dépouilles. La muqueuse se déprime pour laisser passer la
alors recouverte par la joue et la base de la langue. Cette prothèse qui se trouve, ensuite, maintenue mécaniquement
notion de joint peut être améliorée par la création d'un sur la surface d'appui.
sillon creusé dans la partie postérieure vestibulaire du tri-
gone rétromolaire13.

La gravité
Cette composante physique universelle participe à la réten-
tion de la prothèse mandibulaire. d'iniquement, l'exploita-
Le rôle et l'importance de l'esthétique dans les empreintes
tion de ce phénomène physique conduit à alourdir les pro-
peuvent sembler paradoxaux. Mais ce rétablissement parti-
thèses mandibulaires soit en utilisant des bases métalliques
cipe de manière directe à la rétention et à la stabilité pro-
de préférence en or ou en insérant du métal dans le corps
thétique. Dans la mesure où le soutien des lèvres, des joues
de la prothèse. Cependant, les résultats cliniques de ces pro-
est assuré, la zone de réflexion est à sa place facilitant l'ob-
positions sont limités38.
tention du joint périphérique parfait et un contact harmo-
nieux entre les extrados et la face interne des joues et des
Les facteurs neuromusculaires lèvres. Cela augmente la surface de contact d'environ 15 à
Les muscles de la cavité buccale accroissent la rétention pro- 20 cm 2 . La rétention est alors accrue grâce aux phénomènes
thétique. Celle-ci est à la fois passive et active : physiques et au contrôle neuromusculaire.
- Rétention passive - Simplement par leur propre poids,
les muscles exercent une pression sur la prothèse man-

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Depuis Purman ( 1711 ), qui réalisa les premières empreintes
de prothèse adjointe, à l'aide de cire d'abeille, et les frères
Greene (1896), qui prirent en compte le comportement des La prise d'empreinte requiert l'application d'une pression
tissus de soutien, les matériaux, les techniques et les homogène, répartie sur l'ensemble de la surface d'appui.
concepts de prise d'empreinte ont fortement évolué. Cela conduit le praticien à utiliser, lors de l'empreinte pri-
Ces derniers se répartissent en trois grandes classes. maire, des matériaux présentant une viscosité élevée
Celles-ci résultent d'une part d'une différence de conception comme les alginates denses, les compositions telle que la
du comportement de la muqueuse vis-à-vis des charges pâte de Kerr en plaque2 (fig. 7-1 ). Historiquement l'intrados
fonctionnelles, et d'autre part de leur composition histolo- de l'empreinte en composition était creusé de manière
gique. sélective puis réadapté avec un léger lavis de plâtre.

Il consiste à enregistrer la forme des tissus épithélio-conjonc-


tifs de la surface d'appui alors qu'ils sont soumis à des pres-
sions fonctionnelles. Cette conception due aux frères
Greene dans les années 1910-1915 trouve sa justification
dans le comportement hétérogène de la muqueuse. Sous
l'action des contraintes fonctionnelles, son volume change
et, de plus, ce changement volumétrique diffère selon les
zones concernées. Les forces masticatoires se répartissent
ainsi en fonction des caractéristiques naturelles et des qua-
lités d'adaptabilité des tissus de la surface d'appui.
Cependant, les pressions transmises ne doivent pas pertur-
ber la vascularisation des tissus muqueux profonds, en par-
ticulier par des pressions excessives qui provoquent le blan-
chiment des tissus de soutien1. Selon ce principe, la Fig. 7-1 Prise d'empreinte à l'aide de pâte thermoplastique. La
rétention résulte des phénomènes d'interface muqueuse- surface palatine de la base est réchauffée avec un chalumeau à
salive-intrados et de la pression atmosphérique. bouche. (Document issu de l'ouvrage de Fripp)
Actuellement, les empreintes secondaires se réalisent fondes. Elle recouvre la zone de réflexion et les crêtes alvéo-
avec des porte-empreintes ajustés. Le joint périphérique laires, avec une ligne de démarcation très nette avec la
enferme le matériau à l'intérieur du porte-empreinte et la muqueuse masticatoire.
pression exercée par le praticien se répartit sur l'ensemble La muqueuse masticatoire présente un épithélium plus
de la surface d'appui. épais, kératinisé, ce qui, selon Pleasure, réduit son élasticité,
Pour placer les tissus de la surface d'appui, les zones de sa mobilité et sa capacité à supporter les charges tempo-
réflexion, les organes périphériques dans des conditions les raires avec un minimum de modification. En effet, la fonc-
plus physiologiques possibles, l'empreinte doit être réalisée tion physiologique de la muqueuse n'est pas de supporter
sous des pressions dites physiologiques ou fonctionnelles. les charges occlusales. Toutes les forces qui déforment la
L'application de celles-ci est dévolue soit au patient, soit au muqueuse interrompent la circulation, ce qui se traduit par
praticien. Idéalement, l'empreinte devrait être enregistrée une phase de blanchiment. L'interruption de la circulation
bouche fermée, à la dimension verticale d'occlusion adé- n'est pas en elle-même néfaste, mais la durée d'interruption
quate, en occlusion3. doit être limitée au minimum. Selon Pleasure, comme pour
Théoriquement, cette méthode transmet et répartit de la dimension verticale, la muqueuse doit posséder une posi-
manière idéale les charges occlusales sur l'ensemble de la tion de repos.
surface d'appui, dans la mesure où les pressions exercées La rétention dépend essentiellement du joint périphé-
par le patient lors de la prise d'empreinte sont physiolo- rique, le rôle de l'interface mucoprothétique est réduit, la
giques, réparties et symétriques. Cependant, cliniquement, muqueuse masticatoire assurant la stabilité prothétique.
l'ensemble de ces exigences techniques est très délicat à
obtenir.
Cette constatation conduit les praticiens à préférer la
pression digitale. Mais cela ne va pas sans certains inconvé- Les caractéristiques de la muqueuse masticatoire doivent
nients et certaines limites : difficultés à exercer des mouve- être enregistrées de manière passive, sans aucune défor-
ments réellement fonctionnels, comme la déglutition, inter- mation, alors que la muqueuse de recouvrement est enre-
férences entre les doigts du praticien et la langue, les joues, gistrée de manière fonctionnelle. Le choix des porte-
les lèvres modifiant la position des zones de réflexion, diffi- empreintes et des matériaux doit être en harmonie avec les
cultés à exercer des pressions symétriques, déformation de concepts précédemment exposés (espacement du porte-
l'arc mandibulaire lors de l'ouverture buccale. empreinte, haute viscosité des matériaux).

Les empreintes anatomo-fonctionnelles sont particulière- Ce type d'empreinte est indiqué en présence d'une sur-
ment indiquées chez les patients qui ne présentent aucune face d'appui lésée, de tissus non adhérents, d'une corti-
pathologie d'ordre général susceptible d'amoindrir la résis- cale osseuse plus ou moins absente, d'ostéoporose, de
tance muqueuse ou osseuse et localement en présence de troubles d'ordre systémique comme le diabète, d'hyper-
tissus muqueux, fermes, adhérents, de structures osseuses thyroïdisme ou de certaines médications telles que les cor-
où la trabéculation est nette, dense, la corticale épaisse. ticostéroïdes.

Cette technique fut proposée par Pleasure en 19624. Ce type d'empreinte fut proposé par Addison en 1944 et Page
en 1946, puis reprise par De Van en 1952, et plus récem-
ment Kornfeld et Clayton dans les années 1970-19805-8.

Le principe est d'une part de ne pas surcharger, et d'autre


part de ne pas agresser les tissus muqueux de manière à
éviter toute « irritation » osseuse. Pour cela, Pleasure divise Pour les partisans de cette technique d'empreinte les tissus
la surface d'appui en une muqueuse de recouvrement et obéissent au principe de Pascal. Ils sont incompressibles, ne
une muqueuse masticatoire. changent pas de volume mais, par contre, ils changent de
La muqueuse de recouvrement est la muqueuse la forme et ils se déplacent. En conséquence, l'empreinte est
moins spécialisée de la cavité buccale. Elle est mobile, lâche, réalisée sans aucune pression pour éviter tout déplacement
facilement déplaçable, séparée du périoste et de l'os sous- des tissus mous. La rétention dépend de la qualité et de la
jacent par les insertions musculaires des lèvres, des joues, précision de l'interface muco-prothétique, par contre le rôle
de la langue, et les tissus cellulo-graisseux des couches pro- rétentif de la pression atmosphérique est totalement réfuté.
La surface d'appui muqueuse est enregistrée avec un porte-
empreinte totalement espacé à l'aide d'un matériau pré- 1. Boucher CO. Impression for complete denture. J Am Dent
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La parfaite réalisation d'une empreinte découle de la prise l'autre technique lié à la précision de l'empreinte, à la préci-
en compte de deux groupes de paramètres, l'un clinique sion dimensionnelle, et à la précision des matériaux de
comprenant le porte-empreinte, les matériaux et le praticien, reproduction (fig. 8-1).

Fig. 8-1 Organigramme des différents paramètres


ayant une incidence sur la qualité finale du modèle de travail.

La technique d'empreinte choisie, sa parfaite réalisation cli-


nique réside essentiellement dans le contrôle des pressions
transmises sur la surface d'appui. Ce contrôle dépend de la
prise en compte des 3 paramètres suivants: le porte- Fig. 8-2 Organigramme des facteurs influant sur le contrôle des
empreinte, les matériaux, le praticien1 (fig. 8-2). pressions appliquées sur les surfaces d'appui lors des empreintes.
La fluidité ou viscosité des matériaux
La conception du porte-empreinte est un facteur essentiel La viscosité peut être définie comme la résistance à l'écou-
dans la transmission des pressions sur la surface d'appui. Un lement d'un liquide lorsqu'il est soumis à une contrainte. Au
porte-empreinte ajusté transmet 100 % des forces appli- cours du temps, la viscosité initiale du matériau à empreinte
quées par le praticien. Par contre, la présence d'un espace- s'accroît et par conséquent les pressions appliquées sur l'a
ment réduit de 30 % cette intensité, les perforations de surface d'appui augmentent. Ces paramètres interviennent
35 %, la présence d'espacement et de perforations de à la fois lors de l'empreinte préliminaire et secondaire.
55 % 2 (fig. 8-3).
L'empreinte préliminaire
Au moment de leur préparation, la majorité des alginates
présentent une viscosité faible qui varie peu au cours de la
réaction chimique. Par contre, la viscosité de certains algi-
nates comme l'Alginoplast® augmente très rapidement
contrairement à d'autres comme le Jeltrate® dont la visco-
sité très faible ne varie pratiquement pas pendant les 2 pre-
mières minutes 3-5 (fig. 8-5).

Fig. 8-3 Par rapport à un porte-empreinte adapté, la pression ini-


tiale est réduite par la réalisation d'un porte-empreinte espacé, per-
foré, espacé et perforé.

De même, la conception du porte-empreinte modifie la


répartition des pressions sur la surface d'appui. Les pressions
reçues par la voûte palatine et les crêtes sont sensiblement
identiques, sauf dans un cas, lorsque le porte-empreinte ne
présente ni perforations ni espacement. Dans ce cas, les
crêtes reçoivent beaucoup plus de pression que la voûte
palatine (fig. 8-4).

Fig. 8-5 Variations de la viscosité de cinq alginates 48 sec après


le début du mélange Jeltrate plus® (a), Alginoplast (b). (D'après
Inoué3)

De même, lors de la prise d'empreinte au plâtre, le chan-


gement de la viscosité est capital, la viscosité passant de
3 000 cp à 23 000 cp en moins de 2 minutes6.

L'empreinte secondaire
Fig. 8-4 Répartition des pressions entre la voûte palatine et les
crêtes selon que le porte-empreinte est adapté (colonne jaune) ou Les matériaux à empreinte utilisés pour les empreintes
espacé (colonne verte). secondaires, oxyde de zinc (SS White®), polyéthers
(Impregum®), et polysulfures (Permlastic®, Coe-Flex®),
présentent des comportements très spécifiques. De par
leurs caractéristiques, tous ces produits ont, aussi, une inci-
dence directe sur les pressions transmises aux tissus des sur-
faces d'appui7,9 (fig. 8-6).
Les caractéristiques rhéologiques des matériaux découlent Le praticien doit être conscient de l'ensemble de ces
des phénomènes liés aux réactions physico-chimiques qui caractéristiques de manière à choisir un matériau adapté aux
interviennent entre le début de leur préparation et leur prise conditions cliniques. Un matériau dont la viscosité ne change
finale. Ces paramètres sont au nombre de deux: la fluidité pas beaucoup dans les premiers instants sera par exemple
ou viscosité, le temps de travail et de prise. choisi lorsque l'insertion du porte-empreinte est délicate.
Le temps de prise - Le temps de travail
Le temps de travail correspond au temps séparant le début
du mélange jusqu'au moment où il ne peut plus être mani-
pulé, modelé. Les caractères rhéologiques du matériau
d'empreinte se modifient au fur et à mesure du temps.
Le temps de prise correspond au temps qui sépare le
début du mélange de la prise finale. Dans ce temps de prise,
se trouve inclus le temps de travail qui correspond au temps
pendant lequel le matériau est manipulable. Cette différence
est très importante car un mauvais choix de matériau, une
mauvaise manipulation peut transformer un matériau
liquide destiné à une empreinte mucostatique en un maté-
riau dense qui réalise une empreinte anatomofonctionnelle.
Lors des empreintes préliminaires, cette éventualité
dépend de l'alginate choisi car le temps de travail des alginates
varie entre 48 secondes et 158 secondes (tableau 8-1 )3.
Les matériaux destinés aux empreintes secondaires pré-
Fig. 8-6 Évolution de la viscosité té des matériaux à empreinte sui- sentent les mêmes problématiques. Le temps de travail est
vants : Polysulfides light (P.L.), Polysulfide regular (P.R.), Polysulfide long pour les polysulfures, suivis par les polyéthers et les sili-
heavy (P.H.), Polyéther (P.E.). (D'après Herfort et al.9) cones (tableau 8-2) 7 .
Cependant, il est important de souligner le comporte-
ment des polyéthers. La transition de l'état plastique à l'état
« élastique » se déroule en un temps très court dont le pra-
Tableau 8-2 Durées des temps de travail et des temps de prise ticien doit tenir compte lors de la manipulation10 (fig. 8-7).
pour les matériaux le plus souvent utilisés lors des empreintes
secondaires7.

Fig. 8-7 Passage brutal de l'état fluide à l'état pâteux « snap-set »


caractéristique des polyéthers11.

Tableau 8-1 Durées du temps de travail et du temps de prise de matériaux utilisés lors des empreintes préliminaires10.
pour les polysulfures, - 0,2 %, pour les polyéthers et < 0,1 %
pour l'oxyde de zinc. Ces changements doivent être rappor-
Lors de la mise en place et du maintien du porte-empreinte tés à l'épaisseur du matériau à empreinte, épaisseur qui
garni de matériau sur les tissus de la surface d'appui, les dépasse très rarement 2 mm.
pressions transmises par les matériaux et le praticien varient. Cependant, il convient de tenir compte de la stabilité dimen-
Lors de la mise en place du porte-empreinte, les pressions sionnelle du porte-empreinte individuel : 90 % des distor-
appliquées varient entre 0,9 N et 2,7 Ncm2. Par contre, lors sions s'installent pendant les premières 24 heures, mais
de la réaction de prise, elles tombent pratiquement à zéro.
elles peuvent se poursuivre pendant 7 jours. Cliniquement,
Ces pressions dépendent aussi des matériaux utilisés. Si l'on
il est donc préférable d'utiliser un porte-empreinte individuel
utilise comme référence l'intensité appliquée par un algi-
au minimum 24 heures après sa réalisation. Par contre,
nate, les polysulfures réduisent les pressions de 30 % et
lorsque le praticien souhaite l'utiliser immédiatement, celui-
l'oxyde de zinc de 57 %.
ci doit être trempé 5 minutes dans l'eau bouillante pour éli-
Ces pressions doivent être comparées à la pression san- miner les distorsions13.
guine (diastolique), qu'il convient de ne pas dépasser lors
de l'empreinte.

Les derniers paramètres techniques ayant une incidence sur


la précision du modèle concernent essentiellement le degré
de précision des matériaux de reproduction des empreintes.
Les empreintes préliminaires sont coulées avec des
plâtres de classe II dont les qualités, précision, résistance à
Les paramètres techniques dépendent des propriétés spé-
l'usure, permettent l'élaboration d'un porte-empreinte indi-
cifiques des matériaux utilisés lors de l'empreinte et ceux
viduel. La seule difficulté réside dans l'incompatibilité éven-
destinés à leur reproduction.
tuelle entre l'alginate et le plâtre14,15.
Les empreintes secondaires, sont coulées dans un plâtre
de classe III dont les caractéristiques mécaniques sont
adaptées à l'élaboration d'une prothèse adjointe complète.
La précision des empreintes dépend de la finesse des détails Ses qualités de résistance à la compression, de dureté
enregistrés, de la stabilité dimensionnelle des matériaux. de surface, de résistance à l'abrasion sont améliorées par
Cependant le degré de précision doit être en accord avec une spatulation sous vide et par le respect du rapport
l'objectif de l'empreinte d'une surface muqueuse. eau/poudre.
Pour les modèles de prothèse adjointe complète, l'expan-
Les détails enregistrés sion de prise est un paramètre essentiel. Cette expansion
La précision des détails enregistrés est liée aux qualités peut être obtenue de manière classique en immergeant le
intrinsèques des matériaux et à leur comportement vis-à-vis modèle dans de l'eau par la technique de l'expansion
de la salive. L'état de surface des empreintes réalisées avec hygroscopique, ou bien en utilisant des plâtres à haute
des polysulfides de basse viscosité et les oxydes de zinc- expansion. Les plâtres de classe III ont une expansion de
eugénol présente des bulles plus petites et moins nom- prise de 0,12 % alors que pour les plâtres à haute expan-
breuses que celles obtenues avec des silicones de basse ou sion elle s'élève à 0,55 % après 2 heures et 0,59 % à
moyenne viscosité par addition11, 12. Les détails des tissus 24 heures16.
mous enregistrés avec les polyéthers et les silicones par Elle contribue à compenser la contraction thermique de
addition sont plus précis que ceux obtenus avec les poly- la résine de base lors de la polymérisation.
sulfures basse viscosité ou les oxydes de zinc. En raison de Devant la complexité des objectifs auxquels les
leur caractère hydrophile, l'oxyde de zinc comme les poly- empreintes doivent répondre, les différentes techniques
éthers sont les matériaux les plus adaptés à la salive, contrai- permettant de les obtenir se répartissent en trois grandes
rement aux polysulfides, qui présentent un comportement étapes qui répondent à des objectifs bien précis.
hydrophobe. L'empreinte préliminaire enregistre la forme, les reliefs
des surfaces d'appui, la position et le volume des zones de
réflexion, la position des différents freins.
La stabilité dimensionnelle L'empreinte secondaire évalue de manière plus précise les
En dehors des hydrocolloïdes irréversibles, la stabilité dimen- reliefs, les caractéristiques viscoélastiques et hémodyna-
sionnelle des matériaux d'empreinte est totalement com- miques de la surface d'appui muqueuse, de manière fine
patible avec Je degré de précision recherché en prothèse les volumes des zones de réflexion pour assurer simultané-
adjointe complète, dans la mesure bien sûr où les matériaux ment le libre jeu des organes paraprothétiques et la création
sont traités selon les recommandations des fabricants. En du joint périphérique.
effet, les changements dimensionnels par fluage, par L'empreinte tertiaire enregistre le jeu des organes parapro-
contraction due à la polymérisation varient entre -0,6 % thétiques vis-à-vis de l'extrados de la prothèse.
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L'importance et le rôle de l'empreinte préliminaire doivent laire pour « forcer » la zone de réflexion, à l'arcade mandi-
être réhabilités aux yeux des praticiens. Sa parfaite réalisa- bulaire pour repousser le plancher buccal quelquefois enva-
tion est le préalable indispensable à l'élaboration du modèle hissant. Cette technique d'empreinte est réalisée à l'aide de
qui possédera toutes les informations relatives aux caracté- matériaux plus « durs », tels que des alginates à haut coeffi-
ristiques de la surface d'appui et de ses limites. Le modèle cient de viscosité, voire des compositions.
qui en découle permettra au laboratoire de réaliser un porte-
empreinte individuel précis et adapté, élément essentiel
dans l'élaboration de l'empreinte secondaire.
L'exécution adéquate d'une empreinte préliminaire s'ef-
fectue en trois temps : Dans l'idéal, les porte-empreintes du commerce doivent pré-
1) L'examen clinique qui aboutit au choix de la technique senter les caractéristiques suivantes:
d'empreinte. - Être indéformables sous les forces exercées par le prati-
2) Le choix d'un porte-empreinte. cien ou le patient lors de la prise d'empreinte.
3) Les séquences cliniques. - Être modelables - Les porte-empreintes ne sont adaptés
que dans 15 % des cas. Les porte-empreintes maxillaires
sont souvent trop larges dans la région canine, trop longs
au niveau des remparts vestibulaires antérieurs et, sur-
tout, les voûtes palatines sont trop plates, laissant une
place trop importante aux matériaux à empreinte, sources
de distorsions. À l'arcade mandibulaire, les constatations
Les conclusions de l'examen clinique permettent de choisir sont comparables, les porte-empreintes sont souvent
le concept d'empreinte et le ou les matériaux adaptés aux trop longs, trop larges dans la région canine (90 %) et
données anatomiques et physiologiques1. dans la région des molaires2 (50 % ) . Il convient donc de
Les empreintes préliminaires seront le plus souvent non pouvoir les adapter par torsion des bords.
compressives, dites mucostatiques, réalisées avec un algi- - Présenter un système de préhension qui ne déplace pas
nate fluide à prise lente (tableau 8-1), ou du plâtre. De plus, les lèvres et, à l'arcade mandibulaire, des butées laté-
l'alginate est particulièrement nécessaire en présence d'asia- rales qui permettent au praticien de poser les doigts sans
lies, de fortes contre-dépouilles, de nausées, de muqueuses pour autant déplacer les organes paraprothétiques.
blessées, fragiles, que cette fragilité dépende de l'âge du - Permettre un nettoyage parfait, en particulier au niveau
patient, de pathologies acquises (par exemple le diabète) des moyens de rétention (trous, fentes, rebords) surtout
ou d'un traitement par radiothérapie. si des adhésifs à alginate ont été employés.
Les empreintes anatomofonctionnelles sont indiquées - Pouvoir être désinfectés grâce à des bains adaptés au
en présence d'arcades fortement résorbées mais dont les matériau du porte-empreinte ou stérilisés par un passage
tissus muqueux sont fermes et adhérents, à l'arcade maxil- à l'autoclave.
De nombreux modèles de porte-empreintes sont à la dis-
position du praticien. Chacun d'entre eux présente des avan-
tages et des inconvénients.
- Les porte-empreintes Cerpac®, dérivés des porte-
empreintes de Devin, sont en métal et, malgré leur chro-
mage, ils sont relativement adaptables par torsion. La
conception de leur manche assure un parfait respect du
soutien de la lèvre. De plus, le manche présente des gra-
duations qui permettent de transmettre au laboratoire la
longueur de la lèvre. À la mandibule, leur extension dis-
taie autorise un modelage adéquat de la région rétro-
mylohyoïdienne. Ils sont particulièrement adaptés à la
prise d'empreinte au plâtre (fig. 9-1 a, b). Fig. 9-2 Porte-empreinte Clan-Trays® de Schreimenakers avec sa
butée digitale latérale.

- Les porte-empreintes Accu-Tray® de Frusch sont en plas-


tique. Ceux destinés à l'arcade mandibulaire sont très
caractéristiques. Leur partie linguale possède des volets
profonds, qui, lors de la mise en place dans la cavité buc-
cale, « repoussent » le plancher buccal et les glandes
sous-maxillaires, et contraignent la langue à passer au-
dessus puis à s'étaler dans le berceau de la face linguale
du porte-empreinte (fig. 9-3a, b, c). De plus, dans le sens
antéro-postérieur, ils présentent deux profils :
• L'un est adapté à une faible résorption de l'arcade man-
dibulaire.
• L'autre est particulièrement destiné aux mandibules
fortement résorbées dont la partie la plus déclive de
Fig. 9-1 a Porte-empreinte Cerpac maxillaire.
la crête se situe très bas par rapport aux trigones rétro-
molaires.
La présence de ces volets permet au matériau à
empreinte de franchir les insertions du mylohyoïdien mais
crée de fortes surextensions. Ces porte-empreintes sont par-
ticulièrement indiqués en cas de forte résorption, en pré-
sence d'un plancher buccal qui a tendance à recouvrir les
sommets des crêtes, phénomène souvent présent chez les
patients qui n'ont jamais été appareillés.

Les dimensions du porte-empreinte le mieux adapté sont


déterminées à l'aide d'un compas à extrémité mousse, par
comparaison avec les prothèses existantes, ou par appré-
Fig. 9-1 b Manche gradué d'un porte-empreinte Cerpac. ciation visuelle de la forme et des dimensions des arcades.
- À la mandibule, le compas mesure la distance qui sépare
la face interne des trigones rétromolaires. L'ouverture du
- Les porte-empreintes Clan-Trays® de Schreimenakers compas est conservée puis reportée, soit sur une table
sont en métal ou en plastique. Ils ont tous la même forme de sélection, soit directement dans les porte-empreintes
mais sont de tailles différentes. Le manche, les butées au niveau de la face interne des trigones.
latérales n'entravent pas les déplacements des organes - Au maxillaire, de manière comparable, les branches du
paraprothétiques. Par contre, leur rigidité n'autorise compas viennent au contact de la face vestibulaire des
aucune modification de forme par torsion (fig. 9-2). Ils tubérosités. Le compas peut aussi être placé au niveau
sont particulièrement indiqués pour les empreintes à l'al- des processus zygomatiques, position qui correspond à
ginate d'arcades carrée ou ovalaire avec un relief moyen. la situation estimée des premières molaires (fig. 9-4a, b).
Fig. 9-3 Porte-empreinte Accutray® de Frush

Fig. 9-3b Volet lingual et profil de la résorption, coupes en sili-


cones correspondant aux 2 types de porte-empreinte.

Fig. 9-3a Berceau pour la langue et butées latérales caractéristiques.

Fig. 9-3c Les 2 types de porte-empreinte mandi-


bulaires Accutray® : l'un correspondant à un degré
de résorption limitée, l'autre à une amplitude éle-
vée de la résorption de l'arcade mandibulaire.

Fig. 9-4a Mesure de la distance intertubérositaire. Fig. 9-4b Report sur le porte-empreinte.

L'adaptation du porte-empreinte
Le porte-empreinte choisi, il est souvent nécessaire de
l'adapter, d'une part à la forme de l'arcade, et d'autre part,
aux limites de la surface d'appui.
À l'arcade mandibulaire, pour les porte-empreintes défor-
mables, le bord lingual du porte-empreinte mandibulaire est
systématiquement éversé au niveau du frein de la langue pour
prévenir toute interférence entre son bord et les tissus mous
de la région sublinguale (fig. 9-5). Distalement, les volets lin-
guaux doivent se glisser entre la langue et les parois internes
du corps de la mandibule franchissant la ligne mylohyoï-
dienne, sans déplacer la muqueuse libre qui tapisse cette
paroi. Dans l'idéal, les volets doivent être distants de 2 à 3 mm
de la muqueuse. S'ils ne le sont pas, ceux-ci sont tordus pour Fig. 9-5 Le bord du porte-empreinte (Cerpac) est éversé pour ne
les rapprocher ou les éloigner du corps de la mandibule. Enfin, pas interférer avec le jeu du plancher buccal au niveau sublingual.
si le porte-empreinte est trop court, il est possible de le ral- porte-empreinte est garni sans excès. Tout en le passant sous
longer avec de la cire rose. l'eau, le matériau est modelé avec le doigt pour qu'il soit
À l'arcade maxillaire, la partie postérieure du porte- convexe et lisse. Le miroir écarte la lèvre, puis le porte-
empreinte est placée au niveau des sillons ptérygomaxil- empreinte est inséré dans la cavité buccale, ensuite la mani-
laires, puis la partie antérieure est remontée sous la lèvre. pulation se déroule deux temps :
Le praticien contrôle le soutien de la lèvre et des commis- - 1 er temps - Le porte-empreinte est appliqué sans effort
sures. Si elles ne sont pas convenablement soutenues, sur la partie antérieure de la crête, puis basculé distale-
l'orientation des bords est corrigée, à l'aide d'une pince, pour ment tout en vérifiant sa symétrie dans le plan sagittal
pallier les imperfections rencontrées. De même, dans les médian. Le porte-empreinte est enfoncé jusqu'à ce que
secteurs latéraux, une simple déformation des bords permet le matériau à empreinte s'échappe distalement, au
de mieux adapter le porte-empreinte à la forme de l'arcade, niveau des trigones rétromolaires.
évitant ainsi des inadaptations préjudiciables. S'il s'avère trop - 2e temps - Le porte-empreinte est maintenu en place
court, il est possible de l'allonger avec de la cire rose. grâce à son manche et aux butées latérales tandis que le
Pour les porte-empreintes non déformables les modifi- modelage des bords de l'empreinte est effectué. Côté lin-
cations sont très limitées. Il ne peut s'agir que d'adjonctions gual, le patient déplace la langue en avant, le long de la
de cire pour allonger les bords du porte-empreinte. lèvre d'une commissure à l'autre. Côté vestibulaire, le pra-
ticien mobilise les joues, les lèvres, le patient effectue des
mouvements de protraction et de rétraction des lèvres.
Ces manœuvres sont longues, et on mesure mieux l'im-
portance d'un long temps de gélification pour que l'en-
Celles-ci sont au nombre de trois : l'empreinte à l'alginate, semble de la séquence soit parfaitement réalisé.
l'empreinte au plâtre et l'empreinte avec des silicones. Après gélification, le porte-empreinte est désinséré et l'em-
preinte analysée selon les critères du tableau (tableau 9-1).

L'empreinte de l'arcade maxillaire


C'est, sans aucun doute, la méthode la plus utilisée avec Le patient est installé le buste plus vertical qu'auparavant.
laquelle il est possible d'obtenir les meilleurs résultats mais L'alginate est préparé comme précédemment et le porte-
aussi les pires, surtout si les conditions les plus élémentaires empreinte choisi et adapté est garni d'alginate, passé sous
ne sont pas respectées. Il existe trois procédés de prise l'eau froide, la pulpe du doigt modelant une dépression cor-
d'empreinte à l'alginate: l'empreinte en un temps, l'em- respondant à la forme de l'arcade. Le miroir écarte la com-
preinte rebasée et l'empreinte en double mélange. missure labiale, puis le porte-empreinte est inséré par un
mouvement de rotation.
L'empreinte en un temps - 1 er temps - La lèvre supérieure est soulevée, tandis que
le porte-empreinte est appliqué sur la partie antérieure de
L'empreinte de l'arcade mandibulaire la crête, jusqu'à ce que le vestibule soit rempli d'alginate.
La prise d'empreinte proprement dite débute par l'arcade Ensuite, la partie distale du porte-empreinte est remontée
mandibulaire pour réduire le risque de nausées. Le patient pour chasser le matériau à empreinte vers l'arrière.
est confortablement installé, le buste légèrement incliné, afin - 2e temps - L'index, placé au niveau de la voûte palatine,
que le plan occlusal soit horizontal lorsque la mandibule est maintient le porte-empreinte tandis que les joues et les
légèrement abaissée. lèvres sont mobilisées pour enregistrer le jeu des
Le porte-empreinte choisi et adapté est enduit d'adhé- muscles périphériques. Après gélification, la désinsertion
sif. L'alginate est préparé à la consistance voulue, plus ou est facilitée par le passage d'un doigt au niveau d'une
moins dense, selon les conditions cliniques, avec de l'eau tubérosité, ce qui crée un appel d'air. La position du
fraîche pour offrir un temps de manipulation suffisant. Le porte-empreinte est d'abord contrôlée (symétrie), puis
l'empreinte est vérifiée (tableau 9-1).

Tableau 9-1 Critères de validation des empreintes primaires maxillaire et mandibulaire.


Les fossettes palatines n'apparaissent pas toujours dans
l'empreinte, mais l'extension palatine doit atteindre la ligne
virtuelle qui joint les deux sillons ptérygo-maxillaires.

L'empreinte rebasée
Dans la mesure où l'empreinte en un temps ne répond pas
parfaitement aux qualités souhaitées, il est possible de la
rebaser à l'aide d'un alginate.plus fluide, sauf si le porte-
empreinte est inadapté, mal positionné sur l'arcade ou l'al-
ginate décollé.
Tout d'abord, l'empreinte est corrigée à l'aide d'un ins-
trument adapté (fig. 9-6) 3 .

Fig. 9-8 Aspect de l'empreinte finale.

Le sommet de la crête est déchargé, les bords trop longs


raccourcis, trop épais amincis, les freins largement libérés
(fig. 9-7a). L'empreinte est séchée à l'aide d'une compresse
ou d'air comprimé. Une seule dose d'alginate est spatulée
avec 23 cc d'eau. L'utilisation de deux doses d'alginate est,
le plus souvent, excessive (fig. 9-7b).
L'alginate « fluide » est étalé sur l'empreinte, l'ensemble
Fîg. 9-6 Instrument pour découper l'alginate : 2 extrémités diffé- est replacé dans la cavité buccale, appliqué fermement sur
rentes. la surface d'appui. Le patient est invité à déplacer la langue
en avant et sur les côtés. Le praticien mobilise les joues et
Fig. 9-7 Technique de l'empreinte rebasée :
les lèvres pour enregistrer le jeu des organes périphériques.
Après gélification, l'empreinte est désinsérée en plaçant les
doigts sous les bords de l'alginate, sans tirer sur le manche
du porte-empreinte pour éviter tout décollement des maté-
riaux. L'empreinte est ensuite contrôlée selon les critères pré-
cédemment définis (fig. 9-8).

L'empreinte en double mélange


Elle est réalisée simultanément avec deux alginates de
consistances différentes. Les zones de réflexion sont enre-
gistrées avec un alginate fluide, déposé à l'aide d'une
seringue, et la surface d'appui avec un alginate à consistance
dense. Après garnissage des zones de réflexion et insertion
dans la cavité buccale du porte-empreinte, les différents
Fig. 9-7a Découpe des bords de l'empreinte. mouvements des organes périphériques sont enregistrés
avant la gélification des matériaux (fig. 9-9a, b, c).

Quelle que soit la technique employée, après contrôle


des empreintes, et en présence du patient, certaines infor-
mations sont marquées à la surface de l'alginate à l'aide d'un
crayon dermographique (le marquage des empreintes), en
particulier, les limites du futur porte-empreinte individuel
(fig. 9-10a, b, tableau 9-2).
À l'arcade mandibulaire :
- les contours des trigones rétromolaires ;
- la position de la ligne oblique. En cas de crêtes fortement
résorbées, plates, elle apparaît dans l'empreinte sous
forme d'un sillon précis mais peu profond ;
- la position exacte de la zone de réflexion vestibulaire,
basée sur l'observation clinique, et non sur celle des
Fig. 9-7b Rebasage avec un alginate fluide. limites de l'empreinte, qui sont souvent erronées;
Fig. 9-9 Technique d'empreinte en double mélange Fig. 9-10 Repères tracés dans l'intrados d'une empreinte maxillaire :

Fig. 9-9a La seringue dépose de l'alginate fluide au niveau de la Fig. 9-10a Limite de l'empreinte déterminée par le praticien sur
zone de réflexion et éventuellement de la partie profonde de la le bord interne.
voûte palatine.

Fig. 9-9b Le porte-empreinte est inséré. Fig. 9-10b Caractères particuliers du maxillaire surlignés (expl :
crête flottante).

D'autres informations peuvent être soulignées: pré-


sence de crêtes flottantes, position d'épines irritatives, lignes
mylohyoïdiennes saillantes, douloureuses à la palpation,
trou mentonnier, autant de zones qui doivent être déchar-
gées lors de l'élaboration du porte-empreinte.
À l'arcade maxillaire:
- La limite postérieure, délimitée d'une part par la situa-
tion des sillons ptérygo-maxiliaires, éventuellement la
position des fossettes palatines. En l'absence de repé-
rage de ces dernières, les données de l'examen clinique
doivent être confirmées par le tracé d'une position spé-
cifique de la limite postérieure.
Fig. 9-9c Aspect final de l'empreinte. - Comme pour la mandibule, la limite du porte-empreinte
doit être choisie en fonction de l'examen clinique, et non
de la position la plus profonde de la zone de réflexion
- la position des différents freins vestibulaires et linguaux; labio-jugale.
- la position de la zone de réflexion linguale. Cependant, - La position des freins vestibulaires et linguaux est souli-
c'est une limite qui donne lieu à beaucoup d'interpréta- gnée.
tions. La majorité des auteurs s'accordent à penser que De la même manière, d'autres informations peuvent être
la limite de la prothèse se situe au-delà de la ligne mylo- transmises : position et importance du torus, proéminences
hyoïdienne. osseuses douloureuses.
Tableau 9-2 Repères marqués sur les empreintes primaires maxillaire et mandibulaire.

plâtre entre la pulpe des doigts, le porte-empreinte est désin-


séré. Pour cela, il est décollé dans la région antérieure, puis
L'empreinte au plâtre est sans conteste celle qui répond le il est poussé légèrement vers l'arrière pour qu'il se dégage
mieux aux qualités requises et espérées pour une empreinte sans difficultés des régions rétro-mylohyoïdiennes. L'intégrité
primaire. On doit cependant remarquer qu'elle est, en de l'empreinte est contrôlée, si des fragments de l'empreinte
dehors de quelques spécialistes, totalement abandonnée. sont restés dans la cavité buccale, ils sont récupérés avant
C'est un état de fait fort regrettable, mais c'est ainsi. En effet, que le patient ne se rince (fig. 9-11 a, b).
elle ne dépasse pas 2 % de l'ensemble des empreintes
prises en Grande-Bretagne en 1999 4 . Cependant, la mani-
pulation du plâtre à empreinte reste une nécessité, en par-
ticulier, lors de la prise d'empreinte pour des prothèses com-
plètes à complément de rétention implantaire.
La parfaite réalisation d'une empreinte au plâtre découle
du respect de la règle suivante :
Pour réussir en toute sécurité une empreinte au plâtre il
faut garnir la cavité buccale et non pas remplir le porte-
empreinte.
Le matériel est préparé : petit bol à plâtre, spatule à plâtre,
miroir, mesure à eau, plâtre à empreinte (Snow-White de
Kerr), spatule en bois (moitié d'un abaisse-langue).

L'empreinte de l'arcade mandibulaire


De 25 à 30 cm 3 d'eau sont nécessaires et versés dans le Fig. 9-11a Limites harmonieuse et précises d'une empreinte au
bol, ensuite le plâtre est saupoudré jusqu'à saturation, puis plâtre.
très légèrement spatulé afin d'obtenir une consistance cré-
meuse.
Le porte-empreinte est faiblement garni de plâtre. Le
miroir écarte successivement la langue, les joues et la lèvre,
permettant à la spatule en bois de garnir de plâtre les zones
de réflexion vestibulaire, linguale, et surtout les zones rétro-
molaires. Le porte-empreinte est inséré en le glissant dista-
lement sous la langue, puis il est rabattu dans la région anté-
rieure. Après l'insertion, aucun mouvement n'est demandé
au patient. Simplement, la langue doit se situer en position
antérieure basse pour permettre le modelage de la région
sublinguale. Si le patient éprouve des difficultés à placer sa
langue dans cette position, il est possible de coller un petit
repère en cire sur le manche du porte-empreinte, repère sur
lequel il pose la pointe de la langue. Après cristallisation du
plâtre, jugée par la résistance à l'écrasement des restes de Fig. 9-11 b Détails des zones de réflexion.
L'empreinte de l'arcade maxillaire 0,5 %) peut être pulvérisé sur l'empreinte, qui est alors
enfermée dans un sac en plastique étanche pendant
Pour assurer un parfait centrage du porte-empreinte, il est
10 minutes, puis rincée et coulée.
possible de placer dans l'intrados trois ou quatre butées en
- L'empreinte au plâtre - Elle ne peut être désinfectée par
cire molle qui s'appuient sur le sommet des crêtes aux
immersion dans une solution désinfectante au risque
niveaux incisif et molaire.
d'altérer la précision de surface du matériau. La tech-
Pour une arcade de taille normale 35 cm3 d'eau et une
nique la plus adaptée semble être l'adjonction d'une
quantité adéquate de plâtre sont préparés; le porte-
solution désinfectante dans le plâtre de coulée : la glu-
empreinte est légèrement garni, la partie centrale sera plus
taraldéhyde à 2 % est le désinfectant le plus efficace et
ou moins chargée selon la profondeur de la voûte palatine.
entraînant le moins d'effets négatifs sur les propriétés
Le miroir écarte les joues et la lèvre pour permettre le gar-
physiques du modèle obtenu7.
nissage des zones de réflexion avec la spatule enduite de
- L'empreinte aux silicones - Comme pour les empreintes
plâtre. Si la voûte est profonde, cette dernière est, elle aussi,
à l'alginate, elle doit d'abord être rincée, puis immergée
garnie. Le porte-empreinte est inséré dans la cavité buccale,
dans une solution de glutaraldéhyde à 2 %, environ
placé distalement au niveau des sillons ptérygomaxillaires
15 minutes; mais dans tous les cas il faudra suivre les
puis rabattu sous la lèvre. Après cristallisation, l'empreinte
recommandations du fabricant concernant la compatibi-
est désinsérée, et l'intégrité de l'empreinte contrôlée, les
lité du désinfectant avec le matériau et respecter le
éventuels morceaux fracturés sont récupérés.
temps d'immersion conseillé.
La qualité des empreintes maxillaire et mandibulaire est
Avant envoi au laboratoire, il doit être précisé sur la boîte
contrôlée, ces empreintes doivent répondre aux mêmes exi-
de prothèse que les empreintes ont été désinfectées et
gences que celles précédemment définies. En raison de l'as-
quelle technique a été utilisée.
pect mucostatique de cette technique d'empreinte, l'enre-
gistrement des caractéristiques de la surface d'appui, les
crêtes flottantes par exemple, la position des zones de
réflexion, devrait être parfait, permettant ainsi la réalisation
Les empreintes à l'alginate doivent être coulées, surtout
du porte-empreinte individuel dans des conditions idéales.
si elles sont rebasées, dans les délais les plus brefs,
15 minutes environ avec un plâtre de classe I. Elles ne sont
pas coffrées. Après cristallisation, au moment de la phase
exothermique, l'empreinte est démoulée pour éviter toute
Cette technique est peu utilisée, car longue et relativement réaction secondaire entre l'alginate et le plâtre du modèle,
onéreuse. Connue, entre autres, sous le terme technique de celui-ci pouvant devenir farineux en surface.
Ludwigs, elle consiste à enregistrer la surface d'appui à l'aide Les empreintes au plâtre ou au silicone ne réclament
d'un silicone Putty, puis à tailler ce dernier pour lui donner aucune coulée immédiate. Il est aussi préférable de les cof-
la forme d'un porte-empreinte individuel : libération des frer pour conserver les volumes et épaisseurs des bords de
freins, suppression des surextensions, l'ensemble est l'empreinte. Pour cela une bande de cire rouge de 3 à 4 mm
ensuite rebasé avec un silicone fluide5. de largeur est collée à la périphérie, 2 mm sous le bord de
l'empreinte. Au niveau de l'arcade mandibulaire, la partie
dévolue à la langue est obturée par une feuille de cire.
L'empreinte au plâtre est immergée dans un bac rempli
d'eau de soude, ce liquide faisant office de séparateur;
200 g de plâtre de classe I, si possible d'une couleur très dif-
férente du plâtre utilisé pour l'empreinte sont préparés. Le
modèle est coulé et démoulé immédiatement après la
phase exothermique. La différence de couleur entre le plâtre
Après contrôle, validation et marquage, les empreintes doi-
de l'empreinte et celui de la coulée facilite le contrôle de l'in-
vent être désinfectées au cabinet dentaire par des moyens
tégrité du modèle issu de l'empreinte préliminaire.
adaptés aux matériaux, n'entraînant pas d'altérations du
matériau d'empreinte (stabilité dimensionnelle, précision de
surface...)6.
- L'empreinte à l'alginate - L'empreinte doit en premier
lieu être rincée sous l'eau courante pour éliminer salive,
sang et débris. Puis, selon les recommandations de
l'American Dental Association, la désinfection par immer- Les modèles sont ensuite adressés au laboratoire pour la
sion de l'empreinte est préférable. Le temps d'immer- réalisation des porte-empreintes individuels. Il incombe au
sion ne doit pas dépasser 10 minutes, dans une solu- praticien de transmettre un certain nombre d'informations
tion à base de glutaraldéhyde inférieure ou égale à 2 % ; par écrit grâce à la fiche de liaison. Ces informations concer-
soit un désinfectant en spray (hypochlorite de sodium à nent le type de porte-empreinte souhaité (adapté, espacé,
semi-espacé), la position d'un espacement localisé lié à la laminée afin de lui assurer une épaisseur homogène.
présence d'une éventuelle crête flottante, d'un point ou Pour pallier l'incidence des déformations secondaires, il
d'une zone douloureuse, l'orientation des bourrelets dans la est conseillé d'utiliser le porte-empreinte immédiate-
région incisive en fonction du type morphologique, de la lon- ment ou bien 24 heures après.
gueur des lèvres supérieure et inférieure si elles diffèrent des - Les résines thermo-déformables - Des plaques sont
données habituelles. chauffées, puis appliquées, soit par aspiration, soit par
compression sur le modèle de travail. Elles présentent
l'inconvénient de ne pas autoriser des modifications
ponctuelles de volume ou d'épaisseur, de ne pas péné-
trer dans d'éventuelles zones de contre-dépouilles, sauf
Après coulée, au laboratoire les modèles sont taillés selon
élimination du coffrage. Enfin l'élévation de température
des règles bien précises :
inhérente à leur technique de manipulation interdit la
- Le modèle maxillaire - La face inférieure est taillée en
mise en place de cire sur le modèle. Elles ne sont donc
restant parallèle au plan passant par les tubérosités et la
pas très adaptées à la réalisation d'un porte-empreinte
papille incisive. Ce plan, très voisin du plan de Coperman,
individuel.
permet d'orienter facilement les modèles dans la
- Les résines photopolymérisables - Elles sont de deux
mesure où l'arcade maxillaire ne présente pas d'ano-
types. Le premier type est représenté par des résines
malie (forte résorption, hypertrophie des tubérosités).
comparables aux résines composites utilisées en den-
Dans la partie la plus profonde de la voûte palatine,
tisterie restauratrice; mais la charge est essentiellement
l'épaisseur doit être d'environ 10 mm. La face distale du
organique plutôt qu'inorganique. Le matériau se pré-
modèle est ensuite taillée en restant parallèle à la ligne
sente sous forme de feuilles qui sont enfermées dans
virtuelle passant par les deux sillons ptérygo-maxillaires.
une enveloppe étanche à la lumière. Sous cette forme
À la périphérie, la limite du coffrage est conservée, puis
on trouve la résine TRIAD® ou Spectra-Tray®. Le
à l'aide d'un cutter les bords sont adoucis.
deuxième type de résine photopolymérisable est une
- Le modèle mandibulaire - La face inférieure du modèle
résine Bis-GMA utilisant une polymérisation à la fois chi-
est parallèle à un plan qui passe par le milieu des tri-
mique et lumineuse. Elle est constituée d'un mélange
gones rétromolaires et, antérieurement, à 18 mm du
poudre liquide.
fond du vestibule. Distalement, la face postérieure est
Les résines photopolymérisables présentent une cer-
taillée parallèlement à la ligne joignant les insertions des
taine toxicité sur les cellules épithéliales buccales, qui résulte
ligaments ptérygo- mandibulaires.
de la composition du matériau et non de sa polymérisation9.
La modification du temps de polymérisation n'a que peu
d'effet sur cet aspect. Il convient au laboratoire et au cabinet
dentaire de travailler ces matériaux avec une forte aspiration
Les qualités requises pour un porte-empreinte individuel et un masque de protection. De plus, les retouches entraî-
dépendent du type de matériau et de sa réalisation. nent la formation d'une poussière très fine qui se diffuse de
manière plus insidieuse que celle des résines autopolymé-
risables6.
Le type de matériau
Le matériau employé pour la réalisation du porte-empreinte Les critères de réalisation
individuel doit permettre d'obtenir un porte-empreinte rigide
et indéformable. De plus, il ne doit présenter aucun risque Le porte-empreinte doit présenter des bords arrondis, lisses,
de toxicité lors de sa préparation et de ses réglages. Il doit sans aspérité, et doit compenser les zones fortement résor-
enfin offrir des possibilités de désinfection8. bées. Au niveau de la voûte palatine, l'épaisseur est réduite
Deux grandes familles de matériaux sont utilisables, les (1,5 mm) pour ne pas empiéter sur l'espace de Donders.
gommes-laques et les résines. Les gommes-laques Son volume doit lui assurer une insertion et une désinser-
devraient être abandonnées, car elles ne répondent pas aux tion aisées compatibles avec l'ouverture buccale. La pré-
critères souhaités en particulier les critères de rigidité et de sence d'un bourrelet de préhension est obligatoire pour sou-
résistance à la température. tenir les tissus périphériques, ce qui assure le rétablissement
Les résines utilisées sont de trois types : de l'esthétique et place les zones de réflexion jugale, labiale,
- Les résines autopolymérisables - Les produits sont nom- linguale dans une position idéale. De ce fait, le principe de
breux, variés, du type polyméthacrylate de méthyl réalisation d'un « manche » de porte-empreinte doit être tota-
(Formatray®, Ostrom 100 GC'®, Ivolène®). Ils résultent lement banni au bénéfice d'un bourrelet.
le plus souvent d'un mélange poudre-liquide, qui doit
être préparé selon les doses prévues par le fabricant. Le
respect des proportions permet d'éviter des distorsions
secondaires parasites. Après mélange, la résine est lais- La réalisation d'un porte-empreinte individuel se déroule en
sée au repos en atmosphère fermée, puis la masse est quatre temps.
1 e r temps - Le tracé des modèles Porte-empreinte et empreinte
anatomofonctionnelle
Les traces laissées par le crayon dermographique utilisé lors
de l'empreinte préliminaire sont renforcées, puis différents Dans ce cas, le porte-empreinte est adapté, ajusté à la sur-
repères sont marqués sur les modèles maxillaire et mandi- face d'appui. À l'arcade maxillaire, les éventuelles contre-
bulaire selon les schémas suivants (fig. 9-12a, b). dépouilles du versant vestibulaire des crêtes sont comblées
La position des bords est plus délicate à déterminer, car avec de la cire en veillant à en déposer le strict minimum,
elle dépend de la qualité de l'empreinte et particulièrement et à rester en deçà de la limite du porte-empreinte. Les par-
de l'enregistrement de la zone de réflexion. Idéalement les ties soulignées par les marquages (torus, épines irritatives)
limites du porte-empreinte se situent à 1 mm du fond du sont espacées avec une feuille de cire rose. À l'arcade man-
vestibule. dibulaire, les zones de contre-dépouilles, en particulier au
niveau des régions rétro-mylohyoïdiennes, sont aussi com-
blées. Par contre, si les contre-dépouilles sont importantes
la préparation d'un modèle fractionné est indiquée10.

Porte-empreinte et empreinte semi-compressive


Le porte-empreinte est espacé au niveau de la muqueuse
masticatoire ou attachée, ajusté au niveau de la muqueuse
libre. Une feuille de cire rose calibrée est appliquée sur l'en-
semble de la surface d'appui, puis découpée au niveau de la
limite de la muqueuse attachée. L'ensemble est ensuite recou-
vert d'une feuille d'aluminium ménager (fig. 9-13a, b, c, d).

Porte-empreinte et empreinte mucostatique


Le porte-empreinte est espacé vis-à-vis de l'ensemble de la
surface d'appui. Une feuille de cire est appliquée sur l'en-
semble de la surface du modèle. Puis, quatre petites perfo-
Fig. 9-12a Repères tracés sur le modèle maxillaire : Axe de symé-
trie passant par la papille incisive et entre les deux papilles pala- rations 3 mm x 3 mm sont pratiquées dans la cire au niveau
tines (1), perpendiculaires l'une passant par le centre de la papille des zones dures déterminées par le praticien. Une feuille de
incisive (2) et l'autre passant 6 à 8 mm en avant (3), latéralement, papier aluminium recouvre la surface de la cire, la résine du
les axes des crêtes au niveau molaire (4), les tubérosités(5), les porte-empreinte est ensuite appliquée en veillant à bien l'in-
limites du coffrage(6). sérer dans les perforations. Ainsi, des butées sont créées,
assurant une remise en place parfaite du porte-empreinte
sur les surfaces d'appui muqueuses.
Dans ces deux dernières techniques, la feuille d'alumi-
nium évite à la cire rose de coller à la résine lors de la phase
exothermique due à la polymérisation, et permet au prati-
cien de décoller facilement la feuille de cire lorsque celle-ci
doit être éliminée.

3e temps - Application de la résine


Le modèle est isolé, la résine préparée. Lorsqu'elle atteint sa
phase pâteuse, elle est laminée. La feuille de résine est appli-
quée sur le modèle, en veillant à conserver son épaisseur et
à ne pas laisser de vide entre le modèle et la résine. Les
bords sont coupés à l'aide de ciseaux ou avec la pointe d'un
Fig. 9-12b Repères tracés sur le modèle mandibulaire : axes des cutter. Le porte-empreinte est désinséré juste après la phase
crêtes (1) ; aire de sustentation d'Ackermann (2), a) sommet de exothermique de la polymérisation. Les bords sont éven-
la crête, b) pied de la crête ; trigones rétro-molaires (3) ; limites du tuellement corrigés pour respecter le tracé puis arrondis, les
coffrage (4). éventuelles aspérités sont éliminées et le porte-empreinte
poli si nécessaire.

2 e temps - La préparation des modèles 4 e temps - Réalisation du bourrelet

Les modèles sont préparés en fonction du type d'empreinte Le bourrelet de préhension est réalisé en cire dure ou en
secondaire envisagé. pâte thermoplastique Stent's®, Kerr Blanc ou Marron®. Il est
fixé et collé sur le porte-empreinte. Sa largeur est d'environ varie au niveau des incisives et molaires (fig. 9-15).
2 à 3 mm au niveau antérieur et 5 mm au niveau postérieur Postérieurement, le bourrelet s'arrête 6 mm en avant des
(fig. 9-14a, b). Dans le sens vertical, la hauteur moyenne tubérosités ou des trigones.

Fig. 9-13 Réalisation d'un porte-empreinte destiné à une empreinte semi-compressive.

Fig. 9-13a Tracé de la surface de la limite entre la muqueuse atta- Fig. 9-13b Application d'une feuille de cire calibrée pour créer un
chée et la muqueuse libre. espacement.

Fig. 9-13c Feuille d'aluminium ménager appliquée pour éviter Fig. 9-13d Intrados du porte-empreinte.
l'adhésion de la cire à la résine du PEI.

Fig. 9-14a Position du bourrelet maxillaire par rapport aux repères Fig. 9-14b Position du bourrelet mandibulaire par rapport aux
tracés. repères tracés.
porte-empreinte. Par contre, il est délicat de modifier sa posi-
tion. C'est pourquoi les indications transmises par le prati-
cien sur l'orientation de la lèvre inférieure sont capitales, car
elles permettent d'adapter l'orientation de la lame.
Au niveau antérieur, la lame se situe très légèrement sur
le versant vestibulaire de la crête dans l'aire de sustentation
d'Ackermann. La face vestibulaire est concave orientée en
haut et en avant, l'orbiculaire des lèvres venant ainsi épou-
ser cette concavité et assurer par là même la stabilisation du
porte-empreinte. Cependant, la lame sera dirigée en haut et
vers l'arrière en cas de classe III, d'une lèvre qui lors de l'ou-
verture buccale se tend vers l'arrière et impose ainsi d'orien-
Fig. 9-15 Hauteur moyenne des bourrelets à l'arcade maxillaire et
ter la lame en haut et en arrière. Latéralement, la lame se
à l'arcade mandibulaire au niveau incisif et molaire.
situe 1 mm à l'extérieur de l'axe moyen de la crête, tout en
respectant l'aire de Pound. C'est la zone qui s'étend entre
les faces vestibulaire et linguale du trigone rétromolaire et la
À l'arcade mandibulaire, il est préférable de remplacer le position estimée de la face mésiale de la canine.
bourrelet en cire par une lame en résine (fig. 9-16). Celle- Les porte-empreintes individuels sont ensuite contrôlés,
ci renforce et rigidifie le porte-empreinte, évitant les mou- nettoyés et adressés au cabinet dentaire pour la réalisation
vements de torsion, de flexion et les risques de fractures du des empreintes secondaires.

Fig. 9-16a Porte-empreinte mandibulaire avec une lame en résine. Fig. 9-16b Orientation et formes de la lame en fonction du type
de lèvre : 1 ) aire d'Ackermann ; 2) sillon labio-mentonnier marqué ;
3) lèvre dirigée vers l'arrière lors du mouvement d'ouverture.

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De manière à obtenir les propriétés mécaniques et fonc- cale2. En cas de nausées, une prémédication adaptée à
tionnelles espérées et respecter à long terme l'intégrité tis- l'intensité et aux étiologies de celles-ci peut être néces-
sulaire, les objectifs spécifiques de l'empreinte secondaire saire3.
sont:
- d'enregistrer de manière très précise les reliefs morpho-
logiques, les caractéristiques physiologiques de la sur-
face d'appui, en particulier le comportement viscoélas-
tique et hémodynamique de la muqueuse;
- d'évaluer de manière fine les volumes des zones de L'adaptation du porte-empreinte se déroule en quatre
réflexion ; temps, selon la séquence suivante: contrôle de la stabilité,
- d'assurer simultanément le libre jeu des organes para- recherche de l'esthétique et du couloir prothétique, orienta-
prothétiques et le joint périphérique. tion du plan occlusal et réglage des limites.
Cliniquement, les empreintes secondaires se déroulent
en trois phases, deux phases communes et une phase spé-
cifique propre à la technique d'empreinte indiquée.
La stabilité
Le porte-empreinte est inséré dans la cavité buccale, sa sta-
bilité sur la surface d'appui est contrôlée par des pressions
digitales appliquées alternativement au niveau molaire. Si
Cette phase comporte deux temps essentiels : une instabilité apparaît, on doit éventuellement recontrôler
- Le contrôle du porte-empreinte individuel (PEI) - Lors la stabilité sur le modèle, mais, surtout, rechercher par pal-
de la réception du porte-empreinte au cabinet dentaire, pation, au niveau de la voûte palatine, des zones très peu
le praticien contrôle sa bonne exécution et le respect par dépressibles autour desquelles le porte-empreinte indivi-
le laboratoire des indications fournies. La stabilité, la rigi- duel bascule. Un crayon dermographique délimite les zones
dité, l'épaisseur au niveau de la voûte palatine, les ainsi découvertes (fig. 10-1a, b). Le porte-empreinte est
dimensions des bourrelets de préhension sont vérifiées ; appliqué sur la surface d'appui pour que les zones délimi-
les éventuelles rugosités sont recherchées et éliminées. tées par le crayon se marquent sur l'intrados du porte-
Enfin, le porte-empreinte est désinfecté (spray), rincé, empreinte, qui est ensuite creusé à leur niveau.
puis plongé dans un bol d'eau additionnée de bain de Dans certains cas, la stabilité du porte-empreinte est dif-
bouche1. ficile à obtenir. L'utilisation de matériaux dits révélateurs peut
- L'installation du patient - Le patient doit être conforta- se révéler utile. Pour cela, de l'alginate fluide, des silicones
blement installé, le plus souvent en position légèrement à empreinte (faible viscosité) ou spécifiques (Fit-Checker
inclinée, mais adaptée à son âge, à sa courbure cervi- GC®) sont placés en très petite quantité dans l'intrados au
Fig. 10-1a Délimitation des limites du torus palatin à l'aide d'un Fig. 10-1b Corrections correspondantes au niveau de l'intrados du
crayon dermographique. PEI.

niveau de la région concernée4. Le porte-empreinte est


inséré, fortement appliqué sur la surface d'appui, après géli-
fication ou réticulation des matériaux employés, le PEI est
désinséré. Les zones où le matériau est chassé sont creu-
sées.

L'esthétique et le couloir prothétique


Dans la région antérieure, le préréglage de la longueur
(20 mm) et de la position du bourrelet (6 à 8 mm environ
en avant de la papille incisive) rétablit dans la majorité des
cas le soutien adéquat de la lèvre supérieure. Cependant,
en fonction du type de lèvre et du type morphologique, des
modifications de l'orientation et de la longueur du bourrelet
peuvent se révéler nécessaires5'7. Réchauffé, il est modelé Fig. 10-2 Influence de la position du bourrelet sur la position et
jusqu'à ce que son bord libre: l'épaisseur de la zone de réflexion : a) bourrelet en harmonie avec
- dépasse de 1 mm environ la lèvre chez les femmes ou la joue et la zone de réflexion ; b) bourrelet trop vestibulaire, abais-
l'affleure chez les hommes; sement et élargissement de la zone de réflexion ; c) bourrelet trop
- restaure l'angle naso-labial ; lingual, abaissement et amincissement de la zone de réflexion.
- respecte la gouttière philtrale.
Latéralement, la position vestibulo-linguale du bourrelet
contribue au soutien des joues et à l'effacement partiel des doit être considéré comme s'étendant entre l'aile du nez et
sillons naso-géniens. Ce soutien doit être passif pour éviter le milieu du tragus. L'utilisation du plan de Fox et d'une
de provoquer des tensions musculaires, en particulier du réglette rigide, ou du double plan de Fox, facilite cette déter-
buccinateur, qui peut déstabiliser le porte-empreinte. mination (chapitre 11).
A contrario, l'absence de contact provoque une contraction
des fibres du buccinateur et, en conséquence, une modifi-
Les limites périphériques du porte-empreinte
cation de la position de la zone de réflexion (fig. 10-2).
Enfin, la partie palatine du bourrelet est examinée, éven- La dernière étape consiste à adapter la forme, la longueur
tuellement corrigée, afin de supprimer toute interférence et l'épaisseur des bords du porte-empreinte à la morpholo-
entre sa partie linguale et les faces latérale et dorsale de la gie de la zone de réflexion. "
langue. Pour cela le porte-empreinte est mis en place et main-
tenu délicatement par le praticien. La région à analyser est
mobilisée par une traction manuelle de la joue et de la lèvre,
L'orientation du plan d'occlusion les éventuels déplacements ou mouvements du porte-
Le niveau, l'orientation sagittale et frontale du plan occlusal empreinte sont alors ressentis au niveau digital. Cette tech-
sont réglés. Dans la région antérieure, la situation verticale nique demande une certaine expérience. C'est pourquoi
du plan occlusal correspond à la longueur du bourrelet pré- l'utilisation d'un crayon dermographique est préférable.
cédemment déterminée. Dans le plan frontal, le bord du L'extrémité du crayon est trempée dans l'alcool ou dans l'eau
bourrelet doit être parallèle au plan bipupillaire et, dans le selon le type de crayon utilisé (pour la désinfection il
plan sagittal, parallèle au plan de Camper, qui, à ce stade, convient de les tremper dans de l'hypochlorite de sodium).
Fig. 10-3a Tracé de la zone de réflexion à l'aide du crayon. Fig. 10-3b Mise en place du PEI.

Fig. 10-3c Mise en évidence des surextensions et corrections. Fig. 10-3d Corrections au niveau d'un frein.

Le praticien écarte délicatement la joue, la pointe du crayon


délimite la position idéale de la zone de réflexion. Le porte-
empreinte est réinséré, appliqué sur la surface d'appui et les
tissus périphériques mobilisés. Les repères muqueux tracés
se reportent sur le porte-empreinte, ils mettent en évidence
les zones en surextension (fig. 10-3a, b, c).
Les bords sont raccourcis en veillant à conserver leur
épaisseur, leur aspect lisse et arrondi. La réduction doit per-
mettre de situer le bord à 1 mm de la zone de réflexion,
espace nécessaire à la mise en place du matériau qui sera
utilisé lors de l'enregistrement des bords.
Au niveau des freins, il convient non seulement de libé-
rer leur passage, mais aussi de recréer un « logement » dans
l'extrados pour les fibres musculaires (fig. 10-3d).
Ces corrections s'effectuent successivement sur les cinq
segments qui composent le joint vestibulaire (fig. 10-4). Fig. 10-4 À l'arcade maxillaire, le joint vestibulaire se compose de
Postérieurement, pour plus de sécurité, le porte- cinq segments : a) segments tubérositaires ; b) segments latéraux ;
empreinte doit s'étendre de 1 à 2 mm environ au-delà de c) segment incisif ; Le joint postérieur comprend un segment :
la ligne de vibration postérieure dont la position est déter- d) segment vélo-palatin.
minée, puis soulignée à l'aide du crayon dermographique
(chapitre 4).
L'adaptation et les réglages se déroulent selon les mêmes
séquences que celles utilisées pour le porte-empreinte
maxillaire.

La stabilité
Elle est évaluée par un appui digital alternatif appliqué au
niveau des premières molaires. Si, comme à l'arcade maxil-
laire, les causes d'instabilité du porte-empreinte sont com-
parables, les zones à l'origine de ce phénomène sont sou-
vent plus difficiles à déterminer. L'utilisation de matériaux
révélateurs tels que les cires, l'alginate, les silicones s'avère
à nouveau d'un grand secours pour objectiver la ou les zones
à corriger. Fig. 10-5 À l'arcade mandibulaire, le bord vestibulaire se compose
de 4 segments : a) segment incisif ; b) segments modiolus ;
c) segments latéraux molaires ; d) segments trigone. Le bord lin-
L'esthétique et le couloir prothétique gual de trois segments : e) segment sublingual ; f) segments sous
Dans la mesure où les dimensions et l'orientation du bourre- mandibulaires ; g) segments rétro-mylohyoïdiens.
let ou de la lame en résine ont été respectées, ceux-ci s'intè-
grent parfaitement dans le couloir prothétique. Au niveau inci-
sivo-canin, le bourrelet soutient la lèvre de manière passive. Au • Le segment incisif
repos, la langue et la lèvre doivent s'appliquer spontanément Au repos, la position de la zone de réflexion résulte du
sans effort sur les faces vestibulaire et linguale du bourrelet ou contact qui s'établit entre le bourrelet et la lèvre.
de la lame. Ce contact participe à l'établissement des joints sub- Si le bourrelet est trop lingual, les muscles mentonniers
lingual et vestibulaire, ainsi qu'au rétablissement de l'esthé- se contractent, la zone de réflexion se raccourcit et souvent
tique. Une mauvaise orientation, une position erronée du bour- le porte-empreinte est chassé vers l'arrière.
relet provoquent une malposition de la langue, de la lèvre et L'analyse de la position de la zone de réflexion par rap-
de la zone de réflexion vestibulaire. En effet, par voie réflexe, port au bord du porte-empreinte est indissociable de l'ana-
ce contact s'établit toujours sous l'effet de la contraction de l'or- lyse du contact entre le bourrelet et la lèvre (fig. 10-6a). Seul
biculaire et surtout des muscles mentonniers, qui soulèvent, le soutien harmonieux de celle-ci par le bourrelet, sans
donc raccourcissent, la zone de réflexion8. Il conviendra alors contracture réflexe, permet une adaptation précise du bord
d'avancer le bourrelet pour assurer un soutien harmonieux de du porte-empreinte.
la lèvre et une position antérieure de la langue. Le praticien doit très délicatement écarter la lèvre pour
Latéralement, la face interne de la joue doit entrer en évaluer la position du bord par rapport à la zone de réflexion
contact avec la face vestibulaire du bourrelet, du côté lingual, et en tirer les conclusions suivantes :
la langue se place alors spontanément en position antérieure - si le bord du porte-empreinte est en retrait par rapport à
basse. la zone de réflexion, il convient d'allonger le bord pour
qu'il s'étende dans la zone de réflexion (fig. 10-6b, c, d) ;
L'orientation du plan d'occlusion - si le bord recouvre la zone de réflexion, le porte-
empreinte est corrigé en veillant à libérer le frein de la
Dans le sens vertical, la surface occlusale du bourrelet ou de
lèvre et le jeu de la zone de réflexion.
la lame en résine se situe au niveau du plan d'occlusion dont
le niveau est déterminé grâce à des repères anatomiques : • Le segment « triangulaire des lèvres - modiolus »
commissures, langue, face interne de la joue, milieu du tri- Le patient effectue des mouvements de protraction et de
gone rétromolaire (chapitre 11). rétraction de la lèvre : toute instabilité du porte-empreinte
signale la présence d'une interférence entre la face vestibu-
Les limites périphériques du porte-empreinte laire du bourrelet et le jeu du triangulaire des lèvres et du
Au niveau de l'arcade mandibulaire, le réglage des limites modiolus. Les interférences sont ensuite éliminées par des
du porte-empreinte s'applique à la portion vestibulaire, puis corrections précises du porte-empreinte.
linguale. • Le segment latéral molaire
Il s'étend au niveau des planchettes d'Ackermann que le
Côté vestibulaire
porte-empreinte recouvre, sans pour autant interférer avec
La méthode est la même que celle utilisée pour l'arcade les insertions inférieures du buccinateur. L'analyse soigneuse
maxillaire, utilisation de repères visuels et d'un crayon der- du profil du porte-empreinte au niveau de cette région ana-
mographique. Les corrections portent successivement sur tomique est très révélatrice. En cas de crête résorbée la ligne
les 7 segments des bords vestibulaire et lingual (fig. 10-5). oblique apparaît comme un sillon. Le porte-empreinte est
Fig. 10,6 Incidence de la position du bourrelet sur la position de la lèvre inférieure et la situation de la zone de réflexion.

Fig. 10-6b La lèvre est écartée,


la zone de réflexion s'éloigne du
bord du porte-empreinte car le
bourrelet n'est pas assez vesti-
bulaire et le bord est trop court.

Fig. 10-6d Le bord antérieur du


porte-empreinte est allongé.

retouché de manière à obtenir un bord arrondi autour - à ne pas interférer avec le jeu du plancher buccal.
duquel la zone de réflexion va s'enrouler. Pour cela, le bord du porte-empreinte est meulé paral-
Bouche grande ouverte, le crayon souligne la zone de lèlement au plancher buccal pour, d'une part, ne pas le rac-
réflexion, qui est ainsi marquée sur les bords du PEI courcir et, d'autre part, le soulever ou l'éloigner par rapport
(méthodes : marquage à l'aide du crayon dermographique à la région sublinguale. Les corrections sont contrôlées par
puis manipulation des joues par le praticien). des mouvements de protraction antérieure et latérale de la
langue (fig. 10-7a, b).
• Le segment « trigone »
Bouche grande ouverte, le crayon dermographique marque
la limite entre la surface d'appui statique, les insertions ver-
ticales du masséter et l'insertion du raphé ptérygo-mandi-
bulaire. La limite du PEI est réglée en fonction des marques
du crayon dermographique. Les formes obtenues sont fonc-
tion de la position et de la tonicité des insertions basses du
masséter (fig. 4-15).

Côté lingual
Les corrections sont plus délicates, car elles se déroulent le
plus souvent à l'aveugle. Les différents mouvements du
porte-empreinte, provoqués par les déplacements de la
langue et du plancher buccal, sont ressentis par la pulpe des Fig. 10-7a Les corrections de la région du joint sublingual se font
doigts lors des essais statiques ou dynamiques. parallèlement au plan occlusal.
Avant tout réglage le praticien contrôle l'adaptation du
volet lingual du porte-empreinte vis-à-vis de la muqueuse
qui recouvre la face interne du corps de la mandibule dans
la région rétro-mylohyoïdienne.
Si le volet lingual n'est pas en contact avec la muqueuse,
il doit être réadapté dans la cavité buccale à l'aide de résine
autopolymérisable.
Les corrections portent sur 5 segments:
• Le segment sublingual
Le bord du porte-empreinte est corrigé de manière :
- à libérer le jeu des insertions du frein de la langue,
- à obtenir un recouvrement du plancher buccal jusqu'à la Fig. 10-7b Le bord du porte-empreinte s'éloigne du plancher buc-
frange sublinguale, cal libérant son jeu physiologique.
• Le segment sous-maxillaire - Si le porte-empreinte se déplace du même côté que la
Les corrections répondent aux règles suivantes. langue, l'extrados du porte-empreinte est trop épais
Au repos : (fig. 10-8c).
- Si le porte-empreinte se soulève verticalement, les bords • Le segment rétro-mylohyoïdien
sont trop longs (fig. 10-8a).
La partie distale du porte-empreinte doit franchir la ligne
Lors d'un mouvement de latéralité de la langue :
mylohyoïdienne et ne pas interférer avec la base de la
- Si le porte-empreinte se soulève du côté controlatéral le
Iangue9. Le réglage se fait par une protraction linguale
bord est trop long (fig. 10-8b).
importante selon les critères suivants:
- Le volet lingual du porte-empreinte est au contact de la
Fig. 10-8 Réglages de la partie latérale interne du porte-empreinte muqueuse.
mandibulaire. - Distalement le porte-empreinte s'étend jusqu'à l'insertion
du raphé ptérygo-mandibulaire, puis descend perpendi-
culairement par rapport au plan occlusal (fig. 10-9).
- La partie basse s'arrondit puis remonte pour franchir les
insertions distales du mylohyoïdien.

Fig. 10-8a Au repos le porte-empreinte se soulève ; les bords sont


trop longs.

Fig. 10-9 Limite distale du porte-empreinte correspond à une


droite, perpendiculaire au plan occlusal passant par les insertions
du raphé ptérygo-mandibulaire. La partie du porte-empreinte située
au-delà de cette limite doit être éliminée.

Fig. 10-8b Lors d'un déplacement de la langue le PEI se soulève


du côté contro-latéral : le bord est trop long.
C'est le concept le plus utilisé. Il fait appel aux techniques
habituelles, mais aussi à des techniques plus exception-
nelles.

L'empreinte de l'arcade maxillaire


- La t e c h n i q u e classique
Elle se déroule en deux temps : l'enregistrement du joint
périphérique puis de la surface d'appui.

Le joint périphérique

L'enregistrement précis des caractéristiques statiques et


dynamiques de la zone de réflexion et du voile du palais
Fig. 10-8c Si le PEI se déplace du même côté que le déplace- peut être exécuté avec différents matériaux,de maniere sec-
ment de la langue l'extrados lingual est trop épais. torielle ou globale.
• Les matériaux doivent répondre aux qualités suivantes : matériaux du type silicone (Xantopren Fonction®,
- présenter suffisamment de « corps » pour se maintenir Xantopren mucosa®, Coltène regular®) ou des poly-
sur le bord du porte-empreinte; éthers10 (Permadyne orange®).
- permettre un préformage digital ; Les qualités de ces matériaux sont remarquables, mais
- offrir un temps de travail suffisamment long; ils présentent des inconvénients, comme leur relative dif-
- posséder un coefficient de fluage compatible avec le tonus ficulté d'utilisation, car leur manipulation réclame beau-
des muscles périphériques et de la zone de réflexion ; coup d'attention, de soins et leur prix de revient est élevé.
- pouvoir être retouchés, modifiés sans difficulté. - Les cires plastique à température buccale - La plasticité
Pour cela quatre familles de matériaux sont à la disposi- de ces cires permet d'enregistrer le volume de la zone
tion du praticien (tableau 10-1) : de réflexion et le jeu musculaire sans limite de temps
- Les pâtes thermoplastiques - Elles présentent des qua- (Adheseal®). C'est un matériau « idéal », mais qui
lités incontestables; plastiques, elles refroidissent rapi- requiert une mise en œuvre longue.
dement et deviennent très dures à température buccale, - Les matériaux résineux - Proposés pour réaliser des
les corrections, les additions sont pratiquées sans aucune joints périphériques, les résines autopolymérisables sont
difficulté, de plus leur prix de revient est faible. Ces maté- plus ou moins abandonnées. Par contre, les résines à
riaux sont des matériaux idéaux, l'inconvénient serait prise retardée telles que l'Hydrocast®, le Fitt®, le Soft-
pour certains praticiens leur manque de modernité. Liner® peuvent être utilisées pour enregistrer le joint
- Les matériaux à réaction de prise - De différentes périphérique. Elles sont particulièrement indiquées en
familles et de différentes viscosités, ils comprennent des présence de tissus altérés, lésés.

Tableau 10-1 Caractéristiques des matériaux d'enregistrement du joint périphérique.

• Techniques de réalisation tout risque de brûlures, le bord du PEI est alors rapidement
Dans un premier temps, le joint vestibulaire est enregistré trempé dans l'eau. Cela tempère la surface de la pâte ther-
de manière sectorielle ou globale, puis dans un deuxième moplastique, laissant son cœur chaud et lui évitant de coller
temps le joint postérieur. aux commissures ou aux lèvres. Après chaque étape, le résul-
Réalisation du joint vestibulaire par méthode sectorielle tat est contrôlé et les excédents de matériau éliminés.
La pâte thermoplastique est réchauffée à la flamme, et lors- Cliniquement, l'enregistrement du joint vestibulaire se
qu'elle présente une consistance crémeuse elle est placée déroule en cinq étapes selon les séquences suivantes
sur le quart externe du bord du porte-empreinte. Pour éviter (tableau 10-2):

Tableau 10-2 Les 5 étapes d'enregistrement du joint vestibulaire maxillaire.


Étapes 1 et 2 : secteurs latéraux - Après mise en place À ce stade, la rétention du PEI dans les mouvements de
de la pâte thermoplastique, le porte-empreinte est inséré tractions latérales doit être parfaite. Si une incertitude
dans la cavité buccale. Le praticien mobilise alors la zone de demeure, la précision du joint est contrôlée en déposant
réflexion en imprimant un mouvement identique à celui délicatement sur les bords de la pâte de l'oxyde de zinc ou
employé lors du réglage des bords. Après quelques instants, un silicone light. Les surextensions se traduisent par une
la rétention obtenue est testée en plaçant l'index sur le bour- absence de matériau ou les sous-extensions par un prolon-
relet controlatéral et en tirant dans la direction opposée. Le gement du matériau de contrôle. Systématiquement, au
critère de réussite est la rétention du porte-empreinte, une niveau du passage du frein de la lèvre, la pâte thermoplas-
forme arrondie, un aspect mât et lisse de la pâte thermo- tique est éliminée pour faciliter, lors de l'empreinte, l'écou-
plastique (fig. 10-10). lement du matériau.
Étape 6 : le joint postérieur - Le porte-empreinte doit
s'étendre très légèrement au-delà de la ligne de vibration
postérieure qui correspond à la position qu'occupe le voile
lorsque le patient prononce la voyelle « A ». Cette extension
au-delà de la limite idéale crée une marge de sécurité contre
toute erreur ou tout raccourcissement intempestif de la pro-
thèse. La pâte thermoplastique est déposée dans l'intrados
au niveau du voile selon une forme adaptée au type de voile
(tableau 10-3).

Tableau 10-3 Classification des différents joints postérieurs.

Fig. 10-10 Joint périphérique à la pâte de Kerr dans le secteur


latéral.

Étapes 3 et 4 : secteurs paratubérositaires - Dans ce cas


la pâte est placée sur le bord, mais aussi sur l'extrados de la
région paratubérositaire (fig. 10-11). Le modelage est
obtenu en invitant le patient à effectuer des mouvements
de latéralité pour enregistrer les déplacements de l'apo-
physe coronoïde qui la rapprochent de la tubérosité et un
mouvement d'ouverture ample pour « tendre » le raphé pté-
rygomandibulaire.

Réalisation du joint vestibulaire en un temps


Le bord du porte-empreinte est séché et le matériau à réac-
tion de prise, quelle qu'en soit la famille (polyéther, silicone),
est préparé. Il est préférable d'utiliser un conditionnement
en tube qui permet de moduler les proportions entre le cata-
lyseur et la base, pour adapter le temps de prise aux condi-
tions cliniques. Le matériau est placé sans excès sur le bord
du porte-empreinte de manière homogène, puis ce dernier
est inséré dans la cavité buccale. En raison du caractère
hydrophile des polyéthers, if est préférable de l'immerger
quelques instants dans un bol d'eau et éventuellement de
le préformer avec des doigts humides. Cela réduit les risques
d'adhésion avec les lèvres et les tissus mous de la surface
Fig. 10-11 Garnissage de la zone paratubérositaire. d'appui.
Après l'insertion du porte-empreinte, les mêmes mou-
vements de protraction, de rétraction des commissures,
Étape 5 : secteur antérieur - Les mouvements de pro- d'abaissement des lèvres, d'ouverture et de fermeture de la
traction, de rétraction, d'abaissement des lèvres modèlent la mandibule sont réalisés. Lorsque la réaction de prise est ter-
zone de réflexion. Pour enregistrer le jeu du frein de la lèvre minée, le porte-empreinte est désinséré et les bords contrô-
celle-ci est tirée horizontalement. lés (fig. 10-12). Les régions où les bords du porte-empreinte
• Les empreintes anatomo-fonctionnelles sous pres-
sion digitale
Le porte-empreinte est garni sans excès avec le matériau
choisi. L'ensemble est inséré délicatement avec de légers
mouvements de rotation pour faciliter l'écoulement du
matériau à empreinte. Lorsque le PEI est en place le prati-
cien applique une pression symétrique et légère au niveau
des deux premières molaires. Des mouvements d'ouverture,
de fermeture, de latéralité, la mobilisation des lèvres, des
joues modèlent parfaitement la zone de réflexion. Après la
prise du matériau, le porte-empreinte est désinséré et l'em-
preinte contrôlée.
Points particuliers: si le rempart alvéolaire antérieur est
haut, très vertical, l'intrados est creusé, perforé, pour per-
Fig. 10-12 Joint périphérique à la Permadyne orange'
mettre au matériau à empreinte de s'écouler, et ainsi per-
mettre une parfaite mise en place du porte-empreinte.
apparaissent sont corrigées avec une fraise résine. Si les cor- En présence d'une crête flottante localisée, le plus sou-
rections sont très importantes, une petite quantité de maté- vent dans la région antérieure, l'empreinte de la surface d'ap-
riau est replacée à leur niveau et l'ensemble des opérations pui s'effectue en deux temps. Après réalisation de l'em-
est réitéré. preinte de la totalité de la surface d'appui, le porte-empreinte
Le joint postérieur est enregistré dans un deuxième est ouvert au niveau de la crête flottante. Il est ensuite réin-
temps, selon les critères précédemment définis. Par contre, séré et la partie flottante apparaît; son empreinte est prise
le matériau utilisé doit présenter un coefficient de fluage à l'aide de matériaux fluides silicones déposés à la seringue
faible pour exercer une certaine compression des tissus ou de plâtre à empreinte déposé au pinceau pour éviter tout
concernés. déplacement (fig. 10-14a, b, c, d, e).

L'enregistrement de la surface d'appui


L'enregistrement anatomofonctionnel des caractéristiques
de la surface d'appui impose de choisir un matériau d'em-
preinte et une technique de reproduction des pressions
« fonctionnelles ».
Le choix des matériaux d'empreinte découle des don-
nées de l'examen clinique, en particulier de l'importance du
flux salivaire: oxyde de zinc, polyéthers pour une sialorrhée
normale, polysulfure en cas d'asialie partielle ou totale, ou
avec une salive pauvre en mucines (fig. 10-13).
Les pressions fonctionnelles sont simulées avec une
pression digitale par le praticien ou par le patient avec une
pression « occlusale ».
Fig. 10-14a Crête flottante dans la région antérieure.

Fig. 10-14b Après la prise d'empreinte, le porte-empreinte est


Fig. 10-13 Empreinte des surfaces d'appui à l'Impression Paste® ouvert au niveau de la crête flottante.
L'empreinte de l'arcade mandibulaire
- La technique classique
Comme à l'arcade maxillaire l'empreinte se déroule en deux
étapes: enregistrement du joint périphérique, puis de la sur-
face d'appui.

Le joint périphérique
À l'arcade mandibulaire le joint peut être partiel ou total :
- Le joint partiel : il correspond au joint sublingual. La pâte
thermoplastique ou le matériau à réaction de prise est
placé sur le bord externe du secteur sublingual. Cet
apport peut être modelé pour le prolonger horizontale-
ment tout en laissant le passage pour le frein de langue.
Fig. 10-14c Le porte-empreinte est replacé sur la surface d'appui. Le porte-empreinte inséré, le patient est invité à effec-
tuer des mouvements de protraction, de latéralités de la
langue, puis une déglutition. Après refroidissement, la
rétention obtenue est contrôlée, la pâte thermoplastique
devant présenter un aspect mat, arrondi et lisse.
- Le joint complet: la réalisation d'un joint périphérique
complet à l'arcade mandibulaire permet d'exploiter de
manière sûre la totalité de la surface d'appui, sans pour
autant entraver le libre jeu des organes périphériques.
Du côté lingual, la pâte thermoplastique est déposée
successivement au niveau des 5 segments. Les mouve-
ments effectués par le patient sont toujours les mêmes mou-
vements de protraction, de latéralités droite et gauche de la
langue, de déglutition. Pour toutes les séquences d'enregis-
trement, les critères de contrôles sont identiques à ceux
décrits pour le joint partiel.
Fig. 10-14d La crête flottante est recouverte d'un silicone fluide. Du côté vestibulaire, l'enregistrement du joint se réalise
en cinq temps. Le modelage de la pâte thermoplastique
résulte de la mobilisation des organes paraprothétiques, à la
fois par le praticien et le patient, selon la méthodologie sui-
vante (tableau 10-4).
Comme précédemment, en cas d'incertitude sur la pré-
cision du bord prothétique ainsi déterminé, il convient de la
vérifier à l'aide de silicone ou de pâte à l'oxyde de zinc.

L'enregistrement de la surface d'appui


Les critères de sélection des matériaux et les techniques sont
comparables à ceux utilisés pour l'empreinte de l'arcade
maxillaire.
L'empreinte sous pression digitale: garni sans excès du
matériau choisi, le porte-empreinte est placé avec une légère
Fig. 10-14e Résultat final. pression sur l'arcade mandibulaire. Dans un deuxième
temps, les bords de l'empreinte sont modelés avec les
mêmes mouvements que ceux précédemment employés
• L'empreinte sous pression occlusale ou bouche fer- pour délimiter et enregistrer les bords de l'empreinte.
mée L'empreinte sous pression occlusale : cette technique est
tout particulièrement indiquée à l'arcade mandibulaire en
L'empreinte dite bouche fermée est considérée comme la
cas de crêtes fermes et adhérentes.
meilleure technique. En effet, elle permet un modelage fonc-
tionnel de la zone de réflexion, une répartition idéale des - Les techniques spéciales
charges occlusales sur la surface d'appui, mais ses inconvé-
nients sont nombreux. Elle requiert de la part du patient une L'empreinte EX3n : la technique de Jahn
parfaite collaboration et demande au praticien une parfaite Décrite en 1964, cette empreinte anatomo-fonctionnelle ou
maîtrise technique. mucodynamique est, selon l'auteur, particulièrement indi-
Tableau 10-4 Étapes d'enregistrement du joint périphérique vestibulaire mandibulaire.

Fig. 10-15a Empreinte à l'EX3n®. Fig. 10-15b Aspect terminal au niveau des bords.

quée en présence d'une arcade mandibulaire fortement ample, une forte protraction de la langue, des mouvements
résorbée. Ses objectifs sont d'obtenir une surface d'appui de succion et de rétraction des lèvres qui modèlent les bords
d'une étendue maximale, mais sans interférer avec le jeu du porte-empreinte (fig. 10-15a, b). Cette technique pré-
des muscles périphériques. sente l'avantage d'un enregistrement fonctionnel des bords
Les porte-empreintes maxillaire et mandibulaire sont sans limite de temps, mais un inconvénient important, le
préparés selon les mêmes séquences et exigences que pour risque de créer des surextensions.
les techniques classiques. La seule différence réside dans
une réduction plus importante de la longueur des bords, et
des ouvertures plus larges au niveau des passages des dif-
férentes insertions et des brides musculaires11.
Le matériau : le matériau à empreinte est une cire, qui
grâce à l'utilisation d'un réchaud thermostaté est amenée à Les séquences cliniques sont identiques à celles employées
une viscosité optimale pour son utilisation. pour la réalisation des empreintes des arcades maxillaire et
À température buccale, la cire se modèle sur les surfaces mandibulaire: réglage de la longueur des bords du porte-
d'appui et enregistre la position de la zone de réflexion, le empreinte individuel, réalisation du joint périphérique.
jeu des insertions musculaires et des brides. La fluidité du La différence réside dans l'enregistrement de la surface
matériau peut être modifiée pour s'adapter au comporte- d'appui. C'est à ce stade seulement que la feuille d'espace-
ment tissulaire et musculaire. ment est enlevée. Le porte-empreinte se positionne parfai-
L'intrados du porte-empreinte est garni de cire, puis l'en- tement sur l'arcade concernée, mais reste espacé par rap-
semble est appliqué sur la surface d'appui avec une légère port à la surface d'appui. L'intrados du PEI est garni d'un
pression uniformément répartie. Le patient exécute diffé- matériau à empreinte à faible coefficient de viscosité, inséré
rents mouvements fonctionnels tels qu'une ouverture sans précipitation, centré délicatement, appliqué et main-
tenu avec une légère pression digitale. La mobilisation des l'ensemble est replacé sur la surface d'appui, sans pressions
zones de réflexion est comparable à celle des empreintes excessives. Les organes périphériques sont mobilisés pour
anatomo-fonctionnelles. Après la prise du matériau, le porte- éliminer les excès après polymérisation.
empreinte est désinséré puis l'empreinte contrôlée : aucune
surface du porte-empreinte ne doit apparaître, ni aucune
surpression au niveau des bords12.
Les bords du porte-empreinte sont ajustés, selon les mêmes
Empreintes semi-compressives critères que précédemment. Les corrections de la longueur,
et résine à prise retardée de l'épaisseur doivent être effectuées prudemment de
Cette technique est plus particulièrement indiquée au manière à laisser les bords aussi proches que possible de la
niveau de l'arcade mandibulaire. Le porte-empreinte est du zone de réflexion. Ce type d'empreinte est particulièrement
type adapté et les bords sont réglés comme précédem- indiqué à l'arcade maxillaire.
ment. Durant l'ajustage du porte-empreinte, la cire d'espace-
Dans un premier temps, l'ensemble de l'intrados du PEI ment est maintenue dans l'intrados du porte-empreinte.
est garni d'une résine à prise retardée dense (Fitt de Kerr®, Après l'ajustage des bords, la feuille de cire est enlevée et
Soft Liner®). Le porte-empreinte est inséré et placé sans le porte-empreinte retrouve difficilement sa position malgré
pression excessive sur l'arcade. Puis, le modelage des bords les butées qui entrent en contact avec la muqueuse.
est conduit selon les séquences et techniques habituelles: L'intrados est garni d'un matériau d'empreinte très fluide
des mouvements d'ouverture ample et de fermeture sont (Permlastic light®, Luralite®) et l'empreinte est prise comme
suivis de mobilisation de la langue, protraction, déplacement précédemment 13,14 .
à droite, à gauche, puis enfin déglutition. Après 5 minutes,
le porte-empreinte est retiré, le matériau à empreinte doit
totalement englober les bords, mais sans surextension.
L'intrados est alors creusé sans toucher aux bords. Au cabinet dentaire, les empreintes doivent être désinfec-
Dans un deuxième temps, la partie creusée est garnie tées selon des protocoles adaptés aux matériaux, puis adres-
d'une résine à prise retardée fluide (Hydrocast ou Viscogel), sées au laboratoire15 (tableau 10-5).

Tableau 10-5 Procédés de désinfection des matériaux des empreintes secondaires.

modèle. Dans un deuxième temps, une bande de cire


est collée à la périphérie de manière à enfermer l'em-
preinte dans une « boîte en cire » qui évitera au plâtre de
Le traitement des empreintes se déroule en trois étapes : le s'écouler et assurera une coulée la plus dense possible.
coffrage, la coulée et la double base engrenée. - Le coffrage à l'alginate - Il est possible de conserver les
caractéristiques des bords par des coffrages à l'alginate.
Pour cela l'empreinte est immergée dans une boîte
ouvrante garnie d'alginate16. Après gélification la boîte est
Il permet de conserver l'épaisseur, le volume, la forme des ouverte les bords de l'empreinte dégagés, puis la boîte
bords. est refermée (fig. 10-16).
Il est réalisé selon deux procédés :
- Le coffrage avec de la cire - Une bande de cire est col-
lée à la périphérie de l'empreinte 3 mm sous les bords,
distalement en prolongement du voile du palais. À la Le plâtre est spatulé sous vide de manière à offrir la meilleure
mandibule, l'espace « lingual » est operculé par une résistance possible à la compression et à éviter les micro-
feuille de cire dont la forme assurera ensuite la visibilité porosités. La cristallisation du plâtre doit toujours s'effectuer
de l'arcade mandibulaire par la face postérieure du en orientant l'ensemble du coffrage, la surface d'appui diri-
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Ce procédé consiste à réaliser sur un modèle un double 16. Berteretche MV, Citterio H, Hue 0, Martin JR Moyens de repro-
socle, l'interface entre les deux présentant des encoches duction au laboratoire des surfaces d'appui et de leur environ-
mâles et femelles qui assurent un repositionnement parfait nement en prothèse totale : confection des modèles et des
maîtres modèles. Encycl Méd Chir. (Elsevier Paris) Stomatologie-
entre la partie et la contre-partie. Cette réalisation peut se
Odontologie; fasc 23370 C10, vol II, 1996.
faire de manière directe en utilisant des préformes en plas-
tique, auxquelles des aimants peuvent être adjoints, ou de
manière indirecte par taille, puis coulée. Cette double base
permet de mettre en évidence certaines anomalies ou
erreurs d'occlusion qui seront décrites plus avant.
Secondairement, cette technique permet de dissocier le
modèle de l'articulateur avant la mise en moufle et de le
replacer après la polymérisation sur l'articulateur.
En prothèse adjointe complète, l'occlusion correspond au incisif et le milieu du recouvrement des premières
contrôle de l'intensité, de la direction, de la répartition des molaires3.
forces fonctionnelles qui s'exercent sur la surface d'appui À ces diversités de conception, s'ajoutent deux autres
prothétique afin que les différentes fonctions physiologiques éléments qui font partie intégrante du plan d'occlusion :
soient rétablies, le maintien de l'intégrité tissulaire assuré, la la courbe frontale ou courbe de Wilson, la courbe sagittale
stabilisation et la rétention de la prothèse confirmées. ou courbe de Spee. Ces courbes participent de manière
Cette conception générale de l'occlusion implique la majeure à l'équilibre dynamique des relations inter-arcades.
prise en compte d'une composante statique et d'une com-
posante dynamique.
Rôles
Le plan occlusal joue à la fois un rôle fonctionnel et méca-
nique.

Rôle fonctionnel
Au niveau antérieur, le plan d'occlusion contribue au rétablis-
Elle dépend des trois paramètres suivants, le plan d'occlu- sement de l'esthétique et de la phonétique. Au niveau posté-
sion, la dimension verticale, la relation centrée. rieur, il participe plus ou moins directement à l'esthétique mais,
surtout, il contribue à la mastication. De par son orientation, il
améliore ou réduit la puissance masticatoire du patient, car
une modification de l'inclinaison de ± 5 degrés par rapport à
un plan orienté parallèlement à la ligne tragus - aile du nez
Définitions s'accompagne d'une diminution de l'intensité des pressions
appliquées4 (fig. 11-1). De plus, par son niveau, il participe
Les définitions du plan d'occlusion sont à la fois nombreuses
directement à la cinématique du bol alimentaire.
et relativement divergentes. En effet, elles font appel à :
- des références maxillaires - Le plan d'occlusion passe
Rôle mécanique
par le bord libre des incisives centrales maxillaires et la
cuspide disto-palatine des premières molaires1. Le plan occlusal transmet les forces fonctionnelles sur les
- des références mandibulaires - Selon Gysi, le plan d'oc- surfaces d'appui, ce qui contribue à stabiliser la prothèse
clusion passe par le bord libre des incisives inférieures dans la mesure où le plan occlusal et les surfaces d'appui
et par la cuspide disto-vestibulaire des deuxièmes maxillaire et mandibulaire sont parallèles entre eux. Par
molaires mandibulaires2. contre, toute absence de parallélisme entre le plan occlusal
- des références inter-arcades - Le plan d'occlusion est un et les surfaces d'appui engendre une instabilité prothétique
plan virtuel passant par le milieu du recouvrement inter- (fig. 11-2a, b,c).
Fig. 11-1 Forces musculaires et orientation du plan occlusal.

Les critères de détermination du plan occlusal


La détermination du niveau et de l'orientation du plan occlu-
sal fait appel à des critères cliniques et techniques.

Les critères cliniques

Ils permettent de régler successivement le niveau et l'orien-


tation des secteurs antérieurs et postérieurs.

• Le niveau
Dans la région antérieure, le niveau du bourrelet occlusal est
Fig. ll-2a Les crêtes et le plan d'occlusion sont parallèles déterminé par l'intermédiaire de références esthétiques et
entre eux. Les forces fonctionnelles stabilisent la prothèse. éventuellement phonétiques.
- À l'arcade maxillaire, les critères esthétiques correspon-
dent à la visibilité du bord libre, qui varie de 1 à 2 mm.
Cependant, cette visibilité est influencée par le soutien
de la lèvre: une lèvre trop soutenue devient « plus
courte », une lèvre peu soutenue devient « plus longue ».
La visibilité du bord libre devra toujours être établie en
respectant la gouttière philtrale et l'angle naso-labial
(fig. 11-3a, b, c).
- À l'arcade mandibulaire, le plan occlusal se situe au
même niveau que la lèvre inférieure, alors que celle-ci
est, au repos, parfaitement soutenue par le bourrelet.
Cependant, ces critères sont sujets à de nombreuses
variations liées à la longueur, à la forme des lèvres, à l'âge,
au sexe et au type morphologique 5,8 . Les lèvres courtes lais-
sent apparaître fortement les dents maxillaires, peu les dents
mandibulaires. De même, avec l'âge, les dents mandibu-
laires sont plus apparentes alors que les dents maxillaires
tendent à disparaître.
La position des bords libres des bourrelets maxillaire et
mandibulaire peut être contrôlée grâce à la phonétique. La
lèvre inférieure affleurant le bord du bourrelet supérieur lors
de la prononciation de fricatives « f, v », le bord libre du bour-
relet inférieur affleurant le supérieur lors de la prononciation
des sibilantes « s ». Cependant, à ce stade ce test est sou-
vent perturbé par les volumes et reliefs des maquettes d'oc-
clusion, ce qui hypothèque la valeur des résultats obtenus.
Dans la région postérieure, le niveau du plan d'occlusion
Fig. ll-2b, c Une divergence s'installe entre l'une des trois est déterminé par rapport à des références anatomiques et
surfaces, les forces fonctionnelles déstabilisent la prothèse. des références fonctionnelles.
a b c
Fig. 11-3a Angle naso-labial fermé (α), bourrelet trop vestibulaire : visibilité accentuée.
Fig. 11-3b Angle naso-labial respecté (α 1 ), bourrelet est correctement orienté, 1 mm à 2 mm de visibilité.
Fig. 11-3c Angle naso-labial augmenté (α 2 ), le bourrelet est trop lingual, absence de visibilité.

À l'arcade supérieure, anatomiquement le plan occlusal Si la future prothèse mandibulaire ne respecte pas ces
se place 6 mm au-dessous de l'orifice du conduit parotidien9. différents paramètres, son port s'accompagnera de stagna-
À la mandibule, les repères anatomiques sont au tion alimentaire au niveau vestibulaire, de fuite commissu-
nombre de quatre, le plan occlusal se situant: rale, d'instabilité prothétique.
- Au même niveau que la commissure labiale, en regard Cependant certaines exceptions existent. Elles dépen-
de la future pointe cuspidienne de la canine ou de la pre- dent du volume de la langue et du type morphologique. Le
mière prémolaire. plan occlusal est remonté en présence d'une langue étroite,
- 1 mm sous la ligne buccinatrice, ligne qui parcourt la face d'une classe III. A contrario, le plan occlusal est abaissé
interne de la joue au départ de la commissure. Elle cor- lorsque la langue est volumineuse, en présence d'une rela-
respond à la trace occupée par le plan occlusal des dents tion squelettique de classe II. Enfin, en cas d'arcade défavo-
naturelles10 (fig. 11-4). rable, le plan occlusal sera rapproché de cette dernière de
- Sous le maximum de convexité de la langue ou plan manière à réduire les couples de renversement13.
équatorial11.
• L'orientation
- À la moitié ou au tiers supérieur du trigone rétromo-
laire12 Dans le plan frontal, le plan occlusal est parallèle à la ligne
Les références fonctionnelles répondent à un seul objec- bipupillaire. En cas d'asymétrie du visage, il est possible d'uti-
tif, placer le plan prothétique au même niveau que le plan liser la ligne bicommissurale en association avec la ligne
occlusal précédemment occupé par les dents naturelles. Les bipupillaire ainsi que la posture du patient de manière à pla-
joues, les lèvres et la langue sont placées dans une position cer le plan de symétrie du visage et du montage dans le plan
idéale pour créer une véritable enceinte dans laquelle le bol vertical.
alimentaire est enfermé lors de la mastication, participant Dans le plan sagittal, le plan occlusal est souvent décrit
ainsi à la stabilisation. Cette approche est en accord avec le comme étant parallèle au plan de Camper. Mais cette réfé-
principe de zone neutre ou d'équilibre des pressions pro- rence est sujette à de nombreuses variations :
posé en son temps par Fisch (1947). - 1 r e variation - Au niveau de la peau, le plan de Camper
est difficile à déterminer, car à l'origine ce plan est un
plan osseux. Cliniquement, il passe par l'aile du nez et la
partie basse du tragus, partie qui se rapproche le plus du
plan de Camper 14,15 (fig. 11-5).
- 2e variation - Chez le patient édenté le plan d'occlusion
diverge avec le plan de Camper d'environ 7 ou 11 degrés
selon les auteurs16.
- 3e variation - Le plan d'occlusion est sujet à de nom-
breuses variations liées au type morphologique et aux
classes squelettiques17-19.
Cependant, l'établissement d'un parallélisme entre le
plan de Camper et le plan d'occlusion demeure une
approche clinique valable.
« Car, il convient de se souvenir que le plan de Camper
Fig. 11-4 Ligne buccinatrice à la face interne de la joue mettant garde une valeur statistique même s'il n'est jamais paral-
en évidence le niveau du plan occlusal. lèle au plan d'occlusion20. »
crêtes maxillaire et mandibulaire. Cette situation répartit har-
monieusement les charges occlusales sur la surface d'appui.
Cependant, il est possible de modifier le niveau et l'orien-
tation du plan occlusal.
- Modification du niveau : en cas d'arcade défavorable, il
est conseillé de rapprocher le plan d'occlusion vers l'ar-
5,50° sd 3°35 cade la plus défavorable. Ceci diminue le bras de levier
2,75° sd 3°64 et réduit les pressions qui s'exercent sur la surface d'ap-
0,50° sd 3°55 pui muqueuse.
- Modification de l'orientation : en absence de parallélisme
entre les crêtes et le plan occlusal, certains auteurs pro-
posent de choisir un plan parallèle à l'arcade la plus défa-
vorable, voire de modifier la dimension verticale d'oc-
clusion pour obtenir un parallélisme entre les crêtes et
le plan occlusal.

Fig. 11-5 La partie inférieure du Tragus est plus proche du plan • Le plan d'occlusion et les critères céphalométriques
de Camper que les parties médiane et supérieure.
Les tracés céphalométriques peuvent conduire le praticien
à modifier l'orientation et le niveau du plan occlusal.
Cliniquement, les positions verticale et vestibulo-linguale Cette approche impose la prise d'un cliché avec des
du bourrelet sont déterminées. Puis, l'orientation sagittale et maquettes d'occlusion en cire, réglées selon les critères habi-
frontale est établie grâce à l'utilisation du plan de Fox simple tuels et maintenant les relations occlusales lors de sa prise.
ou double. La partie endo-buccale de cette règle, placée sur L'inclinaison du plan d'occlusion est ensuite reportée sur l'ar-
le bourrelet, montre de façon objective le parallélisme ou ticulateur, report facilité par l'utilisation d'un dispositif adapté
l'absence de parallélisme entre le bourrelet et le plan de comme le guide de plan d'occlusion de SAM (fig. 11-7).
Camper et la ligne bipupillaire Par des corrections succes- Cependant, l'utilisation de la céphalométrie ne doit être
sives du bourrelet, le praticien obtient le parallélisme recher- envisagée qu'avec beaucoup de réserve et les interpréta-
ché (fig. 11-6). tions qui en découlent avec beaucoup de prudence. Elle est

Fig. 11-6 Détermination du plan d'occlusion à l'aide du double Fig. 11-7 Dispositif permettant de transférer les valeurs angulaires
plan de Fox. céphalométriques sur l'articulateur SAM.

Les critères techniques plus particulièrement destinée aux patients présentant des
désordres squelettiques importants 21 - 23 .
Les critères techniques correspondent à l'analyse des rela-
tions intercrêtes qui s'établissent entre les modèles montés
en articulateur et à l'analyse des clichés céphalométriques.
« En dépit de nos connaissances sur les mécanismes de
• Le plan d'occlusion et les relations intercrêtes régulation de la dimension verticale, sa détermination reste
Ils ne sont utilisés qu'en deuxième intention, les modèles de un processus clinique basé sur l'expérience personnelle du
travail étant montés en articulateur, en relation centrée, à la praticien24. » (Sandro Palla)
dimension verticale d'occlusion. Sur le plan biomécanique, La dimension verticale de l'étage inférieur de la face cor-
idéalement, le plan occlusal se situe à mi-distance entre les respond à la distance qui sépare un point placé au niveau
de l'étage moyen du massif facial, d'un point placé à l'étage valeur de cette dépression n'est pas constante, elle
inférieur au niveau du corps mandibulaire. atteint son maximum juste après une déglutition27.
- La viscoélasticité - Les fibres musculaires contiennent à
Définitions la fois des tissus élastiques, ceux des unités contractiles
des fibres musculaires, et des tissus conjonctifs (ten-
Les dimensions verticales sont multiples mais parmi celles- dons, fascia, tissus périmusculaires) en organisation plus
ci deux sont tout à fait remarquables : ou moins parallèle. Le muscle développe ainsi une
- La dimension verticale d'occlusion - Elle correspond à légère résistance à la fois à son raccourcissement et à
la hauteur de l'étage inférieur lorsque les dents antago- son élongation 28,29 .
nistes sont en contact. Ceci implique que les dents natu-
- La gravité - Les forces de gravité attirent la mandibule
relles ou prothétiques soient présentes, susceptibles
vers le sol. Leur influence, toujours présente, est liée à la
d'entrer en contact et capables de stabiliser l'occlusion,
position du sujet. Elle est combattue par l'ensemble des
situation qui ne peut exister chez un patient édenté total
mécanismes de contrôle actif. En effet, lorsque le patient
non appareillé.
est allongé, l'activité des masséters et des temporaux est
- La dimension verticale de repos - ou position d'équilibre faible alors qu'elle augmente fortement lorsque le
postural, elle correspond à la position occupée par la patient est assis, les hanches et les genoux pliés à
mandibule lorsque la tête du patient est en position 90 degrés. L'incidence de la position du patient sur l'ac-
droite, que le tonus des muscles élévateurs et abaisseurs tivité des muscles élévateurs est cliniquement capitale,
est en équilibre, tandis que les condyles se situent dans en conséquence, il convient d'évaluer la dimension ver-
une position neutre sans aucune contrainte vis-à-vis des ticale dans une situation où l'équilibre postural du patient
différentes structures articulaires. est respecté.
- L'espace libre d'inocclusion - Il découle de ces deux élé-
ments. Il correspond à la distance qui sépare la dimen- • Les facteurs actifs
sion verticale d'occlusion de la dimension verticale de La position de la mandibule est contrôlée par l'activité
repos. Cet espace est une nécessité physiologique. tonique posturale des muscles élévateurs et abaisseurs de
la mandibule. Cette position de repos n'est qu'apparente,
Physiologie des dimensions verticales résultant d'un équilibre instable entre les influx excitateurs et
inhibiteurs des récepteurs proprioceptifs musculo-tendi-
La dimension verticale d'occlusion neux. De plus, elle est soumise à l'influence des afférences
des extérocepteurs de la surface d'appui, de la langue, des
Elle s'installe lors de la mise en place des premières molaires
propriocepteurs articulaires, des mécanismes centraux, des
temporaires vers l'âge de 16 mois. Puis, lors de la croissance,
influences périphériques comme la vision 30,31 (fig. 11-8).
la puissance des contractions musculaires équilibre l'érup-
Par exemple, au repos, la fermeture des yeux réduit le niveau
tion physiologique des dents naturelles. Cependant, des fac-
d'activité électromyographique des élévateurs, en particulier
teurs tels que le développement musculaire, la migration
le chef antérieur du temporal et du masséter.
des insertions, les variations de la fonction neuromusculaire
et les troubles fonctionnels (respirateurs buccaux) ou mor-
phologiques (brièveté du frein de la langue) perturbent cet
équilibre. Enfin, lorsque le calage occlusal disparaît comme
chez certains édentés partiels et chez les édentés totaux, la
dimension verticale d'occlusion disparaît aussi 25,26 .

La dimension verticale de repos


Depuis Thompson (1922), cette position est considérée
comme étant la position de « référence », qui est stable tout
au long de l'existence. Cette assertion est cependant par-
tiellement fausse. La dimension verticale de repos ou posi-
tion d'équilibre postural découle de l'action conjuguée de
deux groupes de facteurs de contrôle, l'un passif, l'autre
actif.

• Les facteurs passifs


- L'espace de Donders - Il correspond à l'espace qui se
crée entre la face dorsale de la langue et la voûte pala-
tine lorsque la mandibule s'abaisse. Cet abaissement
passif de la mandibule provoque une légère dépression
de 9,7 mm de mercure environ, ce qui équivaut à une Fig. 11-8 Incidence de la vision sur l'activité électromyographique
force de 300 g qui s'exerce vers le haut. Cependant, la du masséter et du temporal antérieur.
Cliniquement, l'influence des facteurs passifs et actifs sur volume dévolu à la langue, l'inconfort des maquettes sont
la dimension verticale de repos est capitale. Une mauvaise autant d'éléments qui perturbent l'équilibre postural de la
posture, la présence d'un stress, l'encombrement, l'épais- mandibule, donc la position de repos. Ces éléments sont
seur trop importante des bases d'occlusion, la réduction du sous la responsabilité du praticien 32,33 (fig. 11-9, 11-10).

Fig. 11-9 Incidence de la position du patient sur le niveau de la


dimension verticale de repos (axe des abscisses) : l'activité mus-
culaire minimale des muscles dépend de l'orientation de la tête
du patient. En position droite l'activité est minimale, la bascule de
la tête en avant ou en arrière augmente cette activité.

Fig. 11-10 Conséquences réflexes


des pressions appliquées sur la face dorsale de la langue.

L'espace libre rechercher la position de repos puis d'évaluer l'espace libre,


pour aboutir à la dimension verticale d'occlusion. À ces deux
Il correspond à l'espace qui sépare la dimension verticale
techniques s'ajoute le rôle de la phonétique (fig. 11-11).
d'occlusion de la dimension verticale de repos. Longtemps
considéré comme constant et invariable dans le temps, il
La détermination de la dimension verticale
n'en est pas moins sujet à des variations d'origine physiolo-
d'occlusion
giques, telles que le type squelettique, ou bien d'origine
pathologique. L'approche directe de la détermination de la dimension ver-
ticale d'occlusion est peu employée, à tort, car elle supprime
nombre d'imprécisions. Elle fait appel aux techniques sui-
Les techniques de détermination
vantes.
des dimensions verticales
Chez l'édenté total, l'objectif thérapeutique est de détermi- • Les bourrelets d'occlusion
ner la dimension verticale d'occlusion. Pour cela il existe La dimension verticale d'occlusion est déterminée par l'in-
deux approches: l'une directe, qui consiste à rechercher la termédiaire des bourrelets d'occlusion dont les plans occlu-
dimension verticale d'occlusion, l'autre indirecte, qui est de saux sont réglés selon les critères préalablement définis. En
Postdéglutition
Décontraction
Gorgée d'eau
« Emma »

Type
morphologique
Phonétique

Fig. 11-11 Approche schématique de la détermination de la dimension verticale d'occlusion.

effet, lorsque les maquettes d'occlusion sont insérées dans


la cavité buccale, le contact entre les faces occlusales des
bourrelets maxillaire et mandibulaire doit s'établir de façon
harmonieuse, fixant la dimension verticale d'occlusion.
Toute dysharmonie entre les deux plans occlusaux traduit
une erreur de l'orientation, du niveau d'un ou des deux
bourrelets, donc de la dimension verticale d'occlusion34
(fig. 11-12, 11-13),

• La déglutition
Lors de cette praxie, chez le patient denté, les dents anta-
gonistes entrent légèrement en contact. Différentes tech-
niques ont été proposées pour appliquer cette donnée phy-
siologique à la recherche de la dimension verticale
Fig. 11-12 Relations occlusales avec deux maquettes préalable-
d'occlusion chez le patient édenté total.
ment réglées.
La technique d'Ismaël
Elle consiste à placer des cônes de cire sur la maquette
mandibulaire, cônes de cire dont la hauteur est réglée par
la déglutition. Quatre cônes en cire molle sont collés sur la
maquette d'occlusion. Au début, la hauteur de ces cônes est
excessive; puis lors de la déglutition, les contacts qui s'éta-
blissent entre le sommet des cônes et le bourrelet antago-
niste réduisent leur hauteur initiale, jusqu'à la hauteur défi-
nie par la déglutition. Cependant, on peut regretter que, dans
cette technique, la langue ne retrouve aucun de ses appuis
physiologiques, ce qui peut entraîner certaines imprécisions
et expliquerait ainsi l'inconstance des dimensions verticales
obtenues.

La lame en résine
Fig. 11-13 Dimension verticale d'occlusion et hauteur des bases La lame et le bourrelet maxillaire sont réglés selon les cri-
d'occlusion. tères précédemment définis. La hauteur du bourrelet maxil-
laire est réduite de 2 mm environ, puis une épaisseur de
3 mm de cire Aluwax est collée sur le bourrelet et laissée à
refroidir à température de la pièce. La lame mandibulaire est
amincie, polie, vaselinée. Les deux maquettes sont repla-
cées dans la cavité buccale. Aucune information ou sollici-
tation ne sont adressées au patient. Une simple conversa-
tion le conduit à déglutir. Progressivement, la lame déprime
la cire Aluwax jusqu'à obtenir une dimension verticale d'oc-
clusion acceptable.

Le test de Shanahan
Il est tout particulièrement indiqué lorsque les maquettes
d'occlusion présentent deux bourrelets d'occlusion dont le
niveau et l'orientation sont réglés. Pour confirmer, la dimen-
sion verticale d'occlusion établie par le contact entre les
bourrelets, deux petites boules de cire molle (Periphery-
Wax®), sont placées sur le bourrelet au niveau de la pre-
mière molaire. Le patient est invité à déglutir trois fois 35-37 .
La maquette mandibulaire est retirée, la cire examinée et Fig. 11-14 Lignes repères permettant de déterminer la hauteur de
trois éventualités sont possibles : l'étage inférieur de la face (1) par rapport à la distance canthus
- La cire est écrasée, éliminée : la dimension verticale d'oc- interne - commissure (a) ; à la distance intercanthus interne (b) ;
clusion est excessive. à la distance canthus externe - canthus interne (c) ; à la distance
- La cire est aplatie, laissant un simple film à la surface du bipupillaire (d).
bourrelet : la dimension verticale d'occlusion est correcte.
- La cire n'est pas aplatie: la dimension verticale d'occlu-
sion est insuffisante.
• La dimension verticale préférée
Elle consiste à rechercher avec le patient sa dimension ver-
ticale d'occlusion « préférée », celle pour laquelle il ressent
un confort. Cette approche ne donne pas une position stable
et reproductible, mais une position dont la zone d'impréci-
sion varie entre 1 et 2 mm, position qui diffère avec le temps,
la méthode utilisée, l'âge, la fatigue et la position du
patient38.
• L'esthétique
L'évaluation esthétique de la dimension verticale d'occlusion
fait appel au « sens clinique du praticien », notion pour le moins
floue. De manière plus précise, elle se base sur les propor- Fig. 11-15 Dimension verticale et nombre d'or (point sous-nasal
tions qui s'établissent entre certains repères et les dimensions - bord libre - bord libre - point sous-mental).
des étages supérieur, moyen et inférieur (fig. 11-14).
Théoriquement, selon Léonard de Vinci, la hauteur de ces
étages est identique. Cette appréciation, le plus souvent
Tableau 11-1 Différents repères utilisables pour évaluer la dimen-
visuelle, peut être confirmée par une évaluation numérique sion verticale d'occlusion.
de leurs dimensions grâce à des dispositifs tels que la règle
de Willis, le compas de Sorensen, le compas d'or (fig. 11-15).
À cela s'ajoutent des égalités qui s'installent entre la dimen-
sion de l'étage inférieur du visage et certaines dimensions du
visage, voire des mains39-40 (tableau 11-1).
La distance coin externe de l'œil - méat acoustique est
facilement évaluée à l'aide d'une règle adaptée « Crânio-
mètre®». (fig. 11-16a, b)
Cependant, de nombreuses études démontrent le peu
de fiabilité de ces systèmes de mesure qui, semble-t-il, ne
tiennent pas compte des variations individuelles. Ils devront
donc être utilisés avec réserve, mais surtout en les pondé-
rant l'un par rapport à l'autre.
Fig. ll-16a La règle Craniometer® évalue la distance canthus Fig. 1 l-16b Cette distance canthus externe-méat acoustique qui
externe-méat acoustique. est égale à la distance menton point sous-nasal.

• Le parallélisme des crêtes très importante, 7 à 12 mm, en présence d'une classe II div.
Lorsque les modèles ont été mis en articulateur, théorique- 1 et div. 2. Cependant, cet espace libre est soumis à de nom-
ment un certain parallélisme entre les crêtes doit s'installer. breuses variations entre les individus, et même, sur le même
Cette relation géométrique s'installe naturellement. individu, au cours de la journée en fonction de la posture de
Cependant, les perturbations de la morphologie des crêtes la tête, du tronc, de la parole, du sommeil, de l'âge, du stress
provoquées par des extractions réalisées à des dates diffé- et d'éventuelles manifestations algiques.
rentes, de manière plus ou moins traumatisante, peuvent À cette méthode d'évaluation s'ajoute l'évaluation de
rendre l'application de cette méthode délicate. l'espace phonétique minimal tel qu'il a été décrit par
Silverman. Lors de l'élocution, le bord libre des incisives
Détermination de la dimension verticale mandibulaires se déplace dans une enveloppe qui corres-
de repos pond au champ phonétique. Lors de la prononciation des
sibilantes « s », le bord libre mandibulaire se situe environ à
La recherche et la détermination de la dimension verticale 1 mm du bord libre des dents maxillaires, distance qui cor-
de repos doivent tenir compte des contrôles actifs et passifs respond à l'espace phonétique minimal 43 . Celui-ci demeure
précédemment exposés. En conséquence, dans un premier le plus précis et le plus constant. Cette évaluation doit être
temps, de manière à rétablir l'équilibre tonique postural, le complétée par l'analyse du déplacement incisif selon la tech-
patient est confortablement installé, dans une position qui nique de Pound. Cependant, cette technique n'est réelle-
lui est habituelle, sans stress. ment utilisable que lors du montage des dents antérieures,
Dans un deuxième temps, la dimension verticale de le volume, l'épaisseur des bourrelets, des bases d'occlusion
repos est recherchée en invitant le patient : étant souvent très différents du volume, du confort d'une
- à se mouiller les lèvres avec la pointe de la langue ; maquette en cire.
- à déglutir, à laisser tomber les épaules ;
- à prononcer les phonèmes « Emma » ;
- à placer une gorgée d'eau sous la langue. Les altérations des dimensions verticales
Lorsque la mandibule est en position basse, le praticien
La précision des différents paramètres de la dimension ver-
mesure la distance qui sépare les points repères préala-
ticale d'occlusion et de repos se heurte à trois problèmes
blement déterminés sur le menton et le philtrum. Cette
essentiels : la fiabilité des positions obtenues, leur évolution
mesure doit être répétée plusieurs fois pour s'assurer des
et leurs modifications.
valeurs obtenues. Cependant, cette-technique n'est pas très
La fiabilité : toutes ces techniques de détermination de
fiable, car les déplacements du corps mandibulaire ne sont
la dimension verticale d'occlusion et de repos donnent des
pas mis en corrélation avec les déplacements des tissus
résultats relativement divergents. Les erreurs sont dues aux
mous 4 1 , 4 2 .
imprécisions des techniques, aux altérations tissulaires. De
plus, le port de la prothèse, par son poids, son épaisseur,
Détermination de l'espace libre
entraîne le plus souvent des modifications rapides de la
La hauteur des bourrelets ou de la lame est réduite pour créer dimension verticale de repos, donc de l'espace libre, à la fois
l'espace libre d'inocclusion. Son importance est évaluée au par réduction ou par augmentation, plus rarement l'espace
niveau des premières prémolaires. Théoriquement, l'espace libre demeure constant44*45. Globalement, la dimension ver-
séparant ces dents est de 3 mm en présence de relation den- ticale d'occlusion se situe dans une zone dite confortable de
taire de classe I. Par contre, cette distance se réduit à 1 ou 1 à 2 mm qui évolue avec l'âge, la fatigue la position du
2 mm en présence d'une classe III et augmente de manière patient46"48.
L'évolution : dans le temps, la dimension verticale d'oc- Les arguments biomécaniques
clusion diminue, suite à la résorption, à l'usure des maté-
L'articulation temporo-mandibulaire est le seul guide des
riaux des dents prothétiques. Théoriquement, cette diminu-
déplacements mandibulaires. L'application de la loi des
tion de la dimension verticale d'occlusion devrait
leviers développée par Gysi puis appliquée par Atwood jus-
s'accompagner d'une augmentation de l'espace libre. Mais
tifie l'utilisation de la relation centrée54,55. La force résultant
ce n'est pas toujours le cas, en effet, il peut demeurer
de l'action des muscles élévateurs favorise la remontée
constant, avec des conséquences sur l'approche thérapeu-
49 51 haute et postérieure des processus condyliens dans leurs
tique " .
fosses respectives.
Les modifications: une question essentielle se pose:
quelle attitude thérapeutique adopter en cas de perte de la
Les arguments physiologiques
dimension verticale d'occlusion? Selon Thompson, il n'est
pas possible de modifier la dimension verticale existante, Ces arguments en faveur de la relation centrée concernent
cette affirmation est en partie contredite par les études de les réactions réflexes.
52
Hellsing . La réponse doit être plus nuancée, dépendant - Le réflexe d'origine occlusale - L'éruption des dents
essentiellement de la valeur de l'espace libre : si l'espace préside à la création d'engrammes d'origine parodon-
libre est important, la dimension verticale d'occlusion peut tale. En effet, la relation centrée est la position de la
être modifiée de manière rapide et radicale. A contrario, si mandibule déterminée par le premier réflexe acquis ini-
l'espace libre est resté constant, l'augmentation de la dimen- tié par les dents temporaires lorsqu'elles entrent en
1
sion verticale doit être réalisée avec précaution . occlusion.
En conclusion : - Le réflexe d'origine fonctionnelle - La déglutition est
« Dans la mesure où on ne sait pas quelle est la dimen- une fonction réflexe endogène ou acquise. En effet,
sion verticale d'occlusion correcte, il est impossible de déter- chez le fœtus et l'enfant sans dent, la déglutition est du
miner quelle est la meilleure technique. L'essentiel est de défi- type viscéral et dépend des muscles innervés par la sep-
nir quels sont les objectifs qui doivent être atteints quand nous tième paire crânienne. L'éruption des unités dentaires
déterminons la dimension verticale d'occlusion. Ceux-ci sont et les contacts qui s'y associent dépendent de réflexes
l'espace libre dans une position d'équilibre tonique postural, acquis sous la dépendance trigéminale. Chez le patient
l'absence de contact entre les dents lors de la phonation et édenté total, le contrôle demeure trigéminal, sauf excep-
1
le plus important, un profil esthétique . » Sandro Palla tion.

Les caractéristiques de la relation centrée


L'équilibre qui s'établit chez un patient denté entre les diffé-
rentes afférences articulaires, musculaires, parodontales, se
La relation centrée correspond à la position la plus haute, la
trouve détruit, chez le patient édenté total, par la perte des
plus médiane des processus condyliens au sein de leurs
récepteurs parodontaux et leur remplacement par les exté-
cavités glénoïdes. Cette définition classique s'applique à une
rocepteurs des surfaces d'appui.
articulation temporo-mandibulaire dont les structures ana-
L'équilibre physiologique qui s'installe alors, entre l'action
tomiques sont intactes, ce qui est rarement le cas chez les
et le contrôle de ces trois groupes d'afférences, assure la sta-
patients édentés âgés (chapitre 2).
bilisation de la mandibule vis-à-vis du massif facial.
Chez ces patients, la relation centrée doit plus souvent
Cependant, cette stabilisation diffère selon les patients.
être comprise comme la position d'équilibre physiologique
Elle est à prédominance articulaire ou à prédominance mus-
occupée par les processus condyliens au sein de leurs fosses
culaire56,57.
glénoïdes respectives. Cet équilibre résulte du contrôle des
- Stabilisation d'origine articulaire - Dans ce cas l'action et
propriocepteurs articulaires et musculaires qui, par voies
l'influence des différents propriocepteurs articulaires pré-
réflexes, stabilisent la mandibule.
domine. Cette situation arrive chez les patients présen-
tant une musculature peu puissante.
Pourquoi utiliser la relation centrée? - Stabilisation d'origine musculaire - La position de la man-
Les arguments qui conduisent à utiliser la relation centrée dibule et plus particulièrement des condyles découle de
sont au nombre de trois : la résultante géométrique des différentes composantes
musculaires entre les élévateurs et abaisseurs. Cette situa-
Les arguments géométriques tion s'installe plus particulièrement chez les patients
«jeunes» présentant une musculature puissante.
Ils découlent du concept gnathologique qui considère la rela-
tion centrée comme la relation spatiale maxillo-mandibulaire
la plus importante. La relation centrée est en effet une rela- Les méthodes d'enregistrement
tion spécifique des centres de rotation de la mandibule vis- Les méthodes d'enregistrement de la relation centrée sont
à-vis du maxillaire. Pour Lucia, la relation centrée est une réa- nombreuses, elles font appel de manière plus ou moins
lité géométrique qui possède un arrière-plan biologique53. directe aux arguments justifiant l'utilisation de cette relation.
Les préalables
Cependant, quelle que soit la technique choisie, la détermi-
nation de la relation centrée impose de respecter les préa-
lables suivants :
- Le patient est confortablement installé, dans une posi-
tion adaptée à sa posture habituelle, calme, décontracté.
Il est préférable que le patient, lors des différentes mani-
pulations, ferme les yeux. En effet, leur fermeture s'ac-
compagne d'une diminution de l'activité des muscles
élévateurs, facilitant par là même l'enregistrement des
relations condyliennes58.
- Les maquettes d'occlusion doivent être stables, rigides,
rétentives et ne pas gêner la langue, les joues et les
lèvres. Pour cela elles sont réalisées en résine autopoly-
mérisable, puis stabilisées sur le modèle de travail à l'aide Fig. 11-17 Aspects de la maquette mandibulaire : lame en résine
de pâte à l'oxyde de zinc. rendue mince coupant, 4 encoches taillées sur le fil de la lame,
Pour pallier les imprécisions liées à une base d'occlusion, appuis latéraux en pâte de Kerr.
il est possible de réaliser une base d'occlusion en résine ther-
mopolymérisable. Dans un deuxième temps, les dents pro- La mandibule est guidée en relation centrée par de petits
thétiques seront montées sur cette base. Cette technique mouvements d'ouverture et de fermeture sans que la lame
présente de nombreux avantages liés à la précision, la rigi- entre en contact avec la maquette antagoniste61.
dité et l'adaptation de la base d'occlusion sur les surfaces Le guidage vers la relation centrée doit se réaliser lors du
d'appui muqueuses59. mouvement d'ouverture alors que la fermeture s'effectue de
- La dimension verticale d'occlusion est déterminée. Ce manière passive. Cette manœuvre évite ou prévient toute
préalable permet de conserver l'équilibre physiologique contraction réflexe des chefs inférieurs des ptérygoïdiens laté-
des relations condyliennes. raux.
De plus, certaines méthodes favorisent le recul de la
Les techniques mandibule. Celles-ci sont la tête en hyperextension, la posi-
tion de la langue dont la pointe cherche à toucher le voile
• La lame de Brill du palais et le réflexe d'occlusion molaire.
Lorsque le praticien juge que le mouvement s'effectue de
Le principe
manière harmonieuse, la lame est amenée au contact de la
Le principe est d'enregistrer la relation centrée en réduisant
cire Aluwax dans laquelle elle pénètre sans aucune résistance.
au maximum la participation des muscles élévateurs. Pour
Les deux maquettes d'occlusion sont retirées de la cavité buc-
cela, l'influence des extérocepteurs de la surface d'appui est
cale, puis l'indentation est examinée. Des corrections sont
limitée par l'établissement de contacts occlusaux inter-
éventuellement réalisées par adjonction, soustraction de cire
arcades entre, d'une part une structure très dure : la lame en
au niveau du bourrelet. Puis, les maquettes sont replacées
résine, et d'autre part une structure très molle: la cire
dans la cavité buccale, les manœuvres précédemment
Aluwax® collée sur le bourrelet de la maquette maxillaire. En
décrites recommencées jusqu'à ce que la lame pénètre de
effet, le couple structure dure contre structure très molle a
manière harmonieuse et symétrique dans la cire (fig. 11-18).
été défini comme la meilleure association pour enregistrer
les relations intermaxillaires60.

La réalisation clinique
Après mise en articulateur du modèle maxillaire, la hauteur du
bourrelet supérieur est réduite d'environ 2 mm, puis une triple
épaisseur de cire Aluwax® non entoilée est collée à sa sur-
face.
La lame de la maquette mandibulaire est amincie, polie
de manière à la rendre coupante, latéralement, du côté ves-
tibulaire deux petites butées de pâte thermoplastique sont
collées au niveau des futures deuxième prémolaire - pre-
mière molaire (fig. 11-17). Enfin, la lame est enduite d'une
fine pellicule de vaseline.
Les deux maquettes sont insérées dans la cavité buccale,
la maquette mandibulaire est maintenue, avec les index, sur
la surface d'appui grâce aux butées latérales. Fig. 11-18 Aspect de l'enregistrement.
Le praticien procède, alors, à quatre validations succes- Le principe
sives : La position condylienne d'équilibre physiologique résulte de
La validation des indentations dans la cire l'équilibre dynamique qui s'installe entre les muscles éléva-
teurs à la dimension verticale d'occlusion. Le point d'appui
Celles-ci doivent être peu profondes: 0,5 mm à 1 mm,
central trouve sa justification dans l'application de la loi des
réparties sur l'ensemble du bourrelet, sans aucune trace ou
leviers (fig. 11-19).
apparition du matériau sous-jacent à la cire Aluwax. Si l'une
de ces trois exigences n'est pas respectée, la cire Aluwax est
modifiée, réchauffée dans sa globalité puis l'enregistrement
refait,
La validation de l'enregistrement
La cire est ensuite durcie par immersion dans un bol d'eau
glacée (glaçons), puis réinsérée dans la cavité buccale. Le
contrôle s'effectue en quatre temps :
- 1 e r temps - Le praticien guide délicatement la mandi-
bule en relation centrée tout en observant si le contact
entre la lame et l'indentation marquée dans la cire ne
provoque pas un très léger mouvement de la maquette Fig. 11-19 Point d'appui central et résultante musculaire entre les
maxillaire. muscles élévateurs propulseurs et sus ou sous-hyoïdiens. (D'après
- 2e temps - Le patient est invité à serrer sur les maquettes Atwood)
d'occlusion, et le praticien, la pulpe de l'index placée sur
la face vestibulaire du bourrelet supérieur, ne doit res-
sentir aucun mouvement ou déplacement de la La description
maquette maxillaire. Le point d'appui central est un dispositif qui se compose
- 3e temps - Le test de l'égalité des pressions : le prati- d'un stylet placé au centre de gravité d'une des deux
cien demande au patient s'il ressent une différence de maquettes d'occlusion. Ce stylet entre en contact avec une
pression entre le côté droit, le côté gauche, l'avant et l'ar- plaque située sur la maquette antagoniste. Le contact entre
rière. En cas de différence le patient indique avec son la plaque et le stylet maintient la dimension verticale d'oc-
doigt la zone où la pression semble la plus forte. clusion, supprime toute stimulation directionnelle donc sup-
- 4e temps - La déglutition : le patient est invité à déglu- prime les réflexes d'évitement qu'elle génère.
tir. Lors de cette praxie le film salivaire est aminci amé- Le stylet peut se situer au niveau de l'arcade maxillaire
liorant la rétention. Suite à cette praxie la mandibule se ou de l'arcade mandibulaire. Il est cependant préférable de
place en position de repos, le praticien tente de soule- le placer à l'arcade mandibulaire, car lors des différents mou-
ver la maquette mandibulaire, la rétention doit, à ce vements celui-ci reste toujours situé au centre de gravité de
moment-là, être maximale. la maquette d'occlusion mandibulaire, évitant tout risque de
Si l'ensemble de ces tests est positif le praticien est en bascule ou d'instabilité de cette dernière.
droit d'espérer que la relation intermaxillaire enregistrée est
La réalisation clinique
bien la relation centrée. Par contre, si l'un de ces tests est
négatif, la relation intermaxillaire ainsi déterminée n'est pas Dans un premier temps les modèles sont mis en articula-
la relation centrée. teur avec le maximum de précision, dimension verticale
d'occlusion réglée et relation centrée enregistrée selon la
La validation de la mise en articulateur technique de la lame de Brill. Au niveau de l'arcade mandi-
Lorsque l'enregistrement est validé, les modèles sont mis en bulaire, le dispositif porteur du stylet est positionné en
articulateur selon les méthodes décrites par ailleurs. La qua- veillant à ce que le stylet se situe au niveau du centre de
lité et la valeur de la mise en articulateur sont vérifiées par gravité de la maquette d'occlusion mandibulaire; c'est-à-
la technique de la double base engrenée11. dire, dans le plan sagittal médian, au niveau de la position
La validation de la position estimée des premières molaires. La plaque antagoniste est
Les marques sur la cire Aluwax sont supprimées par un placée en veillant à ne pas augmenter la dimension verti-
simple réchauffement. La relation intermaxillaire est à nou- cale d'occlusion (fig. 1 l-20a, b, c, d).
veau enregistrée, puis les maquettes sont replacées sur leurs Les maquettes sont insérées dans la cavité buccale, puis
modèles respectifs. La comparaison entre les deux enregis- le patient est invité à effectuer des mouvements de latéra-
trements est réalisée à l'aide de la double base engrenée lité et de propulsion tout en en maintenant le contact entre
dont la manipulation est semblable à la précédente. le stylet et la plaque d'enregistrement. Cette phase prépa-
ratoire est plus ou moins longue. Si le patient éprouve des
• Le point d'appui central difficultés à effectuer ces mouvements, il convient de lui
Cette technique fut proposée en son temps par Cobble, puis confier ce dispositif afin qu'il s'exerce, chez lui, à effectuer
reprise par de nombreux auteurs. les différents mouvements requis.
Fig. 1 l-20a Composant du point d'appui central : a) plaque por- Fig. 11-20b Point d'appui central dans la cavité buccale.
teuse du stylet ; b) plaque d'enregistrement ; c) crayon encreur ;
d) dispositif de blocage.

Fig. 1I-20C Aspects de l'enregistrement : a) latéralité droite ; Fig. 11-20d Blocage avec du plâtre des maquettes d'enregistre-
b) latéralité gauche ; c) propulsion ; d) relation centrée. ment.

Lors de l'enregistrement, la plaque maxillaire est opaci- Tableau 11-2 Interprétation diagnostique des tracés de l'enregis-
fiée. Le dispositif est inséré dans la cavité buccale, puis le trement réalisé avec un point d'appui central..
patient est invité à réaliser des mouvements de propulsion
et de rétropulsion. Lorsque la mandibule se situe en posi-
tion postérieure, les mouvements de latéralités sont effec-
tués, traçant un arc gothique dont le sommet correspond à
la relation centrée. Après retrait de la maquette, un disposi-
tif de blocage est fixé au niveau de l'apex de l'arc gothique
pour s'assurer que le stylet se situe au sommet de l'arc.
L'ensemble est replacé dans la cavité buccale et la mandi-
bule guidée pour que l'extrémité du stylet pénètre dans le
trou du dispositif de fixation puis les deux maquettes sont
solidarisées de préférence à l'aide de plâtre à empreinte.
Analyse critique : dans l'idéal le sommet de l'arc gothique
est net, aigu, formant un angle de 160 degrés. Cependant,
cet aspect peut varier, traduisant des altérations musculaires,
articulaires ou une mauvaise manipulation62 (tableau 11-2).
Contre-indications : la technique du point d'appui cen-
tral est contre-indiquée en présence de relation squelettique
du type classe II div. 1, de crêtes flottantes, divergentes, d'es-
pace intercrêtes insuffisant, de langue volumineuse et d'in-
coordination condylo-discale. Dans ces conditions il est pré-
férable d'utiliser la lame de Brill.
• La déglutition sement harmonieux entre les versants mésiaux cuspidiens
L'enregistrement de la relation intermaxillaire peutfaire appel mandibulaires et les versants distaux maxillaires découle de
à une fonction physiologique, celle de la déglutition. Pour 5 paramètres régis par le Quint de Hanau. Parmi ceux-ci, on
cela l'utilisation de la lame de Brill est tout à fait adaptée. trouve la pente condylienne. Chez le patient édenté total, la
Le bourrelet maxillaire est diminué de 2 mm, puis 3 mm valeur moyenne s'établit à 40 degrés environ après 5 mm
de cire Aluwax sont collés sur celui-ci. Les maquettes sont de déplacement antérieur. Par contre, lors du mouvement
insérées dans la cavité buccale, la cire qui recouvre le bour- de propulsion, dans le premier millimètre de déplacement
relet est à température ambiante. Le patient est laissé sans antérieur, la pente est plus faible 35 degrés.
aucune indication sur la finalité de cette manipulation. La
simple conversation avec le patient lui permet de déglutir, la
lame entrant progressivement dans la cire Aluwax.
Cependant cette technique doit être mise en œuvre avec
beaucoup de précautions car elle implique la participation
musculaire réflexe. Celle-ci peut avoir été perturbée par le
port des anciennes prothèses. 1. Kapur RR. Occlusal patterns and tooth arrangements. A review.
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Les mouvements mandibulaires se réalisent le plus souvent 4. Okane H, Yamashina T, Nagasawa T, Tsuru H. The effect of ante-
roposterior inclination of the occlusal plane on biting force.
sans aucun contact dentaire, mais certaines praxies condui-
J Prosthet Dent, 1979 ; 42 : 497-501.
sent les dents maxillaires et mandibulaires à se rencontrer.
5. Nassif NJ. The relationship between the mandibular incisor
Ces contacts, lorsqu'ils s'établissent, doivent non seulement teeth and the lower lip. J Prosthet Dent, 1970 ; 24: 483-491.
ne pas déstabiliser les prothèses mais au contraire contri- 6. Vig RG, Brundo GC. The kinetics of anterior tooth display.
buer à les stabiliser, notamment la prothèse mandibulaire. J Prosthet Dent, 1978 ; 39 : 502-504.
Il incombe au praticien de créer ou d'établir une har- 7. Tjan AH, Miller GD, The JG. Some esthetic factors in a smile.
monie parfaite entre les mouvements mandibulaires et la J Prosthet Dent, 1984; 51 : 24-28.
morphologie des faces occlusales des dents prothétiques, 8. Matthews TG. The anatomy of smile. J Prosthet Dent, 1978;
en particulier la direction des sillons principaux et l'inclinai- 39: 128-134.
son des versants cuspidiens. 9. Foley PF. A study of the position of parotid papilla to the occlu-
sal plane. J Prosthet Dent, 1985; 53: 124-126.
Durant les déplacements mandibulaires les pointes cus-
10. Lundquist DO, Luther WW. Occlusal plane determination.
pidiennes doivent glisser sans heurt dans les sillons inter-
J Prosthet Dent, 1970; 23 : 489-498.
cuspidiens antagonistes ou sillons principaux. Pour cela, la 11. Nairn RI. Interrelated factors in complete denture construction.
direction de ceux-ci doit être en harmonie avec les dépla- J Prosthet Dent, 1965; 15 : 18-24.
cements condyliens. 12. Cébelic A, Valentic-Perzovic M, Kraleljevic K, Brikc H. A study of
Lors du mouvement de propulsion les pointes cuspi- the occlusal plane orientation by intra-oral method (retromolar
diennes mandibulaires se dirigent vers l'avant alors que les pad). J Oral Rehabil, 1995 ; 22: 233-236.
cuspides maxillaires se dirigent vers l'arrière. 13. Sears V. Selection and management of posterior teeth.
Lors d'un mouvement de latéralité les déplacements J Prosthet Dent, 1957 ; 7: 723-727.
14. Oison A, Posselt U. Relationship of various skull reference lines.
sont plus complexes et leurs incidences sur la direction des
J Prosthet Dent, 1961 ; 11 : 1045-1049.
sillons plus délicate à analyser. Du côté travaillant, les dépla-
15. Karkaris H. Relationship between ala-tragus line and natural
cements se font perpendiculairement aux faces vestibulaires occlusal plane implications in denture prosthodontics. Quintess
et linguales des dents mandibulaires. Du côté non travaillant, Int, 1986; 17:253-256.
les déplacements sont obliques, les cuspides palatines se 16. L'Estrange PR, Vig PS. A comparative study of the occlusal plane
déplaçant dans une direction disto-vestibulaire alors que les in dentulous and edentulous subjects. J Prosthet Dent, 1975;
cuspides d'appui mandibulaires se déplacent dans une 33: 495-503.
direction mésio-linguale. 17. Ausburger R. Occlusal relation to facial type. J Prosthet Dent,
Ce déplacement est modifié par le mouvement de 1953;3:755-759.
18. Hartono R. The occlusal plane in relation to facial types.
Bennett. Celui-ci initie un déplacement plus transversal de
J Prosthet Dent, 1967; 17: 549-558.
la mandibule. Chez les patients âgés, a fortiori édentés
19. Sinobad D. The position of the occlusal plane in dentulous sub-
totaux, le mouvement de Bennett est plus important que jects with various skeletal jaw relationship. J Oral Rehabil, 1988 ;
chez les patients jeunes. En effet, dans le premier millimètre 15:489-498.
de déplacement en latéralité l'angulation du déplacement 20. Palla S. The vertical jaw relation and complete dentures. The
antéro-interne est d'environ 38 degrés, puis de 28 degrés PRO-COR method : a procedure for the provisional mounting
après 2 mm de déplacement. Lors de la propulsion, le glis- of casts in the articulator for simplified modelling of the wax
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On appelle articulateur, ou simulateur, un dispositif méca- centres instantanés de rotation, seule la théorie de la
nique permettant : sphère est encore d'actualité5.4. Les articulateurs basés
- de conserver les paramètres des relations inter-maxil- sur le concept des centres instantanés de rotation ne
laires : dimension verticale d'occlusion, plan d'occlusion, seront pas abordés, car, à notre connaissance, aucun arti-
relation centrée. culateur actuel répondant à ce concept n'est disponible
- de reproduire ou simuler plus ou moins partiellement les auprès des fournisseurs européens5.
déplacements condyliens à une dimension verticale
donnée.
Depuis Pfaff (1756) et Garriot (1803), les articulateurs
ont fortement évolué. Ils se sont en effet multipliés, com-
Les différents types d'articulateurs doivent répondre à des
pliqués, simplifiés, au gré des conceptions et des auteurs.
exigences communes et spécifiques.
Cette multiplicité rend le choix difficile1.

Les exigences communes


Quel que soit le concept auquel il appartient, un articulateur
doit répondre aux exigences suivantes :

Le choix d'un articulateur dépend de critères conceptuels, Être rigide


techniques et cliniques.
Seule la rigidité est garante de la précision des contacts
occlusaux recherchés. En effet, les contraintes subies sont
nombreuses telles que le poids des modèles, les mouve-
Actuellement, l'analyse et la reproduction des mouvements ments d'ouverture, de fermeture lors du montage, les forces
mandibulaires font appel à deux conceptions de la cinéma- exercées lors des équilibrations occlusales.
tique mandibulaire.
Être fiable
- Le concept anatomique. Il correspond à la « reproduc-
tion » des articulations temporo-mandibulaires qui gui- Cela implique que les différentes parties de l'articulateur
dent et dirigent les déplacements mandibulaires avec, s'adaptent parfaitement entre elles, en particulier au niveau
en particulier, comme point de départ le principe du des plaques de montage. Cela implique aussi que dans le
mouvement de rotation pure en axe charnière2. temps aucun phénomène d'usure ne puisse venir réduire la
- Le concept géométrique. Dans ce cas, les articulateurs précision recherchée. Le métal était, à ce titre, le matériau le
sont conçus pour répondre aux différentes propositions plus souvent utilisé, mais l'emploi de matériaux composites
d'analyses géométriques des déplacements mandibu- semble offrir des résistances à l'usure comparable à celle
laires. Parmi toutes les théories proposées, cône, sphère, des métaux.
Être interchangeable travaillante et non travaillante. Ces boîtiers plus ou moins
réglables, adaptables assurent une reproduction plus ou
Cela permet des échanges précis des modèles de travail
moins partielle des déplacements condyliens.
entre laboratoire et cabinet. Ceci réduit le nombre d'articu-
lateurs que doivent posséder le cabinet dentaire et le labo-
Les articulateurs géométriques
ratoire de prothèse, et évite les risques de chutes, de bris
(concept de la sphère)
liés au transport de l'articulateur.
Ils doivent permettre une mise en place rapide et sûre du
Présenter un blocage en centrée efficace modèle mandibulaire pour qu'il se situe de manière idéale
par rapport au centre de la sphère.
Le maintien des relations entre la branche supérieure et la
branche inférieure doit être sûr, simple et précis. Cette exi-
gence du blocage efficace entre les branches supérieure et
inférieure s'est imposée sur tous les articulateurs actuels.
Le choix d'un articulateur doit répondre aux conditions cli-
Présenter une table incisive réglable niques et aux objectifs thérapeutiques.

Cet élément est important, car il permet d'adapter l'articula-


teur à l'une des cinq composantes du Quint de Hanau. La mise en articulateur
Chez les patients handicapés, âgés, la mise en place d'un
Posséder des vis poussoirs arc facial est souvent difficile voire impossible, l'utilisation
d'un plateau de montage s'avère alors indispensable. De
Placées dans les boîtiers condyliens, elles permettent des
même, le manque de coopération du patient peut conduire
déplacements précis et progressifs de la branche supérieure.
le praticien à éviter l'emploi de l'arc facial.
Elles sont quelquefois remplacées par des cales qui sont
insérées dans les boîtiers condyliens.
La reproduction de la cinématique
Maintenir la dimension verticale En présence d'un cycle de mastication presque vertical, l'ab-
Les tiges incisives doivent être graduées sur une distance sence de mouvements de propulsion, de latéralité, souvent
importante: 10 mm au-dessus et au-dessous de la valeur liés aux relations squelettiques de classe III, ne réclament
moyenne pour assurer un contrôle parfait des variations de qu'un articulateur simple sans réglage. A contrario les
dimension verticale. patients, du type classe II div. 1, les anciens bruxomanes,
dont l'amplitude des mouvements de propulsion et de laté-
Posséder un plateau de montage ralités est importante, justifient l'utilisation d'un articulateur
plus réglable5.
Les modèles maxillaire ou mandibulaire doivent pouvoir être
fixés sur l'articulateur dans une position moyenne et ce, indé-
pendamment du patient.

Les exigences particulières


Les articulateurs actuels se répartissent en deux grands
Celles-ci dépendent des concepts cinématiques auxquels groupes selon le concept cinématique choisi, concept ana-
les articulateurs appartiennent. tomique ou géométrique.

Les articulateurs anatomiques


- L'axe charnière - L'articulateur doit accepter la mise en
place d'un arc facial et, ainsi, permettre de placer le Les articulateurs anatomiques actuels (1980-2000) sont
modèle maxillaire par rapport à l'axe de rotation bicon- presque tous du type Arcon7 :
dylien. La localisation de l'axe transverse bicondylien - Un articulateur Arcon est un articulateur où les sphères
peut se faire soit de manière arbitraire (référence à des condyliennes se situent sur la branche inférieure de l'ar-
moyennes, des repères), soit de manière précise suite à" ticulateur et où les boîtiers condyliens sont solidaires de
une localisation graphique. la branche supérieure, offrant ainsi une représentation
- Le plan de référence - De manière à pouvoir évaluer et anatomique.
reproduire les variations et inclinaisons des trajectoires - Un articulateur anti-Arcon est un articulateur où les
condyliennes, l'articulateur doit présenter un plan de sphères condyliennes sont solidaires de la branche supé-
référence situé sur la branche supérieure. rieure alors que les boîtiers condyliens sont solidaires de
- Les boîtiers condyliens - L'articulateur doit présenter des la branche inférieure.
systèmes permettant de reproduire ou simuler les dépla- La différence entre ces deux conceptions est capitale, car
cements condyliens à la fois en propulsion, en latéralité elle influence directement la relation géométrique qui s'ins-
Tableau 12-1 Caractéristiques de l'articulateur FAG-LAB 40°

Fig. 12-1a Avec un articulateur anti-Arcon la modification de la


dimension verticale provoque une variation de l'angle relatif (a) qui
s'établit entre la pente condylienne (P.C.) et le plan occlusal (P.O.).

Fig. 12-1b Avec un articulateur Arcon la modification de la dimen-


sion verticale ne provoque pas de variation de l'angle relatif (a) qui
s'établit entre la pente condylienne (P.C.) et le plan occlusal (P.O.).

talle entre la pente condylienne et le plan occlusal lorsque


la dimension verticale est modifiée. Dans ces conditions,
avec un articulateur Arcon, l'angle relatif entre l'orientation
du plan occlusal et les pentes condyliennes demeure
constant, alors qu'avec un articulateur anti-Arcon, cet angle
relatif varie8 (fig. 12-1a, b).
Fig. 12-2 FAG LAB avec boîtiers condyliens préréglés.
Ce concept Arcon de première génération a ensuite évo-
lué pour aboutir au concept Arcon de deuxième génération.
Dans cette situation, la table incisive se situe sur la branche
supérieure de l'articulateur. La relation géométrique anato- Les articulateurs anatomiques
mique ou naturelle d'un patient est alors parfaitement partiellement réglables
reconstituée, pente condylienne, plan occlusal, guide anté-
rieur sur la branche supérieure, les rendant indépendants • Articulateurs anti-Arcon
des variations de dimension verticale.
Ils sont actuellement peu nombreux. On doit cependant rap-
peler l'existence de l'articulateur Dentatus, et du Condylator.
Description - L'articulateur Dentatus
Les articulateurs anatomiques anti-Arcon et Arcon de 1 r e et Bien qu'ancien, cet articulateur anti-Arcon n'est pas
2e générations se répartissent en 3 groupes: les articula- démodé. Ses qualités intrinsèques de rigidité, de préci-
teurs non réglables, partiellement réglables, totalement sion, et surtout de sûreté dans le maintien des relations
réglables. Seuls certains seront ici présentés. intermaxillaires tant en relation centrée que lors des mou-
vements excentrés en font un articulateur exceptionnel,
Les articulateurs anatomiques non réglables particulièrement adapté à la prothèse adjointe complète.
Par nature, ils sont très simples. L'articulateur FAG LAB 40° est - L'articulateur Condylator Simplex ou Vario
destiné à la prothèse adjointe. Cependant, il ne possède pas Conçu autour de 1952, il répond aux conceptions déve-
de vis de propulsion permettant de simuler des déplace- loppées par Gerber9. Ses spécificités sont d'utiliser
ments très précis et reproductibles. Le qualificatif 40° corres- comme plan de référence le plan de Camper, et de pos-
pond à l'inclinaison de la pente condylienne (tableau 12-1) séder des boîtiers condyliens qui autorisent un mouve-
(fig. 12-2). ment de rétrusion (tableau 12-2) (fig. 12-3a, b).
Tableau 12-2 Caractéristiques de l'articulateur Condylator-Vario. • Articulateur Arcon
C'est l'articulateur le plus souvent utilisé en pratique quoti-
dienne.
- 1 r e génération - L'articulateur Denar Combi a été conçu
par P. Dawson et possède 2 types de boîtiers condyliens :
• des boîtiers de série avec des trajectoires condyliennes
rectilignes mais des inclinaisons différentes;
• des boîtiers individualisames par apports de résine qui
est secondairement modelée grâce à des enregistre-
ments intra-buccaux10 (tableau 12-3) (fig. 12-4a, b).

Tableau 12-3 Caractéristiques de l'articulateur Denar-Combi.

Fig. 12-3a Articulateur Gerber Vario Simplex.

Fig. 12-4a Articulateur Denar-Combi.

Fig. 12-3b Boîtier condylien : 1) verrou de blocage ; 2) pente Fig. 12-4b Boîtier condylien modelé avec de la résine auto-poly-
condylienne. mérisable.
Tableau 12-4 Caractéristiques de l'articulateur Fag-Master. reproduit un mouvement de propulsion rectiligne et
possède dans sa partie postérieure une vis poussoir qui
permet de déplacer la sphère condylienne de manière
précise. Le boîtier B3 présente un toit curviligne. À l'in-
térieur de ces boîtiers les éléments en résine, inter-
changeables, assurent la reproduction du déplacement
du condyle non travaillant dans le plan horizontal. Ils
sont soit rectilignes avec 4 angulations (0,10°, 15°, 20°)
soit curvilignes avec trois rayons de courbures
(tableau 12-4) (fig. 12-5a, b).
• L'articulateur SAM II : cet articulateur est très rigide, très
précis. Ses verrous poussoirs assurent un parfait blo-
cage entre les branches maxillaire et mandibulaire11.
Parmi ses autres qualités on doit souligner son inter-
changeabilité. Il possède trois types de boîtiers condy-
liens et quatre jeux d'ailes de Bennett, trois curvilignes
et un rectiligne (tableau 12-5) (fig. 12-6a, b). Les dépla-
cements condyliens sont contrôlés par des cales pla-
cées dans les boîtiers.

Tableau 12-5 Caractéristiques de l'articulateur SAM.

Fig. 12-5a Boîtier condylien B3 de l'articulateur FAG-Master avec


sa vis de propulsion (1) et son sytème de blocage en centrée (2).

Fig. 12-5b Inserts curvilignes et rectilignes des boîtiers FAG.

- 2e génération - Cette catégorie représente la majorité


des articulateurs actuels.
• L'articulateur FAG Master : sa branche supérieure est en
résine composite alors que la branche inférieure est
métallique. Son interchangeabilité est parfaite. Il pos-
sède deux types de boîtiers condyliens. Le boîtier B2, Fig. 12-6a Articulateur SAM2.
Fig. 12-6b Boîtier condylien SAM 2 et ses ailes de Bennett curvi- Fig. 12-7a Articulateur Stratos 200.
lignes et rectiligne.

Les articulateurs anatomiques « totalement »


réglables
Ce type d'articuiateur permet une simulation quasi parfaite des
déplacements condyliens. Cette simulation fait appel à des sys-
tèmes de modelage des boîtiers condyliens, à des systèmes
mécaniques où les réglages et les pièces interchangeables per-
mettent de reproduire l'ensemble des déplacements limites.
Dans le principe, ces instruments sont particulièrement adap-
tés à la création de schémas occlusaux du type occlusion bila-
téralement équilibrée, mais leur utilisation est délicate, ce qui
limite leur emploi en prothèse adjointe.

Fig. 12-7b Boîtier condylien Stratos 200 avec son système de blo-
Les articulateurs géométriques cage (1).
Ils répondent tous au concept de la sphère.
L'articulateur Kavo
L'articulateur Stratos12 C'est un articulateur relativement complexe qui possède
L'articulateur Stratos 200 est un articulateur qui répond aux deux types de branches supérieures, l'un avec des boîtiers
caractéristiques d'un articulateur anatomique et géomé- condyliens peu adaptables, et l'autre dont les boîtiers sont
trique. Il est particulièrement adapté à la réalisation de pro- plus réglables. Les blocages entre les branches supérieure
thèses adjointes totales, car adapté à la conception d'un et inférieure sont très précis. Par contre, il ne possède pas
montage sphéroïdal (tableau 12-6) (fig. 12-7a, b). de vis de propulsion (tableau 12-7) (fig. 12-8a, b).

Tableau 12-6 Caractéristiques de l'articulateur Stratos 200. Tableau 12-7 Caractéristiques de l'articulateur Kavo.
Fig. 12-8a Articulateur Kavo. Fig. 12-8b Boîtier condylien Kavo avec son système de blocage.

Les séquences et les protocoles de mise en articulateur des


modèles de travail varient selon les concepts cinématiques
choisis et les moyens de reproduction qui s'y attachent.

Mise en articulateur du modèle maxillaire


Selon ce concept, la mise en articulateur débute par la mise
en place du modèle maxillaire suivie de celle du modèle
mandibulaire.
Deux techniques sont utilisées pour placer le modèle
maxillaire, le plateau de montage et l'arc facial 13,14 .
Fig. 12-9 Triangle de Bonwill.
te plateau de montage
Certains articulateurs comme les articulateurs FAG, le
Condylator, le Stratos 200 disposent d'un plateau qui se fixe
sur la branche inférieure de ['articulateur et qui permet de
positionner le modèle maxillaire par rapport à l'axe charnière.
Ce plateau est orienté selon le plan de Camper. Dans sa par-
tie antérieure un repère gravé correspond au sommet du tri-
angle de Bonwill, sommet qui se situe à 100 mm de l'axe
charnière (fig. 12-9).
Son utilisation est très simple et rapide. Le bourrelet est
réglé selon les critères précédemment exposés. La maquette
d'occlusion et son modèle sont posés sur la table de mon-
tage en prenant soin de placer le point inter-incisif au niveau
du repère gravé le plus antérieur et d'orienter le modèle dans Fig. 12-10 Fréquence des distances entre l'axe charnière réel et
le plan sagittal médian, plan passant entre les deux fossettes le point interincisif (John Kois).
palatines et le point inter-incisif.
L'utilisation du plateau de montage est tout à fait adap-
L'arc facial
tée à la prothèse complète, car le triangle de Bonwill donne
une position vis-à-vis de l'axe charnière statistiquement En 1880, Hayes fut le premier à décrire l'arc facial, mais c'est
acceptable 15,16 (fig. 12-10). De plus, le plateau de montage à Snow que l'histoire attribue ce dispositif. C'est un sys-
est tout particulièrement indiqué chez les patients où la mise tème qui permet:
en place d'un arc facial est délicate en raison de l'âge et de - d'enregistrer la position de l'arcade maxillaire par rapport
certains handicaps physiques. à l'axe charnière et au plan de référence ;
- de replacer le modèle maxillaire sur l'articulateur par rap-
port aux centres de rotation et au plan de référence, dans
la même position que celle occupée sur le patient.
Géométriquement, la position du maxillaire est détermi-
née par rapport à un plan de référence défini par les trois
points suivants :
- Antérieurement, le point utilisé est le plus souvent le
point sous-orbitaire ou le bord inférieur de l'orbite.
- Postérieurement, les deux points correspondent aux
émergences cutanées de l'axe charnière. La détermina-
tion de ces points fait appel d'une part à des repères ana-
tomiques cutanés ou osseux et d'autre part à des repères
cinématiques.
Les repères cutanés se situent en avant du tragus sur
une ligne tragus - coin externe de l'œil, mais actuellement
ils ne sont presque plus utilisés.
Les repères osseux correspondent à la paroi antérieure Fig. 12-11 Le dispositif (a) placé au niveau de l'ensellure nasale
situe le plan de référence (b) 25 mm sous l'ensellure au niveau
du méat acoustique. En effet, l'axe charnière réel se situe
du point sous-orbitaire (c).
dans 80 °/o des cas à moins de 6 mm de cette paroi17. Plus
récemment, C. Wirth, dans une étude comparable à celle de
Lundeen, conclut à la fiabilité de la partie antéro-supé-
rieure 18,19 . La relative constance entre l'axe charnière et le
méat acoustique est utilisée par la majorité des arcs faciaux
actuels tels que les arcs FAG, SAM, Stratos et Denar.
Ces trois points non alignés définissent le plan de réfé-
rence ou plan axio-orbitaire, qui ne doit pas être confondu
avec le plan de Francfort.
L'arc facial permet de déterminer la position du maxillaire
par rapport aux émergences de l'axe charnière et au plan de
référence, puis de reporter cette position sur l'articulateur.

* L'arc facial avec des repères anatomiques

Description
Les arcs utilisant les repères osseux se composent de
deux bras latéraux articulés autour d'une barre antérieure.
L'extrémité des branches latérales se termine par des
embouts plastiques qui pénètrent dans les méats acous-
tiques. Antérieurement, le repère nasal placé au niveau de
l'ensellure du nez permet d'une part de soutenir l'arc et
d'autre part de créer le plan de référence en plaçant l'arc à
25 mm de l'ensellure nasale, donc au voisinage du point
sous-orbitaire (fig. 12-11) 19 . Fig. 12-12 Dans le sens antéro-postérieur l'ouverture maximale
Cependant, la conception de ces arcs articulés peut (L) et minimale (I) de l'arc facial (SAM) induit une imprécision de
générer des imprécisions lorsque la distance inter-embouts 0,3 mm dans le sens antéro-postérieur.
auriculaires se modifie (fig. 12-12).
Pour éviter ces problèmes, certains arcs (comme le
Denar Slide-Matic, l'arc facial Stratos) s'écartent par un fourchette est insérée dans la cavité buccale, appliquée sur
simple glissement, évitant ainsi tout artefact (fig. 12-13). le bourrelet en prenant soin d'orienter la tige de fixation dans
le plan sagittal médian, et surtout, parallèlement au plan de
Manipulation clinique Francfort. La fourchette est retirée et passée sous l'eau froide
À la surface occlusale du bourrelet maxillaire trois encoches pour durcir les morceaux de pâte thermoplastique.
sont taillées, une au niveau incisif, les deux autres au niveau Les embouts auriculaires de l'arc facial sont insérés dans
molaire et très légèrement vaselinées, puis la maquette est les méats acoustiques. Cette manœuvre est facilitée par une
insérée dans la cavité buccale. À la surface de la fourchette, ample ouverture de la cavité buccale. Le repère nasal est
trois morceaux de pâte thermoplastique sont réchauffés puis mis en place au niveau de l'ensellure nasale, bloqué avec
collés dans les ouvertures ou trous de la fourchette. Alors sa vis de serrage, les verrous de l'arc facial serrés. Enfin, la
que les trois morceaux de pâte sont encore plastiques, la fourchette est placée sur la maquette d'occlusion, mainte-
Fig. 12-14 Mise en articulateur du modèle maxillaire sur un arti-
culateur FAG.
Fig. 12-13 La branche antérieure de l'arc facial de Stratos glisse
sur elle-même.
M i s e en articulateur du m o d è l e m a n d i b u l a i r e
nue par les pouces du patient, le système de blocage mis Lorsque les deux premières étapes de la validation de l'en-
en place puis activé. registrement de la relation intermaxillaire ont été réalisée, le
L'arc est ensuite déposé, puis, en présence du patient, modèle mandibulaire est mis en articulateur (chapitre 11).
placé sur l'articulateur. Cette précaution permet au praticien En respectant les temps suivants :
de contrôler toutes les imprécisions ou erreurs qui s'opposent
à l'utilisation de l'arc. La mise en articulateur, qui diffère selon 1er temps - Absence d'interférence des modèles
les articulateurs choisis, est ensuite réalisée (fig. 12-14 ;
Les maquettes d'occlusion sont replacées avec soins sur
tableau 12-8).
leurs modèles respectifs. Elles sont mises en contact l'une
avec l'autre pour contrôler qu'il n'existe aucune interférence
Tableau 12-8 Séquence de mise en place de l'arc facial et du
entre les modèles, en particulier au niveau distal, entre les
modèle maxillaire sur l'articulateur FAG-Master.
coffrages.

2 e temps - Centre de gravité

Les extrémités mésiales et distales des enregistrements sont


marquées sur le socle du modèle puis reliées entre elles par
des diagonales. L'intersection des deux diagonales déter-
mine le centre de gravité de l'enregistrement (fig. 12-15a).

• L'arc facial avec des repères cinématiques


La localisation cinématique de l'axe charnière permet de
déterminer de manière précise la position exacte du mou-
vement de rotation pure de la mandibule, puis d'en situer
sa position par rapport au massif facial. Cependant, sa justi-
fication clinique en prothèse adjointe complète est très limi- Fig. 12-15a Une pression digitale appliquée au centre de gravité
tée. de l'enregistrement.
3e temps - Blocage des modèles - Soit en plaçant les deux lames postérieures au niveau du
milieu du trigone rétromolaire et antérieurement, la
Le praticien maintient les modèles en appliquant une pres-
réglette à la hauteur correspondant à celle de la lèvre
sion digitale au niveau du centre de gravité, puis glisse deux
inférieure ou à la distance séparant le dentalé du fond
noisettes de plâtre à prise rapide au niveau distal. Celles-ci
du vestibule (fig. 12-16).
bloquent la relation inter-maxillaire obtenue, facilitant la mise
Le modèle mandibulaire est ensuite solidarisé à l'aide de
en articulateur (fig. 12-15b).
plâtre à la branche inférieure de l'articulateur. Après enre-
gistrement de la relation inter-maxillaire, le modèle supérieur
est mis en articulateur par rapport au modèle mandibulaire.

Fig. 12-15b Blocage des relations inter-maxillaires à l'aide de


plâtre glissé entre les parties distales des modèles.

Fig. 12-16 Un dispositif original est fixé sur le modèle mandibu-


4e temps - Mise en place du plâtre laire. Distaiement les repères correspondent au milieu du trigone
Le plâtre préparé à consistance crémeuse est mis en place rétro-molaire et antérieurement à la hauteur de la lèvre.
sur la plaque de montage puis sur le socle du modèle, l'ar-
ticulateur est refermé (fig. 12-15c).

Le but de la programmation d'un articulateur est de choisir,


d'orienter les différents composants amovibles et mobiles
des boîtiers condyliens, pour reproduire ou simuler plus ou
moins partiellement la cinématique condylienne. La pro-
grammation permet de régler les déplacements condyliens
lors de la propulsion et en latéralité du côté non travaillant,
plus exceptionnellement du côté travaillant.
Les techniques de réglage sont au nombre de trois : les
cires de morsures, les enregistrements fonctionnels, les
enregistrements graphiques.

Fig. 12-15c Mise en articulateur terminée.


Cette technique utilise le phénomène de Christensen21,22.
Lors d'un déplacement mandibulaire, il se crée un vide entre
les dents postérieures. L'importance de ce vide dépend de
l'inclinaison de la pente condylienne. En conséquence, si l'on
Pour les articulateurs répondant au concept de la sphère, le mesure le vide postérieur on peut en déduire l'inclinaison
modèle mandibulaire est fixé en premier sur l'articulateur. de la pente condylienne. Pour cela, des bandes de cire sont
Il est placé sur l'articulateur par l'intermédiaire d'un dis- collées aux niveaux molaire et prémolaire. Les maquettes
positif qui prend comme référence le plan d'occlusion man- sont remises en place et le patient effectue une propulsion
dibulaire: d'environ 5 mm, sans aucun contact. Puis le patient fait
- Soit par l'intermédiaire de la base d'occlusion mandibu- entrer les maquettes en contact. Celles-ci sont retirées de la
laire, ce qui impose une parfaite orientation du bourre- cavité buccale, plongées dans l'eau glacée puis replacées sur
let vis-à-vis du plan occlusal mandibulaire. l'articulateur.
Cette technique d'utilisation simple permet d'orienter les
boîtiers condyliens en propulsion. Cependant, la précision
de cette technique est limitée, car elle nécessite un dépla-
cement condylien de 5 mm minimum et, surtout, elle ne
donne aucune information sur l'ensemble de la trajectoire.
Par ailleurs, la programmation des mouvements de latéra-
lité n'est pas fiable. Le réglage des boîtiers condyliens en
latéralité est plus délicat avec des cires de morsures. Il
semble préférable d'utiliser des ailes de Bennett curvilignes
qui présentent un angle de Bennett très ouvert dans les deux
premiers millimètres du déplacement en latéralité.

Fig. 12-18 Axiographe SAM en place.


Cette technique est ancienne. Son principe est d'enregis-
trer par modelage les déplacements mandibulaires 24,25
(fig. 12-17). Cependant, si chez l'édenté total, les techniques simples
Ce procédé d'enregistrement permet dans un deuxième peuvent être facilement utilisées en pratique quotidienne, il
temps d'individualiser les boîtiers condyliens et ainsi de n'en est pas de même pour les techniques complexes. La
reproduire parfaitement les déplacements mandibulaires. précision recherchée est souvent incompatible avec leur
Ces analogues condyliens sont propres à chaque patient, emploi chez un patient édenté total, a fortiori âgé.
incorporant tous les détails des trajectoires condyliennes.
Cependant, il existe des risques d'erreur dans les enre-
gistrements intra-buccaux, de même lors de leurs modelages
au laboratoire. Le guidage des éléments se fait le plus sou-
vent sans possibilité de contrôle visuel. Mais surtout, les enre-
gistrements n'offrent aucune valeur diagnostique tant sur le
principe de la reproductibilité des enregistrements que sur la
valeur angulaire de la forme des trajectoires obtenues26.
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L'esthétique se définit comme « la science de la beauté dans blanches et parfaitement alignées renvoient une image de
la nature et les arts ». Mais, si cette définition renvoie à des la jeunesse et de la séduction. Le sourire et les dents sont
notions scientifiques, Hegel rappelle que le beau ne peut être devenus des acteurs essentiels de l'esthétique. L'apparence
strictement codifié car « la beauté, comme fruit de l'imagi- domine et les patients ressentent le besoin de rajeunir et de
nation et des sentiments, ne peut être une science exacte ». s'identifier à ces images (fig. 13-1).
Cette double image de l'esthétique scientifique et
humaine répond à la problématique posée par le patient au
praticien: lui redonner ses dents, mais aussi un sourire;
lequel praticien devra retrouver l'image du naturel à partir de
références et de données exactes.

L'esthétique est avant tout une émotion définissant quelque


chose de plaisant ou de déplaisant. Ainsi, pour le patient, la
perception visuelle, « l'interprétation esthétique » d'un sou-
rire ne dépendent que de ses expériences précédentes et
des images érigées par la société comme « idéales ».

Fig. 13-1 Sourire d'une patiente dentée jeune.

Le patient édenté est un patient directement atteint dans son


intégrité corporelle, et, indirectement, dans sa communication Ainsi, le patient anxieux de l'aspect de sa future prothèse
et ses relations avec les autres1. Souvent, c'est un patient âgé idéalise le souvenir de ses dents, et « réclamera » souvent
dont ce handicap accentue le sentiment de dépendance, voire des dents blanches et bien rangées. Au-delà de ces images,
d'exclusion. Il porte tous ses espoirs vers la prothèse, mais il s'inquiète du regard des autres, du jugement qu'ils porte-
cette nouveauté est aussi attendue avec une relative anxiété. ront sur sa future prothèse (fig. 13-2) 2 .

La prédominance de l'image dans la société actuelle se La participation du patient au choix des dents et à l'aspect
caractérise par des sourires éclatants, où des dents toujours esthétique final de la prothèse est essentielle. En effet, sa
L'analyse du visage est dominée par la « définition » et la
situation de la ligne médiane. Cette ligne génère la symétrie
et l'équilibre de la face, principaux paramètres de ce cadre.

La symétrie du visage
La symétrie est considérée comme un des critères de l'es-
- thétique. Elle se définit comme la distribution régulière de
parties, d'objets semblables de part et d'autre d'un axe,
autour d'un centre. Pour Hegel, «régularité, symétrie et
ordre » constituent les caractéristiques de l'esthétique. Cette
vision mathématique remonte aux travaux de Pythagore,
Fig. 13-2 Importance des dents, dans l'esprit du patient, dans l'ap-
préciation esthétique du visage (faible, moyenne, forte). suivi par de nombreux « savants » et artistes, dont Léonard
de Vinci n'en fut pas le moindre.
Cependant, aucun visage ne témoigne d'une parfaite
perception de l'esthétique, liée à ses propres notions cultu- symétrie, et tenter de reconstituer un visage à partir d'une
relles, ethniques, ne rejoint pas toujours le projet proposé de ses moitiés et de sa partie symétrique fait apparaître un
par le praticien (fig. 13-3). De même, l'avis de parents, autre visage6 (fig. 13-4a, b).
d'amis, joue un rôle important; finalement, une véritable
coopération du patient doit exister dans la conception esthé- Fig. 13-4 Symétrie ou asymétrie du visage.
tique de sa prothèse, pour en assurer sa parfaite accepta-
tion 3 - 4 .

Fig. 13-3 Approche spécifique de l'esthétique avec la présence de Fig. 13-4a Visage.
« couronnes » en or sur la prothèse adjointe complète maxillaire.

Pour le praticien, l'esthétique doit dépasser le niveau de la


simple perception plaisante d'une réhabilitation prothétique
harmonieuse.
Des critères esthétiques objectifs existent, permettant
une appréciation rationnelle de ces restaurations.
Au-delà des généralités et des grands principes (symé-
trie, lignes, harmonie), l'esthétique doit être examinée à par-
tir de trois cadres : le cadre facial, le cadre dento-labial et le
cadre dentaire5.
Chacun d'entre eux possède des éléments spécifiques,
les paramètres généraux restant toujours les références de Fig. 13-4b Le « même » visage construit à partir de sa moitié droite
base. et de la partie symétrique de celle-ci.
La symétrie reste cependant une référence, même si à
tous les niveaux d'analyse des modulations existent.
Le cadre dento-labial concentre l'analyse sur l'étage inférieur
de la face, plus précisément sur l'ensemble des structures
La ligne médiane
environnant la composition dentaire.
Malgré cette relative asymétrie du visage, toute restauration Ainsi, l'examen se porte sur trois éléments essentiels : le
prothétique vient s'ancrer sur la ligne médiane, définie soutien des lèvres, le sourire, le corridor buccal.
comme la ligne verticale du milieu de la face qui court per-
pendiculairement à la ligne bipupillaire. Le soutien des lèvres
D'autres repères anatomiques ont été proposés pour
définir le milieu : la papille incisive, située entre les deux inci- L'une des premières conséquences de l'édentation reste la
sives centrales maxillaires, reste un point invariable qui peut « disparition » des lèvres, associée à l'apparition de plicatures
être utilisé. De même, le philtrum coïncide dans 70 % des verticales, à l'accentuation du sillon naso-génien, autant de
cas avec le milieu. Par contre, le frein médian, en raison de caractéristiques qui viennent s'ajouter au vieillissement phy-
sa variabilité, ne doit pas être utilisé7. siologique des tissus cutanés, marqués par le développe-
Mais, dans tous les cas, la coïncidence entre le milieu ment de rides, appelées, plus agréablement les lignes du rire.
inter-incisif et le milieu du visage reste privilégiée dans un L'objectif principal de toute réhabilitation prothétique est
souci d'harmonie et d'équilibre8. de redonner un profil harmonieux aux lèvres supérieure et
Cette recherche d'une harmonie est d'autant plus impor- inférieure, de soutenir les tissus mous au repos sans jamais
tante que l'observation des expressions faciales révèle fré- interférer avec la fonction musculaire (fig. 13-6a, b). Le res-
quemment une relative asymétrie de ces expressions9. pect du philtrum permet de conserver le galbe de la lèvre
supérieure; le soutien des commissures labiales rétablit

Les lignes horizontales


L'effet de « T » tracé par la ligne bipupillaire, perpendiculaire Fig. 13-6 Vue sagittale des lèvres.
à la ligne médiane, est renforcé par la ligne des commis-
sures labiales, également perpendiculaire à la ligne médiane.
Le parallélisme existant entre ces deux lignes horizontales
représente des « forces dites cohésives » tendant à créer une
unité, un équilibre du visage (fig. 13-5).

Fig. 13-6a En absence de prothèse, les lèvres apparaissent « ren-


trer » dans la cavité buccale.

Fig. 13-5 Ligne verticale médiane du visage et lignes horizontales


principales (ligne bipupillaire et ligne des commissures labiales).

La ligne des bords libres des incisives maxillaires, la ligne


de finition des collets, la ligne de la lèvre inférieure lors du
sourire constituent un ensemble de lignes parallèles.
L'harmonie qui résulte de ces parallélismes est aussi accrue
par les intersections avec la ligne médiane10.
Symétrie, ligne médiane et lignes horizontales représen- Fig. 13-6b Avec la prothèse, les lèvres retrouvent un profil har-
tent ainsi les repères de l'esthétique du cadre facial. monieux.
l'harmonie des lèvres et la ligne horizontale des commis- Il résulte de la différence existant entre la largeur de l'arcade
sures. Enfin, la visibilité retrouvée de la lèvre humide est une maxillaire et l'ampleur du sourire. Sa présence est indispen-
référence chez les femmes avec la possibilité recouvrée de sable, elle individualise la composition dentaire et contribue
mettre du rouge à lèvres11. à créer un effet de perspective fondamental à l'esthétique
du sourire. Cet espace latéral échappe souvent à un œil non
Le sourire averti, pourtant c'est aussi une des clefs contribuant à l'har-
monie du visage14 (fig. 13-8).
Le sourire représente l'expression faciale par excellence, et
les qualités esthétiques d'une restauration prothétique trans-
paraissent totalement lors de cette manifestation.
Bien que multiples, les sourires peuvent être classés selon
trois types12 : le sourire haut, moyen et bas (tableau 13-1).

Tableau 13-1 Classification des sourires selon le degré de visibi-


lité des dents antérieures maxillaires.

L'harmonie recherchée est, là aussi, guidée par des lignes


horizontales et verticales qui amènent à définir la symétrie
Fig. 13-8 Le corridor buccal apparaît entre la face interne de la
du sourire. joue et les faces vestibulaires des dents postérieures participant à
Une ligne principale domine, celle dite « ligne du sou- l'effet de perspective.
rire ». Cette ligne à concavité supérieure plus ou moins mar-
quée, se définit comme la courbe hypothétique sur
laquelle se placent les bords libres des dents antérieures
maxillaires. Elle suit le profil du rebord interne de la lèvre La symétrie du sourire
inférieure. Son analyse apparaît directement liée à la position des com-
L'équilibre du sourire est également renforcé par la ligne missures labiales, et à la restauration du corridor buccal. De
dessinée par la lèvre supérieure, ainsi que la ligne des plus, la référence à la ligne médiane est indispensable.
contacts proximaux inter-dentaires. Ainsi, l'alliance du sou- Deux types de symétrie ont été décrites10 :
rire et des tissus péribuccaux est recréée13 (fig. 13-7). - La symétrie horizontale, où chacune des dents apparaît
semblable aux autres; leur montage est réalisé de
gauche à droite selon une séquence régulière et répéti-
tive, le milieu ne semble pas jouer son rôle habituel de
pivot central.
- La symétrie radiante, au contraire, part du milieu inter-
incisif, et le montage du côté droit tend à apparaître
comme l'image dans un miroir du côté gauche et inver-
sement.
Une impression de monotonie résulte d'une symétrie
horizontale, cependant, de nombreux patients choisiront ce
type de montage sans irrégularité, ni particularité. Une symé-
trie radiante sera plus vivante et naturelle, caractérisée par
de relatives variantes dans le montage des dents, dont l'im-
pact sera d'autant plus limité qu'éloigné du milieu.
L'harmonie et le caractère naturel du sourire résultent de l'as-
Fig. 13-7 Sourire avec une ligne caractéristique à concavité supé-
rieure : la ligne du sourire. sociation d'éléments symétriques vers la ligne médiane et
asymétriques à distance.
Là encore, la symétrie représente un facteur important
Le corridor buccal de l'esthétique, où l'équilibre entre respect rigoureux et
C'est l'espace « noir » qui, lors du sourire, apparaît entre la modulation raisonnée aboutit à deux conceptions diffé-
face interne de la joue et les faces vestibulaires des dents. rentes du résultat esthétique15.
teinte. Si la luminosité décroît l'objet s'assombrit, si elle aug-
mente, il s'éclaire.
L'analyse du cadre dentaire est particulièrement consacrée aux
La saturation est la plus ou moins grande charge en pig-
dents et aux tissus gingivaux. En effet, couleur, dimensions,
ments de la teinte de base (fig. 13-10).
forme et position des dents associées à la fausse gencive sont
Enfin, un autre paramètre de la couleur est également
les paramètres directeurs de la restauration esthétique.
important, c'est la translucidité, qui est l'aptitude d'un corps
à se laisser traverser par la lumière.
La couleur Ces paramètres relativement complexes doivent être pris
La couleur reste un domaine complexe, car elle résulte de en compte lors du choix de la couleur des dents prothétiques.
la combinaison de la teinte de base, de la luminosité et de La possibilité de choisir des dents de saturations diffé-
la saturation. rentes, comme en denture naturelle, contribue à accentuer
La teinte de base dépend de la longueur d'ondes au la symétrie radiante du sourire et à rompre l'uniformité de
centre de gravité du spectre perçu. Pour Munsell, la teinte couleur des dents prothétiques.
est « la qualité qui distingue une famille de couleurs d'une Au-delà, faire appel aux techniques de maquillage des
autre, par exemple le rouge du jaune, le vert du bleu ou du dents prothétiques permet de reproduire les dents naturelles;
violet » (fig. 13-9). dans les cas de prothèse immédiate, cette approche repré-
La luminosité, encore appelée luminance, est la quantité sente un plus indéniable sur le plan esthétique et psycholo-
de noir ou de blanc qui entre dans la composition de la gique lorsque l'adhésion du patient est acquise (fig. 13-11 a, b).

Fig. 13-9 Le teintier Chromascop (Ivoclar-Vivadent®) rassemble


les couleurs en 5 groupes, chacun ayant une teinte de base diffé- Fig. 13-10 Groupe d'une teinte de base du teintier Chromascop,
rente. avec les 4 saturations dans un ordre croissant (de gauche à droite).

Fig. 13-11 Cas d'une prothèse immédiate.

Fig. 13-1 la Les dents naturelles très caractérisées devant être Fig. 13-11b Les dents prothétiques maquillées reproduisent les
extraites. caractéristiques des dents naturelles (Réalisation C. Nardari).
Les dimensions Une harmonie vis-à-vis du patient est alors recherchée;
les caractères pris en compte sont le sexe, l'âge et la per-
L'esthétique et la beauté d'un sourire dépendent aussi de
sonnalité. Cette approche a été définie sous le nom de
l'harmonie des proportions des dents antérieures.
concept dentogénique18. De légères modifications de
Des relations mathématiques ont été établies entre la
dimensions, de formes, de positions, voire de couleurs des
taille des dents, la largeur et la hauteur du visage; l'objectif
dents peuvent être apportées. L'ensemble de ces animations
était de rétablir un certain équilibre avec la face. Ainsi, le choix
ne doit en rien rompre l'harmonie générale, mais elles peu-
des dents antérieures sera guidé par le respect de ces règles,
vent transformer l'équilibre un peu statique obtenu en un
assurant de ce fait une harmonie générale.
équilibre dynamique où les variations produites renforcent
Cette harmonie des proportions des dents antérieures
l'esthétique de la restauration prothétique19.
se caractérise par une symétrie parfaite. Mais cette symétrie
ne reproduit pas la situation existant en denture naturelle.
De légères asymétries de taille des incisives centrales sont La fausse gencive
notées, asymétries qui pourraient être reproduites avec pru- Le contour gingival, visible dans le sourire haut, apparaît lors
dence en prothèse, pour créer une animation discrète et du rire, et appartient, ainsi, pleinement à l'esthétique.
rompre ainsi une régularité parfaite16. C'est pourquoi la base prothétique doit reproduire les
bombés radiculaires (concavités, convexités), le festonnage
La forme gingival, car une base prothétique lisse, brillante, sans carac-
tère propre à la gencive réduit à néant tous les efforts entre-
La forme des dents, à un degré supérieur même à la cou-
pris pour rendre une prothèse « naturelle ».
leur, a une incidence majeure sur l'esthétique d'une réhabi-
La morphologie de la fausse gencive, la situation des col-
litation prothétique.
lets sont bien définies, elles reproduisent un parodonte sain
Son choix reste pourtant très délicat et, en l'absence de
et se caractérisent par leur symétrie. Mais avec l'âge, le paro-
toute référence, les lois de l'harmonie de Williams (1914),
donte évolue, et une caractérisation esthétique peut être réa-
communément acceptées, tendent vers l'établissement
lisée (chapitre 14).
d'une similitude entre la forme du visage et la forme des
Les techniques de maquillage de la gencive artificielle
dents antérieures. Si cette classification peut être un moyen
existent, elles permettent dans le cas de sourires gingivaux
d'orientation générale, elle n'en demeure pas moins très
de retrouver aussi une harmonie esthétique au niveau de la
simplifiée. En effet, si l'équilibre de la face est toujours
gencive, associant aux modelés des collets et des racines les
recherché, cette relation ne se vérifie pas systématiquement
modulations de teinte correspondantes (chapitre 26).
en denture naturelle et d'autres paramètres doivent aussi
être considérés. Par leur volume, leur épaisseur, les lèvres,
et plus particulièrement la lèvre inférieure, répondent direc-
tement aux stimulations exercées par les bords libres des
incisives maxillaires ; une harmonie entre la morphologie des
dents choisies et les lèvres constitue un élément plus sub-
jectif du choix17.
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Créer une prothèse qui réponde aux exigences esthétiques, desquels le patient peut trouver ce qu'il recherche. De plus,
fonctionnelles et mécaniques souhaitées est l'objectif qui il convient de laisser le patient se décider car, plus le patient
détermine le choix et le montage des dents antérieures. est impliqué, plus il est responsabilisé ; plus il est conduit à
Cette étape requiert non seulement la connaissance et effectuer un choix, plus il sera satisfait du résultat.
le respect des principes, des règles anatomiques, géomé-
triques, mais aussi la connaissance des lois qui régissent l'es- Tenir compte des données de l'examen
thétique, lois que le praticien doit cependant intégrer, modu- clinique
ler, adapter à son propre sens de l'esthétique.
Lors de celui-ci, le patient a exprimé, exposé, avec ses mots,
son vocabulaire de manière plus ou moins directe son sen-
timent sur ses propres dents, qu'elles soient naturelles ou
prothétiques. Il peut les accepter « petites, blanches, rangées
comme des perles » ou les critiquer : « Elles étaient trop
Le choix des dents antérieures est effectué par le praticien claires, trop foncées, trop longues, trop grosses, mal rangées
en présence du patient et ce, indépendamment des dents etc. » Le praticien doit tenir compte de ces éléments, écou-
postérieures. Il convient non seulement de remplacer les ter, moduler les désirs, comprendre les refus, proposer des
dents absentes mais aussi de répondre aux espérances psy- solutions.
chologiques et esthétiques du patient1.
Rechercher l'ancien sourire
Il convient d'expliquer au patient que la meilleure technique
pour rétablir son sourire est de connaître son aspect origi-
nel. Cette approche amène le praticien à lui demander de
Le principe est simple : « offrir au patient ce qu'il désire ». fournir des modèles, des photos, des anciens appareils,
C'est une obligation qui impose de tenir compte des quatre autant d'éléments qui participent aux différents choix et
paramètres suivants : démarche qui, à nouveau, implique le patient.

Répondre aux exigences du patient Rendre le choix simple


Le praticien doit prendre conscience du fait qu'il s'agit En absence de document, s'il est relativement facile pour le
d'abord de la prothèse et des dents du patient, et que pour praticien de choisir des dents, il n'en est pas de même pour
cela il convient de toujours solliciter l'approbation de ce der- le patient. Il convient de le guider, de lui expliquer les critères
nier. Le praticien fournit des informations, des conseils pour de choix. Malgré cela, certains patients préfèrent ne pas
conduire le patient vers une sélection ou un choix « limité » s'engager dans la décision, laissant toute la responsabilité au
morphologiquement acceptable, choix ou sélection au sein praticien. En conséquence, si le patient est satisfait, tout va
bien, mais si le moindre soupçon s'installe sur la valeur ou - 3 e temps
la qualité du résultat obtenu, la responsabilité des problèmes Plus tard, l'ordre de présentation des deux barrettes choi-
ou de l'échec incombera immédiatement au praticien et non sies est inversé et le choix définitif effectué par le patient.
au patient. Psychologiquement, cette technique est très importante,
La participation du patient à ces choix est essentielle. En car à nouveau, elle implique le patient dans la prise de
effet, parmi les éléments de satisfaction à long terme, l'as- décision (fig. 14-2c).
pect général, la forme, la couleur des dents sont capitales
dans l'acceptation et l'intégration de la prothèse2 (fig. 14-1).

Fig. 14-2a Choix d'un élément du teintier en accord avec la cou-


leur de la peau.

Fig. 14-1 Évolution et acceptation de l'esthétique en fonction de


l'autorité du praticien.

Au niveau des dents antérieures, le choix porte sur trois para-


mètres : la couleur, la dimension et la forme.

Les dents maxillaires supérieures

La couleur Fig. 14-2b Analyse comparative de deux barrettes de saturation


très différente.
La couleur des dents doit être déterminée en premier car
elle implique directement le patient. À l'aide des teintiers
adaptés à la marque de dent utilisée, le praticien détermine
la teinte de base de manière à établir une harmonie avec la
couleur de la peau, des yeux, des cheveux3,4.
Avec le teintier Chromascop®, le choix de la couleur s'ef-
fectue selon la méthode suivante :
- 1 e r temps
Recherche de l'harmonie de teinte entre un des cinq blocs
du teintier et les cheveux, la peau, les yeux (fig. 14-2a).
- 2 e temps
Les barrettes de la même teinte, mais de saturation tota-
lement opposée sont placées au niveau de la lèvre et de
la peau (fig. 14-2b). À l'aide d'un miroir, le patient ana-
lyse l'aspect rendu, exprime son choix ou son refus d'une
des barrettes présentées. De proche en proche, deux bar- Fig. 14-2c Analyse comparative des deux barrettes de saturation
rettes de saturations voisines sont retenues par le patient. proche mais inversées.
Les dimensions interne, la dimension des yeux. Ces dimensions, en particu-
lier la distance inter-alaire, peuvent être mesurées à l'aide
Dans la mesure où des documents préalables aux avulsions
d'un système spécifique : l'Alameter®, le cadre Trubyte® ou
dentaires sont présents, modèles avant extraction, dents
un pied à coulisse (fig. 14-4 a, b) (tableaux 14-1 a, b).
naturelles extraites, le choix est relativement facile si le
La hauteur des dents antérieures est plus délicate à déter-
patient souhaite retrouver son aspect originel5-11. À ces
miner. Celle de l'incisive centrale correspond au 1 /16 de la dis-
documents, s'ajoute l'utilisation de clichés photographiques.
tance séparant le menton en position de repos de la limite des
Le principe est de déterminer un coefficient d'agrandisse-
cheveux. Cette hauteur est directement donnée grâce au cadre
ment entre la photo existante et les données anatomiques
du patient. Différents repères sont proposés : distance inter-
pupillaire, inter-canthus interne, inter-alaire (fig. 14-3a, b).
Cependant, la valeur de ces données dépend de la qua-
lité du cliché, de sa dimension, de l'angle de prise de vue.
En conséquence, cette technique reste d'une utilisation déli-
cate.
En absence de tout document originel, les techniques
proposées pour choisir la dimension des dents antéro-supé-
rieures sont extrêmement nombreuses et variées, ce qui
indique qu'aucune d'entre elles ne procure des résultats par-
faits. La largeur du nez et la distance bizygomatique sont les
éléments anatomiques les plus souvent utilisés pour déter-
miner la largeur de l'incisive centrale, la longueur mésio-dis-
tale du bloc incisive-canin. À cela, s'ajoutent d'autres
moyens : la largeur du philtrum, la distance inter-canthus

Fig. 14-4a L'Alameter® permet de déterminer la distance inter-


alaire, ...
Fig. 14-3a Évaluation de la dimension des dents naturelles, les
repères tels que la distance inter-pupillaire ( 1 ), inter canthus interne
(2), inter-alaire (3), permettent d'établir le ratio d'agrandissement
entre le cliché photographique et le patient (4) Largeur des deux
incisives centrales (5) largeur des quatre incisives.

Fig. 14-3b Calcul des dimensions des dents prothétiques à partir Fig. 14-4b ... et par conséquent la dimension mésio-distale de
d'une photographie des dents naturelles. l'incisive centrale et du bloc incisivo-canin.
Tableau 14-1a Dimensions des incisives centrales et repères ana- Tableau 14-1b Dimensions des six dents antéro-supérieures et
tomiques. repères anatomiques.

« Trubyte » (fig. 14-5a). Cependant, lors du sourire, il convient modèles d'étude, des dents extraites conservées, des pho-
d'éviter toute apparition de la fausse gencive au niveau cervi- tographies, le choix est relativement facile, mais, en leur
cal ; pour cela, la partie visible de la face vestibulaire de l'inci- absence, le choix est plus délicat.
sive centrale doit être inférieure aux 2/3 de sa largeur. Différentes propositions ont été faites, la plus ancienne
Cliniquement, l'évaluation du jeu labial à l'aide de la règle établit une similitude entre la forme du visage et celle de l'in-
Papillameter® s'avère d'un grand secours. Si la fausse gen- cisive centrale. Pour cela les visages sont classés en trois
cive risque d'apparaître, il faut soit choisir des dents plus formes : carrée, triangulaire et ovoïde, avec une combinaison
longues, soit choisir une couleur de résine de base parfai- entre ces trois grands groupes. Ces formes sont aussi utili-
tement adaptée et éventuellement prévoir son maquillage sées pour décrire les incisives carrées, ovoïdes et triangulaires
(fig. 14-6 a, b,c). (fig. 14-5b). Cependant, même si la similitude entre les
Enfin, lorsque, grâce au réglage du bourrelet, l'esthétique contours du visage, de l'arcade et de l'incisive centrale (dite
de la lèvre a été restaurée, le praticien doit marquer sur celui- triade de Nelson) n'est que très partielle voire inexistante,
ci le milieu, la ligne du sourire, la position des commissures. cette notion classique demeure toujours d'actualité, toutes
les cartes de forme continuant à l'utiliser. La forme ovoïde est
La forme le plus souvent choisie à la fois par le praticien et le patient,
La forme des dents est sans conteste l'élément le plus puis on rencontre les formes carrée et triangulaire12-14.
influent sur le rétablissement de l'esthétique. Elle concerne Le dernier élément de la forme correspond aux profils
essentiellement le contour de la face vestibulaire et les pro- verticaux et horizontaux des faces vestibulaires des dents
fils verticaux et sagittaux des dents antérieures. Dans la prothétiques, qui doivent être en harmonie avec les profils
mesure où des documents existent, tels que des anciens du visage du patient (fig. 14-5c). À cette notion de symétrie

Fig. 14-5a Évaluation de la largeur (1) et de la hauteur (2) de l'in- Fig. 14-5c Évaluation des profils vestibulaires de l'incisive centrale :
cisive centrale à l'aide du cadre Trubyte®. 1) profil curviligne, face vestibulaire bombée ; 2) profil plat, face
vestibulaire plate.

Fig. 14-5b Évaluation de la forme


générale de l'incisive centrale par rap-
port à la forme du visage :
1) carré ; 2) carré à modification
ovoïde ; 3) triangulaire ; 4) ovoïde.
Fig. 14-6a Le Papillameter®.

Fig. 14-7 La réflexion (R) de la lumière (L) modifie l'aspect de la


même dent en donnant l'illusion d'une dent courte (A) ou d'une
dent longue (B), si la face vestibulaire est convexe ou plane.

Les dents mandibulaires

La couleur

Elle est choisie par le praticien, le plus souvent, identique à


celle des dents maxillaires. Par contre, les modifications sui-
vantes peuvent être proposées :
Fig. 14-6b Longueur de la lèvre au repos.
- En cas de classe II, la saturation des dents mandibulaires
sera réduite pour les rendre plus apparentes et ainsi
compenser leur position en retrait.
- À l'opposé, en cas de classe III, la saturation sera aug-
mentée pour les dents mandibulaires, qui apparaîtront
moins.

Les dimensions

Elles sont déterminées par le laboratoire après mise en arti-


culateur et évaluation des rapports occlusaux et des relations
antérieures. La longueur mésio-distale du bloc incisivo-canin
dépend des relations canines souhaitées (classe I, classe II),
lors des mouvements de latéralités, et non pas des tableaux
de correspondances proposés par les cartes de forme. La
dimension mésio-distale doit permettre le passage de la
pointe canine mandibulaire dans l'embrasure entre la canine
Fig. 14-6c Longueur de la lèvre lors du sourire. La différence de
longueur entre les deux mesures objective le jeu de la lèvre, donc et la latérale maxillaire (classe I). La hauteur de la face ves-
l'importance de la visibilité des dents antérieures. tibulaire dépend du niveau du plan occlusal et du degré de
supraclusie recherché.

anatomique, s'ajoute l'influence de la réflexion et de la


déflexion de la lumière qui, de manière indirecte, change la
forme de la dent. Les surfaces planes « allongent » la dent Le matériau de choix est sans aucun doute la porcelaine. Par
alors que les surfaces convexes « réduisent » sa longueur contre, les dents résine s'imposent lorsque la distance inter-
(fig. 14-7). crête est réduite, lorsque les dents postérieures sont en
résine et lorsqu'un bout à bout incisif s'établit. Dans cette cone placée sur l'arcade mandibulaire (fig. 14-8a, b, c). Dans
circonstance, les dents d'un des secteurs antérieurs, géné- la mesure où ces indications ne sont que partiellement trans-
ralement le secteur mandibulaire, sont en résine en anta- mises au laboratoire, voire absentes, ce dernier utilise les
goniste de dents porcelaine. Cette organisation évite les sur- repères suivants (tableau 14-2).
charges du secteur antérieur et prévient les risques de
fractures des bords libres.
Les points particuliers
Le montage des dents antéro-supérieures doit rétablir la
symétrie. Pour cela, les bords libres des incisives centrales
sont placés de 6 à 8 mm en avant de la papille incisive symé-
triquement au plan sagittal médian, l'axe inter-incisif vertical.
À ce stade, le point de symétrie rayonnante est créé14-16. Les
Le montage des dents obéit au principe édicté par S.V. canines sont ensuite mises en place, leur pointe sur la droite
Payne : « Les dents prothétiques doivent être placées là où passant par le milieu de la papille incisive (fig. 14-9), leur
les dents naturelles ont fait leur éruption14 » partie cervicale se situant à 2 mm des grandes fossettes pala-
tines. Les incisives latérales sont enfin placées dans les
espaces restants17. Les rotations, les modifications de forme,
les diastèmes permettent facilement d'obtenir la symétrie18
Au laboratoire, le montage découle de la position du bourre- (fig. 14-10).
let antérieur sur lequel le milieu inter-incisif, la ligne du sourire De même, l'utilisation d'un gabarit adapté, placé sur le
et la position des pointes canines sont gravés. La maquette plateau de montage de l'articulateur, permet d'organiser le
maxillaire est placée sur le modèle, la position du bourrelet, montage en fonction du nombre d'or, et ainsi de créer une
dans sa partie antérieure, est conservée avec une clef en sili- harmonie parfaite 19 . 20 (fig. 14-1 la, b).

Fig. 14-8a Le milieu (1), la ligne du sourire (2), la position des Fig. 14-8b Transmission des données au laboratoire. La hauteur
pointes canines (3) marqués sur le bourrelet. de la ligne du sourire est mesurée. Les repères médian et canins
sont marqués sur la clef de montage.

Fig. 14-8c Mise en place des dents antérieures par rapport à la Fig. 14-9 Position des incisives et canines par rapport à la papille
clef du bourrelet. incisive et aux grandes papilles palatines.
Fig. 14-11a Guide de montage établi selon le nombre d'or fixé
sur le plateau de montage.

Fig. 14-10 Dans le plan horizontal, malgré les malpositions créées


au niveau des incisives latérales, les incisives centrales et les
canines respectent : le point de contact inter-incisif dans le plan
sagittal médian (a) ; l'alignement des pointes canines avec la droite
passant par la papille incisive (b) ; l'égalité des dimensions inter-
canines (c).

Fig. 14-11b Montage antérieur organisé selon les séquences du


nombre d'or.

Tableau 14-2 Tableau récapitulatif de la position des dents antéro-supérieures.

d'un mouvement de latéralité, d'assurer un glissement entre le


versant distal du bord libre de la canine mandibulaire et le ver-
Contrairement aux habitudes, il est préférable de débuter le sant mésial du bord libre de la canine maxillaire (fig. 14-12).
montage par la canine mandibulaire. Cette approche permet Les incisives et canines sont ensuite placées en respectant l'aire
de parfaitement créer des relations canines de classe I et, lors de sustentation d'Ackermann (fig. 14-13a, b, c) (tableau 14-3).
Tableau 14-3 Tableau récapitulatif de la position des dents antéro-inférieures.

L'établissement d'un compromis entre la visibilité et le


recouvrement reste de la responsabilité du praticien.
Lors du montage des dents mandibulaires, leurs posi-
tions sont validées sous deux conditions :
- une absence de contact entre les dents antérieures en
occlusion de relation centrée ;
- la présence de glissements harmonieux entre les bords
libres des dents antagonistes lors des mouvements
excentrés, la tige incisive de l'articulateur restant au
contact du plateau incisif.
Ces règles de montage sont adaptées à des relations
antérieures de classe I en normocclusion. Cependant, cer-
taines conditions cliniques telles que les relations squelet-
tiques, les types morphologiques, l'âge ou le sexe, modifient
Fig. 14-12 Lors du mouvement de latéralité la pointe de la canine
les critères précédents.
mandibulaire doit glisser dans l'embrasure située entre l'incisive
En cas de classe III, les dents antérieures sont montées
latérale et la canine maxillaire.
en bout à bout, les axes des incisives mandibulaires verticaux
ou orientés en haut et en arrière.
En présence d'une classe II div. 2, les incisives centrales
maxillaires sont plus en retrait, inclinées vers l'arrière alors que
les incisives latérales sont en position vestibulaire, souvent
situées au-dessus du plan occlusal21.
Les montages en bout à bout, les arcades brachycéphales
imposent des bords libres abrasés tous au même niveau.

Fig. 14-13 Malgré leurs inclinaisons coronaires différentes, les inci-


sives (a, b) et la canine (c) mandibulaires se situent dans l'aire de
sustentation d'Ackermann.

Les points particuliers


Dans le sens vertical, la position des bords libres obéit à des
exigences biomécaniques et esthétiques. Sur le plan bio-
mécanique il est souhaitable de placer les bords libres au
niveau de la lèvre pour éviter d'augmenter ou de créer une
supraclusie antérieure, et ainsi de favoriser l'instabilité pro-
thétique. Cependant, esthétiquement, la visibilité des bords
libres des dents mandibulaires augmente avec l'âge, ce qui
impose d'augmenter le recouvrement incisif (fig. 14-14). Fig. 14-14 Visibilité des dents antérieures en fonction de l'âge.
Les cires sont ensuite « finies », des bourrelets de cire au
niveau des secteurs postérieurs des maquettes sont réglés
sur l'articulateur de manière à maintenir l'occlusion lors de Ainsi réalisés, les montages offrent toujours un aspect stéréo-
l'essai fonctionnel. typé. Il convient « d'animer », de « personnaliser », « d'adap-
ter » ceux-ci au patient.
Pour cela, selon Goldstein, chaque dent doit être indivi-
dualisée par des modifications de forme, de position, de cou-
leur, propositions complétées par le rôle joué par la gencive
artificielle25,26.

Le montage est adressé au cabinet dentaire pour validation


par le praticien et le patient22. Cette étape se déroule en trois 1 r e technique - Modification de forme
temps. C'est la technique la plus simple, qui consiste à modifier la
proportion des dents par des meulages :
- des bords libres, ce qui élargit les dents, leur donnant
ainsi un aspect plus âgé ;
Après insertion dans la cavité buccale des maquettes maxil- - des angles mésiaux et distaux, qui, arrondis, rendent la
laire puis mandibulaire, la couleur choisie est évaluée. Elle dent plus douce ou au contraire plus masculine si ces
doit être acceptée et validée par le patient et éventuellement angles sont rendus plus rectilignes ;
son entourage. L'examen porte ensuite sur l'aspect général - des faces proximales, qui déplacent les zones de
du montage des dents antérieures maxillaires et mandibu- contacts inter-proximales plus ou moins cervicalement,
laires. Les points suivants sont contrôlés23 : rendant la dent plus épaisse, plus profonde.
- Dans le plan frontal
Le respect du milieu et de l'orientation de l'axe inter-inci-
sif, le respect de la gouttière philtrale, le soutien de la 2 e technique - Modification de position
lèvre, l'organisation de la ligne du sourire, le corridor buc- Elle se base essentiellement sur 3 mouvements ou dépla-
cal. Au niveau de la mandibule, le contrôle porte sur la cements des dents. Ce sont des :
visibilité, l'orientation horizontale des bords libres. - Rotations - Elles modifient la répartition des zones
- Dans le plan sagittal brillantes et sombres des faces vestibulaires. La rotation
Les 2/3 inférieurs de la face vestibulaire des dents supé- disto-vestibulaire de l'incisive centrale oriente la face ves-
rieures doivent soutenir la lèvre sans la projeter trop en tibulaire directement vers le regard, la réflexion est maxi-
avant ni lui imposer une position trop postérieure, sans male, ce qui rend la dent visible, « présente », estompant
provoquer de surépaisseur, respectant ainsi l'angle naso- la présence de l'incisive latérale. A contrario, une rota-
génien. Au niveau de l'arcade mandibulaire, le soutien tion disto-linguale de l'incisive centrale réduit la réflexion
de la lèvre rétablit le sillon labio-mentonnier et rend la lumineuse, ce qui réduit sa présence, sa largeur, créant
limite muqueuse sèche - muqueuse humide visible. l'illusion d'une arcade fuyante.
- Inclinaisons - La modification de l'inclinaison du grand
axe des dents doit toujours être réalisée avec prudence
car cela doit rester « naturel ». En particulier, on doit évi-
Dans la mesure où les éléments précédents ont été validés, ter de donner l'illusion de proximités radiculaires qui
le contrôle se poursuit par l'examen du jeu de la langue, des seraient anatomiquement impossibles. De plus l'anato-
lèvres, vis-à-vis des dents prothétiques lors de la prononcia- mie gingivale devra s'harmoniser avec ces modifications
tion de certains phonèmes. La prononciation des « s » et des d'orientation radiculaire.
« f » permet notamment de contrôler la position des dents - Diastèmes - C'est un moyen efficace pour individualiser
vis-à-vis des lèvres supérieure et inférieure, de leurs anta- les dents antérieures. Cependant ces diastèmes ne doi-
gonistes, et l'espace phonétique24. vent pas favoriser ou créer de rétentions alimentaires. Par
Prononciation des « f et v » : les bords libres des antéro- contre, la présence d'un diastème entre les incisives cen-
supérieures entrent très légèrement en contact avec la trales doit être évitée car ce diastème est à l'origine de
lèvre inférieure au niveau de la zone de Klein. fractures.
- Prononciation des « s » : l'espace entre les bords libres Ces déplacements individuels permettent de créer une
des antéro-supérieures et inférieures est d'environ composition qui change l'aspect de l'arcade sans en chan-
1 mm. Les dents mandibulaires restant toujours en ger les dimensions réelles. Les distoversions, le recouvre-
arrière des dents maxillaires. ment des faces proximales distales par la face proximale de
L'examen se fera toujours de côté pour évaluer les rela- la dent suivante donnent un effet d'étroitesse. A contrario,
tions qui s'installent entre les bords libres maxillaire et man- les dents orientées frontalement, le recouvrement des faces
dibulaire et la lèvre inférieure, ainsi que l'ampleur du champ proximales mésiales par la face distale de la dent précédente
phonétique. tendent à élargir l'arcade.
3 e technique - Modifications de couleur 4. Mariani P. Choix de la couleur des dents artificielles chez l'édenté
total : conclusions d'une étude colorimétrique des dents natu-
Ces modifications peuvent être : relles. Actual Odonto-Stomatol, 1992; 177: 133-146.
- globales, par un choix de saturations différentes des 5. Kern BE. Anthropometric parameter of tooth selection. J
dents selon l'arcade concernée en fonction des relations Prosthet Dent, 1967 ; 17 : 431 -437.
squelettiques. Les faibles saturations favorisent la visibi- 6. La Vere AM, Marcroft KR, Smith RC, Sarka RJ. Denture tooth
lité, les fortes saturations la diminuent ; selection : an analysis of the natural maxillary central incisor to
- limitées, par la mise en place de dents présentant un the length and width of the face. Part II. J Prosthet Dent, 1992 ;
67:810-812.
degré de saturation différent par rapport à leurs collaté-
7. Sellen PN, Jagger DC, Harison A. Methods used to select artifi-
rales, en particulier, l'incisive latérale est moins saturée
cial anterior teeth for edentulous patient: a historical overview.
que ses voisines ; Int J Prosthodont, 1999; 12 : 51-58
- ponctuelles, grâce à l'apport des maquillages des dents 8. Hoffman J, Bomberg TJ, Hatch RA. The interalar width as a guide
au niveau des faces vestibulaires, des embrasures, des in denture construction. J Prosthet Dent, 1986; 55: 519-522.
bords libres, ou par modification de l'état de surface des 9. Mc Arthur DR. Determining approximate size of maxillary ante-
dents prothétiques (chapitre 26). rior artificial teeth when mandibular anterior teeth are present.
Part III : Relationship of maxillary to mandibular central incisor
widths. J Prosthet Dent, 1985 ; 53 : 540-542.
4 e technique - Le feston gingival 10. Mavroskoufis FS, Ritchie GM. Nasal width and incisive papilla as
La forme du feston gingival et son niveau accentuent la visi- guide for selection and arrangement of maxillary anterior teeth.
bilité des dents, changent la « forme » de la dent. Un collet J Prosthet Dent, 1981 ; 45 : 592-597
dénudé allonge la dent, un collet fortement effilé donne un 11. Latta GH. The relation between the width of the mouth, inter-
aspect longiligne. Le collet des dents en position vestibulaire alar width, bizygomatic arch and the interpupilary distance in
edentulous patient. J Prosthet Dent, 1991 ; 65 : 250-254.
est plus cervical que celui des dents en position linguale,
12. Mavroskoufis FS, Ritchie GM. The face form as a guide for the
dont le collet est plus proche du bord libre (fig. 14-15). Des
selection of maxillary central incisors. J Prosthet Dent, 1980;
récessions gingivales peuvent être reproduites pour simuler 43: 501-505.
le parodonte d'un patient âgé. 13. Seluk LW, Brobelt HW, Walker GL A biometrie comparaison of
Toutes ces modifications doivent répondre au principe face shape with denture tooth form. J Oral Rehabil, 1987 ; 14 :
de la « création de l'harmonie dans la diversité ». Ce respect 139-145.
passe par la prise en compte des conceptions de Lombardi 14. Payne SH. Contouring and positionning. In : Moss SJ. Esthetics.
basées sur l'équilibre issu du respect du nombre d'or et New York: Medcom Inc, 1973; 50-54.
celles de Frusch et Fisher basées sur le sexe, l'âge et la per- 15. Ehrlihch J, Gazit E. Relationship of the maxillary central incisors and
canine to the incisive papilla. J Oral Rehabil, 1975 ; 2: 309-312.
sonnalité27.
16. Christensen LV. Relationship of first primary palatine rugae to the
maxillary canines in man. J Oral Rehabil, 1988; 14: 133-139.
17. Hue O, Mariani P. Une nouvelle approche prothétique: le
concept « SPB » système bioprothétique biofonctionnel. Cah.
Prothèse, 1996;95:79-84.
18. Preti G, Pera P, Bassi F. Prediction of the shape and size of the
maxillary anterior arch in edentulous patients. J Oral Rehabil,
1986; 13: 114-125.
19. Levin EL. Dental esthetics and golden proportion. J Prosthet
Dent, 1978;40:244-252.
20. Lombardi RE. The principles of visual perception and their cli- '
nical application to denture esthetics. J Prosthet Dent, 1973;
29:358-381.
21. Agarwal A, Howlett JA, Howell PG. A biometric guide to pros-
Fig. 14-15 Incidence de la position de la dent sur la situation de
thetic tooth positionning investigated in subjects with class II
la limite gingivale :
division 2 incisor relationship. Eur J Prosthodont Res Dent,
a) dent en linguo-position limite gingivale basse ; b) dent en ves-
2000; 8: 127-129.
tibulo-position, limite gingivale plus apicale.
22. Brismann AS. Esthetics : a comparaison of dentist's and patient
concepts. JAm Dent Assoc, 1980; 100:345-349.
23. Lombardi RE. Method for classification of errors in dental esthe-
tics. J Prosthet Dent, 1973; 32: 501-513.
24. Pound ES. Let's S be your guide. J Prosthet Dent, 1977; 38:
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to techniques and materials. St Louis: Mosby, 2001. tions. J Prosthet Dent, 1955 ; 5 : 586-595.
Faisant suite au montage des dents antérieures, le montage des pathologies comme le diabète, les thérapeutiques par
des dents postérieures contribue au rétablissement des dif- irradiation, les corticothérapies doivent conduire le praticien
férentes praxies (déglutition, mastication, phonation), à la à ne pas générer, par l'intermédiaire du montage, des
préservation de l'intégrité des tissus de soutien ostéo- contraintes trop importantes sur les tissus de soutien.
muqueux, et au rétablissement de l'esthétique. De plus, le
montage doit confirmer la stabilité, la rétention prothétique, Le cycle de mastication
sans pour autant hypothéquer la sustentation. La réponse à
ces objectifs découle de l'examen clinique, du type de mon- La morphologie occlusale des dents prothétiques doit
tage choisi et de sa réalisation. s'harmoniser avec le cycle de mastication du patient (cha-
pitre 3). Les cycles de mastication « ouverts » imposent de
choisir des dents faiblement cuspidées, alors que les cycles
« fermés » permettent d'utiliser des dents plus cuspidées1.

La salive
L'examen clinique permet de déterminer les composantes
La diminution du taux de mucines, les asialies, suppriment
physiologiques et géométriques des relations inter-arcades.
ou réduisent le rôle protecteur de la salive ainsi que sa par-
ticipation à la rétention prothétique. Dans ces conditions cli-
niques, il est préférable de réduire la transmission des
contraintes occlusales sur la surface d'appui, et de res-
Elle se compose des quatre éléments suivants : le compor- treindre l'importance des composantes occlusales latérales
tement de la muqueuse, le cycle de mastication, la salive et (fig. 15-1).
le comportement neuro-musculaire.
Le comportement neuromusculaire
Le comportement de la muqueuse La précision du schéma occlusal doit être en accord avec le
Les crêtes flottantes ne permettent pas d'obtenir une occlu- degré de coordination neuromusculaire du patient. Cette
sion précise en raison de la mobilité relative de la prothèse coordination est plus ou moins altérée par des affections
vis-à-vis du tissu osseux sous-jacent. Cette mobilité conduit d'origine centrale ou locale. Ces dernières résultent d'une
à utiliser des dents prothétiques dont la morphologie occlu- occlusion erronée, qu'elle soit liée au port d'anciennes pro-
sale est peu marquée. De plus, les muqueuses fines, sans thèses mal conçues ou bien, à une occlusion naturelle per-
élasticité, en particulier chez les patients âgés, n'offrent turbée. L'anamnèse peut aussi révéler l'existence d'un
qu'une faible résistance aux forces fonctionnelles générées ancien bruxisme, qu'il soit du type centré ou excentré. Bien
par les contacts occlusaux et la friction qui s'installent entre sûr, cette affection n'est pas toujours liée à la présence de
les dents antagonistes. Enfin, les muqueuses fragilisées par contacts occlusaux instables, mais la mise en place d'une
Les relations squelettiques
L'analyse tridimensionnelle des relations inter-arcades per-
met de définir le type de relations squelettiques3,4.
Dans le plan frontal : l'inclinaison des axes intercrêtes
conditionne la stabilité prothétique. L'angulation est en
moyenne de 70 degrés par rapport au plan horizontal. Mais
certaines conditions cliniques (forte résorption, avulsions
dentaires traumatiques, fracture mandibulaire, relations des.
bases osseuses de classe III) augmentent l'angulation. Les
conséquences sont importantes sur la stabilité prothétique.
À cela, s'ajoute l'influence de la distance intercrêtes. Lorsque
celle-ci augmente, la longueur des bras de levier s'accroît,
accentuant l'instabilité prothétique (fig. 15-3).

Fig. 15-1 En fonction de l'inclinaison des versants cuspidiens, des


composantes latérales plus ou moins importantes sont induites.
Celles-ci génèrent des contraintes sur les tissus de soutien. (a) dent
cuspidée composantes latérales importantes, (b) dent plate pas de
composante latérale.

prothèse adjointe peut réveiller cette pathologie, avec les


surcharges que cela ne manquera pas d'imposer aux sur-
faces d'appui.
Par ailleurs, les maladresses liées à l'âge ou à l'état de
santé peuvent conduire à préférer des dents prothétiques
peu fragiles, pour réduire les risques de bris d'un bord libre Fig. 15-3 (a) L'angle entre l'axe intercrête et le plan occlusal est
ou autre structure dentaire ou prothétique. supérieur à 70° assurant la stabilité de la prothèse mandibulaire.
(b) L'angle est inférieur à 70°, hypothéquant la stabilité prothétique.

Elle correspond aux caractéristiques morphologiques des


crêtes et aux relations spatiales qui s'établissent entre les Dans le plan sagittal, l'analyse se réalise à trois niveaux:
arcades maxillaire et mandibulaire, - Au niveau antérieur, idéalement, l'axe rejoignant les som-
mets des crêtes se dirige en bas et en arrière avec un
angle de 10 à 15 degrés traduisant la présence d'une
La morphologie des crêtes
classe I squelettique. Par contre, si l'angle dépasse la
Les reliefs occlusaux des dents postérieures doivent s'har- valeur de 15 degrés, les relations squelettiques sont de
moniser avec le relief ou le profil vestibulo-lingual des crêtes. classe II alors qu'un angle inférieur dirigé vers l'avant tra-
Par conséquent, l'absence de reliefs conduit à utiliser des duit l'existence d'une classe III squelettique.
dents « plates » sans morphologie occlusale2 (fig. 15-2). - Au niveau médian, la première molaire maxillaire se situe
en regard du processus zygomatique, et se projette au
niveau de la partie la plus déclive de la crête mandibu-
laire. Si cette projection, vis-à-vis de l'arcade mandibu-
laire se situe distalement, cela met en évidence une rela-
tion de classe III, alors qu'une position mésiale signe une
relation de classe II div.1. '
- Au niveau postérieur, les trigones et tubérosités sont ali-
gnés. Par contre, une position distale du trigone par rap-
port à la tubérosité traduit l'existence d'une classe II
div. 1. (fig. 15-4).

Dans le plan horizontal : le but est de déterminer l'en-


droit où la projection de l'arcade maxillaire croise l'arcade
mandibulaire. En effet, c'est à ce niveau que les charges
Fig. 15-2 Similitude entre l'angulation des versants cuspidiens et occlusales doivent être concentrées. Idéalement, le croise-
l'angulation des crêtes. ment s'effectue au niveau des deuxièmes prémolaires et
Fig. 15-4 Détermination dans le plan
sagittal du type de relation squelettique :
au niveau incisif ( 1 ), molaire (2), et inter-
trigone-tubérosité (3) :
a) relations sagittales en présence d'une
classe I ;
b) relations sagittales en présence d'une
classe III;
c) relations sagittales en présence d'une
classe II div. 1 ;
d) relations sagittales en présence d'une
classe II div. 2.

premières molaires. Par contre, il n'existe aucun croisement


en présence d'une classe III, alors qu'un croisement très dis-
Le schéma occlusal correspond à l'organisation et à la répar-
tal signe la présence d'une classe II div. 1. (fig. 15-5).
tition des contacts occlusaux qui s'établissent entre les dents
Cette analyse des composantes géométriques permet
antagonistes à la fois en occlusion d'intercuspidie maximale
de définir certains types de montage.
et lors des mouvements excentrés5-7.
En prothèse adjointe complète, on peut distinguer trois
grands types de schéma (fig. 15-6) :
- l'occlusion bilatéralement équilibrée ;
- l'occlusion monoplan ;
- l'occlusion en protection canine.

L'occlusion b i l a t é r a l e m e n t équilibrée
Ce schéma occlusal se caractérise:
- En occlusion d'intercuspidie maximale par:
- une absence de contact entre les dents antérieures ;
- des contacts entre les dents postérieures impliquant
ou non l'ensemble des cuspides d'appui.
- Lors des mouvements excentrés par :
- des contacts et des glissements entre l'intégralité ou
non des versants cuspidiens des dents postérieures,
et des bords libres des dents antérieures.
Fig. 15-5 Intersection entre les projections de l'arcade maxillaire L'occlusion bilatéralement équilibrée est le schéma
(noire) sur l'arcade mandibulaire (rouge) signe le type de relation occlusal le plus souvent utilisé en prothèse adjointe com-
squelettique et surtout met en évidence la position où les charges plète8. Si, en occlusion d'intercuspidie maximale, un consen-
occlusales doivent être concentrées. sus général s'est installé pour préconiser l'absence de
contacts entre les dents antérieures, il n'en est pas de même
sur le type de relations qui doit s'établir entre les cuspides
des dents postérieures. En effet, de nombreuses variations
existent en fonction de la morphologie des dents utilisées,
et du type de relations dynamiques recherchées.

L'occlusion bilatéralement équilibrée généralisée

En fonction des données préalablement recueillies, le prati- Cette organisation occlusale se caractérise, lors des mouve-
cien doit choisir le schéma occlusal le mieux adapté aux ments excentrés, par des contacts entre l'ensemble des ver-
conditions cliniques, le type de montage et les dents pro- sants cuspidiens des dents postérieures. Deux montages
thétiques permettant de le réaliser. répondent à ces critères.
Fig. 15-6 Organigramme
des schémas occlusaux
en prothèse adjointe complète.

• Le montage de Gysi résine améliorée, ou composite, si l'indication de ce type de


Ce montage requiert l'utilisation de dents en porcelaine for- matériau est posée. Cette organisation est tout à fait adap-
tement cuspidées à 33 degrés telles que les Pilkington tée à des montages en relations de classe I molaire, mais
Turner®9. En occlusion de relation centrée, les contacts s'éta- aussi de classe II ou classe III.
blissent selon des rapports cuspides-embrasures au niveau
prémolaire et cuspides-fosses au niveau molaire. Lors des L'occlusion bilatéralement équilibrée
mouvements d'excursion, les bords libres des dents anté- non généralisée
rieures et les versants cuspidiens glissent entre eux de Deux types de montages répondent à cette appellation : le
manière harmonieuse. La caractéristique du montage de Gysi montage d'Ackermann et le montage de Strack.
est le respect de l'angulation cuspidienne. Pour cela, en fonc-
tion de l'inclinaison de la pente condylienne, l'orientation de • Le montage d'Ackermann
la table incisive varie selon des valeurs fournies par l'auteur. Ce montage présente les caractéristiques suivantes :
Ce montage est indiqué chez les patients dont le comporte- - En occlusion de relation centrée la répartition des contacts
ment neuromusculaire, la qualité des surfaces d'appui, la sta- occlusaux est identique à celle des schémas précédents.
bilité articulaire, le cycle de mastication fermé permettent - Lors des mouvements excentrés, l'occlusion bilatérale-
d'établir des relations inter-arcades précises. Il s'adapte par- ment équilibrée n'est obtenue que par l'intermédiaire
faitement aux montages en classe I et en classe III, il est plus d'un contact antérieur et de contacts entre les dernières
difficile de l'utiliser en présence d'une classe II div. 1 ou div. 2. molaires, les dents intermédiaires n'entrent pas en
contact créant un vide d'articulé (fig. 15-7a, b).
• Le montage de Hanau
Ce vide répond à un objectif essentiel : maintenir l'oc-
Les relations occlusales sont identiques à celle du montage clusion bilatéralement équilibrée malgré la présence du bol
de Gysi (en intercuspidie maximale contacts au niveau pos- alimentaire. Les dents seront du type anatomique ou semi-
térieur avec des relations cuspides-fosses au niveau molaire anatomique en porcelaine ou résine selon les conditions cli-
et cuspides-embrasures au niveau prémolaire)10. Par contre, niques.
l'équilibre résulte de l'harmonie qui s'établit entre les cinq Ce type de montage est particulièrement indiqué lorsque
composants du Quint de Hanau : la pente condylienne, la le guide antérieur est marqué. Cette supraclusie résulte sou-
pente cuspidienne, la pente incisive, le plan d'occlusion et vent d'un réglage phonétique des dents antérieures et/ou
la courbe de compensation. Ce type de montage est indi- de la présence d'une classe II div. 211.
qué chez les patients dont le comportement neuromuscu-
laire, la qualité des surfaces d'appui, la stabilité articulaire • Le montage de Strack
sont inférieurs à ceux requis pour le montage de Gysi. Les Ce montage, organisé selon le principe de la sphère, requiert
dents employées seront du type anatomique ou semi-ana- des dents semi-anatomiques, moyennement cuspidées,
tomique. Elles seront en porcelaine ou éventuellement en 20 degrés environ6. En occlusion de relation centrée et en
Fig. 15-7 Montage d'Ackermann L'occlusion bilatéralement équilibrée
avec impact lingual ou « occlusion lingualée »
Ce schéma a été établi et proposé en 1927 par Gysi. Il fut
ensuite repris en Europe par Gerber, puis aux États-Unis par
Pound, Murrell et, plus récemment, par Massad et
Lauciello12-15.
Cette organisation occlusale se caractérise :
En occlusion d'intercuspidie maximale par:
- une absence de contact entre les dents antérieures ;
- des contacts occlusaux uniquement entre les cuspides
palatines des dents postéro-supérieures et les zones de
réception antagonistes. Cette organisation contribue à
stabiliser la prothèse en centralisant la charge occlusale
et en supprimant les couples de renversement;
- une absence de contact entre les cuspides vestibulaires
Fig. 15-7a Relation cuspidienne en occlusion d'intercuspidie mandibulaires et les fosses de réception antagonistes.
maximale. Lors des mouvements excentrés :
- par un glissement harmonieux des pointes cuspidiennes
palatines dans les zones de réception mandibulaires.
De petites variations existent cependant entre les diffé-
rentes conceptions de ce type de schéma occlusal.
Le montage de Gerber utilise les dents Condyloform®,
dents spécialement conçues pour ce montage. Elles sont
basées sur le principe pilon-mortier et surtout Gerber assi-
mile l'organisation des relations occlusales à l'articulation
temporo-mandibulaire. Les pointes cuspidiennes correspon-
dent au condyle et les fosses occlusales à la fosse glénoïde.
Ce montage doit assurer « l'équilibre de mastication auto-
nome et sectoriel ». Cet équilibre est obtenu par un mon-
tage statique dans le cadre du couloir prothétique, et par un
montage adapté à la crête mandibulaire, ce qui concentre la
charge occlusale au niveau de la partie la plus déclive de la
Fig. 15-7b Lors d'un mouvement de propulsion les dents anté-
rieures et postérieures entrent en contact, mais entre ces contacts crête et stabilise la prothèse mandibulaire.
s'installe le vide d'articulé. Pour Pound et Murrell, l'organisation occlusale est réali-
sée en utilisant des dents fortement cuspidées (33 degrés)
à l'arcade maxillaire associées à des dents peu cuspidées
(20 degrés ou moins) à l'arcade mandibulaire, les pointes
cuspidiennes palatines entrant en contact avec les fosses des
propulsion, la répartition et l'organisation des contacts occlu-
molaires et les fossettes marginales distales des prémolaires.
saux sont comparables à celles d'un montage de Hanau.
Plus récemment, Massad, Lauciello ont participé à l'éla-
C'est en latéralité que ce montage présente des spécifi-
boration des dents en résine DCL, spécialement conçues pour
cités :
ce type d'organisation dent ortholingual® (Ivoclar-Vivadent).
- Du côté travaillant, les contacts s'installent uniquement
Ce type de montage est particulièrement indiqué chez
au niveau prémolaire entre les versants internes des cus-
les patients dont la coordination neuro-musculaire est insuf-
pides vestibulaires supérieures et les versants externes
fisante, la surface d'appui non stable, le cycle de mastication
des cuspides mandibulaires. Du côté lingual des pré-
ouvert et chez les patients dont le contrôle post-prothétique
molaires et au niveau molaire, il n'existe aucun contact
est difficile à assurer. Cette organisation occlusale contribue
occlusal.
à la rééducation du comportement neuro-musculaire, car il
- Du côté non travaillant, les versants internes des cus- stabilise progressivement les relations occlusales. De plus, il
pides palatines glissent le long des versants internes des est particulièrement adapté à l'établissement des montages
cuspides vestibulaires mandibulaires, des molaires et en classe II div. 1.
éventuellement des prémolaires.
En raison de l'utilisation de dents faiblement cuspidées,
ce montage est tout particulièrement indiqué pour les
L'occlusion monoplan
patients dont le comportement neuromusculaire, la qualité Ce type de montage créé par De Van en 1954 sous l'ap-
de la surface d'appui, le cycle de mastication relativement pellation « occlusion neutre » ou « neutrocentrique » requiert
ouvert n'offrent pas une parfaite précision. des dents plates sans aucun relief cuspidien. Cette organi-
sation occlusale se caractérise en occlusion d'intercuspidie Les dimensions
maximale par 17,19 :
Elles seront toujours déterminées après que les modèles
- une absence de contact entre les dents antérieures ; aient été montés en articulateur, la dimension verticale d'oc-
- des contacts entre les prémolaires et les premières clusion, le niveau et l'orientation du plan occlusal fixés. Le
molaires antagonistes, mais les deuxièmes molaires ne choix porte sur la longueur mésio-distale, la hauteur occluso-
sont pas en contact. cervicale, la largeur vestibulo-linguale.
Lors des mouvements excentrés, les dents postérieures
ne sont pas forcément en contact. La longueur mésio-distale
- Les dents antérieures sont placées de manière à rétablir
l'esthétique. Lors du montage aucun recouvrement incisif Elle est inscrite sur les cartes de formes propres à chaque
n'est établi, par contre, dans le sens antéro-postérieur le sur- fabricant et correspond à la distance séparant la face distale
plomb dépend du type de relations squelettiques du patient, de la canine de la partie antérieure de la tubérosité ou du
et de la tonicité de la lèvre. trigone. En effet, la deuxième molaire mandibulaire ne doit
- Au niveau postérieur, les dents mandibulaires sont situées jamais empiéter sur ces structures anatomiques sous peine
sur la crête. Les deux prémolaires et la première molaire sont d'entraîner une instabilité importante de la prothèse mandi-
placées au niveau du plan occlusal et entrent en contact avec bulaire, de supprimer le joint linguo-masséterin, et souvent
les prémolaires et la molaire antagoniste. Par contre, la de provoquer des morsures de la joue 22 (fig. 15-8).
deuxième molaire maxillaire se situe à environ 0,5 mm au-
dessus du plan occlusal pour éviter tout contact avec la dent
antagoniste et ainsi supprimer tout risque de bascule de la
prothèse mandibulaire. En effet, elles n'ont aucun rôle occlu-
sal, et ne servent qu'à occuper les espaces maxillaires et
mandibulaires situés derrière la première molaire. Ce type
d'organisation occlusale concentre parfaitement les forces
occlusales, stabilisant ainsi la prothèse.
Selon les concepteurs, en raison de l'absence de reliefs
occlusaux, le montage monoplan permet facilement des
montages en classe III, mais surtout en classe II div. 1.
Cependant, ce type de dents présente de nombreux incon- Fig. 15-8 La longueur mésio-distale des dents postérieures cor-
vénients, au premier rang desquels une mauvaise esthétique. respond à la distance séparant la face distale de la canine du pied
du trigone rétro-molaire.
L'occlusion en protection canine
Cette organisation occlusale se caractérise en occlusion d'in-
tercuspidie maximale par: La hauteur occluso-cervicale
- de légers contacts entre les dents antérieures ;
Elle dépend de l'esthétique et de la distance intercrêtes.
- des contacts entre les dents postérieures impliquant l'en-
Esthétiquement, la face vestibulaire des prémolaires maxil-
semble des cuspides d'appui selon un rapport cuspide-
laires et éventuellement des molaires doit être en totale har-
fosse.
monie avec celle des canines maxillaires de manière à assu-
Lors des mouvements excentrés, seules les dents anté-
rer la continuité de la ligne du sourire et de la ligne des
rieures entrent en contact, supprimant ainsi tout contact pos-
collets. L'espace intercrêtes, souvent important, autorise la
térieur.
mise en place de dents porcelaine. Par contre, la réduction
Bien que proposé et défendu par des auteurs comme
de cet espace impose de choisir des dents résine dont la
P. Thomas, V. Lucia, K. Gausch, ce schéma occlusal issu de
partie cervicale peut être réduite par meulage.
la prothèse scellée ne semble pas adapté à la prothèse com-
plète 20,21 . En effet, aucune étude n'a pu démontrer la supé-
La largeur vestibulo-linguale
riorité de la protection canine sur l'occlusion bilatéralement
équilibrée pour la préservation de l'intégrité tissulaire. Elle devrait être plus étroite que celle des dents naturelles,
de manière à réduire les forces transmises aux tissus sous-
jacents23. De plus, les dents plus étroites, surtout à la man-
dibule, augmentent le volume dévolu à la langue et favori-
Le choix des dents postérieures porte sur les quatre para-
sent le libre jeu des muscles périphériques et jugaux, per-
mètres suivants :
mettant la réalisation des surfaces polies stabilisatrices.
La couleur
Elle doit être en harmonie avec celle préalablement choisie Les matériaux
pour les dents antérieures, en particulier, avec la teinte des Les matériaux des dents prothétiques doivent présenter les
canines maxillaires. qualités suivantes:
- être biocompatibles en résistant à l'usure, aux colora- Le DCL® d'Ivoclar: le matériau Double Cross Linked est
tions, en étant non irritants pour les tissus muqueux, en obtenu grâce à une réticulation commune de polymères pré-
favorisant l'efficacité masticatrice et en assurant une réticulés avec la matrice. Il n'y a aucune charge organique. La
bonne jonction avec la résine de la base prothétique; dent prothétique est entièrement composée de ce matériau.
- être adaptables en permettant des corrections occlu- L'INPEN® De Trey: les résines acryliques sont du poly-
sales, des meulages éventuels lors du montage. méthacrylate de méthyl, avec des copolymères qui assurent
Actuellement, trois matériaux sont à notre disposition : la une haute réticulation. La résistance découle d'une poly-
porcelaine, les résines et leurs dérivés les composites et mérisation où des liaisons non seulement s'installent entre
enfin les alliages. les chaînes primaires mais aussi entre les chaînes secon-
daires. La structure tridimensionnelle offre au matériau une
La porcelaine rigidité beaucoup plus importante. Par contre, il n'y a aucune
C'est un matériau idéal qui doit toujours être employé en charge secondaire.
raison de sa résistance à l'usure, à l'abrasion, assurant ainsi
la pérennité des montages. Son seul inconvénient réside Les alliages
dans son manque de résistance aux chocs. On reproche Dans certaines circonstances, en particulier en présence de
aussi à ce matériau de faire du bruit lors de la mastication montages hétérogènes, résine-porcelaine, ou bien en pré-
ou de la phonation. Mais cela est dû plus à l'instabilité de la sence d'une prothèse unimaxillaire, pour prévenir l'usure de
prothèse ou à des erreurs d'occlusion qu'au matériau lui- la résine on est amené soit à créer au niveau des faces occlu-
même. Cependant, en cas d'espace libre réduit (classe III), sales des stops en amalgame ou en composite, soit de recou-
certains auteurs conseillent de remplacer la dernière molaire vrir les faces occlusales des dents résine à l'aide d'éléments
porcelaine par une dent résine. prothétiques métalliques coulés. La résistance à l'usure de
ces différents matériaux répond aux souhaits de pérennité,
Les résines de tolérance tissulaire, et surtout autorise une parfaite adap-
Depuis leur apparition vers 1940, les fabricants ont pallié tation à la morphologie occlusale de la dent antagoniste.
leur défaut essentiel, l'usure, par l'inclusion de charges au
sein du réseau de polymérisation ou par une modification
Les formes
des procédés de polymérisation.
L'Isosit® d'Ivoclar : c'est un matériau composite associant Les dents postérieures présentent quatre types de morpho-
une résine de Bowen modifiée avec une charge de dioxyde logie occlusale :
de silicium pyrolytique. La polymérisation de ce complexe
augmente la résistance à l'abrasion de 240 °/o par rapport Les dents anatomiques
aux résines classiques. L'insensibilité aux différents solvants Leur morphologie est comparable à celle des dents natu-
et l'état de surface offrent une très bonne résistance aux relles jeunes. L'inclinaison des versants cuspidiens varie de
colorations. Cependant, la structure des dents Isosit est hété- 30 à 33 degrés. La forme des versants, les sillons principaux,
rogène, la dent se compose d'une partie centrale et cervi- les sillons secondaires assurent la section et la dilacération
cale en résine partiellement recouverte d'une couche des aliments. Les avantages de ce type de dents sont de
d'Isosit. Par conséquent, les adaptations et les corrections permettre l'obtention d'une occlusion bilatéralement équili-
occlusales sont susceptibles de transpercer la couche exté- brée, de restaurer l'esthétique et de favoriser une parfaite
rieure, laissant le polyméthyl méthacrylate apparaître et per- mastication. Cependant, des inconvénients existent tels que
mettant à l'usure de se développer (fig. 15-9). des surcharges des tissus sous-jacents en présence de
contacts prématurés, des déplacements antérieurs des
bases prothétiques en cas de résorption. Dans ce cas, une
malocclusion s'installe avec la prothèse antagoniste, entraî-
nant un inconfort, une irritation des tissus de soutien et
potentiellement une accentuation de la résorption. Dans
cette catégorie on retrouve les dents Vita-Cuspiform®,
Postaris®, Pilkington Tuner®, Myerson®.

Les dents semi-anatomiques


La morphologie occlusale est plus estompée, l'inclinaison des
versants cuspidiens varie entre 15 et 20 degrés. Ce type de
dents semble établir un juste compromis entre l'apport esthé-
tique, l'efficacité des dents cuspidées et la réduction des
Fig. 15-9 La section d'une dent en Isosit met en évidence la répar- mouvements de bascule qu'imposent les dents fortement
tition des couches de résine renforcée (Isosit a) et de résine de cuspidées. On trouve dans cette catégorie les Orthotyp®,
type PMMA (b). Ortholingual® d'Ivoclar, les dents eXecutiv® De Trey.
Les dents « plates » La position vestibulo-linguale des dents affecte directe-
ment la répartition des charges, les dents montées trop à
Il y a disparition presque totale des reliefs occlusaux comme
l'extérieur des crêtes favorisent l'instabilité prothétique27. En
les Synoform® (Vita), les Orthoplane® (Ivoclar-Vivadent), les
relation centrée, la répartition des charges occlusales est
dents de Sears® (Myerson). Ce type de dents évite les
identique entre l'occlusion classique et l'occlusion lingualée,
contacts déflecteurs, en particulier dans le sens antéro-pos-
l'ensemble des charges occlusales se projette à l'intérieur
térieur, et semble tout particulièrement indiqué pour des
des crêtes au niveau des prémolaires et molaires 28,29 . Par
patients dont la précision de l'occlusion est réduite. Par
contre en latéralité, l'occlusion lingualée réduit les pressions
contre, leur aspect esthétique est souvent discutable.
transmises sur les tissus à la fois du côté travaillant et du côté
non travaillant. La comparaison directe de ces deux schémas
Les dents non anatomiques
est en faveur de l'occlusion lingualée, qui est préférée dans
La morphologie ne reproduit en rien la morphologie occlu- 67 % des cas par le patient en raison du confort, de l'es-
sale des dents naturelles. Les reliefs cuspidiens disparaissent thétique et des capacités masticatoires30.
ou sont remplacés par des éléments propres au concepteur
de la dent. Cette disparition permet de créer des reliefs cor- Tableau 15-2 Tableau synoptique reliant les composantes anato-
miques et géométriques du patient au schéma occlusal.2
respondant à des conceptions très spécifiques comme les
dents Condyloform de Gerber.

En prothèse adjointe complète, le choix d'un montage


découle d'une part de la prise en compte des différentes com-
posantes physiologiques et d'autre part des caractéristiques
anatomiques et géométriques du patient. L'ensemble de ces
éléments sont résumés dans les tableaux 15-1 et 15-2.

Le choix du schéma occlusal et des caractéristiques des


dents qui s'y rattachent est un paramètre capital dans le réta-
blissement des fonctions, la stabilisation de la prothèse et la
préservation de l'intégrité tissulaire.

Le schéma occlusal
L'évaluation de son incidence sur la fonction masticatoire et
le confort est très délicate24-26.

Tableau 15-1 Tableau récapitulatif reliant les composantes physiologiques avec le type de montage, le matériau et l'anatomie des dents
prothétiques.
Les dents prothétiques incidence sur la résorption, les dents plates s'associant à une
résorption plus importante que les dents cuspidées39. Par
Deux éléments participent à la pérennité des relations occlu-
contre, le poids des dents prothétiques porcelaine ou résine
sales et à la transmission des forces sur la surface d'appui :
est faible et la différence pondérale entre ces deux maté-
La résistance à l'usure riaux est mineure 40. Ce paramètre n'a que peu d'incidence
sur les pressions transmises sur les tissus de soutien.
La pérennité des relations intermaxillaires (DVO et relation
centrée) impose que les surfaces occlusales présentent une
parfaite résistance à l'usure. S'il est évident et démontré que
l'association de dents porcelaine opposées à d'autres dents
porcelaine répond totalement à cette exigence, il n'en est
pas de même pour les autres matériaux. Les dents résine
Quel que soit le type de montage choisi, en dehors du mon-
de la première génération possédaient une très mauvaise
tage des dents antéro-supérieures, le montage des dents
résistance à l'abrasion et à l'usure. Les nouveaux matériaux antéro-inférieures et des dents postérieures doit respecter
DCL®, Isosit®, INPEN® sont de 40 à 60 % plus résistants à les 2 aires ainsi définies:
l'abrasion que les résines conventionnelles31.
- L'aire de sustentation d'Ackermann
Cependant, les études comparatives entre ces différents
Elle se situe à la mandibule entre le sommet de la crête
matériaux sont relativement contradictoires sauf sur un point,
et la partie antérieure la plus déclive de la zone de
l'ensemble de ces matériaux s'use plus que la porcelaine32-37. réflexion muqueuse vestibulaire. Les incisives et canines
Les montages mixtes porcelaine-résine furent proposés mandibulaires doivent se placer dans cette zone. Il existe
en leur temps par Sears et Myerson, car, selon eux, les dents cependant des exceptions qui dépendent de la tonicité
résine ne s'usaient pas. Cependant, les études plus récentes de l'orbiculaire inférieur et du type de lèvre (fig. 9-12b).
de Harrison n'aboutissent pas aux mêmes conclusions. Dans
- L'aire de Pound - axe de crêtes
le couple résine-porcelaine, ces matériaux ne s'usent prati-
La notion d'axe des crêtes est toujours difficile à analy-
quement pas, la perte sur une année ne dépassant pas
ser. En effet, dès 1954 Pound a parfaitement souligné le
0,025 mm, alors que pour les dents résine les pertes varient manque de fiabilité de ce repère. Il préfère déterminer
entre 0,2 et 0,3 mm pendant la même période. une aire à l'intérieure de laquelle les dents mandibulaires
doivent être placées. Cette aire présente la forme d'un
Les forces transmises triangle dont le sommet se situe au niveau de la face
Les dents résine transmettent moins de forces que les dents mésiale de la canine mandibulaire et la base entre un
porcelaine, que ce soit à l'impact ou à la pression37. À cela point situé à la face linguale du trigone rétromolaire et
s'ajoute l'incidence du frottement entre les faces occlusales l'autre sur la face vestibulaire (fig. 15-10).
des dents antagonistes38. En présence d'eau ou de salive, Par ailleurs, le principe du montage des dents sur les
la friction entre deux dents résine est plus faible qu'avec un crêtes dans le but d'assurer la stabilisation de la prothèse et
couple porcelaine, mais c'est le couple hétérogène porce- prévenir la résorption présente de nombreux inconvénients.
laine-résine qui offre le plus faible coefficient de friction. En particulier, au niveau du maxillaire cela provoque la réduc-
Les dents cuspidées concentrent les forces alors que les tion du volume dévolu au libre jeu de la langue, ce qui n'as-
dents plates répartissent la charge sur l'ensemble de la sur- sure pas le soutien des joues et ne rétablit pas l'esthé-
face d'appui. La morphologie occlusale semble avoir une tique41,42.

Fig. 15-10 L'aire de Pound correspond au triangle compris entre la face interne et externe du trigone rétromolaire et le bord mésial du
bord libre de la canine.
un angle de 6° environ. La deuxième molaire poursuit l'orien-
tation de la première molaire, aucune de ses cuspides
n'entre en contact avec le bourrelet. Lorsque ces quatre
Parmi les montages faisant appel à l'occlusion bilatéralement dents sont montées, il convient de contrôler la rectitude du
équilibrée, trois techniques seront décrites, le montage de sillon intercuspidien ainsi que la symétrie des crêtes margi-
Hanau, le montage de Strack et le montage lingualé. nales des dents collatérales.

Le montage de Hanau Les dents mandibulaires


Il se réalise en deux temps, le montage des dents antérieures Elles sont mises en place selon les séquences suivantes : pre-
puis des dents postérieures. Celui des dents antérieures mière molaire, deuxième prémolaire, deuxième molaire, pre-
répond aux objectifs esthétiques et phonétiques précé- mière prémolaire. Les relations occlusales établies au niveau
demment exposés, celui des dents postérieures obéit à des des molaires sont du type cuspide-fosse. La cuspide centro-
objectifs esthétiques mais surtout biomécaniques. vestibulaire entre en contact avec la fosse centrale de la pre-
mière molaire maxillaire et simultanément la cuspide mésio-
Les dents maxillaires palatine de la molaire maxillaire entre en contact avec la fosse
Les prémolaires et molaires maxillaires sont mises en place antagoniste. Au niveau des prémolaires les contacts occlusaux
soit sur le plateau de montage, soit sur le bourrelet d'occlu- sont du type cuspide-embrasure, les pointes cuspidiennes pri-
sion mandibulaire. Dans le plan sagittal, les deux prémolaires maires entrant en contact avec les versants externes des crêtes
sont perpendiculaires au plan d'occlusion, les cuspides ves- marginales antagonistes. Après la mise en place de chaque
tibulaires et linguales en contact avec celui-ci. La première dent, les déplacements excentrés sont simulés par l'articula-
molaire supérieure est mise en place. Seule la cuspide teur de manière à s'assurer que les versants cuspidiens
mésio-palatine entre en contact avec le bourrelet, les deux concernés glissent parfaitement entre eux alors que la tige inci-
cuspides vestibulaires s'élèvent au-dessus du bourrelet avec sive demeure au contact du plateau incisif (fig. 15-11 a, b, c, d).

Fig. 15-11 Montage de Hanau (cas de classe II div. 1) (Réalisation S. Nithard).

Fig. 15-11a Occlusion d'intercuspidie maximale. Fig. 15-11b Contact en propulsion.

Fig. 15-11c Contact en latéralité côté travaillant. Fîg. 15-11d Contact en latéralité côté non travaillant.
Fig. 15-12 Montage de Strack.

Fig. 1512a Vue vestibulaire des contacts occlusaux en occlusion Fig. 15-12b Vue linguale des contacts occlusaux en occlusion de
de relation centrée. relation centrée.

Fig. 15-12c Vue vestibulaire des contacts occlusaux en propulsion. Fig. 15-12d Vue linguale des contacts occlusaux en propulsion.

Le montage de Hanau permet de réaliser des montages rieure de la calotte fournissent de parfaits repères pour assu-
en classe II ou classe III sans difficulté, dans la mesure où rer la symétrie du montage.
de petites corrections occlusales sont pratiquées pour amé- La calotte de montage est déposée, les dents posté-
liorer les relations occlusales. rieures maxillaires sont montées de manière à entrer en
contact avec les dents antagonistes selon des relations cus-
Le montage de Strack pides-embrasures au niveau prémolaire et cuspides-fosses
au niveau molaire (fig. 15-12a, b, c, d).
Le montage des dents antéro-supérieures effectué, l'esthé-
tique validée, le laboratoire termine l'ensemble du montage. Enfin, les incisives mandibulaires sont montées dans l'es-
Le montage débute par les canines mandibulaires en s'as- pace compris entre les deux canines en adaptant les incli-
naisons des faces vestibulaires à l'orientation de la lèvre infé-
surant du passage parfait de la pointe canine lors du mou-
rieure.
vement de latéralité (fig. 14-12).
Le montage se poursuit par les dents postérieures man-
dibulaires. Le modèle maxillaire est alors déposé et remplacé Montage et occlusion à impact lingual
par la calotte de montage dont la partie antérieure se place Dans un premier temps les dents antéro-supérieures sont
sur les pointes des canines mandibulaires. Les dents posté- montées selon les règles précédemment développées, puis
rieures sont placées de manière linéaire. Les sommets des les dents postérieures sont mises en place.
cuspides vestibulaires des prémolaires et molaires entrent La caractéristique du montage de Gerber réside dans la
en contact avec la face inférieure de la calotte, les pointes mise en place des surfaces de mastication. Aux repères clas-
cuspidiennes linguales de la deuxième prémolaire et des siques de l'aire de Pound s'ajoute la détermination de la par-
deux molaires sont au contact de la calotte, créant les tie la plus déclive de la crête. Pour cela, le profil antéro-pos-
courbes frontale et sagittale. Les repères gravés à la face infé- térieur de la crête est tracé sur les côtés du modèle, puis la
Fig. 15-13 Montage de Gerber.

Fig. 15-13a Aspect vestibulaire du montage de Gerber mettant Fig. 15-13b Contacts occlusaux uniquement sur les cuspides
en évidence l'absence de contacts entre les cuspides vestibulaires palatines et les fosses et fossettes antagonistes.
mandibulaires et les zones de réception antagonistes.

partie la plus basse est repérée. C'est à ce niveau que doit Cette approche d'un montage de relation occlusale une
se situer la première molaire mandibulaire. dent pour une dent a été aussi proposée par Murrel et Pound
Le montage s'effectue par couple de dents pour obtenir par l'organisation d'un montage réalisé avec des dents à
des relations cuspides-fosses. Il débute par la première pré- 33 degrés maxillaires et 20 degrés mandibulaires et une
molaire maxillaire, puis la première prémolaire mandibulaire relation cuspides-fosses.
- la cuspide vestibulaire de la première prémolaire mandi-
bulaire entrant en contact avec la fossette mésiale de la pré-
Le m o n t a g e ortholingual
molaire antagoniste. Le couple des deuxièmes prémolaires
est ensuite mis en place, mais seule la cuspide palatine entre Les dents utilisées sont les dents Ortholingual®. Les
en contact avec la dent mandibulaire au niveau de sa fos- séquences sont identiques à celles employées pour le mon-
sette mésiale. Dans le plan frontal, les pointes cuspidiennes tage de Strack. Après avoir monté les dents antérieures, les
vestibulaires et linguales se situent au même niveau. Les dents mandibulaires sont mises en place de sorte que l'en-
couples des premières et deuxièmes molaires obéissent aux semble des cuspides des dents mandibulaires entrent en
mêmes règles de montage. Par contre, au niveau maxillaire contact avec la calotte. Dans un deuxième temps, les dents
la cuspide mésio-palatine est plus basse. maxillaires sont montées en s'assurant que seules les cus-
Le montage des dents postérieures réalisé, les dents pides palatines des prémolaires entrent en contact avec les
antéro-inférieures sont mises en place, en ayant soin de res- fossettes distales des prémolaires mandibulaires et les cus-
pecter la béance antérieure et de laisser le libre jeu à l'orbi- pides palatines des molaires supérieures avec les fosses
culaire des lèvres (fig. 15-13a, b). centrales des antagonistes43,44, (fig. 15-14a, b, c, d).

Fig. 15-14 Montage « Ortholingual ».

Fig. 15-14a Principe du montage en occlusion lingualée : le Fig. 15-14b Montage des dents mandibulaires: cuspides en contact
contact entre les cuspides palatines et les fossettes antagonistes. avec la calotte.
Fig. 15-14c Mise en évidence des contacts entre les pointes cus- Fig. 15-14d Organisation occlusale linguale des rapports occlusaux.
pidiennes et la calotte à l'aide de papier à articuler.

Fig. 15-T4e Contacts occlusaux lors des mouvements de latéra-


lité côté non travaillant.

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Le montage terminé, le laboratoire « finit » les cires. Cette
étape répond à l'élaboration des extrados prothétiques ou
surfaces polies, qui comportent deux éléments: Les volumes prothétiques (extrados) participent aux fonc-
- les volumes de la prothèse, au contact de la langue, des tions:
joues et des lèvres ; - esthétiques
- la forme générale de ces volumes, et de manière plus En assurant un soutien harmonieux aux tissus labiaux et
spécifique celle de la gencive cervicale. jugaux, de manière à, si possible, estomper voire effacer
les sillons naso-géniens, restaurer l'harmonie des lèvres
et du sourire, de la gouttière philtrale, de l'angle naso-
génien, et enfin à retrouver la visibilité de la zone humide
des lèvres.
- phonétiques
Par leurs volumes, leurs formes, leurs profils et leurs reliefs,
En fournissant à la langue au niveau de la voûte palatine
les surfaces polies contribuent à répondre de manière
des appuis sûrs pour l'articulation des phonèmes.
directe, et indirecte, aux exigences biomécaniques et fonc-
- masticatoires
tionnelles de la future restauration prothétique1.
En contribuant à la cinématique du bol alimentaire, sans
pour autant entraîner la rétention et la stagnation des
débris alimentaires.
Sur le plan biomécanique, les surfaces polies:
- accroissent la rétention :
• en augmentant la surface de contact entre la salive et
la base prothétique ;
• en assurant la pérennité du joint vestibulaire ; Quatre procédés permettent de réaliser les extrados prothé-
• en facilitant l'action passive des muscles qui s'appli- tiques qui répondent aux exigences précédemment exposées.
quent sur l'extrados et qui favorisent le maintien de la
prothèse sur les surfaces d'appui.
- stabilisent la prothèse :
• en libérant le jeu des muscles déstabilisateurs et en Dès 1933, Wilfrid Fisch insistait sur le rôle des surfaces polies2.
favorisant le jeu des muscles stabilisateurs; Pour cet auteur, la conception des volumes et des formes
• en assurant un équilibre des pressions entre les com- générales des extrados prothétiques répond à deux principes :
posantes musculaires labiales, jugales, linguales. - Les surfaces polies doivent être modelées en une série
- fournissent, enfin, une résistance mécanique suffisante de pans inclinés, de manière à ce que la pression des
aux bases prothétiques maxillaire et mandibulaire pour muscles plaque la prothèse sur la surface d'appui, assu-
éviter tout risque de fracture. rant ainsi la stabilisation et la rétention (fig. 16-1).
RÉTENTION

Elle se base sur la mise en place des dents prothétiques par


rapport à des repères anatomiques, de manière à replacer
les dents dans leur position initiale et compenser la résorp-
tion 3 . 4 .
Au niveau de l'arcade supérieure, le repère correspond
à la ligne, ou cicatrice des extractions, qui se situe légère-
Pressions Pressions ment à l'intérieur du sommet des crêtes. Les dents prothé-
musculaires musculaires tiques sont positionnées, les volumes prothétiques créés en
fonction de cette ligne selon les données de Watt
(tableau 16-1) (fig. 16-2). Il est important de noter que cette
conception du montage et du volume des extrados assure
un meilleur équilibre entre les pressions jugales et labiales
que celles issues des conceptions de Fisch5 (fig. 16-3).

RÉTENTION Tableau 18-1 Volumes prothétiques selon la conception biomé-


trique. (D'après Watt et Mc Cregor)
Fig. 16-1 Grâce aux plans inclinés, les pressions des muscles péri-
phériques appliquent les prothèses sur leurs surfaces d'appui res-
pectives.

- Les pressions labio-jugales doivent être équilibrées par


la pression linguale. En conséquence, les dents ne sont
pas systématiquement placées sur la crête mais, au point
d'équilibre entre les pressions vestibulaires et les pres-
sions linguales. Cet équilibre doit aussi s'établir lors des
différentes praxies, en particulier lors de la mastication.

Fig. 16-2
1) Distance (L) séparant la limite cervi-
cale linguale (c) de la partie vestibulaire
du procès alvéolaire avec des dents
saines.
2) La position de la cicatrice permet d'ob-
jectiver l'importance de la résorption.
3) Le volume de la cire, déterminé par
rapport à la cicatrice, compense la résorp-
tion, la distance (L) demeure constante.

Fig. 16-3 Histogrammes comparant les


pressions vestibulaire et linguale exer-
cées lors de la prononciation des sons
en « M » sur l'extrados type « biomé-
trique » ou « Fisch ».
Cette technique consiste à enregistrer le jeu des organes
paraprothétiques par rapport aux dents prothétiques6. Au
stade de l'essai fonctionnel, le laboratoire adresse au prati-
cien des maquettes où l'ensemble du montage est réalisé
sur une base en cire dure, ou mieux sur une base en résine,
bases sur lesquelles les dents sont fixées à l'aide de cire col-
lante ou de résine.
Après contrôle de la dimension verticale et de la relation
centrée, les extrados vestibulaires sont enduits de matériaux
qui vont enregistrer le jeu des muscles vis-à-vis de la posi-
tion des dents prothétiques. Les matériaux utilisés sont de
deux types: les résines à prise retardée, ou des cires plas-
tiques à température buccale, type Adheseal® (fig. 16-4). Fig. 16-4 Enregistrement des extrados prothétiques à l'aide
Après enregistrement du jeu fonctionnel, les maquettes sont d'Adheseal®.
mises en moufle en ayant soin de ne pas modifier les formes
et volumes obtenus.

Au niveau de la prothèse maxillaire, du côté palatin, l'épais-


seur de la base prothétique doit assurer une résistance suffi-
Cette technique est sans conteste celle qui est le plus sou- sante à la flexion, soit en moyenne 1,0 mm dans la partie cen-
vent appliquée par les laboratoires. Elle résulte de la com- trale. Les profils frontal et sagittal de la base doivent être en
binaison des données, des procédés précédents et d'une harmonie avec ceux de la voûte palatine du patient. En parti-
certaine « habitude ». culier, les forts tori, les fissures centrales seront partiellement
Au niveau de la prothèse mandibulaire, du côté lingual reproduits sans pour autant trop augmenter les volumes ou
dans la région incisivo-canine la prothèse doit présenter une entraîner des risques de fractures. Dans le sens sagittal, chez
forme concave qui permet à la langue de stabiliser la pro- les patients dentés la région rétro-incisive est souvent volu-
thèse. Dans les régions latérales, le profil est plus ou moins mineuse, saillante alors que les bases prothétiques sont plus
concave, mais sans créer de surplomb où la langue puisse souvent, et à tort, concaves et manquent de volume.
se placer, qui déstabiliserait la prothèse. Du côté vestibulaire, Du côté vestibulaire, les profils sont moins complexes à
les profils doivent permettre d'exploiter le jeu des muscles l'exception de la région paratubérositaire, qui doit présenter
labiaux et jugaux (fig. 16-5). une concavité (fig. 16-6).

Fig. 16-5 Caractéristiques des profils vestibulaires et linguaux Fîg. 16-6 Prothèse maxillaire :
d'une prothèse mandibulaire : a) légère convexité rétro-incisive, profil vestibulaire rectiligne ou
a) niveau incisif concavité vestibulaire et linguale ; b) niveau canin légèrement convexe ;
très légère convexité vestibulaire, concavité linguale ; c) niveau b) légère convexité palatine, légère convexité vestibulaire (bosse
première molaire très légère convexité vestibulaire, très légère canine) ;
concavité linguale ; d) deuxième molaire concavité vestibulaire et c) concavité palatine, légère convexité vestibulaire ;
légère concavité linguale ; e) niveau trigone concavité vestibulaire d) concavité palatine et vestibulaire.
et très légère concavité linguale.
trie à la fois radiante et horizontale. Le contour gingival, en
particulier au niveau des incisives des hémi-arcades droite
et gauche, contribue à la genèse de cette symétrie.
Dans la région cervicale, la fausse gencive des dents pro-
thétiques correspond aux gencives dites marginale et papil-
laire7. La gencive marginale entoure le collet des dents for-
mant la ligne de finition entre les dents et la base
La ligne des collets dessinée par la gencive marginale ren-
prothétique, quant à la gencive papillaire elle se situe dans
force l'harmonie de la ligne du sourire. Les collets des inci-
les embrasures interproximales.
sives centrales, latérales et des canines tendent notamment
En denture naturelle, avec l'âge et/ou la maladie paro-
à former une ligne parallèle à la lèvre supérieure (fig. 13-1,
dontale, des modifications de la morphologie de ces deux
fig. 16-9).
gencives apparaissent, modifications qui pourront être plus
ou moins reproduites par la fausse gencive (fig. 16-7, 16-8).
Mais à la reproduction de ces données morphologiques
s'ajoutent, lors du modelage de la fausse gencive, les trois
composantes de l'esthétique :
- la symétrie ;
- la perspective ;
- la forme des dents.

Fig. 16-9 Ligne du sourire et feston gingival.

Au niveau des dents postérieures, le feston gingival suit


une ligne parallèle aux pointes cuspidiennes. Il participe à
l'effet de perspective généré par l'orientation des faces ves-
tibulaires des dents postérieures. Cependant, avec le vieillis-
sement, l'apparition de récessions gingivales peut faire dis-
paraître cette harmonie gingivale.

Fig. 16-7 Gencive marginale et gencive papillaire en denture natu-


relle : apparition avec l'âge des récessions gingivales.
Selon le tracé du contour gingival, l'impression esthétique
obtenue avec la même forme de dent peut varier de façon
importante : le niveau plus ou moins apical du contour gin-
gival allonge ou raccourcit une dent; une papille large ou
étroite, pour une même situation apicale de la gencive,
modifie la forme de la dent (transformant l'aspect esthé-
tique).
Lorsque des dénudations radiculaires sont reproduites
au niveau de la fausse gencive, cela entraîne un « allonge-
ment » des dents prothétiques; par contre, la création d'es-
paces interdentaires dépourvus de papilles engendre des
problèmes d'hygiène importants.

Fig. 16-8 Sourire gingival et importance de la gencive dans l'es-


thétique. Réalisées au laboratoire, ces finitions se déroulent en 6 étapes.

1 r e étape - Contrôle des épaisseurs


Comme au niveau de la voûte palatine, le contrôle de l'épais-
Le premier paramètre de l'esthétique est la symétrie. Dans seur de la cire au niveau de la partie « occlusale » des tubé-
la mesure où le choix du milieu est défini, l'ensemble des rosités et des trigones est important; l'épaisseur de cire doit
caractéristiques de la fausse gencive doit créer cette symé- être de l'ordre de 1,0 mm.
2 e é t a p e - Adjonction de cire Tableau 16-2 Situation de la ligne de finition gingivale.
et homogénéisation
De la cire est coulée sur l'ensemble des collets des dents,
puis homogénéiser la cire avec une spatule chaude pour évi-
ter toute inclusion de bulles d'air (fig. 16-10).

4 e é t a p e - Sculpture de la fausse gencive


- Du côté palatin ou lingual, aucun relief particulier n'est
recherché. Le volume et la limite de la gencive margi-
nale ne doivent pas interférer avec la langue. Au niveau
du maxillaire, une solution de continuité doit exister entre
la voûte palatine et le collet des dents prothétiques
(fig. 16-12a, b) ; à la mandibule, la gencive marginale
Fig. 16-10 Adjonction d'une épaisseur régulière de cire pour
sculpter l'anatomie cervicale.

3 e é t a p e - Festonnage gingival
La ligne générale des collets est tracée sur la cire, puis le fes-
ton gingival est soigneusement créé à l'aide d'une spatule
coupante mais sans reproduire de sulcus, ou sillon gingivo-
dentaire, pour éviter dans le futur l'accumulation de la plaque
dentaire et ainsi faciliter l'hygiène. De plus, une étanchéité
cervicale maximale est recherchée et dans tous les cas la
ligne de finition gingivale doit être située en deçà du pied
de la dent (fig. 16-11) (tableau 16-2).

Fig. 16-12a Prothèse maxillaire - Côté palatin, solution de conti-


nuité entre la voûte palatine et la ligne de finition des collets dans
la région postérieure.

Fig. 16-11 Le festonnage gingival est réalisé à l'aide du côté pointu


de la spatule à cire, orientée par rapport à la face de la dent selon Fig. 16-12b Prothèse maxillaire - Détail : embrasure et situation
un angle de 135° environ. de la ligne de finition gingivale au niveau prémolaire.
5 e é t a p e - M o d e l a g e des zones postérieures
- La cire qui recouvre la tubérosité doit respecter l'épais-
seur du joint vestibulaire, présenter un profil convexe
sauf sur sa partie vestibulaire où une concavité est
requise pour permettre le déplacement du processus
coronoïde lors du mouvement de latéralité.
- La cire qui recouvre les trigones présente vestibulaire-
ment un profil concave pour assurer le passage des fibres
antérieures du masséter; de même, lingualement un
profil concave tient compte de la convexité de la base
de la langue.

6 e é t a p e - Finitions
Fîg. 16-12c Concavité linguale rétro-incisive permettant à la
langue de d'étaler. Elles consistent à lisser l'ensemble de la surface des cires
par un bref passage à la flamme à l'aide d'une torche, sans
faire fondre la cire, ni supprimer les reliefs créés particuliè-
respecte le profil concave caractéristique du berceau lin- rement quand ils sont discrets. On fait briller la cire à l'aide
gual (fig. 16-5, 16-12c). d'une meulette en mousse à petite vitesse.
- Du côté vestibulaire, les reliefs radiculaires des dents sont Enfin, un piqueté dit en peau d'orange peut être ajouté
dessinés dans la cire jusqu'aux premières molaires. Leurs au niveau de la gencive attachée à l'aide d'une brosse à dent.
volumes sont plus ou moins prononcés selon les cas cli-
niques, mais la bosse canine est toujours la plus pro-
éminente.
- Les papilles interdentaires ont un profil entièrement
convexe ne reproduisant pas la légère concavité (dépres-
sion) centrale observée sur une gencive naturelle
(fig. 16-13).
1. Hue 0, Berteretche MV. Les extrados prothétiques en prothèse
adjointe totale. Rôles et réalisations cliniques. Actual Odonto-
Stomatol, 1992; 177: 179-201.
2. Fisch EW. Principles of full denture prosthesis. London : John
Bale Sons & Danielsson Ltd, 1933.
3. Watt DM. Tooth positions on complete dentures. J Dent, 1978 ;
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4. Nomura S, Nomura A, Ishioka K. La largeur des crêtes maxil-
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5. Neill DJ. The denture space. In : Lefkowitz W. Proceedings of the
second international prosthodontics congress. St Louis : Mosby,
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6. Hue 0. Les surfaces polies stabilisatrices en prothèse adjointe
partielle. Quest Odonto-Stomat, 1978 ; 25: 323-334.
7. Postaire M, Duclos-Grenet Y, Raux D. L'esthétique de la fausse
Fig. 16-13 Aspect convexe de la papille interproximale. gencive en prothèse adjointe. Cah Prothèse, 1988 ; 62 :92-100.
Le montage des dents terminé, la finition des cires réalisée,
les maquettes des prothèses sont adressées au cabinet den-
taire pour une séance aussi capitale que négligée, celle de
l'essai fonctionnel. Elle a pour objectif d'évaluer une dernière
fois avant la polymérisation, les différentes caractéristiques
biomécaniques, fonctionnelles, occlusales, esthétiques de la
future prothèse. Cette séquence clinique de contrôle se
déroule en deux temps : le premier en l'absence du patient, Fig. 17-1a Harmonie entre la voûte palatine et l'extrados de la
maquette.
le deuxième en présence du patient.

Le praticien contrôle les caractéristiques des maquettes


maxillaire et mandibulaire en fonction des critères de finition Fig. 17-1 b Dysharmonie entre la voûte palatine et la maquette.
précédemment exposés.

La maquette maxillaire
L'épaisseur et la forme de la voûte palatine sont examinées.
L'épaisseur ne doit pas dépasser 1,5 mm dans sa partie cen-
trale, et surtout la forme de l'extrados doit être en harmonie
avec celle de la voûte palatine (fig. 17-1a, b).
Au niveau des collets palatins, pour des raisons phoné-
tiques, la cire doit procurer un appui satisfaisant à la langue
en évitant, par exemple, les sillons qui descendent de
manière abrupte entre les embrasures, favorisant des fuites
d'air. Au niveau vestibulaire, l'examen porte sur la finition des
collets, leurs formes, leurs niveaux, leur alignement, le res-
pect par le laboratoire des informations et des demandes Fig. 17-2 Manque de symétrie des collets au niveau des deux inci-
spécifiques du praticien (fig. 17-2). sives centrales.
La forme, le profil de l'extrados vestibulaire, sont contrô-
lés - qu'ils aient été réalisés de manière conventionnelle ou
bien individualisés. Enfin, la longueur du joint postérieur et
l'épaisseur du joint vestibulaire doivent respecter les limites
du coffrage.

La maquette mandibulaire
Les critères de contrôle sont comparables à ceux appliqués
pour la prothèse maxillaire.
Du côté vestibulaire, le profil des extrados doit respecter:
- Au niveau antérieur, le sillon labio-mentonnier permet-
tant le libre jeu de l'orbiculaire et des commissures. Fig. 17-4 Évaluation visuelle des contacts occlusaux du côté lingual.
- Au niveau latéral, le jeu du modiolus, tout en assurant
l'herméticité entre les vestibules jugaux et labiaux.
- Au niveau latéral postérieur, le jeu des insertions du buc-
cinateur et postérieurement des insertions basses du
masséter.
Du côté lingual, l'extrados présente:
- Une concavité antérieure qui respecte le joint sublingual
et offre un berceau à la langue.
- Latéralement, une limite des collets ne favorisant pas la
rétention des aliments.
L'ensemble des bords doit respecter les limites du cof-
frage. Dans le cas contraire, ils sont immédiatement corrigés
avant tout autre contrôle (fig. 17-3).

Fig. 17-5a Contrôle de l'occlusion à l'aide d'un « Shimstock ».

Fig. 17-3 Les limites de la maquette ne respectent pas les limites


du coffrage (c : surépaisseur).

L'occlusion Fig. 17-5b Contrôle de l'occlusion à l'aide d'un matériau siliconé.


Les maquettes sont placées sur l'articulateur, le praticien véri-
fie l'absence de contact entre les dents antérieures, au
niveau des dents postérieures la qualité des contacts occlu-
saux établis entre les cuspides d'appui et leurs zones de
réception antagonistes. Cette vérification, le plus souvent
visuelle, doit s'adresser aux côtés vestibulaire et, surtout, lin-
gual (fig. 17-4). Elle est complétée en testant les contacts
occlusaux à l'aide de papier à articulé (Shimstock®) inter-
posé entre les arcades ou objectivée par la mise en place
d'un silicone fluide entre les arcades (fig. 17-5a, b, c). La sta-
bilité occlusale recherchée est contrôlée en appliquant à la Fig. 17-5c Résultat, un seul contact au niveau de la cupside MP
main les deux maquettes entre-elles. de la 1 re molaire.
L'examen de l'occlusion se porte ensuite sur le respect absence de contact entraîne la rupture du joint labial, donc
du schéma occlusal choisi, le plus souvent l'occlusion bila- la diminution de la rétention prothétique et la réduction du
téralement équilibrée: présence des contacts côtés tra- volume lingual.
vaillant et non travaillant lors des mouvements de latéralités, Au niveau latéral, le contact entre la face vestibulaire de
contacts antérieurs et postérieurs en propulsion, respect du la première prémolaire et la commissure doit être parfait,
guide antérieur dans la mesure où celui-ci a été programmé. pour éviter toute communication entre le vestibule jugal et
le vestibule labial. Cependant, ce contact ne doit pas être
trop intense sous peine de provoquer une instabilité de la
maquette mandibulaire. Dans les secteurs latéraux molaires,
les faces vestibulaires des dents mandibulaires entrent en
contact avec la face interne de la joue (fig. 17-7).
Les maquettes sont désinfectées à l'aide d'un spray iodo- Distalement, les insertions basses du masséter doivent
fore, rincées puis immergées dans un bol d'eau froide addi- recouvrir la maquette au niveau du trigone rétromolaire. Du
tionnée de bain de bouche. Les contrôles s'adressent suc- côté lingual, la langue doit se placer spontanément en posi-
cessivement à chacune des maquettes et concernent tion antérieure. Si cette position n'est pas obtenue, cela
l'occlusion, l'esthétique et la phonétique. découle soit d'une mauvaise habitude liée au port de l'an-
cienne prothèse, habitude qu'il convient de corriger, soit d'un
montage trop lingual, de dents trop larges dans le sens ves-
tibulo-lingual.

La maquette mandibulaire
Insérée en premier dans la cavité buccale, l'analyse de la
maquette porte sur les points suivants:

Le plan d'occlusion et le couloir prothétique


L'évaluation de l'orientation et du niveau du plan occlusal est
capitale. Les critères, par ailleurs détaillés, sont à la fois esthé-
tiques, position des bords libres par rapport à la lèvre, etfonc-
tionnels, situation vis-à-vis de la langue, du buccinateur, du
trigone et de la commissure labiale.
À ce stade du contrôle, toute anomalie du plan occlusal
doit être corrigée, et, en conséquence, cela annihile l'en-
semble des phases suivantes.
Dans un deuxième temps, au contrôle du plan occlusal Fig. 17-7 Contact harmonieux entre la face vestibulaire des dents
s'ajoute celui consacré au respect du couloir prothétique. mandibulaires et la face interne de la lèvre.
Dans le secteur antéro-inférieur, la lèvre doit entrer en
contact avec les faces vestibulaires des dents mandibulaires.
Si un quelconque jour apparaît entre leurs faces vestibu- La stabilité de la maquette
laires et la face interne de la lèvre, cela signale une mau-
Le praticien évalue successivement la stabilité de la
vaise position des dents, que celles-ci soient globalement
maquette de la prothèse mandibulaire au repos, lors des
trop en arrière ou bien qu'une ou plusieurs malpositions
déplacements musculaires et lors de l'application de pres-
s'opposent à cette intimité de contact (fig. 17-6). Cette
sions fonctionnelles.
- La stabilité au repos : la prothèse est insérée, le praticien
recherche et analyse les éventuels déplacements de la
maquette selon les critères exposés au tableau 17-1.
- La stabilité et les mouvements: le praticien recherche
d'éventuels déplacements de la prothèse provoqués lors
des mouvements fonctionnels par des bords trop longs,
trop épais, des extrados mal conçus, trop volumineux
(tableau 17-2).
- La stabilité et les pressions fonctionnelles : de manière à
tester l'incidence des pressions occlusales sur la stabilité
de la maquette, le praticien exerce des pressions digi-
tales au niveau des secteurs exposés au tableau 17-3.
Fig. 17-6 Absence de contact entre la lèvre et les dents suppri- Ces tests terminés, la prothèse mandibulaire est retirée
mant le joint labial. de la cavité buccale puis replacée sur le modèle de travail.
Tableau 17-1 Étiologies de l'instabilité au repos de la maquette mandibulaire.

Tableau 17-2 Étiologies de l'instabilité de la maquette mandibulaire lors des mouvements fonctionnels.
Tableau 17-3 Étiologies de l'instabilité de la maquette mandibulaire lors de l'application de pressions fonctionnelles.

La maquette maxillaire Tableau 17-4 Étiologies de l'instabilité au repos de la maquette


maxillaire.
Les séquences d'examen sont comparables à celles de la
maquette mandibulaire.

Le plan d'occlusion et le couloir prothétique


Le premier contrôle porte sur l'orientation sagittale et frontale
du plan occlusal. Le parallélisme avec la ligne bipupillaire doit
notamment être parfaitement respecté. Toute erreur ou
imprécision implique, comme précédemment, de recom-
mencer le montage. Puis, le praticien évalue avec attention le
contact qui s'établit entre l'extrados prothétique, la face interne
des joues et des lèvres. Celles-ci doivent épouser la face ves-
tibulaire des dents, de manière à assurer ou parfaire le joint
salivaire et mettre en jeu la rétention extéroceptive. Ce contact
doit s'établir sans pression ou contrainte.

La stabilité de la maquette
Le praticien évalue à nouveau la stabilité de la maquette au
repos lors des déplacements musculaires et lors de l'appli-
cation de pressions fonctionnelles. Les critères d'analyse,
comparables à ceux de la maquette mandibulaire, sont
regroupés dans les tableaux 17-4, 17-5 et 17-6.
Tableau 17-5 Étiologies de l'instabilité de la maquette maxillaire lors des mouvements fonctionnels.

Le réglage du joint postérieur


La position du joint postérieur préalablement déterminée Ces contrôles sont sous la responsabilité du praticien mais
lors de la phase de la prise d'empreinte doit être confirmée la validation dépend du patient et de son entourage. Dans
lors de l'essai fonctionnel. Les ligaments ptérygo-mandibu- un premiertemps, le praticien contrôle le montage des dents
laires sont à nouveau marqués avec un crayon dermogra- antérieures. L'examen s'effectue tout d'abord au repos. Il
phique. Le patient souffle par le nez alors que le praticien lui porte sur la restauration et le respect de la gouttière philtrale,
pince les narines. Cette manœuvre provoque l'abaissement le soutien des lèvres, des commissures, la diminution ou dis-
maximal du voile dont la position est soulignée par le crayon. parition des plis naso-géniens. Ceci peut conduire le prati-
Dans un deuxième temps, lorsque le patient prononce « a », cien à diminuer l'épaisseur de la cire dans la région anté-
la ligne de vibration postérieure est à son tour marquée. La rieure pour éviter le gonflement de la lèvre ou au contraire
maquette est replacée dans la cavité buccale, le patient à ajouter de la cire au niveau des extrados molaires pour
souffle par le nez narines obstruées. Les traits du crayon der- mieux soutenir les commissures. Pour cela, il est facile d'uti-
mographique se marquent sur l'intrados de la maquette qui liser des cires molles du type orthodontique qui sont pla-
est replacée sur le modèle de travail. cées sur les extrados prothétiques et modelées sans diffi-
culté (fig. 17-8),
Puis, le patient est invité à sourire de manière à exami-
ner les points suivants :
Tableau 17-6 Étiologies de l'instabilité de la maquette maxillaire lors de l'application de pressions fonctionnelles.

Le milieu et le visage
Même si le choix du milieu a déjà été contrôlé lors du mon-
tage des dents antérieures, ce repère peut ne plus coïncider
avec le milieu choisi. Les raisons en sont les suivantes : une
erreur lors de la détermination initiale, un déplacement for-
tuit des incisives lors des différentes phases de laboratoire
et surtout une mauvaise appréciation ou réalisation des
volumes prothétiques latéraux. Une asymétrie de soutien
des commissures entraîne un déplacement de la gouttière
philtrale, donc du milieu.

L'axe général des incisives


Une divergence entre l'axe des incisives et l'axe du visage
provoque un aspect disgracieux. Il convient de vérifier si
Fig. 17-8 Adjonction de cire molle type orthodontique sur l'extra- seules les incisives centrales sont inclinées, auquel cas les
dos prothétique pour modifier le soutien des tissus et améliorer corrections sont simples, ou bien si cette inclinaison est liée
l'esthétique. à une mauvaise orientation du plan occlusal.
L'harmonie entre la ligne des collets
et la lèvre supérieure
Après avoir parfaitement analysé les relations occlusales sur
Le sourire permet de vérifier si la ligne des collets est cor- articulateur, pris des repères visuels tels que le milieu, l'im-
rectement placée vis-à-vis de la lèvre, ligne qui assure la ligne portance de la béance antérieure, les maquettes, refroidies
de fuite distale. La présence du corridor buccal est aussi pour éviter toute déformation, sont insérées dans la cavité
indispensable. buccale. Le contrôle s'effectue en trois temps.

L'harmonie entre les bords libres Le plan d'occlusion et la dimension verticale


et la lèvre inférieure
Les deux maquettes sont insérées, le niveau et les orienta-
Lors du sourire, l'harmonie entre les bords libres des dents tions frontales et sagittales du plan occlusal sont contrôlés
antéro-supérieures et la lèvre inférieure est capitale. Cette har- par rapport aux conditions cliniques. Les dimensions verti-
monie est souvent perturbée, dans le plan vertical, par une cales d'occlusion, de repos et l'espace libre sont vérifiés en
position trop basse des canines. Cette dernière éventualité fonction des critères précédemment exposés.
inverse la ligne du sourire, entraînant un aspect fort disgracieux.

L'occlusion de relation centrée


L'harmonie dentaire
La mandibule est guidée en relation centrée, le praticien
L'attention se porte plus spécifiquement sur chaque dent, sa observe et recherche tout éventuel déplacement entre les
teinte, sa position, la présence d'usure éventuelle des bords maquettes maxillaire et mandibulaire. Ces déplacements
libres, autant d'éléments qui participent à l'animation du sont provoqués par des contacts occlusaux ou bien par des
montage en fonction des facteurs sexe, âge, personnalité. interférences entre les cires au niveau des tubérosités ou tri-
Cette animation doit être validée par le patient et éventuel- gones.
lement par un membre de son entourage. Si une imprécision est découverte, un « Tench » est enre-
À ce stade, il convient de se remémorer le rôle et l'inci- gistré. Pour cela, deux petites bandes de cire rose sont col-
dence de l'autorité du praticien sur l'acceptation future de lées sur les faces occlusales des prémolaires et molaires
l'esthétique choisie - donc de ne pas imposer son propre mandibulaires. L'utilisation de cire rose est préférable à la cire
jugement, mais plutôt de respecter et répondre aux souhaits Aluwax qui risque de polluer par sa couleur l'aspect esthé-
exprimés ou non par le patient (fig. 14-1). tique de la finition de cires. L'épaisseur de cire doit être mini-
Ces contrôles devraient être réalisés si possible en pré- male pour éviter de trop modifier la dimension verticale d'oc-
sence d'une tierce personne pour valider le montage réalisé. clusion.
Immédiatement après, la maquette est placée dans la
cavité buccale, maintenue par les index du praticien, puis la
mandibule est guidée en relation centrée. Les pointes cus-
Les troubles de la phonation que le patient peut ressentir pidiennes des dents maxillaires entrent en contact avec la
sont dus à la morphologie de la voûte palatine, aux versants cire mandibulaire sans aucune contrainte. La maquette est
palatins « alvéolaires », aux faces linguales ainsi qu'à la posi- retirée de la cavité buccale, les indentations examinées
tion des dents. (fig. 17-9a, b).
La maquette, donc la future prothèse, doit permettre aux
éléments mobiles, en particulier la langue, de retrouver ses
appuis « naturels ». Au niveau des incisives maxillaires, com-
posantes statiques, les appuis linguaux facilitent ou permet-
tent la prononciation des sons fricatifs du type « s » (ten-
dresse, caresse etc.). Si les dents sont trop en avant la langue
doit s'étirer, se propulser pour que sa pointe puisse entrer
en contact avec ces dernières. A contrario, si les dents
antéro-supérieures sont montées trop en arrière, la langue
vient heurter les dents antérieures. Elles créent une véritable
digue contre l'écoulement de l'air, qui passe sur les côtés, et
s'accompagne d'un zézaiement.
Par ailleurs les sons comme « s » permettent de contrôler
l'espace libre en vérifiant si les bords libres des incisives man-
dibulaires se situent à 1 mm des bords libres antagonistes.
Le rôle des molaires est plus complexe. La position trop
linguale des secteurs postérieurs accentue les contacts alors
qu'une position trop externe réduit ces mêmes contacts. La Fig. 17-9a De la cire rose est coulée en faible épaisseur au niveau
gêne ressentie est alors plus délicate à analyser. des faces occlusales des dents postérieures.
- Le report du joint postérieur sur le modèle - Le praticien
doit lui-même marquer et creuser le joint postérieur sur
le modèle. Pour cela, les lignes de vibration antérieures
et postérieures transférées, par l'intermédiaire de la
maquette, sur le modèle sont soulignées à l'aide d'un
crayon noir. En fonction du type de voile le modèle est
creusé par le praticien (tableau 10-3).
- Le choix de la teinte de base de la résine - La couleur
de la résine de base, ses caractéristiques veinées ou non
sont déterminées en fonction du choix du praticien, des
exigences esthétiques du patient (fig. 17-10).

Fig. 17-9b Enregistrement de l'occlusion de relation centrée


(Articulé de Tench).

Les critères de validation de l'enregistrement sont iden-


tiques à ceux précédemment décrits pour l'enregistrement
de la relation centrée.

Lorsque les différentes étapes de l'essai fonctionnel sont


validées, tant par le patient que par le praticien, ce dernier
doit transmettre les informations suivantes au laboratoire : Fig. 17-10 Choix de la teinte de base de la résine.
Après l'essai fonctionnel, le laboratoire procède à la phase
de polymérisation de la prothèse. Ce temps de laboratoire,
longtemps considéré comme la simple métamorphose ou
transmutation de la cire en résine, résulte, en réalité, de
séquences de laboratoire précises où la technicité l'emporte
sur l'habitude, le respect des matériaux sur des mélanges
hasardeux.
Cette phase de laboratoire se déroule en 5 temps:
conservation de l'occlusion, choix des matériaux, mise en
moufle, finition et envoi au cabinet dentaire.

Fig. 18-1a Clef de montage sur l'articulateur FAG.

Avant la mise en moufle, une clef de montage est préparée.


Elle permet d'enregistrer la position de la maquette maxil-
laire sur l'articulateur. Cette clé est soit en plâtre, soit en sili-
cone de laboratoire solidarisée à un socle en plâtre. La tige
incisive de l'articulateur étant fixée à la graduation 0 mm,
une plaque de montage ou un dispositif adapté est fixé sur
la branche inférieure de l'articulateur, puis, la branche supé-
rieure est rabattue. Les dents prothétiques entrent légère-
ment en contact avec le plâtre ou du silicone dur. Ce contact
doit se limiter aux bords libres et aux pointes cuspidiennes.
Les marques doivent être symétriques, peu profondes,
nettes, ne débordant pas sur la face vestibulaire des dents
prothétiques, conditions essentielles pour assurer la remise
en place précise de la prothèse maxillaire après polyméri-
sation (fig. 18-1 a, b). Fig. 18-1 b Détails de la clef de remise en place de la prothèse.
La polymérisation résulte d'une réaction chimique com-
plexe durant laquelle les macromolécules ou polymères sont
formés à partir d'un grand nombre de molécules nommées
monomère. Cette réaction chimique est initiée par un apport
calorique pour les résines thermopolymérisables ou par un
Les matériaux utilisés pour réaliser les bases prothétiques apport chimique pour les résines chémopolymérisables. La
doivent présenter les propriétés suivantes1,2 : réaction entre le monomère et le polymère est plus ou
- Biologiques - Ils doivent être inodores, non toxiques, moins complète, laissant une partie de monomère libre dont
non irritants vis-à-vis des tissus buccaux, être totalement le taux ne doit pas dépasser 0,4 %. Cette fraction semble
insolubles dans la salive ou tout autre liquide. indépendante de la technique de polymérisation3.
- Physiques - Ils doivent résister aux mouvements de
Les résines thermopolymérisables
flexion, aux forces de mastication, aux impacts occlusaux,
à l'usure, offrir une stabilité dimensionnelle, que la base Dans un premier temps, le mélange poudre-liquide est pré-
prothétique soit située dans ou hors la cavité buccale. paré selon les proportions définies par le fabricant, celles-ci
- Esthétiques - Ils doivent permettre de retrouver l'appa- étant le plus souvent volumétriques. Les deux composants
rence des tissus buccaux grâce à leur translucidité et ou sont versés dans un récipient propre, mélangés soigneuse-
leur transparence. Le matériau doit pouvoir être teinté, ment, puis le récipient est fermé. Pendant ce temps, la réac-
pigmenté, conserver sa teinte et son aspect après la poly- tion entre le liquide et la poudre se déroule en trois stades
mérisation, et surtout résister aux colorants. qui se traduisent successivement par un état sableux, filan-
- Techniques - Le matériau ne doit produire ni fumées, ni dreux, enfin pâteux4. C'est à ce stade que la résine peut être
poussières toxiques durant sa manipulation, il doit être utilisée. La durée de l'ensemble de ces phases doit être infé-
facile à utiliser, à modeler, à traiter, à polir et surtout per- rieure à 20 minutes. Elle dépend des caractéristiques intrin-
mettre des réparations faciles. Il doit être insensible à sèques des matériaux employés, du rapport poudre/liquide
tous les facteurs de contamination tels que sang, salive, et de la température du mélange1 (fig. 18-2).
oxygène.
Les résines chémopolymérisables
On les appelle aussi résines autopolymérisables. La poly-
mérisation de ce type de résine est le plus souvent due à la
Les deux grandes familles de produits, les résines polymé- présence dans le monomère d'une amine tertiaire comme
thacrylate de méthyle et les résines diuréthanes, répondent une diméthyl-para-toluidine. Celle-ci provoque une décom-
aux critères souhaités. position du peroxyde de benzoyle qui active le mélange. Si
ce type de résine est essentiellement utilisé dans les tech-
niques de réparation, une forme toute particulière est des-
Les résines méthacryliques tinée à la réalisation de bases prothétiques définitives
Elles sont issues du mélange entre un liquide, le méthacry- (Perform, Whaledent®). Le mélange poudre-liquide est très
late de méthyle, et une poudre composée de polymétha- liquide, ce qui lui permet de couler dans le moufle puis d'être
crylate de méthyle (PMMA) et de colorants. polymérisé sous pression, à chaud (45°).

Fig. 18-2 Diagramme de la rhéolo-


gie du mélange polymère-monomère
du départ du mélange à la phase ter-
minale.
Les résines diuréthanes
Depuis quelques années, les résines dites photopolyméri-
sables ont été proposées pour, entre autres, réaliser des bases
prothétiques de prothèse adjointe. Ce matériau composite
présente une base de diméthacrylate d'uréthane, une charge
de silice et un monomère à haut poids moléculaire. Les billes
de résine acrylique sont incluses comme charge organique,
la lumière sert d'activateur tandis que la camphroquinone sert
d'initiateur. La polymérisation résulte de l'action de la lumière.
La plaque de résine diuréthane est appliquée sur le modèle
puis polymérisée dans une enceinte close à l'aide d'une
lumière de longueur d'onde de 400 à 500 nm. Les dents sont
ensuite mises en place avec adjonction d'une résine qui est
polymérisée. Ce procédé ne nécessite pas de mise en moufle Fig. 18-3a Élimination de la partie centrale de la maquette au
avec son cortège d'étapes, ce qui, pour les concepteurs de niveau de la voûte palatine.
cette technique, est un gain de temps.

Au nombre de quatre, ils portent sur: le joint postérieur, la


décharge au niveau de la voûte palatine, la fixation des
maquettes et les reliefs palatins.

Le joint postérieur
Le laboratoire doit contrôler si le joint postérieur a été pré- Fig. 18-3b Préforme en cire mise en place au niveau de la partie
paré, délimité par le praticien ou non. Pour ces deux der- centrale de la maquette.
nières éventualités, le laboratoire creuse le modèle en sui-
vant les indications fournies ou en évaluant la forme à
donner en fonction du type de voile. Cependant, cette der- liser l'empreinte des reliefs palatins à l'aide d'une feuille
nière proposition devrait être refusée par le laboratoire. d'étain brunie sur la voûte palatine, enfin d'utiliser des pré-
formes en cire6.
La décharge au niveau de la voûte palatine Pour cela, la cire en regard de la voûte est découpée puis
remplacée par la préforme choisie. Ce procédé présente
Trop souvent des décharges sont placées au niveau de la
l'avantage d'assurer une épaisseur homogène à la partie
partie centrale de la voûte palatine. Elles sont totalement
palatine de la maquette maxillaire (fig. 18-3a, b).
inutiles. D'une part, elles sont placées de manière arbitraire,
leur disposition, leur forme, leur étendue ne sont jamais
adaptées à la position des zones non dépressibles. D'autre
part, leur rôle dans la rétention est négatif puisque, en réa-
lité, la rétention diminue quand leur surface ou leur volume Parmi les différentes techniques proposées, trois seront
augmentent5. décrites : la technique pressée et polymérisation en milieu
humide, la technique injectée et polymérisation en milieu
humide, la technique injectée suivie d'une polymérisation
La fixation des maquettes avec micro-ondes.
Les maquettes sont scellées sur leur modèle avec une petite
spatule chaude enduite de cire qui est déposée à la péri- La résine pressée
phérie de la maquette.
C'est la technique la plus classique et la plus utilisée. Dans
un premier temps, les modèles de travail sont insérés dans
Les reliefs palatins leurs moufles respectifs afin de contrôler leur possibilité de
Pour reproduire les reliefs de la voûte palatine, il est possible mise en place et d'orientation. Le modèle maxillaire doit être
d'utiliser des préformes, en caoutchouc, en silicone, de réa- orienté pour que les incisives soient verticales. Cette pré-
caution diminue les risques de fractures de leurs bords libres
lors de l'ouverture du moufle.
Le moufle est isolé avec de l'huile de vaseline et le
modèle immergé dans de l'eau de soude. Préparé à consis-
tance crémeuse, le plâtre (plâtre de classe II) est placé au
fond de la partie moufle, le modèle et la maquette y sont
enfoncés jusqu'à ce que le bord du modèle affleure le plâtre.
Lorsque le plâtre atteint sa phase pâteuse tous les excédents
sont éliminés, les aspérités gommées, en particulier au
niveau du bord du moufle.
La contrepartie et son couvercle sont vaselinés puis la
surface de plâtre du moufle est isolée. Du plâtre, si possible
spatulé sous vide pour réduire les porosités et améliorer les
qualités de résistance à la compression, est préparé. Tous
Fig. 18-5 Le filet d'eau élimine les excès d'isolant pour éviter toute
les collets des dents, les embrasures sont soigneusement
surépaisseur.
comblés de plâtre pour éviter la formation de bulles, puis la
contrepartie est terminée.
Pour éviter le contact direct entre le plâtre et l'extrados protocole est aussi proposé : lorsque le moufle est ouvert la
prothétique, celui-ci peut être recouvert d'une faible épais- partie cervicale des dents prothétiques est sablée (alumine
seur de silicone de laboratoire (Flexistone®, Zeta-Labor®) à 50 µm) puis mordancée pendant 30 secondes avant d'être
puis la contrepartie est garnie de plâtre. Cette technique faci- rincée. Enfin un agent de liaison est badigeonné puis poly-
lite grandement la phase de finition (fig. 18-4). mérisé7. Dans le même but, les dents en « résine » sont non
seulement nettoyées mais leurs parties cervicales sont très
légèrement grattées ou sablées pour éliminer la partie lisse.
Il est par contre déconseillé de réaliser des rétentions secon-
daires telles que des trous, des fentes dans la partie cervicale
des dents prothétiques car cela n'améliore pas la rétention
mais en réalité fragilise la jonction avec la résine de base8.
La préparation de la résine s'effectue en un ou deux
temps. Le premier temps dépend des exigences esthétiques
du patient.

Fig. 18-4 Maquette enduite de Flexistone®.

Après cristallisation du plâtre, le moufle est réchauffé


pour ramollir la cire mais sans qu'elle atteigne son point de
liquéfaction. Après ouverture, la cire est soigneusement éli-
minée, les dents retirées (si possible), des encoches sont
taillées dans le plâtre autour du modèle pour faciliter l'éva- Fig. 18-6 Aspect de la partie cervicale d'une dent non sablée (a)
cuation de la résine lors de la pressée. Les deux parties du et sablée (b).
moufle et les dents prothétiques sont soigneusement net-
toyées à l'aide d'eau bouillante, l'apport d'un agent déter-
gent étant différemment apprécié. Si les exigences esthétiques l'imposent, il est possible de
Pour éviter le passage de l'eau vers la résine et du mono- modifier ponctuellement la couleur de la résine de base.
mère dans le plâtre, un isolant est appliqué à l'aide d'un pin- Pour cela des pigments de couleurs différentes sont utilisés
ceau. L'isolant est étalé, puis, passé sous un léger filet d'eau permettant de mieux reproduire la fausse gencive. Cette
pour éliminer tous les excédents et donner un état de sur- technique exposée en détail chapitre 26 est utilisable avec
face lisse (fig. 18-5). les trois procédés de polymérisation décrits.
Pour prévenir, dans le futur, toute infiltration entre la résine La résine de la teinte adéquate est préparée selon les rap-
de base et les dents prothétiques porcelaine, leur région cer- ports poudre/liquide préconisés par le fabriquant, le plus
vicale est dépolie par sablage (alumine 10 µm-10 secondes) souvent selon un rapport trois doses de poudre pour une
puis silanée de manière à ajouter à la jonction physique dose de liquide. L'ensemble poudre-liquide est mélangé
résine-porcelaine une jonction chimique (fig. 18-6). Un autre puis laissé au repos 8 à 10 minutes dans un récipient
étanche. La résine est manipulée lorsqu'elle arrive à l'état
pâteux. Éventuellement, les fibres inclues dans la résine sont
orientées préférentiellement (chapitre 26).
Partie et contrepartie sont garnies de résine, le moufle est
fermé puis placé sous une presse hydraulique. La pression
appliquée doit être progressive pour aboutir à une pression
de 100 bars en fin de cycle, pression qui est ensuite main-
tenue pendant environ 20 minutes. Dans cette technique, le
moufle n'est pas ouvert, les encoches réalisées dans le plâtre
assurant l'évacuation des excédents de résines.
La polymérisation s'effectue selon deux types de cycles :
- Cycle long - Le moufle est immergé dans l'eau froide
puis l'ensemble est lentement élevé à 74 degrés pen-
dant 9 heures, mais sans être porté à ébullition.
- Cycle court - Le moufle est immergé dans l'eau
bouillante puis laissé 45 minutes après la reprise de
l'ébullition. Le cycle court n'est pas indiqué lorsque les
épaisseurs de résine sont fortes. D'autre part, il entraîne
des variations dimensionnelles importantes, un taux de
monomère résiduel moins élevé9-11.
Mais dans tous les cas, le refroidissement doit être très
lent de manière à prévenir les distorsions secondaires12. Il
est même conseillé de ne séparer la prothèse de son
modèle qu'après deux jours13. Fig. 18-7a Système Ivocap, prothèse dans le moufle.

La résine injectée
Le principe est d'injecter, par des conduits adéquats, le
mélange de PMMA dans un moufle fermé de manière à évi-
ter toute surépaisseur.
Dans un premier groupe de procédés, la résine est injec-
tée sous pression puis la polymérisation s'effectue dans un
deuxième temps. Cette technique est appliquée dans les
systèmes Futura® de Schutz Dental, Micro Base® De Trey,
Swiss-Jet®14
Dans le deuxième groupe, la résine est injectée sous pres-
sion puis la polymérisation est effectuée alors que l'injection
de la résine se poursuit, de manière à compenser la rétrac-
tion du matériau liée à la polymérisation. Cette approche est
exploitée par les systèmes Ivocap® ou Acron GC®. Fig. 18-7b Injection de la résine le moufle pris dans sa bride (a).

Le système Ivocap
La maquette de la prothèse est mise en moufle selon les
séquences habituelles dans des moufles adaptés (fig. 18-7a,
b, c). Après ébouillantage et isolation, le moufle est fermé à
vide sous une pression de 80 bars puis bloqué avec une bride.
Le mélange poudre-liquide, spécifique à ce système, est pré-
paré par agitation puis injecté sous une pression de 6 bars.
Cinq minutes après, le moufle est placé dans de l'eau à
100 degrés. Hors de l'eau, le système d'injection reste à la
température de la pièce et continue à injecter la résine de
manière à compenser le retrait dû à la polymérisation15.
L'élévation de température dure 35 minutes, le refroi-
dissement 20 minutes au minimum, le moufle étant
immergé dans de l'eau à température de la pièce. Après Fig. 18-7c Moufle en place immergé dans l'eau à 98°, le système
ouverture du moufle, la prothèse est terminée selon les pro- d'injection (a) restant hors de l'eau à la température de la pièce.
cédés classiques. (Document Ivoclar®)
Le système Acron CC refroidit ensuite à l'air libre pendant 35 minutes. Comme
dans la technique précédente, la pression exercée sur la
Les maquettes sont placées dans un moufle spécial, adapté
résine est maintenue pendant toute la phase de refroidisse-
à la réception d'ondes électromagnétiques (fig. 18-8a). La
ment de manière à compenser le retrait de polymérisation.
résine est injectée sous une pression de 6 bars (fig. 18-8b).
Le moufle et son système d'injection sont placés dans l'en-
ceinte du micro-ondes. L'élévation de température dure
3 minutes, elle amène la résine située à l'intérieur du moufle
à ébullition alors que la résine située dans l'injecteur demeure L'insertion d'une marque d'identification au sein d'une pro-
froide et n'est pas polymérisée16 (fig. 18-8c). L'ensemble thèse est une obligation technique si les patients vivent en
institution. Les méthodes d'identification sont nombreuses :
inclusion au sein de la résine de base d'un repère ou gra-
vure de la résine. Cette dernière proposition doit être élimi-
née en raison des anfractuosités que cela provoque 17,18 .

Après démouflage, les prothèses et leurs modèles sont repla-


cés sur l'articulateur grâce aux encoches des doubles bases
engrenées. Cette manœuvre permet de contrôler la précision
de cette phase technique ou de mettre en évidence d'éven-
tuels déplacements des dents, mais en aucun cas n'autorise
une quelconque équilibration occlusale. Les prothèses sont
Fig. 18-8a Prothèse dans le moufle. ensuite séparées de leur base pour être « finies ».
Cette phase de finalisation s'effectue en trois temps suc-
cessifs : le grattage, la finition des collets, le polissage.

Dans la mesure où la finition des maquettes et la mise en


moufle ont été conduites avec le maximum de soin, la durée
de la phase de grattage doit être réduite. Elle se réalise à
l'aide de fraises résine qui doivent être préférées aux bandes
de papier abrasif en raison des élévations de température
qu'elles provoquent. Les corrections ne doivent pas modi-
fier les formes, les profils, les épaisseurs de la maquette. De
plus, les bords et l'intrados des prothèses doivent être impé-
rativement respectés lors de cette phase.
Fig. 18-8b Mise en place de la résine dans la cuvette d'injection.

Si besoin est, à l'aide de petites lames, de brossettes à poils


noirs, les embrasures sont dégagées des bavures de résine,
les micro-bulles sont éliminées au niveau des collets de
manière à rétablir les formes choisies.

La prothèse est polie avec une brosse noire, des cônes en


feutre et de la ponce fortement humidifiée, pour éviter tout
échauffement, source de dépolymérisation localisée. Enfin,
la prothèse est lustrée à l'aide de brosses douces avec une
approche croisée.
Fig. 18-8c Moufle en place placé dans l'enceinte du micro-onde Pour éviter que la prothèse ne brille, ne « flashe », tra-
(1 000 watts), avec son injecteur (a). hissant ainsi sa présence, l'extrados prothétique doit pré-
senter de petits reliefs qui vont casser la réflexion des rayons sions sont générées lors de cette phase technique. D'une
lumineux, reliefs qui ne concernent pas la gencive margi- part, les résines de base présentent des distorsions linéaires
nale. Ceux-ci sont réalisés à l'aide de fraises-boules excen- par contraction. Pour les résines PMMA, ce retrait, théori-
trées, ou de fraises spécifiques (Candulor) (fig. 18-9). quement de 6 °/o, est cependant moindre car la polyméri-
sation se poursuit après que la résine ait atteint un stade
solide. Ceci explique les tensions internes qui s'installent à
l'intérieur de la résine. Le retrait dépend de la nature du
Joint vestibulaire matériau, du procédé de polymérisation et du rapport
non concerné poudre/liquide établi lors de la préparation du mélange.

Zone « granitée » D'autre part, l'épaisseur de la prothèse, la forme des


arcades, la morphologie, la nature des dents prothétiques
contribuent aussi à la création de distorsions secondaires19"22.
Gencive marginale À ces imprécisions s'ajoutent celles provoquées par le
intacte manque de stabilité dimensionnelle des matériaux, par les
phénomènes de sorption.
Pour réduire le taux final de monomère, il est préférable
d'utiliser un cycle de polymérisation long: 7 heures à
70 degrés, suivi d'une montée à 100 °C pendant 1 heure,
Fig. 18-9 Irrégularités créées à l'aide de la fraise « Stipper » moufle immergé dans l'eau. Enfin, pour éliminer le mono-
Candulor, respectant la gencive marginale et le joint vestibulaire. mère résiduel et ses conséquences cytotoxiques, il est
conseillé de plonger la prothèse dans de l'eau à 50 °C pen-
Dans les régions latérales les avis sont partagés. Certains dant 1 heure23.
auteurs réclament des extrados lisses, car cela réduit la stag-
nation alimentaire, d'autres au contraire préconisent des
extrados plus tourmentés car ils favoriseraient la rétention
prothétique. Cependant, on ne doit pas oublier que la for-
mation de la plaque dentaire est, bien sûr, liée à l'hygiène,
et l'entretien de la prothèse, aux formes générales et aux Après polissage, des socles sont préparés pour les deux pro-
détails des extrados, mais surtout, aux possibilités d'adhé- thèses terminées. Pour cela les contre-dépouilles des intra-
rence de cette plaque dentaire sur les matériaux employés. dos sont comblées de cire ou de silicone de laboratoire. Le
Au niveau de la voûte palatine, en absence de papilles, modèle mandibulaire est réalisé en plâtre de classe III. La
il est conseillé de réaliser un léger granité qui facilitera théo- prothèse doit être parfaitement stable sur le modèle, ce qui
riquement les sensations gustatives. implique que l'ensemble de la périphérie de la prothèse soit
au contact du socle en plâtre (fig. 18-10a, b). Au niveau de
la prothèse maxillaire, le socle est coulé avec les mêmes cri-
tères que pour la prothèse mandibulaire. Cependant, il
convient d'utiliser du plâtre de classe IV, comme du Velmix®,
de manière à pouvoir réaliser une double base engrenée.
Malgré toutes les précautions prises par le laboratoire et par Dans un deuxième temps, la prothèse maxillaire est remise
les fabricants des matériaux, un certain nombre d'impréci- en articulateur. Il suffit de placer cette dernière sur la clef de

Fig. 18-10a Prothèse mandibulaire et son socle: silicone com


blant les contre-dépouilles; bords en plâtre assurant la parfaite sta Fig. 18-10b Prothèse maxillaire et son socle de remise en articu-
bilité prothétique. lateur.
positionnement prealablement realisee puis de solidariser le 11. Kawara M, Komiyama 0, Kimoto S, Kobayashi N, Kobayashi K,
socle a la branche superieure. Les protheses sont ensuite Nemoto K. Distortion behavior of heat-activated acrylic denture-
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Dernière et ultime étape du traitement de l'édentement qu'elles découlent du confort, du volume, du contact, de l'es-
total, la phase d'insertion ne doit en aucun cas être consi- thétique, autant de paramètres qui dépendent plus de cri-
dérée comme une simple phase de livraison. En réalité, cette tères subjectifs que de critères objectifs. À ceux-ci s'ajoute la
phase correspond à une analyse critique des prothèses, cri- mémoire des sensations favorables ou défavorables éprou-
tique effectuée immédiatement et insidieusement par les vées par le patient lors des différentes phases cliniques et
différents protagonistes de cette réalisation. Ces critiques les sensations préalablement ressenties avec le port d'an-
comprennent les aspects spécifiques du cas traité, les ciens appareils. Les « explications » relatives aux limites de
aspects techniques propres au praticien, les aspects psy- nos thérapeutiques, délivrées par le praticien depuis la pre-
chologiques du patient liés à ses craintes, ses espérances et mière consultation jusqu'à cet instant final, démontrent alors
aux jugements subjectifs de son entourage. toute leur importance. L'ensemble de cette analyse est com-
plété dans un deuxième temps par celle effectuée par l'en-
tourage.

L'analyse est conduite successivement par les trois partenaires L'analyse de l'entourage concerne l'esthétique, l'apparence :
qui ont participé à l'élaboration de la restauration prothétique. le jugement d'un proche peut, d'un seul mot, d'un seul
regard, confirmer ou détruire, aux yeux du patient, le bien-
fondé du choix du praticien. L'opinion des tiers peut se révé-
ler quelquefois bénéfique, mais surtout destructrice si elle
L'analyse du praticien doit être des plus pertinentes. D'une est négative. Bien évidemment, ce type de jugement n'est
part, le praticien connaît parfaitement les limites techniques certainement pas toujours basé sur une connaissance réelle
des thérapeutiques de la prothèse adjointe complète et les des problèmes inhérents au traitement de l'édentement
difficultés du cas traité. D'autre part, il est pleinement total mais ce jugement est implacable.
conscient de la valeur de chacune des phases qu'il a effec-
tuées. L'insertion révèle alors les qualités ou les insuffisances
de ses actes thérapeutiques et, en conséquence, le niveau
du « service rendu » par rapport aux difficultés techniques et
psychologiques du cas clinique.
À la réception des prothèses adressées au cabinet dentaire
dans un sachet humide pour éviter les éventuelles distor-
sions liées aux phénomènes de sorption, le praticien
L'analyse du patient se déroule en deux temps. Dans un pre- contrôle si tous les documents relatifs à la création du dis-
mier temps, l'analyse résulte des sensations éprouvées, positif médical sur mesure (DMSM) sont présents de
manière à parfaitement assurer la traçabilité des éléments fausse gencive au niveau des embrasures, qui ne doivent
constitutifs de la prothèse : caractéristiques des dents pro- offrir aucune possibilité de rétention alimentaire. Toutes les
thétiques (teinte, forme, dimension, matériaux), de la résine anomalies sont corrigées puis les zones concernées soi-
de la base prothétique (teinte, type), les numéros de leurs gneusement repolies.
lots.
Cliniquement, le contrôle des prothèses se déroule en
L'occlusion
deux temps: le premier en l'absence du patient, le second
en présence du patient. À ce stade l'évaluation de l'occlusion est limitée. Elle se
résume à établir manuellement l'occlusion entre les pro-
thèses puis à évaluer la stabilité occlusale obtenue.

Le contrôle porte sur quatre paramètres :

Les modèles d'équilibration Ils portent successivement sur: la prothèse mandibulaire, la


prothèse maxillaire, l'esthétique, l'occlusion. Cette séquence
Les deux prothèses doivent posséder des socles de mon- est très comparable à celle de l'essai fonctionnel mais cer-
tage. De plus, le socle de la prothèse maxillaire doit être soli- tains éléments doivent y être ajoutés.
darisé à la branche supérieure de l'articulateur ou, à défaut,
la clé de positionnement est restituée, permettant au prati-
cien de replacer la prothèse maxillaire sur l'articulateur. Le contrôle de la prothèse mandibulaire
La prothèse mandibulaire est insérée en premier pour sta-
L'intrados et les bords biliser la langue dans une position basse et ne pas créer de
phénomènes de nausées. Le praticien applique fermement
Les éventuelles aspérités de l'intrados voire des bords sont
la prothèse sur la surface d'appui pour découvrir toutes les
recherchées avec la pulpe du doigt, l'extrémité d'une sonde
zones susceptibles de déclencher une douleur. Si la pres-
ou mieux une compresse qui, s'accrochant à toutes les irré-
sion s'accompagne d'une réponse algique, le ou les points
gularités, révèle leur présence (fig. 19-1).
concernés sont corrigés. Cependant, la détermination digi-
tale ou visuelle de la position exacte de ces manifestations
muqueuses est souvent délicate. L'utilisation de matériaux
révélateurs fournit alors, une aide précieuse1,2.
Ceux- ci doivent posséder les qualités suivantes : offrir un
temps de manipulation suffisamment long, présenter une
faible viscosité, être fiables en couche mince, permettre une
application et surtout une élimination commode. Les pâtes
révélatrices telles que les cires (Disclosing-Wax®), les
mélanges 70 °/o vaseline + 30 % oxyde de zinc (composi-
tion de Stevenson-Moore), ne répondent pas du tout aux
dernières exigences, car ils sont très difficiles à éliminer.
A contrario, les pâtes à base de silicone répondent à toutes
les qualités souhaitées. Ces produits sont soit des matériaux
à empreintes tels que les silicones à faible coefficient de vis-
cosité (Président Light®, Eurogum Light®), soit des produits
Fig. 19-1 Recherche des zones irritantes à l'aide d'une compresse.
spécifiques comme le Fit Checker® ou le Coltène Pressure
Spot Indicator®. Ces produits sont placés en très petite quan-
tité dans l'intrados au niveau des régions douloureuses puis
Les zones ou points qui accrochent sont éliminés avec
la prothèse est appliquée fermement sur la surface d'appui.
délicatesse, à l'aide d'une pointe montée à grain fin puis la
région est repolie avec une petite brosse enduite de pâte à Les zones où le matériau est éliminé sont soulignées avec
détartrer. Les bords dont l'épaisseur est parfaitement conser- la pointe d'un crayon dermographique, puis la prothèse est
vée doivent présenter un aspect lisse sans pour autant être réinsérée dans la cavité buccale (fig. 19-2). Le crayon marque
polis. sur la muqueuse le point douloureux, position confirmée par
le patient. Les retouches de l'intrados sont réalisées et repo-
lies.
L'extrados Puis, pour contrôler la stabilité de la prothèse, le patient
La forme et les profils des extrados sont contrôlés en fonc- exécute des déplacements de la langue, des joues et des
tion des critères précédemment décrits. L'attention se porte lèvres. Si une éventuelle mobilité est ressentie, un des pro-
tout particulièrement sur la présence des concavités vesti- duits siliconés précédemment décrits est déposé sur les
bulaires au niveau des trigones et des tubérosités, sur la bords de la prothèse; celle-ci est réinsérée, maintenue lors
Fig. 19-2 Silicone chassé au niveau d'une zone douloureuse. Fig. 19-4 Instabilité de la prothèse maxillaire: le silicone déposé
dans la région paratubérositaire met en évidence le mauvais profil
de l'extrados qui interfère avec le processus coronoïde lors des
des différents mouvements jusqu'à ce que le matériau ait mouvements de latéralité.
réalisé sa polymérisation. L'analyse des bords révèle très sou-
vent de nombreuses petites imperfections de l'empreinte,
mauvaises limites, position, profil des bords erronés, mau-
vaise conception des extrados, freins insuffisamment déga- Le contrôle de l'esthétique
gés (fig. 19-3). Un miroir est ensuite confié au patient pour qu'il juge de l'es-
thétique obtenue, esthétique qu'il a, par sa participation et
sa collaboration, contribué à élaborer. Théoriquement,
aucune critique ne devrait être émise, cependant certaines
remarques peuvent être faites conduisant à de minimes cor-
rections qui seront, de préférence, différées. Par exemple, la
longueur des bords libres peut paraître trop importante mais
cette longueur dépend entre autres de la position de la lèvre,
qui est souvent trop haute, soulevée par un sourire forcé lié
à l'examen devant la glace.

Le contrôle de l'occlusion
Fig. 19-3 Imprécisions des bords linguaux d'une prothèse man-
dibulaire révélées par l'utilisation de produit siliconé (Fit-Checker®). Les erreurs d'occlusion ne devraient pas exister si la phase
de l'essai fonctionnel a été parfaitement conduite. Au stade
de l'insertion, elles ne doivent, en aucun cas, être attribuées
au laboratoire, mais à une ou des erreurs provoquées et non
Grâce à la lecture directe des zones où le produit révé-
diagnostiquées par le praticien.
lateur a été chassé, toutes les imperfections sont corrigées
puis soigneusement repolies. Par contre, les imprécisions occlusales sont la règle. Elles
sont provoquées:
- Par le praticien - Imprécisions de l'enregistrement des
Le contrôle de la prothèse maxillaire
relations intermaxillaires, liées aux maquettes d'occlu-
Les séquences sont comparables à celles pratiquées lors du sion, au comportement des tissus de soutien, aux arti-
contrôle de la prothèse mandibulaire. Si le patient est très culations temporo-mandibulaires, au système neuro-
nauséeux, la prémédication est indispensable, qu'elle fasse musculaire3,4.
appel à des médicaments ou à des anesthésies de contact - Par le laboratoire - Au même titre que celles du prati-
en crème déposée de manière directe ou indirecte au cien, elles sont inévitables, quelles que soient les phases
niveau du voile. La stabilité est éprouvée par une pression techniques concernées en particulier lors du montage et
molaire bilatérale, les sensations d'instabilité, les points dou- de l'établissement des contacts occlusaux propres au
loureux sont immédiatement mis en évidence et corrigés de schéma occlusal choisi.
la même manière que sur la prothèse mandibulaire. - Par la technologie - Elles résultent de la chaîne techno-
Les bords sont ensuite analysés : libération des freins, logique. Elles surviennent dès l'élaboration du porte-
profils des extrados, épaisseur des bords, l'apport diagnos- empreinte individuel, pour s'achever lors de la phase
tique des produits siliconés s'avère à nouveau capital. Les finale de la polymérisation, qui s'accompagne de distor-
corrections sont réalisées puis soigneusement repolies sions des bases, de variations de la dimension verticale
(fig. 19-4). d'occlusion, de déplacements des dents postérieures5"8.
Ces imprécisions minimes s'ajoutent sans jamais se dans la cavité buccale, le praticien la maintient sur la surface
compenser, altérant la précision des relations occlusales d'appui et enregistre la relation centrée selon les mêmes
obtenues lors du montage. Ceci impose de pratiquer des techniques que celles décrites précédemment (chapitre 11).
corrections afin de rétablir l'équilibre occlusal, garant de la Après enregistrement de la relation centrée, la prothèse
répartition des charges fonctionnelles sur les surfaces d'ap- est retirée de la cavité buccale puis les indentations enre-
pui, donc de l'homéostasie de celles-ci. De plus, elles per- gistrées dans les cires d'enregistrement sont examinées : des
mettent de parfaire l'occlusion, qui est un élément favorisant contacts peu profonds, symétriques en nombre et en posi-
le port et l'acceptation de la prothèse9. tion, sont attendus mais on ne doit observer aucune perfo-
Les corrections occlusales ne sont jamais effectuées à la ration (fig. 19-5b).
sortie du moufle. Par contre, elles sont pratiquées avant l'in-
sertion définitive des prothèses et jamais après un soi-disant
tassement des tissus de la surface d'appui.
Le tassement entraîne des modifications histologiques,
dénature la précision de l'empreinte, favorise des phéno-
mènes inflammatoires immédiats dont les conséquences à
long terme sont la résorption.

Les corrections occlusales se réalisent toujours sur articula-


teur.
Fig. 19-5b Aspect idéal des indentations : symétrie en nombre,
Pour cela, lorsque les diverses corrections de l'intrados en position, de faible profondeur, pas de perforation.
ont été réalisées, le praticien procède à un nouvel enregis-
trement de la relation centrée. Les prothèses sont insérées
dans la cavité buccale, deux cotons salivaires sont placés Les trois étapes nécessaires à la validation de l'enregistre-
entre les arcades au niveau des premières molaires. Le ment sont ensuite effectuées (chapitre 11).
patient serre modérément ces derniers pendant environ 5
à 6 minutes. Ceci permet aux prothèses de se plaquer sur
la surface d'appui, de déprimer correctement la région du
joint postérieur et d'effacer temporairement les réflexes
occlusaux10.
Dans un deuxième temps, la prothèse mandibulaire est
retirée, le patient reste bouche entrouverte. Deux petits
appuis en pâte de Kerr sont collés sur l'extrados en regard Les techniques de corrections sont spécifiques du schéma
des premières molaires. Les dents sont séchées et deux occlusal et des dents prothétiques choisis. Cependant, ces
épaisseurs de cire Aluwax sont scellées sur les faces occlu- différentes techniques présentent des points communs.
sales en veillant à ne pas déborder au niveau vestibulaire ou
lingual (fig. 19-5a). La prothèse mandibulaire est réinsérée

Après enregistrement de la relation centrée, et contrôles à


l'aide de la double base engrenée, les prothèses sont
remontées en articulateur, puis immobilisées sur leurs
modèles de travail avec du plâtre à prise rapide (fig. 19-6a).
Les cires d'enregistrement sont éliminées. Les verrous
des boîtiers condyliens de l'articulateur sont libérés pour per-
mettre l'établissement de l'intercupsidie maximale entre les
deux prothèses, puis la tige incisive est bloquée à la dimen-
sion verticale ainsi obtenue (fig. 19-6b). le praticien évalue
alors la faisabilité des corrections occlusales.
Elle dépend de deux paramètres, d'une part de la dimen-
sion verticale, de la position des contacts occlusaux, et
d'autre part de l'application des deux principes suivants11 :
- 1 e r principe : Les corrections occlusales doivent rétablir
Fig. 19-5a Cire Aluwax et appuis latéraux collés. ou conserver les spécificités du montage choisi et les
Fig. 19-6 Les trois étapes de l'analyse des relations occlusales sur caractéristiques de la morphologie des dents prothé-
un articulateur. tiques utilisées.
- 2e principe : Les corrections occlusales ne doivent pas
assurer le sauvetage d'une situation par trop erronée.
Elles ne peuvent que parfaire une organisation occlusale
correcte.

La dimension verticale
Les verrous en relation centrée sont à nouveau activés,
les prothèses sont amenées en contact. L'articulateur
refermé, le praticien évalue la situation de la tige incisive.
Celle-ci ne doit pas entrer en contact avec la table incisive.
La distance séparant ces deux éléments met en évidence
l'importance des corrections occlusales qui doivent être pra-
Étape 1
tiquées. Par contre, si la tige incisive est au contact, il est
impossible de réaliser des corrections occlusales (fig. 19-6c).
Fig. 19-6a La prothèse mandibulaire est mise en articulateur.
Les boîtiers sont bloqués (1) ; La cire d'enregistrement se situe La position des contacts occlusaux
entre les arcades (2) ; La tige incisive est au contact du plateau (3).
L'examen porte sur les relations sagittales et frontales qui
s'établissent entre les cuspides d'appui et les fosses de
réception antagonistes, La faisabilité découle de l'application
de la règle des tiers (fig. 19-7a, b).
Les corrections sont :
- possibles, si les contacts se situent dans le tiers interne
de la face occlusale;
- délicates, si les contacts se situent dans le tiers médian
de la face occlusale;

Fig. 19-7 Analyse dans le plan frontal et horizontal de la position


des contacts occlusaux.
Étape 2

Fig. 19-6b Après élimination de la cire d'enregistrement.


Les blocages en centrée sont déverrouillés (1) ; La prothèse en
occlusion d'intercuspidie maximale (2) ; La tige incisive est ame-
née au contact de la table incisive (3).

Fig. 19-7a Dans le plan frontal les corrections occlusales sont :


1) possibles; 2) délicates; 3) impossibles.

Étape 3

Fig. 19-6c Les blocages en centrée sont verrouillés (1) ; La pro-


thèse en occlusion de relation centrée (2) ; L'extrémité de la tige inci-
sive se situe au-dessus du plateau (3) ; La distance séparant la pointe
du plateau objective l'augmentation de la dimension verticale d'oc- Fig. 19-7b Situation dans le plan horizontal des trois possibilités
clusion qui doit être éliminée grâce aux corrections occlusales (4). de contact occlusal.
Fig. 19-8a Matériel pour corrections occlusales des dents porce- Fig. 19-8b Matériel pour polissage des corrections occlusales:
laine: pointes diamantées, pointes vertes, pointes pierre d'Arkansas. disque et lentilles (Shofu®), meulette (Komet®), feutre (Renfert®)
(de gauche à droite).

- impossibles, si les contacts se situent dans le tiers externe 1er temps - Occlusion de relation centrée
de la face occlusale.
Pour les corrections occlusales des dents porcelaine, le Les objectifs des corrections en relation centrée sont doubles,
matériel utilisé se compose de pointes diamantées de forme s'adressant aux dents postérieures et aux dents antérieures.
et de granulation différentes, de pointes vertes et de pointes - Au niveau des dents postérieures - Le but est d'établir une
d'Arkansas, de meulettes caoutchouc pour polir la céramique relation cuspide-embrasure au niveau prémolaire et cus-
(fig. 19-8a, b) 12 . Les marqueurs nécessaires sont des papiers pide-fosse au niveau molaire, afin de stabiliser l'occlusion
à articuler fins ou des soies dentaires, portés par des pinces à la dimension verticale d'occlusion fixée par la tige inci-
de Miller 13,14 . sive. Les corrections s'effectuent selon les règles suivantes :
Pour les dents résine les matériels de correction et de - Règle numéro 1 - Déplacer les sommets cuspidiens
marquage sont identiques; seuls diffèrent les systèmes de pour les placer en regard de leurs fosses ou embra-
polissage, qui doivent être adaptés au matériau composant sures antagonistes. Pour cela, remodeler les versants
la dent. cuspidiens qui entourent le sommet cuspidien pour
le placer dans sa fosse ou embrasure antagoniste
(fig. 19-9a, b, c, d).
- Règle numéro 2 - Si le sommet cuspidien est bien
placé, ne jamais raccourcir la pointe cuspidienne,
mais approfondir la zone de réception antagoniste.
L'occlusion bilatéralement équilibrée Exception si le sommet cuspidien ne s'harmonise pas
type Hanau avec les courbes frontale et sagittale de l'arcade, il
Les corrections occlusales se déroulent en deux temps. doit être corrigé.

Fig. 19-9a Le remodelage des versants des


cuspides d'appui dirige le sommet cuspidien
dans la fosse de réception antagoniste.
- Au niveau des dents antérieures - Aucun contact ne doit
exister entre le bord libre des incisives et canines man-
dibulaires et la face linguale des dents antagonistes.
Pour cela les corrections s'adresseront le plus souvent
aux bords libres des dents mandibulaires, aux dents
maxillaires (se reporter aux corrections en propulsion)
(fig. 19-10).

Fig. 19-9b 1) Contact entre les versants internes; 2) correction • La réalisation pratique
du versant interne supérieur; 3) occlusion rétablie. Les boîtiers condyliens de l'articulateur sont bloqués en rela-
tion centrée. L'articulateur est fermé, l'interposition des mar-
queurs colorés met en évidence les points de contacts occlu-
saux en relation centrée. Les corrections assurent un
remodelage des versants cuspidiens à l'aide d'instruments
rotatifs montés sur turbine. Elles doivent respecter l'anato-
mie des dents prothétiques en conservant le galbe de
chaque versant cuspidien. Les corrections doivent aboutir à
l'établissement de contacts occlusaux parfaitement répartis
sur l'ensemble des dents postérieures et d'un contact de la
Fig. 19-9c Contact versant entre les versants externe mandibu- tige incisive avec le plateau et aucun contact entre les dents
laire et interne maxillaire; b) correction des versants externes; antérieures. Après corrections, les surfaces sont soigneuse-
c) occlusion rétablie. ment repolies à l'aide de l'instrumentation adaptée.
Les prothèses sont confiées au patient, les conseils sont
prodigués, un rendez-vous est convenu 24 heures, voire
48 heures plus tard avec le patient. Ces séances se pour-
suivent jusqu'à ce que la stabilité de l'occlusion soit obte-
nue, suivant le même protocole. Ce n'est qu'à ce stade que
les corrections excentrées sont réalisées.

Fig. 19-9d Contact versant entre les versants externe maxillaire et


interne mandibulaire ; b) correction des versants externes ; c) occlu-
sion rétablie.

Fig. 19-10 Relations incisive et


molaire en propulsion.
A - Occlusion de relation centrée
contact molaire absence de contact
antérieur.
B - Propulsion : possibilités de contacts
en propulsion :
1) contacts incisif et molaire situation
idéale ;
2) contact uniquement entre les bords
libres ;
3) contact entre la face linguale maxil-
laire et les bords libres mandibulaires ;
4) contacts uniquement entre les
molaires.
C - Propulsion : l'objectif est l'établis-
sement de contacts au niveau incisif et
molaire.
2e temps - Les contacts excentrés • Les règles
Lorsque les corrections en occlusion de relation centrée sont
L'objectif est d'obtenir une occlusion bilatéralement équili-
achevées, les corrections des mouvements excentrés sont
brée où l'ensemble des versants cuspidiens des dents pos-
térieures glisse harmonieusement. pratiquées.

La propulsion
- Règle numéro 1 - N e jamais éliminer un point de contact - Règle numéro 3 - En propulsion, au niveau des secteurs
en rapport avec l'occlusion de relation centrée. antérieurs (fig. 19-10):
- Règle numéro 2 - En propulsion, au niveau des secteurs - corriger la face palatine des dents antéro-supérieures
postérieurs; les corrections portent sur les versants cus- si, les bords libres étant en contact, les dents posté-
pidiens distaux supérieurs et mésiaux inférieurs, de pré- rieures sont en contact;
férence aux dépens des cuspides secondaires. Ces cor- - corriger les bords libres mandibulaires ou maxillaires
rections se poursuivent jusqu'à ce que la tige incisive si, les bords libres étant au contact, aucun contact entre
glisse sans heurt sur la table incisive (fig. 19-11a, b). les dents postérieures ne s'installe.

Fig. 19-11 En propulsion, corrections


des versants mésiaux mandibulaires
dans une direction distale (a), des ver-
sants distaux maxillaires dans une direc-
tion mésiale (b), de préférence sur les
cuspides secondaires à la rigueur les pri-
maires mais en respectant les points de
contact en occlusion de relation centrée.

Latéralité travaillante
- Règle numéro 1 - Ne jamais éliminer un point de contact - Règle numéro 2 - Les corrections portent sur les cus-
en rapport avec l'occlusion de relation centrée. pides secondaires, au niveau des versants internes
mésiaux supérieurs et distaux inférieurs, (fig. 19-12a, b).
Ces corrections se poursuivent jusqu'à ce que la tige inci-
sive glisse sans heurt sur la table incisive.

Fig. 19-12 Côté travaillant, corrections


des cuspides secondaires :
a) distaux internes mandibulaires;
b) mésiaux internes maxillaires
dans une direction perpendiculaire aux
faces vestibulaires maxillaires et linguales
mandibulaires.

Latéralité non travaillante


- Règlenumérol - N e jamais éliminer un point de contact - Règle numéro 2 - Les corrections portent toujours sur les
en rapport avec l'occlusion de relation centrée. versants internes des cuspides vestibulaires mandibu-
laires, dans une direction disto-vestibulaire (fig. 19-13a, b).
Ces corrections se poursuivent jusqu'à ce que la tige inci-
sive glisse sans heurt sur la table incisive.
Fig. 19-13 Côté non travaillant,
corrections des cuspides princi-
pales:
a) versants distaux internes man-
dibulaires;
b)mésiaux internes maxillaires
dans une direction distale externe
mandibulaire et mésiale interne
maxillaire.

• Réalisation pratique la tige incisive doit glisser sans heurt sur le plateau incisif. Il
Après un nouvel enregistrement de la relation centrée, les pro- convient d'éviter de créer des surfaces ou des versants cus-
thèses sont remontées en articulateur puis bloquées sur leurs pidiens plans. Pour cela des sillons secondaires sont sculp-
socles respectifs à l'aide de plâtre à prise rapide. Le plateau tés de manière à réduire les pressions transmises sur les sur-
incisif est réglé selon les données choisies lors du montage. faces d'appui 16 .
Propulsion - Les ailes de Bennett sont orientées à 0°. Les Les corrections faites, une pâte de carborundum char-
points de contact en relation centrée sont objectivés à l'aide gée d'huile de vaseline (pâte à roder) est placée entre les
de marqueurs rouges. Dans un deuxième temps, le mou- dents prothétiques. Pour harmoniser le glissement entre les
vement de propulsion est effectué de préférence de versants cuspidiens, les différents mouvements mandibu-
manière séquentielle millimètre par millimètre. Les articula- laires sont simulés une dizaine de fois. Les surfaces corri-
teurs qui possèdent des vis ou cales de propulsion offrent gées sont ensuite soigneusement repolies.
au praticien une précision incomparable (FAG, Stratos 200,
SAM, Dentatus). Le marqueur bleu, placé entre les arcades, L'occlusion à impact lingual
objective les points de contact en propulsion. Les corrections
Dans le montage de Gerber, le schéma occlusal est du type
sont réalisées jusqu'à ce que la tige incisive entre en contact
occlusion bilatéralement équilibrée avec une occlusion lin-
avec le plateau incisif, mais ensuite doivent s'arrêter sous
gualée17 (fig. 19-14). Les corrections se réalisent en deux
peine de perdre la dimension verticale. Les corrections se
temps : recherche de l'occlusion de relation centrée puis har-
poursuivent jusqu'à l'obtention du bout à bout incisif.
monisation des mouvements excentrés.
Au niveau des dents antérieures, les corrections s'adres-
sent: 1er temps - Occlusion de relation centrée
- Au bord libre des dents inférieures si, en bout à bout,
les dents postérieures ne sont pas en contact. L'objectif est d'établir une relation cuspide-fosse entre les
- À la face linguale des dents antéro-supérieures si, en cuspides d'appui et les fosses de réception antagonistes. Les
bout à bout, les dents postérieures sont en contact. cuspides d'appui ne sont jamais corrigées, les corrections ne
concernent que les fosses antagonistes. Les corrections sont
Latéralités - Les ailes de Bennett sont orientées à 20° pour
les ailes rectilignes et, si ['articulateur possède des inserts
curvilignes, il est conseillé d'utiliser les inserts C2 C3 avec
l'articulateur FAG et verts ou rouges avec les articulateurs
SAM15.
Les séquences sont tout à fait comparables à celles pra-
tiquées lors de la propulsion : mise en évidence des contacts
en occlusion de relation centrée, puis les déplacements en
latéralités sont simulés par des déplacements millimétrés.
Du côté travaillant, les corrections sont réalisées perpendi-
culairement aux faces vestibulaires ou linguales sur les cus-
pides secondaires (vestibulaires maxillaires, linguales man-
dibulaires). Du côté non travaillant, les corrections portent
uniquement sur les cuspides vestibulaires mandibulaires
dans une direction disto-vestibulaire.
Les déplacements excentrés sont corrigés jusqu'à l'ob- Fig. 19-14 La fraise diamantée évase la fosse de réception de la
tention du bout à bout incisif ; pendant ces déplacements cuspide antagoniste.
réalisées à l'aide de pointes diamantées boule d'un diamètre manière à conserver leur état de surface pour éviter toute
d'environ 3 mm. Elles modèlent les fosses de manière à per- abrasion ou usure des dents résine. Cependant, ces der-
mettre aux cuspides antagonistes de se placer au fond des nières s'usent. Après les corrections occlusales, il est pos-
fosses de réception. Par ailleurs, les contacts entre les ver- sible de créer des cavités dans la face occlusale des dents
sants externes des cuspides principales mandibulaires et les résine en antagoniste des pointes cuspidiennes d'appui. Ces
versants antagonistes sont éliminés aux dépens des versants cavités sont alors comblées d'amalgame ou de composite
mandibulaires. dont la morphologie est réglée par de légers déplacements
de la branche supérieure de l'articulateur18 (fig. 19-15).
2e temps - Contacts excentrés
Les corrections occlusales sont ensuite réalisées lors de la
propulsion puis des mouvements de latéralité. Seuls les ver-
sants bordant les fosses sont corrigés pour assurer un glis-
sement harmonieux des cuspides d'appui de manière à
créer une occlusion bilatéralement équilibrée. Les cuspides L'insertion d'une restauration prothétique adjointe doit impé-
palatines demeurent intactes. rativement s'accompagner de différents conseils qui vont
permettre au patient de mieux « intégrer et utiliser » la res-
3e temps - Contact en rétrusion tauration prothétique. Ces conseils portent successivement
sur l'esthétique, la mastication, la phonation et l'hygiène
Cette étape est très spécifique à la conception de Gerber, elle (chapitre 27).
consiste à assurer l'équilibre occlusal lors du mouvement de
rétrusion. L'articulateur Gerber permet un déplacement des
condyles de l'articulateur en arrière de la relation centrée. Le
papier marqueur est placé entre les arcades, la branche supé-
Dès le choix des dents le patient doit être prévenu de l'inci-
rieure de l'articulateur est déplacée vers l'avant, simulant un
dence sur son entourage des changements esthétiques qu'il
mouvement de rétrusion, les interférences éventuelles sur la
a souhaité réaliser et des conséquences que cela peut pré-
partie mésiale des fosses de réception sont corrigées.
senter à court et à moyen terme. Une nouvelle prothèse
entraîne obligatoirement une modification du comporte-
4e temps - Harmonisation des glissements
ment des lèvres et des joues, la prothèse étant le plus sou-
Les fosses centrales corrigées sont polies à l'aide d'une vent ressentie comme étrange, massive. Les tensions mus-
pointe d'Arkansas boule puis par rodage. Pour cela, de la pâte culaires peuvent donner l'impression de gaucherie. Ces
à roder est placée sur les faces occlusales mandibulaires. Les changements se manifestent au niveau du soutien de la
dents en contact, la branche supérieure sous une faible pres- lèvre, qui souvent provoque une visibilité plus importante
sion manuelle, décrit de tout petits mouvements circulaires des dents antérieures. Cependant, ces changements sont le
pour harmoniser les glissements dans la fosse de réception. plus souvent temporaires.

Les montages hétérogènes


Certaines conditions cliniques imposent d'utiliser des mon-
tages où les matériaux des dents antagonistes diffèrent, La mastication avec une nouvelle prothèse est souvent déli-
dents porcelaine opposées à des dents résine. Dans ce cas, cate. Le patient doit être informé que, tout d'abord, l'ap-
il est préférable de ne pas corriger les dents porcelaine de prentissage dure environ 6 à 8 semaines. C'est le temps qu'il
faut à la langue, aux joues, aux lèvres pour s'habituer aux
volumes et formes de la nouvelle prothèse et ainsi acquérir
de nouveaux réflexes. Ceux-ci vont contribuer au maintien
de la prothèse et permettre l'acquisition d'un cycle de mas-
tication harmonieux.
De plus, pour tempérer les espérances du patient, il
convient de lui rappeler que son efficacité masticatoire est
réduite et que, pour préserver la stabilité de la prothèse, il
est préférable de mastiquer de petits morceaux, de les pla-
cer au niveau molaire de manière bilatérale et surtout d'évi-
ter les mouvements d'incision19.

Fig. 19-15 Montage hétérogène: création de butées occlusales Le patient peut éprouver certaines difficultés phonétiques
en occlusion de relation centrée à l'aide d'amalgame. mais celles-ci disparaîtront dans les heures qui suivent. La
capacité de la langue à retrouver ses appuis (dans la mesure 8. Nogueira SS, Ogle RE, Davis EL Comparison of accuracy bet-
où le montage est correct bien sûr) est rapide. Les patients ween compression and injection-molded complete dentures. J
sont beaucoup plus conscients de petites imperfections, Prosthet Dent, 1999; 82 : 291-300.
dans leur prononciation, qui ne sont ni entendues ni dis- 9. Fenlon MR, Sherriff M, WalterJD. Association between the accu-
racy of intermaxillary relations and complete denture usage. J
cernées par l'entourage.
Prosthet Dent, 1999; 81 : 519-525.
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1981 ; 19, 1814-1824.
12. Schlissel ER, Newitter DA, Renner RR, Gwinnett AJ. An evalua-
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1. Berteretche MV, Taddéi C. Analyse de l'interface mucoprothé- ture teeth. J Prosthet Dent, 1980; 43 : 258-65.
tique : apports cliniques et pédagogiques des matériaux révé- 13.Trévelo A, Dubreuil J. Équilibration des prothèses adjointes
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Rehabil, 1998;25:725-729. 1979; 470.
On appelle doléance « la plainte pour réclamer au sujet d'un Les doléances exposées et exprimées par le patient sont
grief ou pour déplorer des malheurs personnels » (diction- de deux types :
naire le Robert). - Les doléances objectives qui s'accompagnent de signes
Lorsque le praticien se trouve confronté à un patient pré- cliniques tangibles.
sentant des doléances une question essentielle se pose : - Les doléances subjectives qui sont des sensations sans
- Le praticien a réalisé la prothèse : auquel cas il doit signe clinique réel.
résoudre les problèmes posés, répondre aux doléances Elles se manifestent de manière immédiate, à court
exprimées, avec toutes les difficultés techniques et psy- terme, à long terme (fig. 20-1).
chologiques que cela comporte.
- Le praticien n'a pas réalisé la prothèse : auquel cas les
doléances font partie de l'examen clinique, elles per-
mettent d'analyser les difficultés, les motifs de l'échec,
d'imaginer, de proposer des solutions pour répondre aux
problèmes rencontrés par le patient. Dans les minutes et les heures qui suivent l'insertion des pro-
thèses, il n'y a malheureusement pas toujours une similitude
d'appréciation, de jugement, entre le praticien et le patient.
Cette différence de perception rend la réponse du praticien
très délicate. En effet, combien de prothèses mal conçues,
mal adaptées, sans aucune valeur (aux yeux du praticien)
sont parfaitement acceptées par le patient alors que d'autres,
qui possèdent toutes les qualités souhaitées par ce même
praticien, sont, par contre, refusées par le patient'. 2 .

Elles révèlent une ou des erreurs techniques auxquelles le


praticien doit répondre dans l'urgence car, dans la mesure
où il a réalisé la prothèse, ces erreurs sont de manière directe
ou indirecte de sa responsabilité.

L'absence de rétention et de stabilisation


Fig. 20-1 Doléances principales au maxillaire et à la mandibule. Cette doléance immédiate est certainement la plus délicate à
(D'après Kotkin1) gérer tant sur le plan technique que sur le plan psychologique.
Elle est le prélude à un échec potentiel. Trois hypothèses peu- veau effectués. À l'utilisation du crayon dermographique ou
vent être émises pour expliquer cette situation clinique. de matériaux révélateurs, s'ajoutent les remarques du patient
qui peut préciser éventuellement les circonstances dans les-
L'essai fonctionnel insuffisant quelles la prothèse est instable (ouverture grande, mouve-
L'insuffisance ou l'absence des qualités mécaniques espé- ments des lèvres etc.).
rées sont certainement le problème le plus souvent rencon- L'attention du praticien doit tout particulièrement se por-
tré. En réponse à ces difficultés, les différents contrôles décrits ter sur:
lors de l'essai fonctionnel et de l'insertion doivent être à nou- - L'adaptation des intrados vis-à-vis de la surface d'appui ;
un torus, une exostose peuvent toujours gêner l'établis-
sement de l'intimité de contact entre les surfaces pro-
thétiques et la surface d'appui muqueuse.
- Le joint postérieur, le joint sublingual, qui peuvent être
mal conçus, trop courts, trop longs, entravant le jeu des
ligaments ptérygo-mandibulaires, du frein de la langue.
- Le joint vestibulaire, trop épais, trop court, trop long,
incompatible avec la morphologie et le jeu fonctionnel
de la zone de réflexion.
- Les bords prothétiques qui entravent le jeu des freins, et
des différentes insertions ligamentaires.
- La forme des extrados prothétiques dans la région para-
tubérositaire qui interfèrent lors des mouvements de
latéralité.
- Les erreurs d'occlusion, qui provoquent une bascule de
Fig. 20-2a En absence de joint postérieur, allongement de la pro-
la prothèse lors de la fermeture.
thèse avec de la cire.
Les corrections de la base prothétique par réduction sont
le plus souvent faciles à réaliser, mais les corrections par
extensions sont plus délicates et elles s'accompagnent tou-
jours de la réfection de la base prothétique (fig. 20-2a, b, c)
(chapitre 21).

Les mauvais traitements au laboratoire


Les erreurs de polymérisation provoquent des distorsions,
entraînant un manque de rétention, de stabilité prothétique.
De même, lors de la finition, un grattage, un polissage trop
violents altèrent la précision des bords en détruisant leur par-
faite adaptation, donc la rétention (fig. 20-3). La réponse
technique est le plus souvent un nouvel enregistrement des
bords prothétiques, une empreinte de surface de l'intrados
avant une réfection de la base.
Fig. 20-2b Mise en place sur la cire de la résine.

Fig. 20-2c Aspect de l'allongement de la base prothétique après Fig. 20-3 Disparition du joint sublingual provoquée par polissage
élimination de la cire. excessif.
L'absence de salive Lors de l'insertion, la partie postérieure de la prothèse
supérieure peut générer des nausées. Celles-ci sont provo-
Le non-diagnostic ou la non-prise en compte d'une asialie
quées par une mauvaise position du joint postérieur et une
partielle ou totale se trouvent souvent révélés par le manque
épaisseur trop importante de la base prothétique dans les
de rétention dû à l'absence de création du ménisque sali-
régions paratubérositaires (fig. 20-4).
vaire. Dans ce cas, l'étiologie de l'asialie doit être précisée.
En cas de diminution de la sécrétion salivaire, la théra-
peutique fait appel à la stimulation des glandes salivaires
(tableau 20-1).

Tableau 20-1 Thérapeutiques proposées face à une diminution


de sécrétion salivaire.

En cas d'altération physique du parenchyme salivaire pro-


voquée par un syndrome de Gougerot-Sjôgren, par l'ablation
des glandes salivaires ou par une radiothérapie de la sphère Fig. 20-4 Correction des surépaisseurs de la région palatine para-
orofaciale, la prescription de substituts salivaires s'impose. tubérositaire à l'origine de nausées.
Ce sont soit des produits commerciaux tels que Artisial®,
Syaline Spray®, Salinum®, soit des préparations pharma-
ceutiques, ou la réalisation de prothèse avec un réservoir de
salive artificielle3'5.

L'esthétique
L'hypersalivation ou l'hypersialorrhée
L'esthétique est sans aucun doute la doléance la plus déli-
La mastication et la gustation stimulent la sécrétion salivaire. cate à gérer. Théoriquement ce type d'incident ne devrait
De la même manière, l'insertion d'une prothèse peut, de pas arriver mais, si le choix des dents (couleurs, formes,
manière mécanique chez certains patients, induire ce dimensions), le montage n'ont pas été validés de manière
réflexe6"8. Celle-ci est alors 3 à 4 fois plus importante qu'au certaine par le patient et son entourage, de nombreuses dif-
repos9. Cependant, dans le temps, ce réflexe s'estompe et ficultés peuvent survenir. Par exemple, l'utilisation de docu-
le flux salivaire souvent gênant revient à son niveau initial. ments pré-extractionnels et la reproduction parfaite de l'es-
thétique d'après d'anciennes photos peuvent se révéler une
Les nausées erreur. En effet, l'entourage du patient était habitué à un
aspect et le changement s'avère néfaste à leurs yeux. La
Les nausées sont des manifestations réflexes dont l'origine
seule réponse passe par une réévaluation du montage
est innée ou acquise10. Ces dernières résultent de stimuli
esthétique donc de la prothèse (fig. 20-5a, b, c).
visuels, olfactifs, acoustiques ou psychiques ainsi que chi-
miques ou toxiques. Lors de l'élaboration prothétique, leur
prise en compte est indispensable. Pour cela, le praticien doit Les volumes
placer le patient dans une position favorable. Il veillera à avoir Certains patients se plaignent d'une augmentation du
des gestes sûrs, rapides, à utiliser des matériaux qui ne cou- volume, du « poids » des nouvelles prothèses par rapport
lent pas. Ces techniques directes sont complétées par la aux anciennes ou aux précédentes. Deux éventualités: soit
décontraction et la prémédication de Vogalène® ou de la nouvelle prothèse présente de réelles surextensions, soit
Primperan®. la prothèse répond aux critères d'une prothèse réalisée par-
Les posologies sont les suivantes : faitement. Dans le premier cas les corrections s'imposent,
- Vogalène® 5 à 30 mg par 24 heures, soit 2 gélules dans le deuxième cas la situation est plus délicate à gérer.
1/2 heure avant le rendez-vous, et, si nécessaire, 1 à 2 Elle impose d'expliquer, de justifier l'extension maximale de
gélules par 24 heures en post-prothétique pendant la surface d'appui, explications qui malheureusement ne
48 heures. sont pas toujours acceptées par le patient. Au premier rang
- Primperan® 1 à 2 cuillères à café 3 fois par jour pendant de ces doléances, pour la prothèse maxillaire, le recouvre-
2 jours avant le rendez-vous, puis 2 cuillères 2 heures ment de la voûte palatine, le joint postérieur; pour la pro-
avant le rendez-vous. thèse mandibulaire, les extensions rétro-mylohyoïdiennes.
Fig. 20-5a Ancienne prothèse.

Fig. 20-5c Nouvelle prothèse, réalisée selon les photos et refu-


sée par l'entourage de la patiente. Fig. 20-5b Document photographique préextractionnel.

La phonation
Si la dimension verticale d'occlusion est erronée ou modi-
fiée sans raison, les troubles phonétiques, en particulier lors
Elles surviennent quelques jours après la mise en place de
de l'émission de sibilantes, sont évidents. L'étiologie dépend
la restauration prothétique; elles sont relativement nom-
d'erreurs de la dimension verticale, ce qui impose, le plus
breuses, à nouveau objectives et subjectives.
souvent, la réfection de la prothèse.
Par contre, si la dimension verticale d'occlusion est cor-
recte, dans la mesure où les dents prothétiques sont mon-
tées à leur place originelle, le patient ne devrait éprouver La rétention - La stabilisation
aucune difficulté à parler, à prononcer les sibilantes11,12.
Parfois les insuffisances de rétention et de stabilisation se
Cependant, si le patient éprouve une gêne à la pronon-
manifestent quelques jours après l'insertion de la prothèse.
ciation de certains phonèmes, deux causes peuvent être
Les causes peuvent être un frein insuffisamment libéré, une
retenues, la position des dents et la forme de la voûte pala-
mauvaise appréciation du jeu fonctionnel de la zone de
tine.
réflexion et des freins qui l'animent. Les corrections, le plus
Le patient s'adapte facilement à de petits changements
souvent, sont simples.
de position de dents. Il convient le plus souvent de différer
Par contre, l'instabilité peut être due à une mauvaise
toute modification. Les gênes phonétiques sont souvent res-
conception prothétique impliquant les surfaces d'appui, le
senties par le patient, mais en réalité l'entourage n'entend
montage, l'occlusion. La réponse à cette situation est alors
aucun changement. Ces gênes phonétiques doivent être
très délicate, le praticien doit, le plus souvent, envisager la
considérées comme transitoires.
réfection des prothèses.
Par contre, au niveau de la voûte palatine, les variations
de volumes et d'épaisseurs des bases peuvent entraîner
des résultats imprévisibles dont le patient doit être informé. Les blessures
Il lui est ainsi conseillé de s'habituer pendant 2 semaines Théoriquement, dans la mesure où, lors de l'insertion,
environ, pour laisser le temps à la langue de retrouver des l'adaptation de l'intrados et des bords a parfaitement été
appuis. contrôlée, il ne devrait pas y avoir de blessure.
Cependant, en présence de blessures générées par le Les bruits
port de la prothèse, avant toute correction intempestive, le
Le bruit de dents qui s'entrechoquent est souvent attribué aux
praticien doit procéder en trois temps.
dents porcelaine. Cependant, ces manifestations découlent
- 1 er temps - L'intrados et les bords doivent être examinés d'un espace libre réduit, d'une instabilité prothétique d'une ou
avec soin pour rechercher une épine irritative oubliée, qui des prothèses, d'une importante erreur des relations inter-
sera éliminée. Les surpressions, liées au tassement tissu- maxillaires. En cas de classe III où l'espace libre est restreint,
laire, en particulier au niveau des zones non dépressibles la mise en place d'une dent résine au niveau des dernières
telles que les tori, les lignes mylohyoïdiennes, sont ensuite molaires maxillaires peut éviter tout incident sonore.
corrigées avec prudence puis repolies. Les autres points
ou zones concernés ne doivent pas être corrigés.
- 2e temps - Les différentes composantes de l'occlusion La stagnation alimentaire
sont contrôlées. L'accumulation de débris alimentaires sur les contours ves-
La dimension verticale : une dimension verticale d'oc- tibulaires découle d'un montage trop lingual, d'une mau-
clusion surévaluée peut provoquer une hyperhémie de vaise conception des extrados prothétiques, de concavités
la surface d'appui qu'il ne faut pas confondre avec un vestibulaires trop marquées'3.
problème lié à la résine de la base. Les dimensions ver-
ticales sous-évaluées entraînent des surcharges, des L'hygiène
blessures dans la région antéro-supérieure par propul-
sion de la mandibule. Les doléances ne sont pas toujours à sens unique, le prati-
Le plan d'occlusion : la mauvaise orientation du plan occlu- cien peut constater un mauvais entretien ou une mauvaise
sal s'accompagne de surcharges, d'instabilité prothétique. hygiène de la prothèse. Il lui incombe, d'une part, d'en faire
Dans les deux cas la réfection de la prothèse s'impose. la remarque au patient et d'autre part de réitérer les conseils
L'occlusion: en cas d'erreur ou d'imprécision occlusale, d'hygiène préalablement dispensés.
la relation centrée est à nouveau enregistrée puis les pro-
thèses sont remises en articulateur pour permettre de Les allergies
nouvelles corrections occlusales. Si les blessures géné- Certains problèmes d'intolérance des tissus de la surface
rées par l'occlusion sont trop douloureuses, la région pro- d'appui peuvent s'installer dans la mesure où le taux de
thétique concernée est enduite de crème anesthésiante monomère résiduel est élevé, dépassant 2 °/o. Avec des
(Xylocontact®) puis l'occlusion est contrôlée. résines thermopolymérisables, cette éventualité découle
- 3e temps - Dans la mesure où tous les contrôles ont été d'un rapport poudre/liquide erroné, d'une polymérisation
effectués et les corrections, si elles sont réalisables, pra- mal conduite où le taux de monomère résiduel est trop élevé.
tiquées, la répartition de la charge occlusale sur la sur- La manifestation est alors objective, un érythème qui corres-
face d'appui est correcte. Les douleurs au niveau des pond à l'étendue de la surface prothétique. Cependant, le
blessures sont fortement réduites, confirmant leur étio- taux de monomère résiduel diminue dans le temps surtout
logie occlusale. pour le méthacrylate de méthyle,, un peu moins pour la for-
maldéhyde14.
Les morsures jugales et linguales Par contre, le rôle allergène des fibres inclues dans la
résine ne semble pas devoir être retenu, contrairement à
Trois causes doivent être retenues :
celui des colorants15,16.
- L'absence de surplomb entre les cuspides vestibulaires
et entre les cuspides linguales. Les remodelages des
faces vestibulaires des dents mandibulaires et des faces
palatines des dents maxillaires répondent à ce type de
doléance.
- L'absence de concavité dans la région vestibulaire et dis- La phonation
taie des extrados de la prothèse mandibulaire qui Si, après quelques jours, les troubles de phonation persis-
empiète sur le volume jugal. Ce phénomène est accen- tent, une réponse s'impose. L'étiologie résulte soit de l'ab-
tué lorsque la prothèse précédente était sous-étendue sence d'appui entre la langue et les surfaces palatines ou
et n'occupait pas les zones des trigones rétromolaires. dentaires, soit d'un volume prothétique trop important rédui-
- La forte réduction de l'espace entre les prothèses au sant l'espace lingual.
niveau des tubérosités et des trigones. Si ce manque Cliniquement il convient de comparer, si possible, les
d'espace résulte de prothèses trop épaisses il est facile prothèses actuelles avec d'anciennes prothèses qui don-
de les amincir. Il n'en est pas de même si l'espace est naient satisfaction. Les causes sont souvent une morpholo-
anatomiquement réduit, inférieur à 1 mm, ce qui favo- gie erronée de la voûte palatine, une position des dents et
rise à la fois un pincement de la joue et une légère dia- la forme de leurs faces linguales qui n'offrent pas de bon
pneusie jugale. Cependant, avec le temps, ce type de point d'articulation à la langue17. Si le diagnostic étiologique
doléance disparaît. est incertain, la mise en place de résine à prise retardée peut
Par contre, les contre-indications sont nombreuses et ne
doivent pas être négligées : d'une part la base prothétique
initiale doit être suffisamment épaisse, pour pouvoir être
réduite de 2 mm environ sans provoquer de fracture ; d'autre
part le patient doit être informé que la base souple dite per-
manente a une durée de vie limitée, limite dépendant des
conditions d'hygiène, de vie du patient et du matériau uti-
lisé. En effet, ces matériaux vieillissent, perdent leur qualité
d'élasticité, se décollent, se détériorent (fig. 20-7).
Cliniquement, lorsque les corrections et adaptations de
l'intrados de la prothèse existante ont été pratiquées, la pro-
thèse est adressée au laboratoire. Celui-ci réalise la base
souple selon la technique indirecte (chapitre 26).

Fig. 20-6 Hydrocast compensant les erreurs de profil de la voûte


palatine.

contribuer à révéler l'étiologie du problème et pallier tem-


porairement les difficultés phonétiques (fig. 20-6). Dans un
deuxième temps l'extrados prothétique est corrigé.

Le goût
Après l'insertion d'une nouvelle prothèse, le patient se plaint
parfois « d'avoir perdu » le goût. Cette sensation d'agueusie est
souvent reliée au recouvrement de la voûte palatine, qui, pour-
Fig. 20-7 Aspect macroscopique de la détérioration d'une base
tant, ne comporte pas de bourgeon du goût (chapitre 3).
souple.
En fait, il n'existe pas de justification physiologique à cette
sensation ; mais la complexité de la fonction gustative asso-
Les brûlures buccales
ciée aux facteurs somesthésiques de la cavité buccale, à l'ol-
faction et à l'aspect psychologique lié à l'insertion d'une nou- Il convient d'établir un diagnostic différentiel entre les mani-
velle prothèse peuvent être incriminés18. La création de festations d'une réelle intolérance tissulaire et le syndrome
reliefs ne semble pas pallier ce type de doléances. des brûlures buccales23. Dans ce dernier cas, les sensations
de brûlures sont ressenties sur la pointe, les bords, le dos
La mastication de la langue, entre la muqueuse et la base prothétique24.
De nombreux facteurs ont été proposés pour expliquer cette
L'efficacité masticatoire d'un patient édenté total est toujours
symptomatologie dénuée de tout signe clinique. L'alcool,
réduite, le patient doit en être informé. En effet, chez un
édenté total la puissance masticatoire est 4,5 fois moindre que l'utilisation excessive de bain de bouche, le tabac mais sur-
chez un patient denté, environ de 16 kg contre 74 kg. De plus, tout les effets secondaires de nombreux médicaments tels
la morphologie des dents prothétiques ne semble avoir que les diurétiques, les problèmes psychologiques et leurs
aucune incidence sur les forces masticatoires19. traitements (chapitre 4) semblent largement contribuer à
cette symptomatologie25 (tableau 20-2).
Les douleurs
Tableau 20-2 Causes possibles du syndrome des brûlures buc-
Il est rare que des douleurs ne s'accompagnent pas de
cales. (D'après Budtz Jorgensen25)
signes cliniques tangibles. Cependant, les muqueuses très
fines, les émergences nerveuses peuvent par compression
générer des douleurs difficiles à traiter.
Pour répondre à ce type de manifestation, il est possible
d'interposer entre l'intrados de la base et la muqueuse un
matériau souple créant ainsi une base souple 20-22 . Cette
approche est plus particulièrement indiquée en présence de
tissus de soutien fragile, d'émergences nerveuses doulou-
reuses, de forte résorption, de contre-dépouilles très mar-
quées. Elle peut concerner l'ensemble de la surface d'appui
ou bien n'intéresser qu'une partie de l'intrados au niveau du
trou mentonnier, des tori, des lignes mylohyoïdiennes par
exemple.
9. Jensen JCL, Brodin P, OrstavikJ. Parotid salivary flow rates during
immediate denture treatment. J Oral Rehabil, 1991; 18: 155-
162.
Celles-ci résultent du manque de suivi prothétique. Celui-ci 10. Bertrand C, Hue 0. Le réflexe nauséeux en prothèse. Cah
Prothèse, 2002 ; 117:57-66.
est le plus souvent de la responsabilité du patient, qui n'a
11. Seifert E, Runte C, Riebandt M, Lamprecht-Dinnesen A,
pas effectué de visites régulières.
Bollmann F. Can dental prostheses influence vocal parameters?
La prothèse de manière lente, insidieuse :
J Prosthet Dent, 1999; 81 : 579-585.
- perd ses qualités biomécaniques; 12. Runte C, Lawerino M, Dirksen D, Bollmann F, Lamprecht-
- altère les tissus de soutien, générant des stomatites pro- Dinnesen A, Seifert E. The influence of maxillary central incisor
thétiques, accentuant la résorption ; position in complete dentures on sound production. J Prosthet
- modifie le comportement des organes périphériques, Dent, 2001 ; 85 : 485-495.
par diminution de la dimension verticale d'occlusion, ce 13. Minagi S, Suenaga K, Sato T, Nishigawa MG, Hara T. The effect
qui provoque une modification de l'esthétique et favo- of the mandibular buccal denture surface on food retention. Int
rise l'apparition de chéilites angulaires. J Prosthodont, 1 9 9 2 ; 5 : 4 5 7 - 4 6 1 .
14. Huang FM, Tai KW, Hu CC, Chang YC. Cytotoxic effects of den-
Face à ces problèmes, la réponse thérapeutique impose
ture base materials on a permanent human oral epithelial cell
de refaire une nouvelle prothèse ou de pratiquer une réha-
line and on primary human oral fibroblasts in vitro. Int J
bilitation de la prothèse existante suivie d'une réfection com- Prosthodont, 2001 ; 14: 439-443.
plète. 15. Valitu PK. In vitro cytotoxicity of fiber-polymethyl metacrylate
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109-112.
Le port de prothèses partielles ou complètes plus ou moins tation du plan occlusal, l'esthétique, le montage doivent
inadaptées s'accompagne ou provoque des altérations de relativement bien répondre aux exigences habituelles.
l'ensemble des tissus impliqués dans le port de ces pro- Cette thérapeutique est, de préférence pour ne pas dire
thèses. Les muqueuses, les muscles, les articulations tem- obligatoirement, conduite par l'intermédiaire d'un dupli-
poro-mandibulaires sont les éléments les plus concernés. cata de la prothèse existante. Elle est suivie de la réali-
Si les altérations musculaires et articulaires sont souvent sation d'une nouvelle prothèse.
corrigées lors de la phase préprothétique, il n'en est pas de - Réhabiliter la surface d'appui après la réalisation de la
même pour les tissus de la surface d'appui, qui peuvent être prothèse. Cette approche, dite post-prothétique, permet
traités lors d'une phase pré ou post-prothétique. Cependant, d'améliorer la sustentation, la stabilisation, la rétention
les objectifs thérapeutiques et les séquences cliniques sont d'une prothèse nouvellement réalisée. Cependant, cette
très comparables. approche thérapeutique ne doit pas être considérée
dans l'esprit du patient comme une manière de « récu-
pérer » la prothèse récemment insérée, mais comme fai-
sant partie de la thérapeutique. À ce titre, elle a dû être
annoncée au patient lors de l'établissement du plan de
traitement.
- Réhabiliter l'intrados d'une prothèse existante. Celle-ci, le
plus souvent ancienne, possède des qualités essentielles
La réhabilitation des tissus de soutien, en particulier le réta- que sont l'acceptation et l'intégration psychologique. De
blissement de l'homéostasie des tissus épithélio-conjonctifs, plus, l'ensemble des critères techniques sont respectés,
fait appel à l'utilisation de résine à prise retardée. Ces tech- exception faite d'une surface d'appui sous-étendue,
niques décrites au départ par Lytle (1957) et Chase (1961) d'une inadaptation de l'intrados à la surface d'appui qui
ont depuis été largement reprises en particulier par avec le temps s'est modifiée ou de l'altération de la résine
J. Lejoyeux(1962)1-3. de la base. Dans ces circonstances cliniques, la réhabili-
tation se réalise avec la prothèse du patient.
Ces trois éventualités cliniques conduisent à des
séquences opératoires très différentes (fig. 21-1).
Ces procédés de traitement des surfaces d'appui ont trois
objectifs :
- Réhabiliter la surface d'appui avant la réalisation d'une
nouvelle prothèse. Cette approche préprothétique est Les résines dites résines à prise retardée sont extrêmement
réalisée si l'ensemble de la prothèse existante est par- nombreuses mais la connaissance de leurs propriétés, de
tiellement inadaptée, l'inadaptation concernant principa- leurs caractéristiques physico-chimiques s'avère indispen-
lement la surface d'appui. Par contre le niveau, l'orien- sable pour en obtenir une parfaite manipulation.
Fig. 21-1 Les différents protocoles de la réhabilitation de la surface d'appui.

Le matériau idéal doit présenter les qualités suivantes : la pénétration de l'alcool dans les billes de PMMA qui, alors,
présenter un fluage initial élevé pour se modeler délicate- gonflent, permettant aux plastifiants de s'y infiltrer, prélude
ment sur les tissus muqueux, se déformer pour s'adapter à la phase de gélification.
aux modifications des tissus, absorber les pressions fonc-
tionnelles et les répartir sur la surface d'appui4'7. 2e phase - La gélification
Ces matériaux se composent d'une poudre contenant
du polyméthyl-méthacrylate ou du polyéthyl-méthacrylate et Cette phase est capitale, car ses caractéristiques cliniques
d'un liquide contenant de l'éthanol et différents phtalates qui sont en liaison directe avec l'application thérapeutique.
agissent comme plastifiants8. Cliniquement pour le praticien, le temps de gélification cor-
respond au temps dévolu au garnissage de l'intrados, à l'in-
La réaction chimique globale comprend 5 phases:
sertion, à l'adaptation à la surface d'appui et au modelage
des bords (fig. 21-2).
1 re phase - Le mélange En dehors de paramètres physico-chimiques tels que la
Il doit toujours être réalisé en respectant les proportions teneur en alcool, le type de plastifiant, le rapport
poudre/liquide préconisées par le fabricant. En effet, les pro- poudre/liquide, le temps de gélification dépend surtout des
priétés physiques auxquelles le praticien aspire dépendent matériaux employés.
du respect de ces proportions. Les composants sont versés Ce temps peut en effet varier de 4 minutes environ à
dans un récipient puis spatulés. Cette manipulation facilite plus de 15 minutes (fig. 21-3) 9-12 .

Fig. 21-2 La phase


de gélification.
Fig. 21-3 Temps de gélification de différentes
résines à prise retardée.

Fig. 21-4 Importance du fluage en fonction


des matériaux.

3e phase - Le fluage repris par la salive alors que celle-ci et ses composants pénè-
13 trent dans la base souple 16 (fig. 21-5).
Comme précédemment, le fluage est lié au matériau . Il
Cet échange s'accompagne d'un durcissement du maté-
correspond aux capacités du matériau à se déformer, à
riau et d'une perte de l'intégrité de l'état de surface, qui
s'adapter aux tissus, et à ces derniers à modeler le maté-
devient rugueux. Cette rugosité favorise la colonisation bac-
riau. Débutant après la phase de gélification, la durée du
térienne et entraîne des irritations de la muqueuse. Pour pal-
fluage est extrêmement variable. Elle dépend du type de
lier ce phénomène plusieurs techniques ont été proposées :
matériau et du respect des rapports poudre-liquide
- Le renouvellement complet du matériau. - Cette
(fig. 21-4).
approche est théoriquement simple mais cela implique
de recommencer l'ensemble des opérations de mise en
4e phase - La phase élastique place de la résine à prise retardée avec tous les risques
Elle correspond aux déformations réversibles de la résine que cela implique17.
sous l'effet des contraintes occlusales. Comme précédem- - L'enduction de la surface à l'aide de produits qui s'op-
ment, tous les matériaux possèdent cette propriété, dont posent aux échanges salive-résine rend la surface du
l'amplitude néanmoins varie selon le type choisi. Le Visco- matériau lisse, les micro-organismes y adhérent moins.
Gel® est le matériau le plus élastique alors que le Fitt® et Ces produits dits « protecteurs » sont commerciaux, tels
l'Ivoseal® sont très peu élastiques. Le Coe-confort® présente que le Permaseal®, le Kreguard®, le Flow control®, soit
des propriétés intermédiaires14,15. préparés par le praticien comme le Monopoly18-20. Ce
dernier découle d'un mélange entre 10 portions de
liquide et 1 portion de poudre, qui est porté à 54 degrés
5e phase - La phase de dessiccation
pendant 8 à 10 minutes. Après refroidissement, il devient
Au cours du temps, la résine à prise retardée perd ses qua- sirupeux. Il est ensuite conservé à 4 degrés, dans un réci-
lités élastiques. Les esters alcooliques et les plastifiants sont pient opaque.
Fig. 21-5 Le durcissement et la
dégradation de la résine à prise retar-
dée résultent de l'échange entre les
esters alcooliques et la salive.

Les propriétés physicochimiques des résines varient d'un


matériau à l'autre. Mais cliniquement le choix de celles-ci
doit répondre aux objectifs thérapeutiques souhaités.
Pour le traitement des altérations tissulaires de la surface
d'appui, le produit employé doit posséder un temps de géli-
fication relativement long, un temps de fluage prolongé et
de bonnes propriétés viscoélastiques.
A contrario, si ces matériaux sont utilisés dans une phase
post-chirurgicale, ils doivent présenter un coefficient de
fluage très faible pour éviter toute réduction de la dimension
verticale, et/ou pour maintenir et guider la cicatrisation.

Que ce soit dans une phase pré ou post-prothétique, les


Fig. 21-6 Le silicone fluide révèle les zones en surpression, les
séquences cliniques du traitement de la surface d'appui sont
bords en surextension, éléments ensuite corrigés.
identiques. Dans la mesure du possible, il est préférable de
ne traiter qu'une seule prothèse à la fois, car il est très déli-
cat de réaliser simultanément le traitement de deux arcades. cones fluides s'avère, pour ce contrôle, très utile
(fig. 21-6). À ces corrections ponctuelles s'ajoutent des
Le traitement de l'arcade mandibulaire corrections qui doivent être toujours pratiquées : l'in-
trados prothétique est creusé en regard des trigones
Les séances sont plus ou moins nombreuses mais elles se rétromolaires et des lignes mylohyoïdiennes, enfin le
succèdent selon les séquences suivantes : bord prothétique au niveau du joint sublingual est rac-
courci par un meulage dirigé parallèlement au plan
1re séance occlusal (fig. 10-7 et fig. 21-7a, b).
Cette séance se déroule en quatre temps. 3e temps - L'intrados est nettoyé à l'aide d'une pointe
- 1er temps - Les erreurs d'occlusion sont corrigées par montée qui dépolit l'ensemble de la surface, puis
l'élimination des contacts prématurés, par l'adjonction de dégraissé avec du chloroforme ou de l'éther. La résine à
résine au niveau des dents de manière à rétablir si néces- prise retardée choisie est préparée selon les proportions
saire le plan occlusal et la dimension verticale d'occlu- définies par le fabricant, puis placée dans l'intrados de la
sion. prothèse.
- 2e temps - Les profils, les volumes des extrados, 4e temps - L'ensemble est délicatement inséré dans la
l'adaptation de l'intrados et des bords sont contrôlés. À cavité buccale sur la surface d'appui. Cette mise en place
ce stade la prothèse doit être considérée comme un doit être d'autant plus délicate que la résine est fluide.
porte-empreinte individuel. Les surcontours des extra- Le patient est ensuite guidé en occlusion de relation cen-
dos sont éliminés, les bords en surextension sont lar- trée à la bonne dimension verticale. Il effectue des mou-
gement raccourcis, les freins fortement échancrés de vements des lèvres, des joues pour modeler les bords
manière à assurer ou à rétablir la stabilité de la pro- vestibulaires, des mouvements de déglutition, de pro-
thèse. L'aide de matériaux révélateurs comme des sili- traction de la langue pour modeler la partie linguale.
Fig. 21-7a, b Dans l'intrados des prothèses mandibulaires la ligne mylohyoïdienne (1) les trigones rétromolaires (2) et le joint sub-lingual (3)
sont fortement déchargés.

jacente. Si celle-ci apparaît, les bords devront à nouveau


être raccourcis. Les surextensions de plus de 2 mm sont
éliminées avec des ciseaux, en particulier, dans les
régions rétro-mylohyoïdiennes et sublinguales. Les
extensions seront soutenues à l'aide de résine autopo-
lymérisable (fig. 21-9a, b)
• L'intrados - La résine plastique à prise retardée doit
recouvrir l'ensemble de la surface de l'intrados et pré-
senter une épaisseur de 1 mm. Si, par endroit, la base
apparaît, la ou les zone(s) concemée(s) sont fortement
creusées.
Les différentes zones corrigées sont regarnies sans excès
du matériau utilisé puis l'ensemble est replacé dans la cavité
buccale. Ces phases de retouches ou rectifications sont plus
ou moins nombreuses selon l'importance des problèmes à
Fig. 21-8 Compte-minute permettant de contrôler le temps de régler.
gélification. • Point particulier, le joint sublingual - Chez les patients
dont la musculature linguale est puissante, la position du
Après la gélification du matériau, temps contrôlé par le plancher et de la langue erronée, il est souvent difficile
compte-minute, la prothèse est retirée de la cavité buccale d'obtenir un joint sublingual adéquat. Dans ce cas une
puis examinée (fig. 21-8) : résine à prise retardée à bas coefficient de fluidité
• Les bords - Dans l'idéal, ils doivent être épais et arron- comme le Soft-Liner® ou le Fitt® est indiquée. Le maté-
dis recouvrant d'environ 1 mm la base prothétique sous- riau est modelé, préformé en une lame horizontale

Fig. 21-9a Élimination d'une importante surextension à l'aide de Fig. 21-9b Soutien de la surextension, à l'aide de résine autopo-
ciseaux. lymérisable.
Fig. 21-10a Aspect initial de la région sublinguale. Fig. 21-10b Correction du bord lingual.

Fig. 21-10c Résine à prise retardée placée sur le bord lingual puis Fig. 21-10d Apport secondaire d'Hydrocast®.
modelée (Soft-Liner®).

épaisse qui s'étend distalement tout en laissant libre le


passage du frein de la langue (fig. 21-10a, b, c, d, e).
À la fin de cette première séance, l'intrados est badigeonné
avec un des liquides de protection précédemment cités. Par
ailleurs, si le patient ne peut revenir au cabinet dentaire dans
les 48 heures, il est préférable de lui confier un flacon du
liquide de protection employé. Tous les deux jours, le patient
l'applique sur l'ensemble de la surface. Après 5 minutes, sans
la rincer, le patient replace sa prothèse dans la cavité buccale.
Enfin, différents conseils sont prodigués au patient
(fig. 21-11).
L'emploi des produits de nettoyage de la prothèse est
contre-indiqué20,23. En effet, ces différents produits détério-
rent les résines à prise retardée leur faisant perdre leurs qua-
Fig. 21-10e Résultat final. lités physiques (tableau 21-1):

Figure 21-11 Conseils prodigués au patient suite à la mise en place de résine à prise retardée.
Tableau 21-1 Incompatibilité entre certains couples résines-pro- trados si des zones de surpressions apparaissent au
duits de nettoyage. niveau muqueux ou si des blessures, des douleurs se
situent au niveau des crêtes. Les corrections portent sur
les bords ou sur l'intrados, en respectant le principe sui-
vant : malgré les corrections des bords et de l'intrados, la
prothèse doit toujours pouvoir être remise en place sur
la surface d'appui de manière sûre et précise. Seul le res-
pect de cette règle permet de conserver les relations
occlusales (DVO - ORC) lors des différentes étapes de
la mise en condition tissulaire.
En réponse à ce principe, le praticien peut avoir trois
approches :
- Si la surface d'appui est imparfaite, les bords sont
conservés l'intrados est fortement creusé sur 2 mm
2e séance d'épaisseur environ puis regarni sans excès de résine
Elle se situe 2-3 jours après la première et se déroule à nou- à prise retardée. L'ensemble est replacé dans la cavité
veau en 4 temps : buccale (fig. 21-12a).
- 1er temps - Le patient est interrogé sur les problèmes qu'il - Si les bords sont imprécis, l'intrados est conservé, les
a rencontrés, ressentis tels que le manque de stabilité, les bords sont raccourcis, puis à nouveau regarnis de
zones douloureuses, les gênes ou bien les améliorations résine (fig. 21-12b).
obtenues. Puis, le praticien examine l'occlusion; enfin, - Si la situation est mixte, les retouches sont réalisées
après avoir retiré la prothèse il contrôle l'aspect général du mais en ayant soin de ne jamais perdre l'adaptation
matériau et plus particulièrement les bords et l'intrados. de la prothèse sur la surface d'appui (fig. 21-12c).
- 2e temps - Tout d'abord, en fonction des remarques, - 3e temps - Les différentes corrections effectuées, les
des doléances du patient ou des constatations du prati- zones retouchées sont regarnies du matériau choisi.
cien, celui-ci améliore l'occlusion en corrigeant et élimi- L'ensemble est replacé dans la cavité buccale. La gélifi-
nant les éventuelles interférences occlusales en relation cation terminée, la prothèse retirée est examinée. Les
centrée. Cela permet de mieux stabiliser la prothèse et excès éliminés, les extensions soutenues, les zones où
de mieux répartir les charges occlusales sur la surface la résine apparaît sont corrigées. De la résine à prise retar-
d'appui. Au niveau de la résine retard, les corrections dée est remise en place au niveau des zones corrigées,
s'adressent aux bords si la prothèse est instable, à l'in- ensuite les mêmes séquences pourront être rééditées.

Fig. 21-12a De manière à garder la préci-


sion des relations occlusale obtenues (1),
l'intrados est creusé (2) puis garni de résine
à prise retardée (3).

Fig. 21-12b De manière à garder la préci-


sion des relations occlusales obtenues (1),
les bords sont raccourcis (2) puis garni de
résine à prise retardée (3).
d'une couche de matériau à empreinte de très fine épais-
seur, enfin l'empreinte réalisée.
Dans certains cas, les bords peuvent paraître minces, en
particulier, au niveau du joint sublingual ou des régions
rétro-mylohyoïdiennes. Au moment du garnissage les bords
sont délicatement recouverts d'un matériau à empreinte
très visqueux type Permlastic Heavy®, la rigueur Regular®
(fig. 21-14).

Fig. 21-12c Situation mixte correction partielle de l'intrados et des


bords.

3e séance
Cette séance se poursuit selon la même chronologie que
celle précédemment utilisée, prise en compte des doléances
du patient, examen des bords et de l'intrados, de l'occlusion,
corrections adjonctions de résine à prise retardée.
Ces séquences se renouvellent de séance en séance, Fig. 21-14 Empreinte de réfection réalisée à l'aide de Permlastic
jusqu'à ce que l'intégrité de la surface d'appui soit rétablie Light® au niveau de l'intrados et de Permlastic Heavy® au niveau
et les qualités mécaniques de rétention, de stabilisation, de des bords.
sustentation soient obtenues.
Le laboratoire réalise une réfection totale de la base. Cela
Avant-dernière séance correspond à un changement de l'ensemble de la base en
résine, elle ne doit pas être confondue avec un rebasage.
Lorsque l'ensemble des problèmes a été résolu, la prothèse
Pendant la phase de laboratoire, qui doit être la plus
est adressée au laboratoire pour une réfection totale24. Deux
courte possible, le patient utilise le duplicata ou son
éventualités techniques se présentent:
ancienne prothèse.
- L'intrados de la base présente un état de surface parfait,
des bords précis. Dans ce cas, la prothèse est adressée
Dernière séance
directement au laboratoire (fig. 21-13).
Au retour du laboratoire, la prothèse est contrôlée selon les
critères précédemment exposés puis désinfectée. Théori-
quement, la remise en place se déroule sans aucune diffi-
culté tant au niveau de la muqueuse que de l'occlusion.

Le traitement de l'arcade maxillaire


À l'arcade maxillaire, la mauvaise remise en place de la pro-
thèse lors de ces traitements peut provoquer des erreurs
d'occlusion par une modification de la dimension verticale
et de l'occlusion d'intercuspidie maximale. Il sera donc tou-
jours préférable de pratiquer, des traitements sectoriels et
très rarement des traitements globaux intéressant l'en-
semble de la surface d'appui.

Fig. 21-13 Aspect d'un intrados idéal. Traitements sectoriels


Trois secteurs sont particulièrement concernés par cette
- L'intrados de la base n'est pas parfait, présente de légères approche thérapeutique. Les bords prothétiques au niveau
rugosités, de petites imprécisions. Dans ce cas, une du joint vestibulaire, le joint postérieur et certaines parties
empreinte de réfection s'impose. Les matériaux de choix de l'intrados, en particulier, dans la région antérieure.
sont les polysulfures light type Permlastic®. Pour cela, - Le joint vestibulaire - Les bords vestibulaires de la
l'intrados est badigeonné d'un adhésif, puis recouvert prothèse maxillaire sont corrigés selon les mêmes prin-
Fig. 21-15 Réhabilitation de la zone de réflexion. Fig. 21-16 La prothèse raccourcie, ajouts progressif de la résine :
a) temps 1 ; b) temps 2 ; c) temps 3.

cipes et règles que ceux appliqués à la prothèse mandi- logies de ce phénomène, la longueur qui n'est pas accep-
bulaire : les bords trop longs sont raccourcis, les freins tée par le patient. Pour pallier cette difficulté, la prothèse
dégagés, les surépaisseurs des contours périphériques est raccourcie jusqu'à ce que le patient la tolère. Dans un
éliminées. De nouveau, les matériaux révélateurs deuxième temps, de la résine à prise retardée à faible coef-
comme les silicones contribuent de façon majeure à cet ficient de fluidité est placée au niveau distal du bord pro-
ajustage. Les corrections sont ensuite repolies, les sur- thétique palatin. Progressivement, le patient s'habitue à
faces dégraissées puis enduites de résine à prise retar- cette extension. Cet apport est renouvelé de séance en
dée. La prothèse est réinsérée dans la cavité buccale. séance, pour atteindre la limite adaptée à la réalisation
Après quelques instants le praticien mobilise la zone de d'un joint postérieur (fig. 21-16).
réflexion muqueuse, le patient effectue des mouve- - La surface d'appui - En regard de la région concer-
ments de protraction, de rétraction, d'abaissement des née, la prothèse est fortement creusée sur une épais-
lèvres, des mouvements d'ouverture et de latéralité de seur de 2 mm si possible. Éventuellement, des orifices
la mandibule, autant de mouvements qui modèlent la vestibulaires sont percés dans la base pour communi-
résine. La gélification terminée, la prothèse est retirée de quer avec l'extrados. La résine à prise retardée est pla-
la cavité buccale, les bords contrôlés, les surextensions cée dans la zone creusée. Puis la prothèse est réinsérée
éliminées ou soutenues, les zones où le matériau a été dans la cavité buccale. Les excédents de résine s'échap-
chassé corrigées. Généralement en deux ou trois pent par les orifices, prévenant ainsi les risques d'erreur
séances l'harmonie des bords de la prothèse est rétablie d'occlusion (fig. 21-17a, b, c, d).
et la rétention améliorée (fig. 21-15). Dans tous les cas les corrections terminées, la prothèse
- Le joint postérieur - Les nausées s'opposent quelque- est adressée au laboratoire pour la réfection de la base, qui
fois à l'insertion de la prothèse. Parmi les nombreuses étio- doit être réalisée dans les délais les plus brefs.

Fig. 21-17a Lésion de la crête au niveau antérieur. Fig. 21-17b La prothèse est fortement creusée en regard des
zones pathologiques.
Fig. 21-17c La résine s'échappe par les trous pour éviter toute Fig. 21-17d Garnissage de l'intrados avec peu de résine à prise
erreur d'occlusion. retardée.

Traitement global d'appui muqueuses est prévu, il est préférable de créer un


espacement au niveau de la voûte palatine. Pour cela, une
Cette approche thérapeutique est délicate car la mise en
feuille polyéthylène de 2 mm d'épaisseur est thermoformée
place d'un matériau à prise retardée, dans l'ensemble de
sur le modèle. Elle recouvre l'ensemble de la muqueuse
l'intrados, provoque une augmentation de la dimension ver-
masticatoire jusqu'à la muqueuse libre. La maquette en cire,
ticale d'occlusion liée à l'épaisseur du matériau plastique et
le montage sont réalisés, la feuille de polyéthylène située
surtout des « erreurs d'occlusion » liées aux déplacements
dans l'intrados. L'ensemble des phases de mise en moufle
frontaux et transversaux de la prothèse.
et de polymérisation est conduit, la feuille de polyéthylène
Au stade préprothétique, la mauvaise adaptation de la
toujours adjointe à la maquette. Lors de l'insertion prothé-
prothèse permet le plus souvent la mise en place sans dif-
tique, la feuille est enlevée, la prothèse s'appuie à sa péri-
ficulté de la résine à prise retardée. Après nettoyage et
phérie, laissant un vide entre la muqueuse et l'intrados.
dégraissage de l'intrados, celui-ci est garni, sans excès, de
Celui-ci est garni sans excès d'une résine à prise retardée
résine à prise retardée. L'ensemble est replacé dans la cavité
(fig. 21-18).
buccale. L'occlusion vérifiée, les joues, les lèvres sont mobi-
Cette approche esttout particulièrement indiquée en cas
lisées pour éviter toute surextension. Les étapes sont iden-
d'altération de la surface d'appui liée à une candidose buc-
tiques à celle déjà présentées.
cale. Dans ce cas des produits antifongiques ou des anti-
Au stade post-prothétique, pour ne pas modifier les rela-
biotiques sont mélangés à la résine à prise retardée. L'apport
tions occlusales, l'intrados devra être creusé pour laisser une
d'Izoconazole (Fazol®) à du Coe-Soft, du Fitt semble don-
place suffisante à la résine. Cette opération est souvent dif-
ner de bons résultats. Par contre, dans cette approche thé-
ficile voire impossible en raison de la faible épaisseur de la
rapeutique, les produits protecteurs ne doivent pas être uti-
partie palatine. Cependant, dans la mesure où, dans le plan
lisés.
de traitement, le traitement post-prothétique des surfaces
La résine est fréquemment changée, pour renouveler
l'action des antibiotiques, et exploiter au mieux la phase de
fluage de la résine.

Les altérations du comportement musculaire sont le plus


souvent traitées dans la phase préprothétique par les diffé-
rents moyens et techniques précédemment exposés (cha-
pitre 5). Cependant, les résultats obtenus ne sont pas tou-
jours parfaits.
Deux situations sont le plus souvent abordées dans une
phase post-prothétique : les corrections de dimension ver-
Fig. 2T-18 La feuille de polyéthylène préalablement thermofor- ticale, l'établissement d'une relation condylienne équili-
mée est enlevée après la mise en moufle. brée.
Dans la mesure où la diminution de la dimension verticale
d'occlusion s'accompagne d'un maintien de l'espace libre,
le rétablissement de la dimension verticale de repos et d'oc- 1. Lytle RB. Management of abused oral tissues in complete den-
clusion doit être progressif (chapitre 10). Ce rétablissement ture construction. J Prosthet Dent, 1957 ; 7 : 27-42.
impose dans un premier temps que de nouvelles prothèses 2. Chase WW. Tissue conditionning utilising dynamic adaptive
soient refaites à la dimension verticale d'occlusion du stress. J Prosthet Dent, 1961 ; 11 : 804-815.
patient, puis dans un deuxième temps que cette dimension 3. Lejoyeux J, Lejoyeux R. Mise en condition en prothèse amo-
vible. Paris: Masson, 1993.
soit progressivement augmentée :
4. Mc CarthyJA, Moser JB. Mechanical properties of tissues condi-
- par apport de résine sur les faces occlusales des dents
tioners. Part I : Theorical considerations, behavioral characteris-
prothétiques. tics, and tensile properties. J Prosthet Dent, 1978 ; 40: 89-97.
- par apport de résine à prise retardée sur l'extrados au 5. Grimonster J. Les conditionneurs tissulaires et leurs emplois en
niveau de la voûte palatine, pour influencer l'espace pho- prothèse adjointe. Composition et propriétés physico-chi-
nétique, respecter l'espace de Donders et provoquer un miques. Actual Odonto-Stomatol, 1996; 196:581-592.
abaissement de la mandibule. 6. Shigeto N, Hamada T, Iwanaga H, Murata H. Pressure distribu-
Cependant, l'adaptation du patient à ces modifications tion using tissue conditioner on simplified edentulous ridge
d'épaisseur de la prothèse est lente, 90 jours environ25. models. Part 1 : The influence of the height of the residual ridge.
Int J Prosthodont, 1995 ; 8: 490-495.
7 Shigeto N, Hamada T, Iwanaga H, Murata H. Pressure distribu-
tion using tissue conditioners on simplified edentulous ridge
models. Part 2 : The influence of the powder particle size and
Chez certains patients, l'instabilité et les altérations des rela- ethanol content. Int J Prosthodont, 1995; 8: 557-563.
tions intermaxillaires sont quelquefois importantes voire 8. Braden M. Tissue conditioners. Part I : Composition and struc-
majeures. Il est alors difficile lors d'une phase préprothétique ture. J Dent Res, 1970; 49: 145-148.
de retrouver une relation condylienne physiologique surtout 9. Graham BS, Jones DW, Sutow EJ. Clinical implications of resi-
si la prothèse existante est imparfaite, erronée, instable. lient denture lining material research. Part I : Flexibility and elas-
Confronté à cette situation clinique, le praticien réalise ticity . J Prosthet Dent, 1989; Otc ; 62 : 421-428.
les deux prothèses. La prothèse maxillaire répond aux cri- 10. Murata H, Hamada T, Djulaeha E, Nikawa H. Rheology of tissue
conditioners. J Prosthet Dent, 1998; 79 : 188-99.
tères habituels: orientation du plan occlusal, montage des
11. Braden M. Tissue conditioners. Part II : Rheologic properties. J
dents antérieures et postérieures. Par contre sur la prothèse
Dent Res, 1970;49:496-501.
mandibulaire, seules les dents antéro-inférieures définitives
12. Graham BS, Jones DW, Sutow EJ. Clinical implications of resi-
sont mises en place, deux bourrelets en résine remplacent lient denture lining material research. Part II : Gelation and flow
les dents postérieures. Les prothèses sont insérées, puis les properties of tissue conditioners. J Prosthet Dent, 1991 ; 65:
bourrelets sont corrigés par soustraction ou addition pour 413-418.
rétablir progressivement la stabilité occlusale (fig. 21-19). 13. Murata H, Iwanaga H, Shigeto N, Hamada T. Initial flow of tis-
Lorsque les structures condyliennes retrouvent leur position sue conditioners - Influence of composition and structure on
d'équilibre physiologique, les bourrelets sont remplacés par gelation. J Oral Rehabil, 1993; 20: 177-187.
les dents prothétiques puis la réfection de la prothèse man- 14. Murata H, Murakami S, Shigeto N, Hamada T. Viscoelastic pro-
dibulaire est réalisée au laboratoire. perties of tissue conditioners- Influence of ethyl alcohol content
and type of plasticizer. J Oral Rehabil, 1994; 21 : 145-156.
15. Murata H, Shigeto N, Hamada T. Viscoelastic properties of tis-
sue conditioners - Stress relaxation test using Maxwell model
analogy. J Oral Rehabil, 1990; 17:365-375.
16. Wilson J. In vitro loss of alcohol from tissue conditioners. Int J
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ticity of permanent soft lining materials. J Dent, 1993; 2: 171-
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18. Aslan Y, Avci M. Monopoly coating on acrylic resin surfaces. A
bacteriologic study. J Prosthet Dent, 1990; 63 : 478-481.
19. Malmstrom HS, Mehta N, Sanchez R, Moss ME. The effect of
two different coatings on the surface integrity and softness of
a tissue conditioner. J Prosthet Dent, 2002; 87: 153-157
20. Dominguez NE, Thomas G, Gerzina TM. Tissue conditioners pro-
tected by a poly(methyl methacrylate) coating. Int J Prosthodont,
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21. Nikawa H, Iwanaga H, Hamada T, Yuhta S. Effects of denture
cleansers on direct soft denture lining materials. J Prosthet Dent,
Fig. 21-19 Bourrelet en résine sur la prothèse mandibulaire. 1994;72:657-662.
22. Hayakawa I, Takahashi Y, Morizawa M, Kobayashi S, Nagao M. 24. Pissiotis A, Panagiotouni E, Sofou A, Diakoyanni I, Kaloyan-
The effect of fluorinated copolymer coating agent on tissue nidesA. Dimensional stability and reproduction of surface detail
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complete denture. J Oral Rehabil, 2001 ; 28 : 903-908.
La prothèse adjointe complète unimaxillaire demeure une par les récepteurs muqueux. Ceci entraîne des surcharges
éventualité clinique à laquelle les praticiens se trouvent sou- des tissus de soutien ostéo-muqueux et secondairement des
vent confrontés. La situation la plus fréquente est celle de phénomènes de résorption.
l'arcade maxillaire édentée, opposée à une arcade mandi-
bulaire partiellement dentée dans la région antérieure. En
effet, les canines mandibulaires se maintiennent sur l'arcade
quatre fois plus longtemps que les autres dents naturelles, Il existe un déséquilibre flagrant entre l'étendue de la sur-
suivies par les incisives mandibulaires. Cependant, cette face développée par les racines des dents de chacune des
situation clinique n'est pas unique, les combinaisons sont arcades et les surfaces d'appui muqueuses. Selon Jepsen,
nombreuses, l'arcade dentée pouvant être l'arcade maxil- la surface d'appui radiculaire des dents maxillaires est esti-
laire ou mandibulaire, être totalement ou partiellement den- mée à 3 948 mm 2 , celles des racines mandibulaires de
tée, de manière symétrique ou asymétrique. 3 668 mm 2 . Comparativement, l'étendue de la surface d'ap-
pui muqueuse maxillaire est de 2 2 9 6 m m 2 et la surface
d'appui muqueux mandibulaire 1 225 m m 2 (tableau 22-1).

Tableau 22-1 Surfaces radiculaires des dents maxillaires et man-


Le problème majeur du traitement de cette situation clinique dibulaires.
résulte de l'accumulation des déséquilibres suivants :

La proprioception parodontale régule de manière directe l'in-


tensité, la durée, la direction des contractions musculaires et
participe au contrôle des déplacements mandibulaires. Il n'en
est pas de même pour les extérocepteurs qui tapissent la
muqueuse des surfaces d'appui maxillaire et mandibulaire
dont la densité et la répartition varient selon les arcades. Entre
ces deux sources d'informations somesthésiques, ce désé-
quilibre renforce le rôle des propriocepteurs parodontaux aux
dépens des extérocepteurs muqueux1. Cliniquement, cela se
traduit par une tendance à placer le bol alimentaire au niveau
des dents naturelles, les forces exercées par les muscles élé-
vateurs étant régulées par les récepteurs musculaires et non
Par ailleurs, la surface radiculaire d'une dent perdue est antagonistes de dents naturelles, en particulier dans la région
approximativement 4 fois supérieure à la surface muqueuse incisivo-canine supérieure, des « égressions » des tubérosi-
qui recouvrira l'alvéole3. tés lorsque la prothèse supérieure est instable.

En regard des dents naturelles, la résorption des secteurs Au niveau de l'arcade dentée, les dents restantes peuvent
édentés est fortement accentuée. Ce phénomène est parti- présenter des malpositions telles que des égressions, des
culièrement remarquable chez les patients présentant une versions. De plus, à l'arcade mandibulaire, les dents posté-
édentation complète maxillaire opposée à une classe I de rieures sont susceptibles non seulement d'égresser mais
Kennedy mandibulaire pas ou mal appareillée. Cette situa- surtout de subir une version vestibulaire sous l'effet des pres-
tion s'accompagne d'une forte résorption de la région antéro- sions linguales. Cette vestibulo-version accentue l'angulation
supérieure et postéro-inférieure, ce qui accentue l'angulation des relations intercrêtes (fig. 22-1).
des relations intercrêtes, donc l'instabilité prothétique4. Par ailleurs, les égressions dentaires, en particulier des
dents maxillaires, peuvent ou non être accompagnées par
les structures osseuses de soutien, conditions cliniques qui
compliquent de manière importante la thérapeutique
Les segments édentés peuvent présenter des altérations des (fig. 22-2) 5 . Ces égressions peuvent en effet dépasser le
tissus mous telles que des crêtes flottantes dans les secteurs plan occlusal.

La présence d'une prothèse adjointe totale impose le plus


souvent l'établissement d'un schéma occlusal du type occlu-
sion bilatéralement équilibrée. Celui-ci requiert l'établisse-
ment de contacts occlusaux stables en relation centrée au
niveau des secteurs prémolaires et molaires, des relations
occlusales stables avec des forces dirigées axialement et
l'élimination des contacts antérieurs, aucune interférence
occlusale voire une liberté en relation centrée, 2 mm envi-
ron autour de la relation centrée.
En réponse à l'ensemble de ces constatations et consé-
Fig. 22-1 En absence de dents antagonistes, les dents posté- quences cliniques, l'approche thérapeutique du traitement
rieures inférieures égressent, et sous l'effet des pressions linguales de l'édentement unimaxillaire doit répondre à une systé-
subissent une vestibulo-version (1). matisation certaine.

Fig. 22-2 En absence de dents antago-


nistes (a), l'égression peut être unique-
ment dentaire (b), ou être accompagnée
des tissus de soutien ostéo-muqueux (c).

une phase plus particulièrement consacrée à l'arcade den-


tée et aux relations intermaxillaires.
Ceci impose la réalisation des modèles d'étude, suivie
Chez un patient édenté total unimaxillaire, aux phases clas- de leur mise en articulateur en relation centrée et un bilan
siques de l'examen clinique d'une arcade édentée s'ajoute radiographique des dents restantes.
1er temps
Les maquettes d'occlusion sont préparées. Au niveau de
L'analyse de l'arcade édentée
l'arcade édentée, la maquette présente les caractéristiques
L'examen est comparable à celui habituellement conduit, mais d'une maquette d'occlusion de prothèse adjointe com-
l'attention doit se porter tout particulièrement sur les caracté- plète.
ristiques des crêtes, la présence de tissus fermes ou dépres- Au niveau de l'arcade dentée les conditions sont diffé-
sibles, adhérents ou flottants, d'égressions muqueuses ou rentes. Si l'arcade est complète la préparation d'une
ostéo-muqueuses des tubérosités, de zones fortement résor- maquette d'occlusion est inutile. De même, certains éden-
bées. tements encastrés sont comparables à une arcade dentée,
dans la mesure où il est possible de créer un polygone de
L'analyse de l'arcade dentée sustentation entre les dents postérieures et les dents anté-
rieures. Cette topographie ou répartition de l'édentement
En dehors de l'analyse de la valeur intrinsèque des dents
permet de réaliser un enregistrement de l'occlusion dont la
restantes qui est conduite à la fois par un examen endo-
stabilité autorise une mise en articulateur sûre.
buccal et radiographique, l'examen clinique porte essentiel-
Pour les arcades présentant des édentements posté-
lement sur l'analyse du niveau et de l'orientation du plan
rieurs libres, la maquette d'occlusion est réalisée en cire pour
occlusal6.
prévenir tout risque de fractures des dents du modèle de
Au niveau de la cavité buccale, la position du plan occlu-
travail. Pour la renforcer un fil de renfort est utilisé et surtout
sal est évaluée en fonction des repères anatomiques.
la cire rose est recouverte d'une épaisseur de cire Moyco®.
Au niveau antérieur, la situation des bords libres des
Au niveau des secteurs édentés elle présente des bourre-
dents supérieures est appréciée par rapport aux lèvres, les
lets classiques. Par contre, au niveau des secteurs dentés, la
bords libres devant affleurer ou dépasser légèrement la lèvre
cire recouvre les faces occlusales et déborde sur les faces
supérieure et être parallèles à la ligne bipupillaire.
vestibulaires.
Cependant, cette évaluation critique doit être pondérée par
Cette maquette offre les avantages suivants :
l'esthétique du patient, par son sourire; l'aspect du sourire
- Elle est stable sans crochet.
d'un patient de classe III, n'est pas le même que celui d'un
- Elle protège les bords libres et les pointes cuspidiennes
patient présentant une classe II div.2.
des dents du modèle, évitant tout risque d'éclat ou de
Au niveau postérieur, l'orientation du plan occlusal est
fracture.
évaluée en fonction de différents repères anatomiques :
- À l'arcade maxillaire le plan occlusal doit se situer plus
ou moins parallèlement au plan de Camper, six milli- 2e temps
mètres environ sous l'ouverture du conduit parotidien. Le modèle maxillaire est mis en articulateur. Si l'arcade est
- A l'arcade mandibulaire, les repères anatomiques sont: totalement édentée, il est fixé à la branche supérieure de
le maximum de convexité de la langue, la ligne bucci- l'articulateur à l'aide du plateau de montage ou de l'arc
natrice, le milieu du trigone rétromolaire. facial.
Mais l'utilisation d'une spatule à ciment reste un instru- Par contre, l'utilisation de l'arc facial est indispensable
ment « diagnostique » très pratique. Elle est positionnée dans dans les conditions cliniques suivantes:
la cavité buccale, antérieurement elle s'appuie sur la com- - si l'arcade maxillaire est dentée - En effet, en raison des
missure labiale, distalement elle rejoint le milieu ou le tiers malpositions dentaires qui provoquent des altérations
supérieur du trigone rétromolaire, son niveau objective alors inévitables du plan occlusal, il n'est pas possible de pla-
la position idéale du plan occlusal. La situation verticale des cer le modèle sur le plan d'occlusion idéal représenté
dents naturelles est ainsi rapidement évaluée. par le plateau de montage;
- si, en raison de l'importance de l'altération du plan
occlusal, et de relations squelettiques défavorables l'uti-
lisation de procédés céphalométriques est prévue. - Il
est aussi possible d'utiliser un articulateur géométrique
type Kavo ou Stratos et d'utiliser le protocole propre à
Elle porte sur le niveau et l'orientation du plan occlusal, la ces articulateurs, ce qui permet d'utiliser la technique
dimension verticale d'occlusion et son corollaire l'espace de la calotte.
prothétique disponible, enfin les relations intercrêtes.
Cette phase clinique impose que les modèles soient 3e temps
montés en articulateur, en relation centrée, à la bonne
dimension verticale d'occlusion. La relation centrée est enregistrée en ayant soin de déter-
miner la dimension verticale d'occlusion. Le modèle man-
dibulaire est, ensuite, monté sur un articulateur, permettant
La mise en articulateur une analyse du plan occlusal et de l'espace prothétique dis-
Celle-ci se déroule en trois temps. ponible.
L'analyse du plan occlusal - La technique du drapeau - Elle consiste à déterminer le
centre de la sphère puis à tracer sur les faces vestibu-
Elle fait appel à deux techniques, l'une basée sur le concept
laires des dents mandibulaires l'orientation idéale du
de la sphère, l'autre sur la céphalométrie.
plan occlusal. Pour cela, le modèle mandibulaire est fixé
à la branche inférieure de l'articulateur et le « drapeau »
Plan d'occlusion et concept de la sphère
sur la branche maxillaire. Dans un premier temps, deux
Selon ce concept, les cuspides des dents mandibulaires et arcs de cercles sont tracés sur le drapeau : l'un avec un
le versant antérieur du condyle sont au contact d'une sphère centre condylien, l'autre avec un centre au niveau canin.
d'un rayon de 10,4 cm. Ce concept débouche sur trois appli- Le centre de la sphère est déterminé par l'intersection
cations cliniques qui permettent d'analyser le niveau et des deux arcs. Si le rayon de courbure choisi est le plus
l'orientation puis de corriger le plan occlusal mandibulaire. souvent 10,4 cm en accord avec le concept de la sphère
- La calotte manuelle - Elle correspond à un fer à cheval de Monson, il est possible de le modifier soit en adop-
métallique incurvé. Cette préforme est appliquée tant une valeur de 85 mm comme le suggère Walter, soit
manuellement sur la surface occlusale des dents man- en individualisant ce rayon comme le proposent
dibulaires. Distalement, la calotte devrait se situer au Wadsworth et Orthlieb7-9. Ce dernier insiste sur la prise
niveau des deux tiers supérieurs du trigone rétromolaire en compte du type squelettique du patient. La valeur du
et antérieurement au niveau des bords libres des dents rayon de courbure dépend de la distance séparant le
antéro-inférieures. Ces repères permettent à la calotte plan occlusal du centre de rotation condylien, distance
d'objectiver la présence d'éventuelles surocclusions, mesurée sur un cliché céphalométrique, selon la formule
sous-occlusions, infraclusions. Mais ce dispositif est R = 134 x (1,4 x DPO) (fig. 22-5). Cette technique
imprécis et ne peut être utilisé que si les altérations du impose au préalable, d'avoir réalisé un cliché céphalo-
plan occlusal sont faibles (fig. 22-3). métrique, la mandibule étant maintenue par une
maquette d'occlusion en occlusion de relation centrée à
la dimension verticale d'occlusion.

Fig. 22-3 Calotte d'évaluation du plan occlusal.

- La calotte montée sur articulateur - Le dispositif est com-


parable à la technique précédente. Elle est cependant
beaucoup plus précise. En effet, elle tient compte de l'orien-
tation des modèles vis-à-vis de l'axe charnière. La calotte
fixée sur l'articulateur permet au praticien de parfaitement
analyser et corriger le plan d'occlusion (fig. 22-4).

Fig. 22-5 Tracé du plan occlusal selon Orthlieb.


(1) Plan axio-orbitaire ; (2) plan d'occlusion (Ricketts) ; (3) DPO ;
(R) Rayon de courbure.

Plan d'occlusion et céphalométrie


En dehors de la détermination du rayon de courbure de la
sphère et de l'orientation du plan occlusal, l'utilisation de cli-
chés céphalométriques est indispensable à l'approche dia-
gnostique et thérapeutique des cas complexes. Le préalable
nécessaire à la prise du cliché est la mise en place dans la
cavité buccale de maquettes d'occlusion qui maintiennent
Fig. 22-4 Calotte fixée sur un articulateur SAM. la dimension verticale d'occlusion et l'occlusion de relation
centrée. Les différentes analyses céphalométriques Les bases d'occlusion : les corrections sont réalisées sur
(Ricketts, Delaire) permettent de parfaitement évaluer les le modèle puis sur l'articulateur, la base d'occlusion de
décalages des bases osseuses, d'orienter le plan occlu- l'arcade édentée enregistre le niveau des surfaces occlu-
saP10-11. L'utilisation du système SAM : articulateur, plan d'oc- sales antagonistes. La base d'occlusion est replacée dans
clusion orientable, est particulièrement adaptée au report la cavité buccale et les corrections occlusales sont réali-
des données céphalométriques sur l'articulateur12. sées ; l'adaptation du bourrelet vis-à-vis des faces occlu-
sales de l'arcade dentée permet de contrôler les correc-
tions effectuées.
L'analyse de l'espace prothétique
L'espace prothétique disponible correspond à l'espace qui
sépare le sommet des crêtes de l'arcade édentée des faces
occlusales des dents antagonistes. Il ne peut être analysé
que lorsque la dimension verticale d'occlusion est parfaite-
ment déterminée. Sa valeur impose certains choix tech-
niques, et il convient d'en tenir compte dans l'établissement
du plan de traitement, en particulier lors de la conception de
la base prothétique et du choix du matériau des dents.

Fig. 22-6a Une gouttière est thermoformée sur modèle intact.

La phase préprothétique
L'évaluation, puis la mise en « conformité » du plan d'occlu-
sion représentent les conditions essentielles, mais non suf-
fisantes, du traitement des édentements unimaxillaires.
Les techniques de mise en conformité du plan occlusal
sont au nombre de trois.

Les techniques soustractives


Elles s'adressent aux secteurs édentés et dentés.
Au niveau des secteurs édentés, les interventions
concernent les hyper-développements muqueux ou ostéo-
muqueux qui réduisent l'espace prothétique ou interfèrent
avec le plan occlusal. Elles visent essentiellement à réduire
le volume des tissus muqueux par des plasties en quartier Fig. 22-6b Les corrections occlusales réalisées sur articulateur
d'orange ou osseux par ostéoplastie (chapitre 5). sont les corrections délimitées et objectivées.
Au niveau des secteurs dentés, les corrections font appel
aux trois procédés suivants :

Les coronoplasties
Elles sont indiquées lorsque les altérations du plan occlusal
sont limitées. Dans ce cas les corrections amélaires sont
d'une importance réduite. Elles sont effectuées sur les
modèles d'étude, puis reportées dans la cavité buccale selon
quatre procédés.
- Le simple report : si les corrections sont très peu nom-
breuses et peu importantes, elles sont directement
reproduites sur les dents concernées.
- La gouttière thermoformée : cette technique est particu-
lièrement indiquée lorsque les corrections sont nom-
breuses et importantes13. Elle se déroule selon les Fig. 22-6c Reportée sur le modèle corrigé la gouttière est coupée
séquences suivantes (fig. 22-6a, b, c, d). jusqu'à atteindre les zones rectifiées.
Les techniques additives
Les zones en sous-occlusion doivent être comblées. Pour
cela, les solutions thérapeutiques sont nombreuses, elles
font appel :
- À la dentisterie restauratrice, par la mise en place de com-
posite au niveau occlusal.
- À la prothèse conjointe, par la réalisation d'éléments pro-
thétiques à recouvrement partiel ou complet.
- À la prothèse adjointe, par l'incorporation de faces occlu-
sales solidaires d'un châssis métallique (fig. 22-7a, b).

Les techniques par déplacement


Fig. 22-6d La gouttière est replacée sur l'arcade concernée, les
zones dentaires qui émergent de la gouttière sont éliminées. Les thérapeutiques par déplacements font appel à l'ortho-
dontie ou à la chirurgie. L'orthodontie est une solution thé-
rapeutique de choix pour traiter les versions, les migrations
- Le guide vestibulaire : cette technique est indiquée mais c'est une thérapeutique lente, souvent difficile à adap-
lorsque des restaurations prothétiques sont prévues. Sur ter aux traitements d'une prothèse unimaxillaire. En effet, se
le modèle corrigé au niveau vestibulaire, une bande de pose fréquemment le problème de l'ancrage en raison du
résine autopolymérisable est appliquée au niveau de la nombre souvent réduit des dents restantes et de leur valeur
face vestibulaire des procès alvéolaires et des dents cor- intrinsèque.
rigées14. Cette bande s'arrête exactement au niveau des La chirurgie orthognathique est indiquée lorsque les per-
corrections occlusales. Replacée dans la cavité buccale, turbations du plan occlusal sont majeures, en particulier les
elle objective le niveau de la correction à effectuer. égressions qui réduisent l'espace prothétique ou augmen-
tent la supraclusie antérieure. Les techniques d'intervention
La prothèse conjointe font appel à des impartions sectorielles latérales maxillaires
Si l'importance des corrections occlusales met en jeu l'inté- (Schuchardt), des impactions globales (Lefort I) ou des
grité ou la vitalité des dents concernées, les coiffes à recou- impartions mandibulaires antérieures (Kôlhe). Comme pré-
vrement partiel ou total s'imposent. Les faces occlusales des cédemment (chapitre 5) ces thérapeutiques demandent une
éléments prothétiques sont réalisées en harmonie avec la parfaite coopération entre le patient, le chirurgien et le prati-
morphologie occlusales des dents prothétiques antagonistes. cien traitant.

Les avulsions

Seules sont concernées les dents ou les racines qui pré-


sentent une très faible valeur intrinsèque ou extrinsèque. Le plan d'occlusion ayant été corrigé de façon optimale ou
Cependant, on devra toujours préférer la conservation à ses corrections programmées, le traitement prothétique
l'avulsion de la dent ou de la racine restante. peut alors être entrepris.

Fig. 22-7a Destruction de l'harmonie du plan occlusal par version Fig. 22-7b Rétablissement de cette harmonie par la création
de la 37. d'une face occlusale solidaire du châssis métallique.
Les empreintes - Les matériaux - Ils sont multiples (porcelaine, résine,
composite, amalgame, métal coulé). Le choix découle
L'empreinte de l'arcade dentée est réalisée une fois l'en-
de leur adaptabilité et de leur biocomptabilité.
semble des corrections dentaires et/ou ostéo-muqueuses
- Adaptabilité: cette qualité doit leur permettre de
terminées, Mais si des restaurations prothétiques conjointes
s'adapter, si besoin est, à un espace prothétique
sont prévues, il est préférable de réaliser les préparations,
réduit, de s'harmoniser à la morphologie des dents
de prendre l'empreinte puis de mettre en articulateur le
antagonistes.
modèle reproduisant les préparations. Cette méthode per-
- Biocompatibilité : de manière à conserver la précision
met au laboratoire de construire les éléments fixés en har-
des relations intermaxillaires et ne pas entraîner une
monie avec la morphologie des dents prothétiques antago-
perte de la dimension verticale d'occlusion, l'usure
nistes et en accord avec le schéma occlusal choisi.
entre les dents antagonistes naturelles ou prothé-
L'empreinte de l'arcade édentée est réalisée sous pression
tiques doit être réduite au minimum. Cette usure
occlusale dans la mesure où les conditions suivantes sont res-
dépend des couples choisis et de la présence de la
pectées :
salive qui agit comme lubrifiant17'19.
- patient coopératif;
Cliniquement, dans les secteurs postérieurs, les dents
- relation centrée facile à obtenir;
porcelaine sont indiquées lorsqu'elles sont opposées à des
- arcade antagoniste dentée, dans les secteurs postérieurs,
dents naturelles non abrasées, à des couronnes céramique,
de manière symétrique.
à la rigueur à des couronnes en métal précieux. Les dents
Cette situation assure une répartition équilibrée de la
résine sont indiquées lorsque les dents antagonistes sont
charge occlusale sur la surface d'appui muqueuse. Dans le
abrasées, laissant apparaître la dentine, en présence d'un
cas contraire, l'empreinte est prise sous pression digitale.
espace prothétique réduit, enfin lorsque la morphologie des
dents naturelles est altérée. Au niveau des dents antéro-
Le choix des dents supérieures, les dents résine sont assez souvent indiquées
Les critères de choix des dents prothétiques sont très com- car elles permettent la création d'une concavité linguale.
parables à ceux d'une prothèse adjointe complète bimaxil- Cependant, la présence de dents résine au niveau de l'ar-
laire. Mais si la présence des dents naturelles fournit une cade totalement édentée entraîne une perte de dimension
aide très précieuse dans le choix de leur couleur, de leurs verticale d'occlusion d'environ 0,1 mm par an. Pour pallier
dimensions, de leur morphologie, cette même présence cette perte, il est possible de créer des stops en amalgame,
impose des contraintes dans le choix des matériaux. en composite ou en réalisant des faces occlusales métal-
- La couleur doit bien sûr être en harmonie avec celle des liques qui sont secondairement scellées (fig. 22-8a, b, c).
dents restantes dans la mesure où leurs propres cou-
leurs n'ont pas été altérées. Les caractérisations, fêlures, Le montage
fissures, etc. sont enregistrées pour être éventuellement
Il doit répondre aux objectifs biomécaniques spécifiques à
reproduites par maquillage.
la prothèse adjointe complète, c'est-à-dire l'occlusion bilaté-
- Les dimensions des dents prothétiques sont choisies par
ralement équilibrée.
rapport à celles des dents naturelles restantes. Au niveau
Dans la mesure où l'arcade dentée ne présente que peu
antérieur, les dimensions découlent de l'application des
de dents naturelles, le montage obéit aux principes et aux
deux formules suivantes 15,16 (tableau 22-2).
séquences des montages de prothèse adjointe complète. Il
n'en est pas de même dans le cas d'une arcade édentée
Tableau 22-2 Formules permettant de déterminer le diamètre
opposée à une arcade totalement dentée ou très partielle-
mésio-distal des dents antérieures en présence de dents naturelles
restantes.

Au niveau postérieur, la dimension mésio-distale corres-


pond à celle des dents restantes ou bien, en leur absence,
répond aux critères de choix propres au traitement d'un
édentement total bimaxillaire.
- La morphologie occlusale - Elle doit être en harmonie
avec celle des dents naturelles restantes sur l'arcade de Fig. 22-8a Prothèse unimaxillaire dents résine avec des faces
manière à s'inclure dans le schéma fonctionnel du patient. occlusales en or.
Fig. 22-8b Prothèse unimaxillaire dent résine avec butées occlu- Fig. 22-8c Aspect des butées occlusales 10 ans après leur mise
sales en amalgame. en place.

ment édentée. En effet, le problème résulte de la création un montage inversé, les cuspides vestibulaires des dents pro-
de couples de renversement générés par la direction cen- thétiques maxillaires entrant en contact avec la gouttière
tripète du cycle de mastication, qui déstabilisent la prothèse, intercuspidienne des dents naturelles antagonistes. Le mon-
et par des relations dentaires particulières : au niveau anté- tage classique doit toujours être préféré, mais le montage dit
rieur, le guide incisif et dans les secteurs latéraux, les rela- « inversé ou croisé » ne peut être indiqué qu'en cas de forte
tions intercrêtes. vestibulo-position des dents mandibulaires (fig. 22-9).
La réponse aux problèmes posés dépend de l'arcade Au niveau de l'arcade mandibulaire totalement édentée,
édentée. les déséquilibres occlusaux, précédemment décrits, sont
Au niveau de l'arcade maxillaire (totalement édentée) souvent amoindris en raison de la position des dents pro-
dans le secteur antérieur, le rétablissement de l'esthétique thétiques, position plus linguale. Mais la difficulté de cette
s'accompagne le plus souvent de l'établissement d'un situation clinique est accrue en raison de la faible étendue
important recouvrement incisif. Pour réduire celui-ci, il est de la surface d'appui, de l'absence de relief osseux lié à la
possible: résorption et aux forces occlusales. Le patient doit être
- de réaliser un compromis esthétique en modifiant la informé et averti de cette situation clinique. La mise en place
position des bords libres supérieurs; d'implants s'avère la solution « idéale ».
- de diminuer la hauteur coronaire des dents naturelles
antagonistes;
- de créer une concavité linguale marquée, supprimant
ainsi les contacts occlusaux entre les dents antérieures,
donc les couples de renversement. Le devenir des prothèses unimaxillaires est en grande par-
Au niveau postérieur, la stabilité est directement liée à la tie lié au contrôle exercé par le praticien sur le maintien de
position vestibulo-linguale des dents prothétiques. Pour l'équilibre obtenu lors de la phase prothétique. L'instabilité
réduire le couple de renversement entre le sommet de la s'installe toujours de manière insidieuse.
crête et les sommets des cuspides vestibulaires antago- Elle découle, dans un premier temps, de l'altération de
nistes, les dents postérieures peuvent être placées plus lin- la répartition des contacts occlusaux. Dans un deuxième
gualement, mais cela réduit d'autant l'espace lingual20. temps, le déséquilibre occlusal favorise des phénomènes de
Le montage des dents se déroule selon deux options, soit résorption, des égressions des dents naturelles sans contact
un montage en normocclusion, les cuspides d'appui des antagoniste.
dents mandibulaires entrant en contact avec la gouttière En particulier, en présence d'une prothèse complète
intercuspidienne des dents prothétiques antagonistes, soit maxillaire, opposée à une édentation bilatérale postérieure

Fig. 22-9
a) Le montage « externe » privilégie les
relations dentaires classiques aux dépens
de la stabilité prothétique ; b) le montage
« interne » privilégie la stabilisation de la
prothèse aux dépens du volume lingual.
mandibulaire, il est capital qu'aucun contact ne s'établisse 6. Hue O, Berteretche MV. L'aménagement du plan occlusal en pro-
entre les dents antérieures naturelles et prothétiques. En these adjointe unimaxillaire. Realites cliniques, 1997; 8: 422-
effet, ces contacts déstabilisent la prothèse, favorisant la 433.
7. Walter M, Compensating curves for non-anatomical teeth in
résorption antérieure et entraînant une bascule postérieure
complete denture construction. Eur J Prosthodont Restor Dent,
de celle-ci.
1993; 2 : 11-16.
Régulièrement, le patient doit se rendre au cabinet den- 8. Wadsworth. In: Le mecanisme des machoires (naturelles et arti-
taire pour que le praticien puisse contrôler cette absence de ficielles). Paris: Masson, 1953; 522.
contact et, si contact il y a, l'éliminer. 9. Orthlieb JD. La courbe de Spee: un imperatif physiologique et
De plus, en raison des forces occlusales exercées, qui sont prothetique. Cah Prothese, 1983; 4 4 : 89-116.
plus élevées que chez les patients édentés complets, le 10. Loreille JP. Cephalometrie et orthodontie. Paris: SNPMD, 1992.
risque majeur est celui de la fêlure ou fracture de la prothèse 11. Slavicek R. Revue d'Orthopedie dento-faciale, 1983; 17 :22-36.
complète21. Ce phénomène est particulièrement accentué 12. Hue 0. Manuel d'occlusodontie. Paris: Masson, 1992.
par la présence d'un frein labial marqué, d'un diastème inter- 13. Tan HT. A preparation guide for modifying the mandibular teeth
before making a maxillary single complete denture. J Prosthet
incisif, d'une édentation mandibulaire bilatérale postérieure.
Dent, 1997;77:321-322.
Difficilement évitable cet incident est largement contourné
14. Dawson PE. Evaluation, diagnosis and treatment of occlusal pro-
par l'utilisation de plaques métalliques (chapitre 24). blems, 2nd edition. Saint Louis: Mosby, 1989.
15. Mc Arthur DR. Determining approximate size of maxillary ante-
rior artificial teeth when mandibular anterior teeth are present.
Part III: Relationship of maxillary to mandibular central incisor
widths. J Prosthet Dent, 1985; 5 3 : 540-542.
16. Kern BE. Anthroprometric parameter of tooth selection. J
Prosthet Dent, 1967; 17:431-437.
17 Craig R, Powers JM. Restorative dental Materials, 11th edition. St
1. Taylor A. Neurophysiology of the jaws and teeth. London: Louis: Mosby, 2002
Macmillan Press, 1990. 18. Douglas WH, Delong R, Pintado MR. Wear rates of artificial den-
2. Jepsen A. Root surface measurement and a method for X-Ray ture teeth opposed by natural dentition. J Clin Dent, 1993; 4 :
determination of root surface area. Acta Odont Scand, 1963; 43-47.
21,35-46. 19. Ekfeld A, Oilo G. Wear mechanism of resin and porcelain den-
3. Watt DM, Mc Gregor AR. Designing complete denture. London: ture teeth. Acta OdontScand, 1989;47:391-399.
Saunders, 1976. 20. Winkler S, Monasky GE, Narvekar R. The edentulous mandible
4. Kelly E. Changes caused by a mandibular removable partial den- opposing maxillary natural teeth. Treatment considerations. Dent
ture opposing complete denture. J Prosthet Dent, 1972; 2 7 : Clin North Am, 1990; 3 4 : 143-148.
140-150. 2 1 . Rees JS, Huggett R, Harrison A. Finite element analysis of the
5. Compagnon D, Woda A. Supraeruption of the unopposed maxil- stress-concentrating effect of fraenal notches in complete den-
lary first molar. J Prosthet Dent, 1991; 6 6 : 29-34. tures. Int J Prosthodont, 1990; 3 : 228-240.
Le passage de l'édentement partiel à l'édentement total est prothèse complète, surtout si le patient a déjà, aupara-
une étape clinique très délicate en raison des problèmes vant, eu une expérience néfaste avec des prothèses par-
psychologiques, techniques, physiologiques qu'elle pose. La tielles.
réponse thérapeutique à ces problèmes fait appel à trois pro-
positions : la prothèse de transition, la prothèse à recouvre-
ment radiculaire (overdenture), la prothèse immédiate. tableau 23-1 Motifs invoqués par les patients pour proposer
Le choix entre l'une de ces trois propositions découle de l'avulsion de l'ensemble des dents restantes1.
la recherche d'un juste équilibre entre les problèmes spéci-
fiques de ces solutions thérapeutiques, les données de l'exa-
men clinique, et les craintes et espérances du patient.

Les problèmes de l'édentement total sont triples :


- Les problèmes psychologiques - Très, voire trop souvent,
les patients « choisissent » ou « souhaitent » l'avulsion de
leurs dents restantes pour des raisons multiples et
variées1 (tableau 23-1). Mais, cet acte thérapeutique
provoque des problèmes psychologiques indéniables
dont ni le patient, ni le praticien ne sont au départ plei-
nement conscients. En effet, 45 % des patients sont, à
des degrés divers, moralement touchés. Les thèmes des Tableau 23-2 Thèmes d'inquiétude voire de regrets exprimés par
regrets sont, malheureusement, les mêmes que ceux les patients après l'avulsion des dents restantes2.
ayant conduit le patient à souhaiter l'avulsion de ses
dents2 (tableau 23-2). Une des causes essentielles des
regrets demeure la non-préparation morale du patient à
la perte de ses dents. Ceci explique qu'à la suite des avul-
sions dentaires les émotions ressenties soient multiples
et comparables à celles éprouvées lors d'un deuil. Cet
aspect émotionnel concerne le domaine du « non-dit »
mais aussi celui des appréhensions plus « tangibles »
telles que la crainte et l'anxiété vis-à-vis de la tenue d'une
- Les problèmes techniques - Ils sont, bien évidemment, La valeur extrinsèque est aussi à prendre en considéra-
nombreux et dépendent des conditions cliniques (posi- tion : morphologie radiculaire favorable avec des racines
tions, mobilité des dents restantes), des exigences et divergentes, défavorable avec des racines très coniques, un
espérances du patient. Mais dans un premier temps, il rapport racine clinique/couronne clinique défavorable, des
incombe au praticien de préserver l'intégrité des arcades malpositions avec rotations, versions, gressions. La qualité
en maintenant les dents présentes, au moins temporai- de la gencive marginale (épaisse, mince, fibreuse), le son-
rement, et de prévoir, en cas de difficultés majeures, leur dage des poches, la détermination du degré de mobilité,
remplacement immédiat. l'évaluation de l'importance de l'inflammation gingivale, le
- Les problèmes physiologiques - Le praticien doit répondre niveau et la qualité du tissu osseux révélés par l'examen
à toutes les interrogations et inquiétudes que le patient radiographique signent l'état du parodonte. À ces données,
éprouve ; quels sont les moyens de rétention ? Comment s'ajoutent l'évaluation de la qualité de l'hygiène des dents
mastiquer? Quels sont les risques de « perdre le goût »? restantes, de la muqueuse, de la prothèse donc l'aptitude
De même, le patient est informé des limites de nos thé- du patient à maintenir une hygiène parfaite.
rapeutiques, en particulier, la diminution des capacités et
de l'efficacité masticatoire, enfin les règles d'hygiène doi-
Les segments édentés
vent déjà être abordées et présentées au patient.
La valeur des différents éléments qui contribuent à la stabi-
lité et à la rétention est évaluée : forme de l'arcade, hauteur
et largeur des crêtes (classification d'Atwood), profondeur de
la voûte à l'arcade maxillaire. Cet examen est complété par
l'évaluation radiographique des structures osseuses : impor-
La décision thérapeutique découle de la prise en compte de tance de la résorption, présence ou non d'une corticale
facteurs généraux, locaux et psychologiques. épaisse, valeur de la trabéculation; indirectement, on déter-
mine de la sorte l'épaisseur des tissus épithélio-conjonctifs
ainsi que les caractéristiques de la muqueuse (crêtes flot-
tantes).
Les affections générales, certaines thérapeutiques (radio-
thérapie, greffe osseuse, cardiaque) imposent au médecin Les relations inter-arcades
traitant de prescrire l'avulsion de l'ensemble des dents res-
Les relations du type classe I favorisent la stabilité prothé-
tantes même si, parfois, cela peut paraître lourd, traumatique
tique. Par contre, les relations inter-arcades du type classe II
et psychologiquement difficile à assumer, mais la prescrip-
div. 1 ou classe II div. 2, les asymétries transversales, les
tion médicale demeure maîtresse des décisions. D'autre
supraclusies engendrent souvent une instabilité prothétique.
part, certaines pathologies peuvent conduire le praticien à
proposer les avulsions si les pathologies odontologiques ne
peuvent être efficacement traitées, mettant alors en péril Les organes para-prothétiques
l'état général du patient. L'absence de réhabilitation prothétique compensant l'éden-
tement partiel, ou la présence de restaurations prothétiques
instables, mal conçues entraînent souvent un comporte-
ment anormal de la langue, des lèvres et des joues. La posi-
Ils comprennent les dents restantes, les segments édentés, tion, le jeu de l'ensemble des organes para-prothétiques
les relations inter-arcades, les organes para-prothétiques. sont alors fortement perturbés, rendant délicate la mise en
place d'une prothèse amovible.
Les dents restantes
Leur valeur intrinsèque et extrinsèque est déterminée par un
examen visuel, digital, radiographique.
La valeur intrinsèque dépend de l'importance des des- Le désir de ne plus souffrir, l'espérance d'un meilleur confort,
tructions coronaires, que ce soit par des caries non traitées, la volonté de retrouver un aspect esthétique satisfaisant doi-
en particulier les caries cervicales des patients âgés ou par vent toujours être comparés aux difficultés, aux limites tech-
des restaurations telles que des amalgames volumineux, des niques et fonctionnelles propres à ce type de thérapeutique.
couronnes. À cette évaluation s'ajoute la qualité des éven- En effet, les patients tendent, d'une part, à considérer les
tuelles obturations endodontiques insuffisantes ou non réa- traitements comme simples, faciles, rapides et, d'autre part,
lisées, la présence d'instruments cassés dans les canaux à idéaliser les résultats.
rendant difficile, voire impossible, la reprise de traitement. En fonction des données recueillies lors de l'examen cli-
Enfin, l'éventuelle usure des dents restantes renseigne le nique, le praticien est amené à proposer trois approches thé-
praticien sur la forme du cycle masticatoire ou sur l'existence rapeutiques : la prothèse de transition, la prothèse à recou-
de parafonctions comme le bruxisme. vrement radiculaire, la prothèse immédiate.
LA PROTHÈSE DE TRANSITION

- En présence de patients qui présentent :


- des asialies partielles ou totales ;
- des dyskinésies musculaires, des pathologies neuro-
La prothèse de transition est une prothèse conçue pour pou- musculaires;
voir évoluer de l'édentement partiel vers l'édentement total. - des parafonctions, telles que des pulsions linguales,
On ne doit pas la confondre avec une prothèse provisoire. un bruxisme nocturne excentré.
En effet, la prothèse de transition doit répondre à toutes les - En présence de patients qui présentent :
exigences techniques et psychologiques d'une prothèse - une anxiété certaine à l'idée de perdre leurs dents ;
adjointe complète. - une crainte de la perte de leur image décisionnelle,
Les exigences techniques des prothèses de transition de leur « autorité ».
sont: - En présence de patients :
- À l'arcade maxillaire : - qui n'ont jamais été appareillés ;
- de recouvrir l'ensemble de la voûte palatine jusqu'au - qui, de manière directe ou indirecte, ont été confron-
joint postérieur; tés à une déception ou un échec prothétique.
- d'englober les tubérosités ;
- d'occuper les versants vestibulaires des crêtes ; Les objectifs de la prothèse de transition sont à la fois
- de s'adapter à la zone de réflexion. techniques et psychologiques. Techniquement la prothèse
- À la mandibule: permet de rétablir l'occlusion et la fonction masticatrice.
- de recouvrir les trigones rétromolaires ; Psychologiquement, la prothèse de transition permet de don-
- d'occuper les espaces rétro-mylohyoïdiens ; ner ou de redonner confiance, d'offrir un sentiment de sécu-
- de s'appuyer sur les planchettes d'Ackermann ; rité au patient en utilisant la rétention offerte par les dents
- d'occuper les versants vestibulaires des crêtes en restantes et, ainsi, d'habituer le patient et les organes mus-
s'adaptant à la zone de réflexion ; culaires périphériques à la présence d'une prothèse adjointe.
- de présenter un joint sublingual.
De plus, le montage des dents prothétiques se doit d'être
idéal, ce qui implique entre autres éléments que la dimen-
sion verticale d'occlusion soit rétablie et l'orientation du plan
occlusal respectée.
La prothèse de transition présente trois expressions cli-
niques: la prothèse de transition à court terme, à moyen
terme et à long terme. L'indication de chacune d'elles
dépend du pronostic des dents restantes et des options thé-
rapeutiques choisies.
La prothèse de transition est tout particulièrement indiquée :
- En présence de dents restantes qui présentent :
- une bonne valeur intrinsèque et extrinsèque ;
- pas de lésions majeures, parodontales ou péri-api- Lorsque le patient est déjà appareillé, il est souvent possible
cales; de réaliser une adjonction de manière plus ou moins rapide
- peu de malpositions telles que des égressions qui pour remplacer les dents extraites. Par contre, si la prothèse
perturbent le plan occlusal ou des versions s'oppo- ne répond pas aux critères d'une prothèse de transition, on
sant à une insertion facile ; doit pratiquer, simultanément, une réadaptation des bases
- un aspect esthétique acceptable. prothétiques selon les techniques décrites lors de la mise
- En présence d'arcades qui présentent : en condition. Cette ou ces adjonctions sont pratiquées au
- des éléments anatomiques ne favorisant pas la réten- laboratoire, de préférence avant les avulsions ou de manière
tion et la stabilisation, tels que des crêtes ostéo- extemporanée au fauteuil. L'objectif est d'extraire les dents
muqueuses fortement résorbées, des tubérosités et et de placer immédiatement une prothèse qui stimule la
des trigones dépressibles, des crêtes avec des ver- zone de l'avulsion et réduit la résorption.
sants vestibulaires peu marqués, des voûtes pala-
tines peu profondes;
- des relations inter-arcades défavorables laissant
craindre des difficultés à obtenir une parfaite réten- Ce choix thérapeutique est indiqué lorsque le patient ne pos-
tion et stabilisation telles que les classes II, les supra- sède pas de prothèse adjointe partielle, lorsque le pronos-
clusies inhérentes aux classes II div. 2, voire aux ano- tic des dents restantes est fortement réservé (forte mobilité,
malies squelettiques. hygiène défectueuse, problèmes parodontaux majeurs dif-
ficilement traitables), lorsque le patient n'est pas disposé les barres corono-cingulaires ou coronaires se prolongent
psychologiquement, ou susceptible aux yeux du praticien cervicalement par une grille (fig. 23-1 ). La prothèse est ter-
« d'aborder » l'édentement total. minée, mise en moufle, la résine englobant la grille.
Les objectifs sont alors d'enregistrer l'ensemble des carac- Lorsque la dent naturelle est extraite, l'éventuel crochet est
téristiques morphologiques et physiologiques des tissus den- éliminé puis une dent prothétique de remplacement est
taires, des tissus muqueux recouvrant la surface d'appui et ajoutée sur la prothèse. La résine située au niveau de la
de la zone de réflexion. La prothèse sera réalisée selon les grille facilite la réparation, sans remettre en cause la péren-
techniques propres aux prothèses partielles en résine: nité du châssis.
empreinte préliminaire à l'alginate avec ou sans rebasage,
puis éventuellement, réalisation d'un porte-empreinte indivi-
duel, et de l'empreinte secondaire. L'élaboration de la pro-
thèse se poursuit selon les séquences habituelles. Les extra-
ctions des dents restantes seront pratiquées ultérieurement
au fur et à mesure des problèmes, et des adjonctions com-
pensant la perte des unités dentaires, seront alors réalisées.

Dans certains cas, malgré la bonne valeur intrinsèque et


extrinsèque des dents restantes, le pronostic demeure
réservé en raison du nombre restreint de dents et de leur
position défavorable sur l'arcade. Il est alors préférable de
réaliser des prothèses avec un châssis métallique, qui offre
des possibilités d'évolution.
Le tracé du châssis métallique évolutif est très spéci- Fig. 23-1 Conception du châssis métallique en cas de prothèse
fique : en regard des faces linguales des dents présentes, de transition à long terme.

LES PROTHÈSES À RECOUVREMENT RADICULAIRE

désinsérer la prothèse sans aucune difficulté. Ces exigences


peuvent être incompatibles avec certaines atteintes phy-
siques telles que l'arthrose des mains, des poignets, de
La prothèse à recouvrement radiculaire ou prothèse à appui l'épaule, les problèmes oculaires, un tremblement d'attitude
dento-muqueux est une prothèse qui recouvre l'ensemble ou un parkinsonisme.
de la surface d'appui mais qui conserve et utilise les racines
restantes pour améliorer la stabilisation, la sustentation et,
éventuellement, la rétention 3,4
La réduction de la valeur intrinsèque associée à une valeur
extrinsèque suffisante, en particulier, une longueur radicu-
laire intra-osseuse d'un minimum de 8 à 10 mm, un envi-
ronnement parodontal et ostéo-muqueux favorable sont les
éléments essentiels à la conservation de la racine. De plus,
Les indications des prothèses à recouvrement radiculaire la région vestibulaire ne' doit présenter aucune contre-
sont très proches de celles proposées pour la prothèse de dépouille, situation morphologique qui s'oppose à l'insertion
transition. Cependant, certains points particuliers doivent de la prothèse, à l'obtention d'un joint périphérique et gêne
être ajoutés. l'esthétique (fig. 23-2).

Le patient doit être capable d'assurer un maintien parfait de La valeur stabilisatrice des dents restantes découle de leur
l'hygiène de la prothèse adjointe, des éléments prothétiques situation au sein de leur propre arcade et vis-à-vis de l'arcade
endo-buccaux, des tissus dentaires et muqueux. De plus, ses antagoniste. Pour cela, la position des racines restantes est
aptitudes manuelles doivent lui permettre d'insérer et de évaluée en fonction de leur répartition sur l'arcade. Celle-ci se
Fig. 23-2 Contre-dépouille peu favorable à la mise en place d'une Fig. 23-3 Secteur de répartition des dents restantes selon Owall.
prothèse avec attachements. 1 ) secteur canin ; 2) secteur prémolaire ; 3) secteur incisif ; 4) sec-
teur molaire.

divise en quatre secteurs: secteur 1 canine - secteur 2 pré- antagoniste des dents de l'arcade dentée. Cependant, il faut
molaire - secteur 3 incisive - secteur 4 molaire (fig. 23-3). veiller à ce que la résistance des dents mandibulaires soit
L'objectif est d'utiliser une racine par secteur, mais en évitant, équivalente ou supérieure à celle des dents maxillaires. En
si possible, des dents contiguës5. cas d'édentement bimaxillaire, la conservation des racines
Le nombre idéal est de quatre racines, réparties symé- dans la région antérieure prévient de manière importante la
triquement dans les secteurs canines prémolaires. La pré- résorption osseuse 6,7 . Par contre, la résorption de la zone
sence de trois racines est une situation favorable dans la antérieure maxillaire n'est pas ralentie dans le cas de conser-
mesure où les dents sont largement espacées et réparties vation des canines uniquement.
sur les deux côtés de l'arcade. Deux racines offrent aussi une
situation favorable si elles se situent de manière symétrique.
Les dents supports doivent être largement espacées pour
assurer une parfaite stabilisation de la prothèse et ne pas pro-
voquer de lésions parodontales entre les dents collatérales.
De plus, la proximité radiculaire ne favorise pas l'hygiène.
Le maintien d'une seule racine est diversement appré- Le maintien et la conservation des racines sous-prothétiques
cié. Ce n'est pas l'idéal car cette situation s'accompagne à font appel à deux techniques: les racines enfouies, les
long terme d'instabilité et de fracture de la base prothétique. racines sur l'arcade sur lesquelles sont fixées des coiffes
Dans le cas d'une prothèse unimaxillaire, le maintien des paraboliques, des attachements de semi-précision ou de
racines s'impose en particulier lorsqu'elles se situent en précision, des aimants (fig. 23-4).

Fig. 23-4 Organigramme des solutions thérapeutiques


pour l'exploitation des racines restantes chez un patient
édenté.
Les coiffes paraboliques

La présence de racines ou de dents incluses maintient le Dans ce cas, les racines sont recouvertes d'une chape métal-
capital osseux. La conservation des éléments dentaires lique coulée. La préparation radiculaire répond aux caracté-
nécessite qu'il n'existe aucune lésion périradiculaire quelle ristiques suivantes: limites périphériques du type congé
qu'en soit l'origine, que la racine soit totalement intra- large, dépouille accentuée, tenon radiculaire de 4 à 5 mm
osseuse et, surtout, que le patient soit informé de sa pré- de long, entrée canalaire présentant de petites gorges qui
sence, sa conservation découlant de l'application du principe assurent la mise en place sûre de la chape lors du scelle-
du consentement éclairé. ment (fig. 23-6).
Certains auteurs ont proposé de pratiquer la réinclusion L'empreinte de la préparation est prise puis adressée au
des racines restantes. Pour cela, il faut que la racine ne pré- laboratoire. Cette chape peut aussi être réalisée en tech-
sente aucune lésion périapicale, qu'elle ait été traitée endo- nique directe à l'aide de résine calcinable (fig. 23-7).
dontiquement, et que la longueur intra-osseuse soit d'envi-
ron 6 mm. Cependant, le succès de ce type de thérapeutique
est limité8.

Dans la mesure où la longueur radiculaire intra-osseuse


dépasse 8 mm, la racine est conservable. Après traitement
endodontique et assainissement parodontal, la longueur de
la racine est évaluée, sachant que l'obturation apicale doit
présenter une longueur de 5 mm environ pour assurer l'her-
méticité apicale9. En fonction de cette longueur, l'utilisation
des racines s'oriente dans trois directions (fig. 23-5).

L'obturation de la lumière canalaire


L'entrée canalaire est désobturée sur une hauteur de 2 à
3 mm environ puis une fraise cône renversé crée des réten-
tions dans la paroi canalaire. La cavité est ensuite obturée à
l'aide d'amalgame, de composite, de verre ionomère. Dans
un deuxième temps, les surfaces dentinaires apparentes et
l'amalgame sont arrondis et soigneusement polis. Cette
solution thérapeutique est particulièrement indiquée Fig. 23-6 Caractéristiques de la préparation d'une coiffe parabo-
lorsque l'espace prothétique disponible est réduit10. Pour lique.
prévenir l'atteinte carieuse, la surface dentinaire est badi- a) congé périphérique ; b) entrée canalaire avec deux gorges qui
geonnée de fluorure d'étain11,12 . assurent la parfaite mise en place de l'élément prothétique coulé.

Fig. 23-5 Longueur canalaire et possibilités thérapeutiques.


Fig. 23-7 Coiffe parabolique en résine calcinable réalisée en tech-
nique directe.

Pour éviter toute percolation salivaire et maintenir un


environnement parodontal sain, la préparation est protégée
par une obturation temporaire en résine associée à un tenon
radiculaire13.
La forme des chapes varie selon les objectifs thérapeu-
tiques choisis. Si la sustentation est principalement recher-
chée les chapes seront très basses, en forme de dôme aplati
ne dépassant la muqueuse que de 1 à 1,5 mm. La recherche Fig. 23-8 Dalbo-Rotex (a) partie femelle placée dans la base pro-
de la sustentation et de la stabilisation requiert des racines thétique, (b) partie mâle scellée dans le canal. (Document Cendres
plus longues, des chapes plus hautes, dépassant de 2 à et Métaux)
3 mm le sommet muqueux dans la mesure où l'espace pro-
thétique l'autorise. sale comporte une sphère sur laquelle une contrepartie,
fixée dans la prothèse, vient s'agréger. En fonction du
Les attachements modèle utilisé, la divergence entre l'axe d'insertion de la
prothèse et l'axe radiculaire varie de 6° à 18°. Ses dimen-
Pour les dents à forte valeur extrinsèque dont la longueur
sions le destinent tout particulièrement aux canines
radiculaire est supérieure à 12 mm, l'amélioration des qua-
maxillaires et mandibulaires. Cliniquement, la lumière
lités mécaniques de la prothèse adjointe fait appel aux atta-
canalaire est alésée, calibrée, l'attachement est enfin
chements de semi-précision ou de précision14.
scellé avec du ciment oxyphosphate de zinc ou un verre
Les attachements sont des dispositifs mécaniques qui
ionomère. Dans un deuxième temps, la face dentinaire
relient les racines restantes à la prothèse complète de
est protégée avec du verre ionomère ou du composite.
manière à améliorer la rétention et la stabilité. Ces dispo-
Son avantage essentiel est bien sûr sa rapidité de mise
sitifs sont au nombre de trois : les attachement intra-coro-
en œuvre (fig. 23-8).
naires axiaux, les barres de conjonction et les aimants. Il
- L'Excentric de Rotherman : La partie mâle se présente
doit cependant exister un juste équilibre entre le bénéfice
sous la forme d'un disque mince à la périphérie duquel
obtenu et la conservation de l'intégrité des dents res-
une gorge asymétrique est creusée. Cet élément en
tantes.
métal précieux est soudé sur un plateau type Richmond.
La partie femelle correspond à une boucle ouverte dont
Les attachements intra-coronaires axiaux
les deux extrémités entrent en contact avec la partie la
Ce sont les attachements les plus simples. Ils se compo- plus profonde de la gorge. L'extrémité rétentive de la
sent d'une partie mâle solidaire de la racine dentaire et partie femelle est perpendiculaire ou tangente à la
d'une partie femelle située dans l'intrados prothétique. Il boucle selon que celle-ci s'agrège sur une dent anté-
existe cependant des systèmes inversés, la partie mâle dans rieure ou postérieure. L'avantage essentiel de cet atta-
la prothèse, la partie femelle étant solidaire de la racine res- chement réside dans sa faible épaisseur (1,7 mm) et
tante. Les attachements intra-coronaires axiaux sont nom- dans le fait que le parallélisme absolu entre deux
breux, de conceptions et de dimensions variées, ce qui rend Rotherman n'est pas obligatoirement requis. La mise en
le choix difficile. Seuls certains d'entre eux seront place au laboratoire répond à une règle précise, le
décrits15,16. repère de la partie mâle et l'ouverture de la boucle doi-
- Le Dalbo-Rotex® : c'est le système le plus simple. Il com- vent toujours être alignés et dirigés mésialement
prend un ancrage radiculaire scellé dont la partie occlu- (fig. 23-9a, b).
a

Fig. 23-9b Excentric sur modèles,

Fig. 23-9a Excentric de Rotherman (a) Système de rétention pour les dents antérieures,
(b) Système de rétention pour les dents postérieures, (c) Système d'espacement pour
créer la résilience, (d) Partie mâle de l'attachement scellée sur la coiffe parabolique assu-
d rant la rétention. (Document Cendres et Métaux)

- Le Dalbo®: pour les prothèses à recouvrement, deux dans la base prothétique, offre une rétention mécanique
types d'attachements résilients sont disponibles : l'atta- de l'ordre de 4,5 N (500 g). Le réglage de l'intensité de
chement sphérique et l'attachement cylindrique. la rétention dépend du serrage des lames que le prati-
L'attachement résilient sphérique autorise 3 mouve- cien peut modifier par des clefs spécifiques activatrice
ments de rotation et un mouvement de translation ver- ou désactivatrice ou bien par la rotation d'une bague
ticale. La partie mâle sphérique est secondairement bra- dans le cas du modèle « Dalbo-Plus ». La résilience ver-
sée à un plateau de Richmond. La partie femelle, fixée ticale est créée par l'interposition d'une feuille d'étain de
4/10 mm environ entre les parties mâle et femelle de
l'attachement. Il est tout particulièrement indiqué en pro-
thèse complète surtout lorsque qu'il ne reste que deux
a ou trois racines (fig. 23-10a, b). L'attachement cylin-
drique résilient n'autorise qu'un mouvement de transla-
tion verticale, il n'est pas rupteur. Il est plus particulière-
ment indiqué lorsque les racines restantes sont
nombreuses et l'environnement muqueux favorable.
b

Fig. 23-10a Dalbo sphérique : (a) partie intra-prothétique réten-


tive ; (b) bague périphérique d'isolement ; (c) rondelle de rési-
lience ; (d) partie rétentive brasée sur la base Richmond. Fig. 23-10b Bona sur modèle.
Les barres
Les barres ont un double rôle, d'une part, assurer une
contention des dents restantes et, d'autre part, assurer la
rétention et la stabilisation de la prothèse existante par
l'intermédiaire de systèmes mécaniques, les cavaliers, qui
relient la prothèse à la barre. Sur le plan mécanique, cette
conception offre de nombreux avantages, par contre, à
long terme, les avantages biologiques ne sont pas évi-
dents. Le seul bénéfice semble être la répartition des
forces sur les racines supports. Les barres de conjonction
sont de deux types, la barre d'Ackermann ou la barre de
Dolder17.
- La barre d'Ackermann présente une section ronde de
1,9 mm de diamètre. La rétention est assurée par des cava-
liers en métal qui viennent se placer sur la barre, offrant
une rétention d'environ 9N (900 g) par cavalier. La barre
ronde est ajustée par torsion au profil général de la crête
mais sans entrer en contact avec celle-ci (fig. 23-11).

Fig. 23-12 Oxydation d'un élément prothétique magnétique (a) ;


conséquences au niveau de l'intrados (b).

L'attachement
Son choix découle des trois critères suivants :
- Le volume - Selon Preiskel, on doit préférer un attache-
ment le plus gros possible dans la place qui lui est des-
Fig. 23-11 Barre d'Ackermann fixée sur deux canines mandibu- tinée. Cette proposition permet de choisir un attache-
laires.
ment qui offre la meilleure solidité, fiabilité, résistance à
l'usure et des possibilités de réglages. Cependant, le
- La barre de Dolder ovalaire présente deux dimensions :
volume de l'attachement doit laisser suffisamment de
1,6 mm et 2,2 mm, et une hauteur de 2,3 mm ou
place pour la dent et la base prothétique.
3,0 mm. Elle est rectiligne, non modelable. Elle permet
- Le type de liaison - Les mouvements de la prothèse vis-
des mouvements de translation verticale et une légère
à-vis des dents supports sont complexes. Ils se décompo-
rotation autour de l'axe de la barre.
sent en trois mouvements de rotation et de translations19
(fig. 23-13a, b). Selon la conception mécanique des atta-
Les aimants
chements, les mouvements sont, théoriquement, plus ou
Pendant une période, ils furent largement utilisés, en raison moins transmis aux racines supports. Plus le nombre de
de leur simplicité de mise en œuvre. Cependant, actuelle- déplacements autorisés est important, plus l'attachement
ment, ils sont beaucoup moins employés car ils présentent est dit rupteur, plus le nombre de mouvements est réduit,
de nombreux inconvénients : diminution de la rétention sans plus on parle de liaison rigide20. Les liaisons ruptrices trans-
possibilité de réactivation, phénomènes d'oxydation, créa- mettent théoriquement moins de forces aux racines res-
tion d'un champ magnétique18 (fig. 23-12a, b). tantes que les liaisons rigides. Cependant, in vitro, cette
notion n'est pas toujours confirmée21.
- L'axe de transfert ou analogue de laboratoire - La phase
Les critères de choix des attachements de laboratoire impose de reproduire la partie intra-buc-
cale de l'attachement sur le modèle de travail. Pour cela,
Le choix d'un attachement découle de facteurs liés aux carac- le laboratoire utilise l'original de l'élément prothétique
téristiques de l'attachement, des dents restantes et de la sur- ou, si elle existe, sa reproduction, dénommée axe de
face d'appui muqueuse. transfert ou analogue de laboratoire.
Les crêtes
La morphologie des crêtes et surtout la qualité de la
muqueuse offrent une résistance plus ou moins importante
aux mouvements de la prothèse. Si ces mouvements sont
limités par des crêtes saillantes, des tissus de soutien fermes
et adhérents, ils le sont moins en présence de tissus peu
adhérents, de crêtes flottantes. Dans la mesure où les dépla-
cements prothétiques sont limités, les dents supports ne
subissent que de petites contraintes alors qu'avec des tissus
flottants les contraintes sont plus fortes.
Cliniquement, la conception prothétique, le choix de l'at-
tachement, de la technique d'empreinte découlent de la
valeur des racines concernées et des tissus de soutien. Les
Fig. 23-13a Le déplacement de la prothèse par rapport à la racine situations cliniques sont parfaitement résumées dans les
se fait par trois mouvements de rotation : 1) frontale autour de la quatre classes proposées par Labaig22 (tableau 23-3).
crête ; 2) vestibulo-linguale ; 3) occluso-cervicale.
La réalisation pratique

1er temps
Traitement endodontique et assainissement parodontal.

2e temps
Préparations des unités dentaires, selon les mêmes critères
que ceux prescrits pour les coiffes paraboliques : Préparation
périphérique avec congé, limite cervicale juxta ou sous-gin-
givale.
Les empreintes des éléments dentaires et des arcades
sont réalisées, les modèles de travail montés en articulateur
en relation centrée à la dimension verticale d'occlusion choi-
sie.
Fig. 23-13b ...et trois déplacements en translation.
1) antéro-postérieure ; 2) frontale ; 3) occluso-cervicale.
3 e temps
Le montage des dents prothétiques est suivi d'un essai fonc-
tionnel dont les objectifs sont de contrôler et valider les
Les dents paramètres occlusaux et esthétiques.
Les critères de choix des dents sont, bien sûr, leur position
4e temps
et, surtout, la longueur radiculaire. Ce paramètre est essen-
tiel, il conditionne la résistance aux forces transmises par les Le laboratoire réalise une clef vestibulaire du montage.
systèmes de liaison ou attachements, aux structures radicu- Celle-ci objective la place et le volume réellement exploi-
laires. À cela s'ajoutent un environnement parodontal sain, tables par le laboratoire. Cela peut dans certains cas
et une hauteur de muqueuse attachée de 2 à 3 mm mini- conduire le praticien à changer le type d'attachement préa-
mum. lablement choisi.

Tableau 23-3 Classification de Labaig21.


5e temps mérisable, est souvent délicate. Elle est effectuée soit le jour
de l'insertion, soit de manière différée après tassement de
La pièce métallique intra et supra radiculaire est modelée
la muqueuse. Elle compense certaines imprécisions de l'en-
puis coulée; dans un deuxième temps, les attachements semble de la chaîne technique. Cependant, les risques de
sont brasés sur la pièce coulée en vérifiant que leur position fusée de la résine dans les zones de contre-dépouilles sont
n'interfère pas avec le montage. Cette approche ne tient pas importants, la qualité de la résine est moyenne, voire faible,
compte de l'utilisation d'attachements calcinables qui, eux, et à ce titre cette technique ne doit être utilisée qu'excep-
sont solidarisés sur la maquette en cire puis coulés. tionnellement,

6e temps
Contrôle au cabinet de l'adaptation des éléments prothé-
tiques coulés. À ce stade, 2 éventualités se présentent :
- Les éléments prothétiques peuvent être scellés dans la
mesure où des axes de transfert ou analogues de labo- Les thérapeutiques basées sur la conservation de racines
ratoire existent. sous-prothétiques présentent de nombreux avantages mais
- Les éléments prothétiques ne sont pas scellés s'il n'existe d'aussi nombreux inconvénients.
aucun analogue ou bien s'il s'agit d'une barre adaptée,
type Ackermann.

7e temps Ils sont au nombre de trois.


Les éléments prothétiques en place, l'empreinte préliminaire
est réalisée, puis le porte-empreinte individuel est préparé. Le maintien du capital osseux
Pendant la première année, la présence de racines sous-pro-
8e temps thétiques réduit la résorption de 0,9 mm au niveau canin et
1,2 mm au niveau molaire (fig. 23-14). De même, sur une
L'empreinte secondaire est effectuée selon les techniques et
période de 5 ans, le maintien des racines réduit la résorp-
protocoles classiques. À l'arcade mandibulaire, il est préférable
tion de 0,1 mm à l'arcade maxillaire et de 4,6 mm à la man-
d'enregistrer l'empreinte sous pression occlusale de manière
dibule23-25.
à parfaitement apprécier les caractéristiques hémodyna-
miques des tissus de la surface d'appui. L'utilisation de maté-
riaux élastiques type thiokol, polyéther, est indispensable.

9e temps
L'analogue de laboratoire ou les éléments prothétiques sont
replacés dans l'empreinte et éventuellement collés à l'aide
de cyanolite, puis le plâtre est coulé (fig. 25-11)

10e temps
La prothèse adjointe est ensuite élaborée selon les
séquences habituelles.

11e temps
Fig. 23-14 Différence, après 1 an, entre la résorption osseuse au
Deux éventualités s'offrent au laboratoire et au praticien : réa- niveau canin et molaire en présence d'une prothèse à recouvre-
liser la polymérisation en incorporant, ou non, les éléments ment radiculaire (orange) et une prothèse immédiate (jaune).
rétentifs des attachements dans la base prothétique.
La polymérisation avec les éléments rétentifs en place
assure une solidarisation parfaite de ces éléments à la base
prothétique. De plus leur mise en place au laboratoire per- L'efficacité masticatoire
met une très grande précision, en particulier pour le choix La puissance masticatrice est fortement augmentée lorsque
de l'axe d'insertion. Mais cela n'autorise aucune imprécision des attachements sont placés sur les dents restantes, pas-
tout au long de la chaîne technologique, en particulier lors sant de 230 à 340 N, soit une augmentation de 50 %. De
de l'empreinte, de la polymérisation et après l'éventuel tas- plus, lors de la mastication le contact entre la base prothé-
sement de la muqueuse. tique et l'attachement améliore ce résultat. Cette améliora-
A contrario, la solidarisation des éléments rétentifs direc- tion est liée à l'influence des récepteurs parodontaux et à
tement dans la cavité buccale, à l'aide de résine autopoly- l'amélioration de la stabilité prothétique26"29.
L'apport psychologique Une hygiène défectueuse, ou absente, provoque l'aug-
Au niveau mandibulaire, les patients acceptent mieux les mentation des problèmes parodontaux par approfondisse-
prothèses à appui muco-dentaire qu'une prothèse conven- ment des poches auxquels s'ajoutent des lésions carieuses
tionnelle. Cela pourrait s'expliquer par le maintien de cer- (21,4 % des cas)31.32. Par contre, le brossage associé à
taines unités dentaires, prévenant la crainte de perdre toutes l'application journalière de gel contenant 1 % de chlo-
ses dents - symbole de vieillissement et de mort. Mais l'éva- rhexidine supprime le Streptocoque Mutans et par là même
luation de la satisfaction pour les prothèses à recouvrement les caries des dents supports. Mais contrairement à l'appli-
radiculaire est délicate. En effet après un an, la différence cation de vernis, cette approche préventive dépend d'une
entre les indices de satisfaction des patients porteurs d'une très bonne coopération du patient33"36. Enfin, l'atteinte
prothèse conventionnelle ou d'une prothèse à recouvre- carieuse et parodontale est augmentée chez les patients qui
ment radiculaire n'est pas réelle30. portent leur prothèse jour et nuit, 10 % à 20 % des dents
se carient.
À ces inconvénients majeurs, s'ajoutent des problèmes
esthétiques et techniques (tableau 23-4).
À long terme, le succès des prothèses à recouvrement L'esthétique peut être perturbée par les éléments métal-
dento-muqueux dépend de la participation du patient dans liques recouvrant les racines pouvant transparaître à travers
le contrôle et le maintien d'une hygiène excellente. En effet, la base prothétique ou par l'épaisseur de la base prothétique
cette thérapeutique s'accompagne d'une perte de 5 à 20 °/o en altérant le soutien de la lèvre37. Les problèmes tech-
des éléments supports si l'hygiène est parfaitement main- niques se traduisent par une augmentation de la fréquence
tenue. des fractures de la base.

Tableau 23-4 Pourcentage des pathologies observées au niveau des dents recouvertes par une prothèse.

LA PROTHÈSE IMMÉDIATE

La prothèse immédiate est le dernier stade du passage et insérée immédiatement après. Elle ne doit pas être
de l'édentement partiel à l'édentement total. confondue avec une prothèse provisoire.
Cette approche thérapeutique n'est pas une proposition
récente. En 1947, Meril Swenson écrivait: « La prothèse
immédiate n'est pas une nouveauté; elle est pratiquée
depuis 50 ans38. » Et il en donnait la définition suivante : « Le
terme de prothèse immédiate signifie que la prothèse est
La prothèse immédiate est une prothèse définitive conçue réalisée avant les extractions et posée immédiatement
et réalisée entièrement avant l'extraction des dents restantes après celles-ci39-41. »
Tableau 23-5 Comparaison entre l'avis du praticien et du patient sur l'extraction des dents restantes.

La prothèse immédiate est indiquée lorsque le patient n'est


La décision de proposer à un patient l'avulsion de toutes les en aucune façon concerné par son état bucco-dentaire,
dents restantes est toujours très difficile à prendre. Avant tout lorsque la durée du traitement est incompatible avec les exi-
geste thérapeutique, le praticien doit tenir compte des trois gences ou les possibilités du patient.
principes suivants:
- 1 e r principe - La solution prothèse complète n'est pas
une solution de facilité.
- 2e principe - Il n'existe pas de cas de prothèse adjointe
« simple ou facile » même si apparemment toutes les Lorsque la décision est prise, la réalisation d'une prothèse
composantes anatomiques qui concourent à l'élaboration adjointe immédiate se déroule selon les séquences suivantes.
d'une prothèse adjointe complète semblent favorables.
- 3e principe - Le praticien doit se poser la question : « Si
1 re étape - L'avulsion des dents postérieures
je me trouvais dans cette situation clinique, accepterais-
je ce plan de traitement? » Il est préférable d'extraire les dents postérieures qui sont non
Ces trois principes sont à mettre en relation avec les fonctionnelles, non-support de bridge ou d'appareil de pro-
résultats de l'étude de Bouma selon laquelle 86 % des thèse adjointe. Ces avulsions éliminent les interférences occlu-
patients viennent d'eux-mêmes pour les extractions alors sales postérieures, offrent un temps de cicatrisation plus long
que le praticien ne propose les extractions que dans 14 % pour les tissus ostéo-muqueux et simplifient la prise d'em-
des cas2 (tableau 23-5). preinte secondaire. Les avulsions doivent être le moins trau-
Les indications sont d'ordre général et local. matiques possible, avec un objectif primordial : maintenir et
préserver le capital osseux à court et long terme42.

2 e étape - L'empreinte préliminaire


Le plus souvent, elles découlent d'une décision médicale Les objectifs de l'empreinte préliminaire sont identiques à
majeure. Elles peuvent être liées à des phénomènes dou- ceux de l'empreinte d'une arcade totalement édentée,
loureux incontournables, à un pronostic totalement défavo- objectifs auxquels s'ajoute l'enregistrement de la morpholo-
rable, enfin à l'âge, aux conditions de vie du patient, à ses gie, de la situation, de la position des dents restantes. Mais
difficultés physiques, à des problèmes d'hygiène. un principe essentiel demeure :
« Ne pas extraire prématurément les dents mobiles. »
Pour cela, trois techniques d'empreinte sont utilisées. Leurs
indications respectives dépendent du degré de mobilité des
dents et de la présence d'éventuelles zones de rétention43.
Le praticien est conduit à proposer l'avulsion de l'ensemble
des dents restantes : Dents non mobiles, de bonne valeur intrinsèque,
- lorsque les valeurs intrinsèque et extrinsèque des dents pas de zone rétentive
restantes sont très réduites ;
L'empreinte est réalisée avec de l'alginate en un temps ou
- lorsque des foyers infectieux péri-apicaux sont impos-
bien en deux temps par la technique du rebasage ou de l'in-
sibles à traiter;
jection (chapitre 9). Les empreintes réalisées avec ces tech-
- lorsque la position des dents restantes s'oppose à l'in-
niques procurent des résultats sûrs et rapides.
sertion d'une prothèse adjointe ou à l'établissement d'un
joint périphérique sûr ou bien encore perturbe trop le
Dents mobiles, zones faiblement rétentives
plan occlusal ;
- en présence d'atteintes parodontales généralisées en Les zones rétentives, les intermédiaires de bridge, les furca-
phase terminale. tions sont comblés avec du silicone à faible viscosité déposé
Fig. 23-15a Empreinte de prothèse immédiate en présence de Fig. 23-15b Les dents mobiles recouvertes et protégées par un
dents antérieures fortement mobiles. silicone basse viscosité.

Fig. 23-15c Après retrait de l'empreinte, la protection en silicone Fig. 23-15d Puis replacée dans l'empreinte à l'alginate.
est découpée.

à la seringue. De même, les dents mobiles sont recouvertes 3e étape - La conservation des données
de silicone en veillant à donner une forme de dépouille à existantes
l'ensemble. Ensuite, l'empreinte est prise de préférence avec
un alginate rebasé : alginate dur au niveau des zones éden- Les empreintes préliminaires recueillent des données préa-
tées, puis plus fluide sur l'ensemble. Après gélification, l'em- lables aux extractions, données qui participent de manière
preinte est désinsérée, le silicone enveloppant les dents est directe ou indirecte à l'élaboration de la prothèse immédiate.
enlevé, puis replacé dans l'empreinte avant la coulée du Ces données sont esthétiques et occlusales.
plâtre (fig. 23-15 a, b, c, d).
Les données esthétiques
Dents fortement mobiles, forte rétention
À ce stade la motivation, les espérances et souhaits esthé-
Si les dents sont trop mobiles pour que la technique précé- tiques du patient doivent être parfaitement définis. En par-
dente soit utilisée, il est possible d'utiliser un porte- ticulier, le patient désire-t-il changer d'aspect ou bien désire-
empreinte en plastique dans lequel on prépare une ouver- t-il garder la teinte, la position des dents existantes? Cette
ture vestibulaire. L'empreinte englobe la surface d'appui, la option conditionne le choix des caractéristiques des dents
morphologie des faces linguales mais sans empiéter sur les prothétiques.
faces vestibulaires des dents restantes. Après gélification de - La forme et la dimension - Certains patients sont très
l'alginate, un silicone moyenne viscosité est injecté, enre- attachés aux irrégularités ou malpositions de leurs
gistrant les caractéristiques morphologiques des faces ves- propres dents. La conservation de la dimension, de la
tibulaires concernées. L'apport de silicone puis le porte- forme générale, de leurs petites caractéristiques telles
empreinte sont enlevés, l'ouverture vestibulaire permettant que l'usure, l'orientation des bords libres des dents anté-
alors au praticien de parfaitement contrôler la ou les dents rieures est capitale. Ce sont des éléments parfaitement
mobiles. L'empreinte est reconstituée avant la coulée du originaux qui personnalisent les dents naturelles. Leur
modèle. conservation puis leur reproduction contribuent à une
meilleure intégration psychologique de la prothèse Dents non mobiles de bonne valeur intrinsèque
immédiate44. - pas de zone rétentive
- La teinte est plus délicate à définir dans la mesure où le
Les dents restantes sont recouvertes d'une feuille de cire
vieillissement, les traitements endodontiques, restaura-
calibrée 1,5 mm afin de créer un futur espacement. Puis, le
teurs peuvent avoir altérés la teinte originelle. Cependant,
porte-empreinte, réalisé en résine, est adapté au niveau de
il est souvent possible de définir une teinte de base puis
la surface d'appui muqueuse, espacé par l'intermédiaire de
d'individualiser chaque dent grâce aux techniques de
la cire par rapport aux dents restantes.
maquillage.
- La position exacte des dents restantes dépend des condi-
Dents mobiles - zones faiblement rétentives
tions cliniques. Soit les dents restantes ne sont pas
mobiles et ne se sont pas déplacées lors des empreintes, La préparation est identique, les dents habillées d'une feuille
soit elles sont mobiles et peuvent s'être déplacées. En de cire. Par contre, le porte-empreinte présente une ouver-
effet, elles peuvent avoir migré, s'être situées en vesti- ture occlusale, secondairement operculée par un chapeau
bulo-position, présenter des égressions, avoir été dépla- amovible (fig. 23-16).
cées lors de l'empreinte; autant d'éléments que l'on ne
devra pas reproduire dans leur intégralité lors du mon-
tage final mais reproduire partiellement toujours avec
l'aval du patient.

Les données occlusales


Elles sont importantes mais, comme précédemment, elles
doivent être retenues avec beaucoup de réserves car l'éden-
tement des arcades s'accompagne souvent de bouleverse-
ment des paramètres suivants :
- Le plan occlusal - Le niveau et l'orientation du plan
occlusal physiologique sont évalués grâce à la position
des dents restantes, en particulier au niveau molaire.
Cependant l'orientation du plan occlusal est souvent per-
turbée par les malpositions des dents restantes. À ce titre, Fig. 23-16 Porte-empreinte individuel à ouverture occlusale.
l'analyse des anciennes prothèses partielles (si elles exis-
tent) fournit des indications sur l'ancienne position des
dents absentes.
Dents fortement mobiles - zones fortement
- La dimension verticale d'occlusion - Dans l'idéal, les
rétentives
dents postérieures naturelles ou prothétiques au niveau
des arcades maintiennent, le plus souvent, la dimension Les dents restantes sont préparées comme précédemment,
verticale d'occlusion. La conservation de cette donnée par contre, le porte-empreinte présente un volet vestibulaire
est essentielle. Pour cela, une maquette d'occlusion en regard des dents restantes. Ce volet vestibulaire se repo-
enregistre la dimension verticale d'occlusion en position sitionne sans difficulté dans le porte-empreinte grâce à la
d'intercuspidie. Cette proposition présente aussi des présence d'encoches (fig. 23-17 a, b).
limites dans la mesure où les malpositions des dents
postérieures peuvent altérer la dimension verticale d'oc-
clusion. 5e étape - L'empreinte secondaire
- La relation intermaxillaire - Elle est souvent perturbée
par les malpositions des dents postérieures. Mais les Comme pour les empreintes préliminaires, sa réalisation
avulsions de celles-ci éliminent les contacts prématurés dépend des conditions cliniques. Dans un premier temps,
postérieurs, facilitant le futur enregistrement de la rela- le porte-empreinte est adapté selon les mêmes séquences
tion centrée. et critères que ceux propres à la prothèse adjointe com-
plète : contrôle de la stabilité, réglage des limites, réalisation
du joint périphérique, du joint postérieur, du joint sublin-
gual etc.
4e étape - La préparation
La surface d'appui muqueuse est ensuite enregistrée
des porte-empreintes individuels
avec une pâte à l'oxyde de zinc. Après prise du matériau, le
Au laboratoire, les modèles de travail préparés, les porte- porte-empreinte est enlevé, les éventuelles surpressions
empreintes sont réalisés selon les informations et directives dans l'intrados et les surextensions des bords sont corrigées.
transmises par le praticien via la fiche de laboratoire. Trois L'empreinte de la surface d'appui et des dents est réalisée
types de porte-empreintes peuvent être réalisés en fonction avec du Permlastic Light® selon des séquences spécifiques
des conditions cliniques. à chaque condition clinique.
Fig. 23-17a Porte-empreinte à ouverture vestibulaire. Fig. 23-17b Empreinte de la surface d'appui réalisée avec du
Permlastic et la partie vestibulaire à l'aide de Permadyne orange.

Fig. 23-17c Coaptation des deux parties. Fig. 23-17d Modèle terminé.

Dents non mobiles de bonne valeur intrinsèque, Dents fortement mobiles, fortes rétentions
pas de rétention
L'empreinte enregistre la surface d'appui et les faces lin-
Après enduction de Permlastic light®, le porte-empreinte est guales des dents antérieures. Après prise du matériau, le
inséré dans la cavité buccale, mis en place sur la surface volet vestibulaire est garni de silicone de moyenne viscosité
d'appui. L'empreinte est réalisée selon les mêmes puis repositionné grâce aux encoches sur l'autre partie du
séquences que celles d'une prothèse adjointe complète porte-empreinte. L'utilisation de silicone ou de polyéther pré-
classique. Après prise du matériau, l'empreinte est enlevée, vient tout risque d'adhérence avec le Permlastic. Les deux
puis contrôlée. parties sont enlevées en deux temps puis l'empreinte est
reconstituée et les deux parties recollées à l'aide de cyano-
Dents mobiles, faibles ou fortes rétentions lite(fig. 23-17 c,d).

L'ensemble de l'intrados et des bords du porte-empreinte


sont encollés avec de l'adhésif, à l'exception de l'opercule, 6e étape - La mise en articulateur
qui est vaseliné. Après garnissage de matériau à empreinte, des modèles
l'ensemble est placé dans la cavité buccale. La prise du maté- Après coulée, les modèles sont taillés et les maquettes d'oc-
riau à empreinte effectuée, l'opercule est enlevé, laissant clusion préparées. Celles-ci sont réalisées en cire rose ren-
apparaître les pointes cuspidiennes ou les bords libres des due rigide par un fil de renfort et une épaisseur de cire Moyco
dents restantes, facilitant le retrait du porte-empreinte. Si de placée au niveau de la voûte palatine ou de la partie linguale
fortes contre-dépouilles sont présentes (intermédiaire de de la maquette mandibulaire. La cire recouvre les dents res-
bridge), celles-ci sont, au préalable, comblées avec du sili- tantes, et déborde de 2 mm environ sur la face vestibulaire
cone faible viscosité puis l'empreinte est prise. Le retrait (fig. 23-18). Cette préparation répond à trois objectifs :
effectué, le silicone est enlevé puis replacé dans l'empreinte - prévenir toute fracture des dents du modèle ;
avant coulée du plâtre. - assurer la rétention de la base d'occlusion ;
dés par le patient. De même, les composantes de l'occlu-
sion, la dimension verticale d'occlusion, l'orientation du plan
occlusal et surtout la qualité de l'intercuspidie sont vérifiés.
Dans un deuxième temps, les limites sont contrôlées, en
particulier à l'arcade maxillaire au niveau du joint postérieur.
Sa position est confirmée, puis reportée sur le modèle de
travail comme pour une prothèse adjointe complète.
En phase finale, s'il existe des poches parodontales, le
praticien mesure leur profondeur vestibulaire, mésiale et dis-
taie, valeurs qui sont reportées sur le modèle de travail.

9e étape - Le montage des dents restantes

Fig. 23-18 Le recouvrement des faces vestibulaires des dents res- Celui se déroule en quatre temps.
tantes stabilise la base d'occlusion.
L'enregistrement de la position des dents

- éviter toute mobilisation des dents restantes dans la - Dans la mesure où le patient souhaite conserver la
cavité buccale. forme, la position, l'orientation des dents restantes, ces
Les modèles sont ensuite montés en articulateur selon données sont conservées : D'une part par l'utilisation de
les séquences habituelles, arc facial et relation centrée. repères (tracé de l'inclinaison de chaque dent, axe sagit-
tal médian), d'autre part par l'emploi de clefs en silicone
lourd qui enregistrent la forme, la position verticale, ves-
7e étape - Le montage des dents absentes
tibulaire, l'orientation des bords libres et des faces vesti-
Le choix de la forme, de la teinte, des dimensions des dents bulaires (fig. 23-19).
prothétiques antérieures et postérieures est réalisé en fonc- - Dans la mesure où le patient souhaite « changer », cer-
tion des données recueillies et du désir du patient. Si l'indi- tains éléments doivent être déterminés tels que le plan
cation est posée, le maquillage des dents prothétiques est sagittal médian, le plan occlusal parallèle à la ligne bipu-
alors réalisé. Le matériau sera de préférence de la porce- pillaire, la ligne du sourire.
laine. Le montage des dents absentes est réalisé en veillant
à parfaitement rétablir l'occlusion avec les dents antago- La simulation de la résorption
nistes (postérieures).
La simulation sur le modèle de la perte osseuse consécu-
tive aux avulsions dépend des conditions cliniques :
8e étape - L'essai fonctionnel
- En présence de dents dont l'environnement parodontal
La maquette est adressée au cabinet dentaire pour l'essai est sain, le plus souvent chez des patients jeunes, le pra-
final. Cette étape est comparable à celle de l'essai fonction- ticien pratique si nécessaire un remodelage du versant
nel d'une prothèse adjointe complète. Cependant, elle doit vestibulaire et occlusal de la crête de.manière à réduire
être conduite avec encore plus de rigueur et d'attention. Tous le volume osseux. Cette réduction évite un surcontour et
les paramètres relatifs à l'esthétique sont contrôlés et vali- un soutien excessif de la lèvre lors de l'insertion.

Fig. 23-19 Clef en silicone lourd enregistrant la forme, la position des bords libres des dents antérieures :
a) vue vestibulaire ; b) vue occlusale.
Fig. 23-20 La profondeur des poches est déterminée par son-
dage. .

- En présence de dents dont l'environnement parodontal


est altéré, le laboratoire transfère sur le modèle la pro-
fondeur des poches puis remodèle le plâtre 1 mm plus
cervical que la ligne des poches tracée par le praticien
(fig. 23-20).

Le montage des dents


Chaque dent est alors soigneusement découpée, la dent
prothétique est remodelée pour ressembler à la dent natu-
relle (fig. 23-21). Les corrections « gingivo-osseuses » sont
pratiquées et, de proche en proche, les dents naturelles sont Fig. 23-22 Montage des dents antérieures en fonction des
remplacées par des dents prothétiques (fig. 23-22). repères des axes radiculaires et de la clef ; la hauteur des dents
dépend de la profondeur des poches parodontales.

séquences précédemment décrites (chapitre 18). À la sor-


tie du moufle, la prothèse et son modèle sont remontés sur
l'articulateur, les imprécisions occlusales sont immédiate-
ment corrigées. La prothèse est ensuite polie.
Le laboratoire réalise alors un duplicata de cette prothèse
et éventuellement un guide chirurgical. Le duplicata est une
reproduction parfaite de la prothèse. Elle permet au patient
en cas de problèmes, tels que fracture, perte, de ne pas se
retrouver sans prothèse. Le guide chirurgical est indispen-
sable si des ostéoplasties sont prévues. Ce guide chirurgical
Fig. 23-21 Correction d'une dent du commerce pour qu'elle res- est réalisé avec le Duplicator de Lang (chapitre 26).
semble à la dent naturelle.
1 1 e étape - Les avulsions des dents restantes

L'extrados vestibulaire L'approche varie selon l'indication ou non de plastie osseuse.

Le versant vestibulaire de la crête est recouvert de cire jus- Prothèse sans plastie osseuse
qu'à la zone de réflexion enregistrée. La fausse gencive est
modelée selon les principes habituels. Par ailleurs, il ne faut Dans ce cas les avulsions doivent être réalisées avec beau-
jamais réaliser de dents dites ajustées. coup de précautions en évitant de fracturer les parois
osseuses intra-septales et vestibulaires. En effet, toute des-
truction osseuse s'accompagne d'un accroissement de la
10 e étape - La polymérisation résorption (fig. 23-23). Dans certains cas, il est possible
Dans un troisième temps le laboratoire finit les extrados pro- d'écraser le volet osseux vestibulaire pour mieux coapter les
thétiques en respectant les règles propres à la prothèse com- bords de l'alvéole. Les sutures ne sont pas indispensables,
plète. La phase de polymérisation se déroule selon les car la prothèse protège le caillot sanguin.
points douloureux au niveau de la surface d'appui, en parti-
culier au niveau des bosses canines, des parties vestibulaires
des tubérosités, de la limite postérieure, des lignes mylo-
hyoïdiennes, sont recherchés et corrigés. Ces corrections
doivent être rapides pour ne pas enlever la prothèse trop
longtemps. Les éventuelles interférences occlusales sont éli-
minées. Après avoir expliqué au patient comment enlever
ou remettre en place sa prothèse, les conseils d'hygiène sont
prodigués, les techniques de nettoyage de la prothèse sont
exposées. L'alimentation peut devenir plus dure, mais on doit
insister sur la prise d'aliments riches en calcium, ce qui
contribue à diminuer la résorption.
Pendant la première semaine, la prothèse est portée
24 heures sur 24 pour contrôler l'hématome et protéger le
caillot, sauf lors du nettoyage de la prothèse. Après ce laps
Fig. 23-23 Résorption en fonction de la technique d'extraction : de temps, les sutures (éventuelles) sont éliminées. Ces
a) extraction simple ; b) alvéolectomie vestibulaire ; c) alvéolecto- contrôles tissulaires et occlusaux se poursuivent pendant les
mie intraseptale. semaines qui suivent pour s'assurer de la parfaite répartition
des charges occlusales sur les surfaces d'appui.

Prothèse avec plastie osseuse


Un lambeau muqueux vestibulaire est relevé, les dents res- Le pronostic
tantes sont extraites, le praticien procède alors aux plasties
osseuses en fonction des réductions volumétriques osseuses
prévues. Pour contrôler l'importance de la plastie, le guide Durant la première année, la résorption entraîne une réduc-
chirurgical est fréquemment replacé. Le praticien vérifie alors tion de 20 à 30 % du volume de la crête, ce qui justifie l'uti-
sa parfaite adaptation sur la surface d'appui en contrôlant lisation de bases prothétiques en résine, car elles permet-
l'absence de blanchiment de la muqueuse45. tent de réaliser des réfections. Si le patient désire une base
métallique celle-ci ne doit pas être réalisée avant 1 an25.
12 e étape - L'insertion de la prothèse
Dans les deux cas, immédiatement après la phase chirurgi-
cale, la prothèse est insérée et le praticien vérifie sa stabilité
sur la surface d'appui. En absence de stabilité, l'utilisation de
matériaux révélateurs, en particulier les silicones, permet des
retouches plus faciles et plus rapides. L'occlusion est vérifiée,
les éventuelles corrections pratiquées pour obtenir des
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En 1937, les résines et leurs dérivés remplacèrent la vulca-
nite grâce à leurs indéniables qualités : facilité de mise en
œuvre, aspect esthétique, propriétés physiques. Mais mal-
gré tout, ces matériaux présentaient certains défauts tels que Pour prévenir les risques de fractures précédemment expo-
distorsions et imprécisions. Depuis, ces défauts initiaux ont sés, l'amélioration des caractéristiques des bases en résine
été en grande partie corrigés à l'exception, entre autres, de fait appel soit à une modification de leur composition chi-
leur fragilité, qui entraîne des fractures. Celles-ci ont deux ori- mique, soit à une addition de composants de nature diffé-
gines : les fractures par fatigue, d'une part, et, d'autre part, rente.
par impact ou choc.
Les fractures par fatigue résultent de flexions répétées
provoquées par des contraintes fonctionnelles ou parafonc-
tionnelles. De micro-craquelures se créent dans les régions
où se concentrent les forces puis, les contraintes se pour-
suivant, ces craquelures se propagent pour aboutir à une fis- L'addition de caoutchouc du type butadiène styrène au sein
sure qui, insidieusement, fragilise le matériau1. La fracture des PMMA produit une résine qui se compose d'une
finale résulte du cycle de charges qui excèdent les capacités matrice de polyméthyl-méthacrylate (PMMA) à l'intérieur
mécaniques de la portion restante du matériau. L'éventualité de laquelle est dispersé un réseau interpénétrant de caout-
clinique la plus fréquente est celle de la fracture médiane chouc et de PMMA3. Les fêlures se développent dans la
de la prothèse maxillaire, rupture favorisée par la présence résine mais ralentissent au niveau de l'interface de caout-
de diastème inter-incisif médian, par les échancrures du chouc. Le caoutchouc augmente donc la capacité de résis-
bord prothétique liées au passage des freins2. Les fractures tance à l'impact.
par fatigue peuvent aussi survenir lorsque l'épaisseur des Par contre, cela s'accompagne d'une diminution de la
bases prothétiques est insuffisante. résistance à la flexion et d'une augmentation du coefficient
Les fractures par impact résultent le plus souvent d'un de solubilité en milieu aqueux. De même, certaines résines
choc provoqué par une chute. Pour prévenir ces événe- dites hydro-modifiées présentent un module d'élasticité plus
ments inhérents à ces types de matériaux, deux grandes faible, une résistance à la flexion plus forte si les contraintes
orientations furent proposées : d'une part, l'amélioration des sont faibles, mais une résistance à la flexion plus faible si les
qualités physiques des résines de base et, d'autre part, leur contraintes sont fortes4. Leur seul avantage est de réduire
remplacement par des substances différentes comme les l'angle de mouillabilité avec la salive améliorant par là même
alliages métalliques. la rétention.
Par ailleurs, la proposition technique d'addition de billes
de PMMA (environ 60 µm de diamètre) n'améliore pas de
manière significative le module d'élasticité, la charge de rup-
ture et la résistance à l'impact des résines5.
Les fibres de carbone
L'incorporation de carbone sous forme de fibres libres ou tis- Depuis longtemps, les métaux et alliages métalliques ont été
sées a été proposée vers 1970. Leur présence augmente de utilisés pour la réalisation des bases prothétiques en raison
50 % la résistance à la flexion. Mais en raison des difficultés de leurs qualités physiques.
de mise en place des fibres, de la gestion de l'interface entre
le carbone et la résine, paramètres qui sont à l'origine de
fracture, ce procédé ne s'est pas imposé. À cela s'ajoutent
le préjudice esthétique lié à sa couleur noire et le confort Quatre matériaux sont à notre disposition pour la réalisation
limité par les difficultés de polissage6,7. des bases: les ors de classe IV, l'aluminium, les alliages
chrome cobalt et le titane16.
Les fibres de Kevlar®
Les propriétés mécaniques des fibres de Kevlar ont suscité L'or
de nombreux espoirs dans leur utilisation pour le renforce-
Ce fut le métal le plus utilisé au cours du temps par des tech-
ment des bases en résine malgré leur teinte et les difficul-
niques d'estampage, puis de coulée. Il demeure aujourd'hui
tés de polissage qu'elles entraînent8. Cependant, si l'aug-
le matériau idéal. Ses alliages offrent une parfaite tolérance
mentation de la résistance au choc est indéniable, la
tissulaire et ils résistent parfaitement à la corrosion. De plus,
résistance à la flexion varie selon l'orientation des fibres. Leur
leur utilisation dans une base prothétique accroît leur poids,
non-orientation diminue la résistance à la flexion alors que
facteur qui peut favoriser la stabilité d'une prothèse mandi-
leur orientation l'accroît.
bulaire17. Leur seul et unique inconvénient réside dans le
coût dans la mesure où le poids d'une plaque métallique
Les fibres de verre
maxillaire est estimé à 40 g et mandibulaire à 35 g.
Elles ont été utilisées sous différentes formes, incorporation
de fibres lâches, orientées ou non 9 . Les résultats sont com-
L'aluminium
parables à ceux obtenus avec le Kevlar, augmentation de la
résistance à l'impact mais faible, voire diminution, de la résis- Dès le début des années 1930, ce matériau fut utilisé pour
tance à la flexion. Ces constatations semblent dues aux diffi- réaliser des bases prothétiques. Il présente des qualités indé-
cultés d'adhésion entre les fibres et la résine, les fibres agis- niables de légèreté, de mouillabilité mais aussi de nombreux
sant comme un corps étranger au sein de la résine. Leur inconvénients. Ceux-ci sont:
silanisation n'augmente pas la résistance de manière signifi- - Immédiats : car l'aluminium est très corrodable, sensible
cative. Cependant, la mise en place de fibres hybrides asso- à toutes les différences de potentiels qui s'établissent
ciant des fibres de verre et des fibres de Kevlar incrustées dans avec les autres métaux présents dans la cavité buccale.
une matrice de résine améliore les caractéristiques méca- - Tardifs : il est toxique. En effet, des études ont démon-
niques de la résine. Mais la résistance à la flexion dépend de tré qu'il existerait une relation potentielle entre la mala-
l'orientation unidirectionnelle des fibres et surtout de leur die d'Alzheimer et l'aluminium18.
incorporation partielle et ou totale dans la résine de la base.
Les alliages chrome cobalt
Les fibres de polyéthylène Depuis près de 70 ans, ces alliages et leurs dérivés sont les
Sous forme de fibres, ce matériau parfaitement biocompa- matériaux les plus souvent utilisés en raison de leur faible
tible est ductile, de couleur neutre, de faible densité. coût, de leur résistance à l'oxydation, de leur rigidité et de
L'incorporation de fibres ou de tissage augmente la résistance leur faible densité.
à l'impact mais la résistance à la flexion est réduite. Comme Les alliages binaire Co-Cr ou ternaire Co-Cr-Ni possèdent
précédemment l'orientation des fibres de polyéthylène modi- des propriétés voisines. Leur résistance est sans conteste
fie la résistance de la résine acrylique. Enfin, leur présence meilleure que celle offerte par les alliages d'or. Le seul incon-
réduit de manière importante les modifications dimension- vénient réside dans les risques d'allergie, en particulier au
nelles consécutives à la sorption aqueuse 10,11 . nickel 19,20 .

L'insertion métallique Le titane


L'insertion d'une grille au sein de la base prothétique ne ren- Ce matériau est d'une utilisation plus récente en odontolo-
force que très peu sa résistance. En effet, la résine est « cou- gie21. Ses qualités sont indéniables, très faible densité,
pée » par la grille, les forces se trouvent concentrées dans module d'élasticité bas, aucun phénomène d'oxydation et,
des zones plus petites qui deviennent plus fragiles12. Seul surtout, parfaite biocompatibilité. Il représente une excel-
l'emploi des techniques de sablage ou d'adhésif (4-Meta) lente alternative aux bases métalliques contenant du nickel.
permet à la résine de s'unir réellement à la grille, rendant sa Par contre, sa coulée présente des problèmes car au-dessus
présence utile13-15. de 650° sa résistance à l'oxydation est faible, et sa faible
densité rend sa coulée difficile, le taux de succès n'est que rigidité de la prothèse. Cela réduit les mouvements de
de 60 % 22,23 . Le thermoformage semble pallier ces diffi- torsion à l'origine de blessures donc de phénomènes de
cultés24. Par ailleurs, la différence de poids entre les plaques résorption.
en titane et en chrome cobalt n'est en réalité que très peu
importante : 2,5 g en moyenne, différence très peu signifi- Les inconvénients
cative par rapport au poids total de la prothèse terminée avec
Malgré leurs incontestables qualités, les bases métal-
la résine et les dents prothétiques25.
liques présentent certains inconvénients dont le praticien
doit tenir compte :
Tous ces matériaux présentent des qualités mécaniques
- Le coût - Le coût de la réalisation d'une plaque métal-
supérieures à celles des résines tant au niveau de la résis-
lique est important surtout en alliage précieux. En consé-
tance à la flexion que de la résistance à l'impact, à l'usure et
quence, malgré leurs qualités remarquables, cela limite
une conductibilité thermique bien supérieure.
leur utilisation.
- Retouches - En cas de blessures, de douleurs par com-
pression, les corrections de l'intrados sont très délicates
voire impossibles à réaliser en raison même de la faible
épaisseur de la plaque prothétique et des difficultés à
Les indications des plaques bases métalliques sont au corriger le métal.
nombre de trois. - Réfection des bases - En dehors des plaques type arma-
ture, la réfection des bases pour compenser la résorp-
Les indications techniques tion est impossible. En conséquence, les patients, dont
le potentiel de résorption est élevé, ne peuvent justifier
- Les risques de fractures - La base métallique prévient
de l'indication d'une plaque métallique à contact
les risques de fracture par fatigue qui sont potentialisés
muqueux. De même, en cas d'extractions multiples, la
par la présence d'un diastème interincisif, d'une prothèse
réalisation d'une prothèse métallique doit être différée.
unimaxillaire opposée à une arcade antagoniste dentée,
de freins incisifs ou linguaux dont les insertions sont
importantes. De même, les bases métalliques évitent les
risques de fractures liés à une trop faible épaisseur de
résine provoquée par un espace prothétique diminué, Les plaques métalliques sont conçues de trois manières.
par la présence d'attachements.
- L'amélioration de la rétention - La précision d'adaptation La plaque du type armature
de la base prothétique réduit l'épaisseur du film salivaire Le châssis métallique est entièrement englobé par la résine,
donc favorise la rétention. De plus, la mouillabilité de la il n'existe donc aucun contact entre le châssis métallique et
salive vis-à-vis de l'intrados de la plaque métallique favo- la muqueuse. Ce type de châssis est tout particulièrement
rise les phénomènes d'adhésion qui est, elle-même, destiné aux prothèses mandibulaires présentant des com-
accrue par le sablage de l'intrados (chapitre 6). Enfin, pléments de rétention tels que des attachements sur des
l'utilisation de métaux lourds comme les alliages d'or implants ou des racines naturelles. Leur rôle est essentielle-
favorise la stabilisation de la prothèse mandibulaire. ment de renforcer la prothèse, prévenant ainsi les risques
de fracture (fig. 24-1 ). La réfection des bases se réalise sans
Les indications physiologiques difficultés.
- Le confort - Les plaques métalliques permettent de
réduire de manière importante l'épaisseur de la prothèse
au niveau de la voûte palatine : 0,5 mm pour les alliages
Cr-Co, 0,6 mm pour le titane, contre 1,5 mm pour la
résine. Cependant, la diminution de l'épaisseur des
plaques palatines associée à une meilleure conductibilité
thermique améliore les sensations du patient, mais sans
une réelle conséquence sur les sensations gustatives.
- L'allergie - Même si l'allergie à la résine est une éven-
tualité rare, l'utilisation de plaques métalliques permet
de pallier ces inconvénients en particulier avec l'utilisa-
tion d'or et de titane.

Les indications prospectives


- La prévention de la résorption - En particulier chez les
patients jeunes, la base métallique assure une parfaite Fig. 24-1 Plaque type armature de renfort.
La plaque à appui muqueux limité
Le châssis métallique établit un contact réduit avec la sur-
face d'appui muqueuse. Au niveau maxillaire, le contact
direct s'établit avec la partie centrale de la voûte palatine,
zone la moins résorbable de la surface d'appui telle qu'elle
a été définie par Watt et Mc Crégor (chapitre 2). Cette plaque
se prolonge vers le sommet des crêtes par des grilles qui
assureront la jonction avec la résine des parties alvéolaires.
Distalement, le joint postérieur peut-être conçu de deux
manières, soit la limite postérieure est réalisée directement
en métal soit par une grille dans laquelle la résine de base
est adjointe. Cette dernière solution autorise certaines cor-
rections alors que la première n'autorise aucune imprécision Fig. 24-2 Plaque type contact muqueux limité avec joint posté-
(fig. 24-2). À la mandibule la surface de contact est réser- rieur métallique.
vée au sommet de la crête.

La plaque à appui muqueux étendu


Certains auteurs proposent d'étendre la plaque métallique
sur le versant vestibulaire des crêtes maxillaires. Cette
conception offre des avantages indéniables de précision, de
rigidité, d'amélioration de l'adhésion mais un inconvénient
majeur: l'impossibilité absolue de réaliser des réfections. Le
joint postérieur sera de préférence métallique. Ceci impose
de la part du praticien de parfaitement déterminer sa posi-
tion, son épaisseur et sa forme (fig. 24-3).

Fig. 24-3 Plaque type contact muqueux étendu, joint postérieur


en résine (voile de classe 3b).

seur des décharges est déterminée par le praticien. À l'ar-


cade maxillaire, la position du joint postérieur est détermi-
La réalisation d'une plaque métallique à contact muqueux née, éventuellement contrôlée à l'aide d'une maquette en
limité ou fortement étendu doit respecter les préalables sui- cire dure surtout si le choix d'un joint postérieur métallique
vants. est effectué.

Au cabinet dentaire Au laboratoire


- Les tissus de la surface d'appui doivent être sains et ne Une clef en plâtre ou en silicone des faces vestibulaires enre-
présenter aucun phénomène inflammatoire, aucune gistre l'ensemble de la position des dents (fig. 24-4a, b). La
blessure. maquette de la base métallique est élaborée en fonction du
- L'empreinte de la surface d'appui doit répondre de type de plaque choisie, des indications transmises par le pra-
manière irréprochable aux objectifs physiologiques et ticien et surtout des volumes prothétiques utilisables mis en
techniques. évidence par les clefs de montage des dents antérieures et
Les modèles sont ensuite montés sur articulateur en rela- postérieures.
tion centrée à la dimension verticale d'occlusion. Le montage Pour les plaques à appui muqueux peu étendu, le choix
des dents antérieures et postérieures choisies est réalisé, l'es- des moyens de rétention est très important. Ceux-ci doivent
thétique validée, les composantes occlusales contrôlées. assurer une parfaite rétention de la résine sur la plaque, ne
Le praticien procède ensuite à un examen digital soi- pas gêner le montage des dents prothétiques, résister aux
gneux de la surface d'appui de manière à parfaitement déli- futures forces qui arrachent la résine du châssis. Pour cela,
miter la position et l'étendue du ou des tori palatins et il est préférable d'utiliser des préformes type arceau plutôt
d'éventuels autres reliefs recouverts par une muqueuse fine que celles type grille fine 12 . Après coulée, la plaque est finie,
non dépressible tant à l'arcade maxillaire que mandibulaire. l'extrados soigneusement poli alors que l'intrados est sim-
Toutes ces zones sont marquées sur les modèles, l'épais- plement sablé (fig. 24-5).
Fig. 24-4a Clef en silicone enregistrant la position des dents pro- Fig. 24-4b Clef objectivant les volumes utilisables par le laboratoire.
thétiques.

Fig. 24-5 Plaque métallique mandibulaire à


recouvrement muqueux étendu, intrados sablé.

châssis pour améliorer le rendu esthétique des prothèses.


Pour cela, les zones de rétention du châssis sont sablées,
La présence d'un châssis métallique s'accompagne souvent puis enduites d'un primer. Dans un deuxième temps un
d'une ombre grisâtre dans la résine ce qui, au niveau anté- « opaquer » est déposé puis polymérisé (fig. 24-6a, b, c, d).
rieur, peut entraîner un préjudice esthétique notable. Pour À cela s'ajoutent les différents traitements précédem-
pallier ce type de problème, il est possible de maquiller le ment abordés.

Fig. 24-6a Maquillage d'un châssis métallique. Fig. 24-6b Maquillant de châssis métallique.
Fig. 24-6c Aspect du chassis colore. Fig. 24-6d Aspect final.

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L'implantologie fait aujourd'hui partie intégrante des possi- patient le plus d'informations possible et de répondre à
bilités thérapeutiques offertes dans le traitement de l'éden- toutes ses interrogations. D'autre part, le praticien devra
tement total et, lors de l'établissement d'un plan de traite- prendre en compte tous les facteurs généraux et locaux
ment, la solution implantaire doit toujours être abordée. impliqués dans cette approche thérapeutique et à long
Trois types de prothèses implantaires peuvent être envi- terme dans son succès. La réalisation d'une prothèse totale
sagées1 : supra-implantaire réclame une réflexion et une analyse pré-
- La prothèse ostéo-ancrée ou prothèse fixée transvissée visionnelle préprothétique et pré-implantaire très rigoureuse
sur les implants; elle peut être déposée par le praticien. ainsi qu'une phase chirurgicale respectant non seulement
- La prothèse implanto-portée, prothèse fixée amovible, les exigences de l'acte chirurgical mais aussi les objectifs pro-
est une prothèse de recouvrement sur implant, la réten- thétiques préalablement définis.
tion et la sustentation sont assurées par une barre frai-
sée et divers autres systèmes. Le patient peut retirer sa
prothèse.
- La prothèse à complément de rétention est une prothèse Elles se répartissent en trois groupes.
totale conventionnelle muco-portée et stabilisée par des - Quels avantages potentiels peut-on attendre de la mise
implants. en place d'implants? Les bénéfices offerts sont indé-
niables. L'efficacité masticatoire est fortement améliorée
Seul ce dernier type de prothèse adjointe supra-implan- grâce à une stabilisation et une rétention prothétique
taire, dit à complément de rétention, sera envisagé ici. accrue par la solidarisation des bases prothétiques à la
Mais cette proposition thérapeutique implique que les surface d'appui2. Dans les cas de forts décalages des
principes de conception et les règles de réalisation de la pro- maxillaires, de résorptions marquées, la restauration de
thèse adjointe complète soient parfaitement respectés. l'harmonie des lèvres est assurée par le montage idéal
Le succès de cette thérapeutique est lié à la conduite des dents prothétiques associé à la fausse gencive, sans
cohérente et rigoureuse des trois étapes qui président à pour autant créer une instabilité prothétique. La présence
cette réalisation : les étapes pré-implantaire, implantaire et d'implants réduit la résorption. À long terme son taux
post-implantaire. varierait de 0,02 à 0,1 mm, ce qui correspond à la perte
osseuse mesurée au niveau des dents naturelles chez
un patient âgé3. Sur le plan psychologique, les patients
retrouvent confiance en eux; la prothèse n'apparaît plus
comme un corps étranger « mobile » dans la cavité buc-
Parmi toutes les étapes du traitement aboutissant à la réali- cale, grâce à l'ancrage assuré par les implants4.
sation d'une prothèse adjointe supra-implantaire, l'étape - Quels inconvénients peut-on craindre du traitement ? La
pré-implantaire est capitale en ce qui concerne tant le patient durée du traitement, pour certains patients et pour des
que le praticien. D'une part, il est essentiel de donner au raisons diverses, peut représenter un frein, voire une
contre-indication. C'est pourquoi le patient dès les pre- Tableau 25-1 Contre-indications générales.
miers rendez-vous doit être parfaitement informé de
toutes les différentes étapes nécessaires. Notamment,
les étapes préprothétiques et la durée de la phase d'os-
téo-intégration, étapes qui aux yeux du patient apparais-
sent parfois « très longues ». Pour cela il est souhaitable
de donner une sorte de calendrier des différentes phases
cliniques techniques et surtout d'attente, calendrier qui
va permettre au patient de visualiser l'ensemble de la
thérapeutique et de comprendre ce que cela implique
en phase d'attente.
- Quels risques doit-on redouter à la suite de la mise en
place d'implants? Ils existent, ce sont essentiellement
des risques d'échec implantaire (défaut d'ostéo-intégra-
tion) ou d'échec prothétique. Mais les résultats diffèrent
nettement au maxillaire et à la mandibule5"7. À la man-
dibule, le taux d'échec d'ostéo-intégration est inférieur à
10 %, alors qu'au maxillaire il oscille entre 8 % et 30 %.
Sur le plan prothétique, le taux de succès des prothèses
à complément de rétention varie à la mandibule entre
95 % et 97 %, contre 72 % à 78 % au maxillaire.

Il est important de préciser à ce stade aux patients


Elle doit d'abord tenir compte des indications et contre-indi- fumeurs réguliers que leurs risques d'échec implantaire sont
cations générales à la pose des implants. Puis, grâce à l'exa- accrus de plus de 50 % par rapport aux patients non
men clinique, à l'examen de clichés radiographiques, à l'ap- fumeurs9.
préciation du profil psychologique du patient, les
contre-indications locales peuvent apparaître. Enfin, l'étude
L'examen clinique
prothétique prévisionnelle est fondamentale à toute propo-
sition thérapeutique. Aux données classiques de l'examen clinique s'ajoutent les
éléments spécifiques au projet implantaire, et tout particu-
lièrement un certain nombre de contre-indications locales
Les indications et contre-indications générales absolues ou relatives (tableau 25-2).
(ANDEM janv. 1993)8 Pour les patients ayant subi une radiothérapie de la
région maxillo-faciale (en France, irradiation à 70 grays), la
Les indications
mise en place d'implants reste contre-indiquée en raison des
Face à certaines situations cliniques caractéristiques, une risques d'ostéoradionécrose. Dans d'autres pays, où la dose
thérapeutique implantaire est plus particulièrement indi-
quée en cas :
Contre-indications locales.
- d'échec de la prothèse conventionnelle (inconfort,
manque de stabilité ou de rétention) ;
- de résorption importante;
- de mouvements incontrôlés des muscles péri-buccaux
ou de la langue;
- de rejet psychologique de la prothèse amovible ;
- de réflexes nauséeux incoercibles.
Ces deux dernières indications thérapeutiques indiquent
plus particulièrement la réalisation de prothèses ostéo-
ancrées ou implanto-portées.

Les contre-indications
Elles recouvrent toutes les affections liées à un risque
infectieux potentiel et le risque d'aggraver l'état général du
patient. Elles se décomposent en contre-indications géné-
rales absolues ou relatives (tableau 25-1).
d'irradiation n'est que de 60 grays le taux de réussite des - Aux composants fondamentaux de l'occlusion11 -
implants est de 80,5 % soit une diminution de 15 à 18 % Dimension verticale d'occlusion, relation centrée, plan
par rapports aux taux habituels. d'occlusion.
Dans la mesure où l'âge ne semble pas affecter le poten- - Aux paramètres physiologiques et fonctionnels -
tiel d'ostéo-intégration, chez les patients en bonne santé ils Respect du couloir prothétique.
ne doivent pas être écartés de cette thérapeutique, sauf en - Aux paramètres esthétiques12 - Soutien des tissus mous
cas de résorption très importante associée à un risque de (les lèvres, les joues), ligne du sourire...
fracture3. Cette maquette validée permet d'évaluer l'espace pro-
Par contre, l'hygiène de la cavité buccale et des prothèses thétique disponible, facteur déterminant en prothèse
doit être appréciée, car l'inflammation péri-implantaire et adjointe supra-implantaire d'une part en raison du volume
l'hyperplasie des tissus muqueux comptent parmi les com- requis pour la mise en place des connexions implanto-pro-
plications les plus fréquentes de la prothèse à complément thétiques, et d'autre part, en raison de la valeur du bras de
de rétention10. levier généré par la prothèse vis-à-vis de l'implant.
Enfin, l'analyse de l'occlusion est fondamentale, car c'est Le montage des dents détermine les positions vestibu-
une cause d'échec non négligeable. laire, linguale et occlusale qui doivent impérativement être
respectées13. Ces limites peuvent être visualisées simple-
Les examens complémentaires ment grâce à la confection de clefs en silicone (fig. 25-1).
En cas de problèmes particuliers (espace prothétique
L'analyse de la radiographie panoramique limité, axe des implants et esthétique...), le montage direc-
teur peut être complété par une prévision de la situation des
La radio panoramique est le seul examen radiographique à
structures supra-implantaires (fig. 25-2). Ses objectifs prin-
prescrire en première intention.
Elle permet d'évaluer rapidement la hauteur d'os dispo-
nible, l'importance de la corticale, la densité de l'os spon-
gieux, la proximité d'éléments anatomiques (sinus, fosses
nasales, nerf alvéolaire inférieur), la présence de dents
incluses, d'apex, de lésions telles que des kystes, des granu-
lomes au niveau du ou des sites implantaire(s) envisagé(s).

Le profil psychologique du patient


Il est essentiel, enfin, de connaître et d'évaluer la motivation
et les souhaits (esthétiques, fonctionnels) du patient. Sa
coopération au traitement est un facteur de réussite à long
terme.
Il faudra savoir écarter les patients aux exigences et aux
attentes irréalistes pour lesquels le traitement dans tous les
cas sera un échec.
Fig. 25-1 Montage directeur et réalisation d'une clef en silicone
pour enregistrer la situation et l'orientation des faces vestibulaires
des dents prothétiques.
L'étude prothétique prévisionnelle
La mise en place des implants doit parfaitement s'intégrer
dans la conception et la réalisation de la prothèse complète
et ce sans aucun compromis.
Cette étude prévisionnelle se décompose en trois temps :
- le montage directeur;
- le guide radiographique;
- l'analyse du scanner.

Le montage directeur
C'est une véritable maquette de la future prothèse.
Des empreintes d'étude sont réalisées et les modèles
sont montés en articulateur en relation centrée, à la dimen-
sion verticale d'occlusion. Puis les dents sont choisies et le
montage exécuté. Fig. 25-2 Une maquette des structures implantaires est réalisée
À ce stade, la validation clinique de la maquette doit être en cire. Appréciation des volumes par rapport à la clef en silicone
rigoureuse et systématique, elle s'adresse : du montage directeur.
Fig. 25-3 L'analyse préimplantaire des modèles montés sur arti- Fig. 25-4 Le guide radiologique réalisé est un duplicata du mon-
culateur à la bonne dimension verticale d'occlusion met en évi- tage directeur. Des perforations ont été faites selon l'axe du mon-
dence un espace de 18 mm. tage et le point d'émergence souhaité des implants (Gutta- Percha
foulée dans ces perforations).

cipaux sont la localisation des sites d'émergence des


implants, leur orientation, et le volume des connexions choi-
sies (barre ou attachements axiaux) vis-à-vis de la prothèse
(dents et fausse gencive). Par contre, un espace prothétique
important produit un bras de levier dont il faut tenir compte
pour la conception et le pronostic (fig. 25-3).
Dans le cas où le patient est déjà porteur de prothèses
adjointes complètes satisfaisantes, répondant à tous les cri-
tères cités précédemment, elles pourront être utilisées pour
l'étude prévisionnelle.

Le guide radiographique

Son objectif principal est la visualisation de l'emplacement


souhaité des implants, mais aussi la validation de la cohé-
Fig. 25-5 Dents Ortho-Tac® radio-opaques facilitant l'analyse
rence entre les objectifs prothétiques et les possibilités radiographique préimplantaire.
implantaires.
Différents types de guides existent, mais la réalisation
d'un duplicata en résine transparente de la maquette pro-
thétique, préalablement préparée et validée, ou de la pro-
L'analyse du scanner
thèse existante reste la technique la plus adaptée (cha-
pitre 26). Le scanner permet une analyse précise de la quantité et de
Le guide radiographique obtenu, les sites implantaires la qualité de l'os disponible au niveau des sites implantaires
envisagés sont précisément repérés et le guide est perforé éventuels, analyse qui confirmera ou infirmera le nombre
à leur niveau selon l'axe du montage des dents prothétiques. d'implants prévus, leurs positions sur l'arcade et leurs orien-
Ce respect de l'angulation des dents est essentiel pour des tations vis-à-vis des structures osseuses.
raisons non seulement esthétiques, mais également bio- Le volume, la qualité de l'os sont appréciés avec préci-
mécaniques, les implants résistant mieux aux forces de com- sion selon les critères de Zarb et Lekholm et les rapports
pression que de torsion. Les perforations sont remplies avec avec les structures anatomiques proximales déterminés
un matériau radio-opaque (Gutta Percha par exemple) (tableau 25-3a, b) (fig. 25-6).
(fig. 25-4). À la mandibule dans la région symphysaire, le volume et
L'application de sulfate de baryum sur le guide est une la qualité osseuse (classe A ou B, type I ou II) sont le plus
autre possibilité qui permet d'évaluer la position de la future souvent favorables ou très favorables à la mise en place d'im-
prothèse par rapport au tissu osseux. Il est aussi possible de plants (fig. 25-7). Cependant, dans certains cas malgré un
réaliser des montages avec des dents radio-opaques « Vivo volume osseux suffisant, la qualité osseuse représente un
Tac, Ortho Tac® » et la résine chémopolymérisable corres- facteur négatif (fig. 25-8). Par ailleurs, lors de la mise en
pondante (fig. 25-5). place d'implants, l'émergence du nerf alvéolaire inférieur
Tableau 25-3 Classification de Zarb et Lekholm

Tableau 25-3a Appréciation du volume osseux observé. Tableau 25-3b Appréciation de la qualité du tissu osseux.

n'est pas le seul élément anatomique limitant la mise en


place d'implants, la présence du canal incisif et des diffé-
rents foramen qui perforent la partie linguale de la région
symphysaire ne doit pas être oubliée14.
A contrario, au maxillaire, les sinus, les fosses nasales
constituent des obstacles anatomiques qui fréquemment
limitent le nombre ou la longueur des implants pouvant
être mis en place. De plus, la qualité osseuse du maxillaire
est inférieure à celle de la mandibule (souvent de classe III,
Fig. 25-7 Mandibule présentant un os dense, une corticale
épaisse, os de classe I favorable à la mise en place d'implants. voire de classe IV). Cette évaluation est un facteur important
dans l'établissement du pronostic implantaire et prothétique,
car il existerait une corrélation statistiquement significative
entre le degré de résorption, la qualité osseuse et le taux
d'échec de ces traitements15.
Dans les cas de résorption majeure (classe E, type IV),
envisager la pose d'implants reste totalement impossible
sans l'apport de greffes osseuses, de comblement de sinus.
La problématique est alors beaucoup plus complexe.

Les propositions thérapeutiques découlent de l'ensemble


des paramètres préalablement analysés et notamment, du
montage directeur et des données du scanner. Cela permet
Fig. 25-8 Volume osseux mais mauvaise densité os de classe III ou de définir le nombre d'implants, leurs longueurs et les
IV, pronostic réservé, augmentation de la durée d'ostéointégration. moyens de connexions possibles.
Le nombre d'implants nécessaires16 d'étapes supplémentaires aussi bien au cabinet dentaire
qu'au laboratoire de prothèse. La durée du traitement et
- À la mandibule, 2 ou 4 implants symphysaires sont suf-
son coût en sont par ailleurs réduits comparativement au
fisants (longueur supérieure ou égale à 10 mm).
système des barres.
- Au maxillaire, 4 implants antérieurs ont été longtemps
À la mandibule, les 2 types d'attachements sont envisa-
conseillés. Mais en raison d'un taux non négligeable
geables. Il incombe au praticien d'avoir avant l'intervention
d'échec des prothèses adjointes à complément de réten-
parfaitement défini les objectifs thérapeutiques pour éviter
tion, la tendance actuelle est de recommander un mini-
des problèmes prothétiques ou relationnels avec le patient
mum de 6 implants (longueur supérieure ou égale à
si d'aventure la position et le nombre d'implants souhaités
10 mm).
n'étaient pas respectés.
Au maxillaire, la situation est plus délicate en raison de
Les moyens de connexion prothétique la quantité et de la qualité osseuse et un plus grand nombre
(boule ou barre) d'implants est souvent nécessaire; dans ces cas, des barres
La prothèse adjointe supra-implantaire à complément de de conjonction sont habituellement réalisées19. De plus, la
rétention est reliée aux implants à l'aide de connexions conception de prothèse complète dite en « fer à cheval »,
axiales ou de barre de conjonction17,18. dégageant en grande partie la voûte palatine, engendre une
Les connexions magnétiques présentent de nombreux transmission des forces plus importante sur les implants,
inconvénients (entre autres corrosion et usure, moindre effi- d'où la nécessité d'envisager la pose d'un plus grand nombre
cacité), ce qui contre-indique leur utilisation. d'implants. Dans ce cas la longueur, la répartition, la position
Plusieurs paramètres interviennent dans le choix du type des implants devront tenir compte des principes qui régis-
de connexion : sent la stabilité et la stabilisation des restaurations prothé-
- Le nombre des implants posés - Au-delà de deux tiques classiques (Plan de Roy) et implantaires (non-aligne-
implants la barre de conjonction est requise en raison des ment des implants).
difficultés de parallélisme et des problèmes bioméca-
niques liés à l'utilisation de boules. De plus, les éléments
rétentifs doivent être alignés et se situer au même niveau.
- L'orientation des implants - L'utilisation de connexions
axiales requiert un parallélisme quasi parfait entre les Le guide chirurgical
implants. La tolérance géométrique des rétentions Lorsque la proposition thérapeutique est arrêtée, le guide
axiales varie en effet selon les fabricants de 6° à 10° radiologique pourra servir de guide chirurgical, permettant
(Dalro) voire 20° pour le Locator®. Si l'absence de paral- ainsi au projet prothétique de « présider » à la phase chirur-
lélisme entre deux implants est marquée la solution gicale et d'assurer des conditions optimales à la future réa-
passe par l'utilisation de système angulé ou à barre de lisation prothétique.
conjonction. Après élimination de la Gutta-Percha, les perforations du
- La forme de l'arcade - Les règles de mise en place des guide permettent de repérer les sites implantaires. Mais
barres de conjonction, définies par Dolder en 1961 néanmoins, après décollement du lambeau, la remise en
conseillent, voire imposent, de placer la barre à la fois place et la stabilité du guide sont compromises, rendant très
parallèlement à l'axe charnière mais aussi au plan occlu- difficile son utilisation avec le foret de 2 mm déterminant
sal et perpendiculaire au plan sagittal médian. La forme l'axe de l'implant.
de l'arcade associée à la position des implants au sein
de l'arcade concernée peut s'opposer à la mise en place
d'une barre rectiligne. Elles créent un volume important La prothèse de « temporisation »
du côté lingual à l'origine de gênes linguales. Les réten- Quel que soit le plan de traitement, le préalable incontour-
tions axiales s'imposent; pour certains auteurs la mise nable à la réalisation d'une prothèse adjointe supra-implan-
en place d'une barre ronde permet de répondre à cette taire est la réalisation d'une prothèse complète convention-
situation clinique. nelle satisfaisante sur le plan fonctionnel et esthétique,
- L'encombrement du système - C'est un paramètre prothèse qui permettra d'assurer la phase de temporisation
déterminant. Techniquement l'espace prothétique dis- pendant l'ostéo-intégration des implants.
ponible a été apprécié grâce au montage directeur. Le Par conséquent, avant tout traitement implantaire, si le
système des clefs et les dimensions connues des patient ne possède pas de prothèse complète, une prothèse
connexions envisagées permettent d'apprécier la faisa- idéale doit être construite. C'est-à-dire une restauration
bilité prothétique. Mais dans tous les cas, les connexions répondant aux grands principes exposés précédemment, et
axiales présentent un encombrement réduit comparati- ce, sans aucune concession.
vement aux barres de conjonction. Si le patient porte une prothèse, celle-ci devra être rigou-
- La complexité du traitement est un autre facteur impor- reusement analysée : étendue de la surface d'appui, stabilité,
tant - L'utilisation de connexions axiales représente une rétention, plan d'occlusion, dimension verticale d'occlusion,
solution relativement simple, n'entraînant que peu usure et montage des dents (antérieures et postérieures),
occlusion, esthétique, état de la résine de la base prothé-
tique... Dans les cas où les paramètres principaux sont res-
pectés à l'exception de l'étendue de la surface d'appui, une
réfection de la base prothétique après réhabilitation des tis-
sus de soutien peut être envisagée (chapitre 21).
Lorsque le patient possède une ancienne prothèse
répondant aux impératifs définis et qui a permis l'analyse
pré-implantaire, cette prothèse servira à la temporisation.

Elle se décompose en deux temps :


- l'aménagement de la prothèse après la chirurgie ;
- la gestion du stade 2 implantaire.
Et au centre des préoccupations, le problème du maté-
riau à utiliser est essentiel.
Fig. 25-9 Aspect schématique de la mise en place d'une résine
souple au niveau d'un site implanté mandibulaire.
L'aménagement de la prothèse complète (1) : résine à faible coefficient de fluage.
Pendant les 10 à 15 jours qui suivent la mise en place des (2) : résine à fort coefficient de fluage.
implants, le port de la prothèse doit être totalement sup-
primé. Durant la phase initiale de cicatrisation, une com-
pression des tissus mous risque, en effet, de compromettre prise du matériau, l'absence de contact direct entre la
l'ostéo-intégration. De plus, si à l'arcade antagoniste le muqueuse supra-implantaire et la résine de la base pro-
patient est aussi porteur d'une prothèse complète, la nuit il thétique est vérifiée, tout contact pouvant être à l'origine
devra impérativement la retirer. de pressions incontrôlées vis-à-vis des implants.
Quinze jours après la chirurgie, la prothèse existante est - Les bases siliconées - Elles devront être utilisées en res-
modifiée pour créer une base souple en regard du site pectant les indications fournies, notamment la prépara-
implanté. tion de l'intrados prothétique, pour éviter tout décolle-
Celle-ci répond à trois objectifs : ment et assurer une bonne adhésion du matériau à la
- réduire et répartir les forces transmises au niveau de la base en résine.
surface d'appui et du site implantaire; Mais le problème majeur reste le vieillissement préma-
- maintenir les relations occlusales; turé de ces matériaux avec un état de surface devenant
- permettre une bonne hygiène. rugueux et irritant pour la muqueuse, ainsi qu'une colonisa-
tion bactérienne importante20. Par conséquent, quel que soit
Pour cela deux types de matériaux peuvent être utilisés :
le matériau utilisé, pendant toute la durée de l'ostéo-inté-
- Les résines plastique à prise retardée - Il est préférable
gration un suivi rigoureux doit être instauré et le patient doit
d'utiliser des résines à prise retardée à faible coefficient
être sensibilisé à l'importance de ces rendez-vous.
de fluage au niveau des bords (Soft-Liner®, Fitt de Kerr®)
Des conseils d'hygiène prothétique doivent être prodi-
et à fort coefficient de fluage en regard des sites implan-
gués au patient car, si l'hygiène est fondamentale quant à la
taires (Visco-Gel®). Les propriétés physiques du Coe-soft
pérennité des qualités des matériaux élastiques, c'est aussi
se situent à mi-chemin entre ces deux produits.
un facteur important du succès de ces thérapeutiques
Cliniquement, en regard des implants, la base prothétique
implantaires.
est largement évidée, au minimum de 2 mm, et les bords
de la prothèse sont raccourcis. Si deux résines sont utili-
sées, la résine à faible coefficient de fluage est mise en La gestion du stade 2 implantaire
place, les bords prothétiques sont modelés pour éviter En général, la deuxième phase de chirurgie, c'est-à-dire la
toute surextension qui entraînerait des blessures et une découverte des implants et la mise en place des vis de cica-
instabilité prothétique. La phase de gélification terminée trisation transgingivale, intervient 4 à 6 mois plus tard.
le matériau est enlevé en ne laissant que les bords. La Cependant, la durée de la période d'ostéo-intégration
zone évidée est garnie de résine à fort coefficient de n'est pas constante; elle dépend non seulement de la sta-
fluage et le patient est conduit en occlusion (comme au bilité initiale des implants mais aussi de la qualité de l'os
stade de l'empreinte secondaire) (fig. 25-9). Après la implanté. Un degré identique d'ostéo-intégration pour une
qualité d'os différente peut être obtenu en modulant la
durée de cette période.
Les piliers « débordant » de la gencive, un nouvel amé- Les empreintes
nagement de l'intrados prothétique est nécessaire pour évi-
La réalisation des empreintes répond à un triple objectif,
ter toute surcharge fonctionnelle. Creusé, il sera de nouveau
enregistrer:
rebasé à l'aide d'un matériau élastique; la cicatrisation
- la forme, la position et l'orientation des piliers implan-
muqueuse autour des vis de cicatrisation nécessite une ving-
taires;
taine de jours avant de pouvoir réellement débuter le trai-
- les surfaces d'appui fibro-muqueuses, le jeu de la zone
tement prothétique (fig. 25-10a, b, c).
de réflexion et des organes para-prothétiques ;
- la position relative de ces deux composants, sachant que
la mobilité des implants est estimée à 10 u m 2 1 , 2 2 et
variant de 0,1 à 0,3 mm pour la muqueuse selon les
auteurs.
Comme en prothèse complète conventionnelle une
empreinte préliminaire et une empreinte secondaire sont
réalisées. Selon l'arcade, les conditions cliniques, le type de
rétention supra-implantaire, les protocoles varient.

1re éventualité - Attachements


axiaux + analogues de laboratoire

Fig. 25-10a Lors de la temporisation au stade post-chirugical Il est préférable de visser sur les implants les systèmes de
(stade 2), la prothèse est évidée en regard des vis de cicatrisation, rétention et de les serrer selon les données du fabricant. La
les bords de la prothèse ont été raccourcis. situation est alors comparable à celle précédemment décrite
pour les attachements intra-coronaires axiaux. Les
séquences cliniques empreintes préliminaire et secondaire
sont donc identiques. Les analogues sont replacés dans
l'empreinte secondaire, avant la coulée. Puis, la prothèse est
élaborée (fig. 25-11a, b, c, d, e).

Fig. 25-10b Contrôle dans la cavité buccale de l'absence d'inter-


férence entre les vis et l'intrados prothétique.

Fig. 25-11a Attachements sphériques vissés sur les implants


(Straumman®).

Fig. 25-10c Prothèse rebasée en regard des vis de cicatrisation Fig. 25-11 b Attachement sphérique (a) - Dalro (b) - Analogue
avec un matériau souple (Coe-Soft GC®). de laboratoire (c).
L'empreinte préliminaire
Après dépose des vis de cicatrisation, les transferts standard
sont vissés sur les implants et leur adaptation éventuelle-
ment contrôlée radiographiquement. Le choix du porte-
empreinte de série et son adaptation sont souvent délicats
en raison de la présence des transferts. L'empreinte à l'algi-
nate rebasée s'impose le plus souvent.

Le porte-empreinte individuel
Au niveau de la surface d'appui muqueuse le porte-
empreinte est adapté, dans les secteurs édentés, un bour-
relet, en Stent's ou en résine, préfigure l'arcade et renforce
le porte-empreinte, évitant ainsi toute distorsion secondaire.
Au niveau des implants la conception varie selon le type de
Fig. 25-11c Détail de l'empreinte au niveau de l'attachement
transfert; si les transferts utilisés sont du type standard, le
sphérique.
porte-empreinte est fermé englobant les transferts; si les
transferts choisis sont du type transvissés le porte-empreinte
présente une fenêtre occlusale pour accéder aux vis des
transferts (fig. 25-12).

Fig. 25-11d L'analogue de laboratoire est collé.

Fig. 25-12 Le porte-empreinte à ouverture occlusale est préparé


en fonction des volumes et de la position des transferts.

L'empreinte secondaire
Pour répondre aux trois objectifs précédemment cités, le pra-
ticien doit réaliser une empreinte dissociée24. Cette
empreinte peut se réaliser sous pression occlusale ou sous
pression digitale.
Aux critères présidant au choix de l'empreinte sous pres-
sion occlusale, critères précédemment décrits (chapitre 10),
s'ajoutent, pour les implants, les problèmes d'occlusion.
Fig. 25-1 le Modèle terminal avec les analogues reproduisant les Dans un premier temps le porte-empreinte individuel est
attachements intra-buccaux. ajusté selon les séquences et critères identiques à ceux défi-
nis pour une prothèse complète classique, le bourrelet du
porte-empreinte est réglé de manière à maintenir la dimen-
sion verticale d'occlusion et l'occlusion de relation centrée. Les
vis de cicatrisation sont déposées, les transferts vissés, le porte-
2e éventualité - Barre de conjonction
empreinte inséré. Le praticien vérifie s'il n'y a pas d'interférence
et/ou absence d'analogue de laboratoire
entre les transferts et les dents antagonistes. S'il n'y pas d'in-
Ces empreintes sont réalisées à l'aide de transferts d'im- terférence, l'empreinte peut-être réalisée sous pression occlu-
plants qui peuvent être du type standard vissé ou pick-up sale, par contre, s'il y d'importantes interférences, l'empreinte
transvissé. ne doit pas être prise selon cette procédure (fig. 25-13).
Fig. 25-13 Organigramme du choix de la
réalisation d'une empreinte secondaire.

L'empreinte dissociée sous pression occlusale : Le patient, guidé en occlusion de relation centrée,
- Elle se déroule en trois temps. maintient le porte-empreinte en exerçant une légère
- 1 er temps - Le réglage du bourrelet : celui-ci doit être pression par l'intermédiaire du bourrelet. Pour amé-
précis pour maintenir la dimension verticale d'occlu- liorer la précision des relations occlusales, il est pos-
sion et la relation centrée avec l'arcade antagoniste. sible de coller à la surface du bourrelet de la pâte
Cela sous-entend que l'arcade antagoniste assure thermoplastique. Puis, un plâtre à prise rapide est
une parfaite stabilisation de l'occlusion. préparé, et injecté à la seringue autour des transferts
- 2e temps - L'empreinte de la surface d'appui grâce à l'ouverture du PEI. Après la prise du plâtre,
muqueuse: Les phases cliniques sont identiques à les vis des transferts sont dévissées, et le porte-
celles utilisées en prothèse adjointe complète clas- empreinte peut alors être désinséré, le reste du trans-
sique. Recherche de la stabilité, puis de la rétention par fert restant «prisonnier » du plâtre (fig. 25-14a, b,cd).
un réglage des bords (chapitre 10). Les critères de choix Après contrôle, les vis de cicatrisation sont remises
des matériaux sont semblables à ceux développés. en place, l'empreinte adressée au laboratoire. La rigi-
- 3e temps - L'empreinte de positionnement des piliers : dité et la stabilité dimensionnelle des plâtres à
Les transferts transvissés sont mis en place, leur posi- empreinte assurent une précision maximale quant à
tion contrôlée radiographiquement. Le porte- l'enregistrement de la situation des piliers implan-
empreinte est inséré dans la cavité buccale, l'absence taires, et, pour ces raisons, ce matériau est particu-
d'interférence entre celui-ci et les transferts vérifiée. lièrement indiqué.

Fig. 25-14a Lors de l'empreinte secondaire des surfaces d'appui, Fig. 25-14b Le patient est à nouveau guidé en occlusion de rela-
le patient est en occlusion. tion centrée, puis du plâtre est injecté autour des transferts trans-
vissés.
Fig. 25-14c Retrait des vis des transfert qui restent «emprisonnés» Fig. 25-14d Aspect final de l'empreinte.
dans le plâtre.

L'empreinte dissociée sous pression digitale : 3e éventualité


Elle peut se faire avec un porte-empreinte ouvert ou
Lorsque les éléments prothétiques, en particulier une barre,
fermé. Dans le premier cas les séquences sont totalement
ne peuvent être démontés, qu'ils aient été mis en place
identiques à celles précédemment décrites. Simplement lors
avant l'élaboration de la prothèse ou lors du renouvellement
de l'injection du plâtre le praticien exerce une pression digi-
de celle-ci, l'empreinte primaire est réalisée à l'alginate, l'em-
tale sur le porte-empreinte.
preinte secondaire à l'aide de matériaux élastiques. Dans les
Si un porte-empreinte fermé est utilisé, les transferts
deux cas, l'espace entre la barre et la muqueuse est com-
standard doivent être employés. Les séquences sont iden-
blé à l'aide de cire molle. La coulée du modèle définitif est
tiques. L'empreinte finale est réalisée à l'aide d'un matériau
réalisée en résine époxy au niveau de la barre et en plâtre
élastique polysulfure ou polyéther, ces derniers sont les plus
pour le reste du modèle.
indiqués en raison de leur forte rigidité après la réaction de
prise.
Au laboratoire, les répliques sont vissées sur les trans- L'enregistrement de l'occlusion
ferts, les transferts standard replacés avec soins dans l'em- - mise en articulateur
preinte, le coffrage réalisé. La réalisation d'une barre de
conjonction impose une très grande précision de situation Ces étapes dans le cas de la prothèse complète à complé-
des piliers implantaires. Lors de la coulée de l'empreinte, ment de rétention ne présentent pas de caractères particu-
pour limiter les distorsions liées à l'expansion de prise, un liers et les relations intermaxillaires sont enregistrées de
premier plâtre extra-dur classe V (Microdice®, Fujirock®) est façon classique (chapitre 11).
coulé autour des répliques des piliers; puis après sa prise,
le reste de l'empreinte est coulée à l'aide d'un plâtre adapté
à la prothèse adjointe (fig. 25-15). Le montage des dents
Un montage directeur a déjà été validé lors de l'étude pré-
implantaire. Le laboratoire va donc utiliser ces éléments pour
réaliser le nouveau montage sur l'empreinte secondaire
obtenue. Contrôlé dans la cavité buccale, il servira de mon-
tage directeur pour la réalisation de la barre de conjonction13.
Dans le cas des attachements axiaux, la prothèse est à
ce stade envoyée pour polymérisation.

La réalisation de la barre
La réalisation de la barre doit tenir compte des paramètres
suivants :
- Le type de liaison - La liaison entre la prothèse et la barre
peut être du type rigide ou ruptrice. Pour cela, il existe
trois types de barres et de cavaliers : les barres rigides en
Fig. 25-15 Le modèle secondaire obtenu après coulé à l'aide des U avec de longs cavaliers assurant une rétention par fric-
deux plâtres. tion, les barres ovalaires (type Dolder) ou des barres
Fig. 25-16 Amplitude des mou-
vements de rotation selon le type
de barre :
a) Dolder en U.
b) Dolder ovalaire.
a b c c) Ackermann Ronde.

rondes (Ackermann) (fig. 25-16). Dans ce cas, des cava- L'essayage de la barre
liers courts assurent la rétention par effet ressort ou de
Une méthodologie bien précise permet de valider la préci-
clipage et permettent aussi un mouvement de rotation.
sion d'adaptation de l'infrastructure, adaptation qui doit se
L'opposition entre ces deux types de liaison fait toujours
faire sans aucune contrainte.
l'objet de controverses sans qu'il soit possible d'effectuer
- Celle-ci est d'abord mise en place sans être vissée, aucun
un véritable choix.
hiatus ne doit apparaître entre la barre et le pilier.
- La position des dents - Les clefs de positionnement ves-
- Puis la première vis est mise en place et serrée. Lors du
tibulaire et linguale des dents permettent de délimiter et
serrage aucun soulèvement ne doit être observé au niveau
de définir le volume prothétique dévolu à la partie pro-
du second pilier, la manœuvre inverse est ensuite réali-
thétique supra-implantaire, car la réalisation de cette
sée.
barre ne doit en aucun cas se faire aux dépens de la pro-
- Des radios rétro-alvéolaires sont prises pour confirmer la
thèse complète (fig. 25-17).
mise en place.
Ce contrôle effectué, il est possible d'adjoindre une plaque
métallique pour renforcer la prothèse. Les modèles mon-
tés en articulateur, la barre en place, sont renvoyés au labo-
ratoire, qui réalise alors le châssis, tenant compte égale-
ment du montage prévisionnel et des clefs faites à partir
de ce montage.

Les attachements axiaux


Les systèmes sont très nombreux et très différents tant au
niveau des moyens de rétention que des dimensions et des
tolérances vis-à-vis des manques de parallélisme. La réten-
tion fait appel à des bagues en caoutchouc (Système O'Ring),
des bagues en plastiques (Locator), des systèmes ressort
type lame (Dalro) ou bague à ressort activable. La force réten-
Fig. 25-17 Réalisation de la barre en fonction de la clef vestibu- tive initiale de ces différents attachements varie selon le type
laire du montage directeur. et se modifie en fonction du temps (tableau 25-4).

La polymérisation
- La position des implants - La barre doit être en adé- Tous les contrôles effectués, la prothèse est envoyée à poly-
quation avec la position des implants. mériser (chapitre 26). Cette étape est délicate en particulier
- L'hygiène - Dans la mesure du possible il est préférable au niveau de la mise en place des éléments rétentifs. Comme
d'éloigner la barre de la muqueuse d'environ 3 mm, pour pour les attachements sur des dents naturelles, le choix se
faciliter l'hygiène. Si l'espace prothétique est insuffisant, porte entre une solidarisation sur modèle ou directement dans
il est préférable d'ajuster la barre au profil muqueux pour la cavité buccale. Pour notre part, la solidarisation en bouche
éviter des diapneusies secondaires de la muqueuse n'a pas lieu d'être en raison des imprécisions que cela entraîne
sous-jacente. et de la mauvaise qualité de la résine qui s'y associe.
Tableau 25-4 Caractéristiques des attachements axiaux.

La solidarisation des éléments rétentifs réellement ce parallélisme en solidarisant les élément réten-
lors de la polymérisation tifs dans la cavité buccale.
Au laboratoire, en présence d'attachements sphériques
Quel que soit le type d'attachement employé, les parties
ceux-ci sont directement scellés sur les analogues de labo-
femelles sont placées sur leurs parties mâles de sorte
ratoire avec du ciment oxyphosphate de zinc. Après poly-
qu'elles aient le même axe d'insertion, de préférence per-
mérisation, le ciment est enlevé facilement avec de l'acide
pendiculaire au plan occlusal (fig. 25-18a, b).
chlorhydrique.
On mesure ainsi d'une part l'importance de la mise en
En présence de cavaliers et d'une barre, ceux-ci sont
place des implants et d'autre part l'impossibilité d'obtenir
bloqués, l'espace sous la barre comblé avec du plâtre
(fig. 25-19) ; la mise en moufle se poursuit alors selon les
séquences habituelles.

Fig. 25-18a Mise en place avec un axe d'insertion identique pour Fig. 25-18b Scellement des attachements Dalro avec du ciment
récupérer le parallélisme. oxyphosphate.
Le suivi des patients porteurs de prothèses adjointes supra-
implantaires est un des paramètres essentiels au succès de
ces réhabilitations. Si l'hygiène est toujours un facteur pré-
pondérant en prothèse adjointe, c'est ici un élément plus
aigu encore à cause des éléments implantaires. L'ensemble
des études montre que les problèmes et/ou complications
survenus intéressent en premier lieu les tissus muqueux
péri-implantaires, les éléments rétentifs intra-prothétiques et
Fig. 25-19 Avant la mise en moufle, du plâtre est placé au niveau enfin la prothèse adjointe elle-même 23,24 .
de la partie contra-muqueuse de la barre et bloque les cavaliers. Les objectifs des rendez-vous de contrôles réguliers
concernent, d'une part, le maintien de l'état de santé des tis-
sus de la cavité buccale et, d'autre part, la qualité d'adapta-
tion prothétique vis-à-vis de la stabilité, de l'occlusion et,
La solidarisation des éléments rétentifs enfin, de la rétention des attachements.
après la polymérisation
Cette approche s'impose quelquefois, en particulier lorsque
la prothèse doit être réhabilitée. Dans ce cas il est préférable
de prendre l'empreinte de la partie rétentive implantaire
avec la prothèse, puis de réaliser un modèle de travail. La Les recommandations fondamentales d'hygiène sont un
solidarisation s'effectue ensuite sur modèle. pré-requis indispensable pour tous les patients porteurs de
prothèse adjointe à complément de rétention.
L'équilibration occlusale Ce type de prothèse augmente les risques d'accumula-
tion de plaque autour des piliers implantaires, ce qui
Après polymérisation, la prothèse est insérée en bouche et engendre alors un phénomène inflammatoire et concerne
les contrôles de l'insertion prothétique sont effectués (cha- directement la muqueuse marginale péri-implantaire26.
pitre 19). Cette inflammation crée une hyperplasie des tissus mous
Puis la relation centrée est enregistrée et la prothèse est qui seront traumatisés par la prothèse, amorçant ainsi un
équilibrée selon le schéma classique en prothèse complète cercle vicieux (fig. 25-20) ; la situation devient beaucoup
de l'occlusion bilatéralement équilibrée, les implants n'ayant plus critique chez un patient âgé qui ne pourra pas toujours
qu'un rôle complémentaire de stabilisation et les connexions suivre les recommandations. Il faudra insister alors sur l'as-
implanto-prothétiques ne pouvant pallier un déséquilibre pect démonstratif des mesures d'hygiène à appliquer:
prothétique. - Dans un premier temps, avec une brosse à dent clas-
sique ou une brosse de pédodontie, bien brosser les
L'insertion en bouche et les contrôles superstructures implantaires.

La barre de conjonction sera transvissée, généralement


avec un serrage à10N. Puis la prothèse est mise en place
et le parfait encastrement des cavaliers ainsi que leur acti-
vation sont vérifiés. La relation centrée et les mouvements
d'excursion sont à nouveau contrôlés.
Puis, un certain nombre de recommandations vont être
prodiguées au patient:
- En premier lieu, il faudra lui expliquer et lui montrer
comment insérer et désinsérer sa prothèse.
- En plus des conseils d'hygiène traditionnels (chapitre 27),
il est essentiel de lui montrer comment nettoyer l'intrados
prothétique comportant les attachements.
- Au niveau de la cavité buccale, de même, il faudra insis-
ter sur les techniques de brossage des piliers implan-
taires et sur l'hygiène sous la barre de conjonction.
- Enfin, rappeler au patient l'importance des rendez-vous Fig. 25-20 Inflammation péri-implantaire avec un début d'hyper-
de contrôles réguliers. plasie gingivale autour d'attachements type Dalro.
- Dans un deuxième temps, un nettoyage plus fin des implants dans la mesure où ils sont orientés trop linguale-
limites marginales des piliers est effectué à l'aide de ment ou vestibulairement.
brosse monotouffe. Le serrage des superstructures implantaires doit être
- Enfin, au niveau des barres se pose, de façon plus aiguë, contrôlé en raison de la fréquence des desserrements.
le problème de l'espace libre entre la barre et la crête Le deuxième facteur essentiel dans le suivi reste la sta-
marginale, sur lequel très souvent empiète une bilité proihétique. En effet, lors des empreintes des précau-
muqueuse bourgeonnante. Du fil dentaire spécifique tions ont été prises pour éviter des surcharges importantes
type Superfloss®, voire une compresse, doit être passé sur les implants qui, s'ils supportent des forces verticales, ne
sous la barre pour éliminer tous débris restant, ainsi que toléreront pas dans le temps des forces obliques trop mar-
la plaque dentaire. Ce bourgeonnement muqueux sous quées. L'adaptation prothétique devra toujours être contrô-
la barre est parfois observé même avec une très bonne lée, pour juger de la nécessité éventuelle d'une réfection de
hygiène et son origine reste alors indéterminée ; un mas- la base. De même, réaliser une équilibration de la base
sage vigoureux de la muqueuse est indiqué, l'élimination occlusale régulière assure une répartition harmonieuse des
chirurgicale n'est pas fréquente. Dans ces cas de figure, forces.
l'hygiène est plus délicate et des pseudo-poches se for- Dans le cas de fracture de la base prothétique, dont l'ori-
ment autour des piliers. gine peut être liée à l'encombrement de la superstructure
implantaire, ou à une instabilité prothétique associée à une
résorption osseuse importante, une réparation sera réalisée.
Mais dans ce cas de figure, l'opportunité de réaliser une nou-
Dans le cas des prothèses complètes sur implants, les piliers velle prothèse, renforcée avec une armature métallique
implantaires n'ont qu'un rôle de complément de rétention ; devra être discutée.
cependant, leur pérennité dans le temps dépend aussi de
contrôles réguliers de la prothèse. En effet, le nombre de
retouches, de réparation lors de la première année de mise
en place est important : en moyenne 2,77 visites par an pour
des attachements boules (tableau 25-5).
Le premier facteur mis en cause par le patient est le plus
souvent un défaut de rétention de l'attachement. Ce 1. Tavitian P, Foti B, Tosello A, Bonfil JJ. Prothèses amovibles de
contrôle de l'action des attachements doit être régulier, il recouvrement sur implants. Cah Prothèse, 2001 ; 114: 35-44.
2. Fontijn-Tekamp FA, Slagter AP, van't Hof MA, Geertman ME, Kalk
s'agit soit d'activer la partie femelle intra-prothétique ; soit de
W. Bite forces with mandibular implant-retained overdentures.
la changer notamment lorsqu'il s'agit de pièces en caout-
J Dent Res, 1998 ; 77 : 1832-1839.
chouc ou en plastique dont l'usure reste non négligeable. 3. Bryant SR. The effects of age, jaw site, and bone condition on
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Le laboratoire se définit comme « un lieu où se prépare, retés de surface puis, pour les dents résine, trempées dans
s'élabore quelque chose ». du monomère.
Si le laboratoire participe de manière directe et en syner-
gie avec le praticien à l'élaboration de la prothèse adjointe,
son rôle s'étend à des champs techniques aussi nombreux,
variés, que spécifiques et précis.
Les colorants sont ensuite déposés spécifiquement dans les
régions que l'on souhaite maquiller (bords libres, faces ves-
tibulaires, collets, embrasures) (fig. 26-1 b). Pour les dents
en résine, avant la mise en place des maquillants, un agent
de liaison (Composiv®) est appliqué sur la surface.
Le maquillage contribue à l'intégration psychologique des pro-
thèses adjointes. Il permet d'individualiser chaque dent, de
reproduire l'aspect des dents naturelles dans les cas de pro-
thèse immédiate ou de s'harmoniser aux dents restantes en Après prépolymérisation des colorants à l'aide d'une lampe
présence de prothèse unimaxillaire1,2. Pour les dents résine à composite, la surface de la dent résine est protégée de
ou porcelaine les séquences techniques sont très semblables. l'oxydation avec un gel tel que le « Stain-Clear® ». La poly-
mérisation est terminée dans une enceinte où la photopo-
lymérisation est associée à une élévation de température
(Système Targis®).
À l'aide d'instruments adaptés (pointes ou disques diaman- Pour les dents en porcelaine, après fixation des maquil-
tés, fraises résine) la forme des dents est modifiée pour lants à 850 °C dans un four à céramique, de la glasure est
reproduire les caractères morphologiques des dents natu- déposée et la cuisson terminée.
relles qui doivent être extraites ou pour s'harmoniser avec
les dents naturelles de l'arcade antagoniste (fig. 26-1a).

Le polissage est réalisé à l'aide de pointes siliconées puis de


meulettes en coton associées à une pâte à polir et enfin à
l'aide d'une peau de chamois (fig. 26-1c). L'ensemble de
La surface de la dent est « sablée » à l'oxyde d'alumine et cette séquence modifie fortement l'aspect originel de la dent
passée sous un jet de vapeur pour éliminer toutes les impu- prothétique (fig. 26-1 d).
Fig. 26-1 Maquillage d'une dent prothétique.

Fig. 26-1a Création de fissures sur la face vestibulaire d'une dent Fig. 26-1 b Apports de colorant orangé au niveau du collet et des
prothétique à l'aide d'un disque diamanté ultramince. faces proximales.

Fig. 26-1 c Polissage d'une dent résine à l'aide d'une meulette en Fig. 26-1d Aspects de la canine avant et après maquillage.
coton. (Réalisation J-Y ciers)

Techniquement, après l'ouverture du moufle, l'élimination


de la cire et l'application, éventuelle, d'un isolant en cas de
contrepartie réalisée uniquement avec du plâtre, le maquillage
débute par apports successifs en partant des couches
Répondant aux mêmes objectifs que ceux précédemment externes. On procédera ainsi 4,5 : apports de résine de base
exposés, la personnalisation de la fausse gencive se déroule dans la zone papillaire inter-dentaire, dépôt de résine plus
en trois étapes. claire au niveau de l'anneau gingival, des reliefs radiculaires,
teintes plus violettes dans les dépressions (fig. 26-2a, b, c, d).

Elle doit être en harmonie avec la couleur de la gencive du


patient, couleur choisie par le praticien lors de la phase de Lorsque le mélange polymère-monomère atteint le stade
l'essai fonctionnel (fig. 17-10). pâteux, il est étiré de nombreuses fois de manière à orienter
les veinules ou fibres incorporées au sein du mélange. Puis,
le mélange est coupé en petites bandelettes qui sont placées
dans le moufle, les fibres orientées dans le sens vestibulo-lin-
gual au niveau des dents et dans le sens antéro-postérieur au
La reproduction des variations de teinte de la gencive mar- niveau de la voûte palatine6 (technique pressée) (fig. 26-3).
ginale implique que le praticien transmette la cartographie En dehors de ces séquences, le résultat final dépend,
colorimétrique de la gencive du patient en précisant les d'une part, de la qualité de la finition de la maquette et,
zones claires, foncées, plus ou moins rosées3. d'autre part, de la qualité de l'interface extrados - matériau
Fig. 26-2 Maquillage de la base prothétique.

Fig. 26-2a Pigments de coloration (Candulor®). Fig. 26-2b Mise en place de résine claire au niveau des reliefs
radiculaires.

Fig. 26-2c Dépôts de résine plus rouge dans les espaces inter- Fig. 26-2d Aspect final.
radiculaires.

de la contrepartie. En effet, au stade de la finition, seul un chologiques qu'à une réelle nécessité esthétique car lors du
léger polissage est autorisé sous peine d'entraîner la dispa- sourire la fausse gencive ne doit pas apparaître, sauf si le
rition plus ou moins complète des maquillages. sourire correspond au type 3 de Tjan, soit 10,57 % des
Cependant, en règle générale, ces procédés de colora- patients7. Mais ces procédés trouvent leur indication de
tion et de maquillage répondent plus à des exigences psy- manière très spécifique dans des cas de colorations méla-
niques marquées.

Le rebasage correspond à une adjonction plus ou moins


localisée de résine chémopolymérisable à la base prothé-
tique existante.

Fig. 26-3 Mise en place de bandelettes de résine avec des fibres


préalablement orientées dans le sens vestibulo-lingual au niveau Cette technique rapide permet de réadapter une prothèse
des dents prothétiques. adjointe de manière presque extemporanée.
Fig. 26-4 Rebasage.

Fig. 26-4a L'ensemble prothèse socle est placé dans la partie infé- Fig. 26-4b La prothèse est bloquée au niveau des dents prothé-
rieure de la bride. tiques par la deuxième partie de la bride.

La prothèse est coffrée, les contre-dépouilles comblées à


l'aide de silicone lourd, puis du plâtre est coulé dans l'intra-
dos de la prothèse. Le modèle obtenu est placé dans une
bride (Renfert®) qui bloque totalement la prothèse du côté
de l'intrados et du côté occlusal. Après cristallisation du
plâtre, la bride est ouverte, la zone concernée par le reba-
sage est aménagée par des meulages, des grattages et un
nettoyage de la résine de la base (fig. 26-4a, b, c).
La résine chémopolymérisable est préparée, mise en
place, la prothèse replacée sur le modèle. La bride est refer-
mée, les écrous fortement serrés pour éviter toute suroc-
clusion. L'ensemble est plongé dans l'eau chaude (50 °C
environ), puis polymérisé sous pression. La polymérisation Fig. 26-4c Après préparation de l'intrados la résine chémopoly-
dure en moyenne 15 minutes. La prothèse est ensuite finie, mérisable est mise en place sur le modèle.
polie et remise au patient.

excédents de matériaux à empreinte. De petits apports de


cire sont déposés au niveau des régions cervicales tant du
côté vestibulaire que palatin ou lingual pour prévenir l'abra-
sion due au futur polissage. Pour réduire l'épaisseur de la
base au niveau de la voûte palatine, il est conseillé de
La réfection des bases prothétiques correspond au change-
découper celle-ci puis de la remplacer par une feuille de cire
ment de l'intégralité de la résine de la base prothétique par
calibrée présentant ou non des reliefs palatins8.
une nouvelle résine thermopolymérisable.
L'ensemble de l'extrados est recouvert d'une légère
épaisseur de silicone de laboratoire haute viscosité (Zeta-
Labor®) mais qui n'englobe pas les bords libres et les faces
occlusales des dents prothétiques.
Elle fait suite à la réadaptation fonctionnelle d'une ancienne Enfin, la contrepartie est coulée. Après cristallisation du
prothèse ou bien au changement de la base contaminée. plâtre, le moufle est ouvert, la prothèse délicatement retirée de
son modèle puis les dents démontées à la flamme pour les
dents porcelaine ou par meulage en présence de dents résine.
Après un nettoyage soigneux, les dents sont replacées
Au laboratoire, la base prothétique est coffrée puis l'intrados dans le moufle, puis la polymérisation est conduite selon les
est coulé avec le plâtre adapté. L'extrados est débarrassé des séquences et protocoles habituels (fig. 26-5a, b, c).
Fig. 26-5 Réfection d'une base prothétique.

Le duplicata correspond à la reproduction exacte d'une pro-


thèse existante. Ce double représente soit une prothèse
venant d'être réalisée au laboratoire avant son insertion, par
exemple une prothèse immédiate, soit la prothèse existante
en préalable aux différentes phases de réhabilitation des tis-
sus de soutien de la prothèse, soit enfin dans la cas de pré-
paration d'un guide chirurgical implantaire9.
Au nombre de deux, les techniques de réalisation diffè-
rent quant à leurs indications.

Fig. 26-5a Après l'empreinte de réfection, le modèle est coulé.


La prothèse finie, les bords sont coffrés, les contre-dépouilles
de l'intrados comblées à l'aide de silicone (Zeta-Labor®). Les
bords du silicone sont taillés pour créer des rétentions méca-
niques. L'intrados est coulé avec du plâtre dur de classe III
pour réaliser un socle.
Les séquences techniques sont identiques à celles
décrites pour la réfection. Après cristallisation du plâtre de la
contrepartie, le moufle est ouvert, la prothèse dégagée avec
soin. De nouvelles dents prothétiques sont mises en lieu et
place des précédentes puis le cycle préparation de résine,
polymérisation, finition est similaire.
Ce procédé est tout particulièrement indiqué pour réali-
ser le double d'une prothèse immédiate. Les mêmes dents,
couleur, forme, matériaux, sont employées, la résine ther-
mopolymérisée identique offre au patient une prothèse qui
possède les mêmes qualités biomécaniques et esthétiques
Fig. 26-5b Après mise en place dans le mouffle, l'extrados de la que l'originale.
prothèse est épaissi de cire, les collets sont resculptés.

C'est une boîte articulée semblable à un moule à gaufre


dans laquelle, en deux temps, des matériaux à empreinte
enregistrent la forme et les volumes prothétiques. Les sili-
cones lourds à prise lente, les silicones fluides sont les maté-
riaux idéaux car ils permettent la polymérisation de la résine
dans une cocotte à pression contrairement à l'alginate. Cette
technique est particulièrement indiquée pour réaliser des
duplicata au cabinet dentaire de manière extemporanée.
Dans un premier temps, le premier couvercle est garni
d'un matériau à empreinte, alginate ou silicone forte visco-
sité, simultanément les faces occlusales, la voûte palatine,
les collets sont enduits d'alginate ou de silicone faible vis-
cosité déposé à la seringue. La prothèse est immédiatement
enfoncée en laissant dépasser les bords de 1 à 2 mm. Les
excédents sont éliminés, la périphérie rendue lisse à l'aide
Fig. 26-5c L'extrados est enduit de silicone lourd qui laisse les
faces occlusales et les bords libres apparents. La périphérie est d'un instrument très coupant (bistouri, cutter). Dans un
taillée à 45° pour créer une contre dépouille. deuxième temps, le deuxième couvercle est garni du même
matériau, l'intrados prothétique est enduit d'alginate ou de
silicone fluide. La boîte est rapidement refermée, les excé-
dents s'éliminant par les bords. Après prise du matériau la
boîte est ouverte et la prothèse retirée est rendue au patient.
Au laboratoire, la partie correspondant aux dents pro- riau utilisé est un silicone. Après polymérisation, le dupli-
thétiques est garnie de résine dentine (Tab 2000®, cata est fini et poli (fig. 26-6 a, b, c, d, e, f). Cette tech-
Unifast®). Après polymérisation, la baguette « dentaire » nique trouve aussi son application dans la préparation de
est retirée, les collets, les embrasures, les limites cervi- guide chirurgical pour une prothèse immédiate ou pour
cales sont affinées. Cette baguette est replacée dans l'em- l'analyse radiographique pré-implantaire et/ou lors de la
preinte puis de la résine autopqlymérisable est coulée au phase chirurgicale. Dans ce cas, on utilise la prothèse exis-
niveau des deux parties de la boîte. Cette dernière est tante, et de la résine transparente est employée pour
refermée, mise sous pression dans une cocotte si le maté- reproduire le volume prothétique.

Fig. 26-6 Réalisation d'un duplicata avec le système « Duplicator® ».

Fig. 26-6a La prothèse maxillaire enfoncée dans du silicone. Fig. 26-6b Après retrait de la prothèse les deux volets du
« Duplicator » laissent apparaître l'empreinte de l'extrados et de l'in-
trados de la prothèse.

Fig. 26-6c De la résine dentine est coulée au niveau de l'em- Fig. 26-6d Aspect du bloc incisivo-canin fini.
preinte des dents.

Fig. 26-6e Mise en place et polymérisation de la résine chémo- Fig. 26-6f Après polymérisation de la résine de base, le « Dupli-
polymérisable. cator » est ouvert, le duplicata prêt à être fini.
La réalisation d'une base souple impose que l'ensemble
des corrections, modifications permettant l'adaptation de
l'intrados et des bords de la prothèse ait été préalablement
Le principe est d'enlever environ 2 mm d'épaisseur de la effectué.
base en PMMA pour la remplacer par un matériau souple. La mise en place se fera toujours par des techniques indi-
Ce remplacement intéresse tout ou partie de la surface d'ap- rectes réalisées au laboratoire, jamais par des techniques
pui et des bords. directes qui, bien que souvent proposées, n'offrent ni préci-
sion ni qualité.
Dans un premier temps, après coffrage de la prothèse,
Les procédés de réalisation d'une base souple permanente du plâtre est coulé dans l'intrados. Pour contourner le pro-
dépendent du type du matériau utilisé et de son mode de blème des contre-dépouilles de l'intrados, la coulée s'effec-
préparation : polymérisation à chaud ou à froid 10-12 . tue en 1 temps s'il n'y a pas de contre-dépouilles ou en 2 ou
Ici, seuls les matériaux dits souples permanents par 3 temps si elles sont nombreuses et accentuées (fig. 26-7a,
opposition aux matériaux souples temporaires ou semi-per- b, c, d).
manents seront abordés. Les matériaux utilisés sont essen- Dans un deuxième temps la base souple est réalisée par
tiellement des résines acryliques et des silicones, ces der- des techniques qui font appel à la mise en moufle ou à l'uti-
niers faisant appel à des processus de réticulation différents. lisation de bride.

Fig. 26-7 Réalisation d'une base souple.

Fig. 26-7a L'extrados de la prothèse mandibulaire est isolé pour Fîg. 26-7b Réalisation du premier fragment.
laisser apparent l'intrados et les bords. En fonction de la position des
contre-dépouilles le nombre de fragments est déterminé (ici deux).

Fig. 26-7c Préparation du deuxième fragment. Fig. 26-7d Modèle éclaté de l'intrados de la prothèse mandibu-
laire: 1, 2) fragments du modèle; 3) clefs de blocage des deux
fragments ; 4) prothèse isolée.
Fig. 26-7 Réalisation d'une base souple. (Suite)

Fig. 26-7e La réduction de l'intrados est calibrée à l'aide d'une Fig. 26-7f Mise en place des bandelettes du matériau souple
fraise boule. avant la pressée de la résine.

Fig. 26-7g Aspect de la jonction entre la résine et la base


souple terminée.
(Réalisation S. Nithard)

Base souple et mise en moufle


La mise en moufle est réalisée selon les séquences habi-
tuelles. Le moufle s'ouvre sans difficultés grâce au modèle
Les fractures médianes des prothèses maxillaire et mandi-
fractionné.
bulaire sont les incidents les plus fréquents en prothèse
L'intrados est creusé, les bords raccourcis d'environ
adjointe complète, suivis par les cas des dents qui se frac-
2 mm (fig. 26-7e). Pour assurer une parfaite jonction entre
turent ou se détachent. Les techniques de réparation sont
les deux matériaux, la surface de la résine de base est trai-
relativement identiques.
tée selon les procédures propres au matériau souple. Celui-
Il incombe au praticien de vérifier si les éléments fractu-
ci est déposé sur l'intrados traité, le moufle est fermé sous
rés s'adaptent parfaitement entre eux avant toute tentative de
presse pour éviter toute erreur d'occlusion (fig. 26-7f). Après
réparation. Au laboratoire, avec de la cire collante ou mieux
polymérisation, à chaud ou à froid selon le matériau
des colles cyanoacrylates, les morceaux fracturés sont solida-
employé, le moufle est ouvert et la prothèse retirée. Les
risés. Puis le modèle est coulé et une clef vestibulaire en regard
bavures sont éliminées avec la lame d'un bistouri et polie
de la fracture est préparée de préférence avec du plâtre.
avec une pointe montée silicone adaptée13 (fig. 26-7g).
Puis la prothèse est enlevée, le trait de fracture est élargi
par meulage pour obtenir une distance inter-berge de 3 à
Base souple et bride 4 mm sans biseau. Le modèle, la clef sont isolés. Les frag-
Comme pour un rebasage, le modèle est mis en place dans ments de la prothèse, la clef vestibulaire sont remis en place
une bride. Ensuite, les séquences sont identiques à celles puis parfaitement fixés sur le modèle (fig. 26-8a, b, c).
précédemment décrites. Cette technique est plus rapide Le trait de fracture est comblé de résine chémopolymé-
mais n'autorise que des polymérisations à froid. La finition risable. Puis l'ensemble est plongé dans l'eau chaude (50 °C
est identique à la précédente. environ) et polymérisé sous pression.
Fig. 26-8 Réparation de la base prothétique et changement d'une dent.

Fig. 26-8a Un modèle est coulé englobant l'intrados et les bords. Fig. 26-8b Aspect du modèle et de la clef vestibulaire, dent pro-
thétique en place.

Fig. 26-8c Les deux parties de la prothèse et la clef vestibulaire


sont bloquées sur le modèle avant la mise en place de la résine
chémopolymérisable.

Tous les travaux envoyés au laboratoire ne peuvent subir


une stérilisation à chaud sans altérations importantes et, par
conséquent, la désinfection reste le mode de précaution
Au laboratoire, un risque microbiologique potentiel est pré- principal au laboratoire. Cependant, le choix du désinfec-
sent, c'est pourquoi une collaboration étroite doit exister tant, le mode et le temps d'application sont importants pour
avec le praticien pour qu'en aucun cas la chaîne d'hygiène son efficacité et pour le respect de la qualité des travaux
et d'asepsie ne soit rompue. Cette collaboration doit per- adressés.
mettre d'établir des règles de conduite dont les objectifs sont
la protection du patient et de toutes les personnes en contact
avec les travaux de prothèse. Le concept de protection « uni-
verselle » doit prévaloir, ce qui impose d'établir une procé- Il n'existe pas un désinfectant idéal et un désinfectant unique
dure de contrôle des risques à 3 niveaux15 : ne peut être utilisé pourtous les matériaux et matériels. Mais
- L'arrivée au laboratoire de prothèse. le désinfectant doit être efficace contre le bacille de la tuber-
- Le travail au laboratoire. culose et les virus, entre autres le VIH, le virus de l'herpès et
- Le départ du laboratoire vers le cabinet dentaire. les virus de l'hépatite A, B. Par ailleurs, certains micro-orga-
nismes pathogènes résistent à l'exposition à certains désin-
fectants et il est donc essentiel pour limiter les risques de
contamination croisée de séparer les travaux concernant les
Ces deux termes ne sont pas synonymes : la stérilisation est nouvelles prothèses et les anciennes prothèses17. Enfin, les
un procédé physique ou chimique détruisant toute forme désinfectants utilisés ne doivent pas altérer les qualités des
de vie, alors que la désinfection détruit les micro-organismes matériaux (stabilité dimensionnelle, précision de surface et
pathogènes en dehors de ceux qui sont encapsulés. autres distorsions).
À la suite des réparations d'anciennes prothèses, le polis-
sage devient une source de contamination majeure : la
résine des bases, très difficile à désinfecter, constitue une
Tout paquet arrivant au laboratoire doit comporter une éti- véritable niche pour tous les germes qui, ainsi, contami-
quette mentionnant s'il y a eu désinfection du travail nent la ponce. Lors de cette étape, les risques sont des
(empreintes, maquettes d'occlusion ou cires) et quelle pro- risques d'inhalation, de projection au niveau des yeux,
cédure a été appliquée (type de désinfectant et temps de de contamination d'une plaie au contact direct de la
désinfection) (tableau 26-1). Sinon par précaution, le labo- ponce. L'utilisation de lunettes, d'un masque et de gants
ratoire doit effectuer cette étape malgré les risques liés à est donc indispensable. Mais les risques se retrouvent
une double procédure (altération de la qualité des maté- aussi au cabinet dentaire car la prothèse ainsi polie,
riaux)18. même après une désinfection soigneuse, peut encore
comporter des germes au sein des micro-cavités de la
Tableau 26-1 Procédures à l'arrivée du travail au laboratoire. résine21. Par conséquent, une préparation plus rigou-
reuse de la ponce utilisée pour le polissage doit être mise
en œuvre. Elle devrait être conditionnée « en sachet indi-
viduel » pour un usage unique, et préparée avec un
liquide désinfectant (1/20 hypochlorite de sodium).

Le point particulier des réparations


ou rebasage d'anciennes prothèses
Le risque de contamination au laboratoire est maximum,
lorsque des prothèses ayant été portées en bouche doivent
être traitées.
Conduite à tenir lors de la réalisation d'une réparation22 :
- Nettoyer la prothèse aux ultrasons ou par brossage. La
Les mesures d'hygiène au laboratoire portent sur trois points prothèse est alors placée dans un sachet individuel
suivants : contenant la solution de nettoyage pour éviter toute
- Les surfaces de travail doivent être nettoyées, désinfec- contamination croisée lorsqu'elle est mise dans le bac à
tées tous les jours à l'aide de sprays. ultrasons.
- Les instruments rotatifs tels les fraises, les disques, les - Désinfection par immersion dans une solution d'hypo-
mandrins doivent être nettoyés avec du savon à l'aide chlorite de sodium (1/10), pendant 10 minutes, puis
de brossettes métalliques puis désinfectés; ils peuvent rinçage sous l'eau courante. Le désinfectant ainsi que le
aussi être passés à l'autoclave (tableau 26-2). sachet seront éliminés après chaque utilisation.
- La ponce représente le réservoir principal des germes - La prothèse est désinfectée mais doit être considérée
bactériens et elle constitue un vecteur important de la comme susceptible de comporter encore des micro-
contamination au laboratoire et au cabinet dentaire19,20. organismes.

Tableau 26-2 Procédures de désinfection des différents matériels et matériaux.


- Tout le travail doit être accompli avec du matériel réservé 5. Choudhary SC. Characterizing the denture base for non-cauca-
aux réparations. Les instruments et l'équipement doivent sian denture patients. J Prosthet Dent, 1975; 3 3 : 73-78.
être nettoyés et désinfectés après chaque cas réalisé. 6. Raux D, Postaire M, Duclos-Grenet Y. L'esthétique de la fausse
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L'utilisation de matériel en sachet individuel facilite cette
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Au départ du laboratoire, tous les travaux doivent être désin- indications, réalisations techniques. Cah Prothèse, 1999; 106:
fectés avant d'être emballés. La procédure de désinfection 37-47.
10. Louis JP, Archien C, Ludwigs H, Louis C. Les matériaux souples
doit être indiquée au praticien par un système d'étiquette
permanents en prothèse complète - Une solution intéres-
mentionnant le type et le mode de désinfection. Les travaux
sante : silicone Lutémol vulcanisé sur base titane pur. Actual
seront emballés dans des sachets à usage unique et placés Odonto-Stomatol, 1992; 177:203-229.
dans des boîtes ayant préalablement été désinfectées. 11. Escure S. Les bases souples définitives en prothèse amovible
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Les risques de contamination croisés au laboratoire de pro-
13. Loney RW, Moulding MB. The effect of finishing and polishing
thèse sont élevés et les procédures à appliquer doivent alors
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être parfaitement codifiées et adaptées aux matériaux et J Prosthodont, 1993 ; 6: 390-396.
matériels concernés. 14. Vallitu PK, Ruyter IE. Swelling of poly(methyl metacrylate) resin
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le laboratoire de prothèse doit exister pour établir une règle 15. ADA council of scientific affairs and ADA council on dental prac-
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La phase de l'insertion prothétique est une étape majeure
du traitement, mais c'est aussi un rendez-vous important en
L'information verbale seule n'est pas toujours suffisante, car
raison des conseils qui seront prodigués au patient, notam-
son influence demeure limitée dans le temps. Les patients
ment des conseils consacrés à l'hygiène de la cavité buccale
oublient, ou peuvent ne pas avoir bien compris ou assimilé
et des prothèses. De plus, les études révèlent que la majo-
les informations données par le praticien. C'est pourquoi l'as-
rité des patients porteurs de prothèses ne savent pas réel-
sociation information verbale et information écrite repré-
lement comment les nettoyer et avouent n'avoir reçu que
sente un moyen supplémentaire de motivation du patient.
très peu de conseils, voire aucune information à ce sujet1.
Le jour de l'insertion de la prothèse, une fiche d'hygiène et
d'entretien est remise au patient, fiche comportant le des-
criptif des matériels et produits à utiliser, quand et comment
les employer (fig. 27-1).

Figure 27-1 Fiche conseils d'hygiène et d'entretien des prothèses


Le jour de l'insertion prothétique des recommandations doi- (**: Éludril, dilution 1/5).
vent être dispensées au patient sur l'entretien de ses pro-
thèses.
Ces recommandations peuvent revêtir trois formes : les
informations verbales, les informations verbales associées à
un document écrit remis au patient, enfin, les informations
sous forme d'une démonstration technique de nettoyage
des prothèses et de la muqueuse buccale.

Les conseils d'hygiène apportés au patient de façon verbale


ne doivent pas être uniquement prodigués lors du rendez-
vous consacré à l'insertion prothétique.
En effet, dès le premier rendez-vous, le praticien doit moti-
ver, conseiller le patient, voire l'amener à modifier ses habi-
tudes pour nettoyer sa prothèse. Ces informations doivent être
simples, claires, expliquées lentement et répétées2. Elles
consistent à inciter le patient à brosser ses prothèses, sa
muqueuse, sa langue, et à ne pas porter ses prothèses pen-
dant son sommeil, en lui expliquant pourquoi agir ainsi.
Complémentaires et identiques aux informations ver-
bales, les informations écrites sont présentées simplement
avec éventuellement des schémas ou des photos, venant
ainsi objectiver les conseils prodigués lors de la réalisation
prothétique3.
Les méthodes proposées et les produits nettoyants sont
nombreux et variés.
Idéalement, ces méthodes et ces produits doivent être
À long terme, seules les démonstrations des techniques simples, efficaces, compatibles avec les matériaux prothé-
de nettoyage de la prothèse donnent des résultats signifi- tiques, non toxiques, avoir bon goût, être peu onéreux et
catifs4. facilement disponibles5.
Cette forme d'enseignement des techniques d'hygiène Les techniques se subdivisent en deux grandes catégo-
et de prévention prend en compte, non seulement la notion ries, celles dont l'action est mécanique (tableau 27-1) et
du geste à expliquer, à montrer, mais aussi celle de l'ap- celles dont l'action est chimique (tableau 27-2).
prentissage du patient. Cet apprentissage permet de mettre
en évidence d'éventuels défauts d'habileté du patient, et
Action mécanique (tableau 27-1)
permet d'y répondre par une adaptation des instruments
nécessaires à l'entretien des prothèses. Les précautions sup- Le brossage
plémentaires à prendre pour prévenir leur détérioration acci- Cette technique est la plus simple et la plus utilisée par les
dentelle (fracture liée à une chute lors du nettoyage au-des- patients. Elle doit être régulièrement effectuée après chaque
sus du lavabo, abrasion liée à des gestes mal contrôlés, etc.), repas.
seront alors également exposées. De plus, chez les patients Les brosses spécialement conçues pour la prothèse sont
dont la dextérité est réduite (40 % arthrose), la vision alté- recommandées, car elles permettent d'en nettoyer toutes
rée (cataracte), ce type de démonstration améliore l'effica- les surfaces (fig. 27-2).
cité des méthodes. Il faut préconiser un brossage avec un dentifrice spéci-
À la fin des démonstrations, la remise au patient d'une fique pour la prothèse, moins abrasif (par exemple : Corega
brosse ou de tout autre matériel dont l'utilisation a été dentifrice, Stafford Miller® ; Déterdent, Dentoria®), un savon
démontrée facilite la « mise en route » de nouvelles habi- neutre ou simplement de l'eau ; dans ces deux derniers cas,
tudes d'hygiène. l'effet abrasif est totalement absent6 (fig. 27-3).

Tableau 27-1 Nettoyage des prothèses - Les méthodes mécaniques.

Fig. 27-2a, b Brosse pour prothèse comportant une double tête pour nettoyer intrados et extrados et une seconde extrémité avec une
petite tête.
Fig. 27-2c Autre modèle de brosse pour prothèse. Fig. 27-4 Brosse pour prothèse dont le manche est adapté pour
une meilleure tenue (par un apport de silicone modelé à la main
du patient).

Mais le manque fréquent de dextérité des patients doit


amener à prendre en compte et à proposer toutes les adap-
tations envisageables de ces brosses pour atteindre le
meilleur résultat possible (fig. 27-4).

Les ultrasons

L'action mécanique du brossage montre ses limites en pré-


sence de rugosités, d'anfractuosités, de porosités dont l'ac-
cès est difficile et où l'action du brossage est insuffisante.
Les ultrasons constituent un moyen de réduire l'accumula-
tion de dépôts de plaque ou de tartre dans ces régions.
Fig. 27-3 Incidence des produits de nettoyage utilisés sur l'abra-
C'est une technique particulièrement recommandée
sion de la base prothétique.
pour les patients handicapés, ou pour des patients dont la
dextérité manuelle est extrêmement réduite.
Les brosses à ongles peuvent aussi être utilisées, par
Cette technique ne comporte aucun effet négatif ni sur
contre, les brosses à dents, a fortiori les brosses dures, les
la résine, ni sur les métaux. Cependant, une attention toute
dentifrices classiques sont déconseillés en raison d'un taux
particulière doit être portée aux types de solutions utilisées
en abrasif trop important. Ils provoquent une perte de poli
dans le bain de la cuve à ultrasons.
de la prothèse, accentuant ainsi les porosités de la résine, et
par conséquent la colonisation bactérienne7.
La technique de brossage devra être expliquée et mon-
Action chimique: l'immersion (tableau 27-2)
trée au patient avec la brosse pour prothèse pour limiter les L'action chimique des nettoyants utilisés par la technique
erreurs de brossage (force, direction, etc.) et assurer le d'immersion peut aussi constituer une technique complé-
meilleur nettoyage possible. mentaire intéressante (fig. 27-5).

Tableau 27-2 Nettoyage des prothèses - Les méthodes chimiques.


tous les 15 jours. Une immersion prolongée serait décon-
seillée, car la résine de la base prothétique est poreuse, et
ainsi susceptible « d'emprisonner » l'agent actif, puis de le
restituer progressivement10. L'équilibre de la flore buccale
serait alors perturbé (fig. 27-6a, b).

Les enzymes
Peu de préparations enzymatiques commercialisées exis-
tent, mais certains produits commerciaux tels que le Corega-
Tabs® ou le Polident® contiennent des enzymes protéoly-
tiques.

Fig. 27-5 Matériel nécessaire au nettoyage des prothèses par


immersion : boîte pour prothèses et produits effervescents. Le développement d'une inflammation muqueuse sous-
prothétique est observé chez plus de la moitié des porteurs
Les produits nettoyants utilisés sont classés en 5 grandes de prothèses complètes. Communément appelée stomatite
familles. prothétique, cette inflammation d'une étiologie plurifacto-
rielle est souvent associée à une hygiène insuffisante.
Le peroxyde alcalin Pour prévenir l'apparition d'une stomatite, il faut impé-
rativement recommander aux patients de brosser les
Le peroxyde alcalin est conditionné sous formé de poudre muqueuses édentées à l'aide d'une brosse à dents souple.
ou de comprimés qui, mélangés à l'eau, donnent une solu- Après motivation et enseignement des méthodes de bros-
tion effervescente libérant de l'oxygène. Associé à d'autres sage des muqueuses, une réduction significative du degré
substances, il doit assurer le nettoyage complet de la pro- d'inflammation est observée même si l'indice de plaque au
thèse. niveau de la prothèse amovible n'est pas réduit11. Ce bros-
La durée recommandée de l'immersion est de sage assure une détersion mécanique des débris alimen-
15 minutes environ, mais une immersion de 8 heures est taires, des micro-organismes et des cellules desquamées.
proposée pour augmenter l'action nettoyante8. Le nettoyage des muqueuses doit être complété par un
À long terme, un blanchiment et l'apparition de porosi- massage (15 à 20 minutes) à l'aide de la brosse à dent. La
tés révèlent une incompatibilité entre la résine acrylique et brosse est passée sur l'ensemble de l'arcade maxillaire et
le peroxyde alcalin. mandibulaire, dans un premier temps avec une faible pres-
sion, puis en augmentant la force de stimulation des tissus
L'hypochlorite alcalin lorsque ceux-ci deviennent plus résistants.
Son effet se caractérise par une dégradation de la matrice Ces techniques accroissent la kératinisation de la
organique de la plaque (polymères de structure). Mais il peut muqueuse donc améliorent la qualité des tissus support des
entraîner des altérations des qualités physiques des alliages prothèses12,13.
tels que chrome-cobalt et nickel-chrome, altérations mar- Enfin, le patient doit se brosser la langue au moyen d'une
quées par une réduction des qualités rétentives des crochets brosse à dent souple et d'un peu d'eau salée9.
des bases métalliques.
La source la plus aisée et la moins onéreuse est l'eau de
Javel (composition proposée par une association de
consommateurs : eau de Javel + Calgon + eau)9. Malgré les conseils prodigués, l'hygiène chez les porteurs de
prothèses reste le plus souvent insuffisante. Face aux diffi-
Les acides cultés des patients à assurer un brossage satisfaisant des
Ils se présentent sous forme de liquide ou de gel, mais ils prothèses et une bonne hygiène de la cavité buccale, l'utili-
ne sont pas disponibles en France. sation de solutions chimiques (bain de bouche, gel, vernis)
peut constituer un moyen de prévention intéressant.
Les désinfectants La chlorhexidine est l'agent antimicrobien le plus efficace.
Elle agit principalement en prévenant la formation de la
L'immersion des prothèses dans la chlorhexidine (2 % glu- plaque dentaire, mais elle réduit également le taux des
conate de chlorhexidine) réduit le développement de la flore Streptocoques mutans. La chlorhexidine a été incorporée
bactérienne et de la plaque dentaire, mais ces molécules dans des bains de bouche, des gels et des vernis. Les bains
entraînent l'apparition de colorations brunes. de bouche à 0,2 % de chlorhexidine peuvent être recom-
Il est donc conseillé de placer la prothèse nettoyée dans mandés temporairement, ils ont une action à court terme.
une solution de chlorhexidine à 0,2 % pendant 15 minutes Les gels de chlorhexidine (1 % généralement), fluorés ou
Fig. 27-6 Chlorhexidine et hygiène.

Fig. 27-6a Liaison de la chlorhexidine à la résine de la prothèse Fig. 27-6b Concentration salivaire de chlorhexidine après port
immergée dans une solution de digluconate de chlorhexidine à d'une prothèse préalablement immergée dans une solution de diglu-
0,2 %. (D'après Bonesvollet Olsen10) conate de chlorhexidine à 0,2 °/o. (D'après Bonesvollet Olsen10)

non, s'opposent avec davantage d'efficacité au développe- stimulation est alors absente 17,18 . De plus, une détersion
ment de la plaque dentaire et ils ont également un rôle des muqueuses par la salive est alors possible malgré une
important dans la prévention des caries cervicales pour les sécrétion salivaire réduite la nuit.
prothèses à appui radiculaire14.
De plus, chez les patients présentant une stomatite pro-
thétique, la chlorhexidine par son caractère antiseptique a
une incidence positive, la stomatite étant réduite de façon
significative par ce « traitement » de la base prothétique15.
Conseiller au patient de tremper sa prothèse dans ces
solutions a par ailleurs une action indirecte sur le niveau de L'information du patient est primordiale et, à ce titre, les
l'inflammation des muqueuses qui supportent la prothèse. conseils d'hygiène font partie à part entière du traitement
prothétique.
Faire une démonstration au patient pour lui expliquer
comment nettoyer sa prothèse et avec quel instrument reste
Depuis 1967, la position de l'académie américaine de prothèse la méthode la plus efficace. De même, lui conseiller de ne
amovible concernant le port des prothèses est la suivante: les pas porter sa prothèse la nuit pour assurer la pérennité des
patients doivent retirer leur prothèse amovible la nuit. tissus de soutien est important.
Le port nocturne entraîne une augmentation sévère de Enfin, il faudra expliquer au patient que des visites régu-
l'inflammation et des hyperplasies muqueuses, dont le taux lières chez son praticien demeurent essentielles pour assu-
est alors dix fois plus élevé. D'autre part, 74 % des patients rer un suivi non seulement de la qualité de l'adaptation pro-
présentant une stomatite prothétique portent leur prothèse thétique, de l'état de la muqueuse et du niveau de la
la nuit16. résorption osseuse, mais aussi un contrôle du vieillissement
A contrario, la dépose des prothèses la nuit offre une des matériaux prothétiques et, par conséquent, de l'hygiène
période de repos aux surfaces d'appui, durant laquelle toute des prothèses.
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8. Budtz-Jorgensen E. Materials and methods for cleaning den- Dent, 1978;39:372-374.
tures. J Prosthet Dent, 1979; 42 : 619-623. 18. Mariani P, Gregori JM. Les protheses complètes doivent-elles
9. Grimonster J, Brogniez V. Entretien des protheses amovibles: être portees en permanence? LQOS, 1984; 9: 115-118.
revue non exhaustive des methodes et produits proposes.
Actual Odonto-Stomatol, 1989; 167: 619-632.
Le vieillissement de la population est à l'heure actuelle une Le vieillissement physiologique
des caractéristiques majeures de tous les pays industrialisés
Le vieillissement est un phénomène « physiologique » qui
(Europe, Japon, Amérique du Nord). Ceci se traduit par une
atteint l'ensemble des êtres vivants. Il touche les structures
augmentation de 5 à 10 % du nombre de personnes de
moléculaires, cellulaires des individus, ce qui se traduit cli-
plus de 65 ans, et cette tranche d'âge devrait représenter,
niquement par un « ralentissement, une détérioration », de
en 2025, 20 % de la population (dont 5 % auront plus de
l'ensemble de l'organisme (système nerveux central, sys-
80 ans). À ce phénomène s'ajoute l'augmentation de l'es-
tème cardio-vasculaire, appareil respiratoire, système immu-
pérance de vie qui en 15 ans s'est élevée de 5 ans pour les
nitaire. ..) et par une inexorable régression des 5 sens (audi-
hommes et de 4 ans pour les femmes (tableau 28-1).
tion, vision, olfaction, gustation et tact)
Tableau 28-1 Évolution de l'espérance de vie entre 1985 et 2035 La personne âgée, en bonne santé, apparaît ainsi comme
(INSEE 2001). une personne fragile, dont la santé est précieuse et chez qui
tout risque de détérioration doit être parfaitement évalué.
En effet : « La santé est un état précaire qui ne présage
rien de bon » (Jules Renard, « Knock »)...

Le vieillissement pathologique
Avec l'âge, la fréquence de certaines pathologies augmente
Les thérapeutiques odontologiques s'adresseront donc comme les atteintes rhumatismales (52,8 %) et cardiaques
à des patients en moyenne plus âgés, voire très âgés. On (43,55 %) (tableau 28-2). La fréquence de ces polypatho-
aborde alors la gériatrie, partie de la médecine qui traite de logies peut être reliée à une diminution des défenses immu-
la vieillesse. De nouveaux paramètres généraux, locorégio- nitaires, à une longue période de latence de certaines affec-
naux, locaux devront être pris en compte par le praticien, car
ils influencent directement les choix cliniques et les moyens
Tableau 28-2 Fréquence des pathologies générales du patient âgé1.
thérapeutiques utilisés.

Le vieillissement se manifeste à trois niveaux : physiologique,


pathologique et pharmacologique.
tions telles les rhumatismes, l'arthrose, mais aussi, parfois, à téoarthrose marquée, de rhumatismes importants, etc.
une immobilité trop grande ou forcée. qui rendent tout déplacement difficile, voire imposent un
déplacement en fauteuil roulant. À chaque rendez-vous,
Le vieillissement et la pharmacologie ces personnes devront toujours être accompagnées, par-
fois en ambulance. La proposition thérapeutique et les
Chez les patients âgés, la fréquence des maladies chroniques, séquences cliniques doivent prendre en compte les
la sensibilité aux diverses infections augmentent. Le(s) traite- contraintes liées à ces déplacements.
ment(s) de ces affections s'accompagne(nt) de la prise de - Le patient médicalement dépendant est un patient
nombreux médicaments avec leur cortège d'effets secondaires malade, souffrant de pathologies nécessitant des soins
et d'interactions dont le retentissement au niveau de la cavité constants, il peut s'agir également d'un patient atteint de
buccale est important. Les hyposialies secondaires notamment démence sénile, d'une maladie d'Alzheimer... Ces
auront des conséquences directes lors des traitements de patients totalement dépendants sont traités et vivent dans
l'édentement complet et du port de la prothèse complète. des hôpitaux gériatriques de long séjour. Ils consulteront
Se pose alors le problème de la « polymédication », terme exceptionnellement au cabinet dentaire, mais ils ne doi-
employé quand plus d'un médicament est prescrit par jour. vent pas être éliminés des préoccupations du praticien.
Or, 80 % des personnes âgées admises à l'hôpital prennent
au moins un médicament par jour, 25 % en prenant de 4 à
6 ; de plus, 10 % des admissions à l'hôpital sont provoquées
par des réactions négatives à des prescriptions. En institu-
tion, le nombre moyen de médicaments prescrits s'élève à Face à un patient édenté âgé, le praticien doit se poser une
4, dont un au moins possède des effets sialoprives2. question essentielle:
- Quel est le meilleur service à rendre au patient?
Avec en corollaire les interrogations suivantes :
- Doit-on le traiter? Si oui comment?
Au vieillissement physiologique s'ajoute la fragilité de l'état
- Faut-il refaire une nouvelle prothèse ou non?
général, qui provoque des handicaps de types et de sévéri-
- Doit-on conserver les dents restantes?
tés variés.
- Et si oui sous quelle forme?
Aussi, l'âge seul ne peut caractériser un patient âgé, mais
Une réponse stéréotypée n'est pas possible, le choix thé-
la prise en compte de son état général et de l'existence d'un
rapeutique dépend en effet de l'analyse technique de la pro-
handicap constitue un des paramètres essentiels dans l'ap-
thèse existante, mais, d'autres paramètres doivent égale-
proche clinique, et dans la ou les solutions thérapeutiques
ment être pris en compte, parmi lesquels la motivation du
qui doivent être proposées.
patient, son autonomie, sa capacité psychomotrice à sur-
La population de patients âgés peut être ainsi divisée en
monter un changement...
trois catégories :
- Le patient indépendant autonome: il ne présente
aucune pathologie grave, ne suit aucun traitement
contraignant. Il est considéré comme un patient « ordi- La motivation des patients à refaire leur prothèse dépend de
naire », et ne doit pas être inclus dans l'échantillon de l'équilibre qui s'établit entre, d'une part, les doléances et les
patients relevant de la gériatrie. problèmes qu'ils éprouvent et, d'autre part, la tolérance dont
Par contre, les patients des deux catégories suivantes ils témoignent face à ces mêmes problèmes.
relèvent d'une prise en charge « gériatrique ». En effet, les doléances principales, relativement nom-
- Le patient dépendant moteur ou fragilisé est un patient breuses, sont essentiellement d'ordre fonctionnel : instabi-
globalement en bonne santé, mais il est atteint d'os- lité prothétique, difficultés de mastication3 (fig. 28-1 a, b).

Fig. 28-1a Proportions des différents types de doléances. Fig. 28-1 b Répartition des doléances fonctionnelles.
(D'après Berg et coll.10)
Mais la tolérance vis-à-vis d'une prothèse inadaptée aug- remplaçant, soit une prothèse inadaptée très ancienne, soit
mente avec l'âge du patient4. Inconsciemment, ces patients une prothèse partielle peu volumineuse. Le patient s'était
acceptent la réduction de leurs capacités fonctionnelles habitué à un volume, à des formes, avait pallié l'inadapta-
comme une des nombreuses manifestations du processus tion qui s'était installée avec le temps. Une coordination neu-
de vieillissement, il existe ainsi une discordance importante romusculaire fine s'était développée, coordination muscu-
entre les besoins réels et les doléances des patients âgés5. laire spécifique de la situation existante et permettant une
Les attentes vis-à-vis d'une nouvelle prothèse sont fonction satisfaisante. L'insertion de la nouvelle prothèse
réduites, de plus, vient s'ajouter' une certaine anxiété à rompt l'équilibre obtenu, les mécanismes de contrôle mus-
affronter une nouvelle restauration, donc un changement culaire ne fonctionnent plus, l'adaptation à cette nouvelle
d'apparence, de nouvelles formes... prothèse peut alors être un échec complet.
Par conséquent, la décision de refaire une prothèse doit Les anciennes prothèses, conservées et transformées,
aussi prendre en considération ces paramètres subjectifs, car sont parfois un moyen de redonner au patient une prothèse
le succès de cette réhabilitation prothétique dépendra éga- esthétique et fonctionnelle, à condition cependant que la pro-
lement du facteur psychologique6,7. thèse existante réponde à certains impératifs (morphologie
des dents prothétiques, occlusion, DVO, plan d'occlusion.. .)9.

La décision de refaire ou d'améliorer les prothèses existantes


doit tenir compte du nombre des rendez-vous nécessaires, La conservation d'une ou de plusieurs dents, qu'elles soient
de leur durée, et des contraintes que peuvent engendrer les sur l'arcade ou sous-prothétiques, revêt un rôle psycholo-
différentes techniques. Or, parmi les patients âgés pour qui gique essentiel, car elles représentent pour le patient âgé
il apparaît indispensable de refaire une prothèse, certains « sa » ou « ses » demière(s) dent(s), mais elle(s) peut(vent)
peuvent présenter des pathologies générales assorties de aussi avoir un rôle fonctionnel. Ne pas extraire ces dents,
handicaps non négligeables. voire les exploiter, répond aux mêmes exigences que chez
En conséquence, pour toute décision thérapeutique, il les patients jeunes. Les facteurs propres liés à l'âge (hygiène,
incombe au praticien d'établir une adéquation entre le ser- susceptibilité carieuse, problèmes parodontaux...) devront
vice rendu et les contraintes subies. être pris en compte dans la décision de conserver ces dents,
ainsi que dans le type de restauration envisagée10.
L'utilisation de racines simplement obturées et traitées avec
du fluorure d'étain ou bien avec des attachements à mise
Avec l'âge, la réduction significative de l'habileté motrice
en place immédiate (Dalbo Rotex®, Flexipost®), sont des
manuelle pose le problème d'une évolution similaire de l'ha-
moyens simples, rapides et peu contraignants.
bileté motrice orale. Et, face à la décision du passage de
l'édentement partiel à l'édentement total ou du remplace-
ment d'une prothèse complète cette interrogation revêt une
importance majeure. Or l'habileté motrice orale, à la diffé- Quelles que soient les études réalisées, l'âge moyen d'une
rence de l'habileté manuelle, ne diminue pas significative- prothèse complète est très élevé (de l'ordre de 9 ans)11, de
ment avec l'âge, de même, la capacité d'adaptation à une plus, aux yeux du praticien, la plupart de ces prothèses appa-
prothèse complète resterait inchangée5"8. raissent inadaptées et devraient être refaites12 (fig. 28-2a, b).
. Mais ces données doivent cependant être tempérées par Aux qualités très médiocres des prothèses analysées lors
des échecs fréquents d'intégration d'une nouvelle prothèse de ces différentes études, une hygiène prothétique insuffi-

Fig. 28-2a Lésion muqueuse provoquée par un bord prothétique Fig. 28-2b Situation du bord prothétique par rapport à la lésion.
erroné.
Fig. 28-3a Dépôt de tartre dans l'intrados prothétique. Fig. 28-3b Irritation muqueuse répondant au tartre présent dans
l'intrados prothétique.

sante est très souvent enregistrée, facteur prédisposant à


des lésions muqueuses non négligeables (fig. 28-3a, b).
Le problème de la dégradation des matériaux doit aussi
être pris en compte. Les résines présentent entre autres des
altérations marquées par le développement de porosités,
responsables d'une colonisation bactérienne importante de
la prothèse, d'une hygiène plus délicate, d'infiltrations à la
jonction avec les dents prothétiques. Les dents prothétiques
présentent, elles aussi, des usures importantes des faces
occlusales, avec notamment une disparition de la morpho-
logie cuspidienne et de la stabilité de l'occlusion; s'il s'agit
de dents en porcelaine, des fractures sont parfois constatées
(fig. 28-4). Une analyse rigoureuse de la prothèse est donc
impérative par rapport à l'attitude thérapeutique envisagée.
Fig. 28-4 Usures majeures de dents prothétiques en résine.

Dans de nombreux cas, les paramètres psychiques mais aussi


La décision thérapeutique n'est pas unique, elle dépend de l'état médical du patient tendent vers une adaptation de la
l'ensemble des facteurs psychiques, médicaux et prothé- prothèse existante. Par contre, sur le plan technique, il semble
tiques abordés précédemment. que refaire une nouvelle prothèse apporterait améliorations
Pour chaque patient ce bilan doit être établi de façon à lui fonctionnelles relatives et confort. À ce stade, il est important
proposer une solution réfléchie et raisonnable (fig. 28-5a, b). pour chaque patient de pondérer l'influence des différents

Fig. 28-5a Bilan de l'examen clinique.


Fig. 28-5b Solutions thérapeutiques.

paramètres pour offrir au patient la « meilleure » solution. mêmes restrictions quant à leur hydrophilie. Les polysulfures
Dans les cas où la prothèse ne sera pas refaite, la réhabilita- (Permlastic) hydrophobes posent eux le problème d'un
tion de la prothèse existante et la réfection totale de la base temps de prise de 8 à 10 mn. Les résines à prise retardée
prothétique est, à moyen terme, ce qui permet de résoudre Fitt de Kerr®, Soft-Liner® en raison de leurs qualités intrin-
un grand nombre de cas. sèques, offrent une réponse adéquate aux problèmes posés.

C'est une étape toujours délicate, dont la difficulté s'accroît


chez les patients âgés. Elle se déroule en trois temps :
Cliniquement, la réalisation d'une prothèse adjointe com-
plète chez le patient âgé ne comporte pas de différences La détermination du plan occlusal
fondamentales, les objectifs thérapeutiques sont les
À l'arcade maxillaire, les critères de détermination du plan
mêmes. Cependant, la durée des rendez-vous, les matériaux
occlusal sont comparables à ceux précédemment exposés,
et les techniques employés lors des différentes étapes
en particulier le parallélisme avec le plan de Camper. Par
seront adaptés particulièrement à chacun des cas.
contre, chez les patients âgés présentant une certaine « ato-
nie », au niveau mandibulaire le plan occlusal sera abaissé.
En effet, chez ce type de patient, d'une part la langue paraît
augmenter de taille, augmentation semble-t-il provoquée par
La question des matériaux concerne essentiellement leur l'accroissement du rôle joué par la langue lors de la mastica-
caractère hydrophile ou hydrophobe, leur temps de prise, et tion, de la phonation, et, d'autre part, la posture antérieure
le confort qu'ils offrent au patient. basse de la tête entraîne la remontée du plancher de la cavité
Au stade de l'empreinte primaire, la réalisation d'une buccale. Ainsi, la prothèse mandibulaire se trouve située sous
empreinte à l'alginate est indiquée à plusieurs titres: le la langue, ce qui favorise sa rétention et sa stabilité.
temps de prise de l'alginate est court, c'est un matériau La mise en articulateur du modèle maxillaire est simple,
hydrophobe qui ne colle pas aux muqueuses, il ne lèse pas à l'aide de la maquette d'occlusion et du plateau de mon-
un tissu fragilisé par une asialie ou une hyposialie, enfin son tage.
utilisation n'oblige pas le patient à se rincer!
Concernant l'empreinte secondaire, l'emploi d'une pâte
oxyde de zinc-eugenol présente quelques inconvénients en La dimension verticale d'occlusion
raison de son caractère hydrophile: irritation en cas de bles- Sa détermination est délicate en raison des multiples chan-
sures de la muqueuse; en cas d'asialie, l'oxyde de zinc colle gements physiologiques et pathologiques qui affectent les
aux muqueuses sèches. Les polyéthers comportent les structures de la cavité buccale. Si la dimension verticale d'oc-
Fig. 28-6 a) Montage en neutroclusion - aspect des relations intercuspidiennes.
b) Mise en évidence des contacts palatins.

clusion existante est satisfaisante, il est possible d'utiliser les Les dimensions vestibulo-linguales des dents posté-
anciennes prothèses comme référence pour éviter des rieures seront si possible plus étroites pour laisser le plus de
changements13. Si le praticien choisit les techniques clas- place possible à la langue.
siques, il convient de tenir compte de l'augmentation de l'es- Les dents cuspidées et le montage type Hanau doivent
pace libre chez les patients âgés. Cette augmentation est être éliminés, car ils nécessitent des équilibrations primaires,
d'environ 3 mm par rapport aux valeurs habituelles. En effet, secondaires et des contrôles suivis dans le temps. Le
la posture plus ou moins voûtée des patients entraîne une schéma occlusal idéal est le schéma d'occlusion lingualée
réduction de l'espace libre qu'il faut rétablir en sous-évaluant ou neutre, avec des dents cuspidées maxillaires et des dents
un peu la dimension verticale d'occlusion. plates mandibulaires, des courbes de compensation faibles
voire inexistantes (fig. 28-6). Cette organisation est facile-
La position condylienne ment réalisée avec des dents Cuspiform® maxillaire et
Synoform® mandibulaire ou bien des dents orthoplane ou
Dans ces conditions cliniques le principe de la relation cen-
ortholinguale®. Ces schémas occlusaux suppriment tout
trée, relation condylienne stricto sensu, doit être abandonné
risque de blocage occlusal, d'interférences donc de
au bénéfice d'une conception plus pondérée. La position des
contraintes au niveau des surfaces d'appui.
processus condyliens au sein de leurs fosses mandibulaires
respectives découle de l'équilibre complexe qui, par réaction
aux forces de gravité, s'établit entre les muscles élévateurs,
abaisseurs, posturaux. Cela impose de placer le patient dans
sa position habituelle, position assise adaptée à son équilibre La finition des cires et, par là-même, la finition des bases
postural. Les maquettes d'occlusion sont réglées à la dimen- prothétiques requièrent chez les patients âgés une attention
sion verticale d'occlusion choisie, le praticien guide délicate- particulière. En effet, comme cela a été signalé précédem-
ment la mandibule. L'enregistrement de l'arc gothique à l'aide ment, l'hygiène est souvent défectueuse. La finition des pro-
du point d'appui central est totalement contre-indiqué. thèses doit faciliter le nettoyage en supprimant tous les
reliefs, les irrégularités habituellement réalisés au bénéfice
de surfaces lisses et parfaitement polies14.
Par ailleurs, pour les patients vivant en institution, il est
très important d'identifier les prothèses pour éviter ou pré-
Les critères de choix des dents prothétiques sont comparables
venir les échanges, les pertes, incidents malheureusement
à ceux précédemment exposés. Les dents prothétiques seront
souvent constatés15. Cette identification peut être réalisée
de préférence en résine, pour les raisons suivantes :
pour chaque prothèse neuve au laboratoire par différents
- Les anciennes prothèses possèdent le plus souvent des
moyens: gravure des initiales du patient, petites boîtes
dents résine, et il sera très difficile pour le patient de s'ha-
situées préférentiellement dans les secteurs latéraux vesti-
bituer à des dents porcelaine.
bulaires, où seront placées les informations concernant le
- Le degré d'usure des dents résine est réduit, car les
patient, et refermées ensuite à l'aide de résine transparente.
forces masticatoires sont faibles.
- Les maladies neuro-dégénératives (parkinsonisme) s'ac-
compagnent souvent d'instabilité prothétique, les dents
porcelaine risquent de se fracturer et de faire du bruit.
- Lors des séances de nettoyage, les risques de fractures L'utilisation des adhésifs reste un sujet controversé opposant
consécutives à des chutes sont diminués. des praticiens reconnaissant une certaine efficacité aux
adhésifs quant à la rétention et à la stabilisation prothétique, cas particulièrement complexes avec une résorption
à ceux réfutant leur utilisation, car à leurs yeux, seule une majeure rendant une stabilisation et une rétention méca-
réalisation précise de la prothèse complète apporte réten- nique quasiment impossibles (fig. 28-7, 28-8) ; enfin, chez
tion et stabilisation. des patients que l'on ne peut pas appareiller à cause de leur
Cependant, les mentalités sont en train d'évoluer et force état de santé, dont la fonction masticatoire très limitée pour-
est de constater que ces produits, objets de multiples publi- rait engendrer des carences alimentaires.
cités, sont utilisés par les patients16.

Face à des patients très âgés, l'emploi de produits adhé-


sifs dentaires ne doit pas être rejeté, car ces produits peu-
vent rendre service à deux niveaux.
Premièrement, ils peuvent être employés lors de cer-
taines étapes de la réalisation prothétique, enregistrement
de l'occlusion, essayage esthétique, fonctionnel; le senti- Une alimentation équilibrée est un facteur essentiel de la
ment pour le patient d'avoir des prothèses « qui tiennent par- bonne santé des personnes âgées. Elle influence directe-
faitement », quels que soient les tests réalisés, fait disparaître ment, et/ou indirectement, l'évolution des pathologies, le
toute anxiété vis-à-vis de cette nouvelle prothèse. Cet accord maintien des capacités physiques et intellectuelles.
du patient âgé reste, en effet, un point déterminant dans l'in- Le risque de développer des déficits nutritionnels sérieux
tégration prothétique future. augmente avec le vieillissement. Les personnes âgées repré-
Deuxièmement, l'emploi d'adhésif avec la prothèse ter- sentent ainsi une population à risque.
minée peut être indiqué dans certains cas particuliers : chez Un état de malnutrition apparaît sournoisement et les
les patients ayant des maladies systémiques avec des dys- signes initiaux sont peu évocateurs. Mais un état dépressif,
kinésies musculaires telles que la maladie de Parkinson, la une perte d'appétit, de goût doivent alerter, car ils peuvent
maladie d'Alzheimer, des dyskinésies de la langue ; dans des être le départ d'un déséquilibre alimentaire qui, si il s'ins-
talle, peut conduire à un état de « malnutrition ». Une sur-
veillance s'impose alors pour éviter l'engrenage : faible ali-
mentation, diminution des forces, déficit immunitaire et
augmentation des risques infectieux17. Cet état accroît for-
tement la morbidité et la mortalité ; enfin, de 30 à 50 °/o des
problèmes de santé chez la personne âgée seraient la consé-
quence directe ou indirecte d'un déficit nutritionnel. Pour
certains, 85 % des maladies et handicaps chroniques pour-
raient être compensés grâce à une amélioration de l'état
nutritionnel18.

L'ensemble des études réalisées à propos des déficits nutri-


Fig. 28-7 Patient présentant des mouvements incoordonnés de tionnels tend à démontrer l'existence d'un lien direct entre
la langue et de la mandibule. ces déficits et la santé bucco-dentaire19.
Or, les besoins de soins sont souvent très importants et
contribuent à différents niveaux à une malnutrition présente
chez certains patients, malnutrition dont Tétralogie reste plu-
rifactorielle20. L'état de santé, les capacités masticatoires, les
caractéristiques des réhabilitations prothétiques et le goût
sont les quatre paramètres le plus fréquemment mis en
cause.
- Les patients âgés représentent une population fragilisée,
poly-médicamentée, souvent atteinte par des patholo-
gies chroniques ou aiguës, ne favorisant pas une ali-
mentation équilibrée. En effet, le patient affaibli par la
maladie mange peu ou mal : il n'aura plus d'appétence
alimentaire : s'il vit seul il ne cuisinera plus, son alimen-
tation sera le plus souvent déséquilibrée avec un excès
Fig. 28-8 Résorption de la crête mandibulaire majeure qui, asso- en hydrates de carbone. Les traitements médicamenteux
ciée à un problème de santé général, entraîne le patient à utiliser engendrent, par ailleurs, très souvent une réduction du
des adhésifs pour stabiliser la prothèse complète. flux salivaire, élément négatif supplémentaire.
Enfin, l'isolement du patient âgé, malade est aussi un fac- La prévention ainsi que des rendez-vous de contrôle régu-
teur défavorable, avec un aspect psychosociologique liers chez les patients âgés sont aussi des facteurs essentiels
important, qu'il ne faut pas négliger. qui permettent de conserver une santé orale satisfaisante.
- La perte du goût est un autre argument développé pour De simples conseils concernant une alimentation équi-
expliquer ces problèmes nutritionnels. Cette « perte du librée permettront ainsi d'atteindre un confort et un état oral
goût » avec l'âge ne correspond pas à de réelles don- optimal chez des patients âgés édentés.
nées scientifiques. Sur le plan gustatif aucun déficit
n'existe, mais, l'olfaction présente de réelles altérations,
la perception des flaveurs est donc sensible au phéno-
mène de vieillissement. Par ailleurs, l'hygiène bucco-
dentaire fréquemment insuffisante influe négativement
sur la perception gustative des aliments21.
- Sur le plan fonctionnel, la présence d'une réhabilitation
1. Mersel A. Oral health status and dental needs in a geriatric insti-
prothétique insuffisante, défectueuse est souvent mise
tutionalized population in Paris. Gerodontology, 1990; 8 :47-51.
en cause. L'instabilité prothétique et le manque de réten- 2. Handelman SL, BaricJM, Espeland MA, Berglund KL. Prevalence
tion sont les défauts les plus fréquents, associés ou non of drugs causing hyposalivation in an institutionalized geriatric
à des lésions muqueuses douloureuses. Le nombre des population. Oral Surg Oral Med Oral Pathol, 1986; 62: 26-31.
prothèses qui devraient être refaites est très important. 3. Berg E, Johnsen TB, Ingebretsen R. Patient motives and fulfill-
Dans de telles situations, la mastication est difficile, et le ment in renewal complete dentures. Acta Odont Scand, 1984 ;
patient va privilégier une alimentation semi-liquide, le 42: 235-240.
plus souvent riche en hydrates de carbone et pauvre en 4. Muller F, Hasse-Sander I. Experimental studies of adaptation to
protéines aboutissant à un déséquilibre nutritionnel. complete denture related to ageing. Gerodontology, 1993; 10 :
23-27.
- Enfin, les capacités masticatoires sont considérées
5. Meewissen J, Van Waas MAJ, Meewissen R, Kayser AF, Van't Hof
comme réduites avec le vieillissement. Les patients
MA, Kalk W. Satisfaction with reduced dentitions in elderly
édentés totaux présentent non seulement une réduction people. J Oral Rehabil, 1995;22:397-401.
de la puissance des muscles élévateurs, mais aussi une 6. Nevalainen MJ, Rantanen T, Narhi T, Ainamo A. Complete den-
mastication qualitativement inférieure22. Avec le vieillis- tures in the prosthetic rehabilitation of elderly persons: five dif-
sement, une modification de la structure des muscles ferent criteria to evaluate the need for replacement. J Oral
s'installe, caractérisée par une diminution significative de Rehabil, 1997;24:251-258.
la densité des fibres musculaires associée à une appari- 7 Golebiewska M, Sierpinska T, Namiot D, Likeman PR. Affective
tion progressive de graisses et de tissus fibreux. Ces varia- state and acceptance of dentures in elderly patients.
Gerodontology, 1998; 15:87-92.
tions peuvent être liées à une réduction de la force mus-
8. Baum BJ, Bodner L Aging and oral motor function: evidence
culaire et une altération des capacités motrices8"23.
for altered performance among older persons. J Dent Res,
1983;62:2-6.
9. Marxkors R. Prosthodontic care of elderly edentulous patients.
Int Dental J, 1993;45:591-598.
10. lacopino AM, Wathen WF. Geriatric prosthodontics: an overview.
Lors des nombreux rendez-vous nécessaires à la réalisation Part II: Treatment considerations. Quintessence Intern, 1993;
des prothèses, il s'établit une relation de confiance entre le 24:353-361.
praticien et le patient. Cette relation permet au praticien de 11. Moskona D, Kaplan I. Oral health and treatment needs in a non-
prodiguer plus facilement des conseils et d'exposer les institutionalized elderly population: experience of a dental
school associated geriatric clinic. Gerodontology, 1995; 12:95-
limites des thérapeutiques utilisées :
98.
- Des conseils relatifs à l'hygiène de la cavité buccale et 12. Nevalainen MJ, Narhi T, Siukosaari P, Schmidt-Kaunisaho K,
des prothèses, souvent incriminée parmi les étiologies Ainamo A. Prosthetic rehabilitation in the elderly inhabitants of
d'un certain dégoût des aliments. Helsinki, Finland. J Oral Rehabil, 1996; 23 : 722-728.
- Des conseil alimentaires portant sur la composition des 13. Bissasu M. Use of a patient's old complete denture to deter-
repas : la viande, les légumes et les fruits sont recom- mine vertical dimension of occlusion. J Prosthet Dent, 2001;
mandés afin d'assurer un apport suffisant en protéines, 85:413-414.
vitamines et fibres. Les soupes, bols de lait et tartines ne 14. Jung T, Ziet WD. Modifications de I'extrados vestibulaire.
doivent pas constituer la base de l'alimentation du Consequences fonctionnelles et hygieniques. Cah Prothese,
1992;78: 131-136.
patient âgé édenté !
15. Heath JR. Denture identification - A simple approach. J Oral
- Il est aussi important que la présentation des repas soit
Rehabil, 1981 ; 14: 147-163.
agréable, donne de l'appétit; par conséquent, les repas 16. Poujade JM, Pesci-Bardon C, Serre D. Utilisation des adhesifs
« moulinés » sont à éviter. pour protheses amovibles complètes: aide efficace ou palliatif.
- Enfin, le patient, et éventuellement son entourage le plus Cah Prothese, 2000; 111 : 31-42.
proche, doit être informé de l'importance d'une alimen- 17. Sidobre B, Ferry M. L'evaluation de I'etat nutritionnel. Soins
tation équilibrée, et des aliments à préférer. Gerontologie, 1997; 8 : 24-27
18. Coutaz M, Morisod J, Biselex S, Hermann F, Michel JP. 21. Hoad-Reddick G, Grant A, Griffiths CS. Investigation into the
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