Déjà parus
Sous la direction de
@ L'Harmattan, 2002
ISBN: 2-7475-3671-8
SOMMAIRE
AVANT -PROPOS 7
L'IMAGINAIRE LINGUISTIQUE: UN NIVEAU D' ANALYSE ET
UN POINT DE VUE THÉORIQUE
Anne-Marie HOUDEBINE-GRA VAUD 9
1ère PARTIE APPROCHE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE23
NORME, REPRÉSENTATION, IDÉAL, IMAGINAIRE
LINGUISTIQUE ?
Aziza BOUCHERIT 25
PEUT-ON PRÉVOIR LA DYNAMIQUE LEXICALE?
Evangelia ADAMOU 31
LA DYNAMIQUE DES RELATIONS SPATIALES
Colette FEUILLARD Gaële PARADIS 37
LES RAISONS D'EFFACER SON ACCENT: ENTRE
ACCOMMODATION ET INSÉCURITÉ
Martine AMSTALDEN Pascal SINGY 43
LEXIQUE RÉGIONAL ET IMAGINAIRE LINGUISTIQUE :
INSTABILITÉ ÉV ALUATIVE? (LE CAS DU FRANÇAIS PARLÉ EN
PAYS DE VAUD)
Alexei PRIKHODKINE 49
NOMS PROPRES: À NE PRENDRE QU' AVEC DES PINCETTES?
François-Xavier NÈVE 55
L'IMAGINAIRE LINGUISTIQUE DU PURISTE
Georges KASSAÏ 61
SUR LA DYNAMIQUE DES IMAGINAIRES LINGUISTIQUES DANS
L'ÉLABORATION DES LANGUES À TRADITION ÉCRITE
Ferenc FODOR 67
IMAGINAIRE LINGUISTIQUE ET IDENTITÉ ETHNIQUE: LE CAS
D'UN ALLEMAND DE SIBÉRIE
Orest WEBER 73
5
STRUCTURATION DE L'IMAGINAIRE À PARTIR D'ÉLÉMENTS
LEXICO-SÉMANTIQUES PRÉEXISTANT DANS LE DOMAINE DE
LA DIFFÉRENCIATION SEXUELLE EN LANGUE FRANÇAISE
Nicole PRADALIER-BREL 79
IMAGINAIRE LINGUISTIQUE ET PUBLICITÉ: QUAND LE
MESSAGE PUBLICITAIRE PARTICIPE À LA STIGMATISATION
D'UNE LANGUE FAUTIVE
Karine BERTHELOT-GUIET 83
2ème PARTIE - EXTENSION DU MODÈLE 89
LE LANGAGE ET L'ENFANT: ASPECTS DE L'IMAGINAIRE
LINGUISTIQUE
J.-M. Odéric DELEFOSSE 91
UN MODÈLE LINGUISTIQUE AU SERVICE DE LA SANTÉ?
Pascal SINGY 97
IDENTITÉS DISCURSIVES ET IMAGINAIRES FIGURATIFS
Jean-Claude SOULAGES 103
IMAGINAIRE GESTUEL ET COMMUNICATION NON VERBALE
Elise MALAFOSSE Valérie BRUNETIÈRE 111
LA LANGUE DE L'AUTRE DANS LES RÉCITS DE VOYAGE EN
EXTRÊME-ORIENT
Christine DEPREZ 117
IMAGINAIRE LINGUISTIQUE ET MISE EN TITRE
Marc SOURDOT 123
REPRÉSENT ATIONS DU LANGAGE DANS L INNOMMABLE DE
BECKETT
Véronique HENNINGER 129
CONSTRUCTION ET REPRÉSENTATION DU PARLER D'UNE
FEMME ILLETTRÉE
Carmen BOUSTANI 135
LE SOCIAL, L'IDÉOLOGIE ET L'IMAGINAIRE LINGUISTIQUE
Denis COSTAOUEC 141
BIBLIOGRAPHIE 147
TABLE DES MATIÈRES 151
6
AVANT-PROPOS
7
Georges Kassaï se penche sur le purisme, un des constituants
permanents de l'imaginaire linguistique, dans une étude du discours
sur la langue chez un poète hongrois du début du 20èmesiècle, et
Karine Berthelot-Guiet étudie quant à elle un exemple de purisme
contemporain, relatif à la langue de la publicité.
Dans un deuxième groupe d'articles, les auteurs proposent des
applications de l'Imaginaire linguistique dans divers champs
d'étude. Odéric Delefosse confronte le modèle aux problèmes de
l'acquisition du langage et notamment à l'apprentissage de la
lecture chez l'enfant. Pascal Singy voit la possibilité d'exploiter les
acquis de l'Imaginaire linguistique pour consolider les programmes
de médiation culturelle et notamment la formation des interprètes
dans les hôpitaux. Etudiant des récits de voyage en Extrême-Orient
Christine Deprez se penche sur l'altérité linguistique et notamment
la représentation de la langue de l'autre.
Trois articles envisagent l'application de l'Imaginaire
linguistique dans les études littéraires: Marc Sourdot étudie
l'imaginaire linguistique des romanciers, véhiculé par les titres de
romans; Véronique Henninger décrit la façon dont la langue de
Beckett fait entendre l'Innommable; Carmen Boustani, éclaire la
question complexe de l'Imaginaire linguistique féminin prêté à un
personnage littéraire.
Nicole Pradalier-Brel aborde également la question de la
différenciation sexuelle sous l'angle lexical et sémantique et Jean-
Claude Soulages s'intéresse à la distinction féminin-masculin telle
qu'elle apparaît dans l'imaginaire figuratif d'un corpus publicitaire.
Autre ouverture à la sémiologie, l'étude de Valérie Brunetière et
d'Elise Malafosse explore le champ de l'Imaginaire Gestuel.
Evangelia ADAMOU
8
L'IMAGINAIRE LINGUISTIQUE:
UN NIVEAU D' ANALYSE
ET UN POINT DE VUE THÉORIQUE
9
une capacité de mise à distance, de distanciation permettant une
sorte de récursivité sur elle-même et partant des sujets sur la langue
et les discours, les leurs et ceux d'autrui. Que ce phénomène soit
linguistique ou cognitif n'est pas ici le propos. Il participe sans
doute de ces deux aspects et favorise autant l'apprentissage des
langues, que leur description et leur idéalisation, fictive, ou
légiférante (dite académique) et parfois pénalisante pour les
individus.
En effet ce qui apparaît très vite lors des entretiens
individualisés et des passations des questionnaires d'enquête c'est
l'amour du parler régional (patois) et en revanche le désintérêt
voire le mépris qu'encourent les formes courantes du parler utilisé
à savoir le français. Locuteurs et locutrices s'étonnent de voir une
universitaire s'y intéresser et refusent souvent de répondre aux
enquêtes à cause de leur "mauvais français". Cette dépossession de
leur propre langue par les sujets, en situation de diglossie, souvent
repérée dans les études linguistiques, sociolinguistiques ou
dialectologiques, oblige à approfondir cette attitude des locuteurs
eu égard à leur parler, pour pouvoir les étudier afin de vérifier leur
influence (s'il y a lieu) dans la dynamique linguistique (dans la
synchronie dynamique selon la conceptualisation d'André
Martinet). Cela afin de vérifier si cet aspect peut entrer comme
causalité dans la description linguistique. «Ouvertement ou
tacitement la causalité rest(ant) le fil directeur de toute
investigation scientifique» (Martinet)!.
D'où la notion avancée d'Imaginaire linguistique, pour prendre
en compte ce « rapport du sujet à la langue, la sienne et celle de la
communauté qui l'intègre comme sujet parlant-sujet social ou dans
laquelle il désire être intégré, par laquelle il désire être identifié par
et dans sa parole; rapport énonçable en termes d'images,
participant des représentations sociales et subjectives, autrement dit
d'une part des idéologies (versant social) et d'autre part des
imaginaires (versant RluS subjectif) » - comme j'ai écrit lors de ces
premières réflexions. Notons que ces deux termes peuvent se
conjoindre, nos imaginaires se construisant aussi dans la
communauté culturelle et dans sa transmission historique et sociale
(cf. notion d'imaginaire social chez Castoriadis3).
10
Les analyses des attitudes subjectives s'approfondissant, se
complexifiant et se développant en contact avec l'extension des
descriptions sociolinguistiques, cette notion d'imaginaire
linguistique, proposée pour prendre en compte ce rapport (ou ces
représentations)! des sujets parlants à la langue, s'est vue
approfondie et développée jusqu'à devenir un concept relativement
stabilisé qui a permis de décrire les attitudes des sujets parlants en
les précisant par la construction de catégorisations2; ce concept
s'amplifiant jusqu'à intégrer les constructions théoriques
linguistiques (les théories, voire les niveaux d'analyse)3 malgré
leur souci d'objectivité ou plus justement dit de tension
d'objectivité puisque celle-ci en tant qu'absolu (vérité) n'est pas
atteignable.
Il
d'imaginaire a aussi été retenu pour rappeler, en ces temps de
sociolinguistique dominante (années 80), que tous les sujets
parlants d'un groupe géographique et socioéconomique homogène
supposés avoir la "même" langue peuvent se différencier tant dans
la forme de leurs discours (leur syntaxe, leur prononciation, leur
lexique - ce qu'on peut désigner comme leurs comportements ou
productions linguistiques) que dans leurs évaluations (auto- ou
allo-évaluation) pour peu que l'on observe de près celles-ci.
En effet rares sont ceux ou celles qui restent dans une
évaluation neutre (autrement dit qui se préoccupent peu de leur
façon de parler ou de celle d'autrui). Cela surtout dans les milieux
provinciaux interrogés alors (années 1970-74). Au contraire,
comme il a été dit au début je rencontrais surtout des évaluations
négatives, péjoratives eu égard à son propre parler; cela avec des
rationalisations (c'est -à-dire des raisons, des raisonnements)
différentes.
Pour pouvoir les étudier afin de vérifier leur influence (s'il y
avait lieu) dans la dynamique linguistique (dans la synchronie
dynamique selon la conceptualisation d'André Martinet), il
convenait de les catégoriser; cela comme dans toute démarche
scientifique un tant soit peu rigoureuse afin d'ordonner les
matériaux de la réalité, quelque rigidification que ce type de
méthode impose. Le modèle adopté permet donc de classer ces
éléments (représentations, sentiments, évaluations spontanées ou
recherchées par enquêtes ou entretiens) des fictions puristes,
prescriptives se référant au bon français, au français correct (ou à
l'inverse au mauvais français, ou aufrançais incorrect) aux fictions
esthétisantes agitant le beau français, ou historisantes recourant au
passé de la langue, ou encore s'appuyant sur une fonction plus
pragmatique ou fonctionnelle des discours, avec l'accent mis sur le
communicable, le compréhensible par tous, d'où l'aspect
communicationnell.
Une partie des rationalisations des locuteurs se présente comme
très prescriptive et renvoie à un discours où l'orthographe joue un
rôle déterminant, l'orthographe et l'écrit appris à l'école. Le
discours institutionnel est là repris. Sans même connaître le terme
métalinguistique, les sujets parlent de la norme, de la correction;
ce que Denise François avait appelé à cette époque la norme
prescriptive afin de bien mettre en évidence la différence
1
Tableau 2, adjonction de 1983.
12
magistralement reprise dans un article par Alain Reyl -
régulièrement cité dans mes travaux - entre normal (la norme
fonctionnelle de l'école de Prague ou systémique, celle du
fonctionnement du système), et normatif (la norme prescriptive, le
purisme ).
13
entretiens) et les imaginaires des locuteurs et locutrices dits normes
subjectives (plutôt que attitudes, opinions, sentiments ou
représentations, termes en usage dans les sciences humaines et en
linguistique) .
Quant au terme imaginaire, peu utilisé dans notre domaine,
outre qu'il était peut être dans l'air du temps, comme les notions
flottant qui viennent nous "regarder" et que nous saisissons, il
insiste sur la différence entre opinion révélée et comportement
pour permettre d'étudier leur interaction (cf. tableau 3 ci-dessous),
et signaler - à qui veut bien l'entendre - la connotation ou
l'indexation lacanienne entre Réel, Imaginaire et Symbolique. Si la
langue peut être considérée comme une sorte de "prêt-à-porter
symbolique"l offrant aux sujets une vision du monde dans ses
désignations, catégorisations, son Réel (sa réalité profonde) est en
quelque sorte inatteignable. Qu'est-ce qu'une langue, et même que
La langue (Saussure)? La difficulté des linguistes à la définir et
leur divergence de conceptions en témoignent. De plus d'autres
approches que celle de la science linguistique montrent différents
aspects ou fonctions des langues tout aussi intéressants voire
éclairants. Qu'on songe à la poésie ou à la philosophie par
exemple. Ce qui justifie à mon sens qu'on puisse avancer que la
version qu'on donnera de la langue n'est que faite d'imaginaire.
Cela même dans les travaux supposés scientifiques des linguistes.
Cet aspect plus théorique et épistémologique du modèle de
l'Imaginaire linguistique, que retient le tableau 2 présenté ci-
dessous, apparaît vers les années 82-83 jusqu'à aujourd'hui.
Toutefois soulignons que la première compréhension de ce
terme (1975-82) concerne essentiellement le rapport du sujet
parlant à sa langue, dont témoignent ses reprises (les siennes ou
celles d'autrui). Les premiers corpus analysés sont ainsi constitués
et font apparaître tant une langue idéalisée qu'une attitude
essentiellement normative-prescriptive des sujets.
D'où la première typologie publiée en 1982 dans "Imaginaire
linguistique et phonologie du français contemporain,,2 opposant
normes objectives3 (systémiques et statistiques) aux normes
subjectives (évaluatives-neutres, fictives, prescriptives). Ces
dernières arrivant d'un discours institutionnel faisant lien avec
1 L'expression est empruntée au psychanalyste Serge Leclaire.
2 Le Français moderne, p. 42-51.
3 ou objectivées mais les subjectives aussi sont objectivées d'où le maintien actuel
des termes présentés malgré leur inadéquation, comme tout métalangage (cf.
Lacan et sa réserve sur l'existence du métalangage).
14
l'imaginaire social (Castoriadis). Plus tard vient s'adjoindre une
norme communicationnelle. En travaillant avec des journalistes de
province (Le Courrier de l'Ouest, La République, Centre presse) et
de Paris (Le Monde, le Figaro) un autre mode de rationalisation a
été mis au jour, celui d'une recherche de clarté
communicationnelle, d'une facilité de compréhension entre
locuteurs. Préférence est alors donnée par les journalistes au
compréhensible, au communicable, cela même à l'écrit et avec
méconnaissance ou connaissance de la norme prescriptive
(exemple: mettre à jour pour mettre au jour ou pallier à, etc.) . On
relève alors que leur conception linguistique soutient celle de la
théorie fonctionnelle: c'est moins la grammaticalité ou l'esthétique
qui les préoccupe que l'" outil de communication" même si cela se
paie parfois d'une fiction de transparence autrement dit de ce qu'il
est convenu de désigner comme un cratylisme quelque peu naïf.
Ainsi le modèle de l'Imaginaire linguistique s'est-il enrichi au
fil du temps, avec les travaux des doctorants ou les remarques des
collègues, plus ou moins favorables à cette modélisation. C'est au
travail de Corinne Baudelot et à ses enquêtes avec des journalistes
ou à ma rencontre avec J.-P. Colignon, correcteur au journal le
Monde, et sa notion de bon usage momentanément contemporain
que cette norme communicationnelle, d'abord dite fonctionnelle
par C. Baudelot, a été adjointe au modèle (tableau 2). Les
recherches de Martine Delahaye enquêtant sur le tehuelche et
relevant chez ses témoins des commentaires de l'ordre de
l'imaginaire linguistique m'a donné à penser que cette notion était
extensible aux langues exclusivement orales et de ce fait valable
pour toutes les langues, et pas uniquement pour les langues à
tradition écrite comme je l'avais d'abord envisagé en travaillant sur
le français. La langue française est en effet connue pour être
transmise de façon très prescriptive. Il en va de même de la façon
dont elle est idéalisée par ses sujets parlants. Il convient de se
souvenir qu'elle est une langue imposée par la législation royale
dans des écrits non moins légiférants (actes notariés, cf. écrits de
Villers-Cotterêts, 1539). Aussi malgré la richesse des apports de La
Pléiade et de nombres d'écrivains, ce phénomène prescriptif se
rencontre fréquemment et rend difficile voire impossible la gestion
de la langue française par d'autres institutions que la seule
Académie française, depuis le 17è~ siècle; et cela retentit sur les
1 ilL Il,
'Imaginaire Linguistique dans la communication mas s-médi atique
Enseignement et medias, Didier, Paris, 1986, p. 58-64 avec Corinne Baudelot.
15
sujets parlants. Car même si les usages font la langue, les locuteurs
et locutrices du français semblent ignorer qu'ils construisent la
langue de leurs paroles l'actualisant; surtout ils ne sont pas
autorisés et ne s'autorisent pas à le savoir. On en a eu récemment
différents exemples, ainsi des réformes proposées de l'orthographe
que tous ou presque ignorent et la cabale académique et médiatique
sur la féminisation des noms de métiers1.
Les enquêtes et analyses de Cécile Canut2 ont démontré
l'efficacité descriptive du modèle sur des langues en contact et
dans le cadre d'une politique linguistique, comme la recherche sur
la féminisation des noms de métiers l'avait en France légitimé.
Sandrine Chabot3, Evangelia Adamou4 ou Ferenc Fodor5 par leurs
travaux d'enquête et d'analyse sur différents niveaux linguistiques
(syntaxique, lexical, ou sur des discours épi- ou métalinguistiques)
témoignent également de l'opérativité du concept d'Imaginaire
linguistique et du modèle établi, aux plans linguistique,
synchronique, dynamique, diachronique. Comme d'autres en
montrent l'intérêt en l'adaptant à leurs terrains ou objets qu'il
s'agisse de recherches sociolinguistiques, dialectologiques6 ou de
1
Laféminisation des noms de métiersenfrançais et dans d'autres langues,Paris,
L'harmattan, 1998.
2 Cécile Canut, Dynamique et imaginaire linguistique dans les sociétés à tradition
orale: le cas du Mali, thèse de doctorat, sous la direction d'A.-M. Houdebine,
Paris III, 1995 ou «Acquisition, production et imaginaires linguistiques des
familles plurilingues à bamako (Mali, Travaux de Linguistique, n07, 1996,
Université d'Angers, n° spécial sur l'imaginaire linguistique, p.43-52. Et dans
cet ouvrage, Philippe Gallard, «la conscience linguistique chez les jeunes
patoisants des Deux-Sèvres », p.59-64.
3 Sandrine Chabot, "Analyse synchronique et dynamique des morphèmes à valeur
oppositive et de leurs emplois en français contemporain", Travaux de
linguistique, n07, 1996, Université d'Angers, n° spécial sur l'imaginaire
linguistique, p. 113-130.
4 Evangelia Adamou, Imaginaire linguistique et dynamique lexicale: les mots
d'origine grecque en français, thèse, sous la direction d'A.-M. Houdebine, Paris
V,2001.
5 Ferenc Fodor, "Antoine Meillet et les langues d'Europe: une manifestation de
l'imaginaire linguistique des linguistes", Dans Travaux de linguistique, n07,
1996, Université d'Angers, n° spécial sur l'imaginaire linguistique, p. 131-140 ;
Ferenc FODOR, Dynamique des imaginaires linguistiques dans la constitution
des langues nationales européennes: le cas du français et du hongrois, thèse de
doctorat, sous la direction de A.-M. Houdebine, Paris V, 1999.
6 Cf. ici même les travaux de l'équipe de l'Université de Lausanne.
16
l'application du modèle à d'autres objets sémiotiques! (objets non
verbaux comme Pol Corvez sur la photographie et ses normes
prescriptives, ou Valérie Brunetière sur l'imaginaire du geste
figuré, ou Jean-Claude Soulages sur l'imaginaire figuratif
publicitaire, comme on l'entendra dans ce colloque).
Ses extensions s'étendent aux paroles des personnages des
textes littéraires voire aux postures des écrivains alors décelables
(travaux de Maria Sanda Ardeleanu2 et ici même Carmen Boustani,
Véronique Henninger), ou encore à l'imaginaire gestuel ou
publicitaire (ci-dessous, V. Brunetière, E. Malafosse, K. Berthelot-
Guiet).
L'extension peut prendre la forme d'un approfondissement de
la compréhension de ces phénomènes de distanciation et
d'imaginaire linguistique ou langagier en s'attachant à une
question d'importance non encore traitée dans ce cadre, à savoir la
mise en place des normes dans l'acquisition de la langue
maternelle, quasi traces d'auto-apprentissage et d' hétérogénéité
discursive (selon la notion de Jacqueline Authier-Revuz) comme
Laurence Brunet3 en a commencé l'exploration avec celle de la
fonction identitaire des langues (ou identificatoire d'autrui).
ldentitaire et identificatoire relèvent sans doute d'une fiction
comme toute construction identitaire, aussi peut-on les rattacher à
la norme fictive dans le modèle de l'Imaginaire linguistique ainsi
qu'elle le propose.
Cependant cette question de l'identité et de la fonction
identitaire des langues devient si importante et délicate à traiter
dans ces temps de communautarisme qu'il me semble préférable de
lui consacrer quelques travaux spécifiques dans les années à venir.
Il pourra en être de même des dernières notions avancées comme
celle de langue idéale et Idéal de langue retravaillant les notions
freudiennes de moi idéal et idéal du moi (Ich-idéal et Ideal-ich)
comme celle de surnorme (venue de Surmoi)4.
1 Pol Corvez, Sémiologie de la photographie, (théorie, modélisation, application)
thèse de doctorat, Paris III, 1996; Valérie Brunetière, Sémiologie gestuelle,
Théorie et description de différents corpus, thèse de doctorat, Paris 111,1994.
2 Sanda Maria Ardeleanu, Dynamique de la langue et imaginaire linguistique,
Iasi, Casa Editoriala Demiurg, 2000. Carmen Boustani, "Construction et
représentation d'une femme illettrée". Véronique Henninger, "Représentations
du langage dans l'Innommable de Beckett" dans ce volume.
3 Laurence Brunet, "Imaginaire linguistique: enquête auprès d'étudiants de Deug
I de psychologie", Travaux de Linguistique, p. 37-42.
4 Notion utilisée par Frédéric François et quelques autres dont on trouvera trace
dans La norme linguistique, 1. Maurais et E. Bédart, Québec, 1983. Quant à ces
17
Avec ce concept d'Imaginaire linguistique restent encore bien
des questions et des travaux à mener en prenant en compte
l'épaisseur synchronique d'une langue, les sujets parlants et leur
influence dans la dynamique linguistique. Cela en s'attachant à
décrire et construire, depuis une langue ou des langues, ce réel
inatteignable appelé, depuis Saussure, La langue, à l'aide des
paroles et des discours épilinguistiques ou métalinguistiques, des
fictions du sujet parlant, parlé, par et dans cette langue idéale,
idéalisée.
18
L'IMAGINAIRE LINGUISTIQUE
Usages Attitude
des sujets des sujets
< >
norme norme
fonctionnelle prescriptive
ou ou
normes normes
internes externes
19
Tableau 2 : L'Imaginaire linguistique - normes objectives et subjectives
Ce tableau témoigne des refontes opérées en deux temps (1978 pour les normes
subjectives et 1982 pour les normes objectives).
20