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s
LE SAINT ESCLAVAGE.
On trouve aux mêmes adresses les Ouvrages
suivons du même Auteur :
Amour de Jésus-Christ au Saint-Sacrement de t'autet ,
i vot. in-32.
Avis cathotique touchant ta véritabte dévotion de ta
Bienheureuse Vierge , i vot. in-24-
Dévotion à ta sainte Trinité , i vot. in-24.
Dieu inconnu, i vol. iu-18.
Dieu seut , ou association aux saints Anges , i v. in-24.
Dieu présent partout , i vot. in-24.
Dévotion auxneuf chœurs des saints Anges, 1 vot. in->i8.
Gtoire à ta sainte Trinité , 1 vot. in-24.
Respect dû à ta sainteté des Egtises, 1 vot. in-24.
Saintes Voies de ta Croix, 1 vot. in-12.
Le Règne de Dieu dans t'oraison mentale, 1 vol. in-is.
Le Chrétien inconnu , ou idée de ta vraie grandeur du
Chrétien, 1 vot. in-ia.
LE SAINT ESCLAVAGE
DE L'ADMIRABLE
MÈRE DE DIEU.
NOUVELLE ÉDITION.
BSUOWÉQUE S. J.
les Fontaines
*Q . CHANT1U.Y
A LYON,
CHEZ PERISSE FRÈRES , LIBRAIRES,
BUE MEBCIBBE , 33.
A PARIS,
CHEZ MÉQUIGNON JUNIOR, LIBRAIRE,
>CE DES UBANDS-AU..USTI.N3, D." 9.
t823.
.. .
DIEU SEUL.
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VIERGE FIDÈLE.
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AU
LE SAINT ESCLAVAGE
DE L'ADMIRABLE
MÈRE DE DIEU.
PREMIER TRAITÉ.
CHAPITRE PREMIER.
CHAPITRE H.
CHAPITRE III.
CHAPITRE IV.
CHAPITRE V.
B 5
34 LE SAINT ESCLAVAGE.
CHAPITRE Vf.
CHAPITRE Til.
CHAPITRE VIII.
>
TRAITÉ I. CDAP. V1IÏ. 7§
chent de diminuer la dévotion de la Mère de
Dieu , comme si elle étoit contraire au premier
esprit du christianisme ; ou s'ils n'ont pas assez
de hardiesse pour s'y opposer ouvertement ,
prétendent que l'on y est trop appliqué. O mon
Dieu ! s'il y a quelque plainte à faire , c'est de
nos insensibilités : car nous pouvons dire , avec
bien de la justice, que nos plus grandes ar
deurs pour la Mère de Dieu ne sont que des
glaces , comparées*à la fervente dévotion que
les chrétiens des premiers siècles avoient pour
la sainte Vierge. Que ceux qui avancent té
mérairement que les louanges que l'on donne
en ces derniers temps à la Reine des anges sont
excessives , et que les expressions que l'on fait
de ses grandeurs sont trop fortes , entendent
les sentimens d'un concile parlant par la bou
che de celui qui y présidoit , le grand Saint
Cyrille: « C'est par vous (dit ce bienheureux
» patriarche , parlant devant tous les Pères ,
» et adressant ses paroles à la divine Marie);
» c'est par vous que la très-sainte Trinité est
» adorée et glorifiée; c'est par vous que le
» ciel est rempli d'allégresse , et que les anges
» et les archanges se réjouissent ; c'est par
» vous que les démons sont mis en déroute ,
» et que notre chute est réparée , et l'entrée
» du ciel ouverte aux hommes ; c'est par votre
» entremise que ceux qui sont aveuglés de l'i-
» dolâtrie, parviennent à la connoissance de
» la vérité , et , par le moyen de la foi , à la
4
ÏO M SAINT ESCLAVAGE*
i grâce du saint baptême ; c'est par votre fa-
» veur et assistance que le saint Evangile a été
> prêché, et l'Eglise fondée par toutes les ré-
> gions de la terre. » Apres des louanges si
sublimes , je laisse à considérer si l'on peut
parler -d'une manière plus glorieuse de cette
sainte cité de Dieu.
Le second concile de Nicée , composé de
trois cent cinquante prélats, où les légats du
Pape Adrien présidèrent , jugea qu'il étoit si
nécessaire d'établir fortement le culte de la
sainte Vierge, que les Pères qui y étoient as
semblés ordonnèrent que plusieurs miracles ar
rivés en sa faveur seroient insérés dans les ac
tes du concile.
Mais l'Eglise universelle, qui ne peut avoir
que des sentimens légitimes en toutes les pra
tiques de dévotion qu'elle approuve , que ne
fait-elle pas pour témoigner ses respects en
vers sa glorieuse Dame? Combien d'églises ca
thédrales dédiées à Dieu sous son nom par
toute la terre ! et se rencontre-t-il presque au
cune église où il n'y ait une chapelle en son
honneur ? Avec combien de religion honore-t-
elle tous ses mystères ; et combien de fêtes ins
tituées pour sa gloire! Et comme si toutes ces
solennités n'étoient pas suffisantes pour satis
faire sa dévotion , elle destine un jour toutes
les semaines, savoir le samedi , qu'elle consa-
sacre à sa mémoire : mais ce qui est merveil
leux, c'est que du jour de la Conception de
TRAITÉ I. CHAP. VIII. 8t
notre Seigneur elle en fait une fête de son im
maculée Mère ; et l'office et les hymnes du jour
sont en l'honneur de cette admirable princesse.
Elle appelle le jour de la Présentation de no
tre Sauveur, la fête de la Purification- de la
Vierge; et les hymnes du jour, dans le Bré
viaire romain, sont en l'honneur de cette sa
crée Vierge. Ce qui est encore de plus éton
nant , c'est que le jour de la Circoncision, qui
est l'octave de la solennité de la Naissance de
notre Maître , les antiennes de l'office sont de
la Vierge, aussi-bien que l'oraison du jour,
dans laquelle l'Eglise, pour commencer l'an
née , demande à Dieu de ressentir les secours
de sa puissante protection. Elle commence et
finit tous les offices par ses louanges et par
son invocation ; l'on ne publie les vérités de
l'Evangile que sous ses auspices ; les sermons
se commencent par la Salutation angélique.
Combien de confréries et d'associations éta
blies par tout le monde pour l'honorer !
Enfin , il faut finir la preuve de la dévotion
à la sainte Vierge , par la conduite de Dieu
même. Il est aisé de savoir qu'il n'y a point
de royaume ni de province où il ne se rencon
tre des lieux de dévotion de la Mère de Dieu ,
honorés de plusieurs miracles ; ce qui attire
un grand concours de peuples de tous côtés.
Or, il est certain que n'y ayant que Dieu seul
qui puisse faire des miracles, ceux qui s'opè
rent en ces saints lieux sont une preuve indu
D 5
8» LE SAINT ESCLAVAGE.
bitable que les véritables dévotions qui s'y pra
tiquent sont un effet de sa divine volonté.
C'est donc une illusion , que de blâmer le
concours des peuples qui viennent implorer le
secours de Dieu aux pieds des autels de sa glo
rieuse Mère , sous prétexte que cela pourroit
apporter quelque diminution au respect souve
rain qui est dû à Dieu ; car nous l'avons déjà
dit plusieurs fois, c'est Dieu qui est honoré en
tous les honneurs que l'on rend à la Reine du
Ciel y et si l'on demande pourquoi plutôt en
çette église qu'en une autre ? pourquoi tant de
monde prosterné devant cet autel , pendant
qu'il y a peu de personnes devant plusieurs au
tres ? Je répouds que cela arrive par la con
duite de Dieu , qui en inspire le mouvement :
et si l'on en veut des preuves, je dis que les
miracles en sont de si assurées , qu'il n'y a pas
lieu d'en douter. Si Ton réplique qu'il y auroit
plus de raison d'offrir ses prières devant les
autels de Notre-Seigneur , je déclare qu'il n'y
a point d'autel de Ta Vierge qui ne soit un au
tel de Jésus- Christ ; tout ce qui se fait pour la
gloire de la Mère ayant pour fin la gloire de
son Fils bien-aimé. Si l'on recherche de plus,
d'où vient que l'on ne s'adresse pas à Dieu im
médiatement pour l'ordinaire , la raison en est
évidente ; c'est parce qu'il a voulu que nous
allassions à lui par de certains moyens qu'il
nous a donnés, comme par la sainte Vierge.
Après tout , que ces personnes opposées à une
TBAITÉ I. CHAP. VIII. 85
dévotion si sainte s'en prennent à Dieu même;
car d'où vient que dans un royaume où Dieu
opère des miracles en des églises ou chapelles
de la sainte Vierge , non - seulement en toutes
les provinces , mais presque en tous les diocè
ses , et en plusieurs lieux d'un grand nombre
de diocèses , à peine trouvera-t-on quatre ou
cinq lieux de dévotion qui soient immédiate
ment en l'honneur de notre Sauveur, où il fasse
ces merveilles ?
Ce que nous avons remarqué en l'usage de
l'église universelle , est plus que suffisant pour
faire voir la solidité de la dévotion des parti
culiers, soit en la multitude des pratiques bien
réglées , soit dans les louanges qu'ils donnent h
celle qui ne peut jamais être assez louée. Et
de vrai , outre ce que nous avons dit ci-dessus,
c'est une chose bien remarquable de voir les
titres et les éloges que l'Eglise donne à la sainte
Vierge , et je puis assurer que l'on n'y peut
rien ajouter ; car que peut-on dire davantage ,
si l'on veut louer sa pureté , que de l'appeler
la Virginitéméme ? et c'est ce que fait l'Eglise.
Peut-on se servir de termes qui marquent da
vantage la confiance que nous devons avoir en
sa bonté, que de ceux dont l'Eglise use , l'ap
pelait notre vie , notre douceur , notre espé
rance? Peut-on avancer rien de plus glorieux,
que de soutenir qu'elle seule a détruit toutes
les hérésies dans le monde ? et c'est ce que
l'Eglise chante de cette incomparable Reine»
6
84 tB SAIKT ESCLAVAGE.
Je demande ici ce que ces personnes oppo
sées diroient d'un particulier, s'il avoit écrit,
s'il avoit prêché, que non-seulement quelques
hérésies , mais toutes les hérésies , non-seule
ment en une partie du monde, mais dans tout
le monde, ont été détruites par la seule Vierge.
Que ces personnes nous disent d'où vient que
les prédicateurs , au commencement de leurs
sermons , récitent la Salutation angélique et
non pas l'Oraison dominicale. D'où vient que
le chapelet de la Vierge est la prière commune
de presque tous les fidèles , et que la couronne
de Notre-Seigneur est une dévotion plus rare.
D'où vient que l'office de la divine sagesse est
récité par très-peu de personnes, pendant que
presque tous les séculiers qui sont adonnés à
1* prière récitent celui de Notre-Dame, et font
ce que font les églises au chœur quand on fait
de la férié , et l'ordre de saint Bernard tous les
jours, aussi-bien que celui des chartreux en
leur particulier , ordres recommandables pour
leur singulière piété envers la Mère de Dieu,
et dont toutes les' églises sont dédiées en son
honneur.
Sans doute que les mouvemens d'une dévo
tion si universelle en l'Eglise, et parmi les fi
dèles de l'Eglise , ne peuvent venir que de l'ins
piration de l'esprit de Dieu , comme les 6enti-
mens contraires ne peuvent venir que de l'es
prit du démon , qui craignant extrêmement la
puissance de celle qui lui a brisé la tête , et
TRAITÉ I. CHA.P. VIII. 85
qui lui ravit si souvent tant d'âmes , les tirant
du péché qui les engage dans sa malheureuse
captivité, fait tous ses efforts, et emploie toute
sa rage pour en diminuer les respects. Et c'est
ce qu'il fait en deux manières : la première , en
combattant ouvertement sa dévotion par les
hérétiques et les impies : la seconde, en tâchant
d'en détourner par d'autres suppôts, qui assu
rent d'un côté qu'ils n'en veulent pas au culte
de la Mère de Dieu ; mais qui d'autre part le
'diminuent par leurs artifices, en dissuadant les
pratiques qu'une véritable piété en peut ins
pirer.
J'avoue , et j'en demeure d'accord , que lors
qu'il s'y rencontre de la superstition , de l'igno
rance , ou quelque autre abus , il faut abolir
ces superstitions, il faut'instruire les ignorans,
il faut découvrir les abus et les détruire. C'est
même ce que j'ai tâché de faire en nos cam
pagnes , dans les visites que j'ai faites de nos
paroisses; et l'on ne peut assez recommander
aux pasteurs qu'ils enseignent à leurs peuples
la différence du culte qui est dû à Dieu, d'avec
celui qui est dû à sa virginale Mère , qui n'é
tant qu'une pure créature, doit s'humilier en
la présence de ses grandeurs infinies : et c'est
une chose déplorable de voir l'ignorance gros
sière de grand nombre de ces pauvres gens de
la campagne sur ce sujet , et dont les curés
rendront un compte terrible au jugement de
Dieu. Mais je soutiens qu'il faut bien prendre
86 LE SAINT ESCLAVAGE.
garde de ne pas ôter la dévotion , sous pré
texte des abus qui s'y rencontrent , et qu'il faut
détruire. Luther, au commencement, ne crioit
que contre les abus qui se commettoient tou
chant les indulgences; ensuite il combattit les
indulgences mêmes : c'est un piége que les fi
dèles catholiques doivent éviter.
Je dirai ici ce qui m'est arrivé faisant quel
ques entretiens de piété en une maison reli
gieuse , dont le confesseur me déclara qu'il en
avoit bien ôté les dévotions de la Vierge , et m'en
parluit comme s'il eût fait quelque grand coup
pour la gloire de Dieu. Je lus saisi d'étonne-
ment et d'horreur , voyant de mes yeux un
déréglement que j'aurois bien eu de la peine à
croire parmi les catholiques. 11 faut donc bien
prendre garde à ces artifices de l'enfer, et être
une bonne fois persuadés que quelque effort
que nous fassions pour honorerlu Mère deDieu,
jamais nous ne l'honorons assez : car, hélas !
que pouvons-nous faire, pauvres créatures que
nous sommes ?
Il faut donc avoir une haute estime de sa
dévotion , et de toutes les choses qui peuvent
y contribuer, quelque petites qu'elles soient :
et pour ce sujet il est bon d'avoir ses images,
les orner, y faire brûler des cierges , se met
tre de ses confréries , solenniser avec des res
pects particuliers les fêtes qui lui sont consa
crées , avoir une dévotion spéciale au samedi,
pratiquer des jeûnes et autres mortifications *
TRAITÉ I. CIIAP. IX. 87
tant intérieures qu'extérieures , avoir et lire de
bons livres qui traitent de ses grandeurs , par
ler et écouter volontiers parler de ses louanges,
enfin embrasser avec amour tous les moyen»
qui peuvent établir ou augmenter sa dévotion ,
autant que l'ordre de Dieu le demande de nous.
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CHAPITRE IX.
CHAPITRE X.
r
TRAITÉ I. CHAP. x. tùj
couvrir. Ce sont des ennemis qui ont toute la
rage que l'on peut avoir contre les hommes ,
qui sont terribles en leur malice , qui nous font
la guerre saus aucune trêve, dont les combats
durent autant que la vie, qui ne se lassent ja
mais de nous poursuivre , qui étant vaincus ,
reprennent de nouvelles forces pour nous atta-r
quer avec plus de vigueur ; et ces ennemis sont
invisibles, entrent sans difficulté dans les cham
bres les mieux fermées, nous suivent de tous
côtés et dans les villes et dans les campagnes ,
ne dorment jamais , et veillent continuellement
à notre ruine, souvent même nous font la plus
cruelle guerre, lorsque nous pensons être dans
la plus grande paix ; et leurs embûches sont
si cachées , que quelquefois où nous pensons
trouver plus de sûreté , c'est où il y a plus de
péril. Ils se glissent imperceptiblement dans
les choses qui d'elles-mêmes nous peuvent ser
vir davantage pour les vaincre ; ils se servent
de nos armes pour nous défaire , ils empoison
nent nos médecines, ils tournent contre nous
les secours qui nous sont donnés pour les com
battre , et enfin il y a bien peu de personne»
qui ne cèdent à leurs tentations, et ne suc
combent à leurs attaques.
Malheur à nous , qui vivons au milieu de-
tous ces dangers comme des gens qui sont en
assurance ! L'on a vu les étoiles du ciel tomber,
l'on a vu ceux qui conversoient avec les anges ,
éloignés dans leurs solitudes des occasions fà
6
10S LE SAINT ESCLATACI.
cheuses qui nous environnent , remplis des dons
de Dieu , et admirables en toutes sortes de ver
tus , hommes excellens et illustres en sainteté ,
se perdre et se damner , abattus et terrassés
par ces esprits apostats : et nous , qui sommes
tout plongés dans les sens, qui marchons tou
jours sur le bord du précipice , il semble que
nous n'avons rien à craindre. 0 qu'il est vrai
que notre aveuglement est une chose surpre
nante!
Quel moyen donc de se sauver des piégea
que nous tendent des ennemis si puissans ? Le
moyen le plus assuré est la dévotion à la Mère
de Dieu , qui est terrible comme une armée
rangée en bataille, pour ces ennemis de notre
salut. A la vérité, les démons craignent gran
dement les jeûnes , les veilles , les austerités ,
les pénitences , les prières; mais ils n'ont pas
laissé de perdre plusieurs âmes qui avoient
excellé en ctvs choses : au lieu qu'il n'a jamais
été dit , ni ouï, qu'une personne véritablement
dévote à la très sainte Vierge , ait été perdue.
De là vient qu'il n'y a rien qu'ils redoutent
davantage, que le culte de la Mère de Dieu.
Aussi voyons-nous qu'ils portent étrangement
leurs suppôts , comme les hérétiques, et les
mauvais catholiques , à le détruire , soit ouver.
tement , ou indirectement par tles prétextes
spécieux. Ils savent qu'il est aisé de jeter de
la corruption dans l'intérieur de ceux qui écla
tent le plus par les œuvres extérieures , comme
TBAITÈ I. CHAP. x. » 1 Of)
par les aumônes, l'assistance des malades., les
austérités corporelles, et choses semblables:
ils n'ignorent pas que les âmes les plus solide
ment établies en la vertu , sont sujettes à l'in
constance ; et l'expérience ne les rend que trop
savans sur ce sujet : mais ils connoissent que la
protection de la Mère de Dieu ne manquera
jamais à ceux qui implorent ses miséricordes,
retirant du vice ceux qui y sont plongés, et
augmentant les grâces à ceux qui vivent dans
l'observance des commandemens de son Fils;
obtenant à tous la grâce finale et le don d'une
précieuse mort. « Ne sais-tu pas ( disoit notre
Seigneur à un démon qui se plaignoit à lui de
ce que les plus grands pécheurs lui étoient ra
vis par le crédit de la sainte Vierge ) , t que
» ma mère peut tout en mon empire , et que
-» tout ce qu'elle veut est fait » ? Ceci est rap
porté dans les révélations de sainte Brigitte.
Les Pères du second concile de Nicée ont
jugé à propos d'instruire tous les fidèles de
l'Eglise du grand pouvoir de la mère de Dieu
sur las Démons , par les exemples qu'ils ont fait
insérer dans les actes du concile. Il est donc
rapporté dans l'action quatrième , qu'un soli
taire étant extraordinairemeut" tourmenté des
tentations du malin esprit, comme un jour.il
étoit accablé d'ennui , le démon lui apparut , et
lui promit qu'il cesseroit de le tenter, pourvu
qu'il cessât d'honorer, et de faire quelques dé
votions devant une image de Marie mère de
ItO LE SAINT ESCLAVAGE.
Jésus. Il est à remarquer qu'il fit promettre in
considérément par serment à l'ermite de te
nir la chose secrète : ce qui marque assez qu'il
avoit peur que l'on connût une chose très-vé
ritable , que les démons redoutent plus la con
fiance sincère à la sainte Vierge , que toutes les
autres choses dont ils pourroient même espé
rer plus d'avantage.
11 est rapporté dans la même action , qu'un
homme possédé du démon depuis plusieurs an
nées , fut délivré à l'occasion d'une image de
la Reine du ciel, qui fut mise dans le lieu où
il demeurait; le démon jetant des hurlemens
contre cette image, et avouant qu'il étoit con
traint de sortir par sa vertu , ne pouvant de
meurer dans un lieu où seroit honorée l'image
de Marie, Vierge, et mère de Jésus-Christ.
Un des religieux de l'humble saint François
entendoit bien cette vérité , lorsque dans une
conférence qui se fit après la mort de ce grand
saint , où l'on s'entretenoit de divers moyens
de résister aux démons et à leurs tentations , it
dit que sa pratique étoit d'avoir recours à la
mère de Dieu , de mettre sa confiance en son
extrême bonté, et de ne se lasser jamais d'im
plorer son secours.
Comme le moment de la mort est celui du
quel dépend l'éternité de notre salut . ou de
notre porte; c'est en ce temps que la Reine de
miséricorde fait ressentir principalement les ef
fets de sa charité. Le docteur séraphique assure
TRAITÉ I. CHA P. x. ttt
qu'elle envoie saint Michel Archange pour dé
fendre et assister ses dévots à la mort , et après
la mort. Or il seroit bien difficile d'exprimer
ici combien est douce et puissante à cet instant
terrible la protection des saints anges , et parti
culièrement de saint Michel , le prince de ces
glorieux esprits. C'est un de nos malheurs , de
voir tant de glaces dans la plupart des cœurs
pour ces grands de l'Empyrée , qui ne sont ani
més et qui ne vivent que des plus vives flam
mes de l'amour divin. Je tiendrons ma vie bien
employée, si je pouvois contribuera établir et
réveiller la dévotion de ces aimables esprits , et
je m'estimerois heureux de pouvoir mourir plu
sieurs fois pour leur gloire.
Notre bonne maîtresse ne se contente pas de
nous défendre et soutenir en ce passage , où se
doit décider l'affaire de notre bonheur ou mal
heur éternel ; mais elle fait mille faveurs à ses
favoris. Un des premiers religieux servîtes étant
sur le peint de mourir, on entendit la voix cé
leste de cette Reine du ciel , qui lui dit : « O
» mon enfant I parce que vous avez tout quitté
» pour l'amour de mou Fils, et avez suivi ses
» conseils , vous posséderez tout en jouissant
» de la vie éternelle. » A ces paroles , qui fu
rent ouïes de tous les religieux , dont les es
prits furent saisis d'une sainte frayeur , toute
la compagnie gardant un grand" silence , ce fi
dèle serviteur de Marie expira ; et pour lors on
entendit derechef la. voix miraculeuse de la
119 LE SAINT KSCLAVAGE.
bienheureuse Vierge, qui disoit : t Venez, 8
» les saints bien-aimés de mon Fils , allez au
» devant, glorieux esprits du ciel , tenez com-
» pagnie par honneur à l'âme de celui qui m'a
» servie avec tant de fidélité pendant les jours
» de son pélerinage : et vous , ô mes très-chers
» amis et serviteurs , recevez les dépouilles de
» son corps qu'il vous laisse , et ayez soin de
» l'ensevelir avec tous les respects qu'il mé-
» rite. » C'est ainsi que sont honorés les servi
teurs de cette grande Reine : c'est ainsi qu'elle
reud leur mort précieuse aux yeux de Dieu ,
des anges et des hommes.
Le bienheureux Marin , dont la mémoire
sera à jamais glorieuse , pour la qualité d'es
clave de la Reine du ciel et de la terre , qu'il a
portée avec la ferveur d'un zèle incomparable ,
étant réduit à l'extrémité d'une maladie de poi
trine et de poumon, fut vu un matin parler à
quelque personne que l'on ne voynit pas , dont
la présence le combloit d'une joie extraordi
naire ; puis se tournant vers les assistans , il
leur dit : * Levez-vous, voici la reine du ciel,
» rendez vos respects à ma bonne maîtresse.
Et adressant la parole à la sainte Vierge , il
s'écria : « O ma bonne Dame , d'où vient que
> vous voulez bien visiter votre pauvre servi-
» teur ? Bénissez-moi , et ne permettez pas que
» celui-là aille dans les ténèbres de l'éternité,
» que vous avez honoré des lumières de vo-
» tre douce présence. » En ce moment son frère
TRAITÉ I. CHA.P. X. 1 t3
Damien revenant de l'église , où il avoit récité
les heures canoniales de la nuit , et lui deman
dant l'état de sa santé , il lui répondit , qu'il
étoit certain de sa mort ; et dit ensuite : • O
» mon cher frère , nous avons ici des domesti-
> ques bien peu civils. » Et se plaignant à un
homme de considération qui étoit présent, de
la même incivilité, à raison qu'il ne s'étoit pas
levé à l'arrivée de la reine du paradis; cela lui
donna occasion de douter si ce n'étoit point
quelque foiblesse d'imagination qui le fit parler
de la sorte. Ce que voyant le malade , il repartit:
• Ne pensez pas que ce que j'avance soit une
» illusion de l'imagination; c'est une pure vé-
t rité : l'on sait assez qu'ordinairement les ma-
* ladies du poumon laissent le jugement libre:
» non , il n'y a point à douter , la mère de no-
» tre Sauveur , accompagnée des saints anges,
» m'est venu visiter : elle s'est montrée à son
» pauvre serviteur : elle m'a donné sa sainte bé-
» nédiction. » Tout ceci est rapporté bien au
long par le saint cardinal Pierre Damien , frère
du bienheureux Marin , en l'une de ses épîtres.
Ils avoient encore un autre frère archiprêtre ,
qui s'appeloit Damien : et c'est de lui qu'il est
parlé ci-dessus.
Les soins que la mère de Dieu prend de ses
dévots , ne se terminent pas à la vie présente ,
et ne finissent pas à la mort. Cette mère , qui
n'a que des entrailles de miséricorde , ne peut
les oublier en quelque état qu'ils soient , et en
It4 LE SAINT ESCLAVAGE.
quelque lieu qu'ils puissent être. Elle est tou
jours pour eux une uière d'amour ; elle leur
rend des assistances continuelles pendant tout*
leur vie; elle les soutient à la mort, elle les
défend au jugement, et elle leur donne des se
cours incroyables dans les feux et les flammes
du purgatoire, tantôt les consolant par fe mi
nistère des saints anges , tantôt leur appliquant
les bonnes œuvres dont on lui cède la disposi
tion , ou procurant aux vivans de forts mouve-
niens de prier et de satisfaire pour eux , et
quelquefois obtenant de son Fils bien-aimé la
grâce pour ces pauvres captifs, et la rémission
de leurs peines. Notre Seigneur a fait connot-
tre en plusieurs rencontres , qu'il délivre du
purgatoire grand nombre d'âmes en sa faveur;
et il a voulu que quelques-unes de ces âmes
heureusement délivrées fissent savoir en notre
terre , qu'en de certains jours de grandes fêtes,
comme autant de jours de ses triomphes , elle
donnoit la liberté à ceux qui sont détenus par
la justice divine en ces sombres prisons , et les
conduisoit en la gloire éternelle.
Marie est donc la mère de nos plus douces
espérances; c'est en elle, comme le chante
l'Eglise , que se rencontrent tous les sujets d'es
pérer le salut et la vie éternelle; et l'on peut
appliquer avec bien de la justice à sa véritable
dévotion ces paroles de l'Ecriture : Toutes sor
tes de biens me sont venus avec elle. L'âme qui
l'honore sincèrement n'a rien à craindre , et a
TRAITÉ I. CHAP. x. I 15
tout sujet d'espérer : ses dévots doivent se déli
vrer de leurs scrupules, et mettre bas toutes
leurs inquiétudes. Pourquoi leur âme est-elle
triste ? pourquoi est elle troublée ? Qu'ils es
pèrent en ses miséricordes , et qu'ils sachent ce
que dit saint Anselme , qu'il n'est pas possible
de périr sous son aimable protection : qu'ils
sachent , selon le témoignage de l'Eglise même,
que son esprit est plus doux que le miel , et qu'il
n'y a que des grâces et des faveurs à attendre
dans son service. C'est un avant-goût o!e la fé
licité du ciel , que d'être à elle; c'eit commen
cer dès cette vie la vie des bienheureux. Aussi
est-elle appelée par les saints , un paradis de
délices, le paradis de la terre. Et saint Jean
Damascène la nomme une mer de joie.
Mais si tous ceux qui ont pour elle une vé
ritable dévotion, peuvent légitimement aspirer
à ces priviléges , ses esclaves y ont des droits
tout particuliers ; et l'on peut dire d'eux ces
paroles de l'Evangile, Ce sont des derniers qui
deviennent les premiers ; des derniers, parles
fers dont ils se chargent , par la servitude qu'il»
professent, qui méritent par leurs abaissement,
d'être élevés aux premières places de la gloire.
Autrefois Aristote enseignoit que le serviteur
étoit une partie animée du maître : mais le
Saint-Esprit , en l'Ecclésiastique , nous apprend
que lorsqu'il est fidèle, il doit être traité en
frère , et comme notre propre âme. Non , nous
n'avons point à douter que la divine Marie ne
t iG thaitJs i. chap. X.
soit la meilleure maîtresse qui fut et qui sera
jamais , et qu'elle ne nous considère comme la
Saint Espr it son époux le demande.
Nous voilà donc bienheureux , et infiniment
bienheureux, et les sujets que nous avons de
nous consoler et de nous réjouir, peuvent bien
être admirés ; mais c'est ce qu'on ne peut ex
primer. Ce que nous pouvons dire , est qu'il est
bien doux de vivre au service de Marie , et en
core plus doux d'y mourir. O mon Dieu, quelle
consolation à la m^rt , de l'avoir servie avec
fidélité I Et quel étonneuient dans l'éternité,
des biens , priviléges et faveurs incroyables qui
sont attachés à sa véritable dévotion !
LE SAINT ESCLAVAGE
DE L'ADMIRABLE
MÈRE DE DIEU.
SECOND TRAITÉ.
CHAPITRE PREMIER.
CHAPITRE H.
CHAPITRE III.
CHAPITRE IV,
CHAPITRE V.
De ta foi de la très-sainte fierge.
CHAPITRE VI.
CHAPITRE VII. -
CHAPiTRE VIII.
1
240 M SAINT ESCLAVAGE.
vrons, si nous savons la vanité de nos pensées,
et de nos paroles , pourquoi nous trompons-
nous nous-mêmes , agissant d'une manière con
traire à ce que nous pensons ?
Celui donc qui est véritablement humble,
demeure toujours dans son néant , et il parle et
agit, ne se retirant jamais de son rien. De là
vient que premièrement il ne s'estime et ne se
préfère jamais a aucune créature , mais il se
voit au-dessous de toutes. C'étoient les senti-
mens du divin Paul, qui se qualifioit le pre
mier des pécheurs : c'étoient les pensées du
grand saint François , qui se reconnoissoitpour
le plus grand pécheur du monde. En cet état
l'on ne s'occupe pas tant d'une multitude de
raisonnemens que le propre esprit donne ; mais
l'on porte une impression de grâce qui fait en
trer dans ces sentîmens , qui est fondée sur
quelque chose de bien plus solide que les rai
sonnemens de nos petits esprits. J'ai connu à
Paris un vénérable vieillard , qui marchant dans
les rues alloit le long du ruisseau, quoiqu'avec
incommodité , dans la vue dont il étoit pénétré,
qu'il le devoit céder à tout le monde , et sa
mettre au-dessous de toute créature.
Le saint homme le Père de Condren faisant
voyage , se trouva un jour obligé de coucher dans
un li» u où les chiens passoient la nuit ; et ayant
pris un peu de paille qu'il y trouva, pour se
reposer , comme il s'aperçut que cette paille
servoit à un chien qui étoit auprès de lui , il la
TRAITÉ II. CHAP. VIII. 221
quitta pour la lui laisser, dans la vue que ce
grand serviteur de Dieu avoit , qu'il étoit au-
dessous des chiens par ses imperfections , qui
assurément étoient bien légères , puisqu'ayant
l'usage de raison dès l'âge de deux ou trois ans,
il avoit été tellement appliqué à Dieu seul ,
qu'une personne ayant trouvé un papier où il
avoit écrit une confession de plusieurs années
qu'il avoit passées à la campagne à recevoir les
compagnies , et dans les divertissemens de la
chasse, y étant obligé par ses parens, étant
encore bien jeune , et cette personne en ayant
lu le commencement par mégarde , ne sachant
ce que c'étoit, elle y trouva qu'il s'accusoit
d'avoir perdu la présence de Dieu tout au plus
neuf ou dix fois durant plusieurs années , mt
dans des occupations si peu propres au recueil
lement. Ce sont à la vérité des prodiges de la
grâce : mais si ces personnes qui sont les mi
racles du christianisme se mettent si bas , ces
personnes qui doivent occuper les premières
places d'un empire éternel ; où se mettront
celles dont les péchés méritent le dernier lieu
de l'enfer ?
Le bienheureux François de Borgia disoit,
qu'il ne pouvoit trouver de place assez basse,
après qu'un Dieu s'étoit mis aux pieds de Judas.
Ajoutons à cette pensée, et qu'il s'est laissé
porter par le Démon. Disons encore , et que
dans le très-saint sacrement il s'humilie sous
une apparence de pain et de vin , et est exposé
3
2sQ IE SAINT ESCLAVAGE.
à la rage des impies. Il faut que tout esprit
s'arrête dans ces vues terribles , pour se perdre
sans ressource dans des abîmes anéantissans.
Plus de place donc pour nous dans le monde ,
plus de place dans aucun esprit pour y trouver
la moindre estime, plus de place dans aucun
cœur pour y trouver la moindre affection:
Dieu seul , Dieu seul , Dieu seul': ou si nous y
avons quelque place, que ce soit pour y être
crucifiés par les mépris et les opprobres , pour
y être anéantis par le rebut des créatures. Notre
lieu est l'enfer , nous ne sommes dignes que de
la colère de Dieu , et de sa colère éternelle.
Cette vérité qui estcertaine , pénétrant l'âme
du véritable humble , il ne se plaint jamais , il
ne pense pas qu'on lui fesse jamais tort : il
croit , quelque mal qu'on lui procure , qu'il est
toujours trop bien traité. Ainsi , il ne regarde
jamais ses plus cruels ennemis que comme des
gens qui lui font grâce. Et de vrai , si un homme
qui seroit condamné à être brûlé, n'étoit puni
que d'un soufiet , auroit-il sujet de se plaindre?
Si donc nous qui méritons des confusions infi
nies, souffrons quelques affronts qui passent
Jbientôt , devons-nous nous en étonner ? N'est-
ce pas une grâce très-grande de souffrir dans le
temps , quelques peines que nous puissions
avoir , et quand elles dureroient toute notre vie,
pour éviter les peines de l'enfer qui n'auront
jamais de fin ? Y a-t-il quelque comparaison
entre les souffrances qui nous peuvent arriver
TRAITÉ II. CHAP. VIII. 223
de la part des hommes , quelque grandes qu'elles
puissent être , et celles que nous méritons d'en
durer pour jamais des démons ? Tous les totrr-
mens de la vie présente ont-ils quelque rap
port avec ceux de l'éternité ? Je dis donc , que
quand l'on viendroit nous prendre pour nous
faire mourir sur un gibet , nous n'aurions pas
sujet de murmurer > mais nous devrions adorer
avec soumission la justice divine : et c'est ce
que nous devons faire dans tous les maux qui
nous arrivent , soit de la part de Dieu immé
diatement , soit de la part des hommes et des
démons par la conduite de la divine providence,
qui s'en sert pour notre bien et pour sa gloire.
Enfin , le véritable humble n'a pas seulement
de très-bas sentimens de lui-même , mais il est
bien aise que les autres aient les mêmes pensées
de lui : ainsi , s'il voit sa misère, il bénit Dieu
lorsqu'elle est connue des autres. De plus , il
se réjouit lorsqu'on lui impute des maux qu'il
n'a pas faits , à l'exemple de son divin Maître,
qui étant l'innocence même, non-seulement a
passé pour crimrnel , mais a été jugé et con
damné à la mort ignominieuse de la croix ; et
à l'exemple de sa bonne maîtresse, qui étant la
plus pure créature qui fut jamais , n'a pas laissé
de subir la loi de la purification , qui étoit or
donnée aux femmes dans l'ancienne loi.
4
St4 U SAINT ESCLAVAGE-
CHAPITRE IX.
CHAPITRE X.
CHAPITRE XI.
CHAPITRE XII.
CHAPITRE XIIL
CHAPITRE XIV.
6
300 LE 9AIXT ESCLAVAGE-
CHAPITRE XV.
CHAPITRE XVI.
CHAPITRE XVII.
CHAPITRE XVIII.
-
TRAITÉ II. CUAP. xVIII. $jS
i servir de lui , et ainsi nous perdons beau-
> coup au gain que nous faisions. > L'homme
de Dieu l'ayant interrogé ensuite de la vertu
du saint Rosaire , ce démon , après avoir bien
Crié et hurlé, assura que saint Dominique le
faisoit brûler dans des flammes ardentes , et le
garrottoit avec des chaînes de feu , pour l'obli
ger de dire la vérité. Enfin , il avoua qu'elle
étoit telle que le saint l'avoit prêchée, et que
de grands malheurs arriveroient à ceux qui s'y
rendroient incrédules. Il ajouta que tous les
démons haïssoient Dominique , et qu'ils le
craignoient grandement , à cause de son orai
son et de sa vie austère et exemplaire, et parce
qu'il montroit le chemin du ciel par ses exem
ples et ses paroles. Mais que tout l'enfer avoit
conspiré , et qu'il avoit envoyé les plus forts et
les plus malicieux esprits pour le surprendre lui
et les siens. Le saint homme continuant h in
terroger ce possédé , les démons voulurent sor
tir lorsqu'ils se virent pressés de dire de quelle
condition parmi les chrétiens il y en avoit plus
de damnés. Enfin , étant contraints de parler,
ils dirent : i Nous avons bien des prélats en
» enfer, grand nombre de princes et princes-
» ses, et moins de personnes pauvres et de
» basse condition , beaucoup de marchands
» et de bourgeois par l'injustice et la volup-
» té. » Mais de prêtres, dit le Saint , en avez-
vous plusieurs? « Nous en avons une infinité,
* répliquèrent les démons , et de véritables
3-6 LE SAINT ESCLAVAGE.
* religieux pas un seul , mais un grand nom-
» bre de ceux qui n'observent pas leur règle.»
Saint Dominique entendit par ces véritables
religieux ceux de son ordre et de l'ordre de
saint François , qui pour lors étoient dans les
premières ferveurs que le Saint-Esprit leur
commmiiquoit. Mais ces démons déclarèrent
que dans la suite des temps ils auroieut en suf
fisance des religieux de ces ordres , lorsqu'ils
négligeaient de garder leurs statuts.
L'homme de Dieu leur demanda encore
quel étoit le saint qu'ils craignoient davanta
ge , et que les fidèles étoient plus obligés. d'ai
mer et servir. Les démons commencèrent pour
lors à hurler si terriblement , que la plupart
des personnes qui étoient présentes tombèrent
par terre saisies d'une extraordinaire frayeur.
Les démons crioient : Dominique , aie pitié de
nous , qu'il te suffise que nous soyons tourmen
tés par nos peines de l'enfer, pourquoi viens-
tu nous faire souffrir? Ils le prioient de ne les
pas contraindre à répondre à cette demande,
parce qu'ils prévoyoient que plusieurs person
nes en feroient un grand profit. Saint Domini
que voyant qu'ils ne vouloient pas répondre ,
se prosterne par terre , invoque le secours de
la Mère de Dieu par le sakit Rosaire. Les dé
mons cependant le conjuraient par la Passion
du Fils de Dieu , par les mérites de sa Mere,
par les suffrages de l'Eglise , de ne les pas con
traindre a parler sur ce sujet , et que les saints
TRAITfi II. C11AP. xVIII. 877
anges lui révéleroient ce qu'il demandoit ,
quand il le souhaiteroit. Le saint taisant re
doubler les prières la Reine du ciel , cent
anges parurent, et la très-sainte Vierge au mi
lieu de tous ces esprits bienheureux, qui ayant
touché le possédé du bout d'une verge qu'elle
tenoit en sa très-pure main , commanda aux
démons de répondre. On entendit pour lors les
airs retentir de ces paroles qui sortoient de. la
bouche du possédé : « O notre ennemie , notre
» confusion , voie du ciel infaillible , c'est toi
» qui épuises l'enfer. Ecoutez donc, crioient
» ces esprits malheureux , c'est elle qui réduit
» tous nos efforts au néant , comme le soleil
» dissipe les ténèbres ; c'est elle qui découvre
» toutes nos finesses : nous confessons que per-
» sonne ne se damne de tous ceux qui persé-
» vèrent en son service : un seul de ses soupirs
» a plus de force que toutes les prières des
» saints, et nous la craignons plus que tous
1 les bienheureux du ciel. Plusieurs l'invo-
» quant à la mort , sont sauvés. Sans elle nous
» aurions fait perdre la foi à la plupart de ceux
1 qui la conservent encore ; elle obtiendra le
» paradis à ceux qui lui seront véritablement
» dévots, et qui s'acquitteront dignement du
t saint Rosaire. » Après cela , le fidèle servi
teur de la glorieuse Vierge, saint Dominique ,
fit réciter le saint Rosaire à haute voix et po
sément par tout le peuple , et les démons sor
toient en troupes du corps de ce malheureux ,
5; 8 LB SAINT ESCLAVAGE.
paroissant comme des charbons de feu. Cet
exemple admirable, tiré des annales ecclésias
tiques , fait bien voir le pouvoir des prières
adressées à l'auguste Souveraine du Paradis.
Mais c'est tout dire que d'assurer que le Tout-
Puissant , qui est son Fils , ne lui peut rien re
fuser.
t\m\\uuumun\uuuuuu\uuuwt\\u\u\1
CHAPITRE XIX.
CHAPITRE XX.
Avoir une dévotion particulière à saint Jean
l'Evangéliste.
CHAPITRE XXI.
a
^12 LE SAINT ESCLAVAGE.
CHAPITRE XXII.
ORAISON
Oremus.
ORAISON
DIEU SEUL.
TABLE DES CHAPITRES,
PREMIER TRAITÉ.
SECOND TRAITE.
AUTRE APPROBATION.
J'ai lu par ordre de Monseigneur te Chance
lier, Le saint Esclavage de l'admirable Mère
de Dieu. Tout y respire l'amour et te zète que
l'Auteur a eus pour la sainte Vierge. A Paris, ce
quinze octobre mil sept cent quarante-neuf.
J. Tamponet,
Docteur et ancien Syndic de /a Facults
de Théotogie de Paris.