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La vulgarisation à la (re)découverte des acteurs

Conference Paper · July 2018

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Nour Sellamna

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La vulgarisation à la (re)découverte des
acteurs1
Nour-Eddine Sellamna

Communication faite à l’Atelier de réflexivité professionnelle en vue d’une relecture des


offres de formation en développement, Université Ouaga 1 Professeur Joseph Ki Zerbo, 27 et
28 Octobre 2017, Ouagadougou

Le statut de la vulgarisation agricole dans le monde francophone a longtemps été celui


d’activité allant de soi, que très peu de chercheurs ont considéré comme domaine d’étude
en soi2, encore moins comme une “science”. Alors que les “diffusion studies” sont
anciennes dans le monde anglophone, en particulier aux Etats-Unis, il est intéressant de
noter l’émergence tardive en milieu francophone de ce type d’études, et d’une façon
générale, de l’étude de la vulgarisation. Une raison à cet intérêt nouveau en a sans aucun
doute été la généralisation du système de Training and Visit dans les pays francophones
sous l’impulsion de la Banque Mondiale, forçant les chercheurs francophones à analyser son
impact. Il est tout aussi intéressant de noter que cet intérêt s’est manifesté dans les années
80, à un moment où, précisément, ce système montrait déjà toutes ses limites. Son passage
du contexte asiatique dans des pays (Inde, Pakistan, Philippines, Indonésie) dont les
conditions de base -potentiel agricole, infrastructures sociales et économiques, type de
productions, acquis de la recherche-, ont permis un succès certain de la vulgarisation, à un
contexte africain (en particulier Ouest-Africain) où les tentatives de dynamisation des
activités de vulgarisation se sont heurtées aux faiblesses de ces conditions, a sans doute
contribué à ce qu’on pourrait appeler un “traumatisme post-révolution verte”.

Ce papier passe en revue les aspects méthodologiques et théoriques de la « crise » de la


vulgarisation ces 50 dernières années. Il présentera d’abord les termes de cette crise, les
changements de concepts auxquels elle a donné lieu et l’évolution des cadres analytiques
avant de discuter les tentatives actuelles de renouveler la vulgarisation, en particulier
l’émergence de projets de mise en œuvre des services de conseil agricole pour remplacer le
système de vulgarisation ancien.

1. La crise de la vulgarisation

Après ses succès asiatiques dans les années 70, il est devenu aujourd’hui commun de dire

1 Ce texte est une version largement remaniée, actualisée et étendue d’un papier écrit à l’origine pour le Bulletin
publié par le Département de Vulgarisation et de Développement Rural de l’Université de Reading en Grande
Bretagne, comme introduction d’un numéro spécial consacré aux pratiques novatrices de vulgarisation. Le
Bulletin ayant été fermé pour raisons budgétaires, le numéro spécial n’a pas été publié.
2 Il n’est qu’à voir, par exemple, la faiblesse de l’enseignement de la vulgarisation dans les institutions de
formation des pays francophones et la rareté de départements de type universitaire spécialisés.
1
de la vulgarisation qu’elle est en crise. Cette crise s’accompagne de questionnements sur les
fonctions, les buts et les méthodes d’intervention de la vulgarisation. Cette crise est
d’autant plus intéressante à relever qu’elle concerne une institution relativement récente. Si
l’institution de vulgarisation est née au siècle dernier en Europe, elle n’a connu son essor
dans le monde qu’après la fin de la 2ème guerre mondiale. Dans les pays en voie de
développement, plus de 50% des institutions n’ont vu le jour que, au mieux, dans les 50
dernières années, portées par les objectifs nationaux d’autosuffisance alimentaire et
soutenues par des investissements internationaux massifs dans la recherche et la
vulgarisation (Swanson, 1989).

Crise conceptuelle d’abord: sans tomber dans le recours classique au dictionnaire et


à l’analyse comparative de définitions, quel est le rôle de la vulgarisation? Sa fonction
principale est-elle de faciliter ou d’encadrer la “diffusion des innovations”? Si c’est le cas,
pourquoi la question se pose-t-elle aujourd’hui avec plus d’acuité? Serait-ce que les
innovations se diffusent moins de nos jours? Ou que le manque d’innovation est perçu avec
plus d’urgence aujourd’hui qu’il ne l’était il y a trente ans? A un niveau plus académique, la
vulgarisation est-elle une science? Une discipline enseignable? En somme, peut-on
apprendre à provoquer l’innovation?
Crise institutionnelle aussi, depuis que d’autres “empiètent” sur les activités qui lui
étaient traditionnellement dévolues: les agriculteurs eux-mêmes depuis toujours, mais aussi
les commerçants, les organismes de crédit et, surtout, la recherche. Si les vulgarisateurs ont
depuis longtemps intégré dans leur travail des activités d’expérimentation, les chercheurs
ont pour leur part, plus récemment, développé des approches (Recherche-Développement,
Farming Systems Research and Extension, Développement Participatif des Technologies,
etc...) qui les amènent à des activités de vulgarisation. D’autre part, la vulgarisation est
devenue un objet de recherche, pour les chercheurs comme pour les vulgarisateurs eux-
mêmes. La frontière entre une recherche “expansionniste”, dont les nouvelles approches
tentent d’intégrer les problèmes d’adoption de ses résultats, et la vulgarisation, qui par des
activités de recherche tente de faire des diagnostics des milieux dans lesquels elle intervient
et de définir les modalités de son intervention, est donc devenue plus floue.

Mais la recherche n’est pas la seule institution qui dispute à la vulgarisation ses fonctions, et
les moyens de son action. Même si une majorité de pays en voie de développement
possèdent une ou plusieurs organisations nationales de vulgarisation, le contexte
institutionnel reste très diversifié, en Afrique comme ailleurs. Les ONGs, dont le rôle de plus
en plus important dans l’interface entre recherche et développement (Farrington et
Bebbington, 1994) présente un défi sur le plan des stratégies et des méthodes, se posent
aussi comme alternatives. Comme Röling (1995) le précise, la vulgarisation ne peut plus être
conçue comme le seul travail de vulgarisateurs attitrés mais comme la notion plus large de
toutes les “opérations de communication requises pour le développement agricole”. Dans
ce contexte de fonction diffuse, la fonction créant l’organe, quelle justification y-a-t-il à
maintenir un organe spécialisé là où il ne fait plus la preuve de sa compétence dans
l’accomplissement de sa fonction? Si la vulgarisation en tant qu’activité n’est pas remise en
question (comment pourrait-elle l’être d’ailleurs?), les ajustements structurels auxquels
sont soumises les économies nationales (compression des budgets, retraits des états,

2
libéralisation) offrent l’occasion de soumettre l’institution de vulgarisation à toutes les
critiques.

Crise des approches surtout, face aux échecs répétés des modèles d’intervention.
Ces modèles, on l’oublie trop souvent, reflètent la pensée dominante de l’époque en
matière de théories du développement: diffusion, dépendance, développement endogène,
conscientisation, participation paysanne... Dans ce sens-là, la crise de la vulgarisation reflète
celle de théories générales dont elle n’est souvent que le modèle opérationnel, et un
historique rapide de l’évolution de la vulgarisation permettrait de mettre en relief le
parallélisme de leur changement de philosophie: du capital physique au capital humain, de
l’accent sur le contenu à l’accent sur les processus, d’une orientation technologique à une
orientation sociale, d’une démarche centrée sur les individus à une démarche
communautaire, d’une analyse du comportement de l’agriculteur isolé à une analyse
systémique, de modèles hypothétiques d’un agriculteur dont le comportement est
prédéterminé par une motivation économique, sociale ou culturelle à un modèle plus
nuancé qui lui laisse une marge de manœuvre et une “stratégie”. Ainsi, d’obstacle passif, et
quelque peu entêté, à l’adoption de l’innovation mise au point par le chercheur et transmise
par le vulgarisateur, l’agriculteur devient l’acteur principal, et quelque peu héroïque, de
l’innovation. Le vulgarisateur, lui, voit son rôle et ses modes de fonctionnement redéfinis
selon cette évolution: de celui d’ ”agent de changement”, acteur offensif et véritable
missionnaire de la modernité dans les campagnes (modernité d’abord technologique, faut-il
le rappeler), à celui d’acteur humble et secondaire, “facilitateur”, “accoucheur” de
l’inventivité des agriculteurs. Il doit aussi, parallèlement, prendre en charge les “problèmes”
de développement et se mettre à la hauteur des “enjeux” définis par les institutions et les
exigences des bailleurs de fonds: relations de genre, gestion des ressources naturelles,
savoirs paysans, innovation locale.

Ce changement vers une perspective “orientée vers l’acteur” puise ses concepts et sa base
théorique dans des disciplines telles que la psychologie cognitive, l’anthropologie, la
sociologie des organisations, le marketing, voire le management des entreprises modernes.
La diversité des références théoriques, si elle est source de richesse dans la réflexion, n’est
cependant pas sans contradictions dans les analyses et dans les propositions de modèles
alternatifs. Un bref rappel de ce changement de perspectives permet de s’en rendre
compte.

2. De la technologie à l’acteur

L’émergence du concept de l’agriculteur comme acteur central de l’innovation est


étroitement liée à la remise en cause de la vision technologique longtemps prédominante
dans le développement et de son corollaire, le modèle linéaire de “transfert de
technologie”, base de la philosophie de la vulgarisation. Elle va de pair avec celle du modèle
classique de diffusion des innovations, dont les critiques sont connues. D’abord, tendance à
la réification de la technologie prise comme une donnée non-problématique en elle-même,
et donc “pathologisation” du comportement de l’agriculteur qui ne l’adopte pas. Une
lecture politique du transfert de technologie pose aussi la question des valeurs et des

3
rapports de pouvoir véhiculés par la technologie, c’est à dire la remise en cause de sa
neutralité. Vision simpliste du processus d’innovation ensuite: on considère, si l’on peut
dire, que la technologie “ça passe ou ça casse”, alors qu’elle peut être décomposée,
transformée, réinterprétée, adoptée partiellement. Surtout, l’innovation est considérée
comme un fait individuel, dans sa conception et dans sa diffusion: les effets (imprévisibles et
quelquefois pervers) que peut avoir une technologie -qui, en fait, est souvent un “paquet”
technologique- sur le milieu dans lequel elle s’insère ne sont pas considérés. L’idée s’impose
donc que le transfert de technologie ne peut pas être appréhendé en dehors du processus
de sa génération et des conditions économiques, sociales, culturelles, politiques,
dominantes et, avec elles, celle de l’importance de la prise en compte du système dans
lequel cette technologie doit s’insérer. Dans cette même perspective systémique, la
vulgarisation elle-même est mieux appréhendée en tant qu’institution participant à un
système plus global, et plus diffus, de production de technologie.

3. Du “système dur” au “système mou”

La plus grande influence des études de l’innovation dans les pays industrialisés a sans doute
été l’accent mis sur l’importance de la Science, Technologie et Innovation (STI) dans le
développement rural et, par conséquence, de la vision systémique de l’innovation. Une
influence plus indirecte a été la multiplication rapide de projets fondés sur les théories de
Michael Porter sur le rôle de l’innovation dans le développement d’un avantage compétitif
pour les enterprises3.

A un niveau plus institutionnel, ou d’appui aux agriculteurs, l’analyse systémique a pris la


forme de Système National de Recherche Agricole (SNRA), mettant la recherche au centre
du dispositive et assimilant clairement le processus de production de connaissance au
processus d’innovation (Assefa, Waters-Bayer, Fincham and Mudahara (nd). L’implication de
cette vision est que l’optimisation des investissements publics dans les organisations de
recherche est le bon moyen de développer des technologies pour accélérer la
transformation de l’agriculture et le développement rural (Ugbe, 2010).

La focalisation de l’analyse sur l’acteur et l’élargissement de la perspective vers le système


dans lequel il évolue pose bien entendu la question de savoir quel acteur et quel système.
Le système de production de technologie n’est pas le système de production tout court. Se
basant sur la méthodologie des systèmes flous de Checkland (1989), Röling et ses collègues
de l’université de Wageningen ont développé un cadre d’analyse en termes de “système de
connaissances et d’information agricoles” (AKIS / SCIA), un système dont les composantes
sont des acteurs individuels ou collectifs, formels ou informels, parmi lesquels la
vulgarisation. Chacun des acteurs est porteur de connaissances et communique avec
d’autres acteurs. L’approche SCIA, dont la finalité est de fournir une plateforme de
résolution de problèmes (“problem solving”), vise à créer, par une analyse commune et par
la négociation, une synergie entre ces différents acteurs pour faciliter l’innovation.
L’innovation est ainsi considérée comme une compétence sociale qui passe par la gestion
d’un système plus complexe que l’institution de vulgarisation. Par opposition à un système

3 Mais cette influence réside plus dans l’accent sur l’innovation que sur une approche systémique.
4
“dur” (hard system) tel que le conçoivent les chercheurs en systèmes de production par
exemple, le SCIA est un système “flou” ou « mou » (soft system), un système d’activités
humaines qui n’a pas de limites hors celles, opérationnelles, que lui allouent le chercheur à
des fins d’analyse d’un problème précis. Selon Röling (1995), il est donc nécessaire
d’adopter une double perspective systémique, combinant à la fois le côté “matériel”
(système dur) et le côté “logiciel” (système flou).

La conceptualisation de systèmes d’activités humaines comme systèmes ouverts a


évidemment des antécédents4. La question de l’articulation entre l’analyse en termes
d’acteurs et celle en termes de système reste pourtant posée. Ainsi, une des critiques
portées contre le concept de SCIA est précisément que l’approche par système ignore les
capacités individuelles des acteurs et leur marge de manœuvre. En se concentrant sur le
système, l’analyse occulte les relations de pouvoir à l’œuvre dans toute intervention de
développement et fait abstraction du contexte socio-politique et historique qui façonne les
connaissances des acteurs. Dans ce sens là, seule une approche résolument orientée vers les
acteurs individuels peut aider à comprendre comment ces acteurs “essaient de créer des
espaces pour leurs propres projets” (Leeuwis, Long et Villarreal, 1990). Pourtant, aussi
pertinente qu’elle soit sur le plan analytique, cette critique n’échappe pas au travers qu’elle
relève dans l’approche système: une analyse entièrement à partir de la perspective des
acteurs permet-elle de prendre en compte le contexte structurel qui façonne leur
perception et définit le champ que peut prendre “l’espace de leur propre projet”? Elle
permet peut être de mieux comprendre les mécanismes de pouvoir, elle ne les résout pas
pour autant. Pour la vulgarisation, dont le souci est l’opérationnalité, l’implication du
constat d’une démarche orientée vers les acteurs, à savoir la multiplicité de leurs
interprétations et de leurs intérêts, requiert d’une façon ou d’une autre négociation et
compromis, principes qui, sur le fond, ne sont pas différents de ce que la démarche SCIA
propose, même si elle le fait sous une forme formalisée.

Caractéristiques des 3 principaux cadres utilisés pour promouvoir et investir dans le


secteur agricole
Principe central SNRA AKIS/SCIA SIA/AIS
Acteurs Organisations de Agriculteurs, Spectre large d’acteurs
recherche recherche,
vulgarisation,
education
Résultat Invention et transfert Adoption de Différents types
de technologie technologie et d’innovation
innovation
Principe Utilisation de la Accèder aux Utilisations nouvelles
organisationnel science pour créer de connaissances de la connaissance
nouvelles agricoles pour le changement
technologies social et économique

4 Dans le champ de la sociologie rurale, par exemple, on a depuis longtemps fait le reproche aux spécialistes
des communautés rurales de considérer leur objet d’étude comme un système fermé.
5
Mécanisme Transfert de Échange de Interaction et
d’innovation technologie connaissances et innovation entre
d’information acteurs
Role de la Allocation de Lier la recherche, la permettre innovation
politique ressources, définition vulgarisation et
des priorités l’éducation
Nature du Renforcer Renforcer la Renforcer les
renforcement l’infrastructure et les communication entre interactions entre tous
des capacités ressources humaines le acteurs ruraux les acteurs, créer un
environnement propice
Source: Rajalahti, R. (2009): Promoting Agricultural Innovation Systems Approach: The Way
Forward

Les cadres analytiques du SIA et du SCIA, avec leur critique commune du modèle de
production et de transfert de technologie, sont très proches. Ils partagent le meme accent
sur la nécessité de l’apprentissage collectif, comme fondement de l’innovation. Tout comme
le cadre SNRA, ils ont leurs propres critiques.

L’approche à l’innovation fondée sur la recherche, représentée par le cadre SNRA, a été
critiquée pour etre trop linéaire et pour ignorer les capacities d’innovation d’acteurs autres
que le chercheurs. De meme, l’idée que le renforcement des institutions de recherche
permet de promouvoir le progrès technologique et l’innovation n’a pas toujours été validé
par l’expérience malgré d’importants efforts de financement de la recherche. Des
chercheurs en plus grand nombre et la mise à disposition de connaissances plus
nombreuses ne sont pas en elles memes des conditions suffisantes pour l’innovation
agricole. De la meme façon, le cadre du SCIA, malgré son inclusivité, a été critiqué car il
ignore la diversité des acteurs de la recherche (Spielman, 2005).

4. De la recherche / vulgarisation à l’apprentissage

Un changement de perspective vers les acteurs pose la question du changement de


méthode d’intervention, d’attitudes et de comportement des chercheurs et des
vulgarisateurs. La réponse la plus évidente est l’implication de ces acteurs dans le processus
de recherche et de vulgarisation. Cependant, cette réponse, à travers les problèmes de
définition (participation de qui, à quoi, quand, comment, avec qui, sous quelles
conditions...etc?) laisse ouverte la question des cadres de référence respectifs de ces
acteurs et des rapports de pouvoir dans lesquels ils sont insérés. Quel doit donc être le
processus de changement: structurel et politique, méthodologique? Comme le souligne
Wallace (…), dans la plupart des cas, le contexte institutionnel de la vulgarisation n’offre pas
les conditions organisationnelles, ni la motivation professionnelle, pour changer de
méthode d’intervention. Cependant, il est illusoire de prétendre qu’un simple
aménagement institutionnel permettra de changer le comportement du personnel de
vulgarisation. Un fort courant participationniste a pendant les années 70 et 80 prôné un
changement radical de perspective, qui accorde au paysan un statut de partenaire à part
égale, voire prédominante, de la recherche et de la vulgarisation (Chambers 1994).
6
L’implication méthodologique de ce changement de perspective est un véritable
renversement des modes d’apprentissage, des personnels comme des institutions de
recherche et de vulgarisation, renversement s’inspirant dans la pratique des modes
d’apprentissage paysans et trouvant ses fondements théoriques dans les nouveaux
développements de la psychologie cognitive. Le rejet du concept de “transfert de
technologie” a pour implication méthodologique un rejet du concept de “transfert de
connaissances”. Puisque les technologies sont inventées ou réinventées par les paysans par
la pratique, les connaissances doivent être acquises par la découverte, condition essentielle
pour le renforcement des capacités locales et individuelles de résolution des problèmes,
donc de durabilité. Au niveau des individus, ce renversement implique une formation des
personnels utilisant de nouvelles méthodes d’acquisition des connaissances, basées sur
l’apprentissage par l’expérience personnelle et la découverte et non par l’enseignement
traditionnel. Au niveau des méthodes d’identification des actions concrètes, au diagnostic
traditionnel par les chercheurs ou les vulgarisateurs doit se substituer un processus collectif
de “co-apprentissage” dans lequel les “problèmes” ou “contraintes” à résoudre ne sont pas
présumées d’avance mais définies ensemble, processus par lequel la communauté locale
développe un sens de responsabilité, condition de l’appropriation des actions. Au niveau de
la réalisation de ces actions, les ressources et les savoirs locaux doivent être le point de
départ, base à laquelle l’intervenant extérieur contribue. Au niveau de la communication
avec les paysans, il s’agit d’utiliser les outils les plus transparents dans leur forme et les
moins aliénants dans leur fonds, des outils appropriés faisant appel à la visualisation et à des
concepts proches du cadre de référence paysan. Par exemple, ces outils étaient dans les
années 90 formalisés -bien qu’appelés quelquefois “informels”- dans la Méthode Active de
Recherche et de Planification Participatives (MARP) et sensés compléter, voire supplanter,
les outils traditionnels de la recherche (assimilés aux seuls questionnaires).

5. De la vulgarisation au conseil agricole et rural

Les problèmes auxquels la vulgarisation fait face sont connus: domination par des services
publics inefficaces, financement inadéquat, technologies peu nombreuses et/ou peu
pertinentes, liens faibles avec la recherche, faible participation des agriculteurs, mauvaise
compréhension de la demande des marchés, attitudes dirigistes des gestionnaires,
personnels peu formés et peu motivés, peu de preuves d’impact. Pour faire face à ces
problèmes, la vulgarisation a expérimenté plusieurs modèles. Ses programmes ont été
décentralisés, avec une plus grande responsabilité d’autorités locales (peu de pays
aujourd’hui maintiennent une organisation nationale de vulgarisation opérationnelle, une
exception notable étant l’Ethiopie). Mais même ces changements ont rencontré des
difficultés: captation par des politiciens locaux, financement insuffisant, faibles capacités de
gestion et de mise en œuvre, etc. Comme le notait Swanson, “dans l’économie agricole
mondiale émergeante, un système de vulgarisation descendant et axé sur le transfert de
technologie apparait comme un modèle dépassé. Pour améliorer les moyens d’existence
ruraux, les systèmes doivent changer leurs objectifs, leur structure et leurs approches”. Il ne
peut donc y avoir de modèle universel, mais plutôt un système mixte, public, associatif et
privé, qui offre une diversité de services aux agriculteurs, plaçant ainsi ces derniers au
centre du dispositif.

7
DE LA VULGARISATION AGRICOLE… … AUX SERVICES DE CONSEIL RURAL
Prescriptions technologiques spécialisées Conseil multi-dimensionnel concerté
Focalisé sur la production agricole Moyens d’existence ruraux, y compris l’accès au
marché et le bien être
Organisation nationale unique centralisée Système pluraliste décentralisé, organisations
multiples
Organisations publiques Secteurs public, non-gouvernemental et privé
Système conduit par la recherche Système conduit par une multiplicité d’acteurs
Transfert de technologies Appui à l’innovation
Compétences professionnelles des personnels Profils professionnels diversifiés, y compris des
principalement techniques compétences de facilitation et de gestion des
processus
Confusion entre vulgarisation comme fonction et Séparation entre la fonction de vulgarisation et
vulgarisation comme organisation l’organisation des intervenants
Approche basée sur l’offre Approche basée sur la demande
Agriculteurs peu impliqués dans la planification des Contrôle accru par les agriculteurs à travers:
contenus et les moyens des activités de services 1. Le partage des coûts;
2. L’utilisation accrue de services
contractualisés;
3. L’accent sur les connaissances plutôt que
sur le conseil technique étroit.

Le Forum Africain pour les Services de Conseil Agricole (AFAAS) qui œuvre à la
transformation de la vulgarisation en Afrique depuis quelques années a clairement adopté
cette philosophie de systèmes diversifiés de conseil agricole, qu’il s’agit de réunir au sein de
plateforme / forum nationaux pour créer des synergies, en particulier pour influencer les
politiques publiques dans le sens d’‘un appui aux activités de conseil agricole.

Quel que soit son attrait conceptuel, cette perspective large et ambitieuse est un cas de
« professionnels divisés par un même concept ». Là où le concept « activités de service
agricole » peut faire consensus grâce à sa large définition, il réalise ce consensus aux dépens
de la clarté et de l’efficacité. En d’autres termes, il est inclusif tout en créant les conditions
de conflit entre acteurs aux intérêts irréconciliables. La notion de Plateforme Multi-Acteurs
(PMA) ou de Forum de services agricoles est entièrement basée sur une hypothèse : si nous
rassemblons une diversité d’acteurs au sein d’une structure commune, avec une facilitation
compétente des processus collectifs, ils seront capables de résoudre leurs problèmes tous
seuls. Cette vision –quelquefois associée à une « idéologie de la communication »- ignore
les contextes socio-culturel, politique et économique dans lesquels les plateformes existent,
ainsi que les tensions en leur sein, qui peuvent gêner, voire bloquer, leur fonctionnement.
L’expérience à ce jour montre que si quelques plateformes ont pu quelquefois promouvoir
les intérêts de leurs membres, très peu ont pu fonctionner sans un appui financier
important de bailleurs de fonds dont elles dépendent largement, et qui s’arrêtent de
fonctionner avec l’arrêt de cet appui. Le paysage du développement est jonché de
« plateformes » en dormance, comme autant de coquilles vides en attente d’intervention

8
extérieure pour les ranimer5.

Il y a des exemples de plateformes qui ont contribué à promouvoir les intérêts de leurs
membres6, en particulier dans le développement de chaînes de valeur. Mais pour cela, ce
qui les unit doit être plus important que ce qui les divise. Trois questions potentiellement
conflictuelles doivent être clarifiées.

5.1. Services et systèmes

La conceptualisation du développement rural depuis les années 60 s’est largement appuyée


sur des analyses systémiques, et évolué vers des niveaux plus élevés pour identifier les
conditions et processus d’innovation: des systèmes de culture et d’élevage aux systèmes de
production agricole et systèmes agraires (années 60 et 70), aux SCIA (années 90), aux
systèmes d’innovation (années 2000). De façon concomittante, cette evolution est
également passée d’un focus sur des cibles individuelles vers un accent sur des acteurs
collectifs plus abstraits, appelés ‘acteurs’, ‘groupes d’intérêt’, ‘parties prenantes’, etc…
Même si ces niveaux plus élevés de conceptualisation ont permis quelquefois de produire
des connaissances utiles, il faut reconnaître que leurs impacts en termes d’action ont été
limités7.

Il est intéressant de noter que dans les références à la crise de la vulgarisation agricole, les
contributions vont du concept de « services » de conseil à celui de « système » de
vulgarisation. Les discussions sur les différences –réelles ou théoriques- entre vulgarisation
et conseil agricole, ne sont jamais accompagnées de celles entre services et système. Dans
quelle mesure ces services sont-ils des composantes d’un système ? La question est
rarement abordée, du moins directement. Pourtant la métaphore systémique semble sous-
tendre implicitement une grande partie du débat sur les services agricoles : objectifs
communs aux acteurs, interactions entre composantes, synergies, etc… Il faut pourtant être
prudent dans les définitions excessivement systémiques de la vulgarisation. D’une part, ces
définitions suggèrent des relations de complémentarité et de convergence d’intérêt entre
organisations qui n’existent pas, mais aussi car elles risquent d’orienter les présents débats
sur les services agricoles dans un sens académique, dans un contexte de financement par les
bailleurs de fonds à court terme.

5.2 Le concept de “service agricole”

Dans leur revue du concept, les membres du projet “PRO AKIS - Prospect for Farmers’
Support: Advisory Services in European AKIS” notent que le sens de « conseil » et « conseil
agricole » est la source de grande confusion. Les différences d’interprétation peuvent
sembler académiques, mais elles soulignent des visions différentes du conseil agricole.

5 Malheureusement, les interventions extérieures sous forme de projet, souvent préfèrent créer leur propre
structure, ajoutant ainsi à la multitude de plateformes.
6Devaux, A., J. Andrade-Piedra, D. Horton, M. Ordinola, G. Thiele, A. Thomann et C. Velasco. 2010.
Brokering Innovation for Sustainable Development: The Papa Andina Case. ILAC Working Paper 12, Rome,
Italy: Institutional Learning and Change Initiative.
7 Une raison à cella est sans doute la séparation du monde de la recherche de celui de la décision politique.
9
Le Groupe de Neuchatel8, qui a joué un grand rôle dans le débat sur le renouveau de la
vulgarisation, propose un nouveau paradigme de ‘vulgarisation comme facilitation’. Il le voit
comme « une démarcation des hypothèses traditionnelles du transfert de technologie en
faveur d’une vision de la vulgarisation comme un ensemble de mécanismes de soutien aux
agriculteurs dans leurs propres efforts d’accès à de nouveaux services et technologies ».
Dans ce nouveau paradigme, « les organisations engagées dans la vulgarisation ne doivent
plus seulement fournir de nouvelles technologies mais créer les conditions pour une
circulation plus large de l’information ».

Pour Swanson et Rajalahti (2010) 9 le projet ‘Modernizing Extension and Advisory Services
(MEAS)’ 10, financé par l’USAID, les services agricoles ne sont qu’un “terme alternatif pour la
vulgarisation” à laquelle ont été ajoutées de nouvelles fonctions telles que l’intégration des
petits producteurs aux marchés d’exportation à haute valeur ajoutée, la promotion de
techniques de production durable et la gestion des effets du HIV-SIDA et autres problèmes
de santé qui touchent les populations rurales.

Le concept français de “Conseil Agricole” est plus sophistiqué, avec des définitions
différenciées. C’est un « processus d’appui aux bénéficiaires… en vue d’améliorer leurs
capacités d’analyse, de décision, de résolution de problèmes et de mise en œuvre de
solutions »11. Une distinction est faite entre Conseil de Gestion, Conseil Technique, Conseil
Juridique et Administratif, et Conseil Commercial. Chaque type de conseil a ses propres
approches, méthodologie, outils et compétences. En 1955 déjà, Moreau12 faisait une
distinction entre “vulgarisation” et “conseil”: “leurs objectifs sont les mêmes, le travail de
conseil suit de façon naturelle celui de vulgarisation, il représente sa forme la plus aboutie.
La différence est entre les méthodes de travail du vulgarisateur traditionnel et celles du
conseiller ». Le travail de conseil a des exigences pour les deux parties. Les conseillers
doivent maîtriser des outils tels que les marges brutes, business plan, budget, scoreboard,
etc… Ceux qu’ils conseillent doivent à leur tour accepter de rentre dans un système
d’apprentissage (formation, échange d’expériences, travail individuel et de groupe, etc…)
qui leur permet d’acquérir ces outils et concepts et de bénéficier d’un coaching dans leur
utilisation. Ce système d’apprentissage structuré mis en place par des projets de
vulgarisation financés par l’aide au développement française est le modèle de conseil
agricole auquel se réfèrent les professionnels locaux.

L’interprétation des concepts de « vulgarisation » et de « services agricoles » peut donc être


très différente : comme concepts interchangeables, comme concept différents mais

8 Ian Christoplos et Andrew Kidd (2000): Guide for Monitoring, Evaluation and Joint Analyses of Pluralistic Extension
Support; GTZ, SIDA, SDC.
9 Burton E. Swanson et Riikka Rajalahti (2010): Strengthening Agricultural Extension and Advisory Systems: Procedures
for Assessing, Transforming, and Evaluating Extension Systems; The International Bank for Reconstruction and
Development, The World Bank.
10http://www.meas-extension.org/
11 Christophe Rigourd et al (2014): Le Conseil de Gestion Agricole : Introduction au conseil de gestion des exploitations
agricoles et aux organisations professionnelles agricoles, IRAM, ENA Meknès, Cap Rural, CER France, CIRAD.
12 Moreau Raymond (1955) : Le conseil de gestion. In: Économie rurale. N°26, pp. 35-43.

10
complémentaires, comme philosophies différentes où le premier doit céder sa place au
second dans un changement de paradigme. Ces différences concernent les rôles et
méthodes spécifiques du travail de conseil agricole et des compétences requises mais
également sa gouvernance et ses structures de gestion, selon que les organisations soient
publiques, privées ou autres. Il ne s’agit donc pas simplement d’une question de
« définition » (un débat académique) mais aussi des conditions institutionnelles nécessaires
pour faire fonctionner ce service agricole.

Dans son guide de mise en place de Forums Nationaux de Conseils Agricoles, la position
d’AFAAS est que la « vulgarisation » est simplement « un vieux terme lié au transfert de
technologie à sens unique ». Il définit le Conseil Agricole « comme des systèmes qui doivent
faciliter l’accès des agriculteurs, leurs organisations et d’autres acteurs du marché aux
connaissances, informations, et technologies ; faciliter leurs interactions avec la recherche,
l’éducation, l’agrobusiness et d’autres institutions pertinentes ; et les aider à développer
leurs propres pratiques et compétences techniques, organisationnelles et de gestion ».
Cette définition est illustrée par une liste de services allant de la diffusion d’information à la
formation, l’expérimentation en milieu paysan, l’appui à la gestion, la facilitation des
relations, l’accès au marché, le renforcement institutionnel et le conseil juridique.

Le problème avec cette définition, comme avec toutes celles qui sont trop inclusives, est
qu’il devient difficile de décider quel service agricole n’est pas un service de conseil. Il n’y a
aucun critère objectif pour leur refuser cette appellation ou la qualité de membre d’une
plateforme. La question n’est donc plus de savoir s’ils se qualifient mais s’ils sont disposés à
s’y joindre ou s’ils en ont les moyens. Ceci crée le risque de voir ces plateformes
monopolisées par les « suspects usuels », organisations influentes et prêtes à saisir toute
opportunité d’avancer leurs intérêts politiques ou économiques. Le concept de « service
agricole » perd donc son utilité.

5.3. Pluralisme et motivations

Malgré les ambigüités qui entourent le concept de conseil agricole, il y a actuellement un


consensus sur le besoin de diversité et de pluralisme dans la vulgarisation, en grande partie
pour introduire plus de contrôle par les agriculteurs en leur offrant plus de choix. Une des
implications est que cette diversité est aussi la source de pluralisme dans les intérêts –y
compris les intérêts économiques-, les méthodologies, les publics cibles, etc … des
opérateurs des services.

Cette diversité doit être prise en compte dans toute tentative de définir les rôles des
vulgarisateurs13. La complexité de la vulgarization comme function dans le développement
ne veut pas nécessairement dire une complexité des compétences des vulgarisateurs dans
leur travail14. Des agents d’organisations différentes peuvent avoir des objectifs differents

13 Comme dans le travail du Forum Mondial pour les Services Agricoles et Ruraux (GFRAS) sur le profil de compétences
du “Nouveau Vulgarisateur”.
14 Une question qui n’est jamais abordée dans la littérature est le coût de ces compétences. Qui paiera pour des compétences
complexes, donc couteuses ?
11
et avoir besoin de compétences différentes. Mais leurs profils de compétence ne doivent
pas être appréhendés comme des “types idéaux” qui ne seront probablement jamais
attaints15. Il semble evident que les opérateurs de services agricoles à caractère
commercial n’auront pas besoin de description de profil ideal; ils définiront eux memes les
profils de compétence de leurs agents qui serviront le mieux leurs intérets économiques.

6. Conclusion

Les notions reprises par la critique de la vulgarisation sont connues: critique générale du
modèle de transfert de technologie, rôle que doit jouer la vulgarisation pour aider les
agriculteurs à identifier et résoudre leurs propres problèmes, décentralisation nécessaire à
la participation, nécessité pour les vulgarisateurs d’être bien formés à la communication
avec les paysans, changements d’attitude préalables, en particulier renversement des
formes d’apprentissage.

Les termes de la critique sur laquelle se basent les promoteurs d’approches de vulgarisation
alternatives peuvent être discutés. On peut, par exemple, se poser des questions sur la
validité de la conceptualisation de l’”approche conventionnelle” de la vulgarisation, utilisée
comme contre-modèle, et qui paraît relever d’un dichotomisme instrumental assez
sommaire. N’est-elle pas elle-même une simple construction? On peut également reprocher
au mouvement prônant le renversement d’apprentissage dans le processus de vulgarisation
de ne pas se départir d’une philosophie “pédagogique”. Il ne s’agit pas, comme dans les
approches “conventionnelles” critiquées, d’apprendre aux paysans mais, quand même, de
leur “apprendre à apprendre”. Sa proposition serait donc que les interventions dans le
développement, pour paraphraser Röling, abordent les questions de “hardware”
(technologie) par le biais du “software” (méthodes), sans attaquer de front les rapports de
pouvoir (structures politiques, idéologies néo-coloniales) qui ont permis aux anciennes
méthodes de se perpétuer, et aux nouvelles d’émerger. Une hypothèse de cette approche
de contournement du politique par le méthodologique est que les acteurs trouvent en eux-
mêmes la motivation de changer leurs méthodes, que leur formation (chercheurs,
vulgarisateurs et paysans) peut durablement changer les attitudes, en somme, comme le
suggèrent Cornwall, Guijt et Welbourn (1994), que le changement personnel est un
changement politique à même de révolutionner la recherche et la vulgarisation. De même,
l’idée selon laquelle les problèmes sont résolus par la négociation entre les différents
acteurs concernés, bien qu’ayant la différence d’intérêts au centre de son analyse, ne
considère pas l’hypothèse d’intérêts irréconciliables ou de perdants et de gagnants. Même
s’il ne faut pas négliger le fait qu’il y a une dimension politique à tout changement
méthodologique, on peut se demander quel impact peut avoir une “révolution
méthodologique” largement initiée de l’extérieur (des communautés rurales et des états
nationaux) et dont la gestion reste soumise aux structures mêmes qu’elle veut changer
(Sellamna, 2000).

15 Voir par exemple le profil du « nouveau professionnel » du développement proposé dans les années 80.
12
Comme on le voit, aucun des termes de cette crise n’est bien nouveau. La vulgarisation
oscille entre des expériences et des questionnements qui ont toujours existé
historiquement et les nouveaux théoriciens ne font que redécouvrir (et formaliser) des
concepts anciens. Chauveau (1994) a ainsi mis en relief la récurrence du thème de la
participation dans le développement. Debouvry (1995) a également fait ressortir l’ambigüité
autour du degré de participation qui a entouré la pratique de l’animation rurale depuis une
cinquantaine d’années. L’ancienneté des questionnements ne doit cependant pas détourner
d’une réflexion sur leur pertinence actuelle, ni des défis nouveaux que la vulgarisation doit
relever. Un objectif de développement à long terme devra de toute façon viser à renforcer
le “contenu” aussi bien que le “processus”, c’est à dire la technologie et son transfert mais
aussi la capacité de résolution des problèmes (Anderson et Farrington, 1996). Ce qui est en
cause est sans doute toute tentative de soumettre la vulgarisation à une vision unifiée et à
un présupposé idéologique car aucune approche ne peut, seule, répondre à la diversité des
problèmes

Il est en effet tentant de dire, comme on l’a dit dans un autre contexte, que comme toute
crise, celle de la vulgarisation reflète une transition: celle du passage d’une conception
mourante à une autre qui n’est pas encore née.

13
Bibliographie

J. Anderson et J. Farrington (1996): La Vulgarisation Forestière Face aux Défis


d’Aujourd’hui et de Demain; Unasylva, N 184, Vol. 46, FAO.

R. Chambers (1994): Réformes, Institutions et Changements; in R. Chambers, A. Pacey et


L.A.Thrupp (Eds): Les Paysans D’abord: Les Innovations des Agriculteurs et la Recherche
Agronomique. CTA-Karthala.

J.P. Chauveau (1994): Participation Paysanne et Populisme Bureaucratique. Essai d’Histoire


et de Sociologie de la Culture de Développement; in J.P. Jacob et P. Lavigne Delville (Eds):
Les Associations Paysannes en Afrique; Organisation et Dynamiques; APAD-KARTHALA-
IUED.

P. Checkland (1989): Soft Systems Methodology; in Human Systems Management, 8.

A. Cornwall, I. Guijt et A. Welbourn (1994): Acknowledging Process: Methodological


Challenges for Agricultural Research and Extension; in I. Scoones et J. Thompson (Eds):
Beyond Farmer First; Rural People’s Knowledge, Agricultural Research and Extension
Practice; Intermediate Technology Publications, Londres.

P. Debouvry (1995): Animation Rurale; Reflections on the History of the Concept and its
Practice in French-speaking sub-Saharan Africa; The Rural Extension Bulletin, N7; The
AERDD, University of Reading.

J. Farrington et . Bebbington (1994): From Research to Innovation: Getting the Most from
Interaction with NGOs in Farming Systems Research and Extension; Gatekeeper Series N
43, IIED, Londres.

Forum Mondial pour le Conseil Rural (2012) : Le « Nouveau Conseiller Agricole » : rôles,
stratégies et capacités pour renforcer les services de vulgarisation et de conseil

C. Leeuwis, N. Long et M. Villarreal (1990): Equivocations on Knowledge Systems


Theory: An Actor-Oriented Critique; in Knowledge in Society: The International Journal of
Knowledge Transfer; N3, Vol. 3.

Rajalahti, R. (2009): Promoting Agricultural Innovation Systems Approach: The Way


Forward

N. Röling (1995): Evolution du Rôle des Services de Vulgarisation Agricole; in La


Vulgarisation Agricole en Afrique; Actes d’un Atelier International, Yaoundé; CTA.

B. Swanson (1989): Global Consultation on Agricultural Extension: The Current Status of


Agricultural Extension Worldwide; FAO.

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