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Le travail et la technique

Annabac.
L’homme s’accomplit-il dans le travail ?
La nécessité de travailler s’oppose-t-elle à la liberté ?
Travailler moins est-ce vivre mieux ?
L’homme pourrait-il ne pas travailler ?
Faut-il avoir peur des objets techniques ?
La technique menace-t-elle l’avenir des hommes ?
Le développement technique nous rendra-t-il heureux ?

Problème
Si le travail est l’activité qui consiste à modifier la nature, soit extérieure soit humaine, pour l’adapter aux
besoins humains alors les hommes sauront-ils modifier la nature pour leur bien ou pour leur mal ?
Comment l’activité qui doit nous rendre humain peut-elle nous rendre inhumain ?

Développement.

-1- Analyse négative -2- Analyse positive


-1.1- Anthropologie. -2.1- Anthropologie.
Il est dangereux de modifier la nature car cela va la Si la nature n’a pas été assez généreuse avec
détruire. L’homme n’est pas assez intelligent pour l’homme alors c’est son devoir comme son droit de la
savoir modifier la nature. Il ne faut rien attendre de modifier pour mieux vivre. Travailler et modifier la
bon dans le travail. nature c’est passer de l’état de nature à la culture. La
Grèce. Modifier la nature est une folie (hubris) qui culture consiste à humaniser les conditions de vie
sera punie par un désastre (Némésis). terrestre.
Anthropologie. La nature est bonne car elle nous Homme/animal. L’homme se distingue de l’animal
protège de tout ce qu’il y a de dangereux en même parce qu’il refuse la nature pour la modifier. Si dans la
temps qu’elle nous alimente. Ce qu’il y a de nature il n’existe ni père ni mère à l’inverse une
dangereux en elle (comme le pétrole ou l’or) a été culture invente des liens de parenté pour fonder la
caché aux hommes. société et les échanges. De même si dans la nature il
Grèce. Seul l’esclave doit travailler pour satisfaire les n’existe aucun deuil ou cimetière à l’inverse la culture
besoins naturels ; l’homme libre étudie (skolè). invente des rites funéraires pour maintenir vivant
Ancien Testament. Le travail est une punition divine l’esprit des morts.
qui doit nous faire souffrir. Plus le travail sera Besoins/désirs. Si l’animal n’a que de besoins à
douloureux et meilleur il sera car cela permettra de se l’inverse par son travail l’homme se modifie en
repentir du péché originel. s’inventant des désirs. Si le besoin satisfait une

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Etymologie. Tripalium désigne un instrument de fonction biologique, le désir satisfait une demande
torture. imaginaire. L’origine de nos désirs est donc dans le
travail. Le désir humanise les hommes en leur
permettant d’imaginer aussi bien leurs libertés que
leurs bonheurs ou leurs vies en commun.
-1.2- Philosophie. La technique. -2.2- Philosophie. La technique.
Définition. La technique est l’ensemble des Définition. Un instrument technique est l’application
instruments construits par l’homme pour améliorer sa d’une connaissance scientifique. Le développement
puissance sur la nature. La technique est un pouvoir technique est la conséquence du progrès de nos
de maîtrise sur la nature comme sur la nature connaissances. Les instruments ne dominent pas la
humaine. Les instruments techniques permettent de nature ils approfondissent ses possibilités.
produire davantage, plus vite et mieux. L’intelligence. Elle consiste à savoir produire quelque
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La loi de Gabor . La technique se développe seule : chose avec le moins de moyens possibles. La
« un développement technique possible sera technique n’est pas un projet de puissance mais un
nécessairement réalisé ». Le développement projet de simplification des conditions d’existence. Si
technique ne dépend pas des hommes mais des l’informatique se développe c’est pour simplifier le
possibilités techniques. Les hommes ne choisissent traitement complexe de l’information. L’informatique
pas librement leur avenir mais subissent comment les ne peut pas remplacer le désir de comprendre de
instruments techniques conditionnent leurs vies. l’homme.
L’utilitarisme. La technique consiste à définir les Organisation du travail. Les instruments techniques
moyens utiles pour obtenir une fin. La valeur d’une ont permis de produire mieux et plus vite libérant les
chose est dans son utilité pour produire autre chose. individus d’un travail pénible et douloureux. Les
La technique réduit progressivement notre machines libèrent les hommes des travaux difficiles.
conception et notre perception de la réalité à ce qui Vertu. En simplifiant le réel la technique permet aussi
est utile. (L’inutile, comme les sentiments ou la de simplifier nos vies ; une vie rationnelle est une vie
beauté, n’ont aucune valeur.) plus simple et plus libre qu’une vie irrationnelle et
Le transhumanisme. Les nouvelles technologies désorganisée. La rationalité technique est une des
informatiques vont pouvoir éduquer l’homme à partir conditions d’une vie libre.
de l’intelligence artificielle. Ce n’est plus la culture
humaine qui définit l’homme mais la puissance
informatique. L’avenir ne consiste pas à humaniser les
robots mais malheureusement à robotiser les
humains.
-1.3- Philosophie. L’aliénation selon Marx. -2.3- Philosophie. Les vertus libérales du travail
Définition. L’aliénation est l’ensemble des selon Locke.
mécanismes qui s’opposent à la conscience de soi Le droit naturel. Par nature l’homme a la liberté de
vraie et à la conscience de soi libre. Etre aliéné c’est tout faire pour préserver son espèce. Avoir le droit de
ne pas réussir à se connaître soi-même et ne pas tout faire pour préserver son espèce signifie avoir la

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Dennis Gabor (5 juin 1900 à Budapest, Hongrie - 8 février 1979 à Londres) était un ingénieur et physicien hongrois. Il est connu
pour l'invention de l'holographie pour laquelle il a reçu le prix Nobel de physique de 1971.
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réussir à devenir libre. liberté de modifier la nature pour l’adapter aux
Pire, être aliéné c’est chercher la liberté dans ce qui besoins humains.
s’oppose à notre liberté : le travail. Pire, c’est Vertu 1. En travaillant les hommes deviennent : (1)
chercher la vérité dans ce qui s’oppose à la vérité : la responsables, (2) compétents, (3) respectueux des
technique. autres.
Argument. L’organisation moderne du travail a été Vertu 2. (1) Seul le travail peut être l’origine de la
conçue et voulue par les détenteurs du capital afin de liberté : être libre c’est ne plus être dépendant de la
maintenir et reproduire leur pouvoir sur la société. Le nature ou des autres. (2) Seul le travail peut être à
pouvoir du capital se traduit par son pouvoir total sur l’origine de la société : travailler c’est collaborer (et
l’organisation de la société grâce à la production échanger) avec les autres. (3) Seul le travail peut être
économique. à l’origine de la justice : la justice c’est voir son droit
Marchandise. En travaillant l’homme devient une respecté, c’est-à-dire son mérite et ses propriétés.
marchandise qui vend sa force de travail afin de Vertu 3. Le droit naturel reconnaît l’égale liberté
pouvoir satisfaire ses besoins et s’intégrer. L’homme humaine de travailler. Autrement dit : (1) aucune
perd sa dignité pour ne pas être exclu par la société. société ne peut être fondée sur les inégalités
Valeur marchande. C’est le capital et non le travailleur homme/femme ; (2) aucune société ne peut accepter
qui décide de la valeur des marchandises ; autrement les inégalités qui s’opposent à la liberté individuelle ;
dit, le travailleur n’est pas reconnu dans ses efforts (3) aucune société ne peut s’opposer aux différences
(valeur marchande) car c’est le profit du capitaliste individuelles qui expriment les libertés individuelles.
qui décide (valeur d’usage). Vertu 4. Afin que l’égale liberté de travailler soit
Aliénation. L’homme croit qu’en travaillant il s’efforce maintenue il est impératif de s’opposer à la
pour devenir libre et heureux alors qu’il travaille pour reproduction du capital qui instaure des inégalités. La
renforcer le pouvoir du capital qui le condamne au concurrence est le mécanisme qui permet à chacun
malheur et à la dépendance. d’avoir sa chance de réussir en même temps qu’elle
s’oppose à la reproduction injuste du capital dans un
monopole.
Conclusion. Conclusion.
La fonction du travail n’est pas de satisfaire des Le pire pour l’humanité serait l’absence de travail car
besoins ou d’inventer un monde meilleur. Elle est un l’homme doit travailler pour accéder à ses vertus
instrument de domination redoutable qui permet au morales de la liberté, du mérite et de la dignité
capital de maintenir son pouvoir sur la société en individuelle.
appauvrissant les travailleurs et en épuisant les Le travail est-il la condition du progrès des hommes ?
ressources naturelles.
Le travail est-il l’activité qui détruira la nature et les
hommes ?

Pouvons-nous sortir de la polémique concernant le travail ?


Si le travail est mauvais pour les hommes, pourquoi ne se révoltent-ils pas ?
Si le travail est bon pour les hommes, pourquoi y’a-t-il autant de pauvreté et d’injustice ?

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3 hypothèses possibles ?

Hypothèse 1. Les biens non marchands.


Dans La politique Aristote2 distingue clairement deux économies : l’économie naturelle et l’économie non
naturelle.
L’économie naturelle consiste à satisfaire l’ensemble des besoins d’une société ; une société produit ce dont
elle a besoin et peut donc ainsi vivre bien.
L’économie non naturelle consiste à s’enrichir ; l’économie non naturelle n’est pas nécessairement fondée sur
la production des biens utiles mais sur les mécanismes spéculatifs qui permettent de s’enrichir.
Selon Aristote l’économie naturelle est bonne pour tous car elle satisfait les besoins en même temps qu’elle
s’oppose à l’apparition des inégalités ; comme on le sait les inégalités sociales s’opposent à la justice et à la
liberté.
A l’inverse l’économie non naturelle est mauvaise car en favorisant le plaisir de la richesse (et de l’argent) elle
corrompt les hommes ; l’origine du mal serait donc l’argent qui rend les hommes égoïstes et malhonnêtes.
Que faire ?
Aristote propose de contrôler l’économie avec l’Etat afin que l’économie non naturelle ne vienne pas
corrompre la société. L’Etat sera la condition du bien commun si l’Etat ne laisse pas l’économie non naturelle
se développer.
Est-ce possible ?
Il est en fait impossible de prévoir et définir quels sont les besoins réels, présents et à venir, d’une société. Les
besoins comme les désirs changent : qui peut prévoir ce que nous désirerons demain ? De plus, contrôler les
besoins et les désirs revient à s’opposer à la liberté individuelle ; dans ce cas l’Etat n’est plus l’origine du bien
commun mais l’origine d’un appareil de contrôle dangereux.
Comment l’Etat peut-il intervenir économiquement pour être juste ?
Il faut distinguer les biens nécessaires au bien commun, des biens particuliers qui n’intéressent pas tout le
monde.
Si, par exemple, l’eau, la santé, l’éducation, etc., sont importants pour le bien commun alors il est bon que ces
biens soient des biens non marchands. Un bien non marchand est un bien qui ne peut pas servir à s’enrichir. Il
dépend donc de l’Etat, c’est-à-dire du peuple, de définir quels sont les biens qui deviendront non marchands
afin de maintenir les conditions du bien commun.
Par contre, tous les biens qui consistent à satisfaire des besoins ou des désirs particuliers resteront des biens
marchands. Personne ne peut interdire à personne de gagner de l’argent grâce à son talent ou à son sens de
l’invention.

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Aristote est un philosophe grec de l'Antiquité (IVème siècle av JC). Avec Platon, dont il fut le disciple à l'Académie, il est l'un des
penseurs les plus influents que le monde ait connus.
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Hypothèse 2. La culture selon Arendt.3
Dans La condition de l’homme moderne Arendt indique que l’humanité est conditionnée par trois activités
principales qui sont complémentaires : travailler-faire-agir.
Travailler : c’est l’activité qui ne sert à rien d’autre qu’à satisfaire des besoins. Le travail ne produit aucun
progrès ou aucune vertu car il sert simplement à produire ce qui sera consommé. Le travail produit et
consomme ; il n’est l’origine d’aucune valeur.
Faire : c’est l’activité qui consiste à produire des biens non consommables comme l’art, l’architecture, la
mémoire. Le faire (ou fabrication) développe une culture commune qui permet aux individus de s’identifier et
de s’intégrer aux autres hommes. Le faire produit un monde commun ; le monde commun est l’origine de nos
valeurs et de nos habitudes.
Agir : c’est l’action des hommes ensembles qui parlent et décident. L’agir définit la politique au sens où les
hommes doivent se réunir pour concevoir ensembles ce qui est bien et juste. La politique produit un espace
public de discussion et de tolérance ; la politique est la liberté humaine.
Arendt insiste fortement pour que les trois conditions existent de manière équilibrée dans une société. Si une
activité devient prédominante par rapport aux autres, alors la société vit mal.
Pourquoi le travail est-il mauvais pour les hommes ?
Si les hommes travaillent sans se soucier de ce qu’ils ont en commun (la culture) ou de ce qu’ils doivent faire
(la politique), alors la société se limite à une société de consommation où l’individu n’a plus ni identité et ni
liberté. Petit à petit la société de consommation devient une société anonyme où tout peut s’échanger. Pire,
comme la consommation consiste à produire pour détruire alors une société de consommation ne produit rien
de durable.
Tout peut-il avoir une valeur marchande ? La dignité, la liberté, l’amitié, la solidarité, la beauté, etc., ont-ils
une valeur marchande ?
Que faire ?
Selon Arendt seules les valeurs produites par notre culture et nos actions peuvent définir la société. (Le travail
ne produit aucune valeur humaine fondamentale.) Un individu comme une société ne se définissent pas par la
richesse qui devient vite inégale et contraire aux libertés.
Les individus ont besoin d’un monde commun qui les accueille pour les éduquer. Notre premier devoir est de
construire et de préserver un monde commun qui dépasse la vie mortelle d’un individu : le monde commun
c’est ce qu’on ne consomme pas. Etre soucieux du patrimoine comme de l’histoire ainsi qu’être attentif aux
valeurs de son passé permet au monde commun de se maintenir.
Les individus ont également besoin d’un espace public pour exprimer leur liberté qui se traduit par leur
différence. L’espace public repose sur la pluralité des opinions et des comportements. Plus un espace public
sera marqué par les différences et meilleure sera la liberté.
C’est donc parce qu’ils veulent agir pour construire un monde commun que les hommes ne se limitent pas à
de simples consommateurs sans identité et sans liberté. Le sens véritable de la liberté s’exprime dans la
recherche d’un idéal politique pour tous qui implique un idéal esthétique du beau pour tous.

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Hannah Arendt, née Johanna Arendt à Hanovre le 14 octobre 1906 et morte le 4 décembre 1975 à New York, est une politologue,
philosophe et journaliste allemande naturalisée américaine, connue pour ses travaux sur l’activité politique, le totalitarisme, la
modernité et la philosophie de l'histoire.
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Hypothèse 3. La « justice par équité » selon Rawls4.
Selon Rawls dans La théorie de la justice, la question la plus importante concernant le travail n’est pas s’il est
destructeur mais s’il est injuste. L’injustice est le pire des maux car l’injustice s’oppose au bien commun et à la
collaboration entre les hommes. Autrement dit, si une société est injuste alors elle est sur le point de
s’effondrer ou de disparaître dans la violence. Les inégalités s’opposent au fondement de la société.
Pourquoi y’a-t-il des injustices économiques ?
La liberté et l’égalité ne sont pas compatibles. Soit la liberté produit des inégalités parce que nous sommes
différents ; soit l’égalité produit des injustices parce qu’elle limite l’individu.
Economiquement, plus il y aura de liberté accordée plus et plus il y aura des inégalités de richesse. Ou, plus il y
aura d’égalité et moins il y aura de créativité ou de mérite.
Pouvons-nous résoudre ce problème ?
Selon Rawls comme il est impossible de sacrifier soit la liberté, soit l’égalité, l’unique manière de les maintenir
est de lutter contre la reproduction des inégalités : ce n’est pas l’inégalité qui est injuste mais la reproduction
des inégalités.
En effet, c’est parce que nous avons une égale liberté que les inégalités économiques sont justes : si nous
avons tous les mêmes opportunités alors la concurrence comme la réussite sont justes. S’il n’y a plus d’égale
liberté alors il est faux de croire que les hommes sont libres et égaux. La reproduction des inégalités s’oppose
à la reconnaissance nécessaire de l’égale liberté à la naissance.
Afin de lutter contre la reproduction des inégalités Rawls propose d’instaurer le principe de « la justice par
équité ». « La justice par équité » consiste à lutter contre la reproduction des inégalités en favorisant les plus
défavorisés. Les plus favorisés ont l’obligation morale et sociale de venir en aide aux plus défavorisés afin que
les inégalités ne s’opposent pas à la liberté de chacun. En effet, si on favorise les plus défavorisés alors on les
aide à avoir autant de chances de réussir que les autres.

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John Rawls est un philosophe américain né le 21 février 1921 à Baltimore et mort le 24 novembre 2002 à Lexington. Rawls est l'un
des philosophes politiques les plus étudiés du XXᵉ siècle. La thèse, fondamentale, posée par John Rawls, est la suivante : une société
doit être juste avant d'être égalitaire.
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