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Rapport de stage de fin d’études n˚1102

CHABOT Etienne

Promotion d’élèves Ingénieurs de l’ENM 2005/2008

Stage d’approfondissement réalisé du 21 janvier au 20 juin 2008 au CERFACS

(Centre Européen de Recherche et de Formation Avancée en Calcul Scientifique)

Prévisibilité des régimes de temps


à échelle saisonnière

Directeur de stage : Christophe CASSOU (Cerfacs)


Co-encadrants : Jean-Pierre CERON (Météo-France)
Laurent TERRAY (Cerfacs)

2008
2
Remerciements

Merci tout d’abord à Christophe Cassou, de l’équipe Climate Modelling and Global Change du CER-
FACS, qui m’a encadré activement durant ces 5 mois de stage. Je le remercie pour sa disponibilité et son
engagement à mes côtés pour mener à bien les objectifs de ce travail. J’ai particulièrement apprécié de
pouvoir partager avec lui son vif intérêt pour la prévision saisonnière et la science climatique.

Je remercie Jean-Pierre Céron, Directeur Adjoint d’Exploitation du département DCLIM de la Di-


rection de la Production de Météo-France, pour m’avoir conseillé au fur et à mesure de ma progression
et favorisé une collaboration active entre le CERFACS et Météo-France. Nous avons organisé ensemble
des réunions régulières, qui m’ont permis de faire des bilans intermédiaires constructifs.

Merci à Laurent Terray, responsable de l’équipe Climate Modelling and Global Change du CER-
FACS, pour ses conseils avisés.

Merci à Brigitte Dubuisson (DCLIM), qui a effectué parallèlement à mon travail de nombreux diag-
nostics sur le modèle Météo-France System 3. Je la remercie d’avoir pu s’adapter à mon calendrier,
de manière à ce que nous puissions confronter nos résultats. Merci à Isabelle Charon (DCLIM), pour
m’avoir fourni toutes les informations sur l’historique et l’expertise de prévision saisonnière dont j’ai pu
avoir besoin.

Je remercie Francisco J. Doblas-Reyes du CEPMMT, grâce à qui nous avons pu exploiter les prévi-
sions saisonnières du modèle ECMWF System 3.

Je tiens à remercier les personnes suivantes, que j’ai pu rencontrer au cours des réunions opérationnel-
les de la cellule de prévision saisonnière de Météo-France, pour l’intérêt qu’ils ont porté à mon travail :
Michel Déqué (CNRM), Jean-François Guérémy (CNRM), Nicolas Ferry (Mercator), Silvana Buarque
(Mercator), Jean-Philippe Piedelièvre (CNRM), François Vinit (DCLIM) et Marie Drévillon (Mercator).

Mes remerciements à l’équipe informatique CSG du CERFACS, grâce à laquelle l’outil informatique
ne fut jamais un obstacle insurmontable... !

Un merci tout particulier à Marie Minvielle, Lola Corre, Cécile Dardel et Julien Najac, qui ont
contribué à résoudre mes petits soucis techniques.

Enfin, je remercie tous les membres de l’équipe Climate Modelling and Global Change pour leur
accueil et leur sympathie ainsi que toutes les personnes du CERFACS que j’ai pu cotôyer.
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Résumé court

Les régimes de temps s’observent dans l’atmosphère à l’échelle journalière et sont caractéristiques
de la variabilité des moyennes latitudes. Ce sont des structures récurrentes et quasi-stationnaires, persis-
tant typiquement pendant 5 à 10 jours, qui représentent la circulation de grande échelle.
Le concept de régime de temps a été introduit par Reinhold et Pierrehumbert en 1982. Depuis, di-
verses études s’appuyant sur ce concept ont été publiées, traitant de thématiques aussi diverses que la
descente d’échelle, les événements extrêmes ou encore le changement climatique. La notion de régime de
temps est envisagée ici sous l’angle de la prévision saisonnière. L’objectif est d’examiner si la prévision
saisonnière des régimes de temps sur le domaine Atlantique-Nord / Europe apporte de la valeur ajoutée
à l’expertise opérationnelle.

Sur la période 1979-2007, les réanalyses NCEP (estimation des observations) sont confrontées aux
prévisions a posteriori issues de 2 modèles couplés de prévision saisonnière actuellement opérationnels :
celui de Météo-France et celui du CEPMMT. L’approche ensembliste est mise à profit (11 membres per-
turbés pour chaque modèle) et on étudie séparément les saisons d’hiver et d’été.
Les régimes de temps sont obtenus à partir de champs journaliers d’anomalies d’altitude géopotentiel-
le du niveau de pression 500 hPa. La décomposition en régimes s’effectue par classification automatique,
l’algorithme étant basé sur la méthode des nuées dynamiques.

Après une étude des biais systématiques des modèles, il s’agit de contrôler si les régimes simulés
sont fidèles aux régimes observés, à la fois en terme de structure spatiale et d’occurrence moyenne.
Les configurations de température de surface de la mer associées aux régimes prévus sont analysées et
comparées aux observations. On insiste alors sur des zones connues pour être des sources potentielles de
prévisibilité (océans Pacifique et Atlantique tropicaux). Enfin, différents scores de prévision de régimes
sont commentés.
6
Abstract ECAC

Cet abstract a été soumis à l’EMS (European Meteorological Society) en vue de la conférence européenne
sur la Climatologie Appliquée (ECAC) qui aura lieu à Amsterdam (Pays-Bas) du 29 septembre au 03 oc-
tobre 2008.

Predictability of Weather Regimes at Seasonal Scale

Authors : E. Chabot1&3 , C. Cassou1 , JP. Céron2 and B. Dubuisson2

1 CERFACS, 42 avenue G. Coriolis, Toulouse, France.


2 Direction de la Climatologie, Météo-France, 42 avenue G. Coriolis, 31057, Toulouse, France.
3 Ecole Nationale de la Météorologie, Météo-France, 42 avenue G. Coriolis, 31057, Toulouse, France.

(Etienne.Chabot@meteo.fr, Christophe.Cassou@cerfacs.fr, Jean-Pierre.Ceron@meteo.fr,


Brigitte.Dubuisson@meteo.fr).

Weather Regimes are observed in the atmosphere at daily scale and characteristic of the variability
at middle latitudes. These are recurrent and quasi-stationary structures, commonly persisting for 5 to 10
days, and representing the large-scale circulation. This concept of Weather Regime was introduced by
Reinhold and Pierrehumbert in 1982. Since, many studies about this theme have been published, dealing
with various subjects such as scale descent, extreme events or climate change. The purpose of this study
is to examine whether the seasonal forecast of Weather Regimes over the North-Atlantic / European do-
main could be usefully taken in account during an operational seasonal forecasting appraisal.

Over the period 1979-2007, NCEP Reanalysis (assesment of the observations) are compared with
seasonal forecasts from two coupled models that are currently operational : Météo-France’s and
ECMWF’s models. Winter and summer seasons are dealt with apart and an ensemble approach is used
(11 perturbated members for every model). Weather Regimes are obtained from daily fields of geopo-
tential height of the 500 mb pressure level. The technique used is an automatic classification, based on a
k-mean clustering algorithm.

After an examination of the systematic bias of the models, simulated regimes are confronted with
observed regimes, in term of spatial structure and mean frequency. Structures of sea surface temperature
linked with forecast regimes are analyzed and compared to observations. We focus on zones known for
being some potential sources of predictability (Tropical Atlantic and Pacific Oceans). Different scores
of forecast regimes are otherwise commented. The relationship between Weather Regimes (non-linear
method) and modes of variability obtained from an Empirical Orthogonal Function decomposition (linear
method) is finally tackled.
8
Résumé long

De grands pas ont été franchis dans le domaine de la prévision saisonnière, entre les premiers tests en
mode ”hindcast” du début des années 2000 et les activités quasi-opérationnelles d’aujourd’hui dans les
différents centres météorologiques. Ce développement correspond à une très forte demande économique
et sociétale afin de répondre à des enjeux majeurs tels que la gestion de la ressource en eau ou de
l’électricité, la réactivité face aux canicules ou aux vagues de froid, etc. La prévision saisonnière peut
se targuer d’un certain succès dans le bassin Pacifique Tropical, avec des scores honorables pour tout
ce qui touche au phénomène d’oscillation australe ENSO (El Niño Southern Oscillation). En revanche,
son aptitude à prévoir le climat aux moyennes et hautes latitudes reste limitée, de part la nature même
de la dynamique climatique dans ces régions, largement dominée par les fluctuations chaotiques de l’at-
mosphère.
Si la prévision saisonnière peut fournir des informations sur le climat moyen à l’échelle de la saison à
venir, c’est en grande partie grâce à ce que l’on appelle la mémoire des composantes lentes du système
climatique (océan, glace de mer et eau du sol). En particulier, l’océan possède une capacité thermique
beaucoup plus forte que l’atmosphère. Ainsi, la mémoire des conditions atmosphériques d’un jour donné
est très rapidement perdue, alors que l’océan peut faire persister des conditions particulières de surface
(SST, température de surface de la mer) et de subsurface plus longtemps. La prévision saisonnière se
base alors sur l’hypothèse que l’océan influence l’atmosphère à échelle saisonnière ; la prévisibilité est
ainsi assurée par l’évolution des conditions océaniques dans certaines zones clefs (notamment les régions
tropicales) et leur couplage avec l’atmosphère.

Des études récentes ont montré que l’information apportée par la prévision saisonnière dans les
extratropiques n’était pas forcément prise en compte de manière optimale. En particulier, les analyses
classiques en moyenne d’ensemble, en terciles, etc., effectuées à partir des sorties de modèles en points
de grille, ne sont pas adaptées pour retranscrire la vraie nature du climat des moyennes latitudes à échelle
saisonnière, notamment sur un vaste domaine couvrant l’ensemble de l’Atlantique Nord et l’Europe de
l’Ouest. Un pont entre le signal climatique (échelle du mois à la saison) et le signal ”météo” (échelle
journalière à hebdomadaire) peut être établi via le concept de régimes de temps. Ceux-ci représentent
les quelques états préférentiels, récurrents et quasi-stationnaires, de circulation atmosphérique de grande
échelle, qui se caractérisent par une durée de vie de l’ordre de 5 à 10 jours.
Cette vision en régimes de temps semble être une approche novatrice pour la prévision saisonnière
aux moyennes latitudes. De l’occurrence des régimes de temps sur l’Atlantique Nord pendant une saison
donnée, on peut en effet tirer une information qualitative très utile, dans la mesure où les régimes ex-
pliquent une partie du temps sensible observé et ressenti sur l’Europe, à la fois en termes de moyennes et
d’extrêmes. Connaissant le lien entre la dynamique atmosphérique en moyenne troposphère et les condi-
tions de surface observées, la prévision en terme de régimes de temps permet d’accéder indirectement
à la prévision des variables d’impact ressenties par l’usager (températures, précipitations notamment) et
de s’affranchir du fait qu’on les prévoit mal directement. Les régimes donnent finalement une vision plus
”dynamique” et synthétique de la prévision.
Le but de ce stage était de désagréger le signal ”prévision saisonnière” en termes de régimes de temps
et d’estimer l’apport de cette approche sur la période de référence 1979-2007. Les analyses se sont basées
sur les prévisions saisonnières ensemblistes (11 membres) des modèles couplés du CEPMMT (ECMWF)
et de Météo-France (MF), couvrant 7 mois d’échéances. Nous nous sommes uniquement focalisés sur
les saisons d’hiver (décembre-février) et d’été (juin-août). La question a été de savoir si les modèles
numériques couplés actuels étaient capables de représenter des régimes conformes aux régimes observés,
en terme de structures spatiales ou d’occurrences temporelles. Il s’agissait également de comprendre les
liens entre les régimes de temps et les anomalies SST prévues, source de prévisibilité.

Nous étudions tout d’abord le comportement général des modèles, notamment par une analyse des
biais de SST et de géopotentiel à 500 hPa (Z500), par comparaison aux observations ou à leur estimation
(réanalyses NCEP). Comme condition préalable à la prévision saisonnière, nous montrons pour la saison
hivernale que MF est capable, malgré des biais de SST importants s’établissant dans certaines régions au
bout d’1 ou 2 mois de simulation seulement, de maintenir correctement un forçage océanique préexistant
dans des zones-clefs telles que l’Atlantique Tropical et le Pacifique Tropical.
Pour décomposer les régimes de temps, nous utilisons une méthode de classification automatique par-
titionnelle. L’algorithme est basé sur la méthode dite des nuées dynamiques, généralisation de la méthode
dite des k-means (Michelangeli et al., 1995 1 ). La classification est effectuée sur des échantillons de
champs journaliers d’anomalies de Z500), ces anomalies étant calculées par rapport aux climatologies
journalières de la période de référence 1979-2007. Chaque jour est attribué à un cluster en fonction de sa
distance euclidienne au barycentre du cluster. Sur l’Atlantique Nord, le nombre optimal de clusters est
de 4.
La figure 1 présente les structures spatiales des régimes issues de la décomposition pour la saison
d’hiver. L’échantillon est constitué de l’ensemble des jours couvrant les 5 mois novembre-mai, sur la
période de référence. Pour les modèles, l’échantillon utilisé pour le classement est 11 fois plus grand
que pour les réanalyses, chaque membre étant considéré comme indépendant. Le régime NAO-, souvent
associé à des vagues de froid humides sur l’Europe du Nord, est le régime le moins fréquent (20 % des
jours). Le régime NAO+, qui s’accompagne de pertubations atlantiques sur le nord de la France où il fait
doux et humide, alors que le sud du pays est davantage soumis à un temps plus sec et froid la nuit, est le
régime le plus fréquemment observé (31 % des cas). Le régime de Dorsale est un régime plutôt humide
et frais. Enfin, le régime de Blocage, statistiquement le plus persistant, occasionne les vagues d’air froid
et sec continental, en particulier sur l’Europe de l’Ouest.

La figure 1 illustre que les modèles sont capables de reproduire de manière encourageante les struc-
tures spatiales des régimes de temps sur l’Atlantique Nord, en terme de localisation des noyaux d’ano-
malies. La bonne représentation des structures spatiales par le modèle ECMWF est assez remarquable.
L’intensité des régimes de MF est en revanche trop faible par rapport aux régimes de ECMWF et aux
régimes NCEP. Une hypothèse évoquée pour expliquer ce défaut est la différence entre les résolutions
spatiales horizontales des 2 modèles.
Sur la figure 2, on a superposé, pour les 4 régimes d’hiver, les occurrences des régimes d’hiver
prévues respectivement par les 2 modèles et les occurrences observées. Les séries des modèles corres-
pondent aux moyennes sur 11 membres et les valeurs atteintes, plus faibles par construction, ne sont donc
pas directement comparables aux observations (considérées comme une réalisation dans cette approche
ensembliste). Il est évident qu’il n’y a ni accord entre les 2 modèles, ni accord entre les modèles respec-
tifs et les observations. Malgré la correcte représentation spatiale des régimes d’hiver par les modèles,
il apparaı̂t donc clairement que les occurrences des régimes sont peu prévisibles. Ce fait a été vérifié
par une étude simple en termes de scores (corrélations et décomposition en terciles d’occurrences). Une
1
Michelangeli, P.-A, R. Vautard, et B. Legras, 1995 : Weather Regimes : recurrence and quasi-stationarity. Journal of At-
mospheric Science, 52, 1237-1256

10
F IG . 1 – Structures spatiales des 4 régimes de temps d’hiver (centroı̈des moyens obtenus à partir d’ano-
malies journalières de Z500, par une méthode de classement automatique en 4 clusters). Unité : mgp.
L’intervalle entre les contours est de 25 mgp. Hivers 1979-2007. Domaine NORD-ATLANTIQUE (30˚N-
80˚N ; 85˚W-35˚E). La fréquence d’occurrence du régime (pourcentage de jours classés dans le cluster)
apparaı̂t en haut du régime. Pour les réanalyses NCEP (modèles), l’échantillon classé comprend 4386
(48246) jours.

méthode de projection des régimes prévus sur la base commune des régimes NCEP a été testée mais n’a
pas permis d’améliorer les scores de façon révolutionnaire. Seul le régime NAO+ semble tirer - modes-
tement - son épingle du jeu dans MF uniquement, avec une ”bonne prévision” sur deux et seulement 4
”fausses alarmes” sur l’ensemble des 29 années étudiées.

Les modèles répondent très différemment aux forçages océaniques du Pacifique Tropical et de l’At-
lantique Tropical. La sensibilité à ENSO est manifestement plus forte dans Météo-France que dans
ECMWF. Dans MF, le régime NAO- est largement favorisé (défavorisé) par des conditions El Niño
(La Niña). Par contre, NAO+ semble être plutôt favorisé quand les SST sont froides dans l’Atlantique
Tropical Nord (sans fort forçage ENSO concomittant). Dans MF, le lien statistique entre NAO- et ENSO,
et l’absence de lien statistique entre NAO+ et ENSO ont été mis en évidence via une étude linéaire en
terme de modes de variabilité, s’appuyant sur une Analyse en Composantes Principales (en collaboration
avec la DCLIM de Météo-France). Il n’y a guère de précurseur clair en SST pour le régime de Dorsale.
Le régime de Blocage, quant à lui, est sensible à ENSO dans ECMWF ; il est associé à une structure en
SST dite ”en fer à cheval”, typique de l’Atlantique Nord, dans MF.

La représentation des structures spatiales par les modèles en saison estivale est moins bonne qu’en
hiver et les scores de prévision ne sont pas plus encourageants pour cette saison. Par contre, notre étude
des régimes estivaux a mis en exergue une rupture artificielle dans les occurrences des régimes d’été
dits ”de Blocage” et ”de Thalweg” prévues par MF, dans les années 1990. Cette rupture est cohérente
avec la forte tendance moyenne en Z500 sur 29 ans du modèle et différentes hypothèses ont été dis-
cutées pour l’expliquer. Il est possible que le modèle réponde trop fortement aux concentrations de gaz à
effet de serre prescrites. Il existe aussi une rupture similaire à celle des régimes dans les conditions ini-
tiales océaniques assimilées par Mercator (due à l’assimilation des données altimétriques depuis 1993).
Enfin, la forte résolution de MF dans la stratosphère pourrait expliquer, par des connexions entre la stra-

11
F IG . 2 – Anomalies d’occurrence des 4 régimes de temps d’hiver (en %) sur les hivers DJF 1979-
2007. En rouge : réanalyses NCEP, en vert : prévisions du modèle Météo-France System 3 et en bleu :
prévisions du modèle ECMWF System 3. Pour les modèles, la prévision est établie à partir de la moyenne
des occurrences de l’ensemble (11 membres).

tosphère et la troposphère trop fortes, les dérives de la Z500. Tous ces questionnements ont conduits en
opérationnel à la réduction de la période utilisée pour calculer la climatologie du modèle (passant de
1979-2007 à 1993-2007), afin d’éviter l’occultation du signal de prévision saisonnière par cette tendance
artificielle en Z500.

Cette étude a confirmé la pertinence de l’analyse en régimes, même si la prévisibilité est faible. Les
liens entre modes de variabilité et régimes continueront d’être investigués à la DCLIM, cette étude ayant
donné des résultats prometteurs dans la recherche de ponts entre les 2 approches. On pourra appliquer
la méthodologie de ce travail au modèle anglais (UKMO), et envisager à terme une approche multi-
modèles dans le cadre du projet EUROSIP, pour exploiter au mieux les occurrences de régimes de temps
prévues par chaque modèle. A cette fin, nous recommandons de projeter les régimes prévus sur une base
de régimes observés et d’utiliser une période de climatologie commune. Le présent travail pourra aussi
servir de base à une étude des régimes sur le domaine Pacifique Nord / Amérique du Nord.

12
Abstract

Progress has been considerable in seasonal forecast from the first “hindcast” tests at the beginning
of the 2000’s, to the current operational activities practiced in the different meteorological centers. This
development corresponds to strong demands, in different fields, such as management of water supply or
electricity, the reactivity during scorching heat or cold waves. Seasonal forecast is quite successful in
the pacific tropical basin, with excellent scores in link with the austral oscillation phenomenon ENSO
(El Niño Southern Oscillation). However, its ability to forecast the climate at middle and high latitudes
remains restricted, due to the true nature of the climate dynamics in these regions, known to be largely
dominated by the atmosphere’s chaotic fluctuations.

If seasonal forecast is able to provide some information on climate at the scale of the coming season,
it is mainly due to what is called the memory of the slow components of the climatic system (ocean, ice
sheets and ground water). In particular, oceans have a thermal capacity far greater than the atmosphere.
Thus, the memory of atmospheric conditions for a given day is very quickly lost, whereas the ocean is
able to carry longer some particular surface conditions (SST, sea surface temperature) and subsurface
conditions. Seasonal forecast is based on the hypothesis that the ocean influences the atmosphere at such
a time scale ; the predictablility relies on the evolution of oceanic conditions in some key areas (in parti-
cular the tropical regions) and their coupling with the atmosphere.

Recent studies have shown that information given by seasonal forecast in the extra-tropics is not
optimally taken into account. In particular, analysis in ensemble means or terciles are not adapted to
understand the climate of middle latitudes at seasonal scale, especially in the North-Atlantic region and
in Europe. A connexion between climate signals (monthly to seasonal time scales) and meteorological
signals (daily to weekly time scales) can be established through the concept of weather regime. Regimes
represent the few recurrent and quasi-stationnary states of large-scale atmospheric circulation. They last
typically 5 to 10 days.

This concept of regimes seems to be a very promising approach for seasonal forecast at middle lati-
tudes. Through the occurrence of the weather regimes over the North Atlantic region over a season, we
can obtain a useful information, given that regimes explain a part of the observed weather over Europe,
both in terms of means and extremes. Knowing the link between the atmospheric dynamics in the middle
troposphere and observed surface conditions, forecast in term of weather regimes leads indirectly to fo-
recast of surface variables (temperatures, precipitations), that are not correctly predicted directly by the
model. Regimes provide finally a more dynamical vision of the forecast.

The goal of this study is to decompose the signal of seasonal forecast in terms of weather regimes
and to estimate the pertinence of this method over 1979-2007 (period of reference). The analysis is based
on ensemble seasonal forecasts (11 members) from the 2 coupled models ECMWF System 3 (ECMWF)
and Météo-France System 3 (MF), covering 7 months of leadtime. We only focused here on winter and
summer seasons. The question was to determine if the models were able to correctly simulate regimes
corresponding to observed regimes both in terms of spatial patterns and mean occurrence. We analyzed
the links between weather regimes and the predicted SST anomalies, that are the main source of predic-
tability for the models.

First, we analyze the biases of the models in terms of SST and geopotential at 500 mb (Z500), by
comparison with the observations or their estimation (NCEP reanalysis). We show that MF is able to
correctly maintain the oceanic forcing in key zones such as the Tropical Atlantic and the Tropical Pacific
oceans, despite the fact that SST biases are very important in some regions and appear only after one or
two months of integration.

To obtain the regimes, we use an automatic classification, whose algorithm is based on the k-means
method. The classification is applied on daily fields of Z500 anomalies, which are calculated from the
daily climatologies. Each day over the reference period is attributed to the closest cluster (in terms of
euclidian distance to the barycenter of the cluster). Over the North-Atlantic domain, the optimal number
of clusters is 4, according to Michelangeli and al., 1995 2 .

Figure 3 shows the spatial patterns of the winter regimes obtained from the decomposition. The
sample contains all the days from november to may, over the period of reference. For the models, the
sample used for the classification is 11 times bigger than the one of the reanalyses (given that every
member is considered as independant). The NAO- regime, known to be often responsible for wet cold
waves over the northern Europe, is the least excited regime (frequence of 20 % in the observations). The
NAO+ regime, is often associated to a zonal circulation over the northern France where the weather is
wet and mild, whereas the south of the country is colder at night and drier. This is the most frequent
regime (frequence of 31 %). The Atlantic Ridge regime is rather humid and cool over France, except
along the Mediterranean coasts. The fourth regime, called Blocking, is the most persistent one, and leads
to severe dry, continental, cold waves, particularly in western Europe.

Figure 3 shows that the 2 models are able to reproduce correctly the spatial patterns of the weather
regimes over the North-atlantic region, in terms of localization of the anomalies. The good representation
of the patterns in ECMWF is quite remarkable. On the other hand, the intensity of the MF regimes is too
weak in comparison with ECMWF and NCEP regimes. A possible explanation for this deficiency is the
difference between the spatial resolutions of the two models, MF being too coarse.

In figure 4, we superimposed the forecast and observed occurrences for the 4 winter regimes. The
series of the two models correspond to the means over the 11 members (so that the values cannot be
directly confronted to the observations, that are considered as one realization in this ensemble approach).
It is obvious that there is no correspondance neither between the two models nor between models and
observations. Despite the good representation of the weather regimes by the models, it appears that the
occurrences of the regimes are not very predictible. This was verified with a basic study in terms of
scores (using correlations and decompositions into terciles of occurrences). Projecting predicted weather
regimes onto observed ones has been tested but it did not improve the scores in a significant way. Only
the NAO+ regime in MF seems to be better forecast, with one good prevision over two and only 4 false
alarms over the 29 studied years.

Models respond very differently to oceanic forcings of the Tropical Pacific and the Tropical Atlantic.
The sensitivity to ENSO is stronger in MF than in ECMWF. In MF, the NAO- regime is largely favoured
(unfavoured) during El Niño (La Niña) conditions. The NAO+ regime seems to be favoured when SST’s
2
Michelangeli, P.-A, R. Vautard, et B. Legras, 1995 : Weather Regimes : recurrence and quasi-stationarity. Journal of At-
mospheric Science, 52, 1237-1256

14
F IG . 3 – Spatial patterns of winter weather regimes (mean centroids obtained from daily anomalies of
Z500, by an automatic method of classification in 4 clusters). Unit : mgp. The interval between contours
is 25 mgp. Winters 1979-2007. North-Atlantic domain (30˚N-80˚N ; 85˚W-35˚E). For NCEP reanalysis
(models), the sample contains 4386 (48246) days.

are cold in the north of the Tropical Atlantic (without any strong ENSO forcing). In MF, the statistical
link between NAO- and ENSO, and the absence of link between NAO+ and ENSO have been tackled,
based on a linear study in term of modes of variability, obtained from an Empirical Orthogonal Function
decomposition. There is no clear precursor in SST for the Atlantic Ridge. The Blocking is more sensitive
to ENSO in ECMWF ; in MF it is linked to a ”horseshoe” structure, typical of the North-Atlantic basin.

The representation of the spatial patterns by the models in summer season is not as good as in winter.
Besides, the scores are not better for this season. Our study of the summer regimes shows an artificial
shift in the occurrences of the Blocking regime and the Atlantic Low regime forecast in MF in the ni-
neties. This shift is consistent with the strong mean trend in Z500 of the model over the last 29 years.
Different hypothesis have been raised to try to explain this trend. First, it is possible that the model res-
ponse to greenhouse gazes increase may be too strong. Second, a similar shift exists in the initial oceanic
conditions provided by Mercator (due to the assimilation of the altimetric data since 1993). Third, the
finest resolution of MF in the stratosphere could explain this trend of the Z500, because of too strong
connexions between the stratosphere and the troposphere. All these questions lead to reduce of the period
used to calculate the climatology of the model, to extract the signal of seasonal forecast polluted by this
artificial trend in Z500.

In a nutshell, this study confirms the pertinence of the analysis in terms of regimes, even if the predic-
tability is low. In perspectives, the links between the modes of variability and the regimes is being studied
again in Météo-France DCLIM, all the more since this study gave very promising results. The metho-
dology used in this work shall be adapted to the UKMO model, to carry out a multi-model approach
in the next few years, in the context of EUROSIP. To use this multi-model approach, we recommand to
project the forecast regimes over a basis of observed regimes and to use a common period to compute the
climatology of the models. At last, this work could be used to study the regimes over the North Pacific /
North America domain.

15
F IG . 4 – Occurrences of winter weather regimes (anomalies in %) over the period 1979-2007. Reana-
lyses NCEP (red), ensemble mean for Météo-France System 3 (green) and ensemble mean for ECMWF
System 3 (blue).

16
Acronymes

ACP : Analyse en Composantes Principales


ARPEGE : Action Recherche Petite Echelle Grande Echelle
CEPMMT (ou CEP) : Centre Européen de Prévisions Météorologiques à Moyen Terme
CERFACS : Centre Européen de Recherche et de Formation Avancée en Calcul Scientifique
CNRM : Centre National de Recherches Météorologiques
DCLIM : Direction de la CLIMatologie (Météo-France)
DJF : période Décembre - Janvier - Février
DROM : Départements et Régions d’Outre-Mer
ECMWF : European Centre for Medium-Range Weather Forecasts (en français : CEPMMT)
ECMWF S3 (ou ECMWF) : modèle ECMWF System 3
ENSO : El Niño Southern Oscillation
EUROSIP : EURpean Operational Seasonal - to - Interannual Predictions
GES : Gaz à Effet de Serre
GIEC : Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat
HOPE : Hamburg Ocean Primitive Equation model
IFS : Integrated Forecast System
INLN : Institut Non-Linéaire de Nice
IPSL : Institut Pierre Simon Laplace
IRI : International Research Institute
JJA : période Juin-Juillet-Août
JMA : Japan Meteorological Agency
LMD : Laboratoire de Météorologie Dynamique
MF : Météo-France
MF S3 (ou MF) : modèle Météo-France System 3
MJJAS : période Mai - Juin - Juillet - Août - Septembre
NAO : North Atlantic Oscillation
NATL : North ATLantic
NCEP : National Centers for Environmental Prediction

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NDJFM : période Novembre-Décembre-Janvier-Février-Mars
OASIS : Ocean Atmosphere Sea Ice Soil
OPA : Ocean PArallélisé
SST : Sea Surface Temperature
UKMO : United Kingdom Meteorological Office
ZCIT : Zone de Convergence Inter-Tropicale

18
TABLE DES MATIÈRES

Table des matières

Introduction 21

1 Problématique générale 23
1.1 Notion de prévisibilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
1.2 Outils et approches actuelles en prévision saisonnière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.2.1 Modèles forcés, modèles couplés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.2.2 Approche ensembliste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.2.3 Approche multi-modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
1.3 Techniques opérationnelles d’expertise à Météo-France . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.4 Quelle prévision saisonnière pour demain ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.4.1 Les limites de la prévision saisonnière traditionnelle . . . . . . . . . . . . . . . 25
1.4.2 Les régimes de temps : une approche novatrice pour la prévision saisonnière aux
moyennes latitudes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26

2 Présentation des outils numériques 27


2.1 Description des modèles couplés de prévision saisonnière exploités . . . . . . . . . . . . 27
2.1.1 Le modèle couplé de Météo-France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
2.1.2 Le modèle couplé du CEPMMT . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.2 Biais des modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
2.2.1 Biais océaniques d’hiver . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2.2.2 Biais atmosphériques d’hiver . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
2.3 Analyse des sources potentielles de prévisibilité dans les modèles . . . . . . . . . . . . 33
2.3.1 Comparaison entre la persistance des anomalies de SST simulées et observées . . 33
2.3.2 Connexion entre l’ENSO de novembre et les SST hivernales globales . . . . . . 35

3 Décomposition en régimes de temps pour la saison hivernale 37


3.1 Principe de classification automatique en régimes de temps . . . . . . . . . . . . . . . . 37
3.2 Les régimes de temps hivernaux ”observés” (réanalyses NCEP) . . . . . . . . . . . . . . 38
3.2.1 Structures spatiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 38
3.2.2 Séries temporelles d’occurrences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
3.3 Les régimes de temps hivernaux dans les modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
3.3.1 Structures spatiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
3.3.2 Séries temporelles d’occurrences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43

4 Prévisibilité des régimes d’hiver 49


4.1 Scores de prévision saisonnière des régimes d’hiver . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
4.1.1 Scores bruts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
4.1.2 Projection des régimes prévus sur la base des régimes observés . . . . . . . . . . 51
4.2 Précurseurs océaniques de la dynamique atmosphérique hivernale prévue . . . . . . . . 53

19
TABLE DES MATIÈRES

4.2.1 Impact de l’ENSO de novembre sur la dynamique atmosphérique hivernale prévue 53


4.2.2 Impact du gradient de SST entre Atlantique Tropical nord et sud sur la dyna-
mique atmosphérique hivernale prévue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
4.2.3 Précurseurs océaniques à l’origine des régimes d’hiver . . . . . . . . . . . . . . 58

5 Liens entre régimes de temps et modes de variabilité 63


5.1 Principe d’Analyse en Composantes Principales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
5.2 Liens entre les régimes de temps et les modes de variabilité dans Météo-France System 3 64

6 Décomposition en régimes de temps pour la saison estivale 67


6.1 Structures spatiales des régimes d’été . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
6.2 Occurrences des régimes d’été . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
6.3 Prévisibilité des régimes d’été . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

Conclusion et perspectives 75

Bibliographie 77

Table des figures 80

Liste des tableaux 81

A Prévision saisonnière pré-opérationnelle des régimes de temps à Météo-France 83

B Localisation des boı̂tes spatiales utilisées pour le calcul d’indices de SST 85

C Conditions océaniques postérieures aux régimes d’hiver de l’Atlantique Nord 87

D Modes de variabilité de la Z500 de décembre dans le modèle Météo-France System 3 89

20
INTRODUCTION

Introduction

Les régimes de temps peuvent être décrits comme des structures spatiales atmosphériques de grande
échelle, récurrentes, quasi-stationnaires dans l’espace, et persistantes dans le temps. Leur durée de vie
est généralement comprise entre 5 et 10 jours. Elles sont caractéristiques de l’atmosphère des moyennes
latitudes en particulier dans l’hémisphère nord. Elles ont été mises en évidence dès les années 1950 par
le synopticien Rex [23], qui a étudié plus précisément à l’époque les situations dites ”de blocage” à partir
de données observées. Reinhold et Pierrehumbert ont, plus tard (1982 [22]), étudié ces structures dans le
cadre d’un modèle numérique simplifié et ont alors introduit le terme consacré de ”régime de temps”.

Conceptuellement, le régime de temps peut être vu comme une sorte de pont entre le signal ”clima-
tique” (échelle supérieure au mois) et le signal ”météorologique” (échelle journalière à hebdomadaire).
Depuis les années 1990, les études s’appuyant sur ce concept se sont multipliées, notamment sous l’im-
pulsion de Vautard [29] qui a examiné les probabilités de transition entre les régimes de l’Atlantique Nord
ainsi que leur persistance, à partir de données pseudo-observées (premières réanalyses). Les régimes ont
ensuite été étudiés à partir de plus longues séries de données, sur l’Atlantique-Nord (Michelangeli et
al., 1995 [19], Cassou, 2004 [7]) ou encore l’Amérique du Nord (Straus et al., 2007 [24]). La capa-
cité des modèles à reproduire les entités ”régimes” et leurs liens avec les conditions océaniques, a été
également vérifiée. Cassou, 2001 [6] a par exemple étudié les régimes du modèle ARPEGE-Climat de
Météo-France. D’autres études utilisant les régimes ont porté sur des thématiques diverses, allant de la
descente d’échelle (Boe, 2007 [5]) au changement climatique (Cassou et Guilyardi, 2007 [10], Tourre
et al., 2005 [26]) ou encore aux événements extrêmes (Yiou et Nogaj, 2004 [31]). On se propose ici
d’introduire les régimes de temps sous l’angle de la prévision saisonnière.

Le développement de la prévision saisonnière, branche récente de la prévision climatique, s’est


accéléré depuis le début des années 2000, en écho à une forte demande de la part de nombreux ac-
teurs socio-économiques, appartenant aux secteurs de l’énergie, de la santé, de l’agriculture, des as-
surances ou encore de la gestion de la ressource en eau. Aujourd’hui, la plupart des grands centres
météorologiques mondiaux ont une activité de prévision saisonnière quasi-opérationnelle, basée sur des
simulations couplées, prenant en compte les interactions entre les différentes composantes du système
climatique que sont l’océan, l’atmosphère, la glace de mer et l’eau du sol. Les prévisions effectuées à
Météo-France sont accessibles aux clients privés depuis 2001, et au grand public depuis 2006 (sur le site
internet de Météo-France3 ).

Actuellement, l’expertise opérationnelle de prévision saisonnière s’appuie, à Météo-France, sur la


confrontation de plusieurs prévisions issues d’un panel de modèles internationaux (approche multi-
modèles). Les prévisions publiées sont généralement élaborées à partir de l’examen de moyennes tri-
mestrielles et fournies sous forme probabiliste. En effet, le but de la prévision saisonnière n’est pas de
fournir en détail différents paramètres physiques en un instant et un lieu donnés ; cela n’a aucun sens pour
toute prévision dépassant quelques jours d’échéance, du fait même de la nature chaotique du système cli-
3
http ://www.meteofrance.com

21
INTRODUCTION

matique. Il s’agit typiquement de fournir à l’usager des informations sur le temps sensible moyen, ou le
plus probable, susceptible de le concerner au cours du prochain trimestre.

Différents projets de prévision saisonnière, faisant intervenir plusieurs laboratoires européens se sont
succédés au cours des dernières années. DEMETER, projet à vocation non opérationnelle, a eu pour but
de valider divers modèles de prévision saisonnière et de quantifier les limites de prévisibilité (Morse et
al., 2004 [20]). ENSEMBLES, version ”moderne” de DEMETER, implique actuellement davantage de
pays et de modèles. Enfin, EUROSIP est un regroupement des 3 modèles de Météo-France, du CEPMMT
et de UKMO ; ce projet à vocation opérationnelle, a pour but de fournir des ensembles ”multi-modèles” :
la moyenne et la dispersion de l’ensemble constitué par tous les membres des 3 modèles confondus
servent ainsi à l’expertise. Le présent travail s’appuie précisément sur le jeu de données EUROSIP.

La participation aux réunions mensuelles de la cellule de prévision saisonnière opérationnelle de


Météo-France, composée de la DCLIM (Météo-France), du CERFACS, de Mercator-Océan et du CNRM,
m’a permis, au cours de ces 5 mois de stage, d’acquérir une perception concrète de l’utilisation - et de
l’utilité potentielle - des régimes de temps. Ceux prévus par le modèle de prévision saisonnière de Météo-
France sont en effet examinés depuis début 2006 à titre expérimental lors de l’expertise et constituent une
sorte d’aide supplémentaire à la décision consensuelle. Ils sont considérés comme une ”grille de lecture”
intéressante et prometteuse.

L’utilisation opérationnelle des régimes nécessite cependant une analyse stricte, structurée et complète
des performances du modèle sur une période dite d’apprentissage suffisamment longue. Cette étude n’est
possible que depuis l’année dernière, où les prévisions ont été ”rejouées” a posteriori depuis 1979. Dans
ce stage, nous avons, à partir de ces longues séries de prévisions, examiné si les régimes de l’Atlantique
Nord prévus par les modèles étaient ou non réalistes par rapport aux régimes observés, en terme de struc-
tures spatiales et d’occurrences moyennes. La question principale a été ensuite de savoir si l’occurrence
moyenne des régimes sur une saison était ou non prévisibible.

Dans un premier chapitre introductif, la notion même de prévisibilité, les sources potentielles de
prévisibilité à échelle saisonnière, les méthodes d’expertise actuelles, ainsi que la fiabilité et les limites
de la prévision saisonnière traditionnelle sont discutées. Ce chapitre expose la problématique générale et
introduit le concept de régime de temps.
Le second chapitre contient une présentation des deux modèles numériques de prévision saisonnière
exploités. Les biais moyens de ces modèles sont discutés et on vérifie qu’il y a effectivement à échelle
saisonnière des sources de prévisibilité exploitables. Il s’agit de s’assurer ici que les modèles ne simulent
pas un climat trop éloigné de la réalité.
Le chapitre 3 débute par une description de la méthode de décomposition en régimes de temps uti-
lisée. Nous y examinons les régimes de la saison d’hiver et étudions en particulier les structures spatiales
de ces régimes ainsi que leurs occurrences moyennes.
Le chapitre 4 étudie la prévisibilité des régimes d’hiver : plusieurs scores simples de prévision
des régimes hivernaux sont discutés. Nous examinons en outre quelles sont les conditions océaniques
préalables aux fortes ou aux faibles occurrences de chaque régime prévu.
Le chapitre 5 est le fruit d’une interaction avec la DCLIM : on se propose, dans le cadre du modèle
de Météo-France, de relier les régimes de temps aux modes de variabilité du modèle, obtenus de manière
classique et linéaire par Analyse en Composantes Principales.
Le sixième et dernier chapitre présente les différents régimes d’été (structures spatiales et occur-
rences) et les limites de leur utilisation opérationnelle.
Pour finir, conclusions et perspectives sont données dans une dernière section.

22
CHAPITRE 1. PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE

Chapitre 1

Problématique générale

1.1 Notion de prévisibilité

Si la prévision saisonnière peut fournir des informations sur le climat moyen à l’échelle de la saison à
venir, c’est en grande partie grâce à ce que l’on appelle la mémoire des composantes lentes du système
climatique (océan, glace de mer et eau du sol). En particulier, l’océan possède une capacité thermique
beaucoup plus forte que l’atmosphère, où règne au jour le jour un comportement par excellence chao-
tique. Ainsi, la mémoire des conditions atmosphériques d’un jour donné est très rapidement perdue, alors
que l’océan peut faire persister des conditions particulières de surface (SST, température de surface de
la mer) et de subsurface plus longtemps. La prévision saisonnière se base sur l’hypothèse que l’océan
influence l’atmosphère ; la prévisibilité est ainsi assurée par l’évolution des conditions océaniques dans
certaines zones clefs (notamment les régions tropicales) et leur couplage avec l’atmosphère.

L’oscillation australe ENSO (El Niño Southern Oscillation) de l’océan Pacifique Tropical est le
phénomène couplé océan/atmosphère qui induit le plus de variabilité interannuelle (en terme de SST
et de précipitations notamment) et engendre le plus de répercussions climatiques à échelle planétaire.
C’est de ce phénomène ENSO qu’est issue la part prépondérante du ”signal de prévision saisonnière”,
en particulier dans les régions tropicales. Une petite part de prévisibilité due à ENSO aux moyennes la-
titudes, provient des téleconnexions entre les tropiques et les extra-tropiques. Ces téléconnexions (Tren-
berth et al., 1998 [27]) ont un impact sur le climat américain et dans une moindre mesure sur le climat
européen/Nord-Atlantique (Greatbatch et al., 2004 [13]). D’autres études ont montré que des conditions
particulières de SST dans l’Atlantique Tropical (Cassou, 2004 [7]) avaient un impact sur l’occurrence
de certains régimes de temps dans l’Atlantique Nord. Dans ce rapport, nous serons amenés à examiner les
différentes structures de SST susceptibles d’être reliées à certains régimes de temps et pouvant constituer
une source potentielle de prévisibilité sur l’Atlantique Nord.

Il est essentiel de garder à l’esprit qu’aux échelles journalières à interannuelles et aux moyennes lati-
tudes, l’état atmosphérique est surtout dominé par le chaos (appelé également ”bruit” ou encore ”variabi-
lité interne de l’atmosphère”). Le couplage entre l’océan et l’atmosphère est en effet, à ces échelles, peu
important en dehors des zones tropicales (30 ˚S ; 30 ˚N approximativement). La ”sensibilité aux condi-
tions initiales” est, dans un contexte de modélisation, une manifestation du bruit atmosphérique : elle
se traduit par des modifications sensibles de la circulation atmosphérique prévue, lorsque les conditions
initiales sont perturbées de manière infinitésimale. La prévisibilité des états atmosphériques à échelle
saisonnière peut être en fin de compte définie comme le rapport entre le signal associé aux conditions
aux limites (ici, océaniques) et le bruit atmosphérique.

23
1.2. OUTILS ET APPROCHES ACTUELLES EN PRÉVISION SAISONNIÈRE

1.2 Outils et approches actuelles en prévision saisonnière


Pour pouvoir tirer un maximum d’informations de cette petite part de prévisibilité qui existe à échelle
saisonnière aux moyennes latitudes, la prévision saisonnière traditionnelle s’appuie actuellement sur
différents outils et approches, que nous décrivons ci-après.

1.2.1 Modèles forcés, modèles couplés


Le but ultime de la prévision saisonnière est de prévoir des variables atmosphériques de surface res-
senties telles que la température ou les précipitations. Dans la suite du raisonnement, nous adoptons un
”point de vue atmosphérique”, c’est-à-dire que l’on considère la surface océanique comme une condition
aux limites vis-à-vis de l’atmosphère.
Pour pouvoir exploiter le signal conféré à l’atmosphère par ces conditions aux limites, il est nécessaire
de pouvoir modéliser correctement ce qui se passe à l’interface en particulier océan/atmosphère. On peut
alors utiliser un modèle atmosphérique forcé, auquel on fournit les SST prévues par un modèle océanique
(généralement statistique). Au lieu ”d’imposer” les SST prévues par le modèle d’océan au modèle at-
mosphérique (qui ne sont pas nécessairement équilibrées avec les flux atmosphériques sus-jacents), on
peut aussi permettre au modèle atmosphérique de rétro-agir avec le modèle d’océan : dans ce cas, on parle
de modèle couplé. Les échanges et interactions à la surface de l’océan entre les 2 modèles océanique et
atmosphérique sont alors explicitement pris en compte. La plupart des grands centre météorologiques
mondiaux (dont Météo-France) privilégient désormais les modèles couplés, que ce soit pour la prévision
saisonnière ou les simulations climatiques, et c’est avec ces outils que nous avons travaillé.

1.2.2 Approche ensembliste


Il est peu pertinent pour effectuer des prévisions au-delà de la moyenne échéance (J+4) d’exploiter
une seule simulation déterministe, en particulier aux moyennes latitudes. Il est indispensable d’utiliser
un panel de simulations que l’on appelle ensemble, constitué de différents membres, pour lesquels les
états initiaux océanique et/ou atmosphérique ont été légèrement perturbés. Nous adoptons cette approche
ensembliste dans notre cadre de prévision saisonnière. Son but est d’estimer la sensibilité aux conditions
initiales et de s’affranchir au mieux du bruit atmosphérique, par définition non prévisible. Le calcul de la
moyenne d’ensemble (moyenne entre tous les membres) permet en effet d’éliminer ce bruit (la moyenne
d’ensemble du bruit atmosphérique est en théorie nulle si le nombre de membres est infini). Quand bien
même le ”signal de prévision saisonnière” est faible, on cherche par cette opération de moyenne à en
extraire l’information la plus fiable possible, c’est-à-dire la moins polluée par le bruit.

1.2.3 Approche multi-modèles


Chaque modèle possède ses atouts et ses faiblesses : certains prennent en compte plus que d’autres
la chimie atmosphérique ou les conditions initiales de la stratosphère par exemple, d’autres dérivent trop
vite ou ne sont pas assez ”dynamiques”. Les différents modèles de prévision saisonnière utilisés à travers
le monde, qu’ils soient statistiques, couplés ou forcés, sont alors traditionnellement confrontés, afin de
comparer leurs prévisions respectives. Prendre en compte plusieurs modèles permet alors d’échantillonner
une gamme plus large de conditions initiales et éventuellement de s’affranchir d’un défaut intrinsèque
pour un modèle particulier et dans des conditions particulières. En outre, la dispersion des prévisions
entre les différents modèles fournit une information supplémentaire, par rapport à la simple moyenne
d’ensemble des différents membres d’un seul modèle : plus les prévisions entre les modèles sont proches,
plus on accordera de confiance dans la prévision expertisée finale.
Cette approche multi-modèles est notamment mise à profit lors de l’expertise opérationnelle de
prévision saisonnière effectuée à Météo-France. D’autre part, le projet EUROSIP piloté actuellement

24
CHAPITRE 1. PROBLÉMATIQUE GÉNÉRALE

au CEPMMT a précisément pour but de construire des ensembles multi-modèles, constitués par les
différents membres des 3 modèles couplés de prévision saisonnière du CEPMMT, de Météo-France et
de UKMO.

1.3 Techniques opérationnelles d’expertise à Météo-France


Ce paragraphe a pour but de dépeindre un portrait rapide de l’expertise de prévision saisonnière, telle
qu’elle est effectuée actuellement à Météo-France.

Chaque fin de mois, les membres de la cellule de prévision saisonnière se réunissent à Météo-France
pour élaborer le ”Bulletin Climatique Global” de prévision saisonnière. Après un tour d’horizon des
observations, les prévisions de SST, de circulation générale, de précipitations et de température pour
le trimestre à venir sont analysées à partir d’une expertise multi-modèles mettant à profit les modèles
du CEPMMT (Europe), de l’UKMO (Grande-Bretagne), de Météo-France (France), de JMA (Japon) et
d’IRI (Etats-Unis). Les prévisions synthétiques sont présentées sous forme de scenarii les plus probables
en terme de températures et de précipitations, sur la France Métropolitaine, les DROM et la Nouvelle-
Calédonie. Pour l’expertise sur la France métropolitaine, on examine également, à titre expérimental, les
régimes de temps prévus par le modèle de Météo-France.
A partir d’un large ensemble de 12 modèles dynamiques (dont font partie les 4 modèles couplés
du CEPMMT, de l’UKMO, de Météo-France et de JMA) et de 8 autres modèles statistiques, ENSO
est également suivi jusqu’à 1 an d’échéance. On cherche à prévoir l’évolution d’un événement ENSO
préexistant ou son éventuel déclenchement, ainsi que ses connexions tropicales. Suivant la plus ou moins
grande dispersion des 20 modèles, la confiance dans la prévision est plus ou moins forte.
A posteriori, un bulletin de vérification des prévisions saisonnières est rédigé (de manière routinière
depuis juin 2007). Outre la reprise intégrale des prévisions saisonnières de SST, de température et de
précipitations qui sont confrontées aux observations, on y compare les anomalies d’occurrence des
régimes de temps identifiées par le modèle de Météo-France (en moyenne sur la période de prévision)
et les régimes de temps observés (déduits des réanalyses NCEP). Un exemple de prévision de régimes
pour l’hiver 2008 par le modèle Météo-France System 2 (alors opérationnel), ainsi que la vérification
associée, sont présentés en annexe A.

1.4 Quelle prévision saisonnière pour demain ?


1.4.1 Les limites de la prévision saisonnière traditionnelle
Grâce aux récents et nombreux progrès de la modélisation numérique du système terre/océan/atmos-
phère, les scores de la prévision saisonnière traditionnelle sont aujourd’hui prometteurs dans les régions
proches de l’équateur (en particulier pour l’ENSO) ; grâce au fort couplage océan / atmosphère, la
prévisibilité y est en effet plus importante qu’ailleurs (rapport signal sur bruit plus ”fort”). Les scores
sont par contre bien moins bons dans les régions extra-tropicales (moyennes et hautes latitudes) du fait
de la domination des comportements chaotiques (typiquement : les tempêtes ou les fluctuations du jet
d’altitude), par définition non prévisibles avec une approche déterministe.
On prévoit mal les variables de surface telles que les précipitations ou la température à 2 m, en
revanche les variables de circulation de grande échelle (comme l’altitude géopotentielle du niveau de
pression 500 hPa) sont bien mieux prévues. Les prévisions de température sont toutefois plus fiables
que les prévisions de précipitations, qui constituent actuellement le paramètre le plus mal prévu par les
modèles. C’est précisément sur ce constat que nous allons nous appuyer par la suite à travers les régimes
de temps, afin d’obtenir une information indirecte sur les variables de surface. Notons enfin que les

25
1.4. QUELLE PRÉVISION SAISONNIÈRE POUR DEMAIN ?

prévisions saisonnières traditionnelles aux moyennes latitudes de l’hémisphère nord sont actuellement
meilleures en hiver qu’en été.

1.4.2 Les régimes de temps : une approche novatrice pour la prévision saisonnière aux
moyennes latitudes
Il est clair que l’information classique donnée par un paramètre moyenné sur 3 mois en un point de
grille est inadaptée pour ”résumer” le temps ressenti sur la saison aux moyennes latitudes, notamment en
Europe. En particulier, les champs de précipitations simulés, sont souvent difficilement exploitables du
fait de leur caractère très bruité et il est rare qu’un scénario de précipitations utilisant les sorties brutes
des modèles soit proposé à l’issue de l’expertise de prévision saisonnière.
La vision en régimes de temps, qui contient une information de circulation à grande échelle, semble
être une approche complémentaire - sans parler toutefois d’alternative - à la vision classique en quantiles
et moyennes d’ensemble (de températures ou de précipitations) de la prévision saisonnière aux moyennes
latitudes. De l’occurrence des régimes de temps sur l’Atlantique Nord pendant une saison donnée, on peut
effectivement tirer une information qualitative très utile, dans la mesure où les régimes expliquent une
partie du temps sensible observé et ressenti sur l’Europe de l’Ouest. Chaque régime de temps privilégie
en effet un temps sensible particulier et peut ainsi favoriser par exemple tempêtes, canicules, vagues de
froid, fortes pluies, etc. Cassou et al., 2005 [9] ont ainsi étudié les relations statistiques entre régimes et
conditions de températures et de précipitations sur l’Europe de l’Ouest à partir d’observations pour l’été.
Des études similaires pour l’hiver ont été effectuées par Yiou et Nogaj, 2004 [31].
D’autre part, en étudiant l’occurrence des régimes de temps pour la saison à venir, on semble plus à
même de pouvoir distinguer plusieurs comportements atmosphériques récurrents au cours d’une même
saison, plutôt qu’une moyenne d’un paramètre ”lissée” sur 3 mois, qui ne contient aucune indication
de dispersion. Une anomalie moyenne nulle de température prévue sur 3 mois peut en effet tout à fait
correspondre à la succession d’une période très chaude puis d’une période très froide, par exemple. Au
final, la moyenne de température ne donne donc pas d’information ”ressentie” et utile à l’usager.
Les régimes donnent finalement une vision plus ”dynamique” et synthétique de la prévision. Connais-
sant le lien entre la dynamique atmosphérique en moyenne troposphère et les conditions de surface ob-
servées, la prévision en terme de régimes de temps permet d’accéder indirectement à la prévision des
variables d’impact ressenties par l’usager et de s’affranchir du fait que l’on prévoit mal directement les
conditions de surface. De l’information de grande échelle donnée par les régimes (en terme de circulation
générale sur l’Atlantique Nord), on peut ensuite déduire une information plus locale (par exemple pour
les régions de France) du temps sensible ressenti, à la fois en terme de températures et de précipitations,
en utilisant la technique dite de ”descente d’échelle” (Boe, 2007 [5]). Toute la question est de savoir si
les modèles numériques couplés actuels sont capables de représenter des régimes conformes aux régimes
observés, en terme de structures spatiales ou d’occurrences temporelles, ou de liens avec l’océan, etc.
D’autre part, les régimes simulés par différents modèles sont-ils similaires ou, à défaut, comparables ?

Dans ce manuscript, on se propose en somme de discuter de la pertinence de l’utilisation d’une


prévision saisonnière en terme de régimes de temps, dans le cadre d’une expertise opérationnelle de
prévision saisonnière aux moyennes latitudes.

26
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES OUTILS NUMÉRIQUES

Chapitre 2

Présentation des outils numériques

2.1 Description des modèles couplés de prévision saisonnière exploités


2.1.1 Le modèle couplé de Météo-France
La version actuellement opérationnelle du modèle de Météo-France, ”Météo-France System 3” (qui
sera abrégée par la suite MF), est constituée :
– du modèle atmosphérique ARPEGE-Climat (version 4), modèle de circulation générale global et
spectral développé par le CNRM en collaboration avec le CEPMMT (Déqué et al., 1994 [12]),
– et du modèle océanique OPA global (en configuration ORCA2), développé par l’IPSL et maintenu
par MERCATOR dans le cadre de la prévision saisonnière (Madec, 1998 [17]).

La résolution du modèle ARPEGE-Climat correspond à une troncature T42 (environ 2,8˚ par 2,8˚)
pour les paramètres physiques (températures de surface, précipitations, etc.) et T63 (environ 1,8˚ par
1,8˚) pour les paramètres dynamiques (vents, pression, géopotentiel, etc.). Cette version d’ARPEGE-
Climat possède 91 niveaux verticaux (version dite ”stratosphérique” car possédant de nombreux niveaux
verticaux dans la stratosphère). Le modèle océanique OPA en configuration ORCA2 est intégré sur une
grille non uniforme dite Arakawa de type C, dont la résolution horizontale est de 2˚ en moyenne, la-
quelle est raffinée dans les tropiques, en Méditerranée et en Mer Rouge. La résolution horizontale varie
ainsi de 55 à 222 km. Cette version d’OPA comporte 31 niveaux verticaux (le premier niveau correspon-
dant aux 10 premiers mètres de profondeur). Le coupleur OASIS3, développé au CERFACS (Valcke et
al., 2004 [28]), permet le traitement synchronisé des échanges 2D à l’interface océan-atmosphère des 2
modèles ARPEGE-Climat et OPA. Le couplage entre OPA et ARPEGE-Climat a lieu toutes les 24h, et
OASIS3 se charge alors des interpolations nécessaires entre grilles. Dans cette étude, seules les données
atmosphériques ont été exploitées. Elles ont été réinterpolées sur une grille de 2,5˚ par 2,5˚, soit 73 points
en latitude et 144 points en longitude (grille de référence dans notre cas pour les 2 modèles et les obser-
vations).

Précisons que :
– Les états initiaux océaniques sont fournis par MERCATOR. Les analyses océaniques initiales sont
issues du modèle PSY2G global à 2˚ de résolution, qui assimile des données altimétriques (ano-
malies de hauteur de la surface de l’océan), des données de SST ainsi que des profils verticaux
de température et de salinité (mesures in-situ). Le système d’assimilation actuel, nommé SAM-2
(SAM pour Système d’Assimilation Mercator) est basé sur une méthode de filtrage SEEK (Sin-
gular Extended Evolutive Kalman). Le lecteur pourra se référer à la Newsletter n˚13 de Mercator
Océan, 2004 [14] et à Bahurel, Ferry et al., 2005 [3],
– Les états initiaux atmosphériques sont fournis par le CEPMMT,

27
2.2. BIAIS DES MODÈLES

– Le modèle de glace n’est pas activé ici, il n’y a qu’un rappel vers la glace climatologique,
– La concentration des gaz à effet de serre atmosphériques évolue chaque année, pour prendre en
compte le réchauffement climatique global dû à l’action anthropique : les observations sont prises
en compte jusqu’en 2000, puis le scénario A1B du GIEC post 2000,
– Les simulations de prévision saisonnière par MF sont lancées mensuellement le 1er du mois et
tournent sur le calculateur du CEPMMT,
– Le post-traitement des sorties brutes de modèle (calculs statistiques, production graphique) est ef-
fectué à Météo-France (DCLIM/DEV et CNRM).

La présente étude s’appuie sur des ensembles (11 membres) de prévisions saisonnières effectuées
a posteriori (en mode ”hindcast”) sur la période 1979-2007 dite ”de référence”. Dans ce manuscript,
nous nous focalisons uniquement sur les prévisions pour la saison hivernale (DJF), initialisées au 1er
novembre et celles pour la saison estivale (JJA), initialisées au 1er mai.
Pour obtenir des ensembles de 11 membres pour chaque mois n, on fait tourner le modèle à par-
tir de combinaisons d’analyses atmosphériques et océaniques ”légèrement” perturbées. 6 analyses at-
mosphériques sont disponibles et correspondent aux 5 derniers jours du mois n-1 à 00h UTC ainsi que
l’analyse du 1er du mois n à 00h UTC ; les 2 analyses océaniques sont datées du mercredi le plus près
du 15 du mois n-1 et du mercredi suivant. En combinant ces 2 analyses océaniques et ces 5 analyses
atmosphériques, on obtient 10 membres perturbés. Une simulation dite de contrôle est effectuée avec
l’analyse atmosphérique du 1er du mois. Nous disposons donc de 11 membres pour chaque prévision à
7 mois d’échéance (soit 29 prévisions d’hiver et 29 prévisions d’été sur la période 1979-2007). Notons
qu’en mode opérationnel depuis janvier 2008, 41 membres sont disponibles ; ici, en mode hindcast pour
les prévisions sur la période de référence 1979-2007, nous n’en avons que 11, pour des raisons de coût
informatique.

2.1.2 Le modèle couplé du CEPMMT


Le modèle couplé du CEPMMT dédié à la prévision saisonnière, dont la version opérationnelle est
actuellement ”ECMWF System 3” (abrégé ECMWF par la suite), est constitué :
– du modèle atmosphérique IFS (cycle 31r1), de troncature T159 (soit une maille de 1.125˚ par
1.125˚) et possédant 62 niveaux verticaux,
– et du modèle océanique HOPE.
Le couplage entre IFS et HOPE est géré par le coupleur OASIS3. Les analyses océaniques intégrées
dans HOPE sont fournies par le système d’assimilation HOPE-OI (Optimum Interpolation scheme). Les
ensembles de prévisions sont constitués exactement de la même façon que pour MF (même période 1979-
2007, 11 membres, prévisions à 7 mois d’échéance). Le modèle de glace n’est pas non plus activé. Les
prévisions d’ECMWF ont été réinterpolées sur la même grille que MF (2,5˚ par 2,5˚). Le lecteur pourra
se référer à Anderson et al., 2006 [2] pour obtenir plus d’informations sur le modèle couplé ECMWF
System 3.

2.2 Biais des modèles


Avant d’examiner comment les régimes de temps et leurs connexions océaniques sont simulés, il est
nécessaire d’étudier le comportement général des modèles, et en particulier leurs biais climatologiques
moyens. Le biais d’un paramètre donné s’obtient en calculant en chaque point de grille la différence entre
la valeur simulée, et la valeur observée correspondante, en moyenne sur 1979-2007 et pour une échéance
donnée. Cet examen systématique est fondamental avant d’aborder n’importe quelle étude, ne serait-ce
que pour bien comprendre où est situé le climat ”prévu” des modèles par rapport au climat ”réel”. Nous

28
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES OUTILS NUMÉRIQUES

étudions uniquement dans cette partie les biais des simulations initialisées le 1er novembre (prévisions
d’hiver), sur la période novembre-février.

2.2.1 Biais océaniques d’hiver


Dans notre étude, nous avons été amenés à calculer différents indices de SST sur des boı̂tes spa-
tiales situées dans les océans Pacifique et Atlantique (dont la plupart sont utilisées classiquement dans
la littérature) et correspondant à des sources potentielles de forçage pour l’atmosphère. Leur localisation
est fournie en annexe B.

Erreurs en SST sur la boı̂te Niño3.4


La figure 2.1 montre l’évolution des erreurs en SST de MF (a) et de ECMWF (b) au fur et à mesure
des 7 échéances des prévisions hivernales, sur la boı̂te Niño 3.4. Cette boı̂te capture à la fois la variabilité
interannuelle des SST, et le déplacement de la zone de convection profonde atmosphérique, associé au
déplacement de la Warm Pool vers le centre-est du bassin Pacifique pendant un événement El Niño. On
constate pour MF que l’erreur médiane est faible pendant le premier mois de novembre, puis qu’elle
devient de plus en plus négative au fur et à mesure que l’échéance de la prévision augmente. Cette erreur
atteint - 0,9˚C environ en mai, soit plus d’une fois l’écart-type.

(a) MF (b) ECMWF

F IG . 2.1 – Dispersion des erreurs des modèles en SST sur la boı̂te Niño3.4 (170˚W - 120˚W ; 5˚S - 5˚N)
et évolution de ces erreurs entre novembre et mai. (a) : MF et (b) : ECMWF. Les boı̂tes à moustache
représentent la répartition des erreurs des 11 membres pour les 29 années de prévision d’hiver (319 cas
pour une boı̂te à moustache correspondant à un mois donné).

On remarque également que la dispersion des erreurs est faible en novembre et qu’elle est plus impor-
tante ensuite. Cette dispersion reste confinée dans une enveloppe décroissante (ou dérive) relativement
régulière entre janvier et mai. Dans les autres boı̂tes Niño du Pacifique (non montré), les erreurs sont
plus irrégulières et la dispersion est plus forte, notamment pour les échéances lointaines. C’est le cas
de la boı̂te Niño1+2, où en mai, l’erreur médiane est beaucoup plus forte que les mois précédents (non
montré) : les valeurs varient en effet de -2˚C à +4˚C entre les 29 années et les 11 membres, avec une
dérive vers le chaud marquée pour cette boı̂te côtière.

29
2.2. BIAIS DES MODÈLES

L’erreur médiane dans ECMWF sur Niño3.4 est certes légèrement positive sur DJF, mais reste faible.
D’autre part, la dispersion des erreurs est moins forte dans ECMWF par rapport à MF (figure 2.1 (b)).
Surtout, on ne remarque aucune dérive des erreurs vers le froid. Le refroidissement progressif de MF
dans le Pacifique Tropical aura en conséquence tendance à entraı̂ner, en moyenne, une sous-estimation
du potentiel convectif par le modèle dans cette zone lors des événements ENSO, dont la source de chauf-
fage diabatique restera cantonnée à l’ouest. Cette erreur pourrait avoir des répercussions en termes de
téléconnexions (Trenberth et al., 1998 [27]) au-delà de 4 mois. Notons cependant que l’erreur médiane
du modèle MF est, en moyenne trimestrielle, quasi-nulle sur la période DJF (+ 0,25 ˚C en décembre, 0
˚C en janvier puis - 0,25 ˚C en février approximativement), notre période d’intérêt pour l’opérationnel,
sur laquelle la dérive froide n’est donc pas assez rapide pour perturber les prévisions.

Biais climatologiques moyens globaux de SST

La figure 2.2 montre l’évolution du biais climatologique moyen en température de surface pour les
4 premières échéances mensuelles des prévisions d’hiver (novembre à février), pour les 2 modèles et sur
l’ensemble de la planète. Ce paramètre, utilisé ici comme équivalent de la SST, n’est pas pertinent dans
les zones de glace - on rappelle que le modèle de glace n’est pas activé. En conséquence, les forts biais
au-delà de 60-70˚N en latitude dans les 2 modèles sont artificiels et ne sont donc pas commentés.

Les biais de MF sont, lors du premier mois d’intégration (NOV), plutôt positifs dans les océans de
l’hémisphère nord (en particulier sur les bordures est des bassins océaniques) et plutôt négatifs entre
l’équateur et 50˚S. Les biais sont fortement positifs aux alentours de 60˚S, c’est-à-dire au niveau du
courant circum-polaire. Cela est en partie dû au fait que les dépressions atmosphériques simulées ne sont
pas assez dynamiques dans ces régions : la tension de vent en surface de l’océan est alors trop faible.
Cela induit un déficit d’évaporation et une stabilisation de la couche de mélange océanique, plus pincée,
d’où des biais chauds très forts s’accentuant au fil des échéances, pour atteindre des valeurs supérieures
à 5˚C en février. Localement le long des côtes est-américaines, le biais est nettement positif et atteint 3˚C
dès le premier mois, suggérant que le Gulf-Stream est trop près des côtes dans le modèle.

Au fil des échéances, les biais en SST deviennent très forts près de certaines côtes. Ils dépassent
3˚C en février au large du Chili et du Pérou en fin d’échéance et 5˚C au large de l’Angola par exemple,
en s’étendant vers le centre du bassin. Ces biais forts s’expliquent souvent dans la plupart des modèles
par une représentation erronnée des upwellings côtiers et des nuages bas. Ces biais chauds du modèle
peuvent alors altérer l’intensité et la position de la convection profonde atmosphérique et modifier la
dynamique de l’atmosphère de manière irréaliste (en particulier la convection africaine). On notera aussi
que MF se refroidit trop - entre 1 et 2 ˚C - au niveau de la plupart des anticyclones subtropicaux, ce dans
les deux hémisphères. Cela est dû au fait que les alizés sont trop forts. Notons enfin que les SST sous la
ZCIT à la fois Pacifique et Atlantique autour de 10 ˚N sont trop chaudes à cause d’une convection trop
faible (réchauffement radiatif trop fort à la surface).
Dans ECMWF, les biais de SST sont moins forts que MF au début de la prévision (NOV). Sur les
bassins de l’hémisphère nord et l’océan indien, les biais deviennent ensuite majoritairement négatifs,
mis à part au niveau des courants de bord ouest (Kuroshio, Gulf-Stream). Il n’y a pas comme dans MF
de biais positif au niveau des bords est des bassins. En revanche, comme pour MF, les biais deviennent
plutôt positifs dans l’hémisphère sud, surtout sur les bords est des bassins (courants du Benguela et
d’Humboldt). Les anticyclones subtropicaux sont pour la plupart trop froids, le courant-circum polaire
trop chaud (même si l’intensité des biais est environ 50 % plus faible que MF) et le Gulf-Stream trop
proche des côtes.

30
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES OUTILS NUMÉRIQUES

(a) MF (b) ECMWF

F IG . 2.2 – Biais climatologiques moyens des modèles en SST (unité : ˚C) pour les 4 premières échéances
mensuelles des prévisions d’hiver (novembre (NOV) à février (FEV)). (a) : MF et (b) ECMWF. Pour
chaque mois, la climatologie du modèle sur la période 1979-2007 (en moyenne d’ensemble) est re-
tranchée à celle des réanalyses NCEP.

31
2.2. BIAIS DES MODÈLES

En résumé, on retrouve de grandes similarités entre les biais en SST des 2 modèles. Il est intéressant
de noter que ces biais de prévision saisonnière sont assez semblables à ceux des simulations longues
(climatiques) des modèles couplés. Ceci suggère que ces derniers se mettent en place très rapidement
(lors de la première année de simulation semblerait-il).

2.2.2 Biais atmosphériques d’hiver


Nous étudions dans ce paragraphe les biais du modèles en altitude géopotentielle du niveau de pres-
sion 500 hPa (Z500), toujours sur la période novembre-février, en nous focalisant sur le domaine Nord-
Atlantique.

(a) MF (b) ECMWF

F IG . 2.3 – Biais climatologiques moyens des modèles en Z500 (unité : mgp) pour les 4 premières
échéances mensuelles des prévisions d’hiver. (a) : MF et (b) : ECMWF. L’intervalle entre les contours
est de 20 mgp. Les valeurs en pointillés (trait plein) sont négatives (positives). Pour chaque mois, la
climatologie du modèle sur la période 1979-2007 (en moyenne d’ensemble) est retranchée à celle des
réanalyses NCEP.

Le biais en Z500 de MF (figure 2.3 (a)) atteint - 40 mgp vers Terre-Neuve en novembre, contrastant
avec environ + 40 mgp entre Islande et Grande-Bretagne. Les biais prennent ensuite peu à peu la forme
d’un dipôle nord/sud entre décembre et février, avec une Z500 trop basse sur l’Atlantique Central (- 80
mgp) et trop haute au niveau du Groënland (+ 80 mgp). Concrètement, cette structure de biais dipolaire
se traduit par un déplacement vers le sud du jet des moyennes latitudes et par une dynamique très zonale
sur l’Europe de l’Ouest. Elle montre une faiblesse chronique de l’activité des ondes stationnaires.
Le biais du modèle ECMWF en Z500 (figure 2.3 (b)) est moins important que dans MF en novembre.

32
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES OUTILS NUMÉRIQUES

En revanche, pour la période DJF, la structure de biais est caractérisée par un très fort noyau négatif de
Z500 centré sur l’Islande, atteignant des valeurs de - 140 mgp en janvier, et un noyau faiblement positif
sur le bassin méditerranéen. Ce biais se traduit dans ECMWF par une circulation plus septentrionale du
jet et/ou une modification de son intensité.

Finalement, parmi les 2 modèles étudiés, l’un a tendance à rejeter les perturbations atlantiques d’hi-
ver trop au nord (ECMWF) et l’autre à les faire circuler trop au sud (MF). On peut donc s’attendre
à ce que cette différence dans les biais de Z500 des 2 modèles ait une incidence sur les régimes de
temps atmosphériques simulés. Les 2 modèles ayant les mêmes schémas de résolution dynamique des
équations d’évolution, il est donc possible que ces différences soient en partie dues aux résolutions
spatiales différentes des 2 modèles, et à l’interaction entre la physique propre à chaque modèle et la dy-
namique.

2.3 Analyse des sources potentielles de prévisibilité dans les modèles


Les diagnostics qui suivent visent à vérifier que les SST, source principale de prévisibilité, sont bien
simulées dans les modèles en terme d’évolution temporelle, en dépit des biais en SST déjà discutés. Si
ce pré-requis est bien rempli, elles peuvent être alors des sources potentielles de prévisibilité, pourvu
que les interactions océan/atmosphère soient bien représentées par les modèles. La plupart des sorties de
modèles seront comparées aux réanalyses NCEP, pour validation sur la période de référence 1979-2007.
Nous étudions uniquement ici la saison d’hiver (prévisions pour la période novembre-mai).

2.3.1 Comparaison entre la persistance des anomalies de SST simulées et observées


Le but de ce paragraphe est de s’assurer que la persistance des anomalies de SST simulée dans MF
est fidèle à la persistance ”réelle” des SST. En d’autres termes, on veut vérifier que le modèle est ca-
pable de faire perdurer des anomalies de SST prééxistantes, lesquelles vont alors pouvoir ”imprimer leur
marque” à l’atmosphère et fournir du signal. La méthode consiste à calculer l’auto-corrélation entre les
anomalies de SST de novembre et les anomalies de SST des mois suivants.
Nous avons effectué et surperposé ces diagnostics de persistance, pour chaque membre de MF et les
réanalyses NCEP (données Reynolds pour la SST), en nous restreignant à deux zones océaniques tropi-
cales clefs : le Pacifique Tropical (figure 2.4) et l’Atlantique Tropical (figure 2.5). Les boı̂tes spatiales
utilisées pour calculer des indices de SST sur ces zones sont disponibles en annexe B.
Pour les réanalyses NCEP, les corrélations portent sur 29 cas (29 moyennes mensuelles sur 1979-
2007) et sont en rouge sur les graphiques. Pour le modèle MF, on effectue 3 calculs de corrélation
différents :
– à partir de chacun des 11 membres (11 corrélations portant sur 29 cas, spaghettis noirs),
– à partir de la moyenne d’ensemble (1 corrélation portant sur 29 cas, courbe verte),
– et enfin à partir des 11 membres mis bout à bout (1 corrélation portant sur 29 * 11 = 319 cas,
courbe noire épaisse), soit l’équivalent de la moyenne des corrélations des spaghettis.

Pour la boı̂te Niño3.4 (figure 2.4), les courbes noires sont toutes très proches, c’est-à-dire que la
dispersion entre les 11 membres est faible. La persistance observée des SST (en rouge) suit bien les
spaghettis des membres. La persistance des SST dans le Pacifique Central au cours d’une prévision à 7
mois d’échéance est donc simulée de manière très réaliste par MF. Une rupture de pente a lieu en mai à
la fois dans les observations et MF, illustrant une perte de mémoire, et donc de prévisibilité liée à ENSO
(on parle classiquement de ”barrière de prévisibilité du printemps”).

33
2.3. ANALYSE DES SOURCES POTENTIELLES DE PRÉVISIBILITÉ DANS LES MODÈLES

F IG . 2.4 – Auto-corrélation des anomalies de SST sur le Pacifique dans les boı̂tes Niño3.4, Niño1+2 et
”CONNEX”. Les corrélations supérieures à 0.37 sont significatives à 95 % (zone située au-dessus des
pointillés orange). Courbe rouge : réanalyses NCEP, courbes noires en pointillés fins : les 11 membres
distincts du modèle MF, courbe verte : moyenne d’ensemble du modèle et courbe noire épaisse : la
moyenne des 11 membres.

Sur la boı̂te Niño1+2, on remarque que MF a tendance d’abord à surestimer la persistance des SST
(notamment entre février et avril). Ensuite, en mai, la mémoire des SST initiales est complètement per-
due par le modèle, alors que cette mémoire existe toujours dans les observations. Le modèle tend même
à renverser le signe de l’ENSO et certainement le terminer par l’est.
La boı̂te CONNEX (20˚N - 40 ˚N ; 170˚W - 170 ˚E) est utilisée afin d’étudier les téléconnexions
entre ENSO et les moyennes latitudes du Pacifique Nord (Trenberth et al., 1998 [27]). Au niveau de
cette boı̂te, la corrélation linéaire observée entre les SST de novembre sur Niño3.4 et les SST globales
de DJF varie entre -0,5 et -0,6 (non montré), valeurs significatives au niveau de confiance 95 %, ce qui
justifie l’étude sur cette boı̂te. Dans CONNEX, tous les membres sous-estiment la persistance des SST.
La connexion entre ENSO et les moyennes latitudes est donc trop faible dans MF, bien que suffisam-
ment présente pour que les autocorrélations de la plupart des membres restent significatives jusqu’en
avril. Les autocorrélations calculées à partir des moyennes d’ensemble de SST (courbe verte) sont plus
proches des observations (en rouge) que ne le sont les différents membres (en noir). Cela suggère que le
bruit atmosphérique est probablement trop fort dans le modèle au niveau de la boı̂te CONNEX, puisqu’en
moyennant ce dernier avec une moyenne d’ensemble, on retrouve une certaine persistance nous faisant
pressentir une probable connexion avec ENSO. Notons enfin que la dispersion des autocorrélations entre
les membres est plus importante que dans les boı̂tes Niño (plus proches de l’équateur), ce qui témoigne
d’une moindre prévisibilité quand on se dirige vers les moyennes latitudes, même dans l’océan.

La mémoire de paramètres atmosphériques, comme les précipitations (proxy pour le chauffage dia-
batique atmosphérique et les téléconnexions ENSO : Trenberth et al., 1998 [27]) ou le vent à 10 m, a
également été mise en évidence sur la boı̂te Niño3.4 (non montré). Cette dernière, de manière cohérente
avec les observations, voit ainsi persister ces anomalies sur 4 à 5 mois. Cette vérification est essentielle
car c’est par le chauffage diabatique que se développent les téléconnexions vers les extra-tropiques. Par
contre dans la boı̂te CONNEX située plus au nord, il n’y a pas de persistance des anomalies de vent,
mais une persistance réaliste pendant 2 mois des anomalies de précipitations. Ces remarques illustrent
une plus faible prévisibilité aux extra-tropiques, pour l’atmosphère.

La figure 2.5 montre la persistance des SST sur les boı̂tes de l’Atlantique Tropical TSA, TNA et
TASI (cf. annexe B). On constate que sur ces boı̂tes, la dispersion des membres est plus forte que pour

34
CHAPITRE 2. PRÉSENTATION DES OUTILS NUMÉRIQUES

F IG . 2.5 – Idem figure 2.4 mais sur les boı̂tes de l’Atlantique TSA, TNA et TASI (NAT-SAT).

les boı̂tes Niño, suggérant que la prévisibilité est plus faible dans l’Atlantique que dans le Pacifique. Sur
la boı̂te TSA, il apparaı̂t que presque tous les membres de MF ont tendance à surestimer la persitance
des anomalies de SST, ce qui se voit également avec la moyenne d’ensemble. Au contraire, sur la boı̂te
TNA, la persistance des SST est très bien représentée car la courbe rouge des observations est à peu près
au centre des spaghettis formés par les 11 membres. La persistance réaliste des SST dans TNA pourra
être une source pertinente de prévisibilité dans MF.
Le gradient de SST entre Atlantique Tropical Nord et Atlantique Tropical Sud a une influence sur la
localisation du jet Nord-Atlantique et de la ZCIT (débordant sur le continent africain), acteurs clefs de
la circulation générale atmosphérique. On le repère traditionnellement dans la littérature par l’acronyme
TASI, qui est la différence entre les SST des boı̂tes NAT et SAT (cf. annexe B). La mémoire de ce gradient
est manifestement trop vite perdue (par tous les membres en mars). Dans MF, la prévision saisonnière de
la dynamique atmosphérique sur l’Atlantique Nord pourra donc être potentiellement affectée par cette
insuffisante persistance du gradient entre Atlantique Tropical Nord et Atlantique Tropical Sud.

La mémoire des paramètres atmosphériques, comme les précipitations ou le vent à 10 m (non montré),
est en général totalement perdue au bout d’un mois (dès le mois de décembre) au niveau de toutes les
boı̂tes atlantiques étudiées, que ce soit dans le modèle MF ou les observations. Cela témoigne de la do-
mination du chaos atmosphérique dans cette région du bassin atlantique. La prévision saisonnière sera
par conséquent plus difficile dans le bassin atlantique que dans le bassin pacifique.

Au premier ordre, nous avons pu montrer que la persistance des anomalies de SST était simulée
de manière satisfaisante dans MF, dans des zones clefs comme le Pacifique Central (boı̂te Niño3.4) et
l’Atlantique Tropical Nord (boı̂te TNA). Nous cherchons dans le paragraphe qui suit à trouver des liens
physiques entre les SST du premier mois de simulation (novembre) et les conditions ultérieures de SST
(lors du trimestre DJF) en se limitant à l’ENSO.

2.3.2 Connexion entre l’ENSO de novembre et les SST hivernales globales


Nous étudions ici les téléconnexions entre l’ENSO de novembre et les moyennes latitudes, dans un
esprit de prévision. On corrèle ci-après l’indice Niño3.4 de SST des mois de novembre 1978-2006 avec
la SST de DJF sur 1979-2007, afin d’examiner l’impact du forçage Pacifique, que l’on sait dominant sur
les autres bassins. Les résultats pour les 2 modèles MF et ECMWF sont confrontés (les corrélations sont
calculées pour les moyennes d’ensemble).

35
2.3. ANALYSE DES SOURCES POTENTIELLES DE PRÉVISIBILITÉ DANS LES MODÈLES

(a) Météo-France System 3 (b) ECMWF System 3

F IG . 2.6 – (a) Corrélation entre l’indice Niño3.4 de novembre et les SST hivernales globales dans MF
(moyennes d’ensemble). (b) Idem pour ECMWF. Les corrélations tracées sont significatives au niveau
de confiance 90 %.

Dans les 2 modèles (figure 2.6), on retrouve des structures de corrélations assez similaires. Les fortes
valeurs de corrélations atteintes dans l’Océan Indien signifient qu’un événement ENSO présent en no-
vembre dans le Pacifique persiste généralement l’hiver suivant et a un impact sur les SST hivernales
de l’Océan Indien : celles-ci sont alors plus élevées en conditions El Niño et plus faibles en conditions
La Niña. Une structure de corrélation négative, dite ”en fer à cheval”, encadre les fortes corrélations du
Pacifique équatorial. Ces diagnostics sont conformes à ceux des réanalyses NCEP (non montré).
Dans ECMWF, les téleconnexions de ENSO avec les moyennes latitudes sont plus marquées dans
le Pacifique Nord (au niveau de la boı̂te ”CONNEX”) que dans l’Atlantique Nord, comme le suggèrent
également les observations (non montré). Ceci n’est pas le cas dans MF où les corrélations dans l’At-
lantique Nord (vers les Açores) sont du même ordre de grandeur que celles du Pacifique Nord. Cette
sous-estimation des connexions ENSO dans le Pacifique Nord est cohérente avec la dérive froide du
modèle, qui implique des sources de chauffage diabatique moins fortes, donc moins aptes à générer des
téléconnexions. On relève en outre que l’influence de l’ENSO de novembre sur les SST hivernales de
l’Atlantique Tropical Sud (Nord) est plus marquée dans ECMWF (MF). La prévisibilité hivernale liée à
ENSO sera donc, sur l’Atlantique Nord (au-delà de 30 ˚N), probablement plus faible dans ECMWF que
dans MF. Nous étudierons cet aspect ultérieurement dans la partie 4.2.

Bilan
Dans ce chapitre, nous avons montré que les biais moyens en SST des 2 modèles étaient non négli-
geables, mais assez similaires. Ils se mettent souvent en place dès le premier mois de simulation (no-
vembre) et leur intensité croı̂t ensuite rapidement, notamment près de certaines côtes ou dans les anticy-
clones subtropicaux. Les biais des modèles en Z500 sur l’Atlantique Nord sont antagonistes : ECMWF
(MF) rejette en moyenne la circulation atmosphérique en moyenne troposphère trop vers le nord (sud).
Malgré ces biais, les modèles sont capables de simuler correctement au premier ordre la persistance des
SST dans les zones clefs (sources potentielles de prévisibilité à échelle saisonnière) comme l’Atlantique
Tropical Nord ou le Pacifique Central. Les pré-requis sont donc là pour la prévision saisonnière.

36
CHAPITRE 3. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON HIVERNALE

Chapitre 3

Décomposition en régimes de temps pour


la saison hivernale

Après avoir vérifié le comportement moyen des modèles en terme de SST, nous nous intéressons
maintenant aux régimes de temps, outil que l’on va utiliser pour quantifier la prévisibilité et les per-
formances des modèles en matière de prévision. Pour les examiner, nous travaillons d’abord dans les
”mondes” séparés des observations et des modèles. Nous calculons alors des anomalies de géopotentiel
par rapport aux climatologies respectives des modèles et des observations. Par construction, il n’y a donc
pas lieu de débiaiser les modèles ; en d’autres termes, il est inutile de retrancher une climatologie des
observations aux prévisions issues des modèles, avant d’effectuer la décomposition en régimes de temps.
Dans ce chapitre, nous présentons tout d’abord la méthode de décomposition en régimes de temps
(partie 3.1). Nous commentons ensuite les régimes d’hiver ”observés”, issus des réanalyses NCEP (partie
3.2), puis les régimes d’hiver simulés par les modèles (partie 3.3).

3.1 Principe de classification automatique en régimes de temps


Au jour le jour, l’atmosphère possède certes un comportement typiquement chaotique, mais elle tend
tout de même à se retrouver dans certains états préférentiels de grande échelle (ou régimes). Bien que non
exactement reproductible du fait du chaos, il est toujours formellement possible de considérer qu’un état
atmosphérique pour un jour donné est plus proche d’un régime de temps plutôt que d’un autre. Sur une
période donnée (par exemple un trimestre de prévision saisonnière), le but est donc d’attribuer chaque
jour à un régime donné auquel il ”ressemble” le plus. Pour établir ce classement, on s’appuie sur des
critères objectifs de distance (ici euclidienne).
Selon les auteurs, les régimes de temps sont extraits en exploitant par exemple des champs de
géopotentiel à 200 hPa (Straus et al., 2007 [24]), de géopotentiel à 500 hPa (Cassou, 2004 [7]) ou encore
de pression au sol (Boe, 2007 [5]). Ici, la classification en régimes s’appuie sur des champs journaliers
d’anomalies d’altitude géopotentielle du niveau de pression 500 hPa (notée Z500). Ces anomalies
sont calculées par rapport aux climatologies journalières de la période 1979-2007, auxquelles ont été
appliquées une moyenne glissante de 10 jours. La méthode de classification automatique en régimes de
temps utilisée ici a été adaptée pour s’appliquer aussi bien à des champs de Z500 prévus (par un modèle)
que des champs de Z500 ”observés” (issus d’une réanalyse). Le choix du niveau 500 hPa pour effectuer la
classification en régimes est justifié par le fait qu’il résume bien la circulation atmosphérique de grande
échelle et qu’il est potentiellement moins perturbé dans les modèles par des processus de surface mal
représentés. Et c’est précisément à partir d’échelles relativement grandes (celles des ondes planétaires
quasi-stationnaires), que l’on s’attend à avoir le plus de prévisibilité.
La classification en régimes s’effectue grâce à un logiciel nommé ANAXV et développé par le LMD

37
3.2. LES RÉGIMES DE TEMPS HIVERNAUX ”OBSERVÉS” (RÉANALYSES NCEP)

et l’INLN (cf. documentation [1]). L’algorithme est basé sur la méthode dite des nuées dynamiques, qui
est une généralisation de la méthode des k-means (cf. Michelangeli et al., 1995 [19]). Il s’agit d’une
méthode de classification dite partitionnelle : elle consiste tout d’abord à tirer au hasard k jours parmi
l’échantillon de N champs journaliers d’anomalies de Z500 disponibles. Ces k jours constituent alors les
k clusters. Les autres jours de l’échantillon sont alors classés successivement dans l’un de ces k clusters,
en fonction d’un critère de distance euclidienne minimale par rapport au barycentre du cluster. A chaque
itération de l’algorithme, on recalcule ce barycentre.
En partant à chaque fois de k clusters initiaux différents pris aléatoirement, la répartition des N jours
dans les k clusters est répétée 100 fois pour obtenir 100 partitions différentes. La partition finalement
retenue pour un k donné est celle qui maximise la distance inter-clusters et qui minimise les distances
intra-clusters. Notons que l’étape d’attribution se fait dans l’espace propre des 10 premières composantes
principales. Le passage par l’espace propre est donc pour nous un simple filtre intermédiaire, utilisé en
fait pour réduire le temps de calcul. Le logiciel se charge in fine de reprojeter les anomalies de Z500 de
la base propre vers l’espace physique de départ. Se basant sur les résultats de Michelangeli et al., 1995
([19]), sur l’Atlantique Nord, nous choisissons k=4 comme nombre de clusters optimal (soit 4 régimes).
On précise que la classification en régimes dépend du domaine spatial choisi. Nous nous limitons
dans cette étude aux régimes de temps dits ”de l’Atlantique Nord”, extraits sur le domaine (85˚W-35˚E ;
30˚N-80˚N), qui couvre notamment l’Amérique du Nord-Est, le Groënland, l’océan Atlantique Nord
extra-tropical, la Scandinavie, l’Europe de l’Ouest, et enfin l’ouest du bassin méditerranéen.
Pour effectuer la classification automatique en régimes de temps d’hiver, nous utilisons comme
échantillon l’ensemble des jours couvrant les 5 mois novembre-mai (notés NDJFM), sur la période 1979-
2007. Ces régimes sont ainsi représentatifs, non seulement du trimestre de prévision d’hiver opérationnel
décembre-janvier-février (noté DJF), mais aussi des mois de novembre et de mars. Ainsi, ces décomposi-
tions des régimes d’hiver à partir des jours NDJFM sont potentiellement utilisables en opérationnel, pour
calculer les occurrences des régimes sur les trimestres NDJ, DJF et JFM. Dans cette étude, nous nous
intéresserons uniquement au trimestre DJF, c’est-à-dire que nous nous plaçons comme dans le contexte
opérationnel de la prévision d’hiver DJF. Par convention, l’hiver de l’année n correspond au trimestre
décembre (année n-1) - janvier (année n) - février (année n).

3.2 Les régimes de temps hivernaux ”observés” (réanalyses NCEP)


3.2.1 Structures spatiales
Commençons par examiner les régimes de temps d’hiver ”observés”, obtenus à partir des rénanalyses
NCEP et plus précisément, leurs structures spatiales. 4386 champs journaliers d’anomalies de Z500 ont
été classés et répartis dans les 4 clusters. Les structures spatiales des 4 régimes obtenus, représentées par
leurs 4 centroı̈des (barycentres), sont présentées sur la figure 3.1.
On précise que, comme pour une moyenne d’ensemble, le centroı̈de n’est pas un état physique réel,
mais une simple moyenne d’anomalies journalières. L’ensemble des jours ont été classés, sans tenir
compte de la persistance des régimes. Le fait d’en tenir compte (ne considérer que les cas où le régime
correspondant persiste plus de 5 jours par exemple) réduit le nombre de cas classifiables, mais il a été
vérifié que cela ne modifiait pas significativement les structures spatiales des régimes.

Les 4 régimes d’hiver NCEP (figure 3.1) ont une ”cohérence géographique” fixée par les ondes
stationnaires. Parmi ces régimes, 2 correspondent ainsi plutôt à une dynamique zonale (régimes NAO- et
NAO+), et les 2 autres (Blocage et Dorsale) à une dynamique méridienne :
– Le régime NAO- se caractérise par un dipôle entre une anomalie de Z500 négative sur tout le
bassin atlantique, s’étendant en thalweg jusqu’à l’Europe du Nord-Ouest, et une anomalie positive
sur le Groënland et la Mer du Labrador. Les valeurs d’anomalies moyennes atteignent des valeurs

38
CHAPITRE 3. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON HIVERNALE

F IG . 3.1 – Réanalyses NCEP. Centroı̈des des régimes de temps hivernaux (structures spatiales moyennes
obtenues à partir d’anomalies journalières de Z500). Unité : mgp. L’intervalle entre les contours est de
25 mgp. Hivers 1979-2007 (4386 jours classés dans 4 clusters). Domaine NORD-ATLANTIQUE (30˚N-
80˚N ; 85˚W-35˚E). La fréquence d’occurrence du régime (pourcentage de jours classés dans le cluster)
apparaı̂t en haut à droite du régime.

non négligeables de 125 à 150 mgp. Le flux perturbé circule alors plus au sud qu’en moyenne.
NAO- est souvent associé à des vagues de froid humides (Yiou et Nogaj, 2004 [31]). C’est en
outre le régime le moins fréquent (20 % des jours).
– Le régime NAO+ est caractérisé par une structure tripolaire avec une anomalie positive de Z500
dans le sud de la zone NATL (dédoublée en 2 dorsales depuis Terre-Neuve jusqu’à l’Europe
méditerranéenne) et une anomalie fortement négative centrée au sud de l’Islande. Ce régime se
traduit par une circulation zonale perturbée rejetée vers le nord, avec des tempêtes plus fortes que
dans le régime NAO-, touchant les Iles Britanniques et la Scandinavie. Le nord de la France est
aussi touché par les perturbations atlantiques - il y fait doux et humide - alors que le sud du pays
est davantage soumis à un temps plus sec et froid la nuit. NAO+ est le régime le plus fréquemment
observé (31 % des cas).
– Le régime de Dorsale est un régime plutôt associé à des températures fraı̂ches ou froides, avec
de l’air en provenance du pôle nord. Il est caractérisé par une anomalie de Z500 positive qui
atteint 200 mgp sur le centre de l’Atlantique alors qu’une anomalie négative moins creuse domine
l’Europe de l’ouest. Ce régime est plutôt humide, parfois associé à des chutes de neige, notamment
sur le quart nord-est de la France.
– Le régime de Blocage est caractérisé par une anomalie de Z500 positive sur la Scandinavie et
les Iles Britanniques, et des anomalies faiblement négatives en mer du Labrador et sur l’Europe
méditerranéenne. Ce régime est statistiquement le plus persistant, il occasionne en particulier les
vagues d’air froid et sec continental sur l’Europe de l’Ouest.

39
3.2. LES RÉGIMES DE TEMPS HIVERNAUX ”OBSERVÉS” (RÉANALYSES NCEP)

Ces structures spatiales des régimes d’hiver NCEP sur la période 1978-2007 sont tout à fait sem-
blables aux régimes étudiés dans Vautard, 1990 [29], à partir de données réanalysées de géopotentiel à
700 hPa, sur la période 1949-1986. La période d’étude et le niveau des champs atmosphériques exploités
(500 ou 700 hPa) semble donc avoir peu d’importance sur l’interprétation des structures spatiales des
régimes observés, qui sont robustes dans le temps et dans l’espace.

3.2.2 Séries temporelles d’occurrences


Etudions maintenant les occurrences respectives de chacun des 4 régimes observés, lors des 29 tri-
mestres DJF 1979-2007 (figure 3.2). Une forte variabilité interannuelle des occurrences caractérise les 4
régimes, sans déséquilibres notables d’occurrences entre le début et la fin de la période 1978-2007 : il
semble donc qu’il n’y ait pas de tendance particulière dans les régimes d’hiver observés sur ces 29 ans.
D’autre part, les régimes sont relativement ”discriminants”, puisque pour certaines années, leur occur-
rence est nulle ou quasi-nulle (aucune occurrence de NAO- en 1992 ou aucune occurrence de Dorsale en
1990 par exemple). Un régime, d’autre part, ne persiste jamais, seul, pendant 3 mois consécutifs ; il y a
toujours une répartition entre 2, 3 ou 4 régimes. Certaines années toutefois se démarquent avec un régime
occupant quasiment 2 tiers du trimestre (55 jours sur 90 en 1990 pour le régime NAO+ par exemple, soit
2 fois l’occurrence normale).

F IG . 3.2 – Réanalyses NCEP. Séries temporelles des occurrences de régimes de temps hivernaux pour
DJF. En abscisses : hivers 1979 à 2007. En ordonnées : nombre de jours d’occurrence. L’occurrence
moyenne de chaque régime sur DJF et sur les 29 années apparaı̂t en haut à droite du régime.

Les hivers 1985 à 1987 ont été plutôt froids sur la France ; de façon cohérente, le régime NAO-
fut présent pendant environ 35 jours lors de ces 3 hivers, soit quasiment le double de l’occurrence

40
CHAPITRE 3. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON HIVERNALE

moyenne (19 jours). A l’exception de l’hiver 1996, la décennie 1990 a été caractérisée par des hivers
plutôt doux, comme en témoignent les occurrences importantes du régime NAO+ pendant cette période.
Soulignons une certaine opposition entre les occurrences des régimes NAO+ et NAO-, qui n’est toute-
fois pas systématique : les années de fortes occurrence de NAO- ont tendance à être des années de faible
occurrence des régimes NAO+ et vice versa (c’est le cas par exemple en 1979, 1989 et 2000). Une excep-
tion notable à cette opposition entre NAO+ et NAO- est l’hiver 2007, où l’on a eu respectivement 28 et 38
jours de NAO- et de NAO+, soit dans les 2 cas davantage que les occurrences normales (respectivement
19 et 27 jours).

3.3 Les régimes de temps hivernaux dans les modèles


On applique ici la même méthode de décomposition en régimes que pour les observations NCEP,
mais cette fois aux champs journaliers de Z500 issus des modèles MF et ECMWF. Pour les modèles,
l’échantillon de jours à classer dans les 4 clusters est plus grand que pour les observations NCEP, puis-
qu’il faut le multiplier par le nombre de membres de l’ensemble (4386 jours * 11 membres = 48246
cas). On ne classe en effet pas les moyennes d’ensemble des champs modèles (car elles n’ont pas de
réalité physique), mais les champs de tous les membres regroupés dans le même échantillon. Nous tra-
vaillons ici dans les ”mondes” respectifs des modèles et utilisons pour la classification des anomalies de
Z500 par rapport aux climatologies respectives des modèles. Par construction, il n’y a donc pas lieu de
débiaiser les modèles ; en d’autres termes, il est inutile de retrancher une climatologie des observations
aux prévisions issues des modèles, avant d’effectuer leur décomposition en régimes de temps.

3.3.1 Structures spatiales

F IG . 3.3 – Idem figure 3.1, pour le modèle ECMWF et avec un échantillon de 48246 jours.

41
3.3. LES RÉGIMES DE TEMPS HIVERNAUX DANS LES MODÈLES

Etudions tout d’abord les structures spatiales des régimes d’hiver dans ECMWF. Ceux-ci (figure
3.3) ont des structures spatiales remarquablement proches de celles des régimes NCEP (figure 3.1). La
localisation des noyaux d’anomalies moyennes de Z500 et leur intensité en mgp sont très satisfaisantes.
On peut toutefois noter les détails suivants :
– pour le régime de Dorsale, l’intensité de l’anomalie positive sur l’Atlantique Central est un peu
faible,
– pour le régime NAO-, l’anomalie négative de Z500 est davantage décalée vers l’Europe.
Les fréquences des régimes sont quant à elles quasiment identiques à celles des régimes observés.

F IG . 3.4 – Idem figure 3.1, pour le modèle de Météo-France et avec un échantillon de 48246 jours.

Sur la figure 3.4 sont présentées les structures spatiales des régimes d’hiver pour MF. Pour le régime
NAO-, les bas géopotentiels situés sur l’Atlantique sont décalés vers l’Europe de l’Ouest par rapport
à NCEP (comme pour ECMWF) et le noyau groënlandais est largement sous-estimé. Pour le régime
NAO+, on remarque que la dorsale ne s’étend pas suffisamment sur l’Europe de l’Ouest, restant confinée
sur l’Atlantique Nord ; la bipolarité est ainsi perdue. Les perturbations atlantiques ont ainsi tendance à
trop pénétrer sur la France lors du régime NAO+. Le régime de Dorsale présente des hauts géopotentiels
irréalistes sur le Groënland et une direction de flux beaucoup trop nord. Seul le régime de blocage fina-
lement semble être correctement représenté en terme de localisation des noyaux d’anomalies.
Le régime NAO- prévu dans MF (1 cas sur 4) est plus fréquent que le régime observé (1 cas sur 5).
Du coup, il n’y a pas de déséquilibre entre NAO+ et NAO-, qui sont presque équiprobales (fréquences
valant 26 % et 25 % respectivement). Ceci se traduit, dans les prévisions de MF, par une circulation
zonale perturbée plus fréquente sur la France. Il est difficile de rattacher cette caractéristique aux biais
moyens de Z500 qui se projettent fortement sur le régime NAO-, mais la coı̈ncidence est frappante et
nécessiterait davantage d’investigations. Les fréquences des régimes de Dorsale et de Blocage par contre
sont tout à fait correctes par rapport à NCEP.

42
CHAPITRE 3. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON HIVERNALE

Il est flagrant que l’intensité de tous les régimes de MF est nettement plus faible comparée aux
régimes observés. Par exemple, pour le régime NAO-, l’anomalie sur la mer du Labrador est environ 2
fois trop faible, atteignant 75 mgp au centre du noyau contre 150 mgp pour le régime NAO- de NCEP
(figure 3.1). Contrairement à MF, il n’y a pas de déficit d’intensité des régimes dans ECMWF. Le nombre
de cas utilisés pour le classement, plus important dans les modèles (48246 jouss) que dans les observa-
tions (4386 jours), n’est pas responsable du déficit d’intensité des régimes de MF, puisque le nombre de
jours classés est le même dans les 2 modèles. Ce déficit d’intensité s’explique par le fait que l’écart-type
journalier de la Z500 de MF sur la période DJF est inférieur à celui des réanalyses NCEP et du modèle
ECMWF (figure 3.5). Cet écart-type atteint en effet seulement 85 mgp au maximum dans MF contre en-
viron 110 mgp dans ECMWF et NCEP, soit une sous-estimation de 30 à 40 % sur l’ensemble du bassin.
En effet, qui dit variabilité plus faible dit écarts à la moyenne plus faibles donc anomalies plus faibles. On
émet l’hypothèse que cette faible variance journalière de Z500 dans MF puisse être due aux différences
de résolution spatiale horizontale entre les 2 modèles (cf. chapitre 2), la dynamique étant semblable, et
non pas à un défaut systématique.

F IG . 3.5 – Ecarts-types des anomalies journalières de Z500 (en mgp) pour NCEP (à gauche), MF (au
milieu) et ECMWF (à droite). Hivers 1979-2007.

Bilan
En faisant abstraction de la plus faible intensité des régimes et de la trop grande fréquence du régime
NAO- dans MF, les modèles s’avèrent globalement capables de reproduire de manière tout à fait en-
courageante les structures spatiales des régimes d’hiver observés. Toutefois, les structures spatiales des
régimes présentant des différences de localisation et/ou d’intensité, d’un modèle à l’autre ou entre les ob-
servations et un modèle particulier, il pourra être pertinent dans un second temps de projeter les régimes
prévus sur une base commune : celle des régimes observés NCEP (cf. partie 4.1.2). Cette opération de
projection semble être une alternative intéressante, pour pouvoir utiliser à l’avenir les régimes de temps
dans le cadre d’une approche multi-modèles.

3.3.2 Séries temporelles d’occurrences


Pour pouvoir comparer modèles et observations, on exprime par la suite les occurrences des régimes
pendant les différents hivers DJF, en terme d’anomalies par rapport à un nombre moyen de jours d’occur-
rence sur la saison (exprimées en %). Pour les réanalyses NCEP, cette occurrence moyenne est calculée
sur l’ensemble des 29 hivers 1979-2007. Pour les modèles, l’occurrence moyenne de chaque régime est
calculée sur les mêmes 29 hivers et sur les 11 membres. Dans toute la suite du rapport, on désignera
par ”anomalie d’occurrence en moyenne d’ensemble” la différence entre la moyenne des occur-
rences prévues par les 11 membres et l’occurrence moyenne (calculée sur les 29 ans et les 11

43
3.3. LES RÉGIMES DE TEMPS HIVERNAUX DANS LES MODÈLES

membres).

Dispersion des occurrences de régimes prévues entre les membres d’un ensemble

F IG . 3.6 – Modèle ECMWF : Anomalies d’occurrences (en %) des 4 régimes d’hiver sur DJF. Les 11
membres sont matérialisés par les boı̂tes à moustache (en noir), la moyenne sur les 11 membres est en
bleu et l’occurrence observée NCEP est en rouge.

Nous voulons examiner ici la dispersion des prévisions des occurrences de régimes, entre les différents
membres des modèles MF et ECMWF. La première information qui apparaı̂t clairement sur les figures
3.6 et 3.7 est que la dispersion entre les 11 membres pour une année donnée (cf. boı̂tes à moustache, en
noir) est très importante. Cela est vrai pour les 2 modèles, où pour beaucoup d’années, il y a souvent
autant de membres prévoyant une anomalie positive d’occurrence du régime que de membres prévoyant
une anomalie de signe opposé. Rares sont les années où tous les membres prévoient des anomalies d’oc-
currence du même signe pour un régime donné. Cette forte dispersion justifie pleinement l’utilisation
de la moyenne d’ensemble (moyenne sur les occurrences prévues par les 11 membres) pour effectuer
une prévision saisonnière des régimes. Notons que ces anomalies en moyenne d’ensemble atteignent,
par construction, des valeurs plus faibles comparées aux réanalyses NCEP (rouge) ou aux différents
membres (noir) et ne sont donc pas directement comparables en terme de valeur.
La prévisibilité est théoriquement plus forte quand les membres sont peu dispersés et regroupés au-
tour d’une valeur médiane d’anomalie d’occurrence. En prévision saisonnière, on s’attend à ce que la dis-
persion des membres soit plus faible lorsque les conditions initiales fournies au modèle comportent une
signature océanique importante jouant un rôle de forçage (par exemple lors d’événements ENSO). Nous
avons constaté ici dans le cadre des régimes (non montré) qu’il n’y avait pas de diminution systématique
de la dispersion entre les membres (pour les 4 régimes simultanément) lors des années ENSO, mais aussi

44
CHAPITRE 3. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON HIVERNALE

F IG . 3.7 – Idem figure 3.6, pour le modèle Météo-France System 3. Membres du modèle (noir), moyenne
sur les 11 membres du modèle (vert), réanalyses NCEP (rouge).

pour d’autres forçages tel que l’Atlantique Tropical.


La dispersion des membres est moins forte dans ECMWF (figure 3.6) pour les régimes NAO+, Dor-
sale et Blocage, que pour le régime NAO-. Pour certaines années (1983, 1994 et 2005 par exemple),
certaines valeurs d’anomalies d’occurrence prévues par un membre frôlent en effet pour NAO- + 300 %,
c’est-à-dire 4 fois l’occurrence moyenne. Cela équivaut à ce que le membre concerné simule le régime
NAO- pendant quasiment l’ensemble du trimestre. Or, ceci est irréaliste puisque des valeurs aussi fortes
d’occurrences ne sont jamais atteintes dans les observations. En effet, les anomalies d’occurrence pour
les régimes NCEP atteignent au maximum environ + 200 % (pour le régime NAO- et l’hiver 1979), c’est-
à-dire 3 fois le nombre de jours d’occurrence climatologique du régime. La dispersion des membres est
donc fortement surestimée pour le régime NAO- dans ECMWF. Au contraire, on note une légère sous-
estimation de cette dispersion dans les 3 autres régimes, puisque les observations (en rouge) dépassent
assez fréquemment l’enveloppe (la boı̂te à moustaches) formée par les 11 membres.
Dans MF (figure 3.7), les valeurs d’anomalies d’occurrences prévues pour le régime NAO- et at-
teintes par les différents membres sont plus faibles que dans ECMWF (elles ne dépassent en effet + 200
% que lors des années 2003 et 2005). La dispersion inter-membres est homogène et réaliste pour les 4
régimes prévus : en effet, les observations sont généralement bien comprises entre le membre prévoyant
l’occurrence la plus faible et celui prévoyant l’occurrence la plus forte. Ceci est particulièrement vrai
pour le régime NAO+, où aucune des occurrences observées ne se retrouve complètement en dehors de
l’enveloppe formée par les prévisions d’occurrences des 11 membres.

45
3.3. LES RÉGIMES DE TEMPS HIVERNAUX DANS LES MODÈLES

Corrélation entre les séries temporelles d’occurrence des deux modèles

Sur la figure 3.8 sont superposées les anomalies d’occurrences de régimes prévues en moyenne d’en-
semble, relatives au modèle MF (en vert) et au modèle ECMWF (en bleu). Il s’agit des courbes vertes
et bleues des figures 3.6 et 3.7, qui ont été dilatées. On voit qu’il n’y a pas de tendances marquées dans
les occurrences des régimes, ni pour MF ni pour ECMWF (conformément à NCEP, cf. figure 3.2). Par
ailleurs, il apparaı̂t clairement que les occurrences des régimes relatives aux 2 modèles n’ont pas de
correspondance systématique. Aucune des 4 corrélations entre les occurrences des régimes de MF et
de ECMWF n’est significative au niveau de confiance 90%. La meilleure corrélation revient au régime
NAO- (avec seulement 0,27), avec un comportement semblable entre les modèles sur la décennie 1990.
L’accord entre les 2 modèles semble également correct entre 1995 et 2005 pour le régime de Dorsale,
même si la corrélation sur toute la période n’est que de 0,12.

F IG . 3.8 – Anomalies d’occurrences des 4 régimes hivernaux prévus (en %) pour la moyenne d’en-
semble de MF (en vert) et pour ECMWF (en bleu). Les corrélations brutes entre les séries des 2 modèles
apparaissent en haut à droite de chaque régime.

Anticorrélation entre les régimes NAO+ et NAO-

Nous avons souligné précédemment que dans les régimes observés, les occurrences des régimes
NAO+ et NAO- semblaient être souvent antagonistes. Nous étudions ici si l’anti-corrélation entre les 2
régimes est réaliste dans les modèles (tableau 3.1). Dans les régimes NCEP, les séries temporelles d’oc-
currences des régimes NAO+ et NAO- sont effectivement anti-corrélées à -0.53 (valeur significative à 95
%). Cette corrélation négative signifie qu’en général, quand il y a plus de régime NAO- (NAO+) en hiver,
cela se fait au détriment du régime NAO+ (NAO-). On ne peut toutefois pas raisonner comme si NAO-

46
CHAPITRE 3. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON HIVERNALE

était ”l’opposé” systématique de NAO+, comme nous le verrons plus tard.


Dans les modèles, l’anticorrélation entre les régimes NAO+ et NAO- est respectée en terme de signe.
Toutefois, on voit que cette opposition entre NAO- et NAO+ est sous-estimée par ECMWF. Ceci a pro-
bablement un lien avec le fait que les membres ECMWF sont beaucoup plus dispersés dans le régime
NAO- que dans le régime NAO+. L’anticorrélation NAO+/NAO- est au contraire légèrement surestimée
dans MF, ce qui tendrait à montrer que MF est plus linéaire qu’ECMWF dans son excitation des régimes
NAO+ et NAO- et dans son lien avec le forçage océanique potentiel.

corrélations brutes sans tendance linéaire sans tendance quadratique


NAO+ NCEP vs NAO- NCEP - 0,53 ** - 0,53 ** - 0,46 **
NAO+ MF vs NAO- MF - 0,47 ** - 0,59 ** - 0,62 **
NAO+ ECMWF vs NAO- ECMWF - 0,30 * - 0,30 * - 0,30 *

TAB . 3.1 – Corrélations entre les régimes NAO+ et NAO- pour NCEP, MF et ECMWF. Colonne 1 :
corrélation entre les séries brutes, colonne 2 (3) : corrélation entre les séries sans tendance linéaire
(sans tendance quadratique). Le symbole * (**) signifie que la corrélation est significative à 90 % (95
%) pour un échantillon de 29 cas.

Bilan
Nous avons vu dans ce paragraphe qu’il était nécessaire en première approximation d’utiliser une
moyenne d’ensemble pour pouvoir exploiter les occurrences de régimes de temps prévues, au vu de la
forte dispersion entre les membres et pour extraire un éventuel forçage océanique. Dans MF, pour les 4
régimes, les occurrences prévues par les différents membres possèdent une dispersion semblable. Celles-
ci sont réalistes par rapport aux réanalyses. Par contre, la dispersion des occurrences des régimes prévus
par les membres de ECMWF est moins réaliste en particulier pour le régime NAO-, ce qui viendrait
perturber l’anticorrélation entre les régimes NAO+ et NAO-.

47
3.3. LES RÉGIMES DE TEMPS HIVERNAUX DANS LES MODÈLES

48
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

Chapitre 4

Prévisibilité des régimes d’hiver

Nous traitons dans ce chapitre de la prévisibilité des régimes d’hiver. Dans une première partie, une
étude de scores de prévision est proposée en partie 4.1. On examine dans un second temps les liens
entre la dynamique atmosphérique hivernale (DJF) et les conditions moyennes océaniques du mois de
novembre précédent.

4.1 Scores de prévision saisonnière des régimes d’hiver


Le but de cette partie est d’examiner quelques scores simples de prévision en régimes de temps
hivernaux afin de déterminer quels régimes sont les mieux prévus. Nous examinons d’abord les scores
”bruts”, à partir des régimes obtenus dans les mondes respectifs des modèles. Nous regarderons ensuite si
les scores sont améliorés en projetant les régimes des modèles sur une base commune (celle des régimes
observés).

4.1.1 Scores bruts


Corrélations entre régimes prévus et observés
On étudie ici les corrélations entre les régimes prévus et observés. Aucune des corrélations entre
occurrences de régimes prévues par ECMWF (en moyenne d’ensemble) et occurrences observées n’est
significative (tableau 4.1). Ce résultat est insensible aux tendances. Le modèle ECMWF semble donc
incapable de prévoir correctement l’occurrence de régime : toutes les corrélations sont en effet quasi-
nulles et ne sont pas affectées par les tendances. En revanche, malgré le fait que les structures spatiales
des régimes de MF soient moins fidèles que celles de ECMWF aux structures observées, les occurrences
du régime NAO+ prévues par MF sont fortement corrélées avec les occurrences observées (tableau 4.2).
La corrélation brute entre les séries est toutefois exagérée par l’effet des tendances, mais même après
leur retrait (linéaire ou quadratique), la corrélation atteint encore - 0,40, valeur qui reste significative au
niveau de confiance 95%. Les autres régimes NAO-, Dorsale et Blocage, ne sont par contre pas bien
prévus par MF, comme le suggèrent les très faibles valeurs de corrélation.

Tables de contingence entre régimes prévus et observés


Nous adoptons maintenant une autre approche basée sur un classement des occurrences en quantiles,
de manière à pouvoir discriminer les années de fortes ou de faibles occurrences des régimes, information
que ne contient pas la simple corrélation linéaire qui donne des renseignements ”intégrés”. La méthode
consiste à classer les 29 hivers 1979-2007 en 3 terciles : le tercile inférieur comprend les 10 années où les

49
4.1. SCORES DE PRÉVISION SAISONNIÈRE DES RÉGIMES D’HIVER

corrélations brutes sans tendance linéaire sans tendance quadratique


NAO- : ECMWF vs NCEP 0,08 0,09 0,09
NAO+ : ECMWF vs NCEP - 0,05 - 0,05 - 0,05
DORSALE : ECMWF vs NCEP 0,10 0,12 0,13
BLOCAGE : ECMWF vs NCEP 0,00 - 0,02 - 0,02

TAB . 4.1 – Corrélations entre les anomalies d’occurrence DJF des régimes prévues par ECMWF et les
anomalies observées NCEP.
corrélations brutes sans tendance linéaire sans tendance quadratique
NAO- : Météo-France vs NCEP - 0,07 - 0,13 - 0,18
NAO+ : Météo-France vs NCEP 0,50 ** 0,53 ** 0,40 **
DORSALE : Météo-France vs NCEP 0,12 0,09 0,04
BLOCAGE : Météo-France vs NCEP 0,08 0,05 0,08

TAB . 4.2 – Idem tableau 4.2 pour MF. Le symbole ** signifie que la corrélation est significative à 95 %.

occurrences d’un régime X donné sont les plus faibles, les 10 années avec les plus fortes occurrences sont
classées dans le tercile supérieur et les 9 années restantes, intermédiaires, sont rangées dans le tercile dit
médian. On fait de même pour les observations et le modèle. On calcule ensuite la table de contingence
entre les 6 terciles, pour en déduire des scores de bonnes prévisions et de fausses alarmes. Il s’agit d’avoir
une vision statistique générale, c’est pourquoi on ne rentre pas dans le détail des années particulières.
Elles seront examinées dans une étude ultérieure, aussi bien en terme de dispersion des membres qu’en
terme de mécanismes physiques associés.

nombre de cas Tercile inf NCEP Tercile med NCEP Tercile sup NCEP Totaux
Tercile inf MF 5 4 1 10
Tercile med MF 3 1 5 9
Tercile sup MF 2 4 4 10
Totaux 10 9 10 29

TAB . 4.3 – Table de contingence entre les anomalies d’occurrence du régime NAO+ prévues en moyenne
d’ensemble (moyenne sur les 11 membres) par MF et les anomalies observées. Les 29 hivers sont classés
en 3 terciles. Sur la diagonale apparaissent les ”bonnes prévisions” (en vert), de part et d’autre de la
diagonale les ”fausses alarmes” (en rouge).

Le tableau 4.3 présente la table de contingence entre les occurrences DJF prévues par MF et les occur-
rences observées dans NCEP, pour le régime NAO+ uniquement. Ce régime NAO+ est potentiellement,
nous l’avons vu, le régime le mieux prévu dans MF d’après la valeur des corrélations précédentes (cf.
tableau 4.3). On peut à partir de la table de contingence calculer un nombre de ”bonnes prévisions”, qui
correspond au nombre d’années situées dans les mêmes terciles d’occurrence pour le modèle et les ob-
servations (sur la diagonale, en vert). On considère qu’il y a ”fausse alarme” quand l’occurrence prévue
correspond à une occurrence observée classée dans le tercile opposé (en rouge). Pour NAO+ dans MF, le
nombre de bonnes prévisions est de 5 + 1 + 4 = 10 et le nombre de mauvaises prévisions est de 2 + 1 = 3.
Le taux de bonnes prévisions du tercile inférieur (peu de NAO+) est de 50 % et celui du tercile supérieur
(beaucoup de NAO+) vaut 40 %. On fait de même pour les autres régimes de MF et ceux de ECMWF :
tous ces résultats sont reportés dans le tableau 4.4.

L’étude en terme de contingence fait ressortir plusieurs constats, qui étaient masqués par l’approche
linéaire en terme de corrélation. Le régime de Dorsale (tableau 4.4) semble être le moins bien prévu, que

50
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

scores bruts bonnes prévisions fausses alarmes


NAO- Météo-France 8 9
NAO- ECMWF 11 6
NAO+ Météo-France 10 3
NAO+ ECMWF 10 6
DORSALE Météo-France 6 8
DORSALE ECMWF 7 8
BLOCAGE Météo-France 10 7
BLOCAGE ECMWF 10 6

TAB . 4.4 – Bonnes prévisions et fausses alarmes des occurrences des 4 régimes d’hiver pour les 2
modèles.

ce soit pour MF ou ECMWF, avec autant de bonnes prévisions que de fausses alarmes. Le régime NAO-
est mieux prévu par ECMWF que par MF, mais le succès est limité. Pour le Blocage, les deux modèles
ont quasiment les mêmes scores. Quant au régime NAO+, ECMWF fait autant de bonnes prévisions que
MF (10) mais davantage de fausses alarmes. Avec la méthode de classement en terciles d’occurrences,
la prévision du régime NAO+ par MF apparaı̂t, comme dans l’étude précédente en terme de corrélation
linéaire, être la ”meilleure” prévision. Il est intéressant de noter que même si la prévisibilité est faible, le
nombre de bonnes prévisions est en général supérieur au nombre de fausses alarmes (sauf pour le régime
de Dorsale).

4.1.2 Projection des régimes prévus sur la base des régimes observés
Nous avons vu que les régimes de temps modélisés ne correspondaient pas forcément rigoureuse-
ment aux régimes de temps observés (en terme de structure, d’intensité ou de localisation), en particulier
pour MF. Aussi pour pouvoir comparer les régimes des modèles entre eux et avec les régimes observés,
il peut être pertinent de se ramener à une base commune. La méthode, simple, consiste à projeter les
champs journaliers de Z500 des modèles sur la base des régimes observés NCEP (figure 3.1), au lieu
de classer ces champs dans les clusters des mondes respectifs des modèles. On regarde la distance entre
chaque champ journalier d’anomalie de Z500 prévu et les 4 centroı̈des de référence (régimes observés).
Le champ de Z500 prévu est alors attribué au régime observé qui lui est le plus proche (distance eucli-
dienne minimale par rapport aux 4 régimes de la base de projection). Ensuite, on pourra alors calculer
des scores de prévision en régimes, à partir de nouvelles séries temporelles d’occurrences des différents
régimes (que nous nommons ”occurrences projetées”).
La corrélation entre les séries d’occurrences projetées et celles des occurrences non projetées vaut
au minimum 0.81 pour MF et 0,91 pour ECMWF. Ces très fortes valeurs démontrent que l’attribution
d’un jour donné à un régime est peu sensible à la méthode utilisée. Ceci confirme aussi la bonne ca-
pacité des modèles à reproduire la dynamique en régimes. Nous allons toutefois montrer que même si
ces corrélations sont fortes, la méthode de projection améliore quelque peu les scores de prévision en
régimes.

Tables de contingence entre les régimes prévus projetés et les régimes observés
A partir des nouvelles occurrences projetées, on construit des tables de contingence de la même
manière qu’au paragraphe précédent. On reporte dans le tableau 4.5 les scores de bonnes et de fausses
alarmes d’occurrences projetées, que l’on peut comparer aux contingences pour les occurrences prévues
mais non projetées (rappelées entre parenthèses).

51
4.1. SCORES DE PRÉVISION SAISONNIÈRE DES RÉGIMES D’HIVER

scores après projection bonnes prévisions fausses alarmes


NAO- Météo-France 8 (8) 7 (9)
NAO- ECMWF 12 (11) 5 (6)
NAO+ Météo-France 15 (10) 4 (3)
NAO+ ECMWF 10 (10) 8 (6)
DORSALE Météo-France 6 (6) 7 (8)
DORSALE ECMWF 16 (7) 8 (8)
BLOCAGE Météo-France 7 (10) 6 (7)
BLOCAGE ECMWF 16 (10) 5 (6)

TAB . 4.5 – Bonnes prévisions et fausses alarmes des occurrences des 4 régimes d’hiver prévues par
les 2 modèles MF et ECMWF, après projection des régimes prévus sur la base des régimes observés.
Couleur rouge pour une détérioration du score, couleur verte pour une amélioration, noire pour un
score inchangé. Les valeurs entre parenthèses correspondent aux scores obtenus à partir des champs de
Z500 non projetés (ceux du tableau 4.4).

D’une manière générale, l’effet de la projection des régimes prévus (tableau 4.5) est d’améliorer le
nombre de bonnes prévisions et de diminuer le nombre de fausses alarmes (à trois exceptions près, en
rouge). Le nombre de bonnes prévisions du régime NAO+ par MF passe de 10 à 15 (sur 29), soit une
augmentation de + 50% de bonnes prévisions. Parallèlement, le nombre de fausses alarmes de NAO+ par
MF (4 sur 29) reste toujours très bas (c’est le plus faible nombre de fausses alarmes pour les 4 régimes
et les 2 modèles). Les scores de prévision du régime de Dorsale sont améliorés pour ECMWF (passant
de 7 à 16 bonnes prévisions sur 29). D’environ 1 prévision sur 3 exacte pour le régime de Blocage de
ECMWF, on passe à 1 prévision sur 2 environ exacte après projection. Le régime qui, finalement, semble
le moins bien prévu (2 modèles confondus) est le régime NAO-.

Bilan

La prévisibilité des régimes est globalement très faible, à l’exception du régime NAO+ (MF) voire du
Blocage (ECMWF). Certes, on arrive à améliorer quelque peu les scores en projetant les régimes, mais on
ne peut pas conclure de manière tranchée sur la significativité de ces améliorations, au vu du petit nombre
de cas dans l’échantillon (29 prévisions seulement, réparties en 3 terciles). D’autre part, on ne dépasse pas
1 prévision juste sur 2, ce qui est un faible taux de succès. Une des perspectives serait d’étudier l’impact
d’une prévision multi-modèles sur les scores de prévision en régimes. On pourrait étudier notamment
les régimes du modèle anglais UKMO et moyenner les occurrences prévues et projetées sur les régimes
observés, en utilisant les 3 modèles. Ainsi, on pourrait mieux prendre en compte les qualités et les défauts
de chaque modèle et potentiellement améliorer la prévision des régimes de temps de l’Atlantique Nord,
à échelle saisonnière.

Quelques paradoxes intéressants


– bien que la structure spatiale du régime NAO+ de MF soit moins proche des observations que ne
l’est celle de ECMWF (cf. chapitre 3), la prévision des occurrences du régime NAO+ est meilleure
dans MF,
– la méthode de projection améliore davantage les scores pour ECMWF que pour MF alors que les
structures spatiales des régimes de MF sont plus éloignées des régimes observés, comparativement
aux structures des régimes ECMWF,

52
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

– le régime NAO- est mieux prévu dans ECMWF, pourtant on a relevé précédemment que la dis-
persion entre les membres ECMWF pour ce régime NAO- était nettement plus forte que dans MF.
Une forte dispersion des membres en terme d’occurrence de régime prévue n’entraı̂ne donc pas
forcément de moins bonnes prévisions,
– une très bonne représentation spatiale des régimes par un modèle (ECMWF) n’entraı̂ne pas néces-
sairement de ”bonnes prévisions” systématiques en terme d’occurrences.

4.2 Précurseurs océaniques de la dynamique atmosphérique hivernale


prévue
Dans cette partie, nous cherchons d’abord, via une approche linéaire à l’aide de corrélations, à exa-
miner dans quelle mesure les conditions de SST de novembre (dans le Pacifique Tropical et l’Atlantique
Tropical) influent sur la circulation en moyenne troposphère (500 hPa) et les précipitations prévues en
DJF. Nous introduisons ici un déphasage (océan en avance d’un mois) car étudier les liens en phase
ne nous permettrait pas de ”dire qui force qui” (entre l’atmosphère et l’océan), dans la mesure où l’at-
mosphère, à ces échelles de temps, imprime préférentiellement sa signature à l’océan (Cayan, 1992 [11]).
Ensuite, nous étudions plus précisément les différents précurseurs de SST antérieurs aux fortes ou aux
faibles occurrences des régimes de temps l’hiver suivant.

4.2.1 Impact de l’ENSO de novembre sur la dynamique atmosphérique hivernale prévue


La figure 4.1 présente les corrélations entre l’indice Niño3.4 de novembre et la Z500 globale de DJF,
dans NCEP. Une corrélation positive signifie que des températures chaudes (froides) dans le Pacifique
Central en novembre sont statistiquement associées à une Z500 plus haute (basse) que la moyenne. Les
corrélations sont largement significatives et positives sur toute une bande 20˚S, 20˚N, suggérant qu’un
événement chaud en novembre entraı̂ne une dilatation générale de la colonne atmosphérique dans les
Tropiques l’hiver suivant.
D’autres corrélations significatives s’observent ailleurs sur le globe : en particulier, la structure tri-
polaire située sur le continent Nord-Américain s’apparente à la phase positive de la PNA (Pacific North
America), caractérisée par un renforcement des hauts géopotentiels sur le nord du Canada, de façon
concomittante avec des géopotentiels plus bas de l’Alaska jusqu’à la Floride. En lien avec la phase po-
sitive de la PNA, la dépression des aléoutiennes, située dans le Pacifique Nord au sud de l’Alaska est
plus creuse et décalée vers le sud-est. Elle induit alors des vents plus forts d’ouest ou de sud-ouest sur
les côtes ouest-américaines, inhibant l’apport d’eaux froides via les upwellings côtiers. On remarque que
dans les observations, il n’y a pas de connexion significative entre les SST de novembre du Pacifique
Central et la Z500 ultérieure d’hiver sur l’Atlantique Nord.
Dans les modèles (figure 4.2), la connexion de ENSO avec la PNA est en accord avec les obser-
vations. Par contre, un signal de corrélation négative significative est visible au niveau de l’Atlantique
Nord. Ce signal n’est pas présent dans les observations NCEP (figure 4.1), mais les corrélations pour
NCEP et les modèles ne sont en fait pas directement comparables en terme d’intensité, car ces dernières
sont calculées sur la moyenne d’ensemble. La corrélation négative dans l’Atlantique Nord n’est pas lo-
calisée exactement au même endroit dans les 2 modèles. En comparant la localisation de ces corrélations
négatives aux structures spatiales des régimes d’hiver prévus (cf. figures 3.3 et 3.4), on peut deviner
les régimes favorisés ou défavorisés par les modèles en conditions ENSO, en adoptant un raisonnement
linéaire propre à la corrélation. Dans ECMWF, La Niña en novembre favorise davantage le régime de
blocage en hiver alors qu’au contraire, El Niño défavorise ce régime (interprétation de la corrélation

53
4.2. PRÉCURSEURS OCÉANIQUES DE LA DYNAMIQUE ATMOSPHÉRIQUE HIVERNALE
PRÉVUE
NCEP

F IG . 4.1 – Réanalyses NCEP. Corrélation entre l’indice de SST Niño3.4 pour les mois de novembre et la
Z500 globale des hivers DJF. Période 1978-2007. Les corrélations tracées (supérieures à 0,3 en valeur
absolue) sont significatives au niveau de confiance 90 %.

négative des Iles Britanniques à la Scandinavie). Ainsi, dans le modèle MF, La Niña en novembre a ten-
dance à défavoriser l’occurrence de NAO- en hiver alors que El Niño favorise NAO- (interprétation de la
corrélation négative au nord des Açores).
S’il n’est pas possible de comparer les intensités des corrélations concernant les modèles d’une part
et les observations d’autre part, en revanche il est possible et intéressant de comparer celles des modèles.
On remarque ainsi que le lien entre l’ENSO de novembre et la Z500 hivernale est plus marqué dans MF
(figure 4.2 (b)) au niveau de l’Atlantique Tropical, sur l’Afrique de l’Ouest et du Nord, ainsi que sur l’en-
semble du bassin méditerranéen, que dans ECMWF (figure 4.2 (a)). Par ailleurs, le signal de corrélation
plus fort sur le Pacifique Nord (entre 30˚N et 60˚N) dans ECMWF, est susceptible également d’expliquer
que la connexion sur l’Atlantique Nord soit située plus à l’est dans ECMWF (sous l’effet d’ondes de
Rossby décalées par rapport à MF).

Intéressons-nous maintenant aux connexions entre l’ENSO de novembre et les précipitations hi-
vernales (proxy pour le chauffage diabatique), dans les modèles (figure 4.2). Dans les deux modèles,
quand El Niño est présent pendant le mois de novembre, les pluies de l’hiver suivant sont plus fortes sur
le centre-est du bassin Pacifique Tropical. Cela est cohérent avec le fait que les événements ENSO sont
généralement matures en janvier. Les précipitations sont par contre plus faibles sur le nord de l’Amérique
du sud (zone de subsidence de la cellule de Walker) et à l’ouest du bassin Pacifique Tropical. Ces constats
sont valables également dans les observations (corrélation entre l’indice Niño3.4 NCEP de novembre et
les précipitations Arkin DJF sur la période 1979-2003, non montrée) sur l’ensemble des Tropiques (30˚S ;
30˚N).

Il n’y a aucun signal significatif sur l’Europe de l’Ouest ou la Méditerranée, contrairement à ce que
l’on peut voir dans les modèles. On ne peut en tirer aucune conclusion quant au réalisme des modèles
car les corrélations observées entre ENSO de novembre et précipitations DJF sont beaucoup plus faibles
et plus bruitées dans NCEP que dans les modèles (pour lesquels le signal est plus fort grâce à l’approche

54
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

(a) ECMWF System 3 (b) Météo-France System 3

F IG . 4.2 – Idem figure 4.1 mais pour les modèles (moyennes d’ensemble) : (a) ECMWF (b) MF.

(a) ECMWF System 3 (b) Météo-France System 3

F IG . 4.3 – Corrélation entre l’indice Niño3.4 et les précipitations de DJF globales (moyennes d’en-
semble des modèles). Les corrélations supérieures à 0,3 en valeur absolue sont significatives au niveau
de confiance 90 %.

55
4.2. PRÉCURSEURS OCÉANIQUES DE LA DYNAMIQUE ATMOSPHÉRIQUE HIVERNALE
PRÉVUE

ensembliste). On observe dans MF une corrélation positive sur l’Europe de l’Ouest (figure 4.3 (b)) pour
les précipitations, de façon cohérente avec le minimum de corrélation ENSO/Z500 au nord des Açores
(cf. figure 4.2 (b)). En d’autres termes, MF prévoit un excès de pluie sur l’Europe de l’Ouest pendant
l’hiver boréal succédant à des conditions El Niño en novembre (ceci est cohérent avec Mariotti et al.,
2002 [18]).
Pour MF, de fortes corrélations négatives sont visibles au niveau de l’ensemble de l’Atlantique Tro-
pical (des Caraı̈bes jusqu’au Golfe de Guinée). Celles-ci sont moins élevées et moins étendues dans
ECMWF. Les anomalies de sources de chauffage diabatique en lien avec ENSO sont probablement
décalées entre les deux modèles, au vu des différences dans les structures de corrélations, au niveau
du Golfe de Guinée et de l’ouest du Mexique notamment. Ces différences de chauffage diabatique (loca-
lisation ou/et intensité) peuvent jouer sur l’état de la Z500 en hiver sur l’Atlantique Nord, via l’excitation
d’ondes de Rossby planétaires. Ces ondes peuvent expliquer que la réponse de MF se projette plutôt sur
NAO- et celle de ECMWF plutôt sur le blocage.
Sur l’ensemble du bassin méditerranéen, les précipitations hivernales sont déficitaires dans MF, de
façon cohérente avec la corrélation ENSO/Z500 positive dans cette zone sur la figure 4.2 (b). La forte
réponse en Z500 et précipitations sur la Méditerranée dans MF pourrait s’expliquer par l’action com-
binée de l’Atlantique Equatorial et de l’Indien Ouest, où les anomalies de chauffage diabatique sont plus
fortes que dans ECMWF.

4.2.2 Impact du gradient de SST entre Atlantique Tropical nord et sud sur la dynamique
atmosphérique hivernale prévue
La Z500 globale de DJF est corrélée maintenant avec un indice caractérisant le gradient de SST entre
l’Atlantique Tropical Nord (boı̂te TNA) et l’Atlantique Tropical Sud (boı̂te TSA). On appellera cet in-
dice ”Gradnatsat” par la suite. L’intensité de ce gradient influence la position de la ZCIT et la localisation
des sources de chauffage diabatique, qui sont responsables de la génèse d’ondes de Rossby, perturbant
alors la circulation générale de l’atmosphère des moyennes latitudes. Nous cherchons ici à déterminer si
ce gradient est susceptible d’influencer l’excitation des régimes d’hiver sur l’Atlantique Nord, au même
titre qu’ENSO.

Le forçage de ”Gradnatsat” est moins important que l’effet de ENSO, si bien que les corrélations
sont tracées à partir de 0,2 en valeur absolue, afin de pouvoir faire apparaı̂tre certaines structures de
grande échelle. Ainsi, on voit qu’un gradient positif en novembre tend à favoriser de hautes valeurs de
géopotentiel entre Terre-Neuve et les Iles Britanniques lors des hivers DJF, c’est-à-dire plutôt des condi-
tions favorables à l’occurrence du régime NAO-, dans les réanalyses NCEP (figure 4.4) et pour le modèle
ECMWF (figure 4.5 (a)). Dans MF, le lien se projette plutôt sur le régime de blocage qui est donc fa-
vorisé en hiver (figure 4.5 (b)), d’après le noyau de corrélation positive entre les Iles Britanniques et la
Scandinavie. Notons que même en moyenne d’ensemble, les corrélations sont plus faibles ou au mieux
du même ordre de grandeur que dans les observations, suggérant que le forçage par ”Gradnatsat” est
faible dans le modèle et semble-t-il sous-estimé (peut-être du fait de la domination de l’ENSO).

Sur la figure 4.6, nous présentons la corrélation entre l’indice ”Gradnatsat” de novembre et les
précipitations hivernales, pour les 2 modèles. Il semble qu’ils aient une même réponse globale, mais
décalée de 20 à 30˚vers l’est en longitude environ dans MF, au niveau de l’Atlantique Tropical. En effet,
le dipôle de corrélation est plutôt sur l’est des Caraı̈bes dans ECMWF alors qu’il est plutôt au centre
de l’Atlantique Tropical dans MF. Il est donc envisageable que les ondes de Rossby générées par une
source anormale de chauffage diabatique soient situées plus à l’est dans MF que dans ECMWF. Cela
pourrait expliquer le noyau de Z500 en Mer du Nord dans MF alors qu’il est 30˚plus à l’ouest (au sud de
l’Islande) dans ECMWF.

56
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

NCEP

F IG . 4.4 – Réanalyses NCEP. Corrélation entre l’indice ”Gradnatsat” de novembre et la Z500 de DJF.
Période 1979-2007. Seules les corrélations supérieures à 0,3 en valeur absolue sont significatives au
niveau de confiance 90 %.

(a) ECMWF System 3 (b) Météo-France System 3

F IG . 4.5 – Idem figure 4.4 mais pour les modèles (moyennes d’ensemble) : (a) ECMWF (b) MF.

Bilan

En hiver, la localisation des anomalies de sources de chauffage diabatique (qui générent des télécon-
nexions avec les extra-tropiques) dans les modèles dépend principalement de l’ENSO, et, dans une
moindre mesure, du gradient de SST entre Atlantique Tropical Nord et Sud. Ces sources de chauffage en
lien avec les forçages océaniques tropicaux de novembre, ne sont manifestement pas situées au mêmes
endroits dans les 2 modèles. Cela peut potentiellement expliquer que l’impact de ENSO ou de ”Gradnat-

57
4.2. PRÉCURSEURS OCÉANIQUES DE LA DYNAMIQUE ATMOSPHÉRIQUE HIVERNALE
PRÉVUE

(a) ECMWF System 3 (b) Météo-France System 3

F IG . 4.6 – Corrélation entre l’indice de SST ”Gradnatsat” et les précipitations de DJF globales, dans
les modèles (moyennes d’ensemble) : (a) ECMWF (b) MF. Les corrélations supérieures à 0,3 en valeur
absolue sont significatives au niveau de confiance 90 %.

sat” sur la Z500 d’hiver soit différent dans les 2 modèles sur l’Atlantique Nord.

4.2.3 Précurseurs océaniques à l’origine des régimes d’hiver


Les graphes de corrélations decrits précédemment (paragraphes 4.2.1 et 4.2.2) nous ont donné, par
construction même de la corrélation, des informations linéaires. Nous adoptons ici l’approche en terciles
d’occurrences des régimes sur DJF (cf. méthode décrite au paragraphe 4.1.1), dans le but de les relier aux
conditions antérieures de SST (de novembre). Nous avons classé les 29 hivers en 3 terciles, selon que les
occurrences des régimes étaient faibles (tercile inférieur), fortes (tercile supérieur) ou intermédiaires (ter-
cile médian). Pour les modèles, nous avons utilisé les occurrences des régimes en moyenne d’ensemble
(moyenne des occurrences des 11 membres). A partir de ces terciles, on construit des composites de SST
pour le mois de novembre (il s’agit des SST en moyenne d’ensemble dans les modèles). Les SST sont
exprimées en terme d’anomalies par rapport à la climatologie (des réanalyses ou des modèles respectifs)
sur les 29 mois de novembre disponibles. Ces anomalies de SST et sont normalisées en chaque point,
c’est-à-dire divisées par l’écart-type de l’échantillon constitué par les 29 mois de novembre. Il s’agit
donc ici de déterminer quelles sont les conditions de SST qui précèdent les occurrences hivernales des
régimes de l’Atlantique Nord.

Les figures 4.7 à 4.10 montrent les composites de SST de novembre, uniquement pour les terciles
inférieurs et supérieurs des 4 régimes, pour les modèles MF et ECMWF. Les valeurs d’anomalies nor-
malisées de SST tracées sont significatives au niveau de confiance 70 % (du fait du peu de nombre de cas
dans les composites, nous avons dû faute de mieux, utiliser un niveau de confiance très permissif dans le
test de Student de significativité appliqué).

Dans NCEP, aucun signal clair de SST n’émerge quel que soit le régime. Cela est dû au faible
nombre de cas dans l’échantillon (moyenne sur 10 mois de novembre seulement) et à la faiblesse de la
prévisibilité (rapport signal sur bruit) des régimes dans les observations. Par contre pour les modèles,

58
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

F IG . 4.7 – Composites d’anomalies normalisées de SST pour les mois de novembre en fonction des
occurrences du régime NAO- sur la saison DJF. A gauche les réanalyses NCEP, au centre ECMWF et à
droite MF. Sur la ligne du haut (bas) sont tracées les SST moyennes pour les 10 années les plus faibles
(fortes) en terme d’occurrence du régime NAO-. Seules les valeurs d’anomalies de SST significatives au
niveau de confiance de 70 % sont tracées.

F IG . 4.8 – Idem figure 4.7 mais les composites de SST sont réalisés en fonction des occurrences du
régime NAO+.

les moyennes d’ensemble utilisées permettent d’obtenir des structures océaniques de novembre, qui
précèdent une forte ou une faible occurrence de certains régimes d’hiver et qui sont statistiquement
significatives au niveau de confiance 70 %.

Des 4 figures 4.7 à 4.10, on peut tirer les enseignements suivants pour le modèle MF :
– Le régime NAO- est défavorisé, tercile inférieur (favorisé, tercile supérieur) en hiver lorsque des
conditions La Niña (El Niño) règnent en novembre dans le Pacifique. Ceci est cohérent avec la
figure 4.2 (b) et l’étude de Greatbatch et al., 2004 [13]. On notera la symétrie très nette entre les
terciles inférieur et supérieur. Ceci traduit une réponse du modèle au forçage ENSO qui est plutôt
”linéaire”.
– Le régime NAO+ est favorisé en hiver lorsque des SST froides dominent sur l’Atlantique Tropical

59
4.2. PRÉCURSEURS OCÉANIQUES DE LA DYNAMIQUE ATMOSPHÉRIQUE HIVERNALE
PRÉVUE

F IG . 4.9 – Idem figure 4.7 mais les composites de SST sont réalisés en fonction des occurrences du
régime de Dorsale.

F IG . 4.10 – Idem figure 4.7 mais les composites de SST sont réalisés en fonction des occurrences du
régime de Blocage.

Nord en novembre. Ceci est consistant avec l’article de Cassou, 2004 [7] et Sutton et al., 2001 [25].
Le mécanisme physique est le suivant : les SST plus froides défavorisent la convection profonde
atmosphérique au nord de l’Amérique du Sud, diminuant la cellule de Hadley locale et tendant à
déplacer le jet des moyennes latitudes vers le nord, sous l’effet d’ondes de Rossby générées dans
les Caraı̈bes. Contrairement au régime NAO-, il n’y a pas de symétrie entre les terciles inférieur et
supérieur (c’est peut-être une explication de la ”bonne” prévision du régime NAO+ par MF).
– Le régime de Dorsale est défavorisé en hiver quand les SST sont froides au large de Terre-Neuve
en novembre. Il s’agit en fait d’une réponse barotrope de l’atmosphère en aval de l’anomalie froide
de SST (Kushnir et al., 2002). Il n’y a pas ici de symétrie entre les 2 terciles.
– Le régime de Blocage est favorisé (défavorisé) en hiver lorsque les SST sont froides (chaudes) au
large de Terre-Neuve et chaudes (froides) partout ailleurs dans l’Atlantique Nord. Cette structure
de SST se projette très bien sur le 2ème mode de variabilité de la SST de l’Atlantique Nord, que
l’on appelle ”Horseshoe” ou ”fer à cheval”. Ceci est cohérent avec l’étude de Namias, 1964 [21].

60
CHAPITRE 4. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’HIVER

Des 4 figures 4.7 à 4.10, on peut tirer les enseignements suivants pour le modèle ECMWF :
– Le régime NAO- est favorisé en hiver lorsque des conditions El Niño règnent en novembre dans le
Pacifique. Ceci est cohérent avec la figure 4.2 (a). La symétrie est moins forte que dans MF mais
toujours cohérente avec Greatbatch et al., 2004 [13].
– Le régime NAO+ n’est guère relié à des conditions sur l’Atlantique Tropical (comme dans MF),
mais plutôt au Pacifique Est. Le signe correspond au même que pour NAO- (ce qui n’est pas
consistant avec Greatbatch et al., 2004 [13]). Notons cependant que les anomalies du Pacifique
sont faibles et non centrées sur l’équateur, suggérant qu’il ne s’agit pas vraiment de l’ENSO.
– Le régime de Dorsale est associé à des SST froides au large de l’Afrique de l’Ouest en novembre.
– Le régime de Blocage est sensible à ENSO. El Niño (La Niña) en novembre défavorise (favorise)
le régime de Blocage en hiver. Ceci est cohérent avec la figure 4.2 (a).

En résumé, les événements ENSO du Pacifique ont généralement tendance dans les 2 modèles à
préconditionner les occurrences de certains régimes sur l’Atlantique Nord en hiver, notamment NAO-
dans MF et le Blocage dans ECMWF. Pour ces 2 régimes, la réponse du modèle au forçage semble
linéaire. L’impact d’ENSO sur les régimes NAO- d’hiver est plus fort dans MF que dans ECMWF. Ceci
peut être une explication des moins bons scores de prévision du régime NAO- pour MF car on sait que la
connexion ENSO /Nord-Atlantique dans le réalité n’est pas aussi robuste. Le régime NAO+ est le mieux
prévu dans MF (cf. partie 4.1) et ceci est probablement dû à une connexion réaliste avec l’océan Atlan-
tique Tropical Nord, et que l’on ne trouve pas dans ECMWF. En effet, le régime NAO+ de ECMWF est
au contraire plutôt lié au Pacifique Est, mais de façon irréaliste (Greatbatch et al., 2004 [13]) alors que
dans MF, il est très présent lorsque les SST sont froides dans l’Atlantique Tropical Nord en novembre. Il
pourrait être intéressant d’étudier la position des sources de chauffage diabatique au niveau de l’Atlan-
tique Tropical dans les 2 modèles pour trouver une explication physique à toutes ces connexions ENSO
(en réalisant des composites de précipitations par exemple).

On retiendra que l’approche en terciles n’est pas adaptée pour les observations (par manque d’échantil-
lons) et que la comparaison entre modèles et observations n’est pas possible avec cette méthode. En re-
vanche, elle s’avère très utile pour comparer 2 à 2 le comportement des modèles.

En annexe C, on présente des composites de SST construits de la même façon que précédemment,
mais pour le mois de mars, afin d’illuster l’impact des régimes de temps atmosphériques régnant sur
l’Atlantique Nord pendant l’hiver, sur l’état océanique postérieur de l’Atlantique Nord.

Bilan

Il est clair, d’après cette étude sur les liens physiques entre circulation atmosphérique d’hiver et SST
de novembre, que les mécanismes en jeu sont complexes et différents selon les modèles. Chacun répond
”à sa manière” et de façon plus ou moins forte selon les régimes, aux forçages océaniques en provenance
du Pacifique Tropical. Nous montrons que la connexion avec le Pacifique Tropical, même si elle constitue
la principale source de prévisibilité dans les modèles, n’est pas forcément toujours une connexion permet-
tant de bien prévoir les régimes de l’Atlantique Nord. Finalement, c’est plutôt la réponse à un signal en
provenance de l’Atlantique Tropical qui permet à MF d’atteindre les meilleurs scores de prévision pour
NAO+ avec environ 50 % de bonnes prévisions et de 10 % de fausses alarmes, et pas la connexion avec
ENSO, qui finalement ne serait pas la source de prévisibilité la plus pertinente dans les modèles, pour
prévoir correctement NAO+. Nous avons pu remarquer en outre que les modèles avaient tendance à être
linéaires dans leur comportement, puisque les composites de SST correspondant aux terciles inférieur et
supérieur d’occurrences des régimes sont le plus souvent de signes opposés (en particulier pour le Blo-
cage et NAO-, dans les 2 modèles). Cette réponse ”linéaire” des modèles aux forçages océaniques n’est

61
4.2. PRÉCURSEURS OCÉANIQUES DE LA DYNAMIQUE ATMOSPHÉRIQUE HIVERNALE
PRÉVUE

pas aussi nette pour les régimes NAO+ et Dorsale, mais cela pourrait certainement provenir d’une part
du petit nombre d’échantillons et d’autre part du faible niveau de confiance que l’on s’est accordé (70 %).

Notons enfin que les échantillons sont de très petites tailles et que donc les conclusions valables pour
les modèles, devront être confirmées par l’étude d’un échantillon plus grand d’observations (encore indis-
ponible aujourd’hui). Les différences de comportement entre les modèles, qui possèdent des précurseurs
océaniques souvent distincts, nous inciteraient à tester une approche multi-modèles pour expertiser les
occurrences de régimes de temps prévues par les différents modèles.

62
CHAPITRE 5. LIENS ENTRE RÉGIMES DE TEMPS ET MODES DE VARIABILITÉ

Chapitre 5

Liens entre régimes de temps et modes de


variabilité

La méthode de décomposition en régimes de temps sur laquelle s’est appuyée la majeure partie de
notre étude est par essence non-linéaire : nous avons montré notamment que le régime NAO+ ne pouvait
pas être considéré comme ”l’opposé” du régime NAO-, à la fois en termes de structures spatiales et de
liens avec l’océan. Une des méthodes plus classiques utilisée pour l’étude de la variabilité est la technique
d’Analyse en Composantes Principales (ACP), qui consiste ici à décomposer les champs de Z500 non
pas en régimes de temps mais en modes de variabilité. Cette décomposition en modes est, à la différence
de la décomposition en régimes, linéaire. Elle a été réalisée par Brigitte Dubuisson et Jean-Pierre Céron
à Météo-France (DCLIM). Le but de ce chapitre est d’établir un pont entre les 2 approches.

5.1 Principe d’Analyse en Composantes Principales


L’ACP consiste à déterminer les directions spatiales de variabilité (encore appelées ”modes” ou ”vec-
teurs propres”) et à projeter les données originelles sur cette base afin d’obtenir leur évolution temporelle.
En d’autres termes, il s’agit d’un changement de repère. Chacun des modes est donc caractérisé par une
structure spatiale et une série temporelle (appelée composante principale). L’ACP, réalisée à la DCLIM,
a été appliquée sur des champs mensuels de la moyenne d’ensemble de la Z500 du modèle MF. L’étude
s’est focalisée sur les mois de décembre 1979-2007 uniquement, correspondant aux deuxièmes mois
des prévisions hivernales, à la différence des régimes que nous avons extrait précédemment à partir de
champs journaliers, en prenant en compte les mois de novembre à mars. Une rotation des composantes
principales (méthode ”Varimax”) à faciliter l’interprétation des stuctures spatiales des modes.
Dans la décomposition en régimes de temps, l’ensemble de la variance est conservé car, par construc-
tion, tous les champs journaliers d’anomalies de Z500 sont traités par la classification automatique et
obligatoirement classés dans un des clusters. Dans la décomposition en modes de variabilité, on ne
conserve qu’un nombre fini de composantes principales, qui expliquent un certain pourcentage de va-
riabilité. Dans la présente étude, seules les 10 premières composantes principales (qui expliquent 90,2 %
de la variance) ont été conservées.
La décomposition en modes de variabilité a déjà été très largement utilisée dans le littérature, entre
autres par Barnston et Livezey (BL) en 1987 [4], sur des champs de géopotentiel à 700 hPa réanalysés
sur la période 1950-1984 et sur l’hémisphère nord. Le travail effectué à la DCLIM a été de relier les
structures spatiales des modes de variabilité des réanalyses ERA40 du CEPMMT obtenues par BL sur la
période 1958-2001, à celles simulées par MF sur la période 1979-2007. Il a été montré, pour le mois par-
ticulier de décembre, que certains modes de variabilité des rénanalyses ERA40 étaient reconstructibles à

63
5.2. LIENS ENTRE LES RÉGIMES DE TEMPS ET LES MODES DE VARIABILITÉ DANS
MÉTÉO-FRANCE SYSTEM 3

partir de plusieurs modes de MF (pour ce faire, les séries temporelles des modes ERA40 et MF ont été
corrélées sur la période commune 1979-2001).

Par construction de l’approche linéaire en terme de modes, les deux signes algébriques d’un mode
spatial de variabilité existent. A titre d’exemple, nous donnons ici la structure spatiale du 6ème mode
de variabilité de MF qui capture la NAO (dipôle de pression entre l’Islande et les Açores) ; les struc-
tures spatiales des autres composantes principales sont disponibles en annexe D. En particulier, les deux
régimes NAO- et NAO+ d’hiver du modèle (cf. figure 3.4 des centroı̈des des régimes d’hiver) se projettent
respectivement sur les deux signes opposés de la structure spatiale du mode de variabilité n˚6 (figure 5.1).

MODE 1 MODE 6 MODE 10

F IG . 5.1 – Modèle Météo-France System 3. Structures spatiales des modes de variabilité n˚1, n˚6 et
n˚10, issus de l’ACP (+ 1 rotation ”Varimax”) effectuée sur les champs de Z500 du mois de décembre,
en moyenne d’ensemble et sur l’hémisphère nord (20˚N ; 90˚N).

5.2 Liens entre les régimes de temps et les modes de variabilité dans Météo-
France System 3
Dans ce paragraphe, nous étudions les relations statistiques (en terme de corrélations) entre les oc-
currences des 4 régimes de temps d’hiver de MF et les différentes séries temporelles des 10 premiers
modes de variabilité de la Z500, sur les mois de décembre 1979-2006. Les données considérées pour
les régimes comme pour les modes, sont des moyennes d’ensemble.

Les 10 modes sont rangés sur la colonne de gauche du tableau 5.1 par ordre décroissant de variance
expliquée. Le mode 1 explique 21,9 % de variance et le mode 10 n’en explique plus que 3,4 %. En noir,
nous avons calculé les corrélations brutes entre occurrences de régimes et composantes principales et
en rouge les corrélations sans tendances quadratiques. Les plus fortes corrélations hors tendances sont
obtenues entre le régime NAO- et le mode 1 (-0,75), et entre le régime NAO+ et le mode 6 (-0,85). Nous
avons vérifié que les signes de ces corrélations étaient cohérents, en contrôlant que les structures spatiales
des régimes (cf. chapitre 3) se projetaient correctement sur celles des modes (cf. figure 5.1). On notera
que la tendance des séries a peu d’influence sur les corrélations.

Les 4 premiers modes, qui expliquent à eux seuls 59,1 % de la variance interannuelle de la Z500
de décembre, ont des séries temporelles corrélées significativement à l’indice Niño 3.4 (représentatif
d’ENSO), la corrélation étant maximale pour le premier (0,65). Les modes suivants (5 à 10) n’ont pas

64
CHAPITRE 5. LIENS ENTRE RÉGIMES DE TEMPS ET MODES DE VARIABILITÉ

MF System 3 NAO- NAO+ Dorsale Blocage


mode 1 (21,9 %) - 0,72 ** - 0,75 ** 0,40 ** 0,47 ** 0,33 * 0,35 *
mode 2 (14,5 %) 0,52 ** 0,45 ** - 0,34 *
mode 3 (14,1 %) - 0,42 ** - 0,33 * 0,55 ** 0,47 **
mode 4 (8,6 %)
mode 5 (7,4 %) - 0,37 ** 0,42 ** 0,42 ** 0,40 ** 0,37 **
mode 6 (6,9 %) 0,33 * - 0,86 ** - 0,85 ** 0,39 **
mode 7 (5,2 %) - 0,31 * - 0,56 ** 0,38 **
mode 8 (4,7 %) - 0,62 ** - 0,63 **
mode 9 (3,4 %) 0,33 *
mode 10 (3,4 %) - 0,56 ** - 0,49 ** 0,55 ** 0,57 ** 0,31 *

TAB . 5.1 – Corrélations entre les occurrences des 4 régimes d’hiver de MF (en moyenne d’ensemble
pour les mois de décembre 1979 à 2006) et les 10 premières composantes principales du modèle (ob-
tenues par ACP sur les moyennes d’ensemble mensuelles de Z500, sur le domaine 20˚N ; 90˚N, après
rotation ”Varimax”). Le pourcentage de variance expliqué par chaque mode figure entre parenthèses.
Le symbole ** (*) signifie que la corrélation est significative à 95 % (90 %). En noir (en rouge) :
corrélations brutes (sans tendances quadratiques).

ce lien statistique avec ENSO. On voit très bien sur la structure spatiale du mode 1 l’information de
variabilité due à ENSO, en témoignent les fortes anomalies de Z500 entre 20 ˚N et 30 ˚N, notamment
sur la zone Pacifique (figure 5.1). Avec l’approche en modes, on illustre que le Pacifique Tropical est une
des principales sources de prévisibilité, dans MF.
La série temporelle du mode 1 est très fortement corrélée aux occurrences des régimes NAO-, dont
on a vu que la principale source d’excitation était liée à ENSO (cf. fig. 4.7). La corrélation entre ce mode
1 et les occurrences des régimes de Dorsale et de Blocage est également significative, par contre elle
n’est pas significative pour NAO+. Le fait que les scores de prévision du régime NAO+ par MF soient
meilleurs que pour les 3 autres régimes pourrait provenir potentiellement de l’absence de lien statistique
entre le mode 1 et le régime NAO+. Au lieu d’être relié statistiquement au mode 1 (comme le sont les 3
autres régimes), le régime NAO+ en effet est lié aux modes 3, 6 (notamment) et 10. La corrélation entre
les occurrences de NAO+ et la série temporelle du mode 6 est d’ailleurs la plus forte dans tout le tableau
5.1. Nous avons souligné auparavant (chapitre 4) que le régime NAO+, au lieu de répondre aux ”solli-
citations” du Pacifique Tropical, semblait avoir plutôt une connexion avec l’Atlantique Tropical Nord.
L’absence de relation trouvée entre le mode 1 (lié à ENSO) et NAO+ n’est donc pas contradictoire avec
ce résultat.
Le mode 3 (cf. annexe D) avec lequel NAO+ est relié de manière significative, pourrait être un
mode répondant à la stratosphère, au vu de sa structure annulaire centrée sur le pôle nord. En effet,
la résolution verticale du modèle MF dans la stratosphère, plus fine, permettrait notamment de mieux
prendre en compte la chimie de l’ozone et la dynamique stratosphérique. Ce mode 3 serait susceptible
d’influencer la prévision du régime NAO+, qui rappelons-le est la seule correcte. Le mode 4 (mode PNA,
cf. annexe D) n’est lié statistiquement à aucun des 4 régimes de temps de l’Atlantique Nord. Cela n’a
rien de surprenant car ce mode est plutôt connu pour influencer le climat américain. Son influence arrive
de manière ”diffuse” en Europe, par interaction avec le bassin des Caraı̈bes.
Notons enfin que les occurrences du régime NAO- sont corrélées positivement à la série tempo-
relle du mode 6, alors que celles du régime NAO+ sont corrélées négativement. Ces signes opposés
sont cohérents avec l’anticorrélation montrée précédemment entre les occurrences des régimes NAO- et
NAO+ (cf. chapitre 3). La correspondance entre la structure spatiale du régime NAO+ (cf. fig. 3.4) et le
mode 6 (fig. 5.1) est plus nette qu’avec NAO- (cf. fig. 3.4). Il n’y a donc rien d’étonnant à ce que les

65
5.2. LIENS ENTRE LES RÉGIMES DE TEMPS ET LES MODES DE VARIABILITÉ DANS
MÉTÉO-FRANCE SYSTEM 3

séries temporelles soient moins corrélées entre NAO- et le mode 6.

F IG . 5.2 – Corrélation entre la Z500 et les séries temporelles d’occurrence des régimes NAO- (à gauche)
et NAO+ (à droite). Modèle Météo-France System 3 (moyennes d’ensemble sur les mois de décembre).
Période 1979-2007.

La figure 5.2 présente la corrélation entre la Z500 et les occurrences du régime NAO- de décembre.
On y distingue nettement ”la marque” des modes 1 et 10, qui sont caractérisés par de fortes valeurs au
niveau du bassin méditerranéen (cf. figure 5.1). Les corrélations significatives observables un peu partout
sur l’hémisphère nord sont cohérentes avec la contribution de plusieurs modes de variabilité aux occur-
rences des régimes NAO-. Les corrélations positives dans les Tropiques témoignent de la connexion avec
ENSO. Au contraire, la structure de la corrélation entre la Z500 et les occurrences du régime NAO+
(figure 5.2) ne se projette quasiment que sur la structure spatiale du mode 6 : en effet, il y a peu de signal
de corrélation en dehors du bassin Atlantique Nord et du Groënland, seule région où le signal est très
fort. Ceci est consistant avec la forte corrélation de 0,85 trouvée entre les régimes NAO+ et le mode 6.
On retrouve ici l’assymétrie dans les connexions des 2 régimes NAO avec les SST. Le régime NAO+
apparaı̂t finalement comme un mode ”local” Atlantique, alors que le régime NAO- semble plutôt forcé
par les bassins tropicaux à l’échelle de la planète.

Bilan
Pour résumer, dans ce chapitre, nous avons tenté de faire correspondre modes de variabilité du modèle
et régimes de temps, pour un mois précis (décembre) et à partir de moyennes d’ensemble. Il s’agit là d’un
premier pas dans la recherche de ”ponts” entre les 2 approches en régimes et en modes, qui semblent
complémentaires et fort heureusement non contradictoires. Les perspectives pourront être d’étudier ce
lien modes / régimes dans chaque membre du modèle pris séparément et sur la saison DJF dans son
intégralité, plutôt que sur un mois seul. On pourra aussi tester l’impact du domaine sur lequel est effectuée
l’ACP. Parmi les autres pistes, il serait intéressant d’effectuer des régressions multiples entre les 10 modes
et les 4 régimes du tableau 5.1, pour compléter et synthétiser le lien entre modes et régimes, et mieux
prendre en compte la dépendance entre les modes.

66
CHAPITRE 6. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON ESTIVALE

Chapitre 6

Décomposition en régimes de temps pour


la saison estivale

Après avoir étudié les structures spatiales et les occurrences des régimes d’hiver dans le chapitre
3, nous nous intéressons maintenant aux régimes de temps de la saison estivale (définie ici comme la
période mai-septembre). On suit la même démarche que celle utilisée pour décomposer les régimes d’hi-
ver (cf. partie 3.1).
La dynamique atmosphérique d’été se caractérise par une circulation plus méridienne dans l’Atlan-
tique Nord à partir du mois de mai, du fait du comblement climatologique de la dépression d’Islande
et du gonflement de l’Anticyclone des Açores. Les régimes d’été auront en conséquence des structures
distinctes de celles des régimes d’hiver, se déplaçant spatialement avec les centres d’action pré-cités.
D’autre part, le signal utile à la prévision saisonnière (réponse des modèles aux conditions océaniques)
est plus faible en été, ce qui a tendance à diminuer la prévisibilité. D’un autre côté, le bruit atmosphérique
(la variabilité interne de l’atmosphère) également plus faible produit l’effet inverse. Reste à savoir, qui
du bruit ou du signal utile ”l’emporte” dans le rapport qui définit la prévisibilité.

6.1 Structures spatiales des régimes d’été


Contrairement aux régimes d’hiver, les régimes d’été sont moins persistants, et les anomalies de
géopotentiel associées sont moins fortes. Pour obtenir une classification de régimes observés qui soit
stable et réaliste, il est indispensable de considérer, en saison estivale, l’échantillon le plus grand possible.
Cela est nécessaire pour obtenir des régimes qui soient des entités discriminantes (les attracteurs étant
moins clairement dissociés en été dans l’espace des phases). Ainsi, pour les observations NCEP, on
effectue cette décomposition sur les trimestres JJA (Juin-Juillet-Août) 1950-2007, au lieu d’effectuer
la décomposition sur les périodes MJJAS (mai-septembre) 1979-2007. On dispose donc de 58 années
autour du noyau saisonnier très homogène dynamiquement formé par les 3 mois JJA. On obtient alors
des structures robustes, conformes à celles de la littérature, fidèles notamment à celles présentées dans
Boe, 2007 [5] (décomposition de champs de pression au niveau de la mer) ou dans Cassou, 2005 [9]
(décomposition de champs de Z500). Se limiter aux seules années 1979 à 2007 ne nous permet pas
d’obtenir une décomposition réaliste.
Pour les modèles, on s’appuie sur des prévisions à 7 mois d’échéance pour les 29 étés 1979 à 2007,
couvrant la période mai-novembre (initialisation autour du 1er mai). Les structures spatiales des régimes
des modèles sont obtenues à partir des données MJJAS. Les occurrences des régimes sont calculées
ensuite sur les trimestres JJA, correspondant aux échéances +2 à +4 mois, c’est-à-dire la même fenêtre
d’intérêt de 3 mois que pour l’hiver. Le problème d’échantillonnage ne se pose pas pour les modèles
puisque de part la nature ensembliste de l’approche, on multiplie par 11 (membres) le nombre de jours

67
6.1. STRUCTURES SPATIALES DES RÉGIMES D’ÉTÉ

F IG . 6.1 – Centroı̈des des 4 régimes de temps estivaux (structures spatiales moyennes obtenues à partir
d’anomalies journalières de Z500). Unité : mgp. L’intervalle entre les contours est de 25 mgp. Ligne
1 : réanalyses NCEP (JJA 1950-2007), ligne 2 : modèle MF (MJJAS 1979-2007) et ligne 3 : modèle
ECMWF (MJJAS 1979-2007). Domaine NORD-ATLANTIQUE (30˚N-80˚N ; 85˚W-35˚E). La fréquence
d’occurrence des régimes (pourcentage de jours classés dans le cluster) apparaı̂t au-dessus de chaque
régime.

à classer par rapport à NCEP. Nous avons vérifié d’autre part que les régimes obtenus en ne considérant
que les jours de JJA sont similaires à ceux incluant mai et septembre.
La figure 6.1 compare les structures spatiales des 4 régimes d’été observés NCEP avec celles des
régimes simulés par MF et ECMWF :
Le régime de Blocage (appelé aussi Blocage Scandinave) possède la même structure que le régime
d’hiver portant le même nom (figure 3.1). Une forte anomalie de Z500 située entre les Iles Britanniques
et la Scandinavie caractérise ce régime, plus persistant que les 3 autres (non montré). La stationnarité du
régime de Blocage peut entraı̂ner des vagues de chaleur durables et favorise la sécheresse (air sec en pro-
venance d’Europe continentale dans un flux de Nord-Est). C’est ce régime qui fut d’ailleurs responsable
de la ”canicule” qui a touché la France en août 2003.

Le régime de Thalweg correspond à une forte anomalie négative de Z500 occupant presque tout
l’Atlantique Nord, entourée de faibles dorsales sur Terre-Neuve et l’Europe de l’Ouest. Les perturba-
tions atlantiques sont rejetées sur le nord des Iles Britanniques et la Scandinavie. C’est en quelque sorte

68
CHAPITRE 6. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON ESTIVALE

l’équivalent du régime NAO+ d’hiver, mais en plus ”mou” (avec des anomalies moins creuses et donc
une activité de cyclogénèse moins prononcée). Il induit en moyenne des conditions chaudes sur l’Europe,
par advection d’air chaud subtropical. Il a aussi participé aux épisodes caliculaires de 2003.

En été, le régime NAO- perd la structure zonale continue qu’il possède en hiver (anomalie négative
d’un bord de l’Atlantique Nord à l’autre). Le noyau négatif de Z500, au lieu d’être plutôt sur l’Atlantique,
est décalé vers l’Europe de l’Ouest. Le régime NAO- d’été correspond ainsi davantage sur la France à un
flux en provenance du secteur ouest à sud-ouest. Il s’accompagne de conditions fraı̂ches et humides.

Le régime de Dorsale se caractérise par une anomalie positive de Z500 sur l’Atlantique Nord s’étendant
jusque vers l’ouest de la France, alors que l’Europe du Nord et l’Europe Centrale sont concernées par
des bas géopotentiels. Sur la France, les circulations de Nord-Ouest fraı̂ches mais sèches dominent. Il est
très semblable à son cousin d’hiver.

Globalement, il y a une ressemblance certaine entre les régimes des modèles et ceux des réanalyses,
bien que celle-ci soit moins nette que pour les régimes d’hiver. Pour MF, les noyaux d’anomalies sont
décalés vers l’ouest pour les 4 régimes. Dans le régime NAO-, la dorsale sur la Scandinavie n’a pas
d’équivalent dans NCEP. Le régime de Dorsale est par ailleurs mal reproduit, avec une nette sous-
estimation du noyau positif sur l’Atlantique et une surestimation des bas géopotentiels sur l’Europe
(circulation trop méridienne). Pour les 4 régimes de MF, les intensités sont en général trop faibles ; on
explique cette faiblesse des anomalies, comme pour les régimes d’hiver, par un déficit de variabilité jour-
nalière de la Z500 (non montré). Le modèle ECMWF est très réaliste dans sa représentation des régimes
d’été, aussi bien en terme de localisation des noyaux d’anomalies de Z500 que de leur intensité. On peut
toutefois noter que l’anomalie positive dans le régime NAO- du modèle ECMWF au niveau du Groënland
est un peu trop intense par rapport à l’anomalie observée.
Les écarts entre les fréquences des régimes sont généralement peu importants entre modèles et obser-
vations, sauf pour le régime NAO-. Notamment, le modèle de MF a tendance à sous-estimer légèrement
l’occurrence du régime NAO- avec 20 %, contre 24 % dans les réanalyses.

En conclusion, mis à part le déficit d’intensité des régimes pour MF, déjà mis en exergue lors de
l’étude des régimes d’hiver (chapitre 3), les modèles sont capables de reproduire de manière encoura-
geante les régimes d’été observés, à la fois en terme de structure spatiale et de fréquence moyenne.

6.2 Occurrences des régimes d’été


La figure 6.2 présente les anomalies d’occurrence des 4 régimes d’été observés sur le trimestre JJA
dans les réanalyses NCEP. De manière cohérente avec les gammes de températures statistiquement favo-
risées par les différents régimes de temps, les étés 1994 et 2003, qui ont été très chauds sur la France, ont
été associés à des occurrences plus fortes des régimes de Blocage et de Thalweg alors que les régimes
NAO- et Dorsale étaient moins fréquents (Cassou, 2005 [9]). Au contraire, l’été 2007 a été marqué par
une très grande récurrence du régime NAO- (anomalie de + 93%, soit 42 jours sur 92 au lieu de 22 en
moyenne) au détriment des 3 autres régimes ; or, cet été 2007 fut particulièrement humide et frais sur la
France. Le lien régimes / temps sensible ressenti est donc bien mis en évidence sur ces exemples.
Il n’y a pas de tendances marquées dans les occurrences observées des régimes d’été, sur la période
1979-2007 étudiée ici. Par contre, les occurrences analysées sur la période 1950-2007 prouvent que le
régime NAO- est nettement plus excité dans les années 1950-1970 que dans les 2 dernières décennies
(non montré). Notons enfin que les régimes d’été sont moins discriminants que les régimes d’hiver
puisque les anomalies n’atteignent jamais - 100 %, autrement dit chaque régime se manifeste chaque
année au moins pendant quelques jours.

69
6.2. OCCURRENCES DES RÉGIMES D’ÉTÉ

F IG . 6.2 – Anomalies d’occurrences de régimes de temps estivaux NCEP (en % par rapport à l’occur-
rence moyenne sur la période 1950-2007).

(a) ECMWF System 3 (b) Météo-France System 3

F IG . 6.3 – Anomalies d’occurrences des régimes de temps estivaux des modèles (en % par rapport à
l’occurrence moyenne sur la période et sur tous les membres). A gauche : ECMWF. A droite : MF.

70
CHAPITRE 6. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON ESTIVALE

La figure 6.3 présente les mêmes anomalies que pour les observations, mais cette fois pour les 2
modèles et en moyenne d’ensemble. La dispersion entre les différents membres est du même ordre de
grandeur que pour les régimes d’hiver (non montré). Aucune tendance particulière n’est décelable dans
les occurrences de ECMWF. Par contre, MF prévoit, en seconde moitié de période, plus de régimes de
Blocage et au contraire moins de régimes de Thalweg. Une rupture assez brutale a lieu dans les occur-
rences de ces 2 régimes au milieu des années 1990. On ne peut pas vraiment parler de tendance mais
plutôt de marche d’escaliers entre le début et la fin de la période, traduisant dans le monde du modèle le
passage d’un état du système climatique à un autre.
Ce comportement des régimes de MF n’est pas contradictoire avec l’augmentation de la température
globale associée à l’augmentation des GES. En effet, l’augmentation de la température globale entraı̂ne
naturellement une dilatation de l’atmosphère (effet de Laplace) et donc une hausse de l’altitude de la
Z500, privilégiant les hauts géopotentiels du Blocage au détriment des bas géopotentiels du Thalweg. Le
fait est que l’on ne retrouve pas de ruptures dans les régimes de ECMWF. Or, les taux de gaz à effet de
serre changent chaque année dans les modèles et les mêmes valeurs sont prescrites dans MF et ECMWF.
Il est donc possible que la réponse du modèle MF aux GES soit plus prononcée que ECMWF et que donc
l’impact sur la Z500 soit plus fort.
Les deux périodes antagonistes dans les occurrences des régimes de Blocage et de Thalweg simulés
par MF sont en fait cohérentes avec les tendances linéaires moyennes de Z500 du modèle sur la période
1979-2007. Elles sont fortes dans MF, en particulier au large de Terre-Neuve (figure 6.4) : elles atteignent
en effet des valeurs de + 35 mgp en 29 ans (soit plus de 10 mgp par décade), ce qui n’est pas négligeable
relativement à l’intensité moyenne des régimes. Les anomalies de Z500 atteignent en effet 60 à 70 mgp
dans les structures spatiales des régimes MF de Thalweg et de blocage (cf. figure 6.1), la tendance
représente donc 50 % de l’intensité des régimes. Ces tendances positives de géopotentiel s’étendent vers
la Scandinavie en passant par les Iles Britanniques. Il est donc logique que cette structure soit associée à
davantage (moins) de régimes de Blocage (Thalweg) en fin de période.
Les tendances de ECMWF sont, quant à elle, mieux réparties sur l’hémisphère nord et plutôt du
même signe, positif, ce qui serait cohérent avec un signal global de réchauffement climatique. Dans tous
les cas, elles ne se projettent pas sur les structures spatiales d’un régime particulier. On remarque toute-
fois une légère tendance négative entre les Iles Britanniques et la Scandinavie, qui correspond de manière
cohérente à une diminution des occurrences des régimes de Blocage entre 1979 et 2007 (avec plutôt des
anomalies négatives d’occurrences depuis 1993), diminution qui reste toutefois marginale.
Notons qu’il y a également des tendances de Z500 en hiver dans les modèles, celles-ci ayant une
amplitude comparable à l’été (non montré). Mais la variabilité étant plus forte en hiver (les régimes ont
en effet des intensités plus fortes en hiver qu’en été), l’action de cette tendance n’est pas dominante. Ceci
explique l’absence de tendances marquées dans les occurrences des régimes d’hiver (cf. chapitre 3).
Le fait que les tendances de Z500 ne soient pas réparties géographiquement de la même manière
dans les deux modèles nous incite à rechercher d’autres hypothèses que le seul effet des GES pour les
expliquer. Plusieurs mécanismes physiques susceptibles d’expliquer la tendance forte en Z500 dans MF
sont envisagés ci-après :

Première hypothèse : niveaux stratosphériques dans MF

On sait que le réchauffement climatique associé à l’augmentation des GES induit un refroidissement
de la basse stratosphère et un réchauffement de la troposphère (GIEC 2007). Ceci est cohérent avec
une hausse de l’altitude de la Z500. MF possède une résolution verticale atmosphérique raffinée dans la
stratosphère. Il peut ainsi mieux prendre en compte les effets des GES, l’impact de l’ozone (situé vers 30
km d’altitude) et les interactions entre stratosphère et troposphère. Il est possible que le modèle soit trop
sensible à l’un de ces 3 effets, ce qui induirait alors des tendances dans certains régimes.

71
6.2. OCCURRENCES DES RÉGIMES D’ÉTÉ

F IG . 6.4 – Tendance de la Z500 (en mgp sur 29 ans) sur la période d’étude (étés 1979 à 2007) et sur
l’hémisphère nord. Modèle MF (gauche) et modèle ECMWF (droite).

Seconde hypothèse : tendances dans les états initiaux océaniques assimilés par Mercator

Il est possible que les tendances de Z500 dans MF soient dues à des tendances dans les analyses
océaniques MERCATOR. La figure 6.5 montre que de fortes tendances des conditions initiales en SST
sont présentes dans les analyses océaniques en règle générale sur l’ensemble du bassin Atlantique Nord
ainsi que la Mer du Labrador (jusqu’à + 3 ˚C en 29 ans atteints au niveau du Gulf-Stream au large
de Terre-Neuve). Cet excès de chaleur dans les conditions aux limites au niveau du bassin Atlantique
Nord est alors susceptible d’avoir un impact sur la colonne atmosphérique sus-jacente (dilatation de la
couche de surface rejetant le niveau 500 hPa en altitude) et ainsi peut expliquer les fortes tendances
de géopotentiel de MF. Les tendances de conditions initiales en SST sont par contre moins fortes dans
ECMWF et encore moins fortes dans les observations (jeux de données Reynolds), où l’on relève plutôt
un refroidissement sur l’ouest du bassin et un réchauffement sur l’est. Les fortes valeurs atteintes aux
hautes latitudes (modèles et observations) ne sont pas réalistes car il s’agit de zones glacées (où le pa-
ramètre de température de surface comme estimateur de la SST n’est pas adapté).
Les remarques précédentes tendent à prouver qu’une partie des tendances en Z500 dans MF est
certainement liée aux états initiaux océaniques de Mercator. Il est intéressant de noter que les réanalyses
océaniques de Mercator ne sont pas homogènes sur la période 1979-2007, les données altimétriques étant
assimilées depuis 1993 uniquement. Cette cohérence de date pourrait expliquer en partie la rupture ”en
marches d’escalier” dans les occurrences des régimes de MF. On précise que cet impact de l’assimilation
est aussi visible dans les analyses océaniques de ECMWF mais est beaucoup moins marqué.

Suite à ces diagnostics, il a été envisagé, à des fins opérationnelles, de recalculer une climatologie de
référence pour Météo-France System 3 non pas sur la période 1979-2007, mais sur la dernière période
”stable” (période 1993-2007). On est revenu ainsi à une climatologie de modèle plus courte, comme ce
qui était fait dans la précédente version opérationnelle du modèle, Météo-France System 2 (sur la période
1993-2003). Le but de ce raccourcissement de période est de diminuer l’impact des tendances de Z500
dans MF, qui occultent complètement le signal de prévision saisonnière dû aux conditions océaniques,
et ainsi d’éviter de polluer la moyenne climatologique du modèle par la rupture au milieu des années
1990 dans les occurrences des régimes estivaux de Thalweg et de Blocage. Pour envisager une prévision
multi-modèles des régimes de temps, il serait préférable de se baser sur cette période commune 1993-

72
CHAPITRE 6. DÉCOMPOSITION EN RÉGIMES DE TEMPS POUR LA SAISON ESTIVALE

F IG . 6.5 – Tendance des conditions initiales de SST (en ˚C sur 29 ans) sur le domaine Nord-Atlantique :
SST prescrites dans les analyses océaniques du modèle de Météo-France et dans celles de ECMWF (en
haut), SST observées Reynolds (en bas).

2007 pour calculer les climatologies des 3 modèles du groupement EUROSIP (MF, ECMWF et UKMO).

6.3 Prévisibilité des régimes d’été


Dans cette partie, nous examinons les perspectives de potentielle prévisibilité des régimes de temps
estivaux. Des corrélations entre les séries temporelles d’occurrences prévues des 4 régimes ont été ef-
fectuées entre les 2 modèles et reportées dans le tableau 6.1. Il s’agit en fait des corrélations entre les
séries temporelles de la figure 6.3, régime par régime. L’impact des tendances sur ces corrélations est
examiné.

Le tableau 6.1 montre qu’il n’y a aucun accord entre les deux modèles, même en s’affranchissant
des fortes tendances de MF. Le régime de dorsale se démarque avec une corrélation négative qui atteint
-0,30. Une telle anti-corrélation entre les occurrences temporelles des régimes de Dorsale des 2 modèles
n’est pas totalement surprenante, au vu des différences assez nettes qui existaient entre leurs structures
spatiales (figure 6.1). Elle suscite cependant des questions sur les mécanismes physiques mis en jeu,
qui doivent être différents dans les deux modèles. On remarque aussi que l’impact des tendances sur les
résultats des corrélations est plus fort avec les régimes de Blocage et de Thalweg, en cohérence avec les
ruptures en marches d’escalier de ces régimes dans MF. La corrélation de 0,26 obtenue pour le régime
de Thalweg, même si elle n’est pas significative au niveau de confiance 90 %, est assez encourageante
(la corrélation peut en effet masquer une bonne correspondance pour certaines années) ; elle n’est pas

73
6.3. PRÉVISIBILITÉ DES RÉGIMES D’ÉTÉ

corrélations brutes sans tendance linéaire sans tendance quadratique


BLOCAGE : ECMWF vs MF - 0,04 0,14 0,12
THALWEG : ECMWF vs MF 0,09 0,22 0,26
NAO- : ECMWF vs MF - 0,13 - 0,13 - 0,16
DORSALE : ECMWF vs MF - 0,30 * - 0,30 * - 0,29

TAB . 6.1 – Corrélations entre les séries temporelles d’anomalies d’occurrence trimestrielle (JJA) des
régimes prévus en moyenne d’ensemble par MF et les séries correspondantes prévues par ECMWF.
Colonne 1 : corrélation entre les séries brutes, colonnes 2 et 3 : corrélation entre les séries sans tendance
linéaire et sans tendance quadratique respectivement. Le symbole * (**) signifie que la corrélation est
significative à 90 % (95 %) pour un échantillon de 29 cas.

incohérente avec le fait que les régimes de Thalweg des 2 modèles soient objectivement les plus proches
en terme de structures spatiales.
Notons que nous avons également effectué des corrélations entre les régimes prévus en moyenne
d’ensemble respectivement par les 2 modèles et les régimes NCEP. Dans MF, seul le régime de Thalweg
est corrélé avec les réanalyses (valeur de 0,33, significative au niveau de confiance 90 %). Dans ECMWF,
les occurrences du régime NAO- sont anti-corrélées aux occurrences du même régime observé (valeur
de -0,38, significative au niveau de confiance 95 %). On voit donc que, comme pour l’hiver, le calcul de
scores en terme de corrélations linéaires ne montre pas de correspondance flagrante entre occurrences de
régimes prévues et observées.

Une perspective logique serait de projeter les régimes d’été sur la base des régimes observés sur la
période 1950-2007, comme ce qui a été fait dans le chapitre 3 pour les régimes hivernaux. Cette méthode
de projection a en effet prouvé (cf. partie 4.1.2), que l’on pouvait obtenir des scores un peu plus élevés
en adoptant un classement non-linéaire en terciles d’occurrences. On recommande toutefois d’effectuer
cette projection sur la dernière période 1993-2007 pour s’affranchir de la marche d’escalier dans les
régimes de Thalweg et de Blocage. Une étude des mécanismes physiques entre les régimes d’été et les
conditions de SST de mai pourra dans un second temps être envisagée, en utilisant éventuellement les
mêmes diagnostics que ce qui a été fait pour la saison d’hiver (partie 4.2).

74
CONCLUSION ET PERSPECTIVES

Conclusion et perspectives

Dans cette étude, nous avons examiné comment les régimes de temps caractéristiques de l’Atlantique-
Nord étaient simulés dans les prévisions saisonnières issues des 2 modèles couplés Météo-France System
3 (MF) et ECMWF System 3 (ECMWF), et dans quelle mesure les occurrences de ces régimes étaient
prévisibles. Cette analyse s’est basée sur les longues séries de prévisions à 7 mois d’échéance, effectuées
a posteriori sur la période de référence 1979-2007, suivant une approche ensembliste. Nous nous sommes
limités aux saisons d’hiver (DJF) et d’été (JJA).

Nous avons tout d’abord validé le comportement général des 2 modèles en saison hivernale, en exa-
minant notamment leurs biais climatologiques moyens par rapport aux réanalyses NCEP. Nous avons
montré que les biais de SST étaient importants dès le premier mois de simulation (novembre) et qu’ils
croissaient très rapidement avec l’échéance de prévision, notamment au niveau du Gulf-Stream et du
courant circum-polaire. L’examen des biais en Z500 a quant à lui montré que le modèle ECMWF (MF)
avait tendance en moyenne à trop creuser (combler) la dépression d’Islande par rapport aux réanalyses,
en association avec une activité trop forte (faible) des ondes stationnaires.
Comme condition préalable à la prévision saisonnière, nous avons vérifié que les anomalies de SST
tropicales étaient suffisamment persistantes dans les modèles. MF est capable de faire persister des ano-
malies de SST pendant plusieurs mois dans certaines zones-clefs telles que le Pacifique Central et l’At-
lantique Tropical Nord, conformément aux réanalyses. Nous avons d’autre part illustré que l’impact de
l’ENSO de novembre sur les SST hivernales de l’Atlantique Nord était plus important dans MF que dans
ECMWF, suggérant une connexion plus forte via l’atmosphère.
Les structures spatiales des régimes d’hiver simulés sont encourageantes, malgré des différences
dans la localisation et l’intensité des régimes. Nous montrons que l’intensité des régimes de MF est trop
faible, du fait d’une variabilité journalière intrinsèque du modèle insuffisante, alors qu’elle est correcte
pour ECMWF. Il faut probablement chercher une cause à ce défaut dans la différence entre les résolutions
des 2 modèles. Les occurrences des régimes de temps d’hiver prévues par les différents membres des en-
sembles sont généralement assez dispersées, faisant apparaı̂tre clairement la très faible prévisibilité des
régimes de temps et justifiant une approche en moyenne d’ensemble. Les membres de MF sont dispersés
de manière réaliste, contrairement aux membres de ECMWF. En terme de scores, nous avons montré que
les régimes étaient mal prévus dans MF (à l’exception notable de NAO+ avec 1 prévision juste sur 2 et
un très faible taux de fausses alarmes). Dans ECMWF, les scores sont faibles pour tous les régimes. Nos
résultats ne semblent pas sensibles à la méthode, ayant testé la projection des régimes prévus sur la base
commune des régimes observés et n’améliorant pas de manière sensible les taux de succès (au maximum
une bonne prévision sur 2).
Les liens physiques entre les régimes de temps d’hiver et les SST de novembre (interprétées comme
des précurseurs) sont apparus complexes et différents selon les modèles. Les deux sont sensibles à ENSO,
mais répondent très différemment à la sollicitation de ce forçage, en favorisant des régimes différents sur
l’Atlantique Nord. NAO- est le régime le plus sensible à ENSO dans MF alors qu’il s’agit plutôt du Blo-
cage dans ECMWF ; dans les deux cas, le comportement des modèles dans l’excitation de ces régimes
est plutôt linéaire. Le modèle MF semblerait tirer sa bonne prévision du régime NAO+ d’une connexion

75
CONCLUSION ET PERSPECTIVES

avec l’Atlantique Tropical Nord réaliste et non-linéaire (davantage de régimes NAO+ en hiver lorsque
les SST sont froides en novembre de l’Afrique de l’Ouest aux Caraı̈bes, conformément à Sutton et al.,
2001 [25]). Le régime de Dorsale fait apparaı̂tre les connexions les moins marquées dans les 2 modèles.
L’occurrence du régime de Blocage de MF semble être linéairement liée à la structure de SST dite ”en
fer à cheval” typique du bassin Atlantique Nord.
De façon très préliminaire, nous avons tenté de relier l’approche en régime de temps (non-linéaire)
à l’approche en modes de variabilité (linéaire), dans le modèle de Météo-France et pour le mois de
décembre seul. Il apparaı̂t que tous les régimes sont reliés statistiquement à plusieurs modes. Le seul
régime qui ne soit pas lié au premier mode de variabilité du modèle (mode le plus relié statistiquement à
ENSO et le plus ”prévisible” par construction utilisant la moyenne d’ensemble), est NAO+. Cela renforce
l’idée que la prévision du régime NAO+ dans MF dépend dans une moindre mesure de la connexion avec
l’ENSO.
L’étude des régimes d’été a permis de mettre en relief une rupture très nette dans les années 1990,
dans les occurrences des régimes de Thalweg et de Blocage prévus par MF. Nous avons montré que
ces ruptures étaient cohérentes avec les tendances simulées dans la Z500 sur la période de référence
mais que cette rupture était irréaliste. La piste la plus sérieusement envisagée pour expliquer ce défaut
semble être une tendance dans les conditions initiales de SST, assimilées dans les analyses Mercator.
Une surestimation de la réponse de MF à l’augmentation de la concentration en GES est aussi envisagée.
Il est clair qu’une validation plus poussée du modèle s’impose dans le futur proche. Pour s’affranchir
de l’effet de la forte tendance en Z500 et des ruptures dans les régimes, il a été décidé en opérationnel
de recalculer la climatologie du modèle Météo-France System 3 sur une période plus courte : 1993-2007.

Les perspectives de cette étude sont nombreuses. Tout d’abord, on envisage d’examiner les prévisions
en régimes de temps du modèle couplé de l’UKMO (3ème modèle du jeu de données EUROSIP). A long
terme, les prévisions en régimes des 3 modèles pourraient ainsi être utilisées pour effectuer des prévisions
saisonnières opérationnelles de régimes basée sur une expertise multi-modèles. Nous conseillons pour
cela de projeter les régimes simulés sur une base commune de régimes observés et d’utiliser les mêmes
périodes pour calculer les occurrences climatologiques des régimes des différents modèles.
Des scores probabilistes pourront être regardés pour établir des scores de prévision en régimes à partir
des différents membres plutôt qu’avec la moyenne d’ensemble (score de Brier par exemple). L’examen
de la connexion entre régimes et modes de variabilité sera poursuivi à la DCLIM : il s’agira, entre autres,
de regarder la correspondance entre modes et régimes, dans les différents membres de l’ensemble de
prévision plutôt qu’avec la moyenne d’ensemble. On pourra étendre d’ailleurs cette étude aux autres
modèles de EUROSIP.
Le lien entre les régimes et la prévision probabiliste d’événements extrêmes à échelle saisonnière
ainsi que la problématique de transition entre l’hiver et l’été en terme de changement dans les structures
spatiales des régimes, restent des questions en suspens. Enfin, l’ensemble des méthodologies utilisées ici
pourra servir de base à une étude des régimes de temps sur la région Amérique du Nord / Pacifique Nord.

76
BIBLIOGRAPHIE

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78
TABLE DES FIGURES

Table des figures

1 Structures spatiales des 4 régimes de temps d’hiver sur la période 1979-2007 . . . . . . 11


2 Anomalies d’occurrence des 4 régimes de temps d’hiver (en %) sur la période 1979-2007
(prévisions et observations) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
3 Spatial patterns of winter weather regimes over the period 1979-2007 . . . . . . . . . . 15
4 Occurrences of winter weather regimes (anomalies in %) over the period 1979-2007
(models and reanalysis) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

2.1 Dispersion des erreurs des modèles en SST (boı̂te Niño3.4) . . . . . . . . . . . . . . . . 29


2.2 Biais climatologiques moyens des modèles en SST (domaine global) . . . . . . . . . . . 31
2.3 Biais climatologiques moyens des modèles en Z500 (domaine Nord-Atlantique) . . . . . 32
2.4 Auto-corrélation des anomalies de SST dans le Pacifique (boı̂tes Niño3.4, Niño1+2 et
”CONNEX”). Modèle Météo-France System 3 vs réanalyses NCEP . . . . . . . . . . . 34
2.5 Idem figure 2.4 mais dans l’Atlantique (boı̂tes TSA, TNA et TASI) . . . . . . . . . . . . 35
2.6 Corrélations entre indices Niño3.4 des modèles (novembre) et SST hivernales globales
des modèles (moyennes d’ensemble) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

3.1 Structures spatiales des régimes de temps hivernaux (réanalyses NCEP) . . . . . . . . . 39


3.2 Occurrences des régimes de temps hivernaux (réanalyses NCEP) . . . . . . . . . . . . . 40
3.3 Structures spatiales des régimes de temps hivernaux (modèle ECMWF System 3) . . . . 41
3.4 Structures spatiales des régimes de temps hivernaux (modèle Météo-France System 3) . 42
3.5 Ecarts-types des anomalies journalières de Z500 dans les réanalyses et les modèles . . . 43
3.6 Dispersion des occurrences des régimes hivernaux entre les membres du modèle ECMWF 44
3.7 Idem figure 3.6, pour le modèle MF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
3.8 Anomalies d’occurrences des régimes hivernaux prévues en moyennes d’ensemble (moyennes
sur les 11 membres) par les 2 modèles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

4.1 Corrélation entre l’indice de SST Niño3.4 de novembre et la Z500 hivernale (réanalyses
NCEP) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
4.2 Idem figure 4.1 mais dans les modèles (moyennes d’ensemble) . . . . . . . . . . . . . . 55
4.3 Corrélation entre l’indice de SST Niño3.4 de novembre et les précipitations hivernales,
dans les modèles (moyennes d’ensemble) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
4.4 Corrélation entre l’indice de SST ”Gradnatsat” de novembre et la Z500 hivernale (réanalyses
NCEP) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
4.5 Idem figure 4.4 mais dans les modèles (moyennes d’ensemble) . . . . . . . . . . . . . . 57
4.6 Corrélation entre l’indice de SST ”Gradnatsat” de novembre et les précipitations hiver-
nales, dans les modèles (moyennes d’ensemble) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
4.7 Composites d’anomalies normalisées de SST pour les mois de novembre en fonction des
occurrences hivernales des régimes NAO- . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
4.8 Composites d’anomalies normalisées de SST pour les mois de novembre en fonction des
occurrences hivernales des régimes NAO+ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59

79
TABLE DES FIGURES

4.9 Composites d’anomalies normalisées de SST pour les mois de novembre en fonction des
occurrences hivernales des régimes de Dorsale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
4.10 Composites d’anomalies normalisées de SST pour les mois de novembre en fonction des
occurrences hivernales des régimes de Blocage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60

5.1 Structures spatiales des modes de variabilité n˚1, n˚6 et n˚10, obtenues par ACP (+ 1
rotation ”Varimax”) sur les champs mensuels de Z500 du mois de décembre, en moyenne
d’ensemble et sur l’hémisphère nord (modèle Météo-France System 3) . . . . . . . . . . 64
5.2 Corrélation entre les anomalies de Z500 et les occurrences des régimes NAO- et NAO+
(moyennes d’ensemble sur les mois de décembre). Modèle Météo-France System 3 . . . 66

6.1 Structures spatiales des régimes de temps d’été (réanalyses et modèles) . . . . . . . . . 68


6.2 Anomalies d’occurrences des régimes de temps estivaux NCEP . . . . . . . . . . . . . . 70
6.3 Anomalies d’occurrences des régimes de temps estivaux des modèles . . . . . . . . . . 70
6.4 Tendances de la Z500 entre les étés 1979 et 2007 dans les modèles (hémisphère nord) . . 72
6.5 Tendances des conditions initiales de SST entre les étés 1979 et 2007 dans les assimi-
lations océaniques utilisées par les 2 modèles et dans les données observées Reynolds
(domaine Nord-Atlantique) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73

A.1 Occurrences des régimes de temps prévues par le modèle Météo-France System 2 pour
l’hiver 2008 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
A.2 Régimes de temps journaliers observés entre novembre 2007 et février 2008 (NCEP) . . 84

B.1 Localisation des boı̂tes spatiales de l’Océan Pacifique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85


B.2 Localisation des boı̂tes spatiales de l’Océan Atlantique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86

C.1 Composites des SST de mars en fonction des occurrences des régimes NAO- sur la saison
DJF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
C.2 Idem figure C.1 mais les composites de SST de mars sont réalisés en fonction des occur-
rences hivernales des régimes de Dorsale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88

D.1 Modèle Météo-France System 3. Structures spatiales des 10 premiers modes de variabi-
lité issus de l’ACP (+ 1 rotation ”Varimax”) effectuée sur les champs de Z500 des mois de
décembre 1979-2007, à partir des moyennes mensuelles d’ensemble et sur l’hémisphère
nord (20˚N ; 90˚N) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90

80
LISTE DES TABLEAUX

Liste des tableaux

3.1 Corrélations entre les régimes NAO+ et NAO- pour NCEP, MF et ECMWF . . . . . . . 47

4.1 Corrélations entre les anomalies d’occurrence des régimes d’hiver prévues par ECMWF
et les anomalies d’occurrence observées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
4.2 Corrélations entre les anomalies d’occurrence des régimes d’hiver prévues par MF et les
anomalies d’occurrence observées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
4.3 Table de contingence entre les anomalies d’occurrence du régime NAO+ prévues par MF
(moyenne sur les 11 membres) et les anomalies observées . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
4.4 Bonnes prévisions et fausses alarmes des occurrences des 4 régimes d’hiver . . . . . . . 51
4.5 Bonnes prévisions et fausses alarmes des occurrences des 4 régimes d’hiver, après pro-
jection des régimes prévus sur la base des régimes observés . . . . . . . . . . . . . . . . 52

5.1 Corrélations entre les occurrences des 4 régimes d’hiver et les composantes principales
des 10 premiers modes de variabilité de la Z500. Modèle Météo-France System 3 (mois
de décembre 1979 à 2006, moyennes d’ensemble) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65

6.1 Corrélations entre les anomalies d’occurrence des régimes d’été prévues par les 2 modèles 74

81
LISTE DES TABLEAUX

82
ANNEXE A. PRÉVISION SAISONNIÈRE PRÉ-OPÉRATIONNELLE DES RÉGIMES DE TEMPS
À MÉTÉO-FRANCE

Annexe A

Prévision saisonnière pré-opérationnelle


des régimes de temps à Météo-France

F IG . A.1 – Prévisions du modèle Météo-France System 2 pour l’hiver 2008. En haut : anomalies de
Z500 en moyenne d’ensemble sur DJF. En bas : anomalies d’occurrences des régimes de temps prévues.
Bleu : régime NAO-, rouge : régime NAO+, vert : régime de Blocage et orange : régime de Dorsale. Les
anomalies sont calculées par rapport à la période de référence 1993-2003 et à partir de la moyenne des
occurrences de l’ensemble (5 membres), pour les mois respectifs de novembre à février et en moyenne
sur le trimestre DJF.

83
La figure A.1 présente un exemple de prévision des occurrences des régimes de temps pour l’hiver
2008 (décembre 2007 à février 2008), par le modèle de prévision saisonnière alors opérationnel, Météo-
France System 2. La circulation générale moyenne est typique de la structure spatiale du régime NAO+,
avec des hauts géopotentiels des Etats-Unis à l’Europe de l’Ouest et des bas géopotentiels du Groënland
à l’Islande. De manière cohérente, le modèle prévoit une occurrence hivernale du régime NAO+ - en
moyenne sur le trimestre DJF - nettement plus forte que sa climatologie (+ 40 % environ). La prévision
de la moindre occurrence de NAO- (-40 % environ) est par ailleurs cohérente avec le signal La Niña qui
était présent en novembre dans le Pacifique et qui a persisté l’hiver suivant. A noter l’antagonisme entre
la prévision de NAO+ et celle de NAO-.

F IG . A.2 – Régimes de temps journaliers observés entre novembre 2007 et février 2008 (NCEP). Vert :
régime de Blocage, rouge : NAO+, orange : Dorsale et bleu : NAO-. Chaque jour est attribué à un
régime. Les régimes ayant persisté moins de 3 jours consécutifs apparaissent en blanc. Les anomalies
d’occurrence (entre parenthèses) sont calculées sur la période DJF.

La figure A.2 montre que l’hiver 2008 a été effectivement caractérisé par une grande fréquence
des régimes NAO+ (anomalie de + 61,45 % par rapport à l’occurrence climatologique observée sur la
période de référence 1993-2003) entrecoupées de quelques périodes plus froides associées au régime de
Blocage. Ce régime NAO+ plus fréquent s’est traduit en moyenne sur la France par un temps sensible
plutôt doux et assez sec. De manière encourageante, le signe de l’anomalie observée est conforme au
signe de l’anomalie prévue par le modèle.

84
ANNEXE B. LOCALISATION DES BOÎTES SPATIALES UTILISÉES POUR LE CALCUL
D’INDICES DE SST

Annexe B

Localisation des boı̂tes spatiales utilisées


pour le calcul d’indices de SST

F IG . B.1 – Localisation des boı̂tes spatiales de l’Océan Pacifique.


Source : http : //ioc3.unesco.org/oopc/state of the ocean/sur/pac.

85
F IG . B.2 – Localisation des boı̂tes spatiales de l’Océan Atlantique.
Source : http : //ioc3.unesco.org/oopc/state of the ocean/sur/atl.

86
ANNEXE C. CONDITIONS OCÉANIQUES POSTÉRIEURES AUX RÉGIMES D’HIVER DE
L’ATLANTIQUE NORD

Annexe C

Conditions océaniques postérieures aux


régimes d’hiver de l’Atlantique Nord

Les deux figures de cette annexe illustrent l’impact de l’état atmosphérique hivernal sur l’Atlantique
Nord (en terme d’occurrences de régimes de temps plus ou moins fortes) sur l’état océanique de surface
(SST) du mois de mars. Nous vérifions qu’il y a bien une cohérence physique dans ces résultats.

F IG . C.1 – Composites des SST de mars en fonction des occurrences des régimes NAO- sur la saison
DJF. A gauche les réanalyses NCEP, au centre, le modèle ECMWF et à droite le modèle MF. Sur la
ligne du haut (bas) sont tracées les SST moyennes pour les 10 années les plus faibles (fortes). Seules les
valeurs significatives au niveau de confiance de 70 % sont tracées.

La figure C.1 montre la reconstitution réaliste du ”tripôle altantique” dans le modèle MF : un régime
NAO- très (peu) fréquent en hiver s’accompagne de vents plus (moins) forts de la Floride à l’Europe de
l’Ouest. Les SST de mars, du fait de l’évaporation plus forte (faible), sont plus froides (chaudes) que la
climatologie sur toute cette zone. Au contraire, les vents sont moins (plus) forts que d’habitude sur le
nord du bassin atlantique nord ainsi qu’au sud du bassin (alizés), d’où des valeurs de SST anormalement
chaudes (froides) de part et d’autre (Cayan, 1992 [11]). On retrouve un léger signal de ce tripôle dans
les observations. Dans ECMWF, la connexion d’ENSO avec l’Atlantique Tropical semble plus marquée
que dans MF.

La figure C.2 montre que dans MF, les SST de mars sont plus froides (chaudes) de l’Islande aux

87
F IG . C.2 – Idem figure C.1 mais les composites de SST de mars sont réalisés en fonction des occurrences
des régimes de Dorsale sur la saison DJF.

Açores lorsque le régime de Dorsale est peu (beaucoup) excité en hiver car il y a davantage (moins) de
vent dans cette zone lorsque le régime n’est pas (est) présent. Ceci est cohérent avec le fait que les vents
sont plus calmes au niveau d’une zone anticyclonique. Dans ECMWF, c’est plutôt la strucutre en ”fer à
cheval” qui ressort.

88
ANNEXE D. MODES DE VARIABILITÉ DE LA Z500 DE DÉCEMBRE DANS LE MODÈLE
MÉTÉO-FRANCE SYSTEM 3

Annexe D

Modes de variabilité de la Z500 de


décembre dans le modèle Météo-France
System 3

MODE 1 MODE 2

MODE 3 MODE 4

89
MODE 5 MODE 6

MODE 7 MODE 8

MODE 9 MODE 10

F IG . D.1 – Modèle Météo-France System 3. Structures spatiales des 10 premières composantes princi-
pales issues de l’ACP (+ 1 rotation ”Varimax”) effectuée sur les champs de Z500 des mois de décembre
1979-2007, à partir des moyennes mensuelles d’ensemble et sur l’hémisphère nord (20˚N ; 90˚N).

90

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