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Armand Colin

RELATION ET RATIONALITÉ ACTUALITÉ DE BRØNDAL


Author(s): Claude Zilberberg
Source: Langages, No. 86, Actualité de Brøndal (JUIN 87), pp. 59-77
Published by: Armand Colin
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41682401
Accessed: 03-05-2016 00:38 UTC

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Claude ZlLBERBERG
Groupe de Recherches Sémio-linguistiques
Paris

RELATION ET RATIONALITÉ
ACTUALITÉ DE BR0NDAL
Les mots font partie de nous plus que les nerfs. Nous ne con-
naissons notre cerveau que par ouï-dire.
Paul Valéry

Il semble qu'à l'heure présente on ne demande plus seulement au concept de struc-


ture de servir, de rendre compte, mais encore de se déclarer et de s'expliquer.
C est du moins notre sentiment. Dans cet effort de connaissance, et non seulement
d'application, une place singulière, peut-être unique, revient au Danemark en raison
de la valeur exemplaire de sa tradition linguistique. Tellement que la figure de F. de
Saussure à la fois interrompt et pourtant accomplit cette continuité. Expliquons-nous.

Cette figure détonne si Ion accepte de voir dans Le Mémoire sur le système primi-
tif des voyelles dans les langues indo-européennes lacte fondateur de la linguistique
structurale au même titre au moins, sinon plus haut encore, que le Cours de linguisti-
que générale . Et son génial auteur, âgé de vingt ans ! en soumettant les « valeurs
phoniques » (substantielles) aux « valeurs algébriques » (formelles et fonctionnelles)
selon Hjelmslev, accomplissait et déplaçait le travail accompli sur les langues indo-
européennes.

Et cest encore aux linguistes danois que Ion doit d'avoir montré que l'effort de
Saussure, tout novateur qu'il fût, s'inscrivait dans une continuité irréfragable. Si l'un
des apports majeurs, peut-être la « constante concentrique », de la pensée saussu-
rienne, consiste dans la dualité forme/substance, Hjelmslev a souligné le fait que
cette hypothèse était déjà présente chez Humboldt, mais surtout dans le surgissement
de l'écriture à condition d'accepter de voir en elle non une « articulation de l'expres-
sion », mais une « articulation de la langue » 1.

Juste retour des choses : la continuité de la pensée saussurienne, c'est-à-dire la


dépendance, la dette du CLG à l'égard du Mémoire , la nécessité d'interpréter celui-là
à partir de celui-ci d'une part, la formulation des requisit de la systématisation ébau-
chée dans le Mémoire d'autre part, sont encore à l'honneur des linguistes danois, res-
pectivement Hjelmslev et Br0ndal. Sans voir ici un clivage.

Si le Danemark « reçut » de Saussure, il semble donc équitable de considérer que


l'œuvre de Saussure lui doit, selon une proportion qui reste à définir, son aura, son
rayonnement.

(1) L. Hjelmslev, Nouveaux essais , Paria, Presses Universitaires de France, 1985, p. 154-
155.

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Dans les limites de cette étude, nous aimerions souligner la valeur de la contribu-
tion de Br0ndal, mais dans une perspective qui surprendra peut-être : il s agit d éta-
blir que le type d'approche retenu par Br0ndal, mais peut-être également certaines
prudences, certaines préventions ont affaibli ou voilé la valeur heuristique de cette
contribution. En un mot, que son « être » est supérieur à son « paraître ».

1. La structure des systèmes

L'œuvre de V. Br0ndal n'a pas actuellement en France l'audience qu'elle mérite. En


raison de l'ancienneté des éditions, les œuvres sont indisponibles et malaisément accessi-
bles ; les mentions dans les bibliographies n'ont souvent qu'un caractère conventionnel.
Le recours à tel concept br0ndalien apparaît davantage comme un secours, une force
d'appoint dans une procédure persuasive que comme une adhésion 2. Sans les soins d 'A.
J. Greimas, il est clair que pour le domaine français le nom de Br0ndal serait en voie
d'oubli. En effet, en plusieurs passages décisifs de Sémantique structurale , Greimas fai-
sait appel à Br0ndal pour l'établissement des catégories les plus prégnantes
(actants/prédicats) d'une part 3, pour l'articulation des catégories d'autre part 4.

La conception du linguiste danois se caractérise par une double ambition : elle vise
non seulement à décrire les diverses possibilités d'organisation, jusques et y compris
celle de l'amorphe 5, mais encore les devenirs possibles d'un système.

1.1 . L'économie des systèmes

Dans sa présentation de la structure morphologique, Br0ndal propose deux voies


d'approche de valeur inégale :

• une approche empirique et inductive sous le contrôle du critère d'exhaustivité.


Le recensement semble s'effectuer selon un principe d'importance décroissante : * Le
fait fondamental ..., Il faut d*abord admettre ... En plus de ces trois termes ... A ces
quatre termes (...), il faut encore en ajouter deux , ... » Cet inventaire aboutit à un
chiffre-limite de six possibilités. Selon la terminologie greimassienne, cet inventaire se
situe au plan de la manifestation 6 ; selon la terminologie glossématique, nous serions
en face de taxèmes.

Br0ndal effectue lui-même le passage du plan de la manifestation au plan de


l'immanence et ramène ce groupe de six termes à quatre « groupes » :
«A - neutre ;
B - négatif et positif ;
C - complexe ;
D - complexe-négatif et complexe-positif. » ( ELG , p. 17).

(2) Cf., par exemple, Cl. Lévi-Strauss, La pensée sauvage , Paris, Pion, 1962, p. 246 et
p. 267.
(3) A. J. Greimas, Sémantique structurale , Paris, Larousse, 1966, p. 121-122.
(4) Ibid ., p. 23 & suiv., p. 111-112, p. 170.
(5) V. Br0ndal, Essais de linguistique générale , Copenhague, E. Munksgaard, 1943, p. 96.
(6) A. J. Greimas & J. Courtes, Sémiotiquef Paris, Hachette, 1979, p. 181-182 & p. 219-220.

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Il suffit d embrasser cette seconde présentation pour se persuader qu'un système
- nous nous abstenons pour l'instant de préciser davantage - est ici à l'œuvre. Cette
saisie relève d'une approche autre que celle de la simple recension ;
• une approche déductive recourant à deux couples de caractéristiques dont les
« intersections » (Hjelmslev) constituent l'assiette relationnelle (ou figurale) des gran-
deurs retenues. Dans sa mise en place, Br0ndal fait appel tour à tour au caractère
isolé ou solidaire
et en second lieu au caractère

conjonctif ou disjonctif.
En désignant le terme B comme contrariété d'une part, les termes indiqués en D
comme dominances d'autre part, nous rendons à la relation sa prérogative consti-
tuante et sommes en mesure de proposer le modèle génératif suivant :
¡ i
• solidaire ¡ isolé

disjonctif ! contrariété j neutre

conjonctif ¡ dominance ! complexe

Nous n'envisageons pas ici les termes, mais les relations constituantes. Ou plutôt
c'est aux définitions que nous nous intéressons et non aux dénominations qui les
subsument : que le terme neutre soit recouvert par une seule grandeur ou par plu-
sieurs comme dans le sonnet de Verlaine : « ... ni tout à fait la même ni tout à fait
une autre y ... », peu importe ; la problématique porte sur les figures (Hjelmslev) et
non sur les signes.

Cette précaution prise, envisageons sommairement chacune des positions figúrales


retenues :

• la contrariété est explicitement prédiquée comme « solidaire » et la disjonction


est assurée par le principe de « polarité » ;
• le neutre est « libre », « indépendant » : « Un terme soit neutre soit complexe
peut donc exister ou ne pas exister sans aucune conséquence pour aucun autre
groupe ; » ( ELG , p. 17) ; le neutre est par ailleurs disjonctif eu égard à la contra-
riété : « (il s'oppose à la fois au négatif et au positif (...) » (ELG, p. 16). Br0ndal ne
distingue pas ici - et il est vrai qu'un tel effort serait coûteux au point de vue termi-
nologique - entre fonction et fonctifs ;
• le complexe est, comme le neutre, isolé et conjonctif : « Les caractères opposés
ou contraires , nettement séparés par les termes polaires et exclus par le terme neutre ,
sont intimement réunis par le terme complexe . » (ELG, p. 16) ;
• les dominances sont solidaires entre elles, comme les termes polaires, et con-
jonctives comme les termes complexes, dont elles ne sont, semble-t-il, que des varian-
tes et probablement des variétés (Hjelmslev).
On ne saurait trop insister sur le fait que les démarches de Br0ndal et de Hjelmslev
sont ici étonnamment proches l'une de l'autre. Les distinctions chères au fondateur de
la glossématique sont présentes chez Br0ndal, mais peut-être de façon moins tran-
chée :

- la distinction entre réalisables (généraux) et réalisés (universels) est évoquée


indirectement quand Br0ndal insiste sur le fait qu'un système met à disposition des
« combinaisons possibles » ;

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- la double caractéristique de la théorie, à savoir qu elle doit être à la fois arbi-
traire et adéquate, apparaît également sous la plume de Br0ndal, à cette nuance près
que l'adéquation a le pas sur l'arbitraire : * Ici une vaste vérification ou confrontation
avec les faits simpóse . Par ce travail certainement fécond la théorie qui est rigide ,
pourrait être réfutée , ou bien confirmée . » {ELG, p. 18).
Les présupposés de la structure (solidaire/isolé, disjonctif/conjonctif) doivent, pour
autant qu'ils prédiquent leurs présupposants 7, être interrogés à leur tour :
constituent-ils les limites de la diction où sont-ils susceptibles dune définition-
analyse ? Nous différons cet examen.

1.2 . La dynamique des systèmes

On s'est longtemps complu à opposer la structure et l'histoire, le système et le


temps et plusieurs ont vu dans le structuralisme une revanche due, attendue sur lTiis-
toricisme qui avait longtemps prévalu.
La relecture des grands textes structuralistes laisse un tout autre sentiment. Les
deux préoccupations sont toujours présentes parce qu'elles sont épistémologiquement
complémentaires, parce que chaque point de vue a une valeur heuristique pour
l'autre :

• la structure, à condition de voir en elle un réseau de « tensions génératrices »


(Valéry), assigne à la « chronie » ce que Br0ndal appelle une « direction » ;
• réciproquement, les transformations, si leur récurrence au moins relative
est attestée, sont corrélatives des inégalités reconnues, à savoir solidaire/isolé et
conjonctif/disjonctif. C'est ainsi que « les mutations (seuls véritables changements his-
toriques) sont (...) liées à des règles qui se déduisent de la nature même des
systèmes ». {ELG, p. 21).

Pour que cette interdépendance entre économie et dynamique soit atteinte, il con-
vient d'établir :

- que les dimensions (de la dépendance et de la jonction) sont orientables ;


- qu'une des dimensions est dominante.

La réflexion de Br0ndal, sur ce point délicat et décisif, note plutôt des résultats
d'ensemble que les procédures qui les prennent en charge. Deux « tendances » sont
reconnues :

• une « tendance à l'abstraction croissante » par « acquisition de A » et « perte de


C»;
• une « tendance à la complexité croissante » par « perte de A » et « acquisition
de C ».

Mais au nom de l'adéquation, la « tendance à l'abstraction » (caractérisée, par


exemple, par la substitution à un système de type AB, à trois termes, d'un système
AC, à deux termes, ELG , p. 20) est déclarée dominante parce qu'elle correspond à ce
qui se passe dans les « langues de type moderne ». Cette directivité doit pourtant être
acquise sur chacune des dimensions retenues :
- sur la dimension de la dépendance, la position « isolée » doit être catégorisée
comme attractive ;

(7) Sur les rapports entre structuration et prédication, cf. Cl. Zilberberg, « Conversion et
réversion » in Exigences et perspectives de la sémiotique , tome 1, Amsterdam, Benjamins, 1985,
p. 349-379.

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- sur la dimension de la jonction, la position « disjonctive » apparaît également
comme attractive ;
- enfin la substitution indiquée d'un système AC à un système AB signifierait
que la dimension de la dépendance l'emporte sur celle de la jonction.

Ces directions et ces rapports de force peuvent être mis en évidence de la façon
suivante :

j ABSTRACTION^
iwlé C t ~~~

solidaire

OMPLEXITÉ
conjonctif disjonction

Br0ndal est donc conduit à distinguer :


• au sein du synchronique un point de vue dynamique ou rythmique, qui traitera
de la syntaxe ;
• à côté du point du point de vue diachronique, qui, semble-t-il, traiterait princi-
palement des « fluctuations » et des cumulations », un point de vue qu'il appelle
panchronique : «r Dans cet ordre d'idées on posera également la question de savoir
si, à côté du diachronique et du synchronique , il ne faut pas admettre une panchro-
nie ou achronie, c est-à-dire des facteurs universellement humains qui persistent à
travers l'histoire et se font sentir à l'intérieur d'un état de langue quelconque » ( ELG ,
p. 96.)
La puissance et l'élégance de ces hypothèses s'imposent d'elles-mêmes et pourtant
elles n'ont pas reçu l'accueil qu'elles méritaient. Quand elles l'ont été, c'est en subis-
sant une inflexion peut-être respectueuse de la lettre, mais non de l'esprit. Ainsi le
carré sémiotique expulse dans sa version transformationnelle le neutre et le complexe.
Ces termes apparaissent bien dans le système mais non dans le procès. La dynami-
que du carré sémiotique 8 se fonde sur la gradualisation des contradictoires et ne pré-
voit aucun algorithme remarquable pour les termes neutre et complexe. Au contraire,
c'est de ces mêmes termes que Br0ndal attendait une « direction » et une « attrac-
tion » puisqu'il postulait successivement que :
- les termes « isolés » tendent, toutes choses étant égales, à prévaloir sur les ter-
mes « solidaires » ;
- le terme conjonctif (complexe) tendra à s'effacer devant le terme disjonctif
(neutre).

Nous aimerions, dans les lignes qui suivent, montrer que les vues de Br0ndal, pri-
ses telles quelles, méritent respect et confortent une tradition. Et inversement
qu'elles tirent de la continuité de la réflexion linguistique leur force et leur actualité.

(8) Cf. A. J. Greimas & J. Courtés, Sémiotique , Paris, Hachette, 1979, p. 29-33.

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2. Un consensus ignoré ?

En procédant ainsi, nous ne faisons que prévenir le travail du temps, ce « grand


syntaxier », car si le présent divise, son effacement emporte les tensions qui le définis-
saient.

2.1 . Brindai et Hjelmslev

Les noms de Br0ndal et de Hjelmslev sont par la force des choses associés mais
ordinairement pour soutenir le contraste de deux idiosyncrasies puissantes et imagina-
tives. Cependant, puisque nous sommes désormais en face des monuments en quoi se
changent leurs œuvres, la proximité des préoccupations de même que la similitude des
solutions devraient prévaloir.

Dans les limites de cette étude, nous retiendrons trois points :


- le requisit de la souplesse ;
- le souci d'échapper à l'exclusive des relations antithétiques ;
- le projet de déduire les devenirs possibles d'un système à partir de ses inégali-
tés.

Parmi les reproches adressés au structuralisme, celui de vouloir tout mettre en


système est souvent mis en avant. Cest pourtant l'un des moins fondés. Ici comme
ailleurs, ce n'est pas tant le structuralisme qui est en cause qu'une volonté de dogma-
tisme, que Br0ndal a dénoncée ( ELG , p. 46). Sa préoccupation semble autant la
rigueur d'un système que sa souplesse, ce qu'il appelle son « degré de cohérence » :
«r Est-ce que , dans un système , tout se tient avec la même nécessité ? Ou faut-il
admettre des degrés dans la solidarité , et partant V existence df éléments relativement
indépendants ? » (ELG, p. 96 ; cf. l'introduction à « Compensation et variation »,
ELG , p. 105).

Au vrai, une seule contrainte est rappelée à intervalles : * Une opposition précise
joue toujours a l'intérieur d'une même catégorie. » (ELG, p. 42). Les oppositions sont
« réalisées à l'intérieur d'une même catégorie » (ELG, p. 43) 9. Il convient de souligner
que ce « jeu » n'est pas extérieur au système, advenant comme un signal, un témoin de
sa désagrégation, mais situé au cœur même du réseau. Sans qu'on en discerne parfaite-
ment le motif, il semble bien qu'un système, du point de vue de la forme, ne puisse avoir
lieu sans faire intervenir deux catégories, dont une au moins sera une catégorie modale.
Tel est bien le cas ici : la catégorie de la dépendance, discriminée selon
« solidaire »/« isolé », est, par définition, modale tandis que celle de la jonction, discri-
minée selon « conjonctif »/ « disjonctif » ne l'est pas.

(9) Selon Hjelmslev, l'équité commande de rendre à F. Wüllner cette « découverte » : * La


conception ou Vidée quii s'agit de chercher dans une forme linguistique doit être une idée une ,
une seule signification fondamentale (Grundbedeutung) dfun degré d'abstraction assez grand
pour permettre d'en déduire tous les emplois concrets de la forme . * (Catégorie des cas ,
Munich, W. Fink, 1972, p. 37.) Et de fait il est difficile d'envisager une morphologie sans une
direction (extense) qui identifie et une aspectualisation (intense) qui différencie.

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Ces préoccupations sont également centrales dans la réflexion de Hjelmslev. C est
ainsi qu'il écrit : « La fameuse maxime selon laquelle tout se tient dans le système
ďune langue a été souvent appliquée d'une façon trop rìgide, trop mécanique et trop
absolue. Il convient de bien garder les proportions . Il importe de reconnaître que tout se
tient , mais que tout ne se tient pas dans la même mesure , (...) Le système linguistique
est d'une souplesse plus délicate que la maxime précitée , prise au pied de la lettre , ne le
fait supposer » 10. Le fondateur de la glossématique introduit même le concept assez
étrange de « fonction facultative » : « Les fonctions sont de diverses espèces. Sans vou-
loir aborder encore la classification complète des fonctions complètes , signalons la dis-
tinction évidente entre les fonctions facultatives et les fonctions obligatoires (...)» n.
Enfin les Prolégomènes désignent comme « constellation » la relation entre deux varia-
bles.

Surtout, la parenté est sans doute plus grande que la littéralité même des textes cités
le laisse entendre, peut-être parce que les voies de la réflexion sont, selon une nécessité à
rechercher, parallèles. Nous avons vu plus haut que les catégories dont les intersections
généraient les termes étaient, pour Br0ndal, la dépendance et la jonction. On sait que
Hjelmslev fait ouvertement appel à la dépendance pour définir la structure : « entité
autonome de dépendances internes » 12. Eu égard à la catégorie de la jonction, elle est
aussi requise par Hjelmslev, mais peut-être moins bien rattachée à l'édifice conceptuel
quelle ne lest chez Br0ndal : « Une autre distinction , essentielle pour la théorie du lan-
gage , est celle qui existe entre la fonction «et... et » ou conjonction », et la fonction
« ou... ou » ou « disjonction » 13.

Nous rechercherons plus loin pour quelles raisons Br0ndal et Hjelmslev sont, malgré
eux..., plus ou moins condamnés à s'entendre.

Abordons le second point. Br0ndal partage encore avec Hjelmslev le souci de déta-
cher le binarisme de ce que nous aimerions appeler 1'« antithétisme primaire ». Rappe-
lons succinctement - en utilisant les conventions graphiques proposées par Hjelmslev
- comment se présentent, pour chacun des deux penseurs, les « structures élémentai-
res » de la signification :

• pour Br0ndal, si nous laissons de côté les complexes positif et négatif, deux cou-
ples apparaissent : le couple A/B et le couple A/C que Ion peut visualiser ainsi :

(10) L. Hjelmslev, Essais linguistiques, Paris, Les Éditions de Minuit, 1971, p. 123.
(11) Ib., p. 163.
(12) Ib., p. 28.
(13) L. Hjelmslev, Prolégomènes à une théorie du langage, Pans, Les Editions de Minuit,
1968, p. 52. L'intersection des catégories de la dépendance et de Injonction ne se présente pas de la
même façon chez les deux linguistes : pour Br0ndal, la catégorie de la dépendance est articulée
selon degré plein /degré zéro, tandis que pour Hjelmslev elle est articulée selon constante (détermi-
née )/variable (déterminante). Ce qui complique encore les choses, c'est que dans les Prolégomè-
nes, le procès qui saisit les rapports conjonctifs détermine le système, qui organise les rapports dis-
jonctifs, mais dans un article de 1939 intitulé La. notion de rection, Hjelmslev envi-
sage une réciprocité : « Le paradigmatique même détermine le syntagmatique , puisque d'une
façon générale et en principe on peut concevoir une coexistence sans alternance correspondante,
mais non inversement. C'est par cette fonction entre le paradigmatique et le syntagmatique que
s'explique leur fonctionnement réciproque. » ( Essais linguistiques, op. cité, p. 159.)

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1. le couple A/B ,
a c d

A I jj^ I neutre
positif
B -
négatif
2. le couple A/C
A I "1 neutre

complexe

• pour Hjelmslev, en suivant l'exposé de la Catégorie des cas 14, trois couples sont
mis en place :
1. le couple a/B intensif- -extensif
a 1 I intensif

HIHHHIIHHHHHHHHIHHHH extensif
2. le couple ß/B contraire

ß 1 I intensif

B 1 1 extensif 15
2. le couple ß/T contradictoire

WÊÊÊÊÊÊËÊÊtZZZIZIIIJÊÊÊÊÊËÊÊÊÊË intensif
r I I extensif 15

De façon immédiate, le terme complexe de Br0ndal se laisse identifier au terme


extensif de Hjelmslev, même si les opérations qui les sous-tendent semblent différentes :
conjonction pour Br0ndal, participation pour Hjelmslev, mais cette double extraction
est contraire à la démarche des deux théoriciens. La comparaison est médiate : pour
Hjelmslev, la polarité génératrice est, selon la Catégorie des Cas :
intensif (concentré) vs extensif (étendu).

Il paraît difficile d'homologuer le terme neutre de Br0ndal avec le terme intensif de


Hjelmslev. Donc un pas de plus dans la voie de l'abstraction semble requis. Il faut
admettre l'idée que les catégories topologiques « concentration »/« extension » sont
dans la dépendance de catégories tensi ves 16 articulées selon
contensif vs détensif

catégories tensives à défaut desquelles la dynamique d'un système se comprendrait mal,


à moins d'être introduite, injectée après coup pour les besoins de la démonstration...

(14) L. Hjelmslev, La catégorie des cas , op. cité , p. 112-113.


(15) Il faut reconnaître que les raisons pour lesquels les termes B et T sont désignés comme
« extensifs » ne sont pas très claires.
(16) Pour la signification de ces termes, voir Sémio tique, tome 2, Paris, Hachette, 1986,
p. 236.

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Sous cette condition - la précédence de données tensives - la comparaison entre les
deux conceptualisations s'établit ainsi :

i Br0ndal ¡ Hjelmslev
i i !
i positif ]
contensif ! et i intensif
; négatif I
• i

¡ ¡
détensif ; complexe j extensif

Nous examinerons plus loin les conditions de cette mise en relation de données tensi-
ves avec les catégories mêmes qui informent la signification.

Le dernier point de rapprochement concerne la dynamique des systèmes. Hjelms-


lev considère également qu'à côté du point de vue diachronique doit être prévu un
point de vue métachronique qui considère que « les mouvements du système sont
dirigés par les dispositions du système et non par des tendances extérieures » Il
convient de souligner que la perspective de Hjelmslev offre une complexité et donc
une souplesse plus grandes que chez Br0ndal. En premier lieu, une narrativité élémen-
taire est mise en place : la tendance à réaliser un « optimum » est contrariée par une
« tendance conservatrice » imputable aux usagers de la langue, par une tension entre
le point de vue « intensional » (celui de la signification) et le point de vue « extensio-
nal » (celui de la valeur), par les relations entre catégories. Toutefois Hjelmslev s'abs-
tient de préciser les données de cet optimum alors que pour Br0ndal il est clair, en rai-
son de loption en faveur du « progrès en abstraction », que c'est le système A-C qui
satisfait à cette demande. Si une orientation préférentielle devait être retenue pour le
fondateur de la glossématique, ce serait, au nom d'un indéniable « continuisme », la
confrontation entre le terme intensif, fidéicommis du principe d'exclusion, et le
terme extensif, témoin du principe de participation 18.

2.2. Brindai et Saussure

La référence est bien sûr obligée pour tout structuraliste, mais de « quel » Saus-
sure se réclamer ? Nous avons proposé ailleurs 19 de distinguer au moins « trois »
Saussure, sommation qui conduit à relativiser, sur plusieurs points, l'importance du
Cours.

Dans la mesure où notre étude est consacrée à la notion de système dans l'œuvre
de V. Brindai, il est clair que c'est le Mémoire 20 qu'il convient d'interroger. Eu

(17) La catégorie des cas , op. cité , p. 109.


(18) * Les termes du système (les cas en l'espèce) sont ordonnés selon l'étendue respective
des concepts exprimés et non selon le contenu de ces concepts. » ( Catégorie des cas , op. cité ,
p. 102.)
(19) Connaissance de Hjelmslev in Louis Hjelmslev , Linguistica, Semiotica , Epistemologia ,
Il Protagora, 7-8, décembre 1985, p. 130 & suiv.
(20) F. de Saussure, Mémoire sur le système primitif des voyelles dans les langues indo-
européennes.

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égard au point qui nous retient, deux constatations, bien sûr hâtives, peuvent être fai-
tes :

1. la scission son/phonème affirmée dans le Mémoire , réitérée dans le Cours ,


mais avec moins de netteté, conduit à la dualité forme/ subs tance. Centrale, comme
on sait pour Hjelmslev, elle est présente chez Br0ndal, mais, si Ion ose dire, sur le
mode mineur : «- Les phénomènes de compensation quon constate ainsi pour plu-
sieurs catégories morphologiques (...) se retrouvent en phonologie sous des formes
rigoureusement parallèles. » ( ELG , p. 109). Ou encore : « On a conçu ici la structure
comme objet autonome et par conséquent comme non-dérivable des éléments dont elle
n'est ni l'agrégat ni la somme ; c'est pourquoi il faut considérer l'étude des systèmes
possibles et de leur forme comme étant de la plus grande importance. - Et pourtant
on ne saurait considérer les éléments qui font partie d'un système comme de simples
dérivés des corrélations ou oppositions structurales ; il sera en effet important de dis-
tinguer entre les propriétés purement formelles d'un système et sa matière ou subs-
tance qui , tout en étant adaptée à la structure donnée (puisqu'elle y entre), n'en est
pas moins relativement indépendante ; » (ELG, p. 97) 21 .
2. le second point concerne les réquisit de la systématisation. Le principe de co-
dimensionnalité (dépendance/jonction ) évoqué plus haut est certainement partie pre-
nante puisqu'il garantit, au sein du divers, l'existence du même 22 . Si tel est bien le
cas, un autre principe est réclamé qui vienne introduire au sein du même lexistence
du divers. Ce principe est affirmé par Saussure quand il écrit à propos des grandeurs
o et a. « Ceci établit que l'o et Va européens ont été dans la langue mère distincts
l'un de Vautre et distincts de tous les autres phonèmes » 23.

C est, nous semble-t-il, une des forces de la réflexion de Br0ndal que de mettre
systématiquement en œuvre ce principe de saisie. Nous nous limiterons à deux men-
tions. A propos du « principe de compensation », il écrit : « Le principe (...) trouvera
son application (...) dans les systèmes où deux formes polaires sopposent non seule-
ment entre elles, mais en même temps à une forme complexe ou synthétique (...)
(ELG, p. 107). La seconde mention concerne un thème de réflexion cher à Br0ndal :
les prépositions. Dans le même article, il écrit : « C est ainsi que, parmi les préposi-
tions françaises, a forme avec en un couple à part, se détachant à la fois de de , forme
neutre et donc isolée, et des divers groupes des autres prépositions, toutes de nature

(21) Dans l'Essai d'une théorie des morphèmes , Hjelmslev modère également la coupure
entre forme et substance : « Entre forme et substance , il n'y a aucun lien nécessaire , le signe lin-
guistique reste arbitraire ; cela n empêche pas d'autre part qu'il puisse y avoir un lien possible. »
(Essais linguistiques , op. cité , p. 170.)
(22) Ce filtre, ce préalable par lequel la signification doit passer, nous avons proposé de le
dénommer modalités thémiques et de l'organiser de la façon suivante :
même autre

identique différent
(Cl. Zilberberg, Essai sur les modalités tensives, Amsterdam, Benjamins, 1981, p. 45 Sl suiv. ;
p. 122). On se souviendra que la problématique de l'identité occupe une place centrale dans le
Mémoire et le Cours. La raison de cette contrainte, de cette inquiétude ? probablement la ten-
sion entre ce que Hjelmslev appelle les « valeurs algébriques » (« fonctionnelles ») et les
« valeurs phoniques » (« substantielles »), les premières ayant le pouvoir de dénier les secondes,
c'est-à-dire de changer le même substantiel en différence fonctionnelle d'une part, de changer
l'altèri té substantielle en identité fonctionnelle d'autre part.
(23) Mémoire , op. cité , p. 121.

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plus concrètes que les trois sommités si originales de ce système si intéressant. Le cou-
ple à-en occupe non seulement un niveau particulier (entre de , sommet absolu, et les
autres, plus bas) ; elles se définissent aussi de façon essentiellement différente de tout
autre élément, de tout autre couple de l'ensemble ; ni isolées (comme de ), ni groupées
en séries (comme le reste), elles se déterminent - à part la perspective générale, assez
importante ici - exclusivement par leur rapport mutuel ; elles définissent en somme
deux aspects complémentaires d'un monde (spatial, temporel, etc.) qu elles partagent
entre elles - aspects inexpressibles soit par de, trop abstrait, soit par les autres, trop
concrètes. » (ELG, p. 113.)
Cette mise en place appelle un certain nombre de remarques. Tout d'abord on ne
peut qu'approuver l'effort de systématisation qui vise à mettre en place le type AB
selon :
A B
i i
i i
de à-en

neutre positif -négatif


En second lieu, les deux dimensions retenues, la temporalisation et la modalisation
d'une part, la spatialisation d'autre part, sont, en raison de leur généralité, incontesta-
blement, parties prenantes. Toutefois, cette mise en place paraît un peu « forcée » :
elle a pour condition, ainsi que Br0ndal l'indique lui-même, l'extrême abstraction de
de, qui n'est acquise qu'à la condition d'admettre que « que 'spatial' a perdu, exacte-
ment comme à et en, toute notion de direction » ( ELG , p. 85) - demande à vrai dire
difficilement recevable. C'est moins l'effet d'un penchant au dogmatisme que la consé-
quence de la priorité à la relation sur la direction. La difficulté est telle d'ailleurs
que Br0ndal hésite, pour de, entre les deux assignations possibles : comme terme neu-
tre, on l'a vu, ou bien comme terme complexe : « De, d'autre part, s'est dégagé, de
façon unique, de tout rapport particulier ; il les désigne tous à la fois (direction et ori-
gine, sujet et objet, partie et tout), étant la préposition la plus abstraite, la plus géné-
rale possible. » {ELG, p. 87.)
La difficulté tient peut-être au non-respect du principe de co-dimensionalité, déce-
lable déjà dans le fait que Br0ndal fait intervenir tantôt des données modales, tantôt
des données topologiques. Si nous identifions les données modales et temporelles à des
valeurs phoriques d'une part, les données spatiales à des valeurs scalaires d'autre
part, et que nous déclinions les unes et les autres selon leur valence tensive, nous
démêlons les deux dimensions intriquées tout en obtenant un cadre descriptif homo-
gène ; les indications relevées par Br0ndal se laissent dès lors organiser de la façon
suivante :

I ¡ complexe j
j rétensif i ou ! détensif
i i neutre j
!
' • 1

valeurs 1
! à•
j de 1
i en

-
phoriques j potentiel j complexe | réalisant
1 • 1

valeurs ¡ de j en j à
scalaires ¡ discontinu ; continu ! discontinu
* ; i
i (inchoatif) ! (neutre) i (terminatif)

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Et dans la mesure où notre propos est l'établissement des indices décelant un con-
sensus, notons que pour Brindai et Hjelmslev, la relation de contrariété - le système
B pour Brindai - se fonde pour eux, à la différence du binarisme ordinaire, sur
l'expulsion du terme neutre. Ajoutons que pour Hjelmslev l'inclusion ou l'expulsion
du terme neutre vaut comme pertinence pour démêler la contrariété et la contradic-
tion, même si la rigueur est obtenue aux dépens de la clarté : « Déf 75 : Une corréla-
tion est dite CONTRAIRE (symbole :a : b) si elle est contractée entre deux corrélats dont
chacun est défini comme « tout ce qui (à l'intérieur de ce paradigme de corrélats) n'est
pas l'autre corrélat, à l'exception de tout ce qui (à l'intérieur de ce paradigme) n'est ni
le premier ni l'autre corrélat » (...) Déf. 75 : Une corrélation est dite CONTRADIC-
TOIRE (symbole :ab : c) si elle est contractée entre deux corrélats dont chacun est
défini comme « tout ce qui (sans exception à l'intérieur de ce paradigme de corrélats)
n'est pas l'autre corrélat » 24 (...).
Si Brindai et Hjelmslev sont ¡ci les héritiers du Mémoire , c'est dans la mesure où
Saussure a posé, avec le principe indiqué, un minimum épistémique en deçà duquel
il semble impossible de « descendre ». Ce principe pourrait s'énoncer ainsi : la catégo-
rie ne doit pas seulement être présupposée, elle doit être également être posée :
• pour Saussure, elle l'est par la solidarité de « destin » : ou les deux termes se
maintiennent ensemble ou ils disparaissent ensemble ;
• pour Br0ndal, le minimum épistémique est rendu par le système A-B, visible-
ment préférentiel ; dans cette configuration, le terme neutre vaudrait comme terme-
zéro, ou terme « vide » (comme l'on parle d'ensemble vide) de la catégorie ;
• pour Hjelmslev, le minimum épistémique est attesté par le système a-A, à l'inté-
rieur duquel le terme A, extensif, vaut comme terme complexe, plein de la catégorie.
Si cette convergence est reçue, les relations logiques entrent dans la dépendance
de :
- valeurs topologiques : concentré/étendu, après Hjelmslev ;
- valeurs tensives : rétensif/détensif 25
valeurs qu'elles impliquent et composent.
Dans la Catégorie des cas, Hjelmslev remarquait : « C'est dire que non seulement
le terme de neutre, mais également le terme de complexe est susceptible de deux accep-
tations différentes : il y a une complexité concentrée, comme dans l'instrumental de
Wiillner, et il y a une complexité expansive, comme dans le nominatif » 26.
L'intersection de la dimension tensive et de la dimension topologique aboutit à un
réseau de réalisables élémentaires interdéfinis :

détensif contensif

neutre neutre
neutre a b
détensif contensif

complexe complexe
complexe c d
détensif contensif

(24) L. Hjelmslev, Nouveaux essais , op. cité, p. 104.


(25| La valeur peut etre retensive ou contensive suivant la direction.
(26) L. Hjelmslev, La catégorie des cas , op. cité , p. 100.

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Évoquons brièvement chacune de ces intersections :
- dans le neutre détensif (a), nous reconnaissons aisément le neutre cher à
V. Br0ndal ;
- dans le neutre contensif (b), qui incontestablement est d'un maniement déli-
cat, nous aurions, à titre de réalisable, ce que le poète R. Char pointe comme une
« identité antagoniste » 27 ;
- dans le complexe détensif (c), nous identifions sans peine le terme extensif sur
lequel Hjelmslev a tant insisté ;
- dans le complexe contensif ( d ), nous lisons la définition de ce terme complexe
réclamé par A. Hénault 28.

Bien entendu, nous sommes en face d'un schéma, c'est-à-dire de réalisables et il


est probable qu'un usage, c'est-à-dire un système particulier, qui ne retient pas telle
possibilité structurale en interdit, par là-même, la saisie.

Enfin, si nous aboutissons à un réseau de quatré termes qui s 'interdéfinissent, ce


n'est sans doute pas par hasard : le minimum épistémique posé par F. de Saussure
nous apparaît, s'il est possible de s'exprimer ainsi, comme la « moitié » d'un réseau.

Comme la poésie selon Voltaire, la théorie est faite de « beaux détails » : la doc-
trine saussurienne se caractérise non seulement par l'ampleur des perspectives tracées,
mais également par sa maîtrise du détail et les figures de Br0ndal et de Hjelmslev
satisfont aussi à cette double exigence.

2.3 . Brindai et Thom

Il paraît difficile de s'interroger sur l'actualité de Br0ndal sans envisager les rela-
tions de compatibilité entre les thèses qu'il a défendues avec constance et les proposi-
tions de René Thom, dont l'une des ambitions est de fonder la sémiologie à partir de
modèles topologiques 29.

Nous n'avons pas ici la prétention de défendre une « conclusion », mais de légiti-
mer une interrogation en en déterminant les limites. A notre sens, deux séries de con-
sidérations, d'ailleurs complémentaires, soutiennent cette interrogation : la précellence
du point de vue dynamique d'une part, l'intuition de l'importance de la notion de
« stabilité structurelle ».

Pour Br0ndal, si la morphologie est l'étude des formes et des systèmes qui les régis-
sent, la syntaxe est du côté de la proposition et se préoccupe du « rythme » 30 et de
1'« intention » qui la gouvernent. Enfin, on l'a vu plus haut, la connaissance de la
configuration d'un système est au service, introduit à l'intelligibilité de son devenir 31 .

(27) René Char écrit : «r Au-dessus des contradictions partielles sont apparues les identités
antagonistes qui , elles , mettent fin. (...) in La nuit talismanique , Paris, Flammarion, coll.
Champs, 1972, p. 36-37.
(28) A. Henault, Perplexités à propos du terme complexe in Exigences et perspectives de la
sémiotique , recueil d "hommages pour A. J. Greimas, Amsterdam, Benjamins, 1985, p. 241-248.
(29) <r Or une discipline qui cherche à préciser le rapport entre une situation dynamique glo-
bale (le «r signifié »), et la morphologie locale en laquelle elle se manifeste (le «r signifiant »),
n'est-elle pas précisément une « sémiologie » ? » {Modèles mathématiques de la morphogenèse ,
Paris, Ch. Bourgois, 1980, p. 169.)
(30) ELG, p. 122.
(31) ELG , p. 55.

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Or ce8 préoccupations semblent également partagées par R. Thom : « (...) ma tenta-
tive, qui consiste à essayer de décrire les modèles dynamiques compatibles avec une
morphologie empiriquement donnée, est un premier pas dans l'édification de cette
'Théorie générale des Modèles* qu'il faudra bien construire un jour » 32 .

En second lieu, Br0ndal a noté « en passant » que les systèmes étaient plus ou
moins stables : « Ici il faut remarquer que, parmi les groupes qui peuvent faire partie
d un système morphologique, tous ne sont pas également stables : à l'intérieur d'un
groupe à deux termes - termes forcément polaires et par conséquent solidaires - il y
aura toujours une force de cohérence inconnue aux groupes à un seul terme. » ( ELG ,
p. 23.) Enfin, pour les deux penseurs, une connivence certaine associe complexité et
instabilité, d'une part, stabilité et simplicité d'autre part 33 .

L'intérêt de la réflexion de R. Thom est de soumettre le concept de stabilité au


point de vue dynamique et à ce titre elle doit retenir l'attention. L'inventeur de la
« théorie des catastrophes » a fait porter la comparaison sur les phénomènes biologi-
ques et les phénomènes linguistiques en discernant un isomorphisme partiel entre la
« morphologie des êtres vivants et celle du langage », isomorphisme partiel en raison
du caractère unidimensionnel de la morphologie linguistique mais qui conduit néan-
moins à des analogies, des métaphores « inouïes ». Ainsi, pour les vertébrés, R. Thom
estime pertinents les rapprochements suivants :
morphologie biologique

endoderme (intestin)

mésoderme (os, muscles)

ectoderme (tissu nerveux)

L'entreprise de R. Thom, sans précédent en raison de son envergure, concerne


essentiellement ce que Greimas dénomme les « structures sémio-narratives de sur-
face » 35 et visiblement elle fait de la prédation le programme privilégié 36, envisagée
du « point de vue » du prédateur et non de celui de la « proie ».

En second lieu, l'heuristique de R. Thom postule l 'isomorphisme ultime du langage


et de la réalité : « L'idée générale qu'on peut proposer en sémantique est qu'il existe un
isomorphisme approximatif entre le logos d'un être matériel E, et le logos du concept
correspondant C(E), considéré comme une forme spatiale sur l'espace euclidien des acti-
vités psychiques » 37.

La force, ou l'attrait, d'une part, les objections, ou les réticences d'autre part, en face
de cette vision cosmogonique s'avancent d'elles-mêmes. Négligeons le fait que Thom

(32) R. Thom, ibid., p. 18.


(33) Pour Br0ndal, cf. ELG , p. 114-115 et pour R. Thom, op. cité , p. 143-144.
(34) R. Thom, op. cité, p. 154-161.
(35) A. J. Greimas & J. Courtés, Sémiotique , op. cité , p. 157-160.
(36) La « constante concentrique » que G. Bachelard identifiait dans l'œuvre de Lautréa-
mont semble également devoir s appliquer à Thom : * Quel est donc ce complexe qui nous paraît
dispenser à V œuvre de Lautréamont toute son énergie ? C'est le complexe de la vie animale ;
c'est l'énergie d'agression. De sorte que l'œuvre de Lautréamont nous apparaît comme une véri -
table phénoménologie de l'agression. Elle est agression pure , dans le style mêmè où l'on a
parlé de poésie pure . » (G. Bachelard , Lautréamont , Paris, Lib. José Corti, 1974, p. 8-9.)
(37) R. Thom, op. cité ', p. 166. Les « logoï » sont définis par Thom comme * des structures
algébrico-géométriques qui stabilisent tout concept dans l'espace des activités mentales » {op.
cité, p. 124 ; voir également p. 174-186).

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désigne comme « syntaxiques » des relations que le consensus des linguistes dénomme
« morphologiques » : la remarque est vénielle. Nous n'envisagerons pas davantage la
question de savoir si cet isomorphisme surmonte l'aporie entre « méthode immanente »
et « méthode transcendante » indiquée par Hjelmslev 38 , ou bien si cet effort relève de la
méthode transcendante, à savoir que R. Thom projette, ou retrouve, sur un autre plan
les catégories de l'indo-européen - reproche déjà adressé à Aristote : « Indubitable-
ment, la logique ď Aristote (Heinrich Maier la montré) est, dans une large mesure,
d'inspiration linguistique ; cest parmi les phrases grecques que, pour les besoins de sa
théorie, le Stagirite a choisi certains types, par lui considérés comme fondamentaux, et
cest par l'analyse de mots grecs qu'il est arrivé à certains prédicaments, conçus comme
catégories essentielles » ( ELG , p. 50).

À dire vrai, il est difficile de trancher tant les objections sont intriquées, impli-
quées, dans les arguments et le « bon sens » de Brandal peut nous aider à voir clair dans
cette « ténébreuse affaire ». Plaident en faveur des hypothèses de R. Thom ce
que Brandal appelle 1'« autonomie » et la « monotonie » de la syntaxe. Envisageant
les relations entre morphologie et syntaxe, il insiste sur leur « indépendance » {ELG,
p. 9) ; plus loin il évoque la nécessité d'« épurer les définitions syntaxiques de tout
mélange morphologique » (ELG, p. 13).

En second lieu, les données syntaxiques se caractérisent par leur « extrême mono-
tonie » (ELG, p. 12). Le fait linguistique, si l'on définit un fait par sa constance, sa
permanence, semble résider en ce chiasme entre morphologie et syntaxe : « Ce qui
doit amener encore à condamner toute définition syntaxique d'un mot en tant que
mot, c'est l'extrême variabilité des systèmes de mots en regard de la grande constance,
déjà constatée, des éléments de la phrase » (ELG, p. 10).

Cette variabilité signale une des difficultés internes des hypothèses de R. Thom :
en effet ni l'invariance ni la centralité, le rôle de pivot, du verbe ne sont établies :
« Le verbe au sens propre manque à la plupart des langues du monde (au chinois
aussi bien qu'aux langues américaines par exemple) » (ELG, p. 12) et un peu plus
loin : « Quoi qu'en disent la plupart des grammaires, le verbe n'est pas suffisamment
caractérisé par sa position centrale ou fonction prédicative dans la phrase ; et malgré
l'affinité évidente entre les termes traditionnels sujet et substantif (cf. vTrox^tfißvov),
épithète et adjectif (adjectif traduit précisément ZmdZrov), un substantif n'est nulle-
ment en soi un mot-sujet, un adjectif nullement un mot-épithète » (ELG, p. 10) 39.

Quoi qu'il en soit en définitive, il est clair que l'identification entre les catégories
syntaxiques et les logoï est sans doute universelle mais non générale (Hjelmslev).
C'est la raison pour laquelle une voie d'approche différente peut être retenue en envi-
sageant non plus le niveau des structures sémio-narratives de surface, mais le niveau

(38) L. Hjelmslev, Prolégomènes , op. cit., p. 13.


(39) Sans arrière-pensée polémique, il semble raisonnable de penser qu'un projet ontologique
est obligé de postuler, de « faire comme si » une relation de conformité (Hjelmslev) existait
entre morphologie et syntaxe, comme si sujet et substantif, prédicat et verbe se recouvraient, et
plus généralement de minimiser la solution de continuité entre forme et substance : « Le vieux
rêve d'un système universel de sons et d'un système universel de contenu (système de concepts)
est de ce fait irréalisable , et n'aurait de toute façon aucune prise sur la réalité linguistique »
(Hjelmslev, Prolégomènes , op. cité , p. 99).

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profond des mêmes structures qui est encore celui des structures élémentaires de la
signification dans la perspective greimassienne 4°.

L'interrogation vise à changer en raison une coïncidence terminologique : entre les


structures élémentaires de la signification d'une part et les catastrophes élémentai-
res reconnues par R. Thom d'autre part, cette épithète d'élémentaire est-elle un acci-
dent ou un motif ?

Il suffit de provoquer la question pour discerner que deux rapprochements 41 peu-


vent être envisagés :

1. la « catastrophe de bifurcation », la plus simple, peut être rapprochée de la


problématique du terme neutre. Selon R. Thom, dans certaines conditions : « Si l'on
prend 8 positif, on ne trouve plus aucun point critique » (...) 42 , « il y a abolition de
toute place » selon J. Petitot 43 .
Ce dernier met en relation cette catastrophe élémentaire avec l'opposition privative
de R. Jakobson, mais il nous semble que la « courbe sans point critique » (Thom) est
plus proche du terme neutre tel que Brandal l'a envisagé : « (il) est défini par la non-
application de la relation donnée » ( ELG , p. 16).
La « catastrophe de bifurcation » fixerait - on n'ose dire : déterminerait
- l'indétermination de case (Hjelmslev) du terme neutre, ou plutôt l'effacement des
cases et simultanément garantirait la conservation de la dimension. C'est, nous
semble-t-il, la raison pour laquelle le système minimal contracte, selon Brandal
- même si, nous en convenons, la chose n'est pas formellement déclarée - le grou-
pe A et le groupe B. Dans le même esprit, pour Hjelmslev, le système a/A contracte
un terme a, localisé et un terme délocalisé du point de vue de la case et déterminé du
point de vue de la dimension : A. L'opposition
concentré/ étendu

à ranger selon Hjelmslev dans les primitifs, serait identifiable à la « catastrophe de


bifurcation ».

2. Le second rapprochement concerne la « catastrophe de conflit » et le groupe B,


qui oppose le terme positif et le terme négatif. J. Petitot a, dans les articles cités, mis
en relation la « catastrophe de conflit » avec l'opposition polaire, ou qualitative, de
R. Jakobson.
La « théorie des catastrophes » est-elle en mesure de saturer les six possibilités
indiquées aussi bien par Brandal que par Hjelmslev ? Ce serait le cas.
La « catastrophe de bifurcation » (« pli ») semble bien en mesure de préciser le
régime formel associé à chaque groupe de termes. La « déclinaison » du groupe B,

(40) A. J. Greimas, J. Courtès, Sémiotique, t. 1, op. cit., p. 362-363.


(41) Cest J. Petitot qui, à notre connaissance, a le premier proposé et démontré la corres-
pondance entre les hypothèses de Thom et les structures élémentaires de la signification in Topo-
logie du carré sémiotique , Études littéraires, Québec, Université de Laval, 1977, p. 347-428 ;
Identité et catastrophes in L'identité (séminaire C. Lévi-Strauss, Paris, Grasset, 1977,
p. 109-148.
(42) R. Thom, Paraboles et catastrophes , Paris, Flammarion, 1983, p. 68.
(43) A. J. Greimas & J. Courtés, Sémiotique , tome 2, Paris, Hachette, 1986, Article « Bifur-
cation », dû à J. Petitot, p. 29.

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puis du groupe C, enfin du groupe A apparaît solidaire des « variables de contrôle » à
une condition près 44 :

vjy^y
S < 0 6 = 0 8 > 0
I II HI

Les homologations s'établiraient de la façon suivante :


- dans la situation I, nous reconnaissons le groupe B, lequel confronte un terme
positif et un terme négatif ;
- dans la situation II, nous aurions affaire au type C complexe, à condition
d'admettre pour la manifestante un syncrétisme ;
- dans la situation III, il serait question du terme neutre A.

La « catastrophe de conflit » (« fronce ») a d'autres vertus. Brindai a considéré


que deux tendances (tendance à l'abstraction et tendance à la complexité) étaient à
l'œuvre, même si pour les langues modernes la tendance à l'abstraction était prépon-
dérante. La « catastrophe de bifurcation » serait au principe de la tendance à l'abs-
traction, laquelle fait prévaloir le terme A, tandis que la « catastrophe de conflit » ins-
truirait la tendance à la complexité, laquelle maintient ou développe les termes C et
D. En effet, dans l'une des régions définies par la « catastrophe » de conflit, chaque
détermination peut tour à tour prendre l'avantage sur l'autre. Dès lors, les six possibi-
lités indiquées par Br0ndal se répartiraient de la manière suivante :

catastrophe de bifurcation catastrophe de conflit


(« pli ») (fronce)

groupe B groupe B
groupe A groupe C
groupe C groupe D

(44) Ces représentations sont, bien entendu, empruntées à R. Thom, Modèles mathématiques
de la morphogenèse , op. cit., p. 53.

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La conséquence, quelque peu inattendue, est quìi faudrait recevoir deux types de
groupes B :
- un groupe B1, solidaire de la « catastrophe de bifurcation » et
- un groupe B2, attaché à la « catastrophe de conflit » 45.
Ces groupes seraients distincts à un double titre :
- dans le groupe B1 les valences des termes seraient différentes ; d autre part, le
destin possible s'inscrirait dans la suite de transformations :
B - C - A

- dans le groupe B2, les valences seraient (ou pourraient être) égales et le destin
du groupe enchaînerait :
B - C - D.

A qui s'est accoutumé à soumettre l'identité subtantielle à l'identité fonctionnelle,


cette dualité ne créera guère d'embarras.

Cette convergence indéniable, prometteuse, est d'abord à l'honneur de ces deux


grands courants de pensée. Déjà elle renouvelle les interrogations - avantage non
mince. Bien évidemment, elle laisse intacte l'alternative : en dernière analyse, les
modèles linguistiques servent-ils de plan de l'expression pour les modèles topologiques
qui, sous cette condition, viendraient dès lors s'inscrire comme plan du contenu ? Ou
bien : les modèles linguistiques prennent-ils en charge, ceux-ci comme les autres, les
modèles catastrophiques dans la mesure où ils les traduisent parce que bonnement ils
les comprennent : « En pratique, une langue est une sémiotique dans laquelle toutes
les autres sémiotiques peuvent être traduites, aussi bien toutes les autres langues que
toutes les structures sémiotiques concevables. Cette traductibilité résulte de ce que les
langues et elles seules sont capables de former n'importe quel sens » 46. Sémiotique dont
la langue serait le principe ou morphogénèse modalisant les substrats ? Il est probable
que la réponse gît dans quelque complémentarité pour l'heure inconsciente

3. Regrets

Il y a assurément quelque proportion mystérieuse entre les qualités et les limites


d'une œuvre : celles-là émeuvent celles-ci.
Ce sont la profondeur et l'originalité de la réflexion de V. Br0ndal qui nous font
regretter l'imprécision de certaines définitions, notamment celles concernant les « gen-
res » et les « relations », les « concepts relationnels » et les « concepts génériques »,

(45) Le même effort accompli pour les configurations proposées par Hjelmslev dans La caté-
gorie des cas aboutit à une répartition différente :

catastrophe catastrophe
de bifurcation de conflit

a/A ß/B
y/r

(46) L. Hjelmslev, Prolégomènes , op. cité , p. 138.


(47) Sur les rapports entre ces deux approches, voir J. Petitot et R. Thom, Sémiotique et
théorie des catastrophes , Actes sémiotiques, V, 47-48, 1983.

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les « genres purement relatifs » et les « genres purement descriptifs ». Non qu'il faille
exiger de tout linguiste d'envergure qu'il s'engage, ou se perde, dans un « système de
définitions à outrance » à l'image de celui poursuivi obstinément par Hjelmslev, mais
à l'inverse il n'est pas sûr que l'affirmation suivante : « Or ce sont justement ces deux
espèces de catégories - relationnelles et génériques - qui semblent nécessaires et suf-
fisantes à une définition complète des concepts fondamentaux de la morphologie
grammaticale : les relations constituant le contenu ou signification des mots, les genres
en formant les cadres ou classes » ( ELG , p. 34) soit utilisable.

On peut encore regretter le platonisme logique de Brindai, qui le conduit à placer


la logique « au-dessus » des catégories linguistiques. Tandis que pour Hjelmslev, la
langue, correctement appréhendée, c'est-à-dire après expulsion, expurgation des don-
nées subtantielles, prévaut sur la logique : « La langue est la forme par laquelle nous
concevons le monde. (...) Il n'y a pas de philosophie sans linguistique » pour Bran-
dal le langage est moins fondateur que fondé ; ainsi dans l'étude intitulée Les opposi-
tions linguistiques , la question prioritaire est ainsi formulée : « Quelles sont les catégo-
ries fondamentales nécessaires et suffisantes pour expliquer celles du langage ? »
(ELG, p. 43). Modestie ou pusillanimité, il note lui-même de sa doctrine : « Elle con-
siste à retrouver dans le langage les concepts de la logique, tels qu'ils ont été élaborés
par la philosophie depuis Aristote jusqu'aux logiciens modernes » (ELG, préface).
Même si la grande étude, Langage et logique, ( Elg , p. 49-71 ) se termine par un appel
à la « coopération » entre « logiciens et grammairiens ».
Dans cette même (et belle) étude, V. Br0ndal évoque « la structure, véritablement
merveilleuse, des systèmes linguistiques » (ELG, p. 65), mais en quoi la « merveille »
se résoudra-t-elle sinon en simplicité ? Ce concept - que Hjelmslev a inclus dans le
principe d'empirisme - est sans doute malaisé à définir, mais non à comprendre : le
lien paradoxal entre l'être vivant et l'être parlant, entre le « se faisant indivis » et la
« pensée condamnée à diviser », que P. Valéry explore dans le texte admirable
L'homme et la coquille, le paradoxe tient à ce que ces « structures merveilleuses »
expriment une complexité qu'elles méconnaissent foncièrement. Mais cette compé-
tence inattendue, insolite, à quoi la rattacher sinon à la simplicité et à la « monoto-
nie » des structures dont V. Brindai a été l'un des décrypteurs pénétrants !

avril 1986

(48) L. Hjelmslev, Essais linguistiques , op. cité , p. 173.

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