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Genèse et poïétique de l'œuvre – Marie Bourjea

Imaginaire de l’atelier (XIXe-XXIe siècles)

L’atelier du peintre et du sculpteur a toujours fasciné l’écrivain, alimentant un imaginaire de la création,


questionnant, déconstruisant et renouvelant en bien des façons le mythe créateur, à l’articulation entre le
trivial et le génial, la fabrique et l’inspiration, la matière et ses métamorphoses. Les prosateurs sont
nombreux, au XIXe siècle, à mettre en scène l’atelier, véritable topos romanesque qui contribue à nourrir
l’antique rivalité/complicité entre la littérature et la peinture, et par là même interroge ce Janus bifrons que
sont le peintre et l’écrivain. Cependant, dans la lignée de Baudelaire familier de l’atelier de Delacroix, les
poètes des XXe et XXIe siècles vont à leur tour investir l’atelier : moins tant comme un espace
narratif/réflexif que comme un espace poétique/critique les engageant à renouveler les formes mêmes de la
poésie et de la critique.

Bibliographie :

– De Balzac, Honoré : Le Chef-d’œuvre inconnu [1831]


Gallica via biu

– Baudelaire, Charles : Écrits sur l’art Paris, Librairie Générale Française / éd. Le Livre de Poche, coll. «
Classiques de Poche », 1992/1999
Langues 840"18" BAU.C 4 E

– Goncourt, Edmond & Jules : Manette Salomon [1867], Paris, éd. Gallimard, coll. «Folio/Classiques »,
1996
Langues 840"18" GON.E 4 M
Magasin R 740-49
Magasin XDX 41622

– Zola, Émile : L’Œuvre [1886]


Langues 840 18 ZOL E 4 O

– Char, René : « Alliés substantiels », in : Recherche de la base et du sommet [1955], Paris, éd. Gallimard,
coll. « Poésie », 1971
Magasin WI 1841 ?

– Camus, Albert : « Jonas ou l’artiste au travail », in : L’Exil et le royaume [1957], Paris, éd. Gallimard, coll.
« Folio », 1972

– Ponge, Francis : L’Atelier contemporain, Paris, éd. Gallimard, coll. « Blanche », 1977
Magasin W 4590

Blanc, Jan et Jaillet, Florence : Dans l’atelier des artistes. Les coulisses de la création de Léonard de Vinci à
Jeff Koons [2011]
Arts 7 BLA

sujet donné le 11, noté par Bourjea


L’atelier n’est pas seulement un espace dédié aux arts plastiques. Il appartient aussi aux écrivains. Ce n’est
pas seulement un espace géographique, mais aussi symbolique, métaphorique et métaphysique. L’atelier est
à considéré comme un espace de la création. Les espaces topiques sont des espaces symboliques nommés
pour faire comprendre un fonctionnement (Ça, moi, Surmoi).
Qu’est-ce que l’idée atelier nous permet d’accrocher quand à l’espace de la création et la création en
général ?

Au XIXème siècle en France, les ateliers deviennent encore plus des espaces de sociabilité que les artistes et
les hommes de lettre vont fréquenter. Les écrivain fréquentent ces ateliers et se les approprient. Dans la
littérature du XIXème siècle, un grand mouvement narratif se développe. L’espace de l’atelier peut être
raconté par les plasticiens eux-même. Dans les fictions, les ateliers sont intégrés comme des lieux
symboliques de toute une réflexion sur la création. Via les personnages, les écrivains développent un
questionnement sur ce qu’est la création. Au XXème siècle, l’atelier est toujours investi par les écrivains.
Mais ce sont davantage les poètes qui s’emparent de cet espace symbolique. Le compagnonnage fut très fort.
L’atelier devient une espace métaphorique de la création et un espace critique. L’expression « atelier de
l’écrivain » devient dans la seconde moitié du XXème siècle toute à fait légitime. Les écrivains s’en sont
emparés de manière naturelle, alors que l’espace était d’abord attribué aux plasticiens. On passe d’un espace
fictionnel et narratif à un espace poétique. On note un développement des livres de dialogue, combinant
plasticien et poète. Pour un tel travail, les deux artistes doivent répondre à la nécessité d’un espace de
partage et de rencontre, qui sera l’atelier du peintre. Ceci rend compte de pourquoi ce sont davantage les
poètes qui s’emparent du lieu. Il existe un fort lien entre écrivains et artistes via les ateliers. La critique d’art
naît en France avec Diderot et se développe avec Baudelaire, parallèlement à la naissance des Salons. En
France, il paraît normal qu’un écrivain soit intéressé par l’art plastique et en devienne un spécialiste, lui
donnant droit de produire des critiques. C’est une tradition encore aujourd’hui vivace. L’atelier est donc un
espace de la création, pas comprise comme advenue (celle exposée dans les musées) mais la création
advenante. Or peut-on la voir ? La création est-elle dans le sujet créateur, le geste, le support ou le regard du
spectateur ? Ces questionnements s’encre dans le fantasme de l’origine, de voir la naissance d’une œuvre. Il
rejoint le fantasme de la source d’un fleuve. Dans travail de l’écrivain, cette origine et cette œuvre en train
de se faire est moins visible que dans celui d’un peintre, d’un danseur, d’un sculpteur, … Cela paraît moins
concret. L’atelier est un espace qui donne de la concrétude et un certain cadrage alors même que la création
n’a pas de cadre.
Mythe créateur : Pygmalion et Galathée. Pygmalion fait partie des mythes fondateurs, ces grands mythes
ayant servi à l’humanité à se construire. Dans ses Métamorphoses, Ovide raconte que Pygmalion refuse de
se marier car les seules femmes passablement épousables sont des prostituées. Il se réfugie dans la création
d’une statue parfaite à ses yeux, représentant de manière très claire son idéal féminin. Il l’a faite de cire, et la
considère comme une vraie femme, la pare, lui offre des cadeaux, l’embrasse. Mais hélas ce n’est qu’une
statue. En réponse à ses prières, Vénus/Aphrodite donna vie à la statue. Pygmalion qui voit sa statue devenir
un être de chair et de sang en tombe amoureux et l’épouse. Pygmalion-Galathée = créateur-créature

Dans les descriptions des écrivains, on remarque le motif récurrent de la fascination pour les outils, la
matière dans l’atelier d’un génie. Il existe une ambiguïté entre le faire et le laisser-faire. Dès l’Antiquité, lien
existe entre peinture et littérature (ut pictura poesis). Dans la hiérarchie d’alors, la poésie était considérée
supérieure à la peinture, qui a pour rôle de l’illustrer (mythologie, bible). Puis, advient l’autonomisation de
la peinture avec l’avènement du statut de l’artiste. On note alors un renversement de la hiérarchisation, la
littérature est en position de soumission. A partir de la modernité, une complicité s’instaure entre la
littérature et l’art plastique. La réflexion sur l’atelier par les poètes et les écrivains participa à renouveler les
formes même de leur art. L’intérêt pour l’atelier dépasse donc la simple fascination du littéraire pour l’art
pictural. Il s’approprie l’atelier du peintre pour en faire un espace qui lui est propre. Studio en danse,
laboratoire du photographe.

Gustave Courbet, L'Atelier du peintre. Allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie
artistique et morale, entre 1854 et 1855, Huile sur toile, H. 361 ; L. 598 cm, Musée d'Orsay, Paris.
Le sous titre donné par Courbet est intéressant. Il évoque lui-même l’espace réel de l’atelier du peintre et en
même temps l’allégorie de la création. La représentation de l’atelier par les peintres est un topos de la
peinture. topos = lieu commun, espace symbolique par lequel on passe nécessairement. La façon dont
l’écrivain voit atelier du peintre se nourrit de la manière dont le peintre lui-même perçoit son atelier. Cette
toile possède un format inhabituel pour ce type de représentation. Ce format imposant et en paysage est
propre aux motifs élevés dans la hiérarchie. Il est adapté à la peinture d’histoire (événements historiques,
scènes mythologiques ou bibliques). Il est réalisé au milieu du XIXème siècle, soit l’entrée dans la
modernité. Courbet élève l’espace de l’atelier à un espace symbolique. Il fait aussi de son atelier particulier
l’espace symbolique de l’atelier en général. Il accorde un format imposant où il juxtapose différents genres
de la peinture : autoportrait, paysage, nu (muse et modèle), peinture de genre avec tous les personnages et le
chien, peinture de groupe, portrait, vanité. L’atelier est ici à la fois réel et allégorique. A partir de l’espace
réel de son atelier, il en produit une image allégorique.
Le peintre mis en scène au centre du tableau est un élément totalement nouveau. Au place au centre de la
toile les motifs de la peinture, du paysage d’enfance, de l’inspiration. Il départage ensuite l’espace en deux
par rapport à ce centre. A gauche se trouvent des personnes qui réclament de l’argent, qui vivent de la mort,
tous ceux qui tirent la peinture vers le bas. On remarque qu’ils sont indifférents à la peinture. A droite, sont
représentés tous ceux qui valorisent l’art. Ils sont tournés vers les gestes du peintre. Baudelaire est le seul qui
ne regarde pas, concentré sur son livre de poésie. On reconnaît également Mme Sabatier, Alfred Bruyasse
(barbu), un couple qui s’embrasse symbolisant l’amour libre, Champfleuri (assis) représentant la prose,
enfant en train d’étudier. L’atelier du peintre est mis en avant pour mettre l’art au centre de la vie. Dans
l’imaginaire collectif, l’atelier est l’espace d’une création solitaire. Or en réalité c’est un espace collectif
pour des raisons financières mais aussi pour l’enseignement pédagogique, enfin pour les besoins d’une aide
(manutention). L’atelier est un espace paradoxal. Il s’agit d’un espace collectif, mais qui entoure l’espace
très personnel du génie. Cela participe aussi de la fascination de l’écrivain, qui lui est totalement seul. Il est
accueilli dans un espace où les artistes peuvent être à plusieurs dans la création.
Courbet avait peint le poète Baudelaire avec sa muse au même titre que lui-même avec sa muse. Elle fut
effacée sur demande du poète, voulant apparaître seul. Il tente de représenter l’inspiration, mais il a toujours
besoin de figures pour la représenter. L’atelier de Courbet fut le plus visité de manière contemporaine. Il fit
de l’atelier un espace à visiter.

La fiction est un moyen de réfléchir sur la création en train de se faire à partir de l’atelier. Cet espace de
tâtonnement est fascinant par le travail de recherche, de brouillon, d’essai, d’échec, … La vue d’un tableau
dans un musée nous prive de cette recherche. Dans toute grande œuvre, le geste de création en train
d’advenir parvient à persister dans l’œuvre finale. L’œuvre aboutie conserve la vie du geste créateur.
D’ailleurs, quand est-ce qu’une œuvre est finie ? A quel moment une production est achevée ? Qu’est-ce qui
fait que cette œuvre continue d’être en mouvement pour le spectateur ?

Un même atelier est composé d’une pluralité d’espaces, correspondant à une pluralité de temporalités de la
production ou à une pluralité de techniques. L’espace de l’atelier rassemble ainsi toutes les étapes de la
création. L’atelier devient une partie prenante de la création. On trouve autant de l’artiste dans les œuvres
que dans leur atelier.
Le peintre représente un atelier c’est-à-dire l’espace de la création pour représenter la création (métonymie).
C’est encore plus visible pour l’écrivain. On dit l’atelier, alors qu’il n’y a pas nécessairement un espace
dédié, pour dire la création. La création n’est pas réductible à l’espace physique d’un bureau ou d’une pièce.
Progressivement, le terme d’atelier signifie l’acte de création, création physique ou intellectuelle.

Atelier est traduit en anglais par workshop ou studio. Ce sont là deux idées différentes mais présentes dans le
terme français. Studio provient du latin studium, studiolo, c’est l’espace d’étude c’est-à-dire de construction
d’un savoir d’une culture, fondé sur le libre exercice de l’intelligence. À partir de ce savoir, on construire sa
propre manière de penser. Workshop insiste plus sur la dimension manuelle de l’atelier. Il renvoie à la
boutique en français, où se situe à la fois la fabrique manuelle et le commerce (arrière boutique). Cette
double manière de nommer dans la langue anglaise montre la dualité de l’atelier. Il est à la fois un travail
intellectuel et un travail manuel, solitaire et collectif par la mise en relation avec l’autre. Le terme français
condense ces paradoxes. Atelier provient de l‘ancien français « astelle », donnant « atèle », qui désigne un
morceau de bois transformé. Par métonymie, il désigne ensuite tout le tas de bois, puis l’endroit où on
transforme ces bouts de bois. Toujours par métonymie, le terme désigne ensuite les gens qui travaillent dans
l’atelier, c’est aujourd’hui encore le cas. L’atelier de tel peintre ne désigne pas le lieu géographique mais les
personnes qui y travaillent. L’atelier correspond alors au collectif qui travaille sous la direction d’un maître
d’atelier, plus souvent nommé chef d’atelier. Le terme atelier contient tout cela. Le matériel fut transposé au
domaine de l’art, alors que l’artisanat n’était pas totalement dissocié de l’art. Dans l’espace de l’atelier, à la
fois on crée et on répare. Or une atèle sert à réparer le corps. L’atelier est le lieu où le créateur se crée lui-
même et se répare. Tous les paradoxes présents dans l’espace de la création se disent dans l’évolution du
terme. L’artiste est séparé de son atelier, mais ils ne sont pas totalement dissociables. Il existe une relation de
l’œuvre avec l’espace d’exposition, l’espace où fut produite, avec le regard du spectateur, don esprit, son
corps, … On entre dans un dynamisme du regard et du corps. Où est-ce que la création commence et
s’arrête ? Une œuvre peut travailler un spectateur pendant plusieurs années.

La vie artistique et la vie morale, désignées dans le sous-titre de Courbet, sont impossibles à rendre visible.
Dans L’Origine du monde, on voit le sexe féminin mais l’origine est toujours cachée. On reste dans la
métonymie, on reste dans un leurre.

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