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A 23
Prurit
(à l’exclusion des prurits anal et vulvaire)
Orientation diagnostique
PR Jean-Marie BONNETBLANC, DR Agnès SPARSA
Service de dermatologie, CHRU Dupuytren, 87042 Limoges Cedex.
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PRURIT
Interrogatoire
Il doit vérifier :
– la réalité du prurit (certains malades rapportent des
sensations subjectives superficielles et fugaces) ;
– l’ancienneté ;
– le mode, les circonstances et les sièges d’apparition ;
– les facteurs déclenchants éventuels ;
– l’évolution par poussées ou sa permanence ;
– l’horaire. La plupart des prurits sont plus fréquem-
ment perçus le soir. Au déshabillage, il s’agit le plus
souvent d’un prurit physiologique. La chaleur du lit est
aussi un facteur déclenchant. Le plus souvent, le prurit
est occulté dans la journée par les préoccupations quo- 1 Urticaire.
tidiennes et s’exprime le soir. La prédominance noc-
turne ou diurne du prurit oriente vers certaines causes ;
– l’intensité et le retentissement sur le vécu du malade.
Cette notion est très subjective, fonction de la person-
nalité et du psychisme du malade. Une meilleure
approche est de savoir si le prurit empêche l’endor-
missement et (ou) réveille le malade la nuit ;
– les antécédents du malade ;
– les prises médicamenteuses en s’assurant de la chrono-
logie par rapport au début du prurit ;
– la notion de prurit dans l’entourage ;
– les symptômes cliniques associés ;
– les traitements utilisés pour le prurit et leur efficacité ;
– le mode de vie ; des modifications de l’environnement
(variations de température, d’humidité) entraînent des
prurits chez le sujet noir vivant en pays tempéré, chez 2 Lichen plan.
le sujet atopique ou âgé.
Papulo-vésicule
Dermatoses prurigineuses
Il est rare d’avoir la vésicule présente en raison du
Le prurit peut accompagner plusieurs dermatoses, grattage. La lésion observée est une papule excoriée. Le
chacune étant définie par sa lésion élémentaire. prurigo correspond à un tableau clinique de dermatose
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Dermatologie
Bulle
• La pemphigoïde bulleuse peut débuter par un prurit
4 Eczéma. isolé pendant plusieurs semaines ou mois. Il faut faire
une biopsie cutanée avec examen en immunofluorescence
directe chez tout malade de plus de 60 ans en présence
d’un prurit inexpliqué. L’apparition des bulles sur base
excoriée, papulo-érosif. En cas de chronicité, les papules érythémato-papuleuse permet un diagnostic plus facile.
deviennent plus sèches, plus nodulaires. Il peut compliquer • La dermatite herpétiforme est peu fréquente en
une dermatite atopique et toutes dermatoses prurigineuses. France. Les lésions vésiculo-bulleuses prurigineuses
• Le prurigo strophulus traduit chez l’enfant une prédominent aux faces d’extension des membres. La
hypersensibilité aux piqûres d’insecte (fig. 3). Il est recherche de dépôts granuleux d’IgA à la biopsie cutanée
caractérisé par des papulo-vésicules excoriées, très permet le diagnostic.
prurigineuses, récidivantes qui prédominent soit sur les
zones découvertes, soit dans les plis selon le biotope de Lésions érythémato-squameuses
l’insecte piqueur.
• Le prurigo nodulaire est caractérisé par des nodules • Le psoriasis ne gratte habituellement pas. La présence
fermes, à surface lisse ou verruqueuse, ou centrés d’un prurit peut témoigner de la mauvaise acceptation
par une excoriation ou une croûte. Il existe des lésions psychologique de la maladie.
récentes inflammatoires et des lésions anciennes • Le mycosis fongoïde (lymphome cutané T) forme des
pigmentées. Les sièges préférentiels sont les faces plaques érythémateuses diffuses qui vont s’infiltrer
postérieures des avant-bras, les cuisses et les jambes. progressivement. Le prurit est précoce et persistant. Il
peut débuter par des nappes érythémateuses recouvertes
Vésicule de squames pityriasiformes ; le prurit correspond souvent
à une évolution vers l’infiltration cutanée (fig. 6).
• L’eczéma de contact évolue selon plusieurs stades. Là
aussi, les vésicules sont excoriées par le prurit. Le Érythrodermie
tableau est celui d’une dermatose suintante localisée,
aux bords émiettés, de taille variable. Le diagnostic Elle est définie par une dermatose érythémateuse squa-
repose sur l’interrogatoire à la recherche de l’allergène meuse ou suintante généralisée et évoluant depuis plus
de contact (fig. 4). de 6 semaines (fig. 7). Elle s’accompagne d’une altération
• La dermatite atopique débute chez un nourrisson par de l’état général et peut mettre en jeu le pronostic vital.
les zones convexes du visage et s’étend ensuite aux plis Cette définition n’est pas retenue par tous ; elle permet
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PRURIT
7 Érytrodermie.
6
Mycosis fongoïde (lymphome T).
Lésions polymorphes
Il est classique d’évoquer une toxidermie d’origine
médicamenteuse. Il ne faut pas négliger la modification
de la dermatose par des soins topiques inappropriés ou
une hygiène insuffisante. 8 Gale.
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Dermatologie
Causes endocriniennes
• Pathologie thyroïdienne : l’hyperthyroïdie peut s’ac-
compagner d’un prurit diffus. Il faut y penser s’il existe
un amaigrissement, un tremblement, une tachycardie,
une diarrhée, une irritabilité. L’hypothyroïdie, par la
xérose cutanée qu’elle entraîne, peut également être res-
ponsable d’un prurit diffus. Il faut y penser devant une
9 Larva migrans. infiltration cutanéo-muqueuse pâle et cireuse, un ralentis-
sement psychomoteur, une hypothermie, une bradycardie,
une constipation, des crampes musculaires.
l’Européen qui voyage. Il s’agit d’un tableau plus aigu • Hyperparathyroïdie : le prurit est rare. Cette maladie
avec œdème segmentaire transitoire ou urticaire locali- est le plus souvent asymptomatique, ou révélée par des
sée, un prurit, récidivants, associés à une éosinophilie douleurs osseuses ou des fractures.
élevée. Le diagnostic est confirmé par la mise en éviden- • Diabète : il entraîne fréquemment des prurits localisés,
ce de microfilaires par biopsie cutanée exsangue. notamment au niveau des muqueuses génitales (prurit
• Les dermites rampantes, larva migrans (fig. 9) et vulvaire). Le diabète n’est pas une cause de prurit diffus.
loases, sont un cordon rouge, plus ou moins œdémateux.
Elles se distinguent par la vitesse de déplacement. Causes hématologiques
• Dans la polyglobulie, le prurit est fréquent et s’aggrave
Piqûres d’insectes lors de bains chauds. Il peut s’associer à des céphalées ainsi
qu’à une érythrose faciale. Il est calmé parfois par l’aspirine.
Les piqûres de puces, punaises, aoûtats, moustiques…
• Dans la maladie de Hodgkin, le prurit important,
sont sans grand problème diagnostique.
accompagné de sueurs, d’un amaigrissement chez un sujet
jeune doit faire rechercher la présence d’adénopathies
périphériques. Son intensité a un caractère pronostique.
Prurit révélateur • Carence martiale : la pâleur du visage et des mains, la
d’une pathologie interne fatigue, l’aggravation d’une dyspnée d’effort la font
rechercher. La recherche d’un saignement chronique,
Une maladie viscérale profonde est à rechercher devant un
gynécologique ou digestif, est systématique.
prurit généralisé qui ne fait pas sa preuve dermatologique.
• Les leucémies (en particulier leucémie lymphoïde
chronique), le myélome, la maladie de Waldenström, le
Insuffisance rénale syndrome hyperéosinophilique sont rarement en cause.
Le prurit est un symptôme très fréquent et souvent inva-
lidant au cours de l’insuffisance rénale chronique, associé Grossesse
à l’anémie, l’hypertension artérielle, l’hypocalcémie, et • Le prurit gravidique est dû dans la plupart des cas à une
l’augmentation de l’urée et de la créatinine. Ce prurit cholestase anictérique. Il survient surtout au 3e trimestre.
peut être amélioré ou aggravé chez le patient hémo- • Le prurigo gravidique correspond à plusieurs entités.
dialysé. Le déterminisme est encore mal connu, proba- Il faut rechercher une dermatose prurigineuse ou une
blement multifactoriel. Le traitement est très difficile. dermatose autonome. Une biopsie cutanée avec étude en
La greffe rénale le fait disparaître. immunofluorescence directe permet le diagnostic de
pemphigoïde gestationnelle (fig. 10).
Cholestase
Un prurit diffus peut révéler une cholestase, ictérique ou
Causes diverses
anictérique. Dans les formes avancées, celui-ci est souvent • Néoplasies : un prurit diffus peut s’observer au cours des
féroce, résistant à l’ensemble des traitements classiques. syndromes carcinoïdes (libération de sérotonine) ainsi que
On évoque la responsabilité directe de l’accumulation chez des patients ayant des néoplasies profondes, notam-
de certains acides biliaires dans le déterminisme du prurit. ment digestives. Il n’y a pas de spécificité d’un cancer.
Ils semblent avoir un effet direct et indirect par la libération • Affections neurologiques : sclérose en plaques, abcès
de protéases in situ. cérébral, tumeur cérébrale. Il existe un prurit paro-
La cholestase peut être d’origine extra-hépatique : lithiase, xystique, à début et fin brutales chez des malades ayant
cancer des voies biliaires, compression extrinsèque eu un stress majeur.
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PRURIT
Bilan paraclinique
Lorsque le prurit s’intègre dans le cadre d’une dermatose
caractérisée, le diagnostic de cette dernière peut être
confirmé par la réalisation d’une biopsie cutanée pour exa-
men anatomopathologique, assorti de techniques complé-
mentaires selon les cas (immunofluorescence directe utile
au diagnostic des dermatoses bulleuses auto-immunes).
Lorsque le prurit est isolé, le bilan paraclinique doit être orienté
par les données de l’interrogatoire et de l’examen clinique.
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