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Le français
tire la langue
Perspectives
Un million de dollars
pour fermer la porte au sida
Vincent Piguet, professeur au Service de dermatologie et que nos efforts débouchent sur la découverte d’une cible
vénéréologie, a obtenu un appui financier de 1 350 000 thérapeutique potentielle qui permettrait de fermer défi-
dollars de la part de «Human Frontier Science Program», nitivement la porte au virus.
une organisation non gouvernementale de promotion
de la science. Le projet primé concerne l’étude du passage Sur quel genre de thérapies vos recherches pourraient-elles
du virus du sida au travers de la muqueuse déboucher?
> Cela ne dépend pas de nous, puisque nous pratiquons de
Campus: Qu’allez-vous pouvoir étudier grâce à la recherche fondamentale et non du développement de
ces 1 350 000 dollars? médicaments. Cela dit, on peut imaginer que nos travaux
> Vincent Piguet: Nous allons nous intéresser à la muqueuse, permettent la fabrication d’un gel ou d’un spray qui s’ap-
qui est la première barrière que doit traverser le virus de pliquerait directement sur les muqueuses susceptibles
l’immunodéficience humaine (VIH) avant d’infecter un d’entrer en contact avec le virus. Un tel produit pourrait
individu. Lorsqu’il entre en contact avec ces tissus, l’agent jouer le même rôle protecteur (contre les maladies) qu’un
infectieux est immédiatement capté par des cellules dites préservatif lors des relations sexuelles.
dendritiques dont le rôle est de neutraliser ce genre d’en-
vahisseur. Une fois leur tâche accomplie, ces cellules trans- Quel avantage aurait un tel gel sur un préservatif?
mettent les restes des virus à des lymphocytes (les CD4, > Il présente surtout une alternative au préservatif. On voit
aussi appelés globules blancs) qui achèvent la destruction bien aujourd’hui que l’épidémie de sida progresse sans
des intrus. Dans le cas du sida, ce mécanisme n’est pas opti- cesse, surtout en Afrique, mais aussi en Asie et en Russie.
mal. Certains virus survivent au traitement des cellules Parfois mal accepté culturellement, le préservatif n’est
dendritiques et sont acheminés vivants vers leurs futures manifestement pas un moyen de protection suffisant pour
victimes, les CD4. Ces derniers, censés protéger notre orga- arrêter la maladie. Dans ce contexte, un gel protecteur
nisme, deviennent le lieu de prolifération du VIH qui peut constituerait une arme supplémentaire dans la lutte
commencer l’infection proprement dite. Notre travail vise contre le sida. Par ailleurs, un tel produit aurait l’avantage
à comprendre les mécanismes de contact et de transfert de pouvoir être utilisé par les femmes, qui contrôleraient
des virus entre les cellules dendritiques et les CD4, ce que ainsi elles-mêmes leur protection. Il est utile de savoir que
nous appelons les «synapses infectieuses». Cela fait la plupart des victimes du sida sont des femmes ayant eu
quelques années que les chercheurs étudient le passage du des rapports avec des hommes séropositifs. Il est donc par-
VIH au travers de la muqueuse. Mais cela demeure un ticulièrement urgent de mettre à leur disposition un
domaine largement méconnu. moyen de se protéger.
Si l’on contracte le sida, c’est parce que la muqueuse, notre Vos recherches pourraient-elles s’appliquer à d’autres
premier système de protection, est inapte à arrêter le virus? agents infectieux?
> En réalité, la muqueuse est sans doute extrêmement per- > Oui, il existe d’autres virus qui empruntent le même che-
formante, mais même une efficacité de 99,99% n’est pas minement via les cellules dendritiques que le virus du sida,
suffisante pour arrêter le virus. Il faut du 100% pour empê- notamment le virus Ebola, celui de l’hépatite C et peut-être
cher l’infection. Toutefois, c’est durant le passage au tra- certaines bactéries. I
vers de la muqueuse que le VIH est le plus vulnérable puis-
qu’il n’a pas encore commencé à se répliquer. Un point Propos recueillis par Anton Vos
faible que l’on doit pouvoir exploiter. Nous espérons donc www.hfsp.org
Campus N° 82
sommaire > octobre-novembre 2006
RECHERCHE
4 > Droit
Avec l’apparition des tribunaux modernes entre le XVe et le XVIe
siècle, se développe une iconographie pensée pour renforcer
la légitimité de l’institution judiciaire naissante. Explications
du pénaliste Christian-Nils Robert
6 > Neurosciences
L’Ecole de traduction et d’interprétation s’est associée à la Faculté
de médecine dans le cadre d’une étude visant à mieux compren-
dre le fonctionnement du cerveau des personnes bilingues
8 > Géographie
Les lignes de démarcation qui partagent le Moyen-Orient RENDEZ-VOUS
n’apparaissent pas toutes sur les cartes de géographie.
32 > L’invité
Explications dans le dernier numéro de la revue «a contrario»
«Le choc des civilisations a lieu dans les sociétés, pas entre elles»,
9 > Sciences politiques estime Baber Johansen, titulaire de la chaire «Islamic Religious
Les indicateurs socio-structurels traditionnels servant à décrypter Studies» à la Harvard Divinity School et spécialiste de l’histoire
les comportements politiques ne sont plus adaptés à la réalité du religieuse et politique dans l’Islam
marché du travail. Daniel Oesch, maître assistant au Laboratoire
34 > Extra-muros
de recherches sociales et politiques appliquées, a développé
Une espèce de lichen observée à Genève pour la dernière fois au
une nouvelle grille d’analyse
Vengeron au XIXe siècle a refait surface au Bois de la Grille à Vernier.
10 > Mathématiques Philippe Clerc, conservateur aux Conservatoire et Jardin botaniques
Des physiciens et des linguistes font appel à l’algèbre linéaire de la Ville de Genève, raconte sa découverte
pour analyser la structure d’œuvres littéraires comme «Moby 36 > Parcours
Dick» ou «Hamlet». Petit voyage lettré dans les espaces vectoriels Un nouveau baccalauréat universitaire, deux instituts prestigieux
en compagnie du professeur Jean-Pierre Eckmann qui fusionnent, un réseau d’études qui se met en place: les études
internationales se réorganisent à tous les niveaux. Présentation
38 > Etudiants
12 – 29 De retour du Tour de France à la voile, Sylvain Wenger fait escale à
Genève pour sa rentrée universitaire. Etudiant en maîtrise de globali-
DOSSIER sation et régulation sociale, le marin a des rêves de grand large, mais
les pieds sur terre. Rencontre
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droit
DR
«Suzanne et les vieillards» (détail), par Humbert Mareschet, 1756, Salle du tribunal, Payerne.
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Dieu est juge, juge est
puissance économique nécessaire à cette
Avec l’apparition des tribunaux modernes entre le entreprise. Loin de prétendre à l’exhaus-
XVe et le XVIe siècle, se développe une iconographie tivité – les experts estiment de toute
façon que seuls 2% environ des œuvres
pensée pour renforcer la légitimité de l’institution originales de cette époque sont parvenus
judiciaire naissante. Explication du pénaliste jusqu’à nous –, Christian-Nils Robert a
toutefois choisi de concentrer ses efforts
Christian-Nils Robert sur une dizaine d’exemples embléma-
tiques parmi lesquels deux toiles
«D is papa, pourquoi la justice a-t-elle les légitimité. Qu’on ne s’y trompe pas inédites découvertes à Payerne (lire ci-
yeux bandés?» Pour répondre à cette inter- cependant: le message, souvent d’une contre).
rogation, sortie de la bouche d’une violence extrême, s’adressait au moins
fillette de 8 ans au cours d’une prome- autant aux justiciables qu’aux magis- De la Bible au prétoire
nade dans les rues de Berne, Christian- trats. «La période considérée coïncide avec la mise
Nils Robert, professeur au Département Les représentations de la justice étant en place de l’institution judiciaire moderne,
de droit pénal, a longtemps étudié les rarissimes dans les tribunaux des royau- explique le professeur. Au temps des cathé-
représentations allégoriques de la justice tés, c’est dans les villes du cœur de drales succède le temps de l’hôtel de ville.
et en particulier la statuaire destinée à l’Europe (Hanse, les Flandres, villes d’em- L’institution qui se met en place ne rompt
l’espace public. Pris au jeu, le pénaliste a pire, cités confédérées, Bourgogne, Italie cependant pas tous les liens avec la justice de
récemment choisi de pousser la porte du Nord) que Christian-Nils Robert s’est Dieu. Pour renforcer sa légitimité, elle puise
des hôtels de ville pour ausculter le décor efforcé de dénicher toiles et autres pan- en effet abondamment dans la symbolique
des salles de tribunaux. Illustré avec le neaux peints. Autant de régions caracté- religieuse et en particulier dans l’iconogra-
plus grand soin, La Justice dans ses décors risées par l’existence d’une bourgeoisie phie sacrée.» Une stratégie qui se com-
montre comment la justice laïque s’est importante cherchant à affirmer un pou- prend aisément puisque l’image reste le
appuyée sur des références empruntées à voir urbain autonome et à laïciser l’insti- principal moyen de communication à
la religion pour asseoir sa puissance et sa tution judiciaire, tout en disposant de la une époque où le livre imprimé est
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droit
Dieu
s’ils devaient faillir à leur mission. par Christian-Nils Robert, Droz, 110 p.
Fortement moralisatrices, parfois anxio-
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neurosciences
Le bilinguisme à
des neurosciences
Une collaboration interdisciplinaire entre une professeure de l’ETI et un cher-
cheur de la Faculté de médecine vise à comprendre le cerveau des personnes
maîtrisant deux langues. Présentation
Plus de la moitié des habitants de la dernières années établir que les langues pour des recherches interdisciplinaires.
planète parle au moins deux langues, sont représentées de manière superpo- Caroline Lehr, de l’Unité d’allemand, a
selon des estimations de l’Unesco. Le sée dans le cerveau, et non à des ainsi pu collaborer avec les neurologues
phénomène du bilinguisme a pris ces endroits différents. pour son mémoire de licence sur un
dernières décennies une ampleur sans sujet de nature psycholinguistique. Son
précédent en raison du développement Implications thérapeutiques travail, mené sous la direction scienti-
des moyens de communication et aux C’est en partant de ce constat que Jean- fique du Dr Asaïd Khateb, a porté sur les
échanges interculturels. Une collabora- Marie Annoni, également chargé de «effets d’amorçage» sémantique inter
6
tion entre les docteurs Jean-Marie cours à la Faculté de médecine, et Asaïd langue dans une population de traduc-
Annoni et Asaïd Khateb, de l’Unité de Khateb ont cherché à comprendre les teurs et sur leurs implications didac-
neuropsychologie aux Hôpitaux univer- mécanismes qui permettent au cerveau tiques.
sitaires de Genève, et Hannelore Lee- de faire la distinction entre une langue
Jahnke, professeure à l’Unité d’alle- et l’autre et, plus particulièrement, de Solidarité entre les langues
mand de l’Ecole de traduction et d’in- déterminer si ce système de contrôle lin- Par «effets d’amorçage», il faut com-
terprétation (ETI), a ouvert la voie à des guistique est lui-même de nature langa- prendre des phénomènes liés à l’identi-
recherches dans ce domaine interdisci- gière ou purement cognitif. Cette ques- fication du contenu des mots, lors-
plinaire. Recherches dont les résultats tion n’a pas que des
ont fait l’objet d’une présentation, le implications pour la
13septembre dernier, à l’occasion de la connaissance fonda-
18e Conférence annuelle de l’EAIE
(European Association for International
mentale. Elle inté-
resse aussi les théra-
Un individu bilingue identifie
Education).
Toutes sortes de débats de société tour-
peutes. «S’il s’avère que
le système de contrôle
plus rapidement le contenu
nent actuellement autour du bilin-
guisme (ou du plurilinguisme). Il y va de
linguistique n’est pas
lui-même uniquement
d’un mot lorsqu’il vient d’être
la défense du pluralisme et de l’adapta-
tion à la société globale du XXIe siècle.
de nature langagière,
ce que tendent à mon-
utilisé dans une autre langue
Selon certains, les personnes bilingues trer nos recherches,
feraient preuve de capacités mentales explique Jean-Marie
supérieures à la moyenne. Pour Annoni, cela ouvre de
d’autres, l’apprentissage de plusieurs nouvelles perspectives pour le traitement des qu’une personne passe d’une langue à
langues aux enfants leur serait préjudi- troubles de l’élocution comme l’aphasie.» une autre: dans le cas d’un individu
ciable. Aujourd’hui, les scientifiques Pour mener à bien ces travaux, les neu- bilingue, le contenu du mot d’une
sont en mesure d’apporter des éléments rologues ont fait appel à l’expertise de langue sera identifié plus rapidement
de réponse à ces questions. Grâce aux l’ETI en matière de méthodes d’analyse lorsqu’il vient d’être utilisé dans une
progrès de l’imagerie fonctionnelle, qui de compétences linguistiques et de tech- autre langue. Ce phénomène suggère
permet d’établir des corrélations entre niques de traduction. De son côté, notamment que la représentation des
l’activité cérébrale et les états mentaux, l’Ecole de traduction et d’interprétation contenus dans le cerveau n’est pas
la recherche en neurosciences a pu ces tire profit des travaux en neurologie dupliquée pour chaque langue, mais
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neurosciences
Etude de cas
ANTON VOS
l’Unité d’allemand de l’ETI: celui d’une
commune du Jura bernois où réside
une importante minorité alémanique,
soit les aléas d’une majorité linguis-
tique au niveau national faisant
l’expérience du statut minoritaire…
Prêles est située dans le district de La
Neuveville. Sur ses 830 habitants, 127,
soit 15%, parlent schwizerdütsch. Une
immigration relativement récente, liée
pour beaucoup à la présence sur
la commune d’un foyer d’éducation
tenu par le canton de Berne.
Le travail de Nadja Meister a consisté
à dresser le tableau de la situation
des germanophones et la perception
qu’ils ont de leur position minoritaire.
Pour cela, elle a envoyé un question-
naire aux habitants de langue alle-
mande. Avec un taux de retour de près
de 50%, ce questionnaire a montré
7
l’intérêt des habitants pour les ques-
tions liées au bilinguisme.
Dans son mémoire, Nadja Meister
s’est également penchée sur les
aspects juridiques du bilinguisme en
Suisse. Prêles se trouvant dans un dis-
trict monolingue (contrairement à
Bienne, seul district bilingue du can-
Grâce aux progrès de l’imagerie fonctionnelle, on sait désormais que les langues ton), l’usage exclusif du français pré-
sont représentées de manière superposée dans le cerveau, et non à des endroits différents.
vaut dans l’administration commu-
nale. Les germanophones reçoivent
qu’il s’agit d’un système unique, quelle pauses jouent un rôle capital pour la qualité toutefois leur matériel de vote en alle-
que soit la langue employée. de la traduction. Durant ces moments, le cer- mand, et, au gré de la bonne volonté
«Notre intérêt dans ces travaux est égale- veau est très actif et a recours à des connais- des employés communaux, ceux-ci
répondent parfois en allemand aux
ment d’améliorer la méthode didactique en sances antérieures qui aident à inférer et de
lettres officielles qui leur sont adres-
traduction pour nos étudiants, précise ce fait à produire une meilleure traduction.» sées dans la langue de Goethe.
Hannelore Lee-Jahnke. Le but étant qu’ils La 18e Conférence de l’EAIE, qui a eu lieu Enfin, cette étude fait ressortir des élé-
augmentent leurs performances, notam- à Bâle du 13 au 16 septembre 2006, et ments plus subjectifs. Une majorité
ment en termes de vitesse et qualité. Les qui vise à encourager les collaborations des germanophones estiment ainsi
résultats intermédiaires que nous avions internationales entre établissements que c’est à eux de faire l’effort de com-
obtenus il y a deux ans, ainsi que ceux du d’éducation supérieure, a donné l’occa- muniquer en français. Par ailleurs,
travail de Caroline Lehr nous fournissent sion à ses membres de découvrir les la langue n’est pas perçue comme
déjà quelques indices. Ils montrent notam- recherches que Jean-Marie Annoni et un facteur décisif dans les relations
ment que les traducteurs débutants tra- Asaïd Khateb ont menées avec humaines. Ce sont les affinités
personnelles qui priment.
vaillent plus vite, mais moins bien, car Hannelore Lee-Jahnke. I
Ces résultats ont suscité l’intérêt de
inconscients des failles du texte de départ, la commune de Prêles qui pourrait
tandis que les traducteurs expérimentés Jacques Erard les utiliser pour améliorer sa politique
prennent davantage de temps, mais effec- d’intégration. Une jolie récompense
tuent un meilleur travail parce qu’ils arri- www.eaie.org/basel/ pour le travail de cette étudiante
www.medecine.unige.ch/
vent mieux à faire l’exégèse du “vouloir dire” www.unige.ch/eti/
qui pourrait ainsi avoir valeur d’utilité
du texte de départ et ont développé des auto- www.cepes.ro/hed/policy/bilingual_universities/ publique. J.Ed
matismes. Il s’avère également que les Sadlak.htm http://www.preles.ch/
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géographie
Repenser la frontière
qui ont été analysés par Mohammed-
Les lignes de démarcation qui partagent le Moyen- Mahmoud Mohamedou. Formant une
Orient n’apparaissent pas toutes sur les cartes communauté qui transcende les identi-
tés nationales ou régionales, l’organisa-
de géographie. Explications dans le dernier numéro tion chapeautée par Ben Laden échappe
de la revue «a contrario» à toute définition d’ordre juridique, si
bien qu’il est difficile d’en définir les
L es atlas ne disent pas tout. Nombre de Irène Maffi montre ainsi comment la contours. Refusant d’opérer une dis-
frontières, qu’elles soient symboliques, manipulation des manuels scolaires par tinction entre civils et militaires, Al-
psychologiques, identitaires ou cultu- le pouvoir jordanien a permis d’entrete- Qaïda réduit à néant l’écart entre ce qui
relles, ne figurent en effet sur aucune nir l’illusion que les frontières poli- se fait et ce qui ne se fait pas en temps
carte. Et c’est particulièrement vrai au tiques du pays recouvraient une histoire de guerre, créant ce que l’auteur appelle
Moyen-Orient, région qui a vu se super- et une identité communes. Ce, alors que «une guerre non linéaire». Enfin, si l’or-
poser au découpage politique mis en dans les faits, l’Etat hachémite a été éta- ganisation nie la légitimité des fron-
place sur les décombres de l’Empire bli par les puissances coloniales sur un tières traditionnelles, elle a donné une
Ottoman des clivages d’un genre nou- territoire sans unité politique et habité force nouvelle aux clivages symboliques
veau durant les dernières décennies. par une population hétérogène. que sont la religion, la culture ou le
Mettre en évidence ces lignes de frac- degré de prospérité.
tures souvent souterraines, questionner
la façon courante de concevoir la fron- La nouvelle donne américaine
tière, confronter réalité du terrain et Dans le camp opposé, la politique
approche théorique, tel est le pro- menée par George W. Bush et ses
8
gramme de la dernière livraison de la conseillers depuis le 11 septembre 2001
revue «a contrario». a, elle aussi, contribué à chambouler le
Un numéro réalisé sous la direction de profil de la région. N’hésitant plus à
Riccardo Bocco et de Daniel Meier – res- faire l’amalgame entre la nature auto-
pectivement professeur et assistant de cratique d’un régime, le terrorisme et la
sociologie politique à l’Institut universi- prolifération des armes de destruction
taire d’études du développement – avec massive, l’administration américaine
le concours d’une dizaine de chercheurs est parvenue à imposer au Moyen-Orient
venus d’horizons scientifiques très un modèle proche de celui que connaît
divers, mais possédant tous une excel- l’Amérique latine depuis des décennies.
lente connaissance du terrain moyen- Système qui se caractérise par l’omni-
oriental. présence d’une grande puissance tuté-
laire (Etats-Unis) définissant selon ses
DR
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sciences politiques
Pour les spécialistes de la publicité, la le prolétariat industriel – essentiellement côté, les organisations syndicales n’ont
ménagère de moins de 50 ans est l’in- composé de travailleurs manuels – forme le que peu d’emprise sur les travailleurs
carnation du consommateur lambda. La bas de l’échelle et vote à gauche, tandis que les peu qualifiés du tertiaire. Quant à l’in-
réalité est hélas plus complexe que ne le employés des services sont rangés en bloc fluence politique, les classes situées au
voudraient les marchands de poudre à parmi les classes moyennes et penchent plutôt bas de l’échelle sociale sont fortement
lessive. Comme le démontre Daniel à droite, explique le politologue. C’était sous-représentées dans l’électorat. Parce
Oesch, maître assistant au Laboratoire peut-être vrai il y à trente ans, mais aujour- que composées soit de citoyens étrangers
de recherches sociales et politiques d’hui, à la suite de l’effondrement du monde qui ne peuvent voter, soit de citoyens
appliquées dans un récent ouvrage*, il ouvrier, de l’explosion des services, de la fémi- indigènes peu formés qui sont plus
est de plus en plus difficile de se faire nisation de l’emploi et de l’allongement de la enclins à rester loin des urnes.
Travailleur,
une image claire de la façon dont nos
sociétés sont stratifiées. Suite aux pro-
fondes mutations qu’a connues le mar-
ché du travail durant ces dernières
qui es-tu?
formation, la population active présente un La grille d’analyse développée par
9
décennies, le traditionnel clivage de tout autre visage.» Daniel Oesch met également en évi-
classe entre travailleurs manuels et non Dans les quatre pays considérés, les tra- dence la grande hétérogénéité des
manuels ne fait plus sens. Conséquence: vaux de Daniel Oesch montrent qu’un classes moyennes, qui apparaissent
il est devenu tout aussi ardu de prévoir des clivages dominants est lié au genre: comme un conglomérat réunissant des
qui va acheter quel type de voiture que aux hommes les postes fixes à durée groupes sociaux occupant des positions
de déterminer pourquoi telle frange de indéterminée, aux femmes les emplois très diverses sur le marché du travail.
la population adopte telle préférence intermittents et exigeant peu de qualifi- «L’activité d’une enseignante, d’un tra-
politique. Afin d’y voir plus clair, Daniel cations. Des mandats localisés majoritai- vailleur social ou d’une infirmière repose
rement dans le secteur essentiellement sur des relations interper-
de la vente ou des ser- sonnelles, explique le chercheur. En
vices personnels, qui contraste, un manager ou un cadre privilé-
«Les mécanismes institution- sont aussi les moins giera l’aspect organisationnel: budget équi-
avantageux en termes de libré et hiérarchie respectée. Ces différentes
nels ne sont pas adaptés à revenus, de promotion logiques de travail recoupent des préférences
et de couverture sociale. politiques marquées.» Les professions
la protection des individus «Dans une démocratie, sociales et culturelles soutiennent ainsi
l’Etat, les syndicats et les fortement la gauche, tandis que les ges-
les plus vulnérables» droits politiques sont censés tionnaires votent pour la droite. A un
limiter les inégalités géné- niveau hiérarchique plus bas, les petits
rées par le système écono- indépendants préfèrent les partis
mique, explique Daniel conservateurs, tandis que les ouvriers
Oesch a développé une grille d’analyse Oesch. Or, dans des pays tels que l’Allemagne, de la production sont partagés entre les
reposant sur un critère vertical – le la Grande-Bretagne ou la Suisse, ces méca- socialistes, la droite populiste et l’abs-
degré d’avantage dans la relation du tra- nismes institutionnels ne sont pas adaptés à la tentionnisme. I
vail – et un critère horizontal –, la protection des individus qui sont aujourd’hui
logique du travail. Un outil conceptuel les plus vulnérables.» L’Etat social, pensé sur Vincent Monnet
dont il a examiné la pertinence empi- le modèle de l’emploi masculin à plein
rique pour l’Allemagne, la Grande- temps, peine à répondre aux défis posés * «Redrawing the Class Map. Stratification
and Institutions in Britain, Germany,
Bretagne, la Suède et la Suisse. par la féminisation du travail, le déve- Sweden and Switzerland», par Daniel Oesch,
«La plupart des analyses portant sur la stra- loppement du temps partiel, les carrières Ed. Palgrave MacMillan, 257 p.
tification des salariés reposent sur l’idée que interrompues ou les bas salaires. De leur
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mathématiques
Comment un texte peut-il traduire ont réf léchi à ces problèmes il y a long- une coordonnée. Cet espace a donc
une pensée? Autrement dit, n’est-il pas temps déjà, explique Jean-Pierre autant de dimensions qu’il y a de
curieux que l’on puisse réduire à une Eckmann. Bolzano a écrit en 1837 qu’un termes différents dans un livre (sont
séquence de mots unidimensionnelle texte scientifique, pour être intelligible, exclus les conjonctions, prépositions et
les idées complexes, profondes et intri- doit avoir une structure hiérarchique en autres petits mots sans signification
quées que peut générer le cerveau paragraphes, sections, chapitres, etc. intrinsèque), c’est-à-dire plusieurs cen-
humain? La difficulté de cet exercice se Ingarden évoque lui aussi des “unités struc- taines de milliers parfois. Pour simpli-
reconnaît par le fait que celui qui lit un turelles” et des “couches de compréhen- fier un peu, seuls les mots apparaissant
texte ne comprend pas toujours correc- sion”. Selon le point de vue du philosophe, à une fréquence considérée comme
tement ce que l’auteur a voulu dire. Il le cerveau parviendrait ainsi à comprimer minimale ont été conservés, réduisant
est même considéré comme un art des parties du texte pour en faciliter la ainsi drastiquement le nombre de
majeur que de savoir coucher par écrit mémorisation et les restituer plus loin dans dimensions.
ses idées de manière intelligible par la lecture. Une manière de rendre une pro-
tout le monde. fondeur à un discours forcément recti- «Fenêtre d’attention»
ligne.» L’étape suivante a consisté à définir
10
Mémorisation facilitée Jean-Pierre Eckmann et ses collègues une «fenêtre d’attention» longue de
Dans un article paru dans la revue ont approché le problème de manière 200 mots qui correspond à la longueur
Proceedings of the National Academy of moins empirique, comme le feraient de texte que le cerveau garde en
Sciences du 23 mai, une brochette de des physiciens devant un phénomène «mémoire vive» au cours de la lecture.
physiciens et de linguistes a fait appel naturel. Pour eux, un texte représente Avec les termes contenus dans cet
aux mathématiques pour tenter d’y un ensemble de mots, extraits de la intervalle, les chercheurs ont défini un
voir plus clair dans cette faculté mysté- totalité des mots existants dans une vecteur désignant un point dans l’es-
rieuse du langage. Jean-Pierre langue donnée
Eckmann, professeur au Département (anglaise en l’occur-
de physique théorique et à la Section rence), agencés
de mathématiques, et ses collègues
israéliens, espagnols et allemands ont
selon une logique
qu’il convient de
Il est désormais possible de
développé un algorithme capable
d’analyser objectivement la composi-
découvrir.
méthode d’investiga-
La
manipuler les textes comme
tion d’un texte afin d’en discerner les
ficelles sous-jacentes. Il en ressort que
tion qu’ils ont déve-
loppée fait appel aux
des objets géométriques
le découpage d’un ouvrage en sections, notions de l’algèbre
chapitres et paragraphes distincts favo- linéaire (espace à
rise des corrélations de longue durée plusieurs dimen-
entre des ensembles de mots, eux- sions, vecteurs, matrices, valeurs pace décrit plus haut. Au cours de la
mêmes définissant une idée ou un propres, etc.). Les œuvres étudiées, lecture, les composants de la «fenêtre
concept précis. Une telle disposition elles, ont été choisies pour leur capa- d’attention» se modifient au fur et à
faciliterait la mémorisation de certains cité reconnue à transmettre des idées mesure qu’elle glisse le long du texte.
passages et leur rappel plus loin dans la de manière claire. Il y en a douze, dont Du coup, le vecteur correspondant
lecture lorsque c’est nécessaire. Ce Moby Dick de Herman Melville, Les entame une promenade dans l’espace
résultat confirme les hypothèses Aventures de Tom Sawyer de Mark Twain, des mots pour décrire une trajectoire
posées bien avant eux par les linguistes Hamlet de William Shakespeare ou propre à l’œuvre étudiée.
et les philosophes. Ils leur offrent du encore La Théorie de la relativité restreinte Possédant un espace bien défini et un
même coup une base formelle et quan- et générale d’Albert Einstein. vecteur évoluant au cours du temps en
titative qui leur manquait jusque-là. Les chercheurs ont travaillé à l’inté- fonction de la progression du texte, les
«Des penseurs comme le Polonais Roman rieur d’un espace mathématique dans chercheurs ont dès lors tout loisir d’ap-
Ingarden et le Tchèque Bernard Bolzano lequel chaque mot utilisé représente pliquer la panoplie des opérations four-
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mathématiques
11
pour cachalot), bateau, cri, aye taient identiques même en changeant
(forme anglaise pour dire oui), de manière aléatoire la place des mots
Stubb (second compagnon à l’intérieur des paragraphes, tout en
d’Achab), sir et Léviathan. Les laissant ces derniers dans le même
trois vecteurs suivants sont simi- ordre. D’où la conclusion de l’impor-
laires avec l’apparition de tance du découpage d’un texte pour
quelques nouveaux mots comme améliorer sa compréhension.
blanc, requin, capitaine et «Nous commençons à comprendre de
navire. Le cinquième, lui, manière quantitative à quel point la struc-
indique brusquement une scène ture d’un texte est utile pour le rendre intel-
précise, qui se déroule à l’inté- ligible, estime Jean-Pierre Eckmann. Et
rieur d’une chambre: lit, il nous semble qu’un bon texte fait juste-
chambre, Queequeg, dat (forme ment un usage efficient des techniques per-
nie par l’algèbre linéaire. En d’autres populaire pour that), aye, porte, Moby, mettant de mémoriser ses différentes par-
termes, il est désormais possible de Dick, propriétaire, Achab. ties. Certes, ces découvertes ont été réalisées
manipuler les textes comme des objets avant nous par les linguistes, mais nous
géométriques. Pour les auteurs, le vec- «Quantifier des intuitions avons trouvé une méthode pour quantifier
teur représente à chaque moment un philosophiques» leurs intuitions philosophiques et pour les
concept, une idée contenue dans le L’étape suivante a consisté en une ana- connecter avec le peu que nous savons sur le
texte. Ils ont donc analysé les direc- lyse dynamique du vecteur. Lorsque ce fonctionnement du cerveau. C’est cette ten-
tions principales que ce vecteur visite dernier pointe dans une région de l’es- sion entre les mathématiques et des disci-
lors de sa promenade à travers le texte pace des mots, par exemple, combien plines qui n’ont à première vue aucun lien
– certaines orientations s’avèrent en de temps lui faut-il pour la quitter? avec elles qui me passionne. J’espère que
effet plus importantes que d’autres – et Autrement dit, il s’agit de mesurer la d’autres recherches comme la nôtre aide-
en ont déterminé les «valeurs propres». corrélation entre les mots, une gran- ront à clarifier la nature intrigante du cer-
Pour le roman Moby Dick, par exemple, deur essentielle dans la compréhen- veau et de la communication humaine.» I
les principales composantes du vecteur sion du fonctionnement du langage.
le «plus important» fournissent immé- Dans les ouvrages étudiés, les cher- Anton Vos
diatement la trame de l’histoire: cheurs ont remarqué que cette corréla-
baleine, Achab, Starbuck (premier com- tion diminue très lentement. Ils ont
pagnon d’Achab), sperm (nom anglais également observé que les résultats res-
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français
Le français tire la
Le moins que l’on puisse attendre d’une personne diplômée
de l’Université est qu’elle s’exprime dans un français correct,
oralement comme par écrit. Depuis quelques années pour-
tant, cette condition ne semble plus être pleinement rem-
plie par un nombre croissant d’étudiants, y compris en
Faculté des lettres. Les résultats de l’étude PISA montrent
qu’il en va de même au niveau secondaire puisqu’à Genève,
20% des élèves de 9e année connaissent de grandes difficul-
tés lorsqu’ils sont confrontés à l’écrit. La tendance se
confirme également au niveau national pour ce qui est des
adultes, les derniers chiffres publiés par l’Office fédéral de la
statistique faisant état de 800 000 personnes (soit 16% de
la population) éprouvant d’importants problèmes de com-
préhension lorsqu’ils sont confrontés à un texte de niveau
rudimentaire.
Inquiétant pour l’institution académique qui forme en par-
tie le corps enseignant, ce constat est également préoccu-
pant pour l’ensemble de la société. S’exprimer avec moins
d’aisance, c’est en effet prendre le risque de ne plus être
compris et par conséquent de ne plus être à même de com-
muniquer convenablement avec ses concitoyens. Sans
compter qu’un mauvais apprentissage (ou enseignement)
du français diminue les chances des plus défavorisés d’em-
prunter l’ascenseur social. D’un point de vue économique, la
situation n’est pas plus rassurante, puisqu’on risque à terme
de voir se développer des filières privées capables de
répondre aux attentes des entreprises, mais qui seront très
certainement moins démocratiques. Enquête au sein du
12 Département de français, à l’heure où une réforme de la for-
mation des enseignants du secondaire, qui entrera en
vigueur à la rentrée 2007 ou 2008, se profile à l’horizon.
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français
langue
> Difficultés grammaticales, lexique
restreint, mauvaise maîtrise de
la conjugaison sont les symptômes
d’un mal qui met en danger la capa-
cité de chacun à communiquer, mais
aussi à conceptualiser le monde
> L’apprentissage du français à
l’école primaire est-il satisfaisant?
Les points de vue des différents
acteurs impliqués dans l’instruction
des enfants
> Le français vient du latin et
les grammairiens du passé ont
inscrit cette filiation dans la graphie.
Il en résulte l’orthographe relative-
ment complexe que l’on connaît
aujourd’hui
13
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français
Un jeune enseignant de français tons romands en matière de lecture et directeur du Département de linguis-
contraint à prendre des cours de rattra- de compréhension de texte. tique: «En termes de production, on ne voit
page à la Migros par le directeur de son «Il faut se garder de trop généraliser, pré- pas de choses épouvantables. Lorsqu’on
établissement; des banquiers qui se plai- vient Laurent Jenny, directeur du demande aux étudiants de rédiger un tra-
gnent du niveau d’expression déficient Département de français moderne. Il vail écrit à la maison, le résultat est articulé,
de leurs nouvelles recrues (par ailleurs existe une très grande inégalité de condition argumenté et relativement bien présenté. Ce
très compétentes sur le plan technique); parmi les étudiants de la Faculté des lettres. n’est pas n’importe quoi. En termes de com-
une difficulté croissante de la part des Des mordus de littérature, il y en a encore préhension, par contre, les résultats sont
étudiants non seulement à rédiger cor- chaque année. Et certains étudiants, arri- plutôt à la baisse. Les élèves du secondaire
rectement, mais aussi à repérer leurs vant avec un très petit bagage, parviennent ont en effet de plus en plus de peine à com-
erreurs: nombreux sont les indices lais- à le développer au fil de leurs études. Il y a prendre et à lire des textes que les généra-
sant à penser que la langue de Molière donc toujours de très bons étudiants qui sor- tions précédentes lisaient à l’âge de 12 ans.
est une richesse de moins en moins bien tent de la Faculté. Cependant, d’un point de La langue française, qui n’est pourtant pas
partagée. vue plus global, la baisse de niveau me si inaccessible, est devenue étrangère à beau-
En ce qui concerne Genève, cette hypo- paraît difficilement contestable. Dans leur coup d’entre eux.»
thèse a été confirmée par le premier grande majorité, les étudiants que nous
volet de l’étude PISA. Selon ses résultats, accueillons aujourd’hui ont un rapport très Une mécanique délicate
le canton se caractérise par des élèves scolaire au texte, ils éprouvent peu de curio- Plus concrètement, dans les copies cor-
ayant en moyenne des compétences sité envers ce qu’ils lisent et leur culture lit- rigées par les enseignants du
plus faibles, mais aussi des résultats téraire est souvent très mince.» Même son Département il est relativement fré-
plus dispersés que ceux des autres can- de cloche du côté de Jacques Moeschler, quent de croiser des pronoms ou des
propositions utilisés au petit bonheur,
des choix lexicaux aléatoires, une syn-
taxe très pauvre ou des constructions
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français
teur?
Département de littérature française vail est laissé à la La qualité de la relecture
moderne: «Les élèves sont de moins en machine. «Cette désin-
moins souvent amenés à réfléchir à ce qu’est volture est assez a également baissé puisque
la structure élémentaire d’une phrase. Faute récente, commente
de cette compréhension, ils éprouvent des Guy Poitry. Elle est le travail est laissé aux
difficultés croissantes à manier cette déli- gênante dans la
cate mécanique qu’est la langue française et mesure où un futur logiciels informatiques
à en imbriquer les différents éléments de professeur de français
façon intelligible.» devrait être capable de
se passer de ce genre
L’ordinateur: un faux ami d’outils, ou, dans le
Autre fait aggravant: l’usage de l’ordi- doute, de se référer à un bon dictionnaire.» vaient facilement trouver des «ponts»
nateur, qui permet, au travers des cor- En amont, le fait que la population pour communiquer avec ces élèves.
recteurs orthographiques et grammati- genevoise soit de plus en plus multicul- Aujourd’hui, la multiplication de
caux intégrés aux programmes de trai- turelle pose également un certain cultures extrêmement différentes au
tement de texte, de masquer certaines nombre de nouvelles difficultés au sein d’une même classe rend l’exercice
défaillances durant la première année niveau de l’enseignement obligatoire. Si plus ardu. «Ce type de situation pose des
d’études universitaires (la plupart des les populations italiennes, hispaniques problèmes nouveaux à l’Instruction
facultés n’exigent pas d’examen ou lusophones arrivées à partir des publique, explique Jacques Moeschler.
manuscrit avant la deuxième année). années 50 se sont très bien intégrées du Pourtant les concepts et les modèles géné-
La qualité de la relecture a également point de vue de la langue, cela tient en raux qui permettraient d’obtenir des résul-
pâti de cette évolution puisque le tra- partie au fait que les enseignants pou- tats plus probants existent. Et c’est à
nous, spécialistes de la langue, qu’il revient d’être fréquemment subvertie et détournée. les erreurs de syntaxe afin que l’élève puisse
de développer des outils ayant une validité Mais c’est aussi la façon la plus immédiate prendre la mesure de ses lacunes. C’est
scientifique incontestable et pouvant être de conceptualiser notre environnement. quelque chose qui ne va pas forcément de soi
transmis de manière relativement simple Personnellement, je ne suis pas un puriste. pour les nouveaux enseignants.»
aux enseignants. Tout bon physicien peut Les langues bougent que l’on en soit d’accord
aujourd’hui expliquer en une demi-heure la ou pas. Je ne suis donc pas choqué par l’idée Prise de conscience
théorie de la relativité d’Einstein à un qu’on puisse réformer quelques règles byzan- Autre exemple: jusqu’à une période très
enfant. De la même façon, au sein de notre tines ou trop complexes. Mais il ne faut pas récente, le seul examen durant lequel
Département, il y a une dizaine de per- faire abstraction de ce qui fait la richesse on évaluait le français était la disserta-
sonnes qui sont capables de faire com- expressive d’une langue. Abdiquer trop faci- tion, les autres épreuves étant davan-
prendre à n’importe qui pourquoi le fran- lement devant certaines difficultés, c’est tage destinées à évaluer le fond que la
çais est tel qu’il est et pas autrement.» accepter un appauvrissement de notre uni- forme. Par le jeu des moyennes, il était
Globalement, le constat est donc plutôt vers mental. Personne ne souffrira si l’on par ailleurs possible d’obtenir une
sévère. Mais, sachant qu’un étudiant qui parvient à simplifier l’accord des participes. demi-licence avec des notes de 1,5 ou 2
n’est pas bon en langue n’est pas auto- En revanche, la confusion du futur et du en dissertation, soit un niveau très net-
matiquement mauvais sur le plan de la conditionnel est le symptôme d’une défi- tement insuffisant pour de futurs ensei-
réflexion, faut-il réellement s’en inquié- cience grave dans nos capacités de concep- gnants de français. Pour couronner le
16 ter? La réponse ne fait guère de doute tualisation.» tout, il était impossible, même à un étu-
aux yeux des personnes interrogées. «Le Face à un danger qui semble de plus en diant qui le souhaitait, de repasser ces
rapport à la langue est un rapport com- plus réel, l’Université ne reste pas les examens pour corriger son niveau une
plexe, explique Laurent Jenny. Une bras ballants. En attendant l’entrée en fois la demi-licence obtenue. «Certains
langue, c’est en effet une loi, ce qui lui vaut vigueur d’une nouvelle formation desti- étudiants parvenaient à traverser toute leur
née aux enseignants scolarité en dissimulant leur handicap,
prévue pour 2007 (lire explique Guy Poitry. Mais nous avons pro-
en page 14), un certain gressivement pris conscience du problème et,
«Abdiquer trop facilement nombre de progrès ont dans le système de Bologne, on peut plus
déjà été réalisés. «Pour facilement faire barrage. On pourrait aller
devant certaines difficultés, ma part, explique plus loin en organisant un enseignement
Jacques Moeschler, j’ai propédeutique en début de cursus afin de
c’est accepter un appauvrisse- insisté auprès de mes assis- récapituler certains points essentiels, mais
tantes pour que leurs cor- nous n’en avons pas vraiment les moyens
ment de notre univers mental» rections ne négligent pas pour le moment, puisque le nombre de
la forme et qu’elles spéci- postes au sein du Département n’a cessé de
fient les fautes d’accord et se réduire ces dernières années.» I
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français
L a baisse du niveau de français est-elle A contrario, l’image est un médium qui tie n’est pas pour autant perdue selon
liée à une désaffection du livre? Pour la est clairement situé du côté du plaisir et Michel Jeanneret: «L’image est une dimen-
plupart des observateurs, il ne fait guère de l’instantanéité. Mais la médaille a son sion que nous avons trop longtemps négligée,
de doute que l’écrit ne tient plus dans revers. Les informations diffusées au tra- mais un gros effort d’adaptation est en cours,
nos sociétés le rôle fondamental qu’il a vers de la télévision, de la presse contem- dans le département, notamment grâce à
pu jouer durant des siècles comme véhi- poraine ou d’Internet demandent un l’enseignement du cinéma dans ses rapports
cule du savoir, comme patrimoine cultu- temps d’attention de plus en plus réduit. avec la littérature, assuré par Patrizia
rel et spirituel, mais aussi comme sup- Conséquence: lire un
port à l’imaginaire. «La pratique de la lec- ouvrage de bout en bout
ture tient un rôle fondamental dans l’ap- demande pour certains
prentissage d’une langue, explique Michel individus un effort de «L’image est une dimension
Jeanneret, ancien directeur du concentration qu’ils pei-
Département de littérature française nent à fournir sans exer- que nous avons trop
moderne. La proximité avec le texte met en cice préalable.
jeu un mécanisme qui permet d’intégrer les Le primat de la communi- longtemps négligée»
subtilités de la langue et de se familiariser cation rapide pousse par
véritablement avec elles.» ailleurs les enseignants
comme les médias à privi-
Un objet étranger légier des formulations
A l’évidence pourtant, les étudiants qui simples, des phrases courtes et des Lombardo et Laurent Darbellay. Après tout,
entrent aujourd’hui à l’université n’ont constructions qui finissent par devenir l’écrit et le visuel sont deux formes de langage
pas la même culture littéraire que leurs stéréotypées, sous prétexte de ne pas complémentaires.» Une assertion que
aînés. Ils ont peu fréquenté les classiques rebuter l’audience. «Ce qui fait l’intérêt confirme volontiers Laurent Jenny, après
et ne lisent guère pour des raisons récréa- d’un récit, c’est précisément le fait que l’on ne avoir consacré durant le semestre d’été
tives. «La plupart des enseignants continuent comprenne pas tout instantanément et que le 2006 un séminaire aux «mots dans l’art»
à considérer le livre comme allant de soi, lecteur se trouve incité à réfléchir, explique pour les besoins duquel il a utilisé de
ajoute le professeur. Mais, pour beaucoup Guy Poitry. Les romans de Jules Verne, par nombreux supports imagés (poèmes
17
de jeunes, c’est devenu un objet plus ou moins exemple, comportent des passages relative- visuels ou tableaux comprenant des
étranger.» ment complexes, ce qui n’a pas empêché des mots). «J’ai constaté une désinhibition de la
«Nous sommes sortis d’une culture du livre générations d’enfants de dévorer ses parole tout à fait étonnante de la part d’étu-
pour aller vers une culture de l’image, com- ouvrages.» diants que je connais bien et qui, la plupart
plète son collègue Laurent Jenny, direc- du temps, restent silencieux devant les textes,
teur du Département de français Un mal aux causes multiples explique le professeur. Dès qu’il s’agit de
moderne. A la fin du primaire, avec l’entrée Le problème, on le voit, dépasse de loin la commenter quelque chose qui relève de
au cycle d’orientation, on constate un effon- seule question de l’enseignement. C’est l’image, on a l’impression qu’ils sont libérés
drement de la lecture “spontanée”.» en effet l’évolution générale de nos socié- du poids dogmatique qu’ils attribuent au
Assimilé à un objet purement scolaire tés qui est ici en cause: prédominance de texte littéraire. Ce constat me laisse penser
par les élèves, le livre semble donc avoir la télé bien sûr, mais aussi éclatement que l’on aurait tout intérêt dès l’école à déve-
perdu sur les bancs de l’école l’essentiel des familles, précarisation des condi- lopper une approche plus globale de la lec-
de son attractivité. Et rares sont ceux tions de travail, manque de temps et de ture, qui, sans rien abdiquer de la précision
pour qui il est encore synonyme d’enri- ressources pour l’éducation des enfants, analytique, valorise la dimension culturelle
chissement, d’évasion, de compréhen- métissage croissant des populations… des textes, leur rapport aux autres arts et leur
sion de soi et de l’autre. Aussi sombre que soit le tableau, la par- signification historique.» I
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français
La langue, facteur
de discrimination
Selon Jacques Moeschler, professeur de linguistique, il faut relever le niveau
des exigences à l’école pour remettre en marche l’ascenseur social
Lorsqu’on voyage, le langage – même tant décrié par les pédagogues ces der- sente. La méthode syllabique, si démodée
approximatif – est souvent le meilleur nières décennies? Pour ce qui est de l’ap- soit-elle, a par contre l’avantage de res-
moyen d’intégration. Dans son propre prentissage du français, il semble difficile pecter scrupuleusement le processus de
pays, par contre, les lacunes expressives de passer totalement outre. Un enfant, en construction hiérarchique propre au lan-
se paient cher. Parler de manière confuse, effet, n’apprend pas vraiment la langue gage: des lettres formant des syllabes qui
manquer de vocabulaire, être incapable qu’il parle: il l’acquiert rapidement (vers à leur tour composent des mots, lesquels
de rédiger correctement ou de com- 3 ans en général), par le biais des stimuli permettent de bâtir une phrase, phrases
prendre un texte simple constituent sou- qui proviennent de son environnement qui, mises bout à bout, donnent un dis-
social et grâce à ses facul- cours. «Le problème des méthodes d’enseigne-
tés personnelles. A ment adoptées depuis une vingtaine d’an-
charge de l’école, nées, c’est qu’elles perturbent ce processus de
«Pour permettre au plus ensuite, de lui enseigner
un nouveau code: celui
composition qui est totalement organisé,
explique Jacques Moeschler. Ceci parce que
grand nombre de parvenir de l’écrit. «Pour fixer la
parole dans l’écriture, on est
l’on a cherché à calquer sur une question
pédagogique un certain nombre de sujets
à l’excellence, il faut relever forcé de se reposer sur une
série de conventions et de
vedettes dans le domaine de la recherche.
Mais le tri n’a pas été bien fait: des théories
le niveau des exigences» règles, commente Jacques
Moeschler. Celles-ci sont
séduisantes ont été exagérément complexi-
fiées, tandis que d’autres se voyaient vidées de
forcément complexes et, sous leur sens. Et le résultat, ce sont les inconsis-
de nombreux aspects, ne cor- tances que l’on constate aujourd’hui.» I
respondent pas à ce qu’un
vent un handicap rédhibitoire lorsqu’on enfant sait du langage oral: verbes
recherche un emploi. irréguliers, principes d’accord…»
Si l’école entend continuer à jouer le rôle Exemple: oralement, la langue
d’ascenseur social qui est le sien depuis la française peut marquer le plu-
révolution des systèmes pédagogiques du riel uniquement dans l’article.
début du XXe siècle, elle se doit donc de En revanche, lorsqu’on passe
18 permettre aux plus défavorisés de dépas- au mode écrit, le pluriel est
ser leur condition. «Pour permettre au plus indiqué à trois reprises: dans
grand nombre de parvenir à l’excellence, il n’y l’article, dans le nom et dans le
a pas trente-six façons de procéder, explique verbe (le garçon chante/les gar-
Jacques Moeschler, directeur du çons chantent). «Apprendre le
Département de linguistique. Il faut rele- français, comme toute autre
ver le niveau des exigences, afin que les élèves langue naturelle, c’est ça: montrer
qui sortent de l’école obligatoire ne puissent que le système écrit peut être redon-
plus être discriminés à cause d’un niveau de dant, arbitraire et complexe»,
français insuffisant.» poursuit le chercheur.
Renforcer la sélection permettrait par Face à ces contraintes, les
ailleurs de repérer plus tôt et plus effica- méthodes globales ou semi-glo-
cement les personnes souffrant d’un réel bales d’apprentissage de la lec-
handicap en français. En leur offrant des ture – qui fonctionnent par
appuis adaptés, on pourrait ainsi éviter analogie – peuvent entraîner
bien des dégâts à long terme. Faut-il dès des confusions entre le mot
lors revenir à l’apprentissage par cœur évoqué et la chose qu’il repré-
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français
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Personne ne conteste ce point: un élève tuées dans l’apprentissage des langues, nous leur scolarité. Faire lire ne suffit pas.» En
doit savoir lire et écrire en sortant de essayons de trouver un moyen d’assurer la attendant et dans le souci de mesurer
l’école obligatoire. Pour Thérèse réussite de tous les élèves. Et cela passe non les progrès des élèves en compréhension
Guerrier, à la tête de la direction de l’en- seulement par l’enseignement de la tech- orale et écrite (ainsi qu’en mathéma-
seignement primaire au sein du nique (déchiffrage, orthographe, gram- tiques), une épreuve cantonale a été
Département de l’instruction publique maire, vocabulaire et conjugaison), mais introduite il y a quelques années en fin
(DIP), c’est même la priorité. «Dans le aussi par la compréhension orale et écrite de 2e primaire. Dès la rentrée 2005, un
monde d’aujourd’hui, ne pas savoir lire ou des textes. Car c’est une chose que de maîtri- test équivalent a été organisé pour la
écrire convenablement le français mène à la ser le code de la langue, c’en est une autre première fois pour les élèves de fin de 4e.
marginalisation, à la mise à l’écart de la que de saisir l’information qui se cache dans «Comme il existe depuis longtemps une
société, estime-t-elle. Et c’est le rôle de un texte. Cette dimension, qui requiert des épreuve commune à la fin de la 6e, nous
l’école d’éviter que ce genre de scénario ne se capacités de synthèse et d’analyse, est pré- avons désormais un dispositif qui permet un
réalise.» sente dès l’école primaire.» suivi très fin des connaissances acquises tout
L’exigence que l’élève doit comprendre au long de l’école primaire, explique
Projet pilote ce qu’il lit n’est
Sur ce point-là, la situation actuelle à certes pas nouvelle,
Genève (qui n’est pas si différente que mais la tendance
dans les autres cantons alors que près de actuelle est d’y
40% des élèves n’ont pas le français apporter un soin tout
comme langue maternelle) ne serait ni particulier et, sur-
catastrophique ni totalement satisfai- tout, d’instaurer un
sante. Au DIP, on considère en effet «apprentissage conti-
qu’environ 12% des élèves quittent nué» de la lecture. Le
l’école primaire sans bien maîtriser la «plan lecture» du DIP
lecture. En fin de 2e primaire, 15% des prévoit en effet de
élèves n’atteignent pas les objectifs d’ap- poursuivre cet ensei-
prentissage en lecture. Moins d’un tiers gnement régulière-
rencontrent des difficultés à déchiffrer ment jusqu’à la fin
un texte. Les autres y parviennent, mais de la scolarité obliga-
ne comprennent pas tout ce qu’ils lisent. toire au lieu de l’ar-
20 Ce problème de compréhension lors de rêter après la
la lecture, qui se retrouve d’ailleurs dans deuxième primaire,
les degrés supérieurs et jusqu’à l’univer- comme c’était le cas
sité, est devenu la bête noire du DIP. Il jusqu’à maintenant.
s’agit de le réduire au minimum. C’est «Les enfants ont certes
dans cet esprit que le projet pilote à les capacités cognitives
l’école des Tattes (Onex), qui s’inscrit suffisantes pour maî-
dans un réseau prioritaire d’enseigne- triser la lecture dès 8 ou
ment, a été lancé à la rentrée 2006. 10 ans, mais leurs com-
Celui-ci devrait permettre de répondre pétences doivent encore
de manière encore plus efficace aux être largement perfec-
élèves en difficulté dans les quartiers tionnées par la suite,
populaires. précise la directrice.
«L’enseignement du français à l’école pri- Il est donc nécessaire de
maire s’est perfectionné ces dernières travailler systématique-
années, poursuit Thérèse Guerrier. En ment les techniques de
s’appuyant sur les dernières recherches effec- lecture tout au long de
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L’ARLE (Association refaire l’école) s’en prend vigoureuse- se débrouille pour se procurer du maté-
riel didactique. Ce qui va à l’encontre de
ment à la rénovation de l’enseignement primaire gene- l’enseignement harmonisé, tout récem-
vois entrée en vigueur en 1994. Elle aurait entraîné ment réclamé par le peuple en votation
populaire.
une baisse des exigences de l’école. L’apprentissage
du français, entre autres, en aurait fait les frais A propos de la lecture, qu’est-ce que la
méthode globale, ou semi-globale, et a-
t-elle été utilisée à Genève?
> André Duval: En ce qui concerne l’ap-
André Duval et Muriel Joyeux sont res- > Muriel Joyeux: En ce qui concerne le fran- prentissage de la lecture, chaque ensei-
pectivement président et membre du çais, la rénovation a été associée à de gnant est libre de choisir sa méthode
comité de l’ARLE. Ils sont tous les deux nombreuses directives du DIP. Dans l’en- depuis plus de deux décennies.
enseignants à l’école primaire. seignement de l’orthographe, il a ainsi Cependant, comme le montrent les deux
fallu renoncer à la dictée, pour ne pas manuels qu’il distribue, le DIP favorise
Qu’est-ce qui s’est passé avec l’enseigne- traumatiser les élèves. Les miens ont vite depuis de nombreuses années la
ment du français à l’école primaire gene- compris qu’il n’était plus nécessaire d’ap- méthode semi-globale. Celle-ci tente éga-
voise? prendre leur vocabulaire. Lorsque j’ai lement les nouveaux enseignants. Les
> André Duval: Dès le début des années remarqué cette dérive, j’ai réintroduit de anciens, eux, utilisent plutôt une
1980, un vent appelé socioconstructi- mon propre chef la récitation quoti- méthode alphabétique. En fait, l’école
visme a soufflé sur l’école genevoise. Ce dienne. Une autre directive a supprimé genevoise est depuis vingt ans un labora-
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n’est pas adéquate (85%). Le jugement porté sur
causes du mal? les buts des changements est dès lors majori-
tairement négatif puisque les répondants émet-
tent des doutes sur les effets plus immédiats
(87% d’entre eux adhèrent à l’affirmation selon
laquelle les changements montrent difficile-
contiennent mais sans hiérarchie des dif- d’autres dites en rénovation. Résultat ment leurs avantages), mais aussi sur les objec-
ficultés. Ayant pris l’habitude d’appré- brut: «Dans l’ensemble, les élèves des écoles en tifs à plus long terme des changements en cours
hender le mot globalement, l’enfant en rénovation obtiennent des résultats relative- (84% sont en désaccord avec l’affirmation selon
déchiffrera la première, voire les deux ment moins bons que ceux des élèves des écoles laquelle les changements permettront de
premières syllabes et devinera la fin. On qui ne sont pas en rénovation.» Très curieu- réduire l’échec scolaire).» Que dire de plus?
ne lui aura pas appris à lire systémati- sement, les auteurs du rapport précisent
quement et méthodiquement. Un tel «que la rénovation n’a pas comme objectif La rénovation n’a-t-elle pas amélioré les
élève a de fortes chances de mal maîtriser explicite une amélioration des acquis et com- taux de réussite en français et en mathé-
le code. La méthode alphabétique ou pho- pétences des élèves». Mais alors, pour quelle matiques?
nologique, quant à elle, part des lettres et mystérieuse raison l’avoir introduite? > André Duval: Des taux de réussite aussi
des sons. Elle associe phonèmes et gra- élevés que 85 ou 90% aux épreuves com-
23
phèmes en commençant par les sons les > André Duval: Il existe une autre étude, munes cantonales du DIP ne signifient
plus simples pour aller aux plus com- réalisée en 2003 par un organisme pas que tout va bien. C’est juste la consé-
plexes. On les associe pour fabriquer des neutre, érasm, mandaté par le DIP. Je cite quence de la baisse des exigences. Nous
syllabes puis des mots. Les textes se cor- une de leurs conclusions: «Près de neuf avons publié un rapport en 2002 dans
sent petit à petit. Une manière assez enseignants sur dix estiment que la mise en lequel nous démontrons ce phénomène.
logique d’apprendre à lire, me semble-t-il. œuvre des changements (la rénovation, ndlr) En étudiant les épreuves cantonales en
donne parfois l’impression que l’on navigue à mathématiques, nous avons découvert
La rénovation a-t-elle été évaluée? vue. Une forte majorité d’entre eux sont d’ac- que pour obtenir la note suffisante de 3
> Muriel Joyeux: Elle a été évaluée une cord avec les affirmations selon lesquelles les en 2002, un élève devait répondre correc-
seule fois par le Service de la recherche changements sont mal compris dans la popu- tement à 37% des questions par ailleurs
en éducation (SRED) du DIP. Le rapport, lation et qu’ils ont dévalorisé l’image de l’en- très peu exigeantes. Pour obtenir la
intitulé Le changement: un long fleuve tran- seignement (respectivement 91% et 70%). La même note en 1997, il fallait atteindre les
quille?, a été publié en 1999. Il compare – mise en œuvre des changements donne non seu- 48% de réponses justes, en 1990, 56% et
en 1re primaire puis en 3e – les compé- lement une impression de flottement, mais les en 1989, 62%. I
tences des élèves dans des classes ayant enseignants estiment aussi fortement que la
suivi un enseignement traditionnel avec manière de mettre en place les changements www.arle.ch/, www.geneve.ch/sred/, www.erasm.ch/
Pierre * sont perdus, que la situation est ingé- voir de l’enseignant. Cette méthode per-
En fin d’études rable et qu’à la fin de l’année, ils ont met de changer de mode. L’élève n’est
«Le socioconstructivisme, c’est une l’impression de n’avoir pas avancé. plus dans l’obligation d’apprendre. Il
bonne chose. Il n’y a pas pire chose pour Certes, cela fonctionne pour certains apprend, mais sans en avoir l’impres-
des enfants que d’écouter passivement élèves, les plus doués, mais ce n’est pas sion. D’ailleurs, il vaut mieux qu’il ait
un enseignant durant huit heures par le cas de tout le monde. Notre rôle est envie de travailler que de l’y obliger.
jour. C’est un coup à vous dégoûter de la tout de même de les instruire. Les L’obligation n’a jamais payé.»
lecture. Il ne faut pas oublier que la enfants qui, après une journée d’école,
méthode socioconstructiviste consiste à se motivent encore tout seul à la mai- Charline *
travailler ensemble, à se motiver les uns son, ça n’existe pratiquement pas. Dans 2e année
et les autres, à apprendre sans en avoir les cours de la FPSE, on nous inculque «La FPSE propose une palette de
l’air. C’est beaucoup plus efficace que la insidieusement des méthodes de travail méthodes assez variée. Il n’existe pas
contrainte. Je comprends qu’une telle qui au premier abord ont l’air fantas- une pensée unique dans ce domaine.
méthode ne convienne pas à tous. tique et révolutionnaire. En réalité, cela Chaque professeur a sa vision des
Certains élèves ont besoin d’être sans ne fonctionne pas comme prévu. Il est choses et ils ne sont pas tous d’accord
cesse poussés à faire leurs devoirs, mais totalement utopique de laisser à l’élève entre eux. Quant aux élèves qui sortent
il faut penser aussi à tous ceux pour qui la responsabilité de gérer son travail et de l’école sans savoir lire et écrire cor-
l’ancienne méthode ne fonctionnait son temps. Un enfant a besoin de règles, rectement, c’est un problème qui a tou-
pas. Cela dit, je vais bientôt enseigner et de savoir où il va.» jours existé. Il est possible que les ensei-
mon objectif est de m’adapter à mes gnants qui sortent de la FPSE ne soient
élèves, de tenir compte des besoins indi- Henri * pas tous excellents et que cela puisse
viduels de chacun.» 2e année dans certains cas jouer un rôle. Mais il y
«La méthode globale me paraît la plus a d’autres facteurs, comme l’environne-
Kevin * adaptée. Aujourd’hui, les élèves appren- ment familial, que l’on ne peut pas
Nouvel enseignant en primaire nent tout seul par des jeux ou des petits négliger.» I
«Il ne me semble pas que la Faculté de ateliers didactiques, spécialement *Prénoms fictifs
psychologie et des sciences de l’éduca- conçus pour qu’ils assimi-
tion (FPSE) impose une méthode. Tout lent les connaissances.
au plus en favorise-t-elle une plutôt Ils reçoivent par
24 qu’une autre. De toute façon, une fois exemple un programme
en classe, l’enseignant a le pouvoir d’ap- hebdomadaire pour dif-
pliquer la méthode qu’il souhaite, celle férentes disciplines
qui lui correspond le mieux. Pour l’ap- comme la lecture ou
prentissage de la lecture, je trouve que l’écriture. L’enfant est
l’ancienne méthode est plus adaptée alors libre de choisir ses
que la nouvelle. De toute façon, du activités pour chaque jour,
moment qu’à la fin de l’année le pro- mais il est tenu de termi-
gramme est terminé et que les élèves ner toutes ses tâches à la fin
savent lire, il n’y a pas de problèmes.» de la semaine. Je préfère
cela que de faire répéter les
Adèle * élèves après moi. Grâce à des
3e année activités ludiques, l’enfant
«La méthode socioconstructiviste est apprend seul et beaucoup
une catastrophe, cela a été démontré mieux. Par exemple en met-
plus d’une fois. Les enseignants et les tant en relation les mots qu’il
étudiants qui travaillent sur le terrain apprend avec sa propre expé-
se rendent bien compte que les élèves rience, plutôt que de les rece-
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français
d’étymologie
Une histoire
et de phonétique
Le français vient du latin et les grammairiens du passé ont inscrit
cette filiation dans la graphie. Il en résulte l’orthographe relativement
complexe que l’on connaît aujourd’hui
F orce est de constater que l’orthographe phies, même si l’on peut repérer des habi-
de la langue française est compliquée. tudes partagées par les scribes de l’époque.»
Elle préfère souvent la graphie ph à f, elle
abonde de lettres que l’on ne prononce
Il faut dire que durant tout le Moyen Age,
la majorité des textes s’écrivent encore
Lexique
pas, d’accents divers et variés…
Comment en est-on arrivé là?
«L’orthographe française se fixe relativement
en latin, bien que, petit à petit, la langue
vulgaire gagne du terrain. Ce bilin-
guisme constant est à l’origine de plu-
élastique
tard, explique Yasmina Foehr, directrice sieurs habitudes orthographiques fran- Le Dictionnaire de l’Académie françai-
du Département de langues et littéra- çaises qui perdureront par la suite. Un se a longtemps refusé dans ses
tures françaises et latines médiévales. On tournant important a lieu à la fin du colonnes les mots étrangers et les
considère le Serment de Strasbourg (842) Moyen Age. En effet, dès le XVe siècle, le termes techniques, considérés
comme le premier monument écrit en fran- nombre de personnes sachant écrire aug- comme impropres à l’usage du fran-
çais. Entre cette date et la création de mente fortement. Le français colonise çais. Une opinion largement partagée
l’Académie française au XVIIe siècle, l’établis- des domaines jusque-là réservés au latin, par les écrivains de l’époque. Molière,
sement de normes orthographiques fait l’ob- comme la comptabilité ou la législation. dans ces pièces, ne tourne-t-il pas sys-
jet d’une évolution très lente. On le remarque Par l’édit de Villers-Cotterêts en 1539, le tématiquement au ridicule des méde-
cins ou des juristes communiquant
bien au travers des textes des XIIe et XIIIe roi François Ier fait même du français la
dans un langage jargonneux?
siècles. Un même mot peut connaître diverses langue administrative et judiciaire com- Du coup, le vocabulaire est, à cette
réalisations écrites, qui paraissent relever mune à l’ensemble du royaume. Et puis, époque, sévèrement limité. Les
d’une grande liberté dans l’usage des gra- l’écriture devient également une drames de Jean Racine sont d’ailleurs
écrits avec seulement 2000 mots. La
pauvreté du lexique est telle que
Thomas Corneille, fils de Pierre, l’au-
teur dramatique, rédige en 1694 un
Dictionnaire des termes des arts et
des sciences pour compléter celui
de l’Académie, puis un Dictionnaire 25
universel géographique et historique
en 1708.
A partir de la fin du XVIIIe, les choses
changent du tout au tout et l’on
assiste à une véritable explosion de
nouveaux mots dans la production lit-
téraire. Jean-Jacques Rousseau n’hési-
te pas à puiser dans les patois locaux
pour écrire sa Nouvelle Héloïse, Jules
Verne se délecte des termes issus des
découvertes scientifiques et des déve-
loppements techniques, etc. Le mou-
vement ne s’est pas tari puisqu’on
voit aujourd’hui de plus en plus d’hel-
vétismes, de belgicismes et de parti-
cularités du Québec entrer dans les
dictionnaires de la langue française.
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français
Intercourse
et esprit de
clocher
Ferdinand de Saussure, le créateur de
la linguistique mort en 1913, a identifié
deux tendances dans l’évolution d’une
langue. La première est la force d’inter-
course, c’est-à-dire la volonté de diffé-
rentes communautés de pouvoir com-
muniquer entre elles. Elle favorise le
partage d’un même idiome par le plus
grand nombre possible de personnes.
Dans ce cas, toutes les graphies ayant
trait à des dialectes régionaux tendent
à disparaître. A l’inverse, l’esprit de clo-
même reconnaître l’éditeur rien qu’en analy- «La principale fonction de l’Académie sera cher favorise l’émergence de parlers
sant l’orthographe du texte.» de travailler, avec tout le soin et toute la dili- locaux, très identitaires et que ne com-
Au cours du XVIIe siècle, de nombreux gence possibles, à donner des règles cer- prennent qu’un nombre limité de gens.
grammairiens (Claude Favre de Vaugelas, taines à notre langue et à la rendre pure, élo- Vu à travers ce prisme, on remarque
surtout) expriment le désir d’unifier les quente et capable de traiter les arts et les que le français de Suisse romande et
variations orthographiques et gramma- sciences», spécifie l’article 24 des statuts. les dialectes suisse-allemand suivent
ticales dans un langage «moyen», com- L’institution publie la première édition des voies opposées. De ce côté-ci de la
préhensible par tous. Ce sera le rôle attri- de son dictionnaire en 1694 dans lequel Sarine, la langue est définie par rap-
bué à l’Académie française, fondée en elle affirme avoir réalisé un compromis port à celle de la France. Le français du
entre l’ancienne ortho- Valais n’a pas plus de points communs
avec celui de Neuchâtel qu’avec celui
graphe, influencée par
de Paris, par exemple. Malgré certaines
l’étymologie, et celle
«Au XVIe siècle, on peut recon- fondée sur l’oral, soute-
prononciations régionales et des mots
venant d’anciens patois, il n’y a pas de 27
nue par les réforma- «dissidence» marquée.
naître l’éditeur en analysant teurs de l’époque. De
En revanche, si un jour la volonté de
fait, le français écrit
l’orthographe d’un texte» subit quelques simplifi-
définir une forme écrite du dialecte
suisse-allemand aboutissait, alors cela
cations: suppression de aurait pour effet de limiter le nombre
certaines consonnes de lecteurs potentiels. Par exemple, si
étymologiques (mud certains journaux zurichois devaient
1635. La création de cette institution doit devient mu), distinction du i et du j, du subitement paraître en schwy-
beaucoup au gouvernement de Richelieu u et du v, restriction de l’usage du y, zerdütsch, il est évident qu’ils per-
qui a rapidement compris l’intérêt qu’il recours encore timide aux accents pour draient immédiatement leur lectorat
avait dans une telle entreprise. Avec marquer la disparition d’une consonne allemand – fort important d’ailleurs.
l’Académie, l’autorité se dote en effet (estoile devient étoile, voulte devient
d’un instrument utile à sa politique inté- voûte, etc.). Plus tard, les terminaisons
rieure d’unification du royaume tout en des mots (surtout des verbes à l’impar-
participant à son rayonnement diploma- fait) en oit ou ois sont changées en
tique à l’étranger. ait ou ais.
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français
«Les simplifications admises par l’Académie trés de cette époque désiraient sans doute en 1692. Les manuscrits de Jean-Jacques
sont en réalité assez timides, nuance Olivier conserver leur avantage: celui de devoir maî- Rousseau (1712-1778) sont notamment
Pot. Dès le milieu du XVIe siècle, cent ans triser les langues anciennes pour pouvoir truffés de variantes orthographiques très
avant la création de l’institution, les gram- écrire correctement le français.» personnelles – gommées ensuite par
mairiens débattaient déjà sur une profonde L’Académie française n’a finalement pas l’éditeur avant l’impression.
réforme de la langue écrite visant à la rendre réussi à exercer une influence décisive
plus phonétique. L’idée étant de supprimer les sur la fixation de l’orthographe. Preuve Phylactère et non filacter
lettres muettes, de remplacer les ph par des f, en est la grande variation des graphies, C’est l’entrée en vigueur de l’école obli-
etc. Finalement, cette vision d’une ortho- qui persistent même après la première gatoire à la fin du XIXe siècle qui aurait
graphe plus simple n’a pas triomphé. Les let- édition du Dictionnaire de l’institution créé les premières règles véritablement
contraignantes. L’orthographe, mais
aussi la grammaire se durcissent alors.
Les grammairiens se réunissent, des
manuels sont rédigés, les autorités poli-
Les fautes qui ont de l’avenir tiques s’en mêlent à coups de décrets et
d’inspecteurs et la dictée, examen d’un
Pour les linguistes, il y a fautes et fautes. Il y a de la population, sont les genre nouveau, fait son apparition. C’est
celles que commettent les étudiants et que prémices d’un changement le prix à payer pour réussir une scolari-
les enseignants de l’université, toutes facultés de l’idiome. L’usage de plus sation de masse.
confondues, corrigent à longueur de copie depuis en plus répandu de Une réforme phonétique similaire à celle
des décennies. Celles-ci démontrent les manques ces déviances leur ouvre des grammairiens du XVIe siècle a encore
dans la maîtrise du français et peut-être aussi finalement les portes été proposée par les linguistes au début
les lacunes de l’enseignement de la langue tout de la langue officielle. du XXe siècle en France. Des décrets ont
au long de la formation primaire et secondaire. Ainsi, peut-être qu’un jour,
été préparés – des textes ont même été
Et puis il y a celles qui finissent par exercer une par esprit de simplification
pression sur la langue officielle jusqu’à ce qu’elles généralisé, une majorité rédigés selon ces règles plus simples qui
entrent dans le dictionnaire. Dans sa Grammaire de gens écrira f à la place rappellent l’orthographe de l’espagnol
des fautes, le linguiste genevois Henri Frei, mort de ph. La première ortho- actuel –, mais ils n’ont finalement
en 1980, affirme en effet que les fautes d’aujour- graphe deviendrait officiel- jamais été signés. C’est pourquoi nous
d’hui, du moins celles qui deviennent systéma- le, la seconde archaïque. continuons d’écrire phylactère, et non
tiques et répandues dans de larges portions filacter. I
28
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français
Parlé-vous francé?
Testez votre niveau de français au travers de ce petit bêtisier construit à partir
d’énoncés fautifs tirés de la presse régionale
1) La métaphysique de X. 6) Des scènes violentes 11) La police s’est rendue 15) Ils se sont montrés très
a exhalté bien des imagina- inutiles, qui dénotent compte de ses problèmes menaçants et exigé que je
tions et fait tourné bien par rapport au reste de communication. leur remette la disquette.
des têtes. du film.
12) Berlusconi le répète 16) Cette décision ne
2) Réquisitionner un méde- 7) La composition du depuis 1994, c’est pour souffre d’aucun délai.
cin américain frisait à tout tableau véhicule un senti- «libérer l’Italie des
le moins de l’offense. ment de sérénité emprunt communistes» si, cinq ans 17) Il était complètement
de renoncement. après la chute du mur omnubilé.
3) On assiste à une perte de Berlin, Sua Emittenza
de repaires et de valeurs 8) Demande-t’on à quel- s’est résignée à «boire 18) Ils se sont plus tous
chez les jeunes. qu’un s’il aurait préféré l’amer calice de les deux.
que ce soit sa femme qui la politique».
4) Le coureur sert les dents meurt plutot que son fils? 19) Cette pièce a rapide-
mais n’arrive que quatrième. 13) Nous souhaitons arda- ment conquéri un large
9) L’autre hémisphère est ment que vous vous joignez public de tous âges.
5) Des centaines de serpents plus chaude. à nous.
vénéneux campent dans 20) L’étudiant se trouve
leur école. 10) Cherchons appartement 14) Elle avait une irruption contraint de se coltiner
en collocation ou studio de boutons autour avec des matières qu’il n’a
libre à louer. de la bouche. pas choisi.
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Baber Johansen
Campus N° 82
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Baber Johansen
ations
Arabes, les Pakistanais, les
Indonésiens ou les Iraniens
ont développé des cultures
assez différentes les unes
des autres. Le monde musul-
man est aujourd’hui un
mélange très complexe de
sociétés et de cultures, sou-
mis à des contraintes écono-
miques, à un transfert de
technologie et à des modes
d’organisation étatique qui
viennent largement de
l’Occident. Au lieu d’allu-
mer des guerres entre
Olivier Vogelsang
l’Occident et l’Orient, cette
situation provoque, dans
des pays comme l’Egypte ou
le Maroc par exemple, des
conflits internes dont les
objets sont l’Etat, les institutions poli- Il n’existe pas de pays musulmans internes qui secouent ces sociétés. Ceux
tiques, les droits ou encore la participa- réellement démocratiques. Est-ce une qui se battent pour les droits de l’homme
tion des citoyens à la vie publique. fatalité? et les libertés politiques sont aussi des
Jusqu’à maintenant, le «choc des civilisa- > Il est vrai que la démocratie dans le musulmans. Diviser le monde en deux
tions» a lieu à l’intérieur des sociétés monde arabe rencontre des problèmes grands champs, bons et mauvais, ne per-
»
musulmanes et non musulmanes. multiples. Même les pays qui possèdent met pas de voir les luttes pour la démo-
des institutions démocratiques ont du cratie et les droits de l’homme dans
Estimez-vous que l’Islam est compatible mal à réaliser ce qu’ils promettent dans d’autres systèmes que le nôtre. Les per-
avec les droits de l’homme? leurs Constitutions. En Egypte, par formances démocratiques de la plupart
> Cela dépend largement des musul- exemple, le gouvernement n’a même des pays du monde musulman ne sont
mans. A ce propos, les gouvernements pas, si l’on en croit les rapports de la guère convaincantes. Mais il ne faudrait
démocratiques peuvent, eux aussi, priver presse internationale, permis aux Frères pas ignorer les luttes internes entre des
certaines catégories de personnes de musulmans de participer librement aux forces différentes qui font avancer ces
leurs droits humains sous certaines dernières élections. Mais j’observe aussi, sociétés. Certes, le cours de l’histoire est
conditions politiques. La prison de dans beaucoup de pays musulmans, les contingent. Il peut à tout moment se
Guantanamo en est un exemple. C’est efforts fournis pour acquérir une plus modifier, même chez nous d’ailleurs. Il
une question de volonté et d’expériences grande participation citoyenne aux insti- n’y a donc aucune assurance que les pays
politiques. Beaucoup de musulmans sou- tutions politiques et pour développer la musulmans évoluent vers des démocra-
haitent intégrer les droits de l’homme liberté d’opinion. Les tentatives en vue ties. Mais personne ne peut non plus
dans le droit de leurs sociétés pour com- de réduire la situation actuelle du exclure cette possibilité. I
battre les persécutions dont certains monde musulman à une fatalité cultu-
d’entre eux sont victimes. Et rien ne per- relle, à un résultat nécessaire de l’Islam, Propos recueillis par Anton Vos
met de dire qu’ils n’y arriveront pas. ne laissent aucune place aux luttes 31
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Bois de la Grille
DR
Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève,
raconte sa découverte
Le retour du lichen
U n promeneur peu averti n’aurait vu
qu’une tache grise comme il en existe
tant d’autres sur l’écorce des arbres.
Philippe Clerc, lui, n’en a pas cru ses
ces petits poils qui servent à ancrer le
lichen sur son support. Cette espèce est
en réalité très courante dans le monde,
mais surtout dans les régions tropicales,
que l’o
yeux lorsqu’il est tombé sur le lichen ou en tout cas assez chaudes et humides. Il se peut qu’elle ait simplement été per-
Parmelia reticulata accroché au tronc Comment a-t-elle colonisé la Suisse, pour- due de vue. Il est en effet extrêmement
d’un saule du Bois de la Grille à Vernier. quoi semble-t-elle avoir disparu avant de difficile d’affirmer qu’une espèce de
En ce jour de mai, le lichénologue gene- réapparaître? Mystère. Sa dernière men- lichen a disparu. La communauté des
vois, conservateur aux Conservatoire et tion à Genève remonte au XIXe siècle au spécialistes et amateurs de ces champi-
Jardin botaniques et chargé de cours à Vengeron, dont le site, depuis, a été en gnons lichénisés est peu nombreuse et
l’Université de Genève, a en effet décou- grande partie détruit par la construction ne peut rivaliser avec celles d’autres
vert une espèce que l’on croyait disparue de l’autoroute. Des recherches dans les observateurs de la nature comme les
depuis au moins un demi-siècle en herbiers historiques ont montré que ornithologues ou les entomologistes.
Suisse. La surprise a été d’autant plus Parmelia reticulata a aussi été localisée au D’autant plus que le lichen se cache bien
grande que cette créature, si sensible à la Tessin et à Uri il y a plus de cinquante ans. et n’est souvent pas bien grand. Pour le
pollution, a refait surface dans un carré Depuis, plus rien, à l’exception d’une chasser, le chercheur ne se déplace
boisé sans cesse survolé par les avions et observation dans le canton des Grisons il d’ailleurs jamais sans sa loupe, tel un
coincé entre l’autoroute et les gigan- y a quelques années. Sherlock Holmes sylvestre. «Il faut aimer
tesques entrepôts d’essence.
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Galápagos
Meyrin
Lac Léman
Bois de la Grille
Vernier
Genève
on croyait perdu
chercher les petites choses, concède Philippe nement immédiat, tandis que la seconde flore régionale. Toutefois, si le retour de
Clerc, qui compte publier prochaine- est chargée de réaliser la photosynthèse, Parmelia reticulata est une bonne nou-
ment un article sur sa découverte. Et il c’est-à-dire qu’elle utilise l’énergie solaire velle, il ne faut pas oublier que la liste
faut savoir où regarder. Dans le cas du pour transformer le gaz carbonique en des espèces en danger est encore longue.
Parmelia reticulata, je focalisais mon sucre, source de nourriture pour le Philippe Clerc a d’ailleurs co-dirigé la
attention sur l’écorce des arbres, qui est un réalisation de la Liste
milieu de prédilection pour les lichens. De tels rouge des lichens épi-
endroits subissant de très fortes variations phytes (vivant sur les
d’humidité sont en effet très défavorables aux arbres) et terricoles
plantes à fleurs dont la pousse très rapide (vivant sur le sol) mena-
dans leurs milieux de prédilection ne laisse cés en Suisse, publiée en
en général aucune chance aux lichens. Ces 2002 par l’Office fédéral
derniers profitent donc de ces conditions qui de l’environnement. Sur
leur offrent l’espace et le temps nécessaires les 786 espèces étudiées,
pour se déployer en se nourrissant des élé- 295 figurent sur la liste.
ments dissous dans l’air.» Trente-huit d’entre elles
ont disparu du territoire,
Partage des tâches 45 sont au bord de l’ex-
Contrairement à ce que l’on a cru pen- tinction (dont Parmelia
dant longtemps, le lichen n’est pas une reticulata), 96 en danger
plante. Il fait partie du règne des Le Bois de la Grille, un petit carré boisé coincé entre l’autoroute, et 116 considérées
champignons que les botanistes ont les avions et des entrepôts d’essence. comme vulnérables. Au
décidé de séparer de celui des végétaux total, la Suisse compte
classiques en raison des trop nombreuses champignon. L’évolution conjointe dure plus de 1700 espèces de lichens si l’on
depuis si longtemps que l’un ne peut plus inclut les lichens lignicoles (vivant sur
vivre sans l’autre – sauf exception raris- le bois mort) et saxicoles (sur les roches),
Apparus il y a 400 sime. ces deux dernières catégories étant
Les lichens sont les pionniers de la vie. considérées comme moins menacées.
millions d’années, Apparus probablement il y a plus de 400 «Nous avons actuellement le projet de conce-
millions d’années, ils sont parmi les pre- voir une f lore digitalisée des lichens de
les lichens sont les miers organismes, après les bactéries, à Suisse, poursuit Philippe Clerc. Cette flore
coloniser la terre ferme. Aujourd’hui pourra être chargée sur un petit appareil du
pionniers de la vie encore, on les trouve aux avant-postes, type agenda électronique que l’on pourra
sur les roches en apparence stériles et emporter sur le terrain. Il comprendra
même en ville. En fait, là où les plantes toutes les clés de reconnaissance des espèces,
différences qui les distinguent. Dans le à fleurs, les grandes rivales, ont des dif- avec descriptions, dessins et photos. Elle sera
cas du lichen, le champignon vit en sym- ficultés à vivre, le lichen s’installe. Il lui également accessible aux amateurs, contrai-
biose très étroite avec une population faut juste assez d’humidité et du soleil. rement aux ouvrages très techniques qui
d’algues microscopiques. Une cohabita- La redécouverte à Genève d’une espèce existent aujourd’hui sur le sujet et qui sont
tion qui doit son succès au partage des de lichen extrêmement rare en Suisse réservés aux professionnels.» I
tâches. Le premier récolte l’eau et les élé- est plus importante qu’il n’y paraît. Elle
ments nutritifs présents dans l’environ- est un marqueur de la diversité de la Anton Vos 33
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cursus
Etudes internationales:
le nouveau visag
Un nouveau baccalauréat universitaire, deux instituts prestigieux
qui fusionnent, un réseau d’études qui se met en place: les études
internationales se réorganisent à tous les niveaux. Petite présentation
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cursus
Université de Genève
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mer
Sous la loupe
L’Observatoire de la vie étudiante réunit
Un étudiant
et interprète des données statistiques
sur les études supérieures et les étudiants
De retour du Tour de France à la voile, Sylvain
Wenger fait escale à Genève pour sa rentrée
Etudiants et marché de l’emploi: universitaire entre deux régates. Etudiant en
maîtrise en globalisation et régulation
entre fatalisme
e
sociale, le marin a des rêves de grand large
plein la tête, mais les pieds sur terre.
et sérénité p Un véritable artiste. Virtuose
Rencontre
sabbatique consacrée à sa pas-
Près de deux tiers des étudiants envisagent d’en- du piano, Sylvain Wenger est sion. Mais dès octobre pro-
trer directement dans la vie active après l’obten- un étudiant qui joue des chain, il reprendra le chemin
tion de leur licence ou de leur diplôme. Ce sont
autant des Suisses que des étrangers, plutôt des
u cordes avec talent. Mais ne le
cherchez pas du côté des salles
des amphithéâtres pour un
master de globalisation et
femmes que des hommes, mais surtout des plus de concert en queue de pie. régulation sociale. Habitant
âgés que des plus jeunes. Cette proportion varie Vous aurez plus de chances de du bord du lac, il a dès l’âge de
également selon les facultés. Parmi ces étudiants
o
l’apercevoir sur l’eau, en T- 4 ans manœuvré ses premiers
qui comptent entrer directement après leurs shirt et lunettes de soleil. Ce voiliers: de modestes Optimist
études sur le marché de l’emploi, la majorité
n’est pas dans les auditoriums en camp de voile à ses débuts,
pense que ce sera à Genève et un sur trois ne sait
pas encore où cette insertion pourrait avoir lieu.
qu’il se fait applaudir mais jusqu’aux navires de course
partout dans les vents où il taillés pour les records. Depuis
l
L’Observatoire, dans son étude, classe les étu-
diants selon leur attitude face à leur avenir pro- peut glisser les voiles de son cinq ans, il fréquente assidû-
fessionnel. Il y a les velléitaires, qui pensent entrer bateau de course. En équipage ment le Centre d’entraîne-
rapidement sur le marché de l’emploi mais qui à sept, il alterne à deux postes ment à la Régate* du Port noir
sont pessimistes concernant leur insertion sur ce sur le monocoque «Ville de à Genève.
a
marché. Les conquérants, eux, veulent également Genève–Carrefour Les cheveux éclaircis par le
entrer rapidement, mais sont optimistes quant à Prévention», la grand-voile et soleil et les embruns, l’étu-
leurs chances d’insertion. Les fatalistes envisagent le piano. Le piano, ce point diant rentre d’un été bien
plutôt de retarder l’échéance et, en plus, sont pes-
névralgique de l’embarcation rempli. Pour la quatrième fois,
l
moins souvent parmi les conquérants. Les plus rêves de grand large, le pied à l’issue de l’épreuve, le mono-
âgés, en revanche, sont beaucoup plus fréquem- marin et la tête sur les coque de 9 mètres taillé pour
ment caractérisés comme conquérants et un peu
épaules: «Pas question de tout la compétition s’apprête à
plus souvent comme velléitaires. En fait, ces effets
sacrifier à ma passion. J’ai dû fendre à nouveau les flots de
se réduisent au constat suivant: plus on est âgé,
faire quelques concessions pour la Méditerranée. Basé à
So
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mer
DR
luons dans un cadre amateur
mais avec une démarche de pros.»
Car Sylvain Wenger consacre
pas moins de trois entraîne-
ments hebdomadaires à sa
passion, «quelle que soit la
météo». Et les «coups de tabac»
surviennent aussi sur le lac
Léman: «Le temps peut être très
changeant, comme en
Méditerranée. Mais il est vrai que
par rapport à nos copains bre-
tons, nous avons un petit déficit
et moins l’habitude de naviguer
quand il y a des vagues croisées.»
Des marins d’eau douce? «On
n’a pas du tout peur de naviguer
dans la “baston”, répond aussi-
tôt le matelot prêt à sortir son
sabre d’abordage. Chaque
année, on nous ressort le grand Sylvain Wenger: «Pas question de tout sacrifier à ma passion. J’ai dû faire quelques concessions pour mener
de front mes activités à l’Université et la voile.»
Université de Genève
Ai-je les mêmes chances
en tant que femme ?
www.ey.com/ch
Université de Genève
MGB www.migros.ch
PUBLICIS
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en bref
Le coin
des récompenses
> Hannelore Lee-Jahnke > Giorgio Malinverni élu à la Cour européenne
présidente de la CIUTI des droits de l’homme
Hannelore Lee-Jahnke, professeure au Spécialiste du droit constitutionnel et du de Locarno. Il a étudié le droit à
sein de l’Ecole de traduction et d’inter- droit international, le professeur Giorgio l’Université de Fribourg avant de rédiger
prétation (ETI), a été élue, pour un man- Malinverni a été nommé juge à la Cour sa thèse de doctorat à l’Institut de hautes
dat de trois ans, à la présidence de la européenne des droits de l’homme. Il études internationales à Genève. En
Conférence internationale permanente succède au Bâlois Luzius Wildhaber. Le 1980, il a été nommé professeur ordi-
des instituts universitaires de traduc- professeur Malinverni a été élu dès le pre- naire à l’Université de Genève. Il a rédigé
teurs et d’interprètes (CIUTI), dont le mier tour de scrutin par l’Assemblée par- de nombreuses publications et est
siège social est à Bruxelles et dont l’ETI lementaire du Conseil de l’Europe. Né en notamment coauteur d’un Traité de droit
est membre fondateur. 1941, Giorgio Malinverni est originaire constitutionnel suisse.
Quinzaine «égalité»:
du 6 au 16 novembre 2006
Où en est l’égalité entre les hommes et
Grand choix de professions
les femmes au sein de l’Université de
Genève? C’est pour réfléchir à cette
question que le bureau de l’égalité de
l’Université de Genève convie les colla-
à la Cité des métiers
Du 13 au 19 novembre aura lieu la 2e édition de la Cité des métiers et des formations
borateurs et collaboratrices de l’institu- à Palexpo. L’Université de Genève y tient un stand offrant un panorama de ses for-
tion à participer à la quinzaine «égalité» mations via diverses présentations des métiers de la recherche et des expérimenta-
qui doit se tenir du 6 au 16 novembre tions ludiques. Cet événement est l’occasion de rencontrer des spécialistes et d’ob-
tenir des informations concernant une formation ou sur les débouchés en cours ou
prochain. Au menu: une exposition qui
en fin d’études. A ce titre, le bureau Uni-Emploi sera présent pour évaluer toutes les
invitera les visiteurs à «changer de sexe», propositions destinées aux étudiants (stages de formation ou d’insertion, ateliers
des conférences, une table ronde, des pour la recherche d’un premier emploi, rencontres avec des employeurs, etc.). Par
interventions sur la carrière acadé- ailleurs, il sera également possible de découvrir toutes les évolutions possibles en
mique, des informations, des projec- cours d’emploi grâce à la Formation continue dont le programme comprend plus de
tions et un débat. 100 certificats.
Informations: www.unige.ch/egalité
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Université de Genève
Thèses
Campus N° 82
> Petignat, Pierre-Auguste > Jermann, Patrick
L’âge des malades est-il un critère Computer support for
justifiant une limite d’accès interaction regulation
aux soins intensifs?: une étude in collaborative problem-solving
observationnelle de plus de 3’000 Th. psychol. Genève, 2004;
patients FPE 340
Th. méd. Genève, 2006; Codirecteurs de thèse:
> Vassiliadi, Martha
MEDECINE Méd. 10456
Directeur de thèse:
Les fastes de la décadence
Professeur Pierre Dillenbourg,
Professeure Mireille Bétrancourt
> Hamel, John-John Professeur Jean-Claude Chevrolet chez Constantin Cavafy
Th. lett. Genève, 2004; L. 552 > Perraudin, Sandrine
Effet d’une consultation www.unige.ch/cyberdocuments/theses2006/P
etignatP-A/meta.html Directeur de thèse: Professeur Michel Contribution des paradigmes
de cardiologie sur le traitement
Lassithiotakis; codirecteur: Professeur d’amorçage à l’étude de
cardiaque des patients de > Rossier Brunet, Sandrine Christos Papazoglou l’organisation conceptuelle
l’Hôpital de gériatrie des HUG: Evaluation colorimétrique au cours du développement:
expérience d’un an «in vitro» de l’efficacité rôle des relations instruments
Th. méd. Genève, 2006;
Méd. 10458
de différentes méthodes
et produits de blanchiment
SES et catégorielles
Directeurs de thèse: Docteur > Gsponer, Thomas Th. psychol. Genève, 2005;
Th. méd. dent. Genève, 2005; FPE 359
Jean-Jacques Perrenoud, chargé Konzept einer nachhaltigen
de cours, Docteur François Herrmann, Méd. dent. 645 Directeur de thèse:
Directeur de thèse: Docteur regionalen
privat-docent Professeur Pierre Mounoud
Didier Dietschi, privat-docent Entwicklungsstrategie am
> Khan, Aqal Nawaz Beispiel des Kantons Wallis =
> Varsori, Michael
Prévalence et caractéristiques de
l’association de neuroleptiques
Adaptation des stratégies
(Concept d’une promotion
économique régionale durable:
IUHEI
de lecture à un scotome central exemple du canton du Valais) > Elkhoury, Marwan
chez une cohorte de patients
artificiel, chez des sujets sains Th. sc. écon. et soc. Genève, 2005; In search of an elusive monetary
psychotiques
Th. méd. Genève, 2005; SES 600 policy rule for Switzerland:
Th. méd. Genève, 2005;
Méd. 10447 Directeur de thèse: measuring the natural rate of
Méd. 10453 Directeur de thèse:
Directeur de thèse: Docteur Professeur Beat Bürgenmeier interest for the Swiss economy:
Professeur Avinoam B. Safran
Philippe Huguelet, privat docent what role for the exchange rate?
www.unige.ch/cyberdocuments/theses2005/
www.unige.ch/cyberdocuments/theses2005/ > Nicita, Alessandro
VarsoriM/meta.html
Libéralisation commerciale Th. sc. pol. Genève, 2005; HEI 701
KhanAN/meta.html
Directeurs de thèse:
> Zagury-Chappuis, Tatjana et pauvreté Professeurs Hans Genberg
> Kössler, Thibaud
La calciphylaxie et ses Th. sc. écon. et soc. Genève, 2004;
Utilisation de microarrays pour > Granfar, Ramin
manifestations stomatologiques SES 573
la détermination de l’origine Directeur de thèse: Economic transition and deve-
Th. méd. dent. Genève, 2005;
communautaire ou hospitalière Professeur Jaime de Melo lopment in Mongolia: 1990-2000
Méd. dent. 642
du «Staphylococcus aureus» Directeur de thèse: Th. sc. pol. Genève, 2005; HEI 700
Th. méd. Genève, 2005; > Pham Thi, Thanh Thoa
Professeur Jacky Samson Directeurs de thèse: Professeur Henryk
Méd. 10445 www.unige.ch/cyberdocuments/theses2005/ Intégration des aspects statique, Kierzkowski, Professeur Slobodan Djajic
Directeurs de thèse: Professeur Daniel Zagury-ChappuisT/meta.html dynamique et organisationnel
Lew, Professeur Jacques Schrenzel dans la modélisation
www.unige.ch/cyberdocuments/theses2005/
KoesslerT/meta.html
LETTRES
des systèmes d’information
Th. sc. écon. et soc. Genève, 2005;
ARCHITECTURE
> Maurer, Alisa SES 597 > Surchat Vial, Nicole
> Fidecaro, Agnese Ville, développement durable
400 patients admis pour Directeur de thèse: Professeur
Exposed bodies: crises Michel Léonard; codirectrice: et urbanitaire
infarctus du myocarde dans of experience in twentieth- Professeure Bich-Thuy Dong Thi Th. arch. Genève, 2006; Arch. 5
un hôpital périphérique: century German, French (Université Nationale du Vietnam) Directeur de thèse:
données démographiques and English literature Professeur Riccardo Mariani
et intérêt du score SAPS II Th. lett. Genève, 2004; L. 558 www.unige.ch/cyberdocuments/theses2006/
Th. méd. Genève, 2005; Méd. 10454
Directeur de thèse:
Directrice de thèse:
Professeure Deborah Madsen
FPSE SurchatVialN/meta.html
Université de Genève
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