Les piscines vides sont

tristes à mourir, que ce

soit à La Roche-sur-Yon
(France) ou à Mândû (Inde).
Seuls quelques stepwells
acueillent un fond d’eau
opaque.
Sur le plateau, loin
des villes, des ruines
formidables témoignent
d’un âge où les puissants
et leurs cours jouissaient
de la période des pluies et
avaient fait construire de
vaste palais consacrés en
grande partie aux bains et
au spectacle de l’eau. Hors
saison des pluie, c’est d’une
grande aridité surtout ces
dernières années où le cycle
ne semble plus vraiment
fonctionner.

#india2018mcmarco

MANDU
On the road. Il a fallu arriver jusqu’à Mandu.
Il y a un frisson particulier dans ces minutes qui précèdent l’aube, sur
la route, au bord du chemin, devant une échoppe où le chai boue, dans
une gare routière encore vide. Il y a une promesse dans l’air, des regards
qui confirment la complicité du moment avec les premières femmes et les
premiers hommes du jour, les premiers travailleurs, les premiers voyageurs,
les premiers écoliers, les premières familles qui partent ou rentrent chez
elles.
On a regardé les gens vivre leurs vies. C’était un enterrement musulman
où le cercueil glissait au bout des bras levés des hommes et où les allahou
akbar réintégrait leur sens original. C’était la préparation d’un mariage
où les murs des maisonnettes étaient retapissées d’une boue onctueuse
ocre terre brûlé d’une sensualité inouïe. C’était la déconstruction de la
montagne de marchandises transportées par les best goods carrier, aussitôt
réparties en centaines de lots, très gros, gros, semi-gros, medium, half
medium, petit, petit-petit, tout petit-petit. C’était les femmes balayant,
époussetant, portant, coupant, tranchant, trimant. C’était ces hommes,
innombrables, qui attendent sans interruptions, attendent, attendent et
attendent encore. Puis, Sun is rising sur la pas de ma porte.
Cantina. Ça, c’est le rdv du matin. Avant 10:00 AM il n’y a pas grand monde
dans le bourg mais ici c’est ouvert dès 06:00 AM. C’est l’heure du chai
brûlant et sucré. 10 Rps. Mais c’est prix foreigner. Pour un indien c’est 5
Rps. Puisqu’on en est à l’intendance : 70 Rps c’est 1 euro. Une bouteille
d’eau 1L 20 Rps, un dhal (soupe de lentilles) c’est 50 Rps, un thali (riz +
légumes variés) c’est 100 à 130 Rps, la chambre ici tout confort moderne,
c’est 500 Rps (j’aurais pu dormir avec les pilgrims 300 Rps, mais c’était
complet), réparer mon sac chez le tailleur du coin c’est 30 Rps, louer le
vélo à la journée c’est 100 Rps, un sweet lassi (boisson crémeuse lait +
mangue) c’est 40 Rps. Besoin de quoi d’autre ? Rien, merci.
[Carte postale] De vastes
vallées fertiles viennent
comme s’enchâsser dans
Le plateau de Mândû,
forcément bordé de hautes
falaises. C’est la force de ces
paysages. Plus trivialement,
des panneaux indiquent un
sunset point. Le coucher
du soleil, qui, avec le
sunrise n’est pas rien dans
la culture hindoue, est
effectivement extra. Mais le
moment est souvent pollué
par des ados qui mettent de
la sous techno indienne à
fond. Why not ?
Le premier baoli ! J’y crois pas toujours pas ! Ces réservoirs,
ces tanks, souvent très profonds, sont l’occasion de montages
architecturaux spectaculaires, avec de nombreux degrés et marches
qui se répondent en symétrie, des arches de toutes natures, des
modénatures souvent simples et discrètes. Ils sont désormais le
plus souvent abandonnés mais gardent une puissance d’évocation
très forte des us sociaux d’avant la colonisation anglaise.
Olivier. Faire la rencontre avec Olivier, c’est accéder à l’histoire de Un dessin d’Olivier, énervé par le spectacle votif permanent à
la route, on the road again. Soixante-dix ans passé, belge qui vit Omkaheshwar.
en Angleterre, une tête à la HoChiMin, douze ou treize fois des
périodes de plusieurs mois en Inde, solitaire, obsédé de protocoles
lents et répétitifs pour dessiner minutieusement, le contrat
social ne l’intéresse pas, les moyens économiques sont à l’étiage
d’une vie de petits boulots, grande culture livresque, philosophie
rationaliste, se méfie absolument des simulacres religieux et du
spectacle, avons longuement disserté sur les situationnistes.
Bleu, vert, grenat, rouge, gris, bleu, orange, jaune, bleu-vert,
grenat-rouge, violet, rose, rouge-rose, rouge-orange, bleu-gris,
jaune-vert, violet-rose, jaune-orange, gris-vert, bleu vif, vert clair,
grenat profond, rouge carmin, gris passé, orange mordoré, rose
indien.
Le premier baobab ! J’y crois toujours pas ! Il y a bien longtemps,
des graines de baobabs rapportées d’Afrique ont été plantées un
peu partout sur le plateau de Mândû, c’est un autre versant de
« l’échange colombien ».
Ainsi prospèrent ici des dizaines de ces arbres merveilleux de
sérénité, sur certains s’appuient des maisons de terre, d’autres
servent de supports publicitaires, mais la plupart sont dispersés
dans la nature, les gens d’ici ne les voient plus et moi je ne vois
qu’eux.
Mândû, Delhi gate, vélocipède,
baobab, fenaison, séparation
du grain et de l’ivraie, tapis de
fleurs si grosses qu’elles font
du bruit en tombant, vache en
détention.
Le plateau de Mandu est
totalement ceint d’un rempart
encore intact. On est parfois en
plein trip, de Lawrence d’Arabie
à l’homme qui voulait être roi
jusqu’à Alexandre le Grand.
Les Mongols et les Afghans
sont convoqués. La caravane
ne saurait tarder à apparaître.
J’ai fait préparer le
caravansérail. Nous repartons
demain matin avant l’aube.
[Rénovation de mausolée].
« C’est pas bientôt fini ce
chantier ? — Ben on embauche
un peu quand on veut, le
contremaître nous engueule
parce qu’on va pas assez vite
mais on le fait marrer alors il se
remet à regarder son portable
et on est tranquille pendant
une demi heure. »
[Work in progress]. Quasiment en direct (d’un seul coup il y a de la Ram Mandir Mândû, mais c’est l’entrée par derrière que personne ne
bande passante dans le temple). Il est 10 h 20 ici. Levé depuis 6 h 00 voit sauf les initiés. excusez !
pour faire le portrait d’un type qui me l’a demandé gentiment. Mais il
est arrivé très en retard parce que son père was little thick. 1/4 d’h
chrono parce qu’il allait bosser. Depuis, je stationne dans le temple
hindou qui est en fait un petit complexe avec hébergement pour
les pélerins, oratoires et salles de discussions avec les prêtres, très
fréquenté et je vais y passer 4 ou 5 heures, le temps de discuter avec
tout le monde.
Défilé haute couture
quotidien. Christian Lacroix
peut aller se rhabiller,
croiser des bergères est
ici un enchantement. Le
plateau est essentiellement
occupé par de tout petits
hameaux de petites maisons
à l’allure de masures aux
murs de broussailles et de
boue séchée mais le plus
souvent très propres et
dépoussiérées à l’intérieur.
Toute la famille dort dans
la seule pièce, du petit qui
cours les fesses à l’air toute
la journée à la grand-mère
au regard absent en passant
par les ados qui espèrent un
portable ou un scooter. C’est
une vie agraire et pastorale
de base. C’est période de
fenaison pour certaines
céréales et la séparation
du grain de l’ivraie créée
des nuages de poussières
irrespirables.