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2,80 € jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO - N° 23 137 - www.lefigaro.fr - France métropolitaine uniquement Première édition

lefigaro.fr
« Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur » Beaumarchais

BIEN-ÊTRE ROMANS
APRÈS LES FÊTES, LES BARBERY, RAMBAUD, FOENKINOS…
BIENFAITS DE LA DÉTOX LES TÊTES D’AFFICHE
À L’INDIENNE PAGE 22 DE CE DÉBUT D’ANNÉE PAGE 24

Chères lectrices,
chers lecteurs,
Les géants du numérique
sous le feu des critiques
Les équipes du Figaro se sont
mobilisées comme jamais en
2018 pour vous faire partager
une actualité incroyablement
riche et complexe. À l’heure
où tant d’informations
circulent à grande vitesse sur
les réseaux sociaux, charriant
leur lot d’imprécisions,
Violation des données personnelles, fausses informations, manque d’éthique…
de manipulations ou
d’inexactitudes, notre travail
La réputation des champions américains de la tech a été rudement mise à mal en 2018.
è EN 2019, LA FRANCE FERA
d’analyse et de mise en
perspective n’a jamais été plus Longtemps portés aux nues, Instagram, Twitter et Face- protéger les données person- Congrès américain. Aux États-
les géants américains du nu- book sont notamment mis en nelles des internautes, dont ils Unis, le démantèlement du PAYER LES GAFA
nécessaire - ni plus difficile. è LINA KHAN, LA JURISTE QUI
Fort de votre soutien, Le Figaro mérique, les fameux Gafa, se cause pour servir de canal de font commerce, ce qui a valu à géant du commerce en ligne
FAIT TREMBLER AMAZON
è APPLE ET HUAWEI VICTIMES
est le premier journal national trouvent désormais régulière- diffusion à une multitude de Mark Zuckerberg, PDG de Fa- Amazon est ouvertement évo-
d’information de France, par sa ment sur le banc des accusés. fausses informations. Ils sont cebook, une convocation qué par les autorités de la DE LA GUERRE SINO-
diffusion et par son audience Google et les réseaux sociaux également accusés de ne pas spectaculaire devant le concurrence. AMÉRICAINE PAGES 16 ET 17
Internet. Vous n’avez jamais été
aussi nombreux à nous lire dans
toutes nos versions, imprimées
ou numériques.
Au sein d’un environnement En 2019, le monde suspendu Mélenchon
économique malmené, en
particulier en cette fin d’année à la diplomatie imprévisible encense un
2018, nous devons, comme nos
confrères l’ont fait, augmenter
de Donald Trump meneur des
le prix de vente du Figaro dans
sa version de papier à
« gilets jaunes »,
2,80 euros chez les marchands
de journaux. Nous faisons face
la gauche
en effet à des hausses
permanentes de nos coûts
déroutée
de transports et de distribution, Le chef de file des Insoumis,
sans oublier de nouvelles taxes Jean-Luc Mélenchon, a suscité
sur le papier des journaux le trouble en exprimant sa
imprimés. Cependant, « fascination » pour Éric
nous ne voulons pas baisser Drouet, un représentant mé-
la garde sur la qualité de notre diatique controversé des « gi-
offre éditoriale, alors même lets jaunes ». Le patron des
que vous avez besoin de plus députés de La France insoumi-
de profondeur et d’expertise se a dressé un parallèle avec un
dans la couverture éditoriale homonyme, le révolutionnaire
de l’information. Jean-Baptiste Drouet, partisan
Nous vous remercions de Robespierre qui contribua à
par avance de votre faire arrêter Louis XVI. Benoît
EVAN VUCCI/AP

compréhension et Hamon a exprimé un malaise

de votre fidélité. Merci surtout partagé au sein d’une partie de
pour la confiance que vous nous la gauche. Il avoue ne plus
accordez : elle nous oblige et comprendre ce que fait Jean-
nous pousse à être à la hauteur Sous pression sur le front intérieur, avec la menace d’une relance des enquêtes et l’échéance électorale qui se Luc Mélenchon qui a « quitté
de votre exigence. À l’aube rapproche, le président américain pourrait multiplier les coups d’éclat sur la scène internationale. PAGES 2, 3 ET L’ÉDITORIAL les rives de la gauche ». PAGE 5
de cette nouvelle année,
nous vous adressons tous
nos vœux, ainsi qu’à tous ceux
qui vous sont chers. ÉDITORIAL par Arnaud de La Grange adelagrange@lefigaro.fr
LA RENAISSANCE DE 5000 ANS DE CIVILISATION
MARC FEUILLÉE,
DIRECTEUR GÉNÉRAL,
DIRECTEUR DE LA PUBLICATION,
Seul contre tous…

S
ET ALEXIS BRÉZET,
DIRECTEUR DES RÉDACTIONS
eul astre brillant désormais dans une l’Iran, ni sur le conflit israélo-palestinien, ni

@ FIGARO OUI
FIGARO NON
Réponses à la question
de mercredi :
Retraite, assurance-
chômage, fonction
publique... Pensez-vous
qu’Emmanuel Macron
mènera à bien ses
réformes annoncées ?
OUI
36 %
Maison-Blanche désertée par ses
lieutenants, Donald Trump pourrait
méditer les mots de Louis XIV. « À qui
peut se vaincre soi-même, il est peu de
sur la relation avec la Russie les choses n’ont
vraiment avancé.
L’année 2018 a secoué, mais 2019 pourrait être
encore plus « rock »… Le président américain
chose qui puisse résister », écrivait le monarque adore la posture du « seul contre tous », qui as-
dans ses Mémoires pour l’instruction du dau- soit sa promesse de « l’Amérique d’abord ». Et
phin. Le principal problème du président tous les facteurs se
américain est sans doute là, dans ce préalable… Trump conjuguent pour ac-
Dans sa capacité à dominer ses instincts et ses centuer son inclina-
tweets sanguins. assoit sa tion : l’effacement
La dernière « pulsion » internationale de promesse de des voix dissonantes,
Trump a choqué. Le monde, ses alliés et jusque la pression accrue
NON dans ses propres rangs. La brutale décision de « l’Amérique des enquêtes relan-
64 % lâcher nos alliés kurdes a provoqué le départ d’abord » cées par une Cham-
Présenté par : LOTUS SACRÉ - Licences 2-1058887 / 3-1105096

TOTAL DE VOTANTS : 52 094 du général Mattis, patron du Pentagone. Un bre démocrate, une
homme présenté comme le dernier élément campagne électorale qui se profile. Et à l’exté-
Votez aujourd’hui solide et pondéré de son équipe. rieur, ses « amis » européens sont souvent af-
sur lefigaro.fr Aussi sommaire soit-elle, la lecture du monde faiblis ou entravés politiquement. LE PLUS GRAND
« Sans conteste
Croyez-vous que le par Trump a parfois ses vertus. Quand il dé- De tout cela se dégage une impression de man-
SPECTACLE au monde. »
3’:HIKKLA=]UW]U\:?a@b@a@n@k";

gouvernement français nonce un ordre international qui ne fonction- que de constance et de fiabilité. Et l’on peut
arrivera à faire payer ne pas et le blabla stérile des grands raouts di- craindre que la voix occidentale ne soit dura- — Ken Wells, ancien premier danseur
des impôts aux géants plomatiques, on ne peut que lui donner blement affaiblie par ce spectacle brouillon. de l’English National Ballet
M 00108 - 103 - F: 2,80 E

COMPLET
américains de l’Internet ? raison. Quand il renverse des tables bancales, Sans que l’on sache encore si la présidence
on observe, intéressé. Mais sa faculté à Trump aura été une parenthèse insolite des re- DÉJÀ COMPLET À NANTES ET MONTPELLIER | 21-23 février • ROUBAIX
E. LEOTY,-F. MANTOVANI/©MANTOVANI
©GALLIMARD/OPALE-J.- L. BERTINI/
construire après avoir bousculé reste à prou- lations internationales. Ou si un autre monde
LE FIGARO MAGAZINE-V. BOISOT/
LE FIGARO
ver. Ni sur la Corée, ni sur la Syrie, ni sur est en train d’émerger. ■ 16-20 janvier • 9-12 mai | Palais des Congrès de Paris
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jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
2 L'ÉVÉNEMENT
En 2019, le cavalier seul de
Entravé sur le plan intérieur mais doté d’un cabinet à sa main, le président américain
PHILIPPE GÉLIE £@geliefig
CORRESPONDANT À WASHINGTON
PRÈS DE DEUX ANS après son en-
trée à la Maison-Blanche, Donald
La Trump continue d’étonner le mon-
de, de le diviser, parfois même de le
nomination choquer avec une politique étran-
de hauts gère qui casse les codes. Mais nul ne
peut prétendre qu’elle soit encore
responsables imprévisible.
« Les décisions du président
avec une Trump qui nous surprennent le plus
expérience plus sont souvent celles qui devraient
nous surprendre le moins – c’est-à-
limitée, dire celles qui reflètent ses instincts
l’abandon plutôt que les conseils de son entou-
rage, note Robert Malley, président
d’alliés qui ont de l’International Crisis Group. Le
combattu à nos sommet avec Kim Jong-un, la dé-
nonciation de l’accord nucléaire avec
côtés et l’Iran, l’annonce du retrait des trou-
l’affirmation pes américaines de Syrie et d’Afgha-
nistan, l’attitude méprisante vis-à-
irréfléchie du vis de l’Europe : toutes ces
président selon orientations prises l’an passé sont
dans la lignée de ce qu’il avait an-
laquelle les noncé pendant sa campagne, et tou-
États-Unis ont tes sont cohérentes avec sa vision du
monde et du rôle des États-Unis. »
longtemps été
un “ pigeon ”
dans les
affaires Endiguer l’influence de
mondiales
tirent sa l’Iran reste une priorité
présidence vers
»
GEORGES MALBRUNOT £@Malbrunot
le bas
MITT ROMNEY, CANDIDAT À L’ÉTÉ 2017, à ses amis opposants
RÉPUBLICAIN À L’ÉLECTION iraniens, les Moudjahidins du peu-
PRÉSIDENTIELLE DE 2012, ple réunis à Paris, John Bolton pro-
ÉLU SÉNATEUR DE L’UTAH mettait que le régime de Téhéran
LORS DES « MIDTERMS » ne fêterait pas son 40e anniversai-
DE NOVEMBRE. re. La prévision du faucon, qui al-
#
JAMES M. DOBSON/AP lait devenir quelques mois plus
tard conseiller à la sécurité natio-
nale de Donald Trump, a peu de
chances de se réaliser. La Républi-
que islamique s’apprête à célébrer
en février ses 40 ans, et contraire-
ment à ce qu’affirme Bolton, aucu-
ne alternative crédible ne se dessi-
ne, ni en Iran, ni hors de ses
LE TWEET frontières. Mais, asphyxiés par les
sanctions imposées par Washing-
« Calmez- ton, confrontés au départ des so-
vous » ciétés étrangères qui ont cédé aux
menaces de rétorsions américai-
Bonne année nes, les Iraniens n’ont guère le mo-
à tous, y compris ral, comme en témoigne la persis-
tance de manifestations à travers le
les haineux pays.
Si le régime ne va pas tomber
et les médias dans les prochains mois, la volonté
fake news ! […] américaine de le mettre à genoux
reste intacte. Et si à Washington, le
Calmez-vous, mot d’ordre n’est plus au regime
appréciez le voyage, change, le « changement de com-
portement » de Téhéran au Moyen-
plein de choses Orient reste la priorité dans le ca-
fantastiques dre d’une stratégie d’endiguement
de son influence. Comment l’Iran,
se passent dans affaibli, y répondra-t-il en 2019 ?
notre pays. En Syrie, où Téhéran et les mili-
@realDonaldTrump
ces qui en sont proches ont aidé
Bachar el-Assad à rester au pou-
voir, l’annonce du retrait améri-
cain du nord-est du pays est une
aubaine. En abandonnant les Kur-
des, les Américains renforcent
l’influence chiite sur un arc allant
de Bagdad à Beyrouth.
« Après un soutien extrêmement
conséquent, coûteux et efficace, la
République islamique envisage dé-
sormais de toucher les dividendes de
son engagement victorieux, estime
un diplomate. Elle ambitionne de
reconstruire un corridor routier re-
liant l’Iran à la Méditerranée, ins-
crivant définitivement son action en
Syrie dans une logique plus géostra-
tégique qu’idéologique ou religieu-
En 2019, se. » Une dynamique qui la met-
trait en contact direct avec trois
la stratégie domaines maritimes clés (Golfe,
de défense Caspienne et Méditerranée).
Pour garder ce corridor, Téhé-
nationale
restera notre
ran a démarré la construction de
bases militaires sur le territoire sy-
rien, provoquant en 2018 une
guide »
PATRICK SHANAHAN,
montée des tensions avec Israël.
« Les actions préventives et de ré-
LE NOUVEAU CHEF torsion de l’armée israélienne ne
DU PENTAGONE pourront donc qu’augmenter et du-
A
MARK WILSON/AFP rer », prévient un expert militaire.
Le départ prochain également
Pour cet ancien conseiller des
présidents Clinton et Obama, « il
s’ensuit que le pronostic le plus sûr –
ou le moins risqué – pour 2019 est
qu’il continuera sur cette lancée.
Plus l’étau des enquêtes légales qui le
visent se resserrera, plus il se sentira
aux abois. Et plus la campagne élec-
torale de 2020 approchera, plus il
sera tenté de se fier à ses inclinations
et réflexes naturels. »
Le 2 janvier 2018, le président
américain avait commencé l’an-
née par une série de tweets agres-
sifs envers l’Iran, annonçant : « Le
temps du changement est venu. »
Le 3, il brandissait son « bouton
nucléaire plus gros » que celui du
dirigeant nord-coréen. Le 11, il
brocardait ces « pays de m… »
dont il ne voulait plus les mi-
grants. Le 3 mars, il déclenchait
une série de guerres commerciales
« pas si mauvaises, et faciles à ga-
gner ». Le 4 avril, il ordonnait au
Pentagone de préparer le retrait
des forces américaines de Syrie.
Une semaine plus tard, il tirait 105
missiles contre des installations
chimiques du régime de Bachar
el-Assad, après avoir exigé des
des forces américaines de leur base
d’al-Tanf, sur la route Damas-Ba-
gdad, facilitera sa réoccupation par
les troupes syriennes, verrouillant
encore plus l’influence iranienne.
Même si sous pression russe et is-
raélienne, l’Iran a dû reculer en
2018 du Sud syrien.
Faire le dos rond
La présence iranienne en Syrie,
jusqu’ici cantonnée à des objectifs
militaires, tend à devenir égale-
ment une présence économique,
Téhéran cherchant désormais à se
positionner en maître d’œuvre de
la reconstruction. Cependant, la
reprise des relations diplomatiques
entre Damas et un certain nombre
de pays arabes pourrait réduire la
marge de manœuvre de l’Iran chez
son allié syrien. Les Émirats arabes
unis, Bahreïn et l’Égypte réinves-
tissent la Syrie pour ne plus laisser
Téhéran seul à la manœuvre. L’ar-
gent du Golfe contre la fin de l’al-
liance Damas-Téhéran ? Non. As-
sad ne renoncera pas à ses alliés
historiques iraniens, indispensa-
bles à sa survie, mais il peut -
poussé par la Russie - les inciter à
des replis tactiques.
La stratégie américaine d’endi-
guement de l’Iran s’applique éga-
lement au Hezbollah libanais, frap-
pé lui aussi au portefeuille. Mais
jamais l’Iran ne renoncera à la dé-
fense de son allié qui lui donne cet
accès à la Méditerranée, si long-
temps recherché. « Et si jamais
l’Iran ou le Liban sont attaqués,
confie un proche de Cheikh Nas-
rallah, le chef du Hezbollah, les ri-
postes ne viendront pas uniquement
d’Iran et du Liban, mais des missiles
seront également tirés de Syrie et
d’Irak. La guerre en Syrie nous a
donné une profondeur stratégique
que nous n’avions pas avant. » En
août, l’agence Reuters révélait que
l’Iran avait livré des missiles balis-
tiques à des milices chiites alliées
en Irak et y développe des capaci-
tés de production pour protéger ses
intérêts et se donner les moyens de
riposter à une attaque de ses enne-
mis dans la région.
Cependant en Irak, Téhéran doit
veiller à ne pas susciter davantage
d’antagonismes parmi les chiites
du Sud, qui vivent mal les pres-
sions iraniennes. Bref, si l’Iran est
affaibli, Téhéran garde une indé-
niable capacité de projection hors
de ses frontières. « L’Iran fait le dos
rond et mise sur un départ de Trump
dans deux ans, décrypte le diplo-
mate. En attendant, Téhéran est
prêt à faire un geste au Yémen. Et en
Arabie, il laisse le prince héritier
Mohammed Ben Salman empêtré
dans ses problèmes ». ■
plans pour assassiner le président
syrien…
Le 24 avril, il accueillait Emma-
nuel Macron à Washington en vi-
site d’État. Le Français se voyait
comme un intermédiaire indis-
pensable pour que l’Europe et le
monde « ne tombent pas dans une
sorte de néant » face aux foucades
de l’Américain. Mais le 8 mai,
Trump ignorait à nouveau toutes
les recommandations en dénon-
çant l’accord nucléaire avec
l’Iran. Le 21, dans son premier
discours de secrétaire d’État, Mike
Pompeo lançait à Téhéran douze
injonctions en forme d’ultima-
tum. Entre-temps était inaugurée
l’ambassade américaine à Jérusa-
lem, dont Trump avait décidé le
transfert fin 2017.
En juin, il a enchaîné un G7 dé-
sastreux au Canada – retirant sa
Donald Trump
signature de la déclaration finale –
avec un sommet sans précédent à
lors de la cérémonie Singapour face au jeune dictateur
de signature
de la loi d’amélioration
nord-coréen, prétendant à la sor-
tie que « le problème est réglé ».
de l’agriculture 2018,
à la Maison-Blanche, Scénario similaire en juillet : un
le 20 décembre dernier. sommet de l’Otan conflictuel suivi
d’un tête-à-tête langoureux avec
JACQUELYNE MARTIN/AP
Après
un soutien L’Amérique oublie son vieil
au régime
ISABELLE LASSERRE £@ilasserre
de Bachar
el-Assad
DANS LES BILANS diplomatiques,
extrêmement 2018 restera sans doute pour
conséquent, l’Union européenne une année
coûteux noire, l’année de la perte de son
principal allié, celui qui défendait
et efficace, avec elle depuis la Seconde Guerre
la République mondiale les principes et les va-
islamique leurs du monde occidental, de la
démocratie et de la coopération
d’Iran internationale. Les tentatives
envisage d’Emmanuel Macron, d’Angela
désormais Merkel et de Theresa May d’inflé-
chir les instincts « nationalistes »
de toucher et « isolationnistes » de Donald
les dividendes Trump ont échoué les unes après
de son les autres. Ni la méthode ferme de
engagement
la chancelière allemande ni l’atti-
tude ouverte et amicale du prési-
victorieux
UN DIPLOMATE
» dent français n’ont réussi à in-
fluencer le chef d’État américain
et à le faire revenir sur son aban-
don des engagements internatio-
naux, qu’il s’agisse du compromis
sur le nucléaire iranien ou de l’ac-
cord de Paris sur le climat. Jus-
qu’au retrait du communiqué final
du G7 en juin 2018, au Québec,
Vladimir Poutine où le président
américain donne raison au russe,
contre ses services de renseigne-
ments. En septembre, il ferme la
représentation palestinienne à
Washington et déclare la guerre à
la Cour pénale internationale
(CPI). En octobre, il annonce le
retrait américain du traité sur les
Forces nucléaires intermédiaires
(INF). Après l’assassinat du jour-
naliste Jamal Khashoggi dans le
consulat saoudien d’Istanbul, il
défend contre vents et marées son
« partenariat solide » avec Riyad.
En décembre, il concrétise sa dé-
cision de retrait des forces améri-
caines de Syrie dans les quatre
mois.
Pour le 45e président, l’ordre
international issu de la Seconde
Guerre mondiale « ne fonctionne
pas du tout ». Il n’est ni dans l’in-
térêt ni dans les moyens des États-
Unis d’être « le gendarme du mon-
de ». Les organisations
multilatérales sont des instru-
ments d’ingérence menaçant la
souveraineté américaine. Le G7 et
le G20 sont vus comme une perte
de temps et un effort déplaisant de
Donald Trump a montré le peu de
cas qu’il faisait de ses alliés et de
leur avis.
La tendance au désengagement
américain avait déjà été amorcée
par Barack Obama, qui avait lâché
son allié français en Syrie au der-
nier moment, en refusant d’inter-
venir après une attaque chimique
du régime de Damas en août 2013.
« Trump fait cependant franchir
une nouvelle étape aux États-Unis
dans ce qui n’est plus seulement un
retrait des responsabilités, mais
une entreprise de sape de l’ordre in-
ternational et de ses principes »,
analyse le chercheur Nicolas Ten-
zer dans « The Conversation ». Il
poursuit : « Le principe d’une poli-
tique d’alliance dénoncée par Do-
nald Trump fait peser des doutes
sur la garantie américaine dans le
cadre de l’Otan. » Le multilatéra-
lisme, sur lequel étaient en partie
fondées les relations entre les pays
occidentaux, est mis en danger par
l’unilatéralisme de Donald Trump.
Au sein de l’Europe, la France
est sans doute le pays européen qui
pâtira le plus de la dernière initia-

Donald Trump
aura une grande liberté sur la scène internationale.
coercition internationale. L’UE est
« un groupe de pays mis ensemble
pour tirer avantage des États-
Unis ». L’ONU n’est utile que pour
isoler la Corée du Nord et l’Iran.
Quand ses membres désapprou-
vent le transfert de l’ambassade
américaine à Jérusalem, Washing-
ton « prend les noms » et coupe les
fonds… Pour Trump, la crainte
inspirée par la puissance repré-
sente un levier bien plus efficace
que le partage de « valeurs ».
Désengagement massif
« J’ai pigé », a décrété l’ex-homme
d’affaires au début de 2018. Sur la
Corée du Nord comme sur la Syrie,
il se flatte de « prendre ses décisions
tout seul ». L’habitude d’« envoyer
ses conseillers se faire voir » fait le
vide autour de lui. John Kelly, chief
of staff démissionnaire, demande
d’être jugé « à ce que le président n’a
pas fait » quand il était là… Avec le
départ de James Mattis du Pentago-
ne, plus personne ne se sent tenu de
contrôler les « instincts » présiden-
tiels.
Donald Trump va pouvoir don-
ner libre cours à sa vision de
allié et laisse l’Europe désunie et en plein doute
tive de la Maison-Blanche, le re-
trait de Syrie. La stratégie antiter-
roriste de Paris au Levant était
intimement liée à l’engagement
américain. Si le départ des troupes
américaines est confirmé, les
Français seront la seule force occi-
dentale restante en Syrie, sans
partenaire fiable sur qui s’ap-
puyer. L’attaque terroriste de
Strasbourg en décembre prouve,
s’il en était encore besoin, que le
danger djihadiste reste toujours
aussi vif et que la France demeure
l’une de ses principales cibles.
Politiquement, la volte-face
américaine révèle l’impasse de la
politique syrienne de la France.
Plus que les autres responsables
européens, Emmanuel Macron
avait investi dans une relation
personnelle avec Donald Trump,
qu’il s’était même un temps targué
d’avoir convaincu de rester en Sy-
rie. Sans l’appui des Américains,
comment faire pour maintenir la
pression contre Daech, traquer les
djihadistes français, menacer le
régime quand il lance des attaques
chimiques ? Sans le soutien de
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« l’Amérique d’abord », mélange
de protectionnisme et d’unilaté-
ralisme brutal. L’imposition par la
force de ses priorités se double
d’un désengagement massif, de
l’Afrique au Proche-Orient, que la
Chine et la Russie s’empressent de
combler. « Beaucoup de pays ont
compris qu’on ne peut plus compter
sur Washington », déplore Ri-
chard Haass, président du Council
on Foreign Relations. Le magazine
Time définit son « désir contradic-
toire de se retirer du monde et de
projeter la puissance » comme un
« isolationnisme belliqueux ».
La troisième année de son man-
dat s’ouvre sur une nouvelle don-
ne : un cabinet à sa main, d’où les
fortes personnalités ont disparu ;
un Congrès divisé où la Chambre
des représentants, contrôlée par les
démocrates, promet de le harceler
d’enquêtes, voire d’un impeach-
ment ; les conclusions du procureur
spécial Robert Mueller sur les
soupçons de collusion avec la Rus-
sie et d’entrave à la justice, qui
pourraient donner du grain à mou-
dre à l’opposition ; une campagne
présidentielle déjà amorcée, avec
Washington, alors que Londres est
aux abonnés absents, comment
faire face à la Russie et à la Chine
au Conseil de sécurité de l’ONU ?
Comment défendre les valeurs dé-
mocratiques face à la montée de
l’autoritarisme et à l’influence
grandissante des puissances jugées
déstabilisatrices - Iran, Russie,
Turquie - qui au Moyen-Orient
s’engouffrent dans le vide laissé
par l’effacement américain ?
« Le dernier garde-fou »
À cet égard, 2019 pourrait bien être
l’année de tous les dangers pour
l’Europe. Non seulement la politi-
que disruptive du président améri-
cain va se poursuivre, mais ses va-
gues, poussées par le vent,
atteignent le Vieux Continent. Af-
faiblis chez eux par les mêmes for-
ces qui ont élu Trump et qui pro-
pulsent les mouvements anti-
système au pouvoir ou jettent les
manifestants dans la rue, les trois
grands pays européens n’auront
plus les leviers nécessaires pour
s’imposer dans les bras de fer di-
plomatiques et commerciaux avec
une foule de démocrates sur la li-
gne de départ… Ce cocktail annon-
ce un président entravé sur le plan
intérieur, mais les mains assez li-
bres sur la scène internationale
pour y continuer son cavalier seul
(et y faire diversion si nécessaire).
Au menu des prochains mois fi-
gurent la résolution de la guerre
commerciale avec la Chine, que le
président dit être en bonne voie ;
un plan de paix israélo-palesti-
nien annoncé de longue date mais
probablement retardé à nouveau
par les législatives d’avril en Is-
raël ; la poursuite incertaine du
bras de fer avec l’Iran ; la mise en
cause toujours plus accentuée des
alliances et institutions interna-
tionales. « Il ne faudra pas être
surpris si Trump nous réveille un
matin avec un tweet annonçant
qu’il a entamé le retrait de l’Otan
ou le rapatriement des troupes de
Corée du Sud », prévient Derek
Chollet, ancien du Pentagone pas-
sé au German Marshall Fund. Pour
le Washington Post, « si vous aimez
le drame, préparez-vous, car l’an-
née écoulée n’a été que la répétition
générale de celle qui vient ». ■
la Maison-Blanche. À court terme
en tout cas, ils auront le nez rivé
sur les menaces intérieures, qui
risquent de prendre le pas sur les
défis extérieurs, pourtant de plus
en plus nombreux. À six mois des
élections européennes, les pro-
fondes divisions au sein du conti-
nent affaiblissent davantage enco-
re la voix de Berlin et de Paris face
à Donald Trump. Et depuis sa dé-
mission le 20 décembre, les diplo-
mates et militaires français ne
peuvent plus compter sur la com-
préhension et la continuité qu’as-
surait jusque-là Jim Mattis, le se-
crétaire américain à la Défense,
considéré comme « le dernier gar-
de-fou » de Trump. Emmanuel
Macron espérait que les différen-
ces transatlantiques créeraient
l’opportunité d’une nouvelle soli-
darité européenne. À lui seul il n’a
pu faire bouger le système. L’Eu-
rope saura-t-elle trouver l’éner-
gie et les ressorts suffisants pour
prendre en main sa défense, se
transformer en puissance et com-
penser l’affaiblissement du lien
transatlantique ? ■
L'ÉVÉNEMENT
Kim Jong-un
lors de son
allocution
traditionnelle
du Nouvel An
à la télévision.
KOREAN
CENTRAL NEWS
AGENCY/KOREA
NEWS SERVICE
Le compte à rebours
VIA AP
est lancé sur le dossier
nord-coréen
SÉBASTIEN FALLETTI £@fallettiseb
SHANGHAI
KIM Jong-un manie la carotte
mais menace d’user du bâton
pour amadouer Donald Trump.
Costume-cravate sombre, lunet-
tes studieuses, le leader suprême
nord-coréen a enfilé la panoplie
du dirigeant « responsable », à
l’occasion de son allocution tradi-
tionnelle du Nouvel An, pour
mieux convaincre le président
américain de lâcher du lest sur le
front nucléaire. Installé dans un
fauteuil en cuir, devant une che-
minée rappelant étrangement le
Bureau ovale de la Maison-Blan-
che, le jeune dictateur a réaffirmé
son engagement à ne pas « pro-
duire » ni « multiplier » des armes
atomiques, mais il a posé ses
conditions à tout pas supplémen-
taire en vue du démantèlement de
son arsenal, menaçant de repren-
dre sa stratégie d’affrontement.
« Je suis toujours prêt à m’as-
seoir avec le président américain à
tout moment et à faire des efforts
pour produire un résultat qui satis-
fera la communauté internationa-
le », a déclaré, rassurant, le diri-
geant de l’État paria, appelant à la
tenue d’un second sommet avec
Trump, après la poignée de main
historique du 12 juin, à Singapour.
Un an après avoir lancé le spec-
taculaire rapprochement diplo-
matique avec Washington, et
Séoul, à l’occasion de
son adresse du
1er janvier 2018, Kim
veut transformer
l’essai en arrachant
28 500
un allègement des GI
sanctions internatio- sont aujourd’hui
nales qui étranglent stationnés au sud
sa fragile économie et
ses ressources en de-
vises étrangères.
de la DMZ
Après une année 2017 sous haute
tension, le dirigeant trentenaire a
Trump fait mené l’an passé une offensive de
franchir une charme réussie, brisant son isole-
ment grâce à la suspension de ses
nouvelle étape essais atomiques et balistiques et à
aux États-Unis l’engagement de travailler à la
dans ce qui n’est « dénucléarisation de la péninsu-
le ». « Nous sommes tombés amou-
plus seulement reux », a même affirmé Trump à
un retrait des l’endroit de l’héritier de la seule
responsabilités, dynastie « communiste » de la
planète.
mais une Mais, en 2019, la lune de miel
entreprise de pourrait tourner court, alors que
sape de l’ordre le couple doit passer du stade des
belles intentions aux engage-
international et ments concrets. Si les deux lea-
de ses ders bénéficient à court terme de
principes »
LE CHERCHEUR NICOLAS
cette proximité affichée, les stra-
tèges des deux camps comptent
engranger des résultats tangibles
TENZER
cette année, sous peine d’enclen-
DANS « THE
cher un nouveau cycle de ten-
CONVERSATION » sions. « C’est un jeu de poker aveu-
gle », juge François Godement,
directeur au European Council on
Foreign Relations (ECFR).
Trump a rapidement salué d’un
tweet l’adresse de Pyongyang et
LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019
3
indiqué mercredi avoir reçu une
« formidable » lettre du leader
nord-coréen, assurant sa volonté
de tenir bientôt un second som-
met avec Kim. Mais le report ré-
gulier de la rencontre depuis
l’automne, comme celui de la vi-
site du dictateur à Séoul, illustre
les divergences en coulisse.
L’impatience gagne Kim, après
plusieurs mois d’impasse et l’an-
nulation abrupte le 7 novembre de
la rencontre entre le négociateur
Kim Yong-chol et Mike Pompeo,
le secrétaire d’État américain. Le
dictateur lance la balle dans le jar-
din de la Maison-Blanche, agitant
la menace d’un changement de
pied brutal. « Nous pourrions
n’avoir d’autre choix que de pren-
dre une nouvelle voie si les États-
Unis ne tiennent pas leur promesse,
jaugent mal notre patience et cher-
chent à forcer les choses de façon
unilatérale, en s’accrochant aux
sanctions et aux pressions », pré-
vient Kim.
En clair, Pyongyang menace de
relancer l’escalade si Trump n’al-
lège pas les lourdes sanctions de
l’ONU, imposées à la suite de son
cavalier seul nucléaire. Le diri-
geant va plus loin, exigeant la fin
« complète » des exercices militai-
res américains en Corée du Sud,
pour le moment seulement « sus-
pendus » par Trump. Le retrait des
troupes américaines en Syrie dé-
crétée par le président peut nour-
rir les espoirs de Pyongyang de
voir les 28 500 GI posté
au sud de la DMZ (
zone coréenne démili-
tarisée) faire leurs ba-
gages.
Les belles intentions
de Singapour, visant à
la dénucléarisation de
la péninsule, se fracas-
sent sur la réalité des
négociations. Ce
concept englobe « le retrait de
toute source de menace nucléaire
non seulement au Sud et au Nord,
mais aussi dans les régions voisines
de la péninsule », a précisé l’agen-
ce officielle KCNA, le 20 décem-
bre. Les bases américaines au Ja-
pon, ou à Guam, garantes du
« parapluie nucléaire » américain
sur Séoul, sont donc sur la table
des négociations, selon cette vi-
sion maximaliste. Des exigences
inacceptables pour le Pentagone,
dont le chef démissionnaire James
Mattis était perçu comme un gar-
de-fou dans la région.
Le compte à rebours est lancé.
« Les Nord-Coréens aimeraient
obtenir quelque chose pour l’anni-
versaire de Kim Il-sung, le 15 avril.
Mais l’attitude de Trump sera gui-
dée par la politique intérieure, et il
utilisera la carte nord-coréenne
lorsqu’il en aura besoin », juge
Jean Lee, experte au Wilson Cen-
ter, à Washington. Avec pour am-
bition de décrocher un trophée,
pacifique ou belliqueux, en vue de
A
la prochaine campagne présiden-
tielle. ■
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO

4 POLITIQUE
Macron prend
la plume pour
renouer avec
les Français
En diffusant une lettre mi-janvier, le chef
de l’État veut montrer qu’il prendra toute
Emmanuel Macron
sort de son bureau
à l’Élysée.
sa part dans le « grand débat national ». PHILIPPE WOJAZER/AFP

MATHILDE SIRAUD £@Mathilde_Sd
ÉLYSÉE C’est un grand classique de la
communication présidentielle. Comme
François Mitterrand et Nicolas Sarkozy
avant lui (lire ci-dessous), Emmanuel
Macron va adresser mi-janvier une
« lettre aux Français ». Le chef de l’État
l’a promis lors de ses vœux, lundi soir.
Pour le président de la République, cet-
te initiative participe de sa stratégie de
reconquête de l’opinion.
Au lendemain d’une crise sociale iné-
dite, de manifestations où son nom et sa
figure s’accompagnaient de slogans
hostiles voire haineux, Emmanuel Ma-
cron cherche à renouer le lien avec les
Français, à tenter de regagner leur
confiance pour pouvoir continuer à ré-
former et réussir le « grand débat na-
tional » qui doit se tenir tout au long du
premier trimestre.
L’Élysée a indiqué mercredi que cette
missive serait diffusée dans la presse et
sur les réseaux sociaux, plutôt que par
courrier. « Les questions de coût et de
praticité ont guidé » ce choix, explique
l’entourage du chef de l’État au Figaro.
Toujours selon le Palais, cette lettre de-
vra « cadrer les thèmes du débat et en
préciser les attentes ». Elle marquera le
coup d’envoi de la « phase deux » du
débat et devrait prendre en compte les
remontées de terrain et échanges entre
les maires et les administrés qui ont lieu
jusqu’à mi-janvier.
Contenu secret
Si l’Élysée a communiqué sur les moda-
lités de cette lettre, l’objectif est de gar-
der le contenu secret le plus longtemps
possible. « Tout ce qui participe de
l’adresse directe, de la sensibilisation est
une bonne chose », salue le député La Ré-
publique en marche (LaREM) de la Vien-
ne, Sacha Houlié. « La parole du prési-
En 1988 et en 2012, les lettres de Mitterrand et de Sarkozy
LORIS BOICHOT £@lboichot
UN PARFUM de Mitterrand et de Sarkozy
imprègne la lettre d’Emmanuel Macron
aux Français. En 1988 et en 2012, les deux
présidents se sont eux aussi adressés par
écrit à leurs « chers compatriotes », façon
de créer une relation privilégiée avec
chaque citoyen. Mais les ressemblances
s’arrêtent là. Le message d’Emmanuel
Macron cadrera les thèmes de son
« grand débat ». Ceux de ses prédéces-
seurs, alors candidats à leur succession,
exposaient leur bilan et la philosophie de
dent est très écoutée, on l’a vu lors de son
allocution pour présenter les mesures
d’urgence, début décembre. Politique-
ment, c’est la seule personne ou presque
dont la voix compte, au-delà même de la
majorité. » Le 10 décembre, le discours
d’Emmanuel Macron avait en effet été
suivi par 23 millions de téléspectateurs,
un record d’audience. Pourtant, selon
l’un de ses très proches, le président de
la République « a eu envie d’écrire aux
Français bien avant ce discours, pour leur
rappeler quelques convictions fortes, pour
leur projet aux électeurs, à dix-sept jours
de la présidentielle. Présentée comme
une « sorte de réflexion en commun, com-
me il arrive le soir, autour de la table, en fa-
mille », la « Lettre à tous les Français » de
François Mitterrand est diffusée le 7 avril
1988 à deux millions d’exemplaires. Libé-
ration, Le Parisien et 23 quotidiens de la
presse régionale la relaient sous forme
d’encart publicitaire – une pratique alors
autorisée. D’autres titres, dont Le Figaro,
en reproduisent des extraits.
Amoureux des lettres, le président so-
cialiste y développe ses propositions, de
la réduction du mandat présidentiel au
amorcer le travail de rassemblement ».
« C’était son idée », confie ce fidèle.
Avant lui, le ministre de l’Action et
des Comptes publics, Gérald Darmanin,
avait déjà pris la plume, au mois d’août,
pour expliquer aux contribuables l’ob-
jectif et la mise en œuvre du prélève-
ment à la source. L’expérience a plutôt
été bien perçue et aurait « inspiré » le
chef de l’État, selon l’un de ses proches.
Cette opération doit surtout permet-
tre d’impulser le grand débat national
et de montrer que le président de la Ré-
« revenu minimum » pour les « victimes de
la nouvelle pauvreté » – le futur revenu
minimum d’insertion (RMI) – et met en
garde contre « l’égarement raciste ». Il est
réélu en mai 1988 face à Jacques Chirac.
Une « France unie »
« Après tout, ça ne lui avait pas si mal
réussi cette lettre aux Français », jugera
plus tard Nicolas Sarkozy. En difficulté
dans les sondages, à son tour d’adresser
le 5 avril 2012 une « Lettre au peuple fran-
çais » de 34 pages, tirée à 6 millions
d’exemplaires et diffusée sur le terrain
par des élus et des militants, mais aussi
publique veut y prendre toute sa part.
En adressant ses vœux aux Français, il
avait appelé à débattre et à « parler
vrai » dans le cadre de cette consulta-
tion. « Parler vrai, c’est parler de la réa-
lité », avait déclaré le chef de l’État, qui
prend soin de se montrer davantage à
l’écoute depuis la crise des « gilets jau-
nes ». Jusqu’à mi-mars, les Français
sont invités à débattre autour de quatre
thèmes : la transition écologique, la fis-
calité, l’organisation de l’État et la dé-
mocratie et la citoyenneté. ■
sur les réseaux sociaux. Dans un texte
moins long que celui de l’ancien prési-
dent socialiste, le chef de l’État, conseillé
par l’intellectuel conservateur Patrick
Buisson, prévient contre « une société »,
« un pays » et « un continent sans frontiè-
res ».Quand François Mitterrand appe-
lait de ses vœux une « France unie » et ci-
tait en conclusion le socialiste Jean
Jaurès, le candidat de l’UMP préfère dé-
fendre une « France forte » et conclure sa
lettre par des mots du général de Gaulle :
« Si nous n’étions pas le peuple français,
nous pourrions reculer devant la tâche.
Mais nous sommes le peuple français. » ■

L’alliance européenne
CONFÉRENCE - DÉBAT
de Dupont-Aignan
La tête de liste des « Amoureux de la France »
a officialisé son association au groupe
européen ECR, concurrent de celui du RN, l’ENL.
MICHEL ONFRAY, UN ITINÉRAIRE PHILOSOPHIQUE CHARLES SAPIN £@csapin
A l’occasion de la parution de Sagesse, le dernier volume de sa trilogie philosophique et de la sortie EUROPÉENNES Ils étaient tombés d’ac-
d’un Cahier de l’Herne qui lui est consacré, le fondateur de l’université populaire de Caen est l’invité cord sur l’ampleur de leurs désaccords.
des Rencontres du Figaro. Auteur de plus de 80 ouvrages qui vont de la philosophie à la poésie en Malgré les mains tendues de Marine Le
Pen, c’est à la tête de sa propre liste que
passant par l’Histoire et la littérature, Michel Onfray retracera son itinéraire intellectuel et évoquera Nicolas Dupont-Aignan a préféré partir
les auteurs qui l’accompagnent et nourrissent sa réflexion. à la conquête des prochaines européen-
nes. « Ce n’est pas très grave, on se re-
trouvera au Parlement européen »,
euphémisait alors la patronne du Ras-
semblement national. C’était visible-
sont modérés et raisonnables, et veulent
revoir totalement les règles de l’Union
européenne. Il se prépare un tremblement
de terre au Parlement, cela dépasse de
très loin les petites rivalités françaises. »
Si, dans les rangs du Rassemblement
national, on préfère feindre l’indifféren-
ce, on rappelle malicieusement que les
élections ne sont pas jouées : « Peu im-
porte le nombre de groupes ou de structu-
res, ce qui compte, c’est que ceux qui veu-
lent rendre aux peuples les rênes de leur
destin soient majoritaires demain en Eu-

MICHEL ONFRAY ment méjuger les aspirations d’indé-

pendance de son ancien allié du second
tour de la présidentielle.
rope, balaye le délégué national Jean-Lin
Lacapelle. Je souhaite avant tout à Du-
pont-Aignan de dépasser les 5 % en mai
Alors que le groupe du RN au Parle-
MARDI 22 JANVIER 2019 ment européen, l’Europe des nations et
prochain. Nous avons suffisamment d’ex-
périence parlementaire pour savoir qu’il
20H00 - SALLE GAVEAU des libertés (ENL), multiplie les tracta- vaut mieux rester humble et prudent que
M. Onfray © François Bouchon

tions pour attirer à lui de nouveaux alliés
45-47 rue La Boétie, 75008 Paris en vue de constituer le plus important
groupe souverainiste de cette assem-
blée, c’est avec son principal concurrent
que le député de l’Essonne a préféré
pactiser en vue de la prochaine législa-
TARIF : 25 € ture européenne.
Le 21 décembre dernier, le Polonais
Placement Libre Ryszard Legutko, coprésident du groupe
Réservez vos places sur des Conservateurs et réformistes euro-
www.lefigaro.fr/rencontres péens (ECR), a ainsi officialisé l’associa-
tion de Debout la France - comme ses
Informations au 01 70 37 31 70 potentiels futurs eurodéputés « Amou-
reux de la France » - à son groupe parle-
mentaire : « Je me réjouis que nous
œuvrions ensemble à des réformes indis-
pensables et significatives au sein de
l’Union. Nous partageons l’idée qu’une
démocratie et une responsabilité politique
authentiques doivent être rétablies », a-t-
il salué. « Il ne s’agit pas d’une démarche
de fermeture ni d’hostilité vis-à-vis des
autres groupes, tient à préciser au Figaro
A
de mettre la charrue avant les bœufs. »
Entre 80 et 130 élus
Brexit oblige, le départ des élus britan-
niques du Parlement européen, prévu en
mars, bouleverse les rapports de force
au sein de l’hémicycle de Strasbourg.
Tout particulièrement entre ses trois
groupes eurosceptiques - l’ENL, l’EFDD
et l’ECR -, dont seuls deux seront en ca-
pacité de se maintenir.
Avec le ralliement de Debout la Fran-
ce, comme du jeune parti national
conservateur espagnol Vox, le groupe
ECR rassemblerait 21 nationalités diffé-
rentes et pourrait tabler, selon les son-
dages, entre 80 et 130 élus en mai pro-
chain. Des projections qui feraient de lui
le deuxième groupe le plus important de
l’hémicycle européen.
Pour célébrer le ralliement de leur
nouvel allié tricolore, la coalition lance-
ra sa campagne des européennes lors

Nicolas Dupont-Aignan. Les membres de d’une convention, le 28 février prochain

l’ECR gouvernent dans beaucoup de pays, à Paris. ■

Mélenchon surprend la gauche
en se disant fasciné par Drouet
Le leader de La France insoumise a dressé un parallèle étonnant entre le « gilet jaune »
qui rêvait d’envahir l’Élysée et le révolutionnaire Jean-Baptiste Drouet.
TRISTAN QUINAULT-MAUPOIL £@TristanQM
OPPOSITION C’est un hommage qui
n’était pas attendu. En publiant lundi un
long billet de blog dithyrambique sur Éric
Drouet, une des figures du mouvement
des « gilets jaunes », le leader de La
France insoumise a provoqué la surprise,
à gauche. « Je m’amuse des ironies de
l’histoire que cette séquence comporte. Il y
en a tant ! La plus suave pour l’ami que je
suis de l’histoire révolutionnaire, c’est de
voir l’action de M. Éric Drouet », écrit le
député des Bouches-du-Rhône qui dit
avoir « tant de fascination » pour le
chauffeur routier âgé de 33 ans, sans affi-
liation politique revendiquée.
Jean-Luc Mélenchon rappelle qu’il « y
a déjà eu un Drouet décisif dans l’histoire
révolutionnaire de la France ». Jean-
Baptiste Drouet s’est illustré en 1791 en
reconnaissant le roi Louis XVI sur la rou-
te de Varennes « fuyant Paris, le peuple
et la révolution », a encore relevé le par-
lementaire. Et de faire un parallèle avec
Éric Drouet, qui doit comparaître le
5 juin prochain devant le tribunal cor-
rectionnel pour port d’arme prohibé de
catégorie D. « Sur le seul tableau à l’As-
semblée nationale montrant un épisode de
cette Révolution française, on le voit, lui
Drouet, un pistolet à la main, menaçant le
président de séance un jour où les sans-
culottes parisiens avaient envahi l’hémi-
cycle de l’Assemblée nationale. » Les
« réactionnaires de l’époque » s’en offus-
quaient tandis que Robespierre lançait :
« Vous vouliez une révolution sans révo-
lution ? », souligne-t-il.
Mais l’éloge de ce « gilet jaune » irrite
le sénateur PS Rachid Temal. « Jean-Luc
Mélenchon glorifie un personnage qui ap-
pelle à prendre l’Élysée. Il met de côté les
valeurs de la gauche pour servir la soupe à
CONTRE-POINT
PAR GUILLAUME TABARD £@GTabard
La dangereuse logique
insurrectionnelle de l’Insoumis
D
rôle de parallèle construit
sur une simple homonymie.
Et qui permet à Jean-Luc
Mélenchon de voir dans
le « gilet jaune » Éric Drouet une
réincarnation du révolutionnaire
Jean-Baptiste Drouet. Évidemment,
la comparaison était plus compliquée à
établir avec Juliette Drouet, la maîtresse
de Victor Hugo, Minou Drouet,
l’enfant poète des années cinquante,
ou un autre Jean-Baptiste Drouet,
premier gouverneur général de l’Algérie
sous la Monarchie de Juillet…
Bienheureux révolutionnaire qui
fournit au leader de La France insoumise
l’occasion d’afficher sa « fascination »
pour une logique où l’exaltation de la
révolution et de l’insurrection l’emporte
sur l’acceptation de l’élection.
Reconnaissons à Mélenchon
le mérite de la cohérence. Admirateur
de Robespierre, il a toujours pris la
Révolution française « comme un bloc »,
selon le conseil de Clemenceau,
n’établissant pas de distinction de nature
entre les essais des Cahiers de doléances
et les excès de la Terreur. Dès lors,
le rapprochement des deux Drouet est
révélateur. Le révolutionnaire est en effet
celui qui, reconnaissant Louis XVI,
a permis son arrestation à Varennes
puis, ultimement, son exécution, tandis
que le « gilet jaune » est celui qui invitait
à « entrer » à l’Élysée, autrement dit
à en déloger l’occupant actuel. Et dans
un mouvement au cours duquel des
effigies d’Emmanuel Macron furent
brûlées ou carrément guillotinées,
le parallèle a de quoi faire froid dans le
dos. Car Mélenchon applaudit au geste
« citoyen » qui a permis de mettre
à bas un « tyran » puisque à ses yeux
la défense de la souveraineté populaire
passait par la suppression de l’ordre
politique en place. Et c’est là que la
symétrie mélenchoniste est inquiétante
car elle en vient à justifier la mise
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Jean-Luc Mélenchon
rencontre des « gilets jaunes »,
le 8 décembre à Bordeaux.
AMEZ/ROBERT/SIPA
ce personnage sulfureux », s’insurge-t-il.
Le 6 décembre dernier, à la veille d’une
nouvelle manifestation parisienne, Éric
Drouet avait effectivement appelé sur
BFMTV à « entrer » dans le palais prési-
dentiel, déclenchant l’ouverture d’une
enquête pour « provocation à la commis-
sion d’un crime ou d’un délit » et « orga-
nisation d’une manifestation illicite ».
« Révolution citoyenne »
Même surprise pour Benoît Hamon. In-
terrogé mercredi sur RTL, l’ancien candi-
dat à l’élection présidentielle a dit ne
« pas (être) fasciné par quelqu’un qui,
semble-t-il, assume d’avoir voté aux deux
tours pour Marine Le Pen » (Ce qu’Éric
Drouet a réfuté sur Facebook, NDLR). « Je
ne comprends plus ce que fait Jean-Luc
Mélenchon. Il a quitté les rives de la gauche,
en cause de la légitimité du pouvoir
macronien, fut-il démocratiquement élu,
dès lors qu’il serait perçu comme
attentatoire à la justice ou au bien
du peuple. N’est-ce pas le propre
de la logique révolutionnaire de stipuler
que la légalité d’une autorité politique
ne suffit pas à garantir sa légitimité ?
Et donc n’interdit pas son empêchement
par d’autres voies que la voie électorale ?
Là encore, il y a une forme de cohérence
du leader de La France insoumise entre
sa fascination pour le modèle vénézuélien
et son exaltation du mouvement
des « gilets jaunes », toutes deux fondées
sur sa conviction que l’histoire n’a rien
de linéaire et qu’elle se construit à coups
de bascules brutales, incompréhensibles
pour ceux qui croient à la résistance
des institutions.
Mais dans son dangereux lyrisme
révolutionnaire, Jean-Luc Mélenchon
joue aussi contre lui-même. Car sa
posture lui interdit d’être le fédérateur
des gauches, comme en témoigne la
réaction de Benoît Hamon. Elle valide
l’analyse de ceux qui parient sur une
fusion inévitable des extrêmes, dans
la foulée du précédent italien. Tout
en faisant le jeu de celle qu’il présente
pourtant comme sa véritable adversaire,
Marine Le Pen. Laquelle donne
l’impression de moins chercher
ostensiblement à récupérer les « gilets
jaunes », tout en respectant la logique
des institutions. Laissant ainsi Mélenchon
sortir seul du cadre républicain. ■
il fait autre chose », a encore tancé l’an-
cien socialiste. Benoît Hamon a également
rappelé que le député apparenté LFI Fran-
çois Ruffin avait récemment cité dans
l’Hémicycle Étienne Chouard pour faire,
cette fois, l’éloge du référendum d’initia-
tive citoyenne (RIC). Ce dernier est plus
connu pour sa proximité idéologique avec
Alain Soral qu’avec la gauche. « Tout ça
c’est du petit commerce électoral », a
chargé Benoît Hamon qui estime que
Jean-Luc Mélenchon a « oublié ce que
c’est la droite et la gauche ».
Une lourde charge qui a agacé les ca-
dres de La France insoumise. À commen-
cer par le premier d’entre eux, Jean-Luc
Mélenchon : « Éric Drouet dément avoir
voté Le Pen. Benoît Hamon a donc inventé
une fausse information. Il s’excuse auprès
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POLITIQUE
pard, le directeur des campagnes de LFI
d’ajouter : « Dans la série des bonnes ré-
solutions, j’en propose une à Benoît Hamon
pour 2019 : réserver ses coups pour Ma-
cron et ceux qui font tant de mal à notre
pays ». De son côté, le député Adrien
Quatennens a dénoncé « le mépris » de
Benoît Hamon pour les « gilets jaunes »
et a déploré que l’ancien ministre « tape
sans arrêt sur Jean-Luc Mélenchon ».
Les mots de Jean-Luc Mélenchon à
l’égard d’Éric Drouet illustrent une nou-
velle fois la volonté de LFI d’adresser un
clin d’œil appuyé aux gilets jaunes, à
quelques mois des élections européennes.
« 70 % (de leurs revendications) étaient
dans mon programme […]. C’est un mou-
vement qui me donne entièrement raison »,
avait-il dit le 16 décembre dernier lors du
« Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro ». ■
i d’’un enfant
nez parrain
LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019
5
ZOOM
Benalla : la commission
des lois du Sénat
demande des comptes
La commission des lois du Sénat a
annoncé mercredi avoir demandé
des explications à l’Élysée et
au gouvernement le 28 décembre
sur « les conditions dans
lesquelles M. Alexandre Benalla
a pu faire usage de passeports
diplomatiques » après
son licenciement en juillet.
La presse a révélé que l’ancien
collaborateur d’Emmanuel Macron
disposait toujours de passeports
diplomatiques et qu’il effectuait
des voyages d’affaires auprès
de dirigeants africains,
« alors même qu’il avait déclaré,
lors de son audition sous serment
du 19 septembre 2018, les avoir
laissés dans le bureau qu’il
occupait à l’Élysée », a souligné
la commission. Par ailleurs, le
président a reconnu avoir répondu
à deux reprises « de manière
laconique » à son ancien chargé
de mission, licencié cet été
après sa mise en cause dans
des violences en marge des
manifestations du 1er Mai, a indiqué
mercredi l’Élysée, confirmant une
information du Canard enchaîné.
EN BREF
L’hypothèse d’un
référendum envisagée
L’exécutif étudie la piste d’un
référendum à questions multiples
sur les institutions. Nombre
de parlementaires, vote blanc,
proportionnelle, cumul des
mandats : telles seraient les
questions envisagées lors de cette
consultation, selon le député de
La République en marche, Sacha
Houlié. « Cette piste est à l’étude »,
a affirmé mercredi sur LCI l’élu
de la Vienne, proche du président.
Ce référendum pourrait avoir lieu
à l’issue du grand débat national,
voulu par le chef de l’État pour
répondre aux « gilets jaunes ».
A
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO

6 INTERNATIONAL
Au Brésil, un nouveau gouvernement
pour « se libérer du socialisme »
Les ministres nommés par le président d’extrême droite Jair Bolsonaro ont pris leurs fonctions mercredi.

PATRICK BÈLE pbele@lefigaro.fr

AMÉRIQUE LATINE Lors de son

discours d’investiture mardi, le
nouveau président brésilien a
confirmé sa vision de ce que le Bré-
sil avait besoin : « Se libérer du so-
cialisme, se consacrer aux vraies
valeurs. » L’annonce de la compo-
sition du gouvernement, qui a pris
ses fonctions mercredi, montre
qu’il entend respecter « le mandat
que les électeurs lui ont confié ».
Les premiers à vivre les change-
ments de la politique gouverne-
mentale sont les Indiens d’Amazo-
nie. Jair Bolsonaro affiche une
volonté d’ignorer leurs droits si
ceux-ci font obstacle au dévelop-
pement économique, qu’ils vivent
dans des zones isolées ou qu’ils
soient déjà en contact avec le mon-
de extérieur. Le président a ainsi
décidé que le ministre de l’Agricul-
ture sera en charge de la démarca-
tion des terres indigènes. Une déci-
sion qui choque les militants de la
protection de leurs droits. Le lobby
agricole brésilien est très puissant
et lutte continuellement contre la
reconnaissance du droit des indi-
gènes sur leurs terres. Au sein
même de l’armée chargée de l’en-
cadrement de la protection de la
forêt amazonienne, de nombreux Jair Bolsonaro vironnement - c’est le moins qu’on secrétariat du gouvernement sera penser au programme pour adapter Mais la nomination la plus em-
responsables estiment qu’une entouré de membres puisse dire - et la préservation des occupé par le général Carlos Alberto le pays aux nouveaux défis techno- blématique, et la plus éclairante sur
ouverture plus importante de l’ex- de son gouvernement droits des Indiens de l’Amazonie, le dos Santos Cruz. Il était déjà secré- logiques. la future politique du gouverne-
ploitation et de la déforestation de lors d’une cérémonie discours de Bolsonaro rejette toute taire à la Sécurité publique au mi- Le nouveau président brésilien ment brésilien, est celle de Paulo
l’Amazone risque de provoquer des au palais présidentiel, préoccupation écologique et ne nistère de la Justice du gouverne- devait aussi donner des signes po- Guedes à l’Économie. Formé à
le 2 janvier à Brasilia.
conflits locaux très violents et diffi- mentionne même pas les droits des ment de Michel Temer, qui n’a sitifs aux Églises évangélistes qui l’école d’économie de Chicago,
ERALDO PERES/AP
cilement contrôlables. Indiens d’Amazonie. échappé à la justice qu’avec la com- ont largement contribué à sa vic- adepte des théories ultralibérales
La nouvelle ministre de l’Agri- plicité des parlementaires, pour leur toire et pèsent d’un poids impor- de Milton Friedman, il propose une
culture, Tereza Cristina da Costa, Donner des signes grande majorité impliqués comme tant dans la vie politique brésilien- privatisation de tous les actifs déte-
était auparavant une députée re- aux évangélistes lui dans des scandales de corrup- ne. Il a donc nommé Damares nus par l’État. Pour accompagner
présentante officielle du lobby L’affichage militariste de Jair Bolso- tion. Alves au ministère de la Femme, de cette cure de néolibéralisme au
agro-industriel qui a permis à Jair naro, alors que sa carrière au sein Le général Augusto Heleno Ri- la Famille et des Droits de l’hom- Brésil souhaitée par le nouveau
Bolsonaro de capter l’appui du des forces armées n’a été qu’une beiro dirigera, lui, le cabinet de la me. Cette femme pasteur évangé- président Jair Bolsonaro, ce dernier
monde rural. Si les années de pou- parenthèse par rapport à sa vie par- Sécurité institutionnelle. Pour la liste s’inscrit dans la droite ligne de a désigné Roberto Campos Neto à la
voir du Parti des travailleurs avec lementaire, trouve sa concrétisation Science et la Technologie, c’est le son Église opposée aux droits des tête de la banque centrale, lui aussi
Lula et Dilma Rousseff n’ont pas été dans la nomination de nombreux lieutenant-colonel des forces ar- homosexuels, à l’avortement et pur produit de l’école néolibérale
marquées par une sensibilité à l’en- gradés dans son gouvernement. Le mées Marcos Pontes qui devra aux droits des minorités. de Chicago. ■

Fernando Henrique Cardoso : « Le système traditionnel a éclaté »

PROPOS RECUEILLIS PAR
ADRIEN JAULMES
ajaulmes@lefigaro.fr
FERNANDO Henrique Cardoso a
été président du Brésil durant
deux mandats, entre 1985 et 2002.
Sociologue de formation, intellec-
tuel polyglotte, il fut aussi l’un des
rédacteurs de la Constitution dé-
mocratique de 1988. Alors que
vient d’entrer en fonction le nou-
veau président Jair Bolsonaro, il
répond aux questions du Figaro.
Le FIGARO. - L’élection de Jair
Bolsonaro est-elle la manifestation
d’une crise de la démocratie
brésilienne ?
Fernando Henrique CARDOSO. -
Non, mais nous sommes à la fin
d’un cycle, qui avait commencé
par le rétablissement de la démo-
cratie au Brésil et la nouvelle
Constitution de 1988. Mais ce n’est
pas un phénomène uniquement
brésilien. Tous les pays démocra-
tiques connaissent actuellement
une crise profonde, en grande
partie due au développement des
moyens de communication et des
réseaux sociaux. La mobilisation
politique devient de plus en plus
rapide, et les institutions ne sa-
vent pas comment y répondre.
Notre problème est actuellement
de faire coexister le mouvement et
les structures.
Nous nous trouvons dans une si-
tuation qui rappelle un peu celle
de la IVe République en France.
Mais nous n’avons pas de Gaulle.
Quelqu’un qui ait le sens de l’État,
le sens de l’histoire. Il n’y a pas
d’homme d’État.
J’étais à Paris en 1968, et j’ai assis-
té aux événements de Mai en tant
A
ciété française, alors composée de
classes sociales avec des intérêts
divers et des partis qui les repré-
sentaient, était bloquée. Mai 1968
est arrivé à ce moment-là. Nous
sommes face à ce genre de blocage
de la société.
Les électeurs ont-ils voulu
signifier leur rejet du système
avec l’élection de Jair Bolsonaro ?
Boslonaro est un homme ordinai-
re, qui sait parler aux gens du
commun. Il est loin d’être bête. Il
n’aurait pas été élu sans un certain
nombre de qualités. Il a joué sur le
discrédit de la classe politique
mais aussi sur la violence qui me-
nace les catégories populaires.
Bolsonaro a compris la nécessité
de mettre de l’ordre, de donner
aux pauvres gens le droit de vivre
en sécurité.
La situation au Brésil est préoccu-
pante. Je connais bien les favelas
pour y avoir travaillé à plusieurs
reprises, quand je dirigeai une
commission sur la drogue ou bien
quand j’étudiais les religions
afro-brésiliennes comme le can-
domblé ou l’umbada. Aujour-
d’hui, le crime organisé dirige
tout. Pour entrer dans une favela
il faut prévenir la police qu’on y
va, et lui demander de ne pas y
aller. Il faut aussi entrer en
contact avec les organisations
criminelles qui la dirige. C’est une
contre-société. Nous sommes des
gens qui vivons dans un autre
pays. Le gouvernement est en-
cerclé par cela. Il faut avoir vu les
relations entre le crime et le pou-
voir au niveau local. C’est dange-
reux. Il y a une zone grise.
Bolsonaro a su symboliser l’ordre :
mettre fin à cela, et en finir avec la
corruption. Ces deux facteurs ont
suffi à son élection. Le peuple a
voté pour la sécurité et contre la
corruption. Les espoirs sont énor-
mes, comme d’habitude après une
élection, mais personne ne sait ce
qui va se passer.
Jair Bolsonaro peut-il réussir ?
Le système traditionnel des partis,
des médias, de la justice, a éclaté.
Fernando Henrique Bolsonaro l’a bien compris, et son
Cardoso : « Bolsonaro entourage aussi. Il a senti l’aspira-
est un homme ordinaire, tion profonde de la société. Il a
qui sait parler aux gens
du commun. Il a compris nommé des gens pour réformer
la nécessité de mettre l’économie. Mais il va se heurter à
de l’ordre, de donner de puissants intérêts, et à des cor-
aux pauvres gens porations qui vont tenter de le fai-
le droit de vivre re échouer. Il aura, quoi qu’il arri-
en sécurité. » ROBSON ve, d’énormes difficultés.
FERNANDJES/PICTURE Je ne sais pas comment Bolsonaro
ALLIANCE/ESTADAO CONTE va réussir à la fois à obtenir le sou-
tien de la Chambre, respecter les
lois, et maintenir sa popularité.
Nous sommes dans un système où
le président joue un rôle crucial.
Mais où il n’a pas tous les pou-
voirs. Et s’il ne sait pas comment
travailler avec le Congrès, il va
avoir des problèmes. Le Brésil est
devenu indépendant au début du
XIXe siècle sous la forme d’un em-
pire. Il en est resté quelque chose.
D’une certaine façon, le président
est toujours une sorte d’empe-
reur, qui doit exercer un pouvoir
modérateur. Je ne sais pas si Bol-
sonaro se rend compte de ça.
Les présidents qui ne travaillent
pas avec le Congrès (la Chambre
des députés et le Sénat) finissent
tous par avoir des problèmes. Sur
les quatre présidents depuis le ré-
tablissement de la démocratie,
Fernando Collor a été empêché,
Lula est en prison et Dilma Rous-
seff a été empêchée. Je suis le seul
Il faut fonctionner avec le
Congrès, respecter les institutions,
les armées, la justice, mais aussi la
finance, la culture. Il faut en plus
être capable de parler à la nation.
Et aussi comprendre le monde ex-
térieur. Ce n’est pas facile.
Vous avez connu la période
de la dictature : le fait que
Jair Bolsonaro se soit entouré
d’un grand nombre de militaires
vous semble-t-il préoccupant ?
Non. C’est un milieu que je
connais bien, puisque mon père
était militaire. Ce qui ne m’a pas
empêché d’être contre le coup
d’État, et lui aussi. Il faut aussi
garder à l’esprit que l’armée bré-
silienne a énormément changé.
Les militaires se sont profession-
nalisés. Quand j’étais président
de la République, j’ai pris deux
décisions concernant l’armée, au
début de mon mandat. La pre-
mière a été de créer un ministère
de la Défense et de nommer un
civil à ce poste, alors qu’aupara-
vant chaque branche des forces
armées était administrée séparé-
ment par des généraux. On disait
que les militaires refuseraient
cette réforme. Je leur ai expliqué
pourquoi je la faisais, et tout s’est
bien passé.
Les militaires sont ceux qui ont le
plus le sens des réalités. Ils aiment
l’ordre, mais ils sont aussi issus de
la classe moyenne. Ils ont aussi,
plus que beaucoup d’autres, un
sens de l’échelle du pays.
Je crains plus la famille de Bolso-
naro, sa femme et ses fils, et aussi
les réactionnaires idéologues qui
l’entourent. J’ai aussi des doutes à
propos de son alignement sur
Trump, et ses idées dans le domai-
ne de la culture sont préoccupan-

que sociologue, élève de Raymond à être parvenu à travailler avec le tes. L’économie devrait aller, il a
Aron et d’Alain Touraine. La so- pouvoir législatif. nommé des gens compétents. ■

Le procureur
qui tient l’avenir
de Nétanyahou
entre ses mains
Avichai Mandelblit doit décider s’il suit les
recommandations de la police et inculpe le
premier ministre israélien pour corruption.
MARC HENRY
JÉRUSALEM
ISRAËL Son allure timide de juriste
consciencieux est trompeuse. Bien
malgré lui, Avichai Mandelblit est ac-
tuellement l’homme le plus puissant
d’Israël. Procureur général, il tient
dans ses mains l’avenir politique de
Benyamin Nétanyahou, qui brigue un
cinquième mandat aux élections du
9 avril prochain. Il doit décider s’il suit
les recommandations de la police et in-
culpe l’inamovible premier ministre
dans trois affaires de corruption. Un
véritable dilemme pour ce juif obser-
vant de 55 ans qui porte la kippa noire
des juifs religieux. Il est redevable
d’une grande partie de sa carrière à
Benyamin Nétanyahou, qui l’a propulsé
secrétaire du cabinet en 2013, avant de
lui confier trois ans plus tard le poste
clé de conseiller juridique du gouver-
nement, qui fait office de procureur gé-
néral. Difficile dans ces conditions de
conserver une totale indépendance
vis-à-vis de son bienfaiteur et, ce
d’autant que cette nomination est in-
tervenue alors que les enquêtes préli-
minaires avaient débuté dans des affai-
res impliquant Benyamin Nétanyahou
et son épouse, Sara.
Auparavant, Avichai Mandelblit
avait suivi un brillant cursus d’expert
en droit militaire. Montant peu à peu
tous les échelons, il a été promu en
En Turquie, la crise du papier
fragilise le monde de l’édition
La presse turque, déjà affectée par la censure et les procès de journalistes, est
aujourd’hui fragilisée par la chute de la monnaie locale, alors que s’envolent
les prix du papier importé de l’étranger.
DELPHINE MINOUI £@DelphineMinoui
CORRESPONDANTE À ISTANBUL
MÉDIAS Menaces de mort, visites d’in-
timidation, convocation au tribunal. Du
haut de ses 27 ans, la mythique gazette
satirique LeMan a résisté à toutes les
tempêtes. « Dire que c’est la crise éco-
nomique qui pourrait finir par avoir notre
peau ! », ironise Tuncay Akgün, son ré-
dacteur en chef. Ce n’est pas une bla-
gue : en un an, le prix du papier – un
produit importé - a quasiment doublé à
cause de l’effondrement de la livre tur-
que, mettant en péril la survie d’un des
derniers journaux qui ose critiquer le
pouvoir. « Les problèmes politiques, on
connaît. On a appris à naviguer entre les
obstacles et on est prêt à subir les consé-
quences de notre engagement. Mais là,
quand il s’agit de fric, on est à court de
solution », poursuit le grand gaillard
aux cheveux poivre et sel, perdu dans
un nuage de fumée.
Il nous a donné rendez-vous dans le
troquet qui fait office de hall d’accueil
du magazine, à deux pas des boutiques
de prêt-à-porter et des bars branchés
de l’avenue Istiklal. Un vieux tube de
Lenny Kravitz enrobe ce même espace
tapissé de coupures de journaux et de
dessins érotiques, où une bande de
caïds fous furieux fit irruption après le
putsch raté de juillet 2016 contre le pré-
sident Erdogan. « À l’époque, la police
avait calmé le jeu en retirant des kiosques
à journaux tous les exemplaires du nu-
méro consacré au coup d’État », racon-
te, impassible, Tuncay Akgün.
Cigarette au bec, il invite à traverser
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
2009 procureur général de l’armée
avec à la clé le grade de général. Mais
c’est Benyamin Nétanyahou qui l’a
vraiment sorti de l’ombre. Pour para-
chever cette ascension méthodique, il
ne lui manque plus que d’atteindre le
Graal en devenant juge à la très presti-
gieuse Cour suprême. Encore faut-il
pour ce père de six enfants sortir in-
demne d’un véritable psychodrame
dont il tient la vedette. À tous ceux qui
le soupçonnent de complaisance en-
vers Benyamin Nétanyahou et l’accu-
sent de traîner les pieds, il réplique
systématiquement qu’il ne se laissera
« guider que par les preuves fournies et
la justice » et qu’aucune considération
politique ne viendra influer ou accélé-
rer ses décisions.
Pressé de toutes parts
Cette rigueur, ou cette extrême pru-
dence, lui vaut de se retrouver tiré à
hue et à dia. Pendant des semaines, des
centaines de manifestants anticorrup-
tion se sont rassemblées chaque samedi
soir devant son domicile dans la ban-
lieue de Tel-Aviv pour le presser de
donner un coup d’accélérateur aux en-
quêtes. Désormais, c’est l’autre camp
qui a pris l’offensive. Le quotidien
Israel Hayom, considéré comme le por-
te-voix du premier ministre, a cité en
une Benyamin Nétanyahou proclamant
qu’il n’avait aucune intention de dé-
missionner en cas d’inculpation avant
ou après les élections. Pire encore : des
la pièce jusqu’à la porte blindée – pré-
caution d’usage depuis la déferlante
d’insultes qui suivit l’édition spéciale
« Charlie Hebdo », publiée au lende-
main de l’attentat parisien de jan-
vier 2015 – qui donne sur les escaliers.
Son bureau est niché au cinquième éta-
ge de l’immeuble : un pigeonnier sous
les toits où trône un dessin de Cortès.
D’un geste lent, Tuncay étale sur sa ta-
ble de travail les exemplaires les plus
récents de LeMan : avec leur taille ré-
duite de moitié, on les croirait tout droit
sortis d’un lavage raté en machine.
« Ben, pour l’instant, c’est la seule solu-
tion qu’on ait trouvée pour faire des éco-
nomies », souffle-t-il. Et cela aurait pu
“
Les temps sont durs.
Nous faisons face à un vrai
”
défi
MINE SOYSAL, ÉDITRICE
être pire : le numéro datant du 29 août,
au pic de la crise financière, a les men-
surations d’une pochette de CD. Évi-
demment, l’humour est toujours au
rendez-vous. « Quoi qu’il advienne,
monte sur scène et fait rire la foule », y
assène, en dernière page de couverture,
la caricature d’un clown en larmes à un
dessinateur de LeMan, le pinceau coin-
cé derrière l’oreille. Lequel lui répond
dans sa bulle : « Il n’y a plus de papier…
On ne peut plus transmettre notre mes-
sage au public. »
La phrase, d’un réalisme mordant,
résume à elle seule le danger que cette
crise du papier fait peser sur la circula-
tion de l’information. Le tableau de la
Avichai Mandelblit
(ici en février dernier,
à Jérusalem) doit
une grande partie
de sa carrière
à Benyamin
Nétanyahou.
ABIR SULTAN/EPA/MAXPPP
membres du Likoud, le parti de droite
du premier ministre, ont menacé de
lancer une « campagne sans merci »
contre Avichai Mandelblit au cas où il
oserait inculper le premier ministre.
Histoire d’enfoncer le clou, plusieurs
ministres lui ont même dénié le droit
de s’en prendre à Benyamin Nétanya-
hou.
« Ce n’est pas à un fonctionnaire,
quelle que soit sa fonction, de déterminer
le sort du pays et de remettre en cause le
choix des électeurs », s’insurge Tzipi
Hotovely, vice-ministre des Affaires
presse turque, sinistrée par la censure
qui sévit de plus en plus depuis 2016,
était déjà bien sombre : plus d’une cen-
taine de journalistes derrière les bar-
reaux, des journaux indépendants
contraints de fermer, des médias aux
ordres du pouvoir. « La crise du papier
ne fait que renforcer le fossé entre la
presse indépendante, fragile et précaire,
et la presse progouvernementale soute-
nue par le pouvoir et financée par de
grands groupes proches d’Erdogan »,
observe Erol Onderoglu, le représen-
tant de Reporters sans frontières en
Turquie. Ces derniers mois, plusieurs
quotidiens ont déjà dû renoncer à leur
édition du week-end. D’autres ont ré-
duit leur pagination ou encore augmen-
té leur prix de vente. Particulièrement
touchés par cette récession, certains
quotidiens de province se transforment
en hebdomadaires, comme Ozgur Ses,
dans la ville d’Aydin… en priant pour ne
pas avoir à mettre la clef sous la porte.
Le monde de l’édition n’est pas épar-
gné. « Les temps sont durs. Nous faisons
face à un vrai défi, à cause de l’augmen-
tation du prix du papier, mais aussi de
l’encre, également importée », avance
l’éditrice Mine Soysal. Fondée en 1954,
sa maison, Günisigli Kitapligi, a déjà
traversé d’autres crises économiques,
comme au début des années 2000.
« Mais à l’époque, le gouvernement était
plus réactif. Le climat politique était dif-
férent. Les autorités semblaient plus en
mesure de pallier nos problèmes », esti-
me-t-elle. Autre enjeu de taille pour
cette maison d’édition spécialisée dans
les livres pour enfants : le versement
des « copyrights » aux auteurs étran-
INTERNATIONAL
étrangères. Le chef de la majorité par-
lementaire David Amsalem, très pro-
che du premier ministre, a pour sa part
cru bon de presser le procureur général
de faire preuve de « force mentale pour
prendre la bonne décision ». Autrement
dit, ce serait folie que d’inculper
Benyamin Nétanyahou. La bataille juri-
dique pour savoir si, en cas d’inculpa-
tion avant le vote, le premier ministre
doit démissionner ou si, après sa pro-
bable victoire, il devra renoncer au
pouvoir suite aux élections fait d’ores
et déjà rage.
Des ouvriers de l’imprimerie de l’hebdomadaire satirique LeMan vérifient des
exemplaires sortis de presse, en septembre dernier, à Istanbul. OSMAN ORSAL/REUTERS
gers. « Comme les prix sont souvent fixés
en euros, nous faisons face à de grosses
difficultés de paiement. Avec l’augmen-
tation du taux de change, provoquée par
la chute de la livre turque, nous nous
retrouvons à payer le double d’avant »,
souffle Mine, dont le catalogue compte
un tiers de livres étrangers traduits en
turc.
Pour l’heure, cette amoureuse des li-
vres parvient à négocier au coup par
coup avec les maisons d’édition euro-
péennes. Mais, à terme, l’impact de la
crise économique pourrait s’avérer dé-
sastreux : plusieurs publications sont
déjà en liquidation judiciaire. « Si la ré-
cession perdure, les maisons d’édition
turques qui veulent survivre seront
contraintes d’acheter moins de livres
étrangers. Par souci de rentabilité, elles
privilégieront également des ouvrages
simples et grand public, au détriment de
romans et d’essais plus pointus. La di-
versité des points de vue, si nécessaire au
débat d’idées, en sera directement affec-
tée », dit-elle. Ces inquiétudes ne lais-
sent rien présager de bon à l’heure où
les pages de la démocratie se noircis-
sent de plus en plus dans la Turquie
d’Erdogan. ■
LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019
7
Coup de théâtre dans
l’opposition avant
les élections d’avril
L’opposition de centre gauche en Israël
a connu mardi un coup de théâtre avec
l’annonce de la fin de l’alliance entre
le chef du Parti travailliste, Avi Gabbay,
et la chef de l’opposition, Tzipi Livni,
au sein du parti Union sioniste. Cette
formation, qui a obtenu 24 sièges aux
élections de 2015, réunissait le Parti
travailliste et le mouvement Hatenoua
de Tzipi Livni. Mais depuis que Gabbay a
pris en 2017 la tête du Parti travailliste,
l’avenir de ce partenariat semblait
incertain pour le scrutin du 9 avril.
« J’ai espéré et cru que le partenariat
pourrait nous permettre de nous
développer et de créer une véritable
union. […] Les gens ont vu les choses
autrement et se sont éloignés », a dit
Avi Gabbay, au côté de Tzipi Livni, lors
d’une réunion de l’Union sioniste. « Je
crois encore dans la coopération et
l’union des forces, mais, pour cela, il
faut de l’amitié, de la confiance et des
engagements tenus, ce qui n’est pas le
cas ici », a-t-il déclaré, souhaitant
« bonne chance » à Tzipi Livni, très
surprise de cette annonce. (AFP)
Ces derniers jours, un nouveau fait a
davantage dégradé l’atmosphère : la
tombe du père d’Avichai Mandelblit a
été vandalisée. Le premier ministre a
aussitôt dénoncé cet acte, en laissant
entendre qu’il pourrait s’agir d’un coup
tordu visant à susciter la colère du pro-
cureur général contre lui. Difficile dans
ces conditions pour Avichai Mandelblit
de garder la tête froide et surtout de
prédire son verdict.
Seule certitude : il lui est arrivé de se
cabrer et d’invoquer la défense de
l’État de droit pour refuser de défendre
devant la Cour suprême des projets de
loi approuvés par le gouvernement
qu’il a jugés contraires aux Lois fonda-
mentales, qui servent de Constitution à
Israël. Il s’est ainsi récemment opposé à
un de ces textes qui permettrait à l’ar-
mée israélienne d’expulser des mem-
bres de la famille de Palestiniens de
Cisjordanie auteurs d’attentats anti-is-
raéliens. Reste à savoir jusqu’où ces
velléités de « résistance » pourraient
aller dans le cas Nétanyahou. ■
EN BREF
Pour Xi Jinping, Taïwan est
vouée à la « réunification »
Taïwan sera réunifiée à la Chine,
a promis mercredi le président
chinois, Xi Jinping, défiant
son homologue taïwanaise en
réaffirmant que Pékin ne
renoncerait pas à la force pour
récupérer l’île. « L’indépendance
de Taïwan ne pourra conduire
qu’à une impasse, a-t-il prévenu.
La Chine doit être réunifiée
et elle le sera. »
Transport aérien : davantage
d’accidents et de victimes
L’année 2018 a enregistré
15 accidents mortels d’avions de
ligne, qui ont tué 556 personnes
dans le monde. Des chiffres
en forte hausse sur un an, selon
l’association spécialisée dans ce
type de catastrophes Aviation
Safety Network (ASN). Trois
des 15 appareils étaient exploités
A
par des compagnies figurant
sur la « liste noire » de l’UE.

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
8 SOCIÉTÉ
Deux tout-petits
sur trois
regardent tous
les jours la télé
Un tiers des enfants de 2 ans ne joue
presque jamais au ballon, selon une étude
sur les activités physiques et les écrans.
AGNÈS LECLAIR £@AgnesLeclair
FAMILLE Un enfant sur trois (33 %) de
2 ans ne joue jamais ou seulement occa-
sionnellement à la balle et 68 % des
tout-petits de cet âge regardent tous les
jours ou presque la télévision, révèle une
étude de l’Ined et de l’Inserm. Cette en-
quête documente pour la première fois
en France la fréquence des activités
physiques et le temps passé devant les
écrans des enfants de 2 ans, nés en 2011.
Remise fin décembre à la Direction
générale de la santé (DGS) et dévoilée
mercredi, cette étude a été effectuée sur
une cohorte de plus de 10 000 enfants
dans le cadre de l’étude longitudinale
Elfe. Alors que le sujet de la surexposi-
tion des jeunes enfants aux écrans fait
polémique depuis le cri d’alarme lancé
La guerre entre
Pougatchev et Poutine
s’importe à Nice
L’homme d’affaires est aujourd’hui menacé
par la Russie de la confiscation de tous ses biens
en France. Rencontre avec un oligarque déchu.
VINCENT-XAVIER MORVAN
£@vincentxaviermo
NICE
JUSTICE Nous étions prévenus qu’il
n’était pas forcément ponctuel. C’est
donc avec presque deux heures de re-
tard que Sergueï Pougatchev a fait son
entrée dans le lobby du Palais de la Mé-
diterranée en ce soir d’orage de la fin
décembre. Il ne traîne pourtant pas
derrière lui la réputation détestable de
certains de ses ex-compatriotes russes
en villégiature sur la Côte d’Azur. Très
élégant en jean et blazer bleu, chemise à
rayures et mocassins en croco, l’hom-
me à la barbe bien taillée se prête sans
broncher à la séance photo dans le hall
de cet hôtel de la promenade des An-
glais, avant de se replier pour l’entre-
tien, son garde du corps jamais très
loin, dans un salon feutré à l’étage.
Le 29 novembre, le nom de Sergueï
Pougatchev, 55 ans, est réapparu sous
les radars, au tribunal de grande ins-
tance de Nice. Ses avocats sont venus y
plaider un recours en nullité et un sursis
à statuer dans la procédure que lui in-
tente la Fédération de Russie pour la
faillite de sa banque, la Mejprombank,
en 2010. Par un jugement du tribunal de
Moscou en date du 30 avril 2015, il a été
condamné à verser au liquidateur de
l’établissement la coquette somme de
75,6 milliards de roubles, environ
1 milliard d’euros. La Russie cherche
depuis deux ans et demi à faire valoir ce
jugement en France, via une procédure
d’« exequatur ». L’« incident » provo-
qué par les défenseurs de Pougatchev
devant le tribunal de Nice visait à éviter
l’audience au fond, qui pourrait se sol-
der par la confiscation de tous ses biens
en France. Déjà, le château de Gairaut,
où il demeure sur les hauteurs de Nice,
sa villa de Saint-Jean-Cap-Ferrat, son
chalet de Valberg ou son yacht ont
connu des prises d’hypothèques de la
part des Russes. Il en garde la jouissance
mais n’en dispose plus à son gré. Ce
premier jugement est attendu le 29 jan-
A
vier. « La Russie essaie de transposer en
France une décision totalement para-
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
en 2017 par un médecin de PMI, Anne-
Lise Ducanda, ces statistiques doivent
permettre à la DGS de réfléchir de ma-
nière plus précise à la délicate question
des messages de santé publique à desti-
nation des parents de jeunes enfants.
Cette étude indique aussi que 44 %
des mères ne font jamais ou seulement
occasionnellement des jeux ou activités
physiques (ballon, piscine, etc.) avec
leurs enfants de 2 ans. Une maman sur
quatre ne fait jamais ou seulement rare-
ment de promenade avec son enfant. En
parallèle, l’enquête pointe qu’environ
un quart des enfants de 2 ans jouent avec
un ordinateur, une tablette ou un smart-
phone au moins une fois par semaine.
Environ un sur dix utilise ces outils tous
les jours. L’étude ne fait cependant pas
de lien de cause à effet entre les données
sur l’activité physique des enfants et
doxale et qui a été reconnue comme mo-
tivée politiquement. Je crois en la justice
française et au fait qu’elle ne puisse ac-
cepter un jugement à ce point infondé »,
avance celui qui a acquis la nationalité
française en 2009.
Une procédure à La Haye
Aujourd’hui, une autre procédure, en-
tamée en 2015 devant le tribunal de La
Haye, accapare toute son attention.
Sergueï Pougatchev, qui au temps de sa
splendeur régnait sur un empire indus-
triel composé de chantiers navals ou de
mines de charbon et qui a compté jus-
qu’à 350 000 employés, réclame devant
cette cour arbitrale la bagatelle de
12 milliards d’euros, le montant des
avoirs dont la Russie l’aurait supposé-
ment spolié. « J’espère qu’il y aura une
décision avant la fin 2019 », escompte-
t-il, mettant en avant sa nationalité
française. « Je me réfère à un traité bila-
téral entre la France et la Russie qui pro-
tège chaque investisseur français en
Russie. Là, c’est moi, mais cela pourrait
être Danone, Total ou n’importe quel
autre groupe », avance-t-il. Reverra-t-
il un jour la couleur de son argent en cas
de victoire ? « Dit comme ça, la somme
peut paraître énorme, mais si jamais la
Russie ne payait pas, elle prendrait le
risque que tous les investisseurs étran-
gers s’en aillent, car ils n’auraient plus
aucune garantie d’être protégés », sup-
pose-t-il.
Tout à son feuilleton judiciaire,
l’homme s’est retiré des affaires, du
moins en apparence. « Je fais encore du
business, mais de façon discrète, car si
cela était trop visible, la Russie essaierait
encore une fois de me spolier », indique
Sergueï Pougatchev. Son grand regret
reste Hédiard, l’épicerie fine dans la-
quelle il avait injecté 150 millions
d’euros et dont il a dû se défaire après
que « Poutine a réussi à faire geler les
comptes pendant quatre ans ». Poutine,
le nom est lâché. « J’ai une expérience
hors norme pour comprendre les méca-
nismes politiques en Russie », affirme
celui qui était au début des années 90
conseiller du président Eltsine puis sé-
nateur. Pour lui, aucun doute qu’il faille
Une étude de l’Ined
et de l’Inserm documente
pour la première fois
en France la surexposition
des jeunes enfants
aux écrans.
S. HEAP/STOCK.ADOBE.COM
leur pratique des écrans. Ces chiffres da-
tent en outre de 2013, année où les Fran-
çais étaient encore loin d’être tous équi-
pés en nouveaux outils numériques.
« Avec l’arrivée massive
de ces nouveaux outils dans
les foyers, on peut spéculer
que l’usage des téléphones
portables et des tablettes a
augmenté chez les tout-pe-
tits. Mais la question est de
25 %
des enfants
savoir si cet usage s’est de 2 ans jouent
substitué ou ajouté à celui de avec un ordinateur,
la télévision », souligne Jo- une tablette ou un
nathan Bernard, chercheur smartphone au moins ment. Enfin, dès l’âge de
à l’Inserm et un des auteurs une fois par semaine 2 ans, les filles font moins
de l’enquête. « Par contre,
l’étude montre que plus le niveau d’études
des parents est faible, plus les enfants sont
exposés aux écrans, poursuit le cher-
cheur. Il existe également de fortes dis-
voir la main du maître actuel du
Kremlin derrière les tentatives suppo-
sées d’ingérence dans les pays de
l’Ouest. « Qu’on parle de l’affaire Skri-
pal ou de l’intervention dans la politique
américaine ou française, il faut com-
prendre qu’il y a des dizaines et des di-
zaines de gens qui vont voir Poutine avec
des idées pour déstabiliser, “on pourrait
faire ci, on pourrait faire ça”, et Poutine,
qui est resté dans sa tête à un niveau de
collaborateur moyen du KGB, réagit pour
ça comme un vrai businessman, en es-
sayant de voir où est son intérêt », dé-
crypte cet ancien proche du président
russe.
« Poutine ne s’intéresse qu’à ce qui le
concerne personnellement. Si l’on parle
de Boris Nemtsov, l’opposant qui a été
abattu au pied du Kremlin, évidemment
que Nemtsov ne pouvait pas faire la ré-
volution et changer les choses, par contre
il avait l’habitude d’expliquer à quel
point Poutine était nul et dangereux, et
ça, ça l’a touché personnellement », fait-
il remarquer entre deux gorgées de
sancerre. Le président français ne s’est
pas non plus attiré les bonnes grâces du
parités régionales. En Ile-de-France, les
familles sont plus équipées en nouvelles
technologies et les enfants sont plus sou-
vent devant les écrans. »
La faible fréquence des ac-
tivités physiques ou des jeux
s’explique moins aisément
par des facteurs sociaux.
L’étude pointe cependant
que les enfants de femmes
actives passent moins de
temps à jouer en extérieur et
regardent la télévision plus
fréquemment et plus longue-
d’activités physiques en ex-
térieur que les garçons.
« Ces premiers résultats doivent ame-
ner à s’interroger sur le peu d’efficacité
du message “Pas d’écrans avant 3 ans”,
Sergueï Pougatchev,
le 19 décembre, au Palais
de la Méditerranée,
à Nice.
YANN COATSALIOU
Russe. « Aucun leader de cette envergure
ne lui avait parlé de la façon dont Macron
l’a fait lors de leur première rencontre.
Poutine ne lui pardonnera jamais. Même
si Macron l’embrassait et lui donnait la
moitié de la France, cela ne changerait
rien, il l’a vexé. »
« Nulle part en sécurité »
Pougatchev, aujourd’hui, ne se sent
nulle part « en sécurité ». Il ne se rend
plus en Angleterre, « après qu’on a dé-
couvert des engins explosifs » dans ses
voitures à Londres il y a trois ans. Des
plaintes pénales ont été déposées à Paris
pour menaces et tentative d’extorsion.
Devant le tribunal de Nice, les avocats
de la Fédération de Russie ont dénoncé
« des histoires cousues de fil blanc » et
des « affabulations », expliquant, à pro-
pos de la faillite de la Mejprombank,
que « des milliers de déposants attendent
aujourd’hui après ce recouvrement pour
récupérer quelques kopeks ». Les avocats
de Pougatchev ont fait remarquer au
juge qu’il s’agissait d’une banque privée
et que son fondateur s’était retiré de ses
mandats bien avant la faillite. ■
juge Thomas Rohmer, président de
l’Observatoire de la parentalité et de
l’éducation numérique. Cette étude indi-
que bien qu’il faut tenir compte des diffé-
rentes situations des familles pour avoir
une politique publique de prévention ci-
blée. Le problème, ce n’est pas les écrans
en eux-mêmes mais le manque d’interac-
tions entre parents et enfants à cause de
ces outils. »
En novembre, le Sénat a voté une loi
qui propose d’inscrire un avertissement
sur les outils numériques afin de lutter
contre l’exposition trop précoce aux
écrans. Le gouvernement avait alors in-
diqué qu’il préférait attendre des études
scientifiques avant de se prononcer sur
cette question délicate. Le sujet devrait à
nouveau être abordé lors de prochains
états généraux sur le thème des nouvel-
les régulations numériques. ■
ZOOM
Des centaines de voitures
brûlées le soir du réveillon
Même si le ministère
de l’Intérieur refuse de
communiquer un bilan national
pour éviter d’alimenter toute
« compétition inutile », la nuit de
la Saint-Sylvestre a semble-t-il
une fois de plus sacrifié à
la tradition des voitures brûlées.
Ainsi, pas moins de 277 véhicules
ont été retrouvés calcinés
en région parisienne, dont 148
dans la capitale selon Le Parisien.
Dans les Yvelines, quelque
54 voitures ont été la proie
des flammes tandis que 99 autres
ont été enflammées en
Seine-Saint-Denis. En province,
les Bouches-du-Rhône auraient
réveillonné dans un calme relatif
avec 22 véhicules brûlés
dans le département.
EN BREF
Une pétition contre toute
révision de la loi de 1905
113 ans après la loi de séparation
des Églises et de l’État, plusieurs
sensibilités laïques - dont
le Comité Laïcité République,
les grandes loges maçonniques
ou encore la Licra « s’élèvent »,
dans une pétition intitulée
« appel des 113 », « contre toute
modification de la loi de 1905 »,
l’un des chantiers
du gouvernement cette année.
Bouches-du-Rhône :
nouvelles dégradations
de péages autoroutiers
Les péages autoroutiers
de La Ciotat sur l’A50 et
de la Barque sur l’A8, lieux
de rassemblements de « gilets
jaunes » dans les Bouches-
du-Rhône, ont été en partie
dégradés mardi soir. Vinci
Autoroutes a porté plainte pour
« dégradations volontaires ».
Val-de-Marne :
des braqueurs tentent
de voler un commerçant,
un policier blessé
Un policier a été
« sérieusement » blessé à
une hanche mercredi à Villejuif
(Val-de-Marne) alors qu’il
tentait d’arrêter un véhicule
en fuite avec à son bord
plusieurs braqueurs présumés.
Ces derniers avaient essayé
de voler un commerçant. Deux
personnes ont été interpellées.

SCIENCES
New Horizons s’apprête à dévoiler
les secrets de l’astéroïde Ultima Thulé
La sonde de la Nasa a survécu au survol rapproché de ce caillou glacé, situé bien au-delà de Pluton.
Les scientifiques reçoivent désormais au compte-gouttes les données scientifiques rassemblées à cette occasion.
TRISTAN VEY £@veytristan
ESPACE Ce n’est peut-être pas la plus
belle image que vous ayez vue de votre
vie, mais soyez indulgents : ce cliché a
été pris à plus de 6,5 milliards de kilo-
mètres de la Terre par une petite sonde
dont les appareils photo sont moins per-
formants que celui de votre téléphone. Il
s’agit d’un premier portrait d’Ultima
Thulé, un astéroïde devenu le 1er janvier
le plus lointain objet visité par l’homme.
Rassurez-vous, nous en saurons bientôt
plus : ce n’est que le premier cliché
d’une longue série à venir. Il a été pris
alors que la sonde New Horizons de la
Nasa s’apprêtait à survoler sa cible.
Compte tenu des opérations scientifi-
ques qu’elle avait à réaliser pendant les
quelques heures cruciales qui enca-
draient ce rendez-vous à 3 500 km de
distance, celle-ci n’a pu confirmer la
réussite de sa mission, en même temps
que ce cliché préliminaire, que quatre
heures plus tard. L’ensemble n’est pas
arrivé avant 16 h 29, heure de Paris,
mardi. On apprenait alors surtout que le
vaisseau était en bonne santé et ses dis-
ques durs remplis de données. Ce qui
n’était pas trivial : la sonde file en effet à
50 000 km/h dans le vide de l’espace.
N’importe quel caillou de quelques mil-
limètres seulement rencontré dans le
voisinage d’Ultima Thulé aurait pu pro-
voquer une collision fatale. Ce ne fut
heureusement pas le cas et l’équipe peut
maintenant se concentrer sur la récu-
pération des données.
Il faudra 20 mois pour télécharger les
6 gigaoctets, dont 900 images, récoltées
pendant ce survol (l’équivalent d’un
film en très haute définition), tant le dé-
bit de transfert est faible à cette distan-
Commencer les cours plus tard
fait du bien aux lycéens
Selon une étude américaine, reculer les horaires quotidiens de rentrée scolaire des adolescents
améliore leurs résultats et fait baisser l’absentéisme et les retards.
PAULINE FRÉOUR
SOMMEIL Faut-il continuer d’appren-
dre aux enfants que « l’avenir appar-
tient à ceux qui se lèvent tôt » ? S’il est
difficile de contester l’intérêt de leur in-
culquer le goût de l’effort, côté horaires,
le débat est ouvert… Une étude vient en
effet de confirmer qu’il est bénéfique de
retarder le début des cours pour les ly-
céens afin que ceux-ci puissent se ré-
veiller plus tard et être davantage per-
formants.
En effet, l’adolescence est une période
de la vie où les horaires de coucher et de
lever sont naturellement retardés, jus-
qu’à deux heures par rapport à l’enfant.
Rien à voir avec la prétendue paresse du
jeune en hibernation : c’est la biologie qui
entre en jeu par le biais de deux mécanis-
mes. D’abord, la sécrétion naturelle de
mélatonine – l’hormone qui annonce à
l’organisme que la lumière baisse et qu’il
va donc être l’heure de se coucher – sur-
vient plus tard dans la soirée. Ensuite, les
adolescents ressentent moins la pression
de la fatigue accumulée dans la journée et
ont donc tendance à aller au lit plus tard
– alors même que leurs besoins totaux de
sommeil ne diminuent pas par rapport à
l’enfance (huit à dix heures).
C’est pour cette raison qu’une partie
du corps médical recommande depuis
déjà quelques années de repousser le dé-
but de la journée scolaire des adolescents.
L’Académie américaine de pédiatrie s’est
prononcée en ce sens en 2014 et, trois ans
plus tard, la mesure était adoptée par
deux lycées de Seattle (nord-ouest des
États-Unis). De 7 h 50, le début des cours
est passé à 8 h 45 entre 2016 et 2017.
L’initiative a permis à l’équipe d’Ho-
racio de la Iglesia, professeur de neuros-
ciences à l’université de Washington, de
mesurer l’impact du changement « dans
la vie réelle ». À deux reprises, en 2016
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Hal Weaver, de l’université John Hopkins a présenté, mardi, les premiers enseignements du survol d’Ultima Thulé,
qui aurait la forme d’une « quille », par la sonde de la Nasa New Horizons. JOEL KOWSKY/AP
ce. Une première fournée était attendue
dans la journée de mercredi. L’équipe
scientifique devait en dévoiler le conte-
nu lors d’une conférence de presse à
20 heures (elle n’a pas encore eu lieu au
moment où nous publions ces lignes).
Nous devrions alors avoir une idée
beaucoup plus précise de la forme et de
la « texture » de ce caillou gelé de 32 km
de long et 16 km de large (ces images se-
ront à découvrir jeudi sur notre site Inter-
avant que les horaires ne changent et en
2017 une fois la mesure mise en place,
son équipe de recherche a suivi entre 82
et 92 élèves âgés d’environ 16 ans. Pen-
dant quinze jours, ils devaient remplir
un agenda précisant leurs heures de
coucher, leur humeur, leurs siestes, etc.
Ils étaient également équipés de brace-
lets électroniques Actiwatch dont les
capteurs permettent de mesurer l’acti-
vité diurne et nocturne.
Les résultats parlent d’eux-mêmes : en
2017, sept mois après l’instauration des
nouveaux horaires, les jeunes dormaient
en moyenne 34 minutes de plus par nuit
en semaine que ceux qui les avaient pré-
cédés dans la même classe en 2016. Sur
une échelle de 0 à 20, la somnolence res-
sentie reculait d’un point. Les habitudes
de sommeil le week-end ont peu varié
d’une année à l’autre mais comme la
promo 2017 se levait plus tard en semai-
ne, la différence entre les jours d’école et
le week-end – appelée par les médecins
Une partie du corps médical recommande depuis plusieurs années de repousser
le début de la journée scolaire des adolescents. DURIS GUILLAUME - STOCK.ADOBE.COM
net). Il s’agit a priori d’une sorte de
« quille » plutôt que de deux objets dis-
tincts qui tournent l’un autour de
l’autre, comme cela avait été envisagé.
Pour l’instant, c’est à peu près tout ce
que l’on peut en dire.
Figé dans sa forme originelle
Mais il est raisonnable d’être optimiste :
les premières images de Pluton, survo-
lée en 2015 par la sonde dont c’était
« jet-lag social », jugé délétère pour le
sommeil – était moins importante. Sur le
plan scolaire, les résultats étaient supé-
rieurs en 2017 de 4,5 % par rapport à
l’année précédente. Pour assurer une
“ Paradoxalement,
on a plutôt tendance
à faire commencer
les lycéens plus tôt que
les primaires et collèges,
hormis quelques initiatives
”
d’établissements privés
DR MARIE-FRANÇOISE VECCHIERINI, MÉDECIN
DU SOMMEIL À L’HÔTEL-DIEU (APHP) À PARIS
comparaison valable, les étudiants des
deux promotions suivaient le même
cours de sciences avec le même profes-
seur. « Certes, il est possible que les élèves
de 2017 soient simplement meilleurs que
l’objectif principal, n’étaient pas si dif-
férentes. Quelques jours plus tard, on
découvrait un nouveau monde dont la
richesse géologique insoupçonnée avait
laissé les planétologues bouche bée.
Quelques semaines plus tard, ce sont
des dizaines et des dizaines d’images
haute définition qui dévoilaient des
montagnes gigantesques, des plaines
fracturées et autres merveilles incon-
nues de l’ex-neuvième planète du Sys-
ceux de 2016, mais la progression est si
importante que nous pensons que l’amé-
lioration du sommeil est aussi en cause »,
explique Horacio de la Iglesia.
Mais c’est l’évolution de l’absentéis-
me et des retards qui a le plus étonné le
chercheur. Parmi les deux lycées étu-
diés, celui comptant le plus d’élèves is-
sus de milieux modestes et/ou de mino-
rités a vu ces deux paramètres
s’améliorer significativement (respecti-
vement - 13 % et - 30 %). « Il ne fait
aucun doute qu’être assidu et arriver à
l’heure favorisent l’apprentissage, notent
les auteurs de l’étude. Ces résultats sug-
gèrent que retarder le début des cours
pourrait réduire l’écart de performances
entre les milieux socio-économiques dé-
favorisés et élevés. »
Jugeant l’étude « intéressante », le
Dr Marie-Françoise Vecchierini, méde-
cin du sommeil à l’Hôtel-Dieu (APHP) à
Paris, rappelle qu’en France « on a, pa-
radoxalement, plutôt tendance à faire
commencer les lycéens plus tôt que les
primaires et collèges, hormis quelques
initiatives individuelles d’établissements
privés ».
Reste une question en suspens : ces
bénéfices persisteront-ils jusqu’à la fin
du lycée ? « Une étude parue en 2016
dans Sleep observait que non, rappelle le
Dr Vecchierini. Mais cela plaide sans
doute pour que ces changements horaires
s’accompagnent d’une éducation au
sommeil des jeunes et de leurs parents,
pour qu’ils comprennent l’importance du
sommeil pour la santé. » Selon une étude
conduite par l’Institut national du som-
meil et de la vigilance et la mutuelle
MGEN en 2018 sur les Français de 15 à
24 ans, il manque à cette classe d’âge
1 h 10 de sommeil par nuit en moyenne.
L’usage prolongé des écrans avant de
dormir, très répandu, est pointé par les
spécialistes comme étant une cause des
difficultés d’endormissement. ■
LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019
9
20 mois
seront nécessaires pour télécharger les
6 gigaoctets, dont 900 images, récoltées
pendant le survol, tant le débit
de transfert est faible à cette distance
tème solaire, déchue de son titre en
2006. Si Ultima Thulé est cent fois plus
petit, New Horizons est aussi passé trois
fois plus près. Cela promet quelques
belles surprises, à condition que les ins-
truments aient réussi à faire le point
correctement en passant à 50 000 km/h
au-dessus de sa surface. Réponse dans
les prochains jours.
Si le record de distance qui vient d’être
établi est extrêmement symbolique, il est
presque anecdotique au regard des ques-
tions que se posent les astrophysiciens.
Ultima Thulé se situe en effet dans une
zone très particulière du Système solaire,
baptisée ceinture de Kuiper. Située au-
delà de Neptune, elle concentre de très
nombreux objets, de tailles très varia-
bles, préservés des ravages du rayonne-
ment solaire dans cette zone froide et re-
culée. Comme si on les avait placés
pendant 5 milliards d’années au congé-
lateur. « Cet objet est tellement glacé qu’il
est conservé dans sa forme originelle », a
souligné le directeur scientifique de la
mission, Alan Stern. « Tout ce que nous
allons apprendre sur Ultima - sa composi-
tion, sa géologie, comment il s’est formé,
s’il a des satellites ou de l’atmosphère -
nous renseignera sur les conditions de for-
mation des objets du Système solaire. » ■
ZOOM
La Chine devrait tenter
de se poser sur la Lune jeudi
Le 7 décembre, une fusée
chinoise emportait en toute
discrétion la sonde Chang’e 4
vers la Lune. Celle-ci a été placée
en orbite autour de notre satellite
moins de cinq jours plus tard,
et il semblerait que l’alunissage
soit prévu pour jeudi. La Chine
va tenter à cette occasion une
première mondiale : se poser sur
la face cachée. Un satellite relais
placé derrière la Lune permettra
d’assurer les transmissions
de données. C’est cette contrainte
technique qui avait retenu les
Américains et les Russes de tenter
la manœuvre dans les années 70.
Si l’alunissage (réussi) de la sonde
Chang’e 3 avait été couvert dans
des conditions proches du direct
en 2013, ce ne sera a priori pas
le cas cette fois-ci. Le décollage
n’avait d’ailleurs pas été
retransmis, lui non plus. Nul
doute, en revanche, que la Chine
communiquera en cas de réussite.
Nous devrions alors découvrir
les premiers panoramas in situ
de la face cachée, bien plus
cratérisée que celle que nous
pouvons observer chaque nuit.
EN BREF
Italie : un responsable
de la santé démissionne
à cause d’un gouvernement
« antiscience »
Walter Ricciardi, le président
de l’Institut supérieur de la santé
(ISS) en Italie, a expliqué,
mercredi, dans les colonnes
du quotidien Corriere della Sera
avoir démissionné mi-décembre
en raison du soutien apporté
par le gouvernement populiste
à une politique « franchement
antiscientifique » qui obère
selon lui la santé publique,
tant sur la question des vaccins
que celle des migrants porteurs
A
de maladies ou l’utilisation
des pesticides.

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
10 SPORT
JEAN-JULIEN EZVAN
£@JeanJulienEzvan
TENNIS L’année 2018 a joué sur un
registre classique. Roger Federer a
remporté l’Open d’Australie (sa
vingtième couronne en Grand Che-
lem), Rafael Nadal s’est révélé in-
traitable à Roland-Garros (pour la
onzième fois), Novak Djokovic s’est
imposé à Wimbledon et à l’US Open
(profitant d’un été de feu pour de-
venir, après un titre à Cincinnati, le
premier joueur à remporter tous les
Masters 1 000). Et les trois se sont
partagé la place de no 1 mondial. Les
organisateurs jubilent, les diffu-
seurs en redemandent. 2019 pour-
rait creuser des interstices dans
une domination exclusive (les
trois monstres sacrés compi-
lent 51 des 62 titres du
Grand Chelem disputés
depuis Wimbledon 2003,
date du premier titre ma-
jeur de Roger Federer), et
laisser s’engouffrer voire célébrer le
vent de la jeunesse et de la surprise.
À l’image de celui qui souffle sans
répit sur le circuit féminin, lui assu-
rant une vitalité rafraîchissante.
u Federer, le flou du roi
Au sujet des contours de sa sai-
son (escapade ou non sur terre bat-
tue), de son avenir (« On verra bien
s’il y aura une saison 2020 ou pas »,
petite phrase lâchée à la télévision
suisse SRF), Roger Federer est, sur
le terrain, comme en coulisses, un
metteur en scène méticuleux. Ses
supporteurs retiennent leur souffle.
Et chacune de ses prestations est
enrobée d’une émotion particuliè-
re. Federer (37 ans ; 81,9 % de suc-
cès sur le circuit), professionnel de-
puis 1999 (il pourrait terminer sa
20e saison dans le top 50), définiti-
vement unique en son genre, lui qui
en 2018 avait quitté Nike pour Uni-
qlo et un contrat de dix ans et
300 millions de dollars. « Il ne sera
peut-être plus capable de briller sur
toute une année, mais il est toujours
là aux meilleurs moments », a glissé
David Goffin au Het Niewsblad. En
vue de l’Open d’Australie dont il est
double tenant du titre, le Suisse aux
vingt titres en Grand Chelem a
avancé : «Je pense qu’à mon âge,
les gens sont bien conscients que si
j’arrive à faire quelque chose d’ex-
traordinaire, cela serait incroya-
ble. » Une manière subtile de
sculpter sa légende, de susciter et
d’entretenir le désir. Le prestidigi-
tateur suisse court après un 100e ti-
tre ATP, quand le record du genre
est détenu par Jimmy Connors,
avec 109 trophées. Une marque
qui, cette fois, pourrait résister à
ses coups de baguette magique…
u Djokovic
et Nadal,
des statues décidées
à se défendre
Le Serbe était, il y a un an, re-
venu sur la pointe des pieds.
Le bras droit enserré dans un
J. SETTERFIELD/GETTY IMAGES/AFP, P. ROSSIGNOL/REUTERS, F. NEL/GETTY IMAGES/AFP, USA TODAY SPORTS
manchon et s’appuyant sur
une mécanique de service
écourtée afin de protéger un
coude droit douloureux.
Après une opération en février
et un printemps poussif, No-
vak Djokovic a ensuite entre-
pris un magistral retour au
premier plan lors d’une
deuxième partie de saison in-
candescente (47 victoires-6
défaites). Porté par un jeu soli-
de et tranchant, un physique lui
offrant de martyriser de nouveau
ses semelles pour multiplier les glis-
sades et tisser une infernale toile dé-
fensive, le tout reposant sur un
mental ne souffrant plus de soubre-
sauts. Une panoplie de super-héros
qui lui a permis de retrouver la pre-
mière place mondiale. Dans tous les
domaines. Djokovic faisant en sorte
que son influence infuse et pèse
dans les âpres négociations qui agi-
tent actuellement le monde du ten-
nis. Il s’installera comme le grand
favori de l’Open d’Australie
(épreuve qu’il a remportée à six
reprises). Et le rival désigné de
Rafael Nadal à Roland-Garros.
Avant de défendre ses couronnes à
A
Wimbledon et à l’US Open. Un pro-
gramme titanesque. Rafael Nadal
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
ROGER
FEDERER
ennis
Des lignes enfin prêtes
à bouger en 2019
Monstres sacrés, jeunes loups, surprises en quête de confirmation,
Français en reconquête, l’année promet. Sur les courts et en coulisses.
CALENDRIER
OPEN D’AUSTRALIE ROLAND-GARROS
Du 14 au 27 janvier. Du 26 mai au 9 juin.
ROLEX MONTE-CARLO MASTERS WIMBLEDON
Du 14 avril au 21 avril. Du 1er au 14 juillet.
entame l’année,
comme il a bouclé la
précédente. Clopin-
clopant. Après une opé-
ration de la cheville
droite en novembre,
l’Espagnol a déclaré
forfait lors de l’exhibi-
tion d’Abu-Dhabi (pour
la petite finale), avant, légère-
ment touché à la cuisse gauche, de
renoncer par précaution à s’aligner
à Brisbane. Son objectif : s’avancer
en pleine possession de ses moyens
à Melbourne. Avant d’arpenter la
saison (et surtout le printemps, où
ses 92 % de victoires sur terre bat-
tue en font un épouvantail) la
détermination en bandoulière.
Sur chaque point. Comme si sa
vie en dépendait. Si son corps
le laisse en paix…
u Murray,
Wawrinka
et Del Potro, la fragile
fureur de revivre
Ils avancent à pas de loups. Privés
de repères, de sensations, de
confrontations. Andy Murray
(240e mondial ; 12 matchs seule-
ment en 2018), ascension stoppée
par une opération à la hanche droi-
te, sait que la remontée des marches
s’annonce laborieuse. L’Écossais
avoue des douleurs récurrentes, des
doutes, mais va, fidèle à sa légende,
s’accrocher, même s’il ignore jus-
qu’à quand il pourra prolonger sa
carrière. Touchés à la hanche, cer-
tains joueurs prestigieux tels Gus-
tavo Kuerten ou Lleyton Hewitt
n’ont jamais retrouvé la totalité de
leur intégrité physique. Murray,
lancé à la recherche d’une splen-
deur perdue… Comme Stan
Wawrinka (66e mondial ; 17 victoi-
res-17 défaites l’an dernier), ambi-
tieux après une double opération du
genou gauche. Bien relancé comme
le prouve sa toute fraîche victoire
contre Karen Khachanov à Doha.
Heureux de jouer et soucieux de ne
pas brûler trop vite les étapes de son
NOVAK retour. À l’image de Juan Martin Del
DJOKOVIC Potro. Insuffisamment remis d’une
CAROLINE
GARCIA
US OPEN
Du 26 août au 8 septembre.
ROLEX PARIS MASTERS
Du 28 octobre au 3 novembre.
fracture à la rotule droite qui
l’avait privé du Masters, le ta-
lentueux mais fragile Argentin (fi-
naliste de l’US Open) a été contraint
de renoncer à l’Open d’Australie.
u Zverev
et la nouvelle
vague prête à déferler
Le Croate Marin Cilic, le Japonais
Kei Nishikori, le Sud-Africain Ke-
vin Anderson, l’Autrichien Domi-
nic Thiem, voire le Bulgare Grigor
Dimitrov ou le Belge David Goffin
demeurent des valeurs sûres, appe-
lés à cohabiter avec des voisins de
palier prêts à jouer des épaules pour
se faire de la place. L’Allemand
Alexander Zverev (21 ans ; 4e mon-
dial), déjà vainqueur de trois
Masters 1 000 (dont Madrid en
2018) et du Masters l’an
dernier, et le Russe Karen
Khachanov (lauréat du
dernier Rolex Paris
Masters en assommant
Novak Djokovic) se sont
illustrés en 2018. Ils sont
prêts à aller plus loin. Plus
haut. Dans leur sillage, l’em-
bouteillage menace quand se
bousculent le Croate Borna Coric
(22 ans ; 12e mondial), le Britan-
nique Kyle Edmund (23 ans ; 14e),
le Grec Stefanos Tsitsipas (20 ans ;
15e), le Russe Daniil Medvedev (22
ans ; 16e), le Sud-Coréen Hyeon
Chung (22 ans ; 25e) ou le Canadien
Denis Shapovalov (19 ans ; 27e).
Portrait-robot de ce péril jeune po-
lyvalent : 21 ans pour 1,91 m mais
tout à prouver en Grand Chelem. Le
groupe ne recense en effet que deux
demi-finales majeures (Ed-
mund et Chung lors de l’Open
d’Australie 2018).
SERENA
WILLIAMS
MASTERS
Du 10 au 17 novembre.
COUPE DAVIS (FINALE)
Du 18 au 24 novembre, à Madrid.
u
Les Bleus veulent rallumer
la flamme
Pour trouver trace de succès fran-
çais en 2018, il fallait oublier l’élite
et sonder l’avenir. Clara Burel (no 1
mondiale chez les juniors et lauréate
du Masters de la catégorie, qui bé-
néficiera d’une invitation à l’Open
d’Australie), Hugo Gaston (médaillé
d’or aux Jeux olympiques de la jeu-
nesse) ou Hugo Humbert (20 ans ;
378e en début d’année, 84e fin 2018)
ont semé des promesses et passé un
peu de baume au cœur d’un tennis
tricolore qui doit s’habituer à af-
fronter la réalité : le recul clair de
ses joueurs majeurs (Tsonga, Gas-
quet, Monfils, Simon) sur l’échi-
quier international. À l’image de
Lucas Pouille et Caroline Garcia,
qui après avoir
goûté au top 10
ont glissé dans la
hiérarchie. Les
premiers tournois
du duo formé par
Lucas Pouille et Amélie
Mauresmo, son coach, seront
particulièrement suivis. Com-
me ceux de Caroline Garcia
après une année compliquée (39
victoires-22 défaites). La Lyonnai-
se a, dans L’Équipe, annoncé pour
2019 : «Ce qui me fait me lever le ma-
tin et aller m’entraîner, c’est de ga-
gner des gros tournois, des Masters
et des Grands Chelems. C’est ce que
je veux aller chercher, même si le
chemin est compliqué. »
u La
quête de Serena Williams,
le circuit féminin en ébullition
Serena Williams (37 ans) a marqué
l’année 2018 par son retour après
plus d’un an d’absence pour cause de
maternité en retrouvant rapidement
ses marques, avec deux finales mal-
heureuses en Grand Chelem (à Wim-
bledon et à l’US Open, où elle avait
perdu ses nerfs, s’emportant contre
l’arbitre). L’Américaine reste à une
marche de l’Australienne Margareth
Court (24 couronnes majeures en-
tre 1960 et 1973). Sur le circuit depuis
1998, elle repart, bien décidée à par-
venir à ses fins (à 31 ans, Maria Sha-
rapova n’a, de son côté, pas enterré
l’idée d’une dernière belle histoire).
La légende américaine est loin d’être
seule sur un circuit en perpétuelle
évolution. Les tournois féminins ser-
vent en effet une incessante variété.
Huit lauréates différentes ont ainsi
été sacrées lors des huit derniers
tournois du Grand Chelem. Avec des
premiers sacres pour la Lettonne Je-
lena Ostapenko, l’Américaine Sloane
Stephens, la Danoise Caroline Woz-
niacki, la Roumaine Simona Halep et
la Japonaise Naomi Osaka. Il y a des
places à prendre, du prestige à dé-
crocher.
u Classement,
calendrier, règles,
les grandes manœuvres
Il flotte en ce début d’année un mé-
lange d’approximation et de préci-
pitation. Au sujet du format et du
casting de la Coupe Davis, comme
des règles. Chaque tournoi majeur a
ainsi choisi une option différente
pour l’épilogue des 5e sets : super
tie-break (en 10 points) pour
l’Open d’Australie, tie-break à 12-
12 pour Wimbledon, tie-break clas-
sique à l’US Open quand Roland-
Garros n’invite toujours pas le tie-
break sur sa terre. Cacophonie. Par
ailleurs, le mode de classement et
d’entrée dans les tournois a été mo-
difié. Le World Tennis Tour établi
par la fédération internationale a
pour objectif de rétrécir le nombre
de joueur pros et de circonscrire la
menace des paris.
EN BREF
Football : Toulouse-Nice
reporté
La rencontre entre
Toulouse et Nice
en 32es de finale de la
Coupe de France a été
reportée d’une journée,
à dimanche (17 h 15),
à la demande de la préfecture
de Haute-Garonne. Cette
reprogrammation fait écho
à celles, nombreuses, qui
ont paralysé la Ligue 1
en décembre, en pleine
mobilisation des « gilets
jaunes ». Les 17e et 18e
journées ont ainsi été
amputées de onze rencontres.
Ski : fin de saison
pour Adeline Mugnier
La Française (26 ans),
spécialiste des épreuves
techniques, s’est blessée
à l’entraînement à Obdach,
en Autriche. Victime d’une
rupture du ligament croisé
antérieur du genou gauche,
son hiver est terminé.

LE CARNET DU JOUR
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naissances
M. et Mme Philippe GIMOND
M. et Mme Alain DUMENIL
ont la joie d'annoncer
la naissance de leur petit-fils
Alexandre
le 1er janvier 2019,
à Genève, f ilsde
M. Carl GIMOND
et Mme, née Valérie Duménil.
hommages
Le bâtonnier
Marie-Aimée Peyron,
le vice-bâtonnier Basile Ader,
et les membres du
Conseil de l'ordre des avocats
au barreau de Paris
vous invitent à venir rendre
hommage au
bâtonnier Alain HOLLANDE
lors de la cérémonie
du souvenir
célébrée en sa mémoire,
le mercredi 9 janvier 2019,
à 18 heures, en l'église
protestante unie de l'Etoile,
54-56 avenue de la
Grande-Armée, Paris (17e).
Le port de la robe est souhaité.
deuils
Florence Aubert,
son épouse,
Cyril Aubert et Béatrice
Degott-Serafino,
Grégoire et Dorothée Aubert,
Albane et Sébastien Voyer,
Cédric et Isabelle Poittevin,
Virginie Aubert,
ses enfants et beaux-enfants,
Victoria, A lexandre, Maxime,
Cléa, Joséphine, Céleste,
Béryl, Anna,
ses petits-enfants,
Michèle d'Orsay,
sa sœur,
Françoise de Ricci,
sa belle-mère,
ses beaux-frères
et belles-sœurs
ont l'immense tristesse
de vous faire part du décès,
le 30 décembre 2018,
à l'âge de 74 ans, de
Gérard AUBERT
chevalier
de la Légion d'honneur.
Il rejoint
sa fille chérie Emmanuelle,
son frère Jean-Pierre,
sa sœur Françoise,
et ses parents.
Une cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Notre-Dame-d'Auteuil,
place de l'Église-d'Auteuil,
Paris (16e), à 10 h 30,
le samedi 5 janvier 2019.
Une bénédiction aura lieu
le lundi 7 janvier 2019,
à 10 h 30, en l'église
Saint-Pierre-ès-Liens
de Barcelonnette
(Alpes-de-Haute-Provence),
suivie de l'inhumation
au cimetière de Barcelonnette.
Catherine Baron,
sa fille,
Catherine, Joël
et Nathalie Sellin,
ses neveux,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Laurence BARON
survenu le 29 décembre 2018,
à l'âge de 94 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu le lundi 7 janvier 2019,
à 10 h 30, en l'église
Notre-Dame-des-Champs,
91, boulevard
du Montparnasse, Paris (6e).
19, rue Monsigny,
75002 Paris.
Christine et François Duflocq,
Dominique et Annie Bourgeois,
Alain et Marie-Hélène
Bourgeois,
Eric Bourgeois
et Germain Brun,
ses enfants et leurs conjoints,
ses petits-enfants,
ses arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
M. Francis BOURGEOIS
rappelé à Dieu
le 1er janvier 2019,
dans sa 91e année.
La messe sera célébrée le
vendredi 4 janvier, à 15 heures,
en l'église Saint-Jean
de Dammartin-en-Goële,
suivie de l'inhumation
au cimetière de Vinantes.
Écully. Lyon. Bruxelles.
Mme Louis de Bovis,
son épouse,
Marina et Bertrand Vienne,
Olivier et Lucia de Bovis,
Caroline et David Seïté,
ses enfants,
Laure, Antoine, Quitterie,
Andéol, Augustin, Ombeline,
Philippe, Albéric, Sofia,
Charlotte,
ses petits-enfants,
les familles de Bovis, Lauga,
Laeuffer et Vautherin,
ses frères et sœurs,
les familles Confavreux, Franc,
de la Bastie, Rérolle,
ses beaux-frères
et belles-sœurs,
ont la tristesse de faire part
du rappel à Dieu de
M. Louis de BOVIS
le 31 décembre 2018,
à l'âge de 83 ans.
La céremonie religieuse
aura lieu
le samedi 5 janvier 2019,
à 9 h 30, en l'église
de Villars-les-Dombes (Ain),
suivie de l'inhumation
au cimetière de Prévalon
(Vaucluse), à 16 h 15.
Vincent et Sylvie Canu,
Emmanuelle et Philippe
Wajnglas,
Sylvain et Marianne Canu,
Marie-Alix Canu-Bernard
et Ange Mancini,
ses enfants,
Augustin, Géraldine (†),
Jules-Antoine, Philippine,
Amicie,
Charles, Apolline, Paul-Emile,
Sébastien, M atthieu, Pierre,
Agnès,
Amélie, Valentin, Aurélien,
ses petits-enfants,
Blanche, Félicité, Louise,
Elisabeth, Marie, Jean,
Valentin, Soline, Joséphine,
Paloma,
Victoire, A lma,
Nathanaël, Anne-Flore,
Aurore, S amuel,
Raphaël, Victoria,
Joseph,
ses arrière-petits-enfants,
ont la grande tristesse
de vous faire part du décès de
Marie-Noëlle CANU-DUCLERT
survenu le 29 décembre 2018,
à l'âge de 90 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 4 janvier 2019,
à 14 h 15,
en l'église Saint-Pierre
de Neuilly-sur-Seine,
90, avenue du Roule.
L'inhumation aura lieu
le samedi 5 janvier 2019,
à 11 heures,
au cimetière d'Oissery
(Seine-et-Marne).
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Saint-Chamond.
Saint-Etienne. Grenoble.
Montbrison. Nîmes. Paris.
Mme Maurice Champavère,
née Jeannine Drouot,
son épouse,
Christian et Dothy
Champavère,
Pierre et Edith Champavère,
Didier et Laurence
Champavère,
Florence et Philippe Nayme,
Noël Champavère,
ses enfants,
ses seize petits-enfants,
ses seize arrière-petits-enfants,
les familles Champavère,
Drouot, Ménard
et d'Everlange
ont la douleur
de faire part du décès de
M. Maurice CHAMPAVÈRE
ancien élève
de l'École polytechnique 1942,
chevalier
de l'ordre national du Mérite,
survenu le 1er janvier 2019,
dans sa 98e année.
La messe d'à Dieu
sera célébrée
le samedi 5 janvier 2019,
à 9 h 30, en l'église
Notre-Dame-
de-Lourdes-de-la-Valette,
à Saint-Chamond.
Marcy-l'Étoile.
Christiane Coiffier,
son épouse,
ses enfants et petits-enfants,
sa famille
ont la grande tristesse
de vous faire part du décès de
M. Bertrand COIFFIER
professeur en hématologie.
La cérémonie religieuse aura
lieu le samedi 5 janvier 2019,
à 10 heures,
en l'église Saint-Joseph
de Tassin-la-Demi-Lune,
suivie de l'inhumation
dans l'intimité familiale
et des amis proches.
Pas de fleurs, merci d'adresser
vos dons au Fonds de dotation
LYSA, pour la recherche
sur les lymphomes,
au Centre hospitalier Lyon-Sud,
service d'hématologie,
69495 Pierre-Bénite cedex.
Le docteur Daniel Flahault,
son époux,
Sabine et Bernhard
Wojczewski,
Cyril (†) et Elena Flahault,
Isabelle et Michel Valticos,
Antoine et Chrystel Flahault,
ses enfants et beaux-enfants,
Thomas, Grace, Daniel,
Valerie, S ilvia, Christophe,
Astrid, Marc, Emmanuel,
Anatolia, A lexandre,
Nicolas, Caroline, Alexis,
Anaïs, Marine, Bruno,
Adrien, E meline, Morgane,
Pierre, Tanguy,
ses petits-enfants,
Theo, Sophie,
Josephine, Nicolas,
Louis, Margaux,
Héloïse, Ambre,
ses arrière-petits-enfants,
ont le profond chagrin
de vous faire part du décès de
Françoise FLAHAULT
née Rudelle,
docteur en médecine
Paris 1955,
chevalier
des Palmes académiques,
qui s'est éteinte dans
l'espérance de la Résurrection
dans sa 89e année,
le 30 décembre 2018.
La messe d'obsèques
sera célébrée à 14 heures,
le vendredi 4 janvier 2019,
en la paroisse Saint-Paul,
6, avenue de Saint-Paul,
à Cologny (Suisse).
La famille remercie
très chaleureusement
l'ensemble du personnel de
l'Ehpad de la Petite Boissière
pour son humanité,
son dévouement et son sourire.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Le comte Albert de Broissia
et ses fils,
Michel et François de Broissia,
ont la tristesse
de faire part du décès de la
comtesse Albert
de FROISSARD de BROISSIA
née Anne de Cointet de Fillain,
survenu le 31 décembre 2018,
à l'âge de 72 ans, à Dijon.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Notre-Dame, à Dijon,
le samedi 5 janvier 2019,
à 10 heures, suivie à 15 h 30
de l'inhumation au cimetière de
Dracy dans l'intimité familiale.
M. Patrick de Carolis,
président,
M. Laurent Petitgirard,
secrétaire perpétuel,
et l'ensemble des membres de
l'Académie des beaux-arts
ont la tristesse de faire part
du décès de leur confrère
Jean CORTOT
membre
de la section de peinture
de l'Académie des beaux-arts,
membre de l'Institut,
chevalier dans l'ordre national
des Palmes académiques,
commandeur
dans l'ordre des Arts et Lettres,
survenu le vendredi
28 décembre 2018,
à l'âge de 93 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée le lundi
7 janvier 2019, à 15 heures,
en l'église Saint-Roch,
296, rue Saint-Honoré,
Paris (1er).
Cet avis tient lieu de faire-part.
Académie des beaux-arts,
23, quai de Conti,
75270 Paris Cedex 06.
Françoise Brocard,
Jacques et Marie-Hélène
Fraysse
ont la tristesse de faire part
du décès de
leur sœur et belle-sœur,
Monique GRÉGOIRE
La cérémonie d'obsèques
aura lieu en la collégiale
Saint-Gengoult, à Toul
(Meurthe-et-Moselle),
le vendredi 4 janvier 2019,
à 14 h 30.
Ses enfants, petits-enfants
et arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Michelle KOWARSKI
le 28 décembre 2018.
La cérémonie religieuse
se tiendra le vendredi
4 janvier 2019, à 15 heures,
en l'église Saint-Vigor
de Marly-le-Roy.
Famille Kowarski,
7, allée de la Grotte,
78230 Le Pecq.
Lyon.
Véronique Kopp,
son épouse,
Juliette et Olivier Jamin,
Edouard Kopp
et Frauke Josenhans,
ses enfants,
Paul, Louis, Arthur,
Charles et Léandre,
ses petits-enfants,
ont la tristesse
de vous faire part du décès du
professeur Nicolas KOPP
survenu le 30 décembre 2018.
Une cérémonie religieuse
aura lieu
le samedi 5 janvier 2019,
à 10 heures, en la chapelle
de l'hôpital de la Croix-Rousse,
103, grande rue
de la Croix-Rousse, à Lyon (4e).
L'inhumation aura lieu
dans l'ancien cimetière
de la Croix-Rousse.
Saint-Chamond (Loire). Lyon.
Paris.
Les membres de
l'Association des victimes
de l'hormone de croissance
(AVHC)
l'Association des victimes
de la maladie de
Creutzfeldt-Jakob (AVMCJ)
ont la tristesse
de vous faire part du décès,
le 30 décembre 2018, du
professeur Nicolas KOPP
professeur émérite à la faculté
de médecine de Lyon-Est,
coordonnateur du Centre
de diagnostic, de traitement et
de prévention des maladies à
prions aux Hôpitaux de Lyon.
Une cérémonie religieuse
aura lieu
le samedi 5 janvier 2019,
à 10 heures, en la chapelle
de l'hôpital de la Croix-Rousse,
103, grande rue
de la Croix-Rousse, à Lyon (4e).
Selon la volonté de sa famille,
pas de fleurs mais des dons
pour la recherche sur la
maladie de Parkinson ou les
maladies neuro-dégénératives.
Son dévouement, son humilité,
les valeurs éthiques
qu'il défendait nous auront
marqués à jamais.
Nous nous associons
et partageons la peine
de sa famille et de ses amis.
Marie et Jean-Pierre,
ses enfants,
Lou-Anne, Romain,
Gabriel et Joseph,
ses petits-enfants,
Aurore et Laurent,
sa belle-fille et son gendre,
Maurice Soulié,
son beau-frère,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Roger GUICHEMERRE
agrégé de lettres classiques,
professeur émérite
à l'université Paris-Sorbonne,
ancien élève de
l'École Normale Supérieure,
survenu le 22 décembre 2018,
à l'âge de 94 ans.
Ses obsèques ont été célébrées
dans la plus stricte intimité.
Thomas Lanzenberg,
son époux,
Léo et Maxime,
ses enfants,
M. et Mme Henry Levy,
ses parents,
Jessica Levy,
sa sœur,
M. et Mme Rémi Lanzenberg,
ses beaux-parents,
M. et Mme Grégory Marciano,
son beau-frère, sa belle-sœur,
et leurs enfants
ont l'immense tristesse
de vous faire part du décès de
Géraldine LANZENBERG
à l'âge de 40 ans.
Les obsèques seront célébrées
le vendredi 4 janvier 2019,
à 14 heures,
au cimetière du Montparnasse,
3, boulevard Edgar-Quinet,
Paris (14e).
M. Joël Le Bourdon,
son époux,
Christophe Le Bourdon,
Cyril Le Bourdon (†),
Laëtitia et Cyril Lambropoulos,
Stéphanie Le Bourdon,
ses enfants,
Aymeric, Romain, Ninon,
Solène, Théo, Adrien, D aphné,
ses petits-enfants,
ses frères et sœurs,
ses beaux-frères
et belles-sœurs,
ses neveux et nièces
font part du rappel à Dieu de
Mme Joël LE BOURDON
née Camille
de Roquefeuil Cahuzac,
le 27 décembre 2018.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
en l'église Saint-Martin,
45, rue de la République,
à Meudon,
le vendredi 4 janvier 2019,
à 10 h 30,
suivie de l'inhumation
au cimetière du Montparnasse,
Paris (14e), à 14 h 30.
Ni fleurs ni couronnes,
des dons aux associations
pse.ong ou laurettefugain.org
sont possibles.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Ses fils,
Thierry et Christophe,
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Marie-Lou LEFÉBURE
survenu le 30 décembre 2018,
dans sa 80e année.
La cérémonie religieuse aura
lieu le vendredi 4 janvier 2019,
à 10 h 30, en la collégiale
de Mantes-la-Jolie.
Paris (8e).
Mme Yves Le Poittevin,
née Rose Marie Tasteyre,
son épouse,
Mathieu et Juliette Le Poittevin,
son fils et sa belle-fille,
Armand Le Poittevin,
son petit-fils,
sœur Mechtilde Le Poittevin,
Denis Le Poittevin,
Bernadette Albisetti,
ses sœurs et son frère jumeau,
ont la tristesse
de faire part du décès de
M. Yves LE POITTEVIN
survenu le 28 décembre 2018,
à l'âge de 88 ans.
La cérémonie religieuse
sera célébrée en l'église
Saint-Pierre-de-Chaillot,
à Paris (16e),
le vendredi 4 janvier 2019,
à 10 h 30.
Sa famille
nous prie d'annoncer le décès,
dans sa 91e année, à Paris, de
M. Michel LHEURE
Ses obsèques auront lieu
le mardi 8 janvier 2019,
dans la plus stricte intimité.
Bernard Maçon,
son époux,
Valérie, Emmanuel et Inès,
Olivier,
ses enfants,
Victoire, A lexis, Thibault,
Sixtine, Léopold, I saure,
Capucine et Arthur,
ses petits-enfants,
ainsi que toute sa famille
et ses amis
ont l'immense tristesse
de vous annoncer le décès de
Odette MAÇON
née Bessède,
survenu le 30 décembre 2018.
La cérémonie religieuse
aura lieu
le vendredi 4 janvier 2019,
à 14 h 30, en l'église
Notre-Dame-d'Auteuil,
Paris (16e).
Cet avis tient lieu de faire-part.
Son épouse,
Nicole Marin,
son frère,
Claude Marin,
ses fils,
Christophe, Rémy, Loïc
et Brice Marin,
ses petits-enfants
et toute sa famille
ont la tristesse de vous
faire part du rappel à Dieu de
Emile MARIN
le 24 décembre 2018,
dans sa 91e année.
Des dons peuvent être adressés
à l'association
Les amis de la chaumière,
à Vilcey-sur-Trey,
boîte postale 161,
54706 Pont-à-Mousson Cedex.
Emile en était
membre fondateur.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Ses enfants et petits-enfants
et leurs familles
vous font part du décès de
Philippe MAUPAS-OUDINOT
duc de REGGIO
qui s'est endormi,
confiant dans l'amour de Dieu,
dans sa centième année.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le samedi 5 janvier 2019,
à 15 heures, en l'église
de Senan (Yonne).
L'inhumation se fera
dans l'intimité, au cimetière
du Père-Lachaise, Paris (20e),
dans le caveau familial.
Cet avis tient lieu de faire-part.
Urçay (Allier).
En union avec
Mme Antoine
Michel de Prévia (†),
née Françoise
Duflos de Saint Amand,
son épouse,
Edith et Claude Millot,
Eric et Bénédicte
Michel de Prévia,
Nathalie Lacombe
et Thierry Retsin (†),
ses enfants,
Véronique, Paul, Marie Millot,
Antoine, Augustin
Michel de Prévia,
Marie-Domitille Lacombe
et Julien Jouanneau,
Anne-Cécile et Romain
Tranquart,
ses petits-enfants,
Martin, Apolline, Eléonore
et Alexandre,
ses arrière-petits-enfants,
Alain, son frère,
ses belles-sœurs
et toute sa famille
ont la tristesse de vous
faire part du rappel à Dieu de
M. Antoine
MICHEL de PRÉVIA
le 1er janvier 2019,
à l'âge de 96 ans.
La cérémonie religieuse
aura lieu le samedi 5 janvier,
à 10 h 30, en l'église
Saint-Martin d'Urçay,
suivie de l'inhumation
au cimetière d'Urçay.
jeudi 3 janvier 2019
11
André et Marie-Annick
Guilmard,
Jean-Louis et Marie-Noëlle
Mauduyt de La Grève,
Pierre-Louis et Nathalie
Montfort,
François et Elizabeth
Montfort,
Antoine Montfort,
Philippe Montfort,
ses enfants et leurs conjoints,
ses 20 petits-enfants,
ses 38 arrière-petits-enfants
ont la tristesse
de vous annoncer le décès de
Mme Paul MONTFORT
née Marie-Thérèse Ferrand,
le 30 décembre 2018,
dans sa 94e année.
La cérémonie religieuse
aura lieu
ce jeudi 3 janvier 2019,
à 14 h 30, en l'église Saint-Léon,
Paris (15e), sa paroisse.
M. et Mme Marcel Noché,
M. et Mme Yves Noché,
sœur Thérèse Noché,
ses frères, sœur, belles-sœurs,
Isabelle Hellier du Verneuil,
Bénédicte Noché,
ses filleules,
ses neveux et nièces
ont la tristesse
de vous faire part du décès de
Mlle Françoise NOCHÉ
survenu le 31 décembre 2018,
dans sa 92e année, à Périgueux.
La cérémonie religieuse
sera célébrée
le vendredi 4 janvier 2019,
à 15 heures, en l'église
de Trélissac (Dordogne),
suivie de l'inhumation
au cimetière de Rouffignac-
Saint-Cernin-de-Reilhac.
Sa famille
a la tristesse de vous annoncer
le décès, à l'âge de 85 ans, de
Marie-Claire SOUCHON
née Delosme.
La messe sera célébrée
le vendredi 4 janvier 2019,
à 10 heures, en l'église
du Grand-Andely, Les Andelys.
L'inhumation aura lieu
le samedi 5 janvier, à 11 heures,
au cimetière de Loyasse,
à Lyon
France Tresca,
née Levesque, son épouse,
Anne-Sophie et Loup
Blanpain de Saint-Mars,
Arnaud et Ségolène Tresca,
Geoffroy et Laetitia Tresca,
ses enfants,
Victor, Tiphaine, Pauline,
Sibylle, L ouis, Augustin,
Tristan, Ghislain, Eloi,
Théodore, Gaspard, Quitterie,
ses petits-enfants,
vous font part
de l'entrée dans la Paix
et la Lumière du Seigneur de
Joël TRESCA
le lundi 31 décembre 2018,
dans sa 73e année.
La messe d'à Dieu sera célébrée
le vendredi 4 janvier 2019,
à 10 h 30,
en l'église Sainte-Thérèse
de Nantes (Loire-Atlantique).
L'inhumation aura lieu
le vendredi 4 janvier 2019,
à 15 heures, au cimetière
d'Elven (Morbihan).
souvenirs
Elisabeth Bauchet-Bouhlal,
ses enfants et petits-enfants
et tout le personnel du
Es Saadi Marrakech Resort
rappellent le souvenir de
Jamil BOUHLAL
grand entrepreneur, mécène,
esprit libre et épris de culture,
disparu le 3 janvier 2017,
à Marrakech.
Le lundi 1er janvier 2007,
André LAUBIE
s'est endormi
dans l'Amour de Dieu,
entouré de ses enfants
et petits-enfants.
A
Paulette Laubie,
au nom
du groupe André Laubie.

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
12 CHAMPS LIBRES
ENQUÊTE
L’archéologie revivifiée
par les nouvelles technologies
Vincent Bordenave
vbordenave@lefigaro.fr
Q
uelques semaines après sa paru-
tion, ce grand livre rouge* est déjà
en rupture de stock. Pourtant,
avec ses 600 pages environ, cette
histoire des civilisations n’était
pas destinée à devenir un best-
seller. Un tel succès commercial
témoigne de l’intérêt croissant du
grand public pour l’archéologie.
« Les gens s’interrogent sur leur identité, l’archéologie
permet d’alimenter une réflexion et en partie d’apporter
des réponses », explique Dominique Garcia, président
de l’Institut national de recherches archéologiques
préventives (Inrap), qui a codirigé la rédaction du li-
vre avec Alain Schnapp (professeur émérite d’archéo-
logie grecque, Paris-I) et Jean-Paul Demoule (profes-
seur émérite de protohistoire européenne, Paris-I).
Cette discipline en pleine révolution se transforme
avec l’arrivée de nouvelles technologies comme le
lidar (qui permet de mesurer avec une précision ab-
solue les reliefs des zones étudiées), les analyses
ADN, l’archéologie maritime… « Si l’on devait faire
une comparaison, l’archéologie est à un stade similaire
à celui qu’avait la médecine entre la découverte des
rayons X et celle de la pénicilline, commente Alain
Schnapp. Ces bouleversements modifient nécessaire-
ment notre façon de regarder notre passé. »
Mais le changement le plus important est peut-
être législatif. Si les services de l’État le prescrivent,
chaque chantier de construction est désormais pré-
cédé d’une fouille. « L’archéologie préventive a ame-
né une transformation totale, continue Dominique
Garcia. Depuis 2001, les fouilles ne sont plus seulement
déterminées par les recherches en amont, mais elles
ont lieu sur tout notre territoire. On considère que par
défaut, chaque terrain a quelque chose à nous ensei-
gner. Les travaux prévus pour le Grand Paris ou les
Jeux olympiques sont, par exemple, une très belle op-
portunité : ce patrimoine pour demain permet égale-
ment de s’approprier notre patrimoine ancien. »
Un immense puzzle
CNRS-CCJ/ CHRISTINE DURAND
Une inversion des paradigmes qui fait prendre une
autre dimension à la discipline. Quand bien même on
ne déterre pas tous les jours de somptueuses nécropo-
les, chacune des fouilles permet de comprendre le
contexte historique dans lequel ont vécu nos ancêtres.
Le livre raconte aussi bien les premiers pas de Lucy que
la bataille de Verdun ou les conditions de détention à
Auschwitz. Soit une histoire longue de près de 7 mil-
lions d’années. « C’est une démarche inédite, explique
Dominique Garcia. L’ampleur de la tâche nous a un peu
terrifiés. Mais nous sommes associés avec plus de
70 grands spécialistes mondiaux pour donner une vision
globale de l’aventure humaine. »
Inévitablement, cela oblige à des choix. « On s’est
volontairement concentrés sur les apports les plus ré-
cents de la discipline, détaille Alain Schnapp. La pré-
histoire prend donc une place importante, car les
avancées technologiques ont profondément changé
notre vision de la période. Inversement, nos connais-
A
sances sur les grands empires ont été beaucoup moins
bouleversées. » « Nous avons fait le choix d’apporter
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Par sa pluridisciplinarité, des éclairages nouveaux pour les périodes déjà
connues, ajoute Dominique Garcia. Par exemple,
l’archéologie
l’égyptologie est une discipline très développée. Nous
avons donc pris un angle un peu différent, en parlant
non pas des objets et des architectures mais de l’orga-
est devenue une science nisation de l’État. »
Notre histoire est un immense puzzle et nous ne
à part entière.
disposons que de très peu de pièces. Des absences qui
peuvent quelquefois donner un regard erroné de no-
Si la truelle, le pinceau tre passé. « Les biais sont très nombreux dans nos dis-
ciplines et ont différentes causes, explique Jean-Jac-
ou l’excavatrice sont ques Hublin, directeur du département d’évolution
humaine à l’institut Max Planck de Leipzig, qui a ré-
toujours d’actualité, digé l’introduction de la première partie de l’ouvrage
et supervisé son écriture. Celles-ci vont des conditions
le lidar et son radar très inégales de conservation d’une région à l’autre
jusqu’aux circonstances historiques et politiques qui
ou les analyses ADN
peuvent empêcher certaines recherches. Il est aujour-
d’hui par exemple très difficile d’envisager des pros-
pections dans le Sahel (nord du Mali et Niger, NDLR).
lui donnent Pourtant, je suis persuadé qu’il s’y trouve des sites très
importants. Nous avons eu trop tendance à considérer
une nouvelle puissance. nos découvertes comme une réalité complète et figée du
passé, alors qu’elles n’en représentent qu’une infime
Tout comme la mise partie. » Les découvertes de ces dernières années ont
permis de faire un bond considérable, mais elles ne
en place des fouilles de comblent pas tous les trous. Pendant longtemps, en
se fondant surtout sur l’aspect extérieur des fossiles,
l’archéologie préventive on racontait l’évolution humaine comme un proces-
sus linéaire. « L’évolution est en fait un phénomène
pour tous les chantiers.
buissonnant, continue Jean-Jacques Hublin. On sait
désormais que pendant très longtemps plusieurs espè-
ces humaines ont cohabité. L’arbre n’est pas encore
La lecture du monde bien dessiné et certaines branches sont floues, mais on
commence à bien en comprendre la silhouette. »
vit ainsi une révolution. Notre espèce est née il y a plus de 300 000 ans en
Afrique. Nos ancêtres directs se sont ensuite peu à
peu répandus sur tout le globe, en remplaçant
d’autres populations, comme celle des hommes de
Néandertal. Il y a encore peu de temps, on pensait
qu’aucun échange n’avait eu lieu entre ces différents
groupes. On sait désormais grâce aux analyses ADN
que non seulement Néandertal et Homo sapiens se
sont rencontrés, mais qu’il y a eu des échanges de
gènes entre les deux groupes, bouleversant dans le
même temps la notion même d’espèce !
Depuis environ 40 000 ans, Homo sapiens, l’hom-
me moderne est le seul qui représente le genre
Homo, cette lignée qui compte les ancêtres des hom-
mes et leurs proches parents. « Il est difficile de com-
prendre comment notre espèce a fini par supplanter
toutes les autres, continue Jean-Jacques Hublin. Mais
il y a une caractéristique qui est très développée, c’est
notre capacité à construire des réseaux d’individus
très étendus, et ce, probablement dès avant notre sor-
tie d’Afrique. Cette hypertrophie des liens sociaux a
ensuite permis la naissance des civilisations. »
L’archéologie préventive a amené
une transformation totale. Depuis 2001,
les fouilles ne sont plus seulement
déterminées par les recherches en amont,
»
mais elles ont lieu sur tout notre territoire
DOMINIQUE GARCIA PRÉSIDENT DE L’INSTITUT NATIONAL DE RECHERCHES ARCHÉOLOGIQUES PRÉVENTIVES
Un drone d’archéologie
équipé d’un lidar,
un radar laser capable
de scanner le terrain
sous la végétation,
en août, en Lorraine.
FRANCIS REINOSO/PHOTOPQR/L’EST REPUBLICAIN/MAXPPP
« La préhistoire est une lente marche qui a débouché
sur Homo sapiens, ajoute Alain Schnapp. Un proces-
sus qui amènera l’homme à inventer les sociétés, à do-
mestiquer les animaux, à cultiver et à écrire. » Sur la
pendule de l’humanité, l’histoire et l’écriture n’oc-
cupent que la dernière heure. Paradoxalement, la
place de l’archéologie n’est pas moins importante
pour nous conter cette période. « C’est fascinant de
constater comme tout s’accélère à partir de ce mo-
ment, raconte Dominique Garcia. L’homme n’est pas
le seul animal social, mais c’est le seul à avoir créé des
sociétés et il l’a fait très rapidement. »
« L’homme est un animal migrant »
Il y a environ 9 000 ans, la révolution néolithique a
bouleversé nos vies avec la naissance des premières
sociétés agraires, l’invention de la roue ou de la char-
rue. Une transformation qui débouche sur la sédenta-
risation et sur la naissance des villes. Se confrontent,
dès lors, deux dynamiques. « L’homme est un animal
migrant, ajoute Dominique Garcia. Sur nos 300 000
ans d’existence, la sédentarisation n’a que 9 000 ans.
Mais les villes et les empires n’ont pas arrêté les échan-
ges. Bien au contraire. Les analyses linguistiques et
ADN prouvent que les mouvements de population ont
toujours existé et ce, partout sur le globe. » La plus
vieille ville au monde a 7 000 ans, elle a été construite
au Moyen-Orient. Près de 4 400 ans plus tard est fon-
dée Marseille, la première ville française. De cette cité
vont naître les premiers contacts entre les Celtes et les
civilisations méditerranéennes. L’Europe de l’Ouest
en sera transformée, avec l’apparition des principau-
tés celtiques qui dorment désormais sous nos pieds et
que Dominique Garcia nous raconte pendant tout un
chapitre.
« Pour cette période, comme pour tant d’autres, les
sources écrites seules peuvent être biaisées et l’archéo-
logie permet de démêler le vrai du faux, commente
Dominique Garcia. Les récits de César sur la guerre
des Gaules sont des sources ô combien précieuses, mais
qui ne sont que des comptes rendus d’un militaire à sa
tutelle politique. Ce sont des écrits partiels et partiaux.
Loin de corriger l’histoire, l’archéologie permet de la
contextualiser. » Très récemment, une découverte a
permis de revoir la date précise de l’éruption du
Vésuve à Pompéi. Jusque-là les manuels d’histoire
avaient retenu la version rapportée par Pline le
Jeune, qui décrit la catastrophe au mois d’août de
l’an 79. Mais une inscription démontre que le volcan
a craché ses cendres après le seizième jour avant les
calendes de novembre, soit le 17 octobre.
L’archéologie est une science transversale qui se
nourrit de sciences comme la génétique et la biolo-
gie, pour alimenter les sciences sociales. Une science
qui nous enseigne autant l’histoire des hommes que
l’évolution du climat. « Quand j’étais étudiant, l’ar-
chéologie était considérée comme une source auxiliai-
re, raconte Alain Shnapp. Aujourd’hui, de par sa plu-
ridisciplinarité et parce qu’elle se confronte aux
sciences dites “dures”, de simple source qu’elle était
pour les historiens, l’archéologie est bel et bien devenue
une science à part entière. » Une science qui n’est
qu’au début de son évolution et qui, de plus en plus,
s’adjoint de nouvelles compétences. « Je crois bien
que, dans une quinzaine d’années, les archéologues-
historiens comme moi seront devenus minoritaires au
sein de la discipline », conclut Dominique Garcia. Mi-
noritaires et peut-être dépassés ? ■
*« Une histoire des civilisations »,
Éditions La Découverte Inrap.

CHRONIQUE
Luc Ferry
luc.ferry@yahoo.fr
www.lucferry.fr
@ 100 000 citations
et proverbes sur evene.fr
3 janvier 1892 : naissance de l’écrivain anglais J. R. R. Tolkien, auteur du Seigneur des anneaux.
AP/ASSOCIATED PRESS
ANALYSE
Jean-Pierre Robin
jprobin@lefigaro.fr
Dassault Médias
14, boulevard Haussmann
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Président-directeur général
Charles Edelstenne
Administrateurs
Olivier Dassault, Thierry
Dassault, Jean-Pierre
Bechter, Olivier Costa
de Beauregard, Benoît
Habert, Bernard Monassier,
Rudi Roussillon
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Le « réveil collectif » contre l’individualisme ?
ujourd’hui, c’est la
A
grande mode à gauche,
mais parfois hélas aussi
à droite : on en appelle
au « réveil citoyen »
contre le primat d’un
« individualisme » qui ruinerait
le sens du collectif sous l’égide du
« néolibéralisme » qui menace,
comme chacun sait, notre pays.
La vérité est à peu près inverse,
à savoir que nous crevons lentement
d’un manque de libéralisme associé
au poids écrasant des taxes,
d’un État endetté à mort et de
communautarismes religieux de plus
en plus effroyables. La gauche
en perdition croit s’en sortir en
administrant au socialisme une
ENTRE GUILLEMETS
J. R. R. Tolkien
Les mythes que nous tissons,
même s’ils renferment
des erreurs, reflètent
inévitablement un fragment
de la vraie lumière, cette vérité
éternelle qui est avec Dieu »
L’erreur de calcul qui a fait
chavirer le quinquennat Macron
e gouvernement d’Édouard
L
Philippe est souvent brocardé
comme trop « technique ».
Mais paradoxalement, à
l’origine de la révolte des
« gilets jaunes » - la flambée
des prix des carburants exacerbée
par l’écotaxe -, on trouve une erreur
de calcul élémentaire et une
incompréhension stupéfiante des
mécanismes économiques de la part
de Matignon et de Bercy.
L’affaire remonte au 19 décembre 2017,
lorsque l’Insee présente sa note de
conjoncture de fin d’année. Rappelons
que l’Institut de la statistique et des
études économiques est juridiquement lié
à Bercy tout en bénéficiant d’un statut
de totale indépendance vis-à-vis du
gouvernement, comme ses homologues
européens. Dans ce document, les
économistes de l’Insee analysent
l’impact des nouvelles dispositions
fiscales particulièrement nombreuses
qui viennent d’être votées. Cela va
de la suppression de l’ISF à la réduction
partielle de la taxe d’habitation, en
passant par le relèvement des taxes sur
le tabac et l’énergie, la hausse de la CSG
de 1,7 %, la suppression des cotisations
chômage pour les salariés, etc.
Au total, l’ensemble de ces mesures
conduira à amputer le pouvoir d’achat
des ménages de 4,5 milliards en 2018,
est-il dit, soit une ponction de 0,3 %.
En soi ce n’est pas dramatique dans la
mesure où le revenu réel des Français
(hors inflation) devrait progresser au
total d’environ 1,6 %, comme l’année
précédente du fait des augmentations
salariales et des créations d’emploi.
Les économistes de l’Insee chiffrent
l’impact spécifique de chacune
des réformes fiscales. Ils estiment que
la transformation de l’ISF en un impôt
SOCIÉTÉ DU FIGARO SAS Directeur des rédactions
14, boulevard Haussmann Alexis Brézet
75009 Paris
Directeurs adjoints de la rédaction
Président Gaëtan de Capèle (Économie),
Charles Edelstenne Laurence de Charette (directeur
de la rédaction du Figaro.fr),
Directeur général, Anne-Sophie von Claer
directeur de la publication (Style, Art de vivre, So Figaro),
Marc Feuillée
Anne Huet-Wuillème (Édition,
Photo, Révision),
OPINIONS CHAMPS LIBRES
injection d’écologie apocalyptique.
C’est ne rien comprendre à
l’individualisme démocratique qui ne
signifie pas la fin du collectif, mais,
tout au contraire, son accession à l’âge
adulte. L’État moderne reste bien un
État dont la tâche doit être en principe
de travailler au bien commun qui
consiste à servir les individus et les
familles, pas à les envoyer mourir en
masse « comme en 14 ». Il est à la fois
le lieu de la conscience de soi de la
société, celui de la possible définition
de l’intérêt général et, par là même,
l’auxiliaire des individus auxquels il
doit s’efforcer d’ouvrir des possibilités
de s’épanouir librement et d’entrer
dans des relations affectives, familiales
et professionnelles fécondes. Quand je
sur la fortune immobilière (IFI) ainsi que
la « flat tax » sur les produits financiers
conduiront à améliorer de 0,3 % le
pouvoir d’achat de l’ensemble des
ménages. À l’inverse, les hausses de taxe
sur le tabac et les carburants auront
un impact négatif de 0,3 % et 0,2 %
respectivement. Soulignons que ces
chiffres ne distinguent pas les différentes
catégories socio-économiques, même si
l’on sait bien sûr que la mesure ISF
concerne 300 000 foyers alors que les
augmentations de taxes indirectes en
touchent une vingtaine de millions.
L’analyse de l’Insee, un simple
exercice de comptabilité et non pas une
prévision, n’en a pas moins eu le don de
« L’exécutif a fait preuve d’un manque c’est
manifeste de finesse politique et plus regretter d’avoir
encore d’expertise technique
déplaire à l’exécutif. Dès le lendemain,
le 20 décembre 2017, Benjamin Griveaux,
porte-parole du gouvernement, réplique
de façon cinglante : « Nous contestons
formellement l’étude de l’Insee pour une
raison très simple : le raisonnement est fait
à consommation équivalente, or la fiscalité
indirecte sur le tabac et sur le diesel a pour
vocation de changer les comportements. »
C’est là que le gouvernement commet
son erreur, ne comprenant pas
réellement ce qu’est le pouvoir d’achat.
Certes, une hausse des taxes peut
effectivement entraîner une diminution
de la consommation, ce qui s’est produit
en effet. Sur les dix premiers mois de
2018, les buralistes ont constaté une
chute de 10 % des achats de cigarettes,
même si les recettes fiscales sur le tabac
ont progressé de 500 millions tant la taxe
était forte. Le recul de la consommation,
Arnaud de La Grange Directeur artistique
Pierre Bayle
(International),
Rédacteur en chef
Étienne de Montety Frédéric Picard (Web)
(Figaro Littéraire),
Directeur délégué
Bertrand de Saint-Vincent du pôle news
(Culture, Figaroscope, Télévision), Bertrand Gié
Yves Thréard (Enquêtes, Éditeurs
Opérations spéciales, Sports, Robert Mergui
Anne Pican
Sciences),
Directeur de la
Vincent Trémolet de Villers diversification éditoriale
(Politique, Société, Débats Opinions) Pierre Doncieux
LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019
13
mettais en place les dédoublements comme des totalitarismes modernes.
de cours préparatoire ou la réforme Le meilleur exemple de cet
de la voie professionnelle pour lutter individualisme nous est offert par la
contre l’échec scolaire, je ne travaillais naissance de la famille moderne fondée
pas pour moi, mais bel et bien dans sur le mariage choisi par les jeunes gens
le souci d’améliorer la vie des individus par et pour l’amour, en opposition
et des familles. En quoi j’étais au mariage de raison, arrangé par les
indissolublement dans le collectif et parents, voire par les communautés
dans l’individualisme, deux notions villageoises, comme on le voit tout au
qu’il est absurde d’opposer. long du Moyen Âge européen et dans
Les politiques peuvent, comme c’est nombre de pays traditionnels encore
le cas aujourd’hui, errer, échouer, aujourd’hui, en Asie ou en Afrique
ou faillir, mais c’est une autre affaire notamment. C’est donc par un
qui ne touche pas au principe. Du reste, formidable mouvement de libération
nous pouvons aussi les renvoyer que le rapport entre l’État et les
dans leurs foyers. Quand il apparaît individus (la société civile) s’est enfin
dans les années l830 avec son sens inversé dans nos démocraties au cours
philosophique encore non dégradé, du XXe siècle. Ce n’est pas un déclin,
le mot individualisme ne s’oppose pas mais la meilleure nouvelle du
à collectif, mais à « holisme », du grec millénaire. Nous n’acceptons plus des
holos, qui veut dire le « tout », un politiques qu’ils nous envoient mourir
terme que les ethnologues utilisent et tuer au nom de la révolution
pour désigner les sociétés
traditionnelles au sein desquelles
le « corps » social impose de manière
autoritaire les coutumes et les
ou de la nation, encore moins de Dieu,
mais nous leur demandons de mettre
en place des réformes sociales,
scolaires ou économiques qui
traditions à un individu qui n’existe pas humanisent autant qu’il est possible
encore au sens propre du terme : le monde, qui le rendent meilleur
il est considéré comme le simple et plus humain, des projets qui offrent
« membre » d’un organisme quasi à tous les individus des chances réelles
biologique infiniment supérieur à lui.
Le citoyen n’est ici qu’un organe,
d’épanouissement de soi.
À l’encontre de ce qu’affirment nos
une entité inséparable de la totalité professionnels de la nostalgie comme
qui l’englobe, de sorte qu’il est privé du retour à l’avenir radieux, ce n’est
de toute autonomie personnelle. pas un recul funeste, mais un immense
On retrouvera cette idée dans les progrès. Que nos politiques soient
mouvements contre-révolutionnaires, aujourd’hui incapables, hélas, de
mais hélas aussi dans ce collectivisme
de gauche que certains veulent ranimer
dégager l’intérêt collectif et de servir
les individus, que ces derniers, face aux
aujourd’hui. Le mot individualisme difficultés de l’existence, se révoltent
ne désigne donc pas l’égoïsme, ou essaient de s’en tirer chacun pour
le repli sur soi, mais le mouvement soi est une chose, qu’il faille pour
typiquement moderne et démocratique autant renoncer à l’individualisme
d’émancipation des individus à l’égard en est une autre qui serait tout
des communautarismes traditionnels simplement catastrophique.
VOX
...
GRAND ENTRETIEN
Le journaliste politique
François Bazin,
comme celui de diesel est la réponse des
auteur du blog « lirelasuite-
consommateurs à la hausse des prix qui
ampute leur porte-monnaie.
Le point de vue de l’Insee est le bon, francoisbazin.fr » : « Macron
et d’ailleurs l’Institut de la statistique
a répondu sur-le-champ à Benjamin a cru qu’il était la solution
Griveaux dans un communiqué
confirmant ses chiffres, tout en précisant
d’une crise démocratique
que son mode de calcul correspond aux
normes internationales des instituts
dont il n’était que
de statistique : quand une taxe augmente,
le pouvoir d’achat des consommateurs
l’expression »
...
diminue d’autant. Qu’un gouvernement
CHRONIQUE
polémique publiquement avec les experts
d’une de ses administrations dont
la rigueur scientifique est reconnue
de tous est pour le moins regrettable.
La semaine vue par Gilles-
Mais en l’occurrence William Goldnadel, auteur
Bercy, Matignon
et l’Élysée qui doivent de « Névroses médiatiques.
Le monde est devenu une
»
dénigré l’étude
de l’Insee.
S’ils l’avaient bien foule déchaînée » (Plon).
comprise, ils auraient appris trois choses.
Que leurs mesures fiscales allaient
entraîner en tant que telles une baisse
du pouvoir d’achat des Français en 2018.
Qu’elles étaient mal réparties au cours
de l’année, les hausses de taxes indirectes
Les rencontres
intervenant au premier trimestre
et la réduction de la taxe d’habitation au
du FIGARO
quatrième. Que la facture était discutable
socialement, les principaux bénéficiaires, RENCONTRE AVEC
voire les seuls, étant les contribuables de MICHEL ONFRAY
l’ISF. Tous les motifs de mécontentement
des « gilets jaunes » étaient en germe. le mardi 22 janvier
L’exécutif a fait preuve d’un manque 2019 à 20 heures
manifeste de finesse politique et plus Salle Gaveau.
encore d’expertise technique. Mais
y a-t-il de vrais économistes dans les
Réservations :
cabinets ministériels peuplés d’énarques, 01 70 37 31 70 ou
calibrés comme des petits pois et sans www.lefigaro.fr/
autre culture économique que le vernis
acquis à Sciences Po ?
rencontres.
FIGAROMEDIAS Impression L’Imprimerie, 79, rue de Roissy Ce journal
9, rue Pillet-Will, 75430 Paris Cedex 09 93290 Tremblay-en-France se compose de :
Midi Print, 30600 Gallargues-le-Montueux Édition nationale
Tél. : 01 56 52 20 00 1er cahier 14 pages
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DE COMPÉTITIVITÉ PAGE 18 CARIGE PAGE 17 l’année précédente. Le nombre de
voitures livrées en un an est équi-
valent à celui des dix premières an-
nées de la commercialisation de
Tesla, entamée en 2008.

2018, année noire Cette performance s’explique par

l’arrivée du Model 3, plus économi-
que que les très onéreux Model S et
Model X. La montée en volume de la

pour la réputation des Gafa production a été très difficile, sur-

tout en début d’année, mais la so-
ciété dirigée par Elon Musk y est
parvenue. Sur l’ensemble de l’année,
145 000 Model 3 sont sorties des
Facebook et Google englués dans les scandales, Apple victime de la guerre chaînes de l’usine de Fremont, dont
plus de 61 000 sur le seul quatrième
commerciale sino-américaine : les difficultés s’accumulent pour les géants du Web. trimestre.
Les investisseurs ont pourtant fait
Après des sommets boursiers at- Congrès américain d’avoir été des seau social à protéger leurs données ple est pris entre le feu croisé des plonger le titre Tesla en Bourse. En
teints au milieu de l’année 2018, le instruments de la propagande rus- personnelles. La question du dé- pressions américaines et chinoises. milieu de séance, mercredi 2 janvier,
retournement a été brutal pour les se. Par ailleurs, Facebook a dû faire mantèlement d’Amazon, la pieuvre L’année 2018 a marqué un tournant la chute était supérieure à 7 %. La
Gafa. Mark Zuckerberg et Sundar face au scandale Cambridge Analy- du numérique, est désormais pour ces géants que l’on croyait in- déception s’explique par l’incapacité
Pichai, les dirigeants de Facebook tica, qui a mis à mal la confiance des ouvertement évoquée par les auto- touchables. L’année 2019 sera cru- de la société, qui en avait fait la
et Google, sont accusés par le internautes dans la capacité du ré- rités de la concurrence. Enfin, Ap- ciale pour leur avenir. promesse, d’augmenter sa produc-
tion de Model 3 au-delà des
èLINA KHAN, LA JURISTE QUI FAIT TREMBLER AMAZON èAPPLE ET HUAWEI VICTIMES DE LA GUERRE SINO-AMÉRICAINE PAGES 16 ET 17
5 000 exemplaires par semaine déjà
atteints lors du trimestre précédent.
De plus, les investisseurs s’inquiè-
tent de la baisse annoncée de
Bic veut écrire 2 000 dollars du prix des trois mo-
dèles commercialisés par Tesla aux

une nouvelle États-Unis.

La société californienne explique
cette modification par la baisse des
page de subventions fédérales à l’achat de
BOBBY YIP/REUTERS, MAX ROSSI/REUTERS, JOEL LE GALL/PHOTOPQR/OUEST FRANCE

véhicules électriques de 7 500 à

son histoire 3 750 dollars. À la suite d’une modi-
fication législative intervenue en
2017, cette subvention n’est accor-
Actant l’échec dée que pour les 200 000 premiers
de ses diversifications, véhicules produits par un construc-
teur. Elle est ensuite réduite de
le groupe français moitié. Tesla a passé ce cap en
vend ses planches cours d’année. Les analystes esti-
maient que la demande pour les
à voile et se recentre modèles proposés par Tesla était
sur les stylos, briquets quasiment insensible à l’aspect
« prix ». Cette adaptation des tarifs
et rasoirs, trois montre que ce n’est pas le cas.
marchés en difficulté. Prochaine étape, début février, avec
« Nous devons la publication des résultats annuels.
Ils montreront si Tesla a été capable
réinventer Bic », de gagner de l’argent deux trimes-
assure son patron, tres consécutifs, pour la première
fois de son histoire.
qui prépare une E. E.
réorganisation. PAGE 19

le PLUS du L'HISTOIRE Leclerc accélère

FIGARO ÉCO
Un bug fait vendre à Cathay Pacific son offensive pour
PRESSE
« Nice Matin » doit des billets first au prix de la classe éco s’imposer à Paris
trouver un nouvel 24 000 euros pour ces billets qui auraient dû

N
ous avons fait une erreur, mais Après avoir snobé Paris pen- noprix de l’avenue de Cli-
actionnaire nous sommes impatients être facturés 600 000 euros. En fait, un bug dant des décennies, Leclerc chy… Monoprix qui, avec son
PAGE 20 « de vous accueillir à bord. »
Pour le commun des mortels,
informatique aurait modifié le prix
de ces billets. Cet événement survient
s’offre un deuxième magasin
dans la capitale. Après son
cousin Franprix, a toujours
eu une belle part dans le pa-
le tweet de la compagnie quelques mois après qu’une violente attaque débarquement discret avec nier des Parisiens.
LA SÉANCE hongkongaise Cathay Pacific est abscons. d’hackers a provoqué la divulgation un supermarché dans le XIXe Pour Leclerc, c’est une troi-
DU MERCREDI 02 JANVIER 2019 En revanche, pour 18 voyageurs, des coordonnées personnelles de 9,4 millions arrondissement en 2016, le sième brique pour gagner la
CAC 40 ce gazouillis est de très bon augure. Cathay clients. Le cas de Cathay Pacific n’est pas leader de la distribution bataille de Paris, après son
4689,39 -0,87% a annoncé mercredi qu’elle honorerait isolé. L’été dernier, Hong Kong Airlines avait ouvrira un drive piéton la se- premier magasin et surtout
des billets de first ou de business affichés retrouvé sur Internet des vols Los Angeles- maine prochaine dans le l’ouverture, au printemps
DOW JONES la veille sur son site internet… à prix Shanghaï près de six fois moins chers que XVIIIe. Ou plus exactement 2018, de son site Chez Moi
23211,79 -0,50% de classe éco. 11 geeks, à l’affût de bonnes prévu. Là aussi, la compagnie avait fait face. un « E. Leclerc Relais », Leclerc qui, en livrant la ca-
affaires, désireux de rallier en août la ville En revanche, la presse asiatique cite le cas du comme l’enseigne a décidé pitale, a permis de rendre
ONCE D’OR vietnamienne de Da Nang à New York, site commercial Fortress qui avait affiché des de baptiser cet espace où les l’offre et les prix Leclerc ac-
1281,65 (1279,00) clients viendront retirer leurs cessibles aux Parisiens.
avaient acheté Apple MacBook
commandes. Michel-Édouard Leclerc as-
des allers- et des iPhone à
PÉTROLE (lond) À 100 mètres du métro La surait en septembre : « Il y a
retours à 33,50 euros. Fourche, au pied d’un bel
55,653 (54,150) dix ans, je ne croyais pas
675 dollars Les clients se sont immeuble 1830, ce local de qu’une offre à prix E. Leclerc
EUROSTOXX 50 pièce pour satisfaits cinquante mètres carrés affi- fut possible dans Paris vu les
2991,55 -0,33% des vols en first d’excuses et d’un che déjà la communication charges d’exploitation des ma-
estimés remboursement. offensive chère à l’enseigne. gasins. Mais aujourd’hui, ça
FOOTSIE en réalité à Ils étaient bien « Enfin, une vraie mesure pour peut devenir moins coûteux de
6734,23 +0,09% 16 000 dollars, plus nombreux, le pouvoir d’achat », promet- livrer dans un immeuble que de
assure il est vrai, que tent les vitrines. vendre en magasin. » La ba-
NASDAQ Bloomberg. les candidats Petit clin d’œil comme les taille sera rude : Carrefour a
6312,96 -0,27% Cathay à un vol Da Nang- aime Michel-Édouard Le- déployé une dizaine de drives
n’encaissera New York… ■ clerc, le président des centres piéton, Monoprix s’est asso-
NIKKEI donc que CHARLES GAUTIER E. Leclerc, le magasin se cié à Amazon et Intermarché
A

20014,77 -0,31% trouve juste en face du Mo- installe des casiers… A. V.-D’E.
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO

16 L'ÉVÉNEMENT
2018, une année noire pour la réputation
des géants américains du numérique
Vie privée, désinformation, éthique : les géants du Web ont subi de
nombreuses critiques, sans réussir à convaincre de leur bonne foi.
LUCIE RONFAUT £@LucieRonfaut
TECHNOLOGIE Trente et un. C’est le
nombre de scandales liés à Facebook
depuis janvier 2018, d’après une liste
publiée par Buzzfeed. L’année a été
particulièrement rude pour le pre-
mier réseau social mondial, accusé
pêle-mêle de déséquilibrer les démo-
craties dans le monde, tuer à petit feu
la vie privée en ligne, mettre en péril
le modèle économique déjà fragile
des médias, aggraver l’addiction au
smartphone ou faciliter l’organisa-
tion d’opérations terroristes. Une
année de colère, d’incompréhension
et d’excuses. Une année, aussi,
ayant un penchant démocrate. Cette
stratégie a aussi été empruntée de
l’autre côté de l’Atlantique, lors du
scrutin pour le Brexit. Ces découver-
tes choquantes provoquent une sé-
quence politique inédite. Anciens
chouchous de Washington, à l’ère
Obama, les dirigeants des géants du
Web sont sèchement convoqués les
uns après les autres à s’expliquer de-
vant le Congrès américain. Comment
n’ont-ils rien vu venir ? Comment
lutter contre le fléau de la désinfor-
mation en ligne ? Ils n’ont pas vrai-
ment de réponse.
les en dehors de l’Europe. Les États-
Unis travaillent eux aussi sur une loi
fédérale pour mieux protéger la vie CAPITALISATIONS
privée de leurs citoyens en ligne, BOURSIÈRES
après un premier texte ambitieux DES GAFA
adopté en Californie. Officiellement, (EN MILLIARDS DE DOLLARS)
les géants du Web y sont tous favora-
bles. En coulisses, leur lobbying est APPLE
intense pour s’assurer que leurs acti-
vités ne soient pas trop restreintes.
Facebook a perdu 2 millions d’utili-
sateurs en Europe cette année. Le
RGPD lui aura fait plus de mal que
751AMAZON
tous ses autres scandales réunis.

Fronde des employés

d’images fortes. En avril, pour la pre-
mière fois de sa carrière, Mark Zuc-
kerberg a été forcé d’apparaître à
deux reprises devant le Congrès
américain. De ces auditions resteront
les photos du PDG de Facebook ha-
gard et blafard, entrepreneur brillant
de 34 ans devenu ennemi des gou-
vernements et du grand public en
quelques mois. Entraînant dans sa
chute les autres géants du Web, dont
les faiblesses ont elles aussi brusque-
ment éclaté au grand jour.
Les origines de la tempête sont an-
ciennes. Le 8 novembre 2016, Donald
Trump est élu 45e président des
États-Unis. Comme Barack Obama
avant lui, le candidat républicain a su
utiliser les réseaux sociaux pour mo-
biliser les foules. Mais très vite, des
éléments troublants alertent les poli-
tiques et la justice américaine. S’en-
suivra un long travail d’enquête, tou-
jours en cours, sur les tentatives
d’ingérence russes de l’élection pré-
sidentielle. Fin décembre, deux rap-
ports remis au Sénat américain sont
arrivés à la même conclusion : des
trolls, financés par la Russie, ont
sciemment semé la confusion dans
l’opinion publique américaine sur
Facebook, Instagram, Twitter ou
YouTube, à coups de contenus
outranciers ou de désinformation. Le
but était d’encourager les soutiens de
Donald Trump à aller voter et, au
contraire, à détourner des urnes ceux
C’est sur ce contexte déjà tendu
qu’explose le pire scandale de 2018.
En mars, le New York Times et le
Guardian révèlent l’affaire Cambrid-
ge Analytica, du nom d’une société
britannique spécialisée dans l’analy-
se de données à des fins de commu-
nication électorale. Cette dernière a
exploité de manière frauduleuse les
données de 87 millions d’utilisateurs
Facebook jusqu’en 2015, au profit de
la campagne de Donald Trump.
Outre son aspect politique, l’affaire
montre aussi à quel point le modèle
économique du réseau social est mal
connu du grand public et des politi-
ques. Le chiffre d’affaires de
Facebook repose sur la récolte d’in-
formations personnelles sur les in-
ternautes, au sein du réseau social et
en dehors, utilisées pour constituer
des profils très précis. Ils sont ensuite
vendus à des entreprises pour toutes
sortes de fins, y compris politiques.
En 2018, la vie privée en ligne est de-
venue un enjeu démocratique en Eu-
rope. Le 25 mai, après des années de
négociations, est entré en vigueur le
règlement européen de protection
des données personnelles (RGPD).
Ce texte impose des règles strictes
aux entreprises traitant les informa-
tions des citoyens européens. Les
premiers concernés sont évidem-
ment les géants du Web. Ils s’y sont
préparés à l’aide d’une armée d’avo-
cats. Ils n’avaient pas prévu, en re-
vanche, que le RGPD ferait des ému-
Enfin, 2018 a marqué le début
d’une fronde inédite, aux formes
multiples, des employés des entre-
prises de nouvelles technologies.
745
Chez Facebook, une dizaine de diri- GOOGLE
geants ont pris la porte en quelques
mois. Google a subi plusieurs mani-
festations d’ampleur, pour s’opposer
à sa politique concernant le harcèle-
ment sexuel au travail, et ses velléités
724
FACEBOOK
de collaborer avec la censure chinoi-
se. Microsoft a été critiqué pour sa
collaboration avec l’ICE, l’agence en
charge de l’immigration aux États-
Unis. Des employés d’Amazon ont
390
dénoncé le développement d’un outil
de reconnaissance faciale utilisé par
les forces de police. Habituellement
choyés et fidèles à leurs employeurs,
ces salariés se sont rebiffés, dénon-
çant avec force l’hypocrisie et l’éthi-
que à géométrie variable de leurs di-
rigeants. Les temps ont changé.
Le plus grave, pour les entreprises
des nouvelles technologies, n’est pas
tant la somme de ces scandales. C’est
plutôt ce qu’ils disent sur les rela-
tions des internautes avec les géants 10 AVRIL 2018
du Web. En 2018, quelque chose a Mark Zuckerberg, PDG de Facebook,
changé, de manière irréversible.
témoigne devant une audience
Jusqu’ici, ces entreprises bénéfi-
ciaient d’une bienveillance. Leur do- conjointe des comités sénatoriaux
mination sur le quotidien des utilisa- du pouvoir judiciaire et du commerce
teurs et sur l’économie inquiétait. concernant l’utilisation et la protec-
Mais elles savaient aussi impression- tion, par sa société, des données
ner par leur innovation, leur capacité des utilisateurs à Capitol Hill, à
à faciliter la communication des ci- Washington.
toyens, et leurs performances finan-
cières. Cet équilibre est perdu. De-
puis 2018, la Silicon Valley ne
parvient plus à rassurer. ■

Lina Khan, la juriste qui fait trembler Amazon

ELISA BRAUN £@ElisaBraun
Les mots « monopole », « déman-
tèlement » ou « antitrust » sem-
blent tout droit sortir d’un autre
âge, celui du pétrole et des chemins
de fer du début du siècle dernier.
Mais en 2018, ils ont ressuscité à la
faveur inattendue d’une brillante
juriste américaine, Lina Khan. Ses
idées font planer sur Amazon la
menace d’un démantèlement.
Tout commence en 2017 quand
Lina Khan, alors âgée de 27 ans,
publie dans une obscure revue uni-
versitaire Le Paradoxe antitrust
d’Amazon, le tableau le plus com-
plet du pouvoir tentaculaire qu’a
acquis l’entreprise. Cet article a,
entre-temps, été consulté des mil-
lions de fois et, surtout, lui a valu
les honneurs du New York Times en
2018 ainsi qu’un siège à la Federal
Trade Commission, le régulateur
américain chargé de la protection
des consommateurs.
Ses idées bousculent la politique
de régulation actuelle. « En étudiant
l’histoire de l’antitrust et le modèle
d’Amazon, je me suis rendu compte
qu’il y avait plusieurs points aveu-
gles dans la façon dont nous pensons
la régulation », explique Lina Khan
au Figaro. Ce point aveugle est dû à
un changement idéologique surve-
nu il y a une quarantaine d’années
sous l’impulsion d’ultralibéraux
américains. Alors qu’avant les an-
nées 1980, l’antitrust se méfiait de
l’intégration verticale et veillait à
maintenir une concurrence loyale à
A
priorité des bénéfices ou inconvé-
nients immédiats pour le consom-
mateur. En d’autres termes, son
objectif est surtout de maintenir les
prix à un niveau acceptable. Et c’est
cette approche qui a, selon Lina
Khan, conduit à ignorer les dangers
du modèle d’Amazon. « En termes
de coûts comme d’efficacité du ser-
vice, Amazon est remarquable », re-
connaît Lina Khan.
Or, l’impact d’Amazon doit aussi
s’évaluer à plus long terme à
l’échelle d’effets de domination sur
un marché et même sur la société,
défend la juriste. « Amazon est de-
venu un maître dans la façon de faire
levier de sa puissance économique
pour obtenir des décisions politiques
qui lui sont favorables », s’inquiète
Lina Khan. L’entreprise a « des
avantages fiscaux considérables,
avec la promesse fallacieuse de créer
des emplois : ceux-ci sont souvent de
courte durée et entérinent la préca-
rité avec de faibles salaires et des
mauvaises conditions de travail »,
poursuit-elle. En outre, « la straté-
gie d’Amazon en termes de fiscalité
est ce qui lui a permis de s’ériger en
géant mais aussi ce qui empêche
aujourd’hui tout concurrent de jouer
à armes égales », note la juriste.
Inquiétude du Sénat
Dans un pays enclin au laisser-fai-
re, l’idée qu’Amazon bloque la
compétitivité et l’innovation dans
tous les secteurs où il s’infiltre ob-
tient de plus en plus d’écho. De
nombreux sénateurs américains
poussent l’idée de s’attaquer au
prochaine élection présidentielle,
Elizabeth Warren.
Mais c’est paradoxalement
Donald Trump qui est l’un des plus
fervents opposants d’Amazon, à
l’égard duquel il a déjà évoqué la
menace du démantèlement. Dans
une série de tweets incendiaires en
mars dernier, le président améri-
cain fulminait contre Jeff Bezos qui
utilisait le service postal américain
comme son « coursier de service »,
sans pour autant participer à l’en-
tretien des infrastructures publi-
ques. Il faut dire que le président ne
digère pas les attaques du
Washington Post, quotidien racheté
par Jeff Bezos.
Derrière cette attaque se lit aussi
l’aveu d’une difficile vérité : Ama-
zon est devenu, en vingt ans à pei-
ne, aussi puissante qu’un État. Sa
capitalisation, qui s’est envolée au-
dessus du milliard cette année, en
fait l’un des groupes les plus puis-
sants au monde. Mais face à la me-
nace de démantèlement, l’entre-
prise a beaucoup plus à craindre
qu’un contrôle fiscal. ■
Apple et Huawei victimes
de la guerre sino-américaine
ELSA BEMBARON £@elsabembaron
Rien ne va plus. Après avoir été la
première entreprise à franchir le cap
des 1 000 milliards de capitalisation
boursière cet été, Apple s’enfonce.
Le groupe ne vaut plus « que »
742 milliards de dollars. Près de
400 millions de dollars de capitalisa-
tion boursière sont partis en fumée
depuis le mois d’octobre. Certes,
« La stratégie Wall Street s’inquiète toujours et en-
d’Amazon en termes core de la capacité d’Apple à se réin-
de fiscalité est ce qui venter face à un éventuel ralentisse-
lui a permis de s’ériger ment des ventes d’iPhone. Surtout,
en géant », analyse les marchés sont préoccupés par les
Lina Khan. YOU TUBE conséquences de la guerre commer-
ciale entre la Chine et les États-Unis.
Apple est la victime collatérale par
excellence, avec ses produits conçus
aux États-Unis et fabriqués en
Chine : sa double appartenance fait
qu’il n’est jamais dans le bon camp.
Le temps où les mesures fiscales
annoncées par Donald Trump profi-
taient à Apple paraît très lointain.
Désormais, le président américain
menace d’instaurer des barrières à
l’entrée pour les appareils produits
en Chine et rêve de voir la marque
taient de plus de 25 %, Apple pour-
rait délocaliser sa production hors de
Chine. Le groupe envisage déjà
d’étendre sa production indienne
aux iPhone haut de gamme, alors
que jusqu’à présent seuls ses smart-
phones d’entrée de gamme y sont fa-
briqués.
Pris en tenaille entre la Chine et les
États-Unis, Apple risque de voir ses
ventes pénalisées par une augmen-
tation des taxes, et les marges chu-
ter, avec un renchérissement des
coûts de production. Dans le même
temps, les ventes d’Apple en Chine
sont menacées par Qualcomm. Le
fabricant de microprocesseurs traî-
ne Apple devant les tribunaux aux
quatre coins de la planète, l’accusant
de violer ses brevets.
Huawei dans le viseur
En Chine, la sentence est tombée
début décembre, avec à la clef l’in-
terdiction de vendre tous les modè-
les d’iPhone compris entre les ver-
sions 6 et X. Depuis, Apple
s’acharne à faire des mises à jour
pour tenter d’échapper à la sanc-
tion. La peine est très lourde pour la
firme à la pomme, la Chine repré-

l’échelle d’un marché, la doctrine monopole des Gafa, à l’image de la rapatrier des usines sur son territoi- sente 20 % de son chiffre d’affaires
contemporaine se préoccupe en démocrate pressentie pour la re. Si les tarifs douaniers augmen- mondial annuel, soit 52 milliards de
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019

ÉCONOMIE L'ÉVÉNEMENT 17
17
11 DÉCEMBRE 2018
Sundar Pichai, PDG de Google, témoi-
EN 2019,
LA FRANCE
La BCE intervient dans l’espoir
gne lors d’une audience du comité ju-
diciaire de la Chambre « examinant
Google et ses pratiques en matière
FERA
PAYER
de sauver la banque italienne Carige
de collecte, d’utilisation et de fil-
trage de données » à Capitol LES GAFA Les administrateurs de la dixième banque du pays ont démissionné,
Hill, à Washington.
Dans son allocution aux faute de pouvoir lever les fonds indispensables à son sauvetage.
Français le 10 décembre
dernier, Emmanuel Macron
a tranché : une plus grande ARMELLE BOHINEUST £@armelella
justice fiscale passe par
la taxation des géants FINANCE Quatre ans après Monte
américains d’Internet, dei Paschi di Siena, une autre très
Google, Apple, Facebook ancienne institution italienne, la
et Amazon (GAFA), qui banque Carige, est au bord du gouf-
prospèrent en France tout fre. À tel point que la Banque cen-
en ne payant que très trale européenne (BCE) a décidé
mercredi d’intervenir pour tenter
peu d’impôts sur notre de la sauver. La démission de la
territoire. La France a majorité du conseil d’administra-
décidé d’agir seule, tion, mercredi matin, « a rendu né-
sans attendre le projet de cessaire la mise en place d’une admi-
taxation européenne, qui nistration temporaire pour assurer la
n’arrive pas à trouver un direction de Banca Carige », expli-
consensus parmi les États que la BCE.
Supprimant les organes de direc-
membres. Mi-décembre,
tion existants, la banque centrale a
Bruno Le Maire, ministre désigné pour un an trois adminis-
de l’Économie, précisait trateurs, parmi lesquels Pietro Mo-
dans les colonnes du diano et Fabio Innocenzi, le prési- l’urgence est à nouveau de les aug- quiers italiens pour protéger le sec- Le titre Carige
Figaro : « Nous allons dent et le directeur général tout menter. L’établissement génois, qui teur. Le groupe Malacalza qui a vu a été suspendu
d’abord mettre en place juste démissionnaires. Elle a par a déjà affiché pas loin de 1,5 milliard ses titres fondre redoute la dilution à la Bourse italienne.
ailleurs créé un comité de sur- d’euros de pertes depuis 2014, s’est qu’entraînera une augmentation de Il a perdu 90%
pour 2019 une taxation de sa valeur
des géants du numérique. veillance réduit. Leur mission : retrouvé dans le rouge à hauteur de capital.
en trois mois
« stabiliser la gouvernance, cher- 168 millions d’euros au troisième
JIM YOUNG/REUTERS

J’espère qu’elle s’inscrira Risque de faillite et ne vaut

cher des solutions efficaces pour ga- trimestre. Et il plie sous le poids des que 0,0015 euro.
dans un cadre européen. rantir de façon durable la stabilité et créances douteuses. Au-delà des La première tâche du nouveau STEFANO RELLANDINI/
Mais en tout état de cause, la conformité aux normes » de la difficultés globales du secteur, il est conseil d’administration devrait REUTERS
la taxation française aura banque italienne. confronté au marasme du secteur être de convoquer une nouvelle as-
un champ d’application Ces mesures spéciales sont une maritime, auquel il est particulière- semblée générale pour relancer le
plus large. La taxation première dans l’histoire de la BCE, ment exposé du fait de son implan- projet d’augmentation de capital,
européenne ne concerne qui agit ici en tant que superviseur tation géographique. indique un proche du dossier. Mais
que les revenus de la des grandes banques de la zone Or, affaiblie par ses conflits in- rien ne garantit qu’il obtienne enfin
euro. L’institution de Francfort a ternes, Banca Carige a pris du re- le feu vert des actionnaires. Alors
publicité, nous voulons
choisi d’intervenir car elle s’in- tard par rapport à ses compatriotes qu’en octobre, l’agence de notation
aussi taxer les revenus quiète du manque de continuité qui se sont délestées plus rapide- financière Fitch avait abaissé la
tirés des plateformes dans le management, explique un ment de leurs créances douteuses note de la banque de B- à CCC+ en
et de l’utilisation des proche du dossier. au cours des deux dernières années. soulignant qu’une faillite de l’éta-
données personnelles. Quelques heures auparavant, le Seule dans ce cas parmi six banques blissement était « une possibilité
Cela rapporterait environ gendarme de la Bourse italienne italiennes scrutées, Banca Carige réelle », le risque d’une faillite est
500 millions d’euros en avait suspendu le titre. Celui-ci a est apparue « fragile » à l’issue des toujours présent.
année pleine. » perdu près de 90 % de sa valeur en tests de résistance conduits par la Carige est la dernière grande
trois mois et il ne vaut que 0,0015 BCE. Elle doit rembourser 320 mil- banque italienne à poser encore de
Ce montant est 10 fois
euro. Résultat, la capitalisation de lions d’euros au fonds de garantie sérieux problèmes après le sauve-
celui que les Gafa ont la banque créée en 1483, qui reven- des dépôts italiens (FITD). tage financé par l’État de Monte dei
acquitté au fisc français dique un million de clients et Ses actionnaires principaux de- Paschi di Siena en 2016 et celui de
en 2017. Google, Apple, 4 200 employés, est inférieure à puis quatre ans sont l’homme d’af- deux petites banques de Vénétie
Facebook et Amazon 85 millions d’euros. faires Vittorio Malacalza et sa fa- par Intesa Sanpaolo en 2017. C’est
n’ont payé que 43 millions Tout en multipliant les change- mille qui détiennent environ 28 % précisément parce que le secteur
d’euros d’impôts alors que ments de dirigeants, la dixième du capital. Ils se sont opposés à est jugé globalement assaini que la
banque italienne a procédé à trois l’émission de capital de 400 mil- Bourse de Milan (+ 0,04%), pas
leur volume d’activité
augmentations de capital en cinq lions d’euros programmée le mois plus que les bons du Trésor italien,
en France est estimé à près ans, levant près de 2,2 milliards dernier dans le cadre du plan de n’a montré mercredi la moindre
de 13 milliards d’euros. d’euros de fonds propres. Mais sauvetage mis au point par les ban- panique. ■
Le gouvernement n’a
pas encore précisé le
mécanisme qui permettra
AARON BERNSTEIN/REUTERS

de récupérer les
500 millions ni le texte
législatif qui le créera.
Cette disposition pourrait
Les dernières mines de charbon
être inscrite dans le projet
de loi de finance
rectificative pour 2019
d’Espagne tenues de rembourser l’État
ou le projet de loi de finance Deux sites vont produire sans subvention, les 24 autres vont fermer.
pour 2020. E. R.

nes a été divisé par 5, et les tonnes

MATHIEU DE TAILLAC £@mdetaillac
MADRID
ÉNERGIE Le 1er janvier, les derniè-
res mines de charbon d’Espagne ont
dollars sur 265. La Chine pourrait dû choisir entre deux mauvaises
utiliser le contentieux Qualcomm options : mettre la clé sous la porte
pour durcir le ton face à Apple en ou rembourser des centaines de
riposte aux attaques de Donald millions d’euros d’aides publiques.
Trump sur Huawei. Sur 26 exploitations concernées,
JEAN-CHRISTOPHE MARMARA/LE FIGARO
extraites, par 10, de 30 millions à
3 millions annuellement.
« La fin du secteur n’est pas un
problème économique pour l’Espa-
gne, parce que l’exploitation est très
localisée, mais c’est un problème évi-
dent pour les personnes et les régions
concernées », précise Jorge Morales
de Labra, ingénieur expert en éner-
gie et directeur de l’entreprise de

Le président américain a fait du seules deux ont décidé de restituer commercialisation d’électricité
groupe chinois son bouc émissaire les subventions. La fermeture des Proxima Energia. Les mines sont
industriel. Il est accusé de tous les autres signe la fin d’une agonie lon- surtout présentes dans les Asturies
maux, à commencer par celui gue de trente ans. Le charbon espa- et dans la province de Leon, au
d’être un sous-marin de Pékin, gnol n’était plus rentable depuis des nord-ouest du pays.
mettant à profit ses équipements de décennies face au minerai d’impor-
réseau télécoms et ses smartphones tation : même subventionné par Alerte dès les années 1980 payé, dont dépendait toute l’acti- Déjà en 2013,
pour espionner les entreprises et le Madrid, il ne représentait que 10 % Sur place, c’est tout un monde qui vité économique des régions les mineurs
gouvernement américains. La di- du charbon consommé dans les s’écroule. À Ponferrada, par exem- concernées. manifestaient
rection de Huawei a beau démentir centrales thermiques du pays. Les ple, capitale du canton du Bierzo, Le résultat est une reconversion à à Madrid contre
officiellement ses accusations, de- nouvelles normes sur la pollution peuplé de 130 000 habitants et dont peine entamée. « Les gens se sont la réduction
des subventions
mander aux États-Unis de produire ont achevé de le condamner. L’Es- toute la richesse est liée depuis un endormis en pensant que les mines
des pouvoirs
des preuves, rien n’y fait. Washing- pagne payait pour éviter qu’un ef- siècle au travail des gueules noires. n’allaient jamais fermer, reconnaît publics.
ton a fait rayer Huawei de la liste fondrement brutal n’entraîne dans Archiviste municipal et auteur d’un Courel. Aujourd’hui, la zone perd sa
des fournisseurs pour la 5G aux
La taxation sa chute les régions touchées, et livre sur la principale mine de la ré- population, et ne survit que grâce à
JAVIER BARBANCHO/

États-Unis et encourage ses alliés à
lui emboîter le pas. La Nouvelle-
Zélande, l’Australie, le Japon, la
Grande-Bretagne ont répondu pré-
sent. L’Allemagne y réfléchit. La
France regarde. « Il n’y a pas de
base militaire américaine sur notre
territoire, ce qui prive les États-Unis
d’un levier de pression dans ce dos-
sier », explique un proche du dos-
sier. Les groupes chinois sont déjà
rapporterait
avait négocié à Bruxelles une pro-
longation réclamée aussi par l’Alle-
environ magne. Mais depuis le 1er janvier,
500 millions aux termes de cet accord, pour
maintenir l’activité, une mine doit
d’euros en rembourser une partie des subven-
année pleine
BRUNO LE MAIRE,
» tions.
En 1985, les mines employaient
encore plus de 50 000 personnes.
MINISTRE DE L’ÉCONOMIE En novembre dernier, seuls
2 046 travailleurs cotisaient au régi-
gion, El Tiempo de la Minero, Jesus
Courel rappelle que Ponferrada est
passée de 16 000 à 30 000 habitants
au cours des années 1950. « Les
gens venaient chercher du travail, à
la mine, bien sûr, mais aussi dans
toutes les activités connexes. »
Dès les années 1980, l’Europe
avertit de la nécessité de fermer les
mines non rentables. Mais les res-
ponsables politiques espagnols ont
REUTERS
l’agroalimentaire et au tourisme. »
Après l’extraction, les centrales
thermiques sont dans le viseur.
14,5 % de l’électricité du pays est
produite en brûlant du charbon.
Mais le gouvernement socialiste de
Pedro Sanchez ne souhaite pas pro-
longer les centrales hautement pol-
luantes. Il a prévu en 2019 de consa-
crer 100 millions d’euros à ce qu’il
appelle la « transition écologique
A

interdits de cité sur tous les équipe- me spécial de la sécurité sociale. Sur tenté de ménager les mineurs, au juste », dont la majeure partie
ments dits critiques en Europe. ■ la même période, le nombre de mi- travail dur mais relativement bien devrait échoir aux mineurs. ■
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO

18 ENTREPRISES
La transmission d’entreprises, un enjeu
de compétitivité de la décennie à venir
Le budget 2019 et la prochaine loi Pacte comportent plusieurs dispositions visant à faciliter les cessions.
CORINNE CAILLAUD
£@corinnecaillaud
ENTREPRISE La transmission
d’entreprise sera au cœur du débat
économique en 2019. Ce sujet, fon-
damental, figure en effet en très
bonne place dans le projet de loi
Pacte, piloté par Bruno Le Maire,
dont l’examen au Parlement – le
texte n’a été voté qu’en première
lecture à l’Assemblée début octo-
bre – doit se terminer à l’été pro-
chain. Il faut dire qu’il y avait ur-
gence à le traiter. Faute de
repreneurs, la moitié des 60 000
sociétés mises en vente chaque an-
née en France disparaît. Soit 30 000
fermetures de rideau par an, ac-
compagnées au total de dizaines de
milliers de suppressions d’em-
plois…
Et ce fléau est loin d’être fini. Se-
lon la CCI Paris Île-de-France, pas
moins de… 275 000 entreprises, es-
sentiellement des TPE de moins de
10 salariés, seront à céder dans les
dix prochaines années rien que
dans cette région. Une hémorragie
en perspective donc et une héca-
tombe sociale à la clé si les pouvoirs
publics ne décident pas de prendre
le problème à bras-le-corps. Une
nécessité, d’autant plus que le taux
de survie des entreprises cédées,
versus celles créées, est nettement
supérieur : 60 % sont en effet tou-
jours actives au bout de cinq ans
d’existence, contre 50 % pour les
autres.
Selon la CCI
Paris Île-de-France,
pas moins
de 275 000 entreprises
seront à céder dans
les dix prochaines
années dans cette
région. FOTOLEDHAR/
STOCK.ADOBE.COM
2019 qui a été adoptée fin décembre
et validée dans la foulée par le
Conseil constitutionnel.
Le régime du « Pacte Dutreil » de
2003, qui visait déjà à simplifier la
transmission d’entreprises via une
exonération sous certaines condi-
tions des droits de donation ou de
succession à hauteur de 75 % de la
valeur des titres transmis, est ainsi
un peu plus assoupli. Les membres
de la famille ayant conclu un tel
pacte peuvent désormais apporter
les titres donnés à une société hol-
ding. « Si seul un des héritiers est in-
téressé par la reprise, et qu’il doit
emprunter pour dédommager ses
frères et sœurs, l’opération peut se
faire sans fragiliser l’entreprise »,
note en conséquence Pascal Ferron,
le vice-président du réseau d’ex-
pertise-comptable Walter France.
Les obligations déclaratives de ce
type d’accord sont également as-
souplies. Le formulaire papier rap-
pelant les principales composantes
du « Pacte Dutreil » – dont l’oubli
de l’envoi chaque année, en même
temps que la déclaration d’impôt,
exposait le contribuable à de lour-
des taxes – est supprimé. « À l’ère
du numérique, cette pièce ne se justi-
fiait plus », applaudit encore Pascal
Ferron. Par ailleurs, le dispositif du
crédit vendeur sera encouragé pour
faciliter la reprise des entreprises
de moins de 50 salariés.
Reste que le problème des trans-
missions avortées d’entreprise fau-
te de repreneur ne se limite pas aux
seuls pactes organisés en vue d’une
succession. « Il faut créer un vérita-
ble écosystème de reprise transmis-
sion car il y a plus d’appétence pour
cette forme d’entrepreneuriat »,
prévient ainsi Bertrand Savouré, le
président de la chambre interdé-
partementale des notaires de Paris
pour qui le projet de loi Pacte de-
vrait aller plus loin dans la réforme
du « système administratif, juridique
et fiscal extrêmement complexe »
des cessions.
Une partie importante du mar-
ché de la transmission d’entreprises
reste de surcroît cachée et de nom-
breux freins à la reprise demeurent.
Comme « l’insuffisance de prépara-
tion des dirigeants à transmettre »,
relève Susanne Liepmann, prési-
dente de Fi+, le réseau des finan-
ciers d’entreprises. Quant à la
transmission purement familiale,
elle comporte de nombreuses limi-
tes psychologiques, tant du côté du
cédant que du repreneur. « Elle est
souvent vécue comme une petite mort
par le premier quand pèse un soup-
çon de népotisme sur le second qui
doit démontrer sa compétence pour
faire preuve de légitimité », remar-
que Miruna Radu Lefebvre, profes-
seur spécialiste de l’entrepreneuriat
à l’école de commerce Audiencia. ■

Simplification
du « Pacte Dutreil »
Le gouvernement a donc décidé
d’accélérer le mouvement et de ne
pas attendre la fin du parcours lé-
gislatif de la loi Pacte. Plusieurs dis-
positions fiscales susceptibles de
vraiment simplifier la donne ont en
effet été incorporées par anticipa-
tion dans la loi de finances pour
Le gouvernement veut assouplir
la réserve héréditaire
Les familles sont-elles
à nouveau dans le viseur
de l’exécutif ? Alors que
le gouvernement vient
d’interdire les donations avec
réserve d’usufruit, il veut
désormais réformer
la « réserve héréditaire ».
Ce dispositif du droit français
fait qu’on ne peut déshériter
totalement ses enfants
et qu’une portion de la
succession leur est réservée.
Le reste représente
la « quotité disponible »
que le donateur peut utiliser
comme bon lui semble. Mais,
selon Les Échos, une mission
devrait être lancée par
le secrétaire d’État en charge
des associations, Gabriel
Attal, afin d’assouplir cette
réserve héréditaire. Le but
est de développer les dons
et legs aux associations,
qui font grise mine après la
réforme de l’ISF, transformé
en IFI. Un terrain miné ! M.-C. R.
La passementerie Verrier, l’exemple d’une reprise réussie
La transmission de la passemente-
rie Verrier, installée dans le
XXe arrondissement de Paris, a failli
ne jamais voir le jour… Près d’un an
de discussion a été nécessaire pour
qu’Yves Dorget cède l’atelier fami-
lial de fabrication de passementerie
et de galons d’ameublement dont
les origines remontent à 1753 et
dont il était à la tête depuis un quart
de siècle. L’acquéreur ? Anne An-
quetin, une informaticienne de
50 ans qui rêvait de se lancer dans
l’entrepreneuriat. L’opération
n’avait rien de classique puisque
Yves Dorget, la cinquantaine aussi,
voulait passer la main tout en res-
tant dans l’entreprise. De son côté,
Anne Anquetin n’avait pas envisagé
d’acheter une structure en laissant
20 % à l’ex-propriétaire reconverti
en qualité de simple associé mino-
ritaire.
Il y a huit ans, cette mère de fa-
mille, une ancienne de Capgemini
et Siemens, avait déjà planché sur la
création d’une entreprise. Mais,
chassée par Microsoft, elle avait re-
misé son projet. « Je n’étais pas
mûre et j’avais besoin de ramener un
bon salaire à la maison », avoue-t-
elle. Reste que ses missions ne la
faisaient plus vibrer et il faudra que
les conditions matérielles (enfants,
économies…) soient réunies pour
qu’elle se décide à franchir le pas.
Anne Anquetin démarre alors
une formation à la reprise d’entre-
prise au sein de l’association Cé-
dants et repreneurs d’affaires (CRA)
où elle côtoie experts-comptables,
avocats et autres spécialistes qui lui
enseignent comment lire un comp-
te de résultat et un bilan, aller cher-
cher des financements, scruter des
dossiers de reprise, négocier…
« Trouver une entreprise est difficile,
c’est un travail à temps plein qui
prend entre 18 et 24 mois », jure la
dirigeante qui épluche les sites
d’annonces, rencontre des inter-
médiaires mandatés par des cé-
dants, etc. « J’ai examiné une quin-
zaine de dossiers, souffle-t-elle.
Mon cadrage était clair : fabriquer un
produit dans l’alimentaire ou l’em-
bellissement du bâti, en Île-de-Fran-
ce, avec des fonds propres limités. »
Plusieurs candidats
C’est au printemps 2017 qu’un in-
termédiaire soumet à Anne Anque-
tin le dossier de la maison Verrier.
Son offre est retenue fin juillet puis
rien ne bouge jusqu’en janvier
2018. Et alors que tout est bouclé,
Yves Dorget annonce qu’il ne vend
plus. « Il a eu peur que je n’aie pas
compris où j’avais mis les pieds et
que je lui en veuille, analyse Anne
Anquetin. C’est un secteur avec des
hauts et des bas et son carnet de
commandes n’était pas conforme à
ses attentes. Il a fait preuve d’une
grande honnêteté. »
L’atelier travaille en effet surtout
pour des professionnels (architecte
d’intérieur, décorateur, tapissier)
œuvrant dans l’hôtellerie haut de
gamme, les musées ou demeures
remarquables. Malgré une solide
trésorerie, un bon chiffre d’affaires
et une passion pour son métier,
Yves Dorget peinait à faire grandir
son atelier. Avant Anne Anquetin, il
avait rencontré plusieurs candidats
à la reprise. « Beaucoup voulaient
avoir une activité à côté alors que je
cherchais quelqu’un qui vienne faire
équipe et se batte pour trouver de
nouveaux clients », assure-t-il.
Depuis huit mois, Anne Anquetin
s’est attelée à l’obtention du label
Entreprise du patrimoine vivant et
au développement de la passemen-
terie. Yves Dorget se consacre
quant à lui pleinement à la fabrica-
tion. « Je peux conseiller Anne mais
c’est elle, même si je suis encore au
capital, qui tient les ficelles », jure-
t-il, avouant mieux dormir aujour-
d’hui. Anne Anquetin apprécie
quant à elle de ne pas être seule… ■
CO. C.

Retenue à la source : Darmanin déjà très satisfait de la réforme

Le ministre des Comptes publics va effectuer 17 déplacements en janvier pour assurer le service après-vente.
GUILLAUME GUICHARD
£@guillaume_gui
ENVOYÉ SPÉCIAL À AMIENS (SOMME)
FISCALITÉ Une dizaine de « gilets
jaunes » rassemblés pour accueillir
le ministre des Comptes publics de-
vant le bâtiment aux fenêtres rou-
ges de la Direction des finances pu-
bliques d’Amiens… Ce mercredi,
premier jour d’application du pré-
lèvement à la source (PAS), Gérald
Darmanin rend en effet visite aux
agents de l’administration fiscale.
Le premier de 17 déplacements pré-
Gérald Darmanin vus en janvier.
s’est rendu, mercredi, « Quelles que soient les péripéties
au centre d’appels nationales, les Français adhèrent à la
de la Direction réforme de la retenue de l’impôt à la
des finances publiques source », a insisté l’ex-maire de
d’Amiens. Tourcoing, en déambulant dans le
A
par les coups de fil, alors qu’il s’agit
de la première matinée où les
contribuables peuvent modifier le
taux auquel ils seront prélevés. Il n’y
aurait, selon eux, pas plus de ques-
tions qu’en décembre… « Ce n’est
pas la folie absolue dans les studios »,
se rassure Gérald Darmanin.
Et le ministre de noircir les crain-
tes évoquées ces derniers mois à
propos de la mise en place de la ré-
forme. « On avait prédit que tout dé-
but janvier il y aurait un bug général
et que nous ne pourrions plus rien
faire, ironise-t-il. Ce n’est pas le
cas. Chacun constate que les choses
fonctionnent, que les agents des fi-
nances publiques sont au rendez-
vous, que le site Internet n’a pas bug-
gé, que tout le monde a pu travailler
et que la République fonctionne ce
matin. » C’est donc loin d’être le
CGT. Ce que confirment les chiffres
diffusés par Gérald Darmanin.
« Moins de 1 % des contribuables ont
sollicité l’administration fiscale », a-
t-il tweeté en fin d’après-midi,
avec moins de 150 000 appels et
100 000 visites au guichet.
Chez certains instituts de pré-
voyance, qui versent les pensions
de retraite complémentaire des sa-
lariés, la situation était toutefois
plus tendue. Chez Malakoff Médé-
ric, le standard de l’espace retraite
était saturé. L’Agirc-Arrco indique
pour sa part qu’il est trop tôt pour
obtenir des remontées des caisses
de retraite. L’organisme rapporte
toutefois avoir reçu des appels de
retraités qui s’interrogent notam-
ment sur des petits écarts de quel-
ques euros sur leur pension com-
plémentaire défalquée de l’impôt.
analyse l’organisme des retraites
complémentaires du privé (nos édi-
tions du 27 décembre).
De premiers retours pas totale-
ment rassurants alors que certains
craignent un impact psychologique
négatif du PAS. « La baisse appa-
rente liée aux prélèvements à la
source pourrait bien faire repartir le
feu antifiscal qui couve encore »,
prévient la CGT-finances publi-
ques, hostile à la réforme.
Argumentaire bien rodé
À Amiens, le ministre a donc dé-
roulé l’argumentaire bien rodé en
faveur du PAS, quitte à embellir les
bénéfices de la réforme pour le
contribuable. « Cela fait un siècle
que l’impôt est décalé d’un an par
rapport à la perception des revenus,
et c’est préjudiciable pour les Fran-
complètement cette année de re-
tard. Le taux de prélèvement est en
effet calculé à partir des revenus de
l’année précédente, voire anté-
précédente. En janvier, les contri-
buables seront ponctionnés sur
leurs pensions ou salaires sur la base
de leur déclaration de revenus 2017
remplie en avril 2018. En revanche,
ce taux de prélèvement s’applique-
ra au revenu – salarial, de retraite
ou de remplacement – « du jour ».
En cas de baisse, et sauf demande
de modification, le taux ne bougera
pas avant le prochain avis d’impo-
sition, mais s’appliquera sur un re-
venu en repli. La ponction fiscale
sera donc mécaniquement réduite.
Pour l’instant, le soutien des Fran-
çais à la réforme reste massif : 68 %
y sont favorables. Ce chiffre intègre
toutefois des ménages exonérés

PHILIPPE HUGUEN/AFP spacieux centre d’appels où les « début du foutoir » annoncé à la « Sans doute parce qu’ils calculent çais », a-t-il indiqué. Cependant, la d’impôt sur le revenu, et donc pas
agents ne semblent pas submergés veille de la Saint-Sylvestre par la sur le net et non sur le net fiscal », retenue à la source ne rattrape pas concernés par la réforme du PAS. ■
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019

ENTREPRISES 19

Bic contraint
de se réinventer pour
affronter l’avenir
Le groupe a finalisé la cession de sa filiale de sport.
Il se recentre sur les stylos, rasoirs et briquets.
LES TROIS ACTIVITÉS Oubliée l’époque où l’entreprise
KEREN LENTSCHNER vendait des téléphones portables
CLÉ DE BIC klentschner@lefigaro.fr
(CHIFFRES 2017) dans les bureaux de tabac ; Bic a
surtout renoncé à faire des produits

2milliards d’euros
INDUSTRIE Bic tire un trait sur ses
planches à voile et paddles. Le
groupe a finalisé la vente à l’esto-
promotionnels son quatrième pi-
lier : il a cédé mi-2017 les activités
nord-américaines de son ex-divi-
L’usine de fabrication des briquets Bic, à Redon (Loire-Atlantique). FRANCK DUBRAY/PHOTOPQR/OUEST FRANCE

de chiffre d’affaires dont :

nien Tahe Outdoors de sa filiale Bic sion Bic Graphic au fonds américain duits non conformes. Du coup, il a Certes, les pays émergents repré- Une équipe a été chargée de défi-
Sport, spécialisée dans les sports de HIG pour 71 millions d’euros. revu à la baisse en février dernier sentent un tiers de son activité. nir un plan d’action d’ici à la fin du
glisse nautique. Il en obtiendra de 6 Un recentrage imposé par la for- ses prévisions, tablant sur une mar- Mais la volatilité de certaines éco- premier trimestre. Des achats à la
3 9 %
Papeterie
à 9 millions d’euros en fonction des
résultats futurs de son ex-filiale.
ce des choses. Depuis deux ans, la
croissance de Bic a marqué le pas,
ge d’exploitation entre 17 % et 18 %
en 2018, contre 20,6 % en 2016. En
nomies, à l’image du Brésil, a fragi-
lisé le groupe. Bic doit s’atteler à
production en passant par la forma-
tion, il veut instiller une « approche
Passionné de mer et de voile, le ba- notamment dans l’activité rasoirs, trois ans, son titre a perdu près de la trouver de nouveaux relais de encore plus entrepreneuriale et inno-
ron Bich avait créé cette activité en bouleversée par la montée en puis- moitié de sa valeur. croissance pour l’avenir. L’arrêt des vante ». Alors qu’Amazon domine

35 %
Briquets
1979, avec le souci d’utiliser son ex-
pertise industrielle pour développer
la planche à voile. Basée à Vannes
sance des acteurs en ligne comme
Dollar Shave Club (Unilever) qui ti-
rent les prix du marché à la baisse,
Plan d’efficacité
Le groupe septuagénaire, qui a réa-
recherches autour de la pile à com-
bustible, fin 2014, faute de modèle
économique viable, a été un vrai re-
l’e-commerce, il souhaite pouvoir
suivre en temps réel les comporte-
ments des consommateurs pour
(Morbihan), la firme est devenue surtout aux États-Unis. lisé l’an passé 2 milliards d’euros de vers pour Bic, qui y avait investi mieux répondre à leurs besoins.
leader du windsurf avant de se lan- La rentabilité a par ailleurs été af- chiffre d’affaires, est confronté à 80 millions d’euros en dix ans et Initié par Gonzalve Bich il y a
22 %
Rasoirs
cer dans le surf, le kayak et le pad-
dle. Elle a réalisé l’an passé un chif-
fre d’affaires de 24 millions d’euros.
fectée par la hausse du coût des ma-
tières premières. À cela s’ajoute
l’intensification de la concurrence
une triple contrainte : la baisse du
nombre de fumeurs dans les pays
occidentaux, la mode de la barbe
beaucoup d’espoir.
« Afin de faire face aux défis et op-
portunités d’aujourd’hui et de de-
deux ans, le lancement du Bic Shave
Club, un service d’abonnement en
ligne de rasoirs, devait ainsi servir
Cette cession, mise en œuvre par des pays à bas coût. Elle affecte no- qui incite les hommes à bouder leur main, nous devons réinventer Bic », de laboratoire digital. « Bic veut être
Gonzalve Bich, investi il y a un an tamment ses ventes de briquets rasoir et la désaffection à l’égard de reconnaît aujourd’hui Gonzalve plus agile face à un monde qui évolue
par son père à la tête du groupe, (39 % de sa marge opérationnelle). l’écriture manuscrite. Si Bic peut Bich, 40 ans, qui veut imprimer sa très vite, commente un analyste.
achève le recentrage de Bic sur son À l’automne, Bic a porté plainte compter sur une marque forte et re- marque en modernisant le groupe. Cette revue l’obligera sans doute à
cœur de métier : stylos, briquets et auprès de la Commission européen- connue mondialement, un puissant Le directeur général a annoncé mi- adapter son business model. Gonzal-
rasoirs. Le groupe français, détenu à ne pour défaut de vigilance contre réseau de distribution et son inté- décembre une « revue organisa- ve Bich a les compétences pour
44 % par la famille fondatrice, tire la France et l’Allemagne avec l’es- gration industrielle (23 usines), il tionnelle destinée à améliorer son ef- transformer l’entreprise. » Sa feuille
un trait final sur ses diversifications. poir d’éviter l’importation de pro- est en fait à la croisée des chemins. ficacité opérationnelle ». de route promet d’être fournie. ■

EN BREF
Barry Callebaut progresse sur le chocolat durable ACCORD TARIFAIRE
DANONE-LECLERC
Le géant suisse de la production de cacao confirme ses engagements de traçabilité totale. £ Deux mois après la parution
au JO de la loi alimentation,
les centres Leclerc et Danone
ANGÉLIQUE VALLEZ-D’ERCEVILLE
colat durable la norme, d’ici à vail des enfants dans les planta- point de vue environnemental que ont signé un accord tarifaire

44% £@Aderceville 2025 », affirme Antoine de Saint- tions et veut garantir la non- sociétal. C’est une façon de protéger « intégrant l’évolution des coûts
Affrique, le PDG de Barry Calle- déforestation et renforcer l’usage et développer notre activité », ex- de production des élevages
baut. Un an plus tôt, pour son d’énergies renouvelables dans ses plique Antoine de Saint-Affrique. laitiers dans le prix du lait »,
AGROALIMENTAIRE Peut-être exercice 2017, le géant suisse ne usines. Sur son dernier exercice, dans dans le cadre des négociations
des fèves avez-vous perçu une légère diffé-
rence en dégustant vos chocolats
comptait que 36 % de ses fèves
d’origine durable. Sur l’huile de Ancrage très fort
un marché mondial du cacao en
progression de 1,8 % en volumes,
commerciales 2019, comme
Intermarché et Bel avant eux.
de cacao de Noël ? Même si leur goût n’a pas palme dont la production est très de l’actionnariat familial l’entreprise suisse a vu ses ventes
de Barry Callebaut fondamentalement changé, leur controversée, le suisse est déjà Les prochains mètres seront plus croître de 6,3 %. « Barry Callebaut
saveur a été plus douce, vue l’ori- bien au-delà, avec 87 % de la ma- difficiles. Certains observateurs du a la croissance la plus rapide des CHINA TOBACCO VISE LA
étaient d’origine
durable en 2017-2018 gine plus responsable des fèves tière utilisée dans ses chocolats secteur estiment que cet objectif sociétés alimentaires de taille équi- BOURSE DE HONGKONG
utilisées pour leur fabrication… vendus en Europe qui provient de de 100 % de cacao responsable est valente en Europe », assure son £ La branche internationale
Barry Callebaut, leader mondial plantations gérées durablement. inatteignable, compte tenu de patron. Cotée à la Bourse de Zu- du premier cigarettier mondial,
de la production et transformation Au travers de son programme l’instabilité des pays producteurs rich, la société conserve un fort China National Tobacco,
de cacao (7 milliards de francs baptisé Forever chocolate, lancé il de cacao qui n’est pas de nature à ancrage familial, avec près de qui a le monopole dans l’empire
suisses de chiffre d’affaires sur y a deux ans, l’entreprise qui four- faciliter ces progrès, ferme par 60 % de son capital encore détenu du Milieu, envisage d’entrer
l’exercice clos en août 2018), a at- nit la plupart des géants de l’ali- ferme. Un groupe comme Mars, par les Jacobs après la vente sur- en Bourse à Hongkong.
teint un premier palier dans ses mentaire (Mondelez, Nestlé, qui visait 100 % de cacao certifié prise de 2,7 % de leurs parts fin
objectifs d’amélioration de la pro- Hershey, Ferrero…) prévoit que d’ici à 2020, n’avait atteint que la 2018. Ce léger délestage n’inquiète
duction. « Nous avons remis la du-
rabilité au cœur de notre modèle
100 % de ses approvisionnements
seront durables et responsables
moitié de ses objectifs en fin d’an-
née dernière. Barry Callebaut
pas le patron : « La famille a vendu
une part minime du capital, cela a
+ @ » Comment Facebook peut
collecter certaines données
même si vous n’êtes pas inscrit
économique. Avec désormais plus d’ici à 2025. Outre la question de la continue néanmoins d’y croire. été surinterprété par les marchés. » » Ces 18 villes où Airbnb
de 44 % de nos ingrédients sourcés traçabilité, le groupe prévoit de « Il n’y a pas de futur pour une so- Il en est certain, son actionnaire bloquera les locations
durablement, nous sommes en ligne sortir 500 000 fermiers de la pau- ciété qui ne serait pas un acteur principal est un partenaire de long de plus de 120 jours par an
avec notre objectif de faire du cho- vreté, promet d’éradiquer le tra- économique responsable, tant du terme. ■ www.lefigaro.fr/economie

LA SÉANCE DU MERCREDI 2 JANVIER

LE CAC JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 JOUR %VAR. +HAUTJOUR +BAS JOUR %CAP.ECH 31/12 LES DEVISES MONNAIE

AUSTRALIE ................................................................................
DOLLAR AUSTRALIEN
1 EURO=

1,6273 AUD
L’OR JOUR VEILLE 31/12

ACCOR .............................................. 36,6 -1,37 36,94 36,04 0,239 -1,37 MICHELIN ..............................................
♣ 85,58 -1,29 85,86 83,74 0,235 -1,29 CANADA ................................................................................
DOLLAR CANADIEN 1,5547 CAD
COTATION QUOTIDIENNE ASSURÉE PAR TESSI-CPOR
AIR LIQUIDE ..................................
♣ 106,1 -2,17 106,7 105,35 0,198 -2,17 ORANGE ..............................................14,095 -0,42 14,185 13,885 0,185 -0,42
www.cpordevises.com
GDE BRETAGNE ................................................................................
LIVRE STERLING 0,9017 GBP
AIRBUS .............................................. 84,17 +0,25 84,45 82,1 0,192 +0,25 PERNOD RICARD .................................. 141,2 -1,47 142,3 139,85 0,129 -1,47 HONG KONG ................................................................................
DOLLAR DE HONG KONG 8,9294 HKD
LINGOT DE 1KG ENV .....................................................
36000 35990 +0,03
JAPON ................................................................................
YEN 124,28 JPY
NAPOLEON ..................................................... 219,9 221,7 -0,81
ARCELORMITTAL SA .................................. 17,698 -2,44 17,9 17,056 0,238 -2,44 PEUGEOT .............................................. 18,12 -2,82 18,435 17,87 0,239 -2,82 PIECE 10 DOL USA .....................................................
613 613 -
ATOS .............................................. 71,78 +0,42 72,16 69,84 0,265 +0,42 PUBLICIS GROUPE SA .............................
♣ 49,54 -1,08 49,73 48,72 0,303 -1,08 SUISSE ................................................................................
FRANC SUISSE 1,1239 CHF PIECE 10 FLORINS .....................................................
222 220 +0,91
ETATS-UNIS ................................................................................
DOLLAR 1,1397 USD PIECE 20 DOLLARS .....................................................
1230 1220 +0,82
AXA .............................................. 18,806 -0,28 18,816 18,428 0,331 -0,28 RENAULT .............................................. 52,93 -2,97 53,82 51,98 0,442 -2,97
TUNISIE ................................................................................
DINAR TUNISIEN 3,3996 TND PIECE 20F TUNISIE .....................................................
213 213 -
BNP PARIBAS ACT.A .................................. 39,085 -0,99 39,105 38,135 0,343 -0,99 SAFRAN .............................................. 103,45 -1,85 104,5 102,35 0,182 -1,85 MAROC ................................................................................
DIHRAM 11,103 MAD PIECE 5 DOL US (H) .....................................................
325 325 -
BOUYGUES ..............................................30,44 -2,87 31 30,27 0,227 -2,87 SAINT GOBAIN .................................. 28,78 -1,32 28,865 28,275 0,297 -1,32 TURQUIE ................................................................................
NOUVELLE LIVRE TURQUE 6,113 TRY PIECE 50 PESOS MEX .....................................................
1359 1359 -
CAPGEMINI ..............................................
84,26 -2,93 85,62 83,48 0,36 -2,93 SANOFI ..............................................75,4 -0,34 75,6 72,75 0,159 -0,34 EGYPTE ................................................................................
LIVRE EGYPTIENNE 20,3808 EGP PIECE FR 10 FR (H) .....................................................
122,7 122,7 -
CARREFOUR ..............................................
14,68 -1,54 14,84 14,485 0,279 -1,54 SCHNEIDER ELECTRIC ............................. 59,22 -0,84 59,34 57,62 0,213 -0,84 CHINE ................................................................................
YUAN 7,8165 CNY PIECE SUISSE 20F .....................................................
213 211,9 +0,52
INDE ................................................................................
ROUPIE 79,9855 INR
PIECE LATINE 20F .....................................................
212 212 -
CREDIT AGRICOLE .................................. 9,313 -1,24 9,348 9,095 0,189 -1,24 SOCIETE GENERALE ♣ ..................................
27,425 -1,42 27,51 26,88 0,437 -1,42 SOUVERAIN ..................................................... 272 267 +1,87
DANONE ..............................................61,04 -0,76 61,25 60,2 0,193 -0,76 SODEXO ..............................................88,42 -1,21 89,58 87,82 0,168 -1,21 ALGERIE ................................................................................
DINAR ALGERIEN 135,331 DZD KRUGERRAND .....................................................1198 1195 +0,25
DASSAULT SYSTEMES .................................. 102,85
ENGIE .............................................. 12,54
-0,82
+0,12
103,5
12,545
100,7
12,17
0,183
0,233
-0,82
+0,12
STMICROELECTRONICS .............................
TECHNIPFMC ..................................17,495 -0,88
12,145 -2,72 12,225
17,535
11,915
16,6
0,314
0
-2,72
-0,88
SICAV ET FCP
VALEURS LIQUIDATIVES EN EUROS (OU EN DEVISES), HORS FRAIS
ESSILORLUXOTTICA .................................. 110,7 +0,23 111,15 108,95 0,325 +0,23 TOTAL .............................................. 46,655 +1,03 46,885 44,775 0,268 +1,03 VALEUR DATE DE
Cybèle Asset Management
HERMES INTL ..................................477,6 -1,49 480,3 471,7 0,06 -1,49 UNIBAIL-RODAMCO-WE ............................. 132,62 -2,05 133,34 130,18 0,385 -2,05
RETROUVEZ
LIQUID. VALORISAT.
37 av. des Champs-Elysées
42 rue d’Anjou, 75008 Paris
KERING ..............................................402,8 -2,14 405,4 395,8 0,175 -2,14 VALEO .............................................. 24,52 -3,88 25,24 24,27 1,904 -3,88 75008 Paris
Tél. : 01 55 27 94 94
Tel. : 01 56 43 62 50
www.palatine.fr
L'OREAL ..............................................199,6 -0,8 200,7 197,1 0,08 -0,8 VEOLIA ENVIRON. .................................. 17,8 -0,86 17,83 17,51 0,346 -0,86 BETELGEUSE ................................................
42,82 27/12/18
LEGRAND ..............................................48,94 -0,73 49,15 48,23 0,185 -0,73 VINCI .............................................. 71,44 -0,81
♣ 71,8 70,2 0,181 -0,81 SICAV BELLATRIX C ................................................
302,69 27/12/18 SITE D’INFORMATIONS EXCLUSIVES
LVMH .............................................. 253,3 -1,9 256,05 249,8 0,111 -1,9 VIVENDI ..............................................21,24 -0,19 21,28 20,8 0,176 -0,19 UNI HOCHE C ................................................
240,88 28/12/18 SIRIUS ................................................49,57 28/12/18 WWW.WANSQUARE.COM

LA BOURSE DE PARIS COMMENCE L’ANNÉE SUR UNE BAISSE laskine@lefigaro.fr

Les valeurs françaises ont très mal com- Chine résulte d’un tassement des nou- tes publiques et privées, sans oublier le 0,50 % de baisse de l’indice Dow Jones à encore abandonné 3,88 %. Renault perd
mencé l’année, avec dès l’ouverture un velles commandes intérieures et à l’ex- resserrement monétaire aux États-Unis l’heure de la clôture à Paris) a fortement 2,97 % et Peugeot 2,82 %. Hors CAC 40,
repli de 2,40 % de l’indice CAC 40. Après portation confirmant les craintes des in- qui prive Wall Street des liquidités dé- contribué à calmer les esprits. Faurecia a perdu 5,72 % et Plastic Om-
une perte annuelle de 11 % en 2018, la vestisseurs sur l’économie chinoise versées par la Fed depuis la crise finan- Le fait le plus marquant de la séance a nium 2,63 %. En dépit d’une progression
tension était à son comble dans les salles après plusieurs mois de conflit commer- cière de 2008. L’indice de référence de la toutefois été la chute des valeurs auto- de près de 3 % en 2018 du marché fran-
de marché. Les investisseurs ont mal cial entre Pékin et Washington. Cette place parisienne est parvenu à réduire mobiles, alors qu’elles étaient déjà arri- çais des voitures neuves, le secteur est
accueilli l’annonce d’une contraction de mauvaise nouvelle est venue s’ajouter les dégâts avec un repli limité de 0,87 % vées en tête des plus fortes baisses en victime des craintes de ralentissement
A

l’activité manufacturière chinoise en dé- aux nombreuses autres menaces : insta- en clôture à 4 689,39 points. La relative 2018. L’équipementier Valeo, qui a dé- en Chine, devenue le premier marché
cembre. Le recul de la croissance en bilité géopolitique, tensions sur les det- résistance de Wall Street (seulement vissé en Bourse de 59 % l’an dernier, a mondial pour les voitures particulières. ■

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
20 MÉDIAS et PUBLICITÉ
« Nice-Matin » à la recherche
d’un nouvel actionnaire
Le belge Nethys
a décidé de se
retirer alors qu’il
devait devenir
actionnaire
majoritaire.
CHLOÉ WOITIER £@W_Chloe
PRESSE En faisant entrer le grou-
pe belge Nethys à son capital en
2016, Nice-Matin, repris par ses
salariés à la barre du tribunal de
commerce en 2014, pensait être
enfin à l’abri. Deux ans plus tard, le
quotidien déchante. Alors que, se-
lon le pacte d’actionnaires, Nethys
devait monter de 34 % à 51 % du
capital au 1er janvier, le groupe bel-
ge a annoncé le 28 décembre vou-
loir céder sa participation « dès lors
qu’il recevrait une offre acceptable ».
« Dans l’intervalle, Nethys garantit
son soutien financier à l’activité », a
écrit à ses salariés Jean-Marc Pas-
torino, PDG de Nice-Matin.
Le quotidien niçois et ses 640
salariés (hors portage à domicile)
ne se faisaient plus guère d’illu-
sions sur les intentions de leur ac-
tionnaire. Les échanges entre le
journal et la Belgique sont devenus
de plus en plus flous en 2018, à me-
sure que s’approchait l’échéance
de la montée au capital. « Ils par-
tent ou ils restent ? C’est silence ra-
dio », se plaignait-on en interne
ces derniers mois. Le 5 décembre,
les syndicats ont pu rencontrer
Stéphane Moreau, directeur géné-
ral de Nethys, mais sans obtenir de
réponse claire. Dans la même
journée, le DG a été reçu par le
maire de Nice, Christian Estrosi.
Le 10 décembre, le conseil de sur-
veillance a sommé son actionnai-
re, par le biais d’une motion, de
clarifier au plus vite ses intentions.
Les instances du journal auront
encore dû patienter près de vingt
jours pour être fixées.
INNOVATION
Comment maîtriser la machine
à innover qui s’emballe ?
LA VOIX
Reconnaissance vocale, chatbots…
la parole nouvelle
révolution technologique !
ESPACE
Quand les nouveaux
conquistadors prennent
le relais des États
ARGENT
Fin du cash,
cryptomonnaies…
Quelle révolution
dans les Fintech ?
1
@BigBangFigaro
A
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Nethys a déboulé sans prévenir
en 2016 dans le monde des médias
français, et plus particulièrement
des journaux du Sud : outre sa
participation dans Nice-Matin, le
groupe détient 11 % de La Proven-
ce. Une participation que le groupe
belge devrait également revendre.
Iskandar Safa sur les rangs
Détenu par les institutions publi-
ques wallonnes, Nethys est présent
dans les télécoms, l’énergie et la
presse (les journaux de L’Avenir).
Voulait-il marcher dans les pas du
groupe Rossel, lui aussi très pré-
sent en France (La Voix du Nord,
L’Union, Le Courrier picard…) ?
Quelles qu’aient été ses ambitions,
elles ont été coupées net par un
scandale de soupçons d’emplois
fictifs au sein de Publifin, le hol-
ding public détenant Nethys. De-
puis, le groupe tentaculaire est
scruté à la loupe par les institutions
belges, qui n’ont cessé de s’inter-
roger sur le bien-fondé pour une
telle structure publique d’investir
dans des journaux français, situés
loin de la Wallonie.
3ème édition du Big Bang Éco du Figaro
LA TRANSFORMATION
AU CŒUR
DE L’ÉCONOMIE
MERCREDI 27 MARS 2019
Maison de la Chimie - Paris - 8h30 / 18h
INSCRIVEZ-VOUS
bigbang.lefigaro.fr
Outre ces pressions politiques, la
décision de Nethys de se désenga-
ger de Nice-Matin pourrait être
aussi liée à l’ouverture automa-
tique d’une clause de cession, qui
permet aux journalistes de démis-
sionner avec des indemnités si
l’actionnariat principal avait été
modifié au 1er janvier. Cette clause
aurait pu coûter jusqu’à 9 millions
d’euros à Nethys.
Le groupe belge sera présent le
28 janvier lors de l’assemblée gé-
nérale des actionnaires de Nice-
Matin, où il devrait présenter les
repreneurs potentiels de ses parts.
Seule certitude pour le moment :
l’homme d’affaires Iskandar Safa,
déjà propriétaire de l’hebdoma-
daire Valeurs actuelles, a déposé
une offre. Il était déjà sur les rangs
pour acheter Nice-Matin en 2014,
lorsque le quotidien, alors pro-
priété du groupe Hersant, avait été
placé en redressement judiciaire.
Autre scénario possible : l’entrée
en scène de Bernard Tapie, qui
pourrait ainsi opérer des synergies
avec La Provence. L’homme d’af-
faires a exclu cette possibilité
auprès du Monde, mais indique que Jean-Marc Pastorino,
« tout sera fait pour apporter un PDG de Nice-Matin.
soutien financier à la coopérative si VALERY HACHE/AFP
elle en a besoin ». Le siège du quoti-
dien, dont la valeur foncière dé-
passerait les 30 millions d’euros,
pourrait aussi aiguiser certains ap-
pétits.
Si Nice-Matin multiplie les ini-
tiatives éditoriales depuis 2014
(journalisme de solutions, maga-
zine du week-end, édition pour
les enfants…), le journal reste fi-
nancièrement convalescent. Il a
affiché 2 millions d’euros de per-
tes en 2017 et devrait être tout jus-
te à l’équilibre en 2018. Sa diffu-
sion payée a, elle, reculé de 5,4 %
en un an. ■
Feu vert au rachat
d’Editis par Vivendi
La maison mère de Plon, Robert Laffont
ou Nathan est le numéro deux français de l’édition.
ALEXANDRE DEBOUTÉ £@axel_deb
ÉDITION Négociée depuis l’été
dernier, annoncée en novembre,
l’acquisition auprès de l’espagnol
Planeta du groupe d’édition Editis
par Vivendi a été autorisée mer-
credi par l’Autorité de la concur-
rence. « Constatant qu’elle (l’opé-
ration, NDLR) n’aura pas pour
effet de réduire la concurrence sur
les nombreux marchés du secteur
audiovisuel et littéraire examinés,
elle autorise ce jour cette concen-
759
tration sans conditions », a précisé
le gendarme antitrust.
Vivendi a mis 900 millions
d’euros sur la table pour s’offrir le
deuxième plus beau portefeuille
millions de l’édition en France après celui
de Hachette Livre (Lagardère).
d’euros Dirigé depuis l’an dernier par
Chiffre d’affaires Pierre Conte, ancien du groupe
d’Editis en 2017 Figaro et de GroupM France, le
groupe possède treize maisons,
dont les plus connues en littératu-
re générale sont Plon, Robert Laf-
font, Le Cherche Midi et XO, ou
encore Bordas et Nathan dans le
livre scolaire.
Editis s’est constitué par rachats
successifs, dont certains remon-
tent à la première période de Vi-
vendi, sous l’ère de Jean-Marie
Messier après 1998. La dernière
acquisition en date d’Editis est
très récente, celle des Éditions
Heloïse d’Ormesson, en décembre
dernier.
Au total, le groupe opère à tra-
vers 44 marques. Son chiffre d’af-
faires en 2017 s’était élevé à près
de 760 millions d’euros pour un
résultat opérationnel d’environ
60 millions d’euros. Dans le sec-
teur du livre, ce changement de
main constitue la plus importante
opération depuis… la vente en
EN BREF
NETFLIX SE CENSURE
EN ARABIE SAOUDITE
£ Netflix a confirmé avoir
retiré de sa plateforme en
Arabie saoudite, à la demande
de Riyad, l’épisode d’une
émission satirique évoquant
le meurtre du journaliste
saoudien Jamal Khashoggi
et critiquant le royaume. La
décision de la plateforme vidéo
a suscité de vives critiques,
plusieurs organisations de
défense des droits de l’homme
accusant Netflix de censure.
RFI COUPÉE EN RDC
£ Kinshasa a coupé la réception
de Radio France internationale
(RFI) en République
démocratique du Congo
et retiré l’accréditation de sa
correspondante dans le pays où
les résultats de la présidentielle
sont attendus d’ici à dimanche.
« Le signal de RFI est coupé
dans toutes les villes du
Congo », a déclaré à l’AFP
le porte-parole du pouvoir,
Lambert Mende.
HAUSSE DU PRIX
DES QUOTIDIENS
NATIONAUX
£ En raison des coûts
croissants du papier et de leur
distribution, plusieurs
quotidiens nationaux (Les
Échos, Le Monde, L’Humanité,
Le Figaro et L’Équipe) ont
augmenté en ce début d’année
leurs prix de vente en kiosque
de 10 à 20 centimes. Le Figaro,
Le Monde et Les Échos par
exemple passent de 2,60 à
2,80 euros. Les quotidiens
hippiques ont également
augmenté leur prix de vente au
numéro, de 10 centimes. Paris
Turf passe ainsi à 2,30 euros.
2008 par Wendel du même Editis
au groupe espagnol Planeta, qui
en est resté le propriétaire depuis.
À l’époque, le montant de l’acqui-
sition s’était élevé à un milliard
d’euros.
La concentration du secteur
français du livre s’est accélérée
ces dernières années avec le ra-
chat en 2012 de Flammarion par
Gallimard, maison alors détenue
par l’italien RCS Mediagroup
(Rizzoli), pour 250 millions
d’euros. Le nouvel ensemble
constitue le numéro trois de l’édi-
tion, devant Média Participations,
spécialisé dans la BD (Dargaud,
Dupuis, Le Lombard). De son côté,
Editis a conforté son rang de nu-
méro deux en rachetant en 2015 le
pôle de distribution du groupe
La Martinière (Volumen).
Nouveau pilier
En acquérant Editis, Vivendi de-
vient de facto l’un des leaders de
l’édition en France et en Europe.
Cette nouvelle activité, qui fut
longtemps l’un des grands piliers
de l’ex-Vivendi, complète l’offre
déjà large du géant français des
médias et de l’entertainment dans
les biens culturels. Le groupe pré-
sidé par Yannick Bolloré est pré-
sent dans la musique (Universal
Music Group), la télévision gratui-
te et payante et le cinéma (Canal+,
Studiocanal), la communication et
la publicité (Havas) et les jeux vi-
déo mobile (Gameloft). En chiffre
d’affaires, l’édition devient un
pôle qui pèse plus lourd que les
jeux vidéo (258 millions d’euros
de revenu en 2017).
Dans son analyse, l’Autorité de
la concurrence a estimé que l’opé-
ration « n’était pas de nature à
porter atteinte à la concurrence sur
les marchés des biens culturels ». ■

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO - N° 23 137 - Cahier N° 3 - Ne peut être vendu séparément - www.lefigaro.fr
ERNEST LEOTY
Le « Club des cinq » repart à l’aventure
BANDE DESSINÉE Adepte de la ligne claire, le dessinateur Béja revisite avec brio la célèbre saga créée en 1942 par Enid Blyton.
MORCEAU CHOISI
Olivier Delcroix
odelcroix@lefigaro.fr
Q ui aurait cru que Le Club
des cinq, cette inoubliable
série de romans pour la
jeunesse signée par la très
Britannique Enid Blyton,
pourrait connaître une nouvelle jeu-
nesse en passant de la « Bibliothèque
rose » vers la bande dessinée ? C’est
pourtant ce qui est en train de se pas-
ser grâce au trait élégant d’un dessi-
nateur discret nommé Béja.
Souriant, distingué, à la limite de la
timidité, ce dandy toulousain avait
pris ses distances avec la bande dessi-
née. « Après quelques années virevol-
tantes, raconte-t-il, où j’avais signé
des albums tels Les Griffes du hasard
ou Nolimé Tangéré, prépublié dans la
très respectée revue (À suivre) en col-
laboration avec mon père, Nataël, j’ai
trouvé que le paysage de la BD avait
beaucoup changé. Je suis passé par une
période un peu désabusée. Alors j’ai
LUOVIC LETOT, GRASSET, FLAMMARION, GALLIMARD
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
LETTRES
493 ROMANS SONT ATTENDUS
POUR CE DÉBUT D’ANNÉE DONT
PLUSIEURS TÊTES D’AFFICHE
PAGE 24
laissé de côté la bande dessinée… »
C’était sans compter son talent d’une
belle fluidité, tout en nuances et plein
de vivacité juvénile.
En 2012, les Éditions Hachette Jeu-
nesse, en lien avec Gautier-Langue-
reau, approchent l’auteur des Com-
pagnons du rêve, avec un projet
d’adaptation lié à Bécassine. Échau-
dé, Béja réserve sa réponse. Selon lui,
« adapter Bécassine au langage de la
bande dessinée est un acte graphique
et littéraire qui demande réflexion ».
Les conditions ne lui semblent pas
complètement réunies. Il décline la
proposition. Trois ans plus tard, Ha-
chette revient à la charge. Se senti-
rait-il capable de transposer l’œuvre
d’Enid Blyton Le Club des Cinq en
bande dessinée ?
Publiées pour la première fois en
1942, ces enquêtes romanesques pos-
sèdent toujours une belle notoriété
auprès du grand public. Enid Blyton
est le quatrième auteur le plus traduit
derrière Agatha Christie, Jules Verne
et William Shakespeare. Cette fois,
Béja « prend l’affaire très au sérieux. Je
me souviens que mon éditeur, Domini-
SÉRIE
« TOUJOURS PLUS VITE » :
UN JARDIN TOUT DE SUITE !
PAGE 23
Ayurvéda,
la meilleure
des détox
après les fêtes
Cette médecine traditionnelle indienne
promet, en seulement quelques jours,
d’éliminer les toxines et de faire le plein
d’énergie, pour l’année. Au programme yoga,
bouillon aux épices, méditation
et routine de purification du corps. PAGE 22
prêté attention. Lorsque j’en ai deman-
dé un à ma librairie préférée à Toulouse,
Ombres blanches, on me répond que le
dernier venait justement d’être vendu ! »
Finalement, Béja effectue une plan-
che d’essai qui part directement en
Angleterre pour être validée par les
ayants droit d’Enid Blyton. Le retour
est enthousiaste. Les responsables an-
glais sont « ravis ». L’aventure com-
mence. Le Trésor de l’île, le premier
tome adapté dans l’ordre chronologi-
que des romans de Blyton, paraît en
octobre 2017 et rencontre son public.
« Le succès a été autant public que cri-
tique, se réjouit Béja. Entre-temps, le
projet Bécassine a refait surface, et en
2015 j’ai accepté de relever le défi. »
Une œuvre intemporelle
Béja et Nataël apportent une élégante Ce qui fait la qualité de l’adaptation
modernité au classique Club des cinq. en BD du Club des cinq, c’est la ma-
HACHETTE nière dont Béja et Nataël ont décidé
de gommer le maximum de repères
que Burdot, m’a demandé d’aller ache- spatio-temporels pour se concentrer
ter un livre de la série sur-le-champ. sur l’intrigue. Comme le dit si bien
Une légende veut qu’il se vende un Béja : « Si l’enfance est un territoire,
exemplaire du Club des cinq toutes les l’aventure est le moyen d’y rester. »
deux minutes. Je n’y ai pas vraiment Béja et Nataël ont su insuffler aux ré-
cits d’Enid Blyton cette qualité essen-
tielle à toute œuvre pour enfants, son
côté intemporel. Et le moyen pour y
arriver a été d’utiliser la « ligne clai-
re », ce style romanesque mis au
point par Hergé et Edgar P. Jacobs
dans Le Journal de Tintin, dès 1946.
« Je me documente beaucoup, confie
Béja. Quand je dessine, je cherche tou-
jours à “nettoyer” mon dessin. Je cher-
che le trait juste, je ne veux pas faire
d’excès de style. Cela demande une ri-
gueur qui me plaît. Pour moi, la ligne
claire d’Hergé est un courant littéraire,
auquel je suis fier d’appartenir. »
Le style très épuré de Béja fait mer-
veille sur Le Club des cinq comme
avec sa reprise de Bécassine. L’artiste
a réussi à apporter une modernité
ainsi qu’une belle vibration contem-
poraine à ses ouvrages, tout en les
inscrivant dans le monde actuel. Et ce
n’est pas là la moindre des réussites
de ce dessinateur fidèle à lui-même,
qui a su revenir au plus haut niveau,
sans jamais se départir de son élégan-
ce. Chapeau bas, Monsieur Béja ! ■
Le Club des cinq et le Passage secret,
de Béja et Nataël, Hachette, 32 p., 9,95 €.
A

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
22 L'ÉVÉNEMENT
BIEN-ÊTRE
Est-ce lié
au succès
du yoga ?
De plus en plus
de Français
s’adonnent
chaque matin
aux préceptes
de l’ayurvéda.
Une routine
simple
et efficace pour
contrebalancer
les excès
des fêtes… et
purifier le corps
tout au long
de l’année.
L
ÉMILIE VEYRETOUT
eveyretout@lefigaro.fr
es amateurs de re-
traites en Inde, une expérience qui
séduit de plus en plus d’Occiden-
taux, sont dithyrambiques. En
quelques jours, on se débarrasse
des toxines et des énergies négati-
ves accumulées et l’on fait le plein
de vitalité pour le reste de l’année.
À défaut de s’envoler pour le
Kerala (la région la plus prisée
pour son climat tropical et ses her-
bes médicinales), de nombreux
ouvrages et centres de bien-être,
en France, popularisent les pré-
ceptes de l’ayurvéda - « science
de la vie », en sanskrit. Reconnue
médecine traditionnelle par
l’Organisation mondiale de la san-
té en 1982, enseignée à l’université
en Angleterre et aux États-Unis,
cette thérapie holistique vieille de
5 000 ans est validée, en Europe,
par de plus en plus d’études scien-
tifiques sur la détoxification.
Car elle insiste justement sur ce
concept très à la mode, considé-
rant les toxines comme les princi-
pales sources de maladie et de fati-
gue. « Le corps humain n’est pas
fait pour dépasser ses limites, ce qui
arrive souvent dans nos vies moder-
nes, à cause des bonnes choses, ex-
plique Kiran Vyas, le fondateur des
centres Tapovan à Paris (XVe) et en
Normandie. Un exemple tout bête ?
Un bébé au biberon ou au sein de sa
mère, lorsqu’il a trop bu, fait un rot
et régurgite : son organisme dit na-
turellement “stop”. Ce qui n’est pas
nécessaire à l’instant présent de-
vient toxique à la longue. Nous de-
vrions réapprendre à écouter nos
sensations. Les toxines viennent en
grande partie de l’alimentation, en
plus des émotions - notez que l’on
parle souvent d’une parole ou d’un
acte mal digérés. »
Des concepts terre à terre
et pleins de bon sens
Comme leurs confrères chinois, les
médecins indiens prennent en
considération le pouls, l’aspect de
la langue, la morphologie et la
peau pour évaluer l’état d’un pa-
tient et classent celui-ci par profil
(dosha). Mais ils définissent à 90 %
la « bonne santé », à la qualité du
sommeil (endormissement paisi-
ble, nuit réparatrice et lever plai-
sant), à l’appétit (qui doit être mo-
déré), à la digestion et au transit
(réguliers). S’il y a désordre, il
s’agit alors de rééquilibrer. Sauf
contre-indication médicale, après
les fêtes, une journée complète de
bouillon de légumes et d’eau
A
(tiède, jamais froide) saupoudrée
d’une cuillère à café de curcuma
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Détox
à l’indienne
Quelques postures promet de mettre les cellules au
de yoga au réveil repos et d’amortir les excès. « Les
permettent d’activer
principes de diète proviennent de
tous les systèmes l’ayurvéda, souligne le thérapeute
du corps (respiratoire, Samuel Ganes, auteur du livre Mon
lymphatique
coach ayurvéda (Eyrolles). Il est
et nerveux).
ERNEST LEOTY
important d’espacer le repas du soir
de 12 heures à 14 heures avec celui
du matin, afin que le système puisse
se reposer et qu’il passe ainsi les an-
nées sans trop se fatiguer. »
Les jours suivants ? Comme le
souligne M. Vyas, « autant l’ali-
mentation est capable d’intoxiquer,
autant elle peut s’avérer anti-in-
flammatoire ». Limiter les protéi-
nes animales en les remplaçant par
des légumineuses, lentilles par
exemple associées à du riz com-
plet. Ajouter des épices plutôt que
du sel : le curcuma nettoie le foie et
purifie le sang, la cannelle active le
métabolisme, le cumin et les grai-
nes de fenouil diminuent la forma-
tion de gaz dans l’intestin tandis
que la coriandre est un puissant
Cheveux (très) courts, le renouveau
L’actrice Zoé Kravitz et le mannequin Adwoa Aboah incarnent
la tendance « the big chop », aux États-Unis.
INSTAGRAM ZOE KRAVITZ
capteur de métaux lourds (plomb,
mercure). « Dans l’idéal, il fau-
drait, toute l’année, mettre la di-
gestion au repos une journée par se-
maine. Mais je sais d’expérience que
personne ne tient ce type de résolu-
tion. Une fois par mois est déjà très
bénéfique, reprend Kiran Vyas.
L’ayurvéda est plein de bon sens,
avec des concepts terre à terre et
c’est sans doute la raison de son
succès de nos jours. Il peut répon-
dre, sans trop de contraintes, aux
maux d’un urbain qui travaille et qui
s’occupe de ses enfants. »
La théorie des 21 jours
Les plus motivés pratiqueront la
douche froide et le gandusha (bain
de bouche à l’huile) des puristes.
Les autres gagneront à instaurer
dans leur routine, deux ou trois
conseils piochés dans l’hygiène de
vie ayurvédique. Par exemple, le
matin au réveil, nettoyer sa langue
à l’aide d’un racloir ou d’une
VALÉRIE GUÉDON vguedon@lefigaro.fr
En Inde, les femmes vouent un
culte à leur chevelure, qu’elles
considèrent comme un symbole de
force. C’est dire si le sacrifice est
grand quand, dans les temples du
Sud, des millions de croyantes of-
frent leurs longues mèches à
Shiva, Vishnou et Murugan en
échange d’une vie plus conforta-
ble, d’une santé meilleure ou de
l’arrivée d’un enfant. « Dans la
culture occidentale, les cheveux re-
présentent davantage le temps, ex-
plique Bernard Andrieu, sociolo-
gue et auteur de Rester beau
(éditions du Murmure). Ils comp-
tabilisent les malheurs et les bon-
heurs accumulés au fil des années.
C’est pourquoi nous prenons sou-
vent la décision de les couper afin de
marquer une rupture avec le passé,
au moment d’un nouveau départ. »
Une façon de s’alléger pour re-
mettre les compteurs à zéro qui
sous-tend l’intrigue de Nappily
Ever After (Une femme de tête en
français), un film diffusé depuis
septembre sur Netflix. L’héroïne
afro-américaine au lissage impec-
cable décide, sur un coup de tête,
de raser sa tignasse. Dans le mon-
cuillère pour enlever les dépôts
(bactéries) accumulés pendant la
nuit. S’étirer en réalisant quelques
postures de yoga qui vont activer
tous les systèmes du corps (respi-
ratoire, lymphatique, nerveux).
Méditer pendant quelques minu-
tes, aussi. Les adeptes crient au
regain d’énergie et à la détente
profonde.
« L’ayurvéda est à la fois une
médecine, une philosophie et un art
de vivre. Il agit autant sur le corps
physique que sur l’épanouissement
spirituel, encourage M. Vyas. Les
étapes charnières de l’année comme
le Nouvel An, la rentrée de septem-
bre, un anniversaire sont souvent le
bon moment pour démarrer une
routine. » Il faudrait 21 jours au
cerveau pour assimiler un change-
ment et les perturbations que ce-
lui-ci entraîne, donc se débarras-
ser d’une mauvaise habitude et
ancrer une bonne résolution. Bilan
le 24 janvier ? ■
de entier, de plus en plus de fem-
mes noires et métisses s’adonnent
à ce rite pour retrouver et afficher
fièrement, après des années de dé-
frisages, de coloration et de trai-
tements abrasifs, leurs boucles na-
turelles.
Bientôt en France ?
Les Américaines appellent cette
tendance « the big chop », la gran-
de hache littéralement, populari-
sée jusque sur les tapis rouges par
des actrices comme Amandla
Stenberg et Zoë Kravitz. La fille du
chanteur, égérie du parfum Black
Opium d’Yves Saint Laurent, se
confiait récemment dans l’édition
anglaise du magazine Vogue :
« Prendre cette décision fut un des
changements les plus drastiques de
ma vie car j’ai pris conscience que je
me cachais beaucoup derrière mes
cheveux, que je les considérais com-
me une sorte de doudou. Sans eux, je
me suis sentie soudain très exposée.
Un déclic salvateur : j’ai dû appren-
dre à explorer ma féminité autre-
ment. » Comme elle, de nombreu-
ses femmes ayant effectué le grand
saut racontent être parties à la
(re)découverte d’elles-mêmes.
« Autrefois, avoir les cheveux
très courts était signe d’infamie.
LIBÉRER
LE MOUVEMENT
Marion Rabate, la créatrice
de la ligne de tenues de sport
(yoga, danse, pilates,
running…) la plus désirable
du moment, est elle-même
adepte des salutations au
soleil. « J’étais arrivée au
bout d’une vie traversée
à 100 à l’heure, raconte cette
Française, ex-salariée
d’un fonds d’investissement
à Londres. La pratique du
yoga est devenue une trêve
personnelle, qui m’a permis
de prendre du recul dans
mon quotidien. Comme la
danse classique, il institue
un rite, son rythme rassure :
on pratique au même
endroit, à la même heure,
pour soi. Cette méthode s’est
développée récemment,
mais tellement vite, dans
la culture occidentale. »
Il y a moins d’un an, la jeune
femme décide de créer des
vêtements « couture pour
les loisirs », s’inspirant
d’un corsetier parisien qui,
au XIXe siècle, introduisait
le stretch dans la corseterie :
Ernest Leoty. « Il tenait un
discours très moderne sur le
corps de la femme et avait
à cœur d’apporter du confort
à la corseterie. Il assurait que
les corsets ne devaient pas
être restrictifs, mais plutôt
libérer les mouvements. »
De la même façon, la
trentenaire conçoit ses
combinaisons, leggings,
brassières et tee-shirts
seconde peau selon un parti
pris aussi confortable que
sexy. « Le yoga est un mode
de vie. On veille à bien boire,
manger bio, déconnecter
des réseaux sociaux, bien
dormir… Pour autant, cela
ne vous empêche pas
de travailler et d’enchaîner
un cours avec un apéro. C’est
en ça que je sens ma marque
profondément différente
d’un label de sport : mes
vêtements sont techniques
- on peut courir un
marathon en Ernest Leoty ! -
mais ils ne sont pas conçus
pour se dépasser, plutôt
pour se retrouver. »
À partir de 66 € la brassière
et 110 € les leggings, sur
www.ernestleoty.com
et au Bon Marché Rive
Gauche (Paris VIIe).
Marie-Gabrielle Graffin
Ceux de Jeanne d’Arc furent l’un des
principaux griefs portés contre elle,
reprend Andrieu. Pensez aussi aux
femmes tondues à la Libération, aux
sorcières rasées pour hérésie pen-
dant l’Inquisition. Aujourd’hui, nous
assistons à un changement de sym-
bolique. Porter les cheveux courts,
voire très courts, est une revendica-
tion de soi. » La mode l’a bien
compris. Sur les podiums des défi-
lés printemps-été 2019, la « pixie
cut » (coupe de lutin) du manne-
quin Karolin Wolter ouvrant le
show Givenchy ou la « buzz cut »
(boule à zéro) d’Adwoa Aboah fai-
saient sensation.
« Les modèles aux cheveux
courts affichent une ligne du corps
différente, plus élancée, plus affir-
mée, ce qui intéresse forcément les
créateurs », estime le chercheur.
La tendance ne date pas d’hier,
Inès de la Fressange, Linda Evan-
gelista et Twiggy avant elles
avaient usé du ciseau pour aiman-
ter les flashs des photographes.
« Attention, le très court ne sied pas
à tous les visages, il nécessite un
ovale très dessiné, prévient le coif-
feur David Lucas. Et mieux vaut ne
pas se lancer sur un caprice. Le ré-
sultat dans le miroir peut être parti-
culièrement déstabilisant. » ■
 РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS

LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019

TOUJOURS PLUS VITE 23

SÉRIE (8/10)

Un jardin
Chaque jour,
« Le Figaro » raconte
l’accélération

tout de suite !
de notre société
et les conséquences
de ce phénomène.
Aujourd’hui,
la création
paysagère.

MARC MENNESSIER £@MarcMennessier

On pourrait croire l’univers du jardin

épargné par la frénésie ambiante. À
l’écart, pour ne pas dire à rebours, d’un
monde en perpétuelle accélération.
Après tout, notre civilisation a beau avoir
inventé Internet et le TGV, les arbres, les
fleurs et les légumes ne poussent pas plus
vite pour autant. Les saisons, elles aussi,
continuent à succéder aux saisons, dans
le même ordre et au même rythme : sauf
si les astronomes nous ont caché quelque
chose, la Terre ne s’est pas subitement
mise à tourner plus vite autour du Soleil !
Pourtant, en dépit de ces immuables
constantes biologiques et cosmiques, la
course à l’immédiateté gagne aussi pe-
louses, parterres et ombrages. « À l’heure
où les échanges en Bourse se font dans la
seconde, beaucoup de gens ne compren-
nent pas qu’un jardin ne puisse sortir de
terre du jour au lendemain », déplore le
paysagiste Louis Benech. Comme dans
bien d’autres domaines, l’exigence du
« tout, tout de suite » se banalise.
« Il n’y a pas si longtemps, les clients,
particuliers ou entreprises, acceptaient de crée un jardin pour soi, pas pour les géné- Le nouveau jardin de plus en plus souvent vendus avec des
patienter quelques années, le temps que le rations futures, et on l’aménage comme on à la française fruits sur leurs branches. Dominique
jardin prenne son aspect définitif. Mainte- décore sa maison, dont il est une extension, du château Douard cite l’anecdote de ce client qui lui
nant, il faut aboutir au même résultat en une pièce supplémentaire. Du coup, il doit de Chambord a demandé de remplacer un citronnier
quelques mois, parfois moins », constate être livré en même temps que le bâti dans sa (ci-dessus) tout juste planté au motif qu’il ne portait
également Dominique Douard, paysa- configuration définitive », explique le inauguré en mars pas… de citrons.
giste dans les Pyrénées-Orientales et pré- paysagiste Pierre-Alexandre Risser. 2017 est sorti de
sident de la Société nationale d’horticul- La vitesse ? « Le phénomène n’est pas terre en à peine six Un peu comme des bibelots
ture de France (SNHF). nouveau, sauf que mainte- mois. Plus besoin Non seulement la satisfaction du « désir
d’attendre que la
C’est ainsi qu’à quarante JARDINAGE EXPRESS nant c’est pire ! » s’excla- de jardin » ne souffre pas le moindre re-
EN QUELQUES CHIFFRES végétation pousse :
ans d’intervalle, la même me-t-il en se référant aux la transplantation tard, mais certains vont jusqu’à anticiper
phrase ne veut plus du Alors que la part des Japonais et à Louis XIV. Les d’arbres l’évolution future de leurs goûts. C’est
tout dire la même chose : végétaux « racines nues » premiers maîtrisent la pré-adultes ainsi que, sur la côte méditerranéenne, de
« Au début de ma carrière, se réduit comme peau de transplantation des grands plus en plus de propriétaires préfèrent
chagrin, celle des plantes (ci-contre),
quand quelqu’un voulait vendues en pot ou en arbres depuis des millénai- la culture en voir leurs arbres plantés dans de volumi-
une haie de deux mètres, il conteneur s’élevait l’an res et le second a planté à conteneur et la neuses poteries plutôt qu’en pleine terre,
parlait de la hauteur des passé, en France, à Versailles des sujets énor- pose de gazon en de manière à pouvoir les changer de place

50,9 %
arbustes une fois parvenus mes prélevés dans la forêt rouleau permettent plus facilement. Un peu comme des bibe-
au stade adulte ; aujour- de Marly ou acheminés de- à tout un chacun lots qui font le tour des pièces suivant
de se faire « livrer »

du
d’hui, il faut comprendre puis les provinces du l’humeur du moment.
que la haie doit faire cette royaume. Problème : un jardin clés en Mais ce n’est pas tout : si, comme on
taille dès la plantation. » aujourd’hui, tout le monde
main en un temps vient de le voir, nombre de nos contem-

Fi des exigences
saisonnières
Parfois, la date de « li-
vraison » est le seul et
unique critère. Comme
cette chaîne de fast-foods
qui commande, en avril,
un jardin pour le nouveau
restaurant qu’elle prévoit
d’ouvrir près de Perpi-
marché
Le gazon en rouleau permet
d’obtenir instantanément
une belle pelouse. Mais
son coût moyen, cinquante
fois plus élevé qu’un semis,
est d’environ
10 €
record. À condition
veut faire comme le Roi- d’en avoir porains n’ont plus le temps d’attendre
Soleil dès lors qu’il en a les les moyens. que leur jardin pousse, ils n’en ont pas
moyens… LEONARD DE SERRES d’avantage pour s’en occuper. « Outre les
« La folie des grandeurs considérations d’ordre esthétique, la mode
s’est démocratisée », résu- des graminées que l’on voit partout
me Louis Benech, qui per- aujourd’hui s’explique par le fait que ces
siste à « planter petit, même plantes ne nécessitent ni arrosage ni entre-
si cela déroute les gens ». Et
tien », constate Pierre-Alexandre Risser.
de citer l’exemple de ce ri- Ce manque de disponibilité peut sembler
che client qui voulait
d’emblée de très grands
paradoxal à une époque où les hommes
ont rarement eu autant de temps libre.

par m²
gnan au 1er juillet. « L’im-
portant était de ne pas
manquer le début de la
saison touristique, quitte à
planter les arbres en pleine
canicule… », poursuit Dominique
Douard. Ou encore cette entreprise qui
veut « verdir » les terrains de son nou-
veau siège trois jours seulement avant
l’inauguration. Même les architectes s’en
mêlent : plus question d’attendre le
« bon moment » pour réaliser les planta-
tions. Le paysagiste doit s’insérer dans un
calendrier préétabli qui fait fi des exigen-
ces saisonnières des plantes.
Plusieurs facteurs expliquent cette fiè-
vre. « Autrefois, on transmettait la pro-
priété familiale à sa descendance. Aujour-
d’hui, avec la mobilité géographique, on
arbres : « J’ai réussi à le
convaincre d’alterner avec
des sujets plus jeunes en lui
expliquant que les condi-
tions de reprise seraient
meilleures. Trente ans plus tard, les petits
arbres avaient dépassé les grands ! »
Si le moteur à réaction a permis l’essor
de l’aéronautique, la culture des végétaux
en conteneur a véritablement révolu-
tionné l’horticulture. « Lancée dans les
années 60, généralisée trente ans plus
tard, elle permet de planter des sujets de
toutes tailles douze mois sur douze et plus
seulement de novembre à mars, comme
cela se pratique traditionnellement, souli-
gne Patrick Abadie, responsable Qualité
& Approvisionnements chez Truffaut.
Résultat, les végétaux « racine nue », que
l’on ne plante qu’à partir de la Sainte-Ca-
therine (quand « tout arbre prend raci-
ne », selon le fameux dicton), ne repré-
sentent plus qu’une part marginale du
marché national, contre plus de 50 %
pour ceux vendus en pot ou en conte-
neur. La mécanisation de l’arrachage de
gros arbres en mottes (jusqu’à 10 mètres
cubes), comme les oliviers pluricentenai-
res, a aussi fortement contribué à l’émer-
gence de ces jardins « champignons ».
Sans oublier le gazon vendu en rouleau
qui permet d’obtenir sur-le-champ une
pelouse clés en main, alors qu’il faut des
mois avec un semis. Le prix est juste cin-
quante fois plus élevé…
« La culture en conteneur a aussi l’avan-
tage de proposer des plantes en pleine vé-
gétation, à l’aspect généreux, qui sont bien
souvent déjà fleuries lors de l’achat »,
poursuit Patrick Abadie en citant le cas
emblématique du rosier, dont la période
de plantation se décale de l’automne vers
le printemps jusqu’en mai ou juin. Même
si la reprise est moins bonne, la satisfac-
tion de créer en une journée un massif
fleuri l’emporte sur tout le reste. Le phé-
nomène touche aussi les arbres fruitiers,
En réalité, le jardinage entre en com-
pétition avec d’autres loisirs très chrono-
phages eux aussi : voyages, activités
sportives, écrans de toutes sortes… « Nos
principaux concurrents sont la SNCF et In-
ternet », ironise Patrick Abadie. Sans
parler de la « perte d’expertise » : avec le
développement de l’urbanisation, les
liens avec la terre, la campagne, la rurali-
té se sont distendus, notamment parmi
les jeunes générations. Les gens aiment le
jardin et les plantes dont la ville les prive,
mais aiment-ils ou savent-ils encore
jardiner ? ■
RETROUVEZ DEMAIN :
UN, DEUX, TROIS… INSPIREZ

CHRONOLOGIE frais depuis les lointaines provinces

du royaume.
1971-1985
Les pépinières Guillot-Bourne, basées
à Jarcieu (Isère), sont les premières
MAXIME BROCHIER

1964 à se spécialiser dans la production

1661
Louis XIV fait appel au jardinier
André Le Nôtre (1613-1700) pour créer
et aménager le parc et les jardins
de Versailles. Entrepris en même
RUE DES ARCHIVES
De retour des États-Unis, Jacques
Derly, pépiniériste dans l’Eure,
lance la culture en conteneurs
en achetant à la cantine des usines
Renault de Flins (Yvelines)
5 000 grands pots de confiture
en s’affranchissant de la contrainte
de grands arbres d’ornement semi-
adultes (photo ci-contre). Plantés en
pleine terre, les sujets sont déplacés
tous les cinq ans pour contenir leurs
racines près du tronc. Le recours
à de puissantes arracheuses permet,

temps que la construction du château, métalliques qui devaient partir saisonnière qui prévalait jusqu’alors. au bout de 8 à 15 ans de production,
ce chantier titanesque va durer à la décharge. Il y fait pousser Fort décriée au début, la méthode de transplanter ces arbres en motte
40 ans. De grands arbres adultes des arbres et des arbustes à la façon va connaître dans les décennies (jusqu’à 10 m3 pour les plus gros
A

seront prélevés dans la forêt de Marly, de vulgaires géraniums, de manière qui suivent un succès retentissant spécimens) directement chez le client
toute proche, ou acheminés à grands à pouvoir les planter avec leur motte en France et en Europe. avec une garantie de reprise de 2 ans.

jeudi 3 janvier 2019 LE FIGARO
24 CULTURE
Rentrée
littéraire : ce qui
vous attend
LETTRES Moins de livres mais toujours plus
de premiers romans, telle pourrait être
la devise des éditeurs en ce début 2019. Avec
quelques têtes d’affiche nommées Houellebecq,
Foenkinos, Barbery, Rouaud, Rambaud…
I
ALICE DEVELEY
adeveley@lefigaro.fr
l y a une dizaine d’années, les
auteurs de best-sellers pouvaient vendre
plusieurs centaines de milliers de livres.
Aujourd’hui, les ventes ont largement
chuté. Les Prénoms épicènes d’Amélie
Nothomb, par exemple, en tête des ro-
mans de la rentrée littéraire de septem-
bre 2018, s’est écoulé à un peu moins de
120 000 exemplaires. Le monde de l’édi-
tion ressemble à s’y méprendre à un fau-
teuil roulant que l’on continue de pousser
sans savoir quand ses pneus vont crever.
On dramatise, mais l’année 2018 fut dure.
Et si la « houellebecqmania » promet de
déferler dans les rayons le 4 janvier
- 320 000 exemplaires de Sérotonine ont
été tirés -, le nombre des romans de l’hi-
ver enregistre déjà une baisse de 1,2 %
comparé à 2018, selon les données Livres
Hebdo-Electre Data Services.
Avec 493 nouveautés contre 499 l’an-
née dernière, la production hivernale
reste toutefois stable. En littérature
française, 336 romans sont programmés.
C’est 2,6 % de moins qu’en 2018. Une
baisse inversement proportionnelle au
nombre de romans étrangers publiés
(157 contre 153). Les premiers romans,
UGC ET ORANGE STUDIO PRÉSENTENT
“ UN THRILLER
À LA DOUCEUR
DIABOLIQUE” TÉLÉRAMA
“ LA SOMPTUEUSE
ÉPOPÉE DU MESRINE
ARGENTIN ”
LE FIGARO
“ UN COUP DE CŒUR”
OUEST FRANCE
SURPRENANT
“ Michel, Jacques et Jean, élevée au cor-
ET CAPTIVANT ”
CINÉMA TEASER
L
ANGE
AU CINÉMA LE 9 JANVIER
A
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
quant à eux, déjà fort nombreux à la ren-
trée de septembre, gagnent 20 %. Ils sont
77 contre 64 au mois de janvier dernier.
Ce qui fait de 2019 l’année la plus fécon-
de depuis dix ans.
Les places vont donc être chères en li-
brairie. Pour doubler leur chance et évi-
ter de se retrouver avec des invendus,
les éditeurs doivent rebattre leurs cartes.
Flammarion ouvre ainsi la saison en
jouant son atout Houellebecq. L’auteur
de Sérotonine est le seul programmé par
la maison jusqu’au 9 janvier. Viendra
ensuite Véronique Ovaldé avec Personne
n’a peur des gens qui sourient, tiré à
30 000 exemplaires. Chez Gallimard,
sont attendus en janvier : Dominique
Bona, Tahar Ben Jelloun, Muriel Barbery
et Tristan Garcia. Au mois de février : Dai
Sijie et David Foenkinos pour Deux
sœurs, tiré à 100 000 exemplaires. Sui-
vront, en mars, Alexis Jenni, Jean-
Christophe Rufin ainsi que Marc Dugain
au mois d’avril. Chez Albin Michel, c’est
Éric-Emmanuel Schmitt qui ouvre l’an-
née avec Félix et la Source invisible, tiré à
120 000 exemplaires. Le chanteur de
Dionysos, Mathias Malzieu, lui emboîte-
ra le pas en février avec un livre surréa-
liste intitulé Une sirène à Paris.
Grasset gage sur Yann Moix, Jean
Rouaud et Patrick Rambaud, qui publie
Emmanuel le Magnifique. Chronique d’un
Jean Rouaud, David Foenkinos et Muriel Barbery figurent parmi les auteurs les plus attendus de ce début d’année 2019.
JEAN-FRANCOIS PAGA/OPALE, STUDIO HARCOURT PARIS, FRANCESCA MANTOVANI/GALLIMARD/OPALE
règne, une fiction littéraire sur le prési-
dent publiée en janvier. L’académicien
Andreï Makine prendra le relais en fé-
vrier. Le Seuil parie sur Charif Majdalani
et Frères sorcières d’Antoine Volodine.
Chez Minuit, on mise sur Éric Chevillard,
qui publie deux livres, dont L’Explosion
de la tortue. Rivages propose Bacchantes,
de Céline Minard. Actes Sud espère tirer
son épingle du jeu avec Hélène Frappat,
P.O.L avec Jean Rolin et Atiq Rahimi,
Julliard avec Philippe Besson, Bartillat
avec Christophe Mercier, Plon avec Ra-
phaëlle Giordano et Buchet-Chastel avec
Nan Aurousseau. À noter qu’Alexandre
Jardin revisite avec Hervé Le Goff trois
classiques de la littérature jeunesse, tan-
dis qu’Omnibus se prépare à fêter le 30e
anniversaire de la mort de Simenon en
republiant Tout Maigret.
Entretiens d’Elena Ferrante
À l’étranger, les primés ont la primeur.
Grasset publie D’os et de lumière, prix
Impac irlandais, de Mike McCormack,
tandis qu’Albin Michel édite Grace,
prix du meilleur roman de l’année ir-
landais, de Paul Lynch. Robert Laffont
s’invite dans la danse irlandaise et pu-
blie Maison des rumeurs de Colm Toi-
bin. On note le retour de l’Écossais Ja-
mes Kelman chez Métailié, celui de
l’Italien Erri De Luca chez Gallimard,
de l’Argentin Rodrigo Fresan au Seuil et
du Portugais Lobo Antunes chez Bour-
gois. Le Tripode ferme le bal en février
avec le livre Terminus Berlin d’Edgar
Hilsenrath, décédé le 31 décembre
dernier. Parmi les premiers romans fi-
gure Daisy Johnson, finaliste du Man
Booker Prize 2018, publiée chez Stock.
Du côté de l’histoire littéraire, on at-
tend les lettres et entretiens d’Elena
Ferrante (Gallimard), le journal de John
Steinbeck tenu pendant sa rédaction
des Raisins de la colère (Laffont), le
Journal secret de Curzio Malaparte
(Quai Voltaire) et les Carnets de Goliar-
da Sapienza (Tripode).
Les premiers romans se sont réduits à
peau de chagrin chez Flammarion (un,
celui de Constance Joly, contre trois en
2017) et chez Grasset (trois contre cinq
en 2018). Un choix étonnant quand on
L’autre famille de Babar
BIOGRAPHIE Yseult Williams retrace l’itinéraire
captivant des Brunhoff, une fratrie créative
à l’avant-garde de la mode et de l’édition.
FRANÇOISE DARGENT
fdargent@lefigaro.fr
uel est le lien entre un célè-
Q bre éléphant, Christian
Dior, la Résistance et le ma-
gazine Vogue ? À première
vue, aucun. Et pourtant, la
réponse existe. C’est une fa-
mille, un patronyme, les Brunhoff, une
aventure ou plutôt de grandes aventures
au XXe siècle. De cette famille, on
connaît surtout deux noms, Jean de Bru-
nhoff, le créateur de Babar, et Laurent,
son fils, qui reprit le crayon de son père à
la mort prématurée de ce dernier en
1937. Laurent avait alors 13 ans et son
oncle Michel lui demanda de coloriser les
dessins laissés par Jean. Il s’acquitta de la
tâche avec constance. Aujourd’hui âgé
de 93 ans, il continue de poursuivre les
aventures de l’éléphant le plus célèbre de
la littérature.
C’est pourtant à l’ensemble de cette
étonnante famille que s’intéresse la jour-
naliste Yseult Williams dans La Splendeur
des Brunhoff (Fayard). Et, au premier
chef, à la fratrie composée par Cosette,
deau par une mère alsacienne et sur un
mode plus bohème par un père qui fut un
éditeur et imprimeur d’avant-garde.
Jean, le plus discret, l’artiste de la fa-
mille, a sans nul doute puisé dans sa fa-
mille pour imaginer les attributs de ses
personnages de papier, leur élégance na-
turelle, leur goût pour les arts et la mode.
Héroïne de la Résistance
Michel, homme de presse, fit du Vogue
français avant la guerre un tel modèle
de luxe et d’innovation esthétique réu-
nis que la maison mère à New York en
fit son modèle. Cosette en fut la rédac-
trice en chef. Elle épousa Lucien Vogel,
à qui l’on doit le génial Jardin des mo-
des, où Babar fit ses premiers pas, mais
aussi la revue Vu, premier newsmaga-
sait qu’une première publication est peu
coûteuse et qu’elle peut rapporter gros.
En témoignent les derniers prix Gon-
court et Renaudot, qui sont tous deux
des deuxièmes romans. Quelques pri-
moromanciers à suivre : Joseph Pon-
thus, qui s’intéresse à la vie à l’usine (La
Table Ronde), Gabriella Zalapi, qui ra-
conte l’émancipation d’une femme dans
les années 1960 (Zoé), ou Sol Elias, qui
étudie la schizophrénie (Rivages). Parmi
ces débutants figurent des têtes
connues : Olivier Duhamel, Olivier Mer-
le, fils de Robert, Cécile Pivot, fille de
Bernard, Bruno Le Maire et Alain-Fa-
bien Delon, dont le livre est attendu en
février chez Stock.
Des thématiques se dessinent déjà.
Peut-être portée par la voix du mouve-
ment #Metoo, la littérature s’intéresse à
la place des femmes en France et dans le
monde. Toujours sous le joug de l’ac-
tualité, les écrivains analysent aussi la
vie après les attentats et s’interrogent
sur les dérives politiques, voire écono-
miques. La rentrée promet de faire de
jolis bourgeons. ■
Cosette de Brunhoff et son mari,
Lucien Vogel, dans les années 1930.
COLLECTION PERSONNELLE THOMAS GINSBURGER
zine de l’histoire, fortement antifasciste
dans les années 30. Il va sans dire qu’en
1939 ce monde parfait éclata sous les
coups de l’occupant allemand. La fille
de Cosette, Marie-Claude, qui avait
épousé Paul Vaillant-Couturier quelque
temps avant sa mort, devint une héroï-
ne de la Résistance, tandis que Pascal de
Brunhoff, son jeune cousin, fut l’un des
56 jeunes lycéens parisiens du corps
franc Liberté exécutés par les nazis le
21 juin 1944.
En juin 1945, c’est Vogue qui publie les
photos de Lee Miller de retour de Bu-
chenwald et Dachau. L’ex-mannequin,
égérie de Man Ray, était devenue photo-
reporter sur les conseils de Michel, qui
vit en elle autre chose qu’une sublime
créature. Et en 1946, c’est encore Michel
qui recommanda au couturier Lucien Pi-
guet d’engager l’ex-galeriste Christian
Dior comme premier assistant. On
connaît la suite. Et on sait désormais,
grâce à cette passionnante biographie,
pourquoi le roi Babar porte si divinement
le complet trois pièces. ■
« La Splendeur des Brunhoff »,
d’Yseult Williams, Fayard, 360 p., 22 €.

Martine Chevallier, les adieux d’une reine
THÉÂTRE Sociétaire de la Comédie-Française, nommée « honoraire », elle jouera encore cette saison dans
« Hors la loi », texte écrit et mis en scène par Pauline Bureau. Itinéraire d’une comédienne discrète et brillante.
J
ARMELLE HÉLIOT
aheliot@lefigaro.fr
eune, très jeune. On la revoit
pour jamais, fine, vive, une jeune fille
flamme, une fille du feu. De Wedekind à
Claudel, de L’Éveil du printemps à
L’Échange. De Wendla à Marthe. C’est
bien avant la Comédie-Française. On est
dans les années 1970. Elle joue sous la di-
rection de metteurs en scène qui ont son
âge, autour de 25 ans. Pierre Romans et
Anne Delbée, avec qui elle sera égale-
ment de l’exaltante aventure des Bri-
gands de Schiller. Des spectacles qui ont
marqué public et critiques et demeurent
dans les mémoires.
Martine Chevallier avait déjà entamé
un très joli parcours dans le monde du
théâtre. Née à Gap, plutôt élevée dans un
environnement de mélomanes, elle est
allée naturellement vers Grenoble. Une
jeune bande fait déjà parler d’elle dans la
ville de Stendhal. Jo Lavaudant, Ariel
Garcia Valdès et leurs amis. Mais c’est
vers le centre dramatique que se dirige
Martine Chevallier qui va alors rencon-
trer Bernard Giraudeau. « Il venait de
La Rochelle. Il s’était engagé dans la ma-
rine. Il était d’une beauté rare, avec ce re-
gard d’un bleu incroyable, sa stature, son
visage. On se demandait ce qu’on allait
devenir. On a décidé de partir pour Paris.
Lui à moto. Moi, en train. »
Tragédie et espièglerie
Ils rêvent du conservatoire. Ils obtien-
nent un rendez-vous auprès de la
secrétaire du directeur d’alors, Pierre-
Aimé Touchard. « Bernard avait dépas-
sé l’âge, mais ses cinq ans de marine
marchande ont compté. On a été ad-
mis. » Ils montent une adaptation de La
Ville, Claudel déjà, et présentent en-
semble le concours de tragédie, avec lui
dans le Cid, elle en Chimène. Ils ont des
prix et les premières pages des jour-
La France, l’autre
pays de la pop
CHRONIQUE Un livre illustré cerne avec humour
et érudition les contours de la musique française.
LA MUSIQUE
Olivier Nuc
onuc@lefigaro.fr
e ne sont pas des débutants.
C
Séparément, Hervé Bourhis et
Hervé Tanquerelle, quadragé-
naires actifs, se sont taillé de
belles réputations dans le mi-
lieu de l’illustration et du roman graphi-
que à la française. Le premier a déjà co-
pieusement œuvré pour la musique, avec
une série d’ouvrages aussi didactiques
que bien faits : Le Petit Livre rock, Le Petit
Livre Beatles, Le Heavy Metal ou Le Petit
Livre de la black music… autant de décli-
naisons réussies autour des musiques po-
pulaires. S’il s’inscrit dans la même dé-
marche, Le Petit Livre French pop, qui
voit Bourhis épaulé par son camarade
Tanquerelle, est porteur d’une ambition
plus grande : raconter soixante ans
d’évolution de la musique française.
Peut-être parce qu’il existe moins
d’ouvrages sur le sujet que sur les Beatles
ou la musique noire américaine, leur
nouveau titre pourrait bien prétendre
devenir une référence sur un sujet qui
aurait ressemblé à une vaste blague il y a
une vingtaine d’années : circonscrire la
pop française. Le présent remonte à la
composition de La Marseillaise, en 1792.
Mais c’est avec l’année 1956 que démarre
à proprement parler la chronologie du li-
vre, qui résume chaque année autour
d’un album phare et de plusieurs occur-
rences éclairantes. De la plus petite anec-
dote au fait marquant, chacun des millé-
РЕЛИЗ ПОДГОТОВИЛА ГРУППА "What's News" VK.COM/WSNWS
Martine Chevallier, sociétaire de la Comédie-Française depuis 1988, le 28 décembre à Paris.
naux d’alors. Autre temps… Elle a été
l’élève d’Yves Furet qui l’a initiée à Sta-
nislavski. « Il était d’une très grande ri-
gueur, une rigueur musicale. J’étais ins-
tinctivement en 3D. Essentiel pour moi,
lui aussi, c’est Antoine Vitez. Je me suis
beaucoup amusée avec lui. Il me conve-
nait très bien. J’étais une ingénue, il a vu
la tragédienne en moi. » Elle travaille sa
voix fruitée. « Je suis descendue de trois
octaves. Et j’ai appris à maîtriser ma
force vocale et mon souffle. Lorsqu’il faut
tenir huit vers sans respirer, comme on
chante du jazz, c’est une discipline.
J’aurais adoré chanter… Un peu comme
Tatiana, ma nièce, fille de ma sœur Ca-
therine et de Dominique Probst », glisse-
t-elle en souriant.
Ensuite, il y a pas mal de belles oppor-
tunités qu’elle saisit. Huster monte Le
trop marquées. Le fil de la pop française
se déroule comme un long fleuve intran-
quille, qui ne cesse d’emprunter des
tours et des détours. Stupeflip côtoie Do-
minique A, Souchon & Voulzy croisent
NTM. Plusieurs épisodes sont eux-mê-
mes développés comme des histoires au
sein de l’histoire avec un grand « H ».
Instantanés de studio, coulisses d’une
collaboration…
Coups de griffe bienvenus
Cela fait de longues années que musique
et BD font bon ménage. Les concerts des-
sinés ont mis au jour de superbes collabo-
rations entre musiciens et dessinateurs.
Certains, comme Charles Berberian ou
David Scrima, passent avec bonheur du
crayon à la guitare et inversement. Le li-
vre multiplie les clins d’œil et les hom-
mages avec tendresse et bienveillance.
Sans pour autant s’interdire quelques
coups de griffe bienvenus. Œcuménique
mais pas béni-oui-oui pour autant, Le
Petit Livre French pop est une gourman-
dise que l’on peut consulter comme une
encyclopédie. Une manière de discothè-
que idéale qui donne envie de réécouter
aussi bien Françoiz Breut que Chrysler
rose de Dashiell Hedayat. Un guide prati-
que qui a le bon goût de faire la part belle
à des originaux surdoués comme Brigitte
Fontaine ou Dick Annegarn, et d’autres
aventuriers qui ont fait avancer la musi-
que bien plus que des chanteurs à tubes.
Du rock parodique de Vian pour Magali
Noël et Salvador à la synthèse signée en
2018 par Barbara Carlotti, les femmes
sont pour une fois bien représentées dans
cette histoire qui rend hommage à des
LE FIGARO jeudi 3 janvier 2019
CULTURE 25
Jacquot. Elle y est Madame de la Tour du
Pin dans Les Adieux à la reine.
Reine, elle l’est. Médiatisée parce
qu’elle a été l’épouse d’August Coppola
qui s’est éteint en 2009. Le frère intellec-
tuel, mélomane, cinéaste également de
Francis. On n’en parle pas, on n’est pas
là pour. Tout juste parlera-t-elle de sa
fille, née bien avant, et de ses petites-
filles. Par sa sœur, elle est entrée dans la
galaxie Casadesus, et Gisèle, qui avait
longtemps été au Français, aimait beau-
coup Martine, sa personnalité, sa finesse
et ses audaces dans le jeu.
Grave accident
Elle va donc, bientôt, s’en aller. Le comi-
té en a ainsi décidé. Elle sera sociétaire
honoraire à la fin de la saison, mais on
sait bien d’expérience, que l’on ne rap-
pelle plus les « honoraires ». Elle ne fait
pas un drame de ce nouveau statut. Un
jour, il faut bien, comme le dit la maison,
« faire valoir ses droits à la retraite ». Elle
pouvait le faire dans deux ans, naturelle-
ment. Elle avait sa place. Koltès lui vaut
le molière de la meilleure comédienne en
J.-C. MARMARA/LE FIGARO 2007, elle joue Ostrovski avec Fomenko,
Feydeau avec Zabou Breitman, Strind-
Cid à Carcassonne, elle est Chimène et émotivité à fleur de peau et de timbre. berg avec Arnaud Desplechin qui signe
Geneviève Page la présente à Jean-Louis Elle entre avec le rôle-titre d’Esther de aussi l’adaptation au cinéma de La Forêt.
Barrault pour la tournée au Japon de la Racine, une mise en scène de Françoise Après un grave accident, en juin 2016,
« quatrième journée » du Soulier de sa- Seigner. Ensuite, tout s’enchaîne. So- et de longs mois de rééducation, on l’a
tin. Martine Chevallier est Sept- Épées. ciétaire dès le 1er janvier 1988 - la 478e-, retrouvée dans le spectacle bouleversant
Cocteau, Anouilh, le jeune Ribes de On elle retrouve Lavaudant, Vitez, Delbée de Lars Noren, Poussière. « C’est un être
loge la nuit-café à l’eau, Tchekhov avec pour qui elle est Phèdre « étoile solitai- d’une qualité humaine très profonde. La
Brook, Duras avec Duras, Heiner Müller, re », vêtue en Lacroix, en 1995 et tra- manière dont il nous a fait pénétrer dans
elle ne quitte jamais les planches tout en vaille avec Joël Jouanneau qui crée Les cet univers, cette “pièce”, est très parti-
tournant au cinéma. Elle reçoit très jeu- Reines du Québécois Normand Chauret- culière. Mais d’une force singulière »,
ne le prix Gérard-Philipe. te au Vieux-Colombier avec Christine souligne-t-elle, encore émue.
Lorsqu’elle est engagée comme pen- Fersen, Catherine Hiegel et les jeunes Elle ne quitte pas immédiatement la
sionnaire à la Comédie-Française, le Océane Mozas, Cécile Garcia Fogel, Em- place Colette, puisqu’on la verra dans
1er novembre 1986, c’est donc une artiste manuelle Meyssignac. Un événement. Hors la loi, de Pauline Bureau, au Vieux-
qui a fait ses preuves dans des registres Elle est Elizabeth. Colombier fin mai. Elle vient de tourner,
très différents. Si elle aime la tragédie, il Autant de rôles, autant d’incarnations sous la direction de l’Italien Filippo Me-
y a en elle beaucoup de fantaisie, une es- puissantes. Le cinéma ne l’oublie pas. Ja- neghetti, Deux, histoire inspirée de celle
pièglerie parfois, une légèreté en tout mes Ivory, Yves Angelo, Étienne Chati- de la famille du réalisateur, avec Barbara
cas, avec sa silhouette d’adolescente, liez, Anne Fontaine, Philippe Lioret, Sukowa et Léa Drucker. On peut en at-
alors. Pas trop grande, cheveux lisses, Guillaume Canet, Julie Gavras, Benoît tendre beaucoup. La route s’ouvre… ■



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