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Année scolaire 2016/2017

Exploration du Timbre dans la musique pour piano de Morton Feldman

TRAVAIL D’ÉTUDE PERSONNEL

2e année de 2e cycle supérieur

DE ALMEIDA João Casimiro

Tuteur : ABROMONT Claude


Table des matières

1. Introduction - p.3
 Contexte historique de la musique de Feldman - p.3
 Relation personnelle avec la musique pour piano de Feldman - p.4

2. Aspects principaux de la musique - p.5


 Influences - Peinture et Tapis Orientaux - p.6
 Traitement du Tempo - p.9
 Son et Silence - p.14

3. Le Timbre - p.17
 Utilisation feldmanesque du timbre - p.17
 Musique pour piano - exploration du timbre et de la notation - p.23

4. Conclusion/Réflexion – La difficulté de vouloir écouter Feldman - p.30

5. Biographie - João de Almeida - p.34

6. Bibliographie - p.35-36

2
Introduction

Dans le contexte de la création musicale du XXème siècle, c’est intéressant de


penser et réfléchir sur la mentalité et caractère de la musique de Morton Feldman. Dans
un siècle dans le quelle nous trouvons musique tellement complexe en termes de
systèmes, construction ou rythme – comme Stravinsky, ou ses contemporains
Stockhausen ou Boulez – celle de Feldman nous oblige à nous calmer, à ralentir, pour
bien pouvoir écouter tout ce que la musique nous offre ; ces idées musicales étaient
totalement distinctes. Il pensait que la musique ne devrait pas être retenue par des
systèmes de composition (par exemple le sérialisme), elle devrait exister comme elle est,
libre, et laisser les sons être individuels, pas en relation entre eux-mêmes. Feldman admet
que « la Musique a toujours été impliquée dans la réorganisation des contrôles
systématisés »1 et aussi que « l'exploration progressive de nouvelles possibilités sonores
semblait avoir peu de signification compositionnelle »2 ; cela nous montre une rupture de
pensé par rapport à une grande partie de l’histoire de la musique et, donc, une vision de
la musique qui peut la prendre vers un nouveau chapitre de son histoire.

En regardant, par exemple, des œuvres pour piano entre 1950 et 1960 comme les
six Intermissions ou Extensions 3 on trouve une musique lente, calme, presque toujours
piano. Elle contient beaucoup de silences, et les notes soigneusement placées pour nous
donner le temps pour écouter chacune, pour donner au son la possibilité d’avoir une
attaque, de sonner, et de disparaitre (Intermission 6) – « L'attaque d'un son n'est pas son
caractère. En fait, ce que nous entendons, c'est l'attaque et pas le son. La diminution
sonore, cependant, ce paysage qui part, c’est ça qui exprime où le son existe à notre
audition - nous laissant plutôt que de venir vers nous. »3

1 - Feldman, Morton - “Predeterminate/Indeterminate”, texte de 1966


2 - Idem
3 Feldman, Morton - “Essays”, ed. W. Zimmermann (Cologne, 1985) page 89

3
Une grande partie de cette conception vient de la peinture, sous l’influence des
œuvres de Jackson Pollock, Philip Guston ou Willem de Kooning. Les principes sont les
mêmes: chaque couleur doit être elle-même, pas une façon de délimiter des formes, et
aussi que la peinture et tous ses éléments sont plus importants que la façon comment ils
sont faits. Feldman se souvient que Philip Guston lui disait que « quand il voit comment
une peinture est faite, il s'ennuie avec elle »4. Avec l’ambition de mettre ce type de
sensation en musique, Feldman, dans toute sa vie, a cherché de trouver une façon d’écrire
qui permet à l’interprète de suivre son intention ; dans ce travail j’essayerai de parler de
toutes les particularités et originalités de sa musique, comme le silence ou la notation,
mais en me concentrant plus spécifiquement dans une qui est primordiale dans cette
musique – le timbre.
La découverte de cette musique est, pour chaque personne, une expérience
différente. Pour ceux qui aiment beaucoup d’écouter (et parfois surtout de travailler) la
musique pleine et complexe de Brahms, Schönberg, Stravinsky ou Stockhausen, celle de
Feldman peut paraitre vide, sans richesse, sans matérielle musicale que nous puisons
travailler. Mais il est aussi possible de trouver cela une musique tellement intéressante et
subtile que tout ce qui est écrit est précieux et le simple fait d’avoir moins de matériel fait
qu’il soit de plus en plus important. Le problème principal de ne pas aimer cette musique,
autant que pianiste, c’est la façon de la regarder et la penser : c’est une musique que ne
se travaille pas – ou bien pas comme les autres. Elle n’est pas techniquement difficile,
donc ce qu’on fait c’est de regarder, analyser, comprendre, et enfin, après tout ça, l’œuvre
est prête ; nous n’aurons pas de préoccupations, la musique sonne naturellement comme
elle est écrite.

Ceci étant dit, mon intérêt en mieux comprendre de quelle façon cette musique a
été écrite et pensée, et quelles étaient ses inspirations, m’ont fait décider d’approfondir
mes connaissances dans ce sujet. Après avoir joué quelques « Intermissions » en concert,
j’ai constaté que c’est une musique que difficilement fait une connexion avec des autres
styles d’écriture/ œuvres d’autres compositeurs, de tellement unique qu’est sa façon

4 Feldman, Morton - “Predeterminate/Indeterminate”, texte de 1966

4
d’écrire – elle annule quelque type de relation entre les notes ; même dans un sens formel,
de l’intégralité de l’œuvre, il n’y a presque jamais une note/motif plus important que l’autre.
Dans mon cas personnel, j’ai mis les « Intermissions » de Feldman après la deuxième
pièce des Drei Klavierstücke de Beat Furrer (compositeur autrichien né en 1952) parce
que j’ai constaté des pensées pareilles concernant, par exemple, les plans et timbres dans
le piano ; mais même si ces similarités existaient, c’était néanmoins une grande différence
de style et surtout d’ambiance et sonorités.
Pourtant, le fait de pouvoir donner au public l’occasion d’écouter cette musique
dans un contexte de concert ou récital est, je trouve, une bonne façon de la faire connaitre,
par rapport aux enregistrements, car l’expérience du son, de son timbre, e de sa
progression descente jusqu’au silence se perd dans un disque ou vidéo. Ce sujet sera plus
approfondi dans la partie 4, La difficulté de vouloir écouter Feldman.

Dans les prochains pages (partie 2), je parlerai brièvement des notions et aspects
fondamentales de la musique de Feldman – Influence de la peinture et des tapis orientaux,
Tempo et Son et Silence – pour donner une base pour entrer dans la partie 3, et parler de
son traitement du Timbre.

2. Aspects principaux de la musique pour piano de M. Feldman

De tous les aspects qui peuvent caractériser la musique de Feldman, son traitement du
Tempo musical et son utilisation du silence sont peut-être les plus innovants et caractéristiques de
son style. Pourtant, cela serait superflue de parler de tous ses traits musicaux et esthétiques sans
parler de ses inspirations, soit elles musicales ou non-musicales. L’essence d’une grande partie
de compositeurs et/ou de genres musicales se trouve sur ses influences : J. S. Bach a été une
grande source d’inspiration pour les compositeurs du Romantisme, après le travail de récupération
et diffusion de son œuvre par Felix Mendelssohn ; comme F. Liszt et R. Wagner étaient pour les
compositeurs du XXème siècle. Il avait aussi des inspirations extra-musicaux, comme J.W. v.

5
Goethe dans la musique de L.v. Beethoven (Ouverture Egmont) ou les peintres impressionnistes
comme William Turner ou Claude Monet dans la musique de C. Debussy ou M. Ravel.

Avant ses inspirations musicales, qui couvrent l’influence de compositeurs comme Edgar
Varèse - « Je dirais que pour moi, et peut-être pour d'autres en Amérique, [Varèse] était pour moi
ce que peut-être Webern était à Boulez »5 - mais aussi une réflexion personnelle de ce qui est le
son, le tempo et, en gros, la musique elle-même, Morton Feldman avait inspirations extra-
musicales aussi. Ces inspirations viennent surtout de deux choses différentes : la peinture -
expressionisme abstract de l’école de New York - et les tapis orientaux, qui Feldman a toujours
admiré et essayé de faire passer cette admiration en musique un peu par toute son œuvre.

Influences - Peinture et Tapis Orientaux

Pendant les années 50, le début de sa création musicale, Feldman a été associé aux
expressionnistes abstraits, notamment Mark Rothko, Willem de Kooning et Philip Guston ; il a
envisagé de mettre en musique les éléments qu’il a admiré de cette style de la peinture - en gros,
l’improvisation et la spontanéité dans le procès de création. Cette pensé a influencé Feldman à
chercher une espèce de libération de la musique, de ne pas la limiter en pensant à des systèmes
préconçus et des formules compositionnelles.

La nouvelle peinture me faisait désirer un monde sonore plus direct, plus immédiat, plus physique
que tout ce qui existait jusqu'alors. 6

Quelqu’un qui était au début des années cinquante avec les peintres a vu que ces hommes avaient
commencé à explorer leur propre sensibilité, leur propre langage plastique ... avec cette indépendance
complète de l'autre art, cette sécurité intérieure en travaillant avec ce qui les était inconnu. C'était une
superbe réalisation esthétique.7

5 Feldman, Morton - “A Martyr for the Cause» présenté par Roger Wright dans la Radio BBC,
22/10/1986.
6 Feldman, Morton - « Autobiography: Morton Feldman (1926) », page 38.
7 Nyman, Michael - « Experimental Music: Cage and Beyond», New York: Schirmer Books, 1974, page 43.

6
Dans une peinture de Jackson Pollock, comme par exemple Autumn Rhythm, on constate
l’usage de la couleur pas comme un « moyen » mais comme une partie intégrale ; c’est-à-dire, la
couleur est utilisée comme la façon la plus importante d’expression. Il n’y a que couleur ; elle est
utilisée pas pour délimiter une forme, quel qu’elle soit, mais simplement pour être elle-même, en
gagnant plus d’individualité. Dans ce cas spécifique, la prédominance de couleurs comme le noir
et le marron donne plus d’expressivité aux petites « nuances » de blanc que sont présentes ; le
dialogue coexiste comme un vrai contrepoint.

1) Jackson Pollock - Autumn Rhythm

Cette aspect libre et improvisatrice est présent dans la majorité des œuvres pour piano de
Feldman, dès les œuvres des années 50 comme les Last Pieces (la duration des sons n’est pas
spécifié, ce qui élimine tout connexion entre les sons, donc l’individualité sonore est plus présente)
et les Intermissions (en particulier la sixième, qui est construite dans la forme ouverte), jusqu’à les
œuvres tardifs comme Piano et For Bunita Marcus, dans lesquelles l’œuvre se développe « toute
seul », dans un procès d’écriture qui est concentré sur le moment et pas sur la pièce dans sa
totalité - « Je ne commence pas avec un plan. Je le suis seulement »8.

8Coolidge, Clark - “Regarding Morton Feldman’s Music and wherever it all goes”, article publié dans
“Sulfur (No 22, Spring 1988)» pages 123-129

7
2) "Last Pieces", début de la troisième pièce. L'absence de rythme, en donnant la liberté de duration des sons
("Durations are free"), Feldman nous dirige vers l'individualité de chaque note.

Plus tard, en 1984 dans les courses de Darmstadt, Feldman a remarqué que « la musique
est essentiellement construite sur des structures de mémoire primitive. L'auditeur commun ne sent
même pas qu'une pièce a une forme à moins que quelque chose revienne avec une certaine légère
variation: la forme ternaire - ABA, par exemple. »9 - une citation qui résume la critique au état de
la musique de son époque.

Pourtant, ce qui est moins évident et moins direct dans sa musique est l’influence - et
l’admiration - des tapis orientaux; Feldman lui-même explique, dans un entretien :

“ Dans les vieux tapis orientaux les colorants sont faits en petites quantités et donc ce qui se passe
est qu'il y a une imperfection à travers le tapis de couleurs changeantes de ces colorants. La plupart des
gens se sentent des imperfections. En fait, c'est la réfraction de la lumière sur ces petits lots de colorant
qui rend les tapis merveilleux. Je l'ai interprété comme être accordé ou et désaccordé. Il y a un nom pour
cela dans les tapis - il est appelé « abrash » - un changement de couleurs qui nous conduit vers les
morceaux comme « Instruments III » [1977] qui a été le début de mon idée de tapis.”10

9 Whiticker, Michael - « Morton Feldman: Conversation without Cage », entretien a Morton Feldman
dans les Courses d’Été de Darmstadt, 1984. Publié dans “Ossia: a journal of contemporary music
(Volume 1, Winter1989) » pages 6-9.
10 Williams, Jan - « An Interview with Morton Feldman » Percussive Notes, 1983 »: 4-14.

8
Ces imperfections sont reflétées en musique par un procès de « variation » sur un motif
ou groupe de notes, dans lequel la base motivique ne change pas mais, à cause des variations -
« imperfections » - la musique nous donne la sensation d’avancer, d’avoir un développement.

« En fait, j'essaie simplement de répéter le même accord. Je réitère le même accord dans les
inversions. »11

Ce procès de variation est plus présent dans les œuvres tardifs, comme Triadic Memories,
Palais de Mari ou Piano (exemple 3), dans lesquelles il essaye aussi de prolonger la sensation de
tempo, qui sera détaillé postérieurement.

3) "Piano", mesures 71 à 82: L'accord en rouge représente le un motif (Fa#-Sol-Lab) et l'accord en bleu en autre (Re#-
Mi-Fa). Ils vont être présentés dans différents dispositions jusqu'a l'arrivé d'un nouveau motif (marqué en jaune), que
sera il même le motif en variation les mesures après. Cette technique est présente pendant la plupart de la pièce, où
elle est plus évident de constater ici.

11 Feldman, Morton - « Essays », ed. W. Zimmermann (Cologne, 1985), page 230

9
En bref, les inspirations et admirations extra-musicales ont possibilité à Feldman de
découvrir un nouveau univers de possibilités sonores, en explorant et questionnant les éléments
musicaux, comme le Tempo, le Silence et, après, le Timbre.

Tempo

On peut soutenir que le Tempo – ou bien la conception « Feldmanesque » du Tempo - est


une des innovations que mieux caractérise cette musique. Soit dans ses œuvres courtes (ses
« Intermissions » durent environ 2 minutes) ou les longues (« For Bunita Marcus » dure 1 heure,
« Violin and String Quartet » 2 heures environ), l’objectif principale est de faire croire que le tempo
n’existe pas – ou de créer une nouvelle définition de Tempo. Dans un entretien du musicologue
Jean-Yves Bosseur en 1967, dans laquelle il demandait Feldman quel sens donnait-il au tempo
musicale, Feldman a répondu, après avoir rafraichi, « Je ne le comprends pas »12

Bien que, dans la généralité de son œuvre, la musique soit presque toujours lente,
contemplatif et calme, il y a néanmoins des façons très distinctes de l’écrire, de la faire sonner et
surtout de la faire entendre.

Malgré son écriture très spécifique au niveau de rythme, qu’on peut trouver dans presque
toute son œuvre, ce placement soigneux des notes et silences sert à donner à l’auditeur
l’impression qu’il n’y a pas de tempo. La partition et sa notation sont un guide pour le musicien,
pour qu’il puisse donner cette impression. Dans ses œuvres, il y a une grande diversité de notation
au niveau du tempo et même du rythme. Par exemple, dans For Bunita Marcus (exemple 4), le
tempo base (63-66 a la noire), les notes, les silences et les changements de mesure sont écrites
pour donner l’impression que le Tempo (la notion conventionnelle) n’existe pas.

12Feldman, Morton - “Écrits et paroles, prédecès d’une monographie par Jean-Yves Bosseur”, Paris
L’Harmattan, 1998, p.156.

10
4) A l’auditeur, l’impression sonore est d’une sensation visuelle : les notes existent dans l’espace et il faut attendre
calmement pour le prochain son, sans savoir ou pouvoir « calculer » quand il arrive.

Dans Intermission 6 (exemple 5), le Tempo est donné par la fin du son ; il faut attendre
que le son disparaisse pour sonner le prochain. Il faut aussi remarquer la notion spatiale de cette
pièce : la notation dans cette partition à une relation directe avec la peinture par la façon dont elle
est présentée : les fragments « éclaboussés » dans le papier, en rendant hommage aux peintures
qu’il admirait. Par ailleurs, la pièce peut être jouée par un ou deux pianos, que donne la possibilité
d’une perception plus spatiale de musique et aussi et aussi d’une plus grande liberté aux
interprètes - la spontanéité inspiré da la peinture, ici dans la performance musicale.

11
5) Seule page de "Intermission 6" - Aspect visuel de la musique/partition.

Le texte en bas de la partition dit: "Cette pièce commence par n'importe quel son
et procède a n'importe quel autre. Avec un minimum d'attaque, tenez chaque son jusqu'a
qu'il soit à peine audible. Les petites notes ne doivent pas être jouées trop rapidement.
Toutes les sons doivent être joués le plus piano possible. »

Après, on a aussi deux exemples dans lesquels seulement une vague indication
de tempo est donné, en laissent une certaine liberté a l’interprète - les deux premieres
pièces de Last Pieces (exemples 6 et 7).

12
6) Début de la première pièce de "Last Pieces" - Lent.

7) Début de la deuxième pièce de "Last Pieces" - Rapide.

C’est aussi intéressant de noter que cette deuxième pièce, avec l’indication de tempo
« Rapide » est donc une rareté dans l’œuvre de Feldman. Il a aussi écrit le cycle Nature Pieces
que, dans les pièces I, III et V, l’indication de Tempo (92 a la blanche) se traduit dans une sensation
de Tempo rapide, mais la deuxième pièce, comme aussi la quatrième, de Last Pieces sont vraiment
les seule pièces qui sont une indication d’un Tempo rapide. Cependant, comme Feldman écris
aussi que « les durations sont libres », l’indication d’un tempo rapide doit être interprèté comme un
moyen expressif pour donner plus de direction et pour contraster avec les pièces lentes.

Dans Triadic Memories (exemple 8), Feldman utilise deux triades (sol-sol#-ré + sib-la-do#)
qui vont être la base de toute la pièce. Dans seulement quelques petits variations - soit une triade
est inversé entre elle-même, soit dans l’autre triade - Feldman arrive a prolonger le discours
musical d’une œuvre qui a comme base deux triades jusqu’à une heure de musique ; cela donne
a l’auditeur une nouvelle experience de Tempo, une d’immobilité dans l’écoute et dans l’espace.

13
8)Début de "Triadic Memories". Les deux triades signalés dans l'image sont la base de toute le develeopment de la
pièce.

Pour finaliser, la pièce Projection 1 (1950) pour violoncelle solo (exemple 9) est inspiré par
la notion de projection du son dans l’espace de Edgar Varèse, et (retirar) elle nous montre une
exception au niveau du Tempo, par rapport a sa prodution musicales des années 50. Elle est écrite
dans une notation graphique « dans lequel [...] le temps est représenté par l'espace, et dans lequel
les boîtes espacées ne spécifient que l'instrument, le registre, le nombre de sons simultanés, le
mode de production et la durée »13. L’interprete « peut choisir n'importe quel son, désigné par haut,
milieu ou bas. La durée et le timbre sont donnés et le début est exact. La nuance est piano
partout. »14 Dans cette pièce, la spontaneité et improvisation musicale sont aussi présentes, bien
qu’elle laisse a l’interprète une semi-liberté de notes. C’est exactement les deux choses les plus
originales dans la musique de Feldman qui sont très objectifs et strictes - le tempo et le timbre. Ce
genre de écriture graphique est prèsente aussi, par exemple, dans les deux Intersections pour
piano, composées en 1951 et 1953 respectivement, et aussi dans l’œuvre The King of Denmark,
pour percussion, écrite plus tard, en1964.

13 Griffiths, Paul - «Modern Music and After: Directions Since 1945 (Oxford University Press, 1995)» page
37
14 Feldman, Morton - “Statement, dans l’article « 4 Musicians at Work », publié dans « Transformation:
Arts, Communication, Environment (Vol 1 No 3, 1952) pages 168-172

14
Dans cette mesure, cette note doit être
joué dans la fin de la mesure, dans le
registre central et en pizzicato

9)Début de Projection 1, pour violoncelle. Dans trois systèmes, le système en haut présente une indication pour jouer
des sons harmoniques (◊); dans le milieu en pizzicato (P), et en bas avec l’archet (A). Chaque carré est l’équivalent a
une mesure et, à l’intérieur, la position du petit carré détermine le registre de l’instrument.

Son et silence

En observant une page d’une pièce pour piano de Feldman, son aspect visuel est la
première chose étonnante ; en général, nous trouvons beaucoup de pauses et peu de notes. Donc,
on peut constater deux choses : le silence est une partie intégrale de l’œuvre (l’exemple le plus
extrême étant les « Variations » pour piano, de 1951 - figure 10), et les notes gagnent plus
d’individualité et, comme ça, d’importance.

Ces deux aspects sont liés par le fait que Feldman évite l'utilisation de la mélodie, pour
mieux écouter les notes elles-mêmes, au lieu d’une organisation de sons connectés et hiérarques.
Dans sa musique, de Intermissions et Last Pieces jusqu’à For Bunita Marcus ou Palais de Mari,
Morton Feldman utilise soit des notes/accords isolés, soit des petits motifs. Aussi, son critère pour
les choix des notes est aussi curieux ; les notes ont presque toujours les intervalles de seconde
mineur et de quarte augmenté entre elles, car ce sont les intervalles plus dissonants et
mélodiquement moins naturelles. Cela est évidement présent dans Piano Piece 1952 (figure 11).
Comme Feldman a dit dans une conférence à Toronto, Canada, 1982 : « J'ai vécu avec la seconde
mineure toute ma vie et j'ai finalement trouvé un moyen de le gérer »

15
10) Extrait de « Variations » - Dans cette pièce, les premières notes apparaissent seulement dans la 2e variation – ils
sont variations sur le silence et pas sur les notes. Aussi, toutes les notes sont « connectées » pour une seconde mineur
a autre note : do-do#-ré et sol-sol# dans le 1re accord, et do-do#-ré-mib dans le troisième accord. Dans la deuxième
intervention (c.23) la relation est de seconde majeur mais au même temps le do en haut est la seule note en comun
dans les trois accords, et ça peut remmetre au genre de cette piece – Variations.

11) Début de "Piano Piece 1952" – Dans cette pièce, toutes les notes ont une relation de seconde mineur

ou de quarte augmenté avec autre notre en proximité. Les intervalles de 2e sont marqués on bleu et les 4es

16
marqués on rouge. C’est important de remarquer aussi que la dynamique et le tempo ne change pas
pendant toute la pièce – lent et piano.

Cette usage particulière et fréquente des secondes mineurs et quarte augmentées comme
relation entre les notes donne aussi une intégralité formelle, car même s’il y a des autres plans
musicaux qui changent, comme la texture, le registre de l’instrument ou le tempo, la sonorité
générale reste, au fond, toujours pareil. Cependant, en tenant compte le période de sa vie dont
Feldman a écrit cette pièce, c’est inhabituel qu’il ne se trouve pas un moment de silence ; il peut
éventuellement se considérer que c’est une pièce d’expérimentation pour les grandes œuvres des
années 70 comme « For Bunita Marcus » ou « Triadic Memories », dans lesquels le silence absolu
arrive de moins en moins, étant remplacé par la réverbération de la pédale.

Il se trouve un équilibre plus habituel dans le son et le silence dans la première pièce de
« Nature Pieces » (figures12 à 15), plus commun dans le Feldman des années 50. Ici, le « silence
est son contrepoint », dans le sens qu’il fait partie de la forme et du discours de la pièce. Elle
commence avec beaucoup de notes, en suite elle aura progressivement de plus en plus silences,
qui interrompent les petites arabesques entre la main gauche et droite jusqu’à la fin, et on arrivera
à trouver plus de silences que de notes.

12) Systèmes 1 et 2 - Quelques instants de silence.

17
13)Système 9 - Plus de silences, aussi par le fait que le motif ascendant et descendant du début est maintenant
fragmenté.

14) Systèmes 14 et 15 - Il commence à apparaitre des valeurs plus longues comme les blanches (qui indiquent plus
d'immobilité) et encore plus de silences.

15) Systèmes 21, 22 et 23 - Il arrive à la fin avec une énormité de silences contre une seule réminiscence des arabesques
du début.

Dans cette pièce, il se trouve aussi, sauf quelques exceptions, le même emploi des
intervalles de seconde mineur et quarte augmentée que dans la Piano Piece 1952 ; il est,
cependant, moins évident car ici le foyer principal est le dialogue entre le son (les motifs ascendants
et descendants) et le silence. L’exploration du silence lui donne une force expressive qui, en outre,
donne plus d’importance au son, quand il arrive après. C’est donc un vrai « contrepoint », dont

18
deux éléments existent, Son et Silence, et la propre façon selon laquelle ils sont écris sert pour
mettre en valeur l’autre.

La musique de Morton Feldman reste donc très riche et très subtile, car toutes les éléments
- principalement le traitement du tempo et la relation son-silence - sont fondamentales dans un
plan individuel (son expressivité) et globale (la forme de l‘œuvre et la relation entre les autres
éléments). Cependant, la grande force expressive et unique est donnée par l’exploration du timbre,
et la façon dont il va se lier aux autres éléments - cette exploration constante va devenir l’élément
intégrale de l’œuvre, l’élément qui lui donne l’intégralité.

3. Le Timbre ; son exploration et relation avec les autres paramètres musicaux

Utilisation feldmanesque du Timbre

Dès le début de sa création musicale, le timbre a été un élément primordial dans les
compositions de Morton Feldman. Si les notes sont ses couleurs, le timbre est sa « tonalité », c’est
la façon d’attribuer à une note une intention ou expression musicale différente. Son fascine pour le
timbre l’a conduit à écrire beaucoup d’œuvres pour instrumentations peu conventionnelles, comme
Intervals (Barytone basse, Trombone, Percussion, Vibraphone et Violoncelle), For Franz Kline
(Soprano, Cor, Carillon, Piano, Violon et Violoncelle) ou Routine Investigations (Hautbois,
Trompette, Piano, Alto, Violoncelle et Contrebasse). Dans ce type d’œuvres, l’exploration timbrique
est plus directe et compréhensive pour l’auditeur, car Feldman utilise des instruments très
différents et il profite soit de ses alternances et dialogues (par exemple le début de De Kooning,
de 1963 ; figure 16) soit de ses sonorités ensemble, dans une fusion de timbres (Durations 1, de
1960, figure 17). Sa poursuite incessante pour le Timbre idéal, bien que la meilleure façon de

19
l’exprimer dans une partition sont une constante dans sa création musicale ; ceci est confirmé par
les mots de Michael Tilson Thomas, à l’occasion de plusieurs rencontres avec Morton Feldman :

« Il s'asseyait au piano, la grande page de partitions orchestrales s'étalait devant lui et frappait
très tranquillement un accord « jazzy » post-weberniste. « Écoute ça, » disait-il. « Flûte traversière, flûte
alto, petite clarinette, seconde corne avec sourdine, trombone alto, pas de sourdine, trois violons
ponticello, harmoniques de basse ... Quel son ... Maintenant, je vais l'écrire à nouveau. Un 3 / 8.
Maintenant je suis en attente, à l’écoute de ce qui devrait venir ensuite. Puis je le trouve, rouleau de
tambour et maracas pianissimo. »15

Cette exploration timbrique est liée à une volonté expressive et musicale, au désir d’avoir
un son ou ensemble sonore spécifique, indépendant des autres, mais néanmoins inséré dans la
globalité de la pièce. Comme dans les peintures de l’Expressionisme Abstract, les couleurs existent
naturellement, libres, et cette libération donne leur expressivité ; cependant la relation entre eux
nous montre l’intégralité expressive de l’œuvre.

16) Début de "De Kooning", pièce d'hommage au peintre Willem de Kooning.

15Tilson Thomas, Michael - « Morton Feldman : An Appreciation », dans les notes de programme du
ARGO CD 448 513-2.

20
17) Extrait de « Durations 1 ».

Dans De Kooning, bien que dans autres pièces pour musique de chambre ou orchestre,
Feldman explore une idée provenant de la Seconde École de Vienne, plus concrètement Anton
Webern – la « Klangfarbenmelodie », ou mélodie de timbres – qui consiste à diviser une mélodie
par divers instruments, pour faire ressortir plus l’élément de timbre. Même si Feldman refuse le
concept de mélodie, la technique d´écrire une phrase musicale avec plusieurs instruments lui
donne la beaucoup plus de possibilités à cet égard. Le fait de diviser les sons pour différents
instruments donne l’impression d’une seule phrase qui change de timbre au même temps qu’elle
change de note. Feldman lui-même n’a jamais considéré son emploi de cette idée une « évolution »
de la mélodie de timbres de la Seconde École de Vienne, il reste sans doute une influence au
niveau d’ambiance sonore et de texture musicale. Comme disait Alex Ross, critique musicale, « Ce
que Feldman a fait, était de ralentir le rythme des événements dans l'univers Schoenbergien.
Schoenberg était avant tout un homme impatient, qui devait continuer à se précipiter vers la
nouvelle combinaison de sons nouveaux. Feldman était patient. Il a laissé chaque accord dire ce
qu'il avait à dire. Il respirait. »16

16Ross, Alex - “American Sublime: Morton Feldman’s mysterious musical landscapes”, publié dans le
jornal “The Newyorker”, 19 Juin 2006

21
Après, il faut aussi remarquer un autre traitement du Timbre, celle de la fusion de timbres
entre les instruments. Dans une pièce comme Violin and Orchestra (figure 18), ou dans beaucoup
d’autres pièces chez Feldman, le simple fait d’avoir une harmonie - une combinaison de sons -
affecte le Timbre générale, la texture sonore que l’auditeur entend avant de pouvoir identifier les
instruments individuellement. Dans les mots de Feldman :

« ... en ce qui concerne mes sons et ma base harmonique, je me demande à quel point je veux
même l'appeler harmonie. Beaucoup de ça est liée aux voix, beaucoup de décisions architecturales
constantes ... Je pense que c'est juste une question de coloration ou d'orchestration. Je ne les vois pas
[les accords] comme une harmonie. Parfois, pour colorer un ton, vous devez avoir beaucoup plus d'un
complexe. Je peins vraiment, mais je ne peins pas avec un langage harmonique. »17

La pensée harmonique reste, dans une grande partie de son œuvre, dans la construction
d’accords avec des secondes mineurs et quarte augmentées ; Feldman va être plus attentif à sa
distribution pour les divers instruments et, dans les instruments harmoniques comme le piano, la
distribution dans les différents registres de l’instrument.

17DeLio, Thomas - « The music of Morton Feldman », Excelsior Music Publishing Library, New York, page
110

22
18) Extrait de "Violin and Orchestra". La texture harmonique reste très verticale, avec une relation évidente de seconde
mineurs et quarte augmentées entre les notes.

Il est aussi possible de trouver un équilibre entre ce qui est une pièce plus harmonique et
une pièce plus mélodique : dans Piano and String Quartet (figure 19), bien que le piano donne une
verticalité harmonique, l'alternance entre les instruments à cordes (ils jouent rarement ensemble
pendant toute la pièce) donne une variété au niveau du Timbre.

23
19) Début de "Piano and String Quartet".

Un autre aspect important dans la musique de Feldman qui est liée au Timbre se trouve
dans la partition de Durations 1 (mentionné plus haut), dont Frank Sani appelle un « asynchronous
temporal process » (Processus temporel asynchrone).

Dans Durations 1, pour Flute Alto, Piano, Violon e Violoncelle, les durations sont libres
pour chaque instrument : ça veut forcément dire que, malgré l’écriture de Feldman soit verticale,
les sons ne vont pas sonner comme accords. Cependant, ce qui se passe auditivement c’est que
l’auditeur entend un « cluster » sonore, dans lequel une note change, puis autre, puis autre, jusqu’à
arriver à un accord complètement diffèrent. Dans un point de vue timbrique, ce processus donne
l’illusion que le timbre des instruments fait une fusion complète vers un cluster, et que la musique
ne sort pas de ce cluster que très lentement, comme si les instruments pourraient créer un nouveau
timbre eux-mêmes, en jouant ensemble. Ce type de cluster peut comme ça être considéré comme
un type d’exploration du Timbre.

Ces types de traitement timbrique sont fréquents dans toute l’œuvre de Feldman mais la
manière d’écrire et l’intention sonore finale est toujours différente d’une instrumentation à l’autre.
Plus notamment dans ses œuvres pour piano, Feldman va explorer tout un monde de sonorités et
de façons différentes d’exprimer un son et un timbre.

24
Musique pour piano - exploration du timbre et de la notation

Un des aspects plus explorés de la musique pour piano est la possibilité de donner une
variété de timbre, textures et nuances tel que l’instrument se puisse sembler à un autre instrument
ou ensemble, comme un quatuor à cordes ou même à un orchestre. Ce type d’exploration de
l’usage du timbre peut être parfois implicite dans la musique (figure 20, dans la Sonate op.31 no.2
de L.v. Beethoven), ou avoir une notation précise et directe, comme dans certains œuvres de Liszt
ou Alkan (figures 21 et 22). Ce type d’approche de l’écriture pianistique est beaucoup utilisé par
les compositeurs du XXème siècle, notamment Debussy (inspiré par Liszt) dans une écriture avec
des superpositions de plans et textures différents.

20) Extrait du deuxième mouvement de la sonate op.31 no.2, dite "La Tempête", de L.v :Beethoven. Il se peut imaginer
que les triolets de la main gauche sont un accompagnement semblable à des timbales distantes (dans la connotation
orageuse de cette sonate, avec une « couleur » /timbre différente de la mélodie de la main droite.

25
21) Extrait de l'étude de concert "Un Sospiro" de F. Liszt. Liszt écrit spécifiquement l'intention de faire sonner les
arpèges comme une harpe, qui leur donne un timbre différent.

22) Extrait de l'étude op.39 no.8 de C.V. Alkan, dont il écris dans le début "Quasi-celli", pour imiter le timbre des
violoncelles.

Cette superposition de plans et textures va être de plus en plus fréquent après Liszt,
comme façon de donner plus de variété sonore au piano. Si un compositeur écrit pour le piano
d’une manière qui fait ressembler un orchestre - du point de vue des couleurs et atmosphères
musicales - il est donc naturel que son style et ses habitudes d’écriture orchestrale se reflètent
dans les œuvres pour piano. Tel est le cas pour beaucoup de compositeurs de périodes différents,
comme Beethoven, Liszt, Debussy ou Bartók.

On peut donc penser à la musique pour piano de Morton Feldman comme un reflet de son
écriture orchestrale et de musique de chambre. Cela ne veut pas dire que sa musique n’est pas
pianistique ou que piano ne sert qu’un moyen facile de « imiter » un orchestre ; en tenant compte
son intérêt pour le Timbre et pour les textures musicales, il est facile d’imaginer une grande variété
timbrique/sonore dans sa musique. La difficulté dans Feldman est que sa musique peut paraitre,

26
initialement, pareille et uniforme ; donc il est moins facile d’identifier quel type de timbre il veut.
Comme ses partitions n’ont pas beaucoup de annotations musicales, il faut regarder
soigneusement et trouver les subtilités qui nous conduisent à un nouveau timbre.

Il peut se faire un parallélisme direct avec les œuvres pour ensemble et pour piano : par exemple,
dans De Kooning et Durations 1 (pièces déjà présentées dans les figures 16 et 17), Feldman a
exploré, respectivement, la « mélodie de timbres » et le « processus temporel asynchrone » ; une
écriture similaire est présente dans Piano Piece 1952 et Last Pieces (pièces aussi déjà présentées,
figures 2 et 11). Piano Piece 1952 nous montre un changement constant de registre, comme De
Kooning, qui peut remettre à des timbres différents. Last Pieces, plus notamment la quatrième
(figure 23), dont Feldman écrit qui « les durations sont libres pour chaque main », font croire qu’il
y a vraiment deux instruments différents, car les mains sont totalement indépendantes, comme
Durations 1.

23) Début de la quatrième pièce de "Last Pieces".

Après, dans quelques œuvres des années 50, comme Intermission 4 (figure 24), l’écriture
est très claire du point de vue rythmique et de registre de l’instrument, donc, comme tout aspect
mélodique est d’abord évité, il peut presque s’imaginer que chaque note correspond à un timbre
différent.

27
24) Seule page de « Intermission 4 ».

Dans les systèmes 1 et 3, Feldman introduise des valeurs rythmiques différents pour
chaque note - croches, noires, blanches, rondes - et fait aussi une différenciation de registre entre
elles, qui leur donne une individualité musicale et timbrique et qui élimine quelque intention
mélodique. Dans les systèmes 2 et 4, il explore juste les croches et surtout le silence entre eux - il
y existe beaucoup plus de silences.

Bien que, dans une interprétation, le Tempo ne doit être stricte et précis, le fait d’avoir
toujours une notation différente pour chaque son fait que l’interprète imagine naturellement des
sonorités différentes aussi.

D’une façon générale, il pourrait se considérer que chaque figure rythmique correspond à
un Timbre, à cause de la façon dont les notes sont placées, avec le contraste de registre. Comme
ça, les croches auraient le même timbre, qui donnerait une intégrité à l’œuvre : dans deux systèmes

28
(1 et 3), Feldman explore des timbres différents constamment, et dans les autres (2 et 4), Feldman
fait une pause et utilise juste le timbre attribué aux croches, pour explorer plus le silence.

Cet usage du rythme pour faire allusion à un timbre peut arriver aussi de différentes façons,
la plus intéressante étant l’usage de la pédale. Dans Intermission 5 ou For Bunita Marcus (figures
25 et 26), on peut constater que, malgré l’utilisation de la pédale pendant toute une section (ou
même toute la pièce), Feldman choisit d’écrire une notation rythmique différente pour chaque note.
Le silence n’est pas un vrai silence, il est la réverbération du son précédant, et comme la pédale
est constante, on ne peut distinguer, par exemple, une noire et une pause de noire d’une blanche.
Comme dans Intermission 4, la notation fait qu’un nouveau Timbre soit implicite.

25) Début de "Intermission 5", dont il faut garder la pédale et la sourdine jusqu’à la fin de la pièce.

25b) Mesures 15 à 18. Dans cet extrait, il n'est pas possible de faire une distiction entre la dernière croche de la mesure
13, la double-croche de la mesure 15, ou la petite note après. La distiction doit être faite musicalement.

26) Début de "For Bunita Marcus". La pédale rend imperceptible la distinction entre la continuation du son et du
silence.

Encore dans For Bunita Marcus, il est intéressant de regarder la distribution des notes par
les mains, une autre particularité de son écriture pianistique - le simple fait de jouer une note avec
29
une main ou autre à des résultats sonores différentes. Le début de cette pièce pouvait facilement
être joué avec une seule main, mais le fait d’utiliser les deux indique une nouvelle couleur ; par
exemple, dans la première mesure, les deux do# vont avoir naturellement un timbre distinct, car
l’écriture fait sembler deux voix différentes.

Cette distribution inhabituelle se trouve aussi dans plusieurs pièces, comme par exemple
Piano Piece 1955 (figures 27 et 28), dont Feldman choisit d’utiliser la main gauche dans un registre
non conventionnel - plus habituel dans la main droite - pour effectivement donner une variété au
jeu pianistique.

27 et 28) Mesures 7 et 25 de "Piano Piece 1955".

La grande différence entre ce type de notation (distribution non conventionnelle des mains)
relativement à celles vu précédemment est que, dans ce cas, un changement de timbre existe
naturellement, avec ou sans conscience de l’interprète. Dans les cas dont le rythme est associé à
un timbre, la pièce demande un regard attentif du musicien, pour montrer à l’auditeur toutes les
subtilités ; ici, le Timbre n’est qu’une conséquence inévitable de la façon dont la pièce est écrite.

Indirectement lié au Timbre, il se trouve quelques œuvres de Feldman quelques pistes


subtiles d’une organisation formelle, qui a un impact sur tous les paramètres musicaux.

Même si Feldman évite les contours mélodiques, ou encore plus les systèmes de notation,
dans son processus de « création spontanée » on peut trouver une incontournable organisation
d’un discours musicale. En prenant encore une fois la partition de For Bunita Marcus, il est visible
dans un premier regard que Feldman n’utilise que trois notes dans le début de la pièce - Dó#, Re,
Mib. Après 70 mesures, il va utiliser trois autres notes - Re#, Mi, Fa. Dès maintenant, le fait d’avoir
un Ré# (« réécrire » le Mib en enharmonie) montre que Feldman veut introduire trois nouvelles
timbres/sons au discours musicale. Dans la mesure 93 introduise encore 3 notes en plus - Solb,

30
Sol, Lab. Mesures 98 introduisent Si et Do, et la mesure 136 le La#. Il est nécessaire d’arriver à la
mesure 161 pour finalement avoir un La et finaliser la gamme chromatique de cette pièce. Cela
nous montre que, au-delà de la musique avoir une abondance chromatique, chaque étape de cette
construction était bien pensée et bien établie : les notes différentes apparaissent de plus en plus
souvent sans aucune préparation musicale, comme nuances ou articulation. Ce type d’écriture fait
que, chaque fois qu’une nouvelle note arrive, elle a forcément un Timbre et une intention musicale
individuelle et unique ; l’usage intelligent de la répétition fait que la plus simple addition d’une note
soit un phénomène musical avec une grande intensité. Cela est valable pour l’addition des notes,
l’usage de notes au même temps (mesures 101 et 166 - deux notes et trois notes ensemble pour
la première fois, respectivement), valeurs rythmiques ; retarder le plus possible les éléments
musicaux les rendent plus spécieux et donne un vrai développement de l’œuvre.

En bref, For Bunita Marcus reste comme une des œuvres plus importantes pour piano de
Morton Feldman, car tous ses caractéristiques en tant que compositeur se trouvent dans la pièce,
soit très visibles soit très subtiles.

Pianistiquement, dans la généralité de cette musique, c’est important d’avoir une grande
variété d’attaques dans le piano - plus proche ou loin du clavier, quelle partie du doigt, quel doigt
utiliser - pour pouvoir donner toujours une intention musicale différent à chaque son. Néanmoins,
il est nécessaire d’avoir une sensibilité au niveau de l’écoute pour y arriver, de savoir quelle
intention musicale vouloir et puis la transmettre en forme de son. Feldman lui-même parlait du
toucher dans le piano et de son admiration, en particulier de sa professeure de piano, Madame
Maurina Press, qui Feldman a commémoré dans la pièce Madame Press Died Last Week at
Ninety :

« Si vous avez une sensation, une sensation tactile pour l'instrument, ce que vous pouvez faire
avec juste un doigt - quelque chose que j'ai appris de ma professeure ... la façon dont elle posée son doigt,
d'une manière russe, avec juste le doigt - la vivacité du doigt - et de produire un si bémol, et vous vouliez
juste s'évanouir. »18

18 Feldman, Morton - Conférence dans les courses de Darmstadt, 1984

31
Morton Feldman considère le piano un instrument très complet, versatile, avec des
possibilités interminables de timbres, couleurs et sons.

« Au lieu du concept dodécaphonique, je m’implique dans la totalité des 88 notes. J’ai là un


grande, grande univers. »19

Chaque note à des nombreuses possibilités de timbre, d’intensité, d’articulation ; et au


même temps il y a des nombreuses combinaisons de notes, de registres, de nuances. Soit dans
des pièces courtes comme Intermissions ou Last Pieces, ou des grandes cathédrales sonores
comme Piano ou For Bunita Marcus, le monde musical de Morton Feldman se trouve un monde
dont tant l’interprète comme l’auditeur se perdent dans son propre écoute, en pleine contemplation
et admiration du son.

4. Conclusion/Réflexion – La difficulté de vouloir écouter Feldman

Après cette exploration de la musique de Morton Feldman, il est visible qu’il se parle d’un
des compositeurs les plus originaux et innovateurs du XX. Siècle. C’est donc à partir de cette idée
qu’il faut comprendre pourquoi sa musique ne se joue pas - ou au moins, très peu de fois en
concert.

Dans le contexte de la production musicale du XXIe siècle - c’est-à-dire l’organisation des


salles de concert, les écoles de musique, les concours, etc. - il y a deux « principes » qui
indirectement rendent plus difficile la diffusion de cette musique.

Le premier est plus générale et peut se lier à une grande partie de la musique après 1950
jusqu’à aujourd’hui. En bref, comme il est plus facile d’enseigner/écouter les musiciens en
comparaison uns avec les autres, on se trouve dans un système dont nous jouons pratiquement
que la musique de Bach à Debussy, sauf quelques exceptions un peu avant ou après.
Spécifiquement dans le piano, il est facile de constater ça en regardant le programme imposé d’un
des concours plus prestigieux, le Concours Tchaïkovski à Moscou. Ils demandent, dans le premier

19 Feldman, Morton - Extrait denotes redigés par Steven Bruns, 2016

32
tour, œuvres de Bach (prélude et fugue), études de Chopin, Liszt, Rachmaninoff et une sonate
classique. C’est presque juste dans la première partie du deuxième tour que l’interprète à une
liberté de choix… sauf que là il doit choisir au moins une pièce d’une liste de compositeurs russes.
Dans la finale du concours, il peut se choisir n’importe quel concerto, mais seulement après avoir
joué un des Concertos de Tchaïkovski.

Je me demande donc quelle était le problème de jouer une étude de Ligeti dans le premier
tour, ou un Prélude et Fugue de Chostakovitch ? Ou même des œuvres d’Anton Webern, Aaron
Copland, Olivier Messiaen, ou des contemporains comme Pascal Dusapin ou Krzysztof
Penderecki.

Pour avoir un parcours professionnel comme soliste il est - malheureusement - presque


toujours nécessaire de se présenter à ces concours qui enlèvent la possibilité aux musiciens
d’explorer toute la musique qui se fait aujourd’hui, ou au moins, d’après 1950. Car il est plus facile
d’écouter un candidat qui joue le 1e concerto de Chopin qu’un autre qui joue le Concerto de
Lutoslawski ; ce n’est pas à cause de la musique en soit, c’est à cause d’une nécessité de faire
une comparaison constante par tout, une chose complétement antiartistique. Dans ce contexte, la
musique de beaucoup de compositeurs se perd, et, entre eux, celle de Morton Feldman.

Le deuxième principe c’est la surestimation de l’interprète au lieu de la musique. C’est-à-


dire, aujourd’hui il est plus important de regarder la Berliner Philarmoniker que la musique/le
programme en soit. Cette volonté d’écouter les bons musiciens plutôt que la bonne musique fait
que l’auditeur (et l’industrie de la musique classique) donne plus d’importance à des aspects plus
superficiels du monde musical comme l’apparence physique, ou la virtuosité et sécurité technique
dans l’instrument, qui ne devrait être qu’un moyen pour faire de la musique, et non pas de faire de
la musique pour obtenir la virtuosité. Chez Feldman, on trouve exactement le contraire ; une
musique confortable d’un point de vue de vélocité et dextérité, et une musique qui veut éliminer les
attentions vers les sons, et non pas vers les musiciens.

Comme ça, cette musique à des difficultés à s’insérer dans l’industrie musicale, car la
généralité du public cherche un musicien qui donne de la « spectacularité », avec charisme, et
plusieurs caractéristiques qui n’ont rien à voir avec la musique.

Il faut être prêt (et parfois courageux) pour entrer dans ce monde sonore, pour se laisser
emporter par les sons et les silences sans aucune attente, soit des musiciens, soit de la musique.

33
Comme la musique de Morton Feldman est très particulière, il faut peut-être l’investiguer avant de
l’écouter mais, en gros, on doit laisser toutes les vanités extra musicales et se concentrer dans la
musique pure et son essence.

5 - Biographie - João de Almeida

Lauréat de plusieurs concours au niveau national et international, João Casimiro Almeida,


a 22 ans, a déjà une vaste expérience musicale, en se produisant régulièrement en tant que soliste.
Ayant commencé ses études musicales à l'âge de 11 ans, il a joué dans les plus importantes salles
de concert du Portugal comme le Teatro Rivoli et la Casa da Música - à Porto - et le Centro Cultural
de Belém- à Lisbonne - dans récitals solo dans le Teatro Cinema, à Fafe, et la Sociedade Martins
Sarmento, à Guimarães et aussi dans l’étranger, comme dans l’auditorium Martin Codax, à Vigo
ou la Ehrbar Saal à Vienne. Il a été invité à participer à divers festivals tels que le festival « 1001
Músicos » au Centro Cultural de Belém, « PianoPorto » à Porto, dans le 2ème festival du EPTA
Portugal également à Porto, et le Festival International de Tarnow Piano, Pologne (à partir de Août
2017).

Au cours de son parcours musical, il a eu l'occasion de travailler avec des pianistes de


renom tels que Guigla Katsarava, Joaquín Soriano, Luís Pipa, Leon McCawley, Prisca Benoit, Sofia
Lourenço, Vincent Larderet, William Fong, entre autres. Il a reçu des conseils de Krystian
Tkaczewski, Tatiana Vetrinskaya et Yuri Didenko.

Passionné par la musique de chambre, João a joué dans diverses formations et dès 2016
est le pianiste du Trio Risoluto - avec clarinette e violoncelle - qui se produit régulièrement en
récitals ou masterclasses. Il a eu l’occasion de travailler avec plusieurs musiciens comme António
Saiote, Antonio Salguero, Barbara Francke, Filipe Quaresma, Giammarco Casani, Maria
Belooussova, Nuno Pinto, Ryszard Woycicki, ou Susanne Van Els.

Après avoir obtenu sa licence en Performance de Piano dans la ESMAE, à Porto, dans la
classe de la professeure Madalena Soveral, João achève le 2ème cycle supérieur en Piano au
Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, dans la classe de Michel
Dalberto et Claire-Marie Le Guay.

34
6 - Bibliographie
- BELHOMME, Guillaume, Morton Feldman: For Bunita Marcus, Marseille, Le Mot et le Reste,
2008.

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- EGLI, Urs, “Les souffrances d'un interprète (sérieux): Triadic memories (1981) de Morton
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- ENDER, Daniel, "Zu einem frühen Klavierzyklus von Morton Feldman.", Österreichische
Musikzeitschrift, 56, no. 11-12, November-December 2001, p. 8-41.
- FELDMAN, Morton - « Écrits et paroles, précédés d’une monographie par Jean-Yves Bosseur
»,
- FELDMAN, Morton - «Give my Regards to Eighth Street (Exact Change) », Paperback, 2 mars,
2004
- FRANKE, Daniel, "Analytische Contemplation des Feldmanschen Klavierstückes For Bunita
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- GAREAU, Philip, La musique de Morton Feldman ou le temps en liberté, Paris, L'Harmattan,
2006.
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- GRIFFITHS, Paul - « Modern Music and After: Directions Since 1945 » (Oxford University
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- GUILLOT, Matthieu, « Poétique sonore de Morton Feldman: Lenteur, douceur et fragilité (sur
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- HEINTZE, James R. - « Perspectives on American Music Since 1950 », Garland Publishing Inc,
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- JURKOWSKI, Edward, « Harmonic and formal coherence in Morton Feldman's late music »,
in : Costas Tsougras, Danae Stefanou and Kostas Chardas (éd.), Beyond the Centres :
Musical avant gardes since 1950. In memoriam Yannis Andreou Papaioannou (1910 - 1989),
Thessalonique, 1-5 juillet 2010,
- KRÄMER, Oliver, "'Hold each sound until barely audible': Morton Feldmans Klavierstück
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Musikpädagogik, no. 2 (January 1, 1999): 99-104.
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Tilbury und Steffen Schleiermacher." Positionen: Beiträge Zur Neuen Musik, no. 53, November
2002, p. 34-39.
- NYMAN, Michael - « Experimental Music: Cage and Beyond» (New York: Schirmer Books,
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- ROSS, Alex - “American Sublime: Morton Feldman’s mysterious musical landscapes”, The
Newyorker, 19 juin 2006
- SAXER, Marion, Morton Feldman: Between categories—Studien zum Komponieren Morton
Feldmans von 1951-1977, Saarbrücken: Pfau Verlag, 1998.
- TZOTZKOVA, Victoria, "Exploring real-time sonic adjustments in the performance of notated
music: Morton Feldman, space acoustics, and the variable timbres of piano sound.",
International Symposium on Performance Science, University of Toronto, Toronto, Canada,
August 2011.
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270, Octobre 2014, p. 7-14.
- WILLIAMS, Jan - « An Interview with Morton Feldman», Percussive Notes, 1983

36
Résumé

(Français)

Morton Feldman est très singulier et original dans sa musique et dans sa vision des
instruments et le traitement du son. Très influencé par l’Expressionisme Abstract dans la Peinture,
il imaginait une musique qui n’était pas retenue par les systèmes de composition - en contraste
avec le sérialisme - et aussi une musique avec des nouvelles textures et sonorités, tout un
ensemble de combinaisons sonores qui lui ont permet d’écrire des œuvres très riches dans un plan
d’instrumentation. Tout cela à forcément une répercussion dans sa musique pour piano, que dans
un premier regard peut paraitre vide, mais qu’après se transforme dans un monde de sons et
timbres sans pareil.

Dans ce travail, je commencerai avec une introduction du contexte de la création musicale


du XXème siècle, puis je parlerai des aspects principaux de la musique de Feldman, pour donner
une base pour parler de l’importance du timbre dans la musique de chambre, orchestrale, mais
principalement dans la musique pour Piano. En observant extraits de plusieurs pièces de Feldman,
dès le début de sa création musicale jusqu’à les œuvres tardifs, je parlerai aussi de l’évolution de
son écriture, de sa vision de la musique, et des changements de façons d’exprimer ses pensées.

Après, il aura une conclusion qui parle de la présence/absence de la musique de Morton


Feldman à nos jours, de l’industrie du monde de la musique, que sera lié à une manque de
popularité et de connaissance de sa musique.

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(English)

Morton Feldman is very singular and original in his music and in his vision of the musical
instruments and sound. Influenced by the Abstract Expressionism in Painting, he imagined a music
that was not restrained by compositional systems - in contrast to serialism - and also a music with
new textures and sounds, a whole set of sound combinations which allowed him to write very rich
works in the point of view of instrumentation. All this had inevitably a repercussion in his piano
music, which may, at first glance, seem empty, but afterwards is transformed in a world of sounds
and tone colours (timbre) without equal.

In this essay, I will begin with an introduction to the context of 20th century musical creation,
which will then lead to the main aspects of Feldman's music, to provide a basis for talking about
the importance of timbre in chamber music, orchestral music, but mainly in music for Piano. By
observing excerpts from several of Feldman's works, from the beginning of his musical creation to
the late works, I will also discuss the evolution of his writing, his vision of music, and changes in
ways of expressing his thoughts.

Afterwards, the essay will have a conclusion talking about of the presence/absence of
Morton Feldman's music in our days, of the music industry, that will be linked to a lack of popularity
and knowledge of his music.

Mots-clés

Français: Morton, Feldman, Musique, Piano, Analyse, Vingtième, Siècle, Moderne,


Expérimentale, Timbre, Notation, Silence, Tempo, Expressionisme, Abstracte, Peinture,
Americain, New York.

English: Morton, Feldman, Music, Piano, Analysis, Twentieth, Century, Modern,


Experimental, Timbre, Tone, Notation, Silence, Tempo, Expressionism, Abstract, Painting,
American, New York.

João Casimiro DE ALMEIDA

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