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1.1.

Les particularités du FLE


Nastasja Caneve : Maintenant que nous nous sommes entendus sur quelques termes et
concepts-clés, est-ce que vous pourriez répondre à cette question banale : qu’est-ce qui est
particulier à l’enseignement du français langue étrangère, le français en l’occurrence par
rapport à̀ d’autres enseignements ?

Jean-Marc Defays : La question n’est pas banale, vous en venez directement au cœur du
sujet, bravo ! Au-delà̀ de la multitude des situations d’enseignement/apprentissage d’une
langue et d’une culture étrangères, on peut effectivement se demander s’il existe quelques
principes de base qui caractériseraient cet enseignement/apprentissage. Je vais insister sur 4
d’entre eux :

1. Tout d’abord, par définition, le cours de langue étrangère implique au moins deux langues
et, ne l’oublions pas, au moins deux cultures différentes. Même si seule la langue-cible est
utilisée en classe, la langue maternelle des apprenants ou d’autres langues qu’ils connaissent
sont toujours présentes à leur esprit et interfèrent avec la langue qu’on leur apprend. On sait
maintenant qu’il n’est pas possible de remplacer simplement une langue et une culture par
une autre, mais qu’il faut toujours les combiner dans la démarche pédagogique. Apprendre
une langue et une culture étrangères oblige donc à̀ mettre en perspective sa propre langue et
sa propre culture, donc son identité́ ; en parlant différemment, on peut aussi être amené́ à
penser et à vivre un peu différemment. Il ne s’agit donc pas seulement d’acquérir de nouvelles
connaissances ou compétences, ni une fois qu’elles sont acquises, de savoir les utiliser à bon
escient, mais aussi de développer l’empathie, l’autocritique, le dialogue.

2. Depuis que l’enseignement des langues ne visent pas seulement la connaissance théorique
de ces langues, appelées « métalinguistiques », mais prioritairement leur pratique,
précisément « linguistique » , il a cette particularité́ que son objet et son instrument ne font
qu’un. On enseigne le français en français, le russe en russe, l’allemand en allemand, ce qui
est un défi avec les débutants avec lesquels il faut malgré́ tout parvenir à̀ communiquer. Nous
y reviendrons bien sûr.

3. Les méthodes contemporaines réclament aussi une participation active des apprenants car
on estime que ce n’est que par la motivation, la communication, les initiatives, l’expérience,
que l’on peut apprendre une langue et une culture étrangères. Et cette démarche réclame

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forcement des interactions plus intenses et ouvertes avec l’enseignant et les autres
apprenants du groupe.

L’apprentissage d’une langue étrangère n’engage pas seulement l’activité́ cognitive,


l’intellect de l’apprenant, mais mobilise toute sa personnalité́ : la sociabilisassions (la
participation, l’intégration, l’ouverture, la tolérance) ; le psychoaffectif (l’émotion,
l’imagination, la confiance en soi, la curiosité́, l’esprit ludique) ; le physique (la prononciation,
les attitudes et gestes, le comportement), etc.

Il faut donc insister sur le fait que l’apprentissage des langues et des cultures engage des
processus cognitifs d’acquisition et requiert des investissements socio-affectifs beaucoup
plus longs, complexes, subtils, exigeants que les autres apprentissages, et leurs enjeux et
implications sont plus déterminants pour la personnalité́ et l’avenir de l’apprenant.

Il faut aussi rappeler que l’apprentissage d’une langue étrangère, avant d’être un impératif
comme on ne cesse de le dire actuellement, est d’abord une opportunité́ : celle de vivre une
expérience unique qui engage toute la personnalité́. Apprendre une langue et une culture
étrangères permet de se renouveler, de se multiplier en découvrant d’autres personnes,
d’autres manières de voir le monde, d’y vivre en jouant avec les mots qui disent ce monde et
le façonnent. Cela permet aussi de dépasser les limites de sa propre langue et de sa propre
culture et de les enrichir par la même occasion.

Contrairement à ce que des publicités promettent, on n’apprend donc pas les langues du jour
au lendemain, grâce à un logiciel perfectionné ou à̀ un stage de quelques jours. On peut
effectivement faire de rapides progrès en peu de temps si on s’implique et si on s’applique,
mais il faut d’abord savoir pourquoi on apprend une langue étrangère. En tout cas,
l’apprentissage d’une langue et d’une culture étrangères n’est pas une simple compétence à
acquérir et encore moins un produit à acheter, mais une expérience à vivre, patiemment,
assidument, attentivement, comme l’apprentissage d’un instrument de musique ou d’un
sport.

Nastasja Caneve : Mais précisément, pourquoi apprend-on les langues étrangères ou, dans
certains cas, doit-on les apprendre ? En tout cas, n’est-ce pas la première question à poser à
mes apprenants avant de commencer : « Pourquoi participez-vous à̀ ce cours ?, « Quels sont
vos objectifs ? », et aussi « Quelles sont vos envies ? »

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Jean-Marc Defays : Il y a bien sûr mille raisons différentes pour se mettre à̀ apprendre les
langues étrangères, des plus générales aux plus personnelles, et vous faites bien de poser la
question dès le départ.

On peut classer ces raisons en trois catégories :

• Les finalités extérieures quand c’est l’école, la famille, l’entreprise, la société́ qui
obligent une personne à apprendre des langues étrangères ou une langue en
particulier.
• Les finalités personnelles sont les buts à plus ou moins long terme, dépassant en tout
cas le cadre de l’enseignement pour lesquels une personne a décidé́ d’entreprendre
l’apprentissage d’une langue étrangère. Ces finalités constituent une puissante
motivation à l’apprentissage. Elles peuvent concerner des projets professionnels
(engagement, promotion, expatriation...), scolaires (examen...), sociaux (intégration,
statut...), culturels (tourisme, littérature...), familiaux (couple bilingue...).
• Les finalités pédagogiques seront fixées par l’enseignant, en accord ou en interaction
avec les apprenants, pour la fin de l’année, pour la fin de la semaine ou même de
l’heure. Ces finalités, envisagées maintenant en termes de savoir, de savoir-faire et de
savoir-vivre, peuvent faire l’objet d’un « contrat pédagogique » entre l’enseignant et
ses apprenants pour que chacun sache sur quelle base, de quelle manière et en vue de
quel objectif il va travailler.

Il est essentiel d’établir une adéquation, au moins un compromis, entre les finalités
envisagées par les différents partenaires : enseignants, apprenants, employeurs, parents,
institution, société́, etc. ; ce qui nécessite un important travail de concertation, de
communication, d’adaptation avant même que ne commence l’enseignement.

On constate que l’enseignement/apprentissage des langues et des cultures est actuellement


entrepris dans une perspective surtout utilitariste et instrumentale pour répondre aux besoins
– réels et légitimes – de la mondialisation économique ; que cet enseignement/apprentissage
vise souvent davantage l’employabilité́ ou l’adaptabilité́ des apprenants que leur
épanouissement personnel. Cette finalité́ qu’on ne discutera pas ici ne devrait cependant pas
empêcher la poursuite d’objectifs plus humanistes car nous avons probablement, de nos
jours, plus besoin d’humanité́ que de langues, ou plus précisément d’humanité́ au travers des
langues et des échanges qu’elles permettent.

Communiquer, c’est bien ; s’entendre, c’est mieux. Et là aussi il y va de notre responsabilité́


de professeurs de langue et de culture étrangères, de médiateurs interculturels.

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