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L'ECOLOGIE SOCIALE?
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«Qu'est-ce que l'écologie sociale?» a été publié pour la première fois
en 1993 pour le recueil Environmental Philosophy: From Animal
Rights to Radical Ecology compilé par Michael B. Zimmerman
(Prentice Hall, Edgewood Cliffs, New Jersey, 1993) et repris dans le
volume Social Ecology and Communalism (AK Press, Edinburghl
San Francisco, 2007). Au moment de la parution de ce texte, Murray
Bookchin sort de plusieurs années d'un différend idéologique très
tendu avec les partisans de l'«écologie profonde». Ce texte a pour
but de représenter l'écologie sociale au sein d'un recueil qui vise à
donner un aperçu de l'étendue des tendances nourrissant le courant
radical de l'écologie, alors en formation. Parmi les centaines d'ar
ticles publiés par Bookchin, celui-ci peut être considéré, sous une
forme condensée, comme l'exposé le plus complet de sa pensée.
Symptomatique de la rupture, déjà ancienne, de Bookchin avec tout
ce qui pourrait rappeler la critique marxiste, ce tableau d'une société
écologique et libertaire ne dit rien des rapports de production, sinon
implicitement en mettant au premier plan les notions d'auto
gouvernement et d'autogestion et en dénonçant la domination
sous tous ses aspects.
(Il est à noter que l'article ici reproduit est distinct de la brochure du
même nom éditée en France par l'Atelier de création libertaire en
1989 et qui correspond, elle, au premier chapitre du livre The Ecology
of Freedom.)
NATURE ET SOCIÉTÉ
Si l'on veut se démarquer de cette prétendue écologie motivée
par le profit, il faut repartir de quelques principes de bas� -c'est
à-dire se demander ce que sont véritablement la société et le
monde naturel. Parmi les nombreuses définitions de la nature
adoptées au fil des époques, celle qui présente le plus d'affinités
avec l'écologie sociale est assez floue et souvent difficile à cerner
dans la mesure où il est nécessaire, pour la comprendre et en saisir
les articulations, d'adopter une façon de penser particulière, en
opposition à ce qu'on appelle ordinairement la«pensée linéaire».
Ce mode de penser «non linéaire», ou encore organique, insiste
sur les processus plutôt que sur l'analyse, ou, pour le dire plus
techniquement, il est dialectique plutôt qu'instrumentai. Il conçoit
le monde naturel comme un processus en développement, plutôt
que de le considérer à l'image de ces beaux panoramas pris depuis
les sommets des montagnes et autres clichés de carte postale. De
tels panoramas et images de la nature extérieure à l'homme sont
essentiellement statiques, immobiles. Bien sûr, lorsque nous
71. Paul Radin, The World ofPrimitive Man, New York, Grove Press, 1960.
79. Murray Bookchin, The Ecology of Freedom, Palo Alto, Cheshire Books,
1982, p. 29.
CROh'RE OU MOURIR
Mais tout comme les hiérarchies et les classes, en plein essor,
pénétraient l'ensemble de la société, le marché commença égale
ment à acquérir une vie autonome et à étendre son emprise au-delà
de quelques régions limitées, jusque dans les profondeurs de vastes
continents. Là où l'échange avait jadis été principalement un
moyen de pourvoir aux besoins essentiels, limité par les guildes ou
par des restrictions religieuses et morales, le commerce au long
78.. J'ai expliqué en détail ces idées dans mon essai « &:alogie et pensée révo
lutionnaire», en 1964-1965, et elles furent intégrées avec le temps par les
mouvements écologistes postérieurs. Nombre des perspectives sur la
technologie présentées en 1965 dans l'essai «Vers une technologie libé-
19. Voir le chapitre « Les formes de la liberté " dans Au-delà de la rareté, op.
cit. ; «The Legacy of Freedom » dans The Ecology ofFreedom, op. cit. ; et
« Patterns of Civic Freedom » dans The Rise o/Urbanimtion and the Decline
o/Citiunship (1982, 1992, édition révisée : Londres, Cassell, 1995).