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L.

Douroux

La position des agriculteurs en face de l'économie contractuelle


In: Économie rurale. N°60, 1964. pp. 75-77.

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Douroux L. La position des agriculteurs en face de l'économie contractuelle. In: Économie rurale. N°60, 1964. pp. 75-77.

doi : 10.3406/ecoru.1964.1845

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ecoru_0013-0559_1964_num_60_1_1845
LA POSITION DES AGRICULTEURS

EN FACE DE L'ECONOMIE CONTRACTUELLE

par L. DOUROUX

L'économie agricole a toujours connu le phéno te, une fois que nous aurons mieux cerné cette éco
mène contractuel. Mais jusqu'à présent les cont nomie contractuelle, il faudra dire quelles sont et
rats passés entre un agriculteur et un industriel ou sa portée réelle et les conditions nécessaires à son
un commerçant revêtaient des formes si diverses et application.
si particulières que l'on ne pouvait guère parler Les partisans de la généralisation de l'économie
d'économie contractuelle. C'est le cas par exemp contractuelle en agriculture estiment qu'aucune so
ledés accords passés entre un ensemble de pro lution valable n'a été apportée jusqu'à présent à la
ducteurs laitiers et un ensemble d'industriels privés situation peu satisfaisante que connaît l'agriculture.
pour déterminer le prix du lait, mais sans clause Ils constatent l'échec des systèmes libéraux et des
relative aux quantités. A l'opposé le contrat d'inté systèmes dirigistes stricts, qui aboutissent pour les
gration, qui lie un producteur agricole à une firme premiers à la surproduction et à la braderie des
industrielle ou commerciale, comporte une obliga produits agricoles ainsi qu'à une intégration des
tionréciproque de fourniture, de produits et de ser agriculteurs par le commerce et l'industrie, et pour
vices. Vous savez que de tels contrats sont particu les seconds à une sous-production endémique.
lièrement fréquents en aviculture.
A partir de cette vision des choses, on en vient
Mais ces différents types de contrats n'ont pas à se représenter l'économie contractuelle comme
réussi à garantir à l'agriculteur un revenu sembla un des éléments fondamentaux de la politique agri
ble à celui des autres catégories socio-profession cole française : l'organisation et le rassemblement
nelles de la nation, à lui assurer un écoulement de des producteurs au sein des groupements de pro
sa production et à lui donner un véritable pouvoir ducteurs et des Comités Economiques Agricoles
de négociation. prévus par la loi complémentaire constituent le
Il existe toutefois un troisième type de contrat premier élément.
dont les résultats se sont avérés plus satisfaisants
pour les producteurs. Il s'agit de contrats collectifs Nous sommes bien sûr, d'accord sur cette volonté
conclus entre un ensemble de producteurs et un en de porter remède à la situation défavorable du
semble de firmes industrielles et commerciales pour monde agricole, mais croire que cette évolution
certaines productions. Ce sont les accords inte peut se faire par la seule économie contractuelle
rprofessionnels régissant des produits, tels que les nous apparaît comme une illusion dangereuse.
tomates, les petits pois et les champignons, et qui Un système contractuel global et contraignant
existent depuis déjà longtemps. Alors certains ont est en effet contraire aux réalités agricoles, et n'ap
pensé que si l'on arrivait à généraliser ces accords porte par ailleurs qu'une réponse partielle aux pro
à l'ensemble des productions agricoles, on aurait blèmes que les agriculteurs doivent résoudre.
pratiquement résolu les maux dont souffre le mon Il est contraire aux réalités économiques agricol
de agricole. Et c'est dans cette optique qu'a été es pour plusieurs raisons. Nous en citerons deux
élaborée une proposition de loi tendant à définir les principales :
principes et les modalités de l'économie contrac
tuelleen agriculture. — En premier lieu, l'économie contractuelle ne
peut pas couvrir toutes les productions agricoles.
Le moment me paraît donc particulièrement bien Les expériences réalisées à ce jour en matière d'ac
venu pour réfléchir sur cette économie contractuelle cords interprofessionnels portent toutes sur des
et sur les problèmes qu'elle pose aux agriculteurs. produits destinés à la conserve. Le contrat est alors
Je crois que le premier problème que nous de possible, car il y a un goulot d'étranglement. De
vons résoudre, c'est précisément de déterminer les plus, il s'agit toujours de production ayant un cy
limites de l'économie contractuelle. Et puis cle annuel.
Il apparaît donc que l'économie contractuelle ne meurent pas un simple catalogue de vœux pieux
peut guère s'appliquer dans les années prochaines mais inexaucés.
aux produits consommés ou exportés en l'état (ex : Si sa portée est plus limitée que ne le pensaient
raisin de table) , tout au moins tant que l'appareil certains, l'économie contractuelle doit, tout de mê
commercial demeurera ce qu'il est. Même ultérieu me, permettre d'améliorer pour quelques produits
rement, les caractéristiques propres à ces produits les conditions de production, de régulariser les prix
rendront toujours les accords interprofessionnels et d'harmoniser les conditions de mise en marché
difficiles : tout en favorisant une certaine concentration de
— deuxièmement, un système contractuel laisse l'offre.
en suspens le règlement du problème des excé Elle donne une meilleure base juridique aux ac
dents. Des contrats sont certes possibles pour les cords interprofessionels souscrits ou à venir, no
productions excédentaires, le lait par exemple, tamment pour ce qui est de la mise en place de
mais il est bien évident qu'un transformateur ne taxes parafiscales dans le cas d'une organisation de
signera pas de contrat l'engageant à prendre en l marché. A cet égard, un contrat collectif constitue
ivraison et à ses risques un produit dont il n'aura un progrès certain par rapport à un contrat indivi
pas le débouché. Dès lors que deviendront les ex duelet par rapport à un marché inorganisé.
cédents ? Or le fait qu'une loi les ignore, ne les
supprime pas pour autant !.'.. Enfin, un tel système doit condamner l'intégra
tion réalisée par les firmes industrielles et commerc
Si par contre l'économie contractuelle parvient à iales aux dépens des producteurs agricoles.
les faire disparaître on peut craindre que ce résul
tatne soit obtenu qu'en freinant l'expansion de Il ne suffit pas bien sûr de déterminer ces object
la production. L'Economie contractuelle conduir ifs; il faut aussi s'assurer que dans le cadre des
ait alors au malthusianisme. La croissance pour mesures de tous ordres, qu'elles soient législatives
tant souhaitée des régions les moins développées ou réglementaires, qui seront prises pour donner un
serait arrêtée. statut à ce régime contractuel, des dispositions con
crètes seront établies pour en ■ garantir l'efficacité.
Telle qu'elle nous est aujourd'hui présentée,
l'économie contractuelle n'améliore pas les struc Quelles sont les principales de ces dispositions ?
tures agricoles et commerciales (transformation, — En premier lieu, un système contractuel ne
.

distribution) . Dès lors qu'il ne modifie pas ces fonctionnera valablement que si l'intégration est
structures, le système contractuel sera dominé par vraiment réglementée. Pour cela, il faut que dans
l'industrie et le commerce dont il n'est pas excess tous les cas, aux contrats individuels liant des pro
if de dire qu'ils planifieront la production agricole. ducteurs isolés à des entreprises industrielles ou
L'économie contractuelle ne peut donc pas tout commerciales comportant une fourniture récipro
régler. Elle le peut d'autant moins que des problè que de prestations, soit substitué un contrat collect
mes aussi importants que ceux des structures, de la if conclu pour les producteurs par leurs groupe
formation des hommes, lui échappent complète ments ou leurs organisations professionnelles.
ment. Quant au pouvoir économique recherché par De plus, il faut interdire . l'intégration en aval,
le monde paysan, s'il passe naturellement par une c'est-à-dire la main-mise sur les structures de pro
concentration de l'offre, à laquelle on peut partie duction pratiquée par certaines entreprises indust
llement arriver par la voie de l'économie contract rielles et commerciales, notamment dans l'avi
uelle, il dépend aussi d'une pénétration par les culture.
agriculteurs eux-mêmes des circuits commerciaux.
— Une autre disposition à prévoir : c'est l'él
Les agriculteurs n'amélioreront pas leurs revenus aboration avec la profession agricole, par les Pouv
s'ils se contentent de livrer des produits bruts. La oirs Publics, de la politique contingentaire et tari
transformation du produit, bien plus que sa pro faire.
duction, le valorise. Or, l'économie contractuelle
risque d'enfermer le paysan dans sa fonction de Une politique d'importations non ■ concertée peut
producteur, tout comme les pays industriels ont en effet réduire à néant un accord interprofessionn
maintenu leurs . territoires coloniaux dans l'état de el.
fournisseurs de matières premières. Il est même très clair que si un tel accord est con
Voilà donc les limites de l'économie contractuell clu à l'échelon national pour un produit donné et
e mieux établies ou si l'on veut le mythe dissipé. qu'une entreprise, assurant un fort pourcentage de
Que peuvent donc attendre les agriculteurs de la productions y échappe, cet accord sera sans
l'économie contractuelle et comment devra s'appli grand effet. ,
quercette économie contractuelle dans la réalité, De là, la nécessité de pouvoir, si les organisat
pour que les objectifs qui lui seront assignés ne ions professionnelles intéressées y sont favorables,
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rendre les clauses d'un accord interprofessionnel ce d'excédents permanents et importants, si les me
obligatoire pour l'ensemble des agriculteurs, indust sures de soutien des marchés étaient abandonnées.
riels et commerçants d'une région donnée, voire Il importe donc que l'Etat affirme solennellement
pour l'ensemble du territoire. sa volonté de ne pas se décharger sur les product
Il ne faudrait pas non plus qu'à la faveur d'un eurset sur les industriels du soin de résorber les
régime contractuel les avantages jusque là réservés excédents.
à la coopération, en matière d'investissements no Telles sont les principales dispositions qui nous
tamment, et ceux prévus par la loi complémentaire paraissent absolument nécessaires pour donner vie
en faveur des groupements de producteurs, soient à un régime contractuel, qui, aux yeux des agri
également accordés aux groupements d'industriels culteurs, ne peut prétendre à un monopole.
et de commerçants, ce qui ne manquerait pas de L'économie contractuelle n'est pas la panacée
se faire au détriment de l'agriculture. que l'on pouvait imaginer ; pour ces raisons tech
Il semble également opportun de prévoir, dans niques, de plus, à un problème complexe qui exi
l'application des accords interprofessionnels une ge notamment une participation des agriculteurs à
fois signés, un arbitrage des Pouvoirs Publics en la transformation et à la distribution de leurs pro
cas de désaccord des parties sur des modalités duits, la seule concentration de l'offre, nécessair
d'exécution. ement partielle dans un tel système n'apporte qu'un
Enfin, d'après certains, l'existence de taxes pa élément de réponse.
rafiscales, cotisations qui doivent couvrir les dépens Malgré ces réserves, nous ne rejetons pas l'éc
esde fonctionnement du système contractuel, onomie contractuelle. Dans les perspectives peut-
pourrait faire disparaître les aides existantes d'ori être modestes, mais assurément plus réalistes que
gine budgétaire et en particulier le soutien du nous lui avons assignées, elle peut aider à résoudre
F.O.R.M.A. en cas d'excédents anormaux. le problème agricole sans être en contradiction
Naturellement, les mécanismes qui seraient mis avec le développement de la coopération et de
en place se révéleraient vite inefficaces en l'agriculture de groupe.

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