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Presse Med.

2019; 48: 816–824

SYNDROMES LYMPHO-PROLIF ERATIFS CHRONIQUES ß B  en ligne sur / on line on


www.em-consulte.com/revue/lpm
www.sciencedirect.com

Dossier thématique
Mise au point

Apport des examens de biologie dans la


prise en charge des hémopathies lymphoïdes
B matures. L'intérêt de l'intégration des
données clinicobiologiques

Sophie Kaltenbach 1, Ludovic Lhermitte 2

Disponible sur internet le : 1. Laboratoire de cytogénétique médicale, hôpital Necker–Enfants-Malades, France


19 août 2019 2. Laboratoire d'onco-hématologie, hôpital Necker–Enfants-Malades, 149, rue de
Sèvres, 75015 Paris, France

Correspondance :
Ludovic Lhermitte, Laboratoire d'onco-hématologie, hôpital Necker–Enfants-Malades,
149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France.
ludovic.lhermitte@gmail.com

Points essentiels
Le diagnostic des hémopathies lymphoïdes B matures est hautement pluridisciplinaire.
La biologie procure des informations diagnostiques, pronostiques et théranostiques.
L'hématologie biologique permet l'approche des hémopathies B matures à deux niveaux :
cellulaire et moléculaire.
La cytogénétique conventionnelle, la FISH et la biologie moléculaire sont des outils de l'héma-
tologie moléculaire.
Le NGS est une nouvelle technique qui devrait profondément modifier la prise en charge
diagnostique et thérapeutique des hémopathies B matures dans les années à venir.
L'intégration de l'ensemble des données cliniques, anatomopathologiques et biologiques permet
la prise en charge personnalisée de ces hémopathies.

Key points
Biological diagnosis of mature B cell malignancies

Diagnosis of mature B cell malignancies is highly multidisciplinary.


Biological tools provide diagnostic, prognostic and theranostic information.
Biological hematology allows considering mature B cell diseases from two perspectives : cellular
and molecular approaches.
Cytomorphology and flow cytometry are tools from cell hematology.
Conventional cytogenetics, FISH and molecular biology are tools from molecular hematology.
NGS is a new technique that could dramatically change diagnostic and therapeutic management
of B cell malignancies in the near future.
Integration of clinical, pathological and biological data allows for personalized management of
these diseases.
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tome 48 > n87P1 > septembre 2019


https://doi.org/10.1016/j.lpm.2019.07.021
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Apport des examens de biologie dans la prise en charge des hémopathies
lymphoïdes B matures. L'intérêt de l'intégration des données clinicobiologiques SYNDROMES LYMPHO-PROLIFERATIFS CHRONIQUES ß B 

Mise au point
Abréviations Introduction
ABC cellules B actives La classification des hémopathies lymphoïdes B matures s'est
BCR B-cell Receptor
CMF cytométrie en flux considérablement complexifiée comme en témoigne la dernière
DLBCL lymphome diffus à grandes cellules version de la classification WHO/OMS (World Health Organiza-
FISH fluorescent in situ hybridization tion/Organisation mondiale de la santé [1,2]. Les classifications
GC centrogerminatif
LLC leucémie lymphoïde chronique originales étaient purement morphologiques. L'avènement de
LZM lymphome de la zone marginale l'immunohistochimie, de l'immunophénotypage, de la cytogé-
MBL Monoclonal B-cell Lymphocytosis nétique et de la biologie moléculaire ont progressivement ali-
NGS next generation sequencing
NFS numération formule sanguine menté les connaissances de la physiopathologie des
NGS next generation sequencing hémopathies lymphoïdes B et de ce fait réorganisé notre appro-
OMS organisation mondiale de la santé che diagnostique. La complexité de la classification n'est qu'ap-
PCR Polymerase Chain Reaction
PMBL lymphome primitif du médiastin parente. Elle repose en effet sur deux principes simples :
WHO world health organization  l'identification d'une contre-partie cellulaire normale, c'est-à-
dire d'un équivalent lymphoïde physiologique dont dérive la
tumeur ;
 l'identification de caractéristiques chromosomiques et/ou molé-
culaires communes conduisant au processus oncogénique [3].
C'est par conséquent, l'identification de caractéristiques onto-
Glossaire géniques et oncogéniques communes qui forment le pilier du
Biologie Médecine personnalisée, biologie théranostique et diagnostic de ces hémopathies. Elle n'est possible que par la
théranostique médecine de précision sont des termes utilisés de convergence de différentes informations provenant d'outils bio-
manière interchangeable. Ils réfèrent au modèle
logiques variés. La morphologie reste un élément fondateur du
médical qui permet de concevoir une décision/
intervention médicale spécifique adaptée diagnostic. Elle repose sur l'anatomopathologie dans le cas des
individuellement à chaque patient en fonction de tumeurs tissulaires (lymphomes) ou la cytologie lorsque
prédiction de la réponse au traitement ou de
l'atteinte médullosanguine est commune (leucémies chroni-
l'évolution clinique. Tandis que ce concept émerge
dès le temps d'Hippocrate, il est réapparu en force ques). Cette analyse est systématiquement complétée par
avec le progrès des approches diagnostiques qui des données subcellulaires : l'identification d'anomalies chro-
procurent une meilleure compréhension des bases
mosomiques (cytogénétique), génomiques [ADN] (biologie
moléculaires de la maladie, en particulier la
génomique moléculaire), transcriptionnelles [ARN] (biologie moléculaire),
NGS Le Next Generation Sequencing (NGS) est aussi ou protéiques (immunohistochimie, immunophénotypage).
souvent décrit sous les termes de deep-sequencing
Cet article de synthèse a pour objectif de présenter le principe et
ou séquençage massif parallèle. Il s'agit d'une
technologie reposant sur la fabrication d'une librairie la place des principaux examens de biologie d'hématologie
où chaque molécule d'ADN reçoit un adaptateur et spécialisée dans le contexte des hémopathies lymphoïdes B
un index. L'adaptateur permet le séquençage
matures. Nous aborderons les différents niveaux du diagnostic
individuel de chaque molécule d'ADN. L'index
représente un code-barre permettant d'identifier la biologique avec les outils permettant d'interroger le chromo-
molécule d'ADN, et ainsi de multiplexer les some, l'ADN, l'ARN, la protéine et la cellule. Seront exclues,
échantillons de différents patients qui seront
l'histologie et l'immunohistochimie parce qu'elles représentent
démultiplexés par l'outil bioinformatique lors de
l'analyse. Le NGS permet le séquençage massif d'un des examens anatomopathologiques plutôt que biologiques et
grand nombre de gènes avec une grande sensibilité que le propos sera principalement centré sur l'exploration des
(inférieure à 1 %), de manière simultanée pour
lymphoproliférations B. Nous soulignerons l'importance d'inté-
plusieurs patients, marquant ainsi ses différences
avec la technologie de Sanger. Le NGS peut être grer l'ensemble de ces informations pour parvenir à un diagnostic
appliqué à l'analyse pangénomique (WGS – Whole précis et fiable et prédire le comportement clinique de l'hémo-
Genome Sequencing), panexonique (WES – Whole
pathie. Dans ce cadre, il convient de distinguer différents niveaux
Exome Sequencing) ou ciblée c'est-à-dire restreinte
à l'analyse d'un nombre limité de gènes d'information fournis par les examens de laboratoire : les infor-
sélectionnés. Classiquement, le NGS utilisé à visée mations diagnostiques et pronostiques bien sûr, mais également
hospitalière repose sur le NGS ciblé
de plus en plus des informations théranostiques, c'est-à-dire
FISH La FISH (Fluorescent in situ hybridization) est une
technique de cytogénétique moléculaire permettant permettant de prédire le profil de réponse au traitement. La
d'interroger directement l'ADN à l'aide de sondes biologie théranostique prend ainsi toute sa place à l'ère des
fluorescentes, de manière ciblée. Elle permet de
thérapies ciblées. Le modèle de la leucémie lymphoïde chro-
détecter l'existence d'une délétion, d'une
amplification, ou d'un réarrangement génomique nique apparaît l'un des plus approprié à cet égard pour illustrer
l'apport de la biologie au clinicien en 2020, d'une part par sa
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fréquence dans la population générale qui lui confère un intérêt morphologiques rappelant celles de leur contre-partie cellulaire
tout particulier, et aussi par l'apport de tous les acteurs de la normale. À titre d'exemple, les cellules d'un lymphome du man-
biologie hématologique pour une prise en charge adaptée. Le teau sont habituellement des cellules de grande taille avec une
partenariat étroit du clinicien et du biologiste tel qu'il s'exprime chromatine lâche et nucléolée témoignant de l'intense activité
en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) permet ainsi proliférative caractéristique de la zone du manteau physiolo-
une prise en charge médicale personnalisée et optimale. gique. Le lymphome folliculaire arbore au contraire des cellules
de petite taille à faible rapport nucléocytoplasmique et chroma-
La cellule tine compacte, suggérant le repos métabolique et l'absence de
La cytologie : la cellule prolifération comme c'est le cas dans le centre germinatif phy-
Historiquement, nos confrères du XIXe siècle à qui l'on doit les siologique afin de permettre aux évènements moléculaires
premiers fondements de l'hématologie moderne ne disposaient (hypermutations somatiques, commutation de classe) de se pro-
que de peu d'informations pour approcher le diagnostic. La duire (tableau I). Le raffinement sémiologique de nos prédéces-
clinique et le microscope n'étaient guère que leurs seuls outils. seurs offre des éléments diagnostiques précieux mais qui
Leur talent a été de faire converger les progrès de la physique peuvent cependant être pris en défaut dans certaines situations
optique et de la chimie pour observer le sang au microscope en face au pléiomorphisme de certaines entités et demeurent insuf-
exploitant les propriétés tinctoriales (sub)cellulaires des leucocy- fisantes pour produire un diagnostic formel et précis. Il paraît
tes et en les visualisant à fort grossissement au microscope néanmoins primordial de souligner l'importance de la morpho-
optique. Ainsi la classique coloration de May–Grunwald–Giemsa logie qui demeure la porte d'entrée de l'approche diagnostique
(MGG) reste le quotidien de l'hématologue biologiste près de biologique et conditionne la prescription biologique en aval.
deux siècles après. Les protéines prennent une coloration rosée
(acidophile) tandis que les acides nucléiques type ARN prennent L'immunophénotypage : la cellule et la protéine
une coloration bleutée (basophile). L'ADN prend quant à lui une La cytométrie en flux (CMF) est généralement apparentée à la
coloration intermédiaire violacée du fait de la présence à la fois cytologie. Il s'agit en effet d'une technique d'hématologie « cel-
d'acides nucléiques et de protéines de structures liant les hélices lulaire », c'est-à-dire qui analyse les cellules individuellement et
d'ADN (histones). Ces caractéristiques physico-chimiques permet- tire des conclusions de l'analyse de populations. L'œil humain
tent d'apprécier la morphologie des cellules avec une résolution est ici remplacé par un (ou plusieurs) laser(s). Les cellules sont
suffisamment importante pour avoir donné naissance à une présentées en file indienne à un laser par un système fluidique.
sémiologie très fine reposant sur la texture de la chromatine, Des paramètres morphologiques (taille, granularité) sont ainsi
la présence de nucléoles, le rapport nucléocytoplasmique, la mesurés à partir des propriétés de diffraction/réfraction de la
basophilie cytoplasmique. . . Ces informations sont importantes lumière des cellules. On distingue ainsi lymphocytes, monocytes
car les lymphoproliférations préservent des caractéristiques et granuleux comme le fait un automate d'hématimétrie pour

TABLEAU I
Exemple d'approche intégrée du diagnostic des hémopathies lymphoïdes B matures : application au lymphome du manteau et du
lymphome folliculaire. (à l'exclusion de l'examen anatomopathologique). L'ensemble des outils permettent d'établir un faisceau
d'arguments diagnostique

Lymphome du manteau Lymphome folliculaire

Cellule Grandes cellules Petites cellules


(Cytologie) Cytoplasme étendu Cytoplasme étroit
Chromatine lâche Chromatine compacte
Encoches à bords émoussés Encoches à bords abrupts

Protéine CD5+ C10 CD5 CD10+


(CMF) (Pré-centrogerminatif) (Centrogerminatif)

Chromosome t(11 ;14)(q13 ;q32) t(14 ;18)(q32 ;q21)


(Cytogénétique)
ADN Réarrangement IgH-Bcl1 Réarrangement IgH-Bcl2
(Biologie moléculaire)
ARN Surexpression de la cycline D1 –
(Biologie moléculaire)
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Apport des examens de biologie dans la prise en charge des hémopathies
lymphoïdes B matures. L'intérêt de l'intégration des données clinicobiologiques SYNDROMES LYMPHO-PROLIFERATIFS CHRONIQUES ß B 

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établir la formule leucocytaire. La cytométrie permet d'appro- lymphocyte et d'en déduire sa nature pathologique. Le profil
fondir la caractérisation cellulaire en interrogeant les cellules sur d'expression du CD5 et du CD10 est aussi fondamental en CMF
leur expression protéique à l'aide d'anticorps monoclonaux car il fournit une indication généralement fiable de la contre-
couplés à des fluorochromes (molécules fluorescentes). L'émis- partie cellulaire en distinguant phénotypes précentrogerminatif
sion de lumière en réponse à l'excitation du laser signe par (CD5+), centrogerminatif (CD10+) et postcentrogerminatif
conséquent l'expression antigénique. L'interrogation des cellu- (CD5 CD10 ) et réduisant par là-même le champ des diag-
les permet d'établir leur phénotype B [CD19] (ou T [CD3]) puis nostics possibles [3]. De plus, il convient de savoir que les
d'en préciser la monotypie de la chaîne légère. L'expression d'un progrès technologiques (cytomètres multicouleurs et haut
récepteur de surface (BCR) dont témoigne la détection de la débit) permettent une résolution d'analyse extrême. Ce peut
chaîne légère signe le caractère mature du lymphocyte B. être : l'identification d'une population cellulaire pathologique
La détection d'une monotypie de la chaîne légère, c'est-à-dire sur des prélèvements paucicellulaires (LCR, ponction ganglion-
le déséquilibre du ratio physiologique des chaînes K/L (2/3 vs naire, liquide vitrée oculaire) ; la caractérisation de la coexi-
1/3), permet d'extrapoler le caractère monoclonal du stence de multiples hémopathies lymphoïdes B matures qui

Figure 1
Illustration de la résolution de la cytométrie en flux (CMF) pour le diagnostic des hémopathies lymphoïdes matures. A. Identification
d'une double hémopathie B mature dans une suspension ganglionnaire à partir d'une biopsie cervicale. On identifie 3 sous-
populations B. L'une CD5+ monotypique Kappa (en vert), une autre CD10+ monotypique Kappa (en orange) et une troisième CD5
CD10 polytypique, correspondant respectivement à du lymphome lymphocytique, un lymphome folliculaire et des lymphocytes B
physiologiques résiduels chez le même patient. La clonalité moléculaire (non montrée) confirmait la présence de 2 clones B ; B.
Identification d'un MBL CD5+ Lambda sanguin (125/mm3) (en vert) chez un patient avec 2000 lymphocytes/mm3 et sans syndrome
tumoral ; C. Illustration multiparamétrique montrant la capacité de la cytométrie à disséquer les sous-populations lymphocytaires dans
un prélèvement ganglionnaire réalisant un « adénogramme phénotypique ». On identifie au sein des populations physiologiques un
clone lymphocytique émergent (en vert)
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représente un évènement fréquent du fait d'une instabilité mitose après une étape de culture cellulaire ; il est donc indis-
génomique acquise avec l'âge dans la population lymphocytaire pensable d'avoir un prélèvement tumoral frais, de taille relati-
B (figure 1) ; la détection de clones B pré-LLC (smoldering) que vement importante et il est souvent nécessaire, dans les
sont les lymphocytoses monoclonales B et qui posent de nou- syndromes lymphoprolifératifs et les lymphomes, de stimuler
velles problématiques. En pratique, la fréquence des MBL ainsi la pousse des cellules tumorales grâce à des agents mitogènes.
identifiée et l'évolution sur le long terme font que l'OMS recom- C'est encore un outil précieux permettant de conforter le diag-
mande de surveiller les MBL > 500/mm3 et incitent à ne pra- nostic de certaines hémopathies comme le lymphome du man-
tiquer aucune surveillance pour les MBL < 500/mm3 [1]. Par teau ou le lymphome folliculaire avec l'identification de
ailleurs, la gamme des antigènes qui peut être analysée par CMF remaniements chromosomiques spécifiques, les translocations
s'est considérablement étendue si bien que de nouveaux alr- t(11 ;14)(q13 ;q32) et t(14 ;18)(q32 ;q21) respectivement. Il a
gorithmes diagnostiques ont été développés indépendamment aussi un intérêt pronostique comme l'identification de la del(17)
du classique score de Matutes qui permet le diagnostic des LLC. (p13) de mauvais pronostic dans la LLC et le lymphome du
À titre d'exemple, la négativité du CD200 représente un argu- manteau car associée à une perte du gardien du génome
ment diagnostique fort pour le lymphome du manteau tandis TP53. Le caryotype a comme principal avantage d'être une
qu'il est quasiment constamment positif dans les autres lym- analyse pangénomique mais présente cependant certains
phoproliférations B matures [4]. Il convient de noter que la CMF inconvénients : temps technique et d'analyse long, résolution
s'applique à tout tissu liquide ou pouvant être mis en suspen- faible, risque d'échec et dans le cas précis des lymphomes, il
sion. Il est ainsi devenu un complément important pour aider n'est pas toujours possible d'avoir suffisamment de prélève-
l'anatomopathologiste dans son diagnostic par l'analyse immu- ment tumoral après biopsie pour pouvoir faire un caryotype.
nophénotypique des suspensions ganglionnaires (figure 1).
FISH : hybridation in situ de sondes fluorescentes
Enfin, les progrès de la technologie permettent l'acquisition
La technique de FISH permet d'analyser des loci spécifiques grâce
d'un grand nombre d'évènements et l'analyse de la maladie
à des sondes composées de molécules d'ADN marquées par un
résiduelle au décours du traitement qui tient une place gran-
fluorochrome. Cette technique permet d'accroître considérable-
dissante dans la prise en charge de la LLC.
ment le pouvoir de résolution de la cytogénétique classique,
Les acides nucléiques jusqu'à environ 300 kb, et peut être utilisée aussi bien sur les
chromosomes en métaphase que sur des noyaux en interphase.
Le second niveau d'étude est l'acide nucléique lui-même. Celui-
La FISH permet entre autres de détecter des petites délétions qui
ci donne un accès direct à l'identité cellulaire et aux anomalies
peuvent être non-visibles au caryotype standard (ex : la délétion
génomiques qui représentent le primum movens de l'oncoge-
de TP53 en 17p13) (figure 2) ou de confirmer le réarrangement
nèse. Il peut être analysé à l'échelon chromosomique par les
d'un gène impliqué dans la formation d'un gène de fusion (ex :
outils de cytogénétique conventionnelle, ou au niveau de l'ADN
réarrangement du gène MYC dans les lymphomes de Burkitt). La
ou de l'ARN par la biologie moléculaire. Il est important de
FISH est un examen de choix pour rechercher des réarrange-
rappeler que ces examens doivent être initiés avant tout trai-
ments de gènes comme MYC, BCL2 ou BCL6 dans les noyaux
tement, à partir d'un prélèvement suffisamment infiltré par les
interphasiques sur coupes FFPE pour les lymphomes à grandes
cellules tumorales, qui peut être une biopsie ganglionnaire ou
cellules (DLBCL) lorsque le caryotype standard n'a pas été réalisé.
tissulaire dans le cas d'un lymphome, de la moelle osseuse dans
Caryotype et FISH sont des examens complémentaires, et en
la maladie de Waldenström, ou du sang dans la LLC et les
aucun cas la FISH ne se substitue au caryotype : le caryotype est
lymphomes leucémisés.
peu résolutif mais représente un excellent examen de débrouil-
La cytogénétique : le chromosome et l'ADN lage pour dépister des anomalies sans a priori, tandis que la FISH
L'analyse cytogénétique permet d'identifier les anomalies chro- est beaucoup plus résolutive mais permet de ne répondre qu'à
mosomiques acquises dans les cellules tumorales. Ces anoma- une seule question précise dépendant des sondes utilisées et
lies peuvent être de différents types : anomalies de nombre portant sur la présence d'une anomalie ciblée.
(monosomies, trisomies, hyperploïdies), délétion, duplication,
CGH array : hybridation génomique comparative
ou encore translocation et inversion pouvant être à l'origine de
La CGH array permet de mettre en évidence des anomalies
la formation d'un gène de fusion.
chromosomiques quantitatives type délétion/amplification. Elle
Cytogénétique conventionnelle : le caryotype consiste à comparer la quantité d'ADN par rapport à un ADN
Le caryotype correspond à l'observation morphologique de témoin, sur l'ensemble du génome. On peut ainsi par exemple
l'ensemble des 23 paires de chromosomes, c'est une analyse identifier une del(17)(p13) emportant le locus TP53 (figure 2).
pangénomique de faible résolution, environ 5 Mb (figure 2). Elle est habituellement couplée à la SNP-Array permettant
L'observation microscopique des chromosomes est possible l'analyse des polymorphismes et ainsi l'identification de pertes
lorsque des cellules sont bloquées au stade métaphase de la d'hétérozygotie. La CGH array a des applications particulières en
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Apport des examens de biologie dans la prise en charge des hémopathies
lymphoïdes B matures. L'intérêt de l'intégration des données clinicobiologiques SYNDROMES LYMPHO-PROLIFERATIFS CHRONIQUES ß B 

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Figure 2
Approche intégrée de la prise en charge de la leucémie lymphoïde chronique. A. Aspect cytologique d'une leucémie lymphoïde
chronique (LLC) révélant une lymphocytose monomorphe et mature faite de petits lymphocytes de morphologie banale associée à des
noyaux nus (ombres de Gumprecht) du fait de la fragilité des lymphocytes pathologiques qui se détériorent lors de l'étalement sur
lame (frottis) ; B. Aspect immunophénotypique révélant un phénotype précentrogerminatif CD19+ CD5+ avec monotypie de la chaîne
légère libre Kappa de faible intensité (anergie du BCR). Le score de Matutes confirme le diagnostic de LLC et n'est pas illustré ; C.
Caryotype montrant un caryotype non complexe mais une del(17)(p13) de mauvais pronostic ; D. Fluorescent in situ hybridization
(FISH) confirmant la perte d'un allèle de TP53. La sonde rouge couvre le locus TP53 et la sonde verte le centromère du chromosome
17 ; E. Examen de CGH array montrant la délétion del(17)(p13) emportant le locus de TP53 ; F. Next generation sequencing (NGS)
montrant une mutation R238 W du contre-allèle de TP53. À noter que l'ensemble de ces examens n'est pas réalisé d'emblée et de
manière systématique dans la LLC. Ils sont principalement indiqués en fonction du contexte clinique et de l'intention de traitement
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clinique qui demeurent restreintes et son utilisation n'est pas cette maladie. On recherche aussi volontiers les réarrangements
généralisée. génomiques comme le réarrangement IgH-Bcl1, équivalent
moléculaire de la translocation t(11 ;14)(q13 ;32), dans le
La biologie moléculaire : l'ADN et l'ARN
lymphome du manteau. Toutefois, il convient de préciser que
Clonalité diagnostique la plupart de ces analyses ne sont jamais totalement sensibles et
La biologie moléculaire permet l'analyse de l'ADN et de l'ARN en spécifiques, et encore une fois, c'est le faisceau d'arguments
s'appuyant sur un large éventail de techniques. Les hémopathies clinicobiologiques qui permettra de conduire au diagnostic.
B matures résultent de l'expansion clonale d'une cellule B mature.
Comme toute cellule B, la cellule d'origine a réalisé au cours de Recherche d'anomalies d'expression
son développement la recombinaison VDJ et le processus de Les hémopathies lymphoïdes se caractérisent parfois par un
diversité jonctionnelle dont elle garde la cicatrice génétique. La profil transcriptionnel caractéristique. L'étude de l'ARN, dont il
détection d'un réarrangement clonal par PCR (clonalité diagnos- convient de préciser qu'il est beaucoup plus fragile que l'ADN ce
tique) constitue un élément diagnostique déterminant dans cer- qui implique un prélèvement de bonne qualité pour son ana-
taines situations difficiles (figure 1). De plus, face à la coexistence lyse, prend alors son importance. La recherche de la surexpres-
d'hémopathies B matures multiples, l'analyse de la clonalité sion de la cycline D1 est précieuse pour le diagnostic du
permet de disséquer les réarrangements clonaux et d'identifier lymphome du manteau même si elle peut être retrouvée éga-
les différents clones en présence. En cas de rechute ou de trans- lement dans d'autres hémopathies (LZM, myélome). L'accès
formation en lymphome de haut grade, il se pose fréquemment à une technologie moyen-débit se popularise dans les labora-
la question de savoir s'il s'agit de l'évolution de l'hémopathie toires diagnostiques si bien que l'analyse du profil transcrip-
initiale ou de la survenue d'une nouvelle maladie. Le réarrange- tionnel de plusieurs gènes par nanostring devient possible pour
ment clonal étant la carte d'identité de la tumeur, son étude la caractérisation des lymphomes B à grandes cellules (DLBCL) :
permet de trancher ces deux situations cliniques courantes. on distingue ainsi les DLBCL, ABC et GC sur leur profil d'expres-
sion génique, définissant deux maladies de pronostics et trai-
Recherche d'anomalies génomiques
tements différents [5].
On peut identifier également des marqueurs oncogénétiques.
Par exemple, la recherche de la mutation L265P de MYD88, Next generation sequencing
quasi-pathognomonique de la maladie de Waldenström en Enfin le NGS est le dernier né de la biologie moléculaire. La
présence d'un pic IgM et d'une morphologie lymphoplasmocy- révolution de cette technologie vient de ce qu'on peut obtenir la
taire, est devenue un examen de routine pour le diagnostic de séquence des tous les brins d'ADN individuellement (séquençage

TABLEAU II
Exemple d'approche intégrée du diagnostic des hémopathies lymphoïdes B matures : application à la leucémie lymphoïde chronique (LLC).
L'ensemble des informations clinicobiologiques concourent à la prise en charge diagnostique, pronostique et thérapeutique

Diagnostic Pronostic Théranostique

Clinique Adénopathies bilatérales et symétriques Stade de Binet Stade de Binet


 autre syndrome tumoral
NFS Lymphocytose  cytopénies Temps de doublement de la
lymphocytose
Cytologie Lymphocytes monomorphes et matures,
ombres de Gumprecht
ImmunophénotypageScore de Matutes Expression du CD49d
Caryotype Caryotype complexe
del(17)(p13)
FISH Délétion de TP53
NGS Absence de mutation de NOTCH2 Mutations de NOTCH1 Mutations et délétions de TP53
Mutations d'ATM (prédit la résistance à la fludarabine et
Mutations de TP53 indique l'ibrutinib)
Mutations somatiques des chaînes Mutations de BTK
lourdes d'immunoglobulines (prédit la résistance à l'ibrutinib même en
présence de mutation de TP53)
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Apport des examens de biologie dans la prise en charge des hémopathies
lymphoïdes B matures. L'intérêt de l'intégration des données clinicobiologiques SYNDROMES LYMPHO-PROLIFERATIFS CHRONIQUES ß B 

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massif parallèle), et pas simplement la séquence majoritaire limiter les analyses à un séquençage ciblé afin d'en extraire une
comme dans le séquençage classique de Sanger. Ceci permet information cliniquement pertinente, parce que « trop d'infor-
de révéler des mutations minoritaires, de les quantifier, d'ana- mation tue l'information ».
lyser un grand nombre de gènes simultanément, et même
d'analyser plusieurs patients. En d'autres termes le séquençage
devient à la fois résolutif et industriel. Les applications sont en Conclusion
plein essor et nombreuses. Elles s'étendent de la carte génétique La caractérisation des hémopathies B matures a bénéficié ces
de l'hémopathie, l'étude de la structure et de l'évolution clonale, dernières décennies des progrès considérables de la technolo-
la stratification pronostique et théranostique. À titre d'exemple gie. Ceux-ci ont permis d'appréhender au mieux les aspects
on peut rapporter pour un patient atteint de LLC le statut muta- phénotypiques et moléculaires de ces maladies et ont progres-
tionnel de plusieurs gènes en une seule analyse : NOTCH1 et ATM sivement été implémentés dans l'approche diagnostique en
dont la mutation est de pronostic péjoratif [6], TP53 dont la pratique clinique. La CMF, outil de recherche dans les années
mutation pathogène prédit la résistance à la fludarabine et 1960 a connu son entrée à l'hôpital en 1982 pour la quantifica-
indique l'ibrutinib [7,8] alors que l'association simultanée de tion des T CD4+ dans le cadre de l'infection VIH, et immédia-
mutations de TP53 et BTK prédit la résistance à l'ibrutinib tement été utilisée pour caractériser les hémopathies matures
[9,10]. Il permet également de préciser le degré de mutations avec le succès qu'on lui connaît. Le NGS a permis le séquençage
somatiques physiologiques qui constituent un facteur pronos- intégral du génome pour un million de dollars en 2001 ; c'est
tique majeur dans la LLC[11–13]. Le NGS apporte également des désormais un outil de pratique courante pour la caractérisation
informations diagnostiques sur la base du profil mutationnel. À des hémopathies. Au final, le diagnostic des hémopathies B
titre d'exemple, la découverte de mutations de XPO1, STAT6 et matures est devenu hautement intégré (tableaux I et II), faisant
SOCS1 sont des arguments forts pour le diagnostic de lymphome converger les données cliniques, d'imagerie, d'anatomopatho-
primitif du médiastin (PMBL) versus celui de lymphome B à gran- logie et biologiques en un faisceau d'arguments pour une
des cellules (DLBCL) [14]. Actuellement, les capacités de séquen- définition précise de la maladie. L'hémopathie n'est plus sim-
çage permettent l'analyse de 10 à 100 gènes pour 5 à 50 patients plement définie par son identité diagnostique, mais également
environ, de manière simultanée, pour environ 250 euros par par son pronostic et son profil de sensibilité au traitement. La
patient en coût brut réactifs. La réduction des coûts rend l'outil de caractérisation diagnostique, pronostique et théranostique per-
plus en plus populaire. Cependant, c'est l'analyse des données mettent ainsi de mettre en pratique le concept de médecine
qui représente le principal goulot d'étranglement parce que personnalisée en proposant le traitement le plus approprié non
d'une part elle repose sur une analyse bioinformatique pointue, pas à une maladie, mais à un patient [15].
et d'autre part parce que le NGS génère l'identification d'un très
grand nombre de variants dont l'annotation par le biologiste est Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de
très chronophage et dont la signification biologique est parfois liens d'intérêts.
difficile à préciser. La stratégie actuelle est par conséquent de

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