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Corrigé-type de l’évaluation

FRANÇAIS – FR10
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Objet d’étude : l e personnage de roman,
du XVIIe siècle à nos jours

Question (4 points)
Quelle image de la femme ces différents documents proposent-ils ?
En quoi le passage par le biais du récit autobiographique ou de l’autoportrait rend-il les témoignages
plus puissants ?

Proposition de corrigé
 Introduction 

[Accroche] La condition des femmes a beaucoup évolué au fil des siècles. Longtemps cantonnées aux
rôles d’épouse ou de mère, elles sont désormais pleinement intégrées à la société et au monde du tra-
vail, même si des inégalités demeurent. Cependant, il semble qu’une caractéristique liée à leur condition
ait traversé les siècles : l’injonction faite aux femmes à être belles et séduisantes, à tout faire pour plaire
aux hommes. [Présentation du corpus] De nombreuses auteures ou artistes ont évoqué cet état de fait
dans leurs œuvres autobiographique, par exemple George Sand dans Histoire de ma vie (1855), Simone de
Beauvoir dans La Force des choses (1963), Camille Laurens dans l’autofiction Celle que vous croyez publiée
en 2016, ou encore la célèbre peintre Frida Kahlo dans ses nombreux autoportraits, en particulier celui de
1940. [Reprise de la question sous forme d’annonce de plan] Ainsi, nous analyserons dans un premier
temps l’image de la femme que ces différents documents proposent, avant de nous demander en quoi le
passage par le biais du récit autobiographique ou de l’autoportrait rend les témoignages plus puissants.

 Développement 

[1ère partie / 1er argument] Tout d’abord, nous remarquons que différents documents évoquent l’injonc-
tion faite aux femmes d’être belles ; c’est plus particulièrement le cas des extraits de George Sand et de
Camille Laurens. La première associe ces impératifs à sa mère et sa grand-mère (« ma pauvre mère qui
estimait la beauté plus que tout, m’en faisait souvent de naïfs reproches. […] Ma grand-mère renchéris-
sait encore sur les réprimandes de ma mère »). Camille Laurens, sans la nommer directement, semble
davantage accuser la société de manière générale d’être responsable de cet état de fait : « ça me dégoûte,
tout ce qu’une femme doit faire pour plaire, pour être séduisante ». Les termes employés par Camille
Laurens sont très forts, elle se sent considérée comme un « objet artificiellement créé » par l’attente de
l’homme, comme une marchandise que l’on expose « sur l’étal d’un marché. Le marché des femmes ».
On perçoit bien son désarroi face à cette injonction dans la dernière phrase de notre extrait, qui s’achève
sur des points de suspension, comme si l’auteure ne trouvait plus assez de mots pour dénoncer cette
situation : « Être sexy, être… ».
[2e argument] Cependant, les femmes réagissent différemment face à l’importance accordée à la séduc-
tion, et certaines semblent s’en libérer mieux que d’autres. C’est le cas de George Sand, Simone de
Beauvoir et Frida Kahlo, qui apparaissent comme libres de l’image qu’elles renvoient d’elle-même, là où
Camille Laurens semble s’être pliée à tous les subterfuges vendus aux femmes pour s’assurer un poten-
tiel de séduction ; elle affirme d’ailleurs : « Bien sûr je le fais, je le fais à mon corps défendant, je l’ai tou-
jours fait, même très jeune ». À l’inverse, George Sand refuse de se plier aux exigences de sa mère pour
être belle ; elle précise : « Je ne pus jamais m’astreindre à soigner ma personne », et plus loin, « vivre […]

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sous une cloche pour n’être ni hâlée, ni gercée, ni flétrie avant l’âge, voilà ce qu’il me fut toujours impos-
sible d’observer ». De même, Frida Kahlo se présente, dans son autoportrait, avec tous ses « défauts »,
tout ce que les hommes et la société condamnent lorsqu’il est question de séduction féminine, à savoir
sa pilosité très marquée au niveau du visage. Elle se peint telle qu’elle est, avec ses sourcils fournis et le
duvet de moustache au-dessus de ses lèvres, sans négliger pour autant un aspect séducteur : elle porte
des fleurs dans les cheveux et des boucles d’oreille. Ce paradoxe en fait l’une des femmes les plus trou-
blantes de la peinture moderne, à la beauté très singulière. De manière plus implicite, on comprend que
Simone de Beauvoir (qui était une très belle femme !) ne s’intéresse pas du tout à ce point dans l’extrait
proposé, puisqu’elle n’évoque que son intérêt pour le travail d’écriture, et à la question qu’elle se pose,
« Qu’est-ce que ça avait signifié pour moi d’être femme », elle répond que ça n’avait « pour ainsi dire pas
compté ». L’important est ailleurs que dans sa propre réflexion sur sa féminité, et son discours s’oriente
vers « la condition féminine dans sa généralité ».

[3e argument] Ce qui nous amène tout naturellement à notre dernier point, concernant l’importance ac-
cordée par ces femmes au travail intellectuel par rapport à l’aspect physique. L’image que ces différents
documents nous renvoient est en effet celle de femmes intellectuelles, et même Camille Laurens, qui
se plie aux attentes extérieures en matière de séduction, est capable d’analyser et de porter un regard
critique sur ces pratiques ; elle affirme d’ailleurs : « ce qui me fait vraiment horreur, ce qui me rend
amère, c’est que ça marche […], j’étais à la fois contente et infiniment triste ». George Sand et Simone de
Beauvoir affirment plus ouvertement encore cette importance du développement intellectuel par rapport
à l’aspect physique. La première refuse ainsi de « se priver de travail pour avoir l’œil frais », tandis que la
seconde, à qui l’on reproche un « air farouche », rétorque sur le domaine de l’écriture : « C’est que je vou-
drais écrire et je ne sais pas quoi. » Ainsi, l’image que ces documents renvoient est bien celle de femmes
libres (à part Camille Laurens), intellectuelles, plus soucieuses de leur intelligence que de leur physique.

[2e partie / 1er argument] Le fait que ces auteures et artiste passent par le biais de genres autobio-
graphiques rend ces témoignages d’autant plus puissants  ; on perçoit bien toute l’honnêteté de leurs
confessions, et en même temps une certaine forme de désarroi chez certaines, en particulier peut-être
chez George Sand qui n’a pas pu tenir la « promesse » de devenir « fort belle », ou chez Camille Laurens
qui ne peut se dépêtrer des contraintes sociales liées à la séduction, malgré son désir « d’être aimée
pour [elle]-même ». Dans le portrait de Frida Kahlo, on ressent aussi une forme de tristesse, de douleur,
liée en partie au collier d’épines qu’elle porte autour du cou et qui la fait saigner, mais aussi à ses lèvres
formant un mouvement triste, et à son regard planté dans les yeux de celui qui l’observe.

[2e argument] La force des témoignages autobiographiques réside d’ailleurs aussi dans ce lien très
direct créé avec le lecteur ou l’observateur ; nous sommes véritablement pris à parti par les auteures.
Ainsi, George Sand ne nous ménage pas en affirmant que sa description physique permet de « payer cette
petite dette à la curiosité souvent un peu niaise du lecteur », tandis que Camille Laurens s’adresse à nous
par le biais d’une question directe : « J’aurais voulu être aimée pour moi-même, vous comprenez ? ».
Comme nous l’avons dit précédemment, Frida Kahlo plante son regard directement dans le nôtre, nous
empêchant de détourner les yeux de sa beauté et de sa douleur. Seule Simone de Beauvoir, peut-être,
semble oublier le lecteur.

 Conclusion 

Ainsi, ces différents documents, par leur sincérité liée directement au genre autobiographique, per-
mettent de dresser le portrait de femmes souvent libres, toujours intellectuelles, des femmes qui s’in-
terrogent sur leur position dans une société majoritairement tournée vers la nécessité de plaire aux
hommes.

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Travail d’écriture (16 points)
Vous traiterez ensuite, au choix, l’un des deux sujets suivants :

 Commentaire  

Rappel du sujet

Vous commenterez le texte de George Sand, du début à « mes amis des deux sexes ».

Proposition de plan

I.  Un texte autobiographique


a.  Un « je » qui renvoie à l’auteur
b.  Les temps du récit autobiographique
c.  Des thèmes caractéristiques

II.  Le portrait d’une femme différente


a.  Un portrait sincère : « ni laide ni belle »
b.  Une femme en action
c.  Un regard porté sur l’éducation des femmes : l’importance accordée au paraître

Proposition de corrigé

 introduction 

[ 1. Accroche sur le genre] L’autobiographie est un genre récent dans l’histoire littéraire, qui remonterait
aux Essais de Montaigne, mais aurait été formalisé par Jean-Jacques Rousseau dans ses Confessions au
XVIIIe siècle. [2. Présentation de l’auteur et de son œuvre en général] Aurore Dupin entreprend de se
raconter dès 1836 ; publiant sous le nom de George Sand, elle emprunte à son mari, Sandeau, un nom
masculin afin de défendre par la plume les droits des femmes. Elle commence à rédiger ses mémoires
en 1847, et les termine en 1855. Ne respectant pas toujours le pacte autobiographique qui exige de la pré-
cision dans les dates et les souvenirs racontés, son œuvre Histoire de ma vie, relève davantage du récit de
vie que de l’autobiographie à proprement parler. [3. Présentation du passage] Dans le passage soumis
à notre étude, extrait du premier chapitre de cette œuvre, elle revient sur l’impératif de beauté exigé des
jeunes filles à l’époque, et en profite pour dresser un constat accablant de l’éducation qui leur est donnée.
[4. Problématique] Ainsi, nous pouvons nous demander comment, par l’intermédiaire d’un portrait sin-
cère, l’auteur parvient à formuler une critique sur l’éducation des femmes. [5. Annonce de plan] Nous
étudierons dans un premier temps les caractéristiques de l’autobiographie dans ce texte, avant de nous
pencher sur les différences qui font de cet auteur une femme mieux éduquée que ses contemporaines.

  Développement : première partie 

[1er alinéa  : rappel de l’axe principal et annonce des sous-parties] Ce passage relève du genre de
l’autobiographie (=Axe I), comme nous allons le démontrer en analysant en premier lieu les pronoms
personnels (=1er argument), avant de nous intéresser aux temps du récit (=2e argument). Enfin, nous
reviendrons sur quelques thèmes caractéristiques du genre (=3e argument).

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[2e alinéa : 1er argument] Le passage s’ouvre sur le pronom personnel « je », qui renvoie à l’auteur,
et marque d’emblée l’inscription du texte dans le genre de l’autobiographie. On relève en effet de très
nombreuses occurrences de ce pronom tout au long du texte, à la fois en position de sujet et d’objet,
comme par exemple dans l’expression : « J’étais fortement constituée », ou « Pour moi, je ne pus jamais
m’astreindre », ou la mise en emphase de « Pour moi » insiste encore sur cet aspect personnel du récit.
Par le biais de ces pronoms, l’auteur dresse son portrait à la fois physique et moral, puisqu’elle évoque
son apparence, comme le révèle le champ lexical associé au corps (« constituée », « des cheveux, des
yeux, des dents »), autant que son caractère. On relève ainsi de nombreuses expressions qui permettent
de brosser le portrait d’une jeune fille rebelle, déjà exigeante et intellectuelle : « je passais déjà les nuits
à lire et à écrire », « je ne pus jamais m’astreindre », « j’aime l’extrême propreté », « quoique je ne fusse
pas volontairement rebelle, la contrainte ne put m’atteindre ». Tous ces indicateurs nous précisent bien
que nous avons affaire à un texte autobiographique.
[3e alinéa  : 2e argument] Nous relevons par ailleurs les temps caractéristiques du récit autobiogra-
phique, en premier lieu ceux rattachés au système du passé qui permet d’évoquer les souvenirs. Ainsi,
nous pouvons relever de nombreux imparfaits à valeur de description, comme dans « J’étais fortement
constituée » et plus loin « Mes traits étaient cependant assez bien formés », ou d’habitude : « je pas-
sais déjà les nuits à lire et à écrire », « Ma grand-mère renchérissait encore sur les réprimandes de ma
mère ». On retrouve également les passés simples renvoyant à des actions brèves de premier plan, par
exemple dans l’expression « je n’eus qu’un instant de fraîcheur ». Face à ces temps du passé, le lec-
teur perçoit les temps du système présent, renvoyant au moment de l’énonciation, comme c’est souvent
le cas dans les récits autobiographiques. Par exemple : « Autant j’aime l’extrême propreté, autant les
recherches de la mollesse m’ont toujours paru insupportables. » Ces passages au présent et au passé
composé permettent à l’auteur d’exprimer sa pensée, au moment-même où elle évoque ses souvenirs.
[4e alinéa : 3e argument] Enfin, l’évocation de l’entourage familial, le souvenir d’enfance, sont autant
de thèmes caractéristiques de l’autobiographie. En effet, l’auteur se présente par le biais du regard que
sa mère et sa grand-mère portent sur elle, comme le prouvent leur évocation à plusieurs reprises  :
« ma pauvre mère », « ma grand-mère renchérissait encore sur les réprimandes de ma mère », « dans
l’intimité de ma famille  ». Par ailleurs, l’auteur évoque des souvenirs liés à ses premières années, et
elle emploie plusieurs fois le terme « enfance » ou des périphrases le désignant : « durant toute mon
enfance », « à l’âge où la beauté fleurit », « le désespoir de mon enfance », « dans l’enfance », « dans ma
jeunesse ». Il s’agit là de ce que l’on pourrait qualifier de leitmotiv du genre, qui consiste à revenir sur des
souvenirs précis de son enfance, ce qui paraît d’autant plus logique que l’extrait soumis à notre étude se
situe dans le premier chapitre de l’œuvre.
[5e alinéa : bilan / transition] Une première lecture du texte nous permet donc de cerner le genre du
passage, qui est bien autobiographique, comme d’ailleurs l’avait laissé supposer le titre de l’œuvre dont il
est extrait, Histoire de ma vie. Cependant, ce témoignage paraît particulier, autant par le ton qu’il dégage
que par la portée critique qu’il contient.

  Deuxième partie 

[1er alinéa : rappel de l’axe principal et annonce des sous-parties] Le portrait que brosse George Sand
d’elle-même est différent de ce que l’on pourrait attendre d’une autobiographie « féminine » (=Axe II).
En effet, elle fait preuve d’une grande sincérité, qui confère au texte une forme d’humour (=1er argu-
ment) ; par ailleurs, elle se présente comme une femme « en action » (=2e argument), ce qui lui permet
de faire, de manière implicite, la critique de l’éducation donnée aux femmes à son époque (=3e argument).

[2e alinéa : 1er argument] Par les termes assez peu flatteurs dont use George Sand pour se décrire, on
peut comprendre qu’il y a une grande part de sincérité dans le portrait qu’elle fait d’elle-même. En effet,
l’auteur se présente comme une jeune fille négligée, et elle utilise de nombreuses expressions péjora-
tives pour se décrire, aussi bien physiquement que moralement ; elle emploie ainsi un euphémisme pour
parler de son physique : « Je n’eus qu’un instant de fraîcheur », qu’elle oppose à la « beauté » dont elle
aurait dû se parer ; elle affirme avoir « l’air bête », et se décrit par ce parallélisme antithétique suscitant
l’amusement du lecteur  : «  je ne fus ni laide ni belle  ». D’autres éléments d’ailleurs laissent paraître
l’humour de l’auteur sur sa propre condition, en particulier dans les oppositions qu’elle formule entre
ce qu’elle était, et ce que les autres attendaient qu’elle soit. On relève par exemple l’opposition entre la

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promesse et la réalité dans l’expression : « j’annonçai devoir être fort belle, promesse que je n’ai point
tenue ». Par ailleurs, elle amplifie ses défauts en les comparant à la beauté de ses parents ; pour ce
faire, elle passe par le point de vue interne de sa mère : « Étant fille de deux êtres d’une beauté parfaite,
j’aurais dû ne pas dégénérer, et ma pauvre mère qui estimait la beauté plus que tout, m’en faisait sou-
vent de naïfs reproches. » On relève dans ce passage de nombreux indices de l’ironie de l’auteur, comme
l’hyperbole « beauté parfaite » ou l’exagération des termes « dégénérer » et « ma pauvre mère ». Il s’agit
d’un moyen pour l’auteur de créer une forme de complicité avec le lecteur, tout en indiquant déjà qu’elle
n’accorde pas tant d’importance qu’il le faudrait à son physique.
[3e alinéa : 2e argument] En effet, la jeune Aurore Dupin se préoccupe bien davantage du fait de pouvoir
continuer à agir et à lire qu’à être belle. On comprend rapidement que ce jugement porté sur sa beauté pro-
vient moins de se propre opinion que du regard que les autres portent sur elle. On le perçoit par les formules
impersonnelles que l’auteur emploie, et en particulier par les infinitifs et les présentatifs : « devoir être fort
belle », « voilà ce qu’il me fut toujours impossible d’observer », et par l’emploi du pronom impersonnel ren-
voyant aussi bien à la famille qu’aux éducateurs ou aux sœurs du couvent : « on me l’a dit de même, et (…)
il faut bien que cela soit vrai ». Mais ce que la jeune fille semble refuser, plus que la beauté en elle-même,
ce sont les contraintes liées à cette recherche de beauté. On relève de très nombreuses occurrences du
terme « beauté » et de ses extensions (« fort belle », « la beauté », « une beauté parfaite », « estimant la
beauté »…), mais la liste des consignes pour acquérir et entretenir cette beauté est sans fin. L’énumération
des verbes à l’infinitif et à la forme négative qui constitue le cœur de notre passage les rappelle, et chaque
contrainte vient s’opposer à une liberté dont on prive la jeune fille : « Se priver de travail pour avoir l’œil
frais, ne pas courir au soleil, quand ce beau soleil de Dieu vous attire irrésistiblement ; ne point marcher
dans de bons gros sabots, de peur de se déformer le coup de pied ; porter des gants, c’est-à-dire renoncer
à l’adresse et à la force de ses mains, se condamner à une éternelle gaucherie, à une éternelle débilité, ne
jamais se fatiguer, quand tout nous commande de ne point nous épargner, vivre enfin sous une cloche pour
n’être ni hâlée, ni gercée, ni flétrie avant l’âge…» Tous ces verbes à l’infinitif évoquent l’interdit, et la forme
impersonnelle accentue plus encore cet aspect de règlement. Il nous semble presque entendre les ordres
formulés par les sœurs du « couvent » dont il est question à la fin de ce paragraphe.
[4e alinéa : 3e argument] Enfin, on comprend que ce rejet de l’éducation que l’on a tenté de lui prodiguer et
qui donne toute son apparence au paraître contre la liberté physique et intellectuelle est une façon implicite
pour l’auteur de critiquer, de manière plus générale, l’éducation qui était alors donnée à toutes les jeunes
filles de son temps. Ainsi, dans la longue énumération que l’on vient de citer, on comprend que l’auteur
parle au nom de toutes les jeunes filles car le « je » est devenu un « vous » ou un « nous » plus englobant,
par exemple dans ce passage : « ne jamais se fatiguer, quand tout nous commande de ne point nous épar-
gner ». Contrairement à ce que l’on cherche à imposer aux femmes, George Sand rejette la « mollesse » et
appelle à l’action, physique et intellectuelle ; elle veut en effet « courir », « marcher », « se fatiguer » ; elle
veut « lire » et « écrire ». Les infinitifs « se condamner » et « vivre sous une cloche » insistent sur l’isole-
ment qui guette les jeunes filles trop préservées du monde, et l’adjectif « éternel », répété deux fois dans les
expressions péjoratives « éternelle gaucherie » et « éternelle débilité », souligne l’aspect immuable de cet
état de fait. L’auteur se révolte contre cela, comme le prouvent les nombreux termes relevant de l’isotopie
du refus, de la rébellion : « je ne pus jamais m’astreindre », « insupportables », « voilà ce qu’il me fut tou-
jours impossible d’observer », « la contrainte ne put m’atteindre ». On comprend que sa forte personnalité
et son caractère lui ont permis de ne pas se soumettre à ces exigences, mais elle ne parle pas qu’en son
nom, et c’est à plus d’égalité et de liberté pour les autres femmes qu’en appelle l’auteur.
[5e alinéa : bilan] Dans les dernières lignes de notre passage, George Sand en conclut qu’elle a bien fait
de ne pas se soumettre à cette éducation aberrante, car elle trouvé une forme d’équilibre, et est devenue
une femme épanouie et bien entourée. Mais qu’en est-il des autres femmes de l’époque ?

 Conclusion 

[Réponse à la problématique] Ainsi, en dressant d’elle-même un portrait sincère et teinté d’humour,


l’auteur parvient à formuler une critique de l’éducation donnée aux jeunes filles à son époque, qui semble
tout miser sur l’apparence au détriment du développement physique et intellectuel. [Ouverture] D’autres
auteurs avant George Sand, et par le biais d’autres genres, ont également cherché à dénoncer cet état
de fait, comme par exemple de Choderlos Laclos, par l’intermédiaire de son personnage, la marquise de
Merteuil, qui se rebelle contre cette éducation dans Les Liaisons dangereuses.

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  Écriture d’invention 

Rappel du sujet

Vous rédigerez la préface à une autobiographie de femme célèbre, dans laquelle vous expliquerez les
différents intérêts de se servir de « l’écriture de soi » pour opérer un changement sur le monde.

Proposition de corrigé

[Introduction] C’est un honneur pour moi de vous présenter aujourd’hui l’œuvre de George Sand, Histoire
de ma vie. Ce n’est pas l’œuvre d’un auteur parmi d’autres que vous tenez entre les mains aujourd’hui,
c’est l’œuvre d’une femme hors du commun, d’une femme engagée, qui sut toujours porter sur le monde
qui l’entourait un regard à la fois sans concession et toujours capable de s’émerveiller. George Sand…
Derrière ce nom d’homme se cache une femme volontaire, Aurore Dupin, qui sut se servir de sa plume
comme d’une arme combattant sans violence les injustices de son temps. Elle rédigea de nombreuses
œuvres en faveur de l’émancipation des femmes, comme Indiana, mais elle témoigna aussi, au fil des
pages de son autobiographie, de sa propre expérience. C’est donc le témoignage exceptionnel d’une
femme d’exception que vous aller découvrir dans cette œuvre.

[Argument 1] Il nous paraît que le choix de l’autobiographie par George Sand lui permet de porter un
regard particulièrement mordant sur le monde. En effet, l’auteur y fait part de son opinion sur les événe-
ments de son temps, tout en partageant avec le lecteur ses réflexions sur ce qu’elle est, en toute intimité.
Le témoignage gagne ainsi en force, le lecteur se sentant davantage impliqué, comme concerné par ce
que l’auteur lui raconte. Vous aurez l’impression, ami lecteur, au fil de ces pages, d’entrer véritablement
en conversation avec la jeune Aurore Dupin, de partager ses colères et ses passions, de l’écouter vous
raconter son histoire ! L’histoire de cette jeune fille qui vécut dans une famille hors du commun, bravant
les conventions sociales, ce qui lui permit sans doute de devenir cette femme libre. On sait que son père,
descendant d’une famille aristocratique, s’autorisa à épouser une petite actrice, une «  bohémienne  »
comme aimait à l’appeler Aurore. Élevée par son grand-père, la jeune fille apprend très tôt à gérer un
domaine, à monter à cheval, à s’habiller en garçon, à fumer la pipe… Elle jouit grâce à ce grand-père pro-
videntiel d’une liberté bien rare pour les jeunes filles à son époque. Et plus tard, lorsqu’elle quittera son
mari volage et rustre pour son amant Jules Sandeau (puis pour d’autres amants…), elle écrira à sa mère
ces mots qui la définissent tout entière : « Pour moi, ma chère maman, la liberté de penser et d’agir est
le premier des biens ». Liberté qu’elle s’employa à mettre en œuvre toute sa vie, et en particulier dans
ses écrits.

[Argument 2] Mais George Sand n’écrit pas simplement pour « raconter sa vie » ; elle écrit aussi, et sur-
tout, pour faire évoluer le monde qui l’entoure. D’une nature très indépendante, pour ne pas dire révoltée,
cette jeune femme était scandalisée par ce que l’on imposait aux femmes de son époque. Elle sut, en des
termes choisis, mettre en valeur cette condition scandaleuse des femmes au XIXe siècle, elle qui avoua,
comme vous allez le découvrir dans cette œuvre, s’être sentie « humiliée d’être femme », humiliée par
son statut civique d’éternelle mineure, par sa soumission à la loi des hommes, par l’absence de recon-
naissance de ses talents intellectuels. Dès son premier roman, Indiana, paru en 1832, elle s’inspire de sa
propre vie pour dresser le portrait d’une femme forte, qui s’oppose frontalement à son mari, une femme-
esclave comme il y en avait tant à l’époque, qui se révolte contre son maître comme elle fit elle-même
contre son mari, Casimir Dudevant. Mais George Sand n’est pas la première à s’inspirer de sa propre
expérience pour faire évoluer le monde, et en particulier pour mener le combat féministe sur ce terrain
particulier qu’est le mariage. On retrouve déjà dans l’œuvre de Mme de Lafayette ce type de témoignages
cachés derrière les apparences de la fiction, et même les hommes prennent ce combat en charge, comme
par exemple Choderlos de Laclos, dans ses célèbres Liaisons dangereuses. Et il semble que peu à peu,
ce combat ait porté ses fruits. Même si la situation n’est toujours pas absolument équitable, même s’il y
a peu encore des auteurs comme Simone de Beauvoir devait s’exprimer sur ce sujet dans Le Deuxième
sexe, même si des auteurs comme Annie Ernaux ou Camille Laurens aujourd’hui doivent encore passer
par le biais de la fiction ou de l’autofiction pour dénoncer certaines injustices, il semble que grâce à ces
femmes, grâce à leurs mots, les choses aient évolué en faveur de plus de liberté pour les femmes.

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[Argument 3] Il faut dire que ces femmes célèbres ont une influence réelle sur leurs lecteurs, et par ce
biais, sur le monde qui les entoure. Le passage par l’autobiographie, par l’écriture de soi, en donnant
à entendre les souffrances de celles qui nous paraissent peut-être plus admirables que d’autres, per-
met d’influencer les esprits, et donc de faire évoluer en partie la société, de faire bouger les frontières.
George Sand a énormément choqué par ses idées féministes, puisqu’en réclamant l’égalité entre mari et
femme, elle sapait l’autorité masculine toute-puissante à son époque. Elle fut même accusée de porter
atteinte aux bases mêmes de la société, et ses ouvrages, jugés immoraux, furent mis à l’index par l’Église
en 1863. Mais qu’à cela ne tienne ! George Sand poursuivit son combat, et continua, depuis sa maison
de Nohant, à œuvrer en faveur de la libération des femmes. Que l’on pense à sa Lettre aux membres du
comité central rédigée en avril 1848, dans laquelle elle en appelle à une vraie égalité entre hommes et
femmes, en particulier en termes d’éducation, de droit au travail, et dans le mariage. Certes, il fallut
attendre plus d’un siècle pour voir la réalisation de toutes ses aspirations, mais nul doute que cette
farouche colère fut de celle qui nous permit de voir la condition féminine évoluer.

[Argument 4] Enfin, le choix de « l’écriture de soi », au-delà de tout ce que l’on vient d’en dire, permet à
l’auteur de laisser une trace presqu’indélébile dans l’histoire littéraire. L’être humain, malgré les évolu-
tions sociales qui l’entourent, demeure, fondamentalement, le même. Il est animé des mêmes passions,
des mêmes désirs, des mêmes peurs. Et le récit de soi garde cette saveur qui fait qu’à travers les siècles,
nous retrouvons le même plaisir à nous découvrir, individuellement, sous les mots d’un autre. Que l’on
pense aux réflexions de la jeune George Sand sur cet injonction à être belle lorsqu’elle était petite, et
qu’on la mette en résonance avec des extraits du livre de Camille Laurens, Celle que vous croyez, et l’on
comprendra alors que si certaines choses évoluent, il reste malgré tout encore un chemin immense à
parcourir pour que la femme se sente à l’égal de l’homme. Parfaitement son égal.

[Conclusion] C’est ici que s’achève ma préface, je ne retarde pas davantage le moment où vous allez
pouvoir vous plonger avec délice, ami lecteur, dans la vie et les mots de George Sand.

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