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LA SYMBOLIQUE DU CERF

EN EUROPE CELTIQUE ET GALLO-ROMAINE

Gérard Poitrenaud

Cet article est issu de mon étude Cycle et Métamorphoses du dieu cerf (Toulouse : Lucterios, 2014) actuellement

indisponible, dont je prépare une réédition à paraître fin 2015 ou début 2016.

mots-clés :
Arduinna, Artémis, cerf, Cernunnos, Dioscures, Edern, elembios, Ésus, Llew, Mabinogi, Mélusine, Raymondin, Taliesin,
Théleau, trinox samoni, troménie, Zâl.

Si le dieu aux bois de cerf est bien, comme je le propose, le grand dieu des Celtes, il
importe de vérifier que la vénération de cet animal et son usage cultuel, les dépôts,
offrandes et sacrifices qui le concernent, sont bien attestés, et que cette vénération se
distingue de celle qui a cours ailleurs dans l’Empire romain. Partout en Europe et en Asie,
depuis l’âge paléolithique, les bois de cerf ont symbolisé le cycle du renouveau de la vie.
Les bois de cerf ont des vertus thérapeutiques pour Aristote (Histoire des animaux, IX, 5, 611a)
et pour Pline l’Ancien1. La question est de savoir si les peuples de culture celtique ont eu
une image originale du cerf ou s’ils ont conservé une image communément répandue,
mais qui s’est plus ou moins effacée ailleurs quand le polythéisme d’État s’est imposé aux
abords méditerranéens. Il ne pourra s’agir évidemment d’une analyse exhaustive dont
nous n’avons pas les moyens. Nous proposons ici une exploration visant à dégager les
lignes principales de ce que pouvait signifier le cerf et ses bois dans la pensée mythique
des Celtes.
Un jeu de mots celtique assimile le cerf et les êtres célestes (et par extension les
dieux) : la racine du mot *devos proche du latin dies ; *dives, « lumière du jour, ciel » est un
homonyme de *devos proche du teutonique *dhewo-m, « cervidé », qui a donné deer en
anglais. *Devo-ialon peut donc désigner suivant le contexte « la clairière des cerfs » ou « la
clairière déleste » 2. La découverte de restes de cervidés apprivoisés dans l’enceinte de
sanctuaires semble indiquer que ce double sens n’était pas anecdotique, mais exprimait au
contraire une réalité profonde.
Tite-Live et Plutarque ont témoigné indirectement du caractère sacré du cerf chez les
Celtes. Au contraire des Romains qui méprisaient le cerf « lâche », parce qu’il détalait, les
Celtes le vénéraient, non pas comme il a été dit à cause d’un environnement plus boisé,

1 Gricourt et Hollard 2010, 188.


2 Delamarre 2001, 118-119. Maier 2004, 52. Pons, 2008, 218.
La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 2

mais parce qu’ils le comprenaient dans un autre contexte symbolique. On en a un exemple


à propos de la bataille de Sentinum, qui opposa en 295 A.C. des armées samnites et
gauloises à une armée romaine, quand une biche apparut entre les lignes et fut poursuivie
par un loup. La biche qui se réfugia dans le camp gaulois fut tuée, tandis que le loup
traversa sain et sauf les lignes romaines. Un soldat romain se serait écrié fort à propos :
« La fuite et la mort passent de ce côté-là, où vous voyez étendu l’animal consacré à Diane » (Tite Live X,
17-18) . On sait que la magie a toujours fait partie de l’art de la guerre et que les Romains
avaient des prières pour évoquer les dieux de leurs ennemis. Il était vital de garder secret
le nom du dieu capable de donner la victoire. Georges Sand évoque un tel tabou à propos
du Georgeon, le diable berrichon, dont le nom terrible ne devait jamais être écrit « ni sur
papier, ni sur bois, ni sur ardoise, ni sur pierre quelconque, ni sur étoffe, ni sur terre, ni sur poussière
ou sable, ni même sur neige tombée du ciel 3 . » Il est très probable qu’il était interdit de
prononcer le nom du dieu de la tribu. Teutatès (« Celui de la tribu ») n’est qu’une
périphrase. Le surprenant récit qui met en scène le légionnaire plein d’à-propos peut
laisser penser que la biche était l’équivalent de la louve romaine, c’est-à-dire l’animal
emblématique des Celtes4. L’hypothèse ne peut pas être vérifiée pour le moment. L’idée
d’un totémisme des Celtes a été repoussée vigoureusement, peut-être trop. L’anecdote a
d’ailleurs pu être inventée a posteriori à partir des restes d’un sacrifice observé dans le
camp gaulois. Jean-Jacques Hatt a envisagé que le loup faisait partie du rituel. Son
hypothèse a l’avantage d’expliquer la présence insolite d’un loup et d’une biche au milieu
de lignes d’armée qui faisaient assurément un vacarme épouvantable. Pouvait-il s’agir d’un
sacrifice ? Jean-Louis Brunaux affirme qu’on ne rencontre pas de reste d’animaux
sauvages dans les sanctuaires. Selon lui, les Gaulois du I er siècle, comme les autres peuples
indo-européens, ne sacrifiaient que les animaux de leur production. Mais ils constituaient
un pécule en versant une amende pour chaque animal tué à la chasse. À la fin de la saison,
ils achetaient une chèvre, un mouton ou un veau qu’ils sacrifiaient à Artémis pour la
dédommager de ce que les hommes avaient prélevé sur son troupeau. Les animaux
sauvages, poursuit l’auteur, représentaient un « capital divin » qu’il n’était permis de tuer,
que dans des circonstances particulières et avec contrepartie5. La guerre était-elle une de
ces circonstances, parce que le domaine des dieux lui-même était menacé ? Nous verrons
que l’auteur dresse un tableau trop homogène, et que des cerfs ont bien été sacrifiés y
compris dans des sanctuaires. La question est donc de préciser en quelles occasions.
L’histoire de la biche du tribun Quintus Sertorius est insérée dans un contexte
équivalent : la guerre, l’intervention divine et la présence de troupes barbares de culture
celte. L’action se passe pendant la répression de la révolte des Celtibères en 97 A.C.
Plutarque raconte que Sertorius avait perdu un œil dans une bataille, ce qui l’aidait à
passer pour un magicien. On lui avait offert un jour un faon blanc qu’il avait dressé pour
le suivre partout et pour s’approcher de son oreille :
il se mit peu à peu à la diviniser, pour ainsi dire, débitant que sa biche était un présent de Diane ; et, comme il
connaissait l’empire de la superstition sur les barbares, il leur fit accroire que cet animal lui découvrait bien des
choses cachées […] Était-il informé, par quelque avis secret, que les ennemis avaient fait une incursion sur les
terres de sa province, ou qu’ils avaient sollicité une ville à la défection, il feignait que la biche lui avait parlé
pendant son sommeil, et qu’elle lui avait commandé de tenir les troupes prêtes à combattre. Apprenait-il qu’un

3 Donteville, 1947, 126.


4 Thevenot 1968, 149.
5 Brunaux 2010, 135-136.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 3

de ses lieutenants avait eu quelque avantage, il faisait cacher le courrier, et il produisait en public la biche
couronnée de fleurs, ce qui annonçait une heureuse nouvelle […] Il fit cacher la biche ; et, peu de jours après, il
parut en public avec un visage gai, disant aux chefs des barbares que la divinité lui avait annoncé, pendant son
sommeil, qu’il lui arriverait bientôt quelque chose d’heureux ; puis, montant sur son tribunal, il donna
audience à tous ceux qui se présentèrent. Cependant la biche, lâchée par ceux qui la gardaient près de là,
voyant Sertorius, s’élance, toute joyeuse, vers le tribunal, appuie sa tête sur les genoux de Sertorius, et lui lèche
la main droite : c’était la caresse qu’elle avait accoutumé de lui faire auparavant. Sertorius y répond par des
témoignages d’une véritable affection, jusqu’à verser des larmes. Après quelques moments de surprise, les
spectateurs finissent par battre des mains, en s’écriant que Sertorius est un homme divin et chéri des dieux (Les
6
Vies des Hommes illustres. III, 11 et 20) .

Le motif de la biche messagère des dieux couronnée de fleurs rappelle le torque tendu
au cou du cerf sur la plaque de Gundestrup. Elle incarne la parole divine et la prophétie.
Son apparition est un signe favorable qui prouve la proximité et la faveur des dieux. On
peut donc se demander si les Celtes n’ont pas voulu s’en assurer également avant de
combattre à Sentinum.

Le cerf a été peu consommé en milieu citadin à l’époque romaine


et ce n’est qu’au Bas-Empire qu’il devint une bête à traquer, surtout en
Germanie. Cela explique peut-être qu’à Antran (Vienne), les squelettes
entiers de deux cerfs, l’un adulte, l’autre plus jeune, côtoyaient des
restes de porc et de lièvres dans une sorte de tombe pourvue
d’amphores. La consommation de la viande de cerf était-elle interdite ?
Réservée à une élite restreinte et dans des circonstances particulières ?
Cependant, quelques graffitis attestent que la chasse au cerf suivant
« l’usage des Gaulois » (Arrien) 7 est courante en Gaule romaine. Un
décor de poterie d’Alésia représente un cerf entouré de sarments de
lierre, avec une longe fixée par un anneau à sa bouche pour chasser au
brame8. La mosaïque de Lillebonne représente une chasse au brame
dans un contexte cultuel d’un sanctuaire d’Apollon et de Diane. Cette Fig. 2 Cerf inhumé de
Gond-Pontrouve en
façon de chasser devait avoir une composante rituelle, car, selon Charentes
Arrien, les Celtes ne chassaient (d’après Charenteligne)
Libre en
9
jamais « sans les dieux » . Le
témoignage de saint Germain, qui écrit que Childebert
I er chassait à la gauloise et suspendait des ramures de
cerf et des hures de sanglier sur les branches d’un
poirier sacré 10 , atteste la permanence (ou le
renouvellement) de cet usage jusqu’à la deuxième moitié
Fig. 1 Chasse au brame sur un décor de poterie
du VI e siècle pour le moins. Le graffiti de l’arène de
d’Alésia Vesunna (Périgueux) qui montre des cerfs acculés dans

6 Trad. Alexis Pierron. Paris : Charpentier, 1854.


7 Lombard-Jourdan 2009, 52.
8 V. Benoit 1969, fig. 123 et 272.
9 Brunaux 1986, 97-98.

10 Lombard-Jourdan 2009, 53.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 4

un enclos, des cerfs blessés par des flèches et des sangliers qui se bousculent, a une
signification un peu différente11, car on peut se demander si elle n’était pas sacrilège aux
Gaulois fidèles aux anciennes croyances. Un graffiti figurant un cerf sur un tesson
découvert dans l’enceinte de l’oppidum de Manching en Bavière, c’est-à-dire en milieu
citadin indique cependant que le cerf n’est pas seulement représenté dans un contexte de
chasse 12.
Le cerf est un symbole funéraire dès l’époque de Hallstatt. La présence de figurines de
cerfs en terre cuite dans les tombes gallo-romaines confirme son caractère sacré et son
rôle de premier plan sur le plan funéraire. Le décor peint d’une urne cinéraire de la tombe
de Gemeinlebarn (Autriche), représente des figurines sacrées, parmi lesquelles un cavalier
et un cerf. À Ville-sur-Lumes (Ardennes), trois urnes cinéraires de la nécropole des
Sarteaux contenaient, outre les débris habituels de porc et de pigeon, le bas de patte
arrière droit d’un cerf dont la valeur ne pouvait pas être alimentaire, mais sans doute
analogue à celle de la patte de lapin. Dans un puits funéraire des environs de Bernay
(Eure), plusieurs cerfs entiers, ainsi que des têtes et des bois de cerfs ont été découverts
au milieu de nombreux ossements. Dans la région badoise, une tombe alémanique,
d’époque mérovingienne contient la dépouille d’un guerrier muni de son épée, en
compagnie d’un cheval et d’une biche. Les enfouissements montrent une continuité
remarquable puisque les plus anciens remontent aux Gallo-Romains et les plus récents
aux Mérovingiens. Comme pendant la préhistoire, les reliques de cerf protègent les
défunts et facilitent l’accès à la vie éternelle 13, sans doute parce qu’il incarne la force vitale
qui meurt en hiver et renaît au printemps 14.
Il est attesté que le cerf a été associé à la mort et peut-être au sacrifice humain. C’est ce
que montre un masque de cerf découvert dans la grotte de Majda-Hrasko en Slovaquie
avec deux autres masques sciés dans la partie faciale de crânes humains, ainsi que les
ossements d’une douzaine d’hommes, qui portaient des traces de coups de couteau, de
bris intentionnels et de brûlures. Les découvreurs ont émis l’hypothèse qu’il s’agissait de
rituels magiques et initiatiques comprenant des sacrifices humains 15 . Il est facilement
concevable que les masques confectionnés avec des crânes humains ont symbolisé la mort
ou celui qui la donne. Mais la signification du masque de cerf est pus difficile à
comprendre dans ce domaine. Servait-il pour indiquer à l’initié ou à celui qui passait en
jugement qu’il allait revivre et donc sortir vivant du monde des morts ? Était-il porté par
le « juge » qui décidait de la vie ou de la mort parce qu’il représentait l’entité divine
gouvernant la vie et la mort ainsi que le passage entre les deux ?

La corne, celle du cerf particulièrement, a toujours servi à protéger des forces


malignes 16. Chez Pline, les bois de cerf symbolisent la longévité et la résurrection de par
leur renouvellement annuel (Histoire naturelle, VIII, 50)17. Le cerf est capable selon lui de se

11 Barbet, Alix et Fuchs, Michel : Les murs murmurent. Graffitis gallo-romains. Catalogue de l’exposition créée au
Musée romain de Lausanne-Vidy : 2008, 75 et 96-105.
12 Birkhan 1999, 276 ; Müller 2009, fig. 177 ; Peter-Röcher 2012-2013, 195.
13 Thevenot 1968, 153.

14 Hatt 1986, 363-365.

15 Brunaux 2000, 209.


16 Gricourt et Hollard 2010, 183-184.

17 Gricourt et Hollard 2010, 129-130. Cf. De Vries 1963, 184.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 5

soigner lui-même, et sa chair éloigne les fièvres. Sa peau et l’os cruciforme de son cœur
favorisent les accouchements 18, c’est-à-dire les passages vers la vie. À la fin du IV e siècle,
Symmaque qui fut élevé en Gaule, écrivit pour décliner l’offre des viscera ferina que ses
amis lui avaient fait parvenir comme reconstituant, révélant ainsi qu’on mangeait très
vraisemblablement les tripes du cerf afin de bénéficier de leur pouvoir régénérateur et
rajeunissant (Epist. IV, 18) 19. En Espagne, le motif du cerf décore les aiguières de bronze
servant pour les libations pour illustrer la vertu de rénovation de l’eau 20, qu’on retrouve
aussi dans les légendes du Moyen-âge dans lesquelles un cerf conduit le héros à la
fontaine de Jouvence.
La force virile du cerf est un lieu commun en Europe où on a employé jusqu’à la fin du
XIX e siècle sa corne broyée pour ranimer les vigueurs déclinantes 21. Chez les Anciens, la
vigueur, la fécondité et le renouveau de la vie étaient liés, d’où l’emploi des rondelles
découpées dans des bois de cerf pour renforcer la vigueur sexuelle, écarter les esprits
malfaisants et s’assurer une longue vie. On portait les rondelles taillées dans les meules ou
dans les sections rénovatrices à la base des bois pendant la vie et dans la tombe. De telles
rondelles percées d’un trou de suspension ont été découvertes dans des tombes gallo-
romaines, mérovingiennes et carolingiennes, en Gaule, en Allemagne du Nord et en
Hollande. Les médaillons fabriqués avec des andouillers étaient portés sur des vêtements
ou attachés à des parois afin de parer les dangers menaçant les chevaux et les êtres
humains, en particulier les enfants. Ces amulettes étaient décorées. Les décors
symétriques et géométriques ont été utilisés dès l’époque celtique, mais surtout pendant la
période romaine. Les décors phalliques, plus courants en Germanie, semblent dater de la
période romaine, alors que les médaillons dotés d’une ornementation géométrique
correspondent aux périodes mérovingienne et carolingienne. Ces médaillons bruts,
tournés et sculptés étaient portés cousus sur les vêtements ou suspendus, ce qu’on peut
reconnaître au fait que le trou, par ex. sur un médaillon de Langres, présente une forme
en goutte d’eau causée par l’usure liée au passage d’un cordon. Leur rôle protecteur est
prouvé dans le sanctuaire des sources de la Seine par un médaillon qui représente une tête
d’enfant et par des statues d’enfants portant sur la poitrine des petits objets ronds, dont le
rapport d’échelle correspond aux dimensions des médaillons. La découverte à Besançon
de médaillons dans la sépulture d’un aurige confirme également leur rôle protecteur
contre les maléfices ou la malchance. Ils devaient être cousus sur les vêtements du défunt.
La présence du phallus stylisé sur deux d’entre eux confirme s’il était besoin que le bois
de cerf est associé à la force virile. Ils se trouvaient avec des perles, des défenses de
sangliers et des coquillages probablement reliés entre eux pour former un collier
apotropaïque 22.

Les graffitis, les bois de cerfs et autres objets en rapport avec le cerf ont été
découverts aussi dans des contextes cultuels non funéraires, comme à Entrammes

18 Lombard-Jourdan 2009, 32.


19 Lombard-Jourdan 2005, 106.
20 Thevenot 1968, 153. Benoit 1969, 48.

21 Thevenot 1968, 152-153. Cf. Gricourt et Hollard 2010, 130-132. Elle est encore employée aujourd’hui en Chine
dans le même but.
22 Émilie Alonso : Les médaillons en bois de cerf de l’est et du centre-est de la Gaule romaine : étude d’après

l’ensemble d’Alésia. Revue archéologique de l’Est, t. 55, 2006, 197-223

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 6

(Mayenne), sur un fût de colonne du sanctuaire de Port-Salut, en même temps que des
vestiges d’animaux, la plupart de cerfs, surtout des éléments de tête. Les exemplaires de
bois de cerf découverts aux sources de la Seine associent les vertus prêtées au cerf aux
eaux vives qui rendent fécond et renouvellent la vie. Dans le sanctuaire de Digeon
(Somme), où avait lieu un culte impérial pendant le Haut-Empire, les mandibules d’une
dizaine de cerfs, déposées près de restes d’animaux domestiques témoignent de la
préparation des têtes et de leur exposition cultuelle. Sur le site d’habitat de Levroux, un
buste d’ancêtre ou de personnage divin a été découvert dans une fosse du début du I er s.
A.C. en compagnie d’un bois de cerf et d’un polissoir23. À Châteaumeillant, une statuette
qui participe du comblement d’un puits daté des années 30-20 A.C. a été déposée au-
dessus d’une couche d’andouillers de cervidés24. Le bois de cerf déposé en offrande dans
un puits rituel semble montrer que la force de fécondation et de vie dont il est « chargé »
est propitiatoire, qu’elle favorise le passage des objets symboliques dans les monde des
dieux, la bienveillance de ceux-ci, leur acceptation du don et leur disposition à accorder
en échange leurs bienfaits.
Une paire d’andouillers fut également découverte dans une fosse peu profonde lors des
fouilles des thermes de Hooks Cross près de Stevenage (Hertfordshire). L’os frontal percé
de deux trous carrés montre qu’ils avaient été fixés sur un support et avaient été exposés.
La proximité d’un foyer suggère un rapport avec le feu25. Mais on peut se demander si la
tête de cerf représentait la divinité ou si elle avait la fonction de faciliter l’opération du
sacrifice. Les archéologues Jean Trinquier et Christophe Vendries mentionnent encore
d’autres exemples 26, parmi lesquels un graffiti découvert sur le site du sanctuaire d’Athée
en Mayenne, dédié à Mars Mullo (CIL XIII, 3148, 3149)27. Il montre un cerf entravé enfermé
dans une sorte de cage avec partie surélevée. Les auteurs l’assimilent à un fanum circulaire
avec une tour ronde contre laquelle s’appuie une galerie. Le cerf était-il promis au
sacrifice dans le sanctuaire du dieu guerrier ou incarnait-il la présence du divin ?
La tombe d’un cerf inhumé comme un être humain au Mont Granet (Marne) a quelque
chose de sensationnel, parce que l’animal était couché sur le côté droit, la tête repliée,
dans la fosse, peut-être sacrifié ; ce qui relativise l’hypothèse de Jean-Louis Brunaux sur
l’interdiction de sacrifier les animaux sauvages. Le cerf était doté d’une bride et d’un
mors ; il a donc été attelé. Ses andouillers ont été sciés à la base de son vivant28. Ces
détails écartent l’hypothèse du sacrifice et suggèrent au contraire que l’animal était sacré
et qu’il a servi au culte alors qu’il vivait encore, soit qu’il fût présenté lors de cérémonies,
soit que sa présence dans l’enceinte du sanctuaire ait servi à rappeler celle du divin, un
peu comme la lampe rouge de nos églises.
Ces découvertes indiquent que le cerf n’était pas un animal comme les autres, et que ce
statut privilégié, lié sans aucun doute à des croyances et à des rituels, se traduisait aussi

23 Duceppe-Lamarre 2002, 294 (n o inv. 126 F, 307).


24 Gomez de Soto/Milcent, 2002, 263.
25 Green, Miranda : Les Druides, 2000, 58.

26 Trinquier, Jean ; Vendries, Christophe (dir.) : Chasses antiques. Pratiques et représentations dans le monde gréco-
romain III e siècle av. – IV e siècle apr. J.-C.) Rennes : 2009.
27 Lambrechts 1942, 134-135. L’épiclèse se rapporte-t-elle au « butin » amassé en son honneur (Cf. Benoit 1969, 73),

au gaulois molton (bélier), à cause des cornes de bélier qu’on retrouve aussi sur la coiffure d’Alexandre le Grand, ou
encore à molatus (louange), apparenté au cymrique moli (louer), parce qu’il faut louer celui qu’on craint ?
28 Henri-Paul Eydoux : Hommes et dieux de la Gaule, Plon, 1961, 166 et 170 ; Jean-Jacques Mourrau : Le mythe de

la Grande Chasse. [http://vouloir.hautetfort.com/archive/2012/04/20/chasse-fantastique.html]

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 7

dans son inhumation. C’est le cas des quatre cerfs inhumés dans des fosses au lieu-dit La
Saulsotte à Nogent-sur-Seine, qui ont assurément servi dans un sanctuaire autrement que
pour y être sacrifiés, car leurs squelettes aux bois sciés sont associés à des éléments de
harnachement en fer et à une céramique du deuxième siècle fixée sur une des têtes. À
Créteil, un squelette de cerf montre des traces d’usure sur la face latérale des dents,
révélant qu’il avait longtemps été attaché à une longe par une embouchure. Et à Limoges,
au sein de la ville antique, un squelette de cerf aux bois sciés est associé à une
mentonnière de fer. Les moignons usés indiquent qu’il avait vécu longtemps avec les bois
sciés. Le respect de la dépouille et le lieu de sépulture réservé confirment que le cerf avait
une dignité qui ne peut être comparée qu’à celle du cheval dans certains cas, ou de l’être
humain. Un interdit le concernant, du moins dans le contexte d’un sanctuaire, semble
avoir empêché l’équarrissement des bêtes et l’enlèvement des pièces de harnais. Elles
avaient été dédiées à la divinité et reprendre ce qui appartenait aux dieux était sacrilège.
Le bronze votif de Neuvy-en-Sullias, daté entre le I er s. A.C. et le I er
s. P.C., a été découvert avec d’autres objets votifs ou cultuels dans une
cache. Il est admis aujourd’hui que les éléments de ce trésor forment
un ensemble cultuel den provenance d’un ou plusieurs temples gaulois
ou fana. Le cerf est debout, en position d’arrêt, fièrement dressé sur
ses pattes, les grands yeux ouverts, semblant écouter. Le corps
puissant et massif est comme étiré. Le sexe est visible. La toison du
jabot est épaisse, les bois de dix cors, peut-être amovibles. Sabots et
ergots sont figurés de façon réaliste.
Le cerf de Biberg en Autriche a servi également
Fig. 4 Cerf votif en bronze
d’offrande votive. Son style le classe comme une
de Neuvy-en-Sullias
er
œuvre celtique du I s. A.C. Ses bois ont six pointes. La position des
pattes de devant semble indiquer qu’il est prêt à se dresser, peut-être
pour s’accoupler. Des traces de substance résineuse suggèrent aussi qu’il
était muni d’une queue en crin naturel, de cerf sans doute ou de cheval,
auquel on devait accorder quelque pouvoir ou valeur symbolique. On
peut donc conclure que les cerfs étaient des hôtes habituels des
enceintes sacrées et qu’ils avaient un rôle cultuel. On peut supposer que Fig.de 3Biberg
cerf votif en bronze
en Autriche
leurs bois étaient prélevés pour l’usage du culte ou pour orner les
temples et les autels, ou enlevés parce que les animaux devaient pouvoir côtoyer les
croyants sans devenir dangereux.

La découverte d’une fosse sacrificielle à Vietze, dans l’extrême nord-est de la Basse-


Saxe prouve que l’usage de déposer des bois de cerf dans une fosse cultuelle n’est pas
exclusif aux Celtes. Située dans une dépression à proximité de l’Elbe, cette fosse est datée
entre la fin de l’âge de fer et le début du Haut-Empire et est liée à un habitat de même
époque. Une grande ramure de dix-huit pointes était placée près des parois et entourait
les autres objets comme des parenthèses. Elle est associée à d’autres bois plus petits, à
des tessons provenant de vases intentionnellement brisés, à des pierres et à des morceaux
de meules grosses comme des têtes d’enfant, aux fragments d’un grand landier
rectangulaire en terre cuite, lui aussi intentionnellement brisé, à un foyer avec de la cendre
et du sable rougi par une grande chaleur, ainsi qu’à une très grosse pierre entourée d’une

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 8

couronne de blocs d’argile durcis au feu, de tessons et de petites pierres 29. Ce n’est pas
notre objectif d’expliquer cet assemblage complexe. On peut toutefois entrevoir un rituel
comprenant une succession de plusieurs actes cultuels, ainsi que le « sacrifice » des objets
impliqués. Il est envisageable de considérer que le dépôt de la ramure autour des autres
objets favorise la réussite du sacrifice qui est manifestement une des raisons d’être de
cette « installation ». Si celui-ci suppose le passage des offrandes des hommes vers les
puissances divines et en retour des bienfaits destinés aux humains, on peut considérer que
les bois de cerf sont équivalents ou complémentaires du feu qui dans l’holocauste
transforme les offrandes de façon à ce qu’elles puissent passer dans le monde divin. On
retrouve là l’idée connue selon laquelle le cerf est le passeur par excellence, propice à la
traversée d’un fleuve comme au passage d’un monde à l’autre. Il est possible et même
probable que l’usage cultuel des bois de cerf pratiqué en Germanie diffère de celui des
Celtes laténiens ou gallo-romains. Il semble cependant raisonnable d’admettre que leurs
pratiques religieuses présentaient des ressemblances, explicables soit par la communauté
d’origine « indo-européenne », soit p ar les échanges culturels entre voisins, soit par la
reprise d’éléments à un substrat culturel préexistant, soit encore par l’action conjuguée de
ces trois facteurs.

On a vu des ossements de cerfs ensevelis de


façon remarquable, des ramures et déposées dans
des tombes, dans des fosses sacrificielles et peut-
être comme leurs effigies en bronze dans des
temples. Le cerf sert aussi de motif d’ornement sur
des objets de représentation. Mais les
extraordinaires vases peints dits de Gandaillat
(Puy-de-Dôme) qui remontent au II e s. A.C 30
constituent un cas particulier. Les objets les plus
complets proviennent de puits et de tombes. Leur
Fig. 5 Vase peint de association avec des amphores, des instruments de
Gandaillat 1   Fig. 6 Vase peint de
mouture et des vases à liquide, ainsi que l’état de Gandaillat 2
conservation des récipients permettent, selon Yann Deberge, que nous
suivons ici, d’envisager une pratique cultuelle. Ils semblent impliqués dans des pratiques
religieuses variées, à commencer par la consommation collective de boissons (vin ou
bière) au sein de l’habitat, qui se conclue par le dépôt des accessoires ayant servi à leur
exercice, partiellement détruits ou mutilés, dans des puits. Ils ont aussi été déposés en
offrande dans des structures funéraires ou dans les fondations de bâtiments (trous de
poteaux). Le dépôt dans un contexte analogue de bois de cerf avec de nombreuses
amphores vinaires et quelques outils de mouture sur le site voisin de Gondole, au Cendre
(Puy-de-Dôme) ou sur le site de la caserne Roch à Rodez, confirme l’interprétation

29 Cf. Jens Schneeweiß : « Hirschkult bei den Germanen ? Die Deponierung von Hirschgeweih und Feuerbock aus
Vietze an der Elbe », in : Festschrift Willroth. Göttinger Schriften 33, 2013, 177-190 (en ligne sur academia.edu).
30 Voir Yann Deberge : Nouvel ensemble de vases à décors peints en territoire arverne. Analyse stlistique et
sémiologique des vases à décor zoomorphes du 2e siècle av. J.-C. (Clermont-Ferrand, dép. Puy-de-Dôme, France).
Jahrbuch des Römisch-Germanischen Zentralmuseums t. 57, 2010,123-149. [en ligne journals.ub.uni-
heidelberg.de/index.php/.../16673-57478-1-PB.pdf]

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 9

religieuse 31 . Expressions tardives de l’art laténien, les représentations de cervidés au


centre de ces compositions passent d’un style plus naturaliste qui rappelle celui du chariot
de Strettweg, à un style plus stylisé qui fait penser à la sculpture en bois de Schmiden,
près de Stuttgart. Le traitement des animaux rappelle aussi le style des monnaies qui
s’épanouit surtout au 1 er s. A.C. Les animaux montrent une cambrure exagérée, leur
position est souvent contrainte. Les membres sont allongés et tordus en spirales, les
oreilles et la ramure sont extrêmement développées et stylisées, certaines parties du corps
sont hypertrophiées ou atrophiées. Mais ce n’est pas tout, loin de là.
Sur les têtes apparaissent des appendices supplémentaires, certains
exemplaires sont dotés d’une queue de cheval, une tête de cerf
fusionne avec le corps d’un oiseau échassier, la ramure s’ouvre sur des
volutes entourant un triskèle ou forme une sorte de filet. La préciosité
et le maniérisme des formes accompagnent l’exubérance, la surcharge
ornementale d’esses, de volutes et de rinceaux, de spirales qui se
terminent en forme de corne, de virgules et de losanges, de signes
héliaques. Tout se passe comme si l’artiste s’était employé à fondre les
animaux avec les éléments végétaux (arbre ou fougère), mais aussi Fig. 7 Cerf d’un vase peint
de Gandaillat (détail)
géométriques et symboliques comme peltes, yin yang, svastikas,
« masques affrontés » ou « bête dévorante », connues sur les parures et la vaisselle
métalliques des IV e et III e s. A.C. Animaux, éléments végétaux ou symboliques semble
soumis au pouvoir irrésistible de croissance et de métamorphose que produirait une sorte
d’ivresse dionysiaque. Yann Deberge a remarqué très judicieusement que les scènes
animalières évoquent la parade nuptiale : « Les postures des sujets présentés évoquent des
animaux, mâles ou femelles, lors de la période du rut. Le cerf apparaît dans la position du
brame ou dans une posture de combat. Les biches sont dans une position d’attente, queue
relevée. »32 Ce thème renvoie selon l’auteur au trinox samoni du calendrier de Coligny qui,
marquant le début de l’année gauloise, fut certainement l’occasion de démonstrations
festives et religieuses. 33 Mais cette parade nuptiale ne peut pas seulement servir à indiquer
et à illustrer une date. Cet animal visiblement si fécond, dont les bois tombent et
renaissent plus grands chaque année n’est-il pas aussi un symbole de fécondité et
d’immortalité. Et c’est à mon sens justement ce que représentent ces tableaux. Il faut
envisager que le symbolisme de la parade nuptiale du cerf et de la biche soit intimement
lié au passage de l’année ancienne à l’année nouvelle, c’est-à-dire au renouvellement du
temps et de l’univers qui doit se faire par et pour la profusion et l’abondance. Tout porte
à croire que l’agent, le créateur de ce renouvellement est le dieu cerf avec lequel ces
représentations peintes sont très probablement identifiables.

31 Deberge 2010, 144-146.


32 Deberge 2010, 143.
33 Deberge 2010, 146.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 10

D’autres objets font apparaître les cervidés dans un


ensemble narratif qui trahit une inspiration mythologique
et religieuse. C’est le cas tout d’abord des situles de bronze
produites dans les Alpes orientales entre le VII e et le IV e s.
A.C. : chez les Vénètes de l’Adriatique, les Illyriens, les
Celtes et les Étrusques. Si la part celtique ne peut pas être
exactement délimitée, on peut admettre que tous ces
peuples puisaient dans un fond commun qui forme
l’arrière-plan symbolique des scènes illustrées dont on peut
penser qu’elles sont liées à l’usage des services à boire et Fig. 8 Situle de Sesto Calende

aux circonstances dans lesquelles elles étaient utilisées par les élites. Le décor de la situle
de Sesto Calende près de Varèse, datée de la fin du VII e s. A.C. est composé de deux
registres figuratifs exécutés en pointillés34 qui rappellent le décor de la litière du prince de
Hochdorf. Le registre supérieur représente des oiseaux à becs assez longs et courbés qui
sont tournés vers la droite. Il est encadré par deux frises de boutons ou symboles
stellaires. L’encadrement des oiseaux par des cercles pointés laisse penser qu’ils
représentent le ciel et la dimension divine. Le registre inférieur correspond donc
probablement au domaine terrestre. Il représente un cerf, une biche et son faon, tournés
vers la droite, deux hommes tournés l’un vers l’autre, peut-être en train de lutter, puis
juste devant eux un oiseau placé verticalement, comme pour montrer que cette lutte
conduit à une intervention divine (ordalie ?) ou qu’elle honore les dieux. On trouve
ensuite un cavalier, puis une scène représentant les préparatifs d’un sacrifice : un cerf est
entouré par deux hommes. L’homme qui se trouve derrière lui le pousse en le maintenant
peut-être par la queue, celui qui est devant tient un bois de cerf. Devant eux, tout à
droite, un autre homme lève une hache. On peut rapprocher le geste de l’homme qui
touche la ramure du cerf de celui qui est représenté sur le char de Strettweg. Nous y
reviendrons plus avant. S’il n’est pas question de nier l’influence étrusque, l’existence
d’échanges culturels de part et d’autre des Alpes est confirmée par la découverte
d’inscriptions en langue celtique du deuxième quart du VI e s. A.C. dans l’aire de la culture
de Golasecca en Lombardie et dans le Piémont 35. La fonction de cet attouchement est
sans doute de transférer à l’homme, prêtre ou prince, le pouvoir de l’animal sur le point
d’être sacrifié. La consommation de la viande du sacrifice est attestée par des haches, des
broches et des chenets de fer. Elle distingue, selon Stéphane Verger, le banquet de
l’aristocratie nord-alpine de celui des Étrusques et des Grecs, mais semble correspondre à
l’usage des Grecs de l’époque mycénienne36.

34 Cf. Kruta 1992, 823.


35 Kruta 1992, 822.
36 Verger 2009, 3. Des banquets publics avec distribution de viande sont cependant mentionnés au XIIIe s. A.C. par

les archives mycéniennes du palais de Thèbes (Sergent, 1999, 20).

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 11

La plaque de ceinture en tôle de bronze de


Molnik en Slovénie 37 montre une chasse qui
est aussi un sacrifice. À moins que la bordure
en doubles entrelacs n’indique qu’il s’agit là
d’une scène mythique. On voit de gauche à
droite un grand molosse assis sur ses pattes de
derrière, puis un chasseur coiffé d’un bonnet Fig. 9 Plaque de ceinture de bronze de Molnik
qui s’apprête à tirer une flèche sur un cerf au
corps anormalement long, dont la ramure stylisée forme comme des volutes. L’animal
tient une grande feuille dans sa bouche et relève sa tête en arrière dans une posture
d’abandon extatique. Au milieu de la plaque, entre le chasseur et la proie se trouve un
arbrisseau doté quatre follicules pointus qui retombent de part et d’autre. Entre les deux
feuilles du haut pousse une feuille droite ou un bourgeon. L’arbre stylisé au milieu de la
plaque, entre le côté du chasseur et le côté de la proie figure peut-être le milieu du
monde. Le cerf vient d’en manger et s’apprête ainsi à acquérir l’immortalité. Le
chasseur qui tue le cerf et mange sa chair peut-il devenir immortel lui aussi ?

La situle de la Certosa qui date du début du Ve s. A.C. présente sur ses flancs quatre
registres de frises superposés. Celui du bas figure un cerf conduisant un défilé très
orientalisant de lions et de lions ailés dont l’un d’eux tient une jambe humaine dans sa
gueule. Plus haut, deux registres se consacrent à ce qu’on pourrait appeler la fête et sa
préparation. Le registre supérieur représente un double défilé de guerriers qui se
distinguent par leurs casques, les fantassins suivant des cavaliers, comme sur le chaudron
de Gundstrup. Les deux troupes sont séparées par un signe en forme de cornes de bélier
opposées qui semble être un signe de souveraineté divine et peut-être d’alliance. Le cerf a
ici le rôle d’un conducteur. La situle de Vace en Slovénie, de la fin du VI e s. ou du début
du V e s. A.C. représente sur son registre inférieur une frise d’animaux : des antilopes (?) et
des biches aux oreilles démesurées comme sur les vases de Gandaillat. Elles tirent des
langues de mirliton pour montrer peut-être qu’elles sont ivres, ainsi que là aussi un fauve
qui tient une jambe humaine dans sa gueule. Mais nous avons traité ailleurs de ce sujet.
Des oiseaux de proie ou des corbeaux sont perchés sur le dos de deux des biches. Ils sont
tournés vers l’arrière comme sur certaines monnaies celtiques. Il me semble que le niveau
le plus bas (de la boisson restante) correspond à la plus grande ivresse et exprime le rut, la
possession, le délire divin. Le registre du milieu correspond par contre à l’ardeur
combative des guerriers (qui se mesurent pour gagner un casque d’apparat), tandis que le
registre supérieur montrant un défilé de nobles semble correspondre au niveau de boisson
compatible avec la vie publique. Boire, c’est donc aussi communiquer avec le divin que
symbolisent le corbeau oraculaire, les langues en mirliton, les cornes et la bête féroce. Le
fragment de situle de San Maurizio conservé au musée d’Innsbruck montre aussi sur le
registre inférieur un cerf qui tire la langue comme un mirliton, en compagnie d’une biche
et d’une antilope. Le registre du dessus montre une scène de domptage et de conduite de
char que je suis tenté d’interpréter aussi comme la maîtrise de la boisson. Le niveau
inférieur figure donc encore une fois l’ivresse complète associée aux cervidés et aux

37Fin du VIe siècle - début du Ve s. A.C. Molnik, tombe III-10 (Slovénie). Ljubljana, Mestni muzej Slovenije (cat.
39). D’après Situlae. Images d’un monde disparu. Une exposition coproduite par Bibracte et le Musée d’Histoire
naturelle de Vienne en partenariat avec l’Institut de Préhistoire de l’université de Vienne, 11.

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animaux à corne. Les cornes à boire donnent


aux hommes la force des dieux. L’usage de
cruches à bec tubulaire adapté pour verser
dans l’embouchure étroite des cornes
d’auroch laisse penser que l’aristocratie celte
utilisait au VI e et même au V e siècle A.C. des
cornes à boire ou des gobelets qui en avaient
hérité la forme38
Fig. 10 Cerf sur la situle de San Maurizio du musée d’Innsbruck  

On entrevoit pourquoi la sacralité du cerf est compatible avec sa chasse : la rotation


apparente du ciel étoilé (« le ciel qui tourne » chez les Iraniens 39), était probablement pour
les Celtes comme pour beaucoup d’autres peuples une grande chasse éternellement
renouvelée, dans laquelle la mort et la vie se succédaient et s’engendraient mutuellement.
Les constellations étaient des « arborescences » (prinnios, en gaulois). Le firmament était
formé par la frondaison d’un ou de deux arbres géants poussant au milieu du ciel. Cette
idée qui peut sembler étrange fait l’objet, comme Gricourt et Hollard l’ont bien remarqué,
de la cinquième devinette posée au prince Zâl dans le Livre des Rois de Ferdowsi :
« Voilà deux hauts cyprès qui sortent d’une mer orageuse comme des roseaux. Un oiseau y a sa demeure : il se
perche le soir sur le premier, le matin sur le second. Quand il s’envole de l’un, toutes les feuilles sèchent ; quand
il se pose sur l’autre, elles exhalent un parfum de musc. L’un est toujours vert, l’autre tristement desséché. »
Le héros donne naturellement la bonne explication :
« Depuis le signe du Bélier jusqu’à celui de la Balance, le monde tient cachées les ténèbres ; mais quand il passe
de ce signe dans celui du Poisson, alors les ténèbres et l’obscurité l’enveloppent. Les deux cyprès sont les deux
côtés du ciel sublime, d’où nous viennent les joies et la tristesse ; sache que l’oiseau qui vole au-dessus est le soleil
et que les craintes et les espérances du monde dépendent de lui. »
Ce dialogue fabuleux issu sans doute d’une cosmogonie de l’Iran ancien laisse
transparaître un cycle de contraires alternant l’un avec l’autre. Il suggère que l’année est
composée d’une saison claire comparée au matin et d’une saison sombre comparée au
soir, et que le saut de l’oiseau soleil d’un cyprès à l’autre provoque leur alternance. Les
deux arbres « sortis de la mer orageuse » sont donc associés aux deux parties du ciel
définies par les signes du zodiaque correspondants 40. Mais ils sont aussi des équivalents
du prince Zâl et de la princesse Roudâbè qui sont eux-mêmes comparés avec insistance à
des cyprès. Les deux grandes saisons ne sont donc pas seulement les deux côtés du ciel,
elles symbolisent le couple primordial ainsi que les deux pôles de la destinée humaine.
Notre hypothèse est que ces arbres, qui représentent probablement le ciel d’été et le
ciel d’hiver, ont été assimilés chez les Celtes aux deux bois du cerf. L’animal qui semble
mener la ronde sur les situles pouvait incarner cette chasse, ce mouvement universel, qui
domine le destin des hommes et forme l’éternel retour du temps. Mais on sait seulement
pour l’instant que le cerf a donné son nom à une constellation chez des peuples d’Europe
et d’Asie du nord comme les Lapons, les Groenlandais, les Sibériaques, les Samoyèdes ou

38 Cf. Verger 2009, 6.


39 Ferdowsi : Le livre des rois trad. Jules Mohl, Actes sud, 1996, 84 et 93.
40 Ferdowsi, ibid., 65-66. V. Brélian-Djahanshahi 2001, 71-72 ; Gricourt et Hollard 2010, 189-190.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 13

les Mongols, et qu’un mois celte, Elembios (« le Cerf ») 41 lui était consacré. Espérons que
d’autres études permettront un jour de mieux éclairé ce point qui me semble capital.

Le chariot cultuel en bronze doré de Strettweg


(Autriche) est daté du VII e ou du VI e s. A.C. Remarquable
tant par son ancienneté que par la richesse de sa
symbolique, il mérite d’être examiné à part. Nous pensons
qu’il symbolise le cycle cosmique. Deux cerfs dotés d’une
ramure démesurée à cinq pointes mènent chacun un groupe
de six personnages nus à l’avant et à l’arrière de la plate-
forme du chariot. Au milieu, une grande figure féminine
très mince, dont la taille étroite est entourée d’une large
ceinture, soutient une sorte de coupe avec sa tête et ses
deux bras levés. Le bord de cette coupe est doté d’une
sorte de rambarde composée de colonnettes terminées en
volutes, qui rappellent les enroulements des cornes de Fig. 12 Chariot cultuel de Strettweg en
bélier. Les deux poutres du châssis auxquelles sont fixés les Autriche

axes des roues à huit rayons se relèvent aux extrémités pour former des protomés de
biche. Ils symbolisent le mouvement et la rapidité, mais aussi la fécondité. De part et
d’autre des cerfs, deux jeunes garçons figurés sans marque de sexe tiennent chacun un des
bois de la ramure, comme pour participer de sa force magique. Ils sont aussi associés l’un
à l’autre par l’intermédiaire de ces bois. Lambrechts pense qu’ils représentent les
Dioscures symbolisés dans les pays du nord par deux cerfs, dont on sait que l’un est divin
l’autre mortel, que l’un représente la vie et l’autre la mort. Mis en rapport avec l’initiation
des deux jeunes gens, ils consacrent en tout cas le lien symbolique
qui les unit. L’auteur a relevé un parallèle étonnant avec le relief
de Vendœuvres d’époque romaine, soit 600 ans plus tard, qui
montre également deux petits personnages qui touchent chacun un
bois du dieu cerf. Lambrechts a raison de conclure qu’il s’agit
manifestement d’un élément très stable sinon primordial de la
religion celtique. Ajoutons que dans ce schéma, le dieu aux bois de Fig. 11 Cernunnos de
cerf prend la place du cerf hallstattien. Derrière eux se tient une Vendoeuvres (Indre)

femme, reconnaissable à ses seins et aux boucles d’oreille. À gauche de celle-ci, un


personnage ithyphallique lève une hache. Ce sont, à part la grande déesse, les deux seuls
êtres visiblement sexués. Il est vraisemblable que le « sacrificateur » s’apprête à immoler
le cerf pour capter sa force fécondante. Lambrechts l’interprète comme un dieu, même si
l’identification avec le soleil n’est pas évidente. Est-il un dieu du sacrifice qu’on peut
deviner en Ésus figuré sur le pilier de Paris ? La hache symbolise-t-elle le partage créateur
entre le divin et l’humain, entre la vie et la mort que les deux Dioscures incarnent aussi,
entre le ciel et la terre, tandis que les branches d’Ésus équivaudraient à la ramure du cerf

41 Elembiu(os), « mois du cerf », (Delamarre 2001, 135) est d’après le calendrier de Coligny le dixième mois de l’année
celtique qui correspond à peu près au mois d’août. Brunaux remarque que le mois Elembiu, correspond à
l’Elaphebolion des Grecs, et que le mois Equos correspond à Hippios. Il en conclut que le calendrier a été influencé par
celui des Grecs (Brunaux 1986, 50).

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 14

cosmique ? Au lieu d’incarner le soleil stricto sensu, le cerf pourrait incarner le roi de
l’univers qui suit son cycle comme la harde suit le mâle dominant ; et sa tête coupée, le
soleil au milieu du ciel d’été et du ciel d’hiver… Cette hypothèse semble hardie. Elle
n’exclut pas le sacrifice. Elle le requiert au contraire : le sacrificateur reproduit l’acte
créateur. L’animal sacrifié au dieu devait correspondre à la nature de celui-ci. Mais on
peut se demander si le cerf sacrifié, le dieu honoré (le dieu aux bois de cerf de
Vendœuvres) et le sacrificateur à la hache ne sont pas en fin de compte une seule et
même divinité dans différents tableaux figurant les étapes principales de son mythe.
La scène représente sans doute aussi un rite de passage par lequel les adolescents
auxquels sont révélés les rites et les symboles sacrés deviennent des hommes et des
femmes à part entière. Cette bénédiction de force et d’abondance semble devoir être
symbolisée par les bras levés de la déesse et par le contenu de la cuve. Si elle est
manifestement une déesse « mère » de la fécondité, force est de constater que la mise en
valeur de sa taille étroite par la ceinture lui donne l’apparence d’une jeune fille, peut-être
d’une vierge. Elle évoque Diane-Artémis de même que les vierges mères de la mythologie
des Celtes insulaire. Le char qui la conduit (et qui doit être considéré comme son
deuxième principal attribut) la rapproche beaucoup de la déesse au torque montée sur un
char entouré d’animaux qu’on voit sur une plaque de Gundestrup. Il faut croire que son
culte incluait une grande procession, dans laquelle elle apparaissait en gloire sur un char.
Sa taille particulièrement haute fait penser à la déesse Arduinna dont le nom dérivé de
arduo- qui signifie « hauteur » et désigne la montagne est plus profondément un attribut de
pouvoir et d’exclusion : la cuve est hors de portée des autres personnages. Deux cavaliers
dos à dos occupent chaque flanc du chariot. Ils sont coiffés de bonnets ou de casques
pointus, tiennent le bouclier ovale et lèvent la lance en signe de protection ou de menace,
ce qui est peut-être un trait du rituel. Celui-ci peut-être eu un côté militaire, car
l’accession à la maturité dont il a été question implique la reconnaissance du jeune garçon
en tant que guerrier. Lambrechts a rapproché aussi ces cavaliers des Dioscures parce que
l’un des chevaux est marqué de petits cercles ou de roues qu’on considère généralement
comme des signes héliaques. A-t-on voulu les représenter à deux stations différentes du
mythe 42 ? L’ordonnance symétrique des cerfs, des têtes de biches et des deux groupes de
six personnages a certainement une signification précise ; le mouvement du char dans un
sens ou dans l’autre qui faisait « avancer » ou « reculer » la déesse, également. Supposons
que ce mouvement symbolisait celui de l’année. Chaque petit personnage correspondrait à
un mois : six mois d’arrivée (d’essor) et six mois de départ (de déclin), selon la
périodisation qu’on retrouve aussi sur le calendrier de Coligny. Chacune des deux
périodes a pu être marquée par un rituel de passage accompagné d’un sacrifice.
L’alternance de la grande saison claire et de la grande saison sombre correspond à celle de
la vie et de la mort. Elle était associée à l’un des deux Dioscures, comme à la proximité
ou à l’éloignement de la grande déesse. Par rapport à quoi ? La balustrade ornée de
doubles spirales opposées symétriquement peut représenter douze arbres stylisés
correspondant aux dieux ou aux mois. Elle empêche en tout cas une utilisation de la
coupe pour boire. Une miniature qui représente une véritable balustrade autour d’un
bassin sacré ? Un texte antique indique en tout cas qu’on secouait un tel char quand une
sécheresse sévissait, et qu’on frappait le chaudron pour imiter le tonnerre afin d’obtenir

42 Lambrechts, 1944, 294-299, 301.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 15

de la pluie 43. Ainsi la pluie et avec elle l’abondance de la terre étaient produites par la
force fécondante du ciel associée au cerf. Le symbolisme serait équivalent si la balustrade
était ornée de cornes de bélier, car le bélier souvent associé au feu et à l’holocauste peut
aussi symboliser le feu du ciel et l’orage.
Le fait que le char ait été découvert dans un tumulus funéraire conduit à d’autres
questions. Les fouilles entreprises à l’automne 2012 ont révélé que le tumulus I dans
lequel le char fut découvert recouvrait une chambre funéraire en pierre dans laquelle les
cendres d’un couple princier, d’un serviteur et d’une jeune fille avaient été déposées. Les
offrandes attribuées à la princesse sont exceptionnelles par rapport à celles des hommes
inhumés dans les tumulus voisins, de sorte qu’on peut supposer qu’elle avait une fonction
religieuse et qu’un char grandeur nature a pu servir à son sacerdoce 44. Ces découvertes
laissent penser que le char miniature a pu conduire la défunte dans l’autre monde, et que
la cuve a pu contenir les cendres de celle qui devait être la prêtresse ou même
l’incarnation sur la terre de la divinité. On en a la confirmation par un autre petit char
cultuel étrusque daté de la deuxième moitié du VIII e s. A.C., découvert dans la deuxième
tombe Nécropole d’Olmo Bello à Bisenzio 45 . Son type semble avoir inspiré celui de
Strettweg. Le char en bronze doté également de quatre roues présente deux analogies
frappantes avec son équivalent celtique : tout d’abord les petits personnages qui
représentent la chasse, la guerre, des groupes de personnes ainsi que des charrues, c’est-à-
dire la vie profane, et ensuite un grand bassin qui les surplombe et qui contenait des
restes d’un bûcher. La position et la taille du bassin par rapport à celle des personnages
montrent d’ailleurs l’importance honorifique du défunt. Mais la variante celtique montre
une société hiérarchisée autour d’une souveraine divinisée. Elle suggère aussi que le rituel
funéraire comprenait contrairement au rituel étrusque une procession guerrière et une
cérémonie initiatique au cours de laquelle un cerf était sacrifié.

Le cerf apparaît comme un être primordial qui incarne le ciel, le divin comme la
création en général et le cycle éternel de la mort et de la vie. De ses attributions très
larges ne reste au Moyen-âge que celle de passeur dans l’autre monde, comme le montrent
deux étranges coutumes qui ont échappé à la censure de l’Église, et qu’on peut rattacher
— par défaut — à la tradition celtique.
De nombreuses légendes prêtent à la peau de cerf découpée en lanières le pouvoir
d’englober un domaine ou un territoire d’un périmètre exceptionnel. Selon Jérémie
Benoît, l’espace ainsi délimité était ainsi rendu sacré, le chaos originel transformé en lieu
d’habitation humaine et l’esprit qui l’habitait rendu inoffensif par la présence d’une force
supérieure 46. Ce n’est pas tout à fait exact à mon avis, car il s’agit d’un établissement dédié
au culte ou au pouvoir d’un seigneur et on ne sait rien d’un esprit se trouvant là

43 Cf. Thevenot 1968, 25. Benoît suppose que la cuve contenait de l’eau, peut-être avec des serpents qui en sont le
symbole (Benoît, 2001, 34). Mais rien ne le laisse supposer.
44 V. le site de l’association du Falkenberg (http://www.fuerstengrab-strettweg.at). La tombe contenait les restes
d’un autre char cultuel brûlé avec d’autres objets sur le bûcher, qui ont été interprétés comme des parties du char
cultuel déjà reconstitué.
45 Camporeale, Giovannangelo : Die Etrusker. Geschichte und Kultur. Düsseldorf/Zürich, 2003, fig. 2.

46 Benoît 2001, 199.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 16

auparavant. La fondation devait plutôt se réaliser à partir de l’être primordial en


reproduisant une cosmogonie prototype de toute fondation. C’est justement cet ancrage
dans la cosmogonie qui explique que dans le Mabinogi, Llew et Gwydyon aient eu l’idée de
se déguiser en cordonniers, c’est-à-dire en artisans qui découpent le cuir. Le cerf
primordial est à l’origine de la multiplication miraculeuse du territoire et donc de l’espace.
La peau miraculeuse du cerf était-elle en même temps une allégorie du feu divin qui
dégage et crée un territoire 47 ? Les deux saints bretons légendaires Edern et Théleau
reçoivent en tout cas tout le territoire dont ils font le tour en une nuit en chevauchant
leur cerf. Tous deux sont par ailleurs associés à l’idée de grandeur ou de multiplication.
Parti d’Irlande ou du pays de Galles, le premier aborda en Bretagne vers 894. Son nom est
dérivé de l’adjectif edyrn, « grand, gigantesque » en cymrique ou du latin aeternus « éternel »,
ce qui n’est pas moins. On le retrouve dans le légendaire gallois en tant qu’Eydern fils de
Nuz (Nudd, Nuada en Irlande, Nodons en Gaule), qui chevauchait un cerf. Quant au
saint, un cerf poursuivi par une chasse se réfugia sous sa robe monastique. Il l’apprivoisa
et le cerf ne le quitta plus. Selon une autre version, Edern rencontra le cerf au soir et
chevaucha toute la nuit sur le dos de l’animal pour délimiter les frontières du pays qu’il
avait à christianiser. Quant à saint Théleau, il serait né vers 485 au pays de Galles. Le
seigneur de Châteaugal lui offrit le territoire qu’il pourrait enclore en une nuit avant le
chant du coq ; le saint se servit d’un cerf comme monture. À sa mort, son corps devint
triple. Sa fête est célébrée le jour de la Pentecôte par la procession appelée Troménie.
Cette cérémonie peut apporter un éclairage supplémentaire. Le mot serait la francisation
du breton tro-minihi, littéralement tour du minihi, qui dériverait du latin monachia (espace
monastique du haut Moyen-âge). Une autre étymologie propose tro-menez « tour de la
montagne ». La Troménie de Locronan était anciennement une procession tournante
d’environ douze kilomètres, qui avait lieu tous les six ans. Le circuit passait par la forêt de
Névet, dont le nom viendrait de nemet (« sacré »), dérivé du gaulois nemeton. Si cela pouvait
être vérifié, la grande Troménie serait le contournement d’un espace sacré, reproduisant
le tour effectué par le cerf fondateur.
Sainte Mildred qui vécut vers 700 chevauchait elle aussi des cerfs. Elle était abbesse
d’un monastère situé dans l’île de Thanet, à l’estuaire de la Tamise 48. Sa mère, sainte
Ermenburge, avait, en guise de réparation pour le meurtre de ses deux frères, obtenu du
roi toutes les terres que pourrait parcourir en une seule fois le cerf qu’elle avait adopté.
La légende de la fondation par la peau de cerf se retrouve jusque dans la Saga de Ragnar
Lodbrok, dans laquelle la fondation de la ville de Londres commence aussi par une peau de
cerf découpée en fines lanières. Dans la Légende de Raymondin enfin, la fée Mélusine
conseille au héros, dont le nom signifie comme par hasard « roi du monde » 49 , de
demander au comte de Poitiers de lui donner près de la Fontaine de soif « autant de
terrain qu’une peau de cerf peut en entourer » 50.
Le cerf est donc lié à l’idée de mouvement, de pourtour et d’agrandissement magique.
Il est impliqué dans la circumambulation qui rend un territoire sacré. L’enclos représente
le pourtour du ciel nocturne et crée une limite inviolable par les puissances maléfiques. Le

47 Gricourt et Hollard 2010, 407.


48 On y a découvert (à la Pegwell Bay) un cimetière de l’âge de bronze et du fer, où on été pratiqué d’étranges
rituels.
49 Gaignebet et Lajoux 1985, 101 b ; Gricourt-Hollard 2010, 406.

50 Gricourt et Hollard 2010, 407.

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La symbolique du cerf en Europe celtique et gallo-romaine 17

domaine, la ville, le monastère entouré par la peau du cerf, sont englobés dans celle-ci et
se trouvent par la même sous la protection divine. Mais en même temps, cet espace
inviolable s’agrandit au-delà de tout ce qu’on pouvait imaginer et produit l’abondance. Le
cerf incarne la création divine et l’abondance qui en découle. L’établissement humain est
en quelque sorte généré par le cerf qui lui communique par sa substance la force
d’expansion de l’origine 51.

Depuis La Chanson de Roland jusqu’à la fin du XIe siècle, il est en littérature d’usage de
coudre le corps des défunts prestigieux dans une peau de cerf : c’est le cas pour Roland,
Olivier et Turpin après la bataille de Roncevaux (vers 2967-2968) . L’irlandais Morholt, tué
par Tristan, est lui aussi cousu dans une peau de cerf 52. On lit également dans la chanson
de geste Garin le Lorrain datant de 1180 : En cuir de cerf fet le baron gésir ! Font une bière, le
baron i ont mis. La coutume déborde du domaine littéraire, puisqu’il est aussi écrit qu’à la
mort de Charles le Bon en 1127, on prépara selon la coutume une peau de cerf pour
envelopper son corps. Ainsi cousu dans la peau de cerf, l’illustre défunt fut placé pour la
messe sur une estrade au centre du chœur. Pendant la Révolution française, lors de
l’exhumation des rois de France à Saint-Denis et à Saint-Germain-des-Prés, on trouva
plusieurs d’entre eux, dont Louis VII, mort en 1180, cousus dans des sacs en cuir, ce qui
semble indiquer que l’usage fut suivi pendant au moins une bonne centaine d’années.
Mircea Eliade explique cette coutume par la croyance selon laquelle les morts
apparaissent parfois sous forme de cerf 53. Ce qu’on a dit plus haut sur le pouvoir magique
de la peau de cerf tombe à mon avis plus facilement sous le sens.
C’est, par une curieuse inversion du voyage des défunts vers les îles des Bienheureux,
que, dans un récit gallois, un pêcheur découvre un bébé dans une coracle de cuir et
d’osier54 en pêchant le saumon au filet un 1 er novembre (c’est-à-dire au temps de Samain
qui introduit le Nouvel An celtique). Il avait le « front blanc » (tal-iesin) et n’était autre que
le fameux barde qui errait depuis quarante jours sur la mer. Le linceul en peau de cerf,
comme on peut le supposer, facilite le passage des morts dans l’autre monde, même si
celui-ci est chrétien. Il semble aussi conduire les âmes vers la terre des vivants ; mort et
naissance étant des portes qui communiquent entre elles.

Le cerf a été sacralisé partout en Gaule : ses bois protègent les morts dans les tombes
comme les vivants sous la forme de rondelles cousues aux habits. Les bois accompagnent
les offrandes dans les fosses cultuelles, afin que celles-ci peut-être soient préservées et
atteignent mieux leur destinataire. Ils portent bonheur, donnent la force sexuelle, la

51 Dans un récit irlandais sur saint Patrick, le cerf est, semble-t-il, remplacé par le cheval comme pourvoyeur
d’abondance : Cormac Dubh vendit du blé à Patrick pour nourrir son groupe et lui demanda un prix élevé pour la
quantité que le cheval minable de celui-ci pourrait porter ; mais ce dernier vida sans fatigue la grange sac après sac,
ce qui n’était jamais arrivé (Mac Neill 1982, 398 et 414 ; Sergent 2004, 253).
52 Joseph Bédier, Le roman de Tristan et Iseut, 1946, 20. Lombard-Jourdan 2009, 33. Gricourt et Hollard 2010, 126.
53 Mircéa Eliade : De Zalmoxis à Gengis-Khan. Paris : Payot, 1970, 146-147.

54 De Vries 1963, 267.

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fécondité et la vie. On voit paître des cerfs dans l’enceinte sacrée des temples, en
attendant peut-être une fête de passage, lors de laquelle les adolescents touchent la
ramure pour acquérir sa force virile.
La découverte d’une partie d’un cerf « sauteur » en bois sculpté
dans un puits à l’intérieur de la Viereckschanze de Fellbach-Schmiden
dans le Wurtemberg nous ramène à Cernunnos. Elle se trouvait avec
deux bouquetins dressés symétriquement de part et d’autre d’un
personnage divin qui les maintenait par le milieu du corps si on en
juge d’après les mains qu’on peut voir encore. D’après leur position,
ce personnage a été reconstitué dans la position assise en tailleur. Sans
doute y avait-il à l’origine deux cerfs dressés
symétriquement de part et d’autre du dieu.
Notons que la posture des animaux est aussi
un symbole de fécondité. Le bois des trois
figures daté par dendrochronologie en 127
A.C. confirme l’origine préromaine de cet
artefact. Peter-Röcher avance trop hâtivement
qu’il n’avait pas de signification cultuelle, mais
décorait simplement le puits 55. Mais il faut au
Fig. 15 Sculpture en bois
d’un cervidé à Fellbach-
moins supposer que ce puits était sacré, car
Schmiden (Allemagne) l’ensemble, qui évoque un maître des animaux,
est un thème sacré. Mais on sait par ailleurs que les Celtes avaient
l’habitude de déposer des objets cultuels dans des puits pour les
désacraliser et éviter une profanation. Les peuples anciens ne Fig. 13 Schmiden Exemple de
reconstruction des cerfs
concevaient d’ailleurs pas la décoration indépendamment de la
religion. Cet auteur conteste également que le cerf fût relié
comme les bouquetins à un personnage divin. Il n’y a certes pas
de preuve, mais la composition des sculptures le suggère : les
éléments sculptés qui s’appuient sur les bois et sur naseaux du
cerf devaient se prolonger pour constituer une résille qui suppose
une autre partie symétrique pour la soutenir. L’ensemble
composé de deux paires d’animaux superposées de part et d’autre
d’un ou de deux personnages divins également superposés et
surmontés d’une résille était, à ce qu’il semble un symbole de
souveraineté associé à un arbre symbolique. Yann Deberge a
remarqué qu’il est probable qu’à la période gauloise la
représentation de Cernunnos sous une forme anthropomorphe
Fig. 14 Schmiden Exemple de
n’ait pas été la règle, et que le motif du cervidé a pu alors être reconstruction de la partie inférieure
utilisé pour figurer la divinité ou tout au moins évoquer certains du monument
(Il va de soi que le Cernunnos de
de ses attributs 56. La sculpture de Schmiden illustre à mon sens Gundestrup placé entre les
cette transition, c’est-à-dire le moment où le cerf divin devient bouquetins est une extrapolation)
indissociable du dieu-héros assis en tailleur.

55 Peter-Röcker 2012-2013, 194-195.


56 Deberge 2010, 144.

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Les thèmes et personnages divins impliqués dans cet article sont pour la plupart examinés dans
différents passages de mon étude Cycle et Métamorphoses du dieu cerf. J’invite l’aimable lecteur qui
désirerait en savoir plus à s’y reporter.

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