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Sociologie des médias de masse

16 janvier

nelly.quemener@univ-paris3.fr

La dimension chronologique est très importante en sociologie : les théories se répondent entre
elles et surtout ces théories doivent être remises dans leur contexte pour bien les comprendre. Ce sont
les premières théories qui nous ont poussés à nous interroger à l’effet des médias sur les individus, les
sociétés : si au début on pensait que les médias avaient un effet direct sur les gens, aujourd’hui on
s’interroge aussi sur la résistance des individus face aux discours médiatiques, à ce que font les gens
des médias.

Pour le devoir final (03/04) : identifier les différentes écoles (quel auteur renvoi à quelle
pensée, à quelle période ? Quelles approches des médias défendent ces écoles ? Qu’est-ce que ces
pensées apportent au monde des médias ? ...) ; mettre en discussion les écoles de pensées (comment
une école a remis en question la pensée d’une école précédente ? Comment une école peut-elle
construire une nouvelle partie à partir d’une plus ancienne).

Introduction
Qu’est-ce que la sociologie ?
Socio : société ; logie : science -> Science de la société

Les approches sociologiques sont le produit de transformation politique, économique,


numérique… La sociologie se développe à la fin du XIXe siècle et ramène à l’avènement d’une société
industrielle et le développement des moyens de communication. Les sciences humaines et sociales
(SHS) se développent avec les sociétés industrielles et urbaines, avec les moyens de communication.
Les moyens de communication viennent donc avec les transports par exemple qui permettent une
diffusion à grandes échelles des écrits. Ces transformations historiques s’accompagnent d’une
transformation du monde social et des relations entre les gens : le travail à la chaîne (rationalisation
de l’organisation du travail) mène à une réelle transformation sociale. La modernisation est le résultat
du capitalisme. Toutes ces théories accompagnent ces transformations : elles proposent une façon de
comprendre ces transformations à partir de certains outils.

La sociologie est une science de la société, créée par Durkheim, Weber qui ont insisté sur la
dimension sociale de tout phénomène : qu’est ce qui faisait société ? Comment appréhender des
phénomènes collectifs ? La spécificité de la sociologie n’est pas de définir les phénomènes sociaux via
la psyché, il y a une dimension relationnelle. Les relations mènent à la création de règles, de normes,
de valeurs qui organisent elles-mêmes les relations humaines. La société est donc un système social
organisé qui associent des individus.

La sociologie a pour objet le social : l’ensemble des phénomènes collectifs, des règles, des
normes, des rituels sont à la fois le résultat des actions des individus mais aussi la cause de ces actions.
Durkheim et Weber s’oppose en ce point : D pense que la société s’impose aux individus alors que W
la définit comme le produit des actions des individus.

La sociologie cherche à mettre à jour les règles et les normes des sociétés : quelles sont-elles ?
Comment se maintiennent-elles ? La sociologie n’est pas une science exacte puisqu’elle ne s’appuie
pas sur des observations stables et reproductibles par le biais expérimental : on ne peut pas analyser
le social avec des formules, les règles et les normes sont mouvantes et évoluent. Elle n’est pas non plus
la psychologie même si elle partage des aspects avec la psychologie sociale mais la grande différence
est que les psychologues sociaux s’appuient beaucoup sur l’expérimentation contrairement à la socio
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qui s’appuie uniquement sur des observations. De plus la sociologie ne défend pas les actions comme
le produit de la psyché mais plutôt comme celui des phénomènes sociaux.

La sociologie revendique une scientificité, une certaine objectivité permettant de saisir les
phénomènes sociaux. Elle a une démarche de connaissances, on cherche à mettre des mots sur des
phénomènes qui n’en avaient pas pour ensuite en discuter. Elle a aussi une démarche d’analyse : elle
cherche à expliquer le social. Elle essaye de sortir du jugement de valeur : on ne cherche pas à dire ce
que devrait être le social, mais plutôt à analyser et décrire ce qui est en utilisant des méthodes
contrôlées de validation empirique impliquant des méthodes quantitatives (ex : questionnaires) et
qualitatives (ex : entretiens, observation ethnographique/participante). Si la méthodologie est trop
contestable l’analyse ne tient pas la route.

Le terme des médias de masse est un terme de l’école de Francfort mais est encore utilisé pour
les études sur les effets des médias à grande échelle. A chaque apparition d’un nouveau média arrive
la peur de ce dernier, deux grandes approches de ces médias de masse :

• Les médias sont pensés comme technique, des objets, on s’intéresse à leur fonctionnement ;
les médias ont une influence néfaste sur les êtres humains. Cette version techniciste des
médias vient surtout de McLuhan : les avancés historiques, l’évolution des sociétés sont
résultats du développement des médias.
• Les médias comme fait social et culturel : la technique est produite par les individus, les médias
sont des moyens d’expression et de représentation, les médias ont aussi une dimension
productive de normes, de valeurs… C’est l’analyse sociologique qui s’interroge sur les effets et
la réception des médias.

23 janvier

Chapitre 1. Les effets directs des médias


La peur des médias
Ces premières théories des médias de masse apparaissent durant l’entre-deux-guerres, elles
pensent l’audience comme une foule réagissant de manière directe et spontanée aux messages
médiatiques. Que font les gens avec les messages médiatiques ? Que font les médias aux gens ? Est-
ce-que les messages s’imposent ou dictent des comportements ?

Dès leur apparition, la télévision et la radio ont été désignées comme média de masse et ont
suscité une peur menant à une méfiance face à ces médias. Quand un nouveau média apparaît, il fait
toujours peur.

Au XIXe siècle, les premières théories et méfiances naissent face aux romans feuilletons
mettant en scène la vengeance d’héros modestes persécutés par des bourgeois : mise en scène du
rapport de force. Ces romans feuilletons ont été accusés de faire la promotion du socialisme, une
invitation de révolte aux ouvriers.

Pendant l’entre-deux-guerres, on a accusé la radio de permettre l’arrivée d’Hitler au pouvoir


qui diffusait ses discours. C’est donc quand un nouveau média apparaît qu’on se pose la question de
ses effets, qu’on cherche un lien de cause à effets entre média et Histoire.

En 1938 arrive la première fiction radiophonique : La guerre des mondes aux EU racontant
l’histoire d’arrivée d’extra-terrestre sur Terre, cette fiction a entraîné un mouvement de panique et de
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peur dans la société américaine. Ce phénomène a nourri l’imaginaire d’une réelle influence des médias
sur le comportement des individus.

On voit donc bien que l’apparition d’un nouveau médium vient avec une méfiance en vers lui :
méfiance en vers la TV qui diffuse des scènes violentes, la radio permettant l’ascension d’Hitler, les
jeux-vidéos rendant les enfants violents et stupides… Dès qu’un événement tragique se produit,
plusieurs théories se font contre les médias.

La notion de propagande
A la base de cette peur il y a un questionnement historique sur la propagande : les premiers
travaux confirment donc l’existence d’effets réels des médias sur les gens. Néanmoins, il faut les
remettre dans leur contexte d’entre-deux-guerres où il y avait beaucoup de tentatives de la part des
gouvernements de convaincre, de diffuser des messages à très grande échelle, de contrôler la diffusion
d’informations et tout autre type de messages. On va donc s’interroger sur l’usage de la propagande,
ce qui va confirmer l’idée que les médias manipulent les esprits et les comportements.

Il est important de revenir sur le terme de propagande : aujourd’hui la propagande a une


définition particulièrement négative alors qu’au départ ce n’était pas le cas. Dans son étymologie, la
propagande renvoi à une idée de bouture et de transmission et c’est à partir du XVIII-XIXe siècle qu’on
l’associe à une connotation négative.

La propagande a permis de qualifier deux types de pratiques :

• La propagande était avant tout un moyen de communiquer dans les partis ouvriers, les
syndicats, les mouvements politiques… Action psychologique des EU sur leur propre
population : on cherche à lier ou à convaincre des gens par le biais des outils de
communication.
• Les gouvernements et les Etats se sont ensuite emparés des outils de com pour manipuler les
populations, voir d’agir sur les comportements et esprits des populations

La notion de propagande durant l’entre-deux-guerres a à la fois été discutée et utilisée par les régimes
totalitaires : propagande nazie, communiste… Toutefois, la notion de propagande a été réfléchie et
pensée dans les Etats démocratiques.

Pendant l’entre-deux-guerres, les tous premiers travaux pensant les médias c’est la
psychologie qui développe durant le XXe siècle une vision quasiment mécaniste des êtres humains.
C’est l’approche behavioriste : l’être humain répond par un comportement à des stimuli physiques, on
pense avant tout la manière dont réagissent les gens aux stimuli.

Gustave Lebon dans La psychologie des foules (1895) évoque cette époque comme l’ère des
foules : époque qui serait caractérisée par le règne de regroupements massifs de personnes (ex :
mouvements sociaux des ouvriers). Les mouvements révolutionnaires sont en réalité des foules qui
sont promptes à l’action, spontanées et incontrôlables : elles se caractérisent par une sauvagerie. La
foule fonctionne par réflexes/automatisme et est conditionnée, passive et incapable d’opinion.

L’approche behavioriste a amené à penser l’effet mécanique des messages médiatiques sur les
gens. L’audience est aussi une foule répondant par réflexes à ces messages.
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La théorie de la seringue hypodermique
Harold Lasswell développe en 1927 la théorie de la seringue hypodermique dans Propaganda
Techniques in the World War. Lasswell fût engagé par le gouvernement américain pour rendre compte
de l’influence de la propagande pour savoir quel usage faire des médias de masse. Il nous propose une
question de base : Qui dit quoi à qui ? Avec quel canal ? Et quels effets ? avec laquelle il développe
l’idée que le processus de communication offrirait un large pouvoir à ceux qui tiennent les manettes
de ce processus. La communication se définit comme la diffusion de messages des émetteurs aux
récepteurs, le pouvoir étant du côté de l’émetteur. La communication de masse est un outil de
surveillance de la société et aussi un outil de contrôle en diffusant des menaces et en faisant émerger
une peur collective ; elle permet aussi de lier les gens et est un outil de transmission de valeurs, c’est
un héritage social.

La seringue hypodermique établit un effet quasi mécanique aux médias de masse sur les
récepteurs, elle amène à penser les messages médiatiques comme des stimuli qui agissent sur les
comportements des gens : la réponse fonctionne par réflexe automatiques est comportementale et
commune. L’audience est donc passive et homogène.

La métaphore de la normalité : l’audience est dénuée de conscience et par la seule réception


de messages elle développe une réaction commune et collective. L’audience fonctionne presque
comme une meute animale qui répond de manière quasi systématique à l’appel du leader : quelques
leaders émettent un message intervenant dans une certaine situation pour prévenir les membres de
l’audience et de les faire réagir.

Propagande et contre-propagande
Serge Tchakhotine, psychologue social mais aussi en parti sémiologue va s’interroger par
l’identifications de symboles et l’adhésion d’idéologies par les individus. Tchakhotine traite aussi la
propagande, après avoir travaillé pour l’URSS il part en Allemagne pour mettre en place une
propagande anti Hitlérienne en répondant par un système de symboles à ceux nazis (réponse à la croix
gammée par trois flèches vers le bas). Les systèmes de signes ont des effets sur les gens, pour contrer
une propagande nazie il faut mettre en place une autre propagande avec un autre système de signes.

Puis, il arrive en France, embauché par la SFIO, pour mettre en place des outils de propagande.
Dans Le viol des foules par la propagande politique (19839), T défend que la propagande est un
système efficace et dangereux de conquête et d’asservissement d’opinion publique. « La propagande
est un viol de masse » : elle mobilise les pulsions de l’individu pour que cette personne aille dans le
sens qu’on a choisi pour elle. Il identifie plusieurs pulsions :

• La pulsion combattive
• La pulsion alimentaire
• La pulsion sexuelle
• La pulsion parentale

Ces pulsions permettent la survie de l’espèce. Il faut puiser sa force dans le champ pulsionnel des
individus et à partir de là de les manipuler au profit d’un gouvernement. Cette approche se traduit par
le fait que la propagande nazie aurait plutôt utilisé la pulsion combative.

C’est aussi une approche comportementaliste : l’audience est une masse fonctionnant par
réflexes ou pulsions. Pour T, tout propagandiste doit mobiliser ces pulsions pour amener les gens à
soutenir une idéologie, parfois même néfaste pour la population.
Sociologie des médias de masse
Ce qui le distingue de Lasswell, c’est qu’il peut néanmoins exister des propagandes saines qui
mènent à des idéologies plus démocratiques répondant aux adversaires politiques, c’est la contre-
propagande.

Au cœur d’un usage stratégique de la propagande il y a une idée qu’on peut manipuler et
générer un certain comportement sur les individus chez L comme chez T. Ces théories accréditent
l’idée que les médias peuvent formater les esprits et les actions et promeuvent l’audience comme une
foule, une masse passive et dénuée de conscience. Il y a un lien de causes à effets entre messages et
audience.

Mais ces théories ne passent pas le prisme de l’épreuve historique : l’histoire est plus
complexe que cela. Ce n’est pas uniquement et principalement la diffusion des discours d’Hitler et des
croix gammées qui a mené à la montée d’Hitler au pouvoir. Hitler n’a pas eu la majorité, mais le
système déjà existant était un échec et il y avait donc une volonté de renouveau : contexte
économique et politique a amené à faire appel à de nouvelles personnes.

30 janvier

La théorie des effets directs envisage les médias de manière qu’ils ont des effets directs sur
une audience qui est une foule/masse homogène et globale. Il n’y a pas de conceptions de réactions
individuelles. Les médias ont un effet direct sur le comportement des individus, on ne s’intéresse pas
aux effets sur les idéologies comme l’école de Francfort.

Il existe encore aujourd’hui, et depuis les années 80, des auteurs s’inscrivant dans la pensée
des effets directs des médias. Mais ces derniers la complexifient.

Michael Schudson
M. Schudson s’est interrogé sur l’effet de la publicité sur les comportements, sujet qui se
prête à cette interrogation. Dans Advertissing, the Uneasy Persuasion (1984), il revient sur l’exercice
difficile de persuasion qu’opère la publicité. Il parle de « propagande moderne » au service du
capitaliste et menée par les grandes enseignes. Quels sont les effets de la publicité ? Quel est son
pouvoir ? A partir de ces questions il va discuter frontalement la question des effets directs, la
publicité transforme-t-elle réellement les gens en consommateurs ?

La publicité repose sur un idéal de persuasion, ses effets sont particulièrement incertains : les
campagnes de publicité ne garantissent pas la réussite du produit sur le marché. En discutant les
effets de la publicité, ils discutent sur les effets directs, pour S la publicité a plusieurs effets :

• Elle s’appuie sur un système de croyance : elle nous fait croire qu’un produit correspond à
nos attentes qui va combler un manque ou un besoin que l’on aurait. La publicité crée donc
des besoins que le produit va satisfaire car il est en adéquation avec ce besoin (ex : vous avez
faim, manger un kinder bueno). Mais cette correspondance n’est pas une garantie d’achat,
elle a une influence sur les imaginaires : à partie de toutes les publicités, le consommateur
choisit celui qui lui correspond le mieux.
• La publicité fonctionne un peu de manière insidieuse, elle œuvre à la transformation de
comportement de façon insidieuse : elle s’appuie sur une esthétique qui fait croire au
caractère inoffensif du consommateur agissant sur des structures de perception et s’impose
dans les imaginaires.
Sociologie des médias de masse
Schudson conclue en pensant la théorie des cinq R (en anglais), les 5 forces de la publicité :

• Rendre les biens disponibles dans les imaginaires


• Rendre les biens mémorisables et disponibles dans les imaginaires
• Proposer des biens entrant en résonnement avec des cadres culturels : chacun peut choisir
un bien parmi de nombreux autres en fonction de sa propre identité
• Transformer les structures de perception de manière à ce que les biens restent dans les
imaginaires (adulte, on se souvient encore des pubs de notre enfance)
• Aider les publics à décider de leurs réponses aux sollicitations en leur fournissant des
schémas de résolution de problèmes.

S complexifie et diversifie la théorie des effets directs en envisageant des effets plus complexes : la
publicité n’est pas un stimulus engendrant un comportement de masse.

George Gerbner
Dans les années 80, les débats sur les effets de la télévision étaient nombreux. Les théories
sur les effets directs sont à nouveau discutées, en effet cela est dû au fait que les années 80 est l’âge
d’or de la télévision, il y a donc une peur de ce média et on le remet en cause. Les foyers ont de plus
en plus un téléviseur, les programmes sont diversifiés (chaînes privées, commerciales qui visent des
publics pour faire de l’audience), et parmi eux il y en a de plus en plus de violents.

G. Gerbner renvoi directement à ce type de questionnement : quels sont les effets des
contenus violents sur les enfants ? Il va développer une série de travaux pour l’UNISCO, faisant un
rapport sur la Violence et la terreur dans les médias en 1989. La violence dans les médias pose
problème car elle est diffusée à des heures de grande écoute, les publics n’ont pas le choix, peuvent
très difficilement y échapper. Les consommateurs subissent les violences qui imprègnent les médias
à grand public.

Pour Gerbner, cette théorie peut être mise en discussion : la violence télévisuelle a des effets
mais ces effets s’avèrent très vites être multiples. « L’exposition répétée des enfants à la violence
médiatique peut soit encourager des pulsions agressives, rendre certaines personnes insensibles,
créer un sentiment d’isolement chez l’autre, en intimider beaucoup et inciter un petit nombre à
l’action violente. » La télévision à une influence sur le monde en produisant une image violente du
monde.

Les effets de cette violence télévisuelle sont multiples, même si la télévision configure nos
imaginaires elle peut à la fois nous donner un sentiment de force ou de faiblesse et à partir de là
impliquer toute une série de réaction possible. G remet en cause le lien systématique entre la
violence télévisuelle et les actions violentes des individus : cette violence construit une perception
violente du monde à laquelle chacun et chacune se construit. Il désigne trois éléments jouant sur la
violence médiatique :

• Influence concrète : répétition des éléments, « effets durables et généraux de l’exposition à


la violence », nous sommes amenés à être en contact avec cette violence
• Le temps de l’exposition à la violence télévisuelle à un lien sur le degré des actions violentes
• La violence a un effet de sensibilisation, on s’y habitue : elle a un effet de légitimation sociale
de la violence. Un enfant grandissant avec cette perception violente du monde risque plus
d’être violent en y étant habitué, l’enfant n’est plus amené à discuter de cette violence :
l’action violente du côté de l’audience est rendue possible par la légitimation de cette
violence par la télévision.
Sociologie des médias de masse
Les approches de D et S continuent de s’appuyer sur la notion d’effets direct ce qui rend très
difficile d’identifier quels effets ont les médias sur les gens. Il est très difficile d’isoler le lien entre les
médias et le récepteur : G a lui-même basé ses travaux sur des études quantitatives. Cela pose des
limites : qu’est-ce- qui est violent et qui ne l’est pas ? Qu’est-ce-qui prouve le lien entre les actions
violentes des individus et la réception de la violence télévisuelle ? D ne s’intéresse pas à
l’environnement social des individus qui ont énormément d’effets sur les individus. De plus, il ne
s’intéresse sur la complexité médiatique elle-même : quel est l’acte violent (ses causes ? son
contexte ? …) ; et ne s’intéresse pas aux capacités d’interprétation de l’audience.

Chapitre 2. L’école de Francfort : la théorie critique de l’industrie


culturelle
L’école de Francfort est une école de pensées centrales dans l’analyse de ce qu’ils nomment les
« médias de masse ».

La théorie critique
Nous avons vu jusque là la notion d’effets directs sur les comportements au travers de la
propagande et de la manipulation politique. La théorie critique s’intéresse encore à la notion d’effets
mais envisagée à l’échelle de l’idéologie : la question qui traverse les écrits de l’école de Francfort
c’est le pouvoir/l’effet idéologique des médias de masse sur les gens. Les médias participent,
produisent et véhiculent des idéologies capitalistes à une audience massive. La façon dont les médias
de produire cette idéologie consiste à l’imposer, formater les esprits et à inciter à une certaine forme
de conformisme : les médias amènent les gens à accepter le type de domination dont ils sont l’objet.
Les médias, plus qu’une influence sur les gens, sont les facteurs d’une perte de l’esprit critique. Les
médias ont des effets hypnotiques sur les gens permettant à la classe dominante de maintenir son
pouvoir, de poursuivre ses intérêts.

Il est important de préciser que l’école de Francfort est très imprégnée par les théories
marxistes : ils ont une théorie marxiste de l’idéologie : l’idéologie est un imaginaire, une certaine
conception donnée à voir qui fait passer pour naturel des formes de dominations de la classe
bourgeoise sur la classe ouvrière. On cherche à faire accepter à l’audience des formes de domination,
d’injustice et d’empêcher toutes formes de résistances. Cette idéologie est véhiculée par les médias
de masse. L’adjectif « critique » renvoi à la conception marxiste et à une conception péjorative de la
culture de masse. L’individu moderne est aliéné, manipulé, rendu étranger à lui-même : conception
particulièrement sombre de la modernité.

Petit historique de l’école de Francfort


Créé en 1923 par des philosophes juifs, allemands, les plus connus sont : Théodore Adorno,
Walter Benjamin et Max Horkheimer. Ces penseurs ont dû s’exiler suite à l’arrivée au pouvoir d’Hitler
en 1933. La vision pessimiste de la modernité vient directement de cette arrivée au pouvoir d’Hitler :
l’hyper théorisation et le pouvoir idéologique attribué aux médias de masse est le résultat de ce trouble
historique.

Les théoriciens de l’école de Francfort déplore l’évolution des sociétés modernes, pour eux
la modernité se caractérisent par l’omniprésence de la technique, de la marchandisation et
reproduction des biens culturels. Cela accompagne l’éclatement des institutions traditionnelles : le
monde du travail est très marqué par une fragmentation, les familles éclatent… Les individus ont été
rendus particulièrement vulnérable, il y a une perte de sens. L’homme de masse se trouve exposé à
Sociologie des médias de masse
toute une série de manipulation extérieure, à l’absence de cocon protecteur, il est particulièrement
sensible aux manipulations idéologiques. L’un des maux principaux des sociétés modernes est que tout
est fragmenté, atomisé. L’homme de masse est sans référence, livré à lui-même, ne sachant plus qui il
est. Il est vulnérable d’être manipulé par des nouvelles technologies, comprenant les médias de
masses.

Les médias de masse manipulent les individus par la flatterie, la séduction. Les médias de
masse manipulent en offrant un divertissement facile : le spectateur n’a pas besoin de faire d’efforts
pour accéder au loisir, ce qui le rend plus facilement manipulable par les idéologies capitalismes
diffusées.

La théorie critique implique une démarche qui refuse l’empirisme : le sujet humain n’est pas
conscient de la manipulation dont il fait l’objet, l’idéologie est tellement insidieuse qu’elle ne se
donne pas à voir comme une idéologie. La culture ne peut pas être soumise à des méthodes
empiriques, quantitatives puisque la culture est d’abord une esthétique/philosophie et ces méthodes
désacralisent cette vision de la culture. L’école de Francfort sur des méthodes spéculatives, on cherche
à faire prendre conscience aux gens des pouvoirs manipulateurs des médias de masse qui doit ramener
à une rébellion.

L’homme moderne perd ses repères identitaires car les institutions traditionnelles perdent leur
pouvoir protecteur, il est susceptible d’être manipulé et est donc aliéné.

L’Ecole de Francfort a donc une théorie très sombre et pessimiste et pourtant nous pouvons
distinguer des différences entre les auteurs : Adorno et Horkheimer sont bien plus pessimistes que
Benjamin.

La perte « d’aura » de l’art, Walter Benjamin


Les travaux de Walter Benjamin ont été les fondements de la vision de Francfort dans
L’œuvre d’art à l’époque de sa reproduction technique (1935), il montre comment l’art se transforme
dans les sociétés modernes, en devenant reproductible. Avant l’avènement de la technique, la
culture était divisée en deux grandes catégories : la culture noble/l’Art et la culture populaire
correspondant chacune à une certaine partie de la population. Cette division s’accompagnée de
l’exigence de l’aura de l’art : l’Art doit garder une position d’autorité sur la culture populaire.

L’avènement des processus de reproduction amène la fin des hiérarchies culturelles, « une
fusion de tous les arts en une seule œuvre » : les reproductions empêchent la nette distinction entre
art noble et art populaire pour donner naissance à une série de biens culturels aux capacités
esthétiques faibles et homogénéisés, les œuvres ne sont plus hiérarchisées.

De plus, les œuvres reproductibles (photographies, cinéma) amènent à la perte de l’aura : à la


perte de l’authenticité. Avant, l’œuvre d’art se caractérisait par une originalité, une forme
d’authenticité/singularité/unicité : les œuvres d’art sont objets de culte et voient leur valeur dans leur
impossible reproduction (ex : La Joconde). Les reproductions dévaluent l’aura et l’œuvre elle-même,
détachent les œuvres de leur domaine d’exposition et de production originel. « Les techniques de
reproduction éloigne les œuvres du domaine de la tradition ». Les artistes vont donc chercher à créer
des œuvres reproductibles plutôt que des œuvres uniques, ce qui fait perdre aux œuvres leur qualité
esthétique.

Les techniques de reproduction mènent à une transformation au niveau des récepteurs : la


contemplation de l’œuvre unique n’est pas simple, il y a un effort à faire pour apprécier l’œuvre c’est
ce qui mène à l’esprit critique. A l’inverse, le cinéma ou la photographie proposent des visions du
Sociologie des médias de masse
monde avec parfois des plans rapprochés, des ralentis qui dévoilent tout sans effort. Il n’y a plus
d’inaccessible ni d’imaginaire, ces techniques de reproduction n’incitent plus à l’effort de
contemplation, d’imprégnation de l’œuvre. Cette facilité implique une baisse d’exigence des
individus.

De la culture de masse à l’industrie culturelle, Adorno et Horkheimer


En 1940, Adorno et Horkheimer rebaptisent les médias de masse par le terme d’industrie
culturelle mettant en avant la standardisation des œuvres reproductibles. Ils soulignent l’aspect
mécanique et atomisé de la culture de masse. Le terme d’industrie culturelle est utilisé pour prendre
en contre-pied l’idée selon laquelle la culture populaire viendrait spontanément de la forme des arts
populaires actuels. Ils défendent que la culture de masse n’est pas le produit des gens auxquels elle
s’adresse mais est, au contraire, le produit d’une industrie des classes dominantes qui imposent
toute une série de divertissement aux masses. « L’industrie culturelle c’est l’intention délibérée d’en
haut aux consommateurs » - Adorno.

L’industrie culturelle propose un « art frauduleux » qui est donc répétitif et standardisé et
détruit les cultures populaires ainsi que l’art noble. C’est un « art frauduleux » car l’industrie culturelle
donne à voir ses produits standardisés comme des œuvres culturelles, cela affecte le jugement/l’esprit
critique et endort la raison. Perversion de la culture : on crée le besoin de tel divertissement dans la
vie des individus.

L’industrie culturelle crée une illusion de diversité, de liberté alors qu’elle se fonde sur la
standardisation : elle défend l’ordre, « la soumission par reflexe à la puissance et à l’omniprésence de
ce qui est » - Adorno. On ne pense pas en dehors du moment présent et on prend ce qui nous est
donné sans esprit critique et distance.

L’industrie culturelle mène donc au conformisme : les individus suivent les normes et
acceptent les situations de domination sans réfléchir. Elle abolit la capacité critique des individus. Par
exemple, pour Adorno le jazz nous propose un art frauduleux : nous nous divertissons, nous dansons
sur un pur produit de l’industrie culturelle qui nous diverti facilement et nous prive de notre liberté,
de notre esprit critique. Le jazz participe à la logique de l’industrie culturelle : fait penser qu’il prône la
libération alors qu’il prône la hiérarchisation. Il prend aussi l’exemple du cinéma : les scénaristes
écrivaient des histoires compréhensibles par des enfants de 11 ans, l’industrie culturelle nous offre des
produits trop faciles : la personne ne cherche pas à réfléchir sur ce qui lui est proposé et est donc
facilement manipulable, elle est apathique. L’audience est masse homogène qui n’a pas envie d’être
éveillée et est donc aliénée, elle ne prend aucune distance avec ce qui lui est dit dans les médias et
adhère aux modèles politiques/économiques/sociaux qui y sont représentés : l’industrie culturelle
impose son idéologie.

L’industrie culturelle fait parti d’un tout, elle est le chaînon d’un système d’aliénation dans
lequel l’individu est amené à faire des choses qu’il ferait, habituellement, sous une contrainte : en
offrant des personnages auxquels on s’identifie facilement, l’industrie culturelle nous pousse à imiter
ces modèles.

L’audience se croit comblée et finit par adhérer à une idéologie en consommant des produits
de l’industrie culturelle et est donc inconsciemment manipulée.

La fonction idéologique de l’industrie culturelle


C’est l’imposition d’un schéma reproductible et standardisé qui permet l’imposition d’une
idéologie : ce schéma amène à des formes de réactions quasiment automatiques du côté du
récepteur, amenant à l’abolition de toute forme de résistance.
Sociologie des médias de masse
Le spectateur finit par être préparé/conditionné aux types d’intrigues : il devient insensible aux
contenus et a des réactions automatiques. De plus, il peut anticiper ce qu’il va advenir : il n’est plus
surpris et ne demande pas à être surpris. Ce schéma amène à une perte de réflexion et d’imagination,
d’émotions fortes. C’est par ce processus que l’audience perd son esprit critique.

L’industrie culturelle impose son idéologie par un second mécanisme : en plus de proposer
une image répétitive elle en propose une simplifiée du monde, une vision stéréotypée. Les
personnages sont facilement appréhendables, caricaturaux ce qui permet encore une fois d’empêcher
l’audience de faire un effort de réflexion pour comprendre le message, elle perd son esprit critique et
adhère les idéologies diffusées par les médias de masse. L’audience s’identifie facilement aux
personnages puisque ces derniers sont simples mais cela permet la promotion de l’individualisme : la
solution à un problème collectif/social est individuelle (ex : dans les films Western, le cow-boy, seul,
sauve tout un village. C’est un personnage simple et répété dont il est facile de s’identifier).

L’industrie culturelle impose donc une vision individualiste pour détourner et empêcher l’attention des
luttes collectives. Tous ces schémas narratifs tendent à donner une vision individualiste : on cherche à
rendre naturel les inégalités sociales définissant la société capitaliste.

Le dernier mécanisme pour imposer une idéologie est celui du conscient et de l’inconscient.
Le conscient est ce qui est donné de manière explicite, la partie visible du discours, le message
manifeste qui semble être inoffensif et qui a pour mission unique de divertir l’audience. L’inconscient
est le message caché de l’industrie culturelle qui est au cœur du processus idéologique : il promut
l’absence de rébellion, l’ordre hiérarchisé de la société. En tournant en dérision la vie miséreuse d’une
jeune femme dans une série TV, on cherche à ce qu’inconsciemment les personnes dans la même
situation adhère à l’idée qu’une vie miséreuse l’est moins avec le sourire 😊.

Ce sont ces trois processus réunis qui permettent l’identification, le conformisme et l’absence de
révolte.

Cependant, nous pouvons adresser certaines critiques à l’école de Francfort :

• L’homme de masse a le choix entre la révolte ou l’adhésion à l’idéologie de l’industrie


culturelle : une œuvre peut soit être très stimulante intellectuellement et compliquée à cerner
ou alors très simple et va inconsciemment nous enlever notre esprit critique.
• Théorie héritière du marxisme et donc « anti-plaisir » qui nous fait nous résigner et qui de plus
nous fait oublier que nous le faisons.
• Est-ce-que les œuvres numériques sont-elles de l’art ou non ? Est-ce-que cette distinction
entre les œuvres numériques et les premières formes d’art ? L’Ecole de Francfort pense que
oui et hiérarchise les différentes formes d’art.
• Conception aliénée des publics : les individus sont incapables de résistances face aux
idéologies.
• Néglige l’existence de contre-discours et de contre-culture.
Sociologie des médias de masse
Chapitre 3. La théorie des effet limités/indirectes
Cette sociologie est une sociologie fonctionnaliste : tout fait système, chaque institution a
une fonction et tout va bien si toutes les institutions respectent leur fonction (années 40 et 50).
Nous allons nous intéresser aux travaux sur l’effet des médias par cette idéologie fonctionnaliste :
Paul Lazarsfeld et Elihu Katz.

L’approche empirique est revendiquée en réponse à l’école de Francfort, on fait des études
quantitatives de l’audience, des études de l’auditoire : on cherche à remettre les gens au centre de
l’analyse des effets des médias.

Il y a avec cette idée des effets indirectes/limités que nous ne nous sommes pas sûrs de cette
puissance des médias : remise en question de ce pouvoir donné aux médias en allant voire
concrètement ce que fait la réception des médias.

Lazarsfeld, Berelson et Gaudet ont fait des études pour voir l’influence des médias sur le vote
des citoyens lors de la campagne présidentielle de 1940 : les médias certes permettent d’avoir des
informations sur les candidats mais ne sont pas les seuls à mener aux votes finaux. A partir de là ils
identifient une série de facteurs influençant le vote final, les IPP : ces facteurs sont globalement sociaux
(religion, économie, relation familiale, intégration sociale…).

Pour saisir la formation du vote, les auteurs mettent en place un indice de prédisposition
politique se faisant par la famille, les groupes d’amis… qui permettent de voir à quel point les individus
sont intégrés socialement. A ces facteurs se rajoutent des facteurs sociaux classiques : âge, sexe,
revenu, lieu de résistance, … Qui en cohérant entre eux influent sur le vote final. La société est ici très
structurée par des facteurs sociaux qui influent sur les opinions politiques des individus.

La première influence n’est donc pas les médias mais plutôt le groupe primaire auquel on
appartient et son homogénéité : les indécis sont plus nombreux dans les groupes non homogènes
politiquement puisque les individus vont être entourés de différentes opinions faisant qu’ils vont avoir
plus de difficultés à se décider. Les relations interpersonnelles est un facteur essentiel dans la prise de
décision, elles agissent de manière première sur le vote mais cela n’implique pas que l’individu est
totalement tributaire.

Les relations interpersonnelles (relations entre personnes) sont le réseau dans lequel on est
inscrit, des groupes de personnes qui impliquent des relations en face en face. Ces relations ont un
rôle important dans nos prises de décision au quotidien, c’est au sein de ces groupes que l’on formule
des décisions, que nos opinions se clarifient.

Dans chacun des groupes, il y a des leaders d’opinion : personnes dans le groupe primaire qui
se distinguent par une forte attention aux messages médiatiques. Le leader d’opinon un rôle dans son
groupe, et n’est pas attaché à une situation sociale, ce rôle peut donc passer d’une personne à une
autre en fonction du sujet dont on parle. Par rapport au reste du groupe, le leader d’opinion dispose
d’une expertise sur un certain sujet : par exemple, une personne non politisée va chercher à savoir ce
que pense la personne de son groupe qui s’y connait le mieux pour savoir pour sui voter. Il joue le rôle
de relai d’informations au près des autres membres du groupe primaire faisant que le flux
d’informations n’est plus direct mais qu’il passe par des relaies. Le leader d’opinion est désigné par
les membres du groupe : ce n’est pas le leader qui décide de le devenir, ce sont les autres membres
qui lui donnent ce titre en allant toujours le voir pour se renseigner sur un sujet précis. Ce n’est pas
une caractéristique d’une personne, mais plutôt un mouvement dynamique de groupe. Il va donc
avoir un pouvoir charnière dans les prise de décisions.
Sociologie des médias de masse
Il n’y a donc plus d’effets directs des médias puisqu’il y a des formes de relais qui sont les
leaders d’opinion. De plus, tout le monde n’a pas les mêmes capacités cognitives sur les mêmes sujets,
tout le monde ne porte pas la même attention aux messages médiatiques et il y a chez chacun des
membres de l’audience une manière différente de recevoir un message. Cela ne dépend pas des
capacités intellectuelles des individus mais plutôt de l’attention qu’ils portent aux médias et à la
manière dont ils agissent sur nous : notion de filtre cognitif.

Les filtres cognitifs nous amènent à trier, à retenir, à modifier l’information, ils sont au nombre
de trois :

• Tout le monde n’est pas exposé aux médias de la même manière : la radio n’est pas encore
dans tous les foyers en 1944, encore moins la TV ; de plus en fonction de son milieu social, de
son temps nous allons plus ou moins porter attention aux médias. En fonction de mon
exposition à des informations politiques, économiques… j’aurais une opinion dessus.
• Les individus ont des opinions déjà préexistantes : on porte une attention plus forte aux
opinions qui vont dans notre sens, dans celui de nos opinions déjà existantes et allons donc
mieux les retenir.
• La mémorisation sélective : chacun à une capacité de perception et de rétention de
l’information différente

Chacun et chacune ne reçoit, ne perçoit pas le message de la même manière et ne va donc pas le
mémoriser de la même manière : tous les messages médiatiques sont soumis à ces filtres cognitifs.

Les deux étages de la communication (The Two Step Flow of Communication)


La communication à deux étages est une idée de Katz et Lazarsfeld, développée en 1955 dans
Influence Personnelle : ils développent la place des relations interpersonnelles dans la circulation du
message médiatique. Ils prennent en contrepieds l’idée que les « médias sont les facteurs du mal de
la société » et l’idée selon laquelle « l’audience est une masse atomisée, prête à recevoir le message »
dès le début de l’ouvrage.

Ils vont procéder à l’étude des auditoires : on compte les auditeurs, examine leurs
caractéristiques et on enregistre leurs goûts et dégoûts. C’est une étape préliminaire pour toutes
analyses des médias : avant de s’intéresser aux effets des médias, il faut s’intéresser à l’audience.

800 femmes interrogées dans une ville sur comment elles formulaient leurs choix de
consommation dans la vie de tous les jours (consommations courantes : alimentaires, bien ménagers
mais aussi occasionnelles : comment s’habiller pour un cinéma, une apparition dans un lieu
publique…) : ce qui est premier dans les actes de décisions sont les relations interpersonnelles, les
messages sont donc secondaires. Lazarsfeld et Katz disent « Il apparaît que les études sur les médias
ont grandement sous-estimées dans quelle mesure les attaches d’un individu, les opinions et les
activités qu’ils partagent influencent sa réaction aux messages des médias ». Il y a bien un rôle
premier donné aux leaders d’opinion qui tend à amoindrir le rôle dans la prise des décisions de la
publicité, des émissions de radio…

C’est ainsi qu’apparaît la notion de communication à deux étages : les médias ne façonnent
pas les opinions de manière directe mais plutôt totalement indirecte, puisque ce sont nos leaders
d’opinion qui influent nos choix. Le message ne vient pas directement affecter les gens mais passe
nécessairement par des formes intermédiaires dans le réseau/le groupe.
Sociologie des médias de masse
Plus on est intégré dans un groupe, moins les médias nous influencent de plus le leader
d’opinion a une influence qui n’est pas complètement directe : au près du leader d’opinion s’opère
chez les autres membres d’opinions une aide à prendre une décision.

Cette théorie insiste donc sur la singularité de chacun des récepteurs et de plus insiste sur la
présence de leaders d’opinion dans les groupes primaires. L’influence des médias est donc limitée
puisqu’elle passe par des intermédiaires. Les opinions se forgent dans la conversation et sont le produit
d’une réflexion, d’une mise en contradiction de plusieurs opinions.

Usages et gratifications
On reste dans la même ligne théorique qu’avec la théorie des effets limités. Cette théorie se
développe dans les années 1960 aux USA. Ce courant produit une forme de déplacement, on inverse
la question : que font les gens avec les médias ? Cette inversion permet de montrer que quand les gens
consomment les médias répondent à certain nombre de besoins, de formes d’attentes qu’ils. Ces
besoins sont différents selon les caractéristiques sociales ou individuelles des récepteurs. Toute
pratique de visionnage, lecture… produit une satisfaction de besoin, sinon cela n’a aucune utilité.

En fonction des individus, les besoins ne sont pas les mêmes mais les quatre points principaux
sont :

• L’audience est active : elle choisit sa consommation en fonction de ses besoins. Il n’y a plus
de relation entre les messages médiatiques et les effets. C’est l’audience qui va chercher des
réponses à ses besoins. Les effets sont donc indirects voire inexistants : par exemple, la TV
n’a pas d’effets sur les enfants, c’est eux qui se servent de la TV.
• Les effets des médias sont indirects voir même inexistants : on ne met pas l’attention sur les
effets mais sur l’activité d’audience.
• Les médias n’apparaissent plus que comme un moyen parmi d’autres de satisfaire des
besoins, et ils ne satisfont que certains besoins. Ils sont une ressource parmi d’autre pour
satisfaire des besoin particuliers (information, divertissement)
• La question est celle de la satisfaction des besoins, on ne s’intéresse pas à l’interprétation des
messages : logique rationnelle afin de répondre à des besoins. Cette théorie n’étudie pas la
signification des programmes pour les usagers, on pense avant tout un individu rationnel qui
a pour objectif de satisfaire un besoin.

Types de satisfactions recherchées :

• La diversion : les médias permettent de satisfaire un besoin de diversion/divertissement et


ont pour fonction d’aider l’audience à s’échapper du quotidien, de se relaxer
• Les relations personnelles : les médias occuperaient une sorte de rôle de substitut aux
relations personnelles, ils sont une forme de compagnonnage lorsque nous sommes seul.
• L’identité personnelle : les médias offrent des formes de référence, de modèles de
comportement qui viennent renforcer certaines valeurs ou qui aident à comprendre certaine
situation de la vie quotidienne. Les médias ont donc un rôle social : ils représentent beaucoup
de groupe auxquels les usagers peuvent s’identifier.
• La curiosité : les usagers ont un besoin d’apprendre de nouvelles choses, ils ont besoin
d’information et vont chercher à le satisfaire avec les médias (documentaires, reportages)
• La surveillance : les médias nous permettent de comprendre le monde qui nous entoure,
s’informer sur des événements majeurs et juger des actions/leaders politiques. Logique
d’information, pouvoir juger/appréhender les types d’agissement de l’élite dirigeante.
Sociologie des médias de masse
L’audience a une sélectivité forte qui n’annule pas complètement la notion d’effets mais le curseur est
pointé sur les usages rationnels de celle-ci. C’est une approche fonctionnaliste relativement
conformiste : l’individu est un individu économique, il a conscience de ses besoins et cherche de
manière stratégique et rationnelle à les satisfaire, il cherche en plus à se conformer à la réalité
représentée. La relation entre les médias et les individus est presque clinique, l’audience n’est pas
critique face aux messages des médias mais veut seulement satisfaire ses besoins.

Chapitre 4. Sociologie des pratiques culturelles


Les pratiques culturelles
Pierre Bourdieu, La Distinction : critique sociale du jugement, 1979, définit les pratiques
culturelles comme les pratiques de consommation des biens culturels, dont les médias. Il va chercher
quelle consommation de ses biens culturels ont les individus en fonction de leur classe sociale, leur
âge, leur sexe… La sociologie bourdieusienne s’appuie beaucoup sur des statistiques : les pratiques
culturelles expriment les différentes classent sociales qui forment la société, elles changent selon notre
classe d’origine.

La société est structurée en trois classes sociales :

• La classe supérieure/bourgeoisie correspondant aux chefs d’entreprises, enseignants dans le


supérieur, personne à responsabilité = les catégories sociologiques professionnelles
supérieures = SCP+ (avocats, médecins…)
• La classe moyenne : artisans, employés de PME, enseignants du secondaire
• La classe inférieure/populaire : ouvriers, agriculteurs

Chaque classe sociale se définit par sa position sur la structure sociale. La hiérarchie entraîne un
rapport de domination : la classe supérieure étant dominante et celle inférieure étant dominée.
Bourdieu définit le déterminisme : nous sommes déterminés par notre classe sociale d’origine, on
porte toujours les stigmates de cette dernière.

B évoque la question du capital, les classes se définissent par des capitaux qu’on cherche à
augmenter tout au long de sa vie dans l’optique d’accéder à une classe supérieure. Le volume de
capitaux accumulés détermine la position sur la structure sociale.

• Capital économique : ensemble des biens immobiliers, salaire, capital hérité


• Capital social : réseau relationnel, réseau d’adresse dont on dispose dans notre entourage
• Capital culturel : langage, mode de raisonnement, goûts artistiques, culture générale

Il y a aussi des différences à l’intérieur de chaque classe sociale : il y a des dominants et des dominés
dans chacune des classes : un chef d’entreprise va être dominant dans sa classe car il a un capital
économique supérieur à un enseignant, un médecin.

B évoque la notion de trajectoire sociale : il y a une logique d’ascension sociale, on peut


monter cependant on stagne à partir d’un moment, on a beau gagner du capital nous restons dans
notre classe sociale.

L’habitus est l’ensemble de prédispositions à l’action, intériorisation de visions du monde


qu’on a dès l’enfance à partir d’une expérience de classe, qui guident les goûts, les choix, les
comportements. On incorpore des valeurs qui ensuite vont donner lieu à toute une série de
comportements marquée par notre habitus.
Sociologie des médias de masse
Les dispositions esthétiques
Il y a une hiérarchie culturelle en plus d’une hiérarchie de classes sociales : les pratiques
culturelles des classes dominées sont plus légitimes et nobles que celles des classes populaires alors
qu’elles sont minoritaires. Ce classement apparaît naturel pour toutes les classes sociales, on attribue
aux œuvres les plus nobles des qualités d’esthétisme indéniables que personne ne remet en cause.
Cette échelle s’impose donc par son évidence, son naturel. Les œuvres moins nobles, quant à elles, se
caractérisent par l’absence de consensus : ce sont les œuvres dont on discute la qualité esthétique,
ces œuvres peuvent donc être considérée plus tard comme une œuvre noble. Certaines œuvres, enfin,
sont considérées comme illégitimes, ce n’est pas discutable : elles n’ont aucune qualité esthétique (par
exemple, Plus Belle La Vie).

B pense des formes de disposition esthétique : l’échelle de légitimité vient caractériser les
œuvres et impose une relation entre elles et les spectateurs. Les œuvres nobles sont difficiles d’accès,
demandent des compétences de perception contrairement aux œuvres populaires sont faciles d’accès
et de compréhension. Plus une œuvre est hermétisme, plus l’œuvre est noble. L’œuvre populaire se
définit par une proximité importante avec son public : plus une œuvre est facile d’accès, plus « on
rentre dedans ».

Apports et critiques de la théorie bourdieusienne


B par son approche macro sociologique va éclairer des mécanismes encore à l’œuvre
aujourd’hui : certaines œuvres se voient accorder une légitimité contrairement à d’autres. A l’intérieur
de cette hiérarchie culturelle, il souligne une hiérarchie sociale. Cette hiérarchie est très symbolique :
on se moque des goûts d’une personne aimant des œuvres populaires.

L’approche Bourdieusienne n’arrive pas à sortir du déterminisme social : les hiérarchies


culturelles semblent ne pas pouvoir être remises en cause. Les classes sont populaires n’ont pas
d’autres choix que d’accepter que leurs pratiques soient perçues illégitimes. Or nous pouvons voir,
avec les Cultural Studies, que les pratiques culturelles populaires peuvent être une forme de
résistance. Les classes populaires ne font pas que subir la hiérarchie imposée par les classes
dominantes.

Chapitre 5. Au-delà des pratiques culturelles, la réception


Les pratiques culturelles revisitées
Les classes populaires se tournent vers le négatif de la culture contrairement aux classes
supérieures, et les classes moyennes investissent les œuvres entre les deux, qui cherchent à atteindre
une forme de légitimité.

Depuis les années 1970, les pratiques culturelles sont l’objet de nombreuses études
sociologiques (DEPS) : une grande étude est faite tous les 10 ans afin de voir comment l’échelle des
œuvres est structurée. Les pratiques populaires ne sont plus définies par les usagers venant de classes
populaires, aujourd’hui la génération jouent un peu grand rôle dans la légitimation des œuvres. Petit
à petit, on constate des formes de réception de plus en plus complexes, il y a un processus
d’appropriation des œuvres qui n’est pas toujours évident.
Sociologie des médias de masse
Mutations des pratiques culturelles
Olivier Donnat, remarque en 1997 que nous sommes, en France, dans une politique de
démocratisation culturelle : l’objectif est de rendre accessible à tous, la culture, mêmes aux classes
populaires (gratuité des musées, écoles d’art, conservatoire…). Est-ce-que cette politique fonctionne ?
Les égalités d’accès à la culture ont eu des résultats contrastés : on trouve encore une forme de
hiérarchie sociale dans les pratiques culturelles. 68% des français n’ont jamais vu de spectacles de
danse, 72% n’ont jamais vu un concert de musique classique et 42% n’ont jamais vu une représentation
théâtrale. On remarque un lien de causes à effets entre les classes sociales et ces statistiques.
Néanmoins, il y a une conséquence de cette politique : la fréquentation des lieux de culture de
manière générale a augmenté, mais concerne surtout les classes moyennes et supérieures.

• Cette étude montre aussi qu’il y a, par rapport aux années 80, une baisse générale de la lecture
ou plutôt de gros lecteurs (plus de 50 livres par an) et une augmentation de petits lecteurs.
Ceci s’accompagne de l’apparition d’internet, des pratiques audiovisuelles. Ces nouvelles
pratiques mènent à une culture plus fragmentaire.
• On remarque aussi une augmentation du taux d’éducation : plus de bacheliers (80% des jeunes
de 18 ans ont un bac).
• Les gens regardent de plus en plus la TV, et sélectionnent de plus en plus leur programme
• Ruptures générationnelles : les générations d’après 1968 qui ont connu les industries
culturelles ont des pratiques culturelles moins légitimes (CD, vidéos…) que les générations
précédentes.

En 2008, O. Donnat fait une autre étude :

• Montée en puissance des pratiques numériques : multiplication des écrans


• La consommation de TV stagne voir baisse : 21h/semaine consacrées à la TV seulement, mais
cela doit se comprendre avec les 10h passées devant les ordinateurs en dehors du travail.
• Nouvelle baisse de la lecture
• Baisse de la radio : cependant 2/3 des français écoutent la radio quotidiennement
• Pratiques de musique et de cinéma stagnent
• Stabilité de la fréquentation des lieux culturels

4 grandes catégories de générations :

• Celle née pendant la SGM qui n’a pas suivi le mouvement du numérique et reste
consommateur de médias classiques : radio et TV
• Les Babies Boomers (années 50) : première à bénéficier des industries culturelles et gardent
des traces de cette culture juvénile (achète des disques, vont à des concerts) en plus des
consommations classiques
• La génération des 30-40 : génération multi-équipée à la fois des médias traditionnels et a saisi
le tournant des numériques
• La génération de moins de 30 ans : grandie avec la téléphonie, le numérique, les jeux-vidéo…
elle se caractérise pour son intérêt pour ces pratiques qu’elle substitut aux médias classiques.

La hiérarchie de classes sociales de Bourdieu s’est complexifiée grâce à la démocratisation culturelle


(minimum scolaire, musées…) amenant à une moyennisation des pratiques culturelles. L’enquête de
2008 souligne une différence entre les pratiques culturelles en fonction des divisions générationnelles
et non de classes sociales.
Sociologie des médias de masse
De la consommation à la réception
Pierre-Michel Menger montre en 1986 dans quelle mesure se rendre à un concert de musique
classique contemporaine vient d’une capacité à apprécier ce genre. La fréquentation des concerts de
la musique classique contemporaine n’implique pas nécessairement d’avoir l’ensemble des
compétences pour apprécier cette musique : la capacité d’appréciation ne nous vient pas uniquement
de nos compétences mais aussi de nos goûts. Il y a un effacement de l’homologie entre pratiques de
consommation et compétences d’appréciation de cette musique.

Le matériau musical est difficile d’accès, à déchiffrer et à évaluer ce qui lui donne sa légitimité, c’est
une forme de garantie de valeur : plus une œuvre est abstraite plus elle se donne à voir comme une
œuvre légitime.

Face aux œuvres, les auditeurs se trouvent assez démunis : beaucoup des auditeurs se réfèrent aux
institutions pour savoir quoi écouter, on donne confiance et légitimité aux institutions. 73% d’entre
eux ne savent pas catégoriser les œuvres et vont donc se référer aux institutions pour choisir le concert
auquel ils vont se rendre. Les spectateurs vont développer leur propre capacité d’appréciation : les
auditeurs s’en réfèrent à eux-mêmes parfois pour les œuvres très complexes qu’ils écoutent, c’est la
réforme de l’entendement musical, ils développent leurs propres outils de compréhension (parfois
non proches de la technicité musicale : amusant, divertissant, détendant…).

P-M M permet de montrer qu’il y a une capacité d’écoute active et créative et ouvre la vois à des
approches plus qualitatives sur la réception des œuvres.

Le « braconnage »
Michel de Certeau n’est pas bourdieusien et va s’intéresser à l’interprétation et à la résistance
des consommateurs : ils sont des braconniers qui chapardent des biens en toute illégalité pour
composer leur quotidien (sélection, relation avec des éléments extérieurs).

De Certeau a insisté sur les travaux sur la réception des œuvres dans L’Invention du Quotidien (1980) :
il s’intéresse aux processus de la lecture. Il avance l’idée que la relation entre producteur et récepteur
est une relation inégalitaire : les producteurs sont ceux qui ont le contrôle sur le texte, celui qui va
être mis à disposition des gens et ont donc un pouvoir sur le consommateur en imposant du sens à
travers leur production. Les producteurs sont comme les propriétaires de terres, des propriétaires qui
régularisent l’accès à ces terres.

Il n’empêche que les consommateurs ont de plus en plus de pouvoir et d’autonomie : il y a plus
de choix, les consommateurs choisissent ce qu’ils font des œuvres proposées. Les consommateurs
« braconnent » c’est-à-dire qu’ils opèrent une interprétation pour chaque texte qu’ils lisent : les
éléments dont ils s’emparent sont ceux qu’ils peuvent mettre en lien avec d’autres éléments de leur
vie, ils s’approprient et produisent leur propre usage des textes qu’on leur propose. Les producteurs
mettent en place des logiques de contrôle et pourtant les consommateurs font des « coups », ils vont
déployer des tactiques de résistance face à ce qu’on cherche à leur imposer en ne respectant pas les
usages prévus par les producteurs.

Il y a un rapport de domination entre producteurs et consommateurs mais les dominés


(=consommateurs) sont capables d’action au même titre des dominants. Les publics vont parfois
développer des tactiques de résistance, différentes en fonction de leur groupe social : les positions
sociales ne jouent pas seulement sur les capacités d’interprétation mais aussi sur la manière de résister
aux choses imposées par les médias.
Sociologie des médias de masse
Les actes de résistance sont aussi des actes politiques : c’est une façon de prendre en contre-pied le
contrôle, d’avoir une micro-liberté (échelle individuelle). Pour De Certeau, il n’y a pas de déterminisme
social : une classe sociale n’a pas de meilleure capacité de résistance qu’une autre mais seulement une
tactique différente.

De Certeau (avec Menger) commence à envisager les consommateurs des individus avec de vraies
capacités de résistance en ayant une interprétation personnalisée des textes qui leur sont proposés.
La question de la classe sociale ne détermine pas la capacité de résistance des individus.

Culturaliser les médias de masse. Le tournant des Cultural Studies


Les cultural studies sont des études vastes, ne concernant pas uniquement l’étude des médias,
c’est cependant sur ces études que nous allons nous intéressons. Les cultural studies sont très connues
pour leurs études sur la réception des médias.

C’est un courant qui émerge dans les années 1960 à Birmingham avec Richer Hoggart, Raymond
Williams et Stuart Hall. Il se construit dans la critique de l’école de Francfort, il conteste l’idée des
contenus médiatiques comme homogènes, la culture populaire est aussi un lieu de conflictualité
sociale, et les producteurs ne sont pas des « tyrans » imposant leurs idées, ils produisent aussi des
choses innovantes et diversifiées. De plus, il y a nécessairement des logiques de résistance, de
négociation au niveau de la réception : le sens produit n’est pas tout le temps le même que le sens
reçu, les récepteurs interprètent à leur façon les productions.

On ne parle plus de masse mais d’individus et on ne parle plus d’effets mais des capacités de
résistance, d’appropriation et de négociation.

Une ethnographie des publics


Richard Hoggart dans La culture du pauvre ! The uses of Literacy (1957) nous propose une carte
ethnographique des classes populaires. Cet ouvrage écrit sous la forme d’autobiographie, venant lui-
même d’une classe populaire s’opposant au côté élitiste de l’université britannique des années 50. Son
ouvrage s’appuie sur ses souvenirs d’enfance, use d’un style autobiographique et surtout se donne
pour objectif de prendre le contre-pied d’un imaginaire disqualifiant pour les classes populaires
(aliénées par la culture de masse et l’industrialisation).

Pour aller contre cette vision pessimiste des classes populaires, H fait un ouvrage avec une
approche biographique mais en même temps marquée par une approche ethnographique (évoquant
les lieux de travail, d’habitation, les relations entre les hommes et les femmes, dans les familles… des
classes ouvrières britanniques). H cherche à rendre compte de toutes les pratiques de la classe ouvrière
et de donner un sens à ces pratiques pour montrer leur forte signification et contre-carrer la vision
disqualifiante de cette classe.

Les classes populaires ne sont pas véhiculées par les médias de masse, elles ont une véritable capacité
de distanciation/méfiance face aux médias de masse : il n’y a ni homogénéisation, ni archaïsme mais
au contraire une véritable capacité à mettre à distance les formes de médiatisation et les contenus
médiatiques mis à la disposition des classes populaires. Il y a un double mouvement :

• Les classes populaires se caractérisent par des logiques de défense de tradition, elles sont
très attachées à leur mode de vie traditionnel (débrouillardise, modèle de famille patriarcal,
promiscuité, respectabilité). Les classes populaires « restent fidèles à leur certitude concrète
et à leur rituel quotidien ainsi qu’à leur langage coutumier, à leurs locutions proverbiales et
Sociologie des médias de masse
leurs dictions traditionnels », c’est une tradition populaire pour laquelle les classe ouvrière se
battent.
• Les classes populaires sont, néanmoins, sujettes à des logiques de transformation venant
redéfinir ces pratiques : la consommation de masse inculque des « attitudes nouvelles »
cohabitant avec les « attitudes anciennes ». Il y a une forme de continuité entre la tolérance
traditionnelle et les formes modernes de l’égalitarisme. Le culte de la tradition et le culte du
progrès s’articulent entre eux dans la classe ouvrière, ils sont dans une forme de continuité.

Le fait que la classe ouvrière aille vers des productions de masse sont une preuve qu’il y a une volonté
pour cette classe d’avoir plus de biens matériels : elles ne sont pas plus sensibles aux publicités, elles
achètent plus de machine à laver, de frigo… que les classes bourgeoises, car elles n’en ont pas à la
base.

H évoque aussi la consommation des classes ouvrières vue par les classes ouvrières : prennent-
elles sans réflexion le contenu médiatique qui leur ai proposé ? Les classes populaires sont
véritablement en capacité de consommer avec beaucoup de distance le type de discours médiatiques
qu’on leur propose, il n’y a pas d’adhésion forte aux contenus des médias de masse en prenant appui
les classes populaires. La classe populaire fait l’objet d’une consommation distancière :

• Le consommateur ouvrier fait une distinction nette entre la vie réelle et les discours des
médias, qui sont perçus comme du divertissement, une échappatoire à leur vie quotidienne
compliquée.
• La consommation des classes populaires est oblique : il y a une véritable méfiance du lectorat
face aux contenus médiatiques, ils ne croient pas à ce qu’on leur dit, il y a beaucoup de dérision
et d’inattention du côté de ces consommateurs. Cette méfiance est quasiment encrée dans
l’ethos populaire : il y a une culture de méfiance face à toute chose incarnant le pouvoir et
une élite, on ne veut pas être manipulés et être pris pour des idiots.

Quelques critiques :

• H ne nous dit pas s’il y a une opposition idéologique chez les classes populaires.
• Glorification des classes populaires

Codage/Décodage
Stuart Hall dans Codage/décodage (1973) insiste davantage sur les capacités de la résistance
du côté de la réception, le processus communicationnel se divise en trois pôles :

• Le codage renvoi à la production du message médiatique : ce sont les pratiques faites par les
gens qui agencent le message et le rendent compréhensible. Les producteurs des messages
médiatiques répondent à des règles formelles du discours donnant forme à l’information : il
faut respecter une certaine grammaire pour que le message soit compréhensible. Il y a donc
une série de contraintes que doivent respecter les producteurs. Ces derniers ont le pouvoir en
disposant des moyens de production, ils inscrivent dans le message une structure de sens dont
le but est qu’il se réalise lors de la réception.
• Le message : ensemble de signes ayant une certaine autonomie, il se caractérise par un sens
dominant, une vision du monde ; il correspond au développement de différents sens. Ce
message produit une vision de la réalité ne correspondant ni à la réalité du récepteur ni à
celle du producteur : c’est une interprétation de notre monde à part entière.
• Le décodage renvoi à la réception : il n’y a pas de communication que si le message est
interprété, reçu, appréhendé par la réception, la correspondance entre le message codé et
décodé n’est pas évidente. La structure de sens qui est codée n’est pas nécessairement celle
Sociologie des médias de masse
qui est décodée : il peut y avoir des différentes, voir même des incompatibilités entre codage
et décodage. Les récepteurs ont des facultés d’interprétation et ont donc une autonomie dans
cette dernière : le sens donné lors du décodage peut être différent de celui anticipé par le
codage.

H défini trois formes de décodage (insistant sur les différentes positions idéologiques des récepteurs) :

• Décodage sur le mode hégémonique : les récepteurs décodent le message tel qu’il a été codé,
il y a une adhésion entre production et réception
• Décodage sur le mode négocié : les récepteurs s’opposent partiellement au sens codé, ils
négocient une partie des significations dégagées par les messages
• Décodage sur le mode oppositionnel : les récepteurs s’opposent idéologiquement au message
médiatique, ils s’opposent à l’idéologie du message (exemple : être totalement contre la baisse
des salaires). Il y a des capacités de résistance réelles du côté de la réception.

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