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Les Territoires de la communication

DE ISABELLE PAILLIART 

COLLECTION : COMMUNICATION, MÉDIAS ET SOCIÉTÉS 

Public :

Facile d'accès, cet ouvrage s'adresse à des publics étudiants, chercheurs ou


professionnels de la communication.

Résumé :
Villes, départements, régions, États, Europe... Les niveaux territoriaux
deviennent plus nombreux et leurs relations plus complexes. Tous confèrent
aujourd’hui à la communication une fonction essentielle.

À l’heure où la communication des collectivités territoriales prend une réelle


ampleur et le rôle des nouvelles technologies de communication apparaît
décisif, les médias suivent-ils ce mouvement de recomposition ? Leur
économie favorise-t-elle leur territorialisation et l'émergence d'une écriture
originale ?

Cet ouvrage, rédigé en prenant appui sur un ensemble de travaux de


recherche sur la communication à l'échelon local et régional, se propose
d’appréhender la relation médias-territoires dans ses aspects politiques,
économiques et culturels.

Cette démarche s'avère d'autant plus nécessaire que le territoire possède une
originalité fondamentale, celle de devoir en permanence contribuer à sa
propre production.

Jamais pareil terme n'aura paru aussi familier et insaisissable que celui de « communication ». Polysémique par
nature, la notion de « communication » est traversée par des réalités multiples. La constitution d'une définition
rigoureuse revêt la forme d'un exercice délicat, comme en témoigne l'aveu de Diderot en 1753 dans
l'Encyclopédie cité par l'auteur en guise d'incipit : « Communication : ce terme a un grand nombre
d'acceptions ». Dans ses sens modernes, le terme est souvent perçu au prisme de la communication
médiatique et/ou des mass media. Le détachement de cette vision réduite au profit d'une définition large et
pluridisciplinaire constitue le présupposé central de la démarche de l'auteur.

2Privilégiant une approche historique, Armand Mattelart se charge d'étudier les «  configurations
communicationnelles » des sociétés sur la période du XVII e au XXe siècle. Plus exactement, il s'agit pour lui
d'identifier les ruptures et continuités dans le passage d'une configuration à une autre. Il importe alors
davantage à l'auteur d'étudier au plus près la place accordée à la communication dans les sociétés qui
traversent la période qui l'intéresse plutôt que d'établir une définition qui se voudrait incontestable de la
communication. En somme, dresser une histoire du concept de communication plutôt que de s'arrêter
obstinément sur une notion dont la société moderne s'est emparée pour en démultiplier les sens et les nuances.
Cette « archéologie du savoir sur la communication » s'articule autour de quatre histoires regroupant des
grands domaines traversés par la communication. Loin d'être hermétiques, ces histoires sont développées en
parallèle de sorte à nourrir une réflexion diachronique invitant le lecteur à éviter l'écueil d'une représentation
linéaire de l'histoire du concept de communication.

 1 voir Michel Foucault, Surveiller et Punir, Paris, Gallimard, 1975

3La première d'entre elles se concentre sur une représentation de la société en mouvement. L'auteur y retrace
l'émergence de la connexion des territoires au moyen de voies correctement entretenues et les représentations
de l'homme qu'elle implique. « La société de flux » se préoccupe de rendre les voies de communication
praticables pour assurer une meilleure circulation des marchandises et des hommes. Deux métaphores
parallèles tentent alors de cerner le thème de la circulation. La métaphore organique héritée de la découverte
du mouvement circulaire biologique place la société comme système unifié où chaque élément garantit le
fonctionnement du tout. Elle fait apparaître l'idée du risque de faillite d'un organe de cette société, qui s'illustre
par l'apparition des premières sociétés d'assurance et leur anticipation par le calcul. La métaphore mécanique,
quant à elle, prolonge la précédente. Le médecin-philosophe La Mettrie comparera le système social à celui
d'une horloge. La capacité des hommes à organiser leurs actions et leur travail constitue, selon ce dernier, leur
qualité première. Cette conception systémique de la société a une résonance politique et sociale au regard de la
technicité des moyens d'observation, de surveillance, et d'encadrement de la société 1. Lorsqu'elle est perçue en
mouvement, la société participe donc d'une rationalisation des flux qui concerne d'une part les voies de
communication et ceux qui les utilisent.

4Dans cette perspective, Mattelart souligne d'une part les efforts du réformateur Turgot pour assurer le bon
état des routes, et ceux des États pour recenser les hommes. De cette double attention portée aux voies de
communication et aux usagers résulte le développement des voies ferrées et du télégraphe. Progressivement,
le développement des lignes de communication fera place aux échanges qui se poseront au cœur des premières
théories économiques dont celle bien connue d'Adam Smith. Désormais pensés de paire avec les voies et
moyens de communication, les hommes prennent part à la représentation du monde en mouvement. En
résulteront la « physique sociale » d'Auguste Comte retenue comme l'ancêtre de la sociologie, et la
« physiologie sociale » de Spencer qui associera progrès et division du travail. Mais la théorie évolutionniste de
Darwin est celle qui illustre la prépondérance de la métaphore biologique pour se représenter l'homme en
mouvement dans l'espace de la société.

5Dans sa deuxième histoire, Armand Mattelart interroge le « lien universel » au centre du concept de
communication. Dans quelle mesure la mise en circulation des hommes a-t-elle modifié leur rapport à l'espace ?
La question de la rationalisation des transports intéressera la doctrine saint-simoniste dont les effets sur la
communication sont largement soulignés par l'auteur. L'idée d'une société auto-régulée, rejetant toute
intervention externe en fait un point essentiel pour saisir la genèse de la promesse de connexion et de contact
induite par la communication. Dès le XVIII e siècle, les travaux physiologiques de Xavier Bichat, en sus de poser
les bases des sciences de l'homme, constituent celles de la représentation moderne de la société qui « conjugue
science d'observation et science de l'organisation ». Le perfectionnement des territoires et des voies de
circulations implique alors de facto une représentation de l'homme dans cette configuration
communicationnelle. L'attention de Saint-Simon portée aux territoires et aux chaussées est, par retour,
emprunte de ce retour aux individus. Il concevra non pas le développement des voies de communication
comme une fin en soi mais dans le but assumé de les rendre utiles et agréables, allant jusqu'à affirmer que «  la
totalité du territoire français doit devenir un superbe parc à l'anglaise ». La construction des canaux de
circulation est donc teintée d'une idéologie visant à favoriser les échanges et à croire aux vertus de la
technique.

6La croyance dans les réseaux matériels se fait alors si vive qu'elle entraînera le même enthousiasme pour les
réseaux immatériels. Le développement des réseaux de poste comme la Royal Mail britannique, de transports,
ou encore de marchés à travers la création de la Société Générale en 1864 en constituent les exemples les plus
frappants. Sur le plan intellectuel, l'auteur revisite à ce moment les théories d'organisation de la société de
Marx, Proudhon, Benjamin, d'un côté, et des saint-simonistes Enfantin et Chevalier de l'autre. La vision des
premiers assimilera l'accélération des transports à celle des échanges économiques, tandis que les autres
expriment leur enthousiasme quant au développement des réseaux. L'âge d'or des Expositions constitue un
point fondamental dans le développement des échanges. Ces vastes présentations des nouvelles techniques de
communication questionnent en creux leur impact sur la société. Elles marquent un espace transitoire en tant
qu'aboutissement des échanges mondiaux et la question d'une marche vers le progrès et la société de marché.

 2 voir Loïc Ballarini, « Armand Mattelart, Michel Sénécal, Pour un regard-monde. Entretiens avec Mi (...)

7La troisième partie marque une étape transitoire dans cette archéologie de la communication. L'auteur porte
un regard élargi sur les échanges mondiaux dans ce qu'il dénomme « l'espace géopolitique »2.  Posé comme un
atelier global, l'espace géographique fait l'objet de stratégies de hiérarchisation qui se matérialisent par les
voies de communication. Le développement des voies de communication de la périphérie vers le centre impose
une distance tant physique que sociale entre les individus. Dans sa perspective critique, Armand Mattelart dira
qu'« il est difficile de parler d'un modèle de communication synonyme d'intégration nationale, encore moins
d'intégration sociale ». L'impérialisme sera la notion la plus visible de cette domination par la communication.
Le regard et la définition de communication volontairement élargis permettent ainsi de mieux saisir la pensée
critique de l'auteur qui identifie clairement la communication non plus comme une simple préoccupation
logistique mais idéologique.

8Mais ce n'est qu'alliée à « la propagation symbolique » que la hiérarchisation prend forme. Dans ce domaine,
la religion se pose en pionnier avec ses missionnaires qui attirera plus tard l'intérêt de Napoléon. Si le sens
commun retient essentiellement la dimension hégémonique de la propagande, l'auteur rappelle la diversité des
formes de luttes pour imposer un ordre au reste du monde. Parmi elles, les luttes pour la diffusion de l'usage
d'une langue au profit d'une autre à travers le monde. Le double intérêt communicationnel de l'analyse  de
l'auteur apparaît clairement à travers cet exemple. La langue, élément pourtant nécessaire à la notion ordinaire
de communication est porteuse d'une idéologie et d'une vision du monde à travers son développement, sa
propagation, et les usages qu'elle appelle.

9Le dernier chapitre place l'individu au coeur des techniques de communication. L'auteur revisite les travaux de
Sighele, Le Bon, et Tarde pour souligner la technicité des méthodes élaborées dans le souci de mesurer les
individus. L'auteur met ainsi en valeur l'« individu mesure », produit de cette société qui s'attache à l'aborder
dans le détail. L'organisation taylorienne du travail basée sur le calcul et l'observation précis des tâches ne
surprend plus et préfigure l'émergence du divertissement. Le rythme de travail des ouvriers participe alors à la
naissance de la notion d'agenda, qui sera par ailleurs reprise dans les sciences de l'information et de la
communication. Sur ce point, l'auteur – avec l'habilité qu'on lui reconnaît dans cet exercice – élargit l'angle de
son analyse à travers les travaux du penseur La Boétie. Contre « l'abêtissement des sujets » formulée par la
reprise militante des propos de cet auteur, Armand Mattelart incite, à « interroger la servitude ». Autrement dit,
s'arrêter sur les mécanismes de pouvoir qui conduisent les individus à « obéir à un de leurs semblables » et à
chercher à se divertir par ailleurs.

10L'ouvrage constitue un solide effort documentaire pour ré-historiciser la communication. L'auteur incite à
élargir les perspectives d'analyse d'une histoire des moyens de communication pour en dégager des enjeux de
civilisation. En activant le concept de communication et en assumant son opérabilité, l'auteur dresse une
histoire des utopies, promesses, et représentations induites par et pour la communication. C'est précisément ce
point qui fait de l'ouvrage une histoire du processus d'invention de la communication au-delà d'une histoire ou
d'une anthropologie de la communication.

11Si le lecteur devait ne retenir qu'une chose à la lecture de l'ouvrage, c'est l’invitation de l'auteur à une
pensée complète et complexe. Se détacher de la vision médiatique de la communication pour retracer l'histoire
de ce concept et en saisir la dimension heuristique. Ne pas penser la communication comme un élément
instrumentalisé de et par notre société à travers ses usages médiatiques mais la placer au cœur des activités
humaines.

12L'auteur lui-même se prête à l'exercice dans la postface à l'édition 2011 de l'ouvrage. Il y livre son
interprétation d'un monde réduisant la communication à « l'ingénierie des communications ». Très critique à
l'égard de ces sociétés aveugles aux « enjeux culturels et sociopolitiques du fait techonologique », l'auteur
identifie trois facteurs qui mettent à mal cette représentation. Tout d'abord, l'explosion de la bulle Internet et
de la « nouvelle économie » qui a montré les « dommages d'une économie mondialisée ». Viennent ensuite les
attentats du 11 septembre auxquels ont succédé un nouveau mode de contrôle légitimé par la lutte contre le
terrorisme. Le troisième facteur réinterroge la « révolution de la communication » à la lumière des idées de
« société globale de l'information » et de « sociétés du savoir ». L'auteur situe nos configurations de
communication dans la première représentation, basée sur la division entre ceux qui savent et ceux qui ne
savent pas. Il invite le lecteur à trouver la « révolution de la communication » et l'échange des savoirs en
dehors des « autoroutes de l'information » et des mass media. Démarche qui nécessite la conscience de la
charge historique du concept de communication.

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