Академический Документы
Профессиональный Документы
Культура Документы
B 270
Déshydratation aiguë
du nourrisson
Physiopathologie, diagnostic, traitement d’urgence
PR Pierre COCHAT, DR Yves GILLET
Département de pédiatrie, hôpital Édouard-Herriot et université Claude-Bernard, 69437 Lyon Cedex 03.
Physiopathologie membrane
cellulaire
membrane
capillaire
Par ailleurs, le nourrisson n’est pas autonome en terme concentration des urines, diabète insipide néphrogénique,
d’hydratation et dépend étroitement de son entourage. diabète insulinodépendant, hyperplasie congénitale des
Un déséquilibre hydrique conduira ainsi très rapidement surrénales.
à la déshydratation aiguë d’autant que, avant l’âge de • La déshydratation peut être le fait d’une erreur dié-
18 mois, l’immaturité des fonctions rénales (capacité de tétique ou d’une carence d’apport, chez certains
concentration, capacité à excréter une surcharge sodée enfants négligés ou dans un contexte d’hyperthermie
ou acide) contribue à la gravité du tableau clinique et sans hydratation adéquate.
biologique. La gravité potentielle de la déshydratation • Elle peut enfin être en rapport avec la constitution
tient en partie au fait que le nourrisson présente une d’un troisième secteur (péritonite), l’enfant ne semblant
fragilité cérébrale accrue vis-à-vis de l’hyperthermie, de pas avoir perdu de poids.
l’anoxie et de l’hyperosmolarité.
Diagnostic
Étiologie
Sémiologie
• Les pertes liquidiennes constituent la principale
cause de déshydratation. La sémiologie de la déshydratation est relativement faci-
Diarrhée aiguë : elle représente 90 % des causes de le à reconnaître.
déshydratation aiguë. Dans les pays industrialisés, les • L’interrogatoire recherche les antécédents, précise
diarrhées aiguës sont causées par des virus (rotavirus l’ancienneté des troubles et les modalités diététiques,
essentiellement) dans 50 à 60 % des cas et par des bac- y compris une éventuelle réhydratation orale.
téries dans 20 à 35 % des cas, rarement par des parasites • La perte de poids est le principal symptôme ; elle est
(voir : Pour approfondir 2). Cependant, l’examen de estimée sur la base d’une pesée récente ou d’une extra-
routine des selles pratiqué dans la plupart des labora- polation de la courbe de poids du carnet de santé
toires de microbiologie, même avec les techniques les (tableau I). L’examen clinique doit donc toujours com-
plus récentes, ne permet l’identification de l’agent mencer par la pesée de l’enfant nu.
responsable d’une diarrhée que dans deux tiers des cas. • L’estimation des pertes liquidiennes est habituelle-
Les déshydratations sévères sont beaucoup plus fré- ment accessible à l’interrogatoire : diarrhée, vomisse-
quentes lors des diarrhées aiguës virales que lors des ments, fièvre. La perte de poids peut cependant être sous-
diarrhées bactériennes. Les mécanismes exacts des estimée en cas de diarrhée non encore extériorisée ; les
lésions de la muqueuse intestinale, les médiateurs en autres symptômes prennent alors toute leur valeur.
cause et les facteurs de régénaration font actuellement • Les signes de déshydratation sont généralement
l’objet de nouvelles approches, dont la résultante est une mixtes avec, à divers degrés (fig. 3 et 4) :
interruption du cycle entérosystémique de l’eau avec – des signes de déshydratation extracellulaire : pli cutané,
augmentation de la sécrétion et diminution de l’absorp- dépression de la fontanelle (à examiner en position
tion. Dans le cas du rotavirus, la diarrhée est secondaire semi-assise), hypotonie des globes oculaires, hypo-
à la nécrose des cellules absorbantes et s’accompagne tension artérielle, oligurie ;
d’une sécrétion nette d’eau, de sodium, de potassium, – des signes de déshydratation intracellulaire : soif,
mais aussi de bicarbonates, d’où une acidose métabo- sécheresse des muqueuses (langue, face interne des
lique. Dans la majorité des cas, la phase d’état est brève, joues), fièvre inexpliquée, somnolence.
avec restitutio ad integrum de l’épithélium en 48 à 72 h. • Dans tous les cas, il faut savoir reconnaître les
Autres causes digestives : d’autres causes digestives signes de gravité : perte de poids supérieure à 10 % du
sont possibles, tantôt extériorisées (vomissements, poids du corps ; oligo-anurie (nécessité d’un collecteur
aspiration, fistules, stomies), tantôt masquées (occlu- d’urines – débit urinaire normal > 1 mL/kg/h) ; fièvre ;
sion). Il existe alors des pertes en sodium, mais aussi en polypnée par acidose métabolique ; allongement du
chlore et en ions H+ d’où la possibilité d’une alcalose temps de recoloration cutanée (> 3 s) ; collapsus (voir :
hypochlorémique. Pour approfondir 3) ; signes neurologiques (agitation,
Pertes cutanées ou pulmonaires : l’hyperthermie et le troubles de conscience). Ce tableau était jadis désigné
coup de chaleur entraînent une augmentation des pertes sous le terme de « toxicose ».
insensibles et des pertes sudorales. En cas de mucovisci- • Corrélations clinico-biologiques : un prélévement
dose, les pertes hydriques s’accompagnent d’impor- sanguin est réalisé à l’admission pour ionogramme, pH,
tantes pertes chloro-sodées. Une situation comparable PCO2, glycémie, calcémie, créatininémie, hémoculture ;
peut se rencontrer en cas de brûlures étendues, de der- selon le contexte : analyse des selles (virologie, bactério-
matoses suintantes, d’hyperventilation. logie), uroculture, ponction lombaire.
Toutes ces situations peuvent entraîner une diminution Il existe une corrélation entre l’importance du déficit
de la perfusion rénale avec oligurie par insuffisance réna- hydrique et les signes cliniques de déshydratation
le fonctionnelle (ou « prérénale »). (tableau I).
Plus rarement, l’origine de la déshydratation est rénale À cela peuvent s’ajouter d’autres facteurs de risque :
avec polyurie paradoxale : insuffisance rénale à diurèse dénutrition préalable, infection associée, vomissements,
conservée, uropathies malformatives avec trouble de mauvaise fiabilité parentale.
TABLEAU I
Degré de déshydratation
et signes cliniques en fonction
de la perte de poids
Traitement d’urgence
Les modalités thérapeutiques proposées concernent
avant tout la déshydratation par diarrhée aiguë, de loin la
plus fréquente, mais peuvent s’appliquer dans leurs
grandes lignes à d’autres situations.
(Elohes, 5 à 10 mL/kg). Par la suite, l’objectif est de La persistance de la diarrhée après réintroduction du lait
rétablir progressivement l’équilibre du milieu intérieur, justifie parfois la prescription d’un aliment lacté sans
tant en termes d’hydratation que d’ajustements électro- lactose (Modilac sans lactose, O-Lac) voire d’un hydro-
lytiques, car toute variation brutale peut être délétère. lysat de protéines (Pregestimil, Pepti-Junior) chez les
Cela représente un argument majeur en faveur de la petits nourrissons ayant présenté une diarrhée sévère. ■
réhydratation orale.
TABLEAU II
Réhydratation
Réhydratation par voie veineuse
1. Par voie orale
Dans la majorité des cas, la réhydratation orale repré- La quantité de liquide à perfuser sur 24 h associe
sente la meilleure option et, sous réserve du contexte 1 / les apports adaptés à l’âge
socio-psychologique, l’hospitalisation n’est pas indis- ❑ sérum glucosé à 5 %
pensable dans les cas de déshydratation modérée. Même 100 mL/kg pour les 10 premiers kg de poids théorique
en cas de déshydratation sévère, en milieu hospitalier, la 50 mL/kg pour les 10 kg suivants
seule limitation de la réhydratation orale tient à sa tolé- ❑ électrolytes
rance digestive (vomissements), qui est généralement Na 2 à 3 mmol/kg/j
maîtrisée si le soluté est proposé à l’enfant par petits K = 2 à 2,5 mmol/kg/j
Cl = 3 à 5 mmol/kg/j
volumes répétés (30 à 50 mL par prise) (voir : Pour appro-
❑ calcium
fondir 5). Les produits disponibles dérivent de la solution gluconate de calcium à 10 % : 1 mL/kg/j
élaborée il y a une trentaine d’années par l’Organisation Attendre la reprise de diurèse pour prescrire le potassium
mondiale de la Santé (OMS) pour la réhydratation lors et le calcium.
des épidémies de choléra au Bangladesh.
2 / la correction de la perte de poids par du sérum salé
2. Par voie veineuse isotonique (NaCl 0,9 %)
Si l’état clinique est préoccupant ou si la réhydratation ❑ 25 à 50 % de la perte de poids en 4 h
(sans tenir compte de l’éventuel remplissage préalable
orale s’avère impossible, inefficace ou insuffisante, la en cas de collapsus)
réhydratation par voie veineuse est alors indiquée ❑ puis encore 25 à 50 % de la perte de poids
(tableau III). L’administration de bicarbonate de sodium sur les 20 h suivantes
en cas d’acidose métabolique n’est pas indispensable,
3 / si le pH est inférieur à 7,10
car la restauration d’une volémie efficace, en améliorant
la perfusion des organes et tissus à l’origine de l’acidose, ❑ perfusion de bicarbonate de sodium à 1,4 %
12 à 15 mL/kg en 15 à 30 min
suffit à corriger progressivement le pH.
3. Cas particuliers
La déshydratation hypernatrémique (sodium > 160 Points Forts à retenir
mmol/L) : il faut réhydrater l’enfant plus lentement, sur
12 h, en privilégiant, là encore, la voie orale, sous
contrôle fréquent de la natrémie afin de ne pas l’abaisser • Une déshydratation aiguë négligée peut encore
de plus de 1 mmol/L/h. de nos jours entraîner rapidement le décès
Le cas échéant, il faut aussi corriger une hyperthermie sévère. d’un nourrisson ou lui laisser des séquelles,
Dans tous les cas, la réévaluation du poids et de l’examen en particulier neurologiques ou rénales.
clinique en cours de réhydratation est essentielle et doit • Le traitement précoce du collapsus est toujours
être réalisée au bout de 4 h, puis toutes les 12 h jusqu’à fondamental et souvent suffisant, car il rétablit
ce que la situation s’améliore franchement. la perfusion rénale et permet ainsi la correction
des anomalies métaboliques.
• La réhydratation orale est la meilleure option
Traitements associés dans les déshydratations aiguës par diarrhée.
Les produits antidiarrhéiques ralentisseurs du transit et Il ne faut pas donner d’eau plate,
antisécrétoires n’ont aucune indication. En revanche, les mais seulement un produit de réhydratation
antispasmodiques non anticholinergiques (Spasfon) et destiné à cet effet. La réalimentation doit ensuite
certains médicaments de la motricité digestive être précoce, les laits de régime ne se justifiant
(Débridat) peuvent être utiles en cas de douleurs abdo- que dans certains cas particuliers.
minales associées. • L’hospitalisation n’est pas toujours
Les antibiotiques ne sont indiqués qu’en cas de salmo- indispensable, mais elle s’impose si la perte
nellose ou de shigellose. Ainsi, en présence d’une de poids est importante ou si l’environnement
déshydratation aiguë par diarrhée sanglante fébrile, il est familial est mal adapté à un traitement
licite d’instaurer un traitement par cotrimoxazole ambulatoire (compréhension, éloignement).
(Bactrim) ou ceftriaxone (Rocéphine).
POUR APPROFONDIR