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Dragosaures

L’ aventure des dragues aurifères,


les géantes oubliées de l’histoire
de l o ’ r guyanais
« Peu d’industries ont eu une fortune aussi rapide que le dragage des alluvions aurifères ;
limité, il y a une vingtaine d’années à quelques essais informes, c’est aujourd’hui une
industrie prospère et qui contribue chaque jour à la production d’or du monde »
A. Bordeaux, 1908.

« Cette question des dragues est certainement une des questions les plus graves et les plus
intéressantes des essais industriels qui ont été faits à la Guyane » G. Hesse, 1909.

►La chaîne à godet de la drague


d’Ipoucin.

◄La drague d’Ipoucin en construction


aux ateliers de la société LOBNIZ à
RENFREW en Écosse.

Une saison en Guyane 05


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HISTOIRE

Une saison en Guyane 05


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◄Action de 100 Francs de 1912 de la
SOCIETE FRANCAISE DU MATARONI qui
a amené la drague d’Ipoucin.

A l’aube du XXe siècle, cinquante ans après la découverte de


l’or en Guyane, les grands gisements alluvionnaires des bassins
du Sinnamary, de la Mana et de la Comté, souvent exploités par
des sociétés à capitaux métropolitains, commencent à donner
des signes d’essoufflement relatif. Les productions faciles des
premières années d’exploitation semblent appartenir au passé.
Chaque exploitant a devant les yeux des gisements qu’il ne
peut atteindre : les alluvions dissimulées sous le lit vif des cours
d’eau mais aussi celles des plaines alluviales marécageuses que les
exploitations sont contraintes d’abandonner en saison des pluies ;
autant de difficultés que les moyens techniques du moment pour
l’exploitation des placers aurifères ne permettent pas de résoudre.
Il se pose également le problème de la nécessité d’optimiser le
rendement des exploitations. C’est devant cette problématique,
exprimée alors de façon identique partout dans le monde, que va
intervenir un véritable saut technologique dans l’industrie minière
aurifère à partir de techniques héritées des régions portuaires. Il
s’agit d’adapter à l’exploitation des gisements alluviaux des engins
de dragages destinés jusqu’alors à des travaux de curage des canaux.
Cette innovation se verra alors appliquée à l’industrie minière dès
les années 1870 en Californie, puis connaîtra un développement
▲Part de Fondateur de la COMPAGNIE DES rapide partout dans le monde. En Amérique de Sud, le dragage
DRAGAGES AURIFERES DE LA GUYANE FRANCAISE. des alluvions aurifères s’est principalement développé en Guyane
▼La drague Flora sur ses ateliers de montage française et pour une moindre part au Suriname et au Guyana.
en Belgique.
Une drague aurifère est une véritable usine flottante qui
se compose d’une coque (le « ponton ») constituée de caissons
métalliques étanches assemblés, et qui supporte en général une
machine à vapeur alimentée par des chaudières à bois, permettant,
par des jeux complexes de transmission par pignons et de renvois
de câbles, d’actionner les différentes pièces motrices de l’engin
: la chaîne à godets pour creuser l’alluvion aurifère et remonter
le minerai jusque sur la drague, les différents treuils pour la
manœuvre de la drague – qui se déplace en actionnant des câbles
ancrés sur les rives – et enfin les dispositifs de lavage du minerai
et de pompage.
Toute la prouesse technique consiste en effet ici à séparer l’or des

▲Dessin de la drague Flora, conçue comme la Danica par


l’ingénieur David Edouard LEVAT.
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►La drague Danica
dans la crique Janvier, affluent
de la crique Sparouine.

argiles, sables et graviers durant le très


court temps de passage des alluvions
sur la drague. Les dispositifs de
séparation de l’or sont aussi nombreux
que les modèles de dragues : débourbage
et élimination des gros éléments par
des cribles circulaires tournants ou à
secousses, dispositifs d’arrosage pour
délayer l’argile, passage du minerai sur
des canaux rectangulaires métalliques
ou en bois - les “sluices”*, garnis de
métal déployé, de fibres de coco, et aussi
parfois de plaques de cuivre amalgamé
permettant de retenir l’or.
Une fois un gisement reconnu, il
fallait créer une société qui faisait appel
la plupart du temps à des capitaux
métropolitains. Ces sociétés présentaient
la particularité de rassembler à la fois le
découvreur guyanais qui apportait son draglines jalonnent certaines criques et
gisement, l’ingénieur qui avait étudié le gîte et la plus spectaculaire, par sa mécanisation et ses
conçu son engin de dragage et les financiers. imposantes dimensions, est certainement celle
La construction des dragues guyanaises s’effectuait amenée en 1956 au placer Boulanger près de
en Europe, principalement dans des ateliers Cacao. Il s’agit cette fois d’engins automoteurs, le
écossais, belges ou hollandais puis les machines plus souvent à chenilles, munis d’une grue et qui
étaient intégralement démontées, et acheminées lancent leur godet pour récupérer des alluvions
en pièces détachées. sous l’eau et alimenter une laverie flottante. Les
Le transport s’effectuait en bateau à vapeur depuis dragues suceuses apparaîtront ensuite dans les
l’Europe jusqu’à Cayenne. Le matériel était ensuite années 80 pour exploiter les alluvions dans le
acheminé par les fleuves, jusqu’au site de montage. fond des rivières et les pelles mécaniques ont pris
Alors débutait la reconstruction de l’engin, qui le relais des draglines pour exploiter les alluvions
nécessitait plusieurs mois, avec d’abord la création aurifères.
d’un véritable atelier de montage, l’ensemble des
pièces étant boulonnées ou rivetées. Le délai entre Combien d’engins ont-ils ainsi été amenés en
la commande de la drague au constructeur et ses Guyane Française ? La présence d’une quinzaine
premiers coups de godets sur le gisement pouvait
atteindre aisément deux ans et représentait
de machines est avérée mais les documents
d’archive laissent entrevoir que ce sont sans ▼La drague
une véritable aventure humaine faite d’efforts, doute plus de vingt dragues qui ont été amenées Suzanne de la
de ténacité et d’ingéniosité pour faire face aux en Guyane. Les données relatives à cette activité SOUTH AMERICAN
innombrables difficultés et imprévus du milieu qui appartient à un passé pourtant récent restent GOLDFIELD LTD au
amazonien. toujours très fragmentaires. Certains engins ne placer Elysée (moyenne
sont parfois connus qu’à travers une gravure, voire Mana).
Certaines dragues justifient le terme de
“dragosaures” donné par les historiens
américains. Elles atteignent 40 m de longueur
pour 10 de large, avec des superstructures de 12
m de hauteur pour environ 400 t de métal. Le
dragage de l’or par les dragues à godets représente
une étape dans l’évolution des techniques. Après
l’arrêt en Guyane de ce type d’engin, d’autres
méthodes verront le jour en substitution, chacune
correspondant à un nouveau saut technologique
dans les méthodes d’exploitation minière. C’est
le cas des draglines qui arriveront des USA après
la Seconde guerre mondiale. Les épaves de ces

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▼La chaîne à godet et le trommel débourbeur en arrière plan.

LA DRAGUE SPERANZA DE LA CRIQUE SURSAUT


C’est dans la crique Sursaut, affluent de la criqueTigre aujourd’hui pour ce transport passé en décembre 1898 avec le capitaine
en partie noyée sous les eaux du barrage de Petit Saut, qu’a lieu saramaca Abiguite. Ce sont ainsi 120 tonnes de matériel qui
la première véritable tentative de dragage de l’or en Guyane en sont acheminées en 100 jours « sans qu’aucun organe ne fut
1898. La drague de la Compagnie de dragages aurifères de la détérioré, sans qu’aucun boulon ne fut perdu ».
Guyane française est conçue par le baron Herre Wyn, capitaine Le ponton de la drague est lancé le 14 juillet 1899, puis les
d’infanterie de marine en retraite et machines et appareils sont montées
directeur de la société. en deux mois. Le baron Herre
Cette opération est prévue Wyn peut alors écrire « (nous
comme « un programme qui doit avons) l’honneur d’avoir été les
révolutionner l’industrie aurifère premiers à introduire dans notre
guyanaise». Après prospection, la Guyane ces puissantes machines
teneur est estimée à 5g/m3 et on qui, en transformant complètement
considère alors que la drague est la méthode de traitement des
sur « l’un des plus riches placers alluvions aurifères, procureront à
de la Guyane et [qu’] elle mourra cette colonie une nouvelle ère de
de vieillesse longtemps avant de richesse et de prospérité. »
l’avoir épuisé. » On prévoit alors, pour 300 jours de
La construction est alors réalisée travail de la drague, 1.750.000 F de
par la société hollandaise Werf produits, mais les soucis surviennent
Conrad à Haarlem pour un coût de très rapidement : la chaudière
97.000 F, auxquels s’ajoutent 6.381 est trop petite et ne permet que
F pour le transport de Hollande quatre à cinq heures de travail
jusqu’à Sinnamary et 11.683 F de quotidien ; elle est conçue pour le
droits de douane, soit 114.297F avant son transport à Sursaut. chauffage à la houille et non au bois, trop humide et dont les
La drague est embarquée le 15 février à Amsterdam. A son dégagements de vapeur abiment la machine ; la pression tombe
arrivée à Cayenne, elle est ensuite transportée à Sinnamary le toutes les demi-heures et oblige à un arrêt pour la remonter,
23 août sur la goélette Ida, après qu’un appontement ait été soit quatre heures de travail effectif au lieu des douze prévues...
réalisé à l’embouchure du fleuve pour la recevoir. L’engin est Le rendement de la drague est insuffisant pour être rentable et
ensuite amené au dégrad Spéranza sur la crique Tigre, à 6 km la société est contrainte de cesser son activité durant l’année
de l’établissement central de Sursaut, avec un marché à forfait 1901.
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◄La drague
Marguerite
amenée par la
COMPAGNIE
MINIERE ET DE
DRAGAGES DE
GUYANE au placer
Elysée.

même un godet isolé. écrire en 1952 que « la


Dans le bassin du Maroni, on peut mentionner la question du dragage en
drague Danica, conçue en 1903, dont la carcasse Guyane est désormais
gît au confluent de la Sparouine et du Maroni, réglée ». La technique
puis la drague Helena, amenée en 1909 par la perdurera en d’autres
société anonyme Sparwine. lieux, comme
Trois dragues nous sont connues sur le bassin de en témoigne au
la Mana, avec, outre la drague Orion amenée par Suriname la drague
le Syndicat Mana, deux dragues encore visibles au “Jungle Queen”
placer Elysée avec la drague Suzanne, amenée en amenée à Benzdorp en 1963.
1903 par la Société des Mines d’Or de l’Elysée, ▲Débarquement
et sur laquelle travaillera Jean Galmot, ainsi que Quel avenir reste-t-il aujourd’hui pour les des pièces détachées
la drague Marguerite installée en 1908 par la anciennes dragues aurifères de la Guyane de la drague Marguerite
Compagnie Minière et de Dragage de Guyane. Française ? sur la crique Lézard
Parmi les dragues du bassin du Sinnamary, seule en attendant leur
subsiste aujourd’hui celle de la crique Sursaut L’éloignement de cet exceptionnel patrimoine acheminement vers le
(cf. encadré). La drague Flora a coulé en 1901, industriel minier ne doit pas en masquer l’intérêt placer Elysée.
après cinq mois d’activité, lors d’une crue de la et s’il est évidemment à présent impossible de
rivière, et la drague Courcibo, amenée par la transporter l’un des ces engins, la question d’une
même Société se trouve à présent sous les eaux possible valorisation sur place pourrait se poser
du barrage de Petit Saut. en certains points. La nécessité d’un musée
Enfin, ce sont au moins six engins qui ont été susceptible d’accueillir l’ensemble des vestiges
amenés dans le bassin de l’Approuague, d’abord miniers de l’orpaillage et de l’industrie minière
sur la crique Ipoucin (cf. encadré) puis en 1926 se fait ainsi aujourd’hui grandement sentir car les
sur le bas Approuague et la crique Mataroni multiples agressions humaines, ajoutées à celles
par la Compagnie des Mines d’or de la Guyane du temps et du milieu naturel, risquent de régler
française, parmi lesquelles une surprenante bientôt cette question de manière définitive.
drague-foreuse destinée à la prospection du lit de
l’Approuague. Texte de Pierre Rostan, Bureau d’Études Géologiques
L’aventure des dragues à godets en Guyane TETHYS
française s’achèvera avant les années 30, après des Photos de P-O Jay, P. Rostan.
séries d’échecs liés au manque de persévérance, Remerciements Mme M.F. Beauzemont, MM.
à la malchance, mais aussi souvent à la vétusté B.Youssouf, H .Costa, J. Anatole, C. Octave, J.
des engins, au manque d’argent et de pièces Machine, Ch. Lamendin, C. Santasussagna, F.
de rechange et aux conditions d’exploitation Mounier, J. Petot, D. Hanriot, P. Goergen, G.
difficiles et les frères Lenormand pouvaient Migeon.

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▼La drague d’Ipoucin
en construction sur ses ateliers
en Écosse.

▲Volant de réglage de l’inclinaison des sluices*.

LA DRAGUE “CONRAD” DE LA
CRIQUE IPOUCIN
Les gisements aurifères de la crique Ipoucin,
situés en rive gauche de l’Approuague en
amont de Regina et du saut Mapaou, sont
restés dans les mémoires pour avoir fourni
en leurs temps la plus grosse pépite connue
en Guyane (10,847 kg). Ils furent exploités
par la Société des mines d'or de la Guyane
française (ex Compagnie des placers du
Mataroni) qui se transforma en 1912 en
Compagnie française du Mataroni.
Au début du XXe siècle, Georges Conrad
découvrait dans le secteur d'Ipoucin, un
gisement de 5 millions de mètres cubes
d’alluvions sur 10 km de berges dragables. Il
fit alors construire à Glascow, en Ecosse, ce
qui fut sans doute la plus imposante drague
amenée en Guyane Française. La production
débutait en 1914. La drague était équipée
d’une machine à vapeur de 80 CV, avec
chaudière à double foyer, et d'une cheminée
de 12 m de hauteur. Le groupe de moteurs
à vapeur permettait d’actionner une chaîne
avec des godets de 100 L et un crible à
secousses ; les alluvions triées tombaient dans
des batteries de sluices* disposées de part et
d’autre de la drague. Des groupes de treuils
et de cabestans permettaient les divers
mouvements de la drague, en particulier le
“papillonnage” latéral ainsi que la variation
de la position de la chaîne à godets. Un tour
de marque Huré se trouvait embarqué sur la
drague pour les réparations et une pompe
centrifuge installée dans un caisson crépiné
de la coque prélevait les eaux de la crique

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◄L’amenée du trommel de la drague Marguerite.

nécessaires à la machine à vapeur et aux installations de


lavage des alluvions. ▲Groupe de treuils de la drague d’Ipoucin, sur le
Avec 20 h de travail effectif par jour, la production atteignait catalogue du constructeur LOBNITZ.
17 à 18 kg d’or par mois et la société était rapidement
bénéficiaire ; la machine fonctionna jusqu’en 1924, avec une
production totale de 1043 kg d’or, et ne fut arrêtée que
▼Groupe de moteurs à vapeur et tambours entrainant les
courroies moteur de la chaine à godet et du crible à secousses.
pour cause d’usure.
▼▼Sluices* pour la séparation gravimétrique de l’or d’avec
▼La chaîne à godets. les alluvions.

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