Академический Документы
Профессиональный Документы
Культура Документы
Souhila GHOMARI
Maître-assistante Faculté des Sciences Economiques, de Gestion et des sciences commerciales Université
Abou Bekr Belkaid Tlemcen
souhila.ghomari@hotmail.com
Abderrezak BENHABIB
Directeur de l’école préparatoire en sciences Economiques, Commerciales et Sciences de gestion
abenhabib1@yahoo.fr
Résumé
L’image des entreprises s’est sérieusement dégradée depuis le début de ce siècle : A l’heure des
licenciements destinés à maintenir ou augmenter des bénéfices, des résultats trimestriels, des
bouleversements climatiques majeurs, des publicités porno-soft, de la réalisation de l’homo
economicus, la partition entreprise et éthique ou encore marketing et éthique sonne décidément
faux. Le marketing éthique reconnaît que la tâche prioritaire de l’entreprise est d’étudier les
besoins des marchés visés et de faire en sorte de les satisfaire de manière plus efficace que la
concurrence mais aussi d’une façon qui préserve ou améliore le bien être des consommateurs et
de la collectivité. C’est ainsi qu’il faut désormais montrer patte blanche sur les conditions de
travail des sous-traitants, le travail des enfants, la juste rémunération des salariés…, sinon le
consommateur boycott et l’image flanche ! Mais ce n’est pas uniquement pour éviter le scandale
que les entreprises vont intégrer l’éthique dans leur stratégie marketing. Certaines en font une
véritable politique de différenciation. Ce qui pousse à penser que la tendance des consommateurs
pour l’éthiquement correct est plus qu’une simple mode.
Mais quelle crédibilité accorder à ces entreprises? L’éthique peut-elle être un outil du marketing?
Ne rentre t’elle pas en opposition avec la finalité même du marketing qui consiste à mettre en
œuvre les meilleures conditions pour vendre des produits? Peut-on, tout simplement, allier
éthique et marketing et aller vers un développement du marketing éthique?
Nous tâcherons de répondre à ces questions en analysant tout d’abord les facteurs et les acteurs
qui ont participés à son émergence au sein de l’entreprise. Dans un deuxième temps nous verrons
comment l’éthique peut être intégrée dans la stratégie marketing d’une entreprise. Enfin, nous
étudierons dans une dernière partie le conflit marketing éthique.
The image business has seriously deteriorated since the beginning of this century: At layoffs to
maintain or increase profits, quarterly results, the major climatic upheavals, soft-porn ads, the
achievement of homo economicus, the partition "business and ethics" or "marketing ethics"
definitely rings true. The "ethical marketing" recognizes that the priority task of the company is
to study the needs of target markets and make them meet more effectively than the competition
1
but also in a way that preserves or enhances the well being of consumers and the community.
Thus he must now show their credentials on the working conditions of subcontractors, child
labor, fair compensation of employees ..., if the consumer boycott and image wilt! But this is not
just to avoid the scandal that companies will integrate ethics into their marketing strategy. Some
make a real policy of differentiation. The pressure to believe that the consumer trend for
"ethically correct" is more than just fashion.
But how credible are these companies? Ethics can it be a marketing tool? Does not fit you it does
not conflict with the very purpose of marketing is to implement the best conditions for selling
products? Can we simply combine marketing and ethics and move towards development of
marketing ethics?
We will try to answer these questions by analyzing first the factors and actors who participated in
its emergence within the enterprise. In a second step we will see how ethics can be integrated into
the marketing strategy of a company. Finally, we will study in the last part the clash of ethical
marketing.
Mots clés: Marketing - Ethique - Morale - performance -Déontologie – stratégie
2
Introduction
Face à la pression des consommateurs influencés par les ONG, les entreprises sont amenées à
devenir responsables et tentent aujourd’hui d’allier marketing et éthique. Ce nouveau concept de
«markéthique» passe essentiellement par la communication, de plus en plus, par la conception de
produits éthiquement corrects et par les services rendus. Les distributeurs travaillent, largement, à
la mise en place d’un commerce équitable et d’une consommation engagée. Cependant, on peut
s’interroger sur la sincérité de certaines entreprises qui voient en ce nouveau phénomène une
nouvelle stratégie marketing.
« Marketing et éthique » : antinomie? Le « markéthique » reconnaît que la tâche prioritaire de
l’entreprise est d’étudier les besoins des marchés visés et de faire en sorte de les satisfaire de
manière plus efficace que la concurrence mais aussi d’une façon qui préserve ou améliore le bien
être des consommateurs et de la collectivité.
Pour comprendre l’éthique, un rappel étymologique s’impose. Aristote a introduit le terme êthike
thêoria qui désigne cette partie de la philosophie qui étudie la conduite de l’homme, les critères
de base d’évaluation des choix. En d’autres termes, il s’agit donc de fournir des indications sur
les critères et les valeurs qui doivent être respectés dans l’action.
Nous tenterons de toujours distinguer morale et éthique bien que l’éthique puisse aussi être
considérée comme synonyme de philosophie morale. Autant la morale désigne l’ensemble des
règles en vigueur au sein d’une communauté humaine et par conséquent, est profondément
collective, autant l’éthique est propre à chacun.
La morale se réfère à être bon (le but) tandis que l’éthique peut être caractérisé par agir bien (le
moyen pour y arriver). Dans la mesure où l’éthique résulte d’une réflexion faite par les décideurs
et implique des choix (sélections) dans une situation donnée parmi différentes solutions possibles
(légales, de préférence), elle implique la responsabilité de l’acteur. Elle va ainsi plus loin que la
morale. Celle-ci est plus une recherche de conformité aux règles voire de leur respect tandis que
l’éthique prône le respect des autres personnes (COCHEREL ,2004). Ainsi, l’éthique s’intéresse au
bonheur tant dans sa définition que sa réalisation.
Curieusement, la loi n’utilise quasiment jamais ce terme mais fait référence à la morale
(conformité aux mœurs), à la loyauté et à la bonne foi. Un comportement éthique relève dès lors
d’un engagement social délibéré. Par définition il n’est jamais imposé mais tout au plus
recommandé par la loi puisqu’il suppose l’intime conviction de l’acteur-décideur intéressé.
3
du bien (commun et individuel)». Selon MOUSSÉ (2001), l’éthique ne peut, en effet, être isolée de
la pratique individuelle dans un environnement d’injonctions contradictoires. Dans le monde de
l’entreprise, ce sont bien les pratiques de gestion qui sont en cause et non les convictions éthiques
des cadres et dirigeants.
Cette errance conceptuelle est représentative de la difficulté à fonder une éthique appliquée,
l’éthique des affaires n’étant finalement qu’une éthique appliquée parmi d’autres…
En effet, l’éthique se décline aujourd’hui dans un univers d’éthiques «appliquées», univers
apparu aux Etats-Unis dans la décennie 60 avec l’explosion des champs d’interrogation éthique et
posant la question de ses liens avec les éléments de philosophie morale. Cet univers se stabilise
dans la décennie 70 avec les domaines suivants: la bioéthique (conséquence des pratiques techno
-scientifiques en médecine), l’éthique environnementale (autour de la question des rapports entre
l’homme, les animaux et la nature), l’éthique des affaires et l’éthique professionnelle (liée aux
modes d’organisation propres aux sociétés industrielles et à la représentation des risques liés à
l’exercice de telle ou telle profession). Une éthique appliquée propose les contours normatifs
d’un comportement acceptable en construisant une instance de jugement, positive à l’égard de
certains comportements et négative pour d’autres. Elle contribue ainsi à fonder une sorte
d’idéologie des mécanismes de création de valeurs.
Les entreprises s’intéressent au concept d’éthique avec un intérêt renouvelé depuis quelques
années. L’affaiblissement de la culture d’entreprise (JOBARD, 1992) et les évolutions de
l’environnement poussent les entreprises à se questionner davantage sur leurs valeurs voire à s’en
forger. Selon MERCIER (1999), l’entreprise éprouve le besoin de créer un référentiel culturel afin
de guider et dicter les comportements des salariés. Ainsi, il est plus simple de justifier une
décision en fonction de normes morales et/ou de valeurs parfois autoproclamées. Ces normes et
valeurs se retrouvent formalisées dans les codes ou chartes éthiques de chaque entreprise. De
plus, une formalisation éthique, sincère ou opportuniste, permet de clarifier ou de favoriser les
relations entre parties prenantes.
Depuis les années 90, l’éthique dans l’entreprise est considérée comme un outil stratégique
permettant la création d’un avantage concurrentiel durable (LIPOVETSKY, 1992; BOYER, 2002;
PESQUEUX et BIEFNOT, 2002). Dés lors, l’éthique s’inscrit dans une perspective utilitariste et
pragmatique reposant sur le développement de compétences individuelles et organisationnelles.
Ses objectifs déclarés devenant alors l’amélioration des relations sociales et sociétales. Il est
intéressant de noter qu’il s’agit d’une éthique posée en amont de l’action ou comme le suggère
PESQUEUX (2002), « une éthique conçue comme une coquille vide» voire une «utopie moderne»
selon BOYER (2002). Comment se décline alors l’éthique de l’entreprise? D’une part au niveau
individuel par la recherche du bien être et du meilleur respect possible des parties prenantes
concernées. D’autre part au niveau organisationnel avec le respect des valeurs liées à la RSE et
plus largement du développement durable, deux thèmes construits en extensivité de celui de
l’éthique des affaires. L’impératif de rentabilité de l’entreprise n’en demeure pas moins présent et
l’a conduit à rechercher le compromis optimal entre le respect de ses valeurs éthiques et les
nécessités induites par la mise en œuvre de ses plans d’action. Il n’en reste pas moins que les
écarts constatés entre la mise en œuvre tactique et les valeurs éthiques affichées constituent une
dérive.
4
La question de l’éthique des affaires, comme éthique appliquée, va venir poser le problème de
l’éthique de l’entreprise tout comme de l’éthique des entreprises. Elle concerne l’activité des
entreprises déclinée, par exemple, en codes d’éthiques mais aussi les représentations liées aux
conséquences éthiques véhiculées par les outils de gestion (marketing et publicités érotiques ou à
destination des enfants, comptabilité et qualité des comptes, etc.). A ce titre d’ailleurs, il s’est
développé tout une série d’analyses éthiques articulées avec les différentes disciplines des
sciences de gestion et les instruments sur lesquels elles se fondent ou encore avec les actes de
gestion des entreprises.
L’émergence d’éthique dans le monde des entreprises date du milieu de la décennie 80 en Europe
et donc en France, mais, à part le cas de la Grande-Bretagne, l’éthique des affaires constitue un
thème de discussion et non pas véritablement une discipline de gestion « patentée». En d’autres
termes, les cours d’éthique des affaires ne se développent pas de façon académique de façon
obligatoire et générale dans les cursus universitaires, si ce n’est dans les programmes MBA
«clonés» du système américain. L’explication en est sans doute d’ordre « culturel», en particulier
du fait de la forte tradition philosophique qui existe en Europe continentale.
Des courants de pensée légitimes aux Etats-Unis (PARIENTE, 2010) permettent d’expliquer une
telle vision de la vie des affaires :
- Une forme de légitimité accordée à un « darwinisme social» (avec son - struggle for life)
c’est-à-dire la survie du plus fort dans un jeu de forces qui le dépasse (cf. « la main
invisible» d’A. Smith), mais dans une société où, au départ, chacun est vu comme ayant sa
chance, et qui tente de s’organiser conformément à cela,
- La prégnance du « religieux»
- L’importance accordée au jugement par « soi-même»,
- La tradition éthique américaine du « minimum moral», c’est-à-dire l’impossibilité - d’éviter
une telle injonction même si la notion de dommage social est à la fois imprécise et évolutive
dans le temps.
- Une interprétation contemporaine donnée à la pensée de Machiavel, - interprétation qui
invite à considérer l’entreprise comme lieu de « gouvernement privé » où les décisions
doivent être prises en fonction de ce qui est et non de ce qui doit être dans un univers où doit
régner l’efficacité mais dans un contexte moral, ingrédient nécessaire à la construction de la
confiance,
- Le légalisme avec le principe du respect de la règle au pied de la lettre,
- Le pragmatisme qui se caractérise par le fait que l’on « est» par ce que l’on - « fait ».
Tous ces référents s’inscrivent dans le cadre plus général d’un « jeu économique» aux règles
considérées comme étant égalitaires mais conduisant à l’inégalité des situations dont l’examen est
justement l’enjeu de l’éthique des affaires.
Selon PARIENTE (2010), l’éthique des affaires va se développer sur la base suivante :
- Avec les codes d’éthique (édiction interne de valeurs provenant des directions - générales),
- En liaison avec le thème de la - Corporate Governance où la « bonne » gouvernance consiste
à afficher ses valeurs,
- Avec l’apparition de « responsables éthiques» dans les entreprises suivant- leur taille et leur
secteur, et de « directions» du développement durable (ou de la RSE) dans pratiquement
toutes les entreprises multinationales aujourd’hui,
5
- Compte-tenu de la perspective de l’entreprise citoyenne avec la Responsabilité - Sociale de
l’Entreprise,
- Avec le développement d’autres instruments comme le - stakeholders report
(communication publique des actes de responsabilité sociale de l’entreprise à destination des
autres agents sociaux), les normalisations (ISO 9000 et la qualité, ISO 14000 et
l’environnement, ISO 18000 et la sécurité, les certifications de type SA 8000, etc., où les
normes et documents éthiques sont considérés comme devant s’établir en conformité avec
ces normalisations),
- Avec le développement de l’idéologie d’un capitalisme moral (au regard de - « principes»
tels que le principe de transparence, de précaution, etc.), compte tenu du développement de
fonds éthiques et d’un rating éthique.
Appliquée donc à la vie des affaires, l’éthique représente selon MESURE (2003) « l’ensemble des
principes et des moyens que se donne une entreprise afin d’actualiser une double idée : que la
performance (c’est-à-dire l’atteinte des objectifs) et le développement de l’entreprise doivent
prendre en compte des dimensions non strictement économiques et que tous les moyens pour les
réaliser ne sont pas acceptables même si la loi ne les interdit pas ». L’objectif d’une entreprise
n’est donc pas simplement la recherche de profit ; Constat assez simple mais indispensable pour
s’interroger sur les autres objectifs que l’entreprise doit se fixer.
Au minimum, l’entreprise ne doit pas nuire à la société ; idéalement elle devrait favoriser la
richesse au sens large et non pas strictement économique. L’éthique peut être alors envisagée
comme une véritable courroie de transmission entre la stratégie et l’opérationnel.
L’une des dimensions essentielles du marketing réside dans les techniques de persuasion, dirigées
massivement vers les marchés de consommation (« B to C »). La légitimité de cette discipline
6
dépend donc en grande partie de sa capacité à exercer une influence décisive sur le public (FLIPO,
1999). Un marché est d’abord une réalité concrète signifiant l’établissement de multiples relations
sociales, et l’on sait que les rapports de force en sont une des dimensions constitutives (FLIPO,
1981); c’est la raison pour laquelle, afin d’assurer l’équité des relations commerciales, la
législation les concernant est très fournie. Néanmoins, comme dans les autres secteurs des
relations sociales, les législations sont plus ou moins respectées par les acteurs ; en outre, des
manœuvres déloyales peuvent être développées en toute légalité. Il existe donc bel et bien des
marges disponibles pour des comportements non éthiques. En marketing, ces dérives procèdent
fondamentalement d’un manque de respect du consommateur, et plus généralement le manque
d’éthique dans le marketing nie son idéal, à savoir l’obtention de sa satisfaction pleine et entière
et, au-delà, la mise en scène d’un certain enchantement du monde moderne (HOLBROOK et
HIRSCHMANN, 1982).
Dès lors, toute politique marketing responsable peut devenir, non seulement un levier
fondamental d’une stratégie de développement durable cohérente, mais aussi un gage de succès
pour le développement de l’entreprise dans la mesure où elle colle avec les évolutions du monde
contemporain .
L’éthique n’est pas considérée comme étant un sujet de recherche en marketing, au sens
traditionnel du mot. Néanmoins les préoccupations éthiques, qui ont la plupart du temps
accompagné de manière implicite les décisions des acteurs économiques, n’ont fait une entrée
massive dans cette actualité que depuis quelques années, au travers des célèbres affaires
américaines et françaises, entre autres, mais aussi dans la recherche.
On ne peut évoquer l’éthique du marketing, cependant, sans rappeler que cette discipline est
étroitement soumise aux contextes de son application, à savoir le management en général et, plus
largement, celui de l’économie libérale, et même les systèmes démocratiques, qui interdisent ou
légalisent, légitiment ou ferment les yeux sur les pratiques.
On peut prendre acte de l’indifférence du management pour la morale en général, comme le fait
le philosophe André Comte-Sponville (conférence à E.M.LYON, 2000), ou pour l’éthique, comme
le montre l’ouvrage collectif d’André BOYER (2002). On peut, à l’inverse, croire à une convergence
pertinente, notamment dans le marketing.
Ainsi peut-on penser, comme FOSSE-GOMEZ (2002), que le développement du commerce équitable
contribuera à rétablir un équilibre dans les échanges entre pays riches et pays pauvres ; on peut
aussi remarquer, avec enthousiasme, que des entreprises ont choisi l’option éthique pour valoriser
leur offre sur leurs marchés (DE BROGLIE, 2002).
Quelle que soit la position qu’on adopte, il indispensable de s’interroger aussi sur les enjeux
éthiques entraînés par l’utilisation des techniques et méthodes courantes du marketing, qui se
développent par exemple pour encourager la pénétration des marques commerciales dans les
moindres recoins de la vie individuelle ou collective (DELABRIERE, 1997, KLEIN, 2001).
Mais l’éthique n’est évidemment pas qu’un sujet à la mode ; l’évoquer requiert une certaine
vision de la société dans laquelle nous voulons vivre, et de celle que nous voulons léguer à nos
7
enfants et petits-enfants ; il met en jeu la fierté d’appartenance à une profession ; il évoque des
évolutions à court et long termes qui peuvent être irréversibles et quelquefois terribles :
empoisonnements, modifications graves du climat de la terre, abandon à leur sinistre sort de
centaines de milliers de malades pour des raisons d’inaccessibilité décidée de médicaments… la
liste est longue des conséquences dramatiques actuelles, ou probables à terme, d’un défaut de
réflexion éthique.
Le Marketing Ethique consiste à proposer au consommateur de lier son acte d'achat ou son
adhésion à la marque, à l'implication de celle ci aux côtés d'une cause, plutôt qu'à un bénéfice
immédiat : qualité, plaisir, économie...
Le pionnier est American Express qui, en 1983, donnait de l’argent pour la rénovation de la
statue de la Liberté pour toute utilisation ou achat d’une carte American Express. Depuis, cette
dimension éthique prend de plus en plus de place.
En effet, nos besoins les plus fondamentaux sont satisfaits (besoins physiologiques, de sécurité,
d’appartenance). Face à cette société où nous sommes abreuvés d’informations pour consommer
toujours plus, sans forcément en avoir besoin, les consommateurs sont à la recherche de sens.
92% d’entre eux en France se disent aujourd’hui prêts à traduire leurs aspirations éthiques dans
leurs actes d’achat (NOVETHIC, 2007). Ce qui ouvre un champ très vaste de possibilités pour les
entreprises…
Le marketing éthique est une responsabilité que toutes entreprises doivent prendre en compte
pour refléter leur honnêteté et loyauté envers les consommateurs. Le marketing éthique est en
soit, un principe qui englobe l'ensemble des valeurs morales que les entrepreneurs devraient
considérer lors d'une prise de décision d'affaires.
Lorsqu'on parle de marketing éthique, il faut savoir distinguer les aspects du cadre éthique et les
aspects du cadre légal. Une décision ou une action de la part d'une entreprise qui est contraire à
l'éthique n'est pas nécessairement illégale et vice versa. Il faut faire preuve de jugement
lorsqu'une décision semble être ambigüe.
L'un des exemples très connus en marketing éthique c'est l'opération 1l=10l de la marque Volvic
en été 2006. La promesse est simple : "chaque fois que toi, consommateur, tu m'achète 1l d'eau
minérale, Moi, Volvic, je m'engage à financer la construction de puits au Niger, de façon que 10
litres d'eau potables puissent y être puisés."
8
Le résultat : une progression des ventes spectaculaire... et le financement de la construction et
l'entretien de 16 puits pendant 10 ans... assuré dans le cadre d'un partenariat entre la marque et
l'Unicef.
Dans cet exemple, le marketing éthique permet ainsi de satisfaire simultanément plusieurs
besoins :
- celui des villageois du Niger...qui profiteront des infrastructures eau potable,
- celui des consommateurs qui se sentiront heureux d'avoir contribué à cela, à leur petite mesure,
mais en préférant cette proposition à une réduction de prix sur une marque concurrente par
exemple.
- celui de Volvic qui a vu ses ventes progresser, et son image de marque durablement associé à
une valeur forte, à une belle histoire.
On peut aller plus loin dans les conséquences positives de ce type d'action marketing :
- l'Unicef qui bénéficie d'une visibilité forte...sans engager les parfois controversées dépenses de
marketing direct.
- Les salariés de Volvic qui s'associent naturellement à l'action, et adhèrent plus facilement à un
projet d'entreprise plus motivant que la simple "croissance".
- les actionnaires, qui, constatent l'efficacité financière du dispositif... - ...
Cet exemple probant quant à son efficacité (puisque l'opération est reconduite en 2007!) se veut
une petite illustration didactique du concept.
A ce constat, il faut également ajouter que les valeurs doivent s’assimiler ce que l’on pourrait
appeler le respect de certaines normes avec des valeurs telles que l’intégrité ou la responsabilité
9
et le dépassement d’autres normes pour projeter l’entreprise vers l’avenir avec des valeurs
comme l’ambition ou encore l’innovation
Disons cependant d’emblée que le marketing est toujours éthique au sens où son discours se
structure inévitablement, même si c’est de façon plus ou moins implicite, autour des questions du
bien et du mal. Le bien étant incarné par les produits qu’il faut acheter, le mal par ceux qu’il ne
faut pas choisir.
Ainsi, les objets marchands sont de fait le tissu à partir duquel s’ordonne notre système de
valeurs de même qu’ils contribuent à dessiner le rôle et la place que les consommateurs peuvent y
occuper. Ainsi les objets produits par une collectivité (entreprise, pays, culture…) sont-ils le
reflet de cette collectivité. Un reflet, qui telle une image de soi doit être considéré comme un
symptôme structurant. Derrière la question de l’éthique «commerciale» c’est donc aussi la
question des liens qui peuvent se nouer entre les relations marchandes et non marchandes dans le
corps social qui se profile.
Si chaque objet marchand est promu au rang de symbole, il est amené, par la force des choses, à
représenter autre chose que lui-même. Il devient le support grâce auquel s’échange un contrat
social implicite. L’échange marchand devient donc lui-même le prétexte d’un échange non
marchand. Plus encore, cet échange qui écrit notre lien social dans le quotidien a une influence
essentielle sur la teneur de ce lien.
Si tel est bien le cas, il est donc important d’essayer d’apporter à l’édifice social qui se construit
naturellement jour après jour, un éclairage sur ce qui s’y joue, malgré soi, dans l’inconscience
collective tant des émetteurs que des récepteurs.
Il n’est donc pas sans importance de nous interroger sur la façon dont à un moment donné de
notre histoire collective les objets marketés (produits et lieux marchands) à l’instar de tous les
médias, sont les porte-parole du corps social dans lequel nous vivons.
Et souligner à ce titre la responsabilité qui incombe aux chefs d’entreprise et aux responsables
marketing et communication.
11
On trouve aujourd’hui des exemples à la pelle : Coca-Cola qui transforme ses bouteilles
plastiques en casquettes et T-shirts avec un message militant, les gants Mapa qui s’associent à la
Surfrider Foundation pour aider au nettoyage des plages, ou encore Lush qui lutte contre le
massacre des requins par une opération assez spectaculaire (une employée de Lush s’est pendue
devant la vitrine d’un des magasins parisiens avec 2 crochets plantés dans son dos…) !
S’engager dans une démarche éthique est louable, mais encore faut-il être cohérent et transparent!
Les consommateurs sont de plus en plus curieux et informés et disposent d’un pouvoir de
pression grandissant sur les marques.
un lien avec l’histoire de l’entreprise ou les produits vendus (actions sur la zone
géographique de la Gacilly, berceau d’Yves Rocher)
l’empathie envers la cible (actions pour lutter contre le cancer du sein pour Estée Lauder
ou les collants Chesterfield, produits destinés aux femmes)
l’impact de ses activités sur l’environnement et les hommes (nombreuses actions menées
par The Body Shop sur le choix des ingrédients, les tests sur animaux…)
L’important est de faire son possible pour corriger ses erreurs, assumer son impact sur
l’environnement et compenser au mieux.
Il est très important de savoir valoriser son engagement éthique, car la façon dont le
consommateur va l’accueillir incitera les marques à s’engager encore plus.
Les partenariats avec les ONG, les associations et les fondations sont généralement couronnés de
succès ; les consommateurs les considèrent en effet comme des tiers de confiance et renforcent
donc la crédibilité de la marque et la cohérence de son engagement.
Il ne faut pas oublier la dimension fiscale de l’engagement. Pour chaque don effectué, les
entreprises peuvent en déduire une partie de leurs impôts, tout comme pour nous ! Donner une
somme fixe dès le départ, qui ne soit pas dépendante des ventes (du genre 1 achat = …), quitte à
donner plus par la suite, est le meilleur moyen de faire de ces opérations un succès et redonner
confiance aux consommateurs !
4. Ethique et consommateur
Le consom’acteur est un consommateur responsable et engagé, qui a une attitude réfléchie vis-à-
vis de sa consommation et qui l’utilise pour influencer plus ou moins directement le monde dans
lequel il vit. En consommant, il peut en quelque sorte voter avec son caddie, en privilégiant les
12
produits ou services plus respectueux de l’environnement et de certaines valeurs sociales et
éthiques.
Il s’agit donc de nouveaux comportements de consommation, où l’on choisit de consommer de
façon citoyenne et non plus seulement de manière consumériste. Le consom’acteur aura tendance
à se tourner par exemple vers les produits biologiques ou issus du commerce équitable, et pourra
même choisir de boycotter les marques dont il ne partage pas les valeurs. Ainsi, en France, près
de 70 % des consommateurs se disent prêts à participer à des campagnes de boycott. Grâce au
développement d’internet et du Web 2.0, les consommateurs sont mieux informés et les
informations circulent très rapidement, ce qui a largement contribué à l’essor de la
consom’action. De plus, le développement durable étant un concept de plus en plus connu du
grand public, les attentes dans ce domaine et le besoin de devenir un acteur du changement se
développent.
D’après une étude réalisée en 2008 par le cabinet Ethicity, 83% des français estiment qu’à travers
leurs choix d’achats, ils agissent au service de leurs convictions. Ils sont également 77% à faire
attention à ne pas acheter de marques produites par une entreprise dont ils réprouvent le
comportement.
On peut, dans une certaine mesure, faire un rapprochement entre les consom’acteurs et les
« créatifs culturels », car ils partagent un certain nombre de caractéristiques. Les « créatifs
culturels » sont un groupe socio-culturel identifié il y a quelques années lors d’une enquête
sociologique effectuée aux Etats-Unis, et qui regroupe les personnes qui cherchent, entre autres,
à réduire leur dépendance vis-à-vis des modes de consommation industrialisés, à remettre
l’humain au cœur de la société, à mieux respecter l’environnement, et à agir en cohérence avec
leurs convictions.
Conclusion
Le monde moderne a été fortement bouleversé par les changements rapides de notre société
pendant le dernier siècle écoulé. Ce temps a vu naître la domination du monde économique et
capitaliste en défaveur de l’hégémonie des religions et des états. Même les valeurs familiales se
sont quelque peu atténuées avec l’ouverture des esprits et des frontières. En effet, le monde n’est
plus régi par les nations, les coutumes et les idéaux mais par la prépondérance du capitalisme
économique et l’envie de chacun de s’en sortir et de gagner l’argent qui le fera vivre
correctement.
13
L’éthique semble donc être devenue une bonne voie pour développer une entreprise dans sa
globalité de façon viable et durable tout en bénéficiant de retombées marketing et d’image
appréciable pour la commercialisation des produits.
Le cœur du problème est bien identifié : il s’agit bien d’utiliser tous les outils et techniques du
marketing dans une perspective éthique, dont le maître-mot est le respect du consommateur
(et autres parties prenantes éventuelles). Il faut se garder de substituer « marketing éthique » à
« éthique (et) marketing ». L’enjeu se situe bien dans la seconde expression, le seul qui soit à
prendre vraiment au sérieux. Les tentatives de récupération de ce thème par des stratégies
adaptées, qu’elles soient de nature environnementale, culturelle ou humanitaire, pour respectables
qu’elles soient, ne sauraient en détourner l’attention des acteurs et chercheurs.
14
Références bibliographiques :
- FlipoJ.-P. (1981). Le marketing vu par l’envers du décor, Revue Française de Gestion, n° 33,
35-44.
- Flipo J.-P. (1999). Pouvoir et marketing, revisité. Revue Française de Gestion, n° 125, 112-127.
- Delabrière T. (1997). L’école : un nouveau terrain pour la promotion des ventes. Décisions
Marketing, n° 12.
- Jobard J.-P. (1992), Business Ethics et déontologie des activités financières : existe-t-il un
modèle français ?, in Éthique, Déontologie et Gestion de l'Entreprise (coordination La Bruslerie),
Ed Economica
15
- Pesqueux Y, Biefnot Y. (2002), L'éthique des affaires, Management par les valeurs et la
responsabilité sociale, Ed d'Organisation, 79-82
- Pariente G, Pesqueux Y et Simon E. (2010), les dérives éthiques dans l’entreprises, Revue
managemeny et avenir, n°33, 319-320
- Seidel F. (2002). Stratégie d’entreprise et éthique des affaires : pour une intégration de l’éthique
dans la politique générale d’entreprise. In Regards croisés sur l’éthique. Lyon : Association
Lyonnaise d’Ethique Economique et sociale.
16