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Document d’Etude N° 38
janvier 2018
Résumé
L’objectif de cette étude est de mesurer l’impact des dépenses publiques sur la pauvreté et les inégalités sociales
au Sénégal à travers ses composantes principales (les dépenses courantes hors transferts et les investissements
publics) de même que les programmes de bourses de sécurité familiale et de Couverture Maladie Universelle
(CMU) en utilisant un modèle d’Equilibre Général calculable (MEGC) Inter-temporel avec un module de
microsimulation. A cet effet, des chocs sur les dépenses courantes hors transferts et d’investissement public selon
les évolutions moyennes constatées depuis la mise en œuvre du PSE en 2014 ont été réalisés. Les résultats révèlent
que les investissements publics permettraient en moyenne à 36 880 ménages de sortir de la pauvreté soient environ
344 721 personnes sur le territoire national. Par ailleurs, les dépenses courantes hors transferts offriraient
également l’opportunité à 7903 ménages de quitter la situation de pauvreté. Cependant, l’impact serait mitigé car
malgré un effet positif à l’échelle nationale avec une baisse de l’incidence de la pauvreté estimée à 0,3% l’impact
pourrait être négatif en milieu rural. Le programme des bourses sociales est l’instrument qui agit le plus sur les
indicateurs de pauvreté et d’inégalité tels que la profondeur, la sévérité et l’indice de Gini, avec des impacts estimés
à 11,8%, 8,6% et 3,6%, il permettrait à environ 32 772 ménages de changer de statut en sortant de la pauvreté.
Enfin, la couverture maladie universelle impacterait le plus sur l’incidence avec environ 40 283 ménages qui
devraient sortir de la pauvreté soit 371 019 personnes au niveau national. Par ailleurs, la CMU engendrerait une
évolution significative des indicateurs de pauvreté et d’inégalité avec des réductions de la sévérité, de la profondeur
et de l’indice de Gini estimées respectivement à 4,2%, 2,6% et 1,5% par rapport à la situation référentielle.
Mots clés : dépenses publiques, pauvreté, inégalité, MEGC, microsimulation, CMU, bourses de sécurité familiale,
MEGC
Abstract
The aim of this paper is to measure the impact of public spending on poverty and inequality in Senegal, through
its main components (public consumption and public investment) and programs such as social allocations by
government to households and Universal Health Coverage (UHC), using an inter-temporal Computable General
Equilibrium (CGE) model with microsimulation. Hence, shocks on public consumption net of transfers and public
investment according to their average evolutions observed since the implementation of the new development plan
(PSE) in 2014 have been achieved.
Results show that public investment would lead to 36 880 households getting out of poverty, or 344,721 individuals
at the national level. The public consumption would offer the opportunity to 7903 household to get out of poverty.
However, the impact would be mitigated because of the fact that, despite the positive effect at the national level
with the poverty headcount decreasing at 0.3%, an increase in public consumption would benefit more urban areas
compared to the rural regions, where the impact would be negative. Government social allocations to households
are the most effective programs to reduce severity, poverty gap and inequalities with impacts estimated at 11.8%,
8.6% and 3.6%. In addition, these social allocations would allow to 32 772 households to leave their poverty status.
Finally, Universal Health Coverage (UHC) is the program that has more effect on poverty headcount and would
help about 40,283 households get out of poverty, corresponding to 371,019 individuals nationwide. In addition,
poverty indicators would respond well to UHC with severity, poverty gap and Gini index dropping respectively of
4.2%, 2.6% and 1.5% compared baseline.
Keywords: public spending, poverty, inequality, microsimulation, Universal Health Coverage (UHC), social
allocations, EGC models
2
I. Introduction
La pauvreté a toujours été au centre des débats dans la mise en œuvre des politiques
économiques dans les pays en développement. D’après la Banque mondiale, en 2013, le taux
de pauvreté mondiale était de l’ordre de 10,7%, témoignant de l’importante tranche de la
population encore concernée. Fort de ce constat, beaucoup d’organismes internationaux, la
société civile déclarent œuvrer de façon conjointe ou séparée à côté des gouvernements par la
biais notamment des programmes de développement économique et social structurés, afin de
réduire significativement la misère et la précarité dans le monde. A cet égard, la Banque
mondiale envisage de favoriser l’accroissement des revenus de 40% des habitants les plus
pauvres de chaque pays du monde pour atteindre d’ici l’horizon 2030 un faible niveau de
pauvreté à l’échelle mondiale, de l’ordre de 3%, à travers un programme international, ayant
comme objectif ultime une nette amélioration des conditions de vie des populations. Dans ce
contexte particulier de lutte contre la pauvreté, et dans le sens d’appréhender les avancées
réalisées dans la réduction des inégalités et de la précarité sociale, les objectifs du millénaire
pour le développement ont souvent servi d’instruments de mesure à l’échelle internationale.
Cependant, de nouvelles cibles ont vu le jour par le biais d’un nouveau cadre de référence en
l’occurrence les ODD (Objectifs de Développement Durable) intégrant à la fois le
développement durable et une conception plus large de la pauvreté.
Au plan continental, l’Afrique subsaharienne est la région la plus exposée à la pauvreté avec
une incidence estimée à 41% de la population. Par contre, la région d’Europe de l’Est - Asie
centrale et celle d’Asie de l’Est et du Pacifique qui bénéficient d’un développement économique
et social très important se retrouvent avec de faibles pourcentages de pauvres, soit
respectivement 2,3% et 3,5% de leurs populations.
Au Sénégal, d’après le rapport de la dernière enquête sur la pauvreté (ESPS 2), l’incidence de
la pauvreté (au sens monétaire) au niveau national est de l’ordre de 46,7% en 2011 contre 48,3%
en 2006 et de 55,2 % en 2001-2002. Toutefois, après la mise en œuvre de l’ESPS en 2011,
l’ANSD a mis en place une enquête de perception du bien-être dans l’optique de disposer d’un
outil permettant de suivre l’évolution des conditions de vie des ménages.
3
L’analyse des différentes données révèle une nette amélioration de la situation de pauvreté sur
la première période (2002- 2006) et une faible progression (1,6 de point de pourcentage) entre
2006 et 2011. Cependant, ce taux reste important et cache de fortes disparités régionales,
départementales, voire selon le milieu d’habitation (urbaine et rurale). En guise d’illustration,
il existe un grand écart entre la capitale, Dakar (la moins touchée par la pauvreté) avec un taux
de 26,1% et les régions de Kolda et Kédougou avec respectivement 76,6% et 71,3% (les plus
exposées à la pauvreté). Le milieu rural est relativement plus sensible à la pauvreté avec un taux
estimé à 57,3% en 2011. En outre, la profondeur et la sévérité sont estimées respectivement à
14,5% et 6,6% au niveau national. Ces observations montrent l’ampleur et l’importance de la
problématique.
Toutefois, grâce aux efforts consentis par les autorités publiques ces dernières années, une
baisse significative du nombre des pauvres pourrait être envisagée. Cependant, l’atteinte de cet
objectif nécessite un bon cadre macroéconomique favorisant une croissance soutenue et
inclusive.
Au Sénégal, la politique budgétaire est l’instrument principal à la disposition des autorités dans
la mise en œuvre des politiques socio-économiques du fait de l’appartenance à la zone
UEMOA, dont la politique monétaire est confiée à la BCEAO. Ainsi, la politique de
réallocation des ressources doit prendre en considération les disparités sociales pour lutter
contre la pauvreté et les inégalités. En règle générale, les orientations stratégiques de la politique
de développement doivent améliorer de façon significative le niveau de vie des populations via
une utilisation optimale des ressources, en prenant en compte les enjeux économiques, sociaux
et culturels ainsi qu’au plan sous-régional et à l’échelle internationale.
Les dépenses publiques qui traduisent dans une certaine mesure l’orientation des autorités en
matière de politique budgétaire permettent d’appréhender les efforts consentis pour améliorer
les conditions de vie des ménages à travers leurs composantes sociales (voie de transmission
directe), et/ou les autres dépenses (infrastructure, énergie...) susceptibles de réduire la pauvreté
via des canaux de transmission indirects. A cet égard, la part des dépenses publiques sociales
au Sénégal (la santé, l’éducation, l’environnement, la justice, la protection sociale,
l’assainissement et l’hydraulique rurale, notamment), représente environ le tiers du total,
démontrant l’importance des efforts consacrés à l’accroissement du bien-être. Cette proportion
a connu une évolution légèrement favorable en passant de 31,2% en 2006 à 34,1% en 2013 et
un peu plus de 35% en 2016. En particulier, l’éducation concentre la part la plus importante des
4
dépenses sociales (environ les deux tiers). Par ailleurs, le Plan Sénégal Emergent (PSE) qui est
le nouveau cadre de référence de la politique économique et sociale du Sénégal traduit la
volonté des autorités à améliorer le niveau de vie des populations à travers un ensemble de
programmes et projets. En effet, le PSE vise une nette amélioration des conditions de vie des
populations en tenant compte de plusieurs aspects liés à la pauvreté multidimensionnelle tels
que l’autosuffisance alimentaire, l’accès aux services sociaux de base (services de santé, eau,
électricité, etc.), le développement du capital humain, etc. Dans ce cadre, certains projets et
programmes dont le Plan National de Développement Sanitaire (PNDS) et le « Dakar Medical
City », devraient améliorer l’accès à des soins de qualité pour toutes les classes sociales, et à
des coûts relativement bas. Ces programmes s’inscrivent dans la mise en place de la Couverture
Maladie Universelle qui a déjà offert à plus de trois Sénégalais sur cinq l’opportunité de
s’inscrire à une mutuelle de santé.
5
II. Revue de la littérature
Lustig et al. (2013) quant à eux, ont cherché à mesurer l’impact des taxes et des dépenses
sociales sur la pauvreté et les inégalités, à travers une analyse de l’incidence fiscale dans
différents pays de l’Amérique latine. Les résultats de leurs recherches ont montré que les taxes
directes et les transferts monétaires permettent de réduire de manière considérable les inégalités
et la pauvreté en Argentine, au Brésil et en Uruguay. Cependant, leurs effets sont un peu moins
prononcés au Mexique et relativement négligeables en Bolivie et au Pérou. Par ailleurs, les
transferts en nature dans l’éducation et la santé ont un plus fort impact sur la réduction des
inégalités et de la pauvreté dans les pays couverts par l’étude que ceux monétaires.
Niang (2005) a cherché à analyser l’incidence des dépenses publiques d’éducation sur la
pauvreté au Sénégal. Il a ainsi comparé les courbes de concentration de ces dépenses
gouvernementales à celle des consommations des ménages. Il ressort des résultats que les
dépenses publiques dans l’enseignement primaire sont relativement mieux réparties en termes
d’équité entre les catégories sociales, que celles des ménages. Par contre, les dépenses publiques
liées à l’enseignement technique et professionnel apparaissent peu profitables aux ménages les
plus pauvres (20% des moins riches).
Dans le même sillage, Lanjouw et al. (2001), ont mené une analyse statique de l’impact des
dépenses publiques d’éducation et de santé sur la pauvreté en Indonésie. Ils ont trouvé que les
dépenses consacrées à l’éducation de base et les soins de santé primaires sont généralement
plus favorables aux pauvres. Par contre les dépenses liées à l’enseignement supérieur et aux
hôpitaux sont moins bénéfiques à cette catégorie sociale.
6
Afonso et al. (2008), quant à eux, ont cherché à analyser l’impact des dépenses publiques, de
l’éducation et des institutions sur la distribution des revenus dans les pays avancés, en utilisant
un outil non paramétrique en l’occurrence les modèles DEA (Data envelopment analysis). Les
résultats de l’étude montrent que les politiques publiques affectent significativement la
répartition des revenus à travers les dépenses sociales, et indirectement via une formation ou un
capital humain hautement qualifié et des institutions économiques saines.
Laabas et Limam (2004) ont utilisé des modèles économétriques pour analyser les interactions
existant entre la croissance, les inégalités de revenu et la pauvreté. Leurs résultats montrent que
les politiques publiques n’affectent la pauvreté que de manière indirecte, à travers leurs impacts
sur la distribution des revenus et la consommation par tête. Par contre, l’ouverture à l’extérieur,
bien que favorable à la croissance, influe négativement sur la distribution de revenus et la
pauvreté.
A travers un modèle d’équations simultanées, Fan et al. (1999) ont, pour leur part, cherché à
estimer les effets directs et indirects des différents types de dépenses publiques sur la pauvreté
rurale et la productivité en Inde. Les résultats de leurs recherches ont montré que les
investissements publics dans les infrastructures rurales telles que les routes, la recherche-
développement dans l’agriculture et les dépenses en éducation ont un impact positif très
sensible sur la réduction de la pauvreté et la hausse de la productivité. Toutefois, pour les autres
types de dépenses liées par exemple à l’irrigation, la conservation des eaux et des sols, la santé,
et le développement rural et communautaire, les contributions respectives à la réduction de la
pauvreté et la hausse de la productivité restent assez modestes. Dans la même lignée, Fan et al.
(2002) en conduisant des études similaires en Chine, ont trouvé que les dépenses publiques
orientées vers l’éducation ont le plus fort impact sur la réduction de la pauvreté rurale et des
inégalités régionales, en plus de l’effet significatif sur la hausse de la production. Ces auteurs
ajoutent que l'augmentation de l'emploi non agricole en milieu rural explique en grande partie
cette diminution.
Par ailleurs, Dahmardeh Tabar (2013) ont ressorti une relation de long terme entre la pauvreté
et les dépenses publiques du gouvernement iranien dans les provinces de Sistan et
Baloutchistan, en utilisant une série de données entre 1978 et 2008. Ils se sont basés sur la
méthodologie développée par Pesaran et Shin (1995) pour déterminer une relation de
cointégration qui lie les dépenses publiques du gouvernement et la pauvreté dans les deux
provinces. Toutefois, à long terme, il est ressorti un impact négatif sur la pauvreté ; ce qui est
7
inattendu. Mehmood et Sadiq (2010) ont également étudié la relation entre les dépenses
publiques et la pauvreté par l’analyse de cointégration au Pakistan, sur une période d’analyse
allant de 1976 à 2010 et ont identifié l’existence d’une relation de long terme entre les deux
variables. Cependant, la relation qui en découle ne semble pas conforter la théorie économique
dans la mesure où les dépenses publiques ne permettent pas selon leurs résultats de réduire le
niveau de pauvreté, mais l’accentuent plutôt.
Par ailleurs, Dabla-Norris et Matovu (2002) ont cherché à mesurer les effets des dépenses de
l’Etat, sous forme de transferts publics dans les secteurs de l’éducation et des infrastructures,
sur les décisions des ménages en matière de scolarisation des enfants ou d’accumulation
d’actifs. A travers un modèle dynamique à générations imbriquées, les auteurs ont trouvé
qu’une hausse des dépenses publiques dans l’enseignement primaire et secondaire, a un impact
positif sur la réduction de la pauvreté et sur l’économie, malgré une baisse des investissements
dans les infrastructures. En outre, l’impact de transferts publics sur les agrégats
macroéconomiques et la pauvreté dépend fortement de leurs ampleurs. Autrement dit, s’ils sont
assez conséquents et ciblent les couches les plus défavorisées alors des effets considérables
pourraient être attendus sur la réduction de la pauvreté et la croissance économique. Par contre,
de faibles transferts auraient un impact assez marginal sur la pauvreté et l’économie.
Dans un autre registre, Balma et al. (2010) ont utilisé un MEGC pour évaluer les répercussions
directes et indirectes des politiques publiques en matière d’éducation sur le bien-être, la
pauvreté et la distribution des revenus au Burkina Faso. Les résultats des simulations indiquent
qu’une augmentation uniforme de 40% des dépenses publiques en éducation de base compensée
par une hausse de la taxe de vente (une taxe additionnelle sur les biens de consommation) se
traduirait non seulement par une amélioration du bien-être mais aussi par une baisse de
l’incidence de la pauvreté pour les ménages salariés. Cependant, les résultats montrent que dans
ces conditions de coût unitaire de l’éducation élevé chez les ménages agriculteurs, leur situation
ne s’améliorerait pas en termes de bien-être et de pauvreté, alors que la structure de la répartition
des revenus resterait inchangée.
Rhazi et al. (2009) ont aussi construit un MEGC pour simuler les effets de quelques politiques
sur l’économie nationale et sur les niveaux de vie des ménages, notamment les classes modeste,
moyenne et aisée au Maroc. Il résulte de cette étude qu’une hausse de 10% de l’investissement
global engendrerait une mobilité sociale du bas vers le haut. La part des ménages de la tranche
moyenne dans la population totale passerait, en effet, de 53% à 55% et celle de la classe aisée
8
de 13% à 13,5%, contrairement à la part de la catégorie des modestes qui fléchirait de 34% à
31,5%. Les inégalités seraient légèrement en hausse puisque l’indice de GINI passerait de 0,406
à 0,409. Néanmoins, l’importance de la croissance économique l’emporterait sur la persistance
des inégalités et par conséquent la pauvreté serait en baisse. Le taux de pauvreté national
diminuerait de plus d’un demi-point de pourcentage, soit près de 214 mille personnes qui
sortiraient de la pauvreté.
Enfin, d’après Rasoazanatody (2005), les effets des dépenses publiques dans le processus
d’accélération de la croissance et de la réduction de la pauvreté ne peuvent être attendus que
sur le moyen ou le long terme. En effet, à travers des simulations effectuées sur la base du
modèle RMSM-X+P1 (Banque Mondiale) au Madagascar entre 2007 et 2012, l’auteur montre
qu’une progression des dépenses d’éducation et de santé respectivement à hauteur de 25% et
15% des dépenses totales du gouvernement à partir de 2007, réduirait le niveau de pauvreté
jusqu’à 44,2% en 2012 (contre 57,8% en 2007), soit une baisse de 13,6 points de pourcentage.
La lutte contre la pauvreté constitue l’une des principales priorités des autorités publiques. C’est
également l’objet de l’axe 2 du PSE qui ambitionne d’étendre l’accès aux services sociaux de
base, notamment à l’éducation et aux soins de qualité, à l’eau potable et à un cadre de vie sain.
Dans l’atteinte de cet objectif, l’Etat s’appuie très souvent sur des investisseurs internationaux
notamment à travers les partenariats-public-privé (PPP). La réduction de la pauvreté passe
nécessairement par la prise en compte des recommandations des administrés. Ainsi, l’enquête
de suivi de la pauvreté au Sénégal (ESPS 2011) a révélé que 42,8% des ménages sénégalais
considèrent que le meilleur moyen de lutter contre la pauvreté consiste à développer des
activités génératrices de revenus. Dès lors, il urge d’effectuer un diagnostic fonctionnel et
structurel des dépenses publiques afin de vérifier si elles répondent aux objectifs de réduction
de la pauvreté et des inégalités.
1
A l’origine, il s’agit d’une extension du modèle Harrod-Domar qui a connu des améliorations jusqu’à
l’intégration d’autres modules supplémentaires, dont la pauvreté et les indicateurs sociaux.
9
Figure 1 : Dépenses totales, dépenses courantes et investissement global (en % du PIB)
40%
2007
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
Source : Direction de la prévision et des études économiques (DPEE)
Sur les quinze dernières années, le ratio dépenses publiques sur PIB a connu une croissance
importante, passant de 20,8% en 2001 à 27,2% en 2007 et 31,1% en 2016. Cette progression se
justifie par les nouvelles orientations stratégiques du pays durant la période. Celles-ci se
caractérisent successivement par le développement d’importantes infrastructures et la
réalisation de projets et programmes visant à atteindre la transformation structurelle de
l’économie, développer le capital humain, renforcer la protection sociale, la sécurité et la
gouvernance, en vue d’inscrire le Sénégal dans le cercle des économies émergentes d’ici
l’horizon 2035. A cela s’ajoute les performances réalisées dans la collecte des recettes sur la
période récente qui ont fortement contribué à cette hausse des dépenses publiques.
Concernant la structure fonctionnelle des dépenses publiques, les dépenses courantes rapportées
aux dépenses totales sont passées de 69% en 2001 à 62,1% en 2006 et 59,6% en 2016. Cette
baisse progressive s’inscrit dans la dynamique de rationalisation des dépenses courantes
engagée par les autorités étatiques en vue de disposer davantage de marges de manœuvre
budgétaires à réallouer aux investissements publics. A titre illustratif, la part du poste
« fournitures, entretien et autres » sur les dépenses totales est passée de 17,5% en 2001 à 14%
en 2006 et 11,9% en 2016.
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Composition sectorielle des dépenses d’investissement
Le graphique suivant renseigne sur les dépenses en capital réalisées sur ressources internes par
l’Etat durant l’exercice budgétaire 2015 :
Figure 2 : Part des secteurs dans les dépenses totales d’investissements sur ressources internes
25%
20%
15%
10%
5%
0%
45 Education &
11 Agriculture
43 Habitat &
49 Appui-Renf. &
33 Transports
22 Industries
47 Equipements
46 Développement
classiques/renouve
Assainissement
41 Hydraulique
A. T. quaternaire
44 Santé et
Urbanisme
administratifs
nutrition
Formation
routiers
urbaine -
24 Energies
llables
social
Les secteurs qui absorbent le plus de dépenses d’investissement public sont les équipements
administratifs (19,5%), l’agriculture (14,2%), les transports routiers (13,9%), le développement
social (8,6%). Les investissements relatifs aux équipements administratifs sont censés répondre
aux exigences du service public. Le secteur agricole occupe près de la moitié de la population
active et, par conséquent, fait partie des secteurs privilégiés de l’Etat. Les transports routiers
permettent une plus grande mobilité urbaine et constituent un levier d’accroissement de la
productivité et de soutien à la production. Le développement social est lié à l’amélioration du
bien-être de l’ensemble de la population. Par ailleurs, les parts qui reviennent au secteur
industriel (3,4%) et aux énergies classiques/renouvelables paraissent relativement faibles.
Le graphique ci-après met en évidence les dépenses d’investissements financées par les
bailleurs et investisseurs internationaux.
11
Figure 3: Part des secteurs dans les dépenses totales d’investissements sur ressources externes
35%
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Les projets et programmes publics sont financés par les organismes internationaux sous la
forme d’emprunts ou de subventions. Les financements sont plus concentrés dans les domaines
des transports routiers (30,3%), de l’agriculture (21,3%), de la santé et la nutrition (11,9%), des
énergies classiques et renouvelables (10,4%), de l’éducation et la formation (10%). Les
investissements sont fortement orientés dans les secteurs sociaux de base. Le secteur industriel
n’absorbe que 0,3% des fonds d’investissements extérieurs.
En définitive, les secteurs de l’agriculture et des transports routiers sont ceux qui absorbent le
plus les dépenses d’investissement de l’Etat.
Sur la période 2004-2014, les dépenses publiques destinées aux secteurs sociaux se sont
considérablement accrues en valeur absolue, passant de 342,4 milliards en 2004 à 876,5
milliards en 2014. Toutefois, rapportées aux dépenses publiques totales hors prêts nets, il ressort
que la part des dépenses sociales est restée quasi stable sur la période sous-revue, tournant
autour de 35% du total sauf en 2012. Pour cette année, les dépenses sociales ont en effet
drastiquement baissé à 14,6% des dépenses totales. Cette coupe a touché toutes les lignes de
dépenses sociales, aussi bien l’éducation, la santé que les autres secteurs sociaux.
En termes de structure, l’éducation est le secteur qui bénéficie le plus des dépenses de l’Etat.
En moyenne sur la période, les dépenses destinées à l’éducation ont représenté 65% des
dépenses sociales totales, leur part étant en continuelle progression (59,2% en 2004 contre
70,8% en 2014). Le secteur de la santé occupe la deuxième place dans les dépenses sociales,
représentant en moyenne 19% du portefeuille sur la période sous-revue. Il faut, toutefois, noter
que sa part dans les dépenses sociales diminue progressivement passant de 24,3% en 2004 à
16,8% en 2014. Les autres dépenses sociales regroupent celles destinées à la justice, au
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développement social, à l’environnement, à l’assainissement et à l’hydraulique rural. Ces
secteurs ont occupé en moyenne 16% des dépenses sociales entre 2004 et 2014 et à l’instar de
la santé, leur part a progressivement diminué (16,5% en 2004 contre 12,4% en 2014).
Figure 4 : Part des dépenses sociales dans les dépenses totales hors prêts nets
60,0%
40,0%
20,0%
0,0%
2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
La répartition des dépenses sociales suivant les dépenses de fonctionnement et en capital met
en exergue la prédominance de celles courantes sur toute la période sous-revue. En effet, ces
dernières ont représenté en moyenne 73%, leur part restant globalement stable entre 2004 et
2014. En dehors de l’année 2004, il faut noter que la part des dépenses sociales en capital n’a
jamais atteint la barre des 30%.
Considérant les secteurs de destination des dépenses, il ressort que les dépenses sociales de
fonctionnement sont en moyenne principalement absorbées par l’éducation (77,4%), la santé
(15%) et ensuite les autres secteurs sociaux (7,6%). Par contre, les dépenses sociales en capital,
sont quasi équitablement réparties entre trois groupes : 31,1% pour l’éducation, 29,8% pour la
santé et 39,1% pour les autres secteurs sociaux.
100%
80%
60%
capital
40%
courante
20%
0%
2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014
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Programme national de bourse de sécurité familiale et Couverture maladie
universelle
Dans le PSE, la question de la réduction de la pauvreté occupe une place centrale à travers le
deuxième axe portant sur le capital humain, la protection sociale et le développement durable.
Dans ce cadre, plusieurs projets sont en train d’être mis en œuvre parmi lesquels nous pouvons
citer deux programmes phares présentant un intérêt certain pour la présente étude. Il s’agit
notamment, du programme national des bourses familiales et du programme de la couverture
médicale universelle. Ils ont la particularité d’être conçus pour avoir un effet direct sur la qualité
de vie des individus ; la cible étant la population elle-même, en opposition à d’autres types de
programmes existants dont la portée est plutôt indirecte.
Le programme national de bourses de sécurité familiale, mis en place en 2013, vise à lutter
contre la vulnérabilité et l’exclusion sociale des ménages les plus pauvres. Le programme
procède à l’identification des ménages à travers un registre national unique qui facilite leur
ciblage aussi bien au niveau national, régional et local. Le financement octroyé à chaque
ménage s’élève à 25 000 FCFA par trimestre soit 100 000 FCFA par an. Ayant débuté avec une
cible de 50 000 ménages en 2013, le programme s’est graduellement élargi, passant à 100 000
en 2014, 200 000 en 2015 pour s’établir à 300 000 ménages en 2017, soit 30 milliards de FCFA
en termes de dépenses publiques effectuées. Dans le projet de loi des finances de l’année 2018,
le budget du programme devrait atteindre 40 milliards de FCFA.
Concernant le programme portant sur la couverture maladie universelle, il a également été lancé
en 2013 dans le but de faciliter l’accès aux soins sanitaires de base à toute la population,
notamment aux couches les plus démunies et les plus vulnérables. L’esprit du programme est
de permettre à toutes les couches de la population de bénéficier des mêmes soins que les
personnes affiliées aux autres régimes de sécurité sociale que sont les imputations budgétaires
et les Instituts de Prévoyance Maladie (IPM). Parti d’un taux de couverture de la population de
13,6% en 2012, les cibles fixées pour atteindre l’objectif global du programme sont
respectivement de 27,70% en 2013, 46,32% en 2014, 50,50% en 2015, 60,30% en 2016 et
75,5% en 2017. Pour ce faire, des initiatives concrètes ont été mises en place s’articulant autour
de deux axes : la gratuité de certains types de soins et la création et l’adhésion aux mutuelles de
santé communautaires.
La politique de gratuité de certains soins vise à prendre en charge la totalité des soins sanitaires
de quelques couches de la population bien déterminées. Il s’agit entre autres de la gratuité des
14
soins des enfants âgés de moins de cinq ans, de la césarienne, de la dialyse et de la prise en
charge totale des personnes âgées de 60 ans et plus (Plan Sésame).
Pour ce qui est des mutuelles de santé, la stratégie adoptée est de favoriser leur décentralisation
et leur maillage sur tout le territoire national afin d’assurer une couverture totale du pays et
l’accès des mutuelles aux zones les plus reculées. Du point de vue des modalités d’adhésion, le
montant de la cotisation par personne est fixé à 7000 FCFA par an, subventionnée à hauteur de
50% par l’Etat. La cotisation est totalement prise en charge par l’Etat dans le cas des personnes
indigentes, en l’occurrence pour tous les ménages bénéficiant des Bourses de Sécurité
Familiale. Le paquet offert couvre le poste de santé, le centre de santé et l’hôpital avec une prise
en charge de 80% pour les consultations, les analyses, les examens, les hospitalisations et
médicaments génériques et de 50% pour les médicaments fournis dans les pharmacies privées.
En 2015, le financement de la CMU était majoritairement assuré par l’Etat (59,9%), suivi de la
population (15,95%), le secteur privé (13,24%) et les partenaires (11%). En août 2016, le taux
de couverture avait atteint 45,7% pour une cible de 62,5% pour cette année.
Prévision
Objectif de couverture du Niveau d’atteinte
Régimes décembre
risque maladie en 2016 en Aout 2016
2016
Assurance maladie communautaire 32,60% 14,34% 34,69%
Gratuité des enfants de 0 à 5 ans 13,40% 13,40% 13,40%
Plan SESAME 5,50% 5,50% 5,50%
Assurance Maladie obligatoire
11,00% 11,00% 11,00%
(Fonctionnaires et secteur privé formel)
Autres types d'assurance 1,50% 1,50%
Couverture Totale 62,50% 45,74% 66,09%
15
un net repli, d’environ 6,9 points de pourcentage, a été enregistré contre seulement 1,6 point de
pourcentage entre 2005 et 2011.
56
54
52 incidence pauvreté
50
48
46 Puissance (incidence
44 pauvreté)
42
40
2001/2002 2005/2006 2010/2011
Les données relatives à la pauvreté suivant le milieu de résidence révèlent de fortes disparités.
En effet, les populations issues de la ville de Dakar se présentent comme étant les mieux loties
avec une incidence de l’ordre de 26,1 % en 2011. Sur la même période les autres villes se
caractérisent par une part importante de pauvres estimée à 41,2% ; un taux relativement bas
comparé au monde rural où l’incidence est estimée à 57,3 %. Par ailleurs, l’évolution de la
pauvreté à l’échelle nationale cache un certain nombre de disparités. En effet, sur la période
2002-2006, toutes les populations issues des différents milieux urbains ont observé une
amélioration de leur niveau de vie. Cependant, entre 2006 et 2011 les conditions de vie des
habitants des autres villes sont restées quasiment stables, alors que celles des dakarois et des
ruraux ont connu une légère amélioration.
70
60
50
40 2001/2002
30 2005/2006
20 2010/2011
10
0
dakar autres milieux urbains milieu rural
16
Les indicateurs de pauvreté montrent également des écarts importants au niveau régional. En
effet, étant relativement plus développé et offrant davantage d’opportunités en termes d’emploi
et de placement, Dakar est moins exposé à la pauvreté avec une d’incidence estimée à 26,1%
et une sévérité de l’ordre de 2,1% (figure 8). La région de Louga qui bénéficie d’importants
transferts de fonds issus de la diaspora arrive en deuxième position avec 26,8% de pauvres.
Cependant, les régions de Kolda et Kédougou sont les plus exposées à la précarité avec des taux
d’incidence estimés respectivement à 76,6% et 71,3% (figure 8).
La pauvreté au Sénégal est également très liée aux caractéristiques démographiques. A cet
égard, les ménages dirigés par des personnes âgées d’au moins 60 ans sont plus exposés.
D’après le rapport de l’ESPS 2, ce groupe de ménage représente 38,7% du total des pauvres au
Sénégal. Par ailleurs, les résultats des estimations de l’enquête montrent une certaine corrélation
entre le sexe du chef de ménage et la situation de pauvreté. Il apparait dans les données de
l’enquête que les ménages dirigés par les femmes sont relativement moins exposés avec un
pourcentage de pauvres estimé à 34,7% contre 50,6% pour ceux dirigés par les hommes. Ce
résultat s’inscrit en droite ligne avec ceux de la théorie économique du développement dans
lesquels la plupart des travaux mettent en relief une relation positive entre l’amélioration des
conditions de vie et le fait que le ménage soit dirigé par une femme.
100
50
17
Figure 9: Niveau de pauvreté au Sénégal en 2011
IV. Méthodologie
La modélisation choisie dans le cadre de cette étude permettra, d’identifier les différentes
interactions entre les agrégats macroéconomiques et les indicateurs de pauvreté et de mesurer
l’impact des dépenses publiques sur le niveau de vie des ménages. A cet effet, la dernière
enquête portant sur la pauvreté au Sénégal datant de 2011 réalisée par l’Agence Nationale de la
Statistique et de la Démographie sera utilisée. Ainsi, les Modèles d’Equilibre Général
Calculable inter-temporels, qui ont la particularité d’offrir une lecture globale de l’impact des
politiques économiques sur plusieurs périodes à partir d’une année référence donnée, semblent
plus adaptés. Par ailleurs, un module de microsimulation sera également intégré dans la
spécification du modèle afin d’avoir une connaissance fine des conséquences de la politique
budgétaire jusqu’au niveau ménage. Le modèle sera également en mesure d’identifier les
différents canaux de transmission, ainsi que les délais nécessaires à la perception des premiers
effets sur les agrégats macroéconomiques et les indicateurs de pauvreté à travers la
microsimulation. En outre, la spécification mettra en relief les relations entre les différents
agents économiques à savoir l’Etat, les ménages, les firmes et le reste du monde. Elle prendra
également en compte les fondamentaux structurels de l’économie sénégalaise, ce qui explique
son fort niveau de désagrégation (15 secteurs) afin de faire ressortir les particularités de chaque
18
secteur. Par ailleurs, le modèle intègre une différenciation du prix pour mieux appréhender les
caractéristiques socio-économiques de chaque localité du pays. Autrement dit, un ménage
vivant à Dakar devrait se retrouve avec un niveau de prix différent du kaolackois et reflétant
mieux les réalités économiques de la capitale sénégalaise.
Cette prise en compte du pouvoir d’achat aura un fort impact sur les orientations en termes de
politique économique.
- Le modèle considère une petite économie ouverte avec quatre agents (ménages, firmes,
gouvernement et reste du monde), deux types de biens (biens domestiques et biens importés)
et plusieurs secteurs d’activités j.
- Les ménages détiennent les firmes (sur lesquelles elles reçoivent des dividendes),
consomment des biens et services et offrent leur force de travail. Ils payent également la
dette extérieure et des taxes au gouvernement.
- Les firmes assurent la production. Elles payent également des taxes au gouvernement et
distribuent des dividendes aux ménages.
- Le reste du monde assure une partie du financement de l’investissement privé grâce à son
épargne, paye des taxes au gouvernement et effectue des transferts vers les ménages et le
gouvernement.
- Le gouvernement collecte des taxes, effectue des transferts vers les ménages, consomme des
biens et services et effectue des dépenses d’investissement.
- Les agents économiques sont supposés avoir accès au marché mondial des capitaux sur
lequel ils peuvent prêter et emprunter à taux d’intérêt constant 𝑟.
- Les ménages et les firmes sont supposés vivre plus d’une période et ont un comportement
prospectif. En d’autres termes, ils sont dotés de la faculté d’intégrer un arbitrage inter-
temporel dans leurs décisions de consommation et d’investissement. Le taux de croissance
de la population explique aussi en partie le progrès technologique lié à l’utilisation du
travail :
- Toutes les variables du modèle sont exprimées per capita.
19
Ménage représentatif :
A chaque période, l’économie est peuplée par un nombre fini de ménages constituant une
population qui croit à un taux annuel constant N. Le ménage représentatif maximise son utilité
en consommant des biens et services et ne valorise pas le loisir. A chaque période, il est doté
d’une unité de travail qu’il offre sur le marché ; l’offre étant inélastique à la demande. Le revenu
courant des ménages provient des dividendes reçus des firmes, du revenu du travail, des
transferts du gouvernement et du reste du monde. Le revenu du travail et les dividendes sont
taxables. La ménage cherche, à chaque période, une allocation optimale pour son épargne et sa
consommation.
∞
1 𝑡
𝑈𝑂 = ∑ ( ) 𝑙𝑛(𝐶𝑡 )
1+𝜌
𝑡=0
revenu du travail, Wt est le taux de salaire, 𝐿𝑆𝑡 , l’offre de travail, 𝑇𝑅𝐺𝐻𝑡,ℎ les transferts du
20
ℎ
ℎ ℎ
Après avoir déterminé son niveau de dépenses de consommation agrégée, le ménage procède
à son allocation à travers les différents biens en utilisant une spécification de type Cobb-
Douglas :
Cette étape qui traduit les préférences des ménages en termes de choix d’allocation des
ressources entre les différents biens permet de déterminer les prix composites des différents
paniers de consommation. Ainsi en fonction de ses habitudes de consommation et chaque
ménage se retrouve avec un prix spécifique reflétant la réalité de son environnement
économique. Cette forme de modélisation offre une différenciation des prix selon les districts à
travers la technologie utilisée et la pression fiscale qui varient en fonction des secteurs de
l’économie. En effet, chaque secteur i de l’économie se caractérise par un prix 𝑃𝑖,𝑡 qui est
étroitement lié à la technologie qu’il utilise, de même l’autorité publique dans sa politique
fiscale applique des taux différents selon les produits. Ainsi, le ménage en fonction de ses
préférences choisit le panier qui optimise son utilité et minimise le prix à chaque période.
Gouvernement
Elle agrège les dépenses par produit suivant une spécification de type Cobb-Douglas.
21
Les conditions de premier ordre de la minimisation de la fonction de dépenses de consommation
du gouvernement permettent de déterminer les dépenses de consommation du gouvernement
par produit et le prix composite. Les prix 𝑃𝐶𝐺𝑖𝑡 sont évalués avec taxe.
Dans ce modèle, le solde budgétaire est par hypothèse versé aux ménages
Ainsi, les dépenses courantes hors transferts qui constituent souvent une demande effective
pour le secteur privé offrent des débouchés aux firmes, améliorent indirectement le revenu du
ménage et par conséquence ses conditions de vie. Par ailleurs, les investissements publics
réalisés par le gouvernement sont essentiellement des supports à la création de richesses et
entrent dans la fonction de production comme un capital physique public qui agit positivement
sur la productivité globale des facteurs. Concernant, les dépenses sociales, elles peuvent agir
également sur la productivité globale des facteurs en assurant la mise en place de dispositifs
sécuritaires et juridiques, en favorisant le bon fonctionnement des marchés, le respect des droits
de propriété, l’accès aux besoins de première nécessité, etc. Les équations d’accumulation de
capital permettent de définir le stock de capital physique à chaque période.
𝐾𝐺𝑗,𝑡+1 représente le capital physique public dans le secteur j à la période t+1 et 𝜑𝑗 paramètre
d’efficience des dépenses d’investissement public dans le secteur j, 𝐺𝐼𝑁𝑉𝑡 les dépenses
d’investissement public en capital physique, 𝑁 le taux de croissance annuelle de la population.
Cette dynamique permet de quantifier à chaque période le stock de capital physique disponible
dans l’économie.
L’équation suivante est celle des dépenses publiques en fonction de ses deux grandes
composantes :
𝐺𝑡 = 𝐺𝐶𝑡 + 𝐺𝐼𝑁𝑉𝑡
22
Avec 𝐺𝐶𝑡 les dépenses courantes, 𝐺𝐼𝑁𝑉𝑡 les dépenses d’investissement en capital physique,
𝐺𝐼𝑁𝑉𝑗,𝑡 = 𝛾𝑗 𝐺𝐼𝑁𝑉𝑡
Avec 𝐺𝐼𝑁𝑉𝑗,𝑡 les dépenses d’investissement de l’Etat dans le secteur j et 𝛾𝑗 la part du secteur j
dans les investissements publics.
La Firme Représentative :
Dans chaque secteur, la firme représentative produit un seul bien i composite en utilisant du
travail, du capital et des biens de consommation intermédiaires. Chaque bien composite, produit
par la firme, est une combinaison, de la valeur ajoutée et de biens de consommation
intermédiaires. Le travail et le capital combinés, génèrent de la valeur ajoutée, avec une
technologie d’élasticité de substitution constante (CES). Le facteur travail est supposé
parfaitement mobile entre les différents secteurs de production tandis que le capital physique
est spécifique à chaque secteur, dans le court terme. Les firmes, font, par ailleurs, face à deux
types de taxes : la taxe sur la production 𝑡𝑝𝑗 et la taxe sur les consommations intermédiaires
𝑡𝑣𝑗 .
A l’instar du ménage, le comportement de la firme représentative est compartimenté. En effet,
elle choisit d’abord à chaque période les niveaux appropriés d’investissement, de travail, de
consommations intermédiaires afin de maximiser son profit inter-temporel sous réserve de
l’accumulation du capital. Ensuite, elle décide de l’allocation de sa production suivant les
différents marchés. En outre, par hypothèse l’investissement comprend des coûts d’ajustement
ou coûts d’installation que l’entreprise supporte à chaque augmentation de capital.
1 𝑡
𝑉0 = ∑ ( ) 𝐷𝐼𝑉𝑗𝑡
1+𝑟
𝑡
1 1 𝜎𝑣𝑗
1− 1−
𝜂 𝜎𝑣𝑗 𝜎𝑣𝑗
𝑉𝐴𝑗𝑡 = 𝐴𝑉𝑗 𝐾𝐺𝑗,𝑡 [𝛼𝑣𝑗 𝐾𝑗𝑡 + (1 − 𝛼𝑣𝑗 )𝐿𝐷𝑗𝑡 ]
23
Avec 𝛼𝑣𝑗 la part du facteur capital de la fonction de valeur ajoutée, 𝜎𝑣𝑗 un paramètre d’élasticité
des facteurs (travail et capital) dans la fonction de valeur ajoutée du secteur j, 𝜂 l’élasticité de
la valeur ajoutée par rapport aux évolutions du stock de capital public physique, 𝐿𝐷𝑗𝑡 la
demande de travail du secteur j, 𝐴𝑉𝑗𝑡 le paramètre d’échelle de la fonction de valeur ajoutée,
𝐾𝑗𝑡 stock de capital privé et 𝐾𝐺𝑗𝑡 celui du capital public.
La production agrégée XTS des entreprises est ventilée suivant les différents types de marchés
à chaque période. En d’autres termes, chaque firme alloue sa production XTS it entre vente
Sous la contrainte
Xi
1
Xi 1 1 Xi
XTS it AX i Xi * EX it Xi 1 Xi * XDS it Xi
Xi
Par ailleurs, l’hypothèse d’Armington est formulée de la manière suivante : la demande totale
de chaque bien i est composée d’importation et de production locale.
Sous la contrainte
Mi 1
Mi 1 Mi 1
Mi
XTDit AM i Mi * M i Mi
1 Mi * XDD Mi
24
En outre, cinq conditions d’équilibre caractérisent le modèle :
D’abord, l’offre totale du produit composite est égale à la somme des demandes intermédiaires,
de la consommation finale des ménages, de la consommation du gouvernement, de
l’investissement gouvernementale et des variations de stock.
∑ 𝐿𝐷𝑗𝑡 = 𝐿𝑆𝑡
𝑗
Sur le marché des biens et services, les prix s’ajustent pour assurer l’équilibre entre l’offre et la
demande
𝑋𝐷𝐷𝑖𝑡 = 𝑋𝐷𝑆𝑖𝑡
La quatrième condition est relative à l’équilibre entre l’épargne des agents économiques et du
reste du monde avec l’investissement totale
La désagrégation du compte ménage dans la MCS s’avère nécessaire dans la mesure où l’étude
ambitionne de mesurer l’impact des dépenses publiques sur le la pauvreté et les inégalités au
Sénégal. Cela nous permettra d’avoir des effets très variés liés aux décisions économiques
souvent différentes des ménages.
En outre, l’ESPS 2 (Enquête de suivi de la Pauvreté au Sénégal) réalisée en 2011 sera utilisée
comme base de données d’enquête pour estimer l’impact des dépenses publiques au niveau des
ménages à travers un module de micro simulation. A cet effet, la méthode FGT qui permet
appréhender la pauvreté au sens monétaire a été retenue pour le calcul des indicateurs de
pauvreté classiques en l’occurrence l’incidence, la sévérité et la profondeur. Ainsi, d’après cette
approche l’incidence de la pauvreté représente la part de la population vivant en dessous du
seuil de pauvreté, elle est calculée selon la formule suivante :
25
𝐻 = 𝑃⁄𝑁
La profondeur, quant à elle mesure l’écart entre la consommation d’un ménage pauvre et celui
d’un ménage qui se trouve sur la frontière de pauvreté. Elle permet de mettre en relief le gap
exprimé en termes monétaire empêchant à un ménage donné de sortir de la situation de
pauvreté.
Contrairement, à la profondeur, la sévérité est égale au carré de la distance qui sépare le ménage
de la frontière de pauvreté et elle s’obtient grâce à la formule suivant :
𝑃 𝑌 − 𝑌𝑓
𝑆 = ∑ 1⁄𝑁 ( )²
𝑁 𝑌𝑓
Enfin, le coefficient de concentration de Gini sera utilisé pour mesurer l’impact des politiques
budgétaires sur les inégalités sociales au Sénégal. Ce coefficient est très couramment utilisé
dans la littérature économique pour le calcul des inégalités.
26
V. RESULTATS ET INTERPRETATIONS
Pour analyser l’impact des dépenses publiques sur la pauvreté et les inégalités, plusieurs
scénarii ont été simulés afin d’avoir une parfaite visibilité sur le rôle de la politique budgétaire,
à travers ses différentes composantes, en matière de lutte contre la pauvreté.
Simulation 1
Le premier scénario consiste à effectuer des chocs isolés sur les deux composantes des dépenses
publiques à savoir celles d’investissement et courantes hors transferts sur une période de cinq
ans. L’amplitude de ces chocs sera égale aux progressions moyennes des deux agrégats
observés depuis 2014 correspondant à l’année de la mise en œuvre du PSE. Cela permettra
d’identifier le type de dépense qui contribuerait le plus à la réduction de la pauvreté, et qui
pourrait être choisi comme levier phare dans la quête de l’amélioration du bien-être des
populations sénégalaises.
Simulation 2
Dans une optique de mesurer l’impact de certains programmes qui s’inscrivent dans le volet
social du PSE tels que la Couverture maladie Universelle et la Bourse de Sécurité Familiale,
des scénarii de simulation spécifiques à ces programmes ont été également mis en œuvre.
27
possible. Par ailleurs, les dépenses de santé seront réparties de façon équitable entre les
différentes personnes d’un même ménage afin de déterminer la part allouée à chaque membre.
Ainsi, concernant la gratuité des soins pour les moins de 5ans, seuls les frais de consultations
sont subventionnés, donc la simulation prend dans un premier temps toutes les dépenses
consenties par le ménage pour cette ligne budgétaire au profit des personnes qui rentrent dans
cette catégorie d’âge. Par ailleurs, le plan SESAME qui se caractérise par une prise en charge
de l’ensemble des dépenses de santé sauf celle dédiées à l’achat de médicaments pour les
personnes âgées de 60 ans ou plus, sera également pris en compte. Enfin, les mutuelles qui
représentent la composante principale de la CMU, seront intégrées de deux manières. Elles
devraient d’abord se traduire par un transfert du gouvernement égal à 80% des dépenses en
santé des personnes (supposés être les plus pauvres) qui ont adhéré aux programmes des
mutuelles à travers la CMU et ne concerneront que 43,6% de ménages supplémentaires au
niveau national afin d’atteindre l’objectif d’une couverture nationale fixé à 75% en 2017 par
les autorités. En somme, le scénario pour la CMU va se traduire comme un transfert du
gouvernement vers les ménages qui portera sur toutes les composantes réunies (SESAME,
Mutuelle et gratuité moins de 5ans) afin de faciliter l’accès au soin de santé et donc améliorer
le revenu et le niveau de vie des ménages.
La simulation réalisée sur les dépenses d’investissement de l’Etat montre globalement une
amélioration de la consommation des ménages d’environ 1% en moyenne sur les deux
premières périodes. Par la suite, les ménages ont revu globalement leur consommation à la
baisse afin d’augmenter leurs placements se traduisant par une hausse considérable de
l’investissement à partir de la deuxième période d’environ 7,6% (contre 3,1% sur la première
période). Par ailleurs, le PIB a connu une augmentation de 3,4% sur la période de simulation.
Ces résultats s’expliquent par l’accumulation du capital public qui agit directement sur la
productivité globale stimulant ainsi l’activité économique. Cela a favorisé l’accroissement de
la valeur ajoutée et par voie de conséquence une hausse de la rémunération des facteurs de
production en particulier le salaire qui a augmenté de 1,2 % en moyenne. Dans le même sillage,
la rémunération du capital a enregistré une évolution positive à hauteur de 2%. Ces résultats
témoignent d’une hausse de la richesse des ménages qui devrait avoir un impact positif sur
l’amélioration du bien-être et donc sur la réduction de la pauvreté. En effet, les dépenses
d’investissement de l’Etat permettraient à 36 880 ménages de sortir de la pauvreté soit environ
344 721 personnes. A cet égard, la répartition spatiale du choc selon les zones d’habitation
28
montre une réponse plus importante dans le milieu rural avec une part estimée à 46% contre
24,3% et 29,7% respectivement à Dakar et dans les autres centres urbains.
Figure 10 : Répartition de l'impact des dépenses publiques sur l'incidence de la pauvreté selon le milieu
résidence
100%
80% 29,7%
60% 24,3%
90,5%
40%
20% 46,0%
41,0%
0%
Ginv -31,5% GC
-20%
Par ailleurs, l’impact laisse apparaitre une nette baisse de l’incidence de la pauvreté qui
diminue en milieu urbain de Dakar et les autres villes ainsi qu’en zone rurale, avec des baisses
respectives de 5,8%, 7,9% et 3,6% du nombre de pauvres par rapport à la situation de référence.
En outre une réduction des inégalités sociales devrait être observée au niveau national avec une
légère baisse de l’indice de Gini estimée à 1,78%, avec une diminution plus importante dans
les autres villes de l’ordre de 3,4% par rapport à la situation de référence (annexe 1).
Figure 11 : Impact des dépenses courantes et d'investissement public sur la sévérité (en % par rapport à la
situation initiale)
0,02
0,01
0
Ginv GC
-0,01
-0,02
-0,03
29
Figure 12 : Baisse de la profondeur par rapport à la situation initiale
0,1
0,08
0,06
0,04
0,02
0
Ginv GC bourse CMU
Cependant, le choc effectué sur les dépenses courantes hors transferts révèle un impact
relativement différent sur les agrégats macroéconomiques mais également sur les canaux de
transmissions en termes de politique de lutte contre la pauvreté, comparé aux dépenses
publiques d’investissement. Ainsi, il apparait qu’une hausse de ces dépenses se traduit par une
augmentation des richesses du pays avec une contribution sur l’accroissement du PIB à hauteur
de 1,5%, qui s’expliquerait par l’accroissement de la demande effective à travers
l’augmentation des dépenses de consommation de l’Etat. Cet impact est relativement moins
important confronté à celui des dépenses investissements publics et s’explique essentiellement
par l’augmentation de la demande effective à travers la commande publique qui stimule la
production. Par contre, la consommation privée agrégée diminue en moyenne de 2% sur la
période, du fait de la hausse de la TVA pour satisfaire les besoins de financement de l’Etat.
Cette évolution globalement négative cache des disparités importantes à l’échelle des ménages,
car la majorité aurait revu leur consommation à la hausse. En outre, les résultats montrent une
légère augmentation de l’investissement privé de 0,04% sur la période de simulation qui
s’explique en partie par l’accroissement de la rentabilité des rémunérations du capital. Par
ailleurs, l’impact sur les indicateurs de pauvreté s’avère globalement positif avec des effets très
différents suivant le milieu de résidence. Il apparait que les ménages qui habitent dans les zones
urbaines à savoir Dakar et les autres villes bénéficient davantage d’une hausse des dépenses
courantes hors transferts avec une nette réduction de l’incidence de la pauvreté qui baisserait
respectivement de 2,1% et 5,1%. En d’autres termes, cela permettrait à 3243 ménages dakarois
de sortir de la pauvreté, de même que 7151 ménages des autres zones urbaines. Cependant,
l’impact apparait plutôt négatif en milieu rural qui devrait observer une légère dégradation de
l’incidence à hauteur de 0,5%, à cause de la hausse des prix. Cela pourrait s’expliquer par la
commande publique qui est plus avantageuse pour les ménages disposant d’une part de capital
importante et résidant le plus souvent en zone urbaine. Ainsi, cela permettrait aux entrepreneurs
30
de ces localités de bénéficier d’une demande effective supplémentaire incitative à la production
et par voie de conséquence à une hausse du revenu. Une baisse des inégalités mesurées par
l’Indice de Gini serait également perceptible avec une réduction des disparités sociales au
niveau national à hauteur de 1,8%.
La politique de Couverture Maladie Universelle, quant à elle se traduirait par une hausse des
transferts de l’Etat d’environ 0,08% du PIB pour un niveau de couverture nationale de l’ordre
de 75%. Cette politique qui vise à faciliter l’accès aux soins médicaux permet de soulager
financièrement les ménages en augmentant leurs budgets et leur offre l’opportunité de faire face
aux dépenses de santé qui sont souvent imprévues. Ainsi, les résultats montrent une
amélioration de la consommation privée à l’échelle nationale d’environ 0,11%. Cette
progression est couplée à une hausse de l’investissement privé sur les trois premières périodes
de simulation en réponse à l’augmentation du revenu des ménages. Ces résultats constatés au
niveau des agrégats macroéconomiques devraient se traduire par des améliorations
considérables en termes de bien-être social pour les ménages à travers les indicateurs de
pauvreté et d’inégalité.
Figure 13 : répartition des impacts du programme de Bourses Sociales et de la CMU selon le milieu de
résidence
100%
26,0% 27,7%
80%
60% 27,3% 22,2%
40%
20% 46,7% 50,1%
0%
Bourse CMU
31
Figure 14 : Impact de la CMU et des Bourses de sécurité familiale sur la Sevérité (en % par rapport à la situation initiale)
0,14
0,12
0,1
0,08
0,06
0,04
0,02
0
Bourse CMU
Enfin, la dernière simulation concerne le programme des bourses de sécurité familiale qui se
traduit par un transfert de l’Etat de 100 000 CFA/an destiné aux 400 000 ménages les plus
pauvres du Sénégal. A cet effet, l’impact de ce programme sur les agrégats macroéconomiques
révèle une hausse moyenne du PIB d’environ 0,5% en réponse à l’augmentation de la
consommation privée agrégée qui devrait également connaitre une légère hausse estimée à
0,11% sur la période de simulation. Dans la même veine, les bourses de sécurité familiale
impacteraient le plus la profondeur de la pauvreté qui devrait reculer significativement
d’environ 11,8% par rapport à la situation de référence, de même que la sévérité qui baisserait
de 8,6% sur le territoire national. Elles auraient également un impact considérable sur les
inégalités sociales avec une diminution de l’indice de Gini estimée à 3,6% (annexe 2). Ces
résultats s’expliquent en partie par le caractère social de ces fonds qui sont souvent utilisés
comme des compléments à la consommation des ménages. En outre, le fait d’avoir choisi les
ménages les plus pauvres dans la mise en œuvre de ce programme, peut être perçu comme une
politique de redistribution agissant significativement sur la réduction des inégalités. L’analyse
de l’impact sur les disparités sociales selon la zone de résidence montre une réduction de
l’indice de Gini dans le milieu urbain de Dakar, ainsi que dans les autres villes et le monde rural
estimée respectivement à 2,75%, 5,01% et 1,45%.
Par ailleurs, le programme des bourses, permettrait à 32 772 ménages de sortir de la pauvreté,
dont les 46,7% résident en milieu rural contre 27,3% et 26% respectivement à Dakar et les
autres villes.
32
VI. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Cette étude a eu pour objectif principal de mesurer l’impact des dépenses publiques courantes
et d’investissement de même que celui des programmes de bourses de sécurité familiale et de
la couverture maladie universelle sur la pauvreté et les inégalités sociales au Sénégal. Elle a
ainsi permis d’identifier le rôle de la politique budgétaire dans la lutte contre la pauvreté.
Il ressort des résultats que les bourses sociales constituent l’instrument qui agirait le plus sur
la plupart des indicateurs de pauvreté et d’inégalité, avec des impacts sur la profondeur, la
sévérité et l’indice de Gini estimés à 11,8%, 8,6% et 3,6%. Elles offriraient aussi l’opportunité
à 32 772 ménages de changer de statut en sortant de la situation de pauvreté.
33
A cet effet, il serait judicieux d’utiliser davantage les dépenses d’investissement public de la
lutte contre la pauvreté et les inégalités, car elles constituent un instrument efficace et un moyen
d’assurer une stabilité macroéconomique tout en stimulant l’activité économique.
Les dépenses courantes hors transferts constitueraient également un bon instrument en matière
de politique de réduction de la pauvreté. Cependant, leur impact pourrait être amélioré en
favorisant l’accès à la commande publique aux entrepreneurs Sénégalais. De même, pour
accroitre ses moyens budgétaires, l’Etat pourrait relever le taux des taxes spécifiques et/ou
ajouter une ligne de taxation (par exemple sur la consommation de biens de luxe) afin de mieux
prendre en compte des disparités sociales et d’avoir un meilleur effet en milieu rural.
Par ailleurs, la politique liée aux bourses de sécurité sociale constituerait un outil important
pour l’amélioration de la qualité de vie des Sénégalais. Cependant, l’impact devrait augmenter
à travers une meilleure politique de ciblage visant à sélectionner les ménages les plus
nécessiteux. Dans le même sillage, l’incidence de ce programme serait plus importante par le
biais d’une discrimination positive consistant à offrir un montant relativement plus élevé aux
ménages les plus démunis et à prendre en compte les différences en termes de pouvoir d’achat
caractérisant les différentes localités du pays.
Enfin, le programme de couverture maladie universelle, malgré son impact significatif attendu
sur la pauvreté, pourrait s’améliorer par la biais d’une augmentation du taux de couverture
nationale d’une part, mais aussi à travers l’intégration de plus de lignes de dépenses de santé
dans la prise en charge des moins de 5 ans.
34
BIBLIOGRAPHIE
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Pauvreté au Burkina Faso : une approche en équilibre général calculable ». Réseau de
recherche sur les politiques économiques et la pauvreté.
Boccanfuso, D., Cabral F., Cissé, F., et al. (2003) : « Pauvreté et distribution de revenus au
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ANNEXE:
Sevérité Profondeur
GC -0,02245686 0,0032409
Autres villes
gini % Rural Dakar urbaines Total
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