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LE STYLE D’UNE CURE

Christiane Lacôte-Destribats
in Roland Chemama et al., Le métier de psychanalyste

ERES | « Humus, le désir de l’analyste en acte »

2016 | pages 41 à 45
ISBN 9782749249728
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/le-metier-de-psychanalyste---page-41.htm
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Le style d’une cure

N’IMpOrtE QUOI ?
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Convient-il de savoir, et comment, si notre pratique est
psychanalytique ou non ? S’agit-il de respecter certaines
règles que l’opinion commune connaît déjà, comme l’abs-
tention de nos propres désirs sur les patients et sur le but de
leur cure, la non-réponse à leurs demandes dans la mesure
où cela brouillerait l’expression de leur désir inconscient, le
silence « bienveillant », la régularité des séances, etc. ?
Cela n’est qu’un ensemble de précautions, d’injonctions
plutôt négatives, utiles sans doute, mais qui ne donnent
aucune information sur le style d’une cure.
pourquoi parler de style ? Chaque analyste trouve son
style peu à peu. C’est particulièrement frappant lors des
contrôles ou des supervisions, où il s’agit d’entendre le texte
d’un patient rapporté par un analyste, d’en lire les ressources
inconscientes, de saisir l’à-propos des interventions de cet
analyste, non pas au coup par coup, mais dans ce qui va se
dégager de pertinence originale dans l’intervalle des séances.
C’est ce qui faisait dire à Lacan, avec son humour
et sa provocation coutumiers, que les analystes débutants

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LE MétIEr DE pSyChANALyStE

commençaient par faire n’importe quoi et que c’était de cela


même qu’il fallait partir. Il indiquait sur ce point le chemin.
Il disait en effet, dans le Séminaire Le sinthome, le
18 novembre 1975 : « Il arrive que je me paie le luxe de
contrôler – on appelle ça – un certain nombre, un certain
nombre de gens qui se sont autorisés eux-mêmes, selon ma
formule, à être analystes. Il y a deux étapes. Il y a une étape
où ils sont comme le rhinocéros ; ils font à peu près n’importe
quoi et je les approuve toujours. Ils ont en effet toujours
raison. » Il s’agira ensuite, dit Lacan, dans une seconde étape,
de jouer, selon les mots de l’analysant, de l’équivoque qui
fait l’épaisseur du langage et radicalise la question du sens.
« Car c’est uniquement par l’équivoque que l’interprétation
opère. Il faut qu’il y ait quelque chose dans le signifiant qui
résonne », dit encore Lacan.
Comment entendre ce n’importe quoi de cette première
étape ? Cela signifie qu’on ne peut partir de quelque consigne
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d’abstention, mais qu’on part au contraire de ce qu’un
analyste engage de réel dans sa parole, avec ce que cela
implique de scories, de tâtonnements, bref, d’engagement de
son désir d’analyste. Cela répond, remarquons-le, au « dites
ce qui vous passe par la tête car cela n’est jamais n’importe
quoi » énoncé par le psychanalyste à son patient.
L’étape d’après consisterait-elle alors en une purifica-
tion ? Il ne le semble pas, encore une fois.

LE réEL DU pASSAGE pAr UN AUtrE


Cela reprend ce dont il a été question plus haut, la tenta-
tive de définir le désir de l’analyste de façon positive, à partir
de la pure différence entre signifiants, à partir de ce qui
pourra faire sens dans le langage. Cependant, cette pure diffé-
rence entre signifiants n’est pas ici un énoncé linguistique,
donnant lieu à des combinatoires diverses ou justifiant toute
une variété de commentaires. Cette pure différence bute sur
le réel du passage par un autre, le psychanalyste, qui, tout en

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étant un semblable, pour le patient, ne se met pas à cette place


là, mais tient lieu et temps d’une altérité dissymétrique, sans
l’appui de la ressemblance. L’analyste se met au lieu de ce
que Lacan appelle l’Autre, qui n’est ni dieu ni bête, qui n’est
donc pas en position d’oracle, ni dans une représentation
démoniaque des pulsions. Mais ce lieu et ce temps où se met
le psychanalyste sont sans doute les garants de l’efficacité
symbolique de la parole en toute occasion, de ses effets
imaginaires nécessaires à la fiction de la vérité, de ses effets
réels d’inscription subjective ou, pour certains cas de
psychose, d’inscription de ce que j’appellerais volontiers les
circonstances du sujet.
L’altérité proposée par le dispositif psychanalytique n’est
donc pas celle d’une personne à l’autre, ou bien d’une
personne à quelque transcendance divine. Le psychanalyste
sait que la cure va parcourir des espaces et des temps de
transformation qui vont de la place de l’Autre à celle d’un
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objet qui sera périodiquement rejeté à l’occasion et au profit
d’une séquence de signifiants qui trouveront chez son patient
la chance de leurs sens.
Mais comment ce désir prend-il son style ?

LA CONtINGENCE INCLUSE
Le terme de style appartient souvent à l’art, et il est perti-
nent en ce qui concerne la psychanalyse. Ce n’est pas quelque
chose que l’on définit au départ, mais qui se trouve, et,
surtout, qui se pense peu à peu en incluant la contingence de
ce qui surgit, comme événement, comme parole, comme acte.
L’écart entre deux signifiants qui radicalise le champ de
la psychanalyse, doit, me semble-t-il, inclure cette dimension
de la contingence, cette scansion du hasard, reprise et conti-
nuée, qui fait qu’une inscription possible se fait réellement.
Est-ce une impureté qui se loge alors au lieu même de la pure
différence ? Sans doute, à la condition de ne pas voir dans
cette impureté une dépréciation possible. Car elle est l’occasion

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du lien de la parole au réel. C’est pour cela qu’on ne peut


« cadrer » ce qui est psychanalytique avec des précautions
ou des garde-fous. Cela ne veut pas dire non plus que nous
aurions à valider le « n’importe quoi » de la parole de départ.
Mais cela signifie plutôt, pour notre position de psychana-
lyste, le maintien anticipateur d’une dimension improbable
dans la parole de l’autre, permise par la dissymétrie de fond
entre l’analyste et le patient.

UN tEMpS LONG
Ce qui fait qu’il ne me semble pas falloir toujours s’in-
terroger au coup par coup sur les paroles de l’un ou de l’autre
pour savoir si le cours de la cure est psychanalytique ou pas.
Il y a en effet, dans toute cure, des moments de soutien, des
moments où il ne faut rien lâcher de la parole, des moments
de face-à-face, des moments d’accompagnement de certains
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aspects de la réalité de la vie et des décisions qui en décou-
lent. Est-ce là une succession de fautes par rapport aux scan-
sions nouvelles des signifiants produites par la cure ? pour
ma part je ne le pense pas, à partir du moment où ces temps
d’accompagnement, pour les nommer ainsi, ne sont pas
laissés à la divagation interprétative des demandes d’amour,
dont elles sont parties pourtant, mais trouveront une inscrip-
tion plus tardive et leur nécessité après coup. Même l’erreur
du psychanalyste, sa brutalité de langage, ou son silence
embarrassé, peuvent témoigner, si tout cela est repris, de ce
que l’on fait une analyse avec un homme ou une femme qui
a affaire, comme ses patients, à la difficulté de ce qu’on peut
inventer pour résoudre des impasses proprement humaines.
Enfin, pourquoi ne fait-on pas assez confiance au travail
inconscient de nos patients ? Car c’est la position de l’incons-
cient, spécificité de la psychanalyse, qui est en jeu ici. Une
sorte de confiance flottante, comme l’écoute dit-on, sur la
dimension de savoir qu’a donnée Freud à l’inconscient.

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Il est utile et légitime de se demander si nos interventions


sont psychanalytiques, pertinentes par rapport à la psycha-
nalyse, par rapport à ce qu’elle peut déplacer subjectivement
depuis l’inconscient. Mais cette vigilance peut être vite
asservie à un idéal de transparence dont on voit partout les
ravages aujourd’hui et peut-être surtout les ambitions de
maîtrise naïves.
Il ne s’agit pas pour autant de promouvoir quelques liens
secrets. L’inconscient critique radicalement le secret, en le
faisant aussitôt secret de polichinelle. L’inconscient relève
de l’inconnu qui ne se cache ni ne se dévoile. L’inconnu de
l’inconscient, il faut aller le chercher, le déchiffrer en l’écri-
vant. Ce qui veut dire ici qu’il faut garder à l’esprit le fait
qu’il y ait de l’opacité dans notre démarche, qu’elle trouve
le plus précisément son entame par les réponses parfois
surprenantes de nos patients, et ainsi de suite.
L’opacité dont nous partons, la nôtre et, différente, celle
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du symptôme qui fait la plainte première de nos patients, ce
n’est ni l’obscur ni le clair à la manière de Jung par exemple.
Une psychanalyse ne fait pas un parcours qui va de l’obscur
au clair. Nous pensons davantage notre pratique comme des
avancées sur un savoir inconscient que nous supposons à
partir du réel opaque des symptômes de nos patients. Nos
essais nous viennent non pas d’une transparence à soi, mais
de ce que nous savons de radical dans l’énonciation hasar-
deuse de chacun, dans la phrase qui se risque au sens. Nous
sommes des guetteurs des hasards où une parole joue réelle-
ment l’écart entre les signifiants jusqu’à une possible méta-
phore. Notre présence se prête réellement à cet écart, et il est
possible que notre parole de scansion ne soit là que pour dire
que le moment est justement venu où notre présence n’est
plus utile car la métaphore s’est conclue sur son inscription
pour le sujet. Scansions, donc, séances après séances.
Ch. L.-D.

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