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ENCYCLOPEDIEE SCIENTIFIQUE

PUBLIÉEE SOUS LA DIRECTION DU D* TOULOUSE

BIBLIOTHÈQUEE DIRECTEUK
D'ANTHROPOLOGIEE P. RIVET

L'Artt Primitif
PARR

G.H.LUQUETT

GASTONN DOIN ET Cle, ÉDITEURS K PARIS


G.. DOIN & Cil!, Éditeurs, 8, place de l'Odéon, Paris

E N C Y C L O P É D I EE SCIENTIFIQUE
Publiéee «ous la direction du D ' TOULOUSE,

BIBLIOTHÈQUEE D'ANTHUOPOLOGIE
Directeurr : D r P . RlVET
Professeurr au Muséum d'histoire naturelle.

L'Anthropologiee est une science neuve qui n'était point


encoree constituée, il y a un demi-siècle ; elle a su pourtant
accumuler,, en un si court espace de temps, des découvertes
quii ont exercé une influence considérable sur la pensée philo-
sophiquee de notre époque.
C'estt la France qui a été l'initiatrice de cette nouvelle
méthodee de recherche, comme elle a été la première à. en
organiserr l'enseignement d'une façon complète et systé-
matiquee à l'Ecole d'Anthropologie de Paris ; c'est donc en
Francee qu'il était logique de voir se constituer une Biblio-
thèquee condensant en une cinquantaine de volumes toutes
less connaissances éparses actuellement en une multitude
dee Revues, de Bulletins scientifiques et d'ouvrages spé-
ciaux..
Less difficultés ne manquaient point dans cette entreprise.
Less pionniers d'une science nouvelle s'élancent vers l'in-
connuu dans l'enthousiasme des premières découvertes, sans
songerr à coordonner leurs efforts, sans même se préoccuper
dess limites du domaine qu'ils ont à défricher ; il en résulte que
dess régions entières sont à peine explorées, tandis qu'ailleurs
onn a empiété sur des sciences voisines. Les auteurs de nos Ma-
L'artt primitif. i
III ENCYCLOPÉDIE SCIENTIFIQUE

nuelss d'Anthropologie s'en sont à peine aperçus. La plu-


partt sont des chercheurs éminents qui ont fait une œuvre
personnellee résumant surtout leurs idées et leurs découvertes,
ett n'ont eu cure de faire une véritable encyclopédie. Quant au
Dictionnairee des Sciences anthropologiques, qui manifeste
pourr l'époque où il parut un effort intéressant, il ne reflète,
quee trop fidèlement, dans son plan général, la confusion des
doctriness qui régnaient alors en Anthropologie et n'ont point
encoree disparu.
Onn est, en effet, très loin de s'entendre sur la ('éfinition
ett les limites de l'Anthropologie. Certains lui donnent une
tellee extension qu'elle risque de perdre son individualité. .
Toutee science qui étudie l'homme ou enregistre ses actes
rentreraitt dans son domaine : anatomistes, physiologistes,
psychologues,, historiens, archéologues, etc., feraient ainsi
dee l'Anthropologie sans s'en douter. D'autres, tout au con-
traire,, rétrécissent son champ d'action au point de lui enle-
verr toute portée philosophique et pratique, en la limitant à
l'étudee somatique des races humaines. Entre ces deux ex-
trêmess se disposent un grand nombre d'opinions moyennes
quee je ne résumerai pas en cette courte notice. J'ai voulu
simplementt montrer, devant ces contradictions, combien
ill était nécessaire d'exposer en quelques mots la concep-
tionn qui a présidé à l'organisation de cette bibliothèque.
Ill faut dire tout d'abord que nous avons écarté avec soin les
classificationss générales des sciences qui ont été élaborées
jusqu'ici.. Toutes, à notre connaissance, présupposent que
l'unitéé constitutive d'une science et sa place dans l'ordre
dee nos connaissances reposent sur la nature des phénomènes
qu'ellee étudie ; et il faut avouer humblement que nous igno-
ronss la nature intime de ces phénomènes, bien que les théo-
riess ne manquent point pour nous la révéler ; les meilleures,
commee la théorie atomique, ne sont-elles pas seulement des
constructionss représentatives, des images offrant un support
commodee à notre pensée ? Nous ignorons si les sciences nous
donnerontt jamais une connaissance adéquate de la nature ;
nouss ne savons même pas si nous pouvons soupçonner ce
quee se ait une connaissance adéquate ; mais nous savons de
toutee certitude que les sciences accroissent notre puissance
d'actionn en systématisant nos moyens de recherche et en coor-
donnantt les relations profondément subjectives que nous appe-
lonss nos connaissanes. Il semble donc légitime et nécessaire
dee se placer uniquement au point de vue subjectif et pratique
BIBLIOTHÈQUEE D'ANTHROPOLOGIE III

pourr chercher à s'éclairer sur la constitution réelle d'une


science..
Orr si nous observons comment se forment les unités
d'étudee les plus évidentes et les plus tangibles, telles que les
Laboratoires,, nous constaterons facilement que leur indivi-
dualitéé dépend uniquement de la technique qu'on y emploie.
Sii cette technique se diversifie trop, le Laboratoire se scinde
tôtt ou tard. Des unités d'étude comme la physique, la chimie,
laa physiologie, auxquelles un seul Laboratoire suffisait au dé-
but,, ont subi des subdivisions qui sont maintenant aussi
tranchéess que l'étaient autrefois les divisions primitives,
ett ce n'est que par une habitude de langage que l'on dé-
signe,, par exemple, sous le même terme, des études aussi
disparatess que l'analyse purement mécanique des mouve-
mentss d'un animal, l'analyse chimique de ses sécrétions et
less études sur ses ferments internes : l'unité d'étude nommée
physiologiee est appelée sûrement à se morceler tout comme
l'aa fait depuis longtemps la physique d'Aristote.
Chacunee de ces subdivisions est donc nécessitée par le pro-
grèss même de nos connaissances et la complexité croissante
dee nos moyens d'investigation, c'est-à-dire de la technique
scientifique.. Tout individu qui veut s'assimiler une de ces
sciencess particulières et travailler à ses progrès doit subir
unn apprentissage qui implique non seulement un exercice
mentall particulier, mais souvent même un exercice muscu-
lairee assez difficile, exactement comme l'apprentissage d'un
artt esthétique ou industriel. Il doit connaître les instruments
dee recherche, se familiariser avec leur fonctionnement, acqué-
rirr les connaissances nécessaires pour les appliquer et com-
prendree les résultats que donnent ces modes spéciaux d'obser-
vationn et d'expérience.
Less considérations précédentes nous conduisent, comme on
lee voit facilement, à deux conclusions qui méritent d'être
bienn détachées à cause de leur importance :
1°° II existe, pour les sciences comme pour les arts, une
TechnologieTechnologie qui joint à l'étude de la technique propre
ditee les connaissances nécessaires pour la mettre en œuvre
d'unee façon fructueuse.
2°° Chacune des sciences particulières n'est rien autre chose
qu'unee unité technologique pouvant être concentrée le plus
ordinairementt dans un seul local (laboratoire, musée, bureau
d'information,, etc.) et embrassée assez facilement par un
individuu après un apprentissage plus ou moins prolongé.
IVV ENCYCLOPÉDIE SCIENTIFIQUE

Sii nous admettons cette dernière définition, nous sommes


obligéss de reconnaître que l'Anthropologie emprunte des
observationss à des techniques très diverses, manque par
conséquentt d'unité réelle, et mérite le reproche, que ses
détracteurss lui ont si souvent adressé, d'être un simple carre-
fourr de sciences.
Ill en serait ainsi, si toute unité scientifique équivalait
forcémentt aux unités technologiques que nous venons d'exa-
miner.. Mais, dans la pratique (et c'est toujours à ce point
dee vue que nous nous plaçons), nous voyons se former une
autree distribution des connaissances et des recherches scien-
tifiquess qui vient se superposer aux premières, ou, pour mieux
dire,, constituer comme des pôles d'aimantation qui dirigent
ett orientent toutes ces unités technologiques et font coopérer
leurss efforts. Ces centres attractifs sont de nature fort di-
verses.. Nous les trouvons autour de nous dans une Faculté
dee médecine, une Ecole de pharmacie-, un jardin zoologique
d'acclimatation,, et même tout simplement une usine impor-
tantee ; nous les trouvons encore dans une école vétérinaire,
quii se consacre à l'étude de quelques espèces animales domes-
tiquées,, et particulièrement utiles à l'homme ; l'étude même
d'unee seule espèce animale suffit, bien qu'à un moindre degré,
pourr constituer un centre de convergence analogue aux pré-
cédents..
Qu'onn ne s'imagine point, par ce dernier exemple, que je
tendee à présenter l'Anthropologie comme « l'histoire naturelle
dee l'homme ». Cette définition célèbre se rapproche de celle
quee je critiquais plus haut, parce qu'elle donne une exten-
sionn beaucoup trop considérable à l'Anthropologie. Celle-ci
comprendraitt non seulement l'étude de toutes les particula-
ritéss normales et pathologiques du corps humain, mais elle
devraitt noter toutes les manifestations de son activité phy-
siquee et mentale. Dès lors, un traité d'Algèbre ou de Trigo-
nométriee deviendrait un chapitre obligé de l'Anthropologie,
danss laquelle rentrerait aussi la Pathologie tout entière !
Cee serait le cas de dire que le ridicule nous guette.
Sii nous abandonnons ces vues à priori, et si nous exami-
nonss les centres d'études que j'ai énumérés plus haut, nous
nouss apercevons que tous ont été créés pour satisfaire des
besoinss importants de l'humanité civilisée dans sa lutte
pourr la vie : c'est peut-être au plus fondamental d'entre
eux,, celui de former des groupes vigoureux pour multiplier
notree puissance d'action, que répond l'Anthropologie.
BIBLIOTHEQUEE D ANTHROPOLOGIE V

L'humanitéé se divise en effet en une multitude de groupes,


races,, peuples, états, associations de toutes sortes, dont la
prospérité,, extrêmement variable, influe puissamment sur
lee bonheur des membres qui les constituent et dépend de causes
nombreusess qu'une science doit nous révéler : Quelle est
l'originee et l'évolution de ces groupes ? Quel est leur fonc-
tionnementt ? Quelle action exercent-ils sur la valeur de
leurss membres et quelle impulsion en reçoivent-ils ? Pourquoi
certainss groupes prospèrent-ils, tandis que d'autres souffrent,
végètentt et meurent ? Quelle hygiène préventive doit-on leur
appliquer,, quelle thérapeutique peut les guérir ? Autant de
problèmess redoutables dont la solution intéresse directe-
mentt les besoins collectifs de l'homme, et dont l'étude systé-
matiquee constitue le domaine propre de l'Anthropologie.
Celle-cii peut donc être définie maintenant d'une façon pré-
cisee : Elle est la science des groupes humains qui met en œuvre,
pourpour parvenir à la connaissance exacte et complète de leur na-
ture,ture, de leur fonctionnement et de leurs besoins, un certain
nombrenombre d'unités technologiques ayant pour but l'étude des phéno-
mènesmènes humains collectifs.
Lee plan que nous avons suivi dans l'organisation de cette
Bibliothèquee est le fidèle reflet des considérations précédentes.
Unee première partie comprend les ouvrages qui exposent
lala technologie des sciences anthropologiques. Celles-ci, ayant
pourr but l'étude de caractères collectifs, exigent une technique
ett des connaissances toutes spéciales qui les distinguent très
nettementt des autres sciences expérimentales. Leur nombre
n'aa rien d'absolu comme je l'ai démontré plus haut, et il
s'accroîtraa bien certainement avec les progrès de l'obser-
vation.. Certaines, comme la sociologie et l'économie politique,
ontt pris un tel développement qu'une bibliothèque spéciale
leurr a été consacrée. Peu importe à l'Anthropologie, qui
sauraa bien les adapter à ses fins spéciales dans l'étude des
groupess humains. Nous avons, par contre, consacré plusieurs
volumess à l'Anthropologie anatomo-physiologique ou soma-
tique,, et à l'étude comparée des mœurs et des coutumes que
l'onn appelle Ethnographie en France, en Belgique et en
Angleterre,, et Ethnologie en Allemagne et en Amérique ;
motss impropres d'ailleurs puisqu'ils désignent l'étude des
peuples,, alors qu'il s'agit surtout des civilisations. J'emploie-
raiss plus volontiers le terme d'Ethologie qui présente] le
doublee avantage d'être une traduction exacte et d'être en
VII ENCYCLOPÉDIE SCIENTIFIQUE

accordd avec la terminologie des autres sciences natu-


relles..
Anthropologiee anatomo-physiologique, anthropologie éco-
nomique,, anthropologie sociologique, anthropologie étholo-
gique,, étudient, classent et comparent chacune une caté-
goriee spéciale de phénomènes collectifs qui constituent le fac-
teurr déterminant d'un groupement humain.
Less variations des caractères somatiques déterminent les
groupess raciaux si différents entre lesquels se partage l'huma-
nitéé actuelle.
Less variations des caractères économiques ne déterminent
pass des groupements moins nombreux. Outre les grandes
divisionss qu'on peut tracer entre les peuples suivant l'état
économiquee qu'ils ont atteint, nous rencontrons toutes les
associationss industrielles et commerciales dont la genèse, la
compositionn et la valeur générale comparée relève des études
anthropologiques..
Less phénomènes sociaux proprement dits déterminent des
groupess familiaux et politiques sur l'importance desquels il
estt inutile d'insister.
Enfinn les phénomènes éthologiques sont des facteurs collec-
tifss non moins puissants puisque nous leur devons des forma-
tionss aussi importantes que les groupes linguistiques et les
groupess religieux ; puisque c'est encore eux qui déterminent
ett délimitent dans le champ de l'humanité ces zones d'expan-
sionn spéciales à une variété de mœurs ou bien à une habitude
artistiquee ou industrielle. On a pu quelquefois marquer leurs
frontières,, à une époque donnée, sur des cartes géographiques,
comme,, par exemple, l'habitude d'élever des dolmens, dont
onn a pu préciser la répartition avec une approximation suffi-
sante.. Ces zones représentent, par leurs rapports réciproques
ett leurs variations d'étendue, la marche de la civilisation géné-
ralee ; elles tracent, dans les populations du globe, autant de
groupess culturaux dont la composition et la valeur exigent
dee l'Anthropologie des enquêtes minutieuses.
L'étudee de tous ces groupes constitue aux sciences anthro-
pologiquess un domaine nettement délimité ; mais il ne
faudraitt pas croire que l'étude d'un groupe donné revienne
uniquementt à la science spécialement affectée au phéno-
mènee collectif qui a été le facteur déterminant de ce groupe.
C'estt là une erreur très répandue et contre laquelle je ne saurais
tropp m'élever. Pour connaître une race, je dois, il est vrai,
m'adresserr tout d'abord à l'Anthropologie somatique pour
BIBLIOTHEQUEE D ANTHROPOLOGIE Vil

laa définir et m'en révéler les caractères distinctifs. Mais elle


nee saurait à elle seule me donner une connaissance complète et
adéquatee de cette race. Pour découvrir sa valeur et ses apti-
tudes,, je dois observer tous les produits de son activité éco-
nomique,, sociale, linguistique, religieuse, artistique, etc., je
doiss m'aider par conséquent de toutes les autres sciences. Et,
dee même, s'il s'agit d'une classe sociale, d'un groupe de popu-
lationss vivant sous une forme familiale donnée, etc., je dois
d'abordd les définir et les observer avec la sociologie ; mais
puis-jee approfondir la valeur de ces groupes-si je néglige leurs
aptitudess physiques et les effets que la sélection naturelle et
socialee a pu exercer sur elles ; si je ne tiens point compte de
leurr natalité, de la force de leurs enfants ; si je néglige leur
prospéritéé économique et leut état éthologique général ? Je
nee pourrais plus avoir sur eux qu'une connaissance tronquée,
dontt je ne puis tirer aucune conclusion philosophique et pra-
tique..
Nouss devons donc préciser encore notre définition de
l'Anthropologiee : Elle est la science des groupes humains,
ett elle ne peut parvenir à la connaissance intégrale de leur
composition,, de leur fonctionnement et de leurs besoins que
sii elle met en œuvre toutes les unités technologiques qui ont
pourr objet l'étude des phénomènes humains collectifs.
C'estt à l'examen de ces groupes que la seconde partie de la
Bibliothèquee est consacrée.

Voir,, à la fin du volume, la liste des volumes publiés daiis


l'ENCYCLOPÉDIEE SCIENTIFIQUE.
TABLEE DES VOLUMES
ETT LISTE DES COLLABORATEURS

1.. Introduction générale à l'Etude de l'Anthropologie. — Défini-


tion.. — Méthodes. — Evolution historique. — Résultats phi-
losophiquess et pratiques.

PREMIÈREE PARTIE
Technologiee des Sciences anthropologiques.
1.. Anthropologie anatomique (crane-face tête sur le vivant), par
G.. PAUL BONCOUR, 400 pages, 41 figures.
2.. Le Cerveau et ses fonctions, étude comparée et génétique.
3.. Le Corps humain, anthropométrie, étude comparée et génétique.
4.. Anthropologie des organes du geste.
5.. Anthropologie esthétique.
6.. Anthropogéographie.
7.. Traité de linguistique.
8.. L'Ecriture, origines, formes typiques et évolution.
9.. La Musique, ses rythmes et ses instruments, origines et évolu-
tion..
10.. La Poésie et le Chant, origines et évolution.
11.. La Danse, la Mimique et la Représentation théâtrale, origines
ett évolution.
12.. Le Vêtement et la Parure, origine et évolution.
13.. L'Art primitif par G.-H. LUQUET, 272 pages, 142 figur s.
14.. L'Architecture, origine et évolution.
IUI)LIOTHÏ:QUEE D ANTHROPOLOGIE IX

15.. La Chasse, la Pêche et l'Agriculture, instruments, formes pri-


mitives,, évolution.
16.. L'Industrie de la Pierre, classification suivant ses formes et ses
périodes..
17.. L'Industrie des Métaux, cuivre, bronze, fer, etc., origines, formes
primitives,, évolution.
18.. Le Folk-Lore, Littérature orale et ethnographie traditionnelle, par
P.. SEBILLOT, 496 pages.

DEUXIÈMEE PARTIE
Anthropologiee des Groupes humains.

1.. Les Ancêtres zoologiques de l'homme. (Etude comparée du


groupee humain et des autres primates).
2.. Les Races humaines fossiles.
3.. Les Pygmées et les Nègres des Iles .(Négritos, Australiens, Pa-
pous,, etc.)
4.. Les Nègres d'Afrique.
5.. Les Amérindiens.
66 a. Les Races et les Peuples d'Asie. — Peuples sibériens et centre
asiatiquee ou paléasiatique et Tureo-Mongols.
66 b. Les Races et les Peuples d'Asie. — Peuples de l'Extrême-
Orient,, Japon, Chine, Indo-Chine, etc.
7.. Les Peuples de l'Inde.
8.. Les Peuples anciens et modernes de l'Asie antérieure.
9.. Les Blancs d'Afrique, par H. WEISGERBER, 420 pages.
10.. Les Peuples du Littoral méditerranéen de l'Europe. (Origine des
civilisationss classiques).
11.. Les peuples aryens, par ZABOROWSIU, 450 pages.
12.. Les Slaves et peuples apparentés.
13.. Les peuples nordiques. — Germains, Anglo-Saxons, Danois,
Scandinaves..
14.. Les Races et Peuples de France.
15.. Peuples guerriers et pacifiques, leur organisation et leurs apti-
tudes..
16.. Les Formes gouvernementales et les Groupes humains corres-
pondants,, étude anthropologique comparée de ces groupes.
XX ENCYCLOPÉDIE SC1E1N f .

17.. Les Types d'organisation économique et les Groupes humains


correspondants,, étude anthropologique comparée de ces groupes.
18.. Les Castes et les Classes sociales chez les Peuples sauvages et ci-
vilisés,, étude* anthropologique comparée de ces groupements.
19.. Les Associations professionnelles chez les Peuples sauvages et
civilisés,, origine et évolution ; caractères distinctifs de leurs
membress acquis dans la profession ou dus à la sélection sociale
20.. Les formes de la famille et les Groupes humains correspondants,
étudee anthropologique comparée de ces groupes.
21.. Les Asociaux sexuels. (Célibataires, Prostituées, Invertis, etc.),
étudee anthropologique comparée.
22.. Les Criminels, les Délinquants et les Immoraux, étude anthropo-
logiquee comparée.
23.. Les Peuples et autres Groupes humains inféconds, étude anthropo-
logiquee de ces groupements démographiques.
24.. Les monstres, étude anthropologique comparée et génétique.
25.. Les différents Mythes dans les croyances religieuses et les Groupes
humainss correspondants, étude anthropologique comparée.
26.. Les différents Cultes religieux et Exercices rituels dans l'huma-
manitéé et 1 es Groupes humains correspondants, étude anthro-
pologiquee comparée.
27.. Les Associations religieuses chez les peuples sauvages et civilisés,
originee et évolution.
28.. La Mystique.
29.. Le Paganisme contemporain chez les Peuples celto-latins, par
P.. SEBILLOT, 400 pages.
30.. Les Familles linguistiques et les Groupes ethniques correspon-
dants..
E N C Y C L O P É D I EE SCIENTIFIQUE
PUBLIÉSS SOUS LA DIRECTION

duu D' TOULOUSE


Secrétairee général : H. PlÉRON,
Secrétairee pour le» Sciences techniques : L. POTIN

BIBLIOTHÈQUEE D'ANTHROPOLOGIE
Directeurr : P. RIVET
Professeurr au Muséum d'histoire naturelle.

L'ARTT PRIMITIF
DUU MÊME AUTEUR

Aristotee et l'Université de Paris pendant le XIIIe siècle, Paris,


Leroux,, 1904.
Idéess générales de Psychologie, Paris, Alcait, 1(JO6.
Élémentss de Logique formelle, Paris, Alcan, 1909.
Less Dessins d'un enfant, Étude psychologique, Paris, Alcan,
1913..
Essaii d'une Logique systématique et simplifiée, Paris, Alcan,
1918..
Notionss de Logique formelle, Paris, Alcan, 1925.
L'Artt et la Religion des hommes fossiles, Paris, Masson, 1926.
L'Artt néo-calédonien, Paris, Institut d'Ethnologie, 1926.
Lee Dessin enfantin, Paris, Alcan, 1927.
L'ARTT PRIMITIF
PARR

G.-H.. LUQUET
Professeurr agrégé de philosophie
Docteurr es lettres

Avecc 142 figures dans le texte

PARISS
G.. DOIN & Gie, ÉDITEURS
8 ,, PLACE DE L'ODÉOK, 8

i 9 3oo
Touss droits réservés
Copyrightt by GASTON DOIN et O , ig3o
AA LA MÉMOIRE DE MON FILS

J E A NN

UNN BEAU ET BRAVE GARS


TUÉÉ PAR LA FOUDRE
DANSS SA 3I e ANNÉE
INTRODUCTIONN

Auu seuil de cette étude sur l'art primitif, il convient,


pourr délimiter nettement notre sujet, de préciser le sens
quee nous donnons aux deux mots art et primitif.
Dee l'immense domaine auquel est appliqué couramment
lee nom d'art, nous n'envisagerons qu'une partie restreinte
qu'onn pourrait appeler Y art des j ormes, c'est-à-dire l'acti-
vitéé humaine qui, au moyen de mouvements musculaires,
ordinairementt de la main, éventuellement munie d'instru-
mentss accessoires, apporte volontairement à une matière
préexistantee des modifications ayant pour résultat immé-
diatt d'en changer l'aspect visuel.
Danss ces modifications, on peut distinguer d'abord
deuxx grandes catégories. La première consiste à apporter
àà la matière dans sa totalité, en tant que volume à trois
dimensions,, des modifications qui en changent complète-
mentt la forme ou plus exactement lui en donnent une
alorss qu'elle était primitivement amorphe. Cette sorte de
créationn artistique peut employer des procédés techniques
variéss selon que la matière mise en œuvre est plastique
ouu au contraire plus ou moins dure : modelage pour
l'argile,, moulage pour le métal en fusion, sculpture pro-
prementt dite pour le bois, la pierre, l'ivoire, etc. ; nous
réunironss tous ces procédés, abstraction faite de leur
techniquee spéciale, sous le nom général de sculpture ou
LL ART PRIMITIF

ronde-bosse.. Dans une seconde sorte de création artis-


tique,, l'artiste ne modifie pas la forme totale de la ma-
tièree qu'il met en œuvre : il se borne à déposer sur sa
surfacee une forme qui n'y était pas auparavant. Ici en-
core,, les procédés techniques sont variables : incisions,
piquetage,, incrustations, lignes tracées avec une seule
couleurr ou avec plusieurs, etc., bref les diverses sortes de
gravure,, de peinture et de dessin. Nous les réunirons
toutess sous le nom commun de dessin correspondant à
unee forme à deux dimensions seulement par opposition à
laa sculpture à trois dimensions. Opposés dans leur défini-
tionn abstraite, le dessin et la sculpture se rejoignent par
dess transitions : cbamplevé, bas-relief, haut-relief.
AA un autre point de vue, l'art des formes peut être
subdiviséé selon la nature des formes auxquelles il donne
naissance.. Tantôt la forme créée n'a d'autre rôle que de
produiree un effet agréable à l'œil par l'aspect et le jeu de
seslignesconstitutives(etéventuellemenldee ses couleurs) ;
tantôtt l'artiste se propose de représenter quelque être ou
objett réel. On a dans ce dernier cas Vart figuré (je pré-
fèree ce nom aux termes synonymes d'art concret, physio-
plastiquee ou sensoriel employés par d'autres auteurs),
danss le premier cas ['art géométrique (appelé encore art
abstrait,, idéoplastique ou imaginatif). 11 existe d'ailleurs
entree ces deux types d'art opposés des formes mixtes : ou
bienn l'art géométrique, bien que ses lignes n'aient en
principee besoin de rien représenter, cherche à évoquer
d'unee façon plus ou moins lointaine l'image de quelque
êtree réel, par exemple animal ou plante ; ou bien inverse-
mentt l'art figuré vise, non à donner de son modèle une
reproductionn absolument fidèle, mais à en modifier plus
ouu moins l'aspect effectif pour le rendre plus agréable à
LL ART PRIMITIF O

l'œill : c'est la tendance idéaliste par opposition à la ten-


dancee réaliste.
Enfin,, on peut introduire dans l'art une dernière sub-
divisionn d'après la relation de la forme au support qui la
reçoit.. Tantôt la forme est exécutée uniquement pour
elle-même,, et le support n'a d'autre utilité que de lui
fournirr la matière indispensable, comme une feuille de
papierr pour nos dessins ou nos gravures ; tantôt au con-
traire,, bien que la forme qui lui est surajoutée lui apporte
unn embellissement, il avait déjà antérieurement à elle une
existencee indépendante et un rôle propre. Dans le pre-
mierr cas, l'art n'a d'autre fin que lui-même, aussi
l'appellerons-nouss art indépendant ; dans le second, où il
estt juxtaposé et, au moins en principe, subordonné à
l'utile,, c'est Y art dêcoratij ou ornemental.
Bienn entendu, une œuvre d'art donnée peut être envi-
sagéee à la fois à chacun des trois points de vue que nous
venonss de distinguer. Pour prendre des exemples con-
cretss dans l'art néo-calédonien, les flèches faîtières sont
dess sculptures à trois dimensions ; ce sont des œuvres
dd art décoratif puisqu'elles ont pour rôle d'embellir les
huttess ; mais les unes, représentant des personnages
humains,, appartiennent à l'art figuré ; les autres, ne re-
présentantt aucun être réel, se classent dans l'art géomé-
trique.. Les gravures sur bambous rentrent dans l'art dé
coratif;; les unes sont figurées, les autres géométriques.
Less gravures sur rochers sont des dessins les uns figurés,
less autres géométriques ; mais elles appartiennent à l'art
indépendant,, car elles ont été faites pour elles-mêmes et
nonn pour orner les pierres sur lesquelles elles ont été
tracéess et qui n'avaient d'autre rôle que de les recevoir.
Onn voit par cet exemple qu'il faut se garder de prendre
44 L'ART PRIMITIF

commee synonymes les expressions art décoratif et art


géométrique,, et de même d'opposer l'art figuré et l'art dé-
coratiff : l'art décoratif peut être aussi bien figuré que
géométrique,, l'art indépendant peut utiliser des motifs
géométriquess tout comme l'art ornemental.
Ayantt ainsi défini dans quel sens nous prendrons le
mott art et ses différentes espèces, indiquons ce que nous
entendonss par art primitif. Dans l'usage courant, ce
termee équivaut à art des primitifs. Le mot primitif a reçu
lui-mêmee deux significationsquin'ontde commun qu'une
intentionn péjorative. En ethnographie, il désigne d'une
façonn à peine moins vague les « sauvages » auxquels on
adjointt les hommes préhistoriques, c'est-à-dire tout sim-
plement,, si l'on fait abstraction du préjugé instinctif qui
nouss porte à considérer comme inférieures les civilisa-
tionss différentes des nôtres, des collectivités humaines
extrêmementt éloignées de nous dans l'espace ou dans le
temps.. La signification que le mot primitif a reçue dans
l'histoiree de l'art européen a déjà un peu plus d'objecti-
vité,, car il exprime non seulement cette appréciation que
less artistes auxquels on l'applique ne valaient pas leurs
successeurs,, mais en outre ce fait qu'ils les ont précédés.
Maiss même ici, primitif ne correspond qu'à une antério-
ritéé chronologique toute relative. Pour nous, l'expression
d'artt primitif doit avoir une signification positive, incon-
testable,, purement chronologique, s'appliquera une sorte
d'artt qui en fait apparaît avant les autres.
Orr il existe un domaine où peut se constater une suc-
cessionn chronologique de formes d'art, à savoir l'évolu-
tionn individuelle d'un civilisé actuel. N'importe lequel de
cess individus, qu'il acquière ou non par la suite un déve-
loppementt artistique spécial comme amateur ou profes-
LL ART PRIMITIF 5

sionnel,, se fait successivement du rôle du dessin figuré


deuxx conceptions non seulement diflérentes, mais même
opposées,, que nous caractérisons, comme on le verra plus
loin,, par les noms de réalisme intellectuel et de réalisme
visuel.visuel. Chez le civilisé actuel, le réalisme intellectuel est
laa forme primitive de l'art.
Onn ne saurait comparer à cette évolution nettement dé-
limitéee d'un individu actuel l'évolution de l'humanité au
courss des âges sur toute la surface du globe, qui ne re-
présentee évidemment pas une succession unique et con-
tinue.. Toutefois, dans des milieux plus ou moins étroite-
mentt circonscrits dans l'espace et dans le temps, et qui
constituentt jusqu'à un certain point des sortes de sys-
tèmess clos, on peut constater une succession des concep-
tionss de l'ait figuré semblable à celle qui se produit chez
unn civilisé contemporain au cours de son existence indi-
viduelle.. Divers auteurs, en particulier K. Lamprecht,
ontt cru pouvoir transférer au domaine de l'art et spécia-
lementt du dessin le principe biogénélicjue de Fr. Millier,
d'aprèss lequel révolution de l'individu répéterait celle de
sonn espèce, et qu'A.. Comte dans sa loi des trois étals a
égalementt appliqué à l'évolution mentale et en particulier
intellectuelle.. Il ne m'appartient pas d'apprécier au point
dee vue morphologique ce principe qui semble fortement
ébranléé par les progrès de la biologie (184) ; mais en ce
quii concerne son application à l'art figuré, voici selon
moii comment il faudrait l'entendre si l'on tient à le con-
server.. Il n'est pas sûr, il est même extrêmement impro-
bablee que l'art figuré existe dans tous les milieux humains
ett chez tous les individus des milieux qui le possèdent.
Maiss chez tous les individus où il existe, il semble que
sonn évolution suive un cours constant. Cette évolution
hh ART PRIMITIF

comprendd une série de phases successives. Tel individu


s'arrêtee plus tôt que tel autre dans la série, n'atteint pas
less stades les plus élevés, ne fût-ce que par une mort pré-
maturéee ; mais aucun individu n'arrive à un stade posté-
rieurr sans avoir passé par les stades antérieurs.
Celaa étant, puisque la conception de l'art figuré que se
faitt dans son enfance un civilisé actuel et le rendu des
formess qui en résulte représentent en un sens purement
objectiff et chronologique la forme primitive de l'art pour
cett individu, il est légitime d'appeler art primitif tout
art,, en quelque point de l'espace et du temps qu'il se
rencontre,, en tant que et dans la mesure où il présente
less mêmes caractères que le dessin enfantin, et inverse-
mentt de considérer le dessin enfantin comme un simple
cass particulier de l'art primitif ainsi défini.
Ill ne faudra donc pas s'étonner de nous voir réunir
souss le même concept d'art primitif des œuvres émanant
d'artistess aussi dissemblables que par exemple les Euro-
péenss des âges de la pierre, les céramistes grecs du
vi ee siècle avant J . - C , les peintres du Quattrocento, les
Mélanésiens,, les Peaux-Rouges, les Eskimo, etc... En
agissantt de la sorte, nous ne faisons que constater deux
faits.. Le premier est que ces artistes, quelles que soient par
ailleurss les différences de leurs milieux, et au simple point
dee vue artistique leur habileté technique, obéissent pour
l'artt figuré, qui seul nous occupe ici, à une conception
quii leur est commune et qui s'oppose à celle des civilisés
adultess actuels ; c'est de la même façon que le physicien
réunitt sous le même concept de corps bon conducteur de
l'électricitéé des corps aussi différents que le cuivre, l'eau
acidulée,, l'air humide. Le second fait sur lequel nous
nouss appuyons est que chez les civilisés actuels cette con-
LL ART PRIMITIF 7

ceptionn du dessin et plus généralement de l'art figuré,


caractérisantt l'âge enfantin, précède chronologiquement
laa conception que le même individu s'en fait à l'âge
adultee et est graduellement remplacée par elle au cours
dee son existence.
Less considérations qui précèdent s'appliquent exclusi-
vementt à l'art figuré. En effet, pour obtenir une défini-
tionn objective de l'art primitif, nous avons recouru au
dessinn spontané de l'enfant (nous prévenons une fois
pourr toutes que, pour abréger, nous appelons ainsi l'en-
fantt civilisé actuel). Or, spontanément l'enfant n'a aucun
goûtt pour l'art géométrique et est même généralement
réfractairee aux suggestions par lesquelles on cherche à l'y
intéresser.. De même, ce n'est que postérieurement à l'âge
proprementt enfantin et grâce à l'enseignement, souvent
mêmee à un enseignement spécialisé et pour des lins pro-
fessionnelles,, que nos contemporains s'appliquent à l'art
décoratif.. Le critère auquel nous avons fait appel pour
définirr l'art primitif est par conséquent inapplicable à
l'artt géométrique et à l'art ornemental. Nous nous bor-
nonss donc dans ce livre à l'étude de l'art figuré, qui au
surpluss fournit à lui seul une matière suffisamment ample.
Empruntantt nos matériaux non seulement à l'art indé-
pendant,, seul représenté chez l'enfant, mais aussi à l'art
décoratiff dans les cas où il utilise des motifs figurés, nous
chercheronss à dégager quelles sont les tendances qui
guidentt l'artiste primitif dans ses efforts pour atteindre le
butt de l'art figuré, à savoir pour créer des images d'êtres
ouu d'objets réels qu'il considère comme ressemblantes.
L'ARTT PRIMITIF

CHAPITREE PREMIEK
LAA GENÈSE DE L'ART FIGURÉ

L'artt n'existe que par les œuvres d'art, et les œuvres


d'artt n'existent que par les artistes. La naissance de l'art
figuréé pour un individu donné est la production volon-
tairee par cet individu de sa première œuvre figurée ; la
naissancee de l'art dans l'humanité se confond avec la pro-
ductionn de la première œuvre d'art figuré du plus ancien
artiste..
Avantt d'expliquer la naissance de l'art figuré, il faut
d'abordd constater à quel moment elle se produit. Cette
constatationn ne présente aucune difficulté pour le dessin
enfantinn : l'observation attentive d'un enfant permet d'as-
sisterr à l'exécution de son premier dessin figuré.
Enn ce qui concerne la naissance de l'art figuré dans
l'humanité,, la chronologie relative des œuvres d'art pré-
historiquess est aujourd hui établie avec une sûreté suffi-
sante.. On n'en connaît pas d'antérieures à l'Aurignacien
ancien,, et le caractère rudimentaire de celles-ci autorise à
penserr que s'il en a existé d'antérieures, soit en Europe,
soitt ailleurs, elles ne devaient pas être sensiblement diffé-
rentes.. Il paraît donc légitime de rapporter à cette époque
1 00 h ART PRIMITIF

laa naissance de l'art figuré dans l'humanité. En tout cas,


l'artt figuré existe depuis des siècles au Magdalénien, et
parr suite les œuvres magdaléniennes n'ont pas à être
prisess en considération dans.le problème des origines de
l'art..
Ill en est de même des documents ethnographiques
auxquelss on s'était adressé, faute de mieux, au début des
tentativess pour substituer aux spéculations a priori une
étudee objective de la question. En effet ces œuvres d'art,
telless que les voyageurs peuvent les recueillir et à l'occa-
sionn les voir exécuter, ont pour auteurs des adultes, qui
selonn toute vraisemblance en ont déjà exécuté d'autres, et
parr suite ne représentent pas les débuts de l'art pour ces
artistes.. A plus forte raison, elles ne représentent pas ces
débutss pour la population à laquelle ils appartiennent.
Mêmee quand on se trouve en présence d'œuvres remon-
tantt à une certaine antiquité, leur âge même simplement
relatiff est généralement indéterminable et il est possible,
sinonn probable, qu'elles aient été précédées par des œuvres
disparues..
Unee fois l'apparition de l'art figuré constatée soit chez
unn individu, soit dans l'humanité, se pose le problème de
saa genèse. Il peut s'énoncer ainsi : Comment un individu
n'ayantt encore jamais exécuté aucune œuvre figurée
a-t-ill pu être amené à en produire intentionnellement?
Cettee question est susceptible d'une réponse objective
pourr le dessin enfantin. En effet, l'observation directe de
l'enfantt permet non seulement d'assister à l'exécution de
sonn premier dessin figuré, mais encore de noter ce qui
s'estt produit dans la période de sa vie antérieure au
dessinn voulu et de constater comment celui-ci a pris nais-
sance..
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 1I

III est évidemment impossible d'obtenir des résultats


aussii solides pour la naissance de l'art figuré dans l'hu-
manité.. Le premier artiste échappe à notre observation ;
nouss ne disposons que d'un nombre restreint de produc-
tionss dont les auteurs nous sont inconnus, et il ne nous
estt pas possible, comme pour l'enfant, de reconstituer
leurss processus psychiques d'après des déclarations
expressess ou implicites. En outre, il n'est pas permis de
transférerr d'emblée par analogie au premier artiste hypo-
thétiquee les conclusions qui semblent légitimes pour un
enfantenfant actuel. Celui-ci en effet se trouve dans des condi-
tionss non seulement différentes, mais même opposées au
pointt de vue qui nous intéresse ; notamment il descend
d'unee longue suite d'ancêtres dont bon nombre au moins
ontt dessiné ; ses parents ont pu l'engager et lui montrer à
dessiner..
Maiss justement, par une chance inespérée, l'observa-
tionn des enfants actuels semble établir, comme nous le
verrons,, que l'hérédité, les suggestions et l'exemple
n'exercentt aucune influence appréciable et que chacun de
noss enfants recommence pour son compte l'invention du
dessinn figuré comme s'il était le premier dessinateur.
D'autree part, des faits précis viennent étayer la conjec-
turee que l'art figuré a pris naissance chez les Aurignaciens
dee la même façon que chez nos enfants. Nous sommes
doncc en droit, au moins à titre d'hypothèse de travail,
d'étudierr d'abord la naissance de l'art figuré dans le
dessinn enfantin et de rechercher ensuite si les préludes de
l'artt aurignacien ne semblent pas déceler une genèse ana-
logue..
Onn peut d'abord établir que chez un individu quel-
conque,, qu'il s'agisse du premier artiste ou d'un enfant
122 L ART PRIMITIF

dee nos jours, l'art figuré proprement dit ou exécution vo-


lontairee d'images d'objets réels a dû nécessairement êlre
précédéé par une phase dans laquelle des images ont bien
étéé produites, mais par hasard et non intentionnelle-
ment..
L'exécutionn intentionnelle d'une œuvre figurée, comme
toutt acte volontaire, suppose deux conditions, l'une
d'ordree affectif, à savoir le désir de l'exécuter, autrement
ditt l'attente d'un avantage et en définitive d'un plaisir ré-
sultantt directement ou indirectement de son exécution,
l'autree d'ordre intellectuel, à savoir (car il faut bien, pour
vouloir,, se représenter ce qu'on veut) l'idée même de
l'exécution,, la représentation de cet acte comme simple-
mentt possible.
Enn ce qui concerne d'abord l'élément affectif de l'exécu-
tionn d'une œuvre figurée, une fois qu'un individu en aura
exécutéé une seule, s'il trouve à cette exécution un avan-
tagee ou un plaisir quelconque, il sera naturellement amené
àà recommencer cette action agréable, pour renouveler le
plaisirr qu'elle provoque. Mais le plaisir résultant de la
productionn d'une œuvre, de quelque nature qu'il soit, est
forcémentt postérieur à l'exécution, tout au plus simul-
tanéé dans le cas où il résulte de la création même, mais
nee saurait être antérieur. L'individu qui n'a encore pro-
duitt aucune œuvre figurée ne peut soupçonner le plaisir
quee lui causera cette production et par suite ne peut avoir
l'inlentionn d'en produire. Il en résulte que la première
représentationn figurée ne peut avoir été une création in-
tentionnellee ; et la première exécution d'une œuvre figurée
proprementt dite ou voulue ne peut avoir été que la répé-
titionn volontaire d'une activité qui, si elle a produit en
faitt une irr.age, l'a produite par hasard et non de propos
GENÈSEE DE L'AHT FIGURÉ l3

délibéré.. C'est seulement à la suite de cette production


fortuite,, si elle s'est révélée avantageuse ou agréable, qu'a
puu prendre nai-sance le désir de la création intention-
nelle..
Onn aboutit à la même conclusion en envisageant, après
l'élémentt affectif de la production d'une œuvre figurée,
sonn élément intellectuel, autrement dit l'idée du pouvoir
dee créer des images, abstraction faite du plaisir résultant
dee l'exercice de cette faculté. En tant que l'exécution d'une
œuvree figurée consiste dans un travail qui produit un ré-
sultatt et plus précisément une modification dans la forme
d'unee matière préexistante, elle rentre dans la notion plus
généralee d'industrie. D'autre part, le résultat de cette in-
dustriee est de créer des images, c'est-à-dire des objets
facticess dont l'aspect ressemble à celui que présentent na-
turellementt certains êtres ou objets réels, dans leur en-
semblee ou par tel de leurs traits caractéristiques. L'exécu-
tionn d'une œuvre d'art réalise donc la synthèse des deux
idéess d industrie et de ressemblance, et l'exécution vo-
lontaire,, caractéristique de l'art proprement dit, n'est
possiblee que si cette synthèse est déjà effectuée dans l'es-
pritt de l'artiste, sous la forme de conscience du pouvoir
créateurr d'images.
Pluss spécialement, l'intention de faire un dessin ligure
supposee quelque chose de plus que l'idée de cette industrie
déterminéee qui consiste à tracer des lignes et l'idée de res-
semblance.. L'individu qui veut dessiner doit en outre se
savoirr ou se croire capable de tracer des traits qui fassent
unee image, avoir la conscience, légitime ou illusoire, de
posséderr ce que j'appellerai la faculté graphique.
Or,, l'observation de l'enfant établit qu'il n'acquiert la
consciencee de cette faculté qu'après avoir exécuté des
L'ARTT PRIMITIF

traitss qui lui semblent bien après coup ressembler à un


objett réel, faire une image, mais qu'il n'avait pas tracés
avecavec l'intention d'en faire une.
Dess éléments constitutifs de la conscience de la faculté
graphique,, le premier en date chez l'enfant semble être le
sentimentt de ressemblance ou reconnaissance. Dès que
l'enfantt sait prononcer quelques paroles, l'emploi d'un
mott pour désigner un objet indique chez lui le sentiment
dee la ressemblance de cet objet avec ceux auxquels il l'a
appliquéé antérieurement ou entendu appliquer par son
entouragee ; même à une date plus ancienne, ses gestes ou
sess mouvements de réaction donnent des indications ana-
logues.. Un peu plus compliquée que la reconnaissance
dess objets est la reconnaissance des images, qui se traduit
égalementt chez l'enfant par des paroles ou par des gestes.
Nouss appelons ici images des représentations d'objets
toutess faites, c'est-à-dire qui se présentent à l'enfant sans
qu'ill les ait vu exécuter et qui par suite ne se distinguent
pass pour lui, en ce qui concerne leur production, des
objetss naturels, mais qui en diffèrent objectivement en ce
quee la ressemblance n'est que partielle. Par exemple,
pourr prendre un cas où la ressemblance entre le simu-
lacree et l'objet réel est encore assez complète, un jouet
représentantt un mouton aura du mouton réel les trois di-
mensions,, la forme, la couleur, la toison laineuse ; mais
ill ne marche pas et ne bêle pas. Une image coloriée de
fleurfleur n'a que deux dimensions, elle n'a pas de parfum e
ill est impossible de la détacher du papier sur lequel elle
estt peinte pour la prendre à la main. Une gravure en noir
surr blanc, une photographie, sont dépourvues du carac-
tèree polychrome des objets qu'elles représentent.
Pourtant,, malgré cette réduction considérable du
GENÈSEE DE L'ART FIGUUÉ l5

nombree des caractères effectifs de l'objet représenté, l'en-


fantt arrive de très bonne heure à reconnaître dans des
imagess les objets qu'elles figurent. Il est d'ailleurs ma-
laiséé de déterminer la signification précise qu'il attribue
àà cette ressemblance et qui varie probablement avec les
sujetss considérés. On en peut déterminer les deux con-
ceptionss extrêmes. La première en date est une confusion
dee l'image avec un objet véritable. Par exemple la fille de
Pollockk voulait, à 16 mois, faire manger à la cuiller les
animauxx de son jouet de ménagerie, à 19 mois, donner à
mangerr aux chiens d'une image (180, p. 3g3 et 3gi).
Verss i3 mois, la même fillette (180, p. 3g3) et la nièce
dee miss Shinn (203, p. 73) flairent des images de fleurs.
Unee petite fille n'osait pas toucher au portrait du croque-
mitainee de peur d'être mordue (221, p. 75). Eva Stern,
àà 2 ans 1 mois, voyant une grande image de madone,
croitt qu'il faut habiller le petit Jésus nu et se fait donner
unee petite chemise qu'il faut, comme elle le demande
sérieusement,, poser sur l'enfant (211, p. 157). La nièce
dee miss Shinn, à 2 ans 3 mois, voyant sur une image un
agneauu retenu dans un buisson, chercha instinctivement
àà écarter la ronce qui l'enchaînait ; à 2 ans 10 mois, émue
dee pitié par une image qui représentait un aigle fondant
surr un jeune de chamois, elle plaça vivement sa main sur
l'imagee comme pour opposer une barrière à l'agresseur
(203.. p. io4).
Laa même réalité objective est également attribuée par
11 enfant à des images qui sont son œuvre propre, comme
lee prouvent les histoires qu'il brode souvent sur ces des-
sins.. Par exemple Jeanne (3 ans), ayant interprété un de
sess tracés comme des ballons, ajoute : « Le monsieur les
aa lâchés à la ville haute (Charleroi) ; ils se sont envolés à
]66 L ART PRIMITIF

laa ville basse. » Alfred (3 ans 1/2), ayant interprété son


tracéé commedes chaises, ajoute une histoire surabeaucoup
d'hommess qui sont venus s'asseoir sur toutes les chaises,
parcee que c'est une grande fête ». Margot (3 ans 1/2),
aprèss avoir interprété un contour grossièrement circu-
lairee comme une cage el l'avoir complétée par un point
noir,, ajoute : « C'est le petit pierrot qui est dans la cage.
C'estt mon frère qui l'a attrapé, le petit pierrot ; il fait pie,
piee » (193, p. 29 et pi. II). Le même fait se constate en-
coree plus tard, lorsqu'à la phase du dessin fortuit a suc-
cédéé celle du dessin intentionnel (133, § 35 ; 145,
p.. 3u-4o).
L'adultee au contraire a conscience que l'image n'est
pass un objet véritable, mais un simple simulacre sans
existencee réelle ; et il est infiniment probable que chaque
individu,, au moins chez les civilisés actuels, passe gra-
duellement,, et plus ou moins vite, de la première con-
ceptionn de la ressemblance à la seconde (214,
p.. 43I-436).
Laa seule différence entre des images toutes faites et des
objetss ou accidents naturels consistant en ce que les pre-
mièress sont des productions humaines, celte différence
n'existee pas pour quelqu'un qui ne les a pas vu exécuter.
Parr suite, les mêmes raisons psychiques qui déterminent
l'attributionn d'une interprétation figurée à des images
toutess faites peuvent également en faire attribuer une à
dess objets naturels. Ce fait se constate non seulement
chezz les adultes sauvages ou civilisés, mais aussi chez
l'enfant.. Pour nous borner à un exemple très net, une
filletlee belge de [\ ans, qui attribue à ses tracés fortuits
dess interprétations d'après l'analogie visuelle, s'amuse à
chercherr des ressemblances dans d'autres domaines que
GENÈSEE DE L'AHT FIGURÉ 17

celuii du dessin. Se trouvant en face d'une chute d'eau


qu'ellee regardait attentivement, elle s'écria soudain en
montrantt l'eau écumante qui s'élargissait en éventail :
«« Une barbe, une barbe, la barbe d'un vieux monsieur »
(193,, p. 29, Cécile).
Pourr l'âge auquel l'enfant commence à reconnaître des
imagess qu'il n'a pas vu exécuter, les observateurs sont
arrivéss à des résultats assez différents. Un petit garçon,
d'aprèss le témoignage de sa mère relaté par J. Sully
(214,, p. 429), reconnaissait dès l'âge de 10 mois des
imagess d'animaux en les appelant lui-même ouaou,
miaou,miaou, etc. La nièce de miss Shinn à 10 mois 1/2 sem-
blaitt reconnaître un chat dans une estampe grandeur na-
ture,, à 11 mois reconnaître comme fleurs les fleurs im-
priméess sur sa robe ; à 1 an 1 mois 20 jours, elle recon-
naîtt un coq sur une image et montre une image de cheval
enn voyant un cheval dehors (203, p. 72-78). D'après
Pollock,, sa fillette à i3 mois comprenait d'une façon gé-
néralee le sujet des images et disait oua oua devant les
figuresfigures d'animaux (180, p. 3o,3). Madeleine Cramaussel
reconnaîtt un cheval sur une image en couleurs à 1 an
22 mois 27 jours, des oiseaux dans des dessins noir sur
blancc à partir de 1 an 8 mois, divers objets dans le dessin
enn couleurs d'un appartement à 2 ans. Sa sœur Suzanne
reconnaîtt à 1 an 9 mois des objets usuels sur des gra-
vuress de prospectus (62, p. 39-42). Il est intéressant de
releverr que chez les divers enfants pour lesquels la com-
paraisonn est possible, la reconnaissance de leurs parents sur
dess photographies, c'est-à-dire la reconnaissance d'images
individuelles,, se manifeste au même âge que la reconnais
sancee d'images génériques, comme celles d'un cheval,
d'unn chat, d'un oiseau ou d'une table (62, p. 4o, note).
L'artt primitif. 2
188 L'ART PRIMITIF

Laa différence de ces résultats n'a rien de surprenant et


pouvaitt même être escomptée a priori, car ils dépendent
dee facteurs très variables (137, p. 699). En particulier,
dess enfants différents doivent être inégalement précoces
enn ce qui concerne le sens de l'analogie visuelle aussi bien
quee pour n'importe quelle faculté ; ainsi un exemple de
précocitéé presque invraisemblable pour la reconnaissance
d'imagess est fourni par la fillette de Baldwin, qui, dès
l'âgee de 5 mois, comprit le sens général d'une gravure re-
présentantt le chagrin d'un prisonnier 1 . On doit donc
see contenter, comme approximation générale, de déter-
minerr l'âge moyen où l'enfant est capable de reconnaître
danss une image très simple et sensiblement ressemblante
unn être ou objet familier. D'après l'ensemble des obser-
vationss recueillies, il semble que l'enfant possède cette
facultéé en moyenne vers le début de la deuxième année ;
enn tout cas, ce qui est pour nous l'essentiel, bien avant
l'âgee où il commence à dessiner.
L'enfantt capable de reconnaître des images toutes faites
l'estt également de reconnaître des dessins exécutés sous
sess yeux. Mais cette exécution dont il est témoin le meta
mêmee de constater chez autrui l'existence de la faculté
graphique.. En fait, j'ai constaté la connaissance de
cee pouvoir chez un enfant de 3 ans 2 mois. En effet,
àà cet âge, ma fille Simonne commence à me demander,
commee récompense quand elle a été sage, de lui dessiner
dess M petits bonshommes » et des « madames », preuve

11
5, p. 3o4. Il ajoute (p. 3o5, note 1) : « C'est là, je le re-
connais,, un cas extraordinairement précoce d'appréciation de
laa signification d'un dessin, mais je suis en mesure d'en préciser
less circonstances ».
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 19

qu'ellee m'en considère comme capable, probablement


parcee qu'elle m'avait déjà vu dessiner auparavant. En
toutt cas, en me voyant dessiner des bonshommes sur sa
demande,, elle constate chez moi l'existence du pouvoir de
créerr des images. Tout en s'intéressant beaucoup moins à
dess dessins différents que je lui fais pour varier (maisons,
animaux),, elle les reconnaît également, et par suite cons-
tatee l'existence chez moi de la faculté graphique non seu-
lementt pour les bonshommes, mais aussi pour divers
autress objets.
Pourr vouloir exécuter les traits qui, sans suffire à cons-
tituerr un dessin proprement dit, en sont du moins la
basee matérielle indispensable, l'enfant doit non seulement
êtree capable, mais encore se savoir capable de tracer des
traits.. Voici, semble-t-il, par quel processus il arrive à
prendree concience de ce pouvoir.
Tracerr des traits, c'est exécuter des mouvements de la
mainn qui, celle-ci étant munie d'accessoires variés,
laissentt sur un support tel qu'une feuille de papier des
tracess visibles qui n'y étaient pas auparavant. L'enfant
peutt arriver de lui-même à l'idée de tracé et à l'intention
d'enn faire. Les mouvements de la main s'expliquent
commee n'importe lequel de ceux que l'enfant exécute
sanss qu'ils répondent à une utilité. Il sont d'abord le
simplee effet de la dépense spontanée d'une surabondance
d'énergiee neuro-musculaire, et l'exercice de cette activité
s'accompagnee d'un plaisir qui incite l'enfant à la recom-
mencer.. D'autre part, l'enfant touche à tout. Parmi les
objetss qu'il manie, il en est qui, promenés sans intention
surr une surface claire, y laissent des traces ; même sans
tenirr d'objet étranger, des doigts insuffisamment propres
enn font autant. Ces traces une fois produites, l'enfant les
3 00 L ART PRIMITIF

voitt et constate qu'il en est l'auteur. Cette œuvre invo-


lontairee pourra sembler à un adulte insignifiante, sinon
fâcheusee ; mais pour l'enfant, elle est un produit de son
activité,, une manifestation de sa personnalité, une
création.. La conscience qu'il prend ainsi de posséder un
pouvoirr créateur le rehausse dans sa propre estime et est
laa source d'un plaisir qu'il cherche à renouveler en re-
commençantt ses tracés qui, d'abord fortuits, deviennent
alorss intentionnels. Un petit Californien, dans les derniers
moiss de sa troisième année, quand on lui donnait un
crayonn et du papier, s'en servait parfois pour tracer des
lignes,, mais préférait généralement faire des trous dans le
papierr avec la pointe du crayon (42, p. 44).
Unn tracé, même dépourvu d'intention représentative,
estt le résultat d'une action ; c'est donc une manifestation
dee l'activité de l'individu qui le trace et, à défaut de tout
autree rôle, il peut avoir celui d'être une affirmation plus
ouu moins machinale de sa personnalité, de sa « volonté
dee puissance ». Dans une foule de cas, l'onfant ou même
l'adultee qui trace des graffiti ne songe nullement à se
prouverr par ces dessins qu'il possède la faculté gra-
phiquee ; leur unique raison, d'ailleurs très obscure à sa
propree conscience, est de marquer de son sceau le mur
surr lequel il les fait. Dans une de mes observations, un
ensemblee de graffiti que plusieurs indices concordants :
apparitionn simultanée, proximité sur les murs du même
côtéé de la rue, hauteur sensiblement la même au-dessus
duu sol, nature spéciale de la matière colorante (craie rosé)
permettentt de considérer avec une quasi-certitude comme
tracéss à la file par un même enfant pendant qu'il mar-
chaitt le long de ces murs, comprenait deux petits traits
grossièrementt horizontaux, deux figures un peu plus com-
GENÈSBB DE L'AHT FIGURÉ 21

pliquéess ressemblant à une étoile irrégulière ou à un


trianglee aux côtés prolongés au delà de leur intersection
(danss le genre de la fig. 5) et enfin deux bonshommes.
Ill est extrêmement probable qu'ici les dessins figurés
commee les dessins géométriques n'ont été que des mani-
festationss machinales de la personnalité du dessinateur.
Souss mes yeux, dans le couloir d'un wagon de chemin
dee fer, un écolier d'une quinzaine d'années, après avoir
essuyéé avec ses doigts la buée de la vitre pour regarder
auu dehors, a ensuite imprimé sa main sur la buée qui
subsistaitt au-dessus de la partie nettoyée. 11 y a là mani-
festementt un geste purement machinal sans intention de
fairee un dessin.
Jee considère comme des faits du même ordre les signa-
turess qui se voient en maints endroits. Laissons de côté
celless qu'on peut remarquer sur les murs de monuments
célèbress ou dans les sites renommés et qu'il est permis de
rapporterr à la vanité, au désir de dire en quelque sorte à
ceuxx qui les visiteront ensuite: «J'étais là», les murs,
statues,, arbres ou rochers jouant ici malgré eux le rôle
dess registres destinés à recevoir les signatures des visi-
teurs.. Mais on trouve également des signatures dans les
lieuxx (en donnant à ce mot tous ses sens) les plus vul-
gaires,, où il n'y a guèreà se glorifier d'être allé. D'ailleurs,
elless se réduisent fréquemment à des initiales, qui ne
peuventt renseigner des tiers sur la personnalité de leurs
auteurs.. Bien plus, la signature de certains graffiti
semblee indiquer par sa teneur que le dessinateur a tenu
àà la fois à ce que son œuvre fût pourvue d'une signa-
turee et à ce que celle-ci ne trahît point son incognito
(136,, p. 207-208). Dans tous ces cas, il ne paraît pas
douteuxx que la signature n'est aucunement destinée à
2 22 L'ART PRIMITIF

autrui,, mais inscrite par son auteur uniquement pour sa


satisfactionn personnelle et, comme dirait un philosophe,
pourr « se poser », de la même façon que les indigènes de
Maree (îles Loyauté) placent des blocs de pierre dans l'en-
fourchuree de branches d'arbres, parfois assez haut au-
dessuss du sol, le long des sentiers dans la forêt, simple-
mentt en commémoration de leur passage (194, p. 242).
«« Aziyadé est âgée de 18 à 19 ans... Elle est paresseuse,
commee toutes les femmes élevées en Turquie ; cependant
ellee sait broder, faire de l'eau de rosé et écrire son nom.
Ellee l'écrit partout sur les murs, avec autant de sérieux
quee s'il s'agissait d'une opération d'importance, et épointe
touss mes crayons à ce travail » (130, p. 98).
Pourr un individu qui ne saurait ni écrire ni dessiner,
ill est d'autres moyens d'affirmer sa personnalité, quand
cee ne serait que les exploits des « enfants brise-tout », ter-
reurr des parents, qui relèvent souvent de cette explica-
tionn psychologique. Ces actions, variées dans leurs moda-
lités,, se ramènent toutes à laisser sur une matière préexis-
tantee la trace de l'intervention de leur auteur. J'y rattache,
danss le domaine spécial de l'activité graphique, de longues
ligness grossièrement horizontales que j'ai remarquées par-
foiss sur les murs, tracées avec un crayon, de la craie, du
charbon.dee la boue, un clou ou un caillou, vraisemblable-
mentt exécutées par des enfants pendant qu'ils longeaient
less murs et qui y laissaient une marque de leur passage,
ett aussi des traces que j'ai notées à diverses reprises dans
less rues de villes fort éloignées les unes des autres et qui
ontt été produites en posant sur le mur et traînant vertica-
lementt l'extrémité des doigts (sauf le pouce) enduits de
couleur.. Certaines sont dues, selon toute vraisemblance,
àà l'intention d'essuyer des doigts accidentellement tachés
GENÈSEE DE L ' A B T FIGUKÉ 23

sanss souiller un linge ou des vêtements appartenant à l'in-


dividuu et qu'il désire par suite conserver propres ; mais
cettee explication ne saurait être valable pour bon nombre
d'autres.. S'il s'agissait de traces laissées par des ouvriers,
commee peintres en bâtiments ou en voitures, essuyant sur
lee mur leurs doigts tachés par le manche du pinceau, le
nombree des doigts tachés devrait être variable, et la partie
extérieuree de l'ensemble des doigts tachés, plus éloignée
duu manche du pinceau, devrait être moins tachée que la
partiee centrale. Les traces devraient donc être en nombre
variablee et moins épaisses sur les côtés extérieurs, alors
quee les exemples que j'ai observés présentent générale-
mentt quatre traces parallèles également épaisses sur toute
leurr largeur. Il semble donc que les doigts avaient été non
accidentellementt tachés, mais plongés intentionnellement
danss la couleur, le pouce écarté pendant qu'on trempait
less autres doigts n'ayant pas pris de couleur et par suite
n'ayantt pu en déposer sur le mur, sur lequel d'ailleurs il
n'avaitt peut-être pas été appliqué avec les autres doigts.
Enfinn et surtout, dans un cas, ces traces, déposées sur une
portee qu'on venait de repeindre, ne pouvaient provenir de
professionnelss qui auraient ainsi gâté leur ouvrage, et
avaientt dû, d'après leur hauteur au-dessus du sol, être dé-
poséess par un enfant de taille minime et par suite vrai-
semblablementt très jeune. Ces traces ne me semblent donc
pouvoirr s'expliquer que comme des affirmations machi-
naless de la personnalité de leur auteur, la main étant chez
unn être humain, comme le bec chez les oiseaux, l'organe
essentiell de l'action.
Less différents faits que nous venons de mentionner pour
établirr la tendance de l'enfant (et même de l'adulte) à
affirmerr plus ou moins inconsciemment sa personnalité
2 44 L'AHT PRIMITIF

parr des manifestations variées, en particulier en traçant


dess traits, permettraient de rendre compte de la première
exécutionn de traits par un enfant, même dans le cas assu-
rémentt exceptionnel ou il n'en aurait jamais vu tracer par
personne.. Divers auteurs (174, p. i65 ; 221, p. 76-77)
ontt également considéré comme tenant une place impor-
tantee dans l'exécution des premiers tracés ou dessins de
l'enfantt le plaisir purement moteur de dépenser son acti-
vitéé musculaire, indépendamment des résultats produits
parr l'exercice de cette activité.
Unn enfant entièrement isolé pourrait donc, à lui tout
seul,, arriver à l'intention de tracer des lignes. Mais en
fait,, dans la plupart des cas, « l'activité de jeu » ou ten-
dancee innée à dépenser son activité uniquement pour la
dépenserr est orientée dans des directions déterminées par
l'imitationn des adultes. L'enfant imite spontanément les
activitéss des personnes de son entourage, en particulier
dess grandes personnes et de ses parents, et il appelle jeu
cettee imitation (jouer à la poupée, à la marchande, aux
visites,, à la cuisine, au cheval, au soldat, à la classe ; mes
enfantss aimaient à «jouer à la machine (à écrire) ». En
produisantt spontanément par imitation un certain mode
d'activité,-- l'enfant prend conscience qu'il en est capable
ett peut ensuite, s'il en a éprouvé quelque plaisir, l'exercer
dee nouveau, mais alors intentionnellement.
Parmii ces activités de l'adulte qui s'offrent à l'imitation
spontanéee de l'enfant, se trouve celle de tracer des traits,
carr il voit autour de lui dessiner ou tout au moins écrire.
Maa fille Simonne, presque immédiatement après le mo-
mentt où elle m'a demandé de lui faire des dessins (3 ans
22 mois), se met à tracer elle-même des lignes. Son frère
Jeann commence à tracer des traits à la plume vers 2 ans
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ î5

55 mois M pour écrire à sa grand'mère », comme il le


voyaitt faire à ses parents, et dans la suite pour imiter
saa sœur qu'il voyait constamment dessiner à côté de
lui..
Ill serait superflu d'insister ici sur le rôle joué dans la
viee de l'enfant par l'imitation ; mais pourquoi imite-t-il?
Parlerr d'un « instinct d'imitation », c'est donner un nom
auu fait, non l'expliquer. Comme l'enfant imite des activités
dee l'adulte dont il ignore souvent le but pour celui-ci et
qui,, en tout cas, n'ont pour lui-même aucune utilité (c'est
mêmee pour cette raison qu'il appelle jeu l'imitation qu'il
enn fait), l'imitation n'est pas pour lui un moyen, mais
unee fin ; il imite non pour faire la chose que fait une
autree personne, mais pour faire comme elle. D'où vient
cela?? On oublie trop souvent qu'il ne suffit pas de vou-
loirr imiter pour y réussir. La vue d'un mouvement quel-
conquee exécuté par autrui ne donne à celui qui le voit
aucunee indication sur la façon dont il doit s'y prendre
pourr l'exécuter lui-même, et ce n'est que dans des cas
toutt à fait exceptionnels qu'il y arrive d'emblée. Chacun
dee ses essais manques est pour lui une preuve d'infério-
ritéé ; par contre, lorsqu'il est parvenu à réussir, il se sent
l'égall de celui qu'il a imité. L'imitation chez l'enfant est,
croyons-nous,, une sorte de sport ; il imite surtout pour
fournirr à l'occasion aux autres et en tout cas & lui-même
laa preuve qu'il est aussi « capable » qu'eux.
Enn résumé, l'enfant commence par tracer des traits
parcee que leur exécution lui procure la constatation
pleinee de charme de posséder un pouvoir créateur, qui
l'égalee aux grandes personnes. (Cf. ci-dessous, p. l\t\).
A.. ce moment de sa vie où il prend plaisir à tracer des
ligness qui ne sont pour lui que des traits dépourvus de
a66 L'ART PRIMITIF

signification,, l'enfant a non seulement vu, mais même


regardéé des images dans des livres, journaux ou cata-
logues,, et il reconnaît ce que représentent au moins les
pluss simples de ces images; il sait donc qu'il y a des
tracéss qui ressemblent à quelque chose. Bien plus, au
moinss un certain nombre d'enfants ont vu dessiner de-
vantt eux, ou même pour eux ; certains de ces dessins ont
étéé exécutés à la demande expresse de l'enfant, et il a vu
quee le tracé fait sur sa demande d'un bonhomme, par
exemple,, représentait bien un bonhomme. Par consé-
quent,, au moins ces enfants ont constaté que l'adulte
possèdee la faculté graphique. Il semblerait naturel que la
constatalionn de ce pouvoir chez autrui l'amène à se l'attri-
buerr à lui-même.
Mais,, d'après les faits observés, les choses ne se passent
pass ainsi, et ce n'est pas en constatant la possession par
autruii de la faculté graphique que l'enfant arrive à se
l'attribuerr à lui-même. Il imite bien l'acte d'autrui qui
consistee à tracer des traits, mais tout en sachant que lui-
mêmee peut aussi en tracer, il n'a pas encore l'idée que des
traitss tracés par lai peuvent également produire des
images.. La preuve en est qu'il ne donne des lignes qu'il
aa tracées aucune interprétation figurée, ni spontanément,
nii même lorsqu'on essaie de provoquer cette interpréta-
tionn en lui demandant ce qu'elles signifient. « Rien »,
répondd une petite Californienne de 3 ans (Ruth S., 42,
p.. 33-34). Mon fils Jean, au même âge, me fait à plu-
sieurss reprises cette réponse équivalente : « Cela repré-
sentee des dessins. » Pourtant à cet âge il sait reconnaître
danss des gravures, par exemple sur des catalogues, les
objetss qu'elles représentent. On pourrait objecter que cet
exemplee n'est pas décisif, car il ne s'agit là que de la re-
GENÈSEE DE L ' A R T FIGURÉ 27

connaissancee d'images toutes faites, qui ne peuvent lui


révélerr l'existence de la faculté graphique chez autrui,
puisqu'ill ne les a pas vu exécuter; et je n'ai malheureu-
sementt pas noté expressément, bien que cela me semble
extrêmementt probable, si à la même époque il attribuait
unee signification aux dessins que sa sœur Simonne exécu-
taitt constamment sous ses yeux et dont l'imitation déter-
minaitt généralement ses propres tracés. Mais l'exemple
dee Simonne ne laisse place à aucun doute. Elle a bien,
commee nous le disions plus haut, l'idée que je possède
laa faculté graphique, puisqu'elle m'a vu dessiner les
bonshommess qu'elle m'avait demandés, et d'autre part
ellee se sait capable de tracer des traits puisque, presque
immédiatementt après, elle s'est mise à en tracer elle-
même.. Mais, si c'est par imitation qu'elle le fait, de mon
actee de dessiner elle n'imite que le geste et n'a pas l'idée
quee ce geste reproduit par elle pourra, chez elle comme
chezz moi, créer des images, car elle ne songe à donner
aucunee interprétation des traits qu'elle trace.
D'oùù vient qu'au début l'enfant ne s'attribue pas à lui-
mêmee la faculté graphique dont il a constaté l'existence
chezz l'adulte ? Il est probable qu'ici comme sur d'autres
points,, il existe entre les enfants des différences indivi-
duelles.. Pour peu qu'on y réfléchisse, le pouvoir de pro-
duire,, en déplaçant le crayon sur un papier, l'image d'un
objet,, c'est-à-dire d'après la conception enfantine, comme
nouss l'avons vu, un objet plus ou moins réel, est une
chosee qui tient du miracle, et si l'adulte la trouve natu-
relle,, c'est grâce à l'accoutumance, qui manque à l'enfant.
Ill est donc vraisemblable que nombre d'enfants ne songent
mêmee pas qu'ils puissent posséder cette faculté, tout en
enn constatant l'existence chez l'adulte, parce que de nom-
a 88 L'ART PRIMITIF

breusess expériences les ont amenés à considérer les


grandess personnes, et en particulier leurs parents,
commee des êtres infiniment plus puissants qu'eux-mêmes
ett en quelque sorte d'une essence supérieure.
D'autress enfants, plus audacieux, et encouragés par les
invitationss de leur entourage, essaient s'ils ne posséde-
raientt pas eux aussi la faculté graphique, de même qu'ils
ontt essayé s'ils n'étaient pas capables de tracer des lignes
commee les adultes. « J'ai gardé, écrit un psychologue,
unn souvenir très vif de la façon dont j'ai commencé à
dessinerr quand j'étais petit. Je me bornais à promener
monn crayon dans tous les sens sur le papier, dans l'espoir
quee quelque magie ferait sortir de ce griffonnage une
joliee image » (132, p. 8 0 ) l . Mais alors qu'après avoir
essayéé de tracer des lignes, ces enfants avaient constaté
qu'ilss pouvaient en tracer, quand ils essaient de faire des
imagess avec des lignes, l'expérience les force à s'en re-
connaîtree incapables. L'exemple de la fillette de Baldwin
estt caractéristique sur ce point. Son père lui demanda,
pendantt les six derniers mois de sa deuxième année et les
troiss premiers de la troisième, de dessiner des êtres
connuss (bonhomme, chat, cheval, etc.), soit de mé-

11
Le même procédé continue à être employé par des enfants
quii ont déjà fait des dessins intentionnels, par exemple Ruth W.
àà 2 ans 3 mois (42, p. 8). A près de 7 ans, Madeleine Cr., après
avoirr raturé divers tracés en disant : « Ça compte pas », explique
pourr l'une des ratures : « Ça compte pas parce que je sais pas
qu'est-cee que je veux faire d'abord ; alors, quand je vois que
çaa ressemble... » II faut, à ce que je crois, traduire : « Je com-
mencee par faire dea tracés sans intention représentative quand
aprèss coup je n'y trouve aucune ressemblance, ils ne comptent
pass ; quand j'en trouve une, cela fait un dessin, »
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 39
\\
tnoire,, soit d'après des croquis de caractère enfantin
exécutéss par lui-même. « Après ces diverses tenta-
tives,, dit-il, son visage exprimait le mécontentement
commee celui de l'enfant qui fait de vains efforts pour
parler.. Après avoir fait un dessin, ma fille cachait sa tête,
puiss me tendait le crayon en disant : Papa, fais un
homme.. Gela semblait indiquer qu'elle attendait davan-
tagee de mon habileté que de la sienne » (5, p. 77). Ainsi,
danss ces circonstances exceptionnellement favorables,
puisquee l'expérimentateur avait suggéré au sujet qu'il
étaitt capable de produire des images en lui demandant
d'unee façon répétée d'en exécuter, l'expérience oblige
celui-cii à constater que ce pouvoir lui fait défaut. On
conçoitt donc que les enfants auxquels a manqué cette
suggestionn ne songent pas à s'attribuer la faculté gra-
phique.. La seule différence est que, tandis que la fille de
Baldwinn reconnaît n'avoir pu faire les images qu'elle
essayaitt de faire, ils ne cherchent pas à en faire. Mes en-
fantss ne trouvaient dans leurs premiers tracés aucune
ressemblancee avec quelque objet réel, mais n'en étaient
nullementt gênés, parce qu'en les traçant ils n'avaient
pass le moindre soupçon que ces lignes pussent faire des
imagei..
Maiss il faut aller plus loin. Si ces enfants ne trouvent
pass dans leurs tracés la ressemblance avec des objets réels
quii leur révélerait leur faculté graphique, c'est précisé-
mentt parce qu'ils ne soupçonnent pas qu'ils possèdent
celtee faculté. Assurément, k première vue, il semble tout
naturell que Jean n'attribue aucune signification à ses
tracéss qui se réduisent alors à des barres et à des points,
quee Simonne n'en attribue pas davantage à ses tracés qui
sontt tout simplement d'abord des traits grossièrement rec-
3oo L'ART PRIMITIF

tiligness dirigés soit de haut en bas (fig. i), soit de


gauchee à droite (fig. 2), ensuite et beaucoup plus rare-
mentt des « gribouillis » ou traits pelotonnés (fig. S) 1 ;
onn s'étonnerait bien plutôt qu'ils aient pu trouver une
ressemblancee avec n'importe quel objet réel dans des
ligness aussi informes. Mais ce serait prêter abusivement
unee mentalité d'adulte à l'enfant. Lorsqu'à une date pos-
térieure,, il est parvenu à la conscience de sa faculté gra-
phique,, et en conséquence juge qu'un dessin exécuté par
luii peut et doit ressembler à quelque chose, il trouve
danss ses dessins des ressemblances parfois insaisissables à
unn adulte et en donne des interprétations qui ont toutes
less apparences, d'être sophistiques. La généralité de ce
faitt est établie par une foule d'exemples fournis à divers
auteurss par l'observation d'enfants variés, aussi bien dans
laa période du dessin intentionnel (145, § 16) qu'à la fin
dee la période préliminaire que nous étudions ici (145,
§§ 60 et 61). Même quand aucune interprétation précise ne
see présente à l'esprit de l'enfant, il dit que ses dessins re-
présententt « des choses » (193, p. 235. J'ai moi-même
observéé un cas semblable). Si donc l'enfant qui, comme
nouss le verrons, attribue plus tard une interprétation
mêmee à des figures informes, n'en donne pas encoTe à
sess tracés au moment que nous envisageons ici, c'est,
semble-t-il,, qu'il n'a pas encore l'idée qu'il est capable
dee créer des images.
Enn résumé, la conscience par l'enfant de sa faculté
graphique,, et a fortiori l'usage intentionnel de cette fa-
culté,, n'a comme conditions suffisantes ni le sens de la

11
C'est sous les mêmes formes que se présentent les premiers
tracéss des enfants les plus variés ; cf. par exemple, 42, p. 72-73.
GENÈSEE DE L'AKT FIGURÉ 3ll

ressemblancee en général, ni même plus spécialement la


fatuitéé de la reconnaissance d'images, ni la constatation
chtzz autrui de la faculté graphique, même jointe à la
consciencee de son propre pouvoir de tracer des traits et à
l'esercicee intentionnel de ce pouvoir.
Enn ce qui concerne maintenant les origines de l'art

3;t3;t

Figg i-lt. — Premiers tracés de Simonne L. Echelle ; 1/2. Tous ces tracés
ontt été exécutés sans intention représentative. Les trois premiers n'ont
reçuu après coup aucune interprétation (p. 3o) ; le dernier a été inter-
prétéé comme un papillon (p. 33).

danss l'humanité, les Aurignaciens, au moment où ils ont


produitt leurs premières œuvres figurées, possédaient bien
less deux idées d'industrie et de ressemblance (144, p. 5-6).
Maiss peu nous importe, puisque, comme vient de nous
lee prouver l'exemple de l'enfant, ces idées sont bien les
conditionss nécessaires, mais non suffisantes de la cons-
ciencee de posséder le pouvoir créateur d'images, sans
3 22 LART PRIMITIF

laquellee l'intention d'en créer est impossible. Bien pku,


alorss que l'enfant peut constater chez d'autres individis
l'existencee de la faculté graphique, sans d'ailleurs être
amenéé par là à se l'attribuer à lui-même, il manquait au
premierr artiste, précisément parce qu'il était le premier,
l'expériencee de la création artistique par autrui. Donc,
pourr lui plus encore que pour l'enfant, l'existence de son
pouvoirr créateur d'images n'a pu lui être révélée que par
quelquee circonstance fortuite où il a produit en fait une
imagee sans intention d'en créer.
Enn résumé, l'art figuré, consistant à produire exprès
unee image qui veut être ressemblante, peut se définir un
réalismee intentionnel. Celui-ci implique dans l'esprit de
l'artiste,, comme conditions nécessaires, la conscience de sa
facultéé créatrice d'images et le désir de l'exercer. Ces deux
facteurss psychiques ne peuvent avoir d'autre source qu'un
réalismee fortuit. Par conséquent, la genèse de l'art figuré
consisteconsiste dans le passage d'un réalisme fortuit à un ré
lismelisme intentionnel. Nous devons donc maintenant deman-
derr aux faits, d'abord comment ce passage s'effectue chez
l'enfant,, ensuite si l'on ne retrouve pas au début de 1 âge
duu Renne des indices d'un processus analogue.
Sii les traits tracés par l'enfant sans intention de p r o -
duiree des images présentent quelque possibilité d'applica-
tionn à sa fantaisie interprétative, il pourra les considérer
commee des images et dès lors, de même qu'il attribuait
laa faculté graphique à d'autres personnes en voyant leurs
tracéss produire des images, il se l'attribuera à lui-même
enn voyant que ses tracés en ont produit. L'interprétation
quii lui révèle l'existence de sa faculté graphique ne se
produitt pas, comme nous l'avons vu, pour les premiers
tracés,, moins, croyons-nous, à cause de leur caractère
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 33

rudimentairee et informe que parce que l'enfant, ne se


croyantt pas encore capable de produire des images par
less lignes qu'il trace, ne songe pas à y chercher des
ressemblances.. Mais un jour, une vague analogie d'aspect
quii s'est produite par hasard lui fait voir dans un
tracéé l'image d'un objet réel, à preuve qu'il énonce
l'interprétationn qu'il donne de ce tracé; et c'est alors qu'il
prendd conscience de sa faculté graphique. La nièce de
misss Shinn, à 2 ans 3 mois, s'écrie en montrant un de
sess griffonnages tracés sans but : « Oh ! j'ai fait une
souriss ! « (42, p. 5). Au même âge, la fille de Schreuder,
regardantt attentivement une figure obtenue en laissant
vagabonderr son crayon, s'écria : « Un parapluie ! » (199,
p.. 218 et pi. I, fig. 2). La fille de Lombardo-Radice, à
22 ans 1/2, griffonnant par hasard, fit un contour
ferméé auquel elle trouva « avec étonnement » une certaine
ressemblancee avec un oiseau ; elle baptisa alors son griffon-
nagee de ce nom (129, p. 25 et fig. 1 ; 145, fig. 70). Mon fils
Jean,, à 3 ans, ayant tracé trois lignes droites qui se coupent
approximativementt en leur milieu au même point (fig. 5),
déclaree que c'est un moulin à vent. Simonne, à 3 ans
33 mois, soit un mois après le début de ses tracés, inter-
prètee comme un papillon un tracé qui présente en effet for-
tuitementt une certaine analogie d'aspect avec un papillon
(fig.. 4)- Un garçon belge de 3 ans 1/2, ayant tracé une
sériee de traits embrouillés, parmi lesquels l'un d'eux plus
longg attira son attention, eut bientôt fait de l'identifier à
unee queue et par une association simple dénomma l'en-
semblee des traits incohérents « un gros chien avec sa
grandee queue » (193, p. 3o).
D'autress auteurs ont également relevé qu'à partir d'un
certainn moment l'enfant donne des noms à ses griffon-
344 L'ART PRIMITIF

nagess exécutés sans intention représentative, et que, dans


nombree de cas, ses interprétations résultent de ce qu'il a
trouvéé dans ses tracés une analogie de forme plus ou
moinss vague et plus ou moins partielle avec les objets
dontt il leur donne le nom, en un mot une ressemblance.
Ainsii selon Rouma : « Pendant toute la première partie
duu stade préliminaire, l'enfant ne comprend pas le dessin :
ill n'a aucune idée de sa valeur de représentation visuelle.
Ill fait des traits pour jouer, et s'il appelle parfois ses pro-
ductionss un beau dessin, c'est une appellation acquise de
l'entourage,, mais qui n'éveille en l'enfant aucune idée
correspondantt à une représentation... L'enfant ne com-
prendd pas encore le rapport visuel qu'il y a entre un
objett et sa représentation graphique. Il imite gauche-
mentt sans se rendre compte du pourquoi, tout comme le
perroquett imite la parole sans la comprendre... (Mais) à
unn certain moment, l'enfant, regardant les traits incohé-
rentss de ses gribouillages, découvre dans des ensembles
ouu dans des parties des ressemblances avec les choses »
(193,, p. 23, 25, 27). Baldwin a été amené à des con-
clusionss analogues par des expériences faites sur sa fille,
d'ailleurss avec un but différent, puisqu'il se proposait
«« d'étudier le développement du contrôle volontaire sur
less muscles de la main et des doigts », avec cette seule
différencee que, par le fait même des expériences aux-
quelless elle avait été soumise, cette enfant était déjà in-
clinéee à l'idée que ses tracés devaient reproduire l'image
d'objetss déterminés. Jusqu'au milieu du vingt-septième
moiss « il n'y avait aucun lien entre une image mentale et
less mouvements qui devaient la reproduire. Le dessin
nn était qu'une image vague et lâche des mouvements du
maîtree et non le tracé d'une image mentale... (Au con-
Fig.. 5-i/i. — Premiers tracés de Jean L. Echelle : 1/2. Dessins exécutés
sanss intention représentative et interprétés après coup (p. 33). 011 est
interprétéé comme un moulin à vent, o35 comme un fouet avec sa ficelle
(unn dessin semblable reçoit l'interprétation pique-feu), o38 comme une
montagnee avec quatre hommes (les quatre points) dessus, okh est inter-
prétéé d'abord comme une table, puis comme un aéroplane (p. 3<j). 020,
interprétéé comme un oiseau, est complété par le bec, l'œil et les pattes;
029,, interprété comme un ours, est complété par un œil, 0/10, interprété
commee un arceau de croquet, est complété par les supports; 049, inter-
prétéé comme une cane à laquelle est attaché un ballon, est complété par
unn œuf (p. 4i). o^i et o'(8 sont des dessins voulus d'arceau provoqués
parr un tracé fortuit immédiatement antérieur (o/io et un dessin sem-
blable)) interprété comme un arceau (p. 4ii).
366 L'ART PRIMITIF

traire,, à partir de cette date) était apparue l'idée de l'imi-


tationn graphique, j'entends le sentiment d'un rapport
entree l'image mentale et les mouvements du crayon qui
devaientt la reproduire. Dans ses précédents dessins on
avaitt déjà la vue de l'image et le mouvement de la main,
laa sensation visuelle et la sensation musculaire ; mais il
n'yy avait point de rapport entre eux... L'enfant réalisait
doncdonc pour la première fois l'imitation graphique d'une
imageimage mentale » (5, p. 75-80. — Les italiques sont dan
lee texte).
Less observations concordantes que nous venons de
mentionnerr établissent qu'à un'moment donné, l'inter-
prétationn que l'enfant donne de ses lignes jetées au hasard
aa pour cause la constatation d'une ressemblance de leur
aspectt avec celui de l'objet dont il leur donne le nom et
quee pour cette raison j'ai appelé objet dénominatif. Selon
Rouma,, avant d'être dictée par cette ressemblance, l'in-
terprétationn donnée par l'enfant à ses traits exécutés sans
intentionn représentative serait déterminée par des facteurs
différents,, à savoir l'imitation et la suggestion. J'ai exposé
ailleurss (137, p. 711-715) mes objections à cette théorie ;
maiss peu importe ici, car seule la constatation d'une res-
semblancee créée par lui peut révéler à l'enfant qui n'en a
pass encore conscience sa faculté graphique. Cette révéla-
tionn lui cause une joie non équivoque. Baldwin, après
avoirr signalé le mécontentement de sa fille à la suite de
sess premiers essais de dessin, y oppose la « satisfaction
quee lui donne la ressemblance » de son premier bon-
hommee grossièrement ressemblant (5, p. 79). Le cas de
cett enfant est, il est vrai, exceptionnel, puisque les expé-
riencess effectuées sur elle par son père l'inclinaient à
chercherr une ressemblance dans ses tracés ; il n'en est pas
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 3"]

moinss vrai qu'elle éprouve de la joie à constater qu'elle


arrivee à obtenir cette ressemblance après y avoir échoué
antérieurement.. Du reste, la même satisfaction a été
observéee chez divers enfants non soumis à des expériences
analogues,, lorsqu'ils constatent qu'ils ont créé une res-
semblancee par des tracés qui ne se proposaient pas d'en
produire.. « L'enfant... éprouve généralement une grande
joiee (à découvrir dans ses tracés des ressemblances) et
s'amusee à ce jeu nouveau de découvertes... Un garçon
belgee de 4 ans cherche dans les traits incohérents obtenus
parr hasard une ressemblance avec un objet déterminé ;
lorsqu'ill l'a trouvée, il l'annonce à haute voix » (193,
p.. 27 et 3o, Olivier). « Un petit bonhomme de 2 ans 1/2,
qui,, barbouillant au hasard son papier, avait tracé une
espècee de ligne en spirale, s'écria dans un ravissement
dee joie : « Pff, Pff », c'est-à-dire « de la fumée »
(214,, p. 462).
Danss ces exemples, l'enfant se borne à manifester sa
joie,, il ne l'explique pas. Peut-être, en l'interrogeant sur
lee champ, serait-il possible, et l'expérience vaudrait d'être
tentée,, d'arriver à lui en faire énoncer expressément la
cause.. En tout cas, j'ai pu recueillir de cet état affectif
unee analyse donnée par un enfant et d'autant plus inté
ressantee que cet enfant (Madeleine Cr.) étant relativement
assezz âgé (G ans 8 mois), le sentiment devait, par un
effett constant de l'habitude émotive, avoir perdu une
bonnee partie de son intensité initiale ; pourtant son essence
s'étaitt conservée ; et cette fillette, en même temps qu'elle
couvree de dessins une feuille de papier, fait la réflexion
suivantee : « C'est amusant de crayonner : on peut faire
toutt ce qu'on veut. »
Unn témoignage analogue sur la nature du plaisir causé
388 L'ART PRIMITIF

àà l'enfant par l'expérience de sa faculté graphique nous


estt fourni par Eckermann. Il raconte que dans son en-
fance,, voyant sur un paquet de tabac l'image d'un cheval,
ill éprouva une impulsion irrésistible à la copier. « Quand
j'euss fini, je trouvai ma copie tout à fait ressemblante, et
j'enn ressentis un bonheur inconnu jusqu'alors... Je passai
laa nuit dans une exaltation joyeuse ; à demi éveillé, je
pensaiss continuellement à mon cheval dessiné et j'atten-
daiss le matin avec impatience pour le remettre devant mes
yeuxx et recommencer à m'en réjouir. La tendance ainsi
éveilléee à reproduire ce que je voyais ne m'a plus jamais
quitté»» (77, p. I 3 - I 4 ) .
C'est,, il est vrai, à l'occasion de dessins intentionnels
quee les deux dessinateurs dont nous venons de rappeler
lee témoignage ont ressenti le plaisir causé par l'expérience
dee posséder la faculté graphique. Mais il est vraisemblable
quee ce plaisir était de même nature lorsque l'enfant l'a
éprouvéé pour la première fois en constatant qu'il a pro-
duitt une ressemblance par des traits exécutés sans inten-
tionn représentative. Le « ravissement de joie » dont parle
J.. Sully dans le cas rappelé ci-dessus peut donc être con-
sidéréé comme l'équivalent de l'anch' io son pittore.
Mais,, pour le moment, cette joie est forcément éphé-
mère.. Comme c'est fortuitement que la ressemblance
s'étaitt produite dans le tracé où l'enfant l'a aperçue, cet
heureuxx hasard ne se renouvelle pas immédiatement, et
l'enfantt est obligé de reconnaître qu'il n'est encore ca-
pablee que par accident de faire un tracé qui ressemble à
quelquee chose. Aussi continue-t-il pendant plus ou moins
longtempss à faire des traits qui ne sont ni suivis d'une in-
terprétationn figurée ni à plus forte raison provoqués par
unee intention représentative.
GENÈSEE DE L ' A R T FIGURÉ 3û

Maiss dans ces tracés se produisent à nouveau de temps


enn temps des ressemblances accidentelles, et l'en/ant les
remarquee d'autant plus que maintenant il s'attend à les
voirr se produire au moins par hasard et, selon l'expres-
sionn rappelée plus haut d'un psychologue évoquant ses
souvenirss d'enfance, par une sorte de magie. Il arrive de
laa sorte à concevoir que ses tracés peuvent, non plus seu-
lementt à titre exceptionnel, mais d'une façon constante,
ressemblerr à quelque chose.
Parr là l'enfant est amené à appliquer à chacun de ses
tracéss une interprétation (fig. 5-i4). Celle-ci est pour le
momentt extrêmement flottante, pour deux raisons. D'une
part,, elle est privée de l'appui que lui fournira plus tard le
souvenirr de l'intention, puisque le tracé a été exécuté sans
intentionn représentative. En outre, comme ce tracé dans
saa matérialité ne ressemble guère plus à ceci qu'à cela,
l'enfantt décidé à lui trouver une signification pourra y
voirr la représentation d'à peu près n'importe quel objet.
L'inlerprétationn consistant à appliquer au tracé le nom
d'unee chose dont l'idée est présente à ce moment dans
l'espritt de l'enfant pour une raison quelconque, il arrive
fréquemmentt qu'un même tracé reçoive successivement
plusieurss interprétations différentes, par exemple, chez
dess enfants belges de 3 ans à 3 ans 1/2, un chien et « des
méchantss hommes », une balançoire et un lit, des ballons
ett des poissons dans l'eau d'un canal, « beaucoup de sol-
datss » et des moutons dans la prairie (193, p. 25 et 29
ett pi. II, Jeanne), ou chez mon fds Jean, à 3 ans 8 mois,
unee table et un aéroplane (fig. 12).
AA ce moment, l'enfant n'est pas encore en possession
dee la faculté graphique tout entière. Il est bien capable de
produiree d'une façon non plus sporadique, mais cons-
L'ARTT PRIMITIF

tante,, des tracés qui, au moins à ses yeux, ressemblent à


quelquee chose, mais jusqu'ici il n'a encore fait aucun
dessinn dont l'exécution ait été précédée et provoquée par
l'intentionn de figurer un objet déterminé. Le passage de
lala production d'images involontaires à l'exécution d'images
préméditéess se fait par l'intermédiaire de dessins en partie
involontairess et en partie voulus.
Laa ressemblance fortuite entre le tracé et l'objet dont
l'enfantt lui applique après coup le nom est des plus gros-
sières,, et l'enfant, en même temps qu'il l'aperçoit, en re-
connaîtt l'imperfection. Il est alors tout naturellement
amenéé à vouloir perfectionner cette ressemblance. La
fillettee de Lombardo-Radice, à 2 ans 1/2, après avoir vu un
oiseauu dans le tracé qu'elle vient de faire, y rajoute deux
petitss traits verticaux pour faire les pattes (129, p. 25 et
fig.fig. 1 ; 145, fig. 70). Le petit Anglais de 2 ans 1/2 dont
ill a déjà été question pour son ravissement de joie en re-
connaissantt de la fumée dans une ligne spiralée qu'il ve-
naitt de tracer « se hâta d'en tracer quelques-unes de plus
danss l'intention de marquer encore davantage ce qu'il
voulaitt représenter » (214, p. 462). Une petite Belge de
33 ans 1/2 complète un tracé qu'elle a interprété comme
unee cage par un point figurant le moineau qu'elle con-
tientt (193, p. 29 et pi. II, Margot). Un petit Belge
dee 4 ans déjà cité, qui prenait plaisir à chercher
danss ses tracés une ressemblance avec quelque objet dé-
terminé,, « quand il l'a trouvée, l'annonce à haute voix et
s'efforcee de compléter la ressemblance obtenue en accen-
tuantt certains traits, puis en ajoutant de nouveaux traits »
(193,, p. 3o, Olivier). Mon fils Jean m'a fourni des
exempless analogues. Après avoir, à 3 ans 6 mois, inter-
prétéé un tracé comme un oiseau, il y rajoute le bec, l'œil
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ l\\

ett les pattes (Qg. 6) ; à 3 ans 7 mois i5 jours, un tracé


interprétéé comme un ours est complété par la représenta-
tionn de l'œil (fig. 7) ; à 3 ans 8 mois, après avoir vu
danss le tracé de la fig. 10 un arceau de jeu de croquet (de
salon,, comme il en a un parmi ses jouets), il le complète
parr l'indication des supports qui servent à lui donner du
pied.. A 3 ans 10 mois, après m'avoir donné du tracé de
lala fig. ik celte interprétation : « une cane qui veut
attraperr un ballon qui est attaché aprôs son bec »,
ill ajoute : « Viens voir, je vais faire quelque chose qui va
tee faire rire » ; il dessine le petit contour du bas et dit :
«« Elle a fait un œuf. »
L'accentuationn de la ressemblance se bornant, dans les
cass de ce genre, à quelques additions très simples, le ré-
sultatt obtenu est en gros satisfaisant. L'enfant peut donc
s'attribuerr légitimement la faculté d'accentuer volontaire-
mentt une ressemblance fortuite. Il en renouvelle de plus
enn plus intentionnellement l'exercice, et le succès do ces
tentativess répétées le confirme dans la conscience de la
posséder..
L'exécutionn de ces figures où une image fortuite est en-
suitee perfectionnée intentionnellement comprend deux
moments.. Dans le second, la ressemblance complémen-
tairee est voulue ; mais dans le premier, la ressemblance
initialee n'a pas été produite exprès. Par suite, la figure
danss son ensemble n'est pas un dessin proprement dit,
celui-cii étant caractérisé par l'intention préalable de pro-
duiree une image, et non pas seulement l'image d'un objet
quelconque,, mais de tel objet déterminé. L'enfant n'est
doncc pas en droit, à la rigueur, de s'attribuer la faculté
graphiquee totale, et en fait, il ne se considère pas encore
commee capable de créer d'emblée une image, car ses
LL ART PRIMITIF

tracés,, même interprétés après coup, même complétés par


dess détails correspondant à l'interprétation surajoutée,
continuentt à ne pas être exécutés avec l'intention préalable
dee figurer tel ou tel objet. Mais comme la ressemblance
initiale,, bien qu'involontaire, n'était pas moins son œuvre
quee la ressemblance complémentaire préméditée, il peut
see figurer qu'il est capable de produire volontairement
laa première comme la seconde, ou tout au moins se de-
manderr et essayer s'il n'en serait point capable. L'expé-
riencee pourra réussir ou ne pas réussir ; mais elle ne
peutt réussir sans avoir été tentée, et l'enfant ne la ten-
teraitt pas s'il n'en considérait le succès comme possible.
Laa réussite de sa tentative est d'ailleurs favorisée par
less circonstances. Par suite de la tendance que nous avons
appeléee automatisme graphique immédiat (145, § 12),
quandd il essaie de faire un dessin prémédité, c'est d'ordi-
nairee pour figurer le même objet qu'il vient de représenter
sanss le faire exprès. Par exemple, à deux reprises sépa-
réess par un intervalle de dix jours, Jean, à 3 ans 8 mois,
immédiatementt après avoir tracé un trait courbe et l'avoir
interprétéé comme un arceau de croquet, dessine un arceau
dee croquet vouiu (fig. 10, 11, 13). Les deux tracés étant exé-
cutéss sans intervalle, l'enfant se trouve dans les conditions
less plus favorables pour que le second soit assez analogue au
premierr et par suite à peu près aussi ressemblant. Au
reste,, le sentiment subjectif de la ressemblance n'est qu'en
partiee déterminé par la ressemblance effective, et le sou-
venirr de l'intention peut suffire à donner au dessinateur
laa conviction que son dessin est ressemblant.
Dèss lors, le tracé réunit tous les éléments du dessin
proprementt dit : intention de représenter un objet bien
défini,, exécution, interprétation répétant l'intention. L'en-
GENESBB DE L ABT FIGURE

fant,, si grossières que puissent être ses productions, a


acquiss la faculté graphique totale. Conscient de la possé-
der,, il l'exerce volontairement ; de fait, à partir de ce
moment,, il annonce fréquemment le dessin qu'il va faire
avantt de l'exécuter. La phase préliminaire au dessin pro-
prementt dit est terminée. L'enfant, devenu sur ce point
l'égall de ses aînés, s'en glorifie. Jean, à 3 ans 10 mois,
déclaree fièrement en montrant son deuxième dessin
vouluu : « Maintenant, je deviens un dessineur comme Si-
monne.. » (cf. 42, p. 43)-
Laa description que nous venons de donner de la genèse
duu dessin chez l'enfant est, cela va sans dire, quelque peu
schématique.. Bien que nous nous soyons attaché à faire
ressortirr la continuité des différents moments de cette évo-
lution,, ils sont moins nettement distincts dans la réalité
quee dans notre analyse ; la date et la durée de chacun
d'euxx varient notablement selon l'enfant étudié. En parti-
culier,, j'ai eu l'occasion d'observer une fillette de 4 ans
ii mois (Thérèse J.) chez qui la phase préliminaire tout
entière,, depuis le premier tracé dénué d'intention repré-
sentativee jusqu'au premier dessin voulu, n'a pas duré plus
d'unn quart d'heure. Mais même dans ce cas où l'évolution
aa été extraordinairement rapide, sans doute à cause de
l'âgee relativement avancé de l'enfant, les différents mo-
mentss étaient nettement reconnaissables, leur succession
ett les raisons psychiques du passage de chacun d'eux au
suivantt étaient conformes à notre analyse.
Less futurs artistes ne diffèrent en rien, pour la genèse
duu dessin figuré, des enfants ordinaires, à en juger par les
souvenirsduu peintre allemand contemporain Hans Thoma.
«« Voici, raconte-t-il dans son autobiographie, mon plus
ancienn souvenir. Je n'étais pas encore en âge de porter
444 L'ART PRIMITIF

dess culottes. J'étais assis dans un coin de notre chambre


dee la Forêt noire avec une ardoise et un crayon. Je faisais
surr mon ardoise des traits pêle-mêle, et je me réjouissais
dee constater par là que ma main possédait un pouvoir créa-
teur.. Je courus à ma mère et lui montrai mes produc-
tions.. Bonne comme toujours, elle ne détruisit pas ma
joiee ; elle les examina attentivement, rajouta quelques
traitss çà et là, et m'expliqua : ça c'est une maison, ça un
arbre,, une haie, le gribouillis est le coq, il fait coco-
rico,, e t c . . Aussi, chaque fois je courais à ma mère avec
l'ardoisee pour qu'elle me dît ce que j'avais fait. Bientôt la
volontéé se fit place dans mon griffonnage ; je raccordai les
traitss et cela donna naissance à quelque chose où ma
mèree reconnut nettement un cochon ; je le vis aussi, et
ainsii le cochon fut ma première conquête artistique »
(119,, p. 384).
ÏNouss venons de voir de quelle façon l'enfant parvient
auu dessin figuré. Il semble qu'on puisse retrouver pour les
débutss de l'Aurignacien des traces d'une évolution sem-
blablee et que chez les plus anciens artistes connus comme
pourr l'enfant d'aujourd'hui, les origines de l'art figuré
aientt consisté en un passage, par des transitions ana-
logues,, d'un réalisme fortuit à un réalisme intentionnel.
Quelless sont d'abord les lignes tracées sans intention
figuréee où les Aurignaciens ont pu trouver après coup
unee ressemblance avec quelque être ou objet réel ? Bien
quee l'ait décoratif existât, au moins sous forme élémen-
taire,, antérieurement aux plus anciennes œuvres figurées
incontestabless de l'Aurignacien, il ne me semble pas
possiblee de dériver les dessins figurés des lignes orne-
mentaless (144, p. 6-7) ; l'origine en doit donc être cher-
chéee dans des lignes que leur auteur ne traçait pas plus
GENESEE DE L ART FIGURE

danss une intention décorative que dans une intention


figurée,figurée, mais simplement pour les tracer. Or, on constat
précisémentt dès le début de l'Aurignacien, c'est-à-dire à
unee époque antérieure aux plus anciennes œuvres figurées
ouu tout au plus contemporaine, des manifestations plus
rudimentaires,, entièrement comparables aux premiers
tracéss enfantins. L'argile tapissant les parois ou plafonds
dee diverses grottes a conservé les traces de traînées de
doigts,, tantôt confuses, entrecroisées dans tous les sens,
tantôtt formant des assemblages assez réguliers de lignes
droitess parallèles, soit horizontales, soit verticales (fig. i5 ;
1,, p. 0,3-0,5 et 194-195 ; 56, p. i3o, et i44)- Dans certains
cas,, par exemple à la Groze à Gontran (49, p. 278,
fig.fig. 1) ou à îlornos de la Pena (186, p. 9/1, n°*/i),
cess figures apparaissen-t plus nettement comme inten-
tionnelless : ce sont des courbes parallèles, spiralées, ser-
pentines,, méandriques, entrelacées, tracées avec les doigts
(généralementt trois) d'une même main ou peut-être dans
certainss cas avec un instrument pectine, sorte de main
artificiellee ou de fourchette fabriquée avec des rameaux.
Less tracés de ce genre qui, partout où des superpositions
dee figures fournissent des indications chronologiques cer-
taines,, sont les productions les plus anciennes, ne nous
semblentt susceptibles d'aucune interprétation figurée, et
ill est vraisemblable que leurs auteurs ne leur en attri-
buaientt pas eux-mêmes, pas plus que ne le font nos
enfantss pour leurs premiers tracés ; mais c'était déjà une
tracee déposée volontairement sur un support par l'activité
humaine.. On a trouvé à Gargas (56, fig. 7 et S) des tracés
analogues,, mais dont les lignes plus longues, plus si-
nueuses,, plus compliquées, et qui par leur aspect méritent
lee nom expressif de « macaroni » qui leur a été donné
LL ART PRIMITIF

parr leurs inventeurs, sont plus susceptibles de fournir


l'occasionn d'une interprétation figurée ; et en fait on peut
trouverr dans l'un de ces macaroni une ressemblance avec
unn mufle de face, dans un autre une ressemblance avec
lee front et l'échiné, et peut-être même aussi le train de
derrièree et la queue, d'un animal cornu. Ces derniers
tracéss nous semblent des exemples, analogues à ceux que
nouss avons rencontrés dans le dessin des enfants, d'une

Fig.. i5. — Dessins digitaux sur argile de la Clotilde. Echelle : environ 1/8
d'aprèss BREUIL, 1 (fig. /|5). Traits parallèles (p. £5). Figure animale
Iracéee d'un seul doigt (p. /|6). Contour de la tète interrompu entre les
corness (p. j«). Pattes déplacées (p. 125, noie a).

ressemblancee obtenue fortuitement. Celle-ci a pu, comme


chezz eux, donner l'idée de la compléter intentionnelle-
ment,, puis de la créer de toutes pièces, l'homme étant
arrivéé à l'idée que, puisqu'il en a déjà fait une, il peut
bienn en faire d'autres. On arrive de la sorte aux dessins
d'animauxx encore extrêmement grossiers, mais déjà re-
connaissables,, de la Clolilde de Santa Isabel (fig. i5 ; 142,
fig.fig. 86), de Quintanal (1, fig. 8 i , Sanglier ?), de Hornos
GENÈSEE DE L ' A R T FIGURÉ l\~]

(186,, p. g3, n° i),etàceuxde Gargas(142, fig. 87), un peu


moinss imparfaits, tracés encore les uns et les autres sur
l'argile,, mais avec un seul doigt, et dont il paraît difficile
dee considérer la ressemblance comme simplement acci-
dentellee et non préméditée. Ces différents tracés digitaux
surr une matière molle sont analogues, si l'on fait abstrac-
tionn de leur caractère figuré, aux incisions (lignes et
points)) exécutés sur les outils ou les bijoux dans une
intentionn décorative, et dès lors la technique du burin
peutt être transférée de l'art ornemental à l'art figuré.
Laa Groze à Gontran réunit des spécimensde ces différents
stadess des origines de l'art figuré : elle présente à la fois
dess dessins digitaux analogues à ceux de Hornos, des
incisionss parallèles multipliées qui ne sont que la répéti-
tionn au burin de ces tracés digitaux, enfin des silhouettes
animaless incisées d'un trait unique et qui ne sont que la
répétition,, exécutée au burin sur matière dure, des ligures
animaless tracées avec un seul doigt de Gargas(49, fig. i-3).
Gargass et Hornos présentent une réunion analogue de
spécimenss des différents moments que nous venons de
distinguerr dans la genèse du dessin figuré. On trouve sur
laa frise tombée d'AHamira (142, fig. 88-90) et sur un
plafondd du Tue d'Audoubert (15, p 658) des traits
parallèless incisés qui ne sont que la répétition au burin
dess tracés digitaux de Hornos ou de la Groze à Gontran.
Lee passage des tracés digitaux aux dessins véritables
estt particulièrement visible à la Pileta (province de Ma-
laga),, dans des figures non tracées sur l'argile molle, mais
peintess en jaune sur paroi dure. Ce sont d'abord de
simpless lignes parallèles plus ou moins longues, recti-
lignes,, incurvées ou présentant un nombre variable d'on-
dulationss serpentiformes (38, pi. III). Ces tracés, consi-
488 LL ART PRIMITIF

déréss isolément, semblent avoir donné naissance à des


figuresfigures qui, exécutées avec le même procédé, seraie
cependantt des serpents voulus : dans les unes, les traits
parallèless se rejoignent en pointe effilée soit à l'une des
extrémités,, soit dans un cas aux deux ; dans d'autres, une
dess extrémités est effilée et l'autre présente un renflement
évoquantt une tête de serpent, parfois précédé d'un étran-
glement.. Le renflement, de forme variable, est parfois
diviséé en deux lobes qui iont penser à des mâchoires
écartées,, d'où s'échappe même dans certains cas une
lignee correspondant à une langue. Il nous semble impos-
siblee que la ressemblance de toutes ces figures avec
unn serpent soit purement accidentelle, et n'ait pas été
produitee d'abord par hasard, mais remarquée et re-
produitee exprès.
Dee même que ces tracés serpentiformes isolés ont
abouti,, selon nous, à des serpents voulus, de même leur
juxtaposition,, puis leur coalescence ont conduit, comme
danss les macaroni de Gargas, à des figures animales plus
compliquées.. Les tracés à traits parallèles sont tantôt
juxtaposéss sans aucun ordre, tantôt disposés d'une façon
alterne,, tantôt soudés pour ainsi dire et embranchés les
unss dans les autres. Pour la plupart des figures complexes
ainsii obtenues, l'artiste semble n'avoir eu aucune inten-
tionn figurée et avoir simplement pris plaisir au jeu des
lignes;; mais il en est une au moins où nous voyons cer-
tainementt et où l'artiste a bien pu voir, même sans l'avoir
cherché,, l'aspect d'un animal, quadrupède ou oiseau, en
profill absolu, reposant sur une palte. Que cette transition
soitt ou non hypothétique, elle conduit à des figures où
see retrouve la même technique des traits parallèles et dont
l'intentionn zoomorphique est incontestable : la tête avec
GENÈSEE DE L ' A R T FIGURÉ 49

encoluree d'un bouquetin, la tête avec encolure d'un bœuf


ett un animal entier qui semble un rhinocéros (38,
pi.. III). Dans quelques parties du contour de ces figures,
less traits parallèles se réunissent en un trait unique. Enfin
laa technique primitive est complètement abandonnée, et
l'onn se trouve en présence d'animaux à contour tracé
d'unee ligne unique, chevaux, bouquetins, biches, bœufs,
toutt semblables aux peintures zoomorphes aurignaciennes
dee la province de Santander (fig. 16 ; 38, p. 19).
Maiss la difficulté à résoudre n'est que reculée. Si les
dessinss figurés voulus ont pu sortir des tracés digitaux,
restee à expliquer ceux-ci. D'où a pu venir à leurs auteurs
enn premier lieu l'idée qu'ils étaient capables d'en tracer?
Uniquementt de la constatation qu'ils en avaient déjà
exécutéé de semblables, à savoir, comme nous l'avons dit,
nonn pas les lignes tracées sur leurs instruments pour les
décorerr et dont les caractères sont, non seulement diffé-
rents,, mais opposés, mais des lignes qu'ils avaient tracées
sanss le faire exprès. Les traînées de doigts que nous avons
vuu aboutir, par des intermédiaires de complication crois-
sante,, aux tracés digitaux à plusieurs doigts, soit im-
primés,, soient peints, ont été selon toute vraisemblance
laa répétition intentionnelle de traces involontaires ; peut-
être,, et en tout cas à titre exceptionnel, d'empreintes
résultantt d'une glissade, où les orteils auraient laissé sur
lee sol ou les doigts sur les parois une marque allongée ;
presquee certainement, pour les tracés imprimés du genre
dess plus rudimentaires d'Altamira, Gargas ou Hornos, des
empreintess laissées par les doigts sur des parois couvertes
d'argilee dont on extrayait, pour quelque emploi utilitaire,
l'enduitt plastique [1, p. IG,4-IO,5), et pour les tracés
peintss de la Pileta, de la trace laissée sur les parois
L'artt primitif. 3
5oo L'AKT PRIMITIF

enn essuyant une main souillée d'argile (38, p. 17 et


18)..
D'oùù a pu maintenant venir aux Aurignaciims, en pré-
sencee de tracés produits par eux involontairement, l'in-
tentionn d'en refaire exprès de semblables? Ce ne saurait
êtree pour une raison extrinsèque, car à supposer que par
laa suite leurs œuvres figurées proprement dites aient eu
unee destination magique (142, p. 121-129), cette desti-
nationn ne saurait être prêtée à leurs premiers tracés
informes,, et d'autre part ces tracés, quand bien même ils
auraientt possédé aux yeux de leurs auteurs une valeur
esthétique,, n'étaient assurément pas destinés à décorer les
paroiss des cavernes sur lesquelles on les rencontre et qui
leurr ont simplement servi de support matériel. Quel peut
doncc être le plaisir causé aux artistes accidentels par leurs
tracéss fortuits et qu'ils ont voulu renouveler par des
tracéss volontaires semblables ? Ces tracés présentent la
pluss grande parenté avec les premiers traits exécutés par
l'enfant,, et les traits peints primitifs de la Pileta sont de
toutt point semblables aux lignes verticales parallèles
tracéess sur les murs de nos rues avec plusieurs doigts
trempéss dans de la couleur dont nous avons parlé plus
haut.. Ces manifestations analogues dans des milieux si
différentss et séparés par des millénaires pourraient relever
dee la même cause psychique Dans un cas comme dans
l'autre,, les tracés fortuits auraient produit un plaisir ré-
sultantt de ce qu'ils étaient une création de leur auteur
involontaire,, et ce plaisir l'aurait amené à les répéter
intentionnellement,, à en faire des attestations plus ou
moinss machinales de sa personnalité et de sa « volonté de
puissancee », l'équivalent de signatures.
Less dessins voulus ont également été, selon toute viai-
GENKSRR DE I.AHT FKÎl'HR 5l

semblance,, inspirés par des images fortuites d'origine


différente.. Des hommes à qui la chasse fournissait la ma-
jeuree partie de leur alimentation devaient avoir l'idée de
piste.. Us n'étaient pas sans avoir remarque que les ani-
mauxx laissent sur la terre molle des empreintes caracté-
ristiquess de leur espèce zoologique. En fait, des empreintes
dee griffes et même de pieds d'ours ont subsisté jusqu'à
noss jours et ont été découvertes sur le sol ou les parois
dess grottes à Font-de-Gaume, à Gargas, à Bétharram
prèss de Lourdes, au Tue d'Audoubert, à Altamira, à
Hornoss de la Pena, à la Cova Negra, à la Pileta, à Cas-
tillo 1 .. Cette dernière grotte a fourni une observation par-
ticulièrementt instructive. Sur la muraille de la dernière
galeriee où sont peints de gros disques rouges alignés en
longuess files, les griffes d'ours ont entamé un trait rouge
sanss signification définie, mais appartenant à la technique
dess animaux dessinés au trait de la phase la plus ancienne
dee l'art pariétal paléolithique, et les empreintes de ces
griffess ont été elles-mêmes recouvertes par un gros
disquee rouge (188, fig. io4). Par conséquent, au moins
l'auteurr de ce disque, qui remonte à l'Aurignacien ancien,
aa certainement vu et vraisemblablement reconnu des
tracess d'ours.
Maiss les animaux n'étaient pas seuls à laisser des em-
preintess sur le sol. Les pieds de l'homme en marchant,
sess mains et ses genoux en rampant sous les.plafonds
surbaisséss des cavernes laissaient dans la poussière ou la
terree humide des vestiges analogues : l'abbé Breuil à

11
14, p. 536-537 ; 15, p. 65g-66o ; 24, p. 65 ; 38, p. 6,
i3,, 14 ; 48, p. 29-3i et pi. XLVI, XLVII et XLVII bis ; 53,
p.. u 3 ; 54, p. 43-44 ; 56, p. 142 ; 1, p- 91 et I I 5 - I I 6 .
LL ART PRIMITIF

Niaux 1 ,, le comte Begouen au Tue d'Audoubert 2 ont


découvertt de ces empreintes qui semblent d'âge magda-
lénien,, et les Aurignaciens n'ont pu manquer d'en laisser
dee semblables. En constatant qu il a de la sorte produit
dess images, bien que sans le vouloir, l'Aurignacien a
bienn pu être amené à l'idée d'en produire intention-
nellementt de pareilles, par un processus analogue à
celuii qui s'observe au début du dessin enfantin.
Nouss ne sommes d'ailleurs pas réduits sur ce point à
unee simple hypothèse fondée sur l'analogie; et l'on a
découvertt des exemples authentiques d'empreintes de
mainss exécutées volontairement à l'époque aurignacienne.
Ill s'agit, non de traces laissées en creux dans la terre
molle,, dont rien ne pourrait établir qu'elles fussent
voulues,, mais de figures déposées avec de la couleur sur
unee surface dure, et qui ne peuvent l'avoir été qu'inten-
tionnellement..
Cess figures étaient obtenues par deux procédés. Tantôt
laa main enduite de couleur liquide était appliquée sur
unee surface où elle laissait son décalque coloré. Tantôt, la
mainn étant placée sur une surface naturellement humide
ouu mouillée exprès, ou même, comme dans trois exemples
dee Gargas, déjà recouverte d'une couleur de fond de
teintee différente (56, p. i34), on projetait sur le tout,

22
« En deux points épargnés par les pieds des visiteurs
modernes,, nous avons noté... l'empreinte des genoux nus d'un
hommee qui avait rampé sous une voûte basse et celle de nom-
breuxx pieds également nus, appartenant à des adultes et à des
enfantss (55, p. 222).
33
14, p. 536-537 ; 15, p. 65g-663. Dans une des salles, on a
relevéé à la fois des empreintes de griffes et de pattes d'ours et
dee pieds humains.
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 53

soitt avec la main, soit avec la bouche, de la couleur qui


cernaitt d'une plage colorée la partie couverte par la
main.. De la sorte, celle-ci une fois retirée, la surface
qu'ellee recouvrait primitivement donnait l'image d'une
mainn de la couleur de la paroi, entourée/de la couleur
projetée..
Lee premier procédé ou procédé par impression ou par
décalquee n'est représenté que par un tout petit nombre
dee spécimens de Bédeilhac (en noir) (48, p. 118) et
d'Altamiraa (142, fig. 91), ici en rouge, « petite main de
femmee ou d'enfant, obtenue peut-être par application de
laa main rougie ainsi qu'on fait en Algérie et ailleurs, mais
certainementt retouchée au pinceau » (54, p. 76). Les
exempless du second procédé ou procédé par épargne ou
auu patron sont beaucoup plus nombreux ; on en a re-
trouvéé à Altamira (deux petites mains à doigts très courts
cernéess de brun noir, un peu à gauche de la main im-
priméee en rouge . 142, fig. 91), à Castillo (une cinquan-
tainee de mains cernées de rouge : fig i 6 ; l , f i g . 106-108),
àà Font-de Gaume (quatre mains cernées de noir, l'une bien
nette,, les trois autres très déteintes et cachées par des
peinturess postérieures : 48, p 72, note et fig. 83), aux
Combarelless (51, fig. 4 i ) , à l'abri Labatut des Roches de
Sergeacc (mains cernées de rouge sur des blocs tombés
danss le niveau aurignacien supérieur et probablement
pluss anciennes : 50, p. 518), à Beyssac près Vieil
Moulyy (Dordogne) (une main rouge : 50, p. 5i8 et
fig.fig. i3),à la grotte David de Gabrerets (Lot) (108j, dans
less galeries latérales de la grotte des Trois Frères (Ariège)
(mainss rouges associées comme à Castillo à des aligne-
mentss de points rouges ou noirs : 147, p. 217, note 25),
enfinn à Gargas (56, p. I 3 I - I 3 4 ; 142, fig. 118). Ces
5 44 L ART PRIMITIF

dernièress figurations de la main sont à la fois les plus


nombreuses,, les plus intéressantes et les plus sûrement
datéess comme remontant à la phase la plus reculée de
l'Aurignacien,, au moins aussi anciennes, sinon davan-
tage,, que 1<8 gravures pariétales de Pair-non Pair
(56,, p. i43).
Cee n'est pas seulement à l'époque aurignacienne et plus

Fig.. iC. — Peintures de Castillo (d'après BBECIL, 1, fig. I K J ) . Mains


cernéess de rouge (p 53i, ponctuations rouges (p. 53) et silhouettes de
bisonss en jaune (p. Vj ,

généralementt à l'âge du Renne que l'homme a reproduit


dee la sorte la forme de sa main. L'ethnographie signale
enn foule des exemples analogues de toutes les parties du
mondee (54, p. 208-209; 56, p. I 3 5 - I 3 7 ' 150, p. 168
ett 711-715 ; 171, p. 651 sq. ; 181, p. 529 sq. ;
1.. p. 33 et fig. 37 et 3 8 ; 233, p . 7). J'en ai moi-même
observéé dans les graffiti actuels de la France et dans le
GBNÈSEE DE L'AHT FIGURÉ 555
dessinn enfantin (137, p. 807-812), et ces productions de
civiliséss de nos jours fournissent peut être la clé pour
comprendree les autres
III est en effet remarquable que le motif de la main fait
presquee entièrement défaut dans les dessins proprement
ditss exécutés, soit par des enfants connus dont on a noté
toutess La productions graphiques, soit par les auteurs
anonymess des graffiti. Parmi plusieurs milliers de graffiti

Fig.. 17. — Gralïite actuel. Main dessinée (p. 55).


Fig.. 18. — Graffitti actuels. Main au patron (n° ï>-]!i6) provoquant une
mainn dessinée (n° 5767) (p. 55); dans la main au patron, lu limite des
ongless a été ajoutée au dessiti proprement dit (p, 56).

quee j'ai observés, les dessins proprement dits de main


fig.. 17) n'atteignent pas la dizaine ; et encore, de ce tout
petitt nombre la plupart se trouvaient à côté de mains im-
priméess ou au patron (fig. 18), de sorte que l'intention
dee les exécuter avait dû être non spontanée, mais suggérée
parr la vue de celles-ci. D'autre part, dans les spécimens
ethnographiquess les mains imprimées ou au patron ont
reçuu dans nombre de cas, comme d'ailleurs les mains
566 L'ART PRIMITIF

dessinéess proprement dites, une signification soit prophy-


lactiquee et plus généralement magique, soit symbolique,
quii résulte du rôle fondamental de la main dans l'activité
humaine;; mais il n'en est évidemment pas de même
pourr les productions enfantines. Il semble donc que chez
l'enfantt l'immense disproportion numérique entre les
mainss réellement dessinées et les mains imprimées ou au
patronn doive s'expliquer uniquement par la différence du
procédéé d'exécution, d'une part dessin proprement dit,
dee l'autre procédé en quelque sorte mécanique qui permet
dee produire une image sans avoir besoin de savoir dessi-
nerr ou de s'en donner la peine. De nombreux exemples
témoignentt du goût de l'enfant pour les procédés méca-
niquess de dessin (fig. 19 et 20 ; 137, p. 808-810) ; les
imagess ainsi obtenues sont fréquemment complétées,
commee les tracés fortuits, par des détails exécutés en
dessinn proprement dit, destinés à accentuer la ressem-
blancee (fig. 18-20). D'autre part, nul objet ne se prête
mieuxx que la main à ces procédés mécaniques, puisqu'on
l'aa constamment à sa disposition pour l'imprimer ou s'en
servirr comme patron. Donc, chez l'enfant l'exécution de
mainss imprimées ou au patron semble dictée par l'intention
dee produire une image par un procédé purement méca-
niquee et ainsi de manifester avec le maximum de facilité
saa faculté créatrice.
Celaa étant, si de nos jours des individus qui ont certai-
nementt vu et probablement exécuté des dessins propre-
mentss dits conservent un tel goût pour le dessin méca-
niquee et pour le motif le mieux approprié à son emploi,
less Aurignaciens ont dû à plus forte raison éprouver le
mêmee sentiment pour ce genre de dessin alors qu'ils n'en
connaissaientt point encore d'autre. On s'explique par là
GENÈSEE DE L ' A R T FIGURÉ h~j

quee la reproduction volontaire d'empreintes de mains


d'abordd fortuites ait été en fait l'une des premières formes,
sinonn la première, du dessin intentionnel.
Less images aurignaciennes de mains en couleur prouvent
quee dès ce moment l'homme avait conscience de sa faculté
créatricee d'images, au moins pour une certaine image,

Fig.. 19 et 20. — Dessins de Jean Cr., 8 ans 1/2. Echelle : 1/2. Dessins
auu patron (p. 55) avec additions en dessin proprement dit (contour in-
ternee du talon de la hachette, rivet de la pince; l'intérieur des dessins
étaitt en outre surchargé d'un gribouillage Faisant office de grisé que j'ai
suppriméé dans la reproduction) (p. 56).

cellee de sa main. Des faits établissent qu'il ne s'en est pas


tenuu là, et qu'il a tout au moins cherché à étendre le pro-
cédéé du patron à la production d'autres images. Les
explorateurss de Gargas ont relevé sur les parois de cette
cavernee « une petite main potelée, avec le poignet, d'un
enfantt en bas âge ; des doigts isolés, ne provenant pas
588 L'ART PRIMITIF

d'unee main déteinte, quelquefois le pouce ; le long


d'unee saillie, dans le recoin où furent observées les pre-
mièress mains, une série de cinq doigts sont ainsi juxta-
poséss comme en guirlande décorative. Non loin de là se
trouvee une empreinte [c'est-à-dire ici un dessin au pa-
tronn faite de l'assemblage du pouce et de l'index des deux
mainss droite et gauche... Une autre silhouette cernée de
rougee rappelle celle qu'on obtiendrait avec la tête d'un
huméruss ou d'un tibia » (56, p. i35). Ces différents
exempless de Gargas correspondent à autant de tentatives
pourr obtenir avec le procédé du patron, inauguré avec la
mainn entière, des figures plus variées.
C'estt par la même intention que s'expliquerait, selon
nous,, la curieuse particularité que présentent un grand
nombree des mains au patron de cette même grotte. Un,
plusieurss ou même tous les doigts sont privés desdeux pha-
langess terminales (142, fig. 118). Cet aspect des images
peutt s'expliquer de deux façons : la main naturelle qui a
serviservi de patron était, soit une main mutilée, soit une main
intactee à doigts repliés. A notre avis (142, p. 222-226),
laa majorité de ces images à doigts incomplets ont dû être
exécutéess avec des mains intactes à doigts repliés, et si
l'idéee a pu en être suggérée par la vue de quelques images
obtenuess avec une main réellement mutilée, elles n'avaient
d'autree but que d'obtenir avec la main comme patron des
imagess plus variées. On rencontre également dans l'art
rupestree australien des mains au patron faites avec le
poingg fermé d'ailleurs beaucoup plus rares, ici encore,
quee les mains au patron à doigts étalés (155, p. 271 et
pi.. I, n° 1, en bas à droite).
Enn résumé, le procédé du dessin mécanique a été, dès
less temps aurignaciens, étendu graduellement de la main
GErvÈSEE DE L ' A R T FIGURÉ

entièree à des parties de la main, à des doigts isolés, à des


objetss différents. Il est permis de supposer que les em-
preintess proprementdites, non colorées, produites d'abord
fortuitementt par simple impression dans la terre molle,
ontt fourni un point de départ à un processus analogue,

S]9SS]9S 36533

l'ig.. 2i-a5. — Graffiti actuels. Dessins provoqués par des accidents du


supportt (p. 61), cupule dans un mur ( I I 5 I ) , trou résultant do la
disparitionn d'un nœud dans une planche d'une palissade (330,5}, entrée
dee clef d'une serrure 3658, qui est une tète humaine de profil schéma-
tisée),, moulure de l'appui d'une fenêtre (0786), extrémité d'un tuyau
servantt à l'écoulement de l'eau de pluie sur un appui de fenêtre (5790).

dee même que nos enfants, ayant remarqué l'empreinte


dee leurs pas dans la neige, prennent plaisir à s'y étendre
toutt de leur long pour « faire leur portrait ».
Parr Tune ou l'autre des voies que nous venons de si-
gnaler,, sans parler d'autres également possibles, mais
6 00 L'AHT PHIMIT1F

dontt les faits connus ne fournissent aucune indication,


less Aurignaciens étaient sûrement arrivés à se savoir ca-
pabless de créer, non seulement par hasard, mais même
dee propos délibéré, certaines images. Tout l'art figuré
étaitt là en germe, et ce germe ne demandait qu'à se déve-
lopper.. Il suffisait que l'individu, ayant constaté son pou-
voirr de créer des images de certains objets, cherchât à
étendree ce pouvoir à la production d'images différentes.
L'artt aurignacien présente un exemple de passage du
dessinn mécanique au dessin proprement dit, analogue à
ceuxx qu'on rencontre dans les dessins enfantins ou les
graffitii de nos jours, où une main au patron a été com-
plétéee par des additions réellement dessinées. Il s'agit
d'unee petite main gauche imprimée en noir à la Pasiega,
semblablee à la main imprimée en rouge à Altamira ; on
yy distingue parfaitement les cinq doigts et les parties
charnuess de la paume. La main d'Altatnira avait été régu-
lariséee au pinceau (54, p. 76). Celle de la Pasiega
(37,, pi. XXV) est prolongée par un bras dessiné en
noirr et fort déteint, qui lui-même se continuait peut-être
parr un corps, aujourd'hui presque entièrement disparu.
Nouss croyons trouver à Santian un autre exemple, à un
stadee un peu plus avancé, du passage du dessin méca-
niquee au dessin proprement dit. Une sorte de frise formée
parr la paroi de la grotte présente un groupe de quinze
liguress rouges (1, fig. 32-35). Ce sont des peintures
proprementt dites, et non plus de simples impressions
obtenuess par les procédés mécaniques du décalque ou du
patronn ; mais elles se rattachent aux figures mécaniques
parr le sujet traité, qui pour plusieurs est sans hésitation
possiblee une main prolongée par un bras. D'autres pré-
sententt un aspect différent et plus ou moins énigmatique :
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 6l

danss les unes, il semble que la forme de la main ait été


schématiséee et stylisée ; dans une autre, les doigts res-
semblentt plutôt à des orteils ; d'autres font penser à des
pattess velues d'animaux, d'autres à diverses armes de jet;
maiss toutes forment un ensemble homogène caractérisé
parr la présence constante d'une longue et étroite bande
verticalee rappelant le bras humain. Il n'est donc pas abusif
dee supposer que l'artiste, probablement le même pour
toutess les figures, vu la difficulté de l'opération à l'en-
droitt où elle a été effectuée, a eu 1 idée de faire en pein-
turee les mains qu'il avait pu antérieurement voir exécuter
mécaniquementt par d'autres, sinon exécuter lui-même ;
puiss que la forme de ses peintures, dont l'exécution ma-
ladroitee était encore accrue par les difficultés de la situa-
tion,, lui aura suggéré l'idée de représenter des objets
différents,, mais en gros analogues, de la même façon que
see produit au début l'enrichissement du répertoire gra-
phiquee de nos enfants, grâce à ce que j'ai appelé des ma-
ladressess fécondes '145, p. 53).
Ill est d'ailleurs possible que chez l'Aurignacien, comme
chezz nos enfants, la création artistique n'ait pas consisté
dèss le début dans l'exécution d'une figure complète sur
unee surface antérieurement nue, mais se soit bornée
d'abordd à l'opération matériellement plus facile et sur-
toutt psychologiquement plus simple de compléter inten-
tionnellementt une ressemblance qu'il avait remarquée et
jugéee imparfaite dans des images qui n'étaient pas son
œuvre.. L'enfant perfectionne de la sorte non seulement
sess dessins fortuits (ci-dessus, p. 4o), mais aussi des
productionss étrangères et même des accidents naturels
(fig.. 21-26 ; 137, p. 819-820). Des exemples de la même
tendance,, qui se retrouve même chez les adultes civilisés,
g 22 L'ART PRIMITIF

sontt fournis par l'ethnographie, notamment les pierres-


figuresfigures * ou encore un pétroglyphe de l'Amérique du Sud
considéréé par les indigènes comme représentant un singe,
dontt la tête et le corps sont figurés par un éclalement ro-
cheux,, les pattes et la queue enroulée étant seules l'œuvre
dee l'homme (fig. 27 ; 116, p. 45 et pi. IX, c).

Fig.. 26. — Grafiite actuel. Main peinte complétée par un bonhomme


dessinéé à ta craie (p. 61).
Fig.. 27. — Pétroglyphe sud-américain fd'aprè8 KOCB-GRUHBERG, 116»
pi.. X, c). Singe. Dessin provoqué par un accident rocheux (p, 62).

Onn rencontre égalementdans les œuvres figurées magda-


lénienness une foule d'exemples d'additions ou de correc-

11
99, p. 7 sq. — Une amulette de l'île delà Reine Charlotte,
destinéee à assurer le succès de la chasse au phoque, est faite
d'unn galet allongé ressemblant très grossièrement à un phoque,
qu'unn Haïda a complété par l'addition d'yeux, de naseaux et
d'unee bouche (6, p. 85 et fig. 3i). — Des fétiches recueillis en
Nouvelle-Calédoniee par Glaumont (actuellement au Musée
d'Ethnographiee du Trocadéro) sonl formés de rognons natu-
relss adaptés par un travail rudimenlaire à la figuration d'images
see rapportant au but poursuivi par le Canaque : représentations
soitt de poissons, soit de racines de taros, destinées à favoriser
unee chasse ou une culture (47, p. 436).
GENÈSEE DE L'AHT FIGURÉ 633

tionss apportées soit à des figures exécutées plus ou moins


longtempss auparavant par des auteurs différents, soit à
dee simples accidents naturels. Ils prouvent avec certitude
laa persistance, pendant toute la durée de l'âge du Renne,
dee l'utilisation artistique d'accidents naturels, c'est-à-dire
dee l'influence de ces accidents pour déterminer et si l'on
peutt dire déclancher l'exécution des figures ; mais comme
ilss appartiennent à une période où l'art figuré existait de-

Fig,, a8 — Figure pariétale de Font de Gaume (d'après BfEim, 48,


figfig 78). Reliefs naturels et stalagmites utilisés pour un che»al peint en
noirr modelé (p. 63).

puiss des siècles et où par suite l'artiste avait déjà vu et


sanss doute exécuté d'autres œuvres figurées qui ne
s'expliquentt pas par cette suggestion, je n'en reproduirai
quee quelques spécimens (fig. 28-32) sans répéter
laa longue liste que j'en ai donnée ailleurs (144, p. 18-
25),, et me bornerai aux exemples qui semblent remonter
auxx débuts de l'Àurignacien, c'est-à-dire au moment de.
l'apparitionn de l'art figuré. Je serais porté à considérer
L'ARTT PRIMITIF

commee des cas d'utilisation figurée de surfaces rocheuses,


oùù les additions artificielles sont réduites au minimum,
certainss pendentifs, franges rocheuses et reliefs naturels de
Gastilloo et de Pindal marqués de taches rouges >1, tig 64
^Pindal)) et 112 (Castillo) ; les alignements de taches au
bordd d'un accident pourraient simuler une crinière, et en
outre,, une tache isolée semble correspondre à un œil dans

Fig.. 39. — Figure de Niaui 'croquis schématique). Tète de cerf. Dessin


provoquéé par un accident rocheux (p. 68),
Fig.. 3o-3a. — Figures d'Allamira (d'après BBEUIL, 64. pi II). Utilisation
dess surfaces (p. 63).

deuxx spécimens où je verrais, sous une forme extraordinai-


rementt grossière, l'équivalent de la tête dechevalrougemag-
daléniennedeNiauxx (142, fig. 97 a). D'autres exemples sont
pluss incontestables. Sur la Irise tombée d'Altamira, à côté
dee courbes parallèles qui sont la reproduction gravée des
tracéss digitaux à plusieurs doigts, la ligne verticale figu-
rantt le front d'une tête de quadrupède (cheval ou biche ?)
grossièrementt gravée suit un angle rocheux (142, fig. 89).
GENÈSEE DE L'ART FIGURÉ 65

Laa Croze à Gontran, qui remonte à l'Aurignacien ancien


ett qui nous a déjà fourni des spécimens des différents mo-
mentss de la genèse de l'art figuré, présente deux gravures
dee chevaux dont la tête, c'est-à-dire l'élément essentiel,
estt faite, partiellement dans l'un, totalement dans l'autre,
parr un accident rocheux (49, p. 277 et fig. 2 et 3). Il
nouss semble donc légitime de considérer comme l'une des
sourcess de l'art figuré l'accentuation volontaire d'une
ressemblancee aperçue dans des accidents naturels.
CHAPITREE II
LEE RÉALISME INTELLECTUEL

Cherchantt de l'art primitif une définition qui gardât


auu mot primitif son sens chronologique, seul exempt
d'appréciationss subjectives, nous avons trouvé celle-ci :
L'artL'art primitif est celui qui, dans le rendu des /ormes, es
guidé,guidé, quel que soit l'âge et le milieu de l'artiste, par
mêmemême conception de l'art figuré et par suite de la ressem
blanceblance que nos enjants tant quils dessinent de lajaçon q
leurleur est propre et par laquelle ils s'opposent à l'adulte avant
dede le devenir.
Unee fois posée cette définition abstraite de l'art pri-
mitif,, il faut établir qu'elle n'est pas une construction
arbitraire,, mais correspond à une réalité. Le procédé le
pluss clair et le plus démonstratif nous a semblé le suivant.
Aprèss avoir dégagé, en les rattachant à leur principe
commun,, les caractères de l'art figuré el spécialement du
dessinn chez le civilisé adulte, nous placerons en regard
dess caractères opposés. Puis, passant en revue ces nou-
veauxx caractères, nous constaterons l'existence de chacun
d'eux,, parfois dans la représentation des mêmes objets ou
dess mêmes spectacles, à la fois dans des dessins de nos
enfantss et dans des œuvres d'adultes empruntées aux
milieuxx les plus divers dans le temps et dans l'espace.
Less caractères par lesquels l'art primitif s'oppose à
l'artt des civilisés adultes se manifestent dans la représen-
tationn soit de tableaux statiques, autrement dit d'objets
ouu de groupes d objets envisagés dans un moment unique,
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 67

soitt de spectacles dynamiques, c'est-à-dire de scènes com-


prenantt un plus ou moins grand nombre de moments
successifs.. Etudions d'abord la représentation des tableaux
statiquess ; la représentation des spectacles dynamiques
feraa l'objet du chapitre suivant.
L'artt figuré, chez les artistes les plus divers, veut être
réaliste,, puisqu'il a pour but de créer des images ressem-
blantess d'objets réels, ou secondairement d'objets imaginés
surr le type d'objets réels. L'art figuré de l'enfant et du pri-
mitiff ayant en commun avec celui du civilisé adulte l'in-
tentionn réaliste, ne peut s'opposer à lui que parla concep-
tionn du réalisme, autrement dit de la ressemblance. Une
imagee est ressemblante pour l'adulte quand elle reproduit
cece que son œil en, voit, pour le primitif lorsqu'elle traduit
cece que son esprit en sait. On exprimera à la fois le caractère
communn et le caractère distinctif de ces deux sortes d'art
figuréfiguré en appelant le premier un réalisme visuel, le second
unn réalisme intellectuel.
Danss la sculpture ou art à trois dimensions, ces deux
sortess de réalisme produisent le plus souvent, pour des
raisonss que nous indiquerons, des eQets semblables, de
sortee qu'il est d'ordinaire impossible de décider pour une
sculpturee si elle relève de l'une ÉOU de l'autre. Aussi nous
attacherons-nouss principalement au dessin entendu au sens
largee qui a été défini dans l'introduction, à savoir l'art à
deuxx dimensions seulement ou, selon l'expression alle-
mande,, l'art plat. Pour le réalisme intellectuel, le rôle du
dessinn est (Je décrire avec des traits l'objet qu'il figure
commee le langage le décrit avec des mots. La représen-
tationn dans le dessin de tel élément du modèle est une
sortee de proposition graphique qui pourrait s'énoncer ver-
balementt : cet objet possède tel caractère.
688 LL AHT PRIMITIF

Commee exemple caractéristique de cette opposition


duu réalisme intellectuel au réalisme visuel, nous citerons
unn dessin d'un enfant hollandais de 7 ans (fig. 33),
représentantt un champ de pommes de terre. Il ne
figuree rien de ce que l'œil aperçoit dans un champ
dee pommes de terre, à savoir la partie aérienne des
plantes,, mais uniquement des éléments invisibles, les
tuberculess cachés dans le sol, et un élément qui n'a pas

Figg 33. — Dessin d'un enfant hollandais de 7 ans 'd'après SCIIBEODER, 199,
pi.. III, n° a3). Champ de pommes de terre. Exemple typique de réa-
lismee intellectuel (p. 68).

d'existencee objective, mais seulement abstraite, le con-


tourr du champ. Il est impossible de voir dans ce dessin
unn champ de pommes de terre ; mais on comprend de
primee abord qu'il représente un champ rempli de pommes
dee terre.
Lee réalisme intellectuel de l'art primitif s'oppose donc
auu réalisme visuel de deux façons contraires : d'une part,
lee dessin contient des éléments du modèle qui ne se
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 69

voientt pas, mais que l'artiste juge indispensables ; inver-


sementt il néglige des éléments du modèle qui sautent aux
yeux,, mais qui sont pour l'artiste dénués d'intérêt.
Examinonss d'abord ce second point
III est bien connu que l'enfant laissé à sa spontanéité
dessinee non d'après nature, mais « de cbic » ou de mé-
moiree ; bien plus, lorsqu'on l'invite à dessiner d'après
naturee ou d'après des modèles dessinés, son dessin ne
reproduitt pas l'objet réel qu'il a sous les yeux et que
souventt il ne regarde même pas, mais la représentation
qu'ill en a dans l'esprit, ce que j'ai appelé le modèle
interneinterne (145, p. 80 sq.). Le même fait a été noté p
less primitifs par les voyageurs qui ont pu assister à
l'exécutionn de leurs dessins. Ce modèle interne témoigne
d'unee sélection spontanément effectuée par l'esprit parmi
less données visuelles de la perception. On pourrait oppo-
serr à l'œil optique, fonctionnant comme un objectif pho-
tographique,, un œil mental qui institue entre les éléments
effectivementt fournis par l'œil optique une sorte de
hiérarchie.. Seuls sont retenus et reproduits dans le
dessinn les éléments que l'artiste juge essentiels.
Ill serait sans doute exagéré de prétendre que c'est de
proposs délibéré que l'artiste primitif élimine de son dessin
tell ou tel des éléments effectifs de l'objet qu'il représente ;
ett pourtant, au moment même où il néglige ces éléments,
ill est jusqu'à un certain point conscient de leur existence.
Unn exemple bien net est (ourni par un bonhomme d'une
fillette'defillette'de 3 ans 9 mois (145, fig. 22). Bien qu'il n'ait ni
nii tronc, ni costume, l'enfant considère son œuvre avec
unee satisfaction marquée, qu'il exprime en ces termes :
«« II est bien : c'est tel un monsieur habillé. » Ainsi, au
momentt même où cette fillette néglige le vêtement dans
LL ART PRIMITIF
7
sonn dessin, c'est à lui qu'elle fait appel comme caracté-
ristiquee d'un homme réel.
L'artt primitif fournit de nombreux exemples de la né-
gligencee de détails jugés sans intérêt. Chez divers enfants,
less maisons restent pendant un certain temps dépourvues

ChàistChàist

Figg 34. — Dessin de Jean L., 5 ans. Salle à manger Bonshommes


sanss bras (p, 70) et sans vêtement (p, 76^, indifféremment avec tronc
ett sans tronc (p. 8A)- Deux des bonshommes sont simplement juxtaposés
àà leur chaise (p, 116). Etalement de plans pour la chaise de l'arrière-
plann (p. 123).

dee toit. Pour la figure humaine, chez tous les enfants, les
brass sont régulièrement omis pendant une longue période
(fig.. 34, &2 ; 145, fig.22, i3o, i33) ; et quand ils font leur
apparition,, ils ne sont d'ordinaire figurés que dans des
bonshommess qui en ont besoin pour tenir quelque chose.
Bienn plus, quand un seul est nécessaire, le bras inutile
LEE BÉALISME INTELLECTUEL 71

n'estt pas figuré, par exemple dans un dessin d'une fillette


dee 5 ans où un bonhomme ouvre avec une clé la porte
dee sa maison (133, pi. XLVI, n° 766), ou dans divers
dessinss d'écoliers de Munich représentant un combat à
coupss de boules de neige (112, pi. XCVIII, n° 3). Il
arrivee même que l'utilité des bras dans tel dessin n'arrive
pass à prévaloir contre leur négligence habituelle, par
exemplee dans le dessin d'une noce (145, fig. 56), où
less personnages disposés par couples sont pour la plu-
partt dépourvus des bras dont ils auraient besoin pour
see donner le bras, ou encore dans le dessin d'un bon-
hommee cueillant des cerises, où un garçon de l\ ans
kk mois juxtapose à un cerisier un bonhomme sans bras
(145,, fig. 58). On rencontre la même absence de bras
danss des bonshommes jouant de la trompette ou portant un
parapluiee ouvert ; la trompette tient toute seule dans la
bouche,, le parapluie est planté dans le crâne. L'habitude
estt si forte que dans des dessins de ce genre où sont
réuniss des personnages les uns dépourvus, les autres
dotéss de bras, les objets ne sont pas plus tenus par ceux-
cii que par les autres (145, fig. 60, 61). Un dessin d'un
petitt Belge de 4 ans 1/2 réunit les différents cas pos-
sibles.. 11 figure trois couples chacun sons un parapluie
unique.. Dans le couple de gauche, les deux personnages
sontt dépourvus de bras et le parapluie se tient tout seul
entree eux. Dans les deux autres couples, le bras utile est
figuréfiguré tenant le parapluie; de ces quatre personnag
seull le plus à droite a le bras qui ne sert à rien (145, fig. 62).
Mêmee lorsque l'enfant est arrivé à figurer régulièrement les
bras,, leur rendu reste pendant assez longtemps plus
sommairee que celui des jambes ; chaque bras n'est repré-
sentéé que par un trait unique, filiforme, alors que pour
7 22 L ART PRIMITIF

less jambes celui-ci a été remplacé par un contour fermé


(fig.. 38 ; 127, 6g. n / ; 145, fig. i3a).
L'omissionn des bras n'est pas spéciale au dessin en-
fantin.. Elle se retrouve par exemple, pour l'art rupestre
paléolithiquee d'Espagne, à Minateda (28, fig. 3, 5, 8,
277 ; un bras au moins n'aurait cependant pas été superflu
àà deux de ces personnages pour tenir l'arc figuré devant
eux),, dans un dessin au crayon d'un indigène de la Nou-
velle-Guinéee britannique (95, fig. 12), ou encore dans
less gravures sur bambous de Nouvelle-Calédonie, en par-
ticulierr dans deux dessins représentant des soldats français
ett où par contre sont soigneusement figurés les boutons
dee la tunique (Bambou recueilli à Oubatche en 1873 :
2,, p. 277, 7 0 ). Les bras ne sont pas figurés davantage
danss le portrait d'un Européen à cheval par un de ses
soldatss nègres (225, pi. 37, n° 3), pas plus que les rênes
qu'ilss auraient servi à tenir. Dans le dessin d'un nègre de
l'Afriquee orientale, d'environ dix-huit ans, représentant
unee corvée d'hommes enchaînés, les cinq premiers ont des
brass et les deux derniers en sont privés (225, pi. 35,
n°° 1). L'absence et la présence des bras concordent avec
celless de récipients portés sur la tête pour la corvée d'eau;
less personnages où ces deux éléments font défaut sont les
dernierss dessinés et ont dû être exécutés plus hâtivement
quee les précédents. La liaison fréquente de la représenta-
tionn des bras à leur utilité pour tenir quelque objet figuré
danss le dessin est bien nette dans un dessin d'un autre
nègree qui représente avec une intention ironique une né-
gressee habillée à l'Européenne : un seul bras est figuré,
celuii qui tient l'ombrelle (225, p. 117 et pi. ko, n° 2).
Less jambes sont également omises, non seulement
danss des bonshommes isolés analogues à nos portraits en
LEE RÉALISME INTELLECTUEL

buste,, par exemple dans les Winter-Counts des Dakota


(150,, fig. 196-199 et beaucoup d'autres), mais aussi
pourr des personnages assis, qui par suite n'ont pas besoin
dee jambes. Ce fait se rencontre notamment dans de nom-
breuxx dessins de cavaliers, où le buste sans jambes repose
surr le dos du cheval, assez souvent muni d'une selle J'en
citeraii comme exemples des dessins d'enfants (112, pi. 34,
noss i, 6 ; pi. 37, n° i5 ; 145, fig. 89), une gravure rupestre
néolithiquee de la province de Soria (Espagne) (fig. 35),

Figg 35. — Gravure rupestre néolilhique de la province de Soria (Espagne).


D'aprèss J, CABRÉ AGUILO, 4 4 , fig. 3). Cavalier. Déplacement des pattes
duu cheval (p 125, note 2). Cavalier sans jambes (p, 7S). Absence de
rêness (p. 85),
Fig.. 36. — Pétroglypbe du Ouadi Mokatteb (presqu'île du Sinaï) (d'après
AHDKBE,, 3* pi- I I , Q° 1) Cavalier, Déplacement des jambes du cheval
(p.. 120, note a), Cheval de. profil et cavalier de face (p. i5£] sans
jambess (p, 70). Absence de rênes (p, 85)

unn décor incisé sur une urne cinéraire d'Œdenburg


(Hongrie)) (environ ve siècle avant J.-C.) (140, fig. 3 c), un
pétroglyphee du Ouadi Mokatteb dans la presqu'île du Sinaï
(fig.. 36), des sculptures sur bois de lits de Madagascar
(fig.. /ig, 63), des dessins sur les huttes des indigènes du
Camerounn (103, fig. 3) et de l'Oubanghi (fig. 3j), des
gravuress rupestres du Sud-Oranais (140, fig. 6 ; 7 d, e ;
88 a, c ; 9 (e sur un chameau) ; 10 b), des dessins sur un
tambourr magique tartare ou mongol (140, fig. i5), une
peinturee rupestre de Sibérie orientale (140, fig. i4). des
L'ARTT PRIMITIF
7**
gravuress sur bambous de Nouvelle-Calédonie (140,
fig.fig. 18 6; 143, fig. 3o).
Less pieds de figures humaines sont omis dans les
sculpturess aurignaciennes, en particulier dans celle de
Lespuguee (142, fig. 10) et dans les statuettes en bois des
îless Carolines antérieures à l'influence des Blancs (111,
p.. 289, note 1 etfig. 1). De même, dans des gravures d'ani-
maux,, le contour des pattes est fréquemment interrompu
àà son extrémité inférieure et les pieds ne sont pas figurés,

Fig.. 37. — Dessin sur le mur d'une case à Balao (Oubanghij (relevé par le
capitainee Devaux, de l'infanterie coloniale). Officier blanc a cheval et
nègre.. Celui-ci n'a pas de vêtements, mais des boutons réservés en blanc
surr le noir de la peau. Déplacement des pattes du cheval (p, u 5 .
notee 2). Cavalier de face (p |5&) sans jambes (p. 73). Absence de
rêness (p. 85)

parr exemple dans les gravures aurignaciennes de Pair-


non-Pair(186,, p. i63, nos to-i/i), dans le Bison solutréen
dee la Grèze (186, p. 90, n° 3), dans de nombreuses gra-
vuress rupestres préhistoriques du Sud-Oranais (84,
fig.fig. ^9 b, 53, 55, 58, 5g, 6 1 , 64 a, 121), dans de
graffitii de Haute-Egypte (84, fig. 29), dans des marques
dee poteries prépharaoniques (84, fig. 29, 96 a, 100,
101,, io3).
Lee contour est encore interrompu au sommet du front,
LEE RÉALISME INTELLECTUEL ^5

entree les oreilles ou les cornes, dans un dessin digital de


laa Glotilde (fig. i5), dans des gravures rupestres du
Sud-Oranaiss (84, fig 80-87), dans des graffiti de Haute-
Egyptee (84, fig. 3 i , 32), dans des marques de poteries
prépharaoniquess (84, fig. 101, io3), dans une peinture
rupestree rouge de Koulak (Sibérie orientale) (54,
fig.fig. u 5 ) .
Less détails du visage sont complètement absents non
seulementt dans les premiers^bonshommes dessinés par nos
enfants,, où la tête se réduit à un contour grossièrement
circulaire,, mais encore dans des figures aurignaciennes,
statuettess de Lespugue et de Willendorf (142, fig. i o e t 12)
ett reliefs de Laussel (142, fig. 9, 84 a ; 122, fig. 6), et
danss les statuettes en bois des îles Garolines, où les dé-
tailss du visage ne sont figurés que dans les exemplaires
less plus récents, sous l'influence des Blancs (111, p. 289,
notee 1 et fig. 1 et 2).
Danss les figures où sont représentés les détails du vi-
sage,, yeux, nez, bouche, il arrive que tantôt l'un, tantôt
l'autree soit laissé de côté. La bouche en particulier est
assezz souvent omise. Les diverses explications, en parti-
culierr magiques, qu'on a proposées de cette omission ne
sauraientt avoir une valeur générale, ne fût-ce parce que
laa bouche est tantôt représentée, tantôt absente dans un
mêmee milieu, par exemple dans les dessins rupestres
australienss ou dans les figures des grottes funéraires néoli-
thiquess de la Marne, sans parler des dessins de nos en-
fants.. Dans le portrait d'un cavalier européen par un
nègree déjà cité pour l'omission des bras (225, pi. 37,
n°° 3), la bouche n'est pas figurée davantage, et pourtant
lee dessin ne représente pas un mort et n'avait nullement
l'intentionn de priver son modèle de la parole. L'explication
-gg L'ART PRIMITIF

laa plus probable doit être cherchée, à notre avis, dans le


rôlee secondaire attribué par le dessinateur à cet élément.
Less artistes dessinent les détails d'une figure dans un
ordree correspondant à celui dans lequel ils y songent, et
parr suite à l'importance qu'ils y attachent, et ils en figurent
pluss ou moins selon que leur attention s'épuise moins ou
pluss vite. L'importance attribuée à un détail dépend
principalementt de l'utilité qu'il présente, dans l'esprit de
l'artiste,, pour l'être représenté. On en peut donner
commee preuve les dessins des indigènes du Brésil. Les
Bororoo négligent quelquefois le nez, mais jamais la
bouchee ; les Bakaïri au contraire figurent toujours le nez
ett jamais la bouche. Leurs yeux ont bien vu également
l'unn et l'autre ; mais les Bakaïri s'intéressent au nez dont
ilss perforent la cloison, et les Bororo à la bouche dont ils
percentt la lèvre inférieure, dans les deux cas pour y
passerr ou y suspendre des ornements (208, p. 236).
Unn fait analogue nous est fourni par le dessin enfantin,
où,, quand les oreilles font leur apparition, c'est dans des
dessinss de dames, qui en ont besoin pour supporter des
boucless d'oreilles. De même, il est bien connu que chez
touss les enfants, au début et pendant une période assez
prolongée,, les bonshommes sont figurés sans aucun vête-
mentt (fig. 34, 38 ; 145, fig. 22, 1^2), même lorsqu'ils re-
présententt expressément des grandes personnes, que
l'enfantt n'a pas eu l'occasion de voir nues; et s'il est vrai que
l'expériencee de la nudité lui est fournie par lui-même, d'où
vientt que c'est de celle-là qu'il s'inspire à l'exclusion de celle
dee son corps habillé, néanmoins certainement beaucoup
pluss fréquente? C'est sans nul doute que le vêtement n'est
pass indispensable à la nature d'un être humain et que bien
pluss il est nuisible à sa représentation, puisqu'il en masque
LEE RÉALISME INTELLECTUEL
777
ett en un sens en supprime des éléments autrement es-
sentiels.. Il n'est même pas nécessaire pour caractériser le
sexe,, que suffisent à marquer une pipe pour les messieurs,
unn chignon pour les dames, une natte pour les petites
filles.filles. Chezde nombreux enfants, pendant assez longtemps,
less dames sont caractérisées, non par une jupe, mais par
dess plumes au chapeau.

Figg 38 — Dessin d'un Bavarois, 7 an» 'd'après REHSCHEHSTEINEB, 112,


pi.. IX, fig, 33). Petite fille. Absence de vêtements (p. 76). Bras rendus
pluss sommairement que les jambes (p. 72), ('orps de face et jambes de
profill (p. 169). Natte déplacée (p i56). Orteils vus d'en haut (p. 180,
notee 1). Cœur figuré par transparence (p. io3).
Fig.. 3g — Figure égyptienne d'une chapelle funéraire d'Abd-el-Kurna
(d'après(d'après WUKISSOH, 228, i r e série, II, p. 99). Personnages puisant de
l'eauu dans un bassin. Rabattement des arbres (p, i5o). Mélange de l'élé-
vationn et du plan (p, 176),

Certainss bonshommes sont d'une interprétation


ambiguë,, à savoir ceux où la tête surmonte deux longues
ligness parallèles ou obliques, soit droites, soit en forme
d'angless très obtus à sommet tourné en dedans. La partie
inférieuree de ces lignes, assez souvent terminée par des
pieds,, correspond certainement aux jambes; mais la partie
supérieuree peut représenter, soit le haut des jambes, in-
séréess dans la tête avec omission du tronc, soit le contour
7 88 L'ART PBIM1T1F

latérall du tronc, dont la partie inférieure ne serait pas


figurée.. De cette sorte sont des dessins au crayon d'un
indigènedee la Nouvelle-Guinée britannique(95. fig. 3-5).
Onn en trouve de nombreux exemples dans les illustrations
dess chants magiques des Ojibwa (150, pi. XVII, C, pre-
mierr caractère à gauche ; pi. XVIII, B, 2 e et dernier ca-
ractères)) et dans les Winter-Counts des Dakota (150,
fig.. 191, 217, 23i, 233). Du même genre sont divers pé-
troglyphess algonkins de l'île Cunningham (lac Érié)
(150,, fig 1090). Des bonshommes de ce type sont juxta-
poséss à d'autres de types différents dans des pétroglyphes
dee la Guyane anglaise (150, fig. n o 4 ) . Parfois, l'en-
semblee de la tête et du tronc est représenté uniquement
parr le contour du haut de la tête, à chacune des extré-
mitéss duquel s'insère à angle droit une ligne verticale
terminéee par un pied. Je citerai comme spécimens de ce
typee un dessin d'une fillette de la Jamaïque, âgée de 6 ans
(214,, fig. 12), un pétroglyphe du Nicaragua (150,
fig.fig. 1 io3), deux bonshommes dessinés par une femme du
Queenslandd (96, fig. 2 et 3).
Maiss dans bon nombre de spécimens, ce qui pourrait
semblerr n'être que la partie supérieure des jambes a cer-
tainementt l'intention de représenter les contours latéraux
duu tronc, avec omission de sa partie inférieure, car l'es-
pacee compris entre ces lignes latérales contient ou supporte
dess éléments du tronc. Tels sont par exemple un dessin
auu crayon d'un indigène de la Nouvelle-Guinée bri-
tannique,, où dans cet espace sont dessinés deux détails
quii semblent représenter le nombril et le phallus (95,
fig.fig. 8), des portraits dessinés par des Bakaïri et par un
Nahuqua,, où cet espace contient le phallus et en outre,
danss le dessin Nahuqua, le nombril et l'anus (208,
LEE RÉALISME INTELLECTUEL
799
p.. 234-235 et pi. III et IV;. Les bonshommes des Bororo
comprennent,, à côté de spécimens à tronc distinct, deux
exemplairess (portraits de K. von den Steinen et d'une In-
dienne;; (208, pi. V et VI), où les côtés du tronc se prolongent
directementt par les jambes. Mais comme ces lignes latérales
sontt coupées à mi-hauteur par des traits horizontaux re-

Fig.. io. — Gravure pariélale amignacienne de Hornos de la Peûa (d'après


OBBKMAIE»,, 166, fig 6i 6). Homme. Orteils vus d'en haut (p. 180, note J )
Figg ki. — Dessin d'un nègre de l'Afrique orientale ;d'après WSUIE. 225,
pi.. 3(j, n° k b). Danseur dans une fêle d'initiation. Corps de face et
lètee de profil; jupon vu d'en haut avec franges en rabattement circu-
lairee (p, r83,- Gorreclion tacite (p <j^).
Figg 'in — Dessin sur rouleau en écorce de bouleau des Ojibwa de Red
Lake,, antérieur à 1810 (d'après MAIXERT, 150, fig 8-i7>). Guerrier por-
tantt le scalp d'un ennemi. Contour du tronc supprimé entre les jambes
(pp 8o). Nom rattaché à la tète par une ligne (p. 93).

présentantt une ceinture, il en résulte que la partie de ces


verticaless si tuée au-dessus de la ceinture correspondait dans
l'espritt du dessinateur au tronc et non aux jambes. De
même,, dans des bonshommes des Dakota, l'espace ouvert
danss le bas, situé au-dessous de la tête, contient des seins
fémininss (150, fig. o35 et 1070) ou des taches de
rougeolee ou de petite vérole (150, fig. 870). L'homme
8oo L'ART PRIMITIF

àà côtes saillantes qui, chez ces Indiens, symbolise la fa-


mine,, se simplifie chez les Poltawatomi en bonshommes
àà tronc non séparé des jambes, mais dont la place est in-
diquéee par un trait horizontal correspondant aux côtes
(150,, fig. io46). L'espace correspondant au tronc con-
tientt le cœur et la « ligne de vie » qui le relie à la bouche,
figurésfigurés par transparence, dans des illustrations de chan
magiquess ojibwa (150, fig. i65 c, 166 c, h) et dans le
décorr d'une cloche en fer du Japon remontant au moins
auu xvme siècle et peut-être fort antérieure (150, pi. LU,
eelg).eelg).

3636 5S
Figg '|3. — Pétroglyphe de l'Amérique du Nord (d'après SCUOOLCBAFT
danss 214, Hg. 10).
Fig.. \!>- — Pétroglyphe des îles Bahama (d'après MILLMT, 150, llg. 102).
Figuress humaines sans tronc (p. 81).

Laa suppression de la partie inférieure du tronc entre


less jambes se rencontre également pour des bonshommes
dee profil, par exemple dans des gravures rupestres, pro-
bablementt néolithiques, de Thyout (Sud-Oranais) (84,
pi.. XXXV, n° 2, pi. XXXVII, n° 6), et dans un dessin
surr un rouleau en écorce de bouleau des Ojibwa de Red
Lake,, remontant au moins à 1810 (fig. 42).
Danss un autre type de bonhomme, ce n'est pas seule-
mentt la partie inférieure du contour du tronc qui fait
défaut,, mais le tronc tout entier. Parfois, sa place reste
videe entre la tête, les bras et les jambes : tels sont un dessin
LEE KÉAI.ISMF 1NTE1.LFCTUKL 8l

d'unn nègre adulte de l'Ouganda, où le contour de la tête


n'estt pas non plus figuré (214, fig. 3) et un dessin exé-
cutéé par une femme Zoulou (214. fig. n b). Mais ces
exempless sont tout-à-fait exceptionnels, et dans l'im-
mensee majorité des cas, les jambes s'insèrent directement
danss le bas de la tète. Des bonshommes de ce type se ren-
contrentt dans un pétroglyphe des îles Bahama et
danss un autre de l'Amérique du Nord (fig. 43 et 44), dans
dess gravures rupestres sud-oranaises de Thyout (84,
pi.. XXVIII, n° 9) et de Moghar-et- Tathani (84, fig. 92).
Less figures dessinées ou appliquées enreliefen plâtre, dans
unee intention prophylactique, au-dessus des portes des
maisonss d'Ouargla, et qu'on a souvent considérées
commee des survivances du symbole de ïanit (82,
p.. I 4 I et pi. II (fig. i36j ; 172, p. I 3 6 - I 3 7 et
fig.fig. i-5 à la p. i35), ne sont probablement que des
bonshommess sans tronc. On y retrouve les trois variantes
dee ce type de bonshommes que présente le dessin en-
fantinn : sans bras (82, pi. II, a ; 172, fig. 1, 3-5), avec
brass insérés dans la tête ou au maximum à la jonction
dee la tête et des jambes (172, fig. 2), avec bras insérés sur
less jambes (82, pi. II, b).
Lee motif de 1' M orant » qui décore des agrafes de cein-
turess burgondes (ve siècle après J.-C) est parfois repré-
sentéé sans tronc (fig. 45 et 46). Il n'est pas sans intérêt de
noterr que les auteurs de ces ouvrages n'étaient pas seulement
dess adultes, mais en outre des professionnels, et que leur
façonn de rendre le corps humain devait sembler satisfai-
sante,, comme à eux-mêmes, à leur clientèle, assurément
aristocratique,, notamment pour la pièce la plus informe
àà nos yeux, à bras insérés sur les jambes, et qui est un
objett de grand luxe, plaqué d'argent.
L'artt primitif. 4
LL AtlT PRIMITIF

Deuxx autres bonhommes sans tronc, à bras insérés dans


laa tête, dont au surplus le contour inférieur n'est pas
figuré,, ont été le premier gravé sur une noix de coco de
Matupii (Presqu'île de la Gazelle, Nouvelle Bretagne)
(833 bis, pi. XIX, n° 417), le second dessiné par un nègre
dee l'Afrique orientale. Il voulait représenter un danseur
surr échasses ; mais en fait c'est un bonhomme ordinaire,
carr chacun des traits correspondant à une jambe montée

Fig.. h^ et 46. — Décors d'agrafes de ceintures burgondes (d'après BAB&IÈRE


FLAÏT,, 10, pi. XXXVII, Eg C et pi. A2, fig. 3). Figures humaine
sanss tronc (p. 81 '.

surr échasse porte un pied placé non vers le milieu, mais


àà son extrémité inférieure (225, pi. 35, n° 4 a).
Dess bonshommes de ce genre se rencontrent non seule-
mentt dans le dessin, mais aussi dans la sculpture. Ainsi,
parmii les fétiches anthropomorphes des Koryak et des
Tchouktchii se trouvent des figurines en bois réduites à
deuxx tiges cylindriques divergentes qui correspondent aux
jambes,, surmontées d'une tête parfois presque inexis-
tantee (20, fig. 25o 6 et 2 51 6 ; 109, fig. 3,7,io). Un
bonshommee du même type se trouve parmi les figures
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 83

anthropomorphess plus ou moins stylisées qui décorent


unn chevet en bois de Nouvelle Guinée (120, pi. 56).
Danss des spécimens d'ailleurs exceptionnels, le tronc
n'estt pas absolument absent, mais il est combiné avec la
têtee dans un ensemble unique dont le contour est cons-
tituéé par deux cercles concentriques ; le cercle extérieur
jouee le rôle de tronc, car il supporte les bras et les
jambes,, et le cercle intérieur le rôle de tète, car il con-
tientt les yeux et le nez. Je connais deux exemples de ce
typee étrange de bonhomme : l'un, représenté à quatre
exemplairess à des degrés croissants de stylisation, sur un
churingaa d'un Niol-Niol de la baie du Beagle (Australie
Nord-Ouest),, (114, fig. 4), l'autre, peut-être néolithique,
gravéé à l'intérieur de la grotte de Bouzabaouine (dépar-
tementt de Constantine (190, fig. i). Ce qui me porte à
croiree que les deux ronds concentriques veulent représenter
laa tête et le tronc comme un ensemble indifférencié, c'est
quee dans la figure de Bouzabaouine, cet ensemble est sur-
montéé d'une coiffure qui le caractérise comme tête en
mêmee temps qu'il est caractérisé comme tronc par les
membress insérés sur le contour extérieur. Sur le chu-
ringaa Niol-Niol, les deux ronds concentriques sont re-
liéss par des traits en barreaux d'échelle semblables à ceux
dess bras et des jambes, ce qui semble en faire un con-
tourr unique, et surtout le rond central contient quatre
pointss qui sont, d'après l'interprétation d'un indigène,
less deux yeux et le nez, éléments de la tête, et le pénis,
appartenantt au tronc.
Enn dépit des spécimens que nous avons pu rassembler,
lee bonhomme du type sans tronc est relativement rare
danss l'art primitif des adultes, précisément parce que ce
sontt des adultes. Par contre il se rencontre à foison dans
844 LL ART PIIIMITIF

lee dessin enfantin, même en laissant de côté des cas am-


biguss où le tronc, non figuré en apparence, pourrait être
réellementt voulu et vu par le dessinateur dans ce qui
matériellementt a l'air d'être soit la tête, soit les
jambess (135, p. 693-699) ; et c'est par la forme sans
troncc (fig. 34 ; 145, p. 54-5y) que débute régulièrement
chezz nos enfants la représentation du corps humain. C'est un
dess points où se manifeste le plus nettement le rôle de la fina-
litéé dans le choix des éléments représentés. Si au début et
pendantt longtemps, l'enfant néglige cette partie du corps,
quii par ses dimensions n'a pu évidemment passer inaperçue,
sii même on n'arrive pas à la lui faire rajouter en lui en
signalantt l'absence, c'est sans aucun doute qu'il n'en
sentt pas l'utilité. Le tronc sert à contenir les organes vi-
tauxx internes ; mais comme l'enfant ignore d'ordinaire
l'anatomie,, il n'en sait rien. Cette déduction trouve une
confirmationn par voie de contre-épreuve dans le cas,
uniquee à ma connaissance parmi tous les enfants dont
less premières tentatives graphiques ont été l'objet d'une
observationn méthodique, d une petite Californienne dont
less bonshommes ont été d emblée pourvus d'un tronc.
Ellee figure à l'intérieur par un griffonnage le « tomac »,
qu'ellee énonce en même temps qu'elle le dessine. 3 mois
pluss tard, à 3 ans 7 mois, dans un portrait de son papa,
ellee dessine et énonce les poumons, l'estomac, « la mé-
caniquee qui fait marcher notre estomac, poump, poump;
l'autree morceau de l'estomac avec sa mécanique » (145,
fig.fig. 57). Il y a là des imlices de connaissances plus ou moins
fantaisistess sur l'anatomie et la physiologie et l'on com-
prendd que le tronc, réceptacle de « mécaniques » si cu-
rieuses,, ait été jugé digne d'être représenté.
Laa considération de la finalité explique non seule-
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 85

mentt l'absence primitive du tronc dans les bonshommes


enlantins,, mais aussi son apparition lorsqu'elle finit par
see produire. Si l'utilité du tronc pour l'homme en chair
ett en os continue à échapper à l'enfant, il s'aper<;oit que
lee bonhomme dessiné en a besoin pour recevoir les bras.
Quandd ceux-ci, d'abord négligés, font leur apparition,
l'absencee du tronc se maintient d'abord par la (orce de
l'habitude,, et l'enfant se tire d'affaire en insérant les bras
soitt sur les jambes 145, fig. 24-27). soit plus fréquemment
danss la tête (127, fig. 11 b ; 145, fig. 23, 28, 80-87, 97'
ioô).. Chez des enfiints de nationalités diverses, on
rencontree dans la série de leurs bonshommes sans
troncc des bras insérés dans la tête et d'autres sur
less jambes ; parfois, dans des dessins réunissant
deuxx personnages, chacun présente l'une des deux
insertionss ; il existe même des cas où l'un des bras est
inséréé dans la tète, l'autre sur une jambe. L'oscillation
mêmee de l'enfant entre ces modes d'insertion des bras
prouvee qu'il a jusqu'à un certain point conscience de
leurr imperfection, et c'est ce qui l'amène à dessiner le
tronc,, indispensable pour l'insertion correcte.
Citonss encore, comme dernier exemple de l'omission
dee détails jugés secondaires, l'absence des rênes (ou des
traitss dans nombre de dessins de cavaliers et d'attelages
(iig.. 35-37, ^7-/jg, b'5, 78, 9 1 , 126, i32). Ni les traits ni
less rênes ne sont figurés dans la voiture gravée sur l'un
dess supports de la sépulture de Kivik (102, p. 23g, fig.5).
Enn même temps que le réalisme intellectuel s'oppose
auu réalisme visuel en ce que, comme nous venons de le
montrer,, il s'abstient de figurer des éléments de l'objet
quii sautent aux yeux, mais n'intéressent pas l'artiste,
inversementt il ne peut se résigner à omettre des élé-
866 L'ART PRIMITIF

mentss qui, bien que non visibles, lui paraissent indis-


pensables.. Une manifestation particulièrement nette de
cettee tendance est la représentation d'éléments qui ne
sontt pas de nature visuelle. Des paroles prononcées par
unn personnage sont imperceptibles à la vue ; mais
commee c'est un des caractères du personnage de les
prononcer,, le réalisme intellectuel tient à les figurer dans
lee dessin. Nul n'ignore l'emploi de ce procédé dans l'art
duu Moyen âge et dans les dessins humoristiques de nos
jours,, où les paroles sont inscrites dans un phylactère
sortantt comme une sorte d'ectoplasme de la bouche de
celuii qui les prononce ; j'en ai relevé des exemples
danss les graffiti actuels. Il arrive aussi que les paroles
sontt simplement juxtaposées aux personnages. Sur une
imagee égyptienne, entre deux ouvriers occupés à forer des
vasess de pierre, des hiéroglyphes rapportent leur con-
versationn : « Voilà un beau vase. — Oui certes »
(23,, I, p. 97, fig. k"])- Sur un vase à figures noires du
Vaticann (163, II, pi. XXII), Achille et Ajax jouent aux
déss ; l'un annonce trois, l'autre quatre. Un vase de
Vulcii figure la première hirondelle, considérée ici, con-
trairementt au mot fameux d'Aristote, comme faisant le
printemps.. Trois personnages la regardent. L'éphèbe
ditt : Voyez l'hirondelle. L'adulte s'exclame : C'est par-
dieuu vrai ! L'enfant conclut : C'est bien elle ; c'est le
printempss (163, H, pi. XXIV ; cf. 175, IX, p. 365).
Lee nom, propriété essentielle bien que non visuelle, est
égalementt représenté parle réalisme intellectuel (fig. 92).
Noss enfants inscrivent fréquemment une légende sur
leurss dessins. Nous ne saurions accepter l'explication
souventt donnée de ce fait, à savoir que l'enfant, se ren-
dantt compte de l'imperfection de son dessin, juge cette
LEE RÉALISME INTELLECTl El. 87

additionn indispensable pour faire comprendre à autrui ce


qu'ill a voulu représenter. Dans la généralité des cas,
l'enfantt ne dessine pas en vue d'un public, mais uni-
quementt pour sa satisfaction personnelle. Lorsqu'il lui
arrivee de montrer ses u beaux a dessins, c'est pour faire
étalagee de son habileté, et il ne commettrait pas la mala-
dressee d'en signaler l'insuffisance. On pourrait admettre
laa nécessité d'une légende lorsqu'il s'agit d'un portrait qui
parr la matérialité de ses traits n'est qu'un bonhomme
anonyme,, mais l'enfant en met également à des dessins

Fig.. 47. — Figure incisée sur urne hallitatienne d'OEdenbnrg (Hongrie)


Echellee : 1/6, (d'après HOBSBS, dans 140, fig- lia). Cavalier ne reposant
pass sur le cheval (p 115). Déplacement des pattes (p, 120, note 2) et
dess oreilles {p 127, note 2). Absence de rênes (p. 85).
Fig.. £8. — Figure du Winter-count de Battîste Good (d'après MALLERT,
150,, fig. 272). Cïvalier. Déplacement des oreilles du cheval (p. 127,
notee 2)' Cavalier ne reposant pat sur le cheval (p, l i a ) , à deux jambes
visibless (p. 102). Absence de rênes (p. 85).

dontt l'interprétation saute aux yeux pour un adulte et à


pluss forte raison pour lui. Bien plus, il commence à ajouter
dess légendes à ses dessins alors qu'il ne sait pas encore
écriree ; comment pourrait-il avoir l'intention d'éclaircir
parr des mots illisibles la signification de son dessin, comme
parr exemple quand une petite Belge de 3 ans i / a place à
côtéé d'un dessin où elle s'est représentée un gribouillage
informee qui prétend être son nom (193, pi. XXXIV,
Yvonne)) ? Si l'enfant ajoute des légendes à ses dessins,
c'estt sans doute en partie parce qu'il en voit aux figures
g gg L ART PIUMITIF

dess livres qu'il a entre les mains et parfois à des dessins


exécutéss pour lui par ses pirents (exemple dans 42,
p.. i 4 , légende de la fig. 12). Mais là n'est pas la seule,
nii même la principale raison des légendes. En réalité,
l'enfantt considère le nom de l'objet comme un de ses
attributs,, un élément de son essence, au même titre que
sess différentes parties, à tel point qu'il éprouve parfois le
besoinn de l'inscrire sur des objets réels, comme s'ils
étaientt incomplets sans lui (133, p. 188). Il est donc tout
naturell que l'art primitif, dirigé par le réalisme in-
tellectuel,, tienne à figurer le nom à côté de la repré-
sentationn de l'objet. Cela n'est pas spécial à l'enfant. Les
peintress de vases grecsjuxtaposent le nom, non seulement
auxx personnages, pour lesquels on pourrait admettre qu'il
estt nécessaire à l'identification, mais même à des objets
quii n'offrent aucune ambiguïté, un trône, une cruche,
unee fontaine (175, VII, fig. 221, IX, fig. i 3 o , X , iig. 98
(vasee François, viesiècle) ; VIII, fig. 32 ; X, fig. y5). Dans
unee gravure sur calebasse des Ba Bouende du Congo,
représentantt un homme qui conduit une chèvre, l'artiste
aa placé à côté du personnage l'inscription « moi »
(151,, fig. 19). J'ai vu en 191-7, sur un abri d'une tran-
chéee de première ligne de la région de Tahure, un dessin
dee pipe accompagné de la légende : pipe. L'ensemble
étaitt de la même main et, d'après les circonstances, ne
pouvaitt avoir été exécuté que par un adulte.
Lee réalisme intellectuel figure également des parties
d'unn objet qui ne s'en distinguent pas pour l'œil, mais
seulementt pour la pensée abstraite. Divers enfants, dans
leurss bonshommes, limitent par un contour certaines
partiess du visage qui dans la réalité ne sont pas séparées
duu reste, non seulement les joues pour lesquelles on pour-
LEE RÉALISME INTELLECTUEL

raitt admettre que le contour limite la partie plus rosée des


pommettes,, parfois indiquée par une tache rouge dans les
dessinss coloriés (145, fig. 63) ou par un trait pelotonné dans
less dessins monochtomes (145, fig. 102 ; 211, pi. VI,
fig.. 7), mais aussi le front (193, pi. VIII), auquel cette
explicationn ne saurait s'appliquer. Dans un bonhomme
d'unn petit Allemand de 4 ans, les joues sont figurées par

Fig.. '19. — Gravure sur bois de lit de Madagascar Echelle : i / 3 . Dépla-


cementt en largeur des pattes p. 125. note 2) et des oreilles (p. 127,
notee 3) du cheval. Déplacement en largeur des jambes (p, 125, uote 1)
ett en hauteur des bras (p I»7, note 1) du personnage de profil. Ca-
valierr de face (p. îô'i) sans jambes (p. 73) Absence de renés (p. 85).

dess appendices latéraux qui out l'air de deux oreilles sur-


numérairess (211, pi. VI, fig. 3). Dans un dessin
d'unn nègre adulte de l'Ouganda, les joues sont repré-
sentéess par un contour circulaire au même titre que
less yeux et les oreilles, alors qu'en revanche le contour
de-- la tête est omis (214, fig. 3). I n enfant hollan-
daiss dessine à l'intérieur du tronc d'un bonhomme,
goo L'ART PRIMITIF

verss le bas, un petit rond qui, déclare-t-il, représente le


ventree (199, pi. III, fig 22). De même, dans quantité de
dessinss de quadrupèdes ou d'oiseaux, exécutés aussi bien
parr das adultes, même civilisés, que par des enfants, la
têtee et le corps, qui pour l'esprit sont deux éléments diffé-
rentss ayant chacun son nom, sont séparés par un trait à
l'endroitt du cou ou même figurée par deux contours tan-
gentss (145, fig. 112 et I3,'I), alors que dans la réalité ils
formentt un ensemble unique qui ne présente à l'œil aucune
séparation..
Danss des dessins enfantins de jardins (145, fig- 97), les
alléess qui en fait ne sont que le vide entre les massifs sont
représentéess par des traits distincts, et le sol dans lequel
sontt plantées les fleurs est figuré par une ligne à l'intérieur
dess massifs, alors que dans la réalité il ne fait qu'un avec
eux.. De même, dans le dessin d'un poste fortifié, un nègre
dee l'Afrique orientale figure par deux lignes parallèles
l'alléee centrale, qui dans la réalité était délimitée uni-
quementt par une rangée d'arbres de chaque côté (225,
pi.. 36, n° 2 b). Un autre nègre, dans le dessin d'une danse
dee femmes (225, pi. 34, n° 1), figure le cercle purement
idéall déterminé par leurs pieds sur le sol. Dans des des-
sinss de milieux variés, le sol est figuré uniquement par
unee ligne sur laquelle s'appuient les êtres représentés
danss le dessin ; j'en citerai comme exemples des gravures
magdalénienness sur pierres de Limeuil (Dordogne) (52,
pi.. II, fig. 1 ; pi. V, fig. 9, 11-13 ; pi. VII, fig. 20 ;
pi.. IX, fig. 3o), et un dessin au crayon d'un Miriti du rio
Tiquiéé (Brésil) (fig. i3o). Dans des figures où la
perspectivi:: est rendue par étagement des plans, chaque
-registree a sa ligne de terre (142, fig. 09 ; 175, II,
fig.fig. I 5 I et i5a ; 228, i " série, 111, p. 3a8).
LEE REALISME INTELLECTUEL
9 ''
Alorss que des êtres réunis en groupes ne présentent à
l'œil,, dans la réalité, que des relations topographiques,
lee réalisme intellectuel de l'art primitif tient à en figurer
danss le dessin d'autres, purement pensées et qui ne se
voientt pas, en réunissant par une ligne les êtres en rela-
tion.. Telle est par exemple la relation de parenté. Dans
plusieurss peintures rupestres néolithiques de l'abri de
loss Letreros à Vêlez Blanco (province d'Almeria, Es-
pagne),, une figure anthropomorphe, très probablement

Fig.. 5o. — Gravure rupestre de Thyout (d'après FLIMAXD, 8 4 , fig. 5


ett pi. XXXVII) Famille. Représentation de la relation de parenté
(P-- 9 ' ) .

féminine,, est reliée par des lignes à des figures sem-


blabless plus petites, qui doivent représenter ses enfants
30,, pi. X et XII, n° 2, rangée du bas). Ici, il est vrai,
l'interprétationn est rendue contestable par l'extrême sché-
matisationn des figures. Mais il n'en est pas de même dans
dess gravures rupestres, probablement néolithiques, de
Thyoutt (Algérie), où les personnages sont très nets. Ils
formentt des couples réunis par une ligne partant de
leurss parties génitales (84, pi. XXX, n° 1 ; pi. XXXII,
n°° 5 ; pi. XXXVII, n°' 1 et 1). Dans l'une de ces figures,
9 22 1.. ART PRIMITIF

unee femme est reliée de la sorte à la fois à un archer


ett à une figure plus petite placée entre eux (fig. 5o).
Ill semble difficile de ne pas reconnaître dans ce
groupee la représentation d'une famille. Un dessin de l'île
Miokoo (archipel du Duc d'York), pour exprimer que
ïilikii (Dieu), après avoir créé Tombuikor (la première
femme),, l'a épousée, figure leur union par une maison
dessinéee entre eux ; entre les cuisses de Tombuikor est

Fig.. 5 i . — Dessin de l'île Mioko (d'après BÔRNSTSIII, 2 1 , fig. 2D). La


premièree famille. Représentation de relations (p, 92), Cheveux figurés
individuellementt (p. 120, note 2). Vulve remontée (p, 121, note 2).
Jambess de profil symétriques ip, 169, note 1), Mélange d'élévation el
dee plan (p. 177).

unn petit bonhomme représentant leurs enfants ; Tiliki est


placéé dans un cadre garni d'étoiles qui figure le ciel,
pourr signifier sa nature divine (fig. 5i). Dans l'édition de
Térencee de J. Griininger (Strasbourg, 1/196), le frontis-
picee de l'Eunuque réunit tous les personnages de la pièce
enn symbolisant leurs complications amoureuses par des
ligness droites qui les relient (231, fig. 60). L'emploi de
LEE RÉALISME INTELLECTUEL g3

cee procédé s'explique en partie par des raisons d'éco-


nomiee : les figures étaient obtenues par la juxtaposition
pluss ou moins habile de bois passe-partout, si l'on peut
dire,, représentant des personnages, des édifices, des
paysages.. Il n'en reste pas moins que cette représentation
graphiquee des relations amoureuses convenait à la men-
talitéé de la clientèle. La relation de possession est tra-
duitee de la même façon. Dans des Winter-Gounts des
Dakotaa et dans le recensement fait en 1884 par le chef
Dakotaa Nuage-Rouge, nombre de personnages sont reliés
auu symbole de leur nom par une ligne partant de leur
tête.. 11 en est de même dans un dessin sur un rouleau en
écorcee de bouleau des Ojibwa de Red Lake, antérieur à
1810,, qui représente un guerrier portant le scalp d'un
ennemii tué (fig. 42). Dans un dessin eskimo repré-
sentantt un shaman soignant un malade, la tête de ce
dernierr est reliée par une ligne au mauvais esprit cause
dee sa maladie (105, fig. 142, signes i (le malade) et j
(lee mauvais esprit). Deux enfants, l'un américain (9,
p.. 459-46o), l'autre belge (193, p. io4), sont signalés
commee ayant représenté le rayon visuel par une ligne joi-
gnantt l'œil d'un personnage à l'objet qu'il regarde. Un
dessinn eskimo figure deux hommes voyageant avec un traî-
neauu traîné par trois chiens. Le côté de la tête (vraisembla-
blementt la bouche) de l'un des deux hommes est relié par
unee ligne à l'un des chiens, pour indiquer qu'il lui
adressee la parole (105, fig. i33). Hoffman ajoute (105,
p.. 910) à propos de cette figure : « Des « lignes de voix »
sontt fréquemment représentées de la même manière par
less Cheyenne, les Arapaho et les Dakota. Dans les picto-
graphiess racontant les expéditions de chasse et les diver-
tissements,, les Cheyenne sont peut-être une des tribus les
L'ARTT PRIMITIF

pluss avancées dans la représentation graphique des idées


less plus difficiles, concernant aussi bien les états subjectifs
quee les circonstances objectives. »
Unn exemple intéressant de représentation graphique
d'unee relation temporelle est fourni par une peinture ru-
pestree des Lillooet, qui représente un chasseur poursui-
vantt un cerf. Pour indiquer qu'il était midi quand le
cerff a passé le sommet de la montagne, il est surmonté
duu soleil d'où descend une verticale coupant le corps de
l'animall (216, pi. IX (en face de la p. 282), n° 5i).
Parr la représentation graphique de tous ces éléments
dénaturee non visuelle, l'art figuré dominé par le réalisme
intellectuell était orienté vers la pictographie ; il était
mêmee déjà une pictographie en puissance. 111'est devenu
pleinementt lorsque le dessin, d'abord simple extériorisa-
tionn des représentations mentales de l'artiste pour sa
satisfactionn personnelle, s'est proposé expressément de
less communiquer à autrui.
Cee processus est saisissable chez nos enfants. Lorsqu'à
unn âge où ils ne savent pas encore écrire avec des lettres,
ilss tiennent cependant à se faire comprendre par une
sortee d'écriture, ils recourent spontanément à la picto-
graphie.. C'est le cas des « lettres » écrites au petit Noël,
àà Saint Nicolas ou au Père Janvier par divers enfants de
!\!\ à 5 ans, de l'ancien et du nouveau continent, pour leur
indiquerr les cadeaux qu'ils désirent, et qui se composent
duu dessin de ces objets (42, p. 37-.S8 ; j'ai observé le
mêmee fait chez ma fille Simonne vers 4 ans 1/2).
Sii le réalisme intellectuel tient à figurer dans le dessin
dess éléments de nature non visuelle, il y figurera égale-
ment,, à plus forte raison, des éléments qui sont suscep-
tibless d'être perçus par l'oeil, alors même que dans les
LEE RÉALISME INTELLECTUEL g5

circonstancess normales ces éléments sont effectivement


invisibles,, étant inclus à l'intérieur d'un contenant
opaque.. Il les représentera alors comme s'ils apparais-
saientt à une sorte de radioscopie, ou comme si leur
enveloppee était pour l'occasion devenu transparente.
Aussii donnerons-nous à ce procédé le nom de trans-
parence,parence, quitte à en préciser la nature après l'examen
faits..
Laa transparence présente pour l'étude du réalisme
intellectuell un intérêt spécial et fournit en quelque sorte
unn cas privilégié. D'une manière générale, les procédés
caractéristiquess du réalisme intellectuel ne peuvent être
observéss que dans le dessin et non dans la sculpture. Le
dessinn n'ayant que deux dimensions et ne pouvant être vu
quee lout d'un coup, les éléments du modèle qui sont dans
lee dessin y sont, ceux qui n'y sont pas n'y sont pas. et il
estt aussi impossible à ceux qui y sont de cesser d'y être
qu'àà ceux qui n'y sont pas de s'y trouver. Tous les élé-
mentss que l'artiste tient à y mettre y doivent donc figurer
enn même temps, alors que dans la réalité ils ne seraient
visibless que de points de vue différents et successifs. Le
dessinateurr est donc obligé de choisir, qu'il s'en doute ou
non,, entre les deux « partis » du réalisme visuel et du
réalismee intellectuel, et par suite celui-ci dans son oppo-
sitionn au premier se manifeste à plein dans le dessin. Il
n'enn est pas de même pour la sculpture. Dotée de trois
dimensionss comme l'objet qu'elle reproduit, elle contient
commee lui la possibilité de différents aspects successifs,
bienn que l'œil n'en puisse apercevoir plus d'un à la fois.
Tandiss que tout ce qui se trouve dans le dessin est simul-
tanémentt visible, et que rien de ce qui ne s'y trouve pas
nee l'est jamais, dans limage sculptée comme dans le mo-
966 LL ART PRIMITIF

dèlee tout ce qui s'y trouve n'est pas visible simultanément,


maiss l'est successivement. Par suite, réalisme visuel et
réalismee intellectuel coïncident dans la sculpture ; elle est
doncc en général incapable de mettre en évidence cette
dernièree conception de l'ait figuré.
Maiss lorsqu'il s'agit d'un élément masqué par une
enveloppee opaque, c'est-à-dire à la fois invisible et réel,
lee réalisme intellectuel ne peut le figurer, même en
sculpture,, sans se mettre en contradiction avec le réa-
lismee visuel. La transparence fournit donc dans les
œuvress plastiques aussi bien que graphiques la preuve
quee l'artiste qui recourt à ce procédé considère le réa-
lismee intellectuel comme le principe de l'art figuré.
Nouss commencerons par écarter certains spécimens où
laa transparence pourrait n'être qu'apparente. Les diffé-
rentess parties d'un dessin sont forcément exécutées les
uness après les autres, en principe dans l'ordre de
l'importancee que l'artiste leur attribue. Il arrivera donc
quee dans le dessin achevé, les lignes correspondant à des
partiess invisibles apparaissent sous les lignes tracées en-
suitee des parties qui les masquent, et celle ci auront l'air
dee laisser apercevoir les autres. Un moyen d'éviter cette
apparencee serait assurément d'effacer les lignes qui « ne
comptentt pas ». Mais d'ordinaire, l'artiste primitif ne se
donnee pas cette peine ; il considère comme inexistantes
less lignes qui ne comptent pas et les biffe pour ainsi dire
mentalementt ; c'est ce que j'ai appelé la correction
tacile.tacile. La principale occasion de pseudo-transparen
parr correction tacite est fournie parles vêtements qui,
dessinéss après le corps, ont l'air de laisser transparaître
less parties du corps qu'ils recouvrent et masquent. Les
dessinss de nos enfants en offrent des exemples à profu-
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 97

sionn (145, p. i2-i4). Tels sont encore, pour l'art


paléolithique,, le personnage masculin gravé sur l'une des
facess d'un galet de la Madeleine, où l'on aperçoit la
silhouettee du visage sous le masque qui le recouvre (142,
fig.fig. 112), ou, parmi les dessins d'un nègre de l'Afrique
orientale,, le portrait d'un Européen où le haut de la tête
estt visible sous la coiffure (225, pi. 37, n° 3) et la
figurefigure d'un danseur dans une fête d'initiation, où les
hanchess transparaissent sous le jupon en fibres (fig. lyi).
Ill est jusqu'à un certain point conforme à l'apparence
visuellee que l'eau des rivières ou de la mer, au moins
lorsqu'ellee est calme, laisse transparaître les poissons ou
autress animaux aquatiques. Cette transparence, fréquente
danss le dessin enfantin (145, fig. 77 ; 193, pi. XLV1II,
Rachel,, 5 ans 1/2) comme dans l'art égyptien (fig. io3 ;
154,, fig. p. 61 et 62 ; 23, p. 283, fig. n 4 )
ett chaldéo-assyrien (175, II, fig 107, 212, 220,
pi.. XII, en haut à droite ; III, fig. 8 et 9 ; 154,
fig.fig. p. 5^2, 552, 617), se retrouve sur le relief d'une
plaquee votive en ivoire du temple d'Artémis Orthia
àà Sparte (ix e -vn e siècles avant J . - C ) , où des poissons
sontt visibles sous un bateau sur la poupe duquel est
unn pêcheur à la ligne (153, p. 3o, fig. 8), dans un
dessinn d'un nègre de l'Afrique orientale (225, pi. 33,
n°° 16), dans des gravures sur bois des Eskimo du détroit
dee Smith (76, pi. VII), ou encore dans la miniature du
baptêmee du Christ dans l'antiphonaire de Salzburg
( r ee moitié du xinc siècle) (177, pi. XXVIII). Dans cette
mêmee miniature et dans une autre d'un manuscrit de la
bibliothèquee de l'Universiléd'Innsbrtick. (Un du xui" siècle)
(226,, p. 198, fig. 91), on aperçoit par transparence toute
laa partie immergée du corps du Christ.
LL ART PKIMITIF

Sii la transparence de l'eau peut-être dans une certaine


mesuree conforme au réalisme visuel, il n'en saurait être
dee même pour la terre. Cela n'empêche pas nos enfants
dee représenter souvent des plantes en pots dont la tige
transparaîtt à travers la tene et la paroi (145, fig. 107), des
arbress dont les racines sont visibles dans le sol (fig. 5a).
Ill en est de même dans une gravure sur la paroi d'une
tombee rupestre égyptienne antique à Arèg ^oasis d'Am-

Figg 5:». — Dessin de Jean L., 7 ans fi mois (d'après LUQUET, 145»
fig.fig. 138). Maison frappée par ta foudre. Personnage sans bras (p. ~o)
figuréfiguré à l'intérieur de la maison par transparence (p 98) Racines
l'arbree visibles par transparence (p 98). Maison à trois faces (p. i&&).

mon),, représentant le sacrifice funéraire d'une vache


(fig.. 61).
Laa transparence des maisons pourleur contenu, meubles
ouu habitants, fréquente dans le dessin enfantin (fig. 52 ;
145,, fig. 108) ne l'est pas moins dans l'art primitif.
Ellee se rencontre par exemple dans des gravures sur
bambouss néo-calédoniens (143, fig. i!\, 35, 70), dans
dess dessins eskimos (105, fig. 5o, 79, nn haut à
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 99

droite,, 9 1 , n° 7, i42, pi. 60, n° 6 (plusieurs spécimens),


p l . 8 i , n o s 3 e tt 4) et tchouktchis (20, fig. 273, 282, 289),
danss des dessins de nègres de l'Afrique orientale (225,
p.. 102 et pi. 35, n° 6 (station missionnaire avec person-
nagess dans l'église), pi. 36, n° 1 a (préparation du sel,
parr le même dessinateur), pi. 34, n° 3 (femme pilonnant
duu grain à l'intérieur de sa maison), pi. 4 i , n° 2 (repas
auu mess, par un nègre qui a reçu un enseignement du
dessin)) On peut en rapprocher des peintures rupestres
dess Lillooet, expliquées par des indigènes comme repré-
sentantt sans doute des animaux dans leur terrier (216,
pi.. IX (en face de la p. 282), nos 35 (où l'animal est un
grizzlyy représenté symboliquement par l'empreinte de
sonn pied) et 45).
Less parois des bateaux ne sont pas moins transpa-
rentess pour l'art primitif que celles des maisons, par
exemplee dans des dessins d'enfants (187, fig. 12 et i5),
danss les peintures de vases dipyliens (63, v° navis,
fig.fig. 5625 et 5 6 a 6 ; 70, p. 71, fig. 5o ; 175, VII,
fig.fig. !\() et 6 r ) et d'un vase béotien représentant l'enlève-
mentt d'Ariane par Thésée (206, I, fig. 2g4). dans des
gravuress sur bambous de Nouvelle-Calédonie (143,
fig.fig. 10 et 46), dans divers dessins d'un indigène de l'île
Bougainvillee (îles Salomon) (85, fig. 68).
Danss les trains de chemin de fer représentés par nos
enfants,, les voyageurs sont souvent visibles à travers les
paroiss des wagons. Sur 20 écoliers belges de 5 à 6 ans,
invitéss à dessiner un convoi funèbre, 18 figurèrent le
mortt visible sur le corbillard (193, p. i54). On rencontre
même,, par exemple chez un Belge de 7 ans 1/2 (193,
pi.. XXXVI, en haut à gauche) et un Irlandais de 8 ans
d'unee école de Californie (145, fig. 142), des exemples de
IOOO LL ART l'RIMITIF

doublee transparence, le cadavre visible à travers le cer-


cueill lui-même visible à travers le corbillard. Un dessin
exécutéé et commenté par un Koryak maritime de la ri-
vièree Opuka représente la légende de deux sœurs qui,
pourr échapper aux mauvais traitements de leur beau-père,
s'enfuientt dans une baleine en bois fabriquée par elles et
quii se transforme en une vraie baleine. Le dessin les

Fig.. 53. — Dessin de Dakota (d'après MALLERT, 150, fig. 355).


Femmee enceinte. Transparence (p. 109).
Fig.. 54. — Décor céramique de Numance (d'après TABACBSA AGCIRRE,
215,, pi. 27, fig,*;6). Oiseau, Transparence (p, 108).
Fig.. 55. — Dessin de Roger C , Français, 5 ans (d'après LUQUET, 145,
fig.fig. 96). « Un œuf avec un canard dedans ». Transparence (p. 101).
Fig.. 56. — Dessin eskimo sur peau de morse (d'aprè» Hormu,
105,, pi. 8i, n' 1C1. Baleine pleine. Transparence (p. 108).

montree par transparence dans le corps de la baleine (109,


p.. 20-21 et fig. i). Dans un dessin de l'île Mioko (ar-
chipell du Duc d'York) illustrant la légende d'après
laquellee ïiliki (Dieu) créa Tombuikor (la première
femme)) dans un arbre, Tombuikor est vue par transpa-
rencee dans le tronc de l'arbre (21, p. 2^6, fig. a4).
D'autress récipients opaques laissent également aperce-
voirr leur contenu. Dans un dessin d'une fillette de 7 ans
LEE RÉALISME INTELLECTUEL IOI

88 mois qui représente une dame revenant du marché, ses


achatss sont visibles à l'intérieur de son panier (145, fig. 78).
Unn petit garçon de 5 ans dessine à plusieurs reprises « un
œuff avec un canard dedans » (lîg. 55). Dans un dessin
d'unn gâteau des Rois, une petite Française de 3 ans
55 mois tient à figurer la fève invisible à l'intérieur (133,
fig.fig. 95 et 112).
Lee scrupule que nous exprimions plus haut à propos

Fig.. 57. — Figure sur une œnochoé d'Aradipo (Chypre) (vin-vu* siècle
avantt J.-C.) (Musée du Louvre, A. M. 68a) (d'après POTTIEB, 182, fig. i).
Cavalierr à deux jambes visibles (p, 103). Déplacement des oreilles
duu cheval (p. 137, note a),

dess vêtements n'est pas de mise lorsque les parties mas-


quéess dans la réalité et néanmoins figurées ont été dessi-
néess les dernières. Par exemple, dans un dessin gravé sur
bambou,, représentant un Blanc, l'artiste néo-calédonien a
réservéé en clair, pour les faire ressortir sur le reste
hachuré,, des détails du costume qui l'ont frappé, les
pochess et l'emplacement des boutons. Il figure de la sorte,
nonn seulement ceux du veston, mais aussi ceux de la
braguette,, cachés dans la réalité par une patte d'étoffe
1O33 L ART PRIMITIF

(143,, fig. 69). Dans de nombreux dessins de cavaliers,


l'artt primitif aussi bien des adultes (fig. 48, 57, i34)que
dess enfants (112, pi. 34, n° 2 ; pi. 35, n os 2, 4 ; pi. 38,
n088 21, 22 ; 187, fig. 19) figure à la fois la totalité du
corpss du cheval et les deux jambe du personnage,
bienn que dans la réalité le corps du cheval masque
laa jambe du second plan du cavalier et soit à son
tourr partiellement masqué par la jambe du premier plan.
Quee le cheval ait été dessiné en premier, comme cela pa-
raîtt être le cas général, ou seulement après le person-
nage,, dans un cas comme dans l'autre il ne saurait être
questionn de correction tacite. La transparence, il est vrai,
n'estt pas absolument certaine lorsqu'on ne dispose pas
d'explicationss de l'artiste, car il pourrait avoir eu l'inten-
tionn de figurer un personnage montant en amazone et non
àà califourchon ; mais dans certains cas, en même temps
qu'ill figure les deux jambes du cavalier, le dessinateur,
parr exemple, une fillette de 6 ans 10 mois, déclare expres-
sémentt qu'elles sontdes deux côtés du cheval (133, p. 192
ett pi. CXI, n° 1275).
Lee procédé de la transparence est tout indiqué pour la
représentationn des organes internes dans des figures
d'hommess ou d'animaux. Dans le dessin enfantin, la re-
présentationn des viscères à l'intérieur du corps humain
estt tout à fait exceptionnelle : dans une collection de
messieurss dessinés par 4.ooo écoliers d'Anvers, garçons
ett filles, de 3 à i3 ans, on n'en a relevé qu'un seul
exemplaire.,, d'un garçon de 11 ans (200, p. 32). Mais
celaa doit tenir, au moins pour les enfants les plus jeunes,
àà l'ignorance de l'anatomie : la petite Californienne dont
nouss avons déjà parlé (p. 84) figure les organes internes
danss ses premiers bonshommes, vers 3 ans 1/2. Dans
LEE HÉAL1SMB 1 INTELLECTUEL 1 o3

unn bonhomme de la même époque, elle dessine la


cloisonn interne du nez, qu'elle énonce expressément « ce
quee nous avons entre les côtés de notre nez » (42. p. i5).
Lee cœur est figuré à l'intérieur du corps d'un bonhomme
parr deux écoliers de Munich de 7 et 8 ans (fig. 38 ; 112,
pi.. 7, n° 11). Un petit Français de 7 ans dessine une
mainn (145. fig. I I O ) . On lui demande : « Pourquoi ces
traitss dans la main ? — C'est des nerfs. — Mais je n'en
voisvois pas dans ta main. — Ils sont dans la viande. »
Dess exemples analogues se retrouvent dans le Paléoli-
thiquee européen. Sans faire état de spécimens dont l'in-

Fig.. 58. — Os découpé magdalénien de Lorthet (d'après Pitri-g, dans 142,


fig.fig. 76). Poisson. Transparence (p. io3).

terprétationn peut prêter à controverse, je citerai le pois-


sonn (truite?) à contour découpé dans une lame d'os de
Lorthet,, qui montre sur une de ses faces la représentation
schématiséee du tube digestif et de l'estomac (fig. 58).
Ill est extrêmement probable que la tache rouge à l'inté-
rieurr d'une biche noire d'Àrdales (province de Malaga)
(29,, fig. 4) et d'un éléphant aurignacien à contour rouge
dee Pindal (138, p 4i ; 142, fig. 77) correspond égale-
mentt au cœur vu par transparence. Sur l'extrémité de
bâtonn troué magdalénien en bois de renne de Laugerie-
Bassee dont l'un des prolongements latéraux a été inter-
io44 L'ART PRIMITIF

prêtéé en poisson stylisé, l'autre, interprété en phallus,


portee sur les deux faces la représentation des testicules
(ett peut-être du canal de l'urèthre) vus par transparence
(39,, p. 7^i fig- 3o), exactement comme dans de nom-
breuxx graffiti de nos jours.
Lee cœur, généralement accompagné de la << ligne de
viee » qui le relie à la bouche, est figuré par les Ojibvva
nonn seulement dans les muzzin-ne-neen ou figures des-

Fig.. 59. — Décor peint sur vase zuiïi (d'après VERWORX, 223, fig. Jy).
Cerf.. Ligne de vie figurée en transparence (p io5). Bois du type des
Millareââ à andouillers en dedans (p iO4) et oreilles déplacées (p. 137,
notee 2). Sabots à onglons déplacés ou vus d'en haut (p, 181).
Fig.. 60 — Peinture sur peau des Indiens Mandan. Echelle : enviton 1//1.
(d'aprèss KÙBN, 120, pi. 4o). Buffle. Représentation individuelle des
poilss (p. 119, note 2). Cornes de face (p. 161, notei). Sabots en plan (p. 182).

tinéess à des pratiques d'envoûtement (150, p. 4o


ett fig. 700 et 701), pour lesquelles on pourrait admettre
quee ces organes n'ont pas été figurés dans une intention
graphique,, mais pour recevoir la substance qui devait
produiree l'effet magique sur l'être représenté, mais égale-
mentt dans des dessins dépourvus de rôle magique, faisant
partiee d'illustrations de chants magiques et représentant
soitt des Esprits ou manitous, comme « le Chat sauvage
I.BB RÉALISME INTEI.LF.CTI_EL Io5

souterrainn » (150, fig. 670 a et c) ou Minabozho (le


Grandd Lapin , révélateur de la magie (104, fig. 6), soit
dess magiciens représentés sous forme tantôt humaine,
tanôtt animale (104, fig. 7, 8 ; pi. III, c ; fig. 160 c, e, g,
hh ; fig. 166, c, h, i). Des figures analogues ont été ren-
contréess parmi les gravures tracées sur les faces horizon-
taless des couches de rocher à la carrière de Pipestone
(Minnesota)) (150, fig. 5o) et parmi celles d'un abri sous
rochee de Virginie Occidentale (150, pi. XXXI). On en
retrouvee dans la décoration céramique peinte des Zuni
(fig.. 5Q ; 18, p. 222, fig. g i , n° 1), chez les Eskimo (105,
fig.fig. i 3 8 ; pi. 66, n° 2) et dans le décor d'uue cloche en 1er
japonaisee remontant au moins au xvm e siècle et peut-être
trèss antérieure (150, pi. LU, d, e, g).
Dess peintures rupestres des Lillooet montrent égale- .
mentt le cœur et les côtes de quadrupèdes, la colonne ver-
tébralee d'un poisson (216, pi. IX (en face de la p. 282),
noss 28, 29, 38). Dans des animaux dessinés au charbon
surr les murs par un Baré du Brésil Nord-Ouest, deux
oiseauxx sont figurés avec le tube digestif et l'estomac, un
fourmilierr avec les côtes et le cœur (115, fig. 1, a, b, e)
Danss le Winter-Count que Battiste Good, Dakota
Brûléé né en 1821, exécuta en 1879, mais d'après un
exemplairee plus ancien, l'année 1826-1827 est caracté-
riséee par l'événement suivant. Six Dakota sur le sentier
dee la guerre, presque morts de faim, rencontrèrent et
mangèrentt la carcasse pourrie d'un vieux buffle dévoré
parr les loups. Immédiatement ils furent saisis de dou-
leurss d'entrailles, leur ventre se gonfla, ils émirent des
gazz par la bouche et l'anus, et ils moururent « d'avoir
avaléé un sifflet ». Dans la figure, ou le sentier de la guerre
estt symbolisé par un arc et une flèche, on voit les gaz sor-
io66 L'ART PRIMITIF

tantt de la bouche La volute qui, dans d'autres figures


duu même Winter-Count, signifieles douleurs d'entrailles,
estt figurée deux fois, l'une à côté du corps, l'antre à
l'intérieurr de lui,et y représente parsuite les intestins vus
parr transparence (150, fig. 383).
Dess statuettes humaines en bois de l'île de Pâques, re-
présentantt d'après leur face et leurs membres des person-
nagess sans doute vivants et en tout cas non décharnés,
montrentt le squelette du tronc, non seulement les ver-
tèbres,, les omoplates, les clavicules et les côtes, qui dans
laa réalité se manifestent sous la peau par des reliefs, mais
aussii l'appendice xyphoïde du sternum, recourbé en de-
danss (Musée d'Etnographie du Trocadéro, n° 21.497;
41,, p. 174, fig. i58 ; 126, p. 260, fig. 1, 2, 5, 6).
D'autress objets contenus dans un corps sont également
figurésfigurés à son intérieur. Un petit Belge de 4 ans, qui a
àà dessiner des oiseaux en train de pondre, figure, outre
less œufs pondus sous le corps de l'oiseau, d'autres œufs
danss le corps (193, p. 73). La gravure magdalénienne
surr os de Laugerie-Basse qui représente une loutre à côté
d'unn poisson a dans le ventre un autre poisson, d'ailleurs
peuu visible et qui est longtemps passé inaperçu (39,
fig.fig. i3).
Unn événement qui selon la tradition des Dakota se
seraitt produit dans l'année I 8 5 O - I 8 5 I , à savoir qu'un
Dakotaa Minneconjou, ayant tué un buffle femelle, avait
trouvéé dans sa panse une vieille femme, est figuré dans
less deux Winter-Counts de Lone-Dog et The Swan de la
mêmee façon, par un buffle dont le corps contient une
formee humaine (150, pi. XX et fig. 235 ; fig. 672).
Onn peut encore recourir à la transparence pour repré-
senterr la pénétration partielle d'un objet dans un autre,
I.EE RÉALISME INTELLECTUEL 1O77

parr exemple d'une flèche dans le corps d'un animal ou


d'unn homme. Déduction faite des spécimens où la trans-
parencee ne peut être reconnue avec certitude (138, p. 42-
Ixb),Ixb), elle est incontestable quand la pointe de la flèche est
figuréefigurée à l'intérieur du contour du corps ou le touchan
duu dehors, surtout lorsqu'elle est accompagnée de la re-
présentationn de blessures indiquant sans équivoque qu'elle
aa pénétré dans le corps. Des exemples de ce genre se ren-
contrentt dans le dessin enfantin (fig. 14o), dans l'art paléo-
lithiquee européen, notamment dans un bovidé et un
bisonn gravés sur le sol à Niaux(186, p. 161, n os 2 et 3),
danss la céramique grecque (175, IX, p. 6 i 5 , fig. 326),
danss le Winter-Count du Dakota Battiste Good. La
plupartt du temps, les flèches sont figurées au contact
immédiatt du corps et accompagnées d'une tache
rougee correspondant à une blessure (exemple : 150,
fig.fig. 3/|2). L'événement caractéristique des années 1750-
17511 et I 8 3 O - I 8 3 I : « on a tué plusieurs buffles blancs
femelless est représenté par un buffle percé d'une flèche
dontt la pointe est visible à l'intérieur du corps (150,
fig.fig. 307 et 387). J'ai observé dans les graffiti des murs
dee nos rues des représentations analogues du symbole
amoureuxx du coeur percé d'une flèche et également, par-
foiss très probablement de la même main, d'organes sexuels
enn copulation.
Onn ne saurait s'élonner que l'art primitif recoure à la
transparencee pour représenter la gestation. Dans certaines
gravuress rupestres du Sud-Oranais. en particulier à
Thyout,, l'inscription d'un animal dans un autre plus
grandd résulte selon toute vraisemblance d'une superposi-
tionn accidentelle de dessins d'auteurs différents, et dont
auu surplus la technique semble parfois indiquer de no-
io88 L'ART PRIMITIF

tabless différences d'époque, lorsque les deux animaux


appartiennentt à des espèces ou même à des familles zoolo-
giquess différentes (84, fig. 124 n ; pi. XXX, n° i^ ;
pi.. XXXV, nos 3, 6, 9). Mais il n'en est sans doute pas
dee même d'une gravure de Kef-Mektouba, où le corps
d'unn éléphant en contient un autre, peut-être pourvu
d'unn cordon ombilical (84, fig. 218). Parmi les figures
eskimoo dessinées sur une peau de morse pour représenter
less événements d'une année se trouve une baleine pleine
(fig.. 56).
Deuxx spécimens sont particulièrement curieux, en tant
quee la figuration du jeune à l'intérieur de la mère y est
appliquéee à des animaux ovipares, oiseau sur une sorte
dee tasse à fond hémisphérique de Numance (environ
111ee siècle avant J.-C.) (fig. 54 ; 215, pi. 27 (avant la p. 83),
fig.fig. 6, au milieu de la rangée inférieure), raie dans un
dessinn d'un nègre de l'Afrique orientale (225, pi. 33,
nM)..
Commee spécimens d'emploi de la transparence pour
représenterr des femmes enceintes, je puis citer d'abord
cellee qui est figurée sur une roche gravée néolithique
espagnolee découverte par le marquis de Cerralbo à Retor-
tilloo (province de Soria) (45, pi. III, 2e figure de la
lignee a), dans une composition réunissant les phases suc-
cessivess de la vie humaine (en puissance dans les parents,
viee fœtale, enfance, âge adulte). J'ai moi-même observé
parmii les graffiti des murs de nos rues quelques exem-
plairess de cette représentation de la grossesse. L'un d'eux,
rappelantt la gravure rupestre de Retortillo, juxtaposait
deuxx tableaux figurant, l'un un couple humain effectuant
l'actee sexuel, l'autre une femme enceinte à fœtus vu par
transparence.. Dans le Winter-Count de Balliste Good,
LEE RÉALISME INTELLECTUEL

l'événementt caractéristique de l'année 1798- 1 799, nom-


breusess femmes mortes en couches, peut-être de la fièvre
puerpérale,, est figuré par le dessin d'une femme à ventre
rendee contenant une petite figure humaine. En avant du
ventree est dessinée la volute qui, comme dans plusieurs
autress figures du même Winter-Count, représente les
intestinss tordus, symbole des douleurs d'entrailles
(fig.. 53). Une figure de femme enceinte, à ventre conte-
nantt un fœtus la tête en bas, était peinte sur une porte
enn Nouvelle-Guinée (58, p. 56, n° 780 et pi. XXXIX,
n°° 8). L'art chrétien a employé à maintes reprises la
transparencee pour figurer la grossesse de la Femme de
l'Apocalypse,, de la Vierge Marie, de sa mère sainte Anne
ett de sa cousine sainte Elisabeth, réunie à Marie dans les
scèness de Visitation (fig. 62 ; 139 ; 196). Il a recouru au
mêmee procédé pour représenter la conception par l'opéra-
tionn du Saint-Esprit. Un émail limousin du Musée de Lille
(collectionn J. de Vicq, n° 180) figure la colombe symbo-
lisantt le Saint-Esprit sur le sein de la Vierge, c'est-à-dire
danss son sein, comme le prouve la légende inscrite sur
l'émaill par l'artiste lui-même : l'intérieur de la Sainte
Vierge.. Un thème iconographique plus compliqué se ren-
contre,, avec des variantes de détail, dans diverses enlumi-
nures,, peintures ou sculptures du xve siècle, représentant
dess Annonciations ou des Visitations: Dieu le Père est relié à
laa Vierge Marie par des rayons lumineux contenant Jésus
ett la colombe du Saint Esprit (226, p. 226, fig io3 ;
179,, I, p. 832-834 et fig. ^07 et 4o8 ; 72, p. 97,
fig.fig. 8 ; 73, pi. XII).
Less exemples relatifs à la gestation nous permettent de
préciserr la nature véritable de la transparence et sa signi-
ficationfication psychologique. L'artiste figure dans le corps
M OO LL ART PRIMITIF

laa mère non son contenu effectif, mais la forme achevée


dee son fruit. C'est ainsi que nous avons vu représentés

Figg Si. — Image sur la paroi d'une tombe rupestre égyptienne antique »
Arègg (oasis d'Ammon) (d'après STEINDOBI, 207, p. i36, Arbre à racines
visibless (p. 98). Vache à pattes déplacées (p. 120, note 2) et cornes
dee face (p 161, note 1).
Fig.. 6a. — Statue de Sainte Anne décorant la porte d'une maison de
Notre-Damee de Liesse (Aisne) (Croquis d'après nature du 9 no-
vembree 1918.) Transparence (p. 109I.

danss le corps d'un oiseau et d'une raie un oiseau et une


raie,, qu'aucune dissection ne permettrait d'y apercevoir.
Dee même, dans l'art chrétien, les enfants dans le sein de
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1II

leurr mère n'y sont nullement représentés à l'état embryon-


naire.. Ils sont fréquemment figurés dans l'attitude de la
prière,, Jésus dans celle de la bénédiction, Marie sous la
formee d'une jeune femme portant Jésus dans ses bras.
Quee Jésus soit représenté dans le corps de Marie par une
fio-urefio-ure humaine ou, comme dans une miniature d
xvn ee siècle (7, II, p. 219), par son symbole 1HS entouré
d'unee auréole, dans un cas comme dans l'autre le dessin
estt simplement la traduction de cette phrase : Marie est
laa mère de Jésus, la représentation graphique de la rela-
tionn abstraite de filiation, au même titre que la ligne qui,
danss la gravure rupestre de Thyout (fig. 5o), relie l'enfant à
sess parents. Par suite, soit dit en passant, il serait fort aven-
tureuxx de tirer des figures de ce genre des conclusions sur
less connaissances ou les croyances de leurs auteurs au
sujett de la posture fœtale.
Maiss ce que nous venons de dire de la gestation s'ap-
pliquee aux autres cas de transparence. En figurant par
exemplee les habitants dans une maison ou les poissons
danss la mer, l'artiste ne songe nullement à signifier que
sii l'on y pénétrait au lieu de la regarder du dehors, on
pourraitt les y voir avec les yeux, mais simplement qu'ils
yy sont pour l'esprit. Ici encore c'est d'une relation abstraite
quee le dessin donne une traduction graphique. C'est seu-
lementt dans une [.hase postérieure, chez des artistes dont
laa mentalité se rapproche de la nôtre, qu'à la relation
intellectuellee de possession d'un élément par un objet se
substituee la relation visuelle de possibilité d'être vu en
mêmee temps, par l'intermédiaire de la relation mixte, à
laa fois intellectuelle et visuelle, de contenant à contenu.
Alorss les Vierges enceintes par transparence sont rem-
placéess par les Vierges ouvrantes, de même que les figures
II I a (.ART PRIMITIF

dee nos livres d'anatomie, pour faire apparaître les organes


internes,, représentent les parties plus superficielles coupées
ett écartées, delà façon qu'elles se présentent effectivement
danss une dissection. Mais ces procédés qui, pour satis-
fairee au réalisme visuel sans sacrifier le réalisme intellec-
tuel,, choisissent un cas privilégié où ils se trouvent coïn-
cider,, n'appartiennent déjà plus à l'art primitif.
Lee réalisme intellectuel de l'art primitif ne s'oppose
pass seulement au réalisme visuel en ce qu'il figure l'invi-
sible,, mais encore par la façon dont il figure le visible.
Cee qu'il veut rendre de l'objet réel, c'en est non l'aspect,
maiss l'essence. Mais dans un dessin, qui n'est qu'un en-
semblee de lignes, l'essence ne peut être traduite que par
unn aspect. En conséquence, alors qu'un objet peut pré-
senterr dans la réalité une foule d'aspects différents par
suite,, soit de ses modifications propres, soit du point de
vuee d'où il est envisagé, parmi tous ces aspects, égale-
mentt légitimes, l'artiste primitif choisit spontanément,
avecc une régularité impressionnante, l'aspect le plus apte
àà distinguer l'objet représenté de tous les autres, celui qui
permett le mieux de le reconnaître, soit par sa forme d'en-
semblee ou silhouette, soit par les détails qu'il offre à la
vue.. J'appelle exemplarité ce choix de l'aspect caractéris-
tique,, que l'artiste effectue spontanément et non en vertu
d'unee décision réfléchie.
Cettee exemplarité est bien nette dans les thèmes les
pluss fréquents de l'art primitif, l'homme et les animaux.
Bienn que tous aient certainement été vus par les artistes
d'unee foule de points de vue, on pourrait dire de tous
less points de vue possibles, il y a pour la représentation
dee chacun d'eux, dans les milieux les plus variés de l'art
primitiff à travers le temps et l'espace, un point de vue
LEE RÉALISME INTELLECTUEL Il3

largementt prédominant, parfois même presque exclusif.


C'estt la vue à vol d'oiseau pour les animaux bas sur
pattes,, lézards, crocodiles, tortues (ce qui, dans les
exemplairess d'exécution grossière, leur donne l'apparence
dee bonshommes de face) et pour les poissons plats. Les
mammifèress quadrupèdes, les oiseaux. Tes cétacés et les
poissonss sont presque toujours figurés de profil.
L'hommee est le plus souvent représenté de face. Chez
l'enfant,, où l'on peut suivre l'évolution chronologique de
laa représentation d'un même objet, la vue de face est
pendantt longtemps exclusive pour la figure humaine; et
mêmee plus tard, lorsqu'il est arrivé à dessiner des
bonshommess de profil et par suite n'est pas détourné d'en
figurerfigurer par une difficulté d'exécution, ils restent relative
mentt rares et ne se rencontrent guère que comme élé-
mentss de tableaux d'ensemble qui exigent ce point de vue
pourr les personnages, par exemple dans des dessins d'une
damee poussant une voiture de bébé, où la dame doit être
dee profil comme la voiture, ou des dessins de cavaliers,
oùù l'homme doit être de profil comme le cheval. En
somme,, l'aspect choisi spontanément par l'artiste pri-
mitiff pour le dessin d'un objet quelconque est déterminé
parr la proscription générale du raccourci, qui modifie la
formee caractéristique de l'objet représenté.
Lee souci d'exemplarité qui caractérise l'art primitif est
pluss manifeste encore dans le rendu des détails que dans
celuicelui de l'ensemble. Tout objet est composé de parties ou,
sii l'on préfère, dans -son ensemble il contient des détails.
Pourr l'œil, l'ensemble n'est rien de plus que le total des
parties.. Par suite, pour le réalisme visuel, une fois
choisii pour la représentation de l'ensemble le point de vue
d'oùù il présente son aspect caractéristique, toutes ses
L'artt primitif. 5
L'ARTT PRIMITIF

partiess doivent être figurées telles qu'elles apparaissent


dee ce même point de vue. Pour le réalisme intellectuel,
less détails ne sont pas des parties d'un ensemble, mais
dess attributs d'un sujet ; le rôle du dessin n'est pas de les
l'airee voir, mais de les faire comprendre. Us devront donc
êtree rendus, comme l'ensemble lui-même, par leur as-
pectt caractéristique. Chacun a, pourrait-on dire, sa forme
enn soi, que le réalisme intellectuel tient à lui conserver,

Fig.. 63. — Gravure sur bois de lit de Madagascar. Echelle : 3/4. Cavalier.
Heprésenn ation individuelle des poils de la crinière (p n p , note 3): dé-
placementt des pattes (p 125, note a) et des oreilles (p. 127, note 2) du
cheval.. Cavalier de face (p. i54) sans jambes (p. fi). Chapeau en l'air
(p.. 115, note >).

mêmee quand elle e&t incompatible pour l'œil avec celle


dess autres éléments qui lui sont réunis dans un même
objett et avec celle de l'objet qui les rassemble tous en
lui.. Le dessin d'un objet traduit pour le réalisme visuel
unee image d'ensemble indécomposable, pour le réa-
lismee intellectuel un assemblage d'idées indépendantes.
L'aspectt caractéristique d'un objet constituant son
LEE RÉALISME INTELLECTUEL I 15

essence,, il doit le conserver partout et toujours ; le dessin


doitt le figurer au complet, même lorsque dans la réalité
ill est partiellement caché. Par exemple, pour éviter la
suppressionn du haut de la tête d'un personnage par la
coiffuree qu'il porte, cel le-ci sera figurée soit tangente au
bordd supérieur de la tête (dessins d'enfants : fig. 92 ; 145,
fig.fig. 101, 102 ; 214, fig. i 5 a), soit en l'air au-dessus

Fig.. 6(4. — Stèle funéraire d'Aguilar d'Anguita. Échelle : environ i/a5.


(d'aprèss le marquis de CEEKALBO, 57, fig. p. A37). Cavalier. Déplacement
dess pattes du cheval (p. 120, note 2). Cavalier de face (p. Ï5_'I) et
enn l'air (p. 116, note 1).
Fig.. fiô. — Gravure rupestre d'El-Hadj-Mimoun (région de Figuig, Sud-
Oranais)) (d'après FLAUAND, 85, pi XXII, n° ili). Cavalier. Déplacement
dess pattes du cheval (p 120. note 2). Cavalier de face (p. I5.'I) debout
surr le cheval (p. 115, note i\ Le bouolier n'est pas tenu à la main
(p.. 117, note 1). Absence de rêne» (p. 85).

d'elle l .. Pareillement, dans quantité de dessins de cavaliers,


lee personnage est figuré tantôt debout sur le cheval 2 , tantôt
11
Dessins d'enfants : fig. i32 ; 145, fig. 24-26, i3o. — Gravure,
peut-êtree néolithique, de la grotte de Bouzabaouine (départe-
mentt de Constantine) : 190, p._ 147, fig- I. — Sculptures sur
boiss de lits de Madagascar : fig. 63.
22
Dessins d'enfants : fis. i32 ; 145, fig. 100 ; 187, fig. 20 ; 193, pi-
XVI,, René, 5 ans ; 214, fig. 45 g, 46. — Gravures rupestre du
Sud-Oranaiss et du Sahara : fig. 65 ; 84,"fig. 110, 112 ; 140, fig. 7 b,
100 o et c. — Dessin d'un Karaja du Brésil : 118, p. i5, fig. 104.
II ,() L ART PRIMITIP

enn l'air au-dessus de lui h Sur des vases du Dipylon, des ,


personnagess montés dans un char (175, VII, fig. 7) ou des
guerrierss sur le pont d'un bateau (175, VII, fig. 63) sont
figuréss comme perchés sur le bord. Les occupants d'une
embarcationn sont figurés en l'air au-desus d'elle dans des
pétroglyphess de l'âge du Bronze du Bohuslân (102, p. a35,
fig.fig. 1), dans un dessin de l'île Mioko (archipel du Duc
d'York)) représentant l'arrivée en pirogue du chef d'une
sociétéé secrète (fig 85), dans une scène de pêche dessinée
parr un nègre de l'Afrique orientale (225, pi. 38, n° 1).
Nonn seulement dans cette figure, mais encore dans tous
less dessins de bateaux du même nègre, les rames sont re-
présentéess à part (225, pi. 34, n° 7). Dans de nombreux
dessinss d'enfants différents, des tramways ou des trains
dee chemin de fer sont représentés au-dessus des rails, avec
unn intervalle entre ceux-ci et les roues (145, fig. i 4 , io3).
Onn rencontre également des voitures à roues figurées à
quelquee dislance au-dessous de la caisse non seulement
danss le dessin enfantin, mais aussi dans l'art primitif des
adultes,, par exemple sur des vases du Dipylon (175, VII,
fig.fig. 6 et 7). Dans un dessin d'un petit Français de
66 ans 1/2 représentant son papa qui veut prendre un
journall placé sur une chaise, le journal est figuré en l'air
au-dessuss de la chaise (145, fig. 106). Dans une gravure ru-
pestree australienne qui représente un émou couvant, les
œufs,, en réalité invisibles sous le ventre, sont figurés à
unee certaine distance au-dessous de lui (157, pi. XVI,

11
Dessins d'enfants : 145, fig. 90 ; 214, fig. 47 a. — Gravure sur
unee stèle de la nécropole celtibérique d'Aguilar d'Anguita
(Espagne)) (vers 400 avant J.-C.) : fig. 64. — Gravures rupestres
duu Tidikelt (140, fig. 11 a et b) et de la presqu'île du Sinaï (140,
fig.fig. l3 a).
LEE BÉALISME INTELLECTUEL I 17

n°° 4). Dans d'autres figures rupestres australiennes repré-


sentantt un kangourou femelle portant son petit dans la
pochee marsupiale, le petit est figuré dans son entier, tan-
gentt extérieurement au contour abdominal de sa mère
(fig.. 1 iA ; 155, pi. I (en face de la p. 268), n° 1, en haut
àà droite). Dans des figures provenant de milieux va-
riés,, des armes qui, dans la réalité, sont partiellement
cachéess par la main qui les tient, sont dessinées à côté,
soitt tangentes, soit à une distance plus ou moins grande;
laa main, de son côté, quand elle est figurée, présente se
doigtss ouverts et pour ainsi dire étalés 1 .
Cecii permet de mieux comprendre un fait signalé pour
lee dessin enfantin par Barnes (9, p. 461) et Levinstein
(127,, p. 4o) et dont ils ont donné une interprétation se-
lonn nous inexacte (145, p 107-108). Dans la représenta-
tionn de scènes mouvantes, d' « histoires », le dessinateur
figureraitfigurerait la « préparation » de préférence à la « ca
trophee ». Parexemple, dans l'histoiredeJean Nez-en-l'air,
ill dessinerait plutôt Jean se dirigeanfvers le chien qui le
feraa tomber que trébuchant sur lui. Il est exact que dans
lee dessin tel qu'il se présente à la vue, Jean est séparé du
chienn ; mais l'interprétation postule implicitement et ar-
bitrairementt que le dessin soit en réalisme visuel. Quand

11
Exemples : Archer blanc d'une peinture rupestre paléoli-
thiquee d'Albarracin (Espagne orientale) : 35, pi. II, en bas
àà gauche. — Stèle funéraire de Villafranca (premier âge du
Fer)) : 102, p. 219, fîg. 4. — Gravures rupestres du Sud-Oranais:
fi<r.. 65-91 ; 140, fig. 7 b 84, pi. I. — Dessins sur calebasses des
Baa Bouende du Congo : 151, fig. 2, pi. 6. — Sculptures sur bois de
litss de Madagascar : fig. I 3 I . — Gravure comanche sur os :
fig.fig. l34. —- Gravures sur bambous néo-calédoniens : 143,
fig.fig. 16, 61, 62. — Dessin enfantin : fig. 92.
ii 18 I.'ART PRIMITIF

lee chapeau d'un bonhomme est figuré en l'air au-dessus


dee sa tête, le dessin ne prétend évidemment pas signifier
quee ce chapeau se prépare à le coiffer; et de même un
cavalierr en l'air au-dessus du cheval n'est pas pensé par
lee dessinateur comme se préparant à enfourcher le cheval,
maiss comme effectivement monté sur lui. Il est donc infi-
nimentt vraisemblable que dans la représentation d'une
histoire,, le dessin qui semble correspondre à la prépara-
tionn en réalisme visuel veut en réalité, dans l'intention de
l'artiste,, figurer la catastrophe en réalisme intellectuel.
Parr exemple, dans des scènes où des flèches sont figurées,
nonn dans le corps de l'être qu'elles blessent, mais en
dehorss de lui dans sa direction (par exemple dans la gra-
vuree magdalénienne sur bois de renne de Fontarnaud,
représentantt un poisson : 142, fig. 79), l'artiste n'a pas
selonn nous voulu signifier qu'elles volaient vers lui, mais
qu'elless l'avaient effectivement atteint ; mais il les en a
détachéess dans son dessin pour les figurer dans leur inté-
gralité,, au même titre que dans une autre façon, signalée
pluss haut, de traiter le même thème, leur pointe est
commee vue par transparence dans le corps de la victime.
Onn en dirait autant d'un motif fréquent dans les graffiti
dess murs de nos rues, celui du couple erotique, souvent
réduitt aux organes sexuels ; bien que dans le dessin ils se
présententt d'ordinaire détachés l'un de l'autre, ce n'es
pass la préparation, mais la catastrophe, que le dessinateur
avaitt l'intention de représenter.
L'artistee primitif ne voit pas l'objet qu'il veut repro-
duire,, il le conçoit ; dans son esprit, les parties de cet
objett sont des idées, au même titre que l'objet total. Par
suite,, pour les traduire, il s'y prendra de la même façon
quee pour rendre des objets différents réunis dans un spec-
LEE RÉALISME INTELLECTUEL lig

taclee complexe. Il tiendra à ce que chacune conserve dans


sonn intégralité son aspect caractéristique, et la figurera
danss l'ensemble auquel elle est incorporée comme si elle
étaitt isolée. Par suite, pour un observateur interprétant le
dessinn en réalisme visuel, les parties auront l'air d'être
détachéess de leur entourage ou déplacées par rapport à lui
pourr les mettre en évidence.
Cettee opposition du réalisme intellectuel au réalisme
visuell se manifeste d'abord dans la représentation du
feuillagee des arbres, du pelage ou du plumage des ani-
maux.. Pour l'œil, ils forment une masse indistincte;
l'artt primitif en dissocie les éléments constitutifs. AinsiL
danss des exemples dont l'énumération pourrait s'étendre
àà l'infini, on trouve représentés individuellement les poils
dess quadrupèdes 1 , en particulier ceux de la queue 2 et
pourr les chevaux ceux de la crinière 3 , les plumes des

11
Dessins d'enfants : 127, fig. 27 ; 145, fig. 100. — Dessins sur
calebassess des Ba Bouende du Congo : 151, fig. 9, 16.
22
Vache et son veau, décor peint d'un larnax de Gournia
(Crète)) (Minoen récent III) : fig. 70. — Vases chypriotes :
fig.. 71 ; 164, fig. 12. — Dessins sur les huttes des indigènes du
Camerounn : 103, fig. 3. — Bison dans un dessin exécuté vers
18400 par le chef Sioux Cerf-Blanc : 150, fig. 667. — Dessin d'un
Paressi-Kabisii du Brésil : 198, p. 224. n g- I 2 6- — Fourmilier
dessinéé au charbon par un Baré du Brésil Nord-Ouest : 115, fig.
11 e. —- Chevaux gravés sur bambous néo-calédoniens : iig. 66 ;
140,, fig. 19.
33
Peinture rupestre paléolithique de Minateda (Espagne
orientale)) : 28, fig. 18, n° 3. — Figure incisée sur une urne ciné-
rairee d'Œdenburg : 140, fig. 4 e- — Décor peint de vases dipy-
lienss (vers le vm e siècle avant J.-C.) : 164, fig. 2 et 3. — Sculp-
turess sur bois de lits de Madagascar : fig. 63. — Gravures sur
bambouss néo-calédoniens : flg. 66 ; 140, fig. 18 c-e, 19 ; 143,
fig.fig. 3o, 35, 3 9 , 42.
I 3 OO I- ART PRIMITIF

oiseaux1-;; dans les figures humaines, les cheveux 2 , les


poilss de la moustache et de la barbe 3 , du pudendum
muliebre*.muliebre*.

pig.. 66 — Gravure sur bambou néo-calédonien. Echelle : r / a . (d'après


LUQUET,, 1 4 3 , fig. 45). Cavaliers. Représentation de la ligne de terre
(p.. 90). Représentation individuelle de» poils ip. 119, note» 2 et 2). Dé-
placementt des pattes (p. 125, note 2) et des oreilles (p. 157, note 21 Mé-
langee de points de vue pour la tète (p. 179 1 . Cavaliers de face (p. iô5).
11
Deux cigognes dans les peintures paléolithiques du grand
abrii de la Visera : 33, p. 319, fig. a. — Peintures céramiques
égéo-mycénienness : 170, fig. 28, 29, 3l, 46, 48. — Dessins sur
calebassess des Ba Bouende du Congo : 151, pi. 8. — Dessin d'une
pintadee par un nègre de l'Afrique orientale : 825, pi. 33, n° 1. —
Dessinn eskimo : 105, fig. i4- — Peintures rupestres des Lillooet
expliquéess par des indigènes comme des aigles : 216, pi. IX (en
facee de la p. 282), n os 27 et 5o. — Dessins au charbon de deux
Baréé du Brésil Nord-Ouest : 115, fig. 1 a (ailes), 1 6(ailes et
queue),, 2 b (queue). — Gravures sur bambous néo-calédoniens :
143,, fig. 39 et 44.
22
Dessins d'enfants : 145, fig. 23, 99, 100. —' Dessins sur cale-
bassess des Ba Bouende du Congo : 151, fig. 8, l3. — Dessins de
l'îlee Mioko (archipel du Duc d'York) : fig. 5i et 85 : 21, fig. 25. —
Bonhommee dessiné par une femme du Quensland : 96, fig. 2. —
Figuress rupestres australiennes : 155, pi. I, fig. I (plusieurs
peintures)) ; 157, pi. XVI, n° 2 (gravure). — Gravures sur
bambouss néo-calédoniens : 143, fig. 16-18, 37, 43, 44, 63.
88
Dessins sur calebasses des Ba Bouende du Congo : 151,
fig.fig. 4 (à droite), 7, 19, 23.— Dessins des Bororo et des Nahuqua :
208,, p. 236 et pi. Bororo I et Kulisehu II.
** Statuette énéolilhique en albâtre d'Almérie : 204, fig. 83,
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 121

Danss les cas, d'ailleurs relativement rare?, où nos en-


fantss songent à figurer les narines dans des bonhommes à
têtee de face, elles sont d'ordinaire, pour les rendre plus
visibles,, remontées de la base du nez sur son corps,
oùù elles sont juxtaposées soit en longueur (145, fig. io4 ),
soitt même en hauteur (145, fig. io5).
Danss des représentations féminines de face, les seins
sontt écartés et pour ainsi dire étalés de part et d'autre du
tronc 1 ;; la vulve est remontée plus haut que sa position
normale,, pour la mieux mettre en évidence 2 . Par contre,
danss des bonshommes gravés sur bambous de Nouvelle-
Calédonie,, les oreilles sont descendues, parfois jusqu'à
s'insérerr dans le menton, pour les détacher des cheveux
(143,, fig. /|3). Dans un bonhomme dessiné par un nègre
dee l'Afrique orientale, le scrotum est dissocié en deux
boursess accrochées au bas du tronc de chaque côté
ett à une certaine distance de la verge (225, pi. 38,
n°° i ) . Dans des statues en pierre d'Atnebar (îles Kei),
représentantt des personnages masculins accroupis, le

n°° i. — Statuette en terre cuite d'Egypte ; 204, fig. 83,


n°° 3. — Statuettes de Chaldée, Assyrie et Perse : 175, II, fig. 16,
2311 ; V, fig. 209. — Gravures sur bambous néo-calédoniens :
143,, fig. 19, 3o, 44.
11
Peinture sur un cratère du Dipylon : 175, VII, p. 5g, fig. 6.
—— Peinture sur un vase géométrique de Délos : 71, p. 118, fig. 79.
—— Figures australiennes : fig. 74 ; 156, pi. XXI, n° 4 ; 157,
pi.. XV et pi. XVI, n° 2 ; 155, pi. I, fig. 1 ; 11, pi. XI. — Nou-
velle-Calédoniee : 143, fig. 19 et 3o (gravures sur bambous), 88
etg33 (pétroglyphes). —Peinture pariétaledos Bushmen (fig. io5).
22
Figures australiennes : 155, pi. II, fig. 2 et 3 ; 156, pi. XXI,
n°° 4 ; 157, pi. XVI, n° 2. — Nouvelle-Calédonie : 143, fig. 19 et 3o
(gravuress sur bambous), 98 (pétroglyphe). — Dessins de l'île
Miokoo (archipel du Duc d'York) : fig. 5i ; 21, fig. 25.
I 2 22 LART PRIMITIF

péniss pendant est remonté sur le ventre et le scrotum est


figuréé didyme au-dessus du phallus comme un lorgnon
surr un nez (fig. 76 ; 188, pi. XXII, n09 2 et 3).
Unee petite Française de 5 ans 1/2, dans le dessin d'une
poupée,, étale des deux côtés les brides du tablier (145,
fig.fig. 64), sans songera se demander comment il pourrait
tenirr dans ces conditions. De même, dans des gravures sur
bambouss néo-calédoniens, la tapa, ceinture à franges
caractéristiquee des femmes dont elle constitue l'unique
vêtement,, est souvent figurée se prolongeant horizontale-
mentt de chaque côté du corps (143, fig. 19, 22-2/1),

Fig.. 67. — Dessin d'un nègra de l'Afrique orientale (d'après WEULE, 225.
pi.. 35, n" 5 6). Corvée de femmes enchaînées. Corps de profil à
seinss étage» (p. i3o) et bras de face (p. iG8, note i), avec le peliele vu d'en
hautt (p. i85). Déplacement des cartouchières du policier qui les surveille
(PP .

alorss qu'en réalité elle est enroulée autour des reins.


Pareillement,, dans deux dessins d'un même nègre de
l'Afriquee orientale représentant l'un des hommes, l'autre
dess femmes enchaînés, le policier qui surveille le
groupee a ses cartouchières étalées en dehors des cuisses
pourr les faire ressortir (fig. 67 ; 225, pi. 35, n° 5 b).
Dess déplacements analogues se rencontrent dans d i -
versess représentations de bateaux. Dans une gravure sur
bambouu néo-calédonien figurant un navire européen, les
chaloupess qui dans la réalité sont suspendues aux bossoirs
àà la hauteur du pont, sont représentées accrochées au
LEE RÉALISME INTELLECTUEL I î3

fondd de la coque, comme si elles flottaient sur l'eau (143,


fig.. 10). De même, dans un bateau dessiné par un nègre
dee l'Afrique orientale, pour mettre en évidence les écou-
tilles,, qui ne seraient pas visibles dans la représentation
enn élévation donnée de l'ensemble du bateau, le dessina-
teurr les a transportées du pont sur la coque, où elles se
présententt sous la forme de deux grands sabords rectan-
gulairess de chaque côté du mât (225, pi. 34, n° 7).
L'aspectt essentiel d'un objet est surtout modifié pour
laa vue lorsqu'il est situé en arrière d'un autre qui le
masquee plus ou moins. Bon pour le réalisme visuel de
supprimerr dans le dessin la partie rendue ainsi invisible;
lee réalisme intellectuel représentera dans son entier l'objet
situéé au second plan et se contentera, pour indiquer qu'il
estt en arrière, de le dessiner au-dessus : la perspective
seraa traduite par un étalement des plans. Ceci se ren-
contree par exemple dans un dessin d'enfant pour la repré-
sentationn des couples d'une noce (145, fig. 56), dans une
gravuree magdalénienne sur ardoise du Ghaffaud pour la
représentationn de deux files de chevaux (142, fig. 59).
Danss deux peintures rupestres paléolithiques du Vall-
tortaa (Espagne orientale) figurant une chasse aux cerfs,
less cerfs et en outre dans la seconde figure les chasseurs
quii leur font face sont disposés en registres superposés
(142,, fig. 25 et 56). Dans la fresque de la chasse au san-
glierr de Tirynthe, les chiens sont figurés en entier au-
dessuss et au-dessous du sanglier qu'ils poursuivent (170,
fig.fig. 17). L'étagement des plans se retrouve dans une
peinturee bien connue des Bushmen représentant un com-
batt entre des Matabélé et des Bushmen qui leur ont
voléé un troupeau de zébus (3, pi. III) et dans des dessins
australienss (205, I, p. 286, fig. 4o (dessin sur écorce
I2 / || L'ABT PRIMITIF

dee la région du lac Tyrrell). Des exemples analogues sont


fourniss par la représentation de rangées parallèles d'arbres
danss l'art primitif de nos enfants (145, fig. 73; ou d'adultes
(fresquee d'un temple du Yucatan (époque toltèque) : 120,
pi.. frontispice). Dans un bas-relief assyrien commémo-
rantt la prise d'une ville (175, II, p. 157), les person-
nagess de la pompe triomphale sont répartis en deux re-
gistress placés l'un au-dessous, l'autre au dessus de la
ville.. Une disposition analogue est appliquée à des files
dee soldats dans l'art égyptien, ou d'esclaves de corvée
traînantt une statue colossale dans l'art égyptien (175, I,
p.. 527, fig. 298 ; 154, fig. p. 335) et assyrien (175 II,
fig.fig. I 5 I et i5à)i II en est de même pour les attelages ani-
maux,, par exemple dans un dessin d'enfant (fig. i32j.
Less deux chevaux ou bœufs traînant une char-
ruee sur des gravures rupestres de l'âge du Bronze du
Bohusliinn (Suède) (lîg. ia5) ou une voiture sur une dalle
dee la sépulture de Kivik (102, p. 23g, fig. 5) et sur des
urness cinéraires de Prusse occidentale (environ v e siècb
avantt J.-C.) (121, pi. 10-12) sont figurés en entier, l'un
au-dessus,, l'autre au-dessous du timon. Dans un dessin
d'unn Koryak représentant une course de traîneaux, les
deuxx rennes attelés à chaque traîneau sont étages de la
mêmee façon (109, p. 724, fig. 243). Sur le papyrus égyp-
tienn d'Ani, les deux paires de bœufs attelées de front pour
traînerr une momie sont disposées de la même façon que la
pairee unique des exemples précédents (124, pi. X.fig. 3i).
Danss un dessin eskimo sur peau de morse où sont figurés
deuxx traîneaux attelés de trois chiens, ces derniers sont
dessinéss l'un au-dessus de l'autre, de sorte que les traits
d'attelagee forment un angle avec sa bissectrice ,105,
pi.. 81, n° 17). Le désir de figurer dans son entier un être
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 125

situéé derrière un autre et partiellement masqué par lui se


manifestee de la façon la plus curieuse dans une gravure
pariétalee magdalénienne de Font-de-Gaume, représentant
unee troupe de chevaux attaqués par un lion. L'un des
chevauxx aurait eu en réalité ses pattes de devant mas-
quéess par un autre situé devant lui. L'artiste les a déta-
chéess du corps auquel elles appartiennent et les a trans-
portéess entre les deux paires de pattes du cheval du pre-
mierr plan, de sorte que celui-ci a l'air d'avoir six
pattes,, l'autre en revanche n'en ayant que deux (142,
fig.fig. 80).
Danss un animal vu de profil, les organes pairs sont
situéss dans deux plans parallèles. Qu'il s'agisse d'organes
mohiless comme les ailes des oiseaux, les pattes ou les
oreilless des animaux, les membres de l'homme, ou d'or-
ganess rigides comme les cornes, dans tous les cas leur
insertionn reste fixe, et celle de l'organe du second plan
estt toujours masquée par celle de l'organe du premier
plan.. Pour montrer dans sa totalité l'organe du second
plan,, le réalisme intellectuel le figure parallèle à l'autre
parr déplacement soit dans le sens horizontal pour les
jambess humaines de profil *, les pattes des quadrupèdes 2
11
Dessins d'enfants : 145, fig. 7, 3i, io/J, I 3 I ; 193, pi. XVIII,
Georgette,, 5 ans 1/2 ; pi. XXI, Eugène B., 11 ans ; pi. XXIV,
O.,, 10 ans ; 127, fig. 16. — Dessins d'Européens adultes : 127,
fig.fig. 18 c et (I. — Gravures rupeslres Scandinaves de l'âge du
Bronzee : fig. 77 ; 19, pi. 12, fig. 3, pi. i3et i5.— Dessins de nègres
dee l'Afrique orientale : 225, pi. 37, n° 5 et pi. 39, n° 3 (deux
dessinss du même nègre) ; pi. 38, n° 1, pi. 4°. n 0 8 2 et 5.
22
Dessins d'enfants : fig. i32; 145, fig. 32, 34, 100, III ; 193,
pi.. XII bis, XIII, XIV, XVI ; 127, fig. i5, 19-23, 35 6 et /, 36. —
Dessinss digitaux sur argile de la Clotilde de Santa Isabel (Auri-
gnacienn ancien) :flg. i5 ; 186, p. 175, n os 7 et i3. — Peintures ru-
1 2 66 L'ART PRIMITIF

ett des oiseaux l, soit dans le sens vertical pour

pestress azilio-tardenoisiennes ou néolithiques d'Espagne : fig. 141


(chassee au cerf de Cogul) ; 30, pi. IX en bas à droite, pi. X à
droitee et en bas à gauche (bouquetins de los Letreros) ; 32,
pi.. 9 (Cueva de la Graja) et io (abri de los Tajos de Baeinete ;
33,, fig. 2 (grand abri de la Visera) et 4 (Cueva Negra). — Gravures
rupestress espagnoles néolithiques ou de l'âge du Bronze :
fig.fig. 35, 90. — Cerfs incisés sur vases énéolithiques des Millares
(fig.. 69). — Fusaïoles d'Hissarlik (84, fig. 116). — Pétro-
glyphess Scandinaves de l'âge du Bronze: fig. 77, 78, 101, 125 ;
19,, pi. i3. —- Figures incisées sur urnes funéraires hallstat-
tienness d'Œdenburg (Hongrie) (fig. 47 ; 140, fîg. 4), de Prusse
occidentalee (fig. 126,133 ; 121, pi. 10-16) et deSilésie (201, fig. 1-5).
— Gravure sur une stèle de la nécropole celtiberique d'Aguilar
d'Anguitaa : fig. 64. —- Gravures rupestres de Haute Egypte :
84,, fig. n 3 c, 114. — Gravures rupestres algériennes et saha-
rienness : fig. 65, 91 ; 140, fig. 7-12 ; 84, fig. 7, 12, 22, 24-26, 112 ;
pi.. XXIII, noa 1-4 ; pi. XL. — Dessins sur les huttes des indi-
gèness du Cameroun : 103, fig. 3 et 8. — Dessins et peintures
murauxx et dessins sur papier de nègres de l'Afrique orientale :
88,, fig. 29 et 3o a ; 225, pi. 32, pi. 33, n°" 6, 11, I 3 - I 5 ; pi. 34,
n088 5 et 9 ; pi. 37, nOi> 3 et 4 ; pi. 3g, n° 8. — Sculptures sur
boiss de lits de Madagascar (fig. 49, 63, g3). — Dessins d'Indiens
duu Brésil : 115, fig. 1 c (crocodile), 1 d (tortue), 1 e (fourmilier) ;
118,, fig. 104 et pi. VI ; 198, fig. 123 a, 124, 126, 128, i3o ;
208,, pi. Bororo II et Kulisehu II. — Dessins d'un indigène de
laa Nouvelle Guinée anglaise : 95, fig. 12 et i5 (chiens), fig. 19
(crocodilee de profil). — Dessins d'un indigène de l'île Bou-
gainvillee (îles Salomon) : 85, fig. 68. — Gravures sur bam-
bouss néo-calédoniens : fig. 66, 102 ; 140, fig. 18 et 19. —
Cf.. en outre fig. 36, 37, 61, 70, 71, 100, 113, l34.
11
Dessins d'enfants : fig. 55, 140 : 145, fi?. 69 ; 127, fig. 16,
355 d et e ; 193, pi. XIV. — Peinture rupestre espagnole de l'ex-
trêmee fin du Paléolithique, sinon néolithique: 28, fig. 4i. —
Peinturess rupestres néolithiques espagnoles de la province de
Cadixx : 31, pi. 9-12. — Décors céramiques égéo-mycéniens :
fig.fig. 108 -, 170, fig. 26-29, 33, 40, 4i, 45-47 ; 175, VI, fig. 489. -
LEE RÉALISME INTELLECTUEL IJ'J

1 2
less bras des hommes , les oreilles et les

Figuress incisées ou peintes sur poteries égyptiennes pré-


pharaoniquess : 84, fîg. ioo, n° 5, fig. n 3 a, 216. — Reliefs
surr palettes de schistes égyptiennes : 125, fig. I 6 et X 6. —
Décorr gravé sur la plaque d'une fibule béotienne : 175, VII,
p.. 25i, fig. 18. — Échassiers sur une hydrie attique de style
orientalisantt d'Analatos près d'Athènes (environ première
moitiéé du vn e siècle avant J.-C.) : 70, fig. 5i. — Gravures ru-
pestress de l'Afrique du Nord : 84, fig. 2, 63, 106, n° 4, 214, 262,
n088 I et 2 ; pi. L. — Peinture murale et dessins de nègres de
l'Afriquee orientale : 88, fig. 28 ; 225, pi. 33, n os 1, 5, 9, 10. —
Coqss gravés sur bambou néo-calédonien (fig. 102). — Dessins
dess Karaja et des Paressi-Kabisi du Brésil : 118, pi. VI ; 198,
fig.fig. 125, 127, i3o, I 3 I . — Oiseaux dessinés au charbon sur les
murss par deux Baré du Brésil Nord-Ouest : 115, fig. 1 a et b ;
22 b. — Oiseau d'un décor céramique de Numance (fig. 54)
11
Dessin d'enfant : fig. 140. — Dessin d'un nègre de
l'Afriquee orientale, représentant un Européen photographiant
unee danse de femmes : 225, pi. 34, n° 1. — Dans une curieuse
gravuree rupestre de Nouvelles-Galles du Sud, ce procédé est ap-
pliquéé à la fois aux bras et aux jambes d'un bonhomme assis :
155,, pi. II (en face de la p. 273), n° 3o.
22
Dessins d'enfants : fig. i32 ; 145, fig. 3o, Sx, 89. — Pein-
turess rupestre esspagnoles paléolithiques : 34, fig. 1 et 2 (cerfs de
Calapataa : notre fig. 68, reproduit la tête de l'un d'eux) ; 28,
fig.fig. 41 (quadrupède indéterminé de l'extrême fin du Paléolithique,
sinonn néolithique) ; 168, pi. 37 (jeune cerf de l'abri de los Toros à
Albarracin).. —- Peintures rupestres espagnoles néolithiques : 33,
fig.fig. 2 (grand abri de la Visera) et 4 (Cueva Negra). — Vache peinte
surr un larnax de Gournia (Crète) : fig. 70.— Marques de poteries
égyptienness prépharaoniques : 84, fig. 100, n08 I et 7, fig. io3,
n°° a..— Reliefs sur palettes de schiste égyptiennes : 84, fig. 97
ett 99 ; 125, fig. II (lièvre), III a et 6 (divers animaux, dont une
girafe),, V (ânes), X b (girafe). —- Quadrupède gravé sur une
hachee en bronze de la nécropole de Koban (Caucase) (âge du
Bronze,, vers 1200 avant J.-C.) : 64, II, p. 65, fig. 19 a. — Mou-
tonss dans une miniature du Liber sententiarum d'Henri II à
L'ARTT PRIMITIF

corness 1 des quadrupèdes. Il arrive même que les cornes


ett les oreilles d'un même animal sont alignées toutes
less quatre à la suite l'une de l'autre, les cornes tantôt
euu avant des oreilles, comme dans un bouquetin pa-
léolithiquee de Cogul (34, fig. 87, tout en haut à droite)
ouu dans un capridé ou antilope d'une peinture ru-

Munichh (xe siècle après J.-C.) représentant l'Annonciation aux


bergerss : 177, pi. I en couleurs. — Gravure rupestre de la pres-
qu'îlee du Sinaï : 140, fig. i3 a. — Graffiti de Haute Egypte : 84,
fi"-fi"- 2 9, 94, 113 d-g, n 4 h. —' Gravures rupestres de l'Afrique du
Nordd : % . 89 ; 84, fig. 60, 91, n°» 2, 2o3, 206, 23i-a33, 239 ; pi.
XIV,, n° 3. — Dessins sur calebasses des Ba Bouende du Congo : 151,
pi.. 8, en haut à droite. — Peintures murales de nègres de
l'Afriquee orientale : 225, pi. 32. — Art eskimo : 105, fig. i38. —
Lapinss dans des pétroglyphes des Moki de l'Arizona : 149, p. 47,
fig.fig. 8. — Cerf peint sur un vase zuni : fig. 59. — Tatouage repré-
sentantt un cavalier sur le bras d'un Tupi Apiaka du haut
Tapajozz : 208, pi. Kulisehu II. — Dessins des Karaja du Brésil :
118,, fig. 104 et pi. VI. — Dessin d'un indigène de l'île Bougain-
villee (îles Salomon) : 84, fig. 68. — Cf. en outre fig. 47-49, 57,
63,, 66,77, 78> I26 > l 3 4-
11
Peinture pariétale paléolithique de la Pasiega : 186, p. 16/J,
n°° 3. — Peintures rupestres paléolithiques et néolithiques
d'Espagnee : fig. 100 (bouquetins des Batuecas) ; 34, fig. 5 (bou-
quetinss et chèvre de Calapata) ; 33, fig. 6 (bouquetins d'un des
abriss des Carasoles del Bosque à Alpera) ; 30, pi. IX en bas à
droite,, pi. X à droite et en bas à gauche (bouquetins de los Le-
treros).. — Art égéo-mycénien : 170, fig. 12 a, i5. —Marques
dee poteries égyptiennes prépharaoniques : 84, fig. 96, n 08 I et
3,, 100, n 08 3 et 6, 101, n° 2. — Reliefs sur palettes de schiste
égyptienness : 125, fig. II (antilope), III (divers animaux), V
(bœufs).. — Graffiti de Haute Egypte : 847 fig. 3i c, 3î a. —
Gravuress rupestres de l'Afrique du Nord : 84, fig. 9, 106,
n°° 3, m , k et l, 120 ; pi. XXVI, en haut à gauche. — Antilope
surr une peinture murale d'Afrique orientale : 88, fig. 29.
LEE REALISME INTELLECTUEL

pestree des Indiens Pueblo de l'Arizona (fig. n 3 ) , tantôt


intercaléess entre les oreilles, comme dans un bouquetin
peintt sur une œnochoé chypriote du premier âge du Fer

Fig.. 68. — Peinture rupestre de Calapata. Echelle : environ i / 5 . (d'après


BREUIL,, 3 4 , fig. 2). Tète de cerf. Bois du type de Galapata (p. i63) et
oreilless de profil déplacées (p. 127, note 2),
Fig.. 6i). — Décor céramique incisé. Echelle : environ a / 5 . (d'après SIRET,
danss 134, fig- 2). Cerf. Déplacement des pattes (p 126, note 2) Bois
duu type des Millares (p. i64,i.
Fig.. 70. — Décor peint d'un larnax de Gournia ( d'après OULIK, 170, fig. A).
Vachee et son veau. Représentation individuelle des poils (p. 119, note 2).
Œ i ll de face ( p. 158). Cornes de face et dép ! acement des oreilles (p. 16a, note 2).
Figg 71. — Décor peint d'une œnochoé chypriote. Echelle : 1/2. (d'après
MORIN-JEAH,, 164, fig. 18). Bouquetin. Représentation individuelle des poils
(p.. r 19, note 2). Déplacement des cornes, encadrées par les oreilles (p. 129).
Dess oiseaux ont leurs ailes disposées de la même façon,
parr exemple dans une peinture céramique de Mycènes
(170,, fig. 27), dans un dessin eskimo (105, fig. i4) ou
i3oo L'ART PRIMITIF

danss des dessins exécutés au charbon sur les murs


parr un Baré du Brésil Nord-Ouest (115, % . i c
ett b).
Lee déplacement en hauteur est également employé
danss diverses figures paléolithiques pour rendre le double
ergott que porte en arrière chaque patte des herbivores
bisulquess (ruminants et suidés) (Bison polychrome de
Font-de-Gaumee : 48, pi. XVI ; grande biche, bison
femellee et bison au galop d'Altamira : fig. n 5 ; 142,
fig.fig. 75 ; 186, p. I I , n° 4 et p. i 5 , n° 6 ; cinq bovidés de
laa Vieja : 36, pi. I ; un arrière-train de bovidé du petit abri
dee la Visera : 33, fig. 1). A Minateda, si ce mode de re-
présentationn du double ergot ne se rencontre pas pour les
ruminants,, il a été transféré par une analogie injustifiée à
deuxx équidés (28, fig. 35).
Alorss que dans la réalité les lions n'ont de chaque côté
dee la mâchoire qu'une incisive, une hydrie de Cœre figure
àà côté de l'incisive réelle celle de l'autre partie de la mâ-
choiree masquée par la première, de sorte que cette lionne
aa l'air d'avoir deux incisives à la demi-mâchoire supé-
rieuree (164, fig. io5).
C'estt encore en vertu de la même tendance à ne rien
masquerr dans le dessin des éléments constitutifs de l'objet
quee dans des figures féminines de profil, les seins sont
étagess l'un au-dessus de l'autre du même côté du buste
(Gravuree rupestre espagnole néolithique représentant une
femmee enceinte : 45, pi. III, 2 e signe de la 1° ligne. —
Décorr peint d'une amphore du Dipylon : 175, VII, fig. 5
ett d'une hydrie géométrique béotienne : 175, VII, fig. 95.
—— Dessins sur calebasses des Ba Bouende du Congo :
151,, fig. 2, 4, 5, 7. — Dessin d'un nègre de l'Afrique
orientalee : fig. 67 ; 225, pi. 35, n° 5 b. — Sculpture sur
LEE RÉALISME INTELLECTUEL l3l

boiss de litde Madagascar (fig. ia3). — Peinture rupestre


dess Bushmen (fig. io4).
Alorss que dans les animaux de profil, le scrotum pré-
sentee 1 aspect d'un sac unique, le réalisme intellectuel
tientt à exprimer la dualité de son contenu, et le scrotum
estt figuré didyme dans divers bubales, probablement pa-
léolithiques,, du Sud-Oranais (fig. 72 ; 84, p. 12b, fig. 33,
pi.. XIII et YV (Ksarel Ahmar), fig. 123 (Gara Touidjin),
fig.fig. 180 (El Kharrouba), fig. 201 (Er Richa))et dans un

Fig.. 72. — Gravure rupestre d'Ër-Elicha (d'après FLAMAND, 84, fig 201).
Combatt de bubales. Celui de gauche a le scrotum didyrae (p 131 ). Cornes de
face(p.. îCi.note 1). Deu*naseaui(p. i5ç)). Piedsbisulques(p i66,note3).

taureauu d'un tombeau égyptien de Gournah (175, I,


fig.fig. i83). Le scrotum d'un taureau est figuré non seulement
didyme,, mais dissocié en deux bourses distinctes, simple-
mentt juxtaposées, sur un plat rhodien (164, fig. 29).
Laa position horizontale donnée au membre viril dans
quantitéé de figures humaines de profil (fig. 129) semble
égalementt devoir s'expliquer en général par le désir de le
mettree mieux en évidence qu'il n'apparaît à la vue. 11 est
vraii que dans un cas au moins, à savoir dans l'art rupestre
i3aa L'ART PRIMITIF

dess Bushmen (exemples : 146, fig. 6, 7, 9, pi. XI b).


cettee position du phallus parait devoir être attribuée au
réalismee visuel, car elle est chez les Bushmen un carac-
tèree somatique du vivant (195, fig. 8 et 9). Mais la même
positionn horizontale est donnée à la verge dans des figures
provenantt de populations dont nous savons qu'en réalité
lee phallus en état de non-érection se présente pendant
verticalement.. Nous nous bornerons à deux exemples
particulièrementt démonstratifs. Dans les graffiti des murs
dee nos rues, les bonshommes ont très souvent le pénis
horizontall soit dans des figures isolées, soit dans des
coupless erotiques où il est censé en érection. Dans l'art
grec,, on trouve également le pénis horizontal dans des
peinturess de vases du Dipylon (175, VII, fig. 57), du
vasee François (175, VII, fig. 221) et de vases attiques à
figuress rouges, qui correspondent cependant à l'apogée
decetart(175,, X, fig. 219, 23o, 35i ; 178, III, fig. 36g),
danss des bas-reliefs (175, VIII, p. 45, fig. 32) et des sta-
tuess (175, VIII, pi XI, en face de la p. 472). Dans tous
cess exemples, si la verge n'est pas figurée, conformé-
mentt à la réalité, pendant entre les cuisses et appliquée
contree le scrotum, c'est selon toute vraisemblance pour la
mettree en évidence en la détachant à la fois des unes et
dee l'autre. Aussi, lorsqu'on rencontre des figures viriles à
phalluss horizontal dans l'art de populations éteintes dont
l'anatomiee ne nous est connue au maximum que pour le
squelette,, est-il arbitraire de conclure de ces représenta-
tions,, d'ailleurs non exclusives, que le vivant possédait
effectivementt ce caractère. C'est le cas par exemple pour
quelquess rares gravures magdaléniennes (142, fig. 4,
n oss 4 6), pour des peintures rupestres espagnoles de Co-
gull (34, fig. 6), de la Vieja (36, fig. 4, 10, i3) et de
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 133

Minatedaa (28, fig. i 3. 5, 8, 19-21, l\o, 44), pour des


gravuress rupestres du Sud-Oranais (84, fig. 167, n° 1 ;
pi.. X I ; 87, pi. n 4 ) .
Surr une hydrie de Ciure dont le décor représente la
chassee au sanglier de Calydon, le chien qui vient d'être
décousuu est figuré par ses deux moitiés disposées tête-
bêche,, chacune avec des entrailles qui sortent, l'une au-
dessuss du sanglier, l'autre entre ses pattes (164, fig. 119);
lee thème du personnage écrasé par une automobile est
traitéé d'une façon analogue dans nos journaux humoris-
tiques.. Dans diverses représentations égyptiennes d'une
scènee de labourage, le trait ou timon reliant la charrue
auu joug, qui dans la réalité passe entre les deux bœufs
dee l'attelage et est ensuite masqué par l'animal du pre-
mierr plan, est figuré par-dessus celui-ci (124, pi. VII,
fig.fig. 21).
Diverss bateaux peints sur vases dipyliens et où se
voientt deux rangées superposées de rames ont, pour cette
raison,, été considérés par divers auteurs, en particulier
C.. Torr, comme représentant des dières. Je crois plutôt,
avecc Beloch (16, I, p. 275), qu'il s'agit de bateaux à un
seull rang de rameurs, dans la représentation desquels la
rangéee de rames du second plan, masquée en réalité par
lee bateau, a été ramenée à côté de celle des rames du pre-
mierr plan pour en exprimer l'existence. C'est de la même
façonn que, dans les véhicules dessinés par nos enfants, les
rouess du second plan apparaissent en entier à côté de
celless du premier plan (145, fig. io3),qui en réalité, dans
unee vue de profil, les masquent plus ou moins entièrement.
Enn outre, les roues de tramways ou de wagons de chemin
dee fer sont figurées par des cercles complets tangents au
bordd inférieur de la caisse, alors que dans la réalité leur
i3/ii L'ART PRIMITIF

partiee inférieure est seule visible (fig. i32 ; 145, fig. i/J
ett io3).
Onn rencontre également dans les dessins de nos en-
fants,, bien qu'assez rarement, des têtes de profil dotées de
deuxx yeux, dont l'un en dehors du contour du visage
(193,, pi. X, n° 2 de la 3' rangée; 214, fig. 3i b). De
même,, dans deux portraits de Weule, l'un à cheval,
l'autree à pied, dessinés par un de ses soldats nègres, l'ar-
tistee a ajouté après coup au cheval du premier et au per-
sonnagee du second, tous deux de profil, deux yeux dont
l'unn à l'intérieur de la tête, l'autre en dehors (225, pi. 37,
n°'' 3 et 5). Pour le second dessin, nous disposons du
commentairee de son auteur. Comme il le montrait à
Weule,, celui-ci lui demande : « Qu'est-ce que c'est? —
C'estt toi. — J e suis donc aveugle? » Immédiatement le
nègree ajoule les deux points correspondant aux yeux.
«« Qu'est- ce que c'est que cela ? — Tu as bien deux yeux ;
l'unn est ici 'en montrant le point à l'intérieur du visage) ;
l'autree est de l'autre côté ; pour que tu puisses le voir, je
l'aii mis ici (en montrant le point situé à l'extérieur du
contour).. »
Nouss venons de voir comment l'art primitif rend — ou
pluss exactement qu'il s'abstient de rendre — une certaine
relationn spatiale entre les objets qu'il figure, à savoir la
situationn devant ou derrière, sur des plans inégalement
éloignéss du spectateur. Cette relation topographique soit
entree objets différents réunis dans un même tableau
d'ensemble,, soit entre parties d'un objet unique, est tra-
duitee d'une façon extrêmement lâche et inadéquate, par
simplee juxtaposition ; parfois même des éléments qui non
seulementt pour l'oeil, mais aussi pour la pensée concep-
tuellee sont inséparables de l'objet qu'ils contribuent à
LEE RÉALISME IXTFl-l-ECÏUF.L 135

former,, sont dessinés à une certaine distance en dehors


dee lui. Il y a là un fait surprenant, car c'est précisément
unn des traits de l'art primitif que de tenir à rendre, parmi
less caractères des objets qu'il figure, les relations que ces
objetss possèdent avec certains autres. Dès lors, pourquoi
nee désirerait-il pas rendre la relation de situation devant
ouu derrière au même titre que les autres ? A notre avis, il
lee désire tout autant, mais cette tendance se trouve
inhibéee par une autre également issue du réalisme in-
tellectuell et encore plus forte en tant que plus fondamen-
tale,, celle à laquelle nous avons donné le nom d'exempla-
rité.. En effet, il n'est pas possible au dessein de rendre
cettee relation sans priver les objets situés au second plan
d'unee plus ou moins grande partie de leur aspect essentiel,
àà savoir celle qui est masquée par les objets situés entre
euxx et le spectateur.
Maiss il se trouve que, dans un cas particulier, il de-
vientt possible de traduire dans le dessin cette relation
spatialee sans sacrifier l'exemplarité. Aussitôt l'art primitif
s'empressee de la rendre par un procédé aussi spontané-
mentt et universellement employé qu'il choque le réalisme
visuel.. Cette relation est celle qui existe entre objets se
faisantt face, et ce procédé est celui du rabattement.
Commençons,, pour fixer les idées, par un exemple
particulièrementt net. Soit à exprimer dans un dessin que
deuxx rangées d'arbres sont situées de part et d'autre d'nn
chemin.. Alors que des arbres simplement réunis dans
unee disposition quelconque sont représentés étages les
unss au-dessus des autres, tous avec leur feuillage en l'air,
ici,, au contraire, ils sont figurés symétriquement de
chaquee côté du chemin, l'une des rangées ayant, si l'on
peutt dire, la tête en bas, comme si elle était le reflet de
l 3 66 I/AUIT PRIMITIF

l'autre.. Tout se passe comme si, l'intersection de chacun


dess deux plans verticaux contenant les arbres avec le plan
horizontall du sol étant constituée par une charnière, on
avaitt fait pivoter les plans verticaux autour de ces char-
nièress pour les rabattre dans le plan horizontal, ce qui
justifiee le nom de rabattement que nous avons donné
àà ce mode de représentation graphique. Le dessin en-
fantinn en fournit pour les arbres de nombreux exemples
(145,, fig. 76, 77, 116).
Cee qui vient d'être dit des arbres vaut également pour
less maisons bordant une rue. Le procédé du rabattement
leurr est appliqué dans un plan de la ville de Reims dressé
enn 1677 par Robert Lajoye, arpenteur royal (101,
pi.. frontispice). Il est appliqué à la fois aux arbres et aux
habitationss dans un motif fréquent sur les bambous
gravéss néo-calédoniens. Deux huttes sont figurées symé-
triquement,, opposées par leur base, de part et d'autre de
l'espacee qui les sépare, représenté par un rectangle.
Lee long des deux autres côtés de ce rectangle, des
cocotierss et parfois aussi des personnages sont opposés
dee )a même façon, dans une direction perpendiculaire à
cellee de l'axe des huttes (143, fig. 20, 36, 45, 72).
Dess personnages dressés de part et d'autre d'un objet
centrall ont entre eux la même relation topographique
quee des arbres ou des maisons bordant un chemin ou une
rue;; cette même relation sera rendue de la même ma-
nière.. Une gravure sur os magdalénienne de Ghancelade
oùù deux rangées de bonshommes, dont l'un porte une
sortee de palme, sont opposés par leurs têtes au-dessus et
au-dessouss d'un avant train de bison, est considérée avec
unee assez grande vraisemblance comme pouvanl repré-
senterr une procession (142, fig. n 3 a).
LEE RÉALISME INTELLECTUEL i3 77
Sii l'interprétation de cette figure reste conjecturale,
danss un dessin koryak représentant la cérémonie qui
suitt la capture d'une baleine, les personnages sont ra-
battus,, opposés par la tête, de part et d'autre de la ba-
leinee (109, fig. 28).
Lee dessin enfantin fournit une foule d'exemples de
l'emploii du rabattement pour rendre la relation de deux

Fig.. - 3 . — Dessin chsyenne (l'après LKVINSTEIM, 187, fig. i3y). Arrivée


d'nnn marchand dans un camp eheyenne. Rabattement des personnages
(pp i3g) et des tentas (p. i5c).

objetss se faisant face. Une table et la chaise placée devant


ellee sontopposées par leurs pieds (145, fig. 115). Une dame
assisee dans un fauteuil en face d'un berceau est dis-
poséee d'une façon analogue (145, fig. 114). Pour repré-
senterr une dame qui se regarde dans une glace à trois faces,
unn garçon de 6 ans k mois figure la dame et la glace vues
toutess deux de devant ; mais la glace a le haut en bas,
commee le prouve la place de sa chaînette de suspension,
i388 L'ARTT PRIMITIF

expressémentt énoncée (145, fig. 108). Dans le dessin d'un


concert,, les bonshommes de la scène et de l'orchestre
sontt tournés en sens inverse des spectateurs pour indi-
querr qu'ils leur font face ; de même le musicien est opposé
parr les pieds à son pupitre (145, fig. 68). Dans le dessin d'un
lacc où les arbres sont rabattus de chaque côté des bords,

Fig.. 7'i — Dessin au crayon d'un Woolwonga (d'après BASSBTT-SMITB,


12,, pi- X.IX) Femme. Seins étalés, (p. ia i, note i ) . Orteils vu» d'en haut
(nn
(pp i8o.
180, note i).
il.
Fig.. 75. — Relief sur la maison des prêlres de Kani-Kombole (d'après
FROBIHIUS,, 186, fig. 4) Oaristys. Habattetuent (p. i3g).
Fig.. 76 — Statue en pierre d'Atnebar (îles Kei) (d'après RIEDEL, 188,
pi.. XXII, n° 3). Homme. Phallus remonté et scrotum didvnie en ralal-
teuieutt ( p . 122).

lee bateau et les deux canards sont dessinés à l'envers par


rapportauxx enfants qui les regardent (145, fig. 76; Dans la
courd'unee maison (145, fig. 117), le petit garçon qui donne
unn coup de pied dans son ballon est la tête en bas pour
indiquerr qu'il tourne le dos à la petite fille, de même que
danss un dessin cheyenne représentant l'arrivée d'un mar-
chandd dans un camp de Cheyenne, l'Indien qui vient à la
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 13g

rencontree du visiteur est figuré la tête en bas par rapport


àà lui (fig. 7 3 ) .
Less acteurs d'une scène de copulation ont entre eux la
relationn topographique d'objets se faisant face. Dans
diverss spécimens de l'art primitif, les deux personnages,
quii dans la réalité devaient être accolés, sont rabattus
danss le même plan de part et d'autre de leur inter-
section,, lien est ainsi dans un relief de Laussel, d'âge
aurignacienn (142, fig 84), qui est l'unique groupe
humainn connu de l'âge du Renne franco-cantabrique
ett qui paraît représenter un coït bien plutôt qu'un
accouchement.. Au demeurant, des coïts incontestables
sontt figurés de cette façon dans des gravures sur bambous
néo-calédonienss (143, fig. 37), dans des reliefs appliqués
surr les murs d'argile des temples et des magasins à pro-
visionss dans le Tombo et le Mossi au sud de la boucle du
Nigerr (fig. -]5 ; 86, p. i63 et fig. 2-4), dans une gravure
d'unn nègre marron de la Guyane hollandaise (173, p. 63,
fig.fig. 2^), et vraisemblablement dans un dessin eskimo sur
peauu de morse (105, pi. 81, n° 5).
Peut-êtree faut-il rapprocher de cette série un énigma-
tiquee pétroglyphe de Bohuslan, qui réunit deux person-
nagess opposés par leur tête (fig. 77). Il nous paraît
absolumentt arbitraire d'y voir des divinités et d'inter-
préterr la figure comme symbolisant la parenté et l'oppo-
sitionn du jour et de la nuit '19, p. Î 4 4 ) . Il est également
pluss que douteux qu'elle veuille représenter une scène de
gymnastiquee où le personnage supérieur se tiendrait en
équilibree sur la tête de l'autre. On doit aussi hésiter à y
voirr une scène de coït, aucun des personnages ne présen-
tantt d'attributs sexuels. L'interprétation la plus vraisem-
blablee est qu'il s'agit de deux personnages se faisant face,
L'ARTT PRIMITIF

d'unee conversation ou d'une rencontre ; si l'on tient


compte,, en outre, du fait que les bras d'un côté sont
réuniss comme si les personnages se serraient la main,
laa figure voudrait peut-être représenter une alliance ou un
contrat..
Enn ce qui concerne maintenant non plus des objets ou
êtress différents, mais des éléments symétriques d'un
mêmee objet, nous nous bornerons à mentionner, sans y
insister,, les nombreuses figures d'oiseaux, soit posés, soit
volant,, à ailes étalées des deux côtés du corps, où l'em-
ploii du procédé du rabattement n'est que vraisemblable
ett non certain. En effet les ailes, à cause de leur mobi-
lité,, peuvent se présenter effectivement à la vue dans
cettee position, et par suite rien ne permet d'affirmer que
less figures d'oiseaux en question n'ont pas été inspirées
parr le réalisme visuel.
Maiss ce scrupule n'est plus de mise lorsqu'il s'agit, non
pluss d'ailes, mais de pattes. Un quadrupède ne saurait
s'offrirr à la vue avec deux pattes insérées dans le ventre et
deuxx dans le dos, comme dans une hyène dessinée par un
nègree de l'Afrique orientale (225, pi. 33, n° 3) ou dans
dess dessins muraux de l'Afrique orientale représentant un
léopardd (fig. 128) et des antilopes (88, fig. 2 6 et 3 b). Le
dessinn enfantin fournit des spécimens analogues d'animaux
dee profil, quadrupèdes (133, fig. 299, 311, 312, 366 ; 145,
fig.fig. 112) et plus rarement oiseaux (42, fig. 2), à deux rangs
dee pattes insérés l'un dans le ventre, l'autre dans le dos. Ce
modee de représentation étrange s'explique sans peine par le
rabattement.. Les pattes d'un animal sont situées dans
deuxx plans verticaux de part et d'autre du plan horizontal
duu ventre, c'est-à-dire dans la même disposition que des
arbress bordant un chemin, avec cette seule diflérence qu'à
LEE RÉALISME INTELLECTUEL l4l

partirr de leur intersection avec le plan horizontal, elles se


dirigentt vers le bas et non vers le haut, que ce sont, pour
ainsii dire, non des montants, mais des supports. II est
doncc naturel que l'art primitif recoure dans ces deux cas
analoguess au même procédé. On en dirait autant des deux
animauxx d'un attelage, qui sont rabattus de part et d'autre
duu timon, opposés par leur dos, celui du second plan
ayantt les pattes en l'air, dans un pétroglyphe du

F'DD 77- — Pétroglyphe de Ryland (Suède) (d'après ALMGREN, dans 19,


pi.. iS. fig 3). Figures humaines de face à jambes de profil déplacées
(pp i a 5 , note i et 1C9). Quadrupède (chien ?) avec déplacement des oreilles
(p.. 127, note 2) et des patttes (p. 123, note i ) . Personnages en rabatte-
mentt (p. l3g).
Fig.. 7 8 . — Pélroglyphe de Bjôrnerikl (Suède) (Echelle : i/32). (d'après
ALMGREN,, dans 19, pi. l 4 , n° 2^. Voiture attelée. Absence des traits
d'attelagee p. 85). Déplacement des oreilles du cheval (p. 127, note 2)
ett des pattes des deux animaux ( p . 12.1, note 2) Rabattement de l'attelage
(pp 1/11) et des roues (p. 1^2).

Bohusliinn (fig. 78). Dans d'autres spécimens, malheu-


reusementt détériorés par les intempéries, il semble que
less animaux étaient, au contraire, opposés par les pieds
(19,, pi. 17, nos 4 et 5). Dans un dessin koryak re-
présentantt un traîneau traîné par des chiens, les deux
chienss de chaque paire sont pareillement adossés (109,
pp 72^, fig. 24A) Le rabattement est également appliqué
auxx roues de voitures à deux ou quatre roues dans des
peinturess rupestres néolithiques d'Estrémadure (26, fig. 2
, ^ QQ L'ART PRIMITIF

ett 3), dans le décor gravé d'une dalle funéraire de la fin


dee l'âge du Bronze provenant d'Estrémadure (26, fig. i),
danss des pétroglyphes Scandinaves (fig. 78 ; 19, pi. 17,
n°ss k et 5), sur des urnes cinéraires de la Prusse occiden-
talee (fig. 126 ; 121, pi. 10 et 12), dans des miniatures de
manuscritss des xiv* et xve siècles (124, pi. XXXIX, fig. io4
ett pi. XL, fig. io5), et dans le dessin de nos enfants (145,
fig.fig. 9, m ; 193, pi. XXIX, 2 e rangée). Ceux-ci
appliquentt également à maintes reprises le procédé du
rabattementt à la représentation des pieds des meubles:
lits,, tables, fourneaux (145, fig. 52), berceaux (145,
fig.fig. u 3 ) .
Unee gravure rupestre de Taghtania (Sud-Oranais) pré-
sentee les défenses d'un éléphant rabattues départ et d'autre
dee la trompe (fig. 89).
Danss des peintures murales de l'Afrique orientale
représentantt un tireur de fusil, les bras tenant le fusil
quii ont par rapport à lui la même position que les pieds
d'unn meuble ou les pattes d'un animal par rapport à
sonn corps, sont rabattus de chaque côté du fusil, l'un
au-dessus,, l'autre au-dessous (fig. 129 ; 88, pi. VII,
n ° 6 ) ..
Lorsquee deux montants d'un objet se font face, en
mêmee temps qu'ils sont parallèles entre eux, chacun d'eux
estt ordinairement perpendiculaire à la partie de l'objet
dee chaque côté duquel ils se dressent. Le rabattement se
trouvee ainsi rendre cette seconde relation en même temps
quee la première. On s'explique par là que le rabattement
soitt appliqué à un montant unique, par exemple à la
flècheflèche supportant les rideaux d'un berceau (145, fig. 11
ouu à la capote de voitures, bien que cette position la rende
incapablee de remplir son rôle, laissant à découvert les
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1^3

occupantss du véhicule. Dans un dessin de voiture, non


seulementt la capote est rabattue en arrière, mais aussi
less personnages sont rabattus par rapport à leur siège, en
mêmee temps que les roues sont étalées des deux côtés de
laa caisse (145, fig. m ) .
Unn autre exemple de rabattement est fourni par di-
versess représentations de casques figurés, nolamment sur
dess vases grecs, avec deux cimiers opposés symétrique-

^'&& 79- — Détail du décor d'une coupe grecque à figures rouge» de style
sévèree (d'après GERHARDT, dans 9 8 , fig. u 4 ) . Tète de Meinnon. Rabatte-
mentss des cimiers (p. 1/1&).
Fig.. 80. — Détail du décor d'un vase greo archaïque (d'après HELBIG, 9 8 ,
fig.fig. iiGi. Tète de guerrier. Rabattement des cimiers (p. lAA).
Fig.. 81. — Détail du décor d'un vase grec à figures rouges (d'après
MURRÀY,, 165* pi. XV, n° 5). Tète d'Alhéna. Rabattement du cimier
(p.. i44).

ment.. Comme on sait qu'il existait dans l'antiquité des


casquess à plusieurs cimiers, ces figures peuvent fort bien
représenterr des casques à deux cimiers. Mais, dans cer-
tainss cas, la disposition des cimiers dans le dessin ne
sauraitt être considérée comme conforme à la réalité. En
effet,, les cimiers multiples étaient situés dans des plans
parallèles,, perpendiculaires à la ligne des oreilles, de
sortee que si la tête casquée était vue de face, on n'aper-
cevaitt de chaque cimier que son arête antérieure, et si la
têtee était vue de profil, le cimier du premier plan mas-
quaitt celui du second plan. On doit donc considérer
commee des spécimens de rabattement les figures de
casquess à deux cimiers de profil disposés symétriquement,
affrontéss pour ainsi dire par leur arête antérieure, aussi
bienn pour des casques de profil (fig. 80 ; 165, p. 3i8-32o
ett pi. XV, n° 6) que pour des casques de face (fig. 79 ;
175,, IX, p. 667, fig. 35 7 ).
Danss ces exemples, il est possible, comme nous le
disions,, que l'artiste ait voulu représenter un casque à
deuxx cimiers. Mais d'autres semblent s'être proposé de
figurerr un casque à cimer unique. Il s'agit de dessins de
casquess de face dans lesquels les deux parties opposées
symétriquement,, au lieu d'être séparées l'une de l'autre,
formentt un ensemble compact uniquement divisé par
unee verticale médiane (fig. 81). Le dessin semble donc
vouloirr représenter non deux cimiers rabattus de part et
d'autree de leur axe de symétrie idéal, mais les deux laces
d'unn seul cimier rabattues de chaque côté de leur arête
antérieuree commune.
Ill faut sans doute considérer comme des exemples ana-
loguess de rabattement les maisons à trois côtés visibles,
fréquentess dans les dessins de nos enfants (fig. 02), mais
quii se retrouvent également dans des œuvres d'adultes,
parr exemple dans un dessin exécuté par une Bolivienne
dee 20 ans, intelligente et cultivée, mais qui ne s'était
jomaiss appliquée au dessin (193, pi. LXX), dans un
dessinn papou (fig. 82) et dans diverses sculptures sur bois
dee lits de Madagascar (fig. 83). Il en est de même pour
less dessins de tonneaux montrant leurs deux fonds, aussi
LE~*HÉALISMBB INTELLECTUEL

bienn sur des méreaux en plomb du xve siècle que sur des
enseigness de tonneliers actuelles.
Laa substitution de deux profils symétriques à la vue de
face,, dans laquelle des parties de l'objet sont masquées,
see rencontre encore dans des ligures de personnages age-
nouilléss ou accroupis, dont les jambes sont écartées
latéralementt pour les mettre en évidence 1 .

Fig.. 82. — Dessin papou (d'après HADDOS, 95, pi. C, fig. 1). Maison à trois
côtéss visibles (p. l44).

Ill faut probablement interpréter de la même façon un


dessinn d'un garçon de 5 ans, où un quadrupède de profil
présentee deux tètes de profil juxtaposées (214, fig. 43 d)
ett une gravure rupestre du Djebel Bes Seba (Sud-Ora-
nais),, où deux quadrupèdes de profil, chacun avec deux

11
Peintures rupestres néolithiques espagnoles de la Piedra
Escritaa (Fuencaliente) : 30, pi. III, panneaux 2, 4> 5. — Gra-
vuress rupestres préhistoriques du Sud-Oranais : femme à genoux
dee l'Oued Medsous (84, fig. 179), personnages accroupis de
Mohgar-et-Tathanii (84, fig. 126 a et pi. XLI). — Gravures sur
bambouss néo-calédoniens : 143, fig. 31 (accouchement), 42, 43. —
—— Art décoratif polynésien (213, fig. 17, 21, 22, 25, 28-3l) et
mélanésienn (183, fig. 1-3).
L'artt primitif. 6
1^66 L'ART PRIMITIF

pattess seulement, sont adossés par leur ligne dorsale, avec


unee queue unique (fig. 8/1).
Peut-êtree le rabattement se retrouve t-il encore à l'ori-
ginee d'un motif dont on connaît une foule d'exemplaires
depuiss les temps mycéniens jusqu'à nos jours, à savoir
celuicelui qui représente un animal soit réel, soit fantastique,
avecc une tête de face de part et d'autre de laquelle se dé-
ploientt deux corps de profil symétriques (165, p. 3 i 8 -
3a33 ; 127, p. 67 ; 160, I, p. 888-889 ; 164,

Fig.. 83. — Gravure sur boi» de lit de Madagascar. Echelle: i / 3 . Maison à


troiss côtés visibles (p. 144).

p.. 87 ; 182, p. 428). Dans les figures de ce genre, les deux


corpss de profil pouvaient vouloir, dans l'intention de l'ar-
tiste,, représenter, si l'on peut dire, l'endroit et l'envers du
corpss de l'animal unique dont la tête est figurée de face ; en
d'autress termes, de même que dans les cimiers de casques
mentionnéss ci-dessus, un objet de face serait traduit par la
réunionn de deux profils symétriques. Getle interprétation,
bienn que possible, n'est pas la seule possible; une dis-
cussionn approfondie du problème exigerait de longs déve-
loppementss dont le seul résultat serait de faire ressortir
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1477
saa complexité et d'établir qu'il admet plusieurs solutions
dontt aucune ne s'impose. Aussi jugeons-nous inutile d'in-
sister..
Danss les divers exemples qui précèdent, les objets ou
partiess d'objets figurés en rabattement se faisaient face
parr rapport à un axe unique. Une relation analogue,

Fig.. 84. — Gravure rupestre du Djebel Bes Seba (d'après FROBEMUS et


OuERyiiEB,, 8 7 , pi. 93). Animal à deux profils adossés (p. i/|6).
Kig.. 85 — Dessin de l'ile Mioko (d'après BORNSTEIN, 2 1 , fig. 27). Arrivée
enn pirogue du chef d'une société secrète. Celui-ci est en l'air au-dessus
dee la pirogue (p. 11O), figurée en élévation avec balancier à vol d'oiseau
(p.. 178). Cheveux figurés individuellement (p. 120, note 2).

quoiquee plus complexe, existe entre des objets disposés


autourr d'une surface polygonale ou circulaire limitée par
unn contour soit réel, soit purement idéal. Dans ce cas en-
core,, l'art primitif traduit cette relation topographique
parr un rabattement dont nous exprimerons à la fois la
parentéé et la différence avec le précédent ou rabattement
L'ABTT PRIMITIF

linéairee par le nom de rebattement circulaire. Ce nou-


veauu rabattement peut, comme l'autre, être soit interne,
c'est-à-diree que les objets qui se font face peuvent être
rabattuss en dedans ou en dehors de la surface autour de
laquellee ils sont situés ; en d'autres termes, ils s'opposent
danss le dessin tantôt par celle de leurs extrémités qui
touchee le sol, tantôt par l'autre.
Voicii d'abord divers exemples empruntés au dessin en-
fantin.. Dans le dessin d'une gare (145, fig. 118 et 119), le
bâtimentt principal et les deux bâtiments en retour sont
rabattuss sur le sol, de telle sorte que leurs axes verticaux
fontt dans le dessin le même angle de 90 0 que leurs façades
danss la réalité ; le candélabre du refuge qui se dresse
devantt le bâtiment central est orienté en hauteur comme
luii ; mais le tramway, dont la direction est parallèle à
cellee des bâtiments latéraux, est comme eux orienté hori-
zontalement.. Dans le dessin d'un cirque (145, fig. 120), les
gradinss et l'estrade des musiciens (un seul est figuré),
ainsii que les fils supportant les lampes électriques et les
poteauxx qui les soutiennent sont rabattus circulaiiement
autourr de la piste. Dans de nombreux exemples, les
chaisess entourant une table sont figurées d'une façon
analoguee (145, fig. 52). Dans un manègede chevaux de bois
(145,, fig. 122), les personnages inscrits dans des rectangles
correspondantt aux voitures s'appuient par les pieds sur le
contourr circulaire du plateau et leurs têtes convergent
verss le centre. Dans une ronde (145, fig. 121), les petites
fillesfilles sont étalées autour de la circonférence idéale déter-
minéee par leurs pieds.
Cee dernier dessin, d'une petite Française de 7 ans 1/2,
estt tout à fait comparable à celui d'un nègre de l'Afrique
orientalee d'environ 2/4 ans, où des femmes dansant sont
LEE RÉALISME INTELLECTUEL I£|9

rabattues,, opposées par leurs pieds, autour du cercle,


figuré,, bien qu'idéal, qu'elles déterminent sur le sol (225,
pi.. 34, n° i). Il en est de même dans des dessins sur ca-
lebassess des Ba Bouende du Congo (151, fig. 8, 22, pi. 7).
Duu même genre sont diverses gravures sur bambous néo-
calédoniens.. Des pêcheurs sont rabattus en cercle autour

Fig.. 8G. — Gravure sur bambou néo-calédonien (d'après LUQUBT, 148,


fig.fig. li& bis). Scène de pèche. Rabattement (p. ilig).

duu filet dans lequel ils emprisonnent des poissons (fig. 86).
Danss l'intérieur d'une hutte censément vue d'en haut, les
habitantss sont rabattus en dedans, leurs têtes convergeant
verss le centre (143, fig. 70). Des cocotiers sont rabattus en
cerclee autour d'un enclos (fig. 102). Une lagune en-
touréee de rochers est figurée de la même façon dans un
i5oo L'ART PRIMITIF

dessinn au crayon d'un Koïtapu de Port Moresby (Nou-


vellee Guinée anglaise) âgé de 23 ans (95. pi. G, n° 4).
Danss divers dessins d'Indiens de l'Amérique du Nord
représentantt des campements, les tentes sont rabattues
autourr de l'espace central (fig. j3 ; 150, pi. XXI-XX1II).
Danss un dessin d'un Indien Winnebago représentant la
bataillee de Hard River entre le général Sully et les Sioux,
laa disposition en carré des troupes blanches est rendue de
laa même façon, sous cette réserve que seules les deux
rangéess latérales sont opposées par les pieds ; les rangées
quii font face au spectateur ont toutes les deux la tête en
hautt (150, fig. 785).
Danss diverses figures, par exemple une peinture mu-
ralee égyptienne d'une chapelle funéraire d'Abd-el-Kurna
(figg 3g) et un dessin australien sur écorce des environs
duu lac Tyrrell, maintes fois reproduit d'après Brough
Smylhh (205, I, p. 286, fig. 4o), les arbres qui entourent
unee pièce d'eau sont rabattus extérieurement autour de
sess bords. Ces figures me semblent fournir la clé d'un
motiff des pétroglyphes Scandinaves de l'âge du Bronze,
interprétéé d'ordinaire, comme c'est l'usage pour les
figuresfigures qu'on ne comprend pas, comme un symbole rel
gieux.. Il se compose d'un cercle dont le contour supporte
extérieurementt des figures ayant en général la forme d'un
tridentt ou de la lettre grecque ty, mais présentant par-
foiss plus de deux branches latérales (fig. 101). Il me
semblee tout indiqué de voir dans ce motif la repré-
sentation,, sous forme schématique, d'un étang entouré
d'arbres.. F. Adama van Scheltema (197, p. n 3 ) est
arrivéé de son côté à une interprétation analogue, avec
cettee seule différence que le cercle central où je vois un
étangg est pour lui une enceinte sacrée.
LEE HÉALISME INTELLECTUEL l5l

Danss une peinture rupestre des Lillooet expliquée par


dess indigènes comme représentant sans doute un grizzly
danss sa tanière surmontée par un bois ou un buisson, les
arbress ou arbustes sont figurés par des traits droits ra-
battuss en dehors du contour de la tanière (216, pi. IX
(enn face de la p. 282), n° 35). Dans un dessin tchouktchi
représentantt une maison où se fait une cérémonie, les
objetss placés sur une espèce de cadre construit avec des
ramess et placé à mi-hauteur du poteau central sont ra-
battuss extérieurement autour de ce cadre (20, fig. 282).

Figg 87. — Décor céramique peint de Mycènes (d'après OULIÉ, 170,


fifi11*.*. lia 6). Serpant vu de profil pour la partie antérieure, d'en haut pour
laa partie postérieure enroulée (p. 178).
Fig.. 88. — Dessin dakola (d'après BASTI*», 13, pi. XV). Sanctuaire du
dieuu de l'eau Rabattement linéaire et rabattement circulaire 'p. 151 ).

Certainss dessins réunissent les deux sortes de rabatte-


ment.. Tel est par exemple un dessin dakota représentant
lee sanctuaire du dieu de l'eau. C'est un marais entouré
d'arbress en rabattement circulaire auquel conduit un
cheminn bordé d'arbres en rabattement linéaire (fig. 88).
Danss un dessin d'un nègre de l'Afrique orientale qui repré-
sentee avec une fidélité absolue un poste fortifié, les arbres et
less constructions figurés avec leur nombre et leur situation
exactss sont rabattus de part et d'autre de l'allée centrale ;
danss le même dessin, les pieux de la palissade entourant le
i5aa L'ART PRIMITIF

postee sont dessinés en rabattement circulaire (225, pi. 36,


n°° 2 b).
Laa perspective n'a pas seulement comme effet de
supprimerr pour la vue une partie plus ou moins grande
d'unn objet lorsqu'elle est masquée par un autre objet
situéé entre lui et le spectateur. Même pour un objet placé
auu premier plan, elle donne à certains de ses éléments une
formee différente de leur aspect caractéristique. Le réalisme
intellectuell tient au contraire à ce que tous ces éléments
conserventt dans l'objet dont ils sont des parties la forme
exigéee par l'exemplarité ; chacun d'eux est figuré comme
s'ill était aperçu du point de vue d'où il présente cet
aspect.. On peut donc donner à ce procédé le nom de
changementchangement de point de vue. Mais il doit être b
tenduu qu'il n'y a là qu'une façon de parler commode, une
traductionn dans le langage du réalisme visuel d'un mode
dee représentation graphique dicté en réalité par le réalisme
intellectuel.. L'artiste primitif ne songe pas le moins du
mondee à signifier par la forme qu'il donne à chaque dé-
taill dans son dessin que si l'on regardait l'objet de tel
pointt de vue, ce détail y apparaîtrait avec cet aspect ; il
veutt simplement figurer ce détail tel qu'il le pense en soi.
Sii la forme que présente dans le dessin chaque élément
d'unn objet est forcément de nature visuelle, cette forme
n'estt que la traduction de son essence, c'est-à-dire d'une
idéee de nature intellectuelle; on pourrait dire que dans
l'ensemblee de l'objet, chacune de ses parties est rendue
parr un idéogramme.
Unee fois admise, sous cette réserve, l'expression de
changementt de point de vue, il sera commode de classer
less innombrables exemples de ce procédé graphique
d'aprèss les différents points de vue correspondant à la re-
I.EE REALISME INTELLECTUEL i533
présentationn des éléments d'un même dessin. Nous envi-
sageronss successivement les dessins dont toutes les parties
sontt figurées en élévation, mais de points de vue diffé-
rentss ; les dessins où se rencontrent à la fois l'élévation et
lee pian ou vue à vol d'oiseau ; enfin les dessins où inter-
vientt en outre le rabattement.
Lorsquee plusieurs objets sont réunis dans un tableau
d'ensemble,, chacun d'eux est figuré avec son aspect
exemplaire.. Ce fait est particulièrement manifeste dans

Fig.. 89. — Gravure rupestre do Taghtania (d'après FROUEMUS et OBEIMAIEB,


8 7 ,, pi- 17. n ° £) Eléphant. Déplacement des oreilles (p. 127, note 2),
Défensess en rabattement (p, 1^3).

less dessins de cavaliers. Comme nous l'avons vu (p. 113),


l'exemplaritéé requiert la représentation de profil pour les
animauxx et préfère la représentation de face pour le corps
humain.. Aussi rencontre-t-on fréquemment un person-
nagee de face posé sur une monture de profil. Les dessins
enfantinss en fournissent de nombreux spécimens (fig. i32 ;
112.. pi. 35, n°' 3, 6 ; pi. 36, n°° 2, 3 ; pi. 37, n° 2 ;
145,, fig. 89, 90, 100 ; 187, fig. 19 ; 193, pi. XVI,
Hené,, 5 ans ; 214, fig. 46, 5o), dont l'un (145, fig. 35)
présentee cet intérêt accessoire d'être le premier des dessins
LL ART PB1MIT1F

dee son auteur représentant un cavalier. Ce thème est traité


dee la même façon dans des gravures rupestres espagnoles
néolithiquess ou de l'âge du Bronze (fig. 90), dans des figures
inciséess sur des urnes cinéraires de Prusse occidentale d'é-
poquee hallstattienne (fig. i33 ; 140, fig. 3 c), sur une stèle
funérairee de la nécropole celtibérique d'Àguilar d'Anguita
(provincee de Guadalajara) (fig. 64), dans une peinture ru-
pestree de Sibérie (140, fig. i4), dans des pétroglyphes

Fîg.. 90. — Gravure rupestre néolithique du Rocher delà Poudrière, Torre


dee Hercules (La Corogne, Espagne) (d'après J. CABRÉ AGUILO, 44, Kg. 5).
Cavalier.. Déplacement de9 pattes du cheval (p. is5, note 21. Contour du
corpss interrompu entre les pattes de derrière (p. 70). Cavalier de face
(p.. i54) à deui jambes visibles 'p. 102).
Fig.. 91. — Graffite du Medracen (département de Constanline) (d'après
FLAMAND,, 84, fig. 118, n° 3). Cavalier Déplacement des pattes du cheval
(p.. ia5, note 2). Cavalier de face (p 154) à deux jambes visibles (p 102).
Armee non tenue en main (p. 117, note 1). Absence de rênes (p 8")),

dee la presqu'île du Sinaï (fig. 36), dans de nombreuses


gravuress rupestres de la région de l'Atlas et du Sahara
(fig.. 65, 91 ; 140, fig. 6-12 ; 84, fig 110 et 112), dans
lee décor d'un tissu en raphia delà région de la Côte d'Or
ouu des Esclaves (4, fig. p. 2o5, n° 10), dans des dessins
surr les huttes des indigènes de l'Oubanghi (fig. 37) et du
Camerounn (103, fig. 3 et 8), dans des sculptures sur bois
dee litsde Madagascar (fig. ^9, 63, g3), au Brésil chez les
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1 55

Karajaa (118, fig. io4) et chez les Paressi-Kabisi (198,


p.. 23o et fig. I 3 I ) , dans des gravures sur bambous de
Nouvelle-Calédoniee (fig. 66 ; 143, fig. ik, 3o).
Dee même et pour la même raison, dans les graffiti des
murss de nos rues représentant soit des personnages, soit
dess organes sexuels en copulation, l'acteur mâle est gé-
néralementt figuré de profil, l'autre de face.
Passonss aux représentations d'objets isolés. Parfois, le
dessinn d'un être vu de devant contient un détail qui ne
peutt être vu que de derrière. Ainsi, dans un portrait des-
sinéé par un Nahuqua du Brésil, l'anus est juxtaposé au
nombrill et au phallus (208, p. 235 et pi. Kulisehu H).
Dee même, dans un relief sur bois des Toradja deCélcbes,
unn crocodile vu à vol d'oiseau a l'anus figuré dans le dos
(110,, fig. 234, nos i et 2). Ce type de crocodile est fré-
quentt dans l'art de la Nouvelle-Guinée et du détroit de
Torress (93, p. 2/i ; 202, p. 190, fig. 8). L'anus est éga-
lementt figuré dans un fourmillier de profil dessiné au
charbonn sur un mur par un Baré du Brésil (115,
fig.fig. 1 e).
Cett exemple nous amène à des dessins réunissant la
vuee de face et la vue de profil. Divers enfants de 5 ans
enn moyenne, dans la représentation d'une porte de face,
figurentfigurent le bouton, non de face à l'intérieur du rectan
dee la porte, mais de profil sur l'un de ses bords verticaux
(193,, pi. XIX et pi. XXX, Georgette ; pi. XXIX, Henri).
Danss des dessins d'enfants des nationalités les plus variées
représentantt saint Nicolas ou le Père Janvier, bien que celui-
cii soit de face, la hotte qu'il porte sur le dos est figurée sur le
côtéé comme s'il était vu de profil (145, ûg. 3 ; 211, pi. YI,
fig.fig. 6), parce que sans cela elle serait masquée par le corps.
Dee même, dans nombre de dessins enfantins représentant
i566 L'ARTT PRIMITIF

dess petites filles de face, les cheveux longs ou la natte qui les
caractérisentt sont figurés latéralement, comme s'ils étaient
vuss de profil, pour les mettre en évidence (fig. 38 ; 112,
pi.. V, n° i5). Pour la tête considérée isolément, tantôt un
nezz de profil est ajouté sur le côté d'un visage de face (Gg. 92 ;
214,, Gg. 5 cet 46), tantôt au contraire le visage de profil
contientt des éléments de face, soit la bouche, soit les deux

Fig.. 92. — Dessin de Simonne !_.., 7 ans 1/2 ^d'après LUQUET, 133, pt.
CXXXVIII,, n° i55o). Petite fille jouant au cerceau. Indication du nom
(p.. 86). Baguette simplement juxtaposée aux doigts (p. 117, note 1).
Chapeauu tangent (p. n 5 ) . Personnage de profil à tète de face (p. 167),
aveoo nez de profil rajouté (p. i5G) à deux narines (p. i58).

yeuxx (145, fig. 99), soit à la fois la bouche et les deux yeux
(145,, fig. i32), auxquels s'ajoute même parfois un nez sur-
numérairee (145, Gg. i33 ;187, fig. 26). Un petit Belge
avait,, dans le dessin d'un cavalier, placé deux yeux dans la
têtee de proGl du cavalier et un seul dans la tête de profil du
cheval.. Gomme on lui faisait remarquer cette différence
dee traitement, il s'empressa d'ajouter un second œil au
LEE RÉALISME INTELLECTUEL lb"]

chevall (193, p. 238). Des tètes de profil dotées de deux


yeuxx figurés tantôt à côté, tantôt au-dessus l'un de l'autre
subsistentt même dans des dessins d'Européens adultes
(127,, fig. 18 b et a). On ne saurait donc s'étonner de
nombreuxx spécimens analogues chez les primitifs au sens
courant,, dans des figures humaines 1 , des quadrupèdes 2
ouu des oiseaux 3 . Lorsque le dessin se rapproche du
réalismee visuel en ne figurant qu'un seul œil, il arrive
encoree que cet œil soit représenté de face. Ce mode de
représentation,, bien connu pour l'Egypte et l'Assyrie, se
rencontree aussi dans d'autres milieux, notamment dans

11
Archer, gravure rupestre préhistorique de Thyout :
84,, fig. 167, n° 1. — Décor gravé d'un ceinturon de bronze d'un
kourganee de Chodschali (Transcaucasie) : 102, p. 429, fig. 5. —-
Gravuree rupestre de Nouvelles-Galles du Sud, personnage avec
unn boumerang derrière lui: fig. 121.— Gravures sur bambous
néo-calédonienss : 145, fig. 35 et 36.
22
Taureaux dans le décor gravé d'un ceinturon en bronze
d'unn kourgane de Chodschali (Transcaucasie) (environ 1000
avantt J.-C.) : 102, p. 429> fig. 5. — Gravures rupestres du Sud-
Oranaiss : Bubales de Ksar-el-Ahmar (84, pi. XIII-XV) ; élé-
phantss de Zenaga (84, fig. 25, n° 1), Guebar Rechim (84, pi. XXI,
n oss 7 et 9) et Thyout (84, fig. 124 a et 6) ; félins de Thyout (84,
pi.. XXX, n os 3 et 4) et El Kharrouba (84, fig. 196). — Dessins
surr calebasses des Ba Bouende du Congo (151, pi. 12, à droite).
—— Sculptures sur bois de lits de Madagascar (fig. g3). — Bison
dessinéé sur le rouleau en écorce de bouleau servant de sac à
objetss magiques d'un sorcier Ojibwa du Minnesota : fig. 112.
Panthèree d'un pétroglyphe algonkin de Virginie occidentale :
150,, fig. 1088 a. — Quadrupède d'une peinture sur abri de
Virginiee occidentale : 150, pi. XXXI. — Kangourou, peinture
rupestree de Nouvelles-Galles du Sud : fig. 122.
33
Dessins sur calebasses des Ba Bouende du Congo : 151,
fig.fig. 24. — Gravures sur bambous néo-calédoniens : 143,fig.44.
i588 LL ART PRIMITIF

l'artt égéen ; il est appliqué soit à l'homme *, soit aux ani-


mauxx (fig. 70, g4, g5).
L'artistee primitif, en plaçant deux yeux dans une tête
dee profil, veut exprimer qu'une tête à deux yeux; peu lui
importee qu'un seul soit visible. Il en est de même pour
less narines dans des dessins enfantins de bonshommes
(fig.. 92) ou d'animaux (fig. i32 ; 145, fig. 3o). Dans l'art
paléolithiquee franco-cantabrique, on voit également deux

Fig.. 93. — Gravure sur bois de Ht de Madagascar. Echelle: 3/4. Cavalier.


Chevall de profil à deux yeux (p. 157, note 2). Cavalier de face (p. i54). à
deuxx jambes visibles (p 102).

naseauxx à un cheval au champlevé sur un ciseau de la


Madeleinee (39, fig. 5i, n° i), au cheval polychrome
d'Altamiraa (186, p. 10, n° i) et à une gravure primitive de
Castilloo représentant une tète de jeune capridé, où les deux
naseaux.sontt figurés à côté l'un de l'autre, le second em-

11
Fresques de Cnossos : « la Parisienne » (fig. 106), « le por-
teurr de vase ». — Terre cuite représentant des personnages
écrasantt du blé à la meule, d'une tombe du premier âge du Fer
dee Curium (Chypre) : 74, fig. 201 h.
LEE RÉALISME INTELLECTUEL l59

piétantt sur la bouche (1, p. i5g, fig. i35).Du même genre


sontt les bubales se battant d'une gravure rupestre pré-
historiquee d'Er-Richa (Sud-Oranais) (fig. 72). Un
cétacéé de profil d'une gravure rupestre de Nouvelles-
Galless du Sud montre à la fois deux évents et deux yeux
("g-- " 9 ) -
L'artt primitif utilise également le procédé du change-
mentt de point de vue, concurremment à celui du déplace-
mentt signalé plus haut (p. 127-128) et qui n'est comme

Fig.. 9^. — Gravure sur bois de lit de Madagascar. Echelle : 1/2.


Zébuu femelle el son petit. Tête de profil avec œil de face (p. 158), cornes
dee profil déplacées encadrées par des oreilles de face (p. 160, note 1).

luii qu'un corollaire de l'exemplarité, pour faire ressortir


danss un quadrupède de profil la dualité des cornes et des
oreilles.. Celles-ci, par suite de leur mobilité, peuvent,
chezz les animaux sans cornes, présenter effectivement le
mêmee aspect que dans une vue de face ; il n'est donc pas
possiblee de décider dans ce cas si le dessein obéit au réa-
lismee intellectuel plutôt qu'au réalisme visuel. Mais cette
ambiguïtéé n'existe pas pour les bêtes à cornes, chez qui,
danss une vue de profil, les cornes masquent tout au
,6oo L'ART PRIMITIF

moinss l'insertion de l'oreille du second plan. On doit donc


rapporterr au changement de point de vue les figures de têtes
dee profil à oreilles divergeant de chaque côté des cornes 1 ,
parfoiss même d'une corne unique, comme dans un bou-
quetinn de Minateda (28, fig. 9, au milieu de la ligne du
haut)..
Less cornes, à leur tour, sont figurées de iace dans une
foulee de têtes de profil. Pour les bovidés 2 , comme la
11
Exemples des peintures rupestres paléolithiques espa-
gnoless : deux bœufs de la Visera (33, p. 319, fig. 2, en bas à
droite)) ; deux bœufs de la Vieja (186, p. 5, n° i, au milieu du
bas)) ; deux bœufs de Minateda (28, fig. 29, en bas au milieu ;
fig.fig. 35, en bas à droite). — Marques de poteries égyptiennes
prépharaoniquess : 84, fig. IOI, n° I et io3, n° I. — Bœuf, gra-
vuree rupestre de la vallée de Telizzharen : 84, fig. 7. — Zébus
sculptéss sur bois de lits de Madagascar (fig. 94).
22
Art paléolithique : Bison solutréen de la Grèze (186, p. 90,
n°° 3) ; Bovidés tracés avec le doigt sur l'argile à la Clotilde de
Santaa Isabel (Aurignacien ancien) (186, p. 175, n os 6-8) ; Bison
gravéé de Gargas (186, p. 81, n° 4) ; Tête de bœuf primitive à
contourr pointillé rouge de Font-de-Gaume (186, p. 78, n° 5) ;
Bœufss et bisons de la Pasiega (37, pi. XVI, au milieu vers la
droitee ; pi. XVIII, n09 27 et 28 ; pi. XI, n° 35 ; pi. XXI, n° 55) ;
Deuxx bœufs, l'un jaune et l'autre noir, de la Pileta (38, pi. VII,
n°° 32 ; pi. XIII, en bas à gauche) ; Une des plus anciennes
figuress du Charco del Agua amarga (43, fig. 2) ; Bœufs de Mina-
tedaa (28, fig. 23, au milieu en bas), des Toricos d'Albarracin
(fig.. 96; 186, p. 2, n 03 3-6), de la Vieja (186, p. 4), de la Visera
(33,, p. 3l9, fig. 2) ; Trois bœufs de Cogul, dont les deux du haut
semblentt avoir les cornes en arrêt (186, p. 56, n° 3). — Peintures
rupestress espagnoles néolithiques : deux taureaux peints en
jaune,, affrontés et semblant lutter, des Carasoles del Bosque à
Alperaa (33, p. 32g, fig. 6). — Décor gravé d'un ceinturon en
bronzee d'un kourgane de Chodschali (Transcaucasie) (environ
10000 avant J.-C.) : 102, p. 249, fig. 5. — Pétroglyphe de l'âge
duu Bronze d'Aspeberg (Bohuslan) représentant une scène de
LEE RÉALISME INTELLECTUEL l6l

formee et la direction des cornes dans la réalité sont extrê-


mementt variables, il n'est pas impossible que dans tel ou

Fig.. 9D. —Gravure sur bois de lit de Madagascar. Echelle : i / 3 . Zébu de


profill à œil de face (p i58),cornes et oreilljsde face (p. i62,note 1).

tell dessin déterminé, l'aspect présenté par ces organes


soitt celui qu'il offrait à la sensation visuelle, et qu'aurait

labouragee : fig. 125. — Art égyptien : Gravures sur palettes de


schistee (84, fig. 228 a ; 125, fig. I a, II, III) ; Bas-relief de Tourah
(124,, pi. IX) ; Sacrifice funéraire d'une vache gravé sur parois
d'unee tombe rupestre à Arèg (oasis d'Ammon) (fig. 61) ;
175,, I, fig. 3, 22, 3o, 97, 125. — Vache et son veau sur une amu-
lettee phénicienne trouvée en Sardaigne (175, III, p. 237,fig.182).
—— Décor peint d'un vase étrusco-ionien (164, fig. 171). — Gra-
vuress rupestres de l'Afrique du Nord : Bubales, sans doute
paléolithiques,, des Delaas (84, fig. i3 et pi. XIX, n os 1 et 3),
dee Ksar-el-Ahmar (84, fig. 33, 25o et pi. XIII-XV), de Gara
Touidjinn (84, fig. 123), d'El Kharrouba (84, fig. 180), d'Er Richa
(fig.. 72) ; Bovidés de Taghit (84, fig. H, n° 6) et de Zenaga
(1200 bis, pi. 9, n° 22). — Bovidé d'une peinture rupestre des
Bushmenn (146, pi. XII, a). — Zébu sculpté sur bois de lit de
Madagascarr (fig. 95). —- Bison dessiné sur le rouleau d'écorce
dee bouleau servant de sac à objets magiques d'un sorcier Ojibwa
duu Minnesota (fig. 112). — Bison dessiné par Cerf-Blanc, chef
Siouxx vivant vers 1840 (150, fig. 667). — Bison peint sur peau
dess Indiens Mandan (fig. 60).
1622 L'ART PRIMITIF

puu fixer une photographie instantanée. Mais celte expli-


cationn ne saurait avoir qu'une portée restreinte. Il est im-
possiblee d'invoquer le réalisme visuel pour les figures de
bovidéss à tête de profil où les cornes de face sont, soit
encadréess par les oreilles également de face ', soit accom-
pagnéess d'oreilles figurées de profil avec déplacement 2 .
Ill n'est pas non plus possible d'expliquer par le réa-
lismee visuel les cornes de face attribuées dans divers
dessinss à d'autres ruminants, en particulier à des ca-
pp ridés 3 .
11
Art rupestre espagnol paléolithique : deux bœufs de la
Viseraa (33, p. 3ig, fîg. 2, en bas à droite) ; deux bœufs de la
Viejaa (186, p. 5, n° 1, au milieu du bas) ; deux bœufs de Minateda
(28,, fîg. 29, en bas au milieu ; fîg. 35, en bas à droite). — Gra-
vuree rupestre de Telizzharen (Afrique du Nord) (84, fîg. 7). -^
Zébuss sculptés sur bois de lits de Madagascar (fîg. 95).
22
Peinture rupestre espagnole néolithique de la Cueva Negra
(33,, p. 3a5, fîg. 4)- — Vache peinte sur un larnax de Gournia
(Crète)) (Minoen récent III) (fîg. 70).
33
Art paléolithique : Capridé aurignacien de Pair-non-Pair
(186,, p. i63, n° 12) ; Petite protome jaune de la Pileta (38, pi. X,
n°° 27, où elle est par erreur colorée en rouge) ; Bouquetin des
pluss anciennes fresques de la Vieja (186, p. 6, n° 1, sous les pattes
dee derrière du cerf en bas à gauche) ; Bouquetins de la série la
pluss ancienne (en brun foncé) des Cabras pintadas de la vallée
desBatuecass (flg. 97, 98).—Artégyptien: Ruminants surmarques
dee poteries (84, fig. 100, n° 4 ; fîg. 101, n° 1 ; fîg. io3, n° 3) ;
Gravuress sur palettes de schiste (125, flg. III et V) ; Chèvres
(175,, I, fig. 29) ; Troupeau de chèvres du tombeau de Ti (154,
fig.fig. p. 343 ; le dieu Khnoumou est figuré avec des cornes sem-
blabless : 154, fig. p. 157 et 239). — Art chaldéen et assyrien :
chèvress sur une intaille chaldéenne (154, p. 767, fig. du bas) ;
chèvress en relief sur la porte de bronze de Balawat (175, II,
% 244)- — Gravures rupestres du Sud-Oranais : ruminants de
Bou-Alemm (84, fig. 18) et de Guebar-Hechim (84, fig. 121). —
Antilope,, dessin mural de l'Afrique orientale (88, fig. 3o a).
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 163

Laa même représentation de face sur une tête de profil


estt également fréquente pour les bois de cervidés, où elle
estt parfois associée, comme pour des bovidés, à des
oreilless de profil avec déplacement (fîg. 5g et 68). Mais
ici,, en particulier pour les cerfs mâles adultes, le pro-
blèmee du rendu se complique du fait des ramifications
dee la tige dirigées vers l'avant, notamment les deux an-
douillerss basilaires recourbés en forme de crochet. Cette
difficultéé est escamotée, si l'on peut dire, ou simplement
inaperçue,, dans des figures où chaque bois est rendu
d'unee façon schématique par une sorte d'épine dorsale
dee poisson 1 . Mais dans d'autres dessins, l'artiste s'est
attachéé à rendre d'une façon plus naturaliste la dispo-
sitionn des andouillers, tout en conservant à l'ensemble
dess bois la forme en V qu'ils présentent dans une vue de
face.. Ce problème a reçu deux solutions différentes.
Tantôt,, les bois ont tous deux leurs andouillers dirigés
verss l'avant; tantôt, par une application du procédé si-
gnaléé plus haut sous le nom de rabattement, les an-
douillerss sont figurés symétriquement de part et d'autre
dee l'ensemble des bois. Le premier type, que j'ai appelé
typee de Calapata, est caractéristique des peintures ru-
pestress paléolithiques de l'Espagne orientale (fîg. 68 ;
138,, p. 32-34). Le second, ou type des Millares, est
pluss répandu à travers le temps et l'espace, On le ren-
contree dans des peintures rupestres espagnoles néoli-

11
Pétroglyphe de l'âge du Bronze d'Aspeberg (Bohuslâu) :
fig.fig. loi. — Décor gravé sur la situle de bronze de Trezzo
débutt de l'âge du Fer) : 162, pi. XLVI, n° 19 a. — Ornement
d'unee poire à poudre des Indiens Navajo : 158, pi. XVI.
,544 L'ART PRIMITIF

thiquess ', sur des fragments de céramique eneolithique des


Millaress (fig. 69 ; 134, fig 2 et 3), sur des poteries et fu-
saïoless d'Hissarlik. (84, Og. 116), dans le décor incisé
d'unee urne funéraire hallstattienne de Silésie (201, p.
294,, fig. 1-5), sur le vase en argent de Gundestrup
(Jutland)) (u e siècle après J.-G.) (120, pi. i a 5 , n° 3),
danss un pétroglyphe de la carrière de Pipestone (Minne-
sota),, qui semble attribuable aux Ojibwa (150, fig. 5o),

Fig.. 96. — Peinture rupestre paléolithique d'Albarracin. Echelle : envi-


ronn 1/20. (d'après BREUIL, 3 5 , pi. II.) Bœufs. Cornes de face (p. iCo.note i).
Piedss hisulques (p. 1G6).
Fig.. 97-100. — Peinture! rupestres des Batuecas. Echelle : environ i / 4 ,
(( 'après BREUIL. 27, fig. 2 et 6^. Bouquetins. Pattes déplacées (p. i a 5 . notes).
Corness de profil déplacées (p. 128, note 1) et cornes de face (p. 162, noteo).

danss un dessin sur le fond d'un plat en écorce des Shus-


wapp (217, p. 482, fig. 206), dans un dessin de Cerf
Blanc,, chef Sioux vivant vers i84o (150, fig. 667).
Exceptionnellement,, les andouillers sont encore ra-
battuss symétriquement, mais en dedans et non vers
l'extérieurr (Gravures de l'âge du Bronze ou plus an-

11
33, p. 319, fig. 2, vers le centre (la Visera) ; 32, p. 235,
pi.. 10 (los Tajos deBacinete) ; 134, fig. 18 et 19 (Vêlez Blanco).
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1655

cienness sur la pierre de los Ballotes à Carril (Galice) :


167,, pi. 19, fig. i5 ; Cerf peint sur un vase zuni :
% 5 9 ). , .
Danss le décor peint de plusieurs vases céramiques du
muséee ethnographique de Prague, des bœufs de profil
ontt une tête qui semble de profil, avec un énorme œil

Fig-- 101. — Pétroglyphes d'Aspeberg (Tanuni, Bohusliin) (d'après BING, 19,


pi.. i3, n° 1). Arbres en rabattement (p. i5o). Bœufs de profil à patte
déplacéess (p. ia5, note 2) et cornes de face (p. 160, note 2). Cerf à bois
schématiséss (p. [63, note 1).

uniquee de face, mais avec deux naseaux, et surmontée de


corness et d'oreilles de face.
Lee sabot des ruminants et suidés est divisé en deux
onglonss par une fente longitudinale qui a valu à ces her-
bivoress le nom de bisulques. Cette séparation n'est pas
visiblee de profil ; on peut à la rigueur, dans une vue de
trois-quartss par devant, l'apercevoir au pied de devant et
auu pied de derrière situés en avant de l'axe longitudinal
, 6 66 LART PRIMITIF

duu corps par rapport au spectateur, mais non aux deux


autress pieds. Le réalisme intellectuel tient cependant à
mettree en évidence cette particularité caractéristique, et
less jambes, figurées de profil comme le corps, se ter-
minentt par des sabots qui ont l'air d'être vus de face.
Dess spécimens de ce type se rencontrent dans l'art paléo-
lithiquee européen, aussi bien de la région franco-canta-
triquee que de l'Espagne orientale(fig. 96, n 5 ; 1 3 8 , p. 36-
39),, dans les peintures rupestres néolithiques espagnoles
(abrii des Carasoles del Bosque à Alpera : 33, fig. 6),dans les
décorss peints de la céramique grecque 1 , dans des mi-
niaturess médiévales2, dans des gravures rupestres préhis-
toriquess du Sud-Oranais 3 , dans l'art assyrien 4 , dans des
tatouagess de cuisses birmans (192), dans un buffle du

11
164, fig. 12, 5i, 54, 57, 182, 184, 217, 218, 220-224, ^7°i
1471.. — Biche sur une amphore du Musée de l'Ermitage repré-
sentantt Iphigénie en Tauride : 163, VI, pi. XLVI. — Truie sur
laa kylix de Skythés : 189, pi. VI. — Taureau sur l'hydrie de l'enlè-
vementt d'Europe : 175, IX, p. 565, fig. 279.
22
Moutons dans une miniature du Liber Sentenliarum
d'Henrii II à Munich (xe siècle) représentant l'Annonciation aux
bergerss (177, pi. I en couleurs). —Agneau de l'Apocalypse dans
unee miniature de l'Apocalypse de Bamberg (xe siècle) (177,
pi.. 25). — Sanglier dans une miniature du Manassesche Lie-
derhandschriftt à Heidelberg (xiv e siècle) (177, p. 39). — Cerf
surr un miniature d'un missel de i52Ô (Bibliothèque de l'Uni-
versitéé d'Innsbruck, ms. n° 100) : 226, I, p. i56, fig. 55.
33
Fig. 72 ; 84, fig. i3 ; pi. XIX, fig. 33 ; pi. XIII, fig. ia3, 180,
2011 (Bubales), fig. 18 (ruminant), fig. 227 B (chevreau ?), pi. IV
ett pi. X, n° 1 (Béliers à tiare et collier de Bou-Alem).
44
175, II, pi. XV, n° 2 (décor en briques émaillées de Khorsa-
bad).. — 154, fig. p. 559 ( ur us sur un bas-relief de Nimroud),
5600 (bovidés et même un âne sur un bas-relief de Koyoundjik),
5611 (truie et ses petits sur un bas-relief de Koyoundjïk).
LBB RÉALISME INTELLECTUEL 167

Winterr Count du Dakota Lene Dog (150, pi. XX et


fig.fig. 235), dans un .cerf du décor, représentant le paradis
terrestre,, gravé sur une pipe des Payagua (209, fig p. 62).
Dee même que dans des animaux bisulques entièrement
dee profil, les sabots sont figurés de face pour en faire
ressortirr la séparation, la saillie de la rotule est rendue
parr un cercle couvrant le genou dans un bonhomme de
profill pour tout le reste, dessiné par un nègre de l'Afrque
orientalee (225, pi. 4o, n° 2).
Ill n'y a pas lieu de porter au compte du réalisme in-
tellectuell le thème de l'animal de profil à tète de face. A
laa vérité, le profil correspond à la forme exemplaire du
corpss d'un animal et la face à celle de sa tête ; mais les
animauxx peuvent, dans la réalité, se présenter sous cet
aspect,, au même titre que sous celui de la tête entière-
mentt retournée en arrière, qui n'est pas moins fréquem-
mentt reproduit par l'art figuré, bien que le réalisme
intellectuell n'ait aucune raison de préférer cette position
dee la tète à la position normale, puisque, dans un cas
commee dans l'autre, elle se présente de profil.
Maiss la possibilité de torsion latérale de la tête par
rapportt au tronc est beaucoup plus limitée dans la réalité
chezz l'homme que chez l'animal. Par suite, il paraît
légitimee de rapporter au réalisme intellectuel les repré-
sentationss humaines qui associent à un corps de profil
unee tête de face, comme c'est le cas par exemple dans de
nombreuxx bonshommes dessinés par nos enfants (fig. 92 ;
145,, fig. 29), dans une figure masculine paléolithique de
Minatedaa (28. fig. 19 et pi. I), dans une gravure rupestre de
Nouvelles-Galless du Sud représentant un personnage assis
(155,, pi. Il (en face de la p. 273), n° 3o), dans une gra-
vuree rupestre de Thyout (84, pi. XXXVII, n° 3).
1688 L'ART PRIMITIF

C'estt encore par le réalisme intellectuel que s'explique


l'attributionn de bras de face à des personnages figurés de
profil1..
Lee même souci de donner aux diverses parties du corps
humainn leur forme exemplaire se manifeste également
pourr les jambes, que l'art primitif représente avec prédi-

Fig.. 102. — Gravure sur bambou néo-calédonien (d'après LOQUET, 143,


fig.fig. a3). Chienne allaitant. Pour la mère et les petits, patles déplacées
(p.. n5,notea) et oreilles en rabattement (p 178). A droite, arbres en
rabattementt circulaire aulourd'un enclos(p. 149). En bas à gauche, deux
coqss à pattes déplacées (p. 126, note 1) et queue figurée en plan (p, 178).

leclionn de profil, même dans des personnages de face.


C'estt en effet de profil qu'apparaît le mieux l'articulation

11
Exemples : Personnages assis se faisant face sur une bague
enn électrum de travail babylonien trouvée dans une tombe eré-
toisee du début de l'âge du Bronze (74, fig. 196 b). — Dessins
surr calebasses des Ba Bouende du Congo (151, fig. 4 (à droite),
5,, 7 (à gauche), 8, 22, 23). — Dessin d'un nègre de l'Afrique
orientalee (fig. 67).
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 169

duu genou et l'angle que la cuisse forme avec la jambe


danss la flexion Assez souvent, l'artiste primitif, pour
fairee ressortir cet angle dans des figures de face, dessine
less jambes cagneuses ou « en manches de veste », autre-
mentt dit toutes deux de profil, mais en sens inverse, l'une
ett l'autre avec le genou en dehors, ce qui donne au per-
sonnagee une apparence de danseur 1 . Mais ce mode de
représentationn des jambes a un inconvénient. En effet,
commee chaque jambe se termine par un pied qui forme
avecc elle un angle droit ayant comme sommet le talon,
less pieds devront être, comme les genoux, tournés en
senss inverse; le personnage aura ainsi l'air de marcher
simultanémentt dans deux directions opposées. Le moyen
d'éviterr cette apparence insolite est de figurer les deux
jambess de profil, même dans des personnages de face.
Entree autre spécimens de ce mélange de la face et du
profil,, on peutciterdes dessinsd'enfants (fig. 38, i4o ; 145,
fig.fig. 78, i o i , I 3 I ) , des gravures rupestres Scandinaves de
l'âgee du Bronze (fig. 77 ; 19, pi. 12, n° 3 ; pi. i 5 , n05 2, 11,
12,, i/i), une Gorgone sur un plat de Camiros (environ
vu88 siècle avant J -C.) (63, v° Gorgones, p. 1619,
fig.. 3633), une représentation du dieu Bès sur un bijou
d'orr du trésor d'Egine (102, fig. p. 60, n° 1), un guer-
rierrier sur une stèle funéraire de Villafranca (premier Age

11
Dessin de l'île Mioko représentant la première famille : fig.
5i.. — Nombreux exemples sur les bambous gravés néo-calédo-
nienss : fig. 102 ; 143, fig. ia, 19, 3o, 43, etc. — Dans les nombreuses
figuresfigures de ce type de l'art australien, bon nombre doivent vouloi
effectivementt représenter des danses (corroboris) ; il en est proba-
blementt de même pour une peinture rupestre paléolithique de
laa Vieja (142, fig. 117); niais il est douteux qu'il eu soit de même
pourr diverses autres figures paléolithiques (142, p. 219).
,»<-,, h ART PRIMITIF

duu Fer) (102, fig. p. 219, n" à), un dessin d'un indigène
dee l'île Bougainville (îles Salomon) (85, fig. 68), di-
versess figure d'Indiens du Brésil : Dessins sur cale-
bassess (198, fig. i23 a, 124) et dessin au crayon (198,
fig.fig. i32) des Paressi-Kabisi ; dessin au crayon d'un
Miritii (fig. i3o).
Lee mélange de la face et du profil est particulièrement
remarquablee dans un type de figure humaine qui réunit
unee tête de profil à œil unique de face, un tronc de face
ett des jambes de profil. Ce type, traditionnel dans l'art
égyptien 1 ,, se rencontre également dans de nombreux
bonshommess dessinés par nos enfants (145, fig. 12$, I 3 I ) ,
danss l'artégéo-mycénien 2 , dans l'art chaldéenet assyrien 3 ,
danss l'art grec archaïque 4 , dans des gravures sur
bambouss de Nouvelle-Calédonie (143, fig. i5-i8), sur

11
Fig. io3. — Peinture murale des porteurs de tributs de la tombe
dee Rekhmara à Thèbes (première moitié du xv e siècle avant
J.-C.)) : 91, tf. a3 9 , fig. 35. —175,1, fig. 4, 5 7 , 98, i 7 5,5oi, 5o5, pi.
XII.. — 154, fig. p. 71, 82, m , 123, i35, I57,255,259,26I,263,
3 n .. — Dans diverses figures de ce type, la tête de profil est en
outree surmontée d'une coiffure de face : 175, I, fig. i65, 172,
527-53oo ; III, p. 77, fig. 26 (Bronze trouvé en Syrie) ; 154,
lettrinee de la p. 81, fig. p. 98, i35, i55, 23g, 263.
22
Pêcheurs portant des poissons, peinture céramique de
Phylacopii (Minoen récent I) : 91, p. 197, fig. 29. — Femmes sur
dess bagues d'or de Mycènes : 91, p. 274-276, fig. 37 et 38. —
Déessess aux colombes, plaquettes d'or de Mycènes : 175, VI,
fig.fig. 293 et 294.
33
175, II, fig. 4, 26, 71, 80, 233, 252. —154, fig. p. 54i, 555,
557,, 608, 690, 707, 768, 769.
44
175, IX, pi. VI, nos 6, 8, 16, 18 (monnaies), pi. XIV (mé-
topee du temple de Thermos). — Hydrie attique de style orien-
tahsantt d'Analatos près d'Athènes (environ première moitié
duu vu» siècle avant J.-C.) : 70, p. 75, fig. 5i.
LEE RÉALISME INTELLECTUEL ' 7 11
unee tablette de pierre trouvée dans le Tennesee (150,
pi.. LI), dans des gravures rupestres du Sud-Oranais1.
Less caractères intellectuels d'une partie d'un objet
comprenantt non seulement sa forme essentielle, mais
aussii ses relations topographiques avec les parties voi-
siness du même objet, le réalisme intellectuel désire
exprimerr ces relations dans la mesure où c'est possible
sanss sacrifier l'exemplarité. L'organe sexuel, et en parti-

Fig.. 10S. — Figure égyptienne (d'après WILIUHSON, 228, i T e série, III,


fig.fig. p. 5a). Pêcheur à la ligne. Personnage en élévation à « corp»
égyptienn » (p. 170, note 1) et bassin en plan (p. 17G). Transparence/le
l'eauu (p. 97).
Fig.. io4 et i o 5 . — Peintures rupestres des Bushmen (d'après MOSZEIK,
1644 Ms, pi. H , n°s a5 et 26). Femmes. La première a les seins de
profill étages (p. i31), la seconde les seins de face étales (p. 121, note 1).

culierr le membre viril, est trop caractéristique pour que


l'artt primitif ne tienne pas aie représenter, souvent même
11
84, fig. 229, n° 1 (« Homme au bouclier rond » de Bou-
Alem),, pi. IV (« Homme au fourreau lybien » d'El Kharrouba),
pi.. VII (« Homme au boumerang » de la même station). — Le
soi-disantt gynandre de Ksar-el-Ahmar (84, pi. XII) est tout
simplementt un homme du même type, sous cette réserve que
lee tronc est vu, non de face, mais de dos, montrant l'anus.
1^22 L ART PRIMITIF

alorss qu'il devrait être caché par le costume. Or cet or-


gane,, situé si l'on peut dire à la frontière du tronc et
dess jambes, a avec eux des relations topographiques
qu'ill est impossible de rendre à la fois avec exactitude
lorsquee le tronc et les jambes sont figurés de points de
vuee différents. Dans ce cas, en effet, il faudrait donner
simultanémentt au phallus deux positions différentes, puis-
qu'ill est situé entre les cuisses dans une vue de face, au
bordd antérieur de la cuisse du premier plan dans une vue
dee profil. Le phallus a reçu en fait cette double situation
danss une curieuse peinture rupestre de Minateda, où un
hommee est figuré avec les cuisses de face et l'abdomen
dee profil. Cet abdomen supporte à sa partie antérieure
unn phallus convenablement placé par rapport à lui. Mais
commee il ne l'était pas par rapport aux cuisses, un se-
condd phallus a été rajouté entre elles, peut-être par un
autree auteur, car il est peint d'une couleur différente (28,
fig.fig. 19, au milieu). Ce phallus supplémentaire est tout-à-
faitt comparable au nez surnuméraire qu'il arrive à nos
enfantss de placer entre les deux yeux de face d'une tête
humainee de profil (ci-dessus p. i56).
Danss la généralité des cas, l'artiste primitif n'est pas
arrêtéé par la difficulté de placer convenablement le
membree viril dans les figures où le tronc et les jambes
sontt figurés de points de vue différents. Il le représente le
pluss souvent de profil, à l'occasion, comme nous l'avons
vu,, en position horizontale, pour mieux le mettre en évi-
dence,, sans se soucier si cette situation s'accorde ou non
avecc le point de vue adopté pour l'une des régions voi-
siness du corps. Cette indifférence est particulièrement
marquéee dans des bonshommes vus de dos dont le
phallus,, bien qu'invisible dans ce cas, est représenté sur
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1733

lee côté. J'en citerai comme exemples deux gravures ru-


pestress du Sud-Oranais, où les personnages sont bien vus
dee dos, car l'un, de Moghar et-Tathani, montre le con-
tourr inférieur des fesses (84, pi. XLI) et l'autre, de Ksar-
el-Ahmar,, interprété abusivement comme un «gynandre»,
montree l'anus (84, pi. XI).
Maiss dans certains cas, il se trouve que la décomposi-

Fig.. 10G. — Fresque du palais de Cnossos (d'après EVANS, dans 91, fig 6)
«« La Parisienne ». Tête de profil à œil de face (p. 158, note i ).
Fig.. 107. — Figure égyptienne (d'après WILKISSON, 228, i r e série, I,
p.. 38a). Siège d'une villa. Mélange de l'élévation et du plan (p. 170..

tionn du corps en parties figurées de points de vue diffé-


rents,, après avoir créé le problème de la position du
phallus,, en fournit une solution, sans d'ailleurs, à ce qu'il
semble,, que les artistes l'aient cherchée. En figurant de
pointss de vue différents dans une figure humaine le tronc
d'unee part, la tête ou les jambes de l'autre, le dessinateur
prouvee qu'il ne se soucie pas de l'impossibilité analo-
miquee d'une torsion latérale à 900 du cou ou des hanches.
1744 LL ART PRIMITIF

Dèss lors, il n'y a pas de raison pour qu'il soit arrêté da-
vantagee par la même impossibilité de torsion pour la co-
lonnee vertébrale ; et ce n'est pas seulement les diffé-
rentess parties du corps, mais aussi les différentes parties
et,, si l'on peut dire, les différents étages du tronc qui
pourrontt être représentés de points de vue différents. C'est
ainsii que dans une figure de Minaleda, la tête est de
profil,, le buste de face avec les deux seins, la région lom-
bairee de profil, montrant le phallus en avant et la courbe

Fig.. 108. — Décor céramique peint de Phaeslos (d'après OUIIÉ, 170,


fig.fig. 46 6). Oiseau de profil à pattes déplacées (p. 126, note 1) et queue
vuee d'en haut (p. 178).
Figg 109 — Gravure sur bois de lit de Madagascar. Echelle : 1/2. Dindon
dee profil à queue vue d'en haut (p. 178).

dee la fesse en arrière, les cuisses de face, les jambes de


profill (28, fig. 19, au milieu). Dans l'art égyptien, où
nouss avons déjà signalé le mélange de points de vue pour
less différentes parties du corps, on rencontre fréquem-
mentt aussi la division du tronc en deux étages vus chacun
d'unn point de vue différent : les épaules sont de face, mais le
bustee ne montre qu'un seul sein comme s'il se présentait
dee profil, principalement dans des figures féminines (154,
fig.fig. p. 7 1 , 8 2 , i/io, i55, 239, 254, 263, 279, 32i ;
175,, I, fig. 99, i65, 255, 5i2), mais aussi dans des
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 17&

figuress masculines (154, fig. p. 297 ; 175, I, fig. 57,


i64)..
Maiss si les différents étages non seulement du corps,
maiss aussi du tronc, peuvent recevoir de la sorte dans le
dessinn des torsions anatomiquement impossibles, le point
dee vue adopté pour chacun d'eux sera entièrement indé-
pendantt du point de vue des étages voisins, et pourra être
indifféremmentt soit le même, soit un autre Dès lors le
pointt de vue d'où sont figurés le ventre et les cuisses sera
déterminéé non par le point de vue du buste ou des jambes,
maiss uniquement par la situation du membre viril ; le
ventree et les cuisses pourront donc toujours être consi-
déréss comme aperçus du même point de vue, et par suite
lee problème du phallus se trouvera supprimé.
Passonss aux dessins qui associent des éléments figurés
enn élévation et d'autres en plan. Nos enfants, dans nombre
dee dessins de pots de fleurs en élévation, ne manquent
pass de figurer au fond le petit trou pour l'écoulement de
l'eau,, qui ne peut être aperçu que d'en-dessous (145,
fig.fig. 107). Une bobine dessinée parune fillette de 7 ans 1/2
estt figurée, de trois points de vue différents : le cylindre cen-
trall en élévation, le deux rondelles terminales percées
commee si elles étaient vues l'une d'en dessus, l'autre d'en
dessouss (145, fig. 47)- Dans des maisons à plusieurs étages,
ceux-cii figurés en plan sont reliés par un escalier en
élévation,, par exemple dans la première maison dessinée
parr une petite Californienne à 5 ans 3 mois (145, fig- 124).
Dess cours ou jardins accompagnant des maisons en élé-
vationn sont figurés en plan, avec les fleurs ou arbustes
dess massifset les portes en élévation (145, iig. 73, 97, 117).
Lee changement de point de vue a parfois pour consé-
quencee qu'un même contour correspond à la fois à
L'ARTT PRIMITIF

diversess faces d'un même objet aperçu de points de vue


différents.. Ainsi il arrive dans des dessins enfantins de
maisonss que le contour divisé en pièces figurées en plan
correspondee en même temps à la façade vue en élévation,
carr il contient la porte et les fenêtres, ou encore supporte
lee toit ou la cheminée. De même, dans un dessin d'une
fillettefillette de 5 ans 1/2 représentant une chambre à couche
lee contour représente à la fois le plancher puisqu'il con-
tientt les meubles, les murs puisque c'est à lui que
sontt adossés le placard et la cheminée, et le plafond
puisquee c'est de lui que descendent les rideaux des
fenêtres,, dont le haut, indiqué par les tringles, lui est
accoléé (145, fig. i35).
Danss diverses représentations égyptiennes de jardins,
less bâtiments, arbres et personnages sont en élévation, les
bassinss en plan (fig. 3g, i o 3 ; 228, I e série, II, p. 9 9 ;
154,, fig. p. 201 el'àko). Dans la représentation d'untom-
beau,, l'édicule bâti sur le sol est en élévation, ainsi que le
puitss conduisant à la demeure du mort. Celle-ci est figurée
enn plan, avec les portes de communication des différentes
piècess rabattues sur le sol. Le mobilier et le tombeau
proprementt dit avec la momie sont en élévation (154,
fig.fig. p. 198). Dans un tableau du tombeau de Khnoum-
hotpouu à Beni-Hassan, qui représente deux femmes
tissantt au métier horizontal, les femmes accroupies sont
enn élévation, le métier est vu d'en haut, ce qui lui donne
danss la figure l'apparence d'être vertical (154, fig.
p.. 32i). Dans une autre figure égyptienne représentant
lee siège d'une ville, les fosses entourant celle-ci et les
pontss qui les traversent sont vus d'en haut, la ville elle-
mêmee et les soldats rangés en dehors des fossés sont vus
dee front (fig. 107). Dans un dessin eskimo, des huttes et
LEE RÉALISME INTELLECTUEL I77

dess montagnes en élévation entourent un marais vu à vol


d'oiseauu (105, pi. 81, nos 23-26). Dans un dessin d'un
indigènee de l'île Mioko (groupe du Duc d'York dans l'ar-
chipell Bismarck), représentant la première famille, les
deuxx personnages sont figurés de face de part et d'autre
dee leur maison vue à vol d'oiseau (fig. 5 i ) . Dans une
gravuree rupestre australienne représentant un émou cou-
vant,, les œufs sont figurés en plan, l'oiseau de profil(157,
pi.. XVI, n° 4).
Danss un dessin de maison de l'île Bougainville (îles
Salomon),, les pilotis, l'échelle et le toit sont figurés en
élévation,, le plancher est vu d'en haut (fig. i io). Dans un

ii /

Fig.. n o . — Dessin do l'ile Bougainville (d'après Fwzzi, 85, fig. 68).


Maison.. Mélange d'élévation et de plan (p 177).
Figg m . — Dessin d'un indigène du détroit de Torres fd'après HADDOH,
93,, p. 18). Crocodile. Mélange de points de vue (p. 180).

dessinn tchouktchi d'une maison en élévation, le filet sus-


penduu horizontalement dans le haut de la maison est
figuréfiguré comme vu d'en haut, dans le même plan vertical
quee les figurines d'oiseaux et de rames qui, dans la
réalité,, sont suspendues à ses bords (20,p. 3g5,fig. 273).
Danss un autre dessin tchouktchi d'une maison en éléva-
tion,, la représentation en plan est également appliquée à
l'espècee de cadre fait avec des rames qui est placé à mi-
hauteurr du poteau central (20, fig. 282). Dans des vais-
seauxx européens vus de profil, la « barre » du gouvernail
L'artt primitif. 7
I788 LL ART PRIMITIF

estt figurée à vol d'oiseau, pour en manifester la forme


circulaire,, dans une gravure sur bambou néo-calédonien
(143,, fig. 10) et dans un dessin au crayon d'un indi-
gènee de Port Moresby (Nouvelle-Guinée anglaise) (95,
fig.fig. 22). Dans le dessin d'une pirogue à balancier de
l'îlee Mioko (groupe du Duc d'York dans l'archipel Bis-
marck),, tandis que la pirogue est vue de profil, l'arma-
turee du balancier est figurée en projection verticale
(fig.. 85).
Surr un fragment céramique de Mycènes (Minoen ré-
centt III), un serpent est vu de profil pour sa partie anté-
rieuree ; la partie postérieure, enroulée, est figurée à vol
d'oiseauu pour en manifester la forme spiralée (fig. 87).
Laa queue d'oiseaux de profil est vue d'en haut, pour la
montrerr étalée dans un plan horizontal, dans des pein-
turess céramiques du Minoen récent III de Crète (fig. 108 ;
170,, fig. 45-47) et de la Grèce archaïque (175, IX,
fig.fig. 247, 248, 336), et de même dans des gravures sur
boiss de lits de Madagascar, en particulier pour des
dindonss (fig. 109). Sur les mêmes bois de lits, divers
oiseauxx sont vus de profil pour la tête et les pattes, d'en
hautt pour les ailes et la queue. Un cheval dessiné par
unn petit Français de 5 ans 3 mois (145, fig. i34) et
dess quadrupèdes (chiens?) gravés sur bambous néo-calé-
doniens(fig.. io2;143,fig. i3,23)ontlecorpsde profil et la
têtee vue d'en haut, avec les oreilles figurées l'une en dessus,
l'autree en dessous. Dans un dessin d'une petite Bava-
roisee de 7 ans (145, fig. 89) et des gravures sur bambous
néo-calédonienss (fig. 66), des chevaux de profil ont la
têtee vue d'en haut pour mettre en évidence les deux yeux,
cee qui n'empêche d'ailleurs pas les oreilles d'être placées
àà côté l'une de l'autre comme dans le haut d'une tête de
LEE RÉALISME INTELLECTUEL I 7g

face.. Dans divers cavaliers gravés sur bambous néo-calé-


doniens,, les rênes sont figurées à vol d'oiseau, non seule-
mentt lorsque la tête du cheval est également vue à vol
d'oiseauu (fig. 66), mais aussi lorsqu'elle est de profil
(140,, fig. 18c).
Dess animaux figuré en plan ont la tête de profil :
tortuee peinte sur le plat de l'anse d'un vase corinthien
(164,, fig 8o), lézards gravés sur bambous néo-calédo-

C=JJ
Fig.. l i a . — Dessin sur écorce des Qjibwa du Minnesota. Echelle : envi-
ronn i/4. (d'après HOFFMAN, 104, pi. XX). Bison de profil à deux yeux
superposéss (p. 157, notea). et cornes de face (p. 1O1, note 1).
Fig.. 113. — Peinture murale des Indiens Pueblo de l'Arizona (d'après
MiNDEL«Fp,, 161, fig. 77). Capridé ou antilope. Déplacement des pattes
(p.. I2Ô, note a), des cornes et des oreilles (p 129). Sabots à onglons
déplacéss ou figurés en plan (p 181).
Fig.. 114. — Peinture rupestre australienne. Echelle : environ i/5 . (d'après
M*THEWS,, 157, pi. XV). Kangourou avec un jeune dans sa poche mar-
supiale.. Déplacement (p. 117).

nienss (143, fig. 16) et sur une pipe des Payagua (209,
fig.fig. p. 62). Dans des crocodiles en plan, la queue est
figuréefigurée de profil pour faire ressortir la forme dentelée
sonn arête supérieure dans une peinture sur un vase égyp-
tienn énéolithique de Ballas (176, pi. XXXV, fig. 77). Il
enn est de même pour le dos dans un crocodile en plan
dessinéé par un nègre de l'Afrique orientale (225, pi. 33,
n°° 12). Un crocodile dessiné par un indigène du détroit
^ oo L'ART PRIMITIF

dee Torres est vu d'en dessus pour l'ensemble, de profil


pourr la queue, d'en dessous pour l'anus (fig. m ) .
Less orteils sont assez fréquemment figurés à vol d'oi-
seauseau dans des figures en élévation d'hommes 1 ou d'ani-
mauxx 2 . Il faut d'ailleurs reconnaître que ce caractère n'a
pass la même valeur comme indice du réalisme intellec-
tuell dans tous les exemples où il se rencontre. En effet,
less pieds d'un homme ou d'un animal sont vus de hau-
teurr d'homme ; en d'autres termes, le rayon visuel fait
avecc leur surface un angle aigu d'ouverture variable selon
l'éloignementt et qui, au contact, se confond pratiquement
avecc un angle droit, c'est-à-dire avec la vue à vol d'oi-

11
Figures paléolithiques : Altamira (186, p. 7, n os I et 5)
Hornoss (fig. 40) ; la Vieja (36, fig. 2, 3, 10 et pi. I) ; Minateda
(28,, fig. 20, 24, 33, 3g) ; Valltorta (169, fig. 38, 53). — Stèle
funérairee de Villafranca (premier âge du Fer) : 102, p. 219,
fig.fig. 4- — Gravures rupestres du Sud-Oranais : « Homme au
boumerangg » d'El-Kharrouba (84, pi. VII, « Homme à la hache »
(84,, pi. I) et « gynandre » (84, pi. XI) de Ksar-el-Ahmar. —
Dessinss d'un nègre de l'Afrique orientale d'environ ils, ans:
225,, pi. 34, n<» 1, 2, 4 6 ; pi. 37, n° 2 a ; pi. 40, n° 3) et d'un autre
nègree (225, pi. 34, n° 9). — Dessin mural de l'Afrique orientale :
fig.fig. 129. — Dessin au crayon d'un Woolwonga de la rivière
Adélaïdee (Australie Nord-Ouest) : fig. 74. — Gravures sur
bambouss néo-calédoniens : 143, fig. 12, i3, 14, 16 (pieds de face),
15-177 (pieds de profil).
22
Figures paléolithiques : Felis spelaea de Bruniquel (142,
fig.fig. 72), rhinocéros et ours de la Colombière (159, fig. 56 et
61),, ours de Teyjat (186, p. 181, n° 8) ; carnassier de la Visera,
peut-êtree azilio-tardenoisien ou néolithique (33, fig. 2) ; carnas-
sierss (28, fig. 38, 41) et échassiers (28, fig. 3, 3o) à Minateda.
—— Gravures rupestres du Sud-Oranais : félins d'El Kharrouba
(84,, fig. 196 et pi. VI), d'Er Richa (84, fig. 213), de Ksar-el-
Ahmarr (85, fig. 244, n°s 1 et 2, fig. 246). —- Quadrupèdes gra-
véss sur bambous néo-calédoniens (143, fig. i3 et i4).
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1811

seau.. L'artiste a donc pu voir des pieds d'hommes ou


d'animauxx domestiques offrant effectivement cet aspect,
ett dans ce cas, la représentation des orteils vus d'en haut
estt conforme au réalisme visuel. Mais il n'en est pas de
mêmee pour des animaux non domestiques qui se laissent
difficilementt approcher et, pour ceux ci au moins, cette
représentationn des orteils doit être rapportée au réalisme
intellectuel..
Laa fente qui divise en deux onglons le sabot des rumi-

Fig.. ii5. — Détail des pattes de la biche polychrome d'AHatuira (d'après


BUEUIL,, 54, pi. X11I). Déplacement des ergots (p. i3o) et torsion des
onglonss (p. 166).
Figg tiG. — Détail des pattes de devant d'un bison polychrome J'Altamira
(d'aprèss BRIUIL, 54, pi. XVI) Mélange de points de vue (p. i8a}.

nantss et suidés, invisible de profil, est visible soit de de-


vant,, soit d'en dessus, soit d'en dessous. Nous avons si-
gnaléé plus haut (p. 166) des spécimens où, pour la
rendre,, le sabot était figuré comme s'il avait subi par
rapportt à la jambe une torsion de 90 0 selon un axe verti-
cal.. Le même résultat est également obtenu par une tor-
sionn de 900 selon un axe horizontal, qui amène le sabot à
see présenter non plus de face au bout d'une jambe de
profil,, mais en plan à l'extrémité d'une jambe en éléva-
tionn Dans certaines figures (fig. 59 et n 3 ) , le rendu
1822 LABT PRIMITIF

schématiquee du sabot ne permet pas de discerner si c'est


cee dernier procédé qui a été employé ou simplement le
mêmee déplacement en hauteur que pour le double ergot
dess mêmes animaux (p. i3o). Mais dans d'autres repré-
sentationss plus naturalistes, la forme au sabot correspond
sanss équivoque à une vue en plan (fig. 60).
Unn bison mugissant polychrome d'/Utamira (fig. 116)
estt particulièrement curieux. L'artiste, pour rendre à la
foiss les deux onglons et les deux ergots, s'est avisé du
procédéé extrêmement ingénieux de figurer l'un des pieds
commee s'il était vu d'en dessous par derrière, représenta-
tionn tout à fait conforme au réalisme visuel pour cette
partiee du membre considérée isolément, mais inconci-
liablee avec le point de vue adopté pour le reste de l'ani-
mal.. Un parti analogue semble avoir été employé dans le
boucc casqué de Bou-Alem (84, pi. IX).
Laa représentation des deux yeux dans une tête de
profil,, qui pour les quadrupèdes et oiseaux correspond à
unn mélange de la face et du profil, correspond plutôt à un
mélangee du plan et de l'élévation pour les poissons, cé-
tacéss et reptiles ; mais elle dérive du même principe. J'en
citeraii comme exemples des poissons du carnet de mo-
dèless d'un tatoueur tunisien (219, feuillet 1, dans le carré
dee droite en haut du n° 5 ; feuillet 3, n° 11), un poisson
dessinéé sur le sable par un Bororo du Brésil (fig. 118), un
requinn gravé sur bambou néo-calédonien (143, fig. 29),
unn poisson et un cétacé des gravures rupestres de Nou-
velles-Galless du Sud (fig. 119 et 120), des dugongs des-
sinéss par des Papous (93, p. x6 ; 95. fig. i3), un serpent
peintt sur une coupe de Peithinos (175, X, fig. 287), un
serpentt gravé dans le décor, inspiré du paradis terrestre,
d'unee pipe des Payagua (tribu des bords du Paraguay, près
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 183

d'Asuncion)) (209, fig. p. 65), deux serpents peints


surr les poteaux de deux maloka (maison commune) des
Uananaa du Uaupès moyen (117, p. 49 et fig. ao a et
266 a). Il est intéressant de relever que dans leur explica-
tionn de la seconde de ces figures, les indigènes ont dé-
claré,, de la partie voisine des yeux, que c'était « les joues
ouu la mâchoire inférieure », preuve qu'eux-mêmes étaient
embarrasséss pour savoir s'ils devaient considérer la tète
commee vue de profil ou en plan. La même disposition
dess yeux par rapport aux mâchoires se retrouve dans un

Fig.. 117. — Gravure sur une épaisse plaque de schiste à encoches de


Laugerie-Bassee (collection Vibraye, Muséum national d'histoire naturelle,
Anthropologie,, n° 1^570). Echelle : 1/2. Poisson de profil à deux yeux
(pp 184).
Fig.. 118. — Dessin sur le sable des Bororo (d'après K. von den STEIHEN,
208,, fig. 61). Poisson de profil à deux yeux (p. 182).

dessinn sur calebasse des Ba Bouende du Congo, représen-


tantt un léopard de profil (151, fig. 9).
Dess spécimens du même genre remontent à l'époque
magdalénienne.. Sur l'extrémité de bâton troué en bois de
rennee de Laugerie-Basse dont l'une des branches est in-
terprétéee en phallus, l'autre branche est traitée, sur cha-
cunee de ses faces, en poisson stylisé, mais encore bien re-
connaissable,, avec les yeux vus d'en haut, tandis que les
autress détails, bouche, ouïe, ligne latérale, queue, cor-
respondantt à une vue de profil (39, p. 74, fig. 3o). Les
deuxx yeux sont particulièrement nets dans un poisson
L ' A R TT PRIMITIF

inéditt gravé sur une épaisse plaquette de schiste à en-


cochess de Laugerie-Basse (Muséum, Anthropologie,
n°° 14.570) (fig. 117). De même, un lézard ou salamandre
enn relief sur un objet de la Madeleine, figuré en plan
pourr l'ensemble, a la bouche de profil (39, p. 1/12,
65.67,, n« a).

Gravuress rnpestres de Nouvelles Galles du Sud. Echelle ; environ i / i 3 .


(d'aprèss MATBEWS, 157» pi- XXX).
Fig.. 119. — Cétacé de profil à deux yeux (p. 182) et deux évents (p. I5IJ)-
Fig.. 120. — Poisson de profil à deux yeux fp. 182).
Fig.. 111. — Homme assis (avec un boumerang derrière lui) a deux yeux
superposéss (p. 157, note 1).
Fig.. 122. — Kangourou de profil à deux yeux (p 167, note 2).

Lee mélange du plan et de l'élévation se retrouve à plu-


sieurss reprises dans des figures humaines dessinées par
dess nègres de l'Afrique orientale. Dans un dessin repré-
sentantt une corvée de femmes enchaînées, figurées de
profill avec les bras étendus de face, le pelele (plateau de
lèvres)) est rendu par son aspect exemplaire d'un rond,
LEE RÉALISME INTELLECTUEL l85

commee s'il était vu d'en haut (fig. 67). Le pelele est


encoree figuré de la même façon dans trois dessins d'un
mêmee nègre d'environ 24 ans, représentant une danse
dee femmes (225, pi. 34, n° 1), deux femmes transportant
dee l'eau (225, pi. 35; n° a), une femme portant son en-
fantt (225, pi. 37, n° 2 a). Dans un dessin mural de
l'Afriquee orientale, représentant un enfant, la tête est de
profill avec deux yeux, dont l'un dans le menton, les
brass de face, le tronc de profil au moins dans sa partie
inférieure,, les orteils vus d'en haut (fig. 127).
Lorsqu'unn même tableau réunit à des objets en position
normalee un personnage humain couché sur le dos, dans
laa réalité l'œil l'aperçoit de profil dans une situation per-
pendiculairee à celle des autres éléments du tableau. Mais,
commee nous l'avons vu, le réalisme intellectuel, par souci
d'exemplarité,, préfère pour le corps humain la représen-
tationn de face. Le représenter de face, alors qu'il apparaît
dee profil, revient à le figurer comme si, les autres élé-
mentss du tableau étant en élévation, il était vu en plan.
C'estt ainsi que dans quantité de dessins enfantins, des
personnagescouchésdansunlit(145,fig.. 123) ou des bébés
couchéss dans une voiture (145, fig. io4) sont représentés
commee s'ils étaient vus d'en haut, le lit ou la voiture étant
dee profil. Dans une figure sculptée sur bois de lit de Mada-
gascar,, une femme portant un bébé dans les bras est
figuréefigurée de face, l'enfant comme s'il était vu à vol d'oise
(fig.. 124). De même, dans diverses Notre-Damede Pitié,
parr exemple un relief sur bois de la chapelle de Saint
Trémeurr en Plougastel-Daoulas (Finistère), de la pre-
mièree moitié du xvii" siècle, trois statuettes céramiques
duu Musée etnographique de Prague (vitrine XVII) et un
ex-votoo du même musée, daté de 1816, la Vierge est de
1866 L'ART PRIMITIF

face,, Jésus qu'elle tient sur ses genoux est figuré comme
vuu d'en haut. Sur la plaquette en relief du pont Charles à
Prague,, commémorant qu'à cette place saint Jean Népo-
mucènee a été précipité dans la Yltava, le pont est repré-
sentéé de face, le saint, vu par transparence à travers l'eau,
estt figuré comme aperçu à vol d'oiseau ; il a d'ailleurs
conservéé sur la tête la mitre insigne de sa dignité, au
mêmee titre que dans des miniatures du Moyen Age les

Fig.. 123. — Gravure sur bois de lit de Madagascar. Echelle : 3/4


Nourrice.. Seins étages p. I 3 I ) .
Fig.. 124. — Gravure sur bois de lit de Madagascar. Echelle : i/a
Nourrice.. Mélange de l'élévation et du plan (p. i85).

roiss dans leur lit gardent leur couronne pour dormir.


L'églisee de Ghavignon (Aisne) contenait avant la guerre
deuxx représentations du martyre de son patron, saint
Hippolyte,, écartelé à quatre chevaux, l'une en gravure
surr bois, l'autre constituée par une statue du saint dont
less membres formaient un X, les bras d'un côté, les
jambess de l'autre étant reliés par des ficelles à deux autres
sculpturess sur bois figurant les deux couples de chevaux
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 187

tirantt en sens inverse. Dans l'une et l'autre de ces repré-


sentations,, les chevaux étaient de profil, le saint disposé
commee s'il était vu d'en haut.
Pourr terminer cette revue des spécimens du mélange
dee points de vue par le cas le plus complexe, nous cite-
ronss diverses ligures qui, en même temps que certains
élémentss sont représentés en élévation (face et profil) et
d'autress à vol d'oiseau; recourent en outre au procédé du
rabattement..
Voicii d'abord quelques exemples empruntés au dessin
enfantin.. Dans une chaise (145, fig. 68, en haut à gauche),
lee dossier et les pieds de devant sont vus de face, le
siègee est vu d'en haut, et les pieds de derrière, insérés à
leurr place correcte à la jonction du dossier et du siège,
s'écartentt de chaque côté, comme des bras de fauteuil.
Unn type assez fréquent de voiture attelée comprend la
caissee et les brancards en plan, les roues rabattues de
chaquee côté et éventuellement la capote rabattue en
arrièree ; le cheval est vu de profil et les personnages de
face,, mais rabattus en arrière comme la capote (145,
fig.. m ) . Dans le dessin d'une ancienne porte de ville, les
deuxx tours sont figurées en élévation, le reste, notamment
less fossés, en plan ; les bancs de l'allée centrale sont rabattus
dee chaque côté (145, fig. 125). La photographie de l'objet
réel,, que nous avons reproduite à côté du dessin (145,
fig.fig. 126), permet de voir la différence de deux représenta-
tionss également fidèles et, en ce sens, ressemblantes, mais
l'unee en réalisme visuel, l'autre en réalisme intellectuel.
L'artt assyrien fournit des exemples analogues. Dans
unn tableau représentant les exploits de Sennachérib, les
colliness boisées bordant une rivière sont rabattues de part
ett d'autre de ses rives (175, II, p. 345). Sur la porte de
jggg L'ART PRIMITIF

Balawat,, un pont sur lequel passe un cheval, figuré en


élévation,, est entouré d'une enceinte en plan dont les
tourss sont rabattues en cercle autour d'elle (175, II,
pi.. XII, en bas à gauche). Dans une figure de INimroud
représentantt une ville fortifiée, les édifices, tentes et per-
sonnagess sont figurés en élévation, la perspective étant
renduee par étagement des plans ; ils sont entourés de l'en-
ceintee avec tours en rabattement circulaire externe (175,
II,, fig. 106). Une autre figure de Nimroud représente
unee sorte de donjon par son plan circulaire, divisé par
dess murs suivant deux diamètres perpendiculaires en
quatree salles, dans chacune desquelles les personnages et
less meubles sont figurés en élévation. Les tours entourant
laa muraille de cette forteresse sont rabattues extérieure-
mentt (175, II, fig. i55).
Danss un dessin de voiture incisé sur une urne à vi-
sagee hallstattienne de Grabau, la caisse de la voiture
estt vue à vol d'oiseau avec les roues en iabattement, le
personnagee est représenté de face, les deux chevaux de
l'attelagee sont figurés de profil avec étagement des
planss (fig. 126).
Danss des dessins muraux de l'Afrique orientale, un
léopardd a la tête de profil avec deux yeux, le corps vu à
voll d'oiseau, les pattes en rabattement avec les orteils vus
d'enn haut (fig. 128); un buffle a la tête de profil avec
deuxx yeux, les cornes de face, les pattes en rabattement,
montrantt la fente du sabot (88, fig. 2 e). Dans un dessin
d'unn nègre de l'Afrique orientale, représentant un danseur
danss une fête d'initiation, l'ensemble du corps est de face,
laa tête de profil ; le jupon est figuré comme vu en plan
parr un cercle autour duquel rayonnent les fibres qui dans
laa réalité pendaient verticalement (fig. 4i). Dans un
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 189

dessinn d'un autre nègre de l'Afrique orientale d'environ


244 ans, qui représente un Européen photographiant une
dansee de femmes, l'Européen et ses aides sont vus de
profil,, l'appareil photographique est vu d'en haut, le
groupee des femmes dansant est figuré en rabattement
circulairee (225, pi. 34, n° i). Un autre dessin du même
nègree représente le même Européen photographiant des
femmess qui préparent la farine. Le groupe d'Européens
(àà gauche) est en élévation, de même que la chambre

Fig.. ia5. — Pétroglyphe d'Aspeberg (Suède) (d'après BALTZBR, dans 120,


fig.fig. p. 79V Scène de labourage. Bœufs de profil à pattes déplacées
(pp ia5, notea) et cornes de face (p. 161, note 1). Etagement des plans
(p.. 124).
Fig.. 126. — Décor incisé sur urne à visage hallstattienne de Grabau
(Prussee occidentale) (d'après La BAUME, 121, pi. 16). Voiture. Déplacement
dess pattes (p. n 5 , note 2). et des oreilles (p. 127, nota 2) dos chevaux Ab-
sencee de rênes (p. 85). Mélange de pointe de vue avec rabattement (p. 188).

photographique,, y compris la poire pour le déclanche-


mentt de l'obturateur ; mais le pied qui la supporte est vu
d'enn haut. Au milieu du dessin, une femme portant son
enfantt est de face avec le pelele vu d'en haut. Le groupe
dee droite représente les travailleuses. Les trois qui pi-
lonnentt le grain sont disposées de face, rabattues par
rapportt à leurs bras autour du mortier vu d'en haut dans
lequell pénètrent les pilons. Deux autres femmes qui
broientt le grain sont figurées de face, debout (dans la
réalité,, elles sont accroupies), en rabattement interne,
, q 00 L'ART PRIMITIF

c'est-à-diree opposées par leurs têtes au-dessus et au-dessous


duu groupe des pilonneuses, devant la pierre à broyer le
grainn prolongée par la corbeille pour recevoir la farine,
quii sont vues d'en haut. Tout à fait à droite sont figurées,
vuess à vol d'oiseau, les deux corbeilles, l'une pour vanner
lee grain, l'autre pour le recevoir une fois débarrassé de ses
impuretés,, qui correspondent à l'opération du vannage
intermédiairee entre le pilonnage dans le mortier et le
broyagee sur la pierre. Dans ces deux dessins, comme
danss la plupart de ceux du même auteur, les orteils des
personnagess sont figurés à vol d'oiseau, même ceux des
Européens,, pourtant chaussés dans la réalité (225, p. io4
ett 108 et pi. 37, n° 2 a; cf. les photographies pi. 37,
noss 2 b et c).
Danss l'art eskimo, une figure comprise dans un en-
semblee gravé sur ivoire de morse et expliquée par un
indigènee représente une habitation souterraine (hutte
d'hiver)) dans laquelle les membres d'une société exécutent
dess danses magiques. Ces danseurs, au nombre de quatre,
sontt disposés en deux rangées figurées en rabattement
interne,, c'est-à-dire opposées par les têtes. Aux quatre
angless du toit de la loge, quatre jeunes gens armés d'arcs
ett de flèches pour écarter les intrus éventuels étrangers à
lala société sont figurés en rabattement externe, c'est-à-dire
opposéss par les pieds ; les axes de leurs corps sont per-
pendiculairess aux axes des corps des danseurs. Le couloir
enn pente qui conduit de l'extérieur à la loge est figuré en
plan,, ainsi que le sol de la loge représenté par un carré et
lee foyer central représenté par un petit rectangle. Le rec-
tanglee figurant le sol représente en même temps, d'après
lala position des guetteurs, le toit de la loge, qui par con-
séquentt est figuré également en plan. La partie interne
LEE RÉALISME INTELLECTUEL

duu plafond n'est par représentée par le toit qui lui corres-
pondd à l'extérieur, mais par un rectangle inscrit dans
celuii du sol ; ses côtés forment le bord supérieur des
paroiss latérales de la butte, figurées en élévation comme
sii chacune était vue de devant et rabattues à l'intérieur
(105,, fig. 9 i , n ° 7 ) .
Unn autre dessin eskimo représente également une mai-
sonn d'hiver. De ses trois habitants, deux sont figurés en

Peinturess murales de nègres de l'Afrique orientale (d'après FÛLLEBORN, 8 8 ,


figfig 2 a, 2 e et a 6.
Fig.. 127. — Enfant. Mélange de points de vue (p. i85).
Fig.. 128. — Léopard. Mélange de points de vue avec rabattement (p. 188).
Fig.. 129 — Homme tirant au fusil. Phallus horizontal (p. I 3 I ) . Rabatte-
mentt des bras (p. 1/12). Orteils vus d'en haut (p. 180, note 1).

élévationn comme la maison, l'un assis sur une banquette,


l'autree debout. Le troisième a l'air d'être la tête en bas ;
ill est donc dessiné en rabattement interne par rapport aux
deuxx autres ; par conséquent la ligne droite sur laquelle
s'appuientt ses pieds correspond à l'intersection de la paroi
duu fond de la hutte avec le sol, qui par suite est figuré en
plann (105, fig. 49).
Danss un dernier dessin eskimo, qui représente un sha-
, n 22 L'ART PRIMITIF

mann soignant un malade, la loge est figurée en plan, ainsi


quee le foyer (6) : mais le lampadaire placé près du
foyerr (c), le malade et le shaman sont en élévation ; les
musicienss jouant du tambour (d) et les assistants (e) assis
lee long des parois de la loge sont figurés en rabattement
externee (la tête en dehors) ainsi que les acolytes du sor-
cierr (m et n) placés de chaque côté de l'entrée à l'inté-
rieurr (105, p. 920-921 et fig. i42).
Dess exemples analogues sont fournis par diverses
imagess mnémoniques de magiciens Ojibwa du Minnesota
(104,, pp. i65 sq., pi. III a et c, IV et VIII). Les loges
magiquess (midewicjan) servant aux différents degrés d'ini-
tiationn sont figurées en plan par des rectangles (III a etc,
IV),, à pans coupés dans VIII, avec ouverture au milieu
dess deux petits côtés. Dans VIII, à ces loges magiques
enn plan sont juxtaposées des tentes d'habitation, à usage
profane,, figurées en élévation. Les arbres entourant les
logess magiques sont figurés en élévation sous les deux
premièress loges de III a, en rabattement linéaire externe
pourr la troisième loge de IV. Les poteaux sacrés de l'in-
térieurr des loges sont figurés tantôt en plan (dans la petite
logee du bas à gauche dans III a et les deux loges de III c),
tantôtt en élévation, insérés soit sur l'axe longitudinal de
laa loge (dans les quatre loges de IV et les deux dernières
dee VI11), soit sur le bord inférieur du contour (deux pre-
mièress loges de VIII). Les quatre loges de ce dernier
dessinn présentent en outre en élévation, suspendus à un
bâtonn horizontal, les objets offerts en cadeaux par les
candidatss à l'initiation.
Less personnages qui participent aux cérémonies d'ini-
tiationn (candidat, magiciens, esprits protecteurs) sont
figuréss tantôt en élévation, comme perchés sur le bord
LEE RÉALISME INTELLECTUEL 1Ç)3

supérieurr du contour (première et deuxième loges de


IIII a), tantôt en rabattement linéaire externe, opposés par
less pieds de part et d'autre soit des deux grands côtés du
rectanglee figurant la loge, soit de l'entrée de celle-ci (troi-
sièmee loge de III a, III c, IV). Le dessin VIII est parti-
culièrementt intéressant, car on y voit employés par un
mêmee artiste différents modes de traduction de la perspec-
tive.. Dans les loges d'initiation, les personnages qu'elles
contiennentt sont figurés en élévation à l'intérieur, tantôt
enn une seule rangée horizontale sur le bord inférieur (dans
less deux premières loges), tantôt en deux rangées super-
posées,, celle du dessous comme dans le cas précédent,
cellee du dessus sur l'axe longitudinal de la loge (deux
dernièress loges). Mais les personnages qui se trouvent
danss la loge de l'esprit révélateur de la magie (en haut à
droitee du dessin) sont figurés en rabattement linéaire
interne,, opposés par la tête et appuyés par les pieds à
l'intérieurr des grands côtés de la loge,
Nouss terminerons par une maloka dessinée au crayon
parr un Miriti du rio ïiquié (Brésil). Le toit est figuré en
plann avec son faîte à direction longitudinale et ses che-
vrons,, disposés d'une façon correspondant à la forme de
l'édifice,, rectangulaire avec une sorte d'abside arrondie à
sonn extrémité postérieure. Les personnages placés devant
laa maison sont vus de face, ainsi que les deux sortes de
portiquess (dans la réalité il y en a trois) composés chacun
dee deux poteaux réunis par une poutre transversale qui
supportentt la partie du toit la plus voisine du faîte, et
quee la poutre transversale située à la limite de la partie
rectangulairee de la maison et de l'abside, à laquelle sont
suspendus,, représentés par de petits traits verticaux, les
épiss de maïs conservés comme provisions. Le reste de la
L'ARTT PRIMITIF

maisonn est figuré en rabattement : les deux parois anté-


rieuree et postérieure, chacune avec son ouverture d'accès
médiane,, rabattues intérieurement, c'est-à dire opposées
parr leur bord supérieur, les quatre rangées latérales (deux
dee chaque côté des portiques mentionnés ci dessus) de

Figg i3o. — Dessin au crayon d'un Miriti (d'après KOCII-GRÙMBERG, 117,


p.. 42, fig. 6). Maison. Ligne de terre (p. 90). Personnages de face à
piedss de profil (p. 170). Mélange de points de vue (p. 194).
Fig.. 131. — Gravure sur bois de lit de Madagascar Echelle : 1/2. Soldat.
Déplacementt en hauteur des bras de profil (p. 127, note 1). Fusil non
tenuu en main (p. 117, note 1). Orteils vus d'en haut (p. 180, note 1).

poteauxx verticaux reliés par une poutre longitudinale,


rabattuess extérieurement, c'est- à-dire opposées par
less extrémités inférieures des poteaux ; les poteaux
dess rangées extérieures sont plus courts que ceux
dess rangées intérieures à cause de la pente du toit
(fig.. i3o).
CHAPITREE III
LESS TYPES PRIMITIFS DE NARRATION GRAPHIQUE

Jusqu'ici,, nous n'avons envisagé que des dessins corres-


pondantt à des tableaux statiques. Qu'ils figurent un objet
uniquee ou un assemblage d'objets plus ou moins nombreux,
lee spectacle qu'ils représentent aurait pu objectivement
êtree aperçu d'un coup d'œil unique. L'expérience visuelle
présente,, à côté de ces tableux statiques ou instantanés,
dess spectacles d3'namiques ou changeants, constitués par
unee succession de moments dont chacun ressemble au
précédentt par certains de ses éléments et en diffère par
d'autres,, soit qu'un élément présent dans le premier
momentt disparaisse dans le second, qu'un élément absent
danss le premier apparaisse dans le second, ou qu'un élé-
mentt du premier subsiste bien dans le second, mais avec
dess modifications, par exemple un changement de situa-
tion.. Nous donnons au dessin d'un spectacle de ce genre,
quii le figure par des traits comme une narration le décrit
avecc des mots, le nom de narration graphique.
Lee dessin une fois exécuté, tous les éléments qu'il
figurefigure y sont simultanément visibles, et ceux qu'il n
figuree pas en sont totalement absents. La réalité qu'il re-
présentee était au contraire une synthèse d'éléments per-
manentss qui se sont présentés constamment à la vue et
d'élémentss changeants qui se sont succédé les uns aux
autres,, dont certains n'ont pu apparaître que parce que
IgGG L'ART PRIMITIF

d'autress avaient disparu. Le problème que doit résoudre


lala narration graphique est donc de traduire par un dessin
dontt tous les éléments sont simultanés et immuables un
spectaclee dont certains éléments se remplacent les uns les
autress tandis que d'autres restent fixes, dont en d'autres
termess les moments successifs ont entre eux la relation de
continuité..
Less solutions apportées à ce problème par les dessina-
teurss les plus variés peuvent se réduire à trois types prin-
cipaux,, reconnaissantes à des caraclères très nets, qui
peuventt se constater à la simple inspection du dessin et
sanss aucune conjecture sujette à contestation. Une pre-
mièree solution consiste à choisir parmi les différents mo-
mentss ou épisodes de l'action l'un d'entre eux, considéré
commee le plus important et comme symbolique de l'en-
semble.. Pour cette raison, nous donnons à ce premier
modee de narration graphique le nom de type symbolique.
C'estt le type communément employé par les profession-
nelss de l'illustration : ils choisissent comme résumant l'en-
semblee de l'histoire racontée dans le livre un de ses mo-
ments,, dont la représentation est d'ordinaire placée en
têtee comme frontispice.
Danss un second mode de narration graphique, l'histoire
estt représentée non plus par une seule image qui en symbo-
lisee la totalité, mais par la juxtaposition de plusieurs
imagess distinctes, dont chacune figure un de ses moments
ett forme un tout complet, qui se suffit à lui-même comme
représentationn de l'épisode correspondant, de la même
façonn que l'image unique du type symbolique. C'est le
procédéé employé avec prédilection dans les images
d'Epinal;; aussi l'appellerons-nous type d'Epinal.
Commee il n'y a pas d'autres possibilité pour un dessin
LA.. NARRATION GRAPHIQUE I97

quee de se composer d'une seule image ou de plusieurs, il


sembleraitt a priori qu'il ne puisse exister d'autre type
dee narration graphique que le type symbolique et le type
d'Epinal.. Cependant, en fait, on rencontre quantité de
dessinss d'un type différent, dont le caractère distinctif est
aisémentt reconnaissable. À la différence du type d'Epinal,
ill se compose, comme le type symbolique, d'une seule
imagee ; mais tandis que l'image unique du type symbo-
liquee et chacune des images partielles du type d'Epinal ne
contiennentt que des éléments qui auraient pu être aperçus
enn même temps, il réunit des éléments qui objectivement
appartenaientt à des moments différents ou, en termes plus
précis,, qui en fait n'auraient pu être vus que successive-
ment.. Aussi désignons-nous ce type par le nom de type
successif.successif.
Onn y peut distinguer deux variétés. Dans l'une, aucun
dess éléments qui dans la réalité se présentaient successive-
mentt et que juxtapose le dessin n'est figuré plus d'une
foiss ; il est donc légitime de l'appeler variété sans répé-
tition.tition. Dans l'autre au contraire, les éléments du spectacle
temporell qui, au cours de sa durée, restent sensiblement
immuables,, ne sont figurés qu'une fois ; mais les éléments
changeants,, spécialement les acteurs principaux, mais
aussii des personnages secondaires ou figurants qui appa-
raissentt à un moment donné pour disparaître ensuite, des
chosess mêmes ou éventuellement le décor, sont figurés
plusieurss fois, chacune de leurs représentations corres-
pondantt à une de leurs situations différentes. Pour cette
raisonn nous donnons à cette variété le nom de variété à
répétition.répétition.
Less caractères distinctifs des divers types de narration
graphiquee permettent de les ranger dans un ordre tel que
PRIMITIFF

chacunn serait moins conforme que les précédents à l'expé-


riencee visuelle et à la logique issue de cette expérience,
maiss inversement donnerait de la continuité inhérente à
toutt spectacle temporel une expression plus complète. Le
typee symbolique présente au spectateur du dessin une
imagee conforme à celle que pourrait lui fournir le modèle
àà un moment donné, mais il substitue un tableau unique
àà une succession de tableaux, c'est-à-dire supprime de

Fig.. i3a. — Dessin de Pierre R., Français, 5 ans 1/2 (d'après LUQUÏT,
145,, fig. 92). Char de cavalcade. Dans le grand cheval, deux naseaux
(p.. i58) ; dans les trois chevaux, déplacement des pattes (p. 125, note 2)
ett des oreilles (p. 127, note 2). Cavalier de face (p. 153) et debout sur le
chevall (p. Ii5, noie 2). Chapeau en l'air (p. n 5 , note 1). Roues figu-
rée»» entières (p. i34). Etagement des plans pour l'attelage (p. 124).
Absencee de rênes (p. 85).

l'histoiree dont il prétend donner un récit graphique pré-


cisémentt ce qui en fait une histoire et non un simple
spectaclee statique. Le type d'Epinal présente plusieurs ta-
bleauxx ; il est donc plus riche que le type symbolique. Il
estt encore, dans une large mesure, quoique moins que
celui-ci,, conforme à l'expérience visuelle puisque chacun
dee ses tableaux, comme l'image unique du type symbo-
lique,, ne contient que des éléments qui dans la réalité
seraientt simultanément visibles ; et si le dessin dans son
LAA NARRATION GRAPHIQUE 199

ensemblee réunit sous un regard unique du spectateur plu-


sieurss moments qui dans la réalité ne peuvent être simul-
tanés,, il en symbolise la succession par des artifices ma-
térielss (cadres ou lignes de séparation, numéros). Mais en
revanchee il néglige dans la continuité du spectacle qu'il
reproduitt le facteur identité, puisque ce qui subsiste de
semblablee d'un moment au suivant, soit tel personnage,
soitt le décor, et qui par suite n'est qu'un pour l'esprit,
estt figuré plusieurs fois dans des tableaux différents. Le
typee successif évoque mieux la continuité de l'action,
puisqu'ill réunit dans une image unique des éléments qui
danss la réalité appartenaient à des moments différents ;
maiss par là même ce type entre en conflit avec l'expérience
visuellee dans laquelle des moments successifs ne peuvent
êtree vus simultanément. La variété à répétition symbolise
aussii complètement que possible les deux facteurs anta-
gonistess amalgamés dans la continuité, identité et chan-
gement.. En effet, tandis que la variété sans répétition ne
marquee aucune différence entre les éléments qui changent
d'unn moment à l'autre de l'action et ceux qui restent im-
muables,, puisque les uns comme les autres ne sont figurés
qu'unee fois, dans la variété à répétition les éléments qui
varientt sont distingués par leur répétition des éléments
stabless qui ne sont pas répétés. C'est donc la représenta-
tionn la plus approchée de la continuité; mais c'est en même
tempss la plus éloignée de l'expérience visuelle, puisqu'elle
présentee simultanément à l'œil non seulement, comme la
variétéé sans répétition, des éléments successifs, mais en-
coree un même élément dans des situations différentes.
Enn résumé, nous retrouvons ici, à propos de la repré-
sentationn de tableaux dynamiques, l'opposition que nous
avonss établie plus haut pour les tableaux statiques entre
2 O oo L'ART PRIMITIF

lee réalisme visuel et le réalisme intellectuelle premier vi-


santt à représenter du modèle ce que l'œil du dessinateur
enn voit, le second ce que son esprit en sait. L'esprit sent
laa continuité, car en même temps qu'il voit un spectacle,
ill a conscience que ce spectacle succède à un autre qui,
différentt par certains de ses éléments, lui ressemblait
cependantt par d'autres, était comme lui une scène du
mêmee drame. L'œil au contraire ne voit que la discon-
tinuité,, car pour lui, comme pour l'objectif d'un appareil
dee prise de vues cinématographiques, chaque tableau n'a
nii avant ni après, est borné au moment où il est vu, est ce
qu'ill est et rien que ce qu'il est. Il y a donc, pour la re-
présentationn graphique de la durée ou des spectacles dyna-
miques,, d'une part un réalisme intellectuel qui figure le
changementt tel qu'il apparaît à l'esprit, comme une com-
binaisonn indissoluble d'identité et de différence ; d'autre
partt un réalisme visuel qui, comme un film cinémato-
graphique,, fragmente la continuité en une succession de
momentss discontinus en éliminant de chacun de ses
momentss sa relation avecles moments antérieurs et posté-
rieurs,, et qui n'admet pas qu'un même dessin, qui sera
aperçuu d'un coup d'oeil unique, puisse réunir plusieurs
momentss successifs et à plus forte raison plusieurs repré-
sentationss d'un même objet. La variété à répétition du
typee successif correspond au réalisme intellectuel pur ;
ellee figure l'idée de la durée ou continuité temporelle,
combinaisonn ou plutôt fusion originelle de l'identité et de
laa différence, en réunissant dans un même dessin les élé-
mentss stables représentés une seule fois et les éléments
changeantss représentés autant de fois qu'ils changent ; mais
parr là elle se met en contradiction avec l'expérience
visuelle,, pour laquelle des objets juxtaposés sont forcément
LAA NARRATION GRAPHIQUE 3OI

différents.. La variété sans répétition évite cette contra-


diction,, puisqu'aucun élément n'est représenté plus d'une
foiss ; mais tout en se rapprochant par là du réalisme
visuel,, elle s'y oppose encore en présentant à un même
coupp d'œil des éléments qui dans la réalité appartenaient
àà des moments différents. Cette opposition à son tour est
éliminéee dans le type d'Epinal, puisque les moments suc-
cessifss sont séparés les uns des autres dans l'ensemble du
dessinn et qu'à chacun d'eux correspond une image
distinctee qui se suffit à elle-même ; mais ces images, bien
quee séparées, sont encore juxtaposées dans le dessin total.
Enfinn le type symbolique ne conserve plus qu'une image
unique,, dont tous les éléments seraient simultanément
visibless dans la réalité, et correspond par suite au réalisme
visuell pur.
Cess différents types de narration graphique ne sont pas
utiliséss indifféremment par l'enfant : il passe graduelle-
mentt de l'un à l'autre dans un ordre déterminé à mesure
qu'ill avance en âge. Le type symbolique semble presque
entièrementt absent jusque vers i3 ans, c'est-à-dire pen-
dantt la période proprement enfantine. Il est vrai qu'un
spectaclee statique n'étant qu'un moment d'un spectacle
dynamique,, isolé par abstraction des moments qui l'ont
précédéé et qui lui succèdent, n'importe quel dessin d'un
spectaclee instantané sera un spécimen du type symbolique
dee narration graphique si le dessinateur, en figurant ce
spectacle,, s'est proposé non seulement de le reproduire en
luii même, mais en outre de symboliser par lui l'ensemble
duu processus dont il n'est qu'un moment. Celte intention
duu dessinateur ne peut être connue avec certitude que
danss les cas exceptionnels où l'on sait qu'il se proposait
expressémentt de figurer une histoire, en particulier parce
2 O 22 LART PRIMITIF

qu'onn lui a demandé de le faire. Par suite, une quantité


pluss ou moins grande des dessins de spectacles statiques
pourraientt être, dans l'intention de leur auteur qui nous
restee inconnue, des spécimens de narration graphique du
typee symbolique. Mais, cette réserve faite, comme ies cas
certainss de narration graphique ne présentent pour le type
symboliquee qu'un pourcentage insignifiant, il est vrai-
semblablee que la généralité des dessins de spectacles

Fig.. i33. — Figure incisée sur urne à visage hallslattienne de Darslub


(Prussee occidentale). Echelle : i//J. (d'après L* BAUME, 121, pi. 12).
Cavalier.. Déplacement des pattes du cheval (p. i a 5 , note a). Cavalier de
facee (p. i54) à deux jambes visibles (p. 102).
Fig.. i34. — Partie d'un dessin comanohe sur omoplate de buffle (Texas)
(d'aprèss SCHOOLCSAFT, dans 150, fig. 157). Cavalier. Déplacement des
pattess (p. 1 JD, note a) et des oreilles (p. 127, note 2) du cheval. Cavalier à
deuxx jambes visibles (p. l o i ) . Rênes, bouclier et lance non tenus en
mainn (p 117, note 1).

instantanéss doivent être considérés comme de véritables


tableauxx statiques et non comme des exemples du type
symboliquee de narration graphique.
Auu début, la narration graphique est presque exclusi-
vementt du type successif avec ses deux variétés, à répé-
titionn et sans répétition. Non seulement l'enfant, jusque
verss 8 ans, n'emploie que rarement le type d'Epinal, mais
même,, en présence de dessins de ce type, il n'arrive pas à
LAA NARRATION GRAPHIQUE 2o3

comprendree qu'ils représentent les moments successifs


d'unee histoire unique, même dans le cas le plus simple où
less images partielles ne sont qu'au nombre de deux et ne
contiennentt rien de plus que les deux mêmes* acteurs (par
exemplee un petit garçon et un chien) dans des situations
différentes,, et alors même qu'on lui a expliqué expressé-
mentt qu'il s'agit de la même histoire et des mêmes ac-
teurss (152, p. 233). C'est seulement après 8 ans que .la
majoritéé des enfants comprennent les images d'Epinal et
utilisentt dans leurs propres représentations d'histoires le
typee d'Epinal de préférence au type successif. On cons-
tatee donc nettement chez l'enfant une substitution gra-
duellee du premier type au second, substitution qui, comme
nouss l'avons vu, correspond à une fragmentation de la
continuitéé temporelle en moments discontinus et par suite
àà un passage du réalisme intellectuel au réalisme visuel.
Ainsii l'évolution du dessin enfantin présente pour la nar-
rationn graphique la même transition graduelle du réalisme
intellectuell au réalisme visuel que nous avons déjà re-
levéee pour la représentation des spectacles statiques ; dans
unn cas comme dans l'autre, le réalisme intellectuel est la
caractéristiquee de l'art enfantin ou primitif par opposition
àà l'art des civilisés adultes.
Pourr établir que notre conception de l'art primitif
nee s'applique pas moins à la narration graphique qu'à
laa représentation de tableaux statiques, il suffit de prouver
parr des exemples que les types de narration graphique
caractéristiquess du dessin enfantin, type d'Epinal et
surtoutt type successif, se retrouvent dans quantité d'oeuvres
exécutéess par des adultes et même des professionnels de
milieuxx variés dans le temps et dans l'espace.
Danss les images d'Epinal proprement dites, chacune
L'ARTT PRIMITIF

dess images partielles est inscrite dans un cadre spécial et


généralementt accompagnée d'une légende. Certains
dessinss d'enfants présentent la même inscription de
chaquee image partielle dans un cadre distinct (127,
fig.fig. 81 c, garçon allemand, i 3 ans). Dans d'autres, la
séparationn entre les images partielles est plus simplifiée
ett se réduit à une simple ligne, soit horizontale, soit
verticalee 1 . Les images partielles peuvent encore être dis-
tinguéess par des numéros indiquant l'ordre de succession
dess épisodes qu'elles représentent (127, iig. 81 e, garçon
allemand,, i3 ans), et qui parfois s'ajoutent à des images
déjàà inscrites chacune dans un cadre (8, I, fig. p. 102,
garçonn américain, 8 ans) ou séparées par des lignes (127,
fig.fig. 8 i / , garçon allemand, i 3 ans ; fig. 83, garçon alle-
mand,, 12 ans). Enfin, il peut arriver que le dessin ne
soitt plus divisé en images partielles par aucun artifice
matériel,, lignes de séparation ou numérotage 2 . Dans ce
cas,, il est parfois difficile ou même impossible de discer-
nerr avec certitude si le dessin appartient au type d'Epinal
plutôtt qu'au type successif. L'attribution au type d'Epi-
nall est toutefois hautement probable lorsque chaque
partiee du dessin, bien que non distinguée matériellement

11
17, pi. IV, C. — 127, fig. 64 (garçon allemand, i3 ans),
8ii b (garçon allemand, 14 ans), 84 c (garçon anglais, IO ans). —
199,, pi. VU, n° 16 (le retour du marin, par un enfant hollandais
dee 8 ans).
22
17, pi. IV, E. — 113, pi. III (garçon, 5 ans). — 127, 8i a
(fillee allemande, io ans). —• Un dessin d'un garçon italien de
55 ans i /a (17, pi. IV, B), est divisé par une ligne horizontale en
deuxx registres dont celui du haut juxtapose sans aucune sépara-
tionn deux moments différents : Jean dans l'école avec le maître
ett Jean en dehors de l'école.
LAA NARRATION GRAPHIQUE ao5

dess autres, forme un tout qui se suffit à lui-même,


contenantt tous les éléments d'un des moments ou épi-
sodess de l'histoire et ne contenant aucun élément étranger
àà ce moment.
Voici,, à titre d'exemple, l'analyse détaillée de deux
dessinss enfantins du type d'Epinal. L'un, représentant
l'histoiree de Jean Nez-en l'air, par un garçon allemand
d'unee école de Dresde (232, pi. X, fig. 33), est divisé en
deuxx registres par une ligne horizontale. Le registre du
hautt contient, séparés par des lignes verticales, cinq épi-
sodess : Jean seul, Jean approchant du chien sur lequel il
vaa trébucher, Jean tombé à terre, Jean approchant de la
rivière,, Jean tombé dans l'eau. Le registre inférieur con-
tient,, inscrits chacun dans un cadre complet dont le bord
supérieurr est fait par la ligne séparant les deux registres,
less trois derniers épisodes : la scène du sauvetage, Jean
sortii de l'eau tout trempé, Jean rentrant chez lui. Un
secondd dessin, d'une petite Allemande de 8 ans, repré-
sentee l'histoire intitulée Alice et le jars Peter (145, fig. i4o).
Ill comprend huit tableaux numérotés, dont les deux pre-
mierss sont séparés par une ligne verticale et les autres
simplementt juxtaposés ; dans les trois premiers, la ligne
duu sol fait en même temps office de séparation horizon-
tale.. Les épisodes de l'histoire, représentés par leurs
élémentss caractéristiques, sont les suivants : i) Alice
avecc son jars familier Peter. — 2) Alice joue au cerceau
ett s'éloigne de la maison sans veiller, comme on le lui a
recommandé,, à ce que Peter ne la suive pas. —
3)3) Edouard arrive avec son chien Néron. — 4) Edouard
s'arrêtee près d'une haie à côté d'une barrière pour
couperr une baguette ; pendant ce temps, Néron aper-
çoitt Peter (cet épisode est représenté uniquement par
2O 66 L ART PBIMITIF

lala barrière). — 5) Néron saute sur Peter, qui, saisi


parr l'aile, se débat et crie. — 6) Edouard arrive avec sa
baguettee pour faire lâcher prise à Néron. — 7) Alice a
priss Peter dans ses bras et le rapporte à la maison. —
8)) Alice et Peter sont rentrés dans la maison.
L'artt médiéval européen a fait un fréquent usage du
typee d'Epinal. On peut tout d'abord y rapporter nombre
dee décorations sculptées sur des portails d'églises, de
peinturess murales, de vitraux ou de polyptyques qui réu-
nissent,, en les séparant par des cadres ou des bordures,
unn plus ou moins grand nombre d'épisodes d'une même
histoire.. Il suffira de rappeler, parmi une foule d'exemples,
less médaillons des mois au portail de Notre-Dame de
Paris,, les portes du Baptistère de Florence, la première
d'Andréaa Pisano ( I 3 3 O - I 3 3 6 ) , figurant l'histoire de saint
Jean-Baptiste,, la seconde (i4o3-i424), avec des scènes
dee la vie de Jésus, et la troisième (1447-1402) avec des
scèness de l'Ancien Testament (206, III, pi. III), toutes
deuxx de Ghiberti ; la châsse de sainte Ursule de Hans
Memlingg (1489) (Bruges, Hospice Saint-Jean) (83, II,
p.. i35 et pi. CI et Cil) ; les fresques de la Chapelle Six-
tinee ou, si l'on n'en veut retenir qu'un ensemble exécuté
parr un auteur unique, le plafond de Michel-Ange (i5o8-
i 5 i 2 )) (206, III, fig. 257 et 258).
Auu type d'Epinal se rattachent également les grands
calvairess bretons, comme celui de Plougastel-Daoulas (Fi-
nistère)) ( I 6 O 2 - I 6 O 4 ) , dont la plateforme juxtapose de
nombreusess scènes de la vie de Jésus.
D'autress exemples peuvent être empruntés à des œuvres
dee moindres dimensions, notamment aux enluminures.
Unee des illustrations de l'Evangéliaire de Rabula (586)
(Florence,, Bibliothèque Laurentienne) figure la Crucifixidn
LAA NARRATION GRAPHIQUE 2O7

ett la Résurrection, séparées par une ligne horizontale


(229,, II, fig. P- 4<))- Une image de l'Evangéliaire
d'Othonn III (fin du xe siècle) (Munich) est divisée hori-
zontalementt en deux parties ; celle du haut représente le
feslinn d'Hérode, celle du bas Salomé apportant à Héro-
diadee la tête de saint Jean-Baptiste, après sa décollation
(177,, pi- II en couleurs). Une miniature de l'antipho-
nairee de Salzbourg (première moitié du xm e siècle) réunit
d'unee façon analogue l'adoration des Mages et le baptême
duu Christ (177, pi. 28).
Unn relief de l'église de Saint-André-en-Morvan (Nièvre),
attribuéé au xn" siècle, réunit dans un cadre rectangulaire
environn deux fois plus large que haut, en séparant cha-
cunee de la suivante par une colonnette, l'Annonciation,
laa Visitation, la Nativité et l'Adoration des Mages
(141,, fig- 1).
Danss le manuscrit Tempianus de la Divine Comédie
(finn du xivc siècle) (Florence, Bibliothèque Laurentienne),
lee frontispice représente, d'après le chant I a r de l'Enfer,
Dantee arrivant aux enfers et rencontrant le fauve, puis
Virgile.. Chaque scène est dans un cadre (107, fig.
p.. 527).
Surr une page d'un manuscrit de l'Histoire de Troie,
duu premier quart du xve siècle (Bibliothèque Impériale
dee Vienne, manuscrit 2773, f° 18), sont figurées en
deuxx tableaux les noces de Jason et de Médée (100,
pi.. XXV).
Unn tableau d'auteur inconnu, daté de i485, de l'église
Notre-Damee de Loches, juxtapose, mais chacune dans un
cadre,, les trois scènes du portement de la croix, du
calvairee et de la mise au tombeau (69, pi. p. 117).
Unn dessin d'un indigène de l'île Mioko (archipel du
ao88 L'ART PRIMITIF

ducc d'York), représentant la légende d'après laquelle Ti~


likii (Dieu) créa Tombuikor (la première femme) dans un
arbre,, juxtapose de gauche à droite sans aucune sépara-
tionn la représentation de trois moments de l'histoire :
l'arbreavecc Tombuikor vue par transparence dans la partie
inférieuree du tronc, l'arbre contenant Tombuikor dans sa
partiee supérieure, enfin Tombuikor seule, sortie de
l'arbree (21, fig. 24)- Ce dessin ne peut pas être rapporté
auu type successif sans répétition, puisque Tombuikor y
estt figurée trois fois. Il ne peut pas davantage être attribué
àà la variété à répétition, puisque l'arbre y est figuré deux
fois,, bien qu'il ne change pas. C'est donc bien, malgré
l'absencee de séparation entre les images partielles, un
spécimenn du type d'Epinal.
L'artt eskimo fournit également de nombreux spéci-
menss de ce type dans les séries de scènes à caractère de
mémoiress gravées sur ivoire de morse. Le plus souvent,
cess scènes, réduites à leur plus simple expression, sont
simplementt alignées sans aucune séparation Mais dans
unn exemple, les diverses images partielles sont séparées
parr des lignes verticales dans le cadre qui les entoure
toutes,, l'ensemble des bordures formant une sorte
d'échellee (105, fig. 91).
Envisageonss maintenant le type successif, en commen-
çantt par sa variété sans répétition. Comme spécimens
empruntéss au dessin enfantin, on peut citer un dessin de
l'histoiree de Jean Nez-en-1'air par un garçon américain
dee 9 ans; il juxtapose Jean vu de dos, le soleil, la lune
entouréee d'étoiles, un quadrupède qui d'après l'histoire doit
êtree un chien, une rivière et trois poissons (145, fig. 144).
Unn dessin d'un autre petit Américain de 8 ans, figurant
l'histoiree intitulée Jack et le pied de haricot, réunit trois
LAA NARRATION GRAPHIQUE 20g

momentss successifs : Jack donnant un coup de hache sur


laa tige du haricot, le géant précipité à terre, la femme du
géan"tt pleurant la mort de son mari (145, fig. l45). Dans la
mêmee catégorie rentrent encore trois dessins d'enfants
belges.. L'un juxtapose deux moments : un malfaiteur
tirantt un coup de revolver dans le dos d'un allumeur de
réverbèress et un gendarme accourant (à cheval) sur le
lieuu du crime (193. p. i84 et pi. XLVIII, Henri). Un
autree dessin, également d'un garçon de 5 ans. juxtapose
deuxx anarchistes lançant une bombe contre une maison
ett deux agents, munis de menottes, qui viennent les
arrêterr (193, pi. XLVIII, Gustave). Un dernier dessin,
exécutéé quatre jours plus tard par le même enfant, fournit
unn exemple particulièrement net de la variété sans répé-
tition.. Le sujet représenté est le suivant. Un homme brise
àà coups de pierres l'ampoule électrique d'un réverbère.
Dess agents l'arrêtent, le conduisent au poste où « on
écritt son nom » et finalement il est mis en prison. Dans
lee dessin, le personnage principal n'est représenté qu'une
fois,, au moment où il lance des pierres contre la lampe ;
ill ne reparaît pas dans les scènes suivantes où il figurait
cependantt en réalité, celle du poste qui n'est représentée
quee par les agents, et celle de la prison qui n'est repré-
sentéee que par les « voleurs » avec lesquels il est
incarcéréé (145, fig. i46).
Ill est plus malaisé de trouver dans l'art des adultes
dess spécimens décisifs de la variété sans répétition du type
successif,, par opposition à la simple représentation d'un
tableauu statique ou au type symbolique d'une part, à la
variétéé avec répétition d'autre part. En effet, sur le pre-
mierr point, quand un dessin réunit des moments logi-
quementt différents, mais dont les divers éléments auraient
L'artt primitif. o
22 10 LART PRIMITIF

puu être vus à la fois, il est permis de le considérer aussi


bienn comme la reproduction d'un spectacle instantané
quee comme un exemple du type successif. Par exemple,
danss un tableau de Ghirlandajo (Florence, Trinité) (i/|85)
quii représente au premier plan l'adoration des bergers,
onn voit dans le fond le cortège des rois mages (97, pi.
p.. 1^4)- Mais comme en fait ceux-ci étaient encore en
routee alors que les bergers étaient déjà arrivés, une vue
suffisammentt étendue aurait pu apercevoir simultanément
cess deux spectacles.
Dee même, pour l'épisode de la mort de Troïlos peint
parr Clitias dans l'une des zones du vase François (178,
III,, fig. 2i5), je suis moins sûr que C. Robert et
Wickhofii qu'il réunisse plusieurs moments successifs.
Enn examinant tous les éléments de ce tableau, la fon-
tainee à gauche et le mur de Troie à droite qui limitent le
décor,, les jeunes Troyens surpris à la fontaine, les divi-
nitéss qui assistent à la scène, Troïlos poursuivi par
Achille,, Polyxène qui dans sa fuite a laissé tomber sa
cruche,, Anténor debout à côté de Priam assis devant la
muraillee de Troie, Hector et Polîtes sortant de la porte
dee la ville pour accourir à la rescousse, il me semble que
toutt cela aurait pu être saisi d'un seul coup d'œil. Je ne
suiss pas convaincu par l'argument de C. Robert (191,
p.. 17), qu'au moment où Anténor vient apporter à
Priamm la nouvelle de l'événement, Hector et Polites
avaientt à s'équiper pour sortir de la ville : il n'y a
rienn d'impossible à ce que dans une ville assiégée,
dess guerriers se trouvent à point nommé en tenue de
combat..
Arrivonss aux dessins qui sont manifestement du type
successif,, c'est-à-dire où sont juxtaposés des éléments
LAA NARRATION GRAPHIQUE 2 t I

quii dans la réalité ne pouvaient pas être vus simultané-


ment.. Lorsque tel ou tel de ces éléments est figuré plu-
sieurss fois, le dessin est sans hésitation possible du type
successif.. Mais lorsqu'aucun élément n'est répété.
11 absence efîective de répétition n'est pas suffisante pour
obligerr à rapporter le dessin à la variété sans répétition :
ill faut encore que ce mode de narration graphique n'ait
pass été imposé à l'artiste par la nature même du sujet,
maiss adopté (peut être spontanément et sans choix déli-
béré)) plutôt que la variété à répétition alors que celle-ci
étaitt également possible. On ne saurait évidemment, pour
établirr l'existence de la variété sans répétition, invoquer
dess dessins où les différents moments représentés ne con-
tenaientt objectivement aucun élément commun : il était
alorss impossible à l'artiste, l'eùt-il voulu, de répéter ur.
mêmee élément. C'est ce qui se produit par exemple dans
laa peinture de Benozzo Gozzoli (Florence, église Saint
Martinn a Mensola) qui représente au premier plan
l'Annonciationn et dans le fond à gauche Adam et Eve
expulséss du paradis terrestre (212, pi. 20).
Laa représentation de métamorphoses ne permet pas
davantagee de conclusion nette sur le mode de narration
graphiquee employé par l'artiste, puisque le personnage
quii se transforme est à la fois le même et plusieurs.
L'exemplee le plus caractéristique est celui de la lutte de
Thétiss et de Pelée (191, p. 22). Thétis est figurée à la
foiss sous forme humaine, solidement empoignée aux
hanchess par Pelée, et sous les diverses formes qu'elle
prendprend pour lui échapper. Des flammes s'élèvent derri
sess épaules, des serpents enlacent les mains et les pieds
dee Pelée et se dressent vers son visage, un lion a sauté
surr son dos et lui-enfonce ses dents dans l'épaule. On
2 1 22 L ART PRIMITIF

peutt même se demander si les artistes des v e et iv e siècles


quii reproduisent ce thème traditionnel avaient encore
consciencee que ces animaux correspondaient à Thétis
elle-mêmee et s'ils ne les prenaient pas pour des auxiliaires
différentss d'elle venus à son secours ; dans cette concep-
tion,, le dessin représenterait un moment unique.
Pluss démonstratives de la variété sans répétition se-
raientt diverses peintures de vases grecs à figures rouge
duu vi° siècle avant Jésus-Christ où l'on voit Néoptolème
brandirr par le pied Astyanax devant l'autel contre lequel
Priamm s'est réfugié (65, p. 335 ; 218, p. I 5 Q - I 6 O et
fig.. c et 2). Néoptolème n'y est figuré qu'une fois dans
deuxx actions successives, d'abord précipitant Astyanax du
hautt des murailles de Troie, ensuite tuant Priam. Il est
vraii que, d'après une autre tradition sur la prise de
Troie,, Néoptolème aurait fracassé la tète d'Astyanax sur
l'autell devant Priam avant de tuer celui-ci, de sorte que
sii c'est de cette tradition que se sont inspirés les artistes,
ilss auraient donné une représentation statique de ce ta-
bleauu instantané. Mais on peut se demander si cette tradi-
tionn elle-même n'aurait pas précisément pour origine des
figuress semblables à celles auxquelles nous faisons allusion.
Onn aurait pris à la lettre la représentation figurée, par un
contre-senss du même genre que celui qui a donné nais-
sancee à la légende de saint Denis décapité marchant en
tenantt sa tête dans ses mains.
AA la variété sans répétition semblent encore appartenir
certainess représentations de l'histoire d'Amphiaraos, où
less divers personnages réunis dans le tableau corres-
pondentt à des moments différents (191, p. i<i-i5 ;
175,, IX, p. 637, fig. 348 ; X, fig. 78). Un autre exemple
remarquablee est celui de la scène d'un lécythe à figures
LAA NARRATION GRAPH1QUK 21 3

noires,, inspirée du dernier chant de l'Iliade, où Priam


vientt implorer d'Achille le cadavre d'Hector (191, p. 18).
Lee tableau réunit trois personnages : Achille à table, le
corpss d'Hector sous le lit sur lequel il est étendu, et
Priam.. Chacun de ces personnages suggère un moment
différent.. Le cadavre d'Hector, destiné à expliquer la
démarchee de Priam, évoque le moment de sa mort (il
estt douteux qu'Achille, quelle que fût s^a rudesse, ait
conservéé auprès de lui le corps de sa victime, et en tout
cass il n'y a rien de tel dans l'Iliade). L'attitude de Priam
approchantt d'Achille en suppliant, les bras levés, corres-
pondd au début de leur entrevue ; mais Achille lui tend sa
coupe,, ce qui dans le récit de l'Iliade se rapporte au mo-
mentt de leur séparation.
Danss différents exemples, la réunion de moments
successifss dans une image unique se traduit par la juxta-
positionn à l'acteur principal de personnages qui dans la
réalitéé ne pouvaient se trouver à côté de lui. Ainsi deux
peinturess céramiques figurant le combat de Thésée et
duu Minotaure, qui se passait dans le Labyrinthe, y font
assisterr les jeunes gens et jeunes (illes athéniens voués
àà la mort, Minos, Ariane et même la nourrice de celle-ci
(191,, p. 20).
L'emploii de ce mode de narration graphique produit
parfoiss un effet comique involontaire, par exemple dans
laa représentation de l'épisode d'Ulysse dans l'antre de
Polyphèmee sur une assiette de la même fabrique que le
vasee d'Arcésilas (191, p. 19 ; 175, IX, p. /jo.8, fig. "tt\l\).
Lee Gyclope est figuré debout sur un rocher, tenant dans
chaquee main une jambe humaine, pour indiquer qu'il est
enn train de dévorer un des compagnons d'Ulysse. Celui-ci
estt devant Polyphème ; de la main droite il lui offre la
33 l4 L'AHT PRIMITIF

coupe,, de la main gauche il tient un puissant épieu qui


reposee sur son épaule et celle de trois de ses compagnons
placéss derrière lui, et dont il va enfoncer la pointe dans
l'œill du Cyclope. Cette réunion dans un tableau unique
dee plusieurs moments nécessairement successifs donna
unee figure d'une invraisemblance risible : le Cyclope,
ayantt les deux mains occupées, ne peut saisir la coupe
quee lui tend Ulysse, et il est inadmissible qu'il se laisse

Figg i3ô. — Décor du Frank's Casket (d'après WÙI.CKKR, dans 127,


fig.fig. i5o). Léggnde de Wieland. Narration graphique du type successif
sanss répétition (p. ai4)*

tranquillementt aveugler avant d'avoir subi l'effet de la


boisson..
Unn dernier exemple de la variété sans répétition, de
beaucoupp postérieur aux précédents, est fourni par la
représentationn de la légende de Wieland sur le Frank's
Casket,, coffret en os du temps du roi Alfred (dernier tiers
duu ix e siècle ap. J.-C.) (iig. i35). A gauche, Wieland
présentee à la fille du roi Nitthad une coupe faite du
crânee d'un des frères de celle-ci, dont le corps décapité
gîtt à leurs pieds. A droite Aegyl, le jeune frère de
Wieland,, attrape des oiseaux pour préparer le vêtement
LAA NARRATION GRAPHIQUE aI5

dee plumes qui leur permettra de s'enfuir. Le cadavre


décapitéé figuré dans le tableau de gauche ne devait
pass être réellement présent au moment où Wieland
oflree la coupe ; c'est donc un des éléments d'un moment
antérieurr où intervenait également Wieland, et comme
celui-cii n'est figuré qu'une fois, le dessin est du type
successiff sans répétition.
Commee exemple de la variété sans répétition emprunté
àà l'art ethnographique, nous citerons un dessin exécuté
ett commenté par un Koryak maritime de la rivière Opuka
(109,, p. 20-21 et fig. i). Il représente la légende sui-
vante.. Gros-Corbeau maltraitait les filles de sa femme, la
baleinee Miti, qu'il avait enlevée à son premier mari
Araignée-de-mer,, maître de la mer. Elles voulurent aller
rejoindree leur vrai père, et fabriquèrent une baleine en
boisbois dans laquelle elles s'en allèrent sur la mer. Elle se
transformaa en une vraie baleine; alors elles s'enfuirent
danss elle. Leur frère qui se trouvait dans une île ro-
cheusee à chasser des canards vit la baleine et la visa ;
maiss ses sœurs l'appelèrent de l'intérieur de la baleine, et
l'arcc et les flèches lui tombèrent des mains. Les sœurs
vinrentt à Araignée-de-mer et restèrent avec lui. Dans le
dessin,, on voit à droite la baleine avec les deux sœurs
figuréess par transparence ; à gauche, le frère sur l'île ro-
cheuse,, tenant une foëne ; son arc et ses flèches sont entre
luii et le sol. En l'air au-dessus de lui est Araignée-de-mer.
Lee dessin correspond dans son ensemble à l'épisode de la
rencontree des sœurs et du frère ; mais comme il y ajoute
Araignée-de-merr qui n'était pas là à ce moment, il appar-
tientt bien au type successif sans répétition.
Laa variété sans répétition n'est représentée, au moins
danss les documents publiés, qne par un nombre restreint
2166 L'ART PRIMITIF

dee spécimens. 11 n'en est pas de même pour la variété à


répétition,, pour laquelle on n'a en quelque sorte que l'em-
barrass du choix. Comme exemples empruntés au dessin
enfantin,, je citerai d'abord ceux que m'a fournis ma fille
Simonne,, et dont je suis en mesure, grâce à ses commen-
taires,, de donner une explication exacte. Commt, en
dessinant,, elle chantait la chanson du « petit marchand
d'oignons» 1 ,, on lui demande de la dessiner. L'action
comprendd trois moments ou, si l'on veut, trois tableaux :
i°° le bonhomme montant la montagne ; 2 0 il fit caca sur
sess talons ; 3° les dames lui apportent des torchons. Dans
lee dessin (fig. 106), le décor est figuré une fois pour
toutess : c'est la montagne, que dans la réalité le
bonhommee aurait bien de la peine à escalader, surtout
étantt donnée la position du bâton. Le premier tableau
estt représenté par le bonhomme du haut. Le second,
avecc le « caca sur les talons » soigneusement figuré et
énoncé,, est figuré plus bas, sans doute faute de place dans
lee haut, mais sans que l'enfant semble s'apercevoir que,
danss la continuité de l'action, le bonhomme doit au se-
condd tableau être placé plus haut qu'au premier. Pour le

(')) Voici le début de cette'chanson de nourrice :


III était un p'tit homme, —• Tontontondérontaine
Unn petit marchand d'oignons, — Tondérontainetondéronton (bis)
Quii montait la montagne
AA cheval sur un bâton.
Enn montant la montagne
III entendit le canon.
Auu premier coup de canon
III fit caca sur ses talons.
Tout'' les dames de la ville
Luii apporter' des torchons.
LAA NARRATION GRAPHIQUE 2I 77

troisièmee tableau, le bonhomme n'est pas répété, pas


pluss que la montagne, mais Simonne ajoute à son dessin
less dames tenant leurs torchons. Ainsi la montagne n'est
pass répétée parce qu'elle sert de décor aux trois tableaux,
lee bonhomme n° 1 correspond au premier tableau, le
bonhommee n° 2 à la fois aux deux derniers, parce que

F i g .. 1 0 6 . — Dessin d e S i m o n n e L . , 5 a n s 1 / 2 . Le p e t i t m a r c h a n d d ' o i g n o n » .
N a r r a t i o nn g r a p h i q u e d u l y p e à r é p é t i t i o n (p 216).

dee l'un à l'autre il ne change pas de situation ; enfin les


damess qui n'apparaissent qu'au tioisième tableau sont
figuréess à ce moment.
Danss un second dessin (145, fig. i/ii), représentant un
magasin,, une dame (AJ appelle un vendeur (Bx) et lui dit
qu'ellee veut la poupée qui est dans le lit. Le vendeur va
2 l 88 L'AItT l'KIMITIF

laa chercher (B2), puis va à la caisse payer pour la


damee (B3) et revient vers elle (B4), lui rapportant d'une
mainn le paquet et de l'autre « ses sous » (la monnaie).
Enn A2, la dame est dans la rue, emportant son paquet.
Icii encore, le décor est figuré une seule fois, les per-
sonnagess autant de fois qu'ils accomplissent une action
différentee
Danss un autre dessin figurant une scène analogue (133,
n°° 886), une dame qui vient faire des achats dans un ma-
gasinn est figurée d'abord en dehors de la porte (Ax), puis
entréee (A2) ; là elle demande à un vendeur (BJ la poupée
quii est sur le comptoir en dessous de la cheminée (Gj).
Lee vendeur monté sur un fauteuil (B2) prend la poupée
danss sa boîte et descend avec elle (C 2 ). La dame s'en va
avecc son paquet, d'abord dans le magasin (A3), puis dans
lala rue (A4), qui est dessinée seulement à ce moment. La
maisonn dessinée dans cette rue donne à Simonne l'idée
quee la dame en était partie, et elle rajoute alors le dessin
dee cette dame sortant de la maison pour aller au ma-
gasin,, comme en témoigne le fait qu'elle n'a pas encore
dee paquet (A5). Ainsi, sur le décor qui reste le même tout
enn s'élargissant, si l'on peut dire, lorsque cela devient
nécessaire,, la même dame (A) est figurée cinq fois
(laa dernière tracée correspondant au premier moment
dee l'action), le vendeur (B) deux fois et la poupée (C)
deuxx fois.
Unn dessin de l'histoire de Barbe-Bleue, œuvre d'un
garçonn irlandais de 8 ans d'une école de Californie (145,
fig.fig. 142), donnerait lieu aux mêmes remarques : les acteurs
yy sont figurés plusieurs fois ou une seule selon qu'ils
changentt ou ne changent pas. Sœur Anne n'est figurée
qu'unee fois pour les deux épisodes du troupeau de moutons
LAA NARRATION GRAPHIQUE 3Ig

ett de l'approche des frères, parce que pendant ces dei.x épi-
sodess elle reste en observation au faîte de la maison.
Barbe-Bleuee est figuré trois fois dans trois situations
différentess : une fois avec sa femme quand il lui défend
dee regarder dans le cabinet, une autre fois se préparant à
luii couper la tète quand il s'aperçoit qu'elle lui a désobéi,
unee dernière fois dans le cercueil sur le corbillard.
M'"ee Barbe-Bleue est figurée trois fois, dont deux corres-
pondentt aux deux scènes dont nous venons de parler où
ellee se trouve avec son mari, et la troisième à la scène
intermédiairee où elle visite le cabinet.
Danss un dessin d'un garçon allemand de 10 ans, re-
présentantt l'histoire de Jean Nez en-l'air, Jean n'est pas
figuréé moins de six fois ; i° s'approchant du chien ;
2°° tombant sur le chien ; 3° marchant le long de l'eau ;
/j°° tombant dans l'eau ; 5° tombé dans l'eau ; 6° se
dirigeantt vers la bouée qu'on lui lance (127, fig. 147 b).
Unn dessin d'une petite fille belge de 5 ans 1/2 repré-
sentee l'histoire d'une petite fille riche qui donne une de
sess poupées à une petite fille pauvre après en avoir obtenu
laa permission de sa maman. La mère et la petite fille
pauvree ne sont figurées qu'une fois chacune, mais la
petitee fille riche est dessinée deux fois, une fois avec sa
maman,, lui demandant la permission, une fois avec la
petitee fille pauvre, lui donnant la poupée (193, p. io3).
Danss un dessin où un garçon belge de 7 ans 1/2 a
figuréfiguré l'enterrement (supposé) d'un de ses camarades,
mortt dans le cercueil est figuré deux fois, une fois au bord
dee la fosse, près d'y être descendu, et une seconde fois au
fondd (193, pi. XXXVI, Philippe).
Danss une école belge, les enfants d'une même classe,
dee 7 ans en moyenne, avaient été invités à dessiner l'his-
LARTT PRIMITIF
aaoo
toire,, qui venait de leur être racontée, d'un dénicheur
d'oiseauxx qui s'était tué en tombant d'un arbre. Quatre
d'entree eux remirent un dessin analogue. Dans l'un,
l'arbree n'est^ figuré qu'une fois ; le dénicheur est repré-
sentéé cinq fois dans des positions successives : à deux
hauteurss différentes le long du tronc, sur une branche

Fig.. 137. — De.'Sta d'un enfant belge 7 ans 'd'après Rouiii, 193, lïg.
p.. io3). Le dénicheur. Narration graphique du type à répétition (p. 220).

prèss du nid, tombant la tête la première, étendu sur le sol


aprèss sa chute (fig. i3y).
Lee même type de narration graphique est représenté dans
l'artt primitif des adultes par de nombreux spécimens. Le
pluss ancien peut-être est une gravure rupestre néolithique,
encoree inédite, découverte par le marquis de Cerralbo à
Retortilloo (province de Soria, Espagne), et qui représente
LAA XARHATIO.N GRAPHIQUE 22 1

less âges delà vie humaine. Un homme nu, à sexe accentué,


ett une femme enceinte à fœtus vu par transparence, cha-
cunn inscrit dans un cercle, limitent le panneau à droite et
àà gauche. Entre les deux sont figurés la femme au mo-
mentt où l'enfant « se présente », puis l'enfant déjà gran-
delet,, enfin l'homme adulte, monté sur un cheval (44,
p.. i5 du tiré à part; 25, p. 325-326).
Lee thème des âges de la vie était traité d'une façon
comparablee dans une chomolithographie, éditée si je ne
mee trompe par Pellerin d'Epinal, qui avait une certaine
voguee comme décoration murale dans les campagnes il
yy a une quarantaine d'années : un même personnage
étaitt figuré enfant, adolescent, adulte, vieillard, montant
puiss descendant les marches d'un escalier double.
Surr l'une des plaques gravées pour Assourbanipal (668-
626)) et représentant une bataille entre ses troupes et les
Elamitess dans la plaine entre la rivière Eulueus et la ville
dee Shushan, le prince élamite Te-Umman est figuré deux
fois,, d'abord blessé et défendu par son fils ïamritu, en-
suitee décapité sur sa demande par un guerrier assyrien
(40,, p. 33 et pi. V).
Onn doit, semble-t-il, rapporter au type successif à
répétitionn plutôt qu'au type d'Epinal sans séparation
entree les tableaux partiels l'image de la représentation
théâtralee d'une tragédie de Médée qui décore un cratère
dee style gréco-italiote du Musée de Munich trouvé en
Àpuliee (ive siècle avant Jésus Christ) (70, p. I 3 I - I 3 2 et
fig.fig. 76). Il y a bien, il est vrai, juxtaposition de trois
épisodess : la fille du roi, fiancée de Jason, se meurt,
intérieurementt consumée par la parure que lui a donnée
Médée,, puis Médée tuant un de ses enfants, enfin Médée
montéee dans le char attelé de dragons qui va l'emporter.
2 2 22 h AIIT PRIMITIF

Maiss les éléments stables du drame ne sont représentés


qu'unee fois, à savoir le palais royal, qui sert de décor
communn aux trois scènes, et les dieux qui, dans le
hautt de la composition, assistent à la succession des
événements..
Lee type successif à répétition se retrouve dans certains
dess reliefs qui décorent les sarcophages païens du
11ee siècle après Jésus-Christ. Par exemple, Séléné est
figuréee deux fois, d'abord descendant de son char pour
baiserr Endymion endormi, puis remontée sur son char
pourr s'éloigner (185, III, p. 2^2, n° 3). De même, dans
laa représentation de la légende de Marsyas sculptée sur la
cuvee du sarcophage gréco-romain d'Hermogène trouvé
danss les fouilles de Sidon (aujourd'hui à la Glyptothèque
dee Ny-Carlsberg), Marsyas est représenté trois fois :
d'abordd écoutant Athéna qui joue de la flûte ; ensuite
jouantt de la flûte devant Apollon ; enfin suspendu près
d'êtree écorché (60, pi. VII-VIII). Une représentation
analoguee se voit sur un autre sarcophage (185, III,
p.. 2 4 i , n° 3).
Cess exemples prouvent que c'est à tort qu'on a con-
testéé l'exactitude des descriptions données par Philostrate
dee peintures mythologiques du in" siècle après Jésus-
Christ,, où il signale que la figure du héros agissant
apparaîtt deux ou trois fois dans la même image. Il n'est
pass permis de déclarer a priori qu'un tel mode de repré-
sentationn est impossible, alors qu'on en connaît des
exempless indiscutables.
Less spécimens du type successif à répétition se multi-
plientt dans l'art chrétien. Ce procédé est employé dans
less allégories funéraires des premiers siècles, en parti-
culierr pour l'histoire de Jonas, par exemple dans une
LAA NARRATION GRAPHIQUE 2î3

fresquee du cimetière de Calliste (160, I, fig. 19) et


surr un sarcophage du musée de Latran (ive siècle) (160,
I,, fig. 36).
Danss le manuscrit de la Genèse de Vienne (Autriche),
quii remonte au iv e siècle après Jésus-Christ (227). l'illus-
trationn de la première page représente trois fois dans le
mêmee paysage Adam et Eve : d'abord Eve tend la pomme
àà Adam ; puis ious deux, conscients de leur faute et
courbéss par la honte, se précipitent vers le buisson pour
s'yy cacher ; enfin ils sont accroupis entre les branches
pourr se dissimuler à Dieu qui, symbolisé par une main
sortantt des nuages, leur demande compte de leur con-
duite.. L illustration de la deuxième page réunit également
danss un même tableau et sur un même fond trois mo-
mentss ou scènes successifs : dans le premier, Adam et
Evee anéantis se dirigent vers la porte du paradis terrestre ;
danss le second, ils sont en dehors de lui, reçus par une
liguree d'aspect austère symbolisant les jours amers qui
less attendent; le troisième est représenté par le chérubin
quii monte la garde devant la porte fatale. Ainsi un tableau
uniquee figure à la fois les derniers moments de nos pre-
mierss parents dans le paradis terrestre, leur exil et l'im-
possibilitéé du retour. — Dans la miniature du même ma-
nuscritt représentant l'histoire d'Eliezer et de Rebecca,
celle-cii est figurée deux fois, allant à la fontaine et donnant
àà boire à Eliezer ^177, pi. 5).
L'Evangéliairee de Rossano (fin du ve ou début du
ee
vi siècle) contient plusieurs dessins de ce type. Dans
celuii du mont des Oliviers (f° t\ b), qui est la plus an-
ciennee représenlation connue de cette scène, le Christ est
figuréfiguré deux fois : à droite étendu et priant, à gauche rele
pourr réprimander les disciples endormis (fig. i38). Les
L'ARTT PRIMITIF

imagess de la guérison de l'aveugle (f° 7 a), du Bon Sa-


maritainn (f°7 fc),du repentir et de la mort de Judas (1° 8 a
enn bas) donneraient lieu à des remarques analogues. La
Communionn des Apôtres est figurée sur deux pages con-
tiguëss (f03 3 b et 4 a) qui, lorsque le livre était ouvert, ne
faisaientt qu'une surface unique ; et comme il n'y a que
sixx apôtres sur chaque page, l'ensemble doit s'interpréter
commee un spécimen du type successif à répétition, où
Jésuss est figuré deux fois, aux deux extrémités de l'en-
semblee (90, pi. IX-X1II et XV).

Fig.. i38. — Dessin de l'Evangéliaire de Rossano (d'après Von GEBHARDT et


HARSACK,90,, pi. XI). Jésus au Mont des Oliviers. Narration graphique du
typee successif à répétition (p. aa3).

Danss la Communion des apôtres figurée au repoussé


surr une patène d'argent doré trouvée à Stùmà (district
d'Alep),, œuvre syrienne, probablement du début du
vnee siècle, le Christ est figuré deu\ fois, à droite distri-
buantt le pain et à gauche le vin (75, pi. VIII).
Dee nombreux exemples du type à répétition se trouvent
danss le fameux manuscrit grec de saint Grégoire de
Nazianze,, du ixe siècle (Bibliothèque nationale, manuscrit
grecc n° 510), dont malheureusement l'original est si pré-
cieuxx qu'il est à peu près impossible d'en obtenir commu-
LAA NARRATION GRAPHIQUE 335

nication.. Les figures sont décrites par Bordier <22,


p.. 62 sq ) ; l'une d'elles figure deux l'ois Jacob, une fois
danss sa lutte contre l'ange, une fois dans son sommeil
(123,, fig. 97)-
Danss une fresque (xie siècle) de la basilique souterraine
dee Saint Clément, qui représente le miracle d'un enfant
sauvéé des eaux, l'enfant et sa mère sont figurés deux fois
(160,, I.fig. 5',).
Danss un médaillon d'un vitrail du xiii" siècle de la ca-
thédralee de Bourges, représentant Elie avec la veuve de
Sarepta,, le fils unique de cette femme est figuré deux fois
(46,, p. 6 et 91 et pi. I). De même, dans un médaillon
d'unn vitrail de Lyon, deux figures d'oiseau représentent
unn oiseau unique (46. p. i3o et pi. VIII d).
Danss la Libération de saint Pierre par Giovanni di
Marcoo (1376-1437), saint Pierre et l'ange sont figurés
deuxx fois, d'abord dans la prison, ensuite en dehors (Flo-
rence,, Offices) (222, VII, 1, fig. i5). Le même sujet est
traitéé de la même façon par Conrad Witz sur un volet
d'unn retable de l'église Saint Pierre de Genève (i444)
(aujourd'huii au Musée d'Art et d'Histoire de Genève)
(141,, fig. 5) (sur l'autre volet du même retable, représentant
laa Pêche miraculeuse, saint Pierre est figuré deux fois)
ett par Baphaël (Vatican, chambred'IIéliodore)(i5n-i5i 4)
(1911 bis, pi. p. 89).
Danss le Martyre de sainte Lucie, par Altichieri da
Zevioo et Jacopo d'Avanzo, la sainte est figurée trois fois :
brûlée,, arrosée d'huile bouillante, percée d'un glaive
(Padoue,, oratoire Saint-Georges) (après 1377) (106,
fig.fig. p. 117).
Unee image d'un manuscrit de Froissart réunit cinq
scèness du couronnement du roi Henri IV d'Angleterre.
2 2 66 L'ART PRIMITIF

Auu premier plan à droite, le cortège pénètre dans


l'abbayee de Westminster ; le roi non encore couronne
portee le bonnet royal fourré d'hermine. Au fond de
l'abbaye,, l'archevêque de Cantorbéry, debout à coté
d'Henrii assis sur un podium, demande aux assistants
s'ilss consentent à le reconnaître pour leur roi légitime.
Auu premier plan à gauche, le roi reçoit la couronne. Au
fond,, on voit dans une rue le cortège retournant de
l'abbayee au palais. Enfin, au fond à droite, est figurée
unee salle du palais, laissant apercevoir, à travers une
baiee analogue à celle d'une scène de théâtre, le festin du
couronnement.. Devant la table où siège le roi, le « cham-
pionn du roi » à cheval jette son gant à terre, provoquant
enn combat singulier celui qui ne reconnaîtrait pas lo roi
(127,, fig. i48). _
Danss le Paradis terrestre d'une des miniatures des
Trèss belles Heures du duc de Berry (début du xve siècle),
onn voit Eve recevant la pomme du serpent, Eve tendant
laa pomme à Adam, Dieu interpellant Adam et Eve (222,
VII,, 1, fig. 72).
Danss diverses représentations des Rois mages, ceux ci
sontt figurés deux fois, dans le fond avertis par l'étoile
ett faisant route vers Bethléem, au premier plan adorant
l'enfantt Jésus. Je citerai comme exemples particulière-
mentt nets le tableau de Gentile da Fabriano (1/413) à
l'Académiee de Florence (61, pi. frontispice et fig. p. 5g-
61)) et celui d'Antonio Vivarini, du Musée de Berlin (61,
pi.. p. 147).
L'Adorationn des bergers est représentée de la même
façonn dans une miniature de Jean Foucquet pour le livre
d'Heuress d'Etienne Chevalier (vers i/|5o) : les bergers
sontt représentés dans le fond recevant l'annonce de la
LAA NARRATION GRAPHIQUE 227

naissancee de Jésus et au premier plan l'adorant (123,


fig.. 66). Du même genre est un médaillon de marbre en
relieff d'Antonio Rossellino, au Bargello de Florence (vers
i45o)) (78). Au premier plan est figurée la Nativité; les
bergerss sont représentés deux lois, dans le fond avertis
parr un ange, puis en route vers l'étable.
Danss un tableau de l'école de Gentile da Fabriano re-
présentantt le Jugement de Pâlis (Florence, Musée na-
tional),, on voit dans le haut, d'un côlé Paris, de l'autre
less trois déesses se disputant la pomme ; dans le bas le
jugementt proprement dit (222, fig. 119).
Laa fresque du Denier de saint Pierre de Masaccio (Flo-
rence,, église des Carmes) (1423-1 428) représente au
centree Jésus commandant à saint Pierre de payer l'impôt,
àà gauche la pêche du poisson dans lequel on trouvera la
piècee de monnaie, à droite saint Pierre versant l'impôt
danss la main du publicain (106, fig. p. 251).
Danss une partie d'une fresque des frères Zavatlari,
datéee de 1444 (Cathédrale de Monza, chapelle de la reine
Théodolinde),, ïhéodolinde est figurée deux fois, d'abord
voyantt en songe la colombe qui lui indique le lieu où
devraa être élevée la basilique, ensuite partant avec un cor-
tègee pour rechercher ce lieu (222, fig. i5<))
Unee fresque de Fra Angelico (\atican, chapelle de
Nicolass V) (vers i45o) représente dans deux parties
différentess d'un décor unique saint Etienne prêchant au
peuplee et saint Etienne devant le grand-prêtre (106,
fig.fig. p. 255).
Danss un tableau de Benozzo Gozzoli (1457-1463) qui
représentee saint Dominique ressuscitant un enfant écrasé
parr un cheval, l'enfant est figuré deux fois (212, pi. XXI).
Dee même, dans le tableau de Bartolomeo Caporali repré-
2 2 88 L'ART PRIMITIF

sentantt la guérison par saint Bernardin de Sienne d'un


jeunee homme frappé par un taureau (i473) (Pérouse,
Pinacothèque),, le jeune homme est figuré deux fois sur
unn même fond : à droite, étendu à terre aux pieds du tau-
reau,, à gauche assis devant saint Bernardin (222, "VII,
ii,, fig. 363).
Surr le volet de la Cène (i464-1468) de Thiéry Bouts
consacréé à Elie (Musée de Berlin), Elie dans le désert est
figuréfiguré dormant au premier plan et dans le fond poursui
vantt sa route (92, pi. p. 4o).
Dess spécimens du type à répétition se rencontrent éga-
lementt dans le Bach der berilhmlen Frauen de Boccace
impriméé en i473àUlm chezJ. Zainer. La figure représen-
tantt Pyrame et Thisbé (231, fig. i3) contient, non seule-
mentt la Thisbé qui au premier plan se perce d'une épée
surr le corps de Pyrame, mais encore dans le fond une
femmee dans des arbres qui doit être Thisbé cherchant
Pyramee et un lion qui doit être le même que celui du pre-
mierr plan. La figure consacrée à Sapho représente au
premierr plan Sapho jouant de la viole et au second plan
unee femme costumée de la même façon, qui doit être
encoree Sapho, enlacée par un jeune homme (231, fig. i4)-
Danss la figur^consacrée à Jocaste, Œdif e est représenté
deuxx fois (et chaque fois accompagné de son nom), une
foiss comme enfant nu couché à terre à côté d'un chien
auxx crocs menaçants, une autre fois s'arrachant les yeux
enn présence du suicide de Jocaste (231, figure en cou-
leurss de la couverture).
L'illustrationn de la fable du Lion et du Rat dans le
BachBach und Leben des hochberuhmtenFabeldichters ASsopi
impriméé en i^b à Ulm chez J. Zainer, figure deux fois
LAA NARRATION GRAPHIQUE 239

lee rat, d'abord entre les pattes du lion, ensuite rongeant


sess rets 231, fig. 19).
Danss la Bible de Cologne, imprimée vers i48o, une
mêmee gravure répète deux fois Adam et Eve, d'abord
associéss au serpent, puis chassés du paradis terrestre (231,

Memlingg a employé le type à répétition dans trois ta-


bleaux,, les Sept joies de la Vierge (i48o) (224, pi. 32-3g),
laa Passion de la Pinacothèque de Turin (vers 1490) (224,
pi.. 97 et 98) et la Passion de Notre-Dame de Lûbeck
'224,, pi. 99 et 100). Ces tableaux réunissent un si grand
nombree de scènes que leur analyse nous entraînerait trop
loinn ; nous nous bornerons à relever que dans le premier
l'établee de Bethléem est figurée deux fois, une pour la
Nativitéé et une pour l'adoration des Mages et que le cor-
tègee de ceux-ci est figuré deux fois, à l'aller et au
retour..
Danss nombre de représentations de la Passion, Jésus,
sanss parler d'autres personnages, est figuré plusieurs fois
surr un fond unique, par exemple dans un tableau de
l'écolee flamande (Musée de Genève, n° 1845-7) et dans
unee tapisserie du xvic siècle de la cathédrale d'Angers (81,
pi.. 18).
Danss le tableau de Carpaccio où les ambassadeurs
d'Angleterree viennent demander au roi Morus la main de
saa fille Ursule (1490-1495) (Venise, Académie), le roi est
figuréfiguré deux fois, une fois recevant les ambassadeu
ett une autre fois, à droite, dans sa chambre, délibérant
avecc la reine qui compte les arguments sur ses doigts (106,
fig.fig. p. 347).
Michel-Ange,, dans un dessinauquel lui-même attachait
beaucoupp de prix et qu'après sa mort son neveu Leonardo
ART
2 3 oo ! PRIMITIF

envoyaa au duc Cosme de Médicis, donne de la scène du


Montt des Oliviers une représentation semblable à celle
dee l'Evangéliaire de Rossano 1 .
Danss les fresques latérales de la Chapelle Sixtine, la
cinquième,, de Botticelli, représentant Coré, Dathan et
Àbiron,, réunit sur un fond unique trois scènes dans cha-
cunee desquelles est iiguré Moïse (89, fig. p. 41 ) ; la
huitième,, également de Botticelli, réunit la purilication
duu lépreux et la tentation de Jésus, et à celle-ci corres-
pondentt trois scènes où Jésus est iiguré quatre fois (89,
fig.fig. p. 53) ; dans la neuvième, de Ghirlandajo, représen-
tantt la vocation des apôtres Pierre et André, ceux-ci sont
figuréss deux fois et Jésus trois fois (89, iig. p. 59) ; la
dixième,, de Cosimo Rosselli, réunit le sermon sur la mon-
tagnee et la guérison du lépreux (89, fig. p. 63) ; dans
lala septième, attribuée au Pérugin, au Pinturicchio et à
Andréaa di Luigi d'Assiso dit l'Ingegno, saint Jean et
Jésuss sont réunis au centre dans la scène du baptême de
Jésuss et en outre figurés chacun d'un des côtés du fond,
enn train de prêcher (89, fig. p. ^g). Le baptême du
Christt est représenté d'une façon analogue dans un la-
bleauu de Joachim de Patinier (Ecole flamande, première
moitiéé du xvie siècle) (Musée de Vienne), avec cette seule
différencee qu'il n'y a qu'une scène de prédication, et non
deux,, figurée dans le fond (80, II, pi. (5)).
Unn bel exemple du type à répétition nous est encore
fournii par le tableau du Paradis terrestre de Lucas Cra-
11
Aujourd'hui aux Offices (non exposé ; catégorie « figura »,
écolee florentine, carton 4 ' , n° 23o). Il en existe un certain
nombree de copies en couleurs, dont une au Musée de l'art de
Viennee (Autriche) (79, p. 213, n° 3o4) et une autre, attribuée à
Sébastienn del Piombo, à la galerie Balbi de Gènes.
LAA NARRATION GRAPHIQUE a3l

nach,, daté de i53o. qui réunit en quelque sorte les deux


premièress ilustrations de la Genèse de Vienne (80, I,
pi.. (16)). Sur un unique décor représentant le Paradis
terrestree sont figurées sept scènes dont les acteurs sont
répétéss autant de fois qu'ils changent de situation. Au
dernierr plan : i° création d'Adam ; 2 0 création d'Eve; au
premierr plan, 3° formant le centre de la composition,
Dieuu donnant ses ordres à Adam et Eve ; au second plan,
dee gauche à droite, !\° la tentation, 5° Adam prenant la
pomme,, 6° Adam et Eve se cachant dans le buisson pen-
dantt que Dieu apparaît dans une nuée, 7 0 Adam et Eve
expulséss du Paradis terrestre.
Surr une plaqué émaillée de Gouly Noylier de 15^9 qui
représentee la rencontre de Joachim et de sainte Anne à la
Portee Dorée (Musée de Gluny, n° 4672), Joachim est
figuréé une seconde l'ois dans le haut avec l'ange qui lui
annoncee qu'il aura un enfant.
Surr un tableau d'auteur inconnu (Ecole flamande,
xviee siècle), représentant une légende religieuse, un même
personnagee est répété trois fois dans des scènes différentes
(Muséee de Lille, Peinture, n° 1000). Sur un autre tableau
égalementt anonyme du même musée (Peinture, n° 929),
représentantt Céphale et Procris, celle-ci est répétée deux
fois,, une à côté de Géphale, l'autre dans un fourré. Cé-
phalee n'est figuré qu'une fois, tirant de l'arc; mais outre
laa flèche sur l'arc bandé, il y en a une autre qui pénètre
danss la poitrine de Procris.
Surr un relief en pierre de l'église de Tannay (Nièvre)
(141,, fig. 6), représentant la légende de saint Hubert, celui-
cii est figuré trois fois, au premier plan agenouillé devant
lee cerf miraculeux, dans le fond, en haut, se rendant à
chevall au monastère, et en arrière en évêque.
23aa L'ART PRIMITIF

L'unee des tapisseries du trésor de Conques (panneau


dee droite, au centre) (xvie siècle) réunit dans le même
cadree trois scènes différentes : sainte Foy priant devant
unn crucifix et les soldats venant l'arrêter ; sainte Foy devant
lee magistrat Dasian ; sainte Foy en prison.
Danss diverses Pietà, la Vierge portant Jésus sur ses
genouxx est représentée au pied de la croix ; Jésus est
encoree figuré sur la croix, bien qu'à ce moment il en ait
étéé descendu.
Lee type à répétition ne se rencontre pas seulement
danss l'art européen. Dans un médaillon bouddhi-
que,, quatre éléphants et deux cailles correspondent à
dess moments différents de l'histoire d'un éléphant qui a
méchammentt écrasé le nid d'une caille (68, p. 3i4). Un
exemplee analogue est fourni par une peinture ornant les
côtéss de la châsse de Horyuji (Japon) (début du vu0 siècle),
oùù est figurée la légende du Bodhisattva qui offre son
corpss à la tigresse affamée (220, fig. p. 20).
Danss un dessin d'un nègre de l'Afrique orientale qui
représentee un indigène travaillant à la construction d'un
mur,, le personnage est figuré deux fois, d'abord soulevant
dee terre un bloc de pierre, ensuite le transportant sur sa
têtee (225, pi. 4o, n° 6). Dans un dessin d'un autre nègre
représentantt l'ascension d'une montagne, le personnage
principall est figuré deux fois, d'abord avec le reste de la
troupee pendant le chemin, une autre fois au sommet de
laa montagne, faisant une photographie (225, pi. 38, n° 2).
Danss un dessin eskimo dont l'explication a été donnée
parr le dessinateur lui-même, et qui représente un shaman
soignantt un malade (105, p. 920-921 et fig. 1^2), la
logee où se passe la scène, le foyer (6) et le lampadaire (c),
less musiciens jouent du tambour (d), les assistants (e) et
LAA NARRATION GRAPHIQUE 200

pourr ne pas être pris dans la corde du harpon qui se déroule ;


unn second homme attache une corde supplémentaire autour
dee la queue du dugong harponné (fig. i3o).
Laa variété à répétition du type successif a pour prin-
cipee de figurer plusieurs fois dans le dessin les éléments
changeants.. Dans une histoire ou un drame, ces élé-
mentss changeants sont ordinairement des personnages,

Fig.. i.1a. — Dessin d'un indigène de l'île Mabuiag (détroit de Torres)


(d'aprèss HIDOOH, 94. fig. 17). Pêche au dugong. Narration graphique du
typee à répétition (p. a35;.

acteurss principaux ou éventuellement figurants qui appa-


raissentt à un moment donné pour disparaître ensuite. Mais
cee peut être également des animaux ou même des choses.
Laa loi générale du type à répétition s'appliquera encore à
cee cas : ces animaux ou ohjels changeants, promus en
quelquee sorte par leur changement à la dignité d'acteurs,
serontt répétés plusieurs fois, alors que les personnages,
aa 34 L'ART PRIMITIF

Danss un autre dessin (104, pi. VIII et p. 181), le Grand


Espritt est figuré deux fois, une fois battant du tambour
danss sa demeure céleste (n° i), une seconde fois dans sa
logee magique (n° !\) avec les dix Manitous subordonnés
qu'ill charge de révéler la magie aux Peaux Rouges. Ces
Manitouss à leur tour sont figurés une seconde fois
(noss 5-i4) sans lui, en dehors de la loge, descendant sur terre
pourr s'acquitter de leur mission. Dans un autre dessin re-
latantt une tradition sur les origines des Peaux-Rouges, les
deuxx ours n°s 17 et 18 représentent un même esprit dans
deuxx occupations différentes (104, pi. V et p. 173).
Danss un dessin représentant les cérémonies d'initiation
àà la Société des sorciers (104, pi. VIII et p. 181-182), le
sorcierr est figuré à plusieurs reprises (nos 19, 26, 3o, 35,
/il),, exécutant des actions différentes relatives à ses initia-
tionss successives. Dans un dessin analogue (104, pi. III a
ett pp. 168-170), le sorcier est figuré une fois différente
n088 48, 77, 98) pour'chacun des trois degrés supérieurs
d'initiation,, chaque fois avec les pouvoirs magiques qui
viennentt de lui être conférés. Dans le même dessin, la
logee servant au second degré d'initiation est figurée deux
fois,, une fois (n° 29) représentée par son entrée en éléva-
tion,, une autre fois (n° 38) représentée en plan comme les
logess des trois autres degrés.
Ill paraît légitime de considérer également comme un
spécimenn du type à répétition, plutôt que du typed'Epinal
sanss séparation entre les images partielles, un dessin
d'unn indigène de l'île Mabuiag (détroit de Torres) repré-
sentantt avec une fidélité scrupuleuse la pêche au dugong.
AA droite, un homme, debout sur l'échafaudage construit
pourr cette pêche, attend le dugong qui nage dans les en-
virons.. A gauche, il a lancé son harpon et sauté dans l'eau
LAA NARRATION GRAPHIQUE 23"]

multipless du dessin représentent une même flèche à diffé-


rentss moments de son vol. C'est le cas en particulier pour
diversess scènes de chasse paléolithiques où des animaux
sontt à la fois blessés par des flèches et entourés de flèches
dirigéess contre eux (138, p. 46-47). De même, sur un
bas-relieff de Soueîdà (Syrie), de basse époque gréco-ro-
mainee (environ fin du m e siècle après J.-G.), qui repré-
sentee la lutte d'un archer à cheval contre un géant angni-
pède,, deux flèches sont figurées, l'une sur Tare de l'archer,
l'autree dans le flanc du géant. Clermont-Garnirait (59, 1,
p.. 178-183) se demande avec raison « si l'archer ayant
déjàà atteint son adversaire se prépare à récidiver, ou s'il
nee s'agit pas de la même flèche, d'abord prête à partir,
puiss ayant atteint son but ».
Danss un dessin d'un petit Helge de 5 ans 1/2 repré-
sentantt une scène de pêche et commenté par son auteur,
lee pêcheur et sa barque (qui est d'ailleurs un bateau à va-
peurr à deux cheminées) font office de décor et ne sont
figurésfigurés qu'une fois ; mais le filet est figuré deux fo
d'abordd en l'air, puis dans l'eau, emprisonnant un poisson
quii a été dessiné entre les deux exécutions du filet (193,
p.. 100 et pi. XXIV, Lucien). Un dessin d'un autre garçon
belgee du même âge représente une histoire inventée par
lee dessinateur, qui la raconte en même temps qu'il la des-
sine.. Un « méchant homme » poursuit, un couteau à la
main,, une fillette qui pousse une petite charrette; un
agentt de po'ice intervient avec son sabre et arrête le mal-
faiteurr ; dans leur lutte, ils renversent la charrette. Celle-
cii est figurée deux fois, une fois dans sa position normale,
pousséee par la petite fille, une autre fois renversée, les
rouess en l'air (fig. 1^2). Un équivalent de ce dessin enfantin
remontee au Pséolithique ; c'est une peinture rupestre rouge
2366
LL AKT PRIMITIF

s'ilss ne changent pas, feront pour ainsi dire uniquement


officee de décor et ne seront figurés qu'une fois.
Ainsi,, dans un dessin d'un petit Français de 6 ans
kk mois, représentant un waterchute, le bateau est figuré
d'abordd en haut, puis dans deux positions successives le
longg du plan incliné sur lequel il glisse, ensuite tombant
danss l'eau qui rejaillit tout autour, enfin suspendu au
cablee qui doit le remonter pour recommencer sa descente

Fig.. i4o. — Dessin de Jean L., G ans 4 mois (d'après LUQUST, 145,
fig.fig. i37). Homme tirant de l'arc contre un aigle. Tète de iace et jambes
dee profil (p. 169) ; bras de p'olil déplacés en hauteur (p. 127, note 1).
Déplacementt des pattes de l'oiseau (p. i a 6 , note 1). Pointe de la flèche
vuee par transparence dans le corps de l'oiseau (p. 107). Narration g r a -
phiquee du type successif à répétition [p. a36).

(145.. fig. i!\"j). Un dessin d'un autre garçon du même âge


représentee un homme tirant de l'arc contre un aigle. La
flècheflèche est figurée deux fois, d'abord sur l'arc, ensuit
ayantt atteint l'aigle (fig. i4o). On retrouve dans l'art
primitiff des adultes des spécimens analogues, bien qu'ici,
enn l'absence des explications du dessinateur, il ne soit que
probable,, mais non absolument certain, que les flèches
UU NARRATION GRAPHIQUE

tombee Bernardini (Rome, Musée Kircher) (175, III,


fig.fig. 5/j3) etquiestaujcurd'hui considéréecommeuntravail
chypriotee du vue siècle avant .1 .-C. (74, p. 3o8 sq. . Dans
laa série des scènes successives, l'artiste a répété ce qui
changeait,, n'a pas répété ce qui restait identique, aussi
bienn en ce qui concerne le décor que les acteurs principaux
ouu les figurants. Ainsi, pour les deux scènes qui sont l'une
lee commencement et l'autre la fin du drame, le château
d'oùù part le chasseur et où il revient n'est représenté
qu'unee fois. Le char est figuré une fois pour le premier
tableau,, où il est monté à la fois par le chasseur et par le
cocher,, une autre pour le second et le troisième, où il est
montéé par le cocher seul, le chasseur avant mis pied à
terre,, une autre pour le quatrième parce que le cocher est
descenduu et a dételé les chevaux ; mais pour le second et
lee troisième tableau, le char n'est pas répété parce qu'il
reste,, sans changement, tandis que le chasseur est figuré
deuxx fois, une fois tirant le cerf et une fois le poursuivant.
Less derniers tableaux, après l'intervention de la divinité,
fourniraientt matière à des remarques analogues.
Danss un dessin d'un petit Belge de 7 ans 1/2 (193,
p.. XXIV, J.), qui représente deux enfants jouant au ballon,
less quatre ballons du dessin correspondent selon toute
vraisemblancee non à plusieurs ballons réels, mais à un seul
ballonn dans différentes positions. Dans un dessin d'une
Bavaroisee de 10 ans (112, pi. CI), qui représente des en-
fantss lançant des boules de neige, il est certain que diffé-
rentess boules sont figurées plusieurs fois, car leurs positions
successivess sont reliées par une ligne représentant leur
trajectoiree ; ces trajectoires sont d'ailleurs fantaisistes,
tantt par leur direction que par leur origine, qui souvent
nee part pas de la main du personnage. Dans d'autres cas
LL ART PRIMITI1'

dee Cogul (province de Lérida, Espagne), de style extrê-


mementt schématique, représentant une chasse au cerf. Le
chasseur,, qui ne change pas, n'est pas répété ; mais le
cerf,, qui est d'abord vivant, puis tué, est figuré deux fois,

Fig.. 14i. — Peinture ripestre néolithique de Cogul (province de Lérida,


Espagne)) fd'.iprès B a t r n , 3 4 , fig. G) Chasse au cerf Déplacement de»
pattess (p. i s 5 , note 2). Dans le cerf mort (à droite), les hois sont du type
dee Calapata (p. i63). Narration graphique du type à répétition (p. a38).
Fig.. l i a . — Dessin de Pierre B., Belge, 6 ans 1/2 (d'après ROUMA, 193,
pp 97 et pi XXV) Narration graphique du type successif à répétition
(p.. Ï 3 7 ) .

l'unee dans sa position normale, l'autre les pattes en l'air


(fig.. lin).
Unn spécimen analogue, mais plus compliqué, nous est
fournii par le décor d'une des zones de la fameuse patère
ouu soucoupe en argent doré trouvée à Préneste dans la
LAA NARRATION GRAPHIQUE 24l

Lee type à répétition est également employé pour re-


présenterr le mouvement d'un membre d'un animal ou
d'unn personnage, ce que par opposition au mouvement
totall du corps on peut appeler ses gestes ; l'ensemble du
corpss qui ne bouge pas n'est figuré qu'une fois, les parties
duu corps qui bougent sont figurées plusieurs fois dans leurs
positionss successives. Certains spécimens de ce genre,
pourr lesquels nous ne disposons pas du commentaire de
leurr auteur, sont d'interprétation ambiguë. Le dessin pré-
sentee bien en fait la répétition de tel ou tel membre ou
partiee du corps, mais il peut s'agir, soit d'une addition
postérieuree d'une autre main, soit d'un « repentir » de
l'artistee correspondant à ce que nous avons appelé la
correctionn tacite (p. 96). Tels sont, par exemple, un
dessinn d'un enfant belge de 7 ans, où la jambe de devant
dess deux personnages jouant au ballon est figurée deux
foiss (193, pi. XXIV, D.), ou le dessin d'un garçon belge
dee 5 ans 1 /a représentant des conscrits qui dansent : tous
ontt la jambe de derrière repliée, sauf le troisième où cette
jambe,, d'abord dessinée allongée, a été manifestement sur-
chargéee par le dessin d'une jambe repliée (193, pi. XX,
Martin).. Dans une gravure rupestre préhistorique de Ksar-
el-Ahmarr (Sud-Oranais), un bubale présente bien, outre
unee queue nettement dessinée, en attitude flexueuse,
l'extrémitéé d'une autre queue tracée sur la croupe, et
mêmee une troisième en dehors du contour du corps (84,
pi.. XV, n° 2), mais l'une au moins des deux queues
supplémentaires,, par sa technique piquetée et non in-
cisée,, paraît être une addition très postérieure. Iles! assez
aventuréé de rapporter à l'intention de figurer le mouve-
mentt de la queue les différentes positions qui lui sont
donnéess dans le mammouth de la Madeleine (186, p. 137,
L'artt primitif g
L'ARTT PRIMITIF

pluss fréquents, l'objet en mouvement n'est figuré qu'une


fois,, mais sa trajectoire est indiquée par une ligne ; ce mode
dee représentation du mouvement, employé également par
l'adulte,, a été observé dans des dessins enfantins repré-
sentantt des enfants jouant à la balle ou lançant des boules
dee neige (193, p. io4 et pi. XXIV, enfant bruxellois de
I II ans; 112, légende de la pi. CI). Quelques-uns des
dessinss d'enfants de Breslau représentant « le pays de Co-
cagnee » figurent également la trajectoire suivie par les
alouettess rôties pour tomber dans la bouche des habitants
dee ce pays béni (210).
Sii le type à répétition a pour essence de répéter dans le
dessinn ce qui change, de ne point répéter ce qui nechange
pas,, le procédé peut aller plus loin encore que de figurer
plusieuîss fois un même être, personnage ou chose, sur un
fondd identique. Lorsque dans un objet il n'y a qu'une de
sess parties qui change ou bouge, l'ensemble de l'objet qui
nee change pas ne sera figuré qu'une fois, la partie mobile
seraa figurée plusieurs fois, ou tout au moins son mouve-
mentt sera symbolisé par un artifice matériel. Ainsi une
petitee Californienne de 4 ans explique à mesure qu'elle
less dessine les éléments d'une montre : « Ça c'est la montre;
çaa c'est l'aiguille : elle tourne comme ça », et elle figure
lee mouvement de l'aiguille par une courbe approximatif
vementcirculairepartantdumilieudecelle-ci(145,, fig 53).
Diverss enfants, pour figurer le mouvement de l'hélice d'un
aéroplane,, la représentent par une sorte de peloton (133,
pi.. CXL1X. n° 1662 ; 193, pi. XXIV, André). Le
mouvementt d'hélices ou de roues est rendu d'une façon
analoguee parles adultes professionnels. Il faut du reste
ajouterr que dans la réalité, cette rotation rapide produit
effectivementt sur l'œil une impression analogue.
LAA NARRATION GRAPHIQUE 243

quii doivent être une des origines des êtres légendaires à


tètee ou membres multipliés (Hécate, Janus, etc.), la re-
présentationn figurée ayant été interprétée à la lettre par
oublii de sa signification primitive, comme cela s'est
produitt chez nous pour saint Denis portant sa tête dans
sess mains (65, p. 33o sq. ; 66, p. 33g ; 67, p. 3g sq. ;
68,, p. 322).
Diverss auteurs, en particulier Lamprecht, ont cru
pouvoirr étendre au domaine de l'art, et spécialement du
dessin,, le principe biogénétique de Fr. Millier d'après
lequellequel l'ontogenèse répéterait la phylogenèse, de sor
quee 1 on pourrait retrouver dans l'évolution chronolo-
giquee d'un individu humain actuel l'ordre des diverses
phasess par lesquelles sont successivement passés ses an-
cêtres.. Cette théorie, aujourd'hui très contestée au point
dee vue purement biologique, n'est guère susceptible de
vérificationn pour l'art, ne fût-ce que parce que nous
ignoronss à peu près entièrement les rapports généalo-
giquess des différents milieux humains dont nous possé-
donss des productions artistiques. Mais bien plus, cette
hypothèsee semble contredite par les faits sur un point
précis.. L'art occidental chrétien antérieur à la Renais-
sancee forme un domaine relativement homogène pour
lequellequel nous disposons de documents en nombre suffisa
ett convenablement datés, qui permettent d'en suivre
l'évolutionn historique. Il est donc possible, en compa-
rantt la narration graphique dans cette période artistique
ett dans le dessin enfantin, de constater si elle présente de
partt et d'autre une évolution parallèle. Or il n'en est rien.
Nouss avons vu que l'enfant emploie d'abord le type suc-
cessif,, puis lui substitue, vers 8 ans en moyenne, le
typee d'Epinal. L'art chrétien occidental nous présente au
24aa L'ART PRIMITIF

n°° 10). Dans les gravures paléolithiques sur pierres de


Limeuil,, si dans certains exemplaires les parties répétées
semblentt devoir être considérées comme des repentirs,
notammentt la tête et la queue d'un cheval (52, pi. XXV,
n°° io3), dans deux autres chevaux, à pattes multipliées
(52,, pi. XX, n° g4 et pi. XXIII, n° 98), les différents
étatss d'une même patte sont si nombreux, si voisins et si
peuu différents l'un de l'autre qu'ils doivent correspondre,
nonn à des corrections, mais à des positions successives.
Quoii qu'il en soit de ces spécimens ambigus, quel-
quess figures humaines ne laissent place à aucune hésita -
tion.. Les miniatures des livres de droit allemands du
xiv"" siècle, pour rendre les relations animées du juge avec
less parties et le figurer se tournant tantôt à droite tantôt à
gauchee pour leur parler, donnent au magistrat sur le siège
deuxx paires de mains gesticulant de chaque côté (131,
p.. 26). Un procédé semblable a été employé par Botticelli.
Unn de ses dessins pour la Divine comédie ( 1481 ) veut illus-
trerr le passage du Paradis (v. 19-22) où Dante, voyant
danss la lune les esprits bienheureux et les prenant pour
dess images dans un miroir, retourne la tête pour cher-
cherr les êtres ainsi reflétés, puis, ne les ayant pas aperçus,
regardee de nouveau vers la lune. Ce mouvement rapide
dee la tête est rendu dans le dessin par deux têtes sur le
mêmee corps (128, pi. III du Paradis). De telles figures,
monstrueusess pour nos conceptions esthétiques, ne sont
quee la conséquence exaspérée, pourrait-on dire, mais lo-
giquee du principe du type à répétition : figurer plusieurs
foiss ce qui change, une seule fois ce qui ne change pas.
Less spécimens décisifs que nous en avons pu rencontrer
sontt en nombre extrêmement restreint ; mais il est très
vraisemblablee que dans l'antiquité il en a existé d'autres
LAA NARRATION GRAPHIQIE 247

réalismee intellectuel, au type d'Epinal, plus rapproché


duu réalisme visuel qui dirige notre art adulte, l'art occi-
dentall chrétien jusqu'à la Renaissance trouve également
satisfaisantss ces deux types de narration graphique, puis-
qu'ill les utilise indifféremment, soit isolés, soit même
réuniss dans une même image.
2444 L'ART PRIMITIF

contraire,, au lieu du remplacement d'un des types par


l'autre,, leur coexistence : dans les exemples que nous
avonss cités, le type successif descend jusqu'au xvie
siècle,, le type d'Epinal remonte jusqu'au vi e . Bien plus,
enn nombre de cas, on les trouve employés simulta-
némentt par le même artiste dans un même dessin.
Déjàà la plaque assyrienne signalée plus haut (p. 221)
commee spécimen du type successif à répétition faisait
partiee d'un ensemble de plaques dont la réunion devait
formerr une sorte d'image d'Epinal racontant la con-
quêtee de l'Elam par Assourbanipal (40, p. 33 et pi. V).
Unee miniature d'un manuscrit de Munich (cod. lat. 835)
(xx siècle ?) est pour l'ensemble du type d'Epinal, car
ellee est divisée horizontalement en deux parties dont celle
duu bas représente Salomé qui, après la décollation de saint
Jean-Baptiste,, présente sa tête à Ilérodiade. Mais la
partiee du haut, représentant le festin d'Hérode, est du
typee à répétition, car Salomé y figure deux fois (variété
àà répétition) et l'on y voit également Hérodiade, qui n'as-
sistaitt pas au festin (variété sans répétition) (177, pi. 111
enn couleurs).
Danss l'Evangéliaire d'Echlernach à Gotha (xie siècle),
laa miniature de la parabole du mauvais riche est divisée
enn trois bandes horizontales représentant le pauvre Lazare
àà la porte du riche, la mort du pauvre et la mort du
riche,, ces deux dernières surmontées d'une légende expli-
cative.. Mais l'âme du pauvre Lazare est figurée deux
foiss dans la seconde bande et celle du riche trois fois
danss la troisième(177, pi, 26).
Unn relief de Guido da Como sur la chaire de S. Barto-
lommeoo à Pistoia, daté de i25o. figure en deux tableaux
superposéss et munis chacun d'une légende la Nativité et
COLLUSIONSS

quee l'art figuré proprement dit, production inlenlionnelle


dee simulacres d'objets réels, suppose nécessairement le
désirr de celte production, et plus encore la conscience de
saa possibilité. Au moment initial, cette conscience ne
peutt dériver de l'exécution antérieure d'œuvres d'art
intentionnelles,, puisqu'il n'en existe pas encore; elle
doitt donc avoir sa source dans la production involontaire
d'images.. Les faits nous ont montré que l'art débute cer-
tainementt chez l'enfant et selon toute vraisemblance a
débutéé chez les premiers Aurignaciens par une auto-
imitation,, à savoir la répétition voulue de mouvements de
laa main qui avaient produit une image sans se l'être pro-
posé.. Une fois éveillée par ces images accidentelles la
consciencee de son pouvoir créateur d'images, l'artiste,
enfantt actuel ou Aurignacien ancien, a été poussé par le
plaisirr qu'elle lui procurait à renouveler exprès l'exercice
dee cette faculté. Il a sans doute commencé par compléter,
less jugeant insuffisamment ressemblantes, soit les images
produitess fortuitement par lui-même, soit des accidents
naturelss présentant quelque ressemblance avec les êtres
quii l'intéressaient spécialement. Par cette transition, il est
arrivéé finalement à créer de toutes pièces, par le dessin
chezz l'enfant, par la gravure, la peinture et la sculpture
chezz l'homme préhistorique, des figures d'exécution
d'abordd maladroite et grossière, mais préméditées, sur
unee surface nue ou avec une matière amorphe, ne pré-
sentantt avant son travail aucune ressemblance avec l'objet
représenté..
Ceci,, entre parenthèses, permet de comprendre com-
ment,, à l'âge du Renne et chez nombre de sauvages,
l'artt figuré, désintéressé au début, a pu recevoir par la
suitee une destination magique. En fait, pour le Paléoli-
2466 L'AM PRIMITIF

Othonn M par Thiéry Bouts (i 468) (Musée de Bruxelles)


formentt par leur réunion une image d'Epinal, mais cha-
cunn est du type successif. Dans le premier, on voit à
droitee l'empereur et à côté de lui l'impératrice accusant
unn comte d'avoir voulu attenter à son honneur ; au centre,
lee comte marchant au supplice accompagné de sa femme,
puiss décapité, sa femme recevant sa tète de la main du
bourreau.. Dans le second, au premier plan, la femme du
comtee vient demander justice à Othon; dans le fond,
l'impératricee est livrée aux flammes (92, pi. p. 44
ett 48).
Danss le plafond de Michel-Ange à la Chapelle Sixtine
(i5o8-i5i2),, si l'ensembledes neuf compartiments forme
unee géniale image d'Epinal, deux de ces compartiments,
envisagéss isolément, rentrent dans le type à répétition.
Danss le deuxième, Dieu le Père est figuré deux lois, à
droitee soutenu par des anges et créant le soleil et la lune,
àà gauche planant, bénissant la terre et créant les animaux
(89,, pi. p. i5). Le sixième compartiment réunit la Ten-
tationn et Adam et Eve chassés du Paradis terrestre. Adam
ett Eve sont figurés deux fois, une fois de chaque côté du
pommierr (89, pi. p. 3 i ) .
Enfin,, le tableau de Lucas Granach, Chute et rédemp-
tionn (Gotha), peut être rapporté au type d'Epinal en ce
quee les deux scènes de la chute et de la rédemption sont
séparéess par un arbre desséché du côté de la première
ett verdoyant du côté de la seconde ; mais celle ci est
duu type successif à répétition, car Jésus y est figuré
deuxx fois, une fois sur la croix, une fois en Ascension
(230,, pi. 3 2 ).
Ainsi,, tandis que nos enfants, dans leur évolution
individuelle,, passent du type successif, inspiré par le
CONÇUU S1ONS a5l

L'artt figuré, une fois constitué, est la reproduction


intentionnellee d'objets empruntés à l'expérience ou ima-
ginéss d'après elle. Ces objets sont de deux sortes, des
chosess ou des événements, autrement dit des tableaux
statiquess ou des spectacles dynamiques. Pour les pre-
miers,, une revue de l'art figuré à travers le temps et
l'espace,, bien que forcément très sommaire et incomplète,
nouss a présenté des modes de représentation graphique
inacceptabless pour l'esthétique des civilisés adultes, telle
qu'ellee se manifeste par exemple dans l'art européen
classique.. Ces façons de traduire les formes d'objets réels
see rencontrent dans des spécimens trop nombreux et
émanantt de régions et d'époques trop diverses pour que
leurr concordance puisse être attribuée au hasard. D'autre
part,, à la différence des phénomènes naturels, dont la ré-
gularitéé ne peut être pour la science que l'objet d'une
constatationn brute, ces œuvres d'art sont des productions
humaines,, où se reflète la psychologie de leurs auteurs.
Elless sont donc l'indice de tendances esthétiques à la fois
généraless et restreintes à certains milieux. La représenta-
tionn d'éléments de nature non visuelle, le rabattement,
l'exemplaritéé et ses corollaires : transparence, détache-
ett déplacement des parties d'un même objet, étagement
dess plans, mélange de points de vue, nous ont paru
n'êtree que des expressions variées d'une même tendance
fondamentale,, le réalisme intellectuel, qui se rencontre
égalementt sous les mêmes formes dans les dessins de nos
enfants..
Enn ce qui concerne maintenant la narration gra-
phiquee ou reproduction de spectacles dynamiques,
d'' « histoires », c'est seulement l'art des professionnels
européenss postérieurs à la Renaissance qui, imbu du réa-
CONCLUSIONSS

L'énumérationn qui précède, et qui pouvait être encore


allongée,, est sans aucun doute fastidieuse. Mais elle était
indispensablee pour fournir de notre thèse une justification
positive.. La preuve une fois faite, nous pouvons laisser de
côtéé l'appareil démonstratif et rassembler dans un résumé
conciss les conclusions qu'il légitime.
L'artt classique des civilisés adultes n'est point, comme
l'aa cru longtemps l'esthétique, la seule forme possible
d'artt figuré. En fait, il en existe une autre, caractérisée
parr des tendances opposées. Elle se rencontre à la fois
chezz nos enfants et chez des adultes, même des pro-
fessionnels,, de milieux humains nombreux et variés sur
lesquelss nous sommes renseignés par la préhistoire,
l'histoiree et l'ethnographie. Ces productions artistiques
ayantt comme caractère commun leur opposition à celle
dess civilisés adultes, il est légitime de les réunir en un
genree unique, auquel convient le nom d'art primitif. On
pourra,, pour tenir compte de l'âge des artistes, distinguer
danss ce genre deux espèces, l'art enfantin et l'art primitif
dess adultes, mais ces deux espèces présentent exactement
less mêmes caractères.
Lee moment le plus primitif de l'art est évidemment son
début,, son apparition soit chez l'individu, soit dans
l'humanité.. Le processus de cette apparition, la genèse
dee l'art, s'il peut être observé chez l'enfant, ne saurait être
quee conjecturé pour l'homme préhistorique. Sous cette
réserve,, il y a de grandes apparences que le plus ancien
artt figuré connu, celui des Aurignaciens, a pris naissance
dee la même façon que chez nos enfants. Nous avons vu
INDEXX DES RÉFÉRENCES

(Cett index ne doit pas être considéré comme une biblio-


graphie.. De tous les ouvrages concernant directement ou in-
directementt l'art primitif dont je con: ais le titre ou même
lee contenu, il mentionne uniquement ceux auxquels j'ai em-
pruntéé des idées, des faits ou surtout des figures. — Pour la
commoditéé du lecteur, les références des figures renvoient
fréquemmentt non aux publications originales, mais à des
ouvra-jess de seconde main plus facilement accessibles).

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caverncavern s de la région cantabrique. Monaco, 1912.
2.. H. AMBAYRAC. L'industrie néolithique chez les Canaques
enn 1873. Congrès préhistorique de France, IX, Lons-
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10.. BARRIÈRE-FLAVY. Les arts industriels des peuples barbares
dede la Gaule du Ve au VIIIe siècle. Toulouse et Paris,
1901..
11.. BASEDOW. Transactions 0/ the royal Society oj South Aus-
tralia,tralia, XXXI, 1907.
a5oo L'AKT PRIMITIF

thiquee européen, les raisons qui permettent d'attribuer


unn rôle magique à certaines œuvres figurées magdalé-
nienness ne sont pas applicables à la période aurigna-
ciennee (142, p. 121-128), et en droit, dans n'importe
quell milieu humain, pour qu'on pût se proposer d'agir
surr un être réel par l'intermédiaire de son image, il
fallaitt qu'on fût déjà capable de produire des images,
c'est-à-diree que l'art figuré existât. Mais l'art désintéressé
contenaitt le germe de son utilisation magique. Si le civi-
liséé adulte, accoutumé à voir et même à exécuter des
représentationss figurées, trouve tout naturel que sa main,
aidéee d'ailleurs d'instruments faits exprès pour cela,
laissee sur un support des traces qui fassent une image,
noss enfants considèrent ce pouvoir de créer des simu-
lacress comme une faculté réservée aux grandes personnes
ett dont ils se reconnaissent d'abord dépourvus Lorsque,
danss la suite, ils arrivent à constater qu'ils ont, eux aussi,
produitt un dessin ressemblant, ou jugé tel par leur ima-
ginationn complaisante, c'est pour eux, comme nous
l'avonss vu, la révélation d'un pouvoir à la fois créateur et
miraculeuxx qui, par ce double caractère, participe de la
magie.. Mais en outre, c'est un fait établi de la psycho-
logiee de l'enfant et du primitif que la confusion de l'image
artificiellee avec l'objet réel correspondant. Si, comme
c'estt infiniment vraisemblable, le Paléolithique avait une
mentalitéé analogue, l'artiste qui avait fait par exemple une
gravuree ou une sculpture de cheval se considérait comme
lee créateur et le maître, non d'un simple simulacre de
cheval,, mais d'un cheval véritable. Le caractère créateur
dee l'art figuré est le fondement commun d'abord de son
charmee désintéressé pour l'artiste, ensuite de la croyance
àà sa vertu magique.
INDEXX DES RÉFÉRENCES ï55

18.. H. BREUIL. Les peintures rupestres de la péninsule ibé-


rique.. — XI. Les roches peintes de Minateda. L'Anthro-
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pagne.. Butlleti de VAssociacio catalana d'Antropologia,
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prdhislorischeprdhislorische und ethnographische Kutl&t), I,
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3a.. H. BREUIL. Deux roches peintes néolithiques espagnoles.
IPEKK (Jahrbuch fiir pràhistorische und ethnographische
Kunst),Kunst), II, 1926, p. 229-235.
33.. II. BREUIL et M. BURKITT. Les peintures rupestres d'Es-
pagne.. — VI. Les abris peints du Monte Arabi.— VII.
Nouvelless roches peintes de la région d'Albacete. £,'^4»-
thropologie,thropologie, XXVI, I9i5, p. 3i3-336.
34.. H. BREUIL et J. CABRÉ AGUILO. Les peintures rupestres
duu bassin intérieur de l'Ebre. L'Anthropologie, XX, 1909,
p.. 1-21.
35.. H. BREUIL et J. CABRÉ AGUILO. Les peintures rupestres
d'Espagne.. — II. Los Toricos d'Albarracin. L'Anthro-
pologie,pologie, XXII, 1911, p. 641-648.
30.. H. BREUIL et J. CABRÉ AGUILO. Les peintures rupestres
d'Espagne.. — IV. Les abris del Bosque à Alpera. —
V.. Tortosilla à Ayora. L'Anthropologie, XXIII, HJI2,
p.. 529-562.
S;,, il. BREUIL, II. OBERMAIER et H. ALCALDE del Rio. La
Pasiega.Pasiega. Monaco, 1913.
38.. H. BREUIL, II. OBERMA ER et P. VERNER. La Pilela.
Monaco,, 1914.
39.. II. BREUIL et R. de SAINT-PÉRIER. Les poissons, les batra-
ciensciens et les repliles dans l'art quaternaire. Paris
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40.. British Muséum. A Guid : to the Babylonian and Assyrian
anliquities.anliquities. London, 1900
a5aa L ART PRIMITIF

lismee visuel, a considéré l'art figuré, selon l'expression de


l'esthétiquee classique, comme un « art en repos », inca-
pablee par essence de figurer le changement, et par suite
aa répudié tout autre type de narration graphique que le
typee symbolique. L'art primitif, comme celui de nos
enfants,, n'a pas ce scrupule, je dirais volontiers cette
timidité,, et pense pouvoir donner du changement, de la
durée,, une traduction graphique. Dans chacune des deux
subdivisions,, enfantine et adulte, de l'art primitif, nous
avonss relevé une foule de spécimens non équivoques du
typee successif, notamment dans sa variété à répétition, et
duu type d'Epinal. Ces deux types de narration gra-
phiquee ont comme caractère commun de présenter,
simultanémentt une série plus ou moins longue de mo-
ments,, c'est-à-dire de traduire la succession en juxtapo-
sition,, et par suite relèvent l'un et l'autre, avec une
simplee différence de degré, du réalisme intellectuel.
Knn résumé, les faits nous ont mis en présence de deux
conceptionss antithétiques de l'art ûguré. L'une, fondée
pourr la représentation des choses sur le réalisme visuel et
pourr la représentation des histoires sur son corollaire, le
typee symbolique de narration graphique, est celle de
l'artt classique des civilisés adultes. L'autre, qui se mani-
festee à la fois chez nos enfants et chez des adultes de
milieuxx humains variés, a comme principes pour la repré-
sentationn des choses le réalisme intellectuel, pour la re-
présentationn des histoires le type successif et le type
d'Epinal.. Comme cette sorte d'art figuré est celle par
laquellee nos enfants débutent, pour lui substituer gra-
duellementt la première à mesure qu'ils avancent en âge,
ett également celle que n'ont pas dépassée quantitéd'adultes,
ellee mérite bien le nom d'art primitif.
INDEXX DES RÉFÉHENCES ib-

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Î 5 44 L'ABT PRIMITIF

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INDEXX DES RÉFÉRENCES 2O9

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enfantin.. Journal de Psychologie, 1920, p. 680-710.
136.. G.-H. LUQUET. La méthode dans l'étude des dessins
d'enfants.. Journal de Psyclwlogie, 1922, p. ig3-22i.
137.. G.-H. LUQUET. Genèse do l'art figuré. Journal de Psycho-
logie,logie, 1922, p. 695-719 et 795-83i.
138.. G.-H. LUQUET. Le réalisme dans l'art paléolithique. L'An-
Uiropologie,Uiropologie, X X X I I I , 1923, p. 17-48.
i3g.. G.-II. LUQUET. Représentation par transparence de la
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I,, p. 137-149.
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a588 L'ART PRIMITIF

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caine,caine, XVI, 1872, p. i41-
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1908..
83.. 61». 0. FINSCH. Sildseearbeiten (Abhaiidluiigen des Kolo-
nialinstituts,nialinstituts, XIV). Hamburg, 192'i.
84.. FLAMAND. Les pierres écrites... du Nord-africain. Paris,
Masson,, 1921.
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undd Buka. B issler Archiv, Beihel't VI, 1914.
86.. L. FROBENIUS. Das unbekannte Africa. Mûnchen, 1923.
87.. L. FROBENIUS et H. OBEBMAIER. Hadschra Maktuba.
Mûnchen,, 1925.
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beii den Eigebornen der Deutsch-Ostafrikanische
Kolonie.. Zeitschrift jilr Ethnologie, XXXII, 1900,
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89.. Gustave GEFFROY. Les Musées d'Europe ; Rame. Paris, s. d.
90.. O. von GEBHARDT et Ad. HARNACK. Evangeliorum codex
graecusgraecus purpureus Rossanensis. Leipzig, 1880.
91.. G. GLOTZ. La civilisation égéenne. Paris, Renaissance du
livre,, 1923.
92.. A. GOFFIN. Thiéry Bouts. Bruxelles, 1907.
93.. A. C. HADDOS. Evolution in art. London, 1895.
94-- A. C. HADDON. Head-Hunters. London, 1901.
95.. A. C. HADDON. Drawings by natives of. British -New
Guinea.. Man, IV, 1904, n° ai.
96.. E. T. HAMY. La figure humaine chez le sauvage et chez
l'enfant.. L'Anthropologie, XIX, 1908, p. 385-4O7.
97.. IIAUVETTE. Ghirlandajo. Paris, Pion, (1908).
INDEXX DES RÉFÉRENCES 263

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uiiduiid ethnographische Knn.il), I, 1923, p. 5i-5().
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IPHKK {JahrbuCh fiir pràhistorische und ethnographische
Kunst),Kunst), II, 1926, p. 287.
169.. II. OBER.MAIKR et P. WERNERT. Las pinluras rupestres del
barrancobarranco de Valllorta. Madrid, 1919.
170.. Marthe OULIÉ. Les animaux dans les peintures de la Crète
prèheiléniqiie.prèheiléniqiie. Paris, Alcan, (1926).
171.. PALLARY. La main dans les traditions juives cl musul-
maness du .Nord de l'Afrique. Association française
pourpour V avancement des sciences. Marseille 1891, II,
p.. 651 s<[.
172.. PALLARY. Notes sur... la survivance du symbole de Tanit.
RevueRevue tunisienne, XVIII, 1911, p. i36.
17).. L. C. van PANIIUYS. Proeve einer verklaring van de orna-
incntiekk van de Indianen in Guyana. Internationales
ArchivArchiv fiir Ethnographie, XI, 1898, p. 51-72.
17J.. Lena PARTRIDGE, dans BARNES, Sludies in Education, II,
Philadelphia,, 1902.
175.. PERROT et CmriEZ. Histoire de Fart.
176.. F. PÉTRIE et QUIBELL. Naqada and Ballas. 1896.
177.. K. PFISTER. Die miltelalterliche Buchrnalerei des Abend-
landes.landes. Mûnchen, 1922.
178.. E. PFUHL. Malerei und Zeichnung der Griechen. Mûnchen,
1923..
179.. PLOSS et BARTELS. Das Weib. 8 e édition, Leipzig, 1905.
180.. POLLOK. An infant's ]>rogress in language. Mind, III,
1878..
181.. POMMEROL. La main dans les symboles et les supersti-
tions.. Association française pour Vavancement des
sciences.sciences. Limoges 1890, II, p. 52g sq.
182.. E. POTTIER. Histoire d'une bête. Revue de l'art ancien et
moderne,moderne, XXVIII, 1910, II, p. 419-436.
183.. K. Th. PREUSS. Kùnstlerische Darstellungen aus Kaiser-
Wilhelms-Land.. Zeitschrift fur Ethnologie, XXX, 1898,
p.. 74-120.
184.. E. RABAUD. Les phénomènes embryonnaires et la phylo-
genèse.. Scienlia, avril 1916.
a6oo L'ART PRIMITIF

117.. Th. KOCH-GRUNBERG. Das Haus bei den Indianern


Nordwestbrasiliens.. Archiv fur Anthropologie, N. P.
VII,, 1908 (marqué par erreur 1909), p. 37-5o.
118.. F. KRAUSE. Die Kunst der Karaju-Indianer. Bissler
Archiv,Archiv, II, 1912. p. 1-32.
119.. KRETZSCHMAR. Die freie Kinderzeichnung. Zeitschrijt fur
pàdagogischepàdagogische Psychologie, XIII, 1912.
120.. H. KtJHN. Die Kunsl der Primiliven. Mûnchen, 1923.
[300 bis. H. KÛHN. Aller und Bedeutung der nordafrikanisclna
Felszeichnungen.. IPEK [Jahrbuch fur pràhistorische
undund ethnographische Kunst), III, 19*7, p. i3-3o.
121.. W. LA BAUME. Bildlichp Dargteilungen auf ostgerimnis-
chenn Tongefâssen der frûhen Eisenzeit IPEK (Jahr-
buchbuch fur pràhistorische und ethnographische Kunst
IV,, 1928, p. 25-48).
122.. G. LALANNE. Bas-reliefs à figurations humaines de l'abri
souss roche de Laussel (Dordogne). VAnthropologie,
XXIII,, 1912, p. 129-149.
123.. LECOY de la MARCHE. Les manuscrits et la miniature. Paris,
Quantin,, (1884).
124.. LEFEBVRE des NOËTTES. La force motrice animale. Paris,
1924..
125.. F. LEGGE. The carved slates from Hierakonpolis and
elsewhere.. Journal of the royal anthropological Institute
ofof Gréai Brilain and Ireland, XXX, 1900, Miscellanea,
n°° 22.
126.. W. LEHMANN. Essai d'une monographie bibliographique
surr l'île de Pâques. Anthropos, II, 1907, p. 257-268.
127.. S. LEVINSTEIN. Kindrzeichnungen. Leipzig, igo5.
128.. LIPPMANN. Zeichnungen von Sandro Botticelli zu Dante's
DivinaDivina Comedia. Berlin, 1896.
129.. G. LOMHARDO-RADICE. Il disegno infantile. L'Educazione
nazionale,nazionale, février 1925.
130.. P. LOTI. Aziyadé.
131.. LÛBBEN. Sachsenspiegel nach dent Oldenburger codex
pictoralus.pictoralus. Oldenburg, 1879.
l3a.. II. T. LUKENS. A Study on Children's Drawings in the
earlyy years. Pedagogical Seminary, IV, 1896-7.
133.. G.-H. LUQUET. Les dessins d'un enfant. Paris, Alcan, 1913.
INDEXX DES RÉFÉRENCES a65

201.. Hans SEGER. Figûrliehe Darstellungen auf schlesischen


Grabgefâssenn der Hallstattzeit. Ghbus, LXXII, 1897,
II,, p. 293-297.
202.. C. G. SELIGMAN. The Dubu and steeple houses of British
Neww Guinea. IPEK {Jahrbuch fur pràhistorische und
ethnethn igraphische Kunst), III, 1927, p. 177-192.
203.. M. W. SHINN. Notes on the development of a Child. Uni-
versityversity of California Studies, Education, I, 1893-4.
204.. L. SIRET. Questions de chronologie et d'ethnographie
ibériques,, I. Paris, 1913.
ao5.. R. Brough SMYTH. The Aborigines of Victoria. Melbourne
ett London, 1878.
206.. A. SPRINGER. Handbuch der Kunstgeschichte. 12e édition,
Leipzig,, 1923.
207.. G. STEINDORF. Durch die libysche Wiiste zur Ammonoase.
1904..
208.. K. von den STEINEN. Unter den Naturvulkern Zentralbra-.
siliens.siliens. 2 e édition, Berlin, 1897.
209.. K. von den STEINEN. Der Paradiesgarten als Schnitzmotiv
derr Payagua-Indianer. Ethnologisches Notizblatt, II, 2,
1901,, p. 6o-65.
210.. W. STERN. Spezielle Beschreibung der Ausstellung freier
Kinderzeichnungenn aus Breslau. [Berichl iiber den
KongressKongress fur Kinderforschung in Berlin, 1-4 octo
1906,, p. 411-417).
311.. W. STERN. Psychologie der frilhen Kindheil. 5 e édition,
Leipzig,, 1928.
212.. II. STOKES. Benozzo Gozzoli. (1906).
213.. H. STOLPE. Evolution in the ornamental Art of savages
peoples.peoples. Rochdalc, (1893).
214.. J. SULLY. Studies of Childhood. London, 1895 (Traduction
françaisee : Etudes sur Venfance. Paris, Alcan, 1898).
215.. Blas TARACENA AGUIRRE. Arte iberico. IPEK (Jahrbuch
furfur pràhistorische und ethnographische Kunst), I, 1925,
p.. 75-93.
216.. J. TEIT. The Lillooet Indians. The Jesup Norlh Pacific
Expédition,Expédition, II, p. ft)2-3oo.
217.. J. TEIT. The Shuswap Indians. The Jesup North Pacific
Expédition,Expédition, II, p. 443-78g.
a6aa L'ART PRIMITIF

ett l'interprétation des images de Dawid chez l'enfant.


ArchivesArchives de Psychologie, XIX, 1925, p. 211-239.
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155.. R. H. MATHEWS. Australian rock pictures. American
Anthropologist,Anthropologist, VIII, i8g5, p. 268-278.
156.. R. H. MATHEWS. The Bora, or initiation Cérémonies of ihe
Kamilaroii Tribe. Journal of the royal anthropological
InsliluteInslilute of Greal Britain and Ireland, XXIV, 189
P-- 4II-427-
157.. R. H. MATHEWS. The rock paîntings and carvings of the
Australiann Aborigines. Journal of the royal anthropolo-
gicalgical Instilule of Great Britain and Ireland, XXV,
1896,, p. 145-i63 et XXVII, 1897-98, p. 532-545.
158.. W. MATTHEWS. Navajo Silversmiths. Annual Report of
thethe Bureau of Ethnology, II, 1880-1, p. 171-178.
i5g.. MAYET et PISSOT. Abri de la Colombière. Annales de l'Uni-
versitéversité de Lyon, nouvelle série, I, 3g, igi5.
160.. André MICHEL. Histoire de l'Art.
161.. C. MINDELEFF. The Cliff ruins of Canyon de Chelly, Ari-
zona.. Annual Report of the Bureau of Ethnology, XVI,
1894-5,, p. 79-198.
162.. O. MONTELIUS. La civilisation primitive en Italie, I.
Stockholm,, 1895.
163.. Mont/menti inediti pubblicati dalV Instituto di correspond
denzadenza archeologica.
164.. MOIUN-JEAN. Le dessin des animaux en Grèce d'après les
vasesvases peints. Paris, 1911.
1644 bis. O. MOSZEIK (publié par S. LEVINSTEIN). Die Male-
reienn der Bushmanner in Sùd-Afrika, Internationales
ArchivArchiv fiir Ethnographie, XVIII, 1908, p. 1—44.
lC>5.. A. S. MURRAY. Perspective as applied in early greek Art.
JournalJournal of hellenic Studies, II, 1882.— Les figures rel
tivess à cet article sont réunies dans l'Atlas des tomes
I-VIII,, pi, XV (marquée par erreur 1881).
166.. H. OBERMAIER. El hombre fosil. 2 e édition, Madrid, 192a.
167.. H. OBERMAIER. Die bronzezeitlicheii Felsgravierungen von
TABLEE DES MATIÈRES

II VI RODUCTION I
CHAPITREE T. — La genèse de l'art figuré 9
CHAPITREE II. —• L? réalisme intellectuel 66
CHAPITREE I I I . — L e s types primitifs de narration
graphiquee IQ5
CONCLUSIONSS 248
INDEXX DES RÉFÉRENCES 255
a644 L'ART PRIMITIF

I 8 5 .. S. REINACH. Répertoire des reliefs grecs el romains. Paris,


1909-1912..
18C.. S. REINACH. Répertoire de l'art quaternaire. Paris, Leroux,
igi3..
187.. C. RICCI. Varie dei bambini. ISologna, 1887.
188.. J. G. F. UiiiDiiL. De sluik- en kroesharige rassen tuschen
SelebesSelebes en Papua, Graveôhajje, 1886.
189.. G. E. Rizzo. Il eeramografoSkythes. Mommieufs cl Mémoires
Piot,Piot, XX, 1913. p. IO3-I53.
190.. A. ROBERT. L'art du dessin chez les Troglodytes de
Bouzabaouinee et Dekhet Zitoune (Algérie). Congrès
préhistoriquepréhistorique de France. Chambéry 1908, p. 14G
191.. C. ROBERT. Bild und Lied (Philologische Unlersuchungen,
V).. Berlin, 1881.
1911 bis. ROSENBERG. Rajfae'l. 4 e édition, Stuttgart et Leipzig,
I9O9--
192.. Ling ROTH. Note on a Ilkuong behl set. Journal of the royal
anthropologicalanthropological InHitute of Great Britain and
XXX,, 1900, Miscellanea, n° 64.
193.. G. ROUMA. Le langage graphique de îenjant. 2° édition,
Bruxelless et Paris, Alcan, ig 13.
194.. F. SARASIN. La Nouvelle-Calédonie (traduction par G.
Roux).. Bâle, 1917.
195.. P. SARASIN. Die menschlichen Sexualorgane in enlwick-
lungsgeschichtlicherr und anthropologischer Beziehung.
(extraitt des Verhandlungen der N aturforschenden Ge-
sellschaftsellschaft in Basel). Basel, 1926.
J96.. J. SARRÈTE. Iconographie mariale ; Vierges ouvertes,
ViergesVierges ouvrantes. Lé/ignan (Aude), 1913.
197.. F. Adama van SCHELTEMA. Rhytmus in ethnologisoher
Beleuchtung.. Zeitschrift fiir Àsthetik und allgemeine
Kunstwissenschafi,Kunstwissenschafi, XXI, 1927, p. 111-121.
198.. Max SCHMIDT. Die Paressi-Kabisi. Bdssler Archiv, IV,
I9o5,, p. 224 sq.
199.. A. J. SCHREUDER. I b e r Kinderzeichnungen. Die Kin-
derfehler,derfehler, VII, 1902.
200.. SCHUYTEN. De oorspronkelijke Ventjes der Antvverpsche
Schoolkinderen.. Paedologisch Jaarboek, V, 1904,
P-- 1-87.
GASTONN DOIN ET C 1 0 , ÉU1TEUKS, 8 , PLACE DE L O D É O N , PARIS, 6"

E N C Y C L O P É D I EE SCIENTIFIQUE

DIRBCTKURR : D r TOULOUSE

SECRÉTAIREE GÉHÉBAL : Hi PlÉRON,


SECRÉTAIREE POUR LES SCIENCES TECHNIQUES : L . PûTIN.

TABLEE DES BIBLIOTHÈQUES

DlBECTEUBSS DES BlBUOTHÈQUES :

II Histoire et Philosophie A. R R T , professeur d ' H i s t o i r e de la Philoso-


desdes Sciences . . . . phie d a n s ses rapports avec la Science à la
S o r b o n n e ..

1.. SCIENCES PURES

A.. Sciences mathématiques :


a.. Mathématiques . . . J. DKACH, de l'Institut, professeur à la Faculté
dess Sciences de l'Université de Paris
3.. Mécanique . . . . J. DBACH, de l'Institut, professeur à la Faculté
deaa Sciences de l'Université de Paris.

B.. Sciences inorganiques :


4.. Physique A. LEDLC. professeur honoraire de physique à
laa Sorbonne.
â.. Chimie physique . . J. PBBBIN, de l'Institut, professeur de chimie-
physiquee à la Sorbonne.
6.. Chimie A. PICTET, professeur à la Faculté des Sciences
dee l'Université de Genève
2 0 00 L ART PRIMITIF

218.. T. Tosi. Nuove rappresentanze dell' Iliupersïs. Sludi e


materialimateriali di archeologiae numismatica, III, I()o5, p. i5g
181..
219.. Paul ^TRAEGER. Das Ilandwerkszeug eines tunesischen
Tâtowiererers.. Zeitschrift fur Ethnologie, XXXVI,
1904,, p. 469-477-
220.. Marquis de TRESSAN. La peinture en Extrême-Orient.
UArtUArt et les artistes, XVIII, octobre 1913-mars 1914,
p.. i5g.
aai.. VASCHIDE et MEUNIER. Essai sur une psychologie du dessin
enfantin.. Revue cC hygiène et de médecine infantiles, V,
1906..
222.. VENTURI. Sloria delV Arle ilaliana. Milan.
223.. M. VERWORN. Zur Psychologie der primitiven Kunst.
(extraitt de Naturwissenschaftliche W ochenschrift, 1907)
Jena,, 1908.
224.. VOLL. Memling. Stuttgart et Leipzig, 1909.
225.. K. WEULE. Ostafrikanische Eingeborenen-Zeichnungen.
IPEKK (Jahrbuch fur prâhistorische und elhnographische
Kunst),Kunst), II, 1926, p. 87-127.
226.. WICKHOFF. Beschreibendes Verzeichnis der illuminierlen
HandschriftenHandschriften in Ôsterreich, I. Leipzig, igo5.
227.. WICKIIOFF et HARTEL. Die Wiener Genesis. Wien, 1895.
228.. WILKINSON. Manners and Customs of the ancient Egyp-
tians.tians. I e série, London, 1837. 2e série, London, 1841.
229.. WÔRMANN. Geschichte der Kunst. Leipzig et Wien, 1905.
230.. WORRINGER. Lukas Cranach. Mùnchen, 1908.
231.. W. WORRINGER. Die altdeutsche Buchillustration. Mûnchen,
1921..
232.. 0. WULFF. Die Kunst des Kindes. Stuttgart, 1927.
233.. P. de ZELTNER. Les grottes à peintures du Soudan français,
L'Anthropologie,L'Anthropologie, XXII, 1911, p. i5g.
TABLEE DES BIBLIOTHÈQUES III

11
A. Palholog. M KLIPPEL. médecin honoraire des Hôpitaux de
11 médicale . Paris.
\\ B. Neurolo- E. TOULOUSE, directeur de l'Institut de Psychia-
ao.. Patho- g{e t m m trie à l'École des Hautes-Études, médecin
lolo tete
99 i directeur de 1*Hôpital Rousselle.
ff G Patk, chi- K. PBOOST, professeur agrégé à la Facu^é de
rurgicalerurgicale . Médecine de Paris, chirurgien des Hôpita

D.D. Sciences biologiques descriptives :


3 1 ,, Paléontologie . . . M. BOULB, professeur a u Muséum 'l'Histoire
n a t u r e l l e ,, d i r e c t e u r de l'Institut de Paléon-
tologiee h u m a i n e .
•• A. Généralités H. LECOMTE, de l ' I n s t i t u t , professeur au Muséum
[[ et phanéro d'Histoire naturelle.
12.12. Bota- ) games . ,
// B Cryptoga- L. MANGIM, de l'Institut, directeur du Muséum
mes.. . . d'Histoire naturelle.
J 33 Zoologie R. ANTHONT, professeur au Muséum d*Histoire
naturellee et à l'Ecole d'Anthropologie.
•J44 Anatomie et Embryolo R. ANTHONT, professeur au Muséum d'Histoire
giegie naturelle et à l'Ecole d'Anthropologie.
15.. Anthropologie et Ëlhno- P. RIVET, pro'esseur d'Anthropologie au Mu-
graphie.graphie. . . . séum d'Histoire naturelle, secrétaire de l'In
titutt d'Ethnologie de l'Université de Paris.
16.. Economie politique . . G RBHARD, professeur d'Histoire du Travail
auu Collège de France.

11.. SCIENCES APPLIQUÉES

A.. Sciences mathématiques :


37.. Mathématiques appli- M. D'OCAGNE, de l'Institut, professeur à l'École
quéesquées . . . . Polytechnique et à l'École des Ponts et
Chaussées..
aS.. Mécanique appliquée et M, D'OCAGHB, de l'Institut, professeur à l'École
$énie$énie Polytechnique et à l'École des Ponts et
Chaussées..
miiiiiitiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiuiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiniiii

ENCYCLOPÉDIEE
SCIENTIFIQUEE
aiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiMiiiiiiiiiiiiiiiiiiniiiiiii

CATALOGUEE
DESS OUVRAGES PARUS
JUILLETT IQ3O

PRIXX NETS

Cataloguee annulant les précédents

niiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiniiiiiiiiiiiiniiiiiiiiiiniiiiiiiiimiiiiiiiiiinniiiiiiiniiniiniinmrairaraimfflii

GASTONN DOIN & Cie ÉDITEURS, A PARIS


Registree du Commerce Seine n° 38954

llllllllllllillIllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllIllIllllllllllllllllllliUU
III TABLE DES BIBLIOTHÈQUES

7.. Astronomie et Physique J . MASCART, professeur à l'Université, directeur


célestecéleste de l'Observatoire de Lyon.
8.. météorologie. . J . MASCART, professeur à l'Université, directeur
dee l'Observatoire de Lyon.
9.. Minéralogie et Pétro- \ . LACROIX, secrétaire perpétuel de l'Académie
graphie.graphie. . . . des Sciences, professeur au Muséum tl'llit-
toiree naturelle.
10.. Géologie M. BOULS, professeur au Muséum d'Histoire
naturelle,, directeur de l'institut de Paléon-
tologiee humaine.
11.. Océanographie physi- J . RICHARD, directeur du Musée Océanogru-
queque . . . . . . phique de Monaco.
C.. Science» biologiques normatives :
133 Biologie générale . . M. CAULLERT, de l'Institut, professeur de zoolo-
giee à la Sorbonne.
| 33 Physique biologique . L. PSCH, professeur de physique biologique à
laa Faculté de Médecine de l'Cniversité de
Montpellier,,
lj.lj. Chimie biologique . , G. BERTRAND, de l'Institut, professeurde chimie
biologiquee à la Sorbonne, professeur à PlnBti-
tutt Pasteur.
IÔ.. Physiologie et Patholo- L. MASGIS, de l'Institut, directeur du Muséum
giegie végétales . . . d'Histoire naturelle.
16.. Physiologie . . . . J . GAOTRELBT, professeur agrégé des Facultés
dee Médecine de Paris, directeur de laboratoire
àà l'École des Hautes Études.
17.. Psychologie . . . . E. TOUIOUSE, directeur de l'Institut de Psychia-
triee à l'École des Hautes-Études, médecin
directeurr de l'Hôpital Rousselle.
18.. Sociologie . . . . G. RICHARD, professeur à la Faculté des Lettres
dee l'Université d e Bordeaux.

19.. Microbiologie et Para- A. CALMITTB, membre de l'Institut et de l'Aca-


sitologiesitologie . . . . demie de Médecine, sous directeur de l'Ins
titutt Pasteur.
F.. BEZAKÇOH, professeur à la Faculté de Méde-
cinee de l'Université de Paris, médecin des
Hôpitaux..
PATHOLOGIEE MÉDICALE
Directeurr : Docteur M. KLIPPEL,
Médecinn des Hôpitaux de Paris.
Less Maladies du Péritoine, par A. PISSAVY, médecin des hôpitaux
dee Paris. 1 vol. de 420 pages 22 fr.
Less grands Processus morbides : Congestion.
r
Inflammation. Sup-
puration.puration. Gangrène, par le D Camille HAHN, licencié es scienc
médecin-assistantt à l'hôpital Saint-Michel. 1 vol. de 480 pages,
avecc figures dans le texte 22 fr.
Laa Goutte et l'Obésité par A. FLORAND, médecin de l'hôpital Lari-
boisière,, et M. FRANÇOIS, ancien interne des hôpitaux de Paris.
11 vol. de 550 pages 22 fr.
Fièvree typhoïde et fièvres paratyphoïdes, par H. Duroun, médecin
dee l'hôpital Broussais, et J. THIERS, ancien interne dos hôpi-
tauxx de Paris. 1 vol. de 450 pages avec figures dans le
textee 22 fr.
Grippe.. Coqueluche, Erysipèle, Oreillons, par II. BARBIER, méde-
cinn des hôpitaux de Paris. 1 vol. de 300 pages 22 fr.
Diphtérie.. — Poliomyélite. — Encéphalite léthargique.
r
— Ménin-
gitee cérébro-spinale. — Zona, par le D BARBIER, médecin
cinn des hôpitaux de Paris. 1 vol. de 350 pages 22 fr.
Septicémiess (Septicopyohémies, Bactériémies), par E. VATJCHER et
P.. WORINGER, chargé de cours et chef de laboratoire ri la Fa-
cultéé de médecine de Strasbourg. 1 vol. de 51G pages avec
figuress 25 fr.

NEUROLOGIEE ET PSYCHIATRIE
Directeurr : Docteur TOULOUSE.
Thérapeutiquee des Maladies
r
du Système nerveux,
e
par le profes-
seurr GRASSET et le D L. RIMBAUD, 2 édit. 1 vol. de GOO
pagess 22 fr,
Séméiologiee des Maladies du Système nerveux, par le Dr Henri
DUFOUR,, médecin de l'hôpital Broussais. 1 vol. de 540 pages,
avecc figures dans le texte. 22 fr.
Maladiess de la Moelle et du Bulbe (non systématisées). Polijomyé-
lites,lites, sclérose en plaques, syringomyélie, par le professeur C.
Oddo.. 1 vol. de 4€0 pages, avec 24 figures dans le texte .. 22 fr.
Lee Tabès et les Maladies systématiques de la Moelle, par le
docteurr E. DE MASSARY, médecin des hôpitaux de Paris. 1 vol.
dee 350 pages, avec 8 fig. dans le texte 22 fr.
Laa Paralysie générale, par le professeur A. JOFFROY, et le doc-
teurr Roger MICNOT, médecin en che.f de la Maison Nationale
de.. Charenton. 1 vol. de 450 pages, avec 29 fig 22 fr.

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs.


IVV TABLEE DES BIBLIOTHÈQUES

BB Sciences inorganiques :
29.. Industries physiques . H. CBAUMAT. professeur au Conservatoire des
Art»» et Métiers, sous-directeur de l'Ecole
supérieuree d'Électricité de Paris.
30.. Photographie . . . A. SETEWETZ, sous-directeur de l'École de Ghi
miee industrielle de Lyon.
3ii Industries chimiques . J
DEBÔMB, inspecteur général de l'Instruction
publique,, inspecteur des Établissements classés.
3a.. Géologie et minéralogie L. GATSui,de l'Institut,professeur au Collège de
appliquéesappliquées . . . . France et à l'Institut national agronomiq
33.. Construction. . . . A. MESSAGES, de l'Institut, professeur au Con-
aervatoiree des Arts et Métiers et à l'Ecole
dess Pont» et Chaussées.

CC Sciences biologiques :
34.. Industries biologiques . G. BBBTBAHD, de l'Institut, professeur de chimie
biologiquee à la Sorbonne, professeur à l'Ins-
titutt Pasteur.
355 Botani- ( A. Phanèro- H. LBGOUTB, de l'Institut, professeur au
ueappli-ueappli-gamesgames
V . Muséum d'Histoire naturelle.
uêeuêe et '
agricul-agricul- Crypto-Crypto- L. MANGIN, de l'Institut, directeur du M
tureture . . gamesgames . séum d'Histoire naturelle.
366 Zoologie appliquée . J. PELLEGBIN, assistant au Muséum d'Histoire
naturelle..
i7.. Thérapeutique générale G. POUCHET, membre de l'Académie de Méde-
etet pharmacologie. . cine, professeur honoraire à la Faculté de
Médecinee de l'Université de Paris
38.. Hygiène et médecine A CALUETTB, membre de l'Institut et de l'Aca-
publiquespubliques . . . demie de Médecine, sous directeur de l'I
titutt Pasteur.
39.. Psychologie appliquée. E. TOUIOUSE, directeur de l'Institut de Psychia-
triee à l'Ecole des Hautes-Études, médecin
directeurr de l'Hôpital Rousselle.
ioo Sociologie appliquée . Ta. RUTSSE», professeur honoraire à la Faculté
dess Lettres de l'Université de Bordeaux.
VII ALBBBT VUIBI, bibliothécaire à la Sorbonne. eat chargé de l'Index
dee l'Encyclopédie scientifique.

SA1NT-AMWDD (CHER). — IMP. R. BUSSIÈRK. — 3-6-1930


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

THÉRAPEUTIQUEE
Directeurr : Docteur G. POUCHBT,
Proleseeurr à la Faculté de Médecine de Paris.

Less Médicaments, Action physiologique, formules, emplois, par


lee Dr A. F. PLICQUE, ancien interne, lauréat des Hôpitaux de
Paris.. Préface du professeur G. POUCHBT, 1 vol. de 41)0
pagess 22 fr.

PHYSIOLOGIEE
Directeurr : Docteur J. GACTRELET,
Professeurr agrégé des Facultés de Médecine,
Directeurr de Laboratoire à l'Ecole des Hautes Etudes.

Laa Fonction musculaire, par J. JOTEYKO, docteur en médecine,


cheff de Laboratoire à 1 Université de Bruxelles. 1 vol. de 41u
pages,, avec 35 figures dans le texte. 22 fr.
Laa Cellule nerveuse, par G. MARINESCO, professeur à l'Université
dee Bucarest. Avec une préface de M. le professeur KAMON Y
CAJALL (de Madrid). 2 vol. formant 1.148 .pages, avec 252 ligures
danss le texte 50 fr.
Le33 Fonctions nerveuses : les fonctions bulbo-médullaires, par
W.. BECHTEREW, professeur à l'Université de Saint-Pétersbourg.
11 vol de 400 pages, avec lig. dans le. texte 22 fr.
Less Fonctions nerveuses : les [onctions bulbo-médullaires. Fonc-
tionstions viscérales, sécrétoires, trophiques et thermogéniques, par
W.. BECHTEREW. 1 vol. de 600 pages, avec 43 figures dans le
textee 82 fr.
Laa Fonction cérébelleuse, par le docteur ANDRÉ-THOMAS, ancien
internee des hôpitaux de Paris. 1 vol. de 350 pages, avec 89 lig.
danss le texte 22 fr.
Less Fonctions digestives, par le docteur E. BARDIER, professeur
agrégéé à la Faculté de Médecine de Toulouse. 1 vol. de 450
pages,, avec 29 figures dans le texte 22 fr.
Laa Fonction sexuelle, par le docteur H. BUSQUET, professeur
•• agrégé à la Faculté de Médecine de Nancy. 1 vol. (épuisé).
Laa Croissance, oar le docteur L. DUFESTEL, médecin inspecteur
dess Ecoles de la Ville d« Paris. 1 vol. de 310 pages avec 20 fig.
danss le texte 22 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris 6e.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SC

L'Hystérie.. Délinition et Conception. Pathogénie. Traitement, par


lee Dr H. BERNHEIM, professeur honoraire à la Faculté de méde-
cinss de Nancy. 1 vol. du 450 pages 22 fr.

MICROBIOLOGIEE ET PARASITOLOGIE
Directeurss : Professeur A. CALMETTE.
Sous-Directeurr de l'Ins-titut Pasteur,
ett Docteur F. BEZAKÇON,
Professeurr à la Faculté de Médecine de Paris.

Lee Micro-organisme de la Syphilis. Treponema pallidum (Schati-


dinn),dinn), par le docteur LÉVY-BING, chef de Laboratoire de Sain
Lazare,, lauréat de l'Académie de Médecine. 1 vol. de 350 pages,
avecc figures dans le texte et une planche en couleurs hors
textee 22 fr.
L'Etudee expérimentale de la Rage, par le docteur A. MARIE, chef
dee service à l'Institut Pasteur. 1 vol. de 400 pages, avec figures
danss le texte et une. planche en couleurs hors texte 22 fr.
Less Dysenteries. Etude bactériologique, par le D r Ch. DOPTER,
professeurr agrégé au, Val-de-Gràce. 1 vol. de 300 pages, nvec
figuress dans Je texte et 12 pi. hors texte 22 fr.
Less Insectes piqueurs et suceurs de sang, par le Dr Edmond
SERGENT,, chef de laboratoire à l'Institut Pasteur de Paris. 1 vol.
dee 310 pages, avec 229 fig. dans le texte 22 fr.
Less Associations microbiennes, leurs applications thérapeutiques,
parr G. PAPACOSTAS et J. GÂTÉ, de l'Institut Pasteur de Lyon.
11 vol. de 410 pages 25 fr.

HYGIÈNEE ET MÉDECINE PUBLIQUES


Directeurr : Professeur A CALMETTE.

L'Ouvrierr (Son atelier, son hygiène, son habitation), par le doc-


teurr Uené MARTIAL. 1 vol. de 425 p., avec fig. dans le
textee 22 fr.
Hygiènee scolaire, par L. DUFESTEL. médecin inspecteur des Ecoles
dee Paris. 2e édition, 1 vol. de 460 pages, avec 72 figures dans
lee texte 22 fr.
Hygiènee du premier âge, par P. LASSABLIÈRE, chef de Laboratoire à
laa Faculté de Médecine de Paris. 1 vol. de 352 pages et 18 figures
danss le texte 22 fr.

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

ciétéé d'Anthropologie de Paris. 1 vol. de 430 pages, avec figures


danss le texte et une carte hors texte. 28 fr.
Lee Paganisme contemporain chez les peuples celto-latins, par
Paull SÉBILLOT, ancien président de la Société d'Anthropologie de
Paris,, directeur de la Revue des traditions populaires. 1 vol.
dee -400 pages 22 fr.
Lee Folk-Lore. Littérature orale et Ethnographie traditionnelle, par
P.. SÉBIIXOT. 1 vol. de 493 pages 22 fr.
Less Blancs d'Afrique, par le Dr H. WEISGERBER. 1 vol. de 420
pagess avec ligures 22 fr.
Anthropologiee
r
anatomique (crâne, face, tête sur le vivant), par
lee D G. PAUL-BONCOUR, vice-président de la Société d'Anthro-
pologie,, médecin en chef de l'Institut médico-psychologique, an-
cienn interne des hôpitaux de Paris. 1 vol. de 400 pages, avec
4-44 figures 22 fr.
L'artt primitif, par M. LOQUET. 1 vol. in-16 de 280 pages, avec
1411 ligures 30 fr.

PALÉONTOLOGIEE
Directeurr : M. BOULE,
Professeurr au Muséum d'Histoire naturelle.
Paléontologiee végétale. Cryptogames cellulaires et cryptogames
vasculaires,vasculaires, par Fernand PELOURDE, docteur es sciences
parateurr au Muséum d'Histoire Naturelle, préface de M. R. ZEIL-
LER,, membre de l'Institut. 1 vol. de 400 pages, avec 80 figures
danss le texte 22 fr.

OCÉANOGRAPHIEE PHYSIQUE
Directeurr : Docteur J. EIOHARD,
Directeurr du Musée océanographique de Monaco.
Less Dépôts Marins, par L.-W. COLLET, professeur à l'Université
dee Genève. 1 vol. de 325 pages, avec 35 figures dans le texte
ett une. carte hors texte 22 fr.

ZOOLOGIEE
Directeurr : R. ANTHOKT,
Professeurr au Muséum d'Histoire naturelle.

Less Insectes. Analomie et physiologie générales. — Introduction


àà l'étude de l'entomologie biologique, par C. HOULBERT, profes-
seurr à l'Ecole de Médecine de Rennes. 2e édition. 1 vol. de 400
pages,, avec 207 figures 25 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris 6°.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SC

ANATOMIEE ET EMBRYOLOGIE
Directeurr : E. ANTHONY,
Professeurr au Muséum d'Histoire naturelle.

Anatomiee plastique, par Edouard CUVER, peintre, professeur d'ana-


tomie.. 1 vol. de 350 pages, avec 14-6 flg. dans le texte — 22.fr.

BIOLOGIEE GÉNÉRALE
Directeurr : if. CAULLEBT,
Professeurr à la Faculté îles Sciences de Paris.

Laa Tératogenèse. Etude des variations de l'organisme, par Etienne


RABAUD,, maître de Conférences à la Faculté des Sciences de
Paris.. 1 vol. de 360 pages, avec 98 flg. dans le texte 22 fr.
L'œuff et les facteurs de l'ontogenèse, par A. BRACIIET, professeur
àà l'Université de Bruxelles, 2e édition (Sous presse)
Lee Parasitisme et la symbiose, par M. CAUIXERY, professeur à
lala Sorbonne. 1 vol. de 400 pages, &vec 53 flg. dans le texte. 22. fr.
L'Hérédité,, par E. GUYÉNOT, professeur à l'Université de Genève.
2°° édition (Sous presse)
Laa Variation et l'Evolution, par E. GUYÉNOT.
TOMEE I : La variation, 1 vol. in-16 de 452 pages, avec 46 figu-
ress 32 fr.
TOMEE II : L'évolution. 1 vol. in-16 de 420 pages, avec figu-
ress 33 fr.
L'Adaptation,, par L. CUÉ.NOT, correspondant de l'Institut, profes-
seurr à la Faculté des Sciences de Nancy. 1 vol. de 420 pages
avecc 82- figures 30 fr.
Less Pigments dans l'organisme animal.r Chimie. Morphologie. Phy-
siologie.siologie. Etiologie, par le D J. VERNE docteur es scie
professeurr agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 1 vol.
dee 612 pages, avec 32 figures dans le te.xte 35 fr.
Less Sociétés d'insectes. Leur origine, leur évolution, par le pro-
fesseurr William Morton WHEELER. 1 vol. de 472 pages, avec
Cll figures dans le texte 30 fr.

ANTHROPOLOGIEE ET ETHNOGRAPHIE
Directeurr : P. Eiver,
Assistantt d'Anthropologie au Muséum d'Histoire Naturelle.
Less Peuples aryens. Leur origine en Europe, par ZABOROwsfci, pro-
fesseurr à l'Ecole d'Anthropologie, ancien président de la So-

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

Laa Pisciculture industrielle, par C. RAVERET-WATTEL, ex-maître


dee Conférences de Pisciculture à l'Ecole Nationale des Ponts
ett Chaussées. 1 vol. de 400 p., avec 74 flg. dans le texte .. 22 fr.
Less Equidés domestiques, le Cheval, l'Ane et le Mulet, par A.
Gu-i-iER,, médecin vétérinaire, inspecteur sanitaire de la ville de
Caen.. 1 vol. de 3S0 pages, avec G8 fig. dans le texte 22 fr.

BOTANIQUEE CRYPTOGAMIQUE
Directeurr : L. MASGIN, de l'Institut.
Directeurr au Muséum d'Histoire naturelle.

Less Urèdinées (Rouilles des Plantes), par Paul HAWOT, assistant de


cryptogamiee au Muséum d'Histoire Naturelle. 1 vol. de 400 pages,
avecc 47 figures dans Je texte 22 fr.
Less Champignons, Essai de classification, par le Dr Paul VUTIXE-
MIN,, professeur à la Faculté de Médecine de Nancy. 1 vol.
dee 425 pages 22 fr.
Less Levures, par A. GUILLIERMOND, Epuisé.

BOTANIQUEE APPLIQUÉE
Directeurss : H. LECOMTE, de l'Institut,
Professeurr au Muséum d'Histoire naturelle,
ett L, MANGIN, de l'Institut.
Directeurr au Muséum d'Histoire Naturelle.

Less Bois Industriels, par .7. BEAUVERIE, chargé d'un cours de


botaniquee appliquée à la Faculté des sciences de Lyon. 1 vol.
dee 420 p., avec 53 figures dans le te.xte. 22 fr.
Less Plantes à tubercules alimentaires des climats tempérés et
dess pays chauds, par Henri JUMELLE, professeur à la Faculté
dess sciences de Marseille. 1 vol. de 380 pages, avec 35 figures
danss le texte 22 fr.
Less Plantes à gommes et à résines, par H. JACOB DE CORDEMOY,
docteurr es sciences, docteur en médecine, chargé de cours à
l'Ecolee de Médecine de l'Université d'Aix-Marseille. 1 vol. de
4200 pages, avec 15 figures dans le texte 22 fr.
Utilisationn des algues marines, par C. SAUVAGEAU, professeur à la
Facultéé des sciences de Bordeaux. 1 vol. de 400 pages, avec
266 figures 22 fr.
Less Palmiers, par C.-L. GATIN, docteur es sciences, ingénieur agro-
nome,, préparateur de botanique à la Sorbonne. 1 vol. de 350
pages,, avec 46 figures 22 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris G'.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCI

Laa Distribution géographique des animaux, par le Dr L. TROUES-


SARII professeur au Muséum national d'histoire naturelle de
Paris.. 1 vol. de 350 pages, avec ligures dans le. texte — 22 fr.
Less Batraciens et principalement àeux d'Europe, par G.-A. Bou-
LENGER,, D r Se, D r Phil., membre de la Société Royale de Lon-
dres,, vice-président de la Société de zoologie de Londres. 1 vol.
dee 320 pages, avec 55 figures dans le texte 22 fr.
Mollusquess de la France et des régions voisines.
TOMEE PREMIER : Amphineures, Gastéropodes Opisthobranches, Iloté-
ropodes,, Marséniadés et Oncidiidés, par A. VAYSSIÈRE, profes-
seurr à la faculté des sciences de Marseille. 1 vol. de 430 pages,
avecc 42 planches hors texte 22 fr.
TOMEE DEUXIÈME : Gastéropodes pulmonés et Prosobranehes terres-
trestres et fluviatiles, par L. GERMAIN, docteur es sciences, prépa-
rateurr au Muséum d'Histoire Naturelle. 1 vol. de 380 pages,
avecc 25 planches hors texte 22 fr.
Less Coléoptères d'Europe (France et renions voisines), par Ç.
HOULBERT,, professeur à l'Ecole de Médecine et de Pharmacie
dee Rennes.
TOMEE PREMIER : 1 vol. de 350 pages, avec 104 figures dans le
textee 30 fr.
TOMEE DEUXIÈME : 1 vol. de 310 pages, avec 99 figures dans le texte
ett 30 planches 30 fr.
TOMEE TROISIÈME : 1 vol. de 300 p., avec 30 planches 30 fr.
Less Thysanoures, Dermoptères et Orthoptères de la Faune euro-
péenne..
TOMEE PREMIER : par C. HOULBERT. 1 vol. de 382 pages avec 87 figures
danss le texte et 9 planches 4 32 fr.
TOMEE DEUXIÈME : 1 vol. de 378 pages avec 44 figures et 15 plan-
chess 32 fr.
Less Echinodermes des mers d'Europe.
TOMEE PREMIER ; par R. KOEHLER, professeur de Zoologie à la
Facultéé de Médecine de Lyon. 1 vol. de 370 pages avec 9 plan-
chess hors texte. 35 fr.
TOMEE DEUXIÈME : 1 vol. de 348 pages avec 9 planches hors
textee 35 fr.
Less Oiseaux, par M. BOUBIER, président de la Société zoologique de
Genève.. 1 vol. de 306 pages, avec 78 figures dans le texte et
100 planches 35 fr.

ZOOLOGIEE APPLIQUÉE
Directeurr : J. PELLEGRIN,
Assistantt au Muséum d'Histoire Naturelle,

Less Vers à soie (Sériciculture moderne, par Antonin ROLET, profes-


seurr à l'Ecole d'Agriculture d'Antibes. 1 vol. de 450 pages,
avecc 102 figures dans le. texte. 22 fr.

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs.


EXCYCL0PED1EEXCYCL0PED1E SCIENTIFIQUE

Less nouvelles conceptions de la matière et de l'atome, par A.


BERTHOUD,, professeur à l'Université de Neuchatel. 1 vol. de 330
pages,, avec 21 figures dans le texte 25 fr.
Lee Tombeau d'Aristoxène. Essai sur la musique, par G. URBAIN,
professeurr à la Faculté des Sciences de Paris. 1 vol. de 240
page.s,, avec figures 22 fr.

PSYQHOLOGIEE EXPERIMENTALE
directeurr : Docteur TOULOUSE.

Techniquee de Psychologie expérimentale, par TOULOUSE, VASCHIDE


ett PIÉRON. Deuxième édition, entièrement nouvelle, par le doc-
teurr Erd. TOULOUSE et H. PIÉRON. (Epuisé.)
L'Hypnotismee et la Suggestion, par le professeur GRASSET. (Epuisé)
Laa Volonté, par Fr. PAULHAN [Epuisé)
Laa Morale, Fondements psycho-sociologiques d'une conduite ra-
tionnelle,tionnelle, par G.-L. DUPRAT, docteur es lettres, lauréat de l
titut,, correspondant du Ministère de l'Instruction publique, asso-
ciéé de l'Institut international de sociologie, directeur du Labo-
ratoiree de psychologie expérimentale d'Aix-en-Provence. 2e édi-
tion.. 1 vol. de 400 pages 22 fr.
Laa psychologie sociale. Sa nature et ses principales lois, par G.-L.
DUPRAT,, docteur es lettres, lauréat de l'Institut. 1 vol. de 370
pagess 22 fr.
L'Inconscient,, par A. HESNARD, professeur à l'Ecole de Médecine na-
valee de Bordeaux. 1 vol. de 300 pages avec figures dans le
textee 22 fr.
L'odorat,, par H. ZWAARI>EMAKER, professeur de physiologie à l'Uni-
versitéé d'Utrecht. 1 vol. d.e 31 pages, avec figures 22 fr.

PSYCHOLOGIEE APPLIQUEE
Directeurr : Docteur TOULOUSE.

L'Educationn des Sentiments, par le docteur V. BRIDOU. 1 vol. de


4100 pages 22 Ir.
Laa Pédagogie expérimentale, par Gaston RICHARD, professeur à
laa Faculté des Lettres de Bordeaux. 1 vol. de 350 pages . . 22 fr.
Laa Pratique commerciale, par J.-H. HAENDEU 1 vol. de 400 pages,
avecc figures 22 fr.
L'Educationn de la volonté et des facultés logiques, par G.-L. Du-
r-RAT,, docteur es lettres, lauréat de l'Institut, associé de l'Insti-
tutt international de sociologie. 1 vol. de 324 pages 22 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris 6*.


] 00 ENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

PHYSIOLOGIEE ET PATHOLOGIE
VÉGÉTALESS
Directeurr : Professeur L. MANGIS,
Directeurr an Muséum d'Histoire Naturelle.
Membree de l'Institut.

Biologiee florale, par F. PÉCHOUTRE, docteur es sciences, profes-


seurr au Lycée Louis-le-Grand. 1 vol. de 380 pages, avec 82
figuress dans le texte 22 fr.
Nutritionn cheze la plante, I. Echanges d'eau et de substances miné-
rales,rales, 2 édition, par M. MOLLIARD, doyen de la Faculté de
sciencess de l'Université de Paris, membre de l'Institut. 1 vol. de
4000 pages, avec 46 figures dans le texte 25 fr.
Nutritionn de la plante, II. Formation des substances ternaires, par
M.. MOLUARD. 1 vol. de 450 p. avec 88 flg. dans le texte... 25 fr.
Nutritionn chez la plante, III. Utilisation des substances ternaires,
parr M. MoiiiA.Ro. 1 vol. de 324 pages avec 54 figures dans
lee texte 25 fr.
Nutritionn de la plante, IV. Cycle de l'azote, par M. MOLLIARD. 1 vol.
dee 330 pages, avec 56 figures 25 fr.

GÉOLOGIEE ET MINÉRALOGIE
APPLIQUÉESS
Directeurr : L. CAYEUX,
Professeurr de Géologie au Collège de France.

Less Gisements de pétrole, par J. CHAUTARD. 1 vol. de 350 pages


avecc 4? figures dans le texte 22 fr.

PHILOSOPHIEE DES SCIENCES


Directeurr : A. EET,
Professeurr a la Sorbonne.

Less disciplines d'une science, la Chimie, par G. URBAIN, membre


dee l'Institut, professeur de la Faculté des Sciences de Paris.
11 vol. de 340 pages, avec figures 22 fr.
Laa Physique depuis vingt ans, par P. LANGEVIN, professeur au
Collègee de France. 1 vol. de 350 pages, avec figures 30 fr.

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

ÉCONOMIEE POLITIQUE
Directeurr : GEORGES BESiRD,
Professeurr au Collège de France.
Laa Monnaie le Change et l'Arbitrage, le Crédit, par M. et A.
MÉLIOT.. (Epuisé.)
Guerree et Paix internationales, par Eugène n'EiCHTHAL, membre
dee l'Institut. 1 vol. de 350 pages, avec graphiques 22 Ir.
Laa Colonisation et les Colonies, par Pierre AUBRY, docteur es
sciencess juridiques, politiques et économiques.i 1 vol. de 278 p..
avecc nombreux tableaux 22 fr.
Lee Commerce et les Commerçants, par YVES GUYOT. (Epuisé.)
L'Industriee et les Industriels, par YVES GUYOT. 1 vol. de 400 page?,
avecc tableaux dans le texte 22 fr.
Lee Blé et les Céréales, par Daniel ZOLLA, professeur à Grignon
ett à l'Ecole libre des sciences politiques. 1 vol. de 3O0 pages,
avecc cartes et graphiques dans le texte 22 fr.
Less Fibres textiles d'origine animale (Laine et soie), par D. ZOLLA.
11 vol. de 350 pages, avec cartes et graphiques 22 fr.
Syndicats,, Trade-unions et Corporations, par Georges RENARD, pro-
fesseurr au Collège de France. 1 vol. de 420 pages 22 fr.
Salariatt et Salaires, parE. LEVASSEUR, membre de l'Institut, ad-
ministrateurr du Collège de France. 1 vol. de 500 pages .. 22 fr.
Laa Machine et la Main-d'œuvre humaine par D. BELLET. secré-
tairee perpétuel de la Société d'Economie politique, professeur
àà l'Ecole des Sciences politiques et à l'Ecole des Hautes
Etudess commerciales. 1 vol. de 300 pages 22 fr.
Laa Vie chère, par G. RENARD professeur au Collège de France.
11 vol. de 250 pages 22 fr.
L'Economiee politique et les Economistes, avec une introduction
surr l'Economique et la Guerre, par G. SCHELLE. vice-président
dee la Société d'Economie politique. 1 vol. de 400 pages. 82 fr.
Lee Luxe, le Bien-être et la Consommation, par André PINARD. Ou-
vragee couronné par l'Académie française (Prix Fabien 1919).
11 vol. de 480 pages 22 fr.
Less Monopoles, par E. PAYEN. 1 vol. de 450 pages 22 fr.
Less Systèmes socialistes, par H. BOURCIN. 1 volume de 400 pa-
gess 22 fr.
L'Enseignementt commercial en France et à l'Etranger, par M.
FACY.. 1 vol. de 330 pages 22 fr.
Less physiocrates, par Georges WEULERSSE. 1 vol. in-lG de
3500 pages 30 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris 6".


144 ENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

CHIMIEE
Directeurr : A. PICTET,
Professeurr à la Faculté des Sciences de l'Université de Genève.
Zinc,, Cadmium, Cuivre, Mercure, par A. BOUCHONNET, préparateur
àà la Faculté des sciences de l'Université de Paris. 1 vol. de
4100 pages, avec figures dans le texte 22 fr.
Etain,, Plomb et Bismuth, par A. BOUCHONNET. 1 vol. de 380
pagess 22 fr.
Hydrocarbures,, Alcools et Ethers de la série grasse, par P.
CARRÉ,, docteur es sciences, professeur à l'Ecole des Hautes
Etudess commerciales, préparateur à l'Institut de chimie appli-
quée.. 1 vol. de 420 pages 22 fr.
Phosphoree — Arsenic — Antimoine, par A. BOUTARIC, agrégé de
l'Université,, docteur es sciences, maître de conférences de phy-
siquee à la Faculté des sciences de Dijon, et A. RAYNAUD, ingé-
nieur-chimiste,, chargé des fonctions de chef des travaux de
chimiee à la Faculté des sciences de Montpellier. 1 vol. in-16 de
4200 pages, avec figures dans le texte 22. fr.
Laa Chimie des matières colorantes organiques, par P. CASTAN,
docteurr es sciences de l'Université de Genève. 1 vol. de 460
pages,, avec nombreuses formules 40 fr.
Less Sucres et leurs dérivés, par Marc CRAMER, docteur es scien-
ces.. 1 vol. de 360 pages, avec nombreuses formules 30 fr.

CHIMIEE BIOLOGIQUE
Directeurr : G. BERTRISD,
Professeurr de Cnimie biologique à la Sorbonne.

Lee Parfum chez la Plante, par Ejig. CHARABOT, docteur es sciences


physiques,, inspecteur et membre du Conseil supérieur de l'En-
seignementt technique, et C.-L. GATIN, docteur es sciences natu-
relles,, ingénieur agronome, préparateur à la Faculté des
Sciencess de Paris. 1 vol. de 400 pages, avec 21 figures dans le
textee 25 fr.

INDUSTRIESS BIOLOGIQUES
Directeurr : Professeur G. BERTRAND,
Industriee des Parfums naturels, Les Principes odorants des Végé-
tauxx (Méthodes de dosage, d'extraction, d'identification), par
Eug.. CHARABOT. 1 vol. de 400 pages, avec figures dans le
textee 25 fr.
Laa Fabrication du sucre, par D. SIOERSKY, ingénieur-chimiste.
11 vol. de 360 pages, avec 37 figures dans le texte 22 fr.

GASTONN DOIN et Cd«, Editeurs.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

INDUSTRIESS CHIMIQUES
Directeurr : J.
Inspecteurr général de l'Instruction publique.

Less Produits pharmaceutiques industriels, par P. CARRÉ, docteur


ess sciences, préparateur à l'Institut de Chimie appliquée. (Epuisé)
Industriee des Métaux secondaires et des Terres rares, par Pierre
NICOLARDOT,, capitaine d'artillerie, chef du Laboratoire de Chi-
miee de la Section technique. 1 vol. de 420 pages, avec 37'fig.
danss le texte 22 fr.
Pierress et Matériaux artificiels de construction, par Albert GRAN-
GER,, professeur à l'Ecole d'application de la Manufacture natio-
nalee de Sèvres, chargé de conférences à l'Ecole de physique
ett de chimie industrielles de la Ville de Paris. 1 vol. de 350 p.,
avecc 55 figures dans le texte. 22 fr.
L'Eauu dans l'Industrie. Application. Epuration, par Georges
BOURREY,, inspecteur de l'Enseignement technique, ingénieur
chimistee des chemins de fer de l'Etat, professeur à l'Ecole spé-
cialee des travaux publics. Avec une préface de M. MAX DE NAN-
SOUTY.. 1 vol. de 468 pages, avec 57 figures dans le texte. 22 fr.
Industriee des Acides minéraux (Acides suljurique, chlorhydrique
etet azotique), par E. BAUD,'maître de conférences à la Faculté
dess Sciences de Marseille. 1 vol. de 360 pages, avec 82 fig.
danss le texte 22 fr.
Industriess du Plomb et du Mercure. I. Métallurgie ; II. Com-
posés,, par A. BOUCHONNET, préparateur à la Faculté des Sciences
dee Paris. 2 vol. formant 660 pages, avec 57 figures dans le
textee 44 fr.
Industriess du Chrome, du Manganèse, du Nickel et du Cobalt,
parr L. OUVRARD, directeur du Laboratoire de chimie générale
dee la Sorbonne. 1 vol. de 310 pages, avec 22 fig. dans le
textee 88 fr.
Alcooll et Distillerie. Production et consommation de Valeool.
UtilisationUtilisation des sous-produits. Analyse. Législation, par A. M
VOISIN,, chef des travaux de physique et chimie à l'Ecole natio-
nalee vétérinaire d'Alfort (préface de M. L. LIXDET, professeur à
l'Institutt national agronomique). 1 vol. de 450 pages, avec 112
figuresfigures dans le texte 22 fr.
Caoutchoucc et Gutta-percha, par E. TASSILLY, docteur es sciences,
professeurr agrégé à l'Ecole supérieure de pharmacie, chargé
dee conférences à l'Ecole de physique et chimie industrielles.
11 vol. de 400 pages, avec 56 figures dans le texte 22 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris 6«.


166 ENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

Industriess des Métaux précieux : L'Argent et les Métaux de la


Minee de Platine, parM. MOLINIÉ, ingénieur-chimiste, chef du
Laboratoiree des Essais du Comptoir Lyon-Alemand, et H.
DIETZ,, ingénieur-chimiste, directeur de l'Usine d'affinage du
Comptoirr "Lyon-Alemand. 1 vol. de 400 pages, avec 93 figures
danss le texte 22 fr.
Industriess des Matières Colorantes organiques par André WAHL,
docteurr es sciences, professeur au Conservatoire national des
Artss et Métiers. 2° Edition : TOME PREMIER. Les Produits intermé-
diaires.diaires. 1 vol. de 350 pages avec 4 figures dans le texte.. 2
Industriess des cyanures, pnr P. BRUN, licencié es sciences phy-
siques,, pharmacien de l1* classe, ingénieur chimiste, prépa-
rateurr à la Faculté des sciences de Montpellier. 1 vol. in-]6 de
4800 pages, avec 44 flgur.es 30 fr.
Industriess des Os, des Déchets animaux, des Phosphates et du
Phosphore,, par L. VÉZIEN. ingénieur-chimiste. 1 vol. de 4?5
pages,, avec 50 fig. dans le texte 22 fr.

PHOTOGRAPHIEE
Directeurr : A. SETEWETZ,
Sous-Directeurr de l'Ecole de Chimie industrielle de Lyon.

Laa Photographie, par G. CHICANDARD, licencié es sciences pny-


siques.. 1 vol. de 350 pages 22 fr.
Less Positifs en photograDhie, par E. TRUTAT, docteur es sciences,
directeurr du Musée d'Histoire naturelle de Toulouse. 1 vol. de
3000 pages, avec fig. dans le. texte 22 fr.
Lee Négatif en photographie, par A. SEYEWETZ. 2e édition. 1 vol.
dee 320 pages avec 44 figures dans le texte 22 fr.
Less Reproductions photomécaniques monochromes. Photogra-
vure,vure, similigravure, pholotypie, hélioaravure, etc., par L.
CLERC,, ingénieur, préparateur à la Faculté des sciences de
l'Universitéé de Paris. 2e Edition. 1 vol. de 400 pages avec 61
figuress 22 fr.
Less Reproductions photomécaniques polychromes. Sélections
trichromes,trichromes, orthocronvatisme, procédés d'interprétatio
L.-P.. Clerc. 1 vol. de 350 p., avec 73 fig. dans le texte. 22 fr.
Laa Photographie à la lumière artificielle, par Albert LONDE, di-
recteurr honoraire des services de photographie et de radio-
graphiee à la Salpêtrière. 1 vol. de 400 pages, avec 80 figures
danss le texte 22 fr.
Laa Photographie des couleurs, par J. THOVERT, professeur à la
Facultéé des sciences de Lyon. 1 vol. de 300 pages avec 93 figures
danss le texte et 4 planches en couleurs hors texte 25 fr.

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs. ~"


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

Calcull mécanique. Appareils arithmétiques et algébriques, Intégra-


teurs,teurs, par L. JAOOB, ingénieur général de l'Artillerie navale. 1 vol
de.. 438 pages, avec 184 figures dans le. texte 22 fr.
Géodésiee élémentaire par ele général R. BOURGEOIS, professeur
àà l'Ecole polytechnique. 2 édition, revue, corrigée et augmen-

Nayigation.. Instruments, Observations, Calculs, par £. PERRET,


lieutenantt de vaisseau, professeur à l'Ecole Navale. 1 vol. de
3600 pages, avec 57 figures dans le texte et 4 tableaux hors
textee 2à fr.
Théoriee et pratique des Opérations financières, par A. BARRIOL,
membree de l'Institut des actuaires français, directeur de l'Ins-
titutt des Finances et Assurances. 4e édition (Prix Montyon).
II vol. de 408 p., avec nombreux tableaux (Sous presse)
Théoriee mathématique des Assurances, par P.-J RICHARD eet PETIT,
ancienss élèves de l'Ecole Polytechnique, actuaires. 2 édition,
revue,, corrigée et augmentée, par P.-J. RICHARD. Ouvrage cou-
ronnéé par l'Institut (Prix Montyon, 1922). 2 vol. formant 775
pages,, avec figures et tableaux dans, lg texte 44 fr.
Géométriee descriptive, par Raoul BRICARD, ingénieur des Manu-
facturess de l'Etat, professeur au Conservatoire national des
Artss et Métiers, répétiteur à l'Ecole Polytechnique. 1 vol. de
2755 pages, avec 107 figures dans le texte 22 fr.
Economiquee Rationnelle, par F. DIVISIA, Ingénieur des Ponts et
Chaussées,, Professeur d'Economie politique à l'Ecole Natio-
nalee des Ponts et Chaussées. Préface de M. C. COLSON, Vice-
Présidentt du Conseil d'Etat. 1 vol. de 474 pages, avec 40 fig.
danss le texte 35 fr.
Statistiquee Mathématique, par Georges DARMOIS, Professeur à la
Facultéé des Sciences de Nancy et à l'Institut de Statistique
dee l'Université de Paris. Préface de Michel RUBER, Directeur de
laa Statistique Générale de la France. 1 vol. de 380 pages, avec
III fig. . . . . . . . . 3 5 fr.
Métrophotographie,, par le capitaine du génie Th. SACONNEY, chef
duu Laboratoire d'aérologie et de téiéphotographie militair.es de
Chalais-Meudon.. 1 vol. de 300 pages, avec 130 figures dans
lee texte 42- fr.
Géométriee perspective, par M. EMANAUD, chef des travaux gra-
phiquess à l'Ecole polytechnique. 1 vol. de 440 pages avec
1688 figures 22 fr.

8,, Place de l'Odéon, Paris 6°.


188 ENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

PHYSIQUEE
Directeurr : A. LEDUC,
Professeurr de Physique à la Sorbonne.

Oscillationss et vibrations, par A. BOUTARIC, agrégé de l'Univer-


sitésité (Epuisé)
Optiquee géométrique, par J. BU:IN, professeur au Lycée Saint-
Louiss (Epuisé)

PHYSIQUEE BIOLOGIQUE
Directeurr : L. PEOH,
Professeurr à la Faculté de Médecine de Montpellier.

Rayonssr X et Radiations diverses. Actions SUT> l'organisme, pa


lee D H. GuitLBMWOT, vice-président de la Société de Radiolo-
giee médicale de Paris. 1 vol. de 320 pages, avec figures dans
lee texte ..._ 22 fr.

INDUSTRIESS PHYSIQUES
Directeurr : H. CHAUMAI,
Sous-Directeurr de l'Ecole supérieure d'Electricité de Parie.

Instrumentss optiques d'observation et de mesure, par J. RAI-


BAIÏD,, capitaine d'artillerie. 1 vol. de 380 pages, avec 144 figures
danss le texte 22 fr.
Lee Ferro-magnétisme. Applications industrielles, par R. JOUAUST,
cheff de travaux au Laboratoire central d'électricité. 1 vol. de
4200 pages, avec 55 figures dans le texte 22 fr.

MATHÉMATIQUESS APPLIQUÉES
Directeurr : M. D'OOAGNE,
Professeurr à l'Ecole Polytechnique et à l'Ecole des Ponts et Chaussées,
Membree de l'Institut.
Calcull graphique et Nomographie, par M. D'OCAGXE, professeur
àà l'Ecole des Ponts et Chaussées et à l'Ecole Polytechnique,
membree de l'Institut. 3° édition. 1 vol. de 410 pages avec 146
figures,figures, dans le. texte
Calcull numérique. Opérations arithmétiques et algébriques. Inté-
grations,grations, par R. DE MONTESSUS et R. D'ADHÉMAR, docte
sciencess mathématiques. 1 vol. de 250 pages, avec figures dans
Jee texte ;. ...... . . . 22 fr.

GASTONN DOIN et Cde, Editeurs.


ENCYCLOPEDIEENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

Pontss suspendus, par G. LEINEKUGEL LE COQ, ancien ingénieur


hydrographee de la Marine, ingénieur en chef des Etablissements
F.. Arnodin. 2 vol. formant 720 pages, avec 160 figures dans le
textee 41 fr.
Pontss improvisés. Ponts militaires et Ponts coloniaux, par (î.
ESPITALLIER,, lieutenant-colonel du génie territorial, et F'. DU-
RAND,, capitaine du génie. 1 vol. de 300 pages, avec 99 figures
danss le texte 22 fr.
Dynamiquee appliquée, par L. LECORNU, membre de l'Institut,
ingénieurr en chef des Mines, professeur à l'Ecole Polytechni-
que.. 2e édition. 2 vol. formant 780 pages, avec 149 figures dans le
textee 4i fr.
Hydrauliquee générale, par A. BOULANGER, professeur adjoint de
mécaniquee à la Faculté des Sciences de Lille. 2 vol. formant
7000 pages, avec 27 fig. dans le texte 44 fr.
Techniquee de l'Aéroplane, par le capitaine J. RAIBAUD, sous-di-
recteurr de l'Etablissement d'Aviation militaire de Vincennes.
11 vol. de 300 pages, avec 61 figures dans le texte 22 fr.
Laa Technique du Ballon e
par G. ESPITALLIER, lieutenant-colonel
duu génie territorial. 2 édition. 1 vol. de 500 p., avec 111 fig.
danss le texte 22 fr.
Chronométrie,, par J. ANORADE, professeur à la Faculté des Scien-
cess de Besançon. 1 vol. de 400 pages, avec 193 figures dans le
textee 22 fr.
Locomotivess à vapeur, par J. NADAL, ingénieur en chef adjoint
duu matériel et de la traction des chemins de fer de 1 Etat
2«« édition. 1 vol. de 370 pages avec 78 figures et 9 similigra
vure.ss hors texte 22 fr.
Freinagee du Matériel de Chemins de fer, par P. GOSSEREZ et
A.. Jonet, ingénieurs des Arts et Manufactures. 1 vol. de 450
pages,, avec 220 figures dans le texte 22 fr.
Exploitationn des Mines. La taille et les voies conliguës à la taille,
parr L. CRUSSARD. (Epuisé).
Miness (Grisou, Poussières), par L. CRUSSARD. 1 vol. de 420 pages,
avecc 101 figures dans le texte 22 fr.
Théoriee des Moteurs thermiques, parE. JOUGUET. (Epuisé).
Less Moteurs à combustion interne, par A. WITZ, professeur à
laa Faculté libre des Sciences de Lille, correspondant de l'Ins-
titut.. 1 vol. de 360 pages, avec 87 figures dans le texte 22 fr.
Turbiness à vapeur, par le colonel F'. CORDIER, ingénieur é'.-îc'.n
cienn I. E. G. 2e édition.
TOMEE I. 1 vol. de 350 pages, avec 58 figures 22 fr
TOMEE II. 1 vol. de 330 pages avec 124 figur.es 22 fr.
Less Machines à vapeur, par le colonel F. CORDIER [Epuisé]

8.. Plnre de TOdéon, Paris C«.


2 00 ENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

MÉCANIQUEE APPLIQUÉE ET GÉNIE


Directenrr : M. D'OOAGNE,
Professeurr à l'Ecole Polytechnique et à l'Ecole des Ponts et Chaussées,
Membree de l'Institut.

Balistiquee extérieure rationnelle. (Problème balistique principal),


parr le général P. CHARBONNIER (Epuisé).
Balistiquee extérieure rationnelle. (Problèmes secondaires), par le
générall P. CHARBONNIER. (Epuisé).
Balistiquee intérieure, par le général P. CHARBONNIER. (Epuisé).
Mécaniquee des Explosifs, par E. JOUGUET, ingénieur en chef au
Corpss des Mines, répétiteur à lEcole Polytechnique. 1 vol.
dee 525 pages avec 120 ligures 22 fr.
Mécaniquee des Affûts. 2« édition, par le colonel J. CHALLÉAT et le
commandantt THOMAS.
TOMEE I. 1 vol. de 370 pages avec 97 figures 30 fr.
TOMEE II. 1 vol. de. 360 pages avec 62 ligures 30 fr.
Résistancee et construction des Bouches à feu. Autofretlage, par
L.. JACOB, ingénieur général de l'Artilleriee navale, conseiller
techniquee aux Etablissements Schneider. 2 édition. '2 vol. for-
mantt 600 pages, avec 131 figures dans le texte et 10 grands
graphiquess hors texte 44 fr.
Artilleriee de Campagne, par J. PALOQUE, lieutenant-colonel, pro-
fesseurr à l'Ecole supérieure de guerre. (Epuisé).
L'Artilleriee dans la bataille, par le colonel J. PALOQUE, com-
mandantt le 18e régiment d'artillerie. 1 vol. de 460 pages, avec
144 flg. dans le texte et une carte hors texte 22 fr.
Artilleriee navale, par L. JACOB, ingénieur général de l'Artillerie
navale.. 2 vol. formant 950 pages, avec 462 figures dans le
textee 44 fr.
Probabilitéé du Tir. Théorie et application au tir de l'infanterie et
dede l'artillerie, par le capitaine S. BURILEANO, docteur es sciences
mathématiquess de l'Université de Paris, professeur à l'Ecole
d'applicationn de l'artillerie et du génie de Bucarest. 1 vol. de
2600 pages, avec 60 figures dans le. texte 22 fr.
FortificationFortification cuirassée, par le général L. PIARRON DE M
11 vol. de 400 pages, avec 108 figures dans le texte et 2 plan-
chess hors texte 22 fr.
Pontss en maçonnerie. Calculs et constructions, par A. Aunic,
ingénieurr en chef des Ponts et Chaussées. 1 vol. de 400 pages,
avecc 110 figures dans le texte 22 fr.
Pontss métalliques. Méthodes de calcul, par G. PIGEAUD, ingé-
nieurr des Ponts et Chaussées [Epuisé]

GASTONN DOIN et Cie, Editeurs.


Less commandes sont fournies dès réception
dee leur valeur, augmentée des frais de port.

Comptee Chèques postaux Paris 201.74


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R.. C. Semé N° 38954.

LeLe catalogue général


estest adressé franco sur demande.
222 ENCYCLOPEDIE SCIENTIFIQUE

Pharess et Signaux maritimes, par C. RIBIÈRE, ingénieur en chef


duu service des phares et balises, docteur es sciences. 1 vol
dee 400 pages, avec 161 figures dans le texte 2§ fr.
Less Machines marines, par P. DROSNE, ingénieur de la Marine.
11 vol. de -400 pages, avec 140 figures dans le texte 22 fr.
Laa Navigation sous-marine, par Charles RADIGUER, ingénieur du
Géniee maritime. 1 vol. de 360 pages, avec 102 figures dans le
textee 22 fr.
Travauxx maritimes, par A. GUIFFART, ingénieur en chef des Ponts
ett Chaussées. 1 volume de 360 pages, avec 75 figures dans le
textee 22 fr.
Constructionss navales. La Coque, par J. ROUGE, ingénieur prin-
cipall de la Marine. 1 vol. de 320 pages, avec 129 figures dans le
textee 22 fr.
Constructionss navales. Accessoires de coque, par M. EDMOND.
11 vol. de 310 pages, avec 116 figures dans le texte 22 fr.
Théoriee du navire par BOURDELLE, ingénieur principal de la Ma-
rinee des cadres de réserve, ancien professeur à l'Ecole d'applica-
tionn du Génie maritime. 2 vol. formant 760 pages, avec 249 fig.
danss le texte 44 fr.
Cinématiquee appliquée. Théorie des mécanismes, par L. JACOB,
ingénieurr général de l'artillerie navale. 1 vol. de 400 pages, avec
1711 figures dans le texte 22 fr.
Organess des Machines opératrices et des transmissions, par
L.. JACOB, ingénieur général de l'artillerie navale. 1 vol. de
3600 pages, avec 63 planches, contenant 372 figures 22 lr.
Loiss mathématiques de la résistance des fluides. — Théorie de
l'hélice,, par H. WILLOTTE, inspecteur général honoraire des
Pontss et Chaussées. 1 vol. in-16 de 300 pages, avec figures dans
lee texte 22 fr.
Laa résistance de l'air et l'expérience. — Les conséquences,
parr L. JACOB, ingénieur général de l'artillerie navale. 2 volumes
formantt 600 pages, avec 83 flgure.s dans le. texte 44 fr.
Applicationss de la géométrie à la stabilité des constructions.
parr D. WOLKOWITSCH, Ingénieur. Ancien élève de l'Ecole Poly-
technique.. Préface de M. d'OcvcNÉ, membre de l'Institut.
TOMEE PREMIER, 1 vol. in-16 de 304 pages, avec 87 figures... 35 fr.
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