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Université Akli Mohand Oulhadj-Bouira

Faculté des lettres et des langues


Département de langue et Culture amazighes
Niveau : Master 1. Littérature
Matière : Théorie de la littérature

Cours 02 : L’Esthétique littéraire

Introduction
 
Nous pouvons proposer que, chez les Grecs de l'Antiquité, l'esthétique est le lien entre
la technique et la métaphysique : elle est le devenir-technique de la métaphysique et le
devenir-métaphysique de la technique; elle est inséparable de la dialectique et ainsi de la
politique, qui est l'art des arts. La dialectique est l'art -- la tekhnê -- de dialoguer et de
persuader, de convaincre et donc de vaincre l'adversaire; elle est mise en scène dans et par
l'éloquence; aussi a-t-elle les pieds dans la rhétorique, qui est l'art du discours en général et
qui inclut la poétique, celle-ci étant alors l'art -- le métier et ses règles -- d'un discours comme
la poésie (à ne pas confondre avec le poème, puisqu'on la retrouve autant dans la tragédie et
l'épopée). 
Au Moyen-Âge, la dialectique et la rhétorique font partie du trivium, avec la
grammaire; le trivium et le quadrivium (arithmétique, géométrie, astronomie et musique)
constituent les sept arts libéraux enseignés dans les facultés des arts. Au XVIIe siècle, la
rhétorique commence à être dissociée de la logique (l'art de penser) et de la grammaire (l'art
de parler et d'écrire) par la modernité de la pensée cartésienne; elle n'est plus un art (une
pratique) et elle devient une théorie des figures de discours ou de style : elle est maintenant
réduite à une théorie des tropes, à une tropologie, à une rhétorique restreinte, alors qu'elle
avait été généralisée jusqu'à l'époque des collèges classiques. Au XVIIIe siècle, par Kant, et
au XIXe, par Hegel, la dialectique est « déplatonisée », avant d'être marxisée, par Marx,
Engels, Lénine et Staline : la politique moderne (ou postmoderne) est sans doute l'échec de la
dialectique des Anciens. 
Revenons à l'esthétique comme discours qui constitue et institue l'art comme art, la
littérature comme littérature. Pour l'esthétique, l'art a une essence, une valeur en soi, une
valeur d'usage; cette valeur (ou son concept ontologique), c'est la beauté comme synonyme de
vérité et de liberté; en somme, la beauté est un concept éthique avant d'être esthétique.
L'esthétique est à l'art ce que l'épistémologie est à la science : elle en est la réification, la
réduction à une chose, à un artefact. On distingue cinq esthétiques : 
1. Pour l'esthétique objective1, il y a une réalité extérieure à la pensée, une réalité
objective dont l'art (la littérature) est le reflet : plus le reflet est exact, plus il y a réflexion
passive ou active de la réalité par une œuvre, plus celle-ci est réaliste, plus elle a de la valeur.
À l'esthétique objective du contenu (thématique) conduisant au réalisme, correspond
l'esthétique objective de l'expression (stylistique) conduisant au formalisme. La forme
(l'expression) et le fond (le contenu) sont les catégories duelles fondamentales de l'esthétique
(objective). Le réalisme socialiste, c'est-à-dire la soi-disant esthétique marxiste est une
esthétique objective du contenu.
2. Pour l'esthétique positive, l'art est homologue (plutôt qu'analogue), comme sujet, à
l'objet qu'est le monde ambiant ou environnant. Le développement de l'art est alors le
développement conceptuel de l'histoire, de l'esprit, de la pensée. L'esthétique hégélienne - et a
fortiori l'esthétique aristotélicienne, contrairement à l'esthétique platonicienne (plutôt
objective) - est une telle esthétique positive en définissant l'art par un concept, par son propre

1
. Avner
Ziss. Éléments d'esthétique marxiste. Éditions de Moscou [surtout «Petit vocabulaire
esthétique», pp. 280-300.
1
concept (à réaliser ou à retrouver), et en séparant l'artistique et le politique tout en les
réunissant dans le spirituel (l'Esprit absolu). Pour Hegel, il y a une hiérarchie des arts, du
matériel au spirituel : l'art supérieur est l'art idéal et idéel, c'est l'art le plus éloigné du matériel
(la matière et la nature), c'est l'art le plus raisonnable et le plus spirituel; c'est la poésie.
Aux arts symboliques (la thèse) comme l'architecture, ont succédé les arts
classiques (l'antithèse) comme la sculpture et, enfin, les arts romantiques (la synthèse)
comme la poésie (musicale, théâtrale, littéraire). La poésie est elle-même hiérarchisée de
l'épique au dramatique en passant par le lyrique : en ce sens, l'opéra de Wagner est l'art
romantique par excellence. L'esthétique du jeune Lukacs (et de Goldmann) est elle aussi une
esthétique positive (fondamentalement hégélienne).
3. L'esthétique négative qui s'inscrit dans la dialectique négative d'Adorno et de
Horkheimer et qui est inspirée de la théorie critique de l'École de Francfort à laquelle les deux
appartenaient, repose sur une critique (kantienne) de la raison au profit d'une éthique du
jugement, mais elle n'accède pas au statut d'esthétique transcendantale du sublime comme
chez Kant. Pour Adorno, l'art a valeur de vérité parce qu'il est liberté et il est la négation de la
totalité (la réalité, la société, l'aliénation, le fascisme) qui est fausseté.
4. Pour l'esthétique subjective d'un Marcuse, l'art, comme subjectivité, a un potentiel
révolutionnaire de transformation de l'objectivité.
5. De Nietzsche à Lyotard et à Deleuze, se développe une esthétique affirmative, pour
laquelle l'art n'est pas intentions mais intensités : pouvoir d'affirmation de la libido, du désir,
de la force, de la volonté de puissance; cette esthétique s'oppose à la fois à l'esthétique
objective de Platon et à l'esthétique positive de Hegel, mais pas à l'esthétique négative et à
l'esthétique subjective. 
L'esthétique (objective ou positive) est la philosophie spontanée (naïve, non critiquée)
de la critique littéraire, qui est elle-même la philosophie spontanée de la littérature (réaliste ou
formaliste). L'esthétique se retrouve ainsi dans les trois illusions de la critique littéraire
dénoncées par Macherey : 

a. L'illusion empirique (ou naturelle) - l'illusion de l'induction, selon nous - prend


l'œuvre comme acquise et clôturée par l'ouvrage, comme un étant donné, comme un état de
fait; elle ne questionne pas le corpus et elle clôture le texte en réduisant la littérature à
l'écriture; elle explique l'œuvre par l'auteur individuel (l'écrivain) ou par l'auteur collectif (la
société, la classe, le groupe, le sexe). Le critique empiriste se fait le complice de l'écrivain en
suggérant que ce sont les auteurs et les œuvres qui font la littérature, alors que c'est la
littérature - l'art, la tradition, l'histoire, la critique - qui fait les auteurs et les œuvres.
b. L'illusion normative (ou virtuelle) - l'illusion de la déduction, encore selon nous -
corrige l'œuvre selon un modèle esthétique, éthique, idéologique; elle la soumet à une norme,
à un code, à un(e)mode; elle refait l'œuvre en la restreignant à une lecture idéologique, en
réduisant la littérature à l'idéologie. Expliquant l'œuvre par un lecteur naïf, le critique
magistrat (journaliste) se fait alors le maître de l'écrivain.
c. L'illusion interprétative (ou culturelle) actualise ou réalise les deux autres illusions en
une herméneutique qui met en œuvre les couples duels de catégories esthétiques ou
métaphysiques : fond/forme, intériorité/extériorité, inspiration/improvisation, etc. Elle
explique l'œuvre par l'œuvre, mais en postulant que l'œuvre à un sens (secret, caché) en soi et
que la lecture ne fait que le découvrir, le dévoiler, le révéler (ou le trahir); le sens se trouve
alors réduit à la signification. L'interprète se fait interprêtre, c'est-à-dire esclave ou disciple,
voire complice, de l'œuvre même, substituant l'explicitation (herméneutique dans sa genèse et
son exégèse) à l'explication (sémiotique), l'interprêtrise (psychologique) à l'interprétation
(métapsychologique).

2
L'Histoire littéraire 

Pendant très longtemps, les études littéraires se sont confondues avec l'histoire littéraire,
celle-ci consistant à raconter après coup ce qu'elle considère être la littérature, à en faire
l'historique; en France, après la Révolution, l'histoire littéraire s'est affairée à constituer un
ensemble d'écrits en littérature nationale et la littérature en un art, en établissant un corpus
d'œuvres connus et de chefs-d’œuvre reconnus, selon divers critères :
1. la langue écrite : le français et non d'autres langues parlées sur le territoire français;
2. l'époque : le Moyen-Âge, la Renaissance, le Classicisme et les Lumières avant la
Révolution et la Modernité depuis;
3. l'école (ou le courant);
4. le genre : la non-fiction et la fiction, le poème et le roman ou les autres formes
romanesques (nouvelle, conte), le théâtre, les écrits intimes ou autobiographiques, etc.;
5. le style : variable d'une œuvre ou d'un auteur à l'autre;
6. l'auteur lui-même : sa vie et son œuvre.

L'histoire littéraire cherche, à travers ces différents critères, à établir


un répertoire d'œuvres et un palmarès d'auteurs; elle fait donc l'inventaire ou la nomenclature
des œuvres et elle opère des classements : elle classe en tendances, en courants, en écoles, en
genres, en styles, en thèmes, en influences, etc. Pour l'histoire littéraire, l'objet des études
littéraires, c'est le corpus à constituer ou à reconstituer, à instituer, à ficher dans les annales et
les archives et dont il faut rendre compte dans des bibliographies et des monographies ou dans
des anthologies et des manuels. Pour l'histoire littéraire, la littérature est d'abord et avant tout
ce qui se retrouve à la bibliothèque ou ce qui doit s'y retrouver; c'est là qu'on la cherche et
qu'on la trouve. 

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