SÉDATION POUR LES

SOINS DENTAIRES
CHEZ LES ENFANTS :
CONSIDÉRATIONS
ÉTHIQUES
Gunilla KLINGBERG
DDS, PhD,
Senior consultant in paediatric
dentistry
Mun-H-Center

MOTS CLES
Odontologie pédiatrique
U ne petite fille de 7 ans est sur
votre fauteuil alors que vous avez
Sédation
Ethique identifié la présence d’une lésion
carieuse sur la première molaire per-
KEY WORDS manente droite. L’examen radiolo-
Paediatric dentistry gique révèle également au maxillaire
Sedation la présence de lésions nécessitant un
Ethics traitement sur les 2 e molaires lac-
téales. C’est un cas clinique fréquent
en odontologie pédiatrique. Lorsque
vous avez décidé de la nature des
traitements nécessaires, la question
que vous vous posez est : comment
réaliser ces soins ? Pour de nom-
breux dentistes, les soins chez les
enfants sont facteurs de stress. La
partie technique du soin est rarement
un problème. Par contre, les condi-
tions qui permettent d’accompagner
l’enfant tout au long de son soin
constituent une somme de difficultés.
Les dentistes ont souvent à faire à
des enfants qui ne coopèrent pas, et
la possibilité d’aider ces enfants pour
accepter les soins dentaires peut
devenir un réel défi. Les enfants et
les adolescents qui présentent un
état d’anxiété lié aux soins dentaires
ou des troubles du comportement,
constituent une grande proportion
des enfants qui relèvent d’une indica-
tion de sédation pour leurs soins den-
taires.

REALITES CLINIQUES Vol. 16 n° 3, 2005 pp. 221-230

 PEUR ET ANXIÉTÉ LIÉES
AUX SOINS ET PROBLÈMES
COMPORTEMENTAUX
Les enfants et les adolescents présen-
tent une très grande variabilité en âge,
compétence, maturité, personnalité,
tempérament et émotion, état de santé
générale, expérience, santé bucco-
dentaire, milieu familial, culture etc..,
tous ces facteurs étant susceptibles
d’influencer leur capacité à coopérer
pour permettre la réalisation de leurs
soins dentaires. Certains enfants sont
robustes et tolérants dans les situa-
tions de stress et ne sont pas prédis-
posés à présenter des problèmes lors-
qu’ils sont chez le dentiste, alors que
d’autres sont vulnérables et peuvent
nécessiter plus d’attention et de temps
pour se sentir à l’aise et coopérer lors
des soins dentaires.
Les problèmes de comportement ou
la peur sont fréquemment rencontrés
lors des soins dentaires, la prévalen-
ce variant en Europe de 3 % à plus
de 20 %. Il s s ont g éné rale men t
conf ondu s en un seu l con cept .
Cependant, par définition ils consti-
tuent différentes entités et les résul-
tats d’études transversales montrent
qu’elles ne peuvent être assimilées
les unes aux autres (13).
La situation clinique des enfants pré-
sentant un problème de gestion com-
portementale pendant les soins est
évidente et facilement prévisible ;
alors que la situation clinique des
enfants présentant un état de peur ou
d’anxiété peut varier considérable-
ment, entre une totale opposition et un
état de complète passivité silencieuse,
ces différences reflétant probablement
des différences dans les personnalités
et les étiologies de ces états d’anxiété.
Ainsi, si le dentiste ne se réfère qu’au
comportement ou à l’absence de
coopération, il peut sous estimer
l’existence d’un état d’anxiété et, de
ce fait, ne pas induire son traitement.
222
Les difficultés de coopération, comme
les états d’anxiété ou de peur liés aux
soins dentaires peuvent avoir des ori-
gines multifactorielles et l’existence
de plusieurs co-facteurs étiologiques
potentiels est discutée. Les facteurs
de risque mentionnés dans la littéra-
ture incluent un bas âge, l’existence
de peurs plus générales, les traits de
caractère, la présence de problèmes
neuro-psychiatriques, le niveau socio-
économique, la culture, l’éducation, et
l’existence d’un état d’anxiété liés aux
soins dentaires chez les parents (1, 3,
10, 13, 14, 15, 16, 18, 21, 25).
Le vécu de la douleur et d’expériences
négatives pendant les soins dentaires
sont considérés comme les principales
causes de problèmes comportemen-
taux et d’états d’anxiété ou de peur liés
aux soins dentaires (10, 16, 19). Ces
facteurs sont également considérés
comme pouvant être réduits ou préve-
nus par le dentiste. La douleur et
l’inconfort des soins sont très souvent
rapportés et les enfants ont souvent
des difficultés à distinguer ces deux
phénomènes. Il est essentiel que tous
les personnels soignants soient
convaincus de cette réalité de manière
à ce que tout soit mis en œuvre pour
prévenir la douleur et l’inconfort.
Les conditions d’indications de soins
dentaires sous sédation sont nom-
breuses et variées, comme le mon-
trent les autres articles de ce numéro.
Poser l’indication de sédation, im-plique
généralement de choisir entre la séda-
tion et les autres stratégies de prise en
charge. Une telle situation implique
d’analyser les indications et contre-indi-
cations des différentes méthodes, tout
en considérant les considérations
éthiques et les aspects légaux.
LA CONVENTION DES
NATIONS UNIES ET LES
DROITS DE L’ENFANT
La convention des Nations Unies sur
les droits de l’enfant existe depuis
1989 (22), et elle a été ratifiée par la
REALITES CLINIQUES Vol. 16 n° 3 2005
grande majorité des états du monde.
Il est important que tous les profes-
sionn els qui trava ille nt a ve c des
enfants, y compris les professionnels
en santé bucco-dentaire, soient en
ac cord avec c ette conv enti on.
L’essentiel de cette convention réside
dans la reconnaissance du fait que
les enfants ont des droits. L’enfant a
le droit d’être respecté et aussi d’être
protégé contre les risques pour sa
santé, contre les mauvais traitements
etc… De ce fait, l’enfant a le droit
d’être impliqué dans la prise de déci-
sion d es traitements qui le ou la
concernent, et son avis doit être res-
pecté. Dans ce contexte, l’âge de
l’enfant et son degré de maturité doi-
vent, bien sûr, être pris en considéra-
tion, mais même un très jeune enfant
doit être informé et peut d’une certai-
ne manière participer à ce choix.
Un autre principe important de cette
convention est celui du “meilleur inté-
rêt pour l’enfant” qui apparaît dans le
troisième article de la convention.
Toutes les décisions concernant une
situation dans laquelle un enfant est
impliqué doivent avoir pour finalité le
“meilleur intérêt pour l’enfant”. La
convention a eu un impact sur les
modalités d’accueil et de prise en
charge d’un enfant à l’hôpital, comme
par exemple au travers d’associations
ou d’organismes comme the Child
Friendly Healthcare Initiative (4, 20).
L’ÉTHIQUE BIOMÉDICALE
Les considérations éthiques sont
devenues une part importante du tra-
vail clinique pour les dentistes. Dans
les années 70, Thomas Beauchamp
et James Childress ont publié le
manuel des Principes d’Ethique Bio-
médicale, qui a ensuite été plusieurs
fois réédité (2). Ce manuel a eu une
grande influence sur les pratiques de
soins (5, 8, 23). Les auteurs ont décrit
différents principes éthiques, parmi
le sque ls quat re so nt co nsidé rés
comme centraux. Ils sont souvent
G. KLINGBERG
appellés le mantra de Georgetown
après son instauration à l’Université
de Georgetown à Washington D.C.
Ces quatre valeurs sont les principes
de l’autonomie, la non-malveillance,
le bienfaisance et la justice.
• Selon le principe de l’autonomie, la
personne doit avoir le droit de décider,
aussi longtemps que possible, dans les
domaines qui le ou la concernent. Ce
faisant, chacun doit également respec-
ter l’autonomie des autres. En soins
dentaires, le pré-requis à la prise de
décision du patient est une information
claire et correcte de la part du dentiste
sur le diagnostic qui a été posé et sur
le traitement qui est nécessaire. Une
personne a toujours le droit de refuser
un traitement, dans la mesure où elle
est compétente pour prendre cette
décision. Par ailleurs, une personne ne
peut pas solliciter la mise en œuvre
d’un traitement, dans la mesure où les
traitements doivent être réalisés dans
les règles de l’art. Le traitement doit
être administré ou réalisé par un pro-
fessionnel, qui, s’il n’est pas en accord
avec ce choix thérapeutique, n’est pas
obligé de le mettre en œuvre.
• Le principe de non malveillance
vient du serment d’Hippocrate, qui
précise que le médecin ne doit pas
nuire à son patient. Il pourrait sembler
que ce principe est facilement appli-
cable, et pourtant ce n’est pas le cas.
Dans certaines situations, les procé-
dures de soins peuvent devenir dou-
loureuses ou anxiogènes, ce qui, en
soi, constitue une limite au respect de
ce principe. Ces situations de douleur
provoquées au cours du soin sont
parfois rencontrées comme dans le
cas de l’injection anesthésique ou du
sondage parodontal et on peut consi-
dérer qu’elles ne sont pas en contra-
diction avec le principe de non mal-
veillance à la seule condition que le
patient (ou une personne référente)
ait donné son consentement pour le
recevoir et que ce traitement est bon
et va améliorer sa santé.
223
 Cependant, ces situations doivent
rester ponctuelles et isolées. Il est
essentiel que le dentiste mette tout en
œuvre pour contrôler l’apparition de la
douleur ou de l’inconfort. L’usage sys-
tématique de l’anesthésie locale, des
analgésiques systémiques, de la
sédation et l’adoption d’attitudes
empathiques dans la relation avec le
pati ent s ont in disp ensa bles a u
contexte du soin dentaire. Excepté si
la vie du patient est directement en
jeu, il est critiquable d’entreprendre
un traitement susceptible d’être dou-
loureux et inconfortable, sans essayer
de minimiser la souffrance du patient.
• Le principe de bienfaisance est un
concept très fort en santé. Il se rap-
porte à l’intérêt et au bien du patient
ainsi qu’à l’idée de veiller à ce que
l’on délivre un traitement. De nos jours,
il existe de nombreuses thérapeu-
tiques et de nombreuses procédures,
mais toutes ne sont pas nécessaire-
ment évaluées. L’idée d’évaluer les
traitements dentaires en leur appli-
quant les méthodes basées sur les
preuves est l’un des moyens de
s’assurer que l’on travaille en respec-
tant le principe de bienfaisance. En
tant que professionnel, le dentiste a la
responsabilité de faire évoluer ses
compétences et ses connaissances en
fonction des avancées de la science,
mais il doit aussi savoir être critique
vis-à-vis de nouvelles méthodes et
s’assurer qu’elles sont bénéfiques à
ses patients.
• Le principe de justice implique que
tous les individus ont les mêmes droits
à l’accès aux soins dentaires, et que
ces soins doivent être les mêmes, s’ils
ont les mêmes besoins, indépendam-
ment de leur âge, de leur sexe, de leur
position sociale, de leur niveau d’édu-
cation, de leur religion et d’autres cri-
tères non médicaux. Pour des raisons
évidentes, ce principe est très difficile-
ment respecté dans certains pays, du
fait de l’absence d’un circuit de distri-
bution des soins, et/ou du fait du coût
224
des soins dentaires. Ainsi, la société
doit assurer l’accès aux soins den-
taires aux groupes de patients ayant
des besoins spécifiques, comme les
patients handicapés.
CONSENTEMENT ÉCLAIRÉ
De tous temps, les habitudes cultu-
relles ont conféré une forte autorité aux
professionnels de santé comme les
médecins et les dentistes. L’approche
paternaliste qui se résumait par la
phrase “le docteur sait ce qui est bon”
est désormais remise en question et
remplacée par l’idée que le patient a
plus de choses à dire sur le traitement
qu’il va recevoir. Aujourd’hui, le patient
a une forte position dans tous les
domaines de la santé. Malgré tout, il
est important de considérer qu’il y a
des différences culturelles, à la fois
entre les différents pays d’Europe,
mais également au sein d’une même
population, du fait de l’âge, la religion,
l’ethnie etc…Traiter les enfants et les
adolescents diffère du fait de traiter des
adultes (8). Dans tous les cas, les rela-
tions entre les personnes qui sont
impliquées dans un traitement sont
assimilables à un triangle réunissant le
jeune patient, les parents et le dentiste
(fig. 1). La même situation peut être
décrite lorsqu’il s’agit de traiter un adul-
te qui n’est pas autonome et qui a
besoin de l’aide d’une tierce personne.
Une personne adulte, autonome est
généralement capable de décider
pour elle-même. Lorsqu’on soigne un
a dulte, le respect du prin cipe d e
l’autonomie est souvent prioritaire par
rapport au principe de bienfaisance.
Les enfants, eux, n’ont pas de libre
arbitre, ils appartiennent à une unité
sociale au sein de laquelle les déci-
sions finales sont prises par les
parents. Il est fréquent que les parents
e t le dentiste, dans un commu n
accord, décident de négliger le princi-
pe d’autonomie au profit du principe
de bienfaisance. C’est la raison pour
laquelle la communication est impor-
REALITES CLINIQUES Vol. 16 n° 3 2005
tante au sein du triangle. Si le dentiste
peut décrire pour l’enfant ce qui doit
être fait et pourquoi cela doit être fait,
l’enfant peut prendre part à la déci-
sion, et le dentiste peut recevoir un
consenteme nt, même d’un jeune
enfant. La difficulté réside dans le fait
de délivrer une information appropriée
à l’âge en utilisant un vocabulaire et
un imaginaire adaptés, qui permet-
tront à l’enfant de se projeter dans une
situation de sécurité et de confort.
INTÉGRITÉ
ET AUTONOMIE
Par intégrité, on entend le droit d’avoir
un espace intime protégé contre l’inva-
sion d’autrui, c'est-à-dire un espace
privé où la dignité humaine est centra-
le. Tout personne a défini son intégrité
ou sa dignité, c’est un droit de naissan-
ce, mais qui peut être transgressé par
autrui. D’autres individus peuvent
envahir cet espace sans y être autori-
sés, sans respecter la personne. Un
exemple de cette situation en soins
dentaires est rencontré lorsque, en
cours de soins, absorbé par la techni-
cité de l’acte, le dentiste oublie de
regarder le patient et prend une déci-
sion importante, comme par exemple
de dévitaliser ou d’extraire une dent
sans consulter ce patient. Le dentiste
doit reconnaître le patient en tant que
personne, qu’il doit respecter et avec
laquelle il doit communiquer.
Par autonomie, on entend le droit
pour une personne de décider pour
elle-même, le droit de décider d’entre-
prendre un traitement ou pas, le droit
d’être une personne compétente.
L’autonomie est également un moyen
de préserver son intégrité. L’autono-
mie n’est pas toujours présente au
cours de la vie (fig. 2). L’autonomie
s’acquièt progressivement au cours
du développement de l’enfant et l’évo-
lution de la personne. Pour être auto-
nome dans ses choix, il faut une cer-
taine capacité de raisonnement. Un
jeune enfant, une personne âgée, une
G. KLINGBERG
personne malade, une personne pré-
sentant une déficience mentale n’est
pas capable de ce degré de raisonne-
me nt. Dans certaines situations,
l’autonomie peut être perdue transitoi-
rement, comme lorsque le patient est
endormi sous anesthésie générale, ou
encore elle peut être réduite lorsque
sa vigilance est altérée par une mala-
die mentale ou des troubles cognitifs.
L’autonomie peut également être vio-
lée comme lorsqu’un soignant réalise
un traitement pour lequel le patient n’a
pas donné son consentement.
Lorsqu’on s’adresse à des très jeunes
patients, ou à des patients dépen-
dants, il est essentiel qu’une tierce
personne référente, agissant comme
un aidant substitut d’autonomie, puis-
se fournir le consentement (fig. 2 et
3). Ce n’est pas équivalent à la situa-
tion où l’on se réfère aux propres
parents d’un enfant pour obtenir un
consentement de traitement. La tierce
personne-substitut doit considérer Fig. 1 - Représentation schématique
toutes les perspectives offertes au de la relation triangulaire existant
patient lorsqu’on lui propose un traite- entre un enfant, ses parents et les
ment. Cette personne doit s’interro- soignants. Cette relation peut être
décrite pour une personne adulte
ger, sur ce que serait le choix de dépendante (personne handicapée,
l’enfant s’il était capable de com- malade ou personne âgée) une ou
prendre ce qu’on lui propose. De des tierces personnes référentes
nombreux parents peuvent être de et les soignants.
Enfant
Parents Soignants
225
 Intégrité
Substitut
Autonomie
2 3
Fig. 2 - Toute personne a une
intégrité (dignité) alors que le niveau
d’autonomie (auto-détermination)
varie au cours de la vie (représentée
ici sur l’axe horizontal, de 0 à 100).
L’autonomie augmente
progressivement au cours de
l’enfance, et peut décroître lors du
vieillissement. Quand l’autonomie
d’une personne est réduite ou altérée,
il est indispensable qu’une autre
personne supplée à ce manque
d’autonomie. Dans la situation
du soin dentaire, ce rôle peut être
tenu par un parent, un proche,
un soignant ou le praticien.
Fig. 3 - Certaines personnes, comme
les patients qui présentent des
troubles cognitifs, une déficience
ou une maladie mentale ne pourront
jamais atteindre un niveau total
d’autonomie. Dans ces cas, il est
particulièrement important qu’une
tierce personne essaie d’évaluer quel
choix la personne dépendante aurait
fait si elle avait pu bénéficier d’une
totale autonomie. Ces patients
nécessitant toujours une aide pour
accepter un traitement, la sédation
peut être cette aide.
226
bons substituts, et cependant dans de
nombreuses situations, il peut y avoir
conflit d’intérêts entre les parents et
l’enfant. Par exemple, dans une situa-
tion où un enfant serait initalement
opposant à la réalisation d’un traite-
ment, les parents peuvent préférer
que l’enfant soit traité rapidement,
pour des raisons d’organisation fami-
liale ou de déplacement. Cependant,
ce n’est pas nécessairement la
meilleure solution pour l’enfant qui, lui,
aurait besoin de plus de temps pour
s’adapter à ce qui lui est demandé
pour recevoir les soins. Le praticien,
dans ce cas, doit prendre en compte
l’intérêt de l’enfant, et ne doit pas pré-
cipiter les choses simplement pour
répondre aux besoins des parents. Le
traitement (sa finalité et ses modalités)
doit viser à servir au mieux les intérêts
de l’enfant.
ÉVALUER LA NÉCESSITÉ
DES SOINS
Il y a parfois conflit entre les différents
principes éthiques. Ainsi, un enfant
non coo pérant qu i p rés ente d es
lésions carieuses peut nécessiter la
réalisation de traitements conserva-
teurs qu’il n’est pas prêt à accepter.
Dans ce cas, il y a conflit entre les
prin cipe s d u bén éfice appo rt é à
Substitut d’autonomie
l’enfant par le traitement et le principe
du respect de l’autonomie de l’enfant
qui ne veut pas recevoir ce traite-
ment. Dans ces cas de conflits entre
deux principes différents, la règle
générale est de s’orienter vers la
décision qui satisfait la majorité des
principes et des individus concernés.
Le dentiste doit alors mesurer la gra-
vité du diagnostic, relativiser le besoin
de traitement, et peser les consé-
quences possibles à une abstention
ou au report du traitement. Il est
essentiel que la prise de décision
implique que, sur le plan de l’éthique,
le traitement et les procédures qui
permettent sa réalisation soient béné-
fiques pour l’enfant, dans une pers-
pective à long terme. Si le praticien
doit choisir entre deux décisions,
l’alternative qui garantit le bénéfice de
l’enfant à long terme doit être privilié-
giée aux dépens de l’alternative qui
fournit un résultat technique à court
terme (réalisation du soin), mais qui se
révèlera contre-productive à long
terme (conséquences sur le dévelop-
pement psychologique de l’enfant qui
aura été contraint). En odontologie,
rares sont les situations où la vie de
l’enfant est en danger du fait de l’exis-
tence d’une pathologie dentaire (17),
et dans la plupart des cas, il n’est pas
REALITES CLINIQUES Vol. 16 n° 3 2005
utile de précipiter un traitement. Bien
au contraire, le fait d’arrêter de sollici-
ter l’enfant et de prendre le temps de
s’interroger sur les différentes maniè-
res de gérer la situation est souvent
réalisable et peut s’avérer extrême-
ment utile dans une meilleure perspec-
tive de résultats à long terme (6, 7).
Il n’est guère acceptable d’imposer
une contrainte physique et morale à
un enfant pour réaliser un soin à
visée thérapeutique, comme un scel-
lement des sillons, alors que la réim-
plantation immédiate d’une incisive
centrale permanente luxée impliquera
nécessairement un geste immédiat,
malgré les protestations initiales de
l’enfant. Dans cette dernière situa-
tion, la réimplantation est la meilleure
solution et le pronostic à long terme
dépend directement de la rapidité de
l’intervention. Cependant, le dentiste
doit, dans tous les cas, réunir le maxi-
mum de conditions pour aider l’enfant
à coopérer et optimiser le confort de
l’intervention. Ces conditions incluent
le contrôle de la douleur et de l’anxié-
té , ce q ui pe ut e n cons éque nce
nécessiter le recours à la sédation. La
sédation peut réduire la douleur et
l’anxiété et aider un enfant à coopérer
dans les situations d’urgence.
ÉVALUER LA NÉCESSITÉ
DE LA SÉDATION
Différentes publications ont rapporté
l’impact de la sédation dans le res-
pect des principes de non-malveillan-
ce et de bénéfice (9, 11, 12). La séda-
tion, sous ses différentes formes, a
des effets antalgiques et anxiolytiques
qui facilitent la réalisation des soins
dentaires chez l’enfant (9,12). Elle
permet également d’obtenir des effets
bénéfiques à long terme sur la réduc-
tion du stress et les difficultés com-
portementales liées aux soins den-
taires (24).
Lorsque l’on doit choisir entre la séda-
tion pharmacologique ou les tech-
G. KLINGBERG
niques comportementales, la raison
éthique doit permettre de considérer
tous les avantages et les inconvé-
nients des différentes possibilités de
traitement, en se plaçant du point de
vue de l’enfant, des parents, du den-
tiste et de la société. Dans certaines
situations, les techniques comporte-
mentales, appliquées seules, ne per-
mettent pas de respecter ces consi-
dérations éthiques.
Par exemple, l’utilisation de contrain-
tes physiques constituent une viola-
tion à la fois des principes d’autono-
mie et d’intégrité, et questionnent
également sur leurs conséquences en
te rme de non -malve illance et de
bénéfice (7). Un enfant responsable
et autonome, n’accepterait probable-
ment pas d’être enroulé dans une
couverture et contraint à maintenir sa
bouche ouverte avec un cale bouche.
Ces modalités d’intervention sont
L’ E S S E N T I E L
La capacité à coopérer de l’enfant lors de soins dentaires se heurte sou-
vent à des problèmes de gestion comportementale, d’état de peur ou
d’anxiété.
La douleur et l’inconfort, qu’il distingue mal, doivent faire l’objet de
toutes nos attentions pour limiter et expliquer ces phénomènes.
Les grands principes éthiques qui encadrent notre pratique soignante
sont regroupés dans le «Mantra de Georgetown» : principe de l’autono-
mie, de non malveillance, de bienfaisance et de justice.
La difficulté réside dans le fait de délivrer une information appropriée à
l’âge en utilisant un vocabulaire et un imaginaire adaptés afin de
recueillir le consentement de l’enfant.
Dans les situations d’urgence, la sédation peut réduire la douleur et
l’anxiété de l’enfant et l’aider à coopérer.
Elle peut également permettre, en pratique courante et sous réserve d’en
avoir la compétence, d’obtenir à long terme des effets bénéfiques sur la
réduction du stress et des difficultés comportementales associées aux
soins dentaires.
227
 contre-productives pour le développe-
ment de l’enfant. Par ailleurs, différer
le traitement d’une pathologie infec-
tieuse peut également relever de la
malveillance. De même, la sédation
peut également être remise en ques-
tion si les besoins en soins sont mul-
tiples et si elle doit être fréquemment
répétée sur une courte période, parti-
culièrement chez les très jeunes
enfants. Dans toutes ces situations,
l’anesthésie générale constituera une
alternative qui permettra au praticien
de réaliser tous les soins en une
seule fois. De même, les résultats
d’une administration sédative ne sont
pas toujours prédictibles, et la séda-
tion peut co-exister avec une situation
de malveillance si le soin est réalisé
alors que le niveau de coopération est
insuffisant malgré la sédation.
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228
CONCLUSION
Pour un enfant, qui ne présente pas
de contre-indication d’ordre médical,
la séda tio n pe ut êt re co nsidé rée
comme une modalité permettant de
réaliser un soin de bonne qualité dans
des conditions de sécurit é et de
confort, lorsque les indications sont
respectées. Si le dentiste connaît et
respecte la convention des Nations
Unies sur les droits de l’enfant, il peut
fournir une bonne information, à la fois
à l’enfant et à ses parents, de manière
à s’assurer qu’il a leurs consente-
ments respectifs. S’il a la connaissan-
ce et la compétence pour soigner les
enfants et pour administrer des procé-
dures sédatives, la sédation est l’un
des moyens qui peut aider au respect
de la convention des droits de l’enfant.
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Scand 2003 ; 61 : 178-83. SE 413 90 Göteborg
Suède
email : gunilla.klingberg@vgregion.se

RÉSUMÉ
SÉDATION POUR LES SOINS DENTAIRES CHEZ LES ENFANTS : CONSIDÉRATIONS
ÉTHIQUES
La sédation, lorsqu’elle est administrée dans le but de réaliser des soins dentaires dans des conditions de confort
et de sécurité peut être une aide efficace à la fois pour le praticien et pour l’enfant. Indépendamment
de la connaissance des propriétés pharmacologiques des différents sédatifs, le dentiste doit maîtriser les conditions
et connaître les patients pour lesquels la sédation peut être indiquée. L’indication de sédation est généralement posée
lorsque le plan de traitement dentaire a été établi. Lors de cette prise de décision, des considérations éthiques
s’imposent.
Ces considérations impliquent l’évaluation de l’autonomie du patient, le respect de sa personnalité, l’information
simultanée du jeune patient et de ses parents, le consentement des parents, ainsi que celui de l’enfant si son âge le
permet. Le praticien doit tendre vers la planification d’un plan de traitement qui offre un bénéfice à long terme pour
l’enfant. Le temps passé à aider l’enfant à coopérer pour ses soins dentaires et à se sentir en sécurité et à l’aise
pendant le traitement constitue un investissement bénéfique pour le futur. Le risque de développer un état anxieux lié
aux soins dentaires s’en trouve probablement réduit, et l’enfant se sent certainement plus apte à consulter
régulièrement, condition qui permettra d’optimiser sa santé orale dans une perspective à long terme.

G. KLINGBERG 229
 ABSTRACT
SEDATION FOR DENTAL TREATMENT IN CHILDREN :
ETHICAL CONSIDERATIONS
Sedation, when it is administered with the aim of performing dental treatment under comfortable and secure
conditions, may be a useful aid both for the dentist and for the child. In addition to the knowledge of the
pharmacological properties of the various sedatives, the dentist must master the conditions and the patients for whom
the sedation may be indicated. The indication for sedation is generally decided upon when the treatment plan has been
established. When this decision is made, certain ethical considerations enter the equation. These conditions imply an
evaluation of the patient’s autonomy, the respect for his/her personality, the information simultaneously derived from
the young patient and the parents, parental consent, as well as that of the child if his/her age permits it. The dentist
must aim for a treatment plan that offers long-term benefit for the child. The time passed in helping the child cooperate
with his/her dental treatment and feeling safe and at ease during treatment is a beneficial investment in the future. The
risk of developing anxiety related to dental treatment is probably reduced and the child certainly feels more likely to
consult the dentist regularly, which facilitates better long-term oral health.

RESUMEN
SEDACIÓN PARA LAS CURAS DENTALES EN LOS NIÑOS :
CONSIDERACIONES ÉTICAS
Cuando la sedación es administrada con el fin de realizar cuidados dentales en condiciones de comodidad y
seguridad, puede ser una ayuda eficaz a la vez para el dentista y para el niño. Independientemente del conocimiento
de las propiedades farmacológicas de los diferentes sedativos, el dentista debe controlar las condiciones de
administración, y conocer a los pacientes para los cuales la sedación se puede indicar. La sedación se plantea
generalmente cuando se ha establecido el plan de tratamiento dental. Durante esta toma de decisión se imponen
ciertas consideraciones éticas.
Dichas consideraciones implican la evaluación de la autonomía del paciente, el respeto de su personalidad, la
información simultánea del joven paciente y de sus padres, y el consentimiento de éstos, así como el del niño si su
edad lo permite. El dentista debe orientarse hacia la planificación de un plan de tratamiento que ofrezca un beneficio a
largo plazo par el niño. El tiempo que se tome para ayudar al niño a cooperar en sus curas dentales y sentirse cómodo
y en seguridad durante el tratamiento, constituye una inversión benéfica para el futuro. El riesgo de desarrollar un
estado ansioso relacionado con las curas dentales seguramente se verá reducido y el niño estará más apto a
consultar regularmente, condición que permitirá optimizar su salud oral en una perspectiva a largo plazo.

REALITES CLINIQUES Vol. 16 n° 3 2005

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