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А.В.

Колмогорова

Стилистика французского языка

учебно-методическое пособие

Красноярск 2015
Министерство образования и науки РФ
ФГАОУ ВПО «Сибирский федеральный университет»

А.В.Колмогорова

Стилистика (французский язык)

учебное пособие

Красноярск 2015
УДК 85 Печатается по разрешению
ББК 85.14 редакционно-издательского
К 60 отдела СФУ
ISBN протокол № от 2015 г.

Рецензенты:
Дашкова С.Ю., к.ф.н., доцент, доцент кафедры французской филологии
ФГБОУ ВПО «Кемеровский государственный университет»
Комарова А. В., к.ф.н., доцент, заведующий кафедрой романских языков
Тульского государственного педагогического университета им.
Л.Н. Толстого

Колмогорова А.В.
Стилистика французского языка: учебное пособие. Красноярск: РИО
СФУ, 2015. 96 с.

Учебно-методическое пособие предназначено для студентов язы-


ковых факультетов, изучающих французский язык. В пособии представ-
лен краткий курс лекций, теоретический вопросы для обсуждения на се-
минарских занятиях, семинарские задания, расширенная библиография,
в том числе – сайтография, по основным темам курса.

УДК 85
ББК 85.14
К 60
ISBN

© Сибирский федеральный университет, Красноярск, 2015


СОДЕРЖАНИЕ

Введение…………………………………………………………………….…. 4
Курс лекций……………………………………………………………….…... 6
Задания к семинарским занятиям.………………………………………….. 55
Тексты для анализа………………………………………………………….. 58
Тестовые задания…………………………………………………………….. 83
Вопросы к коллоквиумам…………………………………………………… 91
Вопросы к зачёту….………………………………………………...……….. 92
Методические рекомендации………………………………………………. 93
Список литературы……………………………………………………..…… 95
ВВЕДЕНИЕ

Дисциплина «Стилистика (французский язык)» ориентирует на под-


готовку к лингводидактической, переводческой, коммуникативно-
консультативной, информационно-лингвистической и научно-
исследовательской профессиональной деятельности, ее изучение способ-
ствует решению следующих типовых задач профессиональной деятельно-
сти:
в области лингводидактической профессиональной деятельности:
• использование учебно-методических материалов, современных
информационных ресурсов и технологий;
в области переводческой деятельности:
• обеспечение межкультурного общения в различных професси-
ональных сферах;
• выполнение функций посредника в сфере межкультурной
коммуникации;
в области коммуникативно-консультативной деятельности:
• участие в деловых переговорах, конференциях, симпозиумах,
семинарах с использованием нескольких рабочих языков;
• применение тактик разрешения конфликтных ситуаций в сфере
межкультурной коммуникации;
в области информационно-лингвистической деятельности:
• обработка русскоязычных и иноязычных текстов в производ-
ственно-семинарских целях;
• экспертный лингвистический анализ звучащей речи и пись-
менных текстов в производственно-семинарских целях;
• применение средств информационной поддержки лингвисти-
ческих областей знания;
в области научно-исследовательской деятельности:
• выявление и критический анализ конкретных проблем меж-
культурной коммуникации, влияющих на эффективность межкультурных
и межъязыковых контактов, обучения иностранным языкам;
• участие в проведении эмпирических исследований проблем-
ных ситуаций и диссонансов в сфере межкультурной коммуникации;
Целью курса «Стилистика (французский язык)» является обучение
студентов основным функционально-стилистическим разновидностям со-
временного французского языка и методам их анализа.
1.2. Задачи изучения дисциплины.
Задачи курса:
1) сформировать у студентов понятийный аппарат стилистики;

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2) ознакомить с основными тенденциями и перспективами разви-
тия стилистики французского языка;
3) сформировать семинарские навыки и умения стилистического
анализа текстов различной жанровой и функциональной принадлежности;
4) сформировать коммуникативно-прагматические компетенции
для успешного овладения иностранным языком во всех его функциональ-
но-стилистических разновидностях.

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КОНСПЕКТ КУРСА ЛЕКЦИЙ
Лекция 1. «Introduction à la stylistique»
Il est évident que la stylistique est la science qui s’occupe du problème du
style. Les dictionnaires étymologiques nous apprennent que le mot style, apparu
au XVI siècle, est le calque du latin stylus. Stylus désignait tout objet en forme
de tige pointue (un pieu, par exemple),et plus particulièrement le poinçon qui
permettait d’écrire sur les tablettes de cire. Puis, par métonymie, le mot a
designé la manière d’écrire et les qualités de l’expression. En ce qui concerne le
mot français, les dictionnaires actuels montrent très bien comment, réservé
d’abord à la manière de s’exprimer par le langage, il a été utilisé aussi pour les
arts et a fini par qualifier notre manière d’agir et de vivre. Il va de soi que la
stylistique s’occupe du style сomme aspect de la langue. Mais entre tous ces
emplois du mot style il y a un traît commun: il s’agit toujours d’une certaine
manière d’agir (parler, écrire, se comporter, s’habiller) qu’une personne
choisisse entre les autres possibles dans cette situation afin de faire montrer ses
attitudes, ses intérêts et tenant en compte ses buts et ses attentes. L’activité
langagière (activité de parler et d’écrire) pose aussi le problème du choix devant
une personne qui veut s’exprimer à l’aide de la langue: «Chaque fois que nous
avons quelque chose à dire la langue nous offre plusieurs façons différentes de
le dire. Tout le problème du style est là», – écrivait P. Guiraud. Alors, on peut
déterminer le style d’un énoncé – par ce dérnier mot on désigne toute manière
de s’exprimer à l’aide du langage – comme ensemble de ses qualités formelles
qui résulte du choix qu’on fait entre ces moyens d’expression que la langue
dispose, suivant le domaine de vie, les conditions dans lesquelles se réalise la
communication et la personnalité, le status social du sujet parlant. On
comprend sous le style du texte l’ensemble encore plus global des qualités
formelles des énoncés qui font partie de ce texte. Enfin quand on parle de la
valeur stylistique d’une unité de la langue on a en vue le style des textes et
des énoncés dans lesquels cette unité est employée le plus souvent et dont
elle porte empreinte au niveau associatif des sujets parlants.
Il faut dire que les linguistes ne sont pas d’accord sur le problème d’objet
d’études de la stylistique et le problème du nombre et du caractère de ses
branches. Il faut préciser que ces deux problèmes sont étroitement liés : le
caractère de la subdivision de la stylistique en branches découle du point de vue
du linguiste sur ce que cette science doit étudier. Ainsi Z.I. Khovanskaïa croit
que la stylistique étudie les moyens de la langue du point de vue de leurs couleur
et fonction stylistique et en plus les composantes de l’œuvre littéraire ou bien
tout l’ensemble de l’ œuvre littéraire du point de vue de leurs fonctions
stylistique et estétique. En partant de ce double objet ce linguiste distingue deux
branches de la stylistique: stylistique linguistique dont l’objet est les moyens de
la langue du point de vue de leurs couleur et fonction stylistique et la stylistique
littéraire dont l’objet est les composantes de l’œuvre littéraire ou bien tout

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l’ensemble de l’ œuvre littéraire du point de vue de leurs fonctions stylistique et
estétique. La première embrasse les problèmes suivants: l’étude des ressourses
stylistiques de la langue, l’étude des styles fonctionnels, l’étude de la variation
stylistique des moyens de la langue au cours de leur actualisation et l’étude
comparative des potentiels stylistiques de différentes langues. Alors que la
stylistique littéraire s’occupe de l’étude des procédés stylistiques, de l’étude de
différents styles qui sont propres à la littérature même (dite «les belles lettres»)
et du problème des méthodes d’analyse des œuvres littéraires. Autre stylisticien
russe K.A. Dolinin répartit presque le même cercle de problèmes entre quatre
branches dites: 1) «stylistique déscriptive» qui étudie les ressourses stylistiques
de la langue; 2) «stylistique fonctionnelle» qui traîte les particularités des textes
appartenants à tel ou tel style fonctionnel; 3) «stylistique du langage individuel»
(dans la tradition française «stylistique génétique») qui s’occupe du problème de
l’actualisation du potentuel stylistique des unités de la langue dans un texte
concret produit par un auteur où bien dans tous les textes dans leur totalité
appartenant à cet auteur; 4) «stylistique comparée» qui cherche à determiner des
façons typiques d’organiser un énoncé dans une situation typique dont une
langue se sert en le comparant avec une autre langue.
М.К. Морен и Н.Н. Тетеревникова en determinant la stylistique comme
branche de la philologie ayant pour objet l’étude et l’emploi des faits de la
langue servant à exprimer une idée selon les circonstances de l’énoncé en
distigue deux branches: stylistique pratique qui enseigne l’art de bien écrire et de
bien parler et stylistique déscriptive qui étudie, premièrement, les différents
styles de la langue et, deuxièmement, la valeur stylistique des faits de la langue.
En résumant on peut dire que la stylistique s’interesse au trois problèmes
essentiels: 1) la typologie et les particularités de différents régistres de la langue
(styles fonctionnels); 2) la valeur stylistique des faits de la langue; 3)
l’actualisation du potentiel stylistique des faits de langue dans des textes – étude
des procédés stylistiques et de la variation stylistique y joue un grand role.
La stylistique a reçu un riche héritage de la réthorique qui étant née comme
science en Antiquité était la première à s’occuper de l’étude du style. Pour les
greques et les romains la réthorique était un art de parler au publique, d’argumenter
son opinion, d’influencer les autres à l’aide des paroles, de se faire entendre.
La rhétorique classique reliait le discours à trois situations fondamentales
qui déterminaient trois genera dicendi:
 L’orateur défend ou attaque quelqu’un à cause d’un acte commis dans le passé,
pour persuader de l’innocence ou de la culpabilité: c’est le genre judiciaire.
 Il s’adresse à une assemblée afin de la persuader de prendre une décision
qui concerne l’avenir: c’est le genre délibératif.
 Il vante les mérites ou critique les défauts d’une personne ou institution:
c’est le genre épidictique.
Parmi les réthoriciens les plus célèbres on peut nommer Aristote, Virgile,
Cicéron. Il est à noter que c’est l’étude des tropes et des figures qui attirait le plus
attention des réthoriciens antiques. Les notions même de la méthaphore et de la

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méthonymie prennent leur source à cette époque-là. Il faut dire que la théorie des
tropes et des figures avait été si bien élaborée par les réthoriciens antiques que les
stylisticiens d’aujourd’hui s’en servent comme de base dans leurs théories à eux.
L’ouvrage dont l’influence sur la stylistique dépasse en beaucoup les
autres est La Réthorique d’Aristote où il postule que l’organisation de tout
énoncé et le choix des moyens de la langue dépend du but du sujet parlant, des
circonstances de la communication et du type de publique auquel on s’adresse.
Aristote explique le but de son autre ouvrage La Poétique de la manière suivante:
définir «la façon dont il faut composer les histoires si l’on veut que la poésie soit
réussie». Il distingue quelques espèces de l’art poétique: l’épopée et la poésie
tragique, comme aussi la comédie, l’art du dithyrambe et, en partie, l’art de la
flûte et de la cithare. C’est la tragédie qui selon Aristote est le genre le plus
estimé occupant la plus haute place sur son echelle des genres.
Il faut ajouter que c’était Virgile (à l’image)
qui le premier a dressé un schéma des styles de la
langue. Il en distigue trois: le style neutre (stylus
mediocrus) pour parler du travail du laboureur, le
style épique (gravis stylus) pour décrire les
exploits des héros et le style simple (humilis
stylus) pour la vie de tous les jours.
Le vif intérêt pour les problèmes du style
renaît au XVII s. C’est surtout la question de la
norme qui provoque des disputes. Il faut citer les
noms de François de Malherbe et de son
succésseur Claude Favre de Vaugelas qui sont
associés au purisme français. Malherbe se
prononce contre l’emploi des mots simples dans la haute poésie. Il tend à
purifier la langue poétique considérée comme le meilleur échantillon et le trésor
de la langue nationale. Vaugelas dans son ouvrage Remarques sur la langue
française cherche à déterminer les règles et les critères du bon usage. Il se pose
pour but de fixer le style noble qu’il comprend comme «la façon de parler de la
plus saine partie de la Cour». Vaugelas proteste contre tout emploi stylistique
individuel et même contre la notion du style individuel dans la littérature.
Encore un nom à citer c’est Nicolas Boileau dont l’ouvrage l’Art poétique est
devenu manifeste du classicisme. Boileau définit les genres littéraires, les styles
inséparables de ces genres et le choix du lexique, des structures syntaxiques, des
moyens de composition, des tropes et des figures propres à chacun de ces genres.
Mais c’est surtout le XVIII siècle qui raffine sur le classement des styles. Si
Voltaire distingue, dans son Dictionnaire philosophique, le style simple et le
style relevé, Ferraud dans la préface de son Dictionnnaire critique distingue les
styles «polémique, critique, satirique, badin, plaisant, comique, marotique,
bourlesque». Au XIX sciècle ce sont surtout les problèmes de la langue littéraire
qui provoquent des discussions les plus vives. Une vraie bataille est livrée entre
les classiques et les puristes qui s’appliquent à limiter le choix des moyens

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d’expression par des règles tyranniques, et les écrivains progressistes, réalistes et
romantiques, qui réclament la liberté de s’exprimer et tendent à renverser les
barrières entre la langue litttéraire et la langue courante.
Il est à souligner que la stylistique en tant que branche spéciale de la
philologie est l’œuvre du XX s. C’était Albert Séchéhaye qui en a proclamé le
besoin le premier. Mais la conception de cette nouvelle branche n’a été formulée
que par le représentant de l’école saussurienne Charles Bally dans son ouvrage
Traité de la stylistique française publié en 1909. Les traits caractéristiques de sa
théorie sont: 1) il exclut de la sphère d’intérêt de la stylistique la langue des belles
lettres qui selon Bally est l’objet d’étude de la critique littéraire; 2) les stylisticiens
doivent se concentrer exclusivement sur le français tel qu’on le parle (le français
parlé); 3) c’est le contenu affectif des faits d’expression du langage que doit
étudier la stylistique; 4) la stylistique est essentiellement synchronique c’est à dire
cette science est appelée à étudier les faits d’expression dans le cadre d’une seule
époque. La notion-clé de la théorie de Bally est l’affectivité. En parlant de la
nature de la communication langagière Bally précise que le sujet parlant donne au
mouvement de son esprit tantôt une direction intellectuelle, objective et logique,
tantôt il y joint des éléments affectifs à doses variables.
Comme il n’existe presque pas d’emplois de la langue privés de toute
affectivité et purement intellectuels c’est l’étude des caractères affectifs des faits
de la langue qui doit préocuper le stylisticien. Il distingue deux espèces des
caractères affectifs des faits de la langue (аффективные свойства языковых
единиц): 1) caractères affectifs naturels qui font partie du fait de la langue lui-
même et sont inséparables de son sens; Bally parle de trois formes de réalisation
de ces caractères: intensité affective (étonné et ebahi), valeur affective (acteur et
cabotin) et valeur estétique qui ne se réalise que dans la langue des belles lettres et
c’est porquoi cette valeur selon Bally est hors du sphère d’activité de la stylistique;
2) effets par évocation qui ne sont pas liés au contenu sémantique du fait de la
langue et ont un caractère socio-symbolique parce qu’ils sont associés aux
certaines situations, circonstances de communication. Encore une idée précieuse
de Bally c’est la nécéssité de la catégorie de la norme (il ne s’agit pas de la langue
littéraire en tant que la norme du bon usage mais d’une catégorie plus generale et
conceptionnelle) servant du point de départ pour l’évaluation des caractères
affectifs. Ainsi Bally en distigue deux: la premiere, mode d’expression intellectuel
et logique (le langage abstrait privé de tout affectivité), sert à évaluer les
caractères affectifs naturels, et la deuxième, la langue commune ou l’expression
usuelle, qui est la façon la plus répandue et admise dans toute situation de se
communiquer à l’aide de la langue, sert à évaluer les effets par évocation.
En 1941, Jules Marouzeau, philologue français renommé, a publié un
cours sommaire de stylistique française intitulé Précis de stylistique française.
Selon Marouzeau, la stylistique est appelée à étudier les principes du choix des
faits d’expression en partant du but et des circonstances de l’énoncé. Guidé par
ce principe, il dresse l’inventaire des ressources expressives du français littéraire,
accompagné d’exemples tirés de préférence des bons auteurs: emploi des sons,

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des mots, des constructions grammaticales et syntaxiques, versification.
Marouzeau ajoute aussi quelques remarques sur les particularités de style
propres aux différents genres littéraires (poésie et prose) et sur les caractères
essentiels des styles du français parlé et écrit.
Parmi les conceptions de la stylistique qu’a connu la deuxième moitié du
XX s. on peut citer 1) la «stylistique appliquée» de Ch.Bruneau dont l’objet est les
textes littéraires, 2) «stylistyque génétique» et «stlistique de la parole» de
P. Guiraud: la première s’applique à l’analyse des caractères du style d’un
certaine auteur sur la base de tous ses textes, la deuxième se concentre sur
l’analyse et l’interprétation des textes, 3) «stylistique des écarts» dont l’adepte le
plus connu est C.Todorov, qui apprécie tout emploi stylistique du point de vue du
degrès de déviation de la norme que cet emploi montre, 4) «stylistique du
décodage» dont les principes ont été définis par le linguiste américain
M.Riffaterre, cette stylistique a eu un grand succès dans notre pays et a trouvé un
nombre cosidéré de défenseurs (I.V. Arnolde, par exemple): la stylistique du
décodage examine le texte du point de vue de sa perception par le lecteur, les
notions-clé de cette stylistique sont le procédé stylistique et la fonction stylistique.
En guide de conclusion je voudrais dire qu’à mon avis la stylistique est en
crise aujourd’hui parce que ses objets traditionnels – les différents régistres de la
langue et le texte littéraire – sont devenus le champ de différents approches
linguitiques: l’analyse du discours, la théorie des actes du langage, la linguistique
communicative ont fait beaucoup de progrès en étude des genres langagiers, et
l’analyse du texte littéraire s’enrichit de beaucoup par les résultats de recherches de
l’analyse conceptuel, de la théorie d’intertextualité, de la théorie de polyphonie.

Termes à retenir:

style m – стиль
énoncé m – высказывание
objet d’étude m – предмет (науки)
branche de la stylistique f – раздел стилистики
notion-clé f – ключевое понятие
sujet parlant m – говорящий
unité de la langue f – языковая единица
moyen d’expression m – средство выражения
fait de la langue m – языковой факт
valeur stylistique f – стилистическая окраска слова
fait d’expression m – единица выражения
genre langagier m – речевой жанр
style fonctionnel m – функциональный стиль
procédé stylistique m – стилистический приём

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Лекция 2. «Norme et ses types»
La norme c’est la catégorie stylistique centrale. Dans le dictionnaire
Robert trois sens du mots norme sont donnés:
NORME:
«1. Type concret ou formule abstraite de ce qui doit être».
«2. État habituel conforme à la majorité des cas».
«3. …prescriptions techniques relatives aux caractéristiques d’un produit
ou d’un procédé».
De deux premiers points découle l’opposition-clé de la catégorie de la
norme dans la stylistique : objectivité/subjectivité. Le troisième point
«élaboration des prescriptions techniques relatives aux caractérisrique de la
langue donné» est la tâche de psycholinguistique: par exemple, en étudiant les
quelques 6,000 différentes langues du monde, on a constaté que la position
relative du verbe (V) et de son objet (O) est déterminante. Selon qu’une langue
est VO ou OV i.e. selon que le verbe précède ou suit son objet direct, cette
langue aura des pré- ou des postpositions, des relatives et des adjectifs précédant
ou suivant le nom modifié, des adverbes précédant ou suivant le nom modifié,
etc. Ces propriétés découlent du fonctionnement de la mémoire, qui «impose»
que le verbe ne soit pas séparé de son objet direct.
Du point de vue de l’opposition objectivité/subjectivité dans la linguistique
russe on fait parfois la distinction entre les notions de la normativité et de la
norme: la première représente l’aspect objectif d’emploi de la langue et est le
moyen d’expression le plus répandu et le plus fréquent parmi les sujets parlantss
et la deuxième – l’aspect subjectif qui est basé sur les opinions des sujets parlants
à propos de ce qui est correct ou pas. Dans la linguistique française il existe
plusieurs nominations de ces deux aspects: norme effective/norme idéale (Martin),
norme qualitative/ norme quantitative (Guiraud). Cette dernière opinion a eu une
grande influence sur la stylistique française. Guiraud parle de la norme
quantitative comme de l’usage le plus fréquent, il définit la norme qualitative
comme l’usage correspodant le mieux à la structure de la langue. La même
opposition sert de principe distinctif de deux approches à la norme: descriptif et
préscriptif. Le dernier temps c’est la sociolinguistique qui s’interesse le plus au
problèmes de la norme du point de vue descriptif: la sociolinguistique décrit ce
qui se dit dans des conditions sociales (âge, sexe, lieu, classe…) données. Le
sociolinguiste ne fait que décrire ce qui se dit habituellement, normalement
(statistiquement) dans des conditions données (l’usage).
Ex: «une blouse et un beau jean» sera dit de telle façon, avec telle
probabilité par une femme de tel âge à Paris et autrement à Montréal. Les
représentants de l’approche descriptif ne porte aucun jugement de valeur, mais
parlent de ce qui est standard (statistiquement habituel) et non standard
(statistiquement inhabituel).

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P. ex.: dans des années 20 pour exprimer une appréciation extrême on
disait с’est sensass; dans des années 30 – c’est formidable; dans des années 40 –
c’est épatant; dans des années 60 – c’est du tonnerre.
L’aspect prescriptif est lié à l’imposition planifiée d’un standard
linguistique. Cet approche a de riches traditions en France. Les tendences
puristes restent fortes à nos jours aussi. On peut demander à un juge que la
pancarte office soit retirée sous peine d’amende puisque la norme prescrit
d’employer le mot français bureau. Ce type de mesure fait partie de ce qu’on
appelle l’aménagement linguistique. C’est ce que fait le Conseil de la langue
française lorsqu’il publie des bulletins terminologiques (lexique de
l’informatique, de l’aéronautique…).
P.ex. dans le journal quebequois Le Devoir on peut trouver régulièrement
des articles du réviseur linguistique soulignant p.ex. que la récente Station
Centrale d’autobus de Montréal aurait dû être appelée la Gare routière de
Montréal. Le problème de l’aspect prescriptif de la norme est une «actualité
brulante» pour le français parce que le monde francophone n’est pas homogène
et embrasse de différentes cultures, nations, traditions.
Mais très souvent les deux aspects de la norme sont étroitement liés et
entrecroisés. Le standard préscrit est orienté sur un mode d’expression qui a une
existence et une fréquence réelles dans la société. Et le cas inverse: un mode
d’expression répandu parmi les usagers de la langue devient normatif. Alors les
linguistes russes tendent à neutraliser l’opposition en question: ils ne parlent que
d’une seule norme qui peut être analysée sous des angles différents.
En précisant la notion du style nous avons déjà dit que le style c’était
toujours le problème du choix. Mais pour choisir il faut avoir un critère du choix.
La norme sert de ce critère, du point de départ pour le choix des faits de la langue
que font les usagers dans telle ou telle situation. La norme au sens large c’est le
standard, ensemble de règles définissant la façon de parler dans les circonstanses
donnés que tous les membres de la société doivent suivre. On ne viole la norme
que pour des buts spécifique: pour se faire voir, attirer attention et dans les œuvres
littéraires – pour créer des effects stylistiques. On distingue au moins 5 types de
norme: 1) norme de la langue; 2) norme littéraire; 3) norme interne d’un style
fonctionnel; 4) norme neutre; 5) norme communicative. Toutes ces normes ne
sont pas des catégories stables. Elles changent avec le temps.
1) La norme de la langue est très large. Cette norme a deux aspects.
Premièrement elle embrasse ce qui est autaurisé par le système même de la langue.
Ses règles sont obligatoires pour tous les sujets parlantss, pusque les écarts
brouilleraient l’itelligence et feraient le sens de l’énoncé incompréhensible. Il
n’est pardonnable de violer cette norme que pour les étrangers.
Ex: Moà parler bon in french.
Vous êtes le français?
Ce premier aspect de cette norme s’exprime bien à l’aide de deux
oppositions: correct/ pas correct et existe/ n’existe pas dans la langue.

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Le deuxième aspect de cette norme réunit les règles qui limitent le choix des
unités, des formes et des consructions parmi celles qui sont déjà autorisées par le
système. Ces règles sont aussi obligatoires. Mais les déviations de cette norme sont
moins évidentes puisque on emploie la construction théorétiquement possible mais
manquant dans l’usage réel. L’essentiel de cet aspect de la norme de la langue peut
être bien exprimé par la formule: C’est correct mais on ne dit pas comme ça!
Ex: fureur extrême /* fureur violente
livrer une bataille / *donner une bataille
La norme de la langue embrasse tous les éléments, tous les modes
d’expression de la langue pertinant à une étape donée de l’évolution de la langue.
Comme le système et la structure de la langue changent ce qui était normatif
autrefois est placé hors cette norme quelque temps après. Alors en dehors de la
norme de la langue se trouvent des archaïsmes – quand seul le mot a vieilli et
non la notion et quand ce mot est surplanté dans son emploi par un mot nouveau
– des néologismes individuels – des mots nouveaux crées par un auteur qui ne
sont employés qu’une seule fois dans un contexte qui les justifie et les explique –
toute sorte du langage secret (argot des voleurs). Du point de vue de cette
norme le style familier, le style populaire et même l’argot sont normatifs.
2) La norme littéraire est appelée parfois par les liguistes français «le
bon usage» (le français standard, la langue soignée, la langue soutenue). Elle est
plus étroite que la norme de la langue. Elle est considérée comme le meilleur
échantillon qui fait voir toute la richesse de la langue nationale. Ce n’est que
cette norme qui est inculquée par tout le système d’éducation nationale et doit
être surveillée par mass-média. C’est une sorte du standard élaboré et cultivé
consciemment et soigneusement par la société. Dans le dictionnaire linguistique
sous la rédaction du J.Dubois cette norme est définie de la façon suivante : « un
système d’instructions définissant ce qui doit être choisi parmi les usages d’une
langue donnée si l’on veut se conformer à un certain idéal esthétique ou socio-
culturel ». L’idée-clé de cette norme: on dit comme ça mais ce n’est pas un bon
usage il ne faut pas dire comme ça! Alors en dehors de cette norme se trouvent
le langage populaire, les dialectismes et l’argot.
La norme lettéraire embrasse le langage familier, les faits d’expressions
neutres, livresques et élévés. Le langage familier se trouvant à la périphérie de la
langue littéraire n’est pas opposé à la norme littéraire. Le mot familier c’est le mot
qu’ une personne bien instruite et bien élevée peut introduire dans son discours
sans risquer sa réputation et sans avoir peur d’être blâmée par son milieu.
Il est à noter que la norme littéraire ne reste pas inchangeable. Les linguistes
français constatent qu’au cours des dernières decennies un grand nombre de mots et
de constructions ont passé du langage populaire et argotique au langage normatif.
Les frontières entre la norme littéraire et les éléments non normatifs deviennent de
plus en plus floues. Comme facteurs contibuant à cette situation on nomme la
démocratisation de la société et l’expension des mass-média qui afin d’attirer plus
de publique se sert du langage facile à comprendre – le langage populaire.

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La norme interne c’est la forme d’expression qui est caractéristique à un
style fonctionnel, à un type de texte, à un genre de communication et même à la
manière de s’exprimer d’une personne. La norme interne est propre à chacun
des styles fonctionnels et elle pose un certain nombre de règles qui organisent et
sanctionnent la communication dans des conditions données. Cette norme est
plus étroite encore que les deux précédentes puisque ses règles se superposent
sur les règles déjà en action de celles-ci. On doit surveiller cette norme pour ne
pas être insolite dans une certaine situation de communication. Mais les normes
internes de différents styles fonctionnels ne sont pas les mêmes du point de vue
de leur caractère obligatoire. P. ex. dans le style administratif ces normes ont
plus de rigeur que dans le style des Belles Lettres ou dans le style parlé.
La norme neutre se manifeste sous forme des unités de la langue privées
de toute valeur stylistique qui ne remplissent que la fonction purement
informative dans l’énoncé. Cette norme est la plus étroite de toutes. Elle se
rapproche d’une abstraction scientifique puisque ses éléments n’ont aucune
nuance affective ou bien axiologique, ne portent pas de marque socio-
symbolique et n’expriment que l’idée logique et intellectuelle. Cette norme sert
à dégager la valeur stylistique des unités appartenant aux autres normes. P.ex. ce
n’est qu’en comparaison avec le mot neutre manger qu’on définit consommer
comme son symonyme livresque, croûter comme l’unité lexicale du style
familier, bouffer comme le mot populaire et claper comme élément argotique.
La norme communicative est la plus large de toutes les normes. C’est la
compréhension mutuelle qui sert de critère dans cette norme. A l’interieur de cette
norme se trouvent les énoncés classés parmi les non normatifs du point de vue de
toutes les autres normes (avec des fautes linguistiques, des mots mal combinés, des
fautes du style, néologismes, archaïsmes etc.) à condition que le but communicatif
soit atteint: l’un des interlocuteurs a compris ce que l’autre voulait dire.
P.ex. La phrase «Le vert signal la libre voie indique» malgré son écart de
l’ordre des mots normatif porrait être facilement comprise si la communication
avait lieu au carrefour.

Termes à retenir:

norme déscriptivef – описательная норма


norme préscriptive f – предписательная норма
normativité f – нормативность
usage m – узус
jugement de valeur m – ценностно-маркированное суждение
style familier m – разговорный стиль
style populaire m – просторечие
compréhension mutuelle f – взаимопонимание
néologisme m – неологизм
archaïsme m – архаизм

14
Лекция 3. «Valeur stylistique et notion du style»
Les notions de valeur stylistique et de fonction stylistique sont étroitement
liées mais ne sont pas identiques. La valeur stylistique est propre à l’unité de la
langue en tant qu’élément du système alors qu’il ne s’agit de la fonction stylistique
d’une unité de la langue que dans son emploi concret, dans son actualisation. P.ex:
dans la phrase «Il devient gras et paresseux, son intelligence engraisse aussi» le
verbe engraisser comme élément du système de la langue a la valeur stylistique
zéro, mais employé dans le contexte donné il accomplit une fonction stylistique
importante en créant l’image et en y joignant de l’appréciation affective.
La valeur stylistique a trois composantes: 1) composante axiologique; 2)
composante imagée; 3) composante socio-symbolique. Il faut dire que cette
triple distinction a un caractère un peu artificiel puisque il est parfois difficile de
les dégager tellement elles sont soudées. Dans le cadre du stucturalisme on
cosidère la signification lexicale comme entité ayant la structure suivante: le mot
en tant qu’image sonore ou visuelle, la notion à laquelle cette dernière est
associée – le significat, le rang d’objets de réalités auxquels ce mot peut être
appliqué – le dénotat, et enfin un ensemble d’éléments hétérogènes qui
provinnent d’impressions et d’assocations affectives, appréciatives et d’autres
qu’évoque ce mot dans la consience (et parfois dans le subconsience) des sujets
parlantss – le connotat. Alors c’est ce domaine de connotation qui embrasse les
éléments de la valeur stylistique et la fonction stylistique.
Composante axiologique
Cette composante a le statut du sème – élément minimal de la
signification lexicale – différenciel qui identifie ce mot-là parmi ses synonymes
et est l’élément le plus informatif dans la communication.
P. ex. Si le mot neutre ivrogne n’exprime aucune autre idée que celle que
quelqu’un boit trop d’alcool, ce qui est le principal dans le mot soulard c’est
l’appréciation négative de la société de celui qui en boit trop. Il faut dire qu’un
mot peut contenir l’appréciation rationnelle comme par exemple méchant mais
ce n’est que l’appréciation affective qui caractèrise le mot à valeur stylistique
comme p.ex. vache, rosse. Le plus souvent ce sont les sèmes «l’intensité» et
«l’appréciation (négative ou positive)» qui se combinent avec la sème catégoriel
et différencie le mot à valeur stylistique de ses synonymes neutres.
La composante axiologique doit être toujours «soutenue» par la marque
socio-symbolique (appartenence au langage familier ou populaire) ou par la
composante imagée qui se manifeste en forme interne du mot ou bien par toutes
les deux. La forme interne c’est ce qui permet aux sujets parlants de voir net et
clair le motif de la nomination. P.ex. le mot pentouflard qui désigne un homme
qui passe toute sa journée en pentoufles à ne rien faire, à regarder la télé, ou la
nomination du policier la vache à roulettes ne cache pas l’image vive qui en a
servi du motif. Dans des cas où la forme interne n’est plus ressentie (p.ex.
bringue) ou il n’en s’agit pas (en cas d’onomatopée effacée gasouiller) c’est la
marque socio-simbolique seule qui soutient la composante axiologique. Si le

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mot perd cette marque et passe dans le langage commun il perd aussi et son
caractère axiologique et affectif (p.ex. coquette).
La composante imagée a une position fixée dans l’hiérarchie de la
signification lexicale: elle se place à la périphérie du niveau différenciel. Cette
composante est toujours en conflit avec le contenu logique de la signification
lexicale (vache à roulettes et la notion de l’homme au service d’état appelé à
maintenir l’ordre). Il faut préciser que le plus souvent on comprend sous la
composante imagée la forme interne du mot ou bien du locution figée ou des
expressions phraséologiques.
Tenir la jambe à qn – le retenir en lui parlant
Mettre des batons dans les roues – empêcher qn
Lèche-bottes – celui qui se plie devant les superieurs
Il est à noter que la composante imagée est étroitement liée à la
composante axiologique: l’une présuppose toujours l’autre. Mais ce n’est pas
vrai en cas inverse puisque la composante axiologique peut être indépendante de
la composante imagée. Nous en avons déjà cité deux exemples (la forme interne
effacée et l’onomatopée à l’origine de nomination). Le troisième c’est le cas de
la motivation dérivationnelle: on voit clair le suffixe à couleur stylistique dont
on a servi afin de former ce mot. P.ex. maison –maisonette.
La composante socio-symbolique a le statut du sème catégoriel qui
indique les conditions communicatives où cette unité lexicale est employée.
Cette composante est une sorte de signal qui évoque dans la consience des sujets
parlantss des associations avec tel ou tel style langagier. Très souvent elle se
combine avec la composante axiologique.
Les composantes de valeur stylistique sont enrégistrées dans des
dictionnaires. Mais ce n’est que la composante socio-symbolique qui y est
mentionnée régulièrement à l’aide des marques «fam.», «arg.», «pop»,
«livresque», «vulg.». Les signes de composante axiologique sont : «ironique»,
«péjoratif», «terme de tendresse», «injure». La composante imagée est parfois
marquée dans des dictionnaires par le signe «fig.».
Avant de passer à la fonction stylistique précisons encore une fois: la valeur
stylistique est propre à l’unité de la langue comme élément du système. Nous
pouvons choisir un mot dans le dictionnaire et en faisant attention aux marques qui
accompagnent sa définition, en le comparant avec ses defférents synonymes et en
étudiant quelques détailles de son étymologie nous pouvons faire la conclusion sur
sa valeur stylistique. Mais ce n’est pas le cas de fonction stylistique. Elle n’apparaît
que dans le contexte. La fonction stylistique d’une unité de la langue ne peut pas
être définie hors de son emploi dans une situation communicative concrète.
La notion de la fonction stylistique est liée à celle de la fonction
informative. Quand on représente une situation, un fait, un état d’une façon
objective en employant les unités de la langue à valeur stylistique zéro sans
changer le contenu sémantique usuel de cette unité il s’agit de la fonction
informative. Quand on représente la situation du côté subjectif en y mêlant de
l’affectivité, des éléments axiologiques et imagés, quand on emploie du lexique

16
à valeur stylistique ou le lexique neutre en changeant son contenu sémantique,
quand le contenu de tout l’énoncé s’enrichit en comparaison de son équivalent
neutre, alors il s’agit de la fonction stylistique. Il est à noter que la notion de
fonction stylistique est traîtée parfois defféremment: certains liguistes ne parle
de cette fonction que dans le cadre de l’œuvre littéraire (Arnolde), d’autres la
comprend au sens plus large comme le phénomène qui peut se réaliser dans tous
les genres et types de communication (Khovanskaia). D’abord nous allons parler
du deuxième point de vue. Z.Khovanskaia parle de trois facteurs qui aident à
reconnaître l’énoncé à fonction stylistique.
1. Le contenu de l’énoncé où se réalise la fonction stylistique est plus riche
que celui de son équivalent à fonction informative.
2. L’enoncé à fonction stylistique est caractérisé par le nombre plus grand de
facteurs communicatifs qui y sont en jeu.
3. A l’énoncé à fonction stylistique est propre le moyen spécifique
d’actualisation de ses composantes: с’est la valeur stylistique de l’unité lexicale
qui au moment de son actualisation sert de base pour la fonction stylistique ou
bien c’est le changement sémantique compliqué qui transforme la signification
lexicale de l’unité de la langue à valeur srylistique zéro au cours d’actualisation
de cette unité et devient la source de la fonction stylistique.
Citons deux exemples.
1) Oh, là, là! Mais c’est une vieille bique!
Le contenu de cet énoncé est plus riche que celui de son équivalant neutre
«C’est une vieille femme» parce que beaucoup de facteurs communicatifs y
participent en ajoutant de l’information nouvelle. Nous comprenons par exemple
que cet énoncé a eu lieu dans un cercle familier (facteur: circonstances de
communication) où les rapports entre le sujet parlant et celui qui l’écoute ne sont
pas officiels (facteur: aspect interpersonnel de communication), nous voyons
clair l’attitude ironique du sujet parlant (facteur: l’attitude du sujet parlant)
envers une personne en question. Le mot bique, l’intonaton exclamative sont les
faits de la langue à valeur stylistique qui en cas de leur actualisation devient la
base de la fonction stylistique de l’énoncé.
2) La Grande Guerre est un gouffre, un trou noir de l’humanité.
Dans ce cas-là la fonction stylistique se réalise à la base du lexique neutre,
dont le contenu sémantique s’est modifié au cours d’actualisation.
La fonction stylistique au sens plus étroit est comprise comme
dependance du contenu du texte né de l’interaction de l’information
logique et objective d’une part et de l’information axiologique, affective,
expressive, estétique de l’autre de la structure de l’œuvre littéraire.
L’élément de base de cette fonction stylistique est le procédé stylistique. La
fonction stylistique a trois traîts caractéristiques: 1) non explicité – la fonction
stylistique s’appuit surtout sur les connotations, les sens cachés des unités
lexicales, des formes et des constructions de la langue; 2) accumulation – le
même motif, sentiment est traduit, est réalisé dans l’œuvre littéraire par une série,

17
un «bouquet» de procédés; 3) irradiation – étant née dans une partie de texte la
fonction stylistique influence toute une autre partie en tant que macrocontexte.
Dans le cadre d’analyse du texte littéraire il faut parler encore de la
fonction estétique des faits de la langue. Cette fonction n’est propre qu’à ce type
de texte et le distigue de tous les autres (document officiel, article scientifique,
éditorial) et en même temps le rapproche des œuvres d’autres arts (tableaux,
sculptures, symphonies). Cette fonction consiste en ce que l’auteur en faisant le
choix particulier des faits d’expression de la langue, en employant les procédés
stylistiques de nature différente et en faisant recours aux modes particuliers
d’actualisation des unités de la langue crée une idée essentielle qui se fait voir au
lecteur à travers tout le texte. Cette idée doit exercer une certaine influence sur le
lecteur et même changer sa perception du monde et ses valeurs essentielles. La
notion de la fonction estétique peut être attribuée à tout l’ensemble de l’œuvre
littéraire et non à un de ses élément hors de ce contexte global. On fait distinction
entre fonction stylistique et fonction estétique d’après les critères suivants:
1) sphère de réalisation: fonction estétique n’est propre qu’à la
communication littéraire alors que la fonction stylistique caractérise toute
activité langagière;
2) contenu: fonction estétique se rapporte au contenu idéologique tandis que
fonction stylistique – au surplus enrichissant le sens de l’énoncé des
nuances situatives, sociales, psychologiques;
3) mode de réalisation: fonction estétique se réalise à la base de tout
ensemble des moyens stylistiques et fonction stylistique y joue un rôle
secondaire; alors que fonction stylistique elle-même est basée sur des
moyens purement linguistiques;
4) contexte suffisant: on ne peut analyser fonction estétique que dans le
cadre de tout l’œuvre littéraire alors que pour l’analyse de fonction
stylistique le cotexte minimal d’un ou deux énoncés suffit.

Termes à retenir:

fonction stylistique f – стилистическая функция


valeurf stylistique zéro – отсутствие стилистической окраски
composante imagée f – образная составляющая стилистической окраски
composante socio-symbolique f – социально-маркированная составляю-
щая стилистической окраски слова
signification lexicale f – лексическое значение
significat m – сигнификат
dénotat m – денотат
connotat m – коннотат
sème m – сема
forme interne f – внутренняя форма (слова)
motivation dérivationnelle f – словообразовательная внутренняя форма (слова)

18
Лекция 4. «Procédés stylistiques»
Pendant des cours précédents nous avons pris connaissance de différents
tours appelés à modeler, façonner le discours. Ce sont des figures de style. Selon
le contexte et la sphère d’emploi ces figures peuvent poursuivre des buts
diverses et produire de différents effets stylistiques. Mais ce n’est qu’étant
introduits dans un texte littéraire afin de servir du materiel à réaliser la fonction
estétique qu’ils deviennent les procédés stylistiques. C’est-à-dire que le
phénomène des procédés stylistiques n’existe en dehors du cadre du texte
littéraire. Alors les figures du style perdent leur valeur à eux, valeur absolute, et
se soumettent au rôle des subordonnés dans la structure complexe du texte:
même le terme «procédé» en témoigne – il évoque la façon d’agir à l’égard
d’autrui ou bien métode employée pour parvenir à un certain résultat. Dans le
cas des procédés stylistique c’est toujours le concept du texte, l’idée-clé du texte
qui devient cet «autrui», ce «résultat» qui sanctionne leur fonctionnement.
Le texte étant traditionnellement un phénomène à plusieurs définitions
reprend des contours plus ou moins nets dans les dernières années. Dans la
tradition russe enracinée dans la stylistique du décodage les linguistes cosidèrent
le texte comme l’entité dont les éléments formels et le contenu sont
interdépendents et étroitement liés. On admet aussi le fait que le même texte
peut être réinterprété plusieurs fois, mais le nombre d’interprétations est fini: il
est limité par les rapports de l’interaction qui lient l’idée du texte telle qu’elle
était conçue par l’auteur et les éléments constituant et organisant la structure du
texte. L’auteur non seulement crée le texte mais il pronostique, prévoit le mode
de son perception par le lecteur. L’auteur selectionne parmi toutes les formes
sémiotiques de différents niveaux (en commençant par le lexique, le choix des
procédés stylistiques et en finissant par l’organisation graphique du texte) celles
qui réaliseraient le mieux le concept de son œuvre et en même temps
permetteraient aux récipients de déchiffrer, décoder le mieux ce cocept. De ce
point de vue il me semble interessant le modèle du signification et de la
compréhension du texte proposé par le linguiste russe V. Krasnich (Красных)
qui réunit quelques niveaux:
Signification du texte Compréhension du texte
1) superficiel 1)perception de la forme; compréhension du sens
propre du texte
2) profonde 2) compréhension du sens simbolique: des nuances
du sens complimentaires, des sens cachés
3) concept 3) compréhension et perception du concept
Le procéssus de la création du texte se déroule dans la direction inverse : du
concept à l’organisation formelle. Ce modèle montre d’une façon évidente la
grande importance de la forme du texte dans le décodage du concept ce qui est le
but essentiel du lecteur et l’intention essentiel de l’auteur. Pour l’analyse productif
de l’interaction de la forme et du contenu le liguiste russe I.V. Arnold a proposé la

19
notion des «moyens de mise en avant» qu’elle définit comme la présence dans le
texte des particularités de l’ordre formel accentuant l’attention du lecteur sur
certaines traits du texte et reliant du point de vue du sens les éléments des niveaux
différents ou les éléments distents du même niveau. Les éléments textuels mis en
avant attirent l’attention des lecteurs sur des certaines passages du texte. Arrêtés,
intéressés et parfois étonnés lecteurs apprécient mieux la valeur relative de ces
éléments, ils percent mieux l’hiérarchie des images, des sentiments, des idées
existant dans le texte et traduisant l’intention de l’auteur. Les moyen de mise en
avant servent à faire surgir l’expressivité des éléments du texte et à assurer l’unité
et l’organisation hiérarchique de la structure du texte. Arnold distingue les
moyens de mise en avant suivants: convergeance, attente trompé,
enchaînement, position forte. Chacun des phénomènes cités peut être employé
en ensemble avec les autres ou seul, peut s’éteindre sur tout le texte ou
n’embrasse qu’une de ses parties. Le niveau sur lequel se réalisent les moyens en
questions est supérieur à celui des procédés stylistiques.
La notion de convergeance a été introduite dans l’usage linguistique
par J. Marouzeau mais elle était élaboré avec beaucoup de détailles plus tard par
Michel Riffaterre. Ce terme est appliqué à un faisceau de procédés stylistiques
réunis du fait qu’ils traduisent le même sens et remplissent la même fonction
stylistique. La convergeance marque un élément important pour tout le texte
mais elle n’y occupe pas beaucoup de place. L’enchaînement c’est l’apparition
des éléménts pareils dans des positions pareilles. Ce terme a été proposé par
Samuel Lévin (en anglais «coupling»). On appelle «l’attente trompé» le trouble,
la rupture subite et inattendue de la liaison habituelle entre les éléments,
l’apparition des éléments qu’on ne s’attendait point à y voir. Sous le terme
«position forte» on susentend l’information importante qui est toujours
concentrée dans le titre, épigraphe, au début et à la fin du texte.
Comme exemple de la convergeance citons un passage du roman du
Marc Lambron «L’oeil du silence», consacré à la vie d’une femme dont la
nature quelque chose de caché, de secret, quelque chose qui la hante. C’est la
convergeance qui marque le moment imporant pour la compréhension de toute
sa vie: elle raconte qu’elle a été violée à l’âge de sept ans.
«C’était une petite fille. C’était une femme. La flétrissure de ses sept ans avait
enfoncé en elle une fleur noire dont les pétales s’ouvraient dans les très fonds. Elle
cherchait désespérément le moment où la honte enfouie deviendrait acceptation».
Au début du passage nous voyons la répétition anaphorique qui sert à
introduire et à souligner l’opposition-clé de ce roman fille/femme (c’est à sept
ans que fille est devenu femme, c’est cette fille effrayée qui vivait toujours en
elle, devenu déjà femme: C’était une petite fille. C’était une femme.
Puis nous voyons quelques métaphores entrelacées qui font naître une
image symbolique de la profondeur: 1) emploi métaphorique du verbe
«enfoncer» (la flétrissure a enfoncé); 2) une métaphore prédicative filée «une
fleur noire dont les pétales s’ouvraient dans les très fonds»; 3) métaphore

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prédicative «honte enfuie». Il est à noter le rôle important de l’interaction des
sens des mots «honte» et «acceptation».
Dans le même roman nous pouvons trouver et l’exemple de l’enchaînement.
Il faut dire que dans sa jeunesse Lee Miller était mannequin vedette puis elle est
devenue photographe elle-même. A travers tout le roman on voit des réflexions de
l’auteur sur les rapports existant entre l’apparence, la surface d’un être humain et
ses profondeurs. Et voilà au début du roman dans ses trois premières pages on
rencontre avec une régularité étonnante des passages traitant le thème de la
photographie et les constructions analogiques: ...Photo de George Hoyningen-
Huene... un alinéa après on retrouve la même phrase. Une page après la phrase
suivante suit: «La photographie était un secret à propos d’un secret».
Dans un des romans de Philippe Djian nous trouvons un exemple parfait
de l’attente trompé: dans un des passage on introduit un personnage dont
l’apparition est précédé par une telle caractéristique: A présent George avait
soixante et onze ans. Il s’était voûté mais il avait encore de l’allure... Il était tout
de blanc vêtu et, malgré la chaleur, son col était boutonné, de même que les
manches de sa chemise...
Après avoir lu cette caractéristique le lecteur s’attend au discours noble
d’un homme âgé. Mais voilà ce qui suit: – Sacré nom, Henri-John! Tu ne
manque pas de culot!
Le lexique populaire, les tours propres au langage très familier sont en
conflit avec l’apperence de ce vieillard et ce conflit attire attention du lecteur à
ce personnage étrange mais très important.
Arrêtons nous sur les formes de la position forte. Le titre du texte c’est
comme le nom propre, nom d’une pesrsonne dont la fonction est d’individualiser
l’objet auquel il est attribué parmi tous les autre. C’est pourquoi le titre peut
exprimer le thème de tout l’œuvre («L’act de probité» Bazin – dans la nouvelle
Bazin décrit comment un petit voleur sent tout à coup monter au profondeur de
lui la vague de sagesse qui enfin le fait rendre le porte-monnai trouvé à celui qui
l’avait perdu), parfois le titre nomme le personage principal en lui attribuant une
telle épithète que l’auteur tend à expliquer à travers tout l’œuvre et qui étant
relié par le lecteur au éléments composant le texte aide à mieux comprendre son
idée. Par exemple le roman d’ Annie Erneaux porte le titre «La femme gelée».
L’idée maîtresse du texte est celle que la femme contemporaine n’est pas libre à
choisir sa vie, ce qu’elle veut faire dans la vie; son existence est strictement
limité par tout un nombre de devoirs familials, des obligations sociales, des
restrictions de toute sorte; et alors sa personnalité, son talent, sa nature
passionnée perdent leur force et deviennent pareils aux substances gelées. Les
titres qui nomment quelque lieu, quelque circonstance où se déroule l’action
introduisent le plus souvent le pricipale ou un des secondaires symboles de l’
œuvre. P.ex: un des romans de Jaqueline Montupet porte le titre «Dans un grand
vent de fleurs». Ce titre est symbolique par ce que toute la vie de la héroïne
principale est consacré aux fleurs: elle les cultive pour des buts de la parfumerie

21
et les adore passionnement et toute sa vie ressemble à un vent parce qu’elle est
toujours au milieu de différentes péripéties, des événements imprévus change sa
vie cordinalement en un clin d’œil.
L’épigraphe c’est l’élément extérieur qui précède le texte. Il peut avoir la
forme de la citation d’autres œuvres littéraires (prosaïque ou poétique), de la
proverbe, dicton, aforismes. D’habitude il est placé après le titre de tout l’ œuvre ou
bien devant le titre d’un chapitre, d’une partie. Sa fonction est d’éclaircir au lecteur
l’idéé du texte, de creer l’atmosphère de l’ œuvre, de la narration en général avant
même la lecture. Le fait que cet élément textuel n’est point obligatoire déremine
son grand potenciel informatif en cas de présence. P.ex. le roman que nous avons
déjà cité – «L’œil du silence» de MarcLambron – est précédé par trois épigraphes:
citations de M. Proust, de Pablo Picasso et de Louis Aragon.
«Il en est des plaisirs comme des photographies. Ce qu’on prend en
présence de l’être aimé n’est qu’un cliché negatif, on le developpe plus tard, une
fois chez soi,quand on a retrouvé à sa disposition cette chambre noire intérieure
dont l’entrée est condamnée tant qu’on voit du monde.»M. Proust.
«Une peinture qui contiendrait tout d’une femme en particulier et qui ne
ressemblerait à rien de ce qu’on connaît d’elle.» Picasso.
«Lorsque tu descendais à l’Hôtel Istria
Tout était différent rue Campagne première
En mille neuf cent vingt-neuf vers l’heure
Du midi...»
Aragon
Alors nous voyons que les deux premiers épigraphes traitent le sujet des
rapports entre l’apperence et ce qui est dedans dont nous avons déjà parlé comme de
l’idée maitresse du texte. Le dernier épigraphe plonge le lecteur dans l’atmosphère
du début du vingtième sciecle, à l’époque où commence l’histoire de Lee.
Une autre position forte dans le texte c’est la partie finale. C’est dans cette
partie du texte que l’auteur résume ce qu’il voulait dire. Très souvent à la fin du
texte on repris le même motif, la même idée qu’au début du texte: P. ex. Arthure
Rimbaud à la fin dans sa poésie «Première soirée» répète les premiers strophes
afin d’accentuer l’image qui a donné naissance à tout le concept de l’œuvre:
Elle était fort déshabillée
Et de grands arbres indiscrets
Aux vitres jetait leur feuillée
Malinement, tout près, tout près.
Dans l’infinie variété du discours, la rhétorique classique cherchait à repérer
tous les tours, tous les moyens qui, d'un discours, d'un texte à un autre, peuvent être
mis en œuvre pour produire un effet particulier sur celui à qui l'on s'adresse (lecteur,
auditeur, interlocuteur): ces procédés, qu'elle appelait figures du discours, nous les
nommons aujourd'hui plus souvent figures de style1 . Quant au terme latin de figura,
il remonte à une racine qui signifie ‘façonner, modeler’ (sens qu'on retrouve dans
les mots français feindre, fiction, qui comportent bien cette notion de modelage de

22
la réalité): une figure, c'est donc un façonnement particulier du discours. Ce terme
de figure de style recouvre donc des réalités diverses.
Les rhétoriciens de l’Antiquité (Aristote entre autres, chez les Grecs ),et
chez les Romains, (Cicéron, Quintilien, et leurs continuateurs) ont fort bien
observé et décrit cette diversité des moyens et des effets. Ils se sont efforcés de
donner un nom à chacun des procédés qu’ils distinguaient et de les classer en
grandes catégories. Ainsi toutes les figures dans lesquelles un mot leur semblait
changer de sens furent-elles rangées dans la catégorie générale des tropes.
Aujourd'hui encore subsiste cette distinction entre les tropes d'une part, les non-
tropes (figures où aucun “changement de sens” ne semble apparaître) d'autre part.
Le mot trope (mot masculin) se rattache à la racine d'un verbe grec (trepô)
qui signifie ‘tourner’. Le terme grec de tropê signifie ‘ce qui tourne’, ‘ce qui
change de sens’, c'est-à-dire aussi bien de diréction que de signification. On
retrouve cette même racine dans un assez grand nombre de mots français: le
tropique est la ligne parallèle à l’équateur où l’inclinaison du soleil s'inverse au
moment du solstice ; l’héliotrope est une fleur qui, mot à mot, “se tourne vers le
soleil” (cf. le terme équivalent de tournesol, fondé, lui, sur des racines latines), etc.
C'est pourquoi ce terme a été utilisé, depuis l'Antiquité, pour désigner les figures
qui semblent faire qu'un mot change de sens (comme faucille dans l’exemple ci-
dessus). Tropes ce sont les figures de style dans lesquelles on emploie les mots
avec un sens différent de leur sens habituel. Il est à souligner que les topes ne font
pas partie du système de la langue: ces changements du sens qui se produisent
dans le mot employé de la façon tropéique ne sont qu’occasionnels, nés dans un
contexte donné et ne sont point mentionnés dans des dictionnaires.
Au sens strict il n’existe que deux tropes: méthonymie et métaphore (leurs
variations y compris).
Métonymie. Imaginons ce dialogue téléphonique: on appelle un ami
médecin à son cabinet. On lui demande si on ne le dérange pas, s'il n'est pas en
consultation. – Non, non, j'ai deux minutes, je suis avec un laboratoire – répond-il.
Qu'est-ce à dire? Un laboratoire pharmaceutique au grand complet, avec ses
instruments et ses machines, ses bocaux, ses éprouvettes, ses bureaux et ses
employés, aurait-il été transporté, par un coup de baguette magique, dans le cabinet
de consultation d'un médecin? Évidemment non: le médecin veut seulement dire
qu'il se trouve avec le représentant d'un laboratoire, et qu'il peut le faire patienter
quelques instants, plus facilement qu'il ne pourrait faire d'un patient. Dire un
laboratoire au lieu d'un représentant d'un laboratoire, c'est user d'une métonymie.
Cette figure est un trope: le terme métonymique semble avoir changé de sens mais
en fait il ne s'agit pas d'un réel changement de sens, mais d'un changement de
désignation: le terme de laboratoire conserve son sens habituel, mais, dans cette
phrase, il désigne une personne et non plus un lieu. La métonymie remplace le
terme propre (un représentant d'un laboratoire) par un autre (un laboratoire)
lié au premier par quelque rapport objectif, matériel et logique. Tous ces deux
éléments appartiennent au même ensemble, sont liés par un rapport de
contiguïté. Alors ce replacement aboutit à une anomalie du discours, qui permet de

23
répérer la figure. S'il est en effet naturel de rencontrer le terme de laboratoire dans
un contexte médical (identité du champ sémantique), il est en revanche anormal
d'être avec une chose, surtout si cette chose est un lieu, ou une entité abstraite.
Donnons encore un exemple de métonymie. On pouvais voir naguère sur
les murs de Paris cette publicité pour un grand magasin:
Dormir avec Kenzo Dîner avec Saint-Laurent Séduire avec Cacharel!
Nulle incitation à la débauche avec des célébrités de la haute cou-ture
dans ces trois injonctions... Elles ne faisaient que nous inviter à dormir, dîner ou
séduire avec des vêtements griffés par Kenzo, Saint-Laurent ou Cacharel. Ces
trois noms ne désignent plus les couturiers mais les vêtements qu'il-ont créés.
Le rapport existant entre le terme propre et le mot qui le remplace peut
varier infiniment. La méthonymie peut substituer:
 le contenant au contenu (ex. boire un verre),
 l'effet à la cause (ex. Socrate a bu la mort = le poison qui l'a tué),
 le symbole à la chose (ex. les lauriers = la gloire),
 l'objet à l'utilisateur (ex. le premier violon = le premier violoniste),
 l'auteur à son oeuvre (ex. lire un Zola), etc.
 le lieu d’origine pour le produit (ex. «le coulommiers» est un fromage
fabriqué en Coulommiers, le «bourgogne» = vin produit en Bourgogne)
 la matière pour l’objet qui en est fait («une petite laine»= un vêtement de laine,
 le lieu, l’édifice pour ceux qui y travaillent, résident (le
Pintagone=spécialistes et hauts fonctionnaires de l’arméé américaine; et la
Maison blanche a choisi comme ligne d'attaque de reprocher à Kerry de
"perdre son sang-froid" à propos des accusations dont il est l'objet.)
Cette liste est à continuer. De cette diversité des rapports entre les
éléments internes de la M. découle le fait que ce phénomène existe sous
diffétentes formes. La première à citer c’est la synecdoque.
La synecdoque est une métonymie qui remplace le nom d'une réalité, non
pas par celui de l'une quelconque de ses caractéristiques, mais par celui d'une de
ses parties. La langue courante en fournit une infinité exemples: on est à la
recherche d'un toit (c'est-à-dire d'une maison, d'un appartement); on voit
s'approcher une flottille de douze voiles (c'est-à-dire de douze voiliers). On dit
communément que la synecdoque exprime la partie pour le tout, et l'on se plaît
souvent à le dire en latin : pars pro toto. Au reste, cette formule de partie pour le
tout est trop limitée, et l'on parle de synecdoque dans de nombreux autres cas, ce
qui nécessite une définition plus large: c'est en fait un rapport d'inclusion
quelconque (la partie pour le tout donc, mais aussi le genre pour l'espèce, ou
l'espèce pour le genre, le singulier pour le pluriel et réciproquement, etc.) qui
définit plus justement la figure. Ainsi lorsque, dans Un cœur simple, Flaubert,
pour décrire un taureau furieux qui voit sa charge arrêtée par une claire-voie,
écrit “et la grosse bête, toute surprise s'arrêta”, il remplace, usant d'une
synecdoque, le genre (taureau) par l'espèce (bête). Les réthoriciens appelaient
parfois la synecdoque considéré autrefois comme trope à part “trope par
connexion” alors que méthonymie «trope par correspondence».

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La SYNECDOCHE (inclusion): c'est une variété de métonymie; c'est un
trope permettant de désigner quelque chose par un terme dont le sens inclut celui
du terme propre. Elle permet d'exprimer un tout par une de ses parties, un objet
par sa matière, et vice-versa.
L'ANTONOMASE c’est encore une forme de la méthonymie. Elle
consiste à designer un individu par l'espèce à laquelle il appartient – par exemple
un homme par sa nationalité -figure qui aboutit au remplacement d'un nom
propre par un nom commun. De telles antonomases sont fréquentes sous la
plume ou dans la bouche des journalistes. Dans le compte-rendu d'une
conférence internationale de diplomates, on écrira par exemple: “Le Britannique
prit la parole...” Ou bien, à propos d'une rencontre de tennis, on dira que
“l'Argentin se précipite au filet ”.Toute espèce, toute classe peut donner lieu à
l'emploi de cette figure – et cela aussi bien dans le langage courant, ou
journalistique, que dans la littérature. Dans la presse, on a pu naguère lire à
propos du savant soviétique Andréi Sakharov: “Au parlement, le physicien et ses
partisans demandent la démocratie pluraliste."
La métonymie en toutes ses formes est utilisée à des fins diverses.Les
journalistes en font recours afin d’éviter la tautaulogie et de varier les
expressions désignant l’objet en question. P.ex. quand un journaliste écrit, dans
un long article consacré a la politique étrangère américaine, que “Washington
craint qu'une action de représailles ne provoque de nouvelles prises d'otages”, il
cherche avant tout à varier les expressions qui serviront à désigner le
gouvernement américain. La langue courante peut avoir recours à une
métonymie pour abréger l'expression : il est plus rapide de commander du
Champagne que du vin de Champagne. Mais la stylistique comme science se
concentre sur les méthonymies à valeur expressives, parfois violante, voire
forcées que ne se permet que la langue des belles lettres.:
Métaphore est souvent appelée la figure-reine de la rétorique. Il existe
plusieurs théories se posant pour but d’expliquer le mécanisme de ce phénomène
mais la métaphore échappe toujours à l’analyse et reste dans la plupart des cas
indéfinissable mais intuitivement sentie et affectivement survecue. Comme nous
avons tout de même besoin de quelque définition à donner, constatons que la
métaphore c’est la nomination d’un objet ou d’un phénomène par un mot
désignant un autre objet, un autre phénomène lié au premier par une
assosiation de similitude. Le phénomène de métaphore est apparenté à celui de la
comparaison et en est souvent accompagné. P. ex. c'est ainsi qu'un personnage de
Maupassant - dans le récit intitulé Auprès d'un mort – parle, à propos de
Schopenhauer, de “cet homme [...] mordant et déchirant les idées et les croyances
d'une seule parole (métaphore), comme un chien d'un coup de dents déchire les
tissus avec lesquels il joue (comparaison)”. Cet exemple nous montre de la façon
bien évidente et claire ce qui diffère ces deux figures de style: si la comparaison
rapproche deux éléments comportant une caractéristique commune (le terme
comparé et le terme comparant – l’homme et le chien ) à l'aide d'un mot
comparatif (comme, pareil à, semblable à, il semble etc.), la métaphore dans

25
la première partie de la phrase ne recourt à aucun mot spécifique pour
signaler sa présence. Bien plus, contrairement à ce qui avait lieu dans la
comparaison, la présence nette d’un comparé et d’un comparant dans
l’énoncé n’est pas obligatoire. P.ex. dans la phrase «L’Université neutralise les
franc-tireurs de la pensée» on sent bien «les franc-tireurs» comme un comparant
mais le comparant est absent: le lecteur doit le reconstituer en s’inspirant du
contexte offert par les mots Université et pensée. Il doit comprendre alors que «les
francs-tireurs» en question sont les penseurs isilés qui travaillant en marge du
cadre universitaire, échappent aux contraits que ce cadre leur impose.
Il est à souligner que c’est le contexte dans lequel apparaît un terme
métaphorique qui joue un rôle foundamental dans le repérage de ce trope.
Encore un traît caractéristique de la métaphore c’est le mélange de deux
champs sémantiques différents qui lui est propre. Alors c’est non seulement le
rapprochement de deux objets, deux phénomènes mais c’est le mélange des deux
champs: les verbes «mordre» et «déchirer» d’une part et le substantif «idées» de
l’autre n’appartiennent au même champs (ex. de Maupassant). Ce mélange peut
être obscur, ou bien comporter quelque chose d’inattendu, de brutal, qui
nécessite un éclaircissement.
Il n’est pas rare de voir se manifester dans des œuvres littéraires des
métaphores filées. C’est le cas où l’auteur continue, après l’apparition d’un
premier terme métaphorique, d’utiliser un volabulaire appartenant au champ
sémantique de ce mot figuré, sans cesser de parler de la réalité initiale. La
métaphore filéé peut ne pas dépaser les limites d’une seule phrase:
Adolphe essaie de cacher l’ennui que lui donne ce torrent de paroles qui
commence à moitié chemin de son dimicile et qui ne trouve pas de mer où se
jeter (Balzac. Petites misères de la vie conjugale);
ou passer à travers un passage aussi bien qu’à travers tout le texte:
Incroyable vérité que dans ces aubes toutes pures de nos vies les pires orages
étaient déjà suspendus. Matinées trop bleues: mauvais signe pour le temps de
l’après-midi et du soir. Elles annoncent les parterres saccagés, les branches
rompues et toute cette boue (Mauriac).
Quant aux formes de la métaphore on en distingue trois: métaphore
explicite ou par combinaison, métaphore pure ou par remplacement, métaphore
indirecte ou contextuelle. La métaphore explicite est caractérisée par la présence
dans le même contexte et du mot «normal» et de son remplacant métaphorique.
Ce phénomène a lieu quand les rapports de similitude entre les objets, les
phénomènes métaphoriquement comparés ne sont pas assez clairs. On fait recours
à cette forme afin que la métaphore soit comprise. P.ex. Appolinaire dans son vers
«Zone» écrit en présentant la tour Eiffel comme la bergère des ponts:
Bergère ô Tour Eiffel le troupeau des ponts bêle ce matin.
La métaphore pure est caractérisée par la présence dans le discours d’un
seul terme – du comparant. Ce n’est posiible que dans le cas où les rapports de
ressemblance sont clairement suggérés par le contexte.

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Dans la métaphore indirecte ou contextuelle c’est le comparant qui n’est
pas explicite. Au lieu d’introduire le mot métaphorique dans le contexte normal,
l’auteur place le mot normal (le comparé) dans le contexte métaphorique.
Dans le poème intitulé La mort l'amour la vie, Paul Éluard écrit ainsi:
“l'espoir tendait sa voile”. Le terme espoir est ici parfaitement normal vu ce qui
précède (“J'allais vers toi j'allais sans fin vers la lumière / La vie avait un
corps...”). Quant au terme métaphorique qui pourrait remplacer cet espoir, il
n'apparaît pas explicitement dans le vers. Mais il est suggéré par l'expression
tendre sa voile: nous comprenons que l'espoir est comparé à un bateau.
Il est à citer encore un type de la métaphore c’est la métaphore incohérente
ou brisée. Elle consisite en ce qu’ une image métaphorique n’est point poursuivie
mais au contaraire se met en conflit sémantique et imagé avec son developpement:
Le char de l’Etat navigue sur un volcan.
Ici nous voyons trois images (char, navire, volcan) qui évoquent les
demaines tout à fait différentes et ne font point créer une image complète et
developpée mais jette de la confusion dans toute la phrase.
La métaphore est un trope très répandu. Nous la trouvons dans tous les
styles de la langue, le style officiel excepté. La langue parlée recourt aux
métaphores à valeur expressive, appréciative et affective, à des images plus ou
moins constantes: Mais c’est une perle, cette enfant!
Pour les orateurs et les publicistes la M. est une ressource stylistique qui
rend le discours plus expressif: la flambée de violence contre la
communauté.Mais de l’autre côté dans des journaux on trouve souvent les
métaphores-clichés déjà privées de toute expressivité: «une brulante actualité».
La métaphore est parfois employée dans des ouvrages scientifiques afin
d’exposer les thèses d’une manière spéctaculaire et plus probante.

Termes à retenir:

tropes pl – тропы
métaphore f –метафора
métonymie f – метонимия
antonomase f – антономазия
synecdoche f – синекдоха
métaphore filée f – сквозная метафора
métaphore brisée f – непоследовательная метафора
moyens de mise en avant pl – средства выдвижения
convergeance f – конвергенция, скопление стилистических приёмов в опре-
делённой части текста
attente trompé m – обманутое ожидание
position forte f – сильная позиция

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Лекция 5. «Régistres du français : style officiel»
On peut définir le style fonctionnel comme variété de la langue nationale,
mode d’expression qui se rapporte à une certaine sphère d’activité sociale et aux
conditions communicatives données.
Mais il faut préciser que l’épitète «fonctionnel» donne à cette notion un
double sens: on peut y parler des fonctions de la langue dans ce type de
communication et en même temps du fonctionnement de ce mode d’expression
dans une certaine sphère d’activité sociale. C’est le premier point de vue qui est la
base de la typologie des styles fonctionnels élaborée par V.V. Vinogradov: 1) le
langage de tous les jours (la fonction communicative de la langue est à la base);
2) le langage de l’administration, des affaires et le style scientifique (la fonction
informative de la langue est à la base); 3) le style publiciste et le style des belles
lettres (fonction excitatrice de la langue à la base).
Tout de même le deuxième point de vue reste le critère essentiel pour la
plupart des classifications des styles fonctionnels proposées par les stylisticiens
russes. Les linguistes français ne parlent pas des styles fonctionnels: ils
emploient le terme «régistre stylistique» dont le contenu n’est pas identique à
celui du «style fonctionnel». La notion du régistre est basée sur deux oppositions
essentielles: expressivité / neutralité; caractère soigné / spontané. C’est plutôt
seule la situation communicative qui est considérée comme facteur-clé de
l’étagement des régistres. Au contraire la notion du style fonctionnel embrasse
tout l’ensemble de facteurs qui y sont en jeu. De ce fait on croit que la notion du
style fonctionnel est plus large et plus nuancée que celle du régistre.
Deux groupes de facteurs sont en général à la base de la typologie des
styles fonctionnels:
1) facteurs extralinguistiques ou communicatifs tels que
 sphère de la communication (science, presse...)
 statut social et formation culturelle
 situation de la communication (lieu, entourage, contact immédiat ou non
entre les interlocuteurs, répartition des rôles communicatifs, le nombre
des communicants etc.)
 but communicatif (prouver, informer, convaincre, exciter)
2) facteurs linguistiques
 forme de communication (orale ou écrite ou ecrite oralisée)
 caractères stylistiques (p.ex. «exactitude», «rigueur», «manière logique
d’exprimer les faits» sont les caractères du style scientifique)
 type de discours (monologue/dialogue)
 principes de l’organisation compositionnelle du texte
 choix et emploi spécifique des faits d’expression de différents niveaux de
la langue.
Il existe quand même un nombre considéré d’ inventaires de styles
fonctionnels. Z. Khovanskaia en distingue 7: 1) le langage parlé de tous les jours,

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2) style populaire qui se rapportent à la forme orale de communication, 3)le
langage de l’administration et des affaires; 4) le style scientifique; 5) le style
publiciste; 6) style des belles lettres; 7) le langage de la publicité et des annonces
se rapportant à la forme écrite de communication.
М.К. Mopeн, Н.Н. Тетеревникова ne parle que de 4 styles fonctionnels en
excluant de la liste précédente le style des belles lettres considéré comme système
de moyens d’expression à fonction spéciale, le langage de la publicité et d’annonce.
Elles ne font aucune distinction au corps des moyens d’expression propres à la
forme orale et ne mentionne dans leur classification que le français parlé en gros.
Потоцкая en distingant d’après de nombreux critères différants 4 groupes
de styles du français contemporain nomme 5 genres du style se rapportant à la
notion du style fonctionnel: style oratoire, style publiciste, style officiel, style
scientifique et style épistolaire. Le langage parlé selon ce linguiste représente un
mode d’expression à part puisque il peut se manifester dans des textes de nature
stylistique différente: on peut rancontrer des éléments du langage parlé dans des
œuvres littéraires, des articles, des lettres etc. Le langage des belles lettres est
aussi hors liste de styles fonctionnels.
Cela se voit bien que les frontières entres les différents styles fonctionnels
sont parfois difficiles à reconnaître. C’est le statut du mode d’expression des belles
lettres et le problème de l’appartenance stylistique du langage parlé (le français de
tous les jours) qui sont des points faibles du classement des styles fonctionnels.
Mais quand même dans des buts didactiques et à l’absence de
l’unannimité parmi les stylisticiens examinons de près les styles fonctionnels
suivants: le langage parlé ou de tous les jours, le style officiel ou le langage de
l’administration et des affaires, le langage de la presse, le style scientifique et le
langage des belles lettres.
Du point de vue des facteurs extralinguistiques le style officiel est
employé dans la communication entre les ministères, les administrations
publiques ou privées, les magistratures, les entreprises industrielles, les maisons
de commerce, entre ces organismes et la population. Dans cette sphère de la
communication le statut social des communicants joue un rôle important. On se
sert de cette variété de la langue dans sa forme orale – ce qui suppose le contact
immédiat des communicants – pendant les rencontres officielles, les entretiens.
Dans sa forme écrite (le contact n’est pas immédiat) le style officiel est employé
dans des lois et des décrets, arrêtés, circulaires, ordres, instructions,
avertissement, traités et contrats entre établissements publiques et particuliers,
lettres d’affaires, cetificats, mémoires, déclarations, demandes. Le but
communicatif dans ces cas-là est informer, préscrire, ordonner, demander.
Quant aux facteurs linguistiques qui détermine les particularités de ce style,
la forme de communication est de préférence écrite et le type de discours est
monologique. Parmi les caractères stylistiques essentiels on peut citer «neutralité»,
«conservatisme». Mais ce style est loin d’être uniforme. Comme le spectre

29
d’activités sociales où on’y fait recours est très large, tout en gardant ses propriétés
essentielles ce style prend des traîts particuliers selon la sphère d’emploi.
Alors les traîts essentiels de l’emploi des faits de la langue dans textes
appartenants à ce style sont:
1) syntaxe complexe: la proposition principale est suivie d’un cascade de
subordonnées alourdies à leur tour par les tours participes et infinitifs
(autorisations préscrites par la loi, mandat de saisir ou d’arrêter);
2) emploi des termes officiels et de la terminologie spéciale (durée de
validité ‘срок действия’, fin de l’exercice ‘конец финансового года’,
unité de compte européenne ‘европейская расчётная единица’);
3) emploi des formules traditionnelles (P. ex. dans le texte administratif:
«Par circulaire en date de...», «Les préscriptions ci-dessus devront être
obligatoirement observées.» dans une lêttre d’affaire «Nous avons
l’honneur de...», «Je m’empresse de vous informer..» etc.).
On soudivise l’ensemble des textes du style officiel en quelques genres:
texte de loi, texte administratif, lettre d’affaire, texte de convention nationale.
Chacun de ces genres a ses particularités.

Termes à retenir:

caractères stylistiques pl – стилевые черты


moyens de mise en relief pl – выделительные конструкции

Лекция 6. «Régistres du français : style scientifique»


On fait recours au style scientifique afin de résumer les résultats de
l’activité scientifique et cognitive. Ce type de communication présuppose que les
communicants ont le même niveau d’éducation proffessionnelle, sont des
spécialistes compétents dans le même domaine de la science, sont initiés à la
terminilogie spéciale. Alors le plus souvent les communicants ne sont pas en
contact direct et immédiat: un savant publie son article en y exprimant les
résultats de ses recherches et ses conclusions et attend la réaction de ses confrères
en formes des références, article de réponse. Des débats sur les pages des revues
scientifiques ne sont pas une chose rare. On peut parler du contact immédiat et
direct seulement dans le cas de l’exposé fait à la conférence ou session de quelque
société scientifique. Mais alors le style ne change que très peu la syntaxe est
moins complexe, on cite plus d’exemples et on introduit quelques formules pour
saluer le publique. Le but communicatif est faire connaître, argumenter, prouver.
En passant aux facteurs linguistiques précisons que la forme de
communication est de préférence écrite ( traités, manuscrits, thèse etc.), mais peut
être aussi écrite oralisée (exposé, rapport) ou orale (discussion publique). Caractères
stylistiques sont «logique», «objectivité», «abstraction», «rigueur», «exactitude»,
«concision». Le discours monologique prédomine. Du poin de vue de l’organisation

30
compositionnelle le texte scientifique est divisé en parties, chapitres, paragraphes
dénotés par chiffres et lettres. Les traits particuliers au niveau du lexique sont:
 emploi abondant de la terminologie spéciale des termes nouveaux y
compris (P. ex. dans un article linguistique on peut voir des termes qui ne
sont clairs que pour des spécialistes: signifié, signofiant, discours,
pragmatique, cohérence, topoï (principe d’organisation argumantative qui
est propre à la structure interne d’un mot);
 abréviations (ESP «expressions socialement paradoxales», ADL «théorie
de l’argumentation dans la langue») qui sont employées afin
d’économiser le temps (dans le cas d’un exposé) et la place (dans le cas de
la forme écrite du texte) pusque les mêmes termes parfois à structure
developpée sont repris plusieurs fois;
 emploi du lexique dont la fonction est d’organiser compositionnellemen
l’argumentation dans le texte: «au début de l’article...», «premièrement»,
«deuxièmement», «en guide de conclusion»;
 dans le style scientifique du français (surtout dans des sciences humaines)
des éléménts à valeur affective et appréciative et même métaphores et
comparaisons sont admis: La référence à l’expérience humaine agit
comme un talisman qui dispense d’expliquer les modalités précises ayant
permis la mise en place de la «projection métaphorique».
Il est à noter que le dernier trait a le caractère plus exprimé dans les textes
scientifiques français que dans le style scientifique dans sa tradition russe.
Les traits particuliers au niveau de la grammaire sont:
 emploi large du présent de l’indicatif et des formes impersonnelles du verbe
 les propositions complexes avec de nombreuses conjonctions de
coordination et de subordination
 l’ordre des mots direct
 emploi du pluriel dit «de modestie» (nous au lieu de moi ou je)
 emploi large des moyens de mise en relief (c’est... que, c’est... qui).
On distingue 5 genres au corps du style scientifique: genre académique
(monographie, article scientifique), genre technic (rapport technique, brevet
d’invention, instructions, mode d’emploi), genre didactique (manuels, traités,
cours, abrégés), genre des ouvrages de vulgarisation (brochures, revues telle que
«Science et vie»), genre informatif (ouvrages de références, résumés).

Лекция 7. «Régistres du français : style publiciste»


Le langage de la presse с’est l’instrument essentiel des journalistes et des
publicistes. En parlant de ce style le plus souvent on a en vue les journaux comme
sphère de son emploi. La diversité des journaux à couleurs idéologiques et à
dominantes thématiques différents témoigne du rôle important du statut social et
de la formation culturelle dans ce type de comunication. P. ex. «Le Monde» est

31
adressé aux hommes d’affairs, hauts fonctionnaires, hommes d’état; «Le Figaro»
est aux boirgeois conservateurs, «L’Humanité» n’est destiné qu’ aux
communistes dont le nombre a beaucoup diminué à nos temps, «Les Echos» est
interessant pour les hommes de finances, «L’Equipe» – aux amateurs du sport,
«France-soir» est orienté au publique large. Ce type de communication suppose le
contact indirect des interlocuteurs et de plus ces derniers ont le caractère collectif:
très souvent le journaliste n’exprimant que très rarement son avis à lui n’est ni
connu, ni vu par ses lecteurs et inversement les lecteurs ne sont pour le journaliste
qu’une image assez floue et stéréotypée. Le but de cette communication est
informer et exciter, influancer. Le premier aspect (informer) le rapproche du style
officiel, et le deuxième (exciter, influancer) à la langue des belles lettres.
Facteurs linguistiques sont: forme de communication de préférence écrite,
type du discours – monologue, caractères stylistiques – «standard», «expression».
Les particularités du choix des faits d’expression au niveau du lexique:
 emploi du lexique terminilogique dénotant les phénomènes de la vie sociale
et politique (opinion publique, élections, grands problèmes de l’heure)
 emploi du lexique à valeur axiologique et affective et même des mots
familiers
 emploi large des clichés, des locutions figées, des phraséologismes(Il était
non seulement tout œil, mais aussi toute bouche), des méthaphores
usuelles, des personifications (La montagne a tué toute la famille), des
méthonymies (L’Elysée au lieu du Président de la République)
Les particularités du choix des faits d’expression au niveau de la grammaire:
 fonction particulière de l’article indéfini (La conférence a adopté un
Message aux peuples du monde entier)
 absence de l’article surtout dans des titres (Homme de paix et de raison
article sur la vie de U. Palmé); article zéro remplit dans le texte de la presse
quelques fonction essentielles: a) celle de généralisation (Si l’on admet la
parité à l’Assmblée alors on y admet aussi une limite d’âge. Position bien
délicate!); b) celle d’intensité (Eternel triomphe du bien sur le mal);
 emploi de l’article devant les noms propres qui dans des buts stylistiques
rapproche ce dernier aux noms communs (des Lavales);
 emploi des substantifs abstraits au pluriels (des menaces terroristes dans
ce cas-là la répétition de l’action est accentuée);
 emploi large de la forme passive (Deux personnes ont été arrêtées jeudi...),
des formes du Présent de l’indicatif pour marquer les actions se rapportant
aux tous les trois plans temporaires (présent, futur, passé), des formes du
Futur simple pour marquer les actions passées afin de rendre les faits du
passé comme en perspective (Et ce que devait arriver arriva. Les deux
étrangers de la «Juve» Platini et Bonick trouveront la brèche), emploi
alterné du Passe Simple et du Passé Composé dans le même contexte
(Avant-hier, nous n’avons pas été déçus: il y eut deux «coups») surtout dans

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des reportages sportifs; ce dérnier phénomène remplit quelques fonctions
essentielles telle que a) sert de moyen stylistiique appelé à animer la
narration, la rapprocher du lecteur;b) moyen logique de mise en relief; c) sert
à mettre en valeur soit l’information essentielle (cas du Passé Composé) soit
l’information supplémentaire, des détailles (cas du P.S.) P.ex: A l’évidence,
les Dieux n’aiment pas Rossini: à Vaison, ils l’ont éventé, glaçant son
«Barbier»; à Aix ils l’ ont remis noyé: «Semoramis» reçut une trempe.;
les particularités du syntaxe sont déterminées par deux tendences se manifestant
dans tout texte de la presse: citer, faire voir tous les éléments signifiants de
l’événement, d’une part et atteindre ce but au minimum des faits de la langue;
 emploi large des tours participaux, des groupes de mots à valeur nominative
(les décisions du gouvernement au lieu de «le gouvernement a décidé...), des
groupes du circonstanciel, tour infinitif, la reprise et de l’anticipation (La
crise, ça se soigne..reprise; Avec le même satellite, on peut les échanger
simultanément, dix programmes de télévision en couleur anticipation)
 emploi des propositions incitatives à intonation exclamative, des
questions oratoires.
On soudivise l’ensemble des textes de la presse en deux groupes de genres:
informatifs et analytiques. Parmi les premiers on distingue le reportage et la
note, parmi les derniers – commentaire, éditorial ou article de fond,
polémique, pamphlet.
A notre époque la publicité devient un demaine de la vie sociale à part
dont le rôle et l’importance ne sont pas à contester. Comme la langue est un des
instruments essentiels de cette activité on peut parler du langage de la publicité.
Rappelons-nous que c’est Хованская qui le distingue comme un mode d’emploi
des faits de la langue à part. Bien que les lingustes ne soient pas d’accord sur
l’indépendance de ce style citons quelques caractéristiques de ce langage. Il est à
noter que ce langage est apparenté à celui de la presse: tous les deux ils ont les
mêmes buts communicatifs – informer et exciter. Mais le langage de la publicité
a quelques traits distinctifs. Voilà quelques instructions consernant le langage
proposées par des spécialistes de la publicité aux créateurs débutants:
▪Le style du texte doit être simple, c'est primordial.C’est comme on parle
à l’enfant (Cerise Griotte, j’en suis dévote. Tout bien pesé, je prends le panier.
Panier de Yoplait – publicité d’un yogourt) Mais simple ne veut pas dire banal.
L'originalité doit naître de la simplicité.
▪La longueur du texte varie selon le produit, l'argumentation, la nature du
message et la surface de l'annonce. Le texte doit être fait de phrases courtes,
divisées en paragraphes, de façon à être mieux compris (Cheveux au soleil.
Votre coiffeur Kérastase Veille sur eux. Avec le Système Photodéfense de
Kérastase Solaire, vos cheveux se donnent Pleinement au Soleil. Sans aucun
regret.) Le texte se termine par une conclusion qui doit susciter l'action de la
part du lecteur. Dans ce cas-là l’imperatif est empoyé souvent (Profitez du soleil
avec la sécurité HEI POA).

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▪Le message publicitaire contient enfin très souvent un slogan. Le slogan
est une expression, généralement brève et imagée, qui est lié à la marque. Le
rôle du slogan est de provoquer une association mécanique de la marque avec
son avantage principal: "Bienvenue dans la vie point COM" France tétélecom,
"activateur de croissance pour votre épargne" Radobank.be.
▪Pour le message publicitaire le mode particulier d’actualisation des unités
lexicales de la langue est caractéristique: à l’aide de contexte on fait jouer à la
fois et le sense abstrait du locution, du mot et le sens abstrait ce qui donne aux
récipients de ce message l’impression de participer à un jeu, alors cela amuse et
plaît («Quand une femme tient à la beauté de son buste Clarins la soutient» –
publicité des produits soignant les seins; «Jusqu’au bout des ongles avec
Revlon» – publicité du vernis à ongles).
Comme nous avons délà noté un des problèmes de la classification des styles
fonctionnels provoquant le plus de disputes c’est le statut de la langue des belles lettres.
Sous le terme «langue des belles lettres» on sousentend l’ensemble des
styles individuels des écrivains et des poètes. La différence essentielle entre le
langage parlé et les styles écrits d’une part et l’expression littéraire de l’autre
c’est que les premiers sont employés dans telle ou telle autre sphère de la vie, et
y sont, pour ainsi dire attachés, tandis que l’expression littéraire ne l’est pas. Il
est impossible de nommer un milieu social ou proffessionnel qui n’ait fourni de
la matière aux écrivains. L’écrivain met en œuvre tous les faits de la langue
choisis dans des sphères différentes de l’activité humaine pour exprimer son
ideé par des images concrètes, par des tableaux, pour peindre la réalité telle qu’il
la conçoit. Alors un des traits de ce style consiste en rôle particulier des faits
de la langue comme matière servant à créer des images et tableaux de la vie.
Nous avons déja parlé de l’autre trait distinctif de ce style – tous les faits
de la langue choisis et actualisés par l’auteur servent à réaliser la fonction
estétique de tout l’œuvre.
Troisième caractéristique de la langue des belles lettres est qu’une seule
et même œuvre littéraire réunit parfois des éléments particuliers aux styles
les plus divers.
Du fait que l’expression littéraire est non seulement intellectuelle mais affective
aussi, l’emploi des mots au figuré prend une très grande importance. Ce sont de
préference des combinations, des modifications de sens innattendus, faisant naître des
associations nouvelles. On peut considérer cet emploi plus au moins fréquant des
tropes individuelles comme encore une caractéristique de style en question.

Лекция 8. «Régistres du français : le français parlé»


Du point de vue des facteurs extralinguistiques le langage parlé est
employé dans la sphère de la vie quotidienne où le statut social des
communicants n’a pas de grande importance ou bien les communicants ont le
même statut. On se sert de ce type du langage dans des situations ordinaires,

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dans des lieux familiers (à domicile, au café, dans les rues) quand les
interlocuteurs se connaissent bien, se sentent libres de s’exprimer, laissent
facilement voir leurs émotions et attitudes et peuvent recourir aux gestes et à la
mimique.Du point de vue des facteurs linguistique il est à constater que le
langage de tous les jours se réalise de préférance dans la forme orale, se
manifestant le plus souvent au discours dialogique où on voit clair ses
caractèristiques stylistiques essentiels: affectivité, expressivité, spontanéité,
caractère situationnel. Dans le domaine du choix des faits d’expression il faut
citer des particularités suivantes:
1) au niveau de la phonétique
 on voit apparaître accent supplémentaire (C’est formidable!),
 les liaisons se font de moins en moins (Les Anglais sont arrivés ici)
 la chute de e instable là où il serait respecté par le style soigné (j’veux
bien) et des voyelles dans des syllabes inaccentuées (v(oi)là)
 la réduction de certaines consonnes (Je suis heureux d’êt(re) à
Novokouznetsk)
 la pronontiation des consonnes finales dans des monosyllabes (but, fait) et
les adjectifs numéraux (cinq francs)
 chute du pronom il et de la négation ne (J’sais pas)
2) au niveaux de la grammaire
 propositions simples ou incomplètes ou inachevées
 constructions syntaxiques contaminées dites «anaculuthes»
 tendence à conserver l’ordre direct des mots
 l’emploi large des moyens de mise en relief (construction «c’est...que»,
«ce qui... c’est», l’anticipation, la reprise
 tendence à unifier les formes grammaticales (la féminisation des substantifs,
unification des formes du singulier et du pluriel: *corails au lieu de coraux,
on évite les formes meilleur, pire, moindre, préférant former les degrès de
comparaison des adjectifs «bon», «petit», «mauvais» d’après le modèle
commun, unification analogique de la conjugaison des verbes)
 emploi large du présent de l’indicatif
3) au niveau du lexique
 le lexique neutre à la base
 le lexique familier et populaire dont les nuances affectives se font voir
assez souvent à travers des suffixes diminutifs et péjoratifs (-ot, -otte / -
aille, -ard, -asse, -aud,-ailler,-asser)
 emploi large des mots formés au moyen de l’abreviation et de la
réduplication (ciné, proprio, dodo «баиньки», bobo «вавка»), des série
phraséologiques, des proverbes et des dictons, des métaphores usuelles,
des mots à tout faire (mots-omnibus): chose, machin, truc; des épitètes
hyperboliques, laudatives, dépréciatives
 renouvellement du sens des mots déjà existants: termes de métiers, mots
empruntés aux parlers locaux, aux jargons, aux autres langues.

35
Le langage populaire c’est un ensemble des faits d’expression de la
langue qui sont considérés comme typiques dans un milieu mal éduqué, peu
instruit et ne peut être défini que par rapport au bon usage. Le langage populaire
viole la norme littéraire. Mais en même temps si on rencontre le lexique du
langage populaire dans la conversation des gens bien élevés et bien éduqué ce
n’est que la marque de la familiarité entre les interlocuteurs.
Ex: pue-la sueur gros travailleur
L’argot. Quand les usagers d’une langue appartiennent à un même groupe
social ou professionnel, on voit paraître dans leur langage des mots et des
expressions spécifiques. Le parler d’un groupe social ou professionnel plus ou
moins restreint, dont les membres se servent, à côté du vocabulaire commun,
d’un lexique particulier est appelé le jargon. L’ensemble des jargons est l’argot.
On rapporte à l’argot et un groupe du lexique affectif et axiologique qui désigne
les notions dont le contenu logique contient l’élément axiologique:
Je suis dans la dèche, je n’ai même pas de sous pour m’acheter des clopes.
Peux-tu me prêter un peu de fric ?
L'argot français contemporain est une forme d'argot parlé en France par
une partie de la jeunesse. On l'appelle aussi langue djeunz, (de djeunz, qui
signifie «jeunes» dans cet argot) car ses locuteurs font essentiellement partie de
la jeunesse, ou encore par langue des cités ou argot des cités, parce qu'il se parle
particulièrement dans les quartiers populaires (les cités) de France.
L'argot contemporain répond aux mêmes finalités que l'argot classique. Il
conserve notamment les mêmes fonctions exclusive et identitaire, même si c'est
cette dernière qui prédomine. Cependant, l'apparition du langage SMS et surtout
la diffusion de la culture hip-hop sur une large échelle a permis deux évolutions:
D'une part il a permis de diffuser cet argot dans la société en dehors des
quartiers populaires où il était utilisé principalement, ce qui a déplacé une partie
du vocabulaire propre à cet argot dans le registre familier.
D'autre part, il a permis une relative unification de cet argot au niveau du
pays, même si des nuances locales et régionales continuent d'exister.
Le franglais.Malgré les tentatives de l’Académie Française de bannir le
vocabulaire anglais de la belle langue française , aussi bien le monde des affaires
que les jeunes ont tendance à emprunter des mots à l’anglais, prononcés à la
française, d’ou le terme fran-glais.
Citons comme exemple: le joint, un must, le walkman (il existe un
équivalent français: un baladeur), cool, relax.
Les abréviations. Phénomène très courant en français parlé, il consiste à priver
le mot de sa dernière syllabe. Sympathique devient sympa, restaurant devient resto.
D’autres exemples : manif, appart. Par ex. «Le petit déj et l"info à 7 heures du mat».
Le verlan. Les verlan est la preuve même de la volonté de créer une
langue secrète. Le principe semble simple: inverser les syllabes du mot, donc le
prononcer à l’envers (ver-lan). Dans la pratique par contre, il ne va pas de soi de
reconnaître les mots. Le verlan est surtout populaire dans la banlieue parisienne.
Limitons-nous à quelques exemples, parce que ce phénomène linguistique est

36
très sujet à la mode. On a ainsi commencé à renverser les mots à nouveau,
frisant l’incompréhensible.
Keum < mec
Beur < arabe
Zarbi < bizarre
Laisse beton < laisse tomber
Le langage Short Message Service est aussi un sociolecte écrit qui modifie
les caractéristiques orthographiques voire grammaticales d'une langue afin de
réduire sa longueur, dans le but de ne pas dépasser le nombre de caractères
autorisé par les messages SMS, ou dans le but d'accélérer la saisie de l'énoncé
sur un clavier numérique d'un téléphone.
L'appellation «langage SMS» désigne ainsi, par extension, l'usage de ce
type de langage lors d'échanges sur Internet par messagerie instantanée ou
courrier électronique, sur les forums Internet et les blogs, ou encore dans les
jeux en réseau. L'utilisation du langage SMS sur un autre médium qu'un clavier
téléphonique est par ailleurs très controversée.
Le langage SMS, apparu avec la banalisation des technologies de
l'information et de la communication au cours des années 1990, combine
plusieurs procédés pour raccourcir les phrases et les mots:
L'abréviation: lgtps, tt, pr,"slt"; la plupart des voyelles sont écartées,
certaines consonnes sont également retirées, mais le mot reste plus ou moins
lisible et compréhensible;
La phonétique: koi, jamè, grav, eske; il faut prononcer les syllabes
normalement pour reconstituer le mot d'origine ;
Le rébus typographique : 2m1 = demain, bi1 = bien, koi 2 9 = quoi de neuf.
Valeur épellative des lettres, des chiffres et des caractères : G pour «j'ai»,
C pour «c'est», a12c4 pour «À un de ces quatre» 2m1, «demain», bi1, «bien»,
koi 2 9, «quoi de neuf». Le procédé vient de l'anglais (R pour «are», U pour
«you»), langue dans laquelle ce procédé n'est pas l'exclusivité des jeunes. Ainsi
dans le langage de programmation de Matlab, «convertir un nombre (number) en
texte brut (string)» se dit num2str, le «2» se lisant to, «vers».
Utilisation de mots anglais plus courts (today pour aujourd'hui, now pour
maintenant, etc.).
Le langage SMS répond à la limitation à environ 160 caractères des
messages SMS entre téléphones portables (le dépassement du nombre autorisé
de caractères rend l'envoi du message plus cher par multiplication des messages)
et de la limitation à dix touches du clavier alphanumérique.
Le langage SMS est essentiellement dérivé de la communication verbale
et a donc pour caractéristique de posséder une syntaxe et un vocabulaire propres,
différents du langage écrit «standard». L'exemple suivant illustre cependant les
principes de formation du langage.
Soit le texte suivant:

37
«La linguistique par ordinateur pourrait tirer profit d'une langue abrégée à
la fois dans sa syntaxe et ses matériaux – non seulement du point de vue de la
mémoire – mais surtout du point de vue de l'analyse algorithmique du langage
humain, la particularité d'une langue abrégée étant de supprimer ou de
contourner les idiomatismes.» (331 caractères)
Application de la suppression des caractères inutiles
On supprime tous les espaces et on met une majuscule à chaque mot pour
faciliter la lecture. Ce type de langage SMS est un des plus compressant tout en
restant assez lisible pour une personne qui ne serait pas habituée. C'est aussi la
façon de compresser les phrases de la plupart des étrangers écrivant un SMS en
langage SMS français (mais elle se limite généralement à la suppression des
espaces, ce qui donne déjà un bon taux de compression).
LaLinguistiqParOrdinateurPouraiTirerProfiDUneLangAbrégéÀLaFoiDanSa
SyntaxEtSesMatériau -NonSeulmntDuPoinDVuDLaMémoir-
MaiSurtouDuPoinDVuDLAnalyseAlgoritmiqDuLangageHumain,LaParticularitéD
UneLangAbrégéÉtanDSuprimerOuDContournerLesIdiomatism. (239 caractères)
La phrase a ainsi été compressée de 28%.
Application de la phonétisation, du rébus typographique et de l'abréviation.
On peut compresser encore le texte grâce à des abréviations. Le texte
devient nettement moins compréhensible. La manière d'abréger dépend des
utilisateurs et du «style» SMS adopté. Des utilisateurs peuvent convenir de
certains codes. Souvent, seuls les utilisateurs assez expérimentés comprennent.
Lngk pr ordi pov7 tir pft du lng abr al fs dn sn sytx e sn matr# - nn slmt
ptdv mmr - ms srtt ptdv algo spc a lngg hm, 1prtk lng abr = 8:supr o ktrn idiom#.
(156 caractères)
Écrite comme ça, le taux de compression atteint les 53% pour cette phrase.

Termes à retenir:

caractère m - графема, буква


sociolecte m - социолект
compression f - компрессия
langage SMS m - СМС сленг
franglais m – сленг на основе смеси английского и французского языков
registre familier m – разговорный язык
Лекция 9. «Effects stylistiques dans le texte»
Personnification est une des variétés de la métaphore. Ce trope consiste à
évoquer un objet ou une idée sous les traits d'un être humain.
Ex.: Le soleil aussi attendait Chloé, mais lui pouvait s'amuser à faire des
ombres. Boris Vian
Parfois la périphrase est aussi parfois considéré comme un trope.
Certains linguistes la classe parmi les figures dites «figures de voisinage»
puisque au lieu d’une nomination on emploie celle qui est perçue comme voisine.

38
D’autres stylisticiens lui rapplique le nom de «figure de substitution» puisque
elle remplace une nomination par une autre. Quand même le mécanisme de ce
phénomène est suivant:elle remplace un mot par sa définition.
Ex.: La Venise du Nord = Bruges; la capitale de l'hexagone= Paris.
La comparaison: elle rapproche deux éléments comportant une
caractéristique commune, une analogie (le terme comparé et le terme comparant),
à l'aide d'un mot comparatif (comme, pareil à, semblable à, il semble etc.).
Ex.: Son regard est pareil au regard des statues ... Paul Verlaine
L’allégorie: elle consiste à représenter de façon imagée, en la
matérialisant, une idée abstraite.
C'est une image littéraire dont le phore (comparant) est appliqué au thème
(sujet comparé) non globalement comme dans la métaphore, mais élément par
élément ou du moins avec une personnification.
Ex.: Mon beau navire ô ma mémoire / Avons-nous assez navigué / Dans
une onde mauvaise à boire / Avons-nous assez divagué / De la belle aube au
triste soir ... Guillaume Apollinaire
Ici la mémoire est matérialisée par l'image du navire à la dérive.
La rêverie... une jeune femme merveilleuse, imprévisible, tendre,
énigmatique, à qui je ne demande jamais compte de ses fugues... André Breton
Le symbole: Expression indirecte au moyen d'un récit, fable, d'images qui
suggèrent ce qu'on veut exprimer. On distingue le sens littéral du sens
symbolique. Le symbole est un système de métaphores suivies.
Ex. L'albatros de Baudelaire, le pélican de "La nuit de mai" de Musset
L’antanaclase (ce terme signifie proprement “répercussion”) est la
répétition du même mot dans deux sens différents. Elle joue donc sur la
multiplicité des sens, la polysémie, qui constitue une donnée essentielle du
lexique, et de la langue en général.
Elle ne se confond pas avec la syllepse, qui emploie dans la même phrase un
mot pris dans son sens propre et dans son sens figuré (métaphorique ou métonymique :
le mot “pervenches” par exemple, pour désigner les donneuses de contraventions aussi
bien que les fleurs elles-mêmes. L’antanaclase, elle, joue sur deux sens propres.
Un slogan publicitaire joue de même sur les deux sens qu'a le verbe
changer selon qu'il est employé à la voix pronominale ou non:
Vous vous changez, changez de Kelton.
L’antanaclase conduit au calembour (l'origine de ce mot est inconnue, et
l'on se contente parfois de lui supposer une parenté avec le mot bourde). Mais le
calembour, contrairement à l'antanaclase proprement dite, n'exige pas la
répétition du mot sur les sens duquel on joue; il ne l'exclut pas y pour autant:
[...] c'est une embarcation; elle fond sur nous comme un morceau de
beurre dans un autoclave.
Le calembour repose ici sur la polysémie du verbe fondre.
Calambour, on le retrouve abondemment chez Raymond Devos,
humoriste célèbre belge:

39
[...] mon père a fait toutes les guerres en tant que clairon. D'ailleurs, pour
mon père, la guerre, c'était une belle sonnerie...
La paronomase (on trouve aussi parfois les termes de paronomasie ou de
prosonomasie) est la figure qui consiste à rapprocher des paronymes.
Rappelons que, si des hhomonymes sont des mois aux sonorités identiques, on
appelle paronymes des mots dont les sonorités sont très proches ; nous citions
dans le premier chapitre des paronymes comme bouton et boulon, collège et
collage, etc. La paronomase tente d'attirer l'attention par le rapprochement,
souvent dans une formule concise, de deux paronymes (rarement plus).
Ses aspects énergique, condensé et frappant en font une figure
abondamment utilisee dans le domaine publicitaire: “Le gris qui a un grain” (à
propos d'un vin “gris” poussant dans des régions sablonneuses). On peut lire
chez Montaigne cet aphorisme, où l'auteur se moque de lui-même:
[...] tel [...] fait des Essais qui ne saurai faire des effets.
Figure importante et d'usage fréquent, la litote (du grec iilotês qui signifie
“simplicité, affaiblissement”) consiste à dire moins pour suggérer plus. Ex: –
Va, je ne te hais point ! Pierre Corneille (Par ces mots, Chimène fait comprendre
à Rodrigue qu'elle l'aime.)
L’euphémisme dont l’essentiel est d’atténuer une idée déplaisante repose
parfois sur la litote: on se rappelle qu'une phrase comme “il est assez fatigué” peut
signifier “il est gravement malade”. Le procédé est par ailleurs caractéristique de
la langue des diplomates, toujours soucieux de recourir à des expressions
atténuées dans le but de ne froisser aucun partenaire. Enfin, la même figure
permet souvent telles nuances en demi-teintes de la langue courante: “Hmm! pas
mauvais ce petit canard aux olives” – qu'on trouve à l'évidence délicieux.
Mais c'est quand la litote devient ironique qu'elle est particulièrement
frappante et expressive. Ainsi, tel journaliste politique, commentant naguère les
très mauvais rapports qui existaient entre les différents gouvernements
européens d'une part et le gouvernement libyen d'autre part, tournait ainsi sa
pensée: “Sans doute, les États européens pourraient vivre sans Kadhafi...” –
affirmant par là qu'en réalité c'est avec le plus grand soulagement qu'ils auraient
accueilli la chute du dirigeant libyen.
Le caractère humoristique qui accompagne ici la litote résulte de l'écart
entre la formulation atténuée et la pensée réelle que tout auditeur attentif rétablit
dans toute sa force. Attentif, l'auditeur doit en effet l'être, car seul le contexte (en
l'occurrence l'état des relations entre l'Europe et la Libye) permet de reconnaître
la litote pour ce qu'elle est, et de ne pas prendre l'expression au pied de la lettre.
L'antiphrase c’est le procédé par lequel, comme l'indique exactement son
sens étymologique, on dit le contraire de ce qu'on veut faire entendre.
Celui qui arrive avec deux heures de retard au rendez-vous que vous lui
avez fixé peut s'attendre à l'une de ces trois remarques de votre part :
1. (Furieux, en désignant votre montre) : “Non mais, t'as vu l'heure? Deux
plombes que j't'attends !...”. Ici nul travestissement de la pensée.

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2. (Avec un petit sourire pincé): “Tu es légèrement en retard...”. C'est une litote.
3. (Véhément ou résigné): “Eh! ben, t'es en avance!”. Voilà l'antiphrase.
On comprend que, bien plus encore que la litote, l'antiphrase soit la figure
préférée de l'ironie – qu'elle peut faire surgir dans des contextes divers.
A l'opposé de la litote, l'hyperbole (proprement “action de lancer par-
dessus”, puis “dépassement, exagération”) est bien une exagération de
l'expression par rapport à la réalité de référence: : briller de mille feux,
mourir de honte, un bruit à réveiller un mort.
Elle peut être frappante, grandiose – ou bien devenir humoristique quand
elle atteint à l'inconcevable.
Les procédés qui produisent l'hyperbole sont divers. Lun d'entre eux est
l'accumulation de superlatifs: c’est la plus belle fille du monde. Autre procédé
sur lequel peut reposer l'hyperbole: la comparaison. Il est beau comme dieu.
La tautologie, comme son nom l'indique (tatlo signifie en grec “le même”),
dit la même chose. En pratique, c'est une expression qui affirme une évidence
indiscutable (ce qu'on appelle parfois un truisme, d'après l'anglais true, “vrai”):
mais ce caractère «évident» de l'affirmation tautologique resulte non du contexte
dans lequel elle apparaît, mais de la forme même de l'expression. “Un sou est un
sou”: voilà une vérité contre laquelle il est difficile d'aller, quel que soit le contexte.
Bien sûr, au-delà de l'aspect formel des choses, on peut avoir mille raisons de
construire une tautologie. On peut jouer par exemple sur la polysémie. Dans un sou
est un sou, le premier sou a son sens propre d'unité monétaire, mais le second
affirme plutôt que “c'est toujours quelque chose, ce n'est pas rien, même si c'est
peu”. La nuance sémantique que présente une tautologie peut être fort variable.
C'est avec malice que Salvador Dali, lui, jouait de la tautologie lorsqu'il
affirmait magistralement :
La différence [...] entre moi et un fou, c'est que je ne suis pas fou.
Tous les linguistes remarquent le caractère hétérogène de ces tours qu’on
appelle traditionnellement «figures». Ce qui les unit c’est le fait qu’ils visent le
même but: mettre en lumière un fait. Dans la plupart des cas des moyens
syntaxiques, lexicaux et intonationnels y vont d’ensemble. Mais quand même les
linguistes distiguent quelques types de figures d’après la nature du moyen-clé de
cette figure: figures de l’ordre de mots, F. du lexique, figures de la construction,
figures du voisinage.
Les principales figures de l’ordre des mots sont l’inversion et le
chiasme. Comme le français est un langue à l’ordre des mots fixé, l’inversion en
tant que figure n’est admise que dans le nombre restreint des cas. Ce phénomène
est peu employé dans la prose mais la poésie s’y adonne systèmatiquement ce
qui s’explique par les exigeances de la rythme: Et leur vague regard tout autour
d’eux se pose... Ils se croient endormis dans un paradis rose... (Rimbaud.
Etrennes des orphélins).
Il est possible d'avoir recours à l'inversion dans un grand nombre de
structures: verbe/sujet, verbe/complément, nom/complément du nom, etc. Et si

41
certaines inversions sont exclues par la syntaxe (celle de l'article et du nom, par
exemple), d'autres au contraire sont quasiment prévues par la langue.
C'est le cas notamment dans la structure substantif + épithète. L’épithète,
en français, est en principe postposée : un homme âgé, une montagne élevée, un
parfum exquis. Mais les exceptions abondent: un vieil homme, un haut sommet,
un délicieux parfum (aussi bien qu'un parfum délicieux). Souvent, comme le
montre ce dernier exemple, le locuteur a le choix, et la place de l'épithète donne
lieu alors à un jeu subtil de nuances. Ainsi l'adjectif de couleur est-il normalement
postposé : “voici des pommes rouges”. Mais Victor Hugo, dans ces vers écrit:
Enfants, voici des bœufs qui passent,
Cachez vos rouges tabliers!
(La Légende de la Nonne)
L’epithète, lorsqu’elle est postposée, a souvent un sens plus concret et se
rapprochant plus de son sens premier, que dans le cas où elle est antéposée:
qu'on compare un garçon petit à un petit garçon, un homme grand à un grand
homme. Quand elle est antéposée, l'épithète semble faire corps avec le nom qui
suit: un petit garçon forme une seule unité de sens; tandis que, postposée, elle
est davantage autonome et porte un sens plein qui s'ajoute à celui du substantif:
un garçon qui est petit.
Différente est l'inversion de l'attribut. La place de l'attribut est en effet
aussi réglée par la langue que la place du complément d'objet (verbe + attribut;
verbe + C.O.D.), et son inversion, exceptionnelle, répond toujours à des
intentions rythmiques et/ou expressives, comme dans la première phrase de ce
paragraphe - ou dans ces vers de Verlaine:
Ô triste, triste était mon âme
A cause, à cause d'une femme...
(Ariettes oubliées)
Le chiasme: cette figure est un effet de rythme. Les éléments (nommos-
les A et B) de deux groupes parallèles sont inversés. Le chiasme peut souligner
l'union de deux réalités ou renforcer une antithèse.
Ex.: La neige fait au nord ce qu'au sud fait le sable. Victor Hugo
A B В A
Dans l'exemple, tiré des “Odes et Ballades” de Victor Hugo, A est un
participe passé et B un complément d'agent:
Ces murs maudits par Dieu, par Satan profanés
participe passé complément d'agent complément d'agent participe passé
(A) (B) (B) (A)
Figures du lexique. Parmi les figures qui reposent avant tout sur le choix
d'un mot, ou d'une série de mots, on trouve des procédés correspondant à des
techniques et à des effets très divers: répétitions, gradations, paronomase, litote
et antiphrase, hyperbole, digression, réticence.
Une répétition est la reprise d'un même mot ou groupe de mots. Les
répétitions portent différents noms selon la place qu'occupe cette reprise dans le
discours: répétition simple (ou épanalepse); anaphore et épiphore (ou épistrophe).

42
Dans la narration littéraire la répétiton prend des formes variées:
Ils se taisent... Pluie. Pluie. Pluie. (Rolland.)
La dame en blanc avait ces deux défauts, sans compter un troisième, qui me
désespérait: celui de pleurer, de pleurer, de pleurer. (France. Le livre de mon ami).
L’épanalepse. La répétition la plus simple apparaît lorsque les mots ou
groupes de mots sont répétés dans le même membre de phrase selon le schéma :
A, A—————
Le temps s'en va, le temps s'en va, ma Dame...
"Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! Morne plaine...
ô triste, triste était mon âme
à cause, à cause d'une femme…
Dans la langue courante:
“Un monde fou, fou, fou”; de la ronde: “Gai, gai, marions-nous”; ou de la
chansonnette: “Belles, belles, belles comme le jour”. On voit, à la diversité des
contextes où elle apparaît, la variété des effets qu'on peut en tirer.
Anaphore et épiphore, au lieu d'affecter comme la répétition simple un
même membre de phrase, répètent un élément identique dans des membres de
phrase, ou des vers (voire des phrases entières ou même des paragraphes) qui se
suivent immédiatement.
L'anaphore (“transport en haut, ou en arrière”) est la reprise du même
élément en tête de plusieurs membres successifs, selon le schéma:
A———/A———
L‘exemple peut-être le plus fameux – et qu'à ce titre nous citions dès le
premier chapitre – se trouve dans l'Horace de Corneille :
Rome, l'unique objet de mon ressentiment!
Rome, à qui vient ton bras d'immoler mon amant!
etc.
La figure inverse est plus rare. C'est l'épiphore (“transport à la suite”) ou
epistrophe (“retour”), ou encore antistrophe (même sens). Elle consiste à.
répéter un mot à la fin de plusieurs membres successifs, selon le schéma:
____A / ____A
Elle est en général plus mélancolique que violente. Éventuellement elle
peut aussi faciliter la recherche de la rime... Quelques années après son “Belles,
belles, belles...”, Claude François ponctuait ainsi l'une de ses chansons à l'aide
de l'expression “comme d'habitude” inlassablement reprise:
Sans bruit je quitt' la maison, tout est gris dehors, comm' d'habitude.
J'ai froid, je relev' mon col, comm' d'habitude...
L’épanaphore est la répétition des mots terminants une proposition, au
début de la proposition qui suit: Ils vont s’élogner, chercher ailleurs, et moi je
vais tomber. Je vais tomber sur le seuil de la vie (Saint-Exupéry).
L’anépiphore est encore une variété de répétition: le même mot (ou le
même groupe de mots) se retrouve au début et à la fin dèune strophe, d’un alinéa
ou d’une phrase.

43
On parle de gradation à propos d'une série de plusieurs termes différents
mais de même nature et ayant même fonction grammaticale, juxtaposés ou
coordonnés, et exprimant à des degrés divers à peu près la même idée, que
l'accumulation de termes voisins esl censée rendre avec plus de vigueur.
La gradation qu'on trouve dans ce vers de Victor Hugo est ternaire:
J'attends, je demande, j'implore...
(Paroles sur la dune)
Dans cet autre vers, extrait de L'Année terrible, Hugo présente la guerre
comme une...
[...] buveuse de sang farouche, fletrie, hideuse...
En effet, la gradation n'a de réelle valeur stylistique qu'agencée avec .soin:
elle sera d'autant plus frappante et utile que la progression du sens des mots sera
plus recherchée.
L’antithèse est un procédé stylistique par lequel on souligne, en les
raprochant, l’opposition de deux mots (respectivement de deux choses, de deux
idées). De préférence ces deux mots rapprochés représentent les mêmes
catégories morphologiques.
Au XIXe siècle, même si la figure se rencontre bien entendu chez d'autres
écrivains, elle atteindra des sommets dans la prose comme dans la poésie de
Victor Hugo, sorte d'empereur de l'antithèse, à laquelle l'auteur des Rayons et
des Ombres recourt immodérément. Pour illustrer la fonction du poète, il s'écrie
ici emphatiquement:
Il inonde de sa lumière
Ville et désert, Louvre et chaumière,
Et les plaines et les hauteurs...
(Les Rayons et les Ombres)
Voisinage dans le discours, identité de la catégorie morphologique, identité –
ou du moins équilibre – de la structure syntaxique, toutes ces similitudes
soulignent fortement le contraste sémantique et permettent de produire des effets
tout à fait saisissants – mais parfois assez faciles quand ils deviennent
systématiques – qui font de l'antithèse une figure abondamment utilisée.
A la fois plus violente et plus rare, la figure appelée oxymore (ou alliance
de mots), combine dans un méme syntagme deux mots sémantiquement
opposes et appartenant a des categories grammaticales différentes. Le mot
(masculin) oxymore lui-même résulte de la francisation du terme grec
doxumôron (on dit d'ailleurs parfois, en français, un oxymoron).
Contrairement à la plupart des antithèses, l'oxymore ne s'appuie pas sur
des structures équilibrées (juxtaposition, coordination, symétrie, etc.): ces
équilibres, ces symétries sont exclues du syntagme unique que les deux mots
antithétiques composent.
Ce peut être un syntagme nominal (substantif + épithète), comme lorsque,
dans Les Liaisons dangereuses, Valmont, congédiant sa maîtresse, se plaint de
l'“impitoyable tendresse” de cette dernière. De même, dans un sonnet que nous

44
citions pour d'autres raisons dans le premier chapitre, Du Bellay décrit la “fuite
hautaine” d'un torrent dévastateur.
Mais l'oxymore peut aussi composer un syntagme verbal (verbe + adverbe)
comme dans ce “hâtez-vous lentement” que Boileau reprend de la maxime latine,
attribuée à l'empereur Auguste, festina lente. On voit ce qui fait la force de la
figure : les deux termes antithétiques se complètent sur le plan syntaxique mais
s'opposent sur le plan sémantique. C'est ainsi que, dans une chanson au climat
assez violent intitulée Le rouge et le noir, Claude Nougaro décrit une jeune
femme se passant sur les lèvres “du rouge noir”.
Toutefois, il n'y a pas que de la force dans l'oxymore; souvent, ce qui compte,
c'est la subtilité de la nuance sémantique qu'il suggère. Il est inattendu qu'une
tendresse soit impitoyable. Mais Valmont se fait parfaitement bien comprendre de
Madame de Tourvel, à qui il s'adresse, en lui signifiant par là tout ce que l'amour
qu'elle lui portait avait d'excessif, de pesant et, à la longue, d'ennuyeux.
Faire une prétérition (du latin praeter ‘au-delà’, et ire ‘aller’), c'est annoncer
qu'on ne va pas dire ce qu'on finit, grâce à cette figure, par dire quand même. “Je
ne dirai pas, chers concitoyens, tout le bien qu'on doit penser d'un homme qui, par
sa valeur, son courage, son abnégation, mérite le respect, l'admiration, les
hommages de la communauté à laquelle il fait honneur d'appartenir...”
Diverses formules permettent d'introduire une prétérition: je ne dirai pas
que..., il est inutile de rappeler ici que..., je ne m'attarderai pas à décrire ce...
qui..., après quoi on fait la description de la personne ou de la chose en question.
Le terme de réticence vient du verbe latin reticere, composé de tacere, ‘se
taire’: aussi désigne-t-il l'action de ne pas dire quelque chose, de le garder par-
devers soi en se taisant. Si la prétention finit par permettre de dire ce qu'on était
censé vouloir omettre, la réticence, elle, se contente en général de le faire deviner.
On s'allête au milieu d'une phrase, on n'exprime pas sa pensée jusqu'au bout: à
l'interlocuteur (car la réticence apparaît plus naturellement dans le cadre du
dialogue) de suppléer, grâce au contexte, à ce qui a été incomplètement formulé.
La réticence ne saurait être confondue avec les pures ellipses ou
anacoluthes du langage quotidien – lesquelles hachent et interrompent le
discours sans qu'il y ait là une intention particulière. Dans le cas de la réticence,
on ne s'interrompt pas pour aller plus vite, ou parce que l'interlocuteur a déjà
compris ce qu'on allait dire; au contraire, on fait sentir qu'on s'arrête
volontairement, qu'on s'interdit de poursuivre – ou bien encore il y a une réelle
volonté de dissimuler ce qui allait vous échapper. Le cinéma comme la
littérature y ont souvent recours, surtout lorsqu'ils mettent en scène des
sentiments – amoureux en particulier.
Dans L'Éducation sentimentale, les dialogues entre Frédéric et Louise, la
jeune Nogentaise qui en est amoureuse, présentent à plusieurs reprises la figure.
Ainsi, Louise se plaignant de sa vie monotone, Frédéric tente-t-il de la consoler:
– “Votre père vous aime pourtant ! ”
– “Oui, mais...”
– et Flaubert d'expliciter:

45
Elle poussa un soupir qui signifiait: “Cela ne suffit pas à mon bonheur.”
II y a digression (littéralement ‘action de s'éloigner, de s'écarter’) quand, au
milieu d'un développement, intervient un autre développement relativement long
sur un sujet annexe, ne se rapportant pas directement au thème traité, mais sur
lequel, pour une raison ou une autre, on désire s'attarder. L'occasion fait alors le
larron. On saisit au vol le sujet qui s'est rencontré, et l'on abandonne pour un
temps, quitte à y revenir plus tard, le droit chemin qu'on suivait jusque là.
L’art de la digression est difficile: il peut être assommant qu'un auteur, ou
qu'un simple causeur, se laisse à ce point emporter par ses discours, qu'il finisse,
de changement de sujet en changement de sujet, de digression en digression, par
s'y perdre lui-même et par vous y perdre avec lui. “Où en étais-je?” se demandera
soudain le fougueux, et c'est avec quelque agacement que vous lui rappellerez –
ur peu que vous n'ayez pas cessé de l'écouter! – point d'où il est parti.
D'un autre côté, on peut se lasser des plans trop stricts, des lignes trop
droites, d'une littérature trop cartésienne. Et les vagabondages de la pensée, chez
certains auteurs qui se refusent à tirer un texte au cordeau, peuvent avoir quelque
chose de rafraîchissant.
Dans la langue courante, et dès qu'on sort du cadre restreint du lexique de
la rhétorique, le terme de parenthèse est souvent employé dans le sens de
“digression”, comme dans cette phrase où Saint-Simon, par prétérition, annonce
qu'il ne va pas s'attarder sur un sujet, auquel il va en fait consacrer près de cinq
pages: “On ne se jettera pas ici dans une longue parenthèse pour montrer
combien la prétention des maréchaux de France est destituée de raison...”. Mais,
dans un sens plus strict,- la digression ne saurait se confondre avec la parenthèse.
Cette dernière est en effet de taille modeste et s'inscrit toujours dans les limites
d'une phrase, alors que la digression est un procédé de portée beaucoup plus
large, produisant des développements de dimension très variable et s'inscrivant
dans le cadre de l'organisation générale du discours.
Loin des textes théoriques ou didactiques, il existe aussi des digressions
narratives. On peut trouver bon qu'une histoire n'aille pas tout droit à son but,
comme sur des rails. Le roman moderne s'est reposé cette question de la linéarité
du récit. Au cinéma, c'est avec ce qu'on a appelé la Nouvelle Vague que les
choses ont commencé à changer. Dans les films des Truffaut, des Godard, des
Rivette, il arrive souvent que l'un des protagonistes soit croisé par hasard par un
personnage de passage – et la caméra, brusquement, se met à suivre non plus le
héros, mais le personnage fortuit : digression plus ou rr.ums longue qui ne mène
nuile part, qui s'achève sans raison, avant qu'on ne retourne au récit principal.
Les figures décrites dans le cours précédent affectaient l'ordre des mots
d'une phrase sans remettre en cause sa syntaxe. Les figures de la construcrion
reposent sur un bouleversement des fonctions syntaxiques.
La prolepse consiste à extraire un mot d'une proposition à l'intérieur de
laquelle il devrait normalement se trouver, et à placer ce mot avant elle pour le
mettre en relief: phrase normale «Tu sais comme Jean aime le chocolat»; phrase
à prolepse «Tu sais Jean comme il aime le chocolat».

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Quoi qu'il en soit, la construction proleptique (“ce bouquin, je n'y
comprends rien”) vise bien le thème de l'énoncé, qu'elle permet de mettre en
avant, en relief. Cette mise en relief peut d'ailleurs être obtenue par l'inverse
d'une prolepse, c'est-à-dire en rejetant le thème après sa place attendue – ace où
il est alors remplacé par un pronom. La langue parlée ne cesse d'avoir recours à
ce procédé particulièrement expressif.
Elle m'en a filé, des conseils!
Ce procédé est généralement appelé une reprise. Dans cet exemple la
reprise débouche, ce qui n'est pas toujours le cas, sur une nuance de sens. En
effet, alors que, d'un point de vue strictement sémantique, les deux phrases “je
ne comprends rien à ce bouquin” et “ce bouquin, je n'y comprends rien” sont
équivalentes – n'en va pas de même des phrases “elle m'a filé des conseils” et
“elle m'en a filé, des conseils”, cette dernière formulation ajoutant une idée
d'abondance (elle m'en a filé beaucoup).
L’anacoluthe (du grec anakolouthos, qui signifie ‘qui ne suit pas’,
“inconséquent”) n'est pas autre chose qu'une rupture de construction (terme
qu'on peut préférer au mot savant d'anacoluthe, et qui est de fait souvent utilisé).
Elle est caractéristique du style parlé, que Giono par exemple cherche à imiter ici:
Après boyre, l'homme qui regarde la table et qui soupire, c'est qu'il va parler.
(Un de Baumugnes)
On chercherait en vain une suite logique dans la syntaxe de cette phrase,
dans laquelle l'homme devrait être le sujet d'un verbe principal. L'anacoluthe
consiste à changer brutalement de construction au milieu d'une phrase, comme le
montre encore cet exemple, typique de la langue courante:
Exaspérés par cet arrêt prolongé en rase campagne, le chef de train fit
remonter les passagers dans les wagons.
Exaspéras se rapportant à passagers, en bonne grammaire ce dernier mot
est attendu comme sujet du verbe principal. Or ce sujet n'est pas ies pas-sagers,
mais le chef de train. En somme, l'anacoluthe est d'abord une faute de syntaxe,
comme nous avons vu que le pléonasme, avant d'être une figure j dont on peut
tirer des effets divers, est une faute sémantique.
Si l'anacoluthe est une faute – urante – le a parfois l'avantage d'alléger une
construction trop complexe ; elle peut en revanche être gênante et nuire à la
clarté de l'énoncé. Au reste, on la trouve chez les meilleurs auteurs, comme
l'attestent ces vers de La Fontaine, où la rupture de construction est nette:
Ce n'est pas vous, c'est l'Idole
A qui cet honneur se rend
Et que la gloire en est due...
(L'Ane portant des reliques)
Deux constructions cohabitent ici: 1. “c'est l'idole à qui cet honneur se
rend et à qui la gloire en est due”; 2. “c'est a l'idole que cet honneur se rend et
que la gloire en est due”. La phrase de La Fontaine commence avec la premiere
construction et se termine avec la seconde.

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Quand plusieurs éléments de même niveau syntaxique se suivent dans un
énoncé, ils peuvent être coordonnés ou simplement juxtaposés. Alors peut
apparaître l'une ou l'autre de ces deux figures que sont l’asyndète et la polysyndète.
Asyndète est un mot d'origine grecque qui signifie proprement ‘absence
de liaison’ (a- privatif, syn- “ensemble”, dète “lié”). On est en présence d'une
asyndète lorsque les éléments de même niveau syntaxique dont nous parlions à
l'instant apparaissent les uns à la suite des autres, sans qu'aucune conjonction de
coordination les relie: ils sont juxtaposés, et séparés en général par des virgules.
Le contraire de l'asyndète est la polysyndete (dans ce nom, l'a- privatif est
remplacé par le préfixe poly- qui signifie “nombreux”). Au lieu de juxtaposer les
éléments, la polysyndete les relie systématiquement les uns aux autres par une
même conjonction de coordination (le plus souvent et ou ni, parfois ou, plus
rarement mais).
Il y a une asyndète dans ces vers de Victor Hugo extraits de l'Expiation:
Fuyards, blessés, mourants, caissons, brancards, civières,
On s'écrasait aux ponts pour passer les rivières.
De même, dans Gargantua, les soldats pillards et indisciplinés de
Picrochole raflent tout sur leur passage:
[...] beufz, vaches, thoreaux, veaulx, génisses, brebis, moutons, chèvres et
boucqs, poulies, chappons, poulletz, oysons, jards, porcs, truyes, guoretz;
abastans les noix, vendangeons les vignes, emportans les seps, croulions tous les
fruitz des arbres.
Dans ces deux exemples, l'asyndète est au service d'une énumération, et
produit un effet remarquable d'accumulation.
Mais la figure de l'énumération ne se confond pas avec celle de l'asyndète;
certaines énumérations ont recours aussi bien à la polysyndete, ou à une
alternance des deux figures.
A l'inverse, il n'est pas nécessaire qu'il y ait énumération pour qu'il y ait
asyndète: cette dernière peut en effet être remarquable même lorsqu'elle
n'affecte que deux ou trois éléments – éléments qu'on s'attendrait à trouver reliés:
témoin cette phrase de Maupassant, où l'asyndète porte encore sur deux termes
(qui sont deux propositions indépendantes):
La pleine lune éclairait d'une lueur vive et blafarde tout l'horizon, rendait
plus visible la pâle désolation des champs.
(Conte de Noël)
- phrase qui deviendrait plus banale si l'on y remplaçait la virgule par la
conjonction et que sa composition fait attendre.
Autre exemple chez Biaise Cendrars, avec une asyndète portant sur trois
termes, et soulignée cette fois par l'absence totale de ponctuation:
Le bruit des portes des voix des essieux grinçant sur les rails congelés
(La Prose du Transsibérien et de la Petite Jehanne de France)

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Enfin on peut à la rigueur parler d'asyndète dans le cas de phrases
successives, courtes, et qu'aucun mot ne relie les unes aux autres. Flaubert
excelle dans ce type de composition:
Ses forces reparurent. L'automne s'écoula doucement. Félicité rassurait
MmeAubain.
(Un Cœur simple)
POLYSYNDÉTE
La polysyndète au contraire accumule les mots de liaison. Elle ne se
contente pas de relier un terme au terme suivant, mais fait précéder chacun des
termes, y compris le premier, de la même conjonction de coordination.
Ainsi que l'asyndète, la polysyndète se met parfois au service d'une
enumération, comme dans ces vers de Baudelaire:
Et son bras et sa jambe, et, sa cuisse et ses reins,
Polis comme de l'huile, onduleux comme un cygne,
Passaient devant mes yeux clairvoyants et sereins;
Et son ventre et ses seins, ces grappes de ma vigne…
(Les Bijoux)
Autre exemple de répétition de la conjonction et chez Marguerite
Yourcenar, dans une phrase où la polysyndète finale est d'autant plus
remarquable qu'elle est soulignée par l'emploi conservé des virgules devant
chaque conjonction, et qu'elle s'oppose aux juxtapositions initiales:
[...] ces hommes qui comme nous croquèrent des olives, burent du vin,
s'engluèrent les doigts de miel, luttèrent contre le vent aigre et la pluie
aveuglante, et cherchèrent en été l'ombre d'un platane, et jouirent, et pensèrent,
et vieillirent, et moururent.
(Carnets de notes de "Mémoires d'Hadrien")
Enfin, dans l'Ancien Testament, le mot «et» est repris sans cesse, de
manière obsédante et systématique:
Et Dieu se souvint de Noé et de tous les animaux et de tout le bétail qui
était avec lui dans l'arche, et Dieujït passer un vent sur la terre, et ies eaux
s'abaissèrent.
Et les sources de l'abîme et les écluses des cieux se fermèrent, et la pluie
fut arrêtée dans les deux. Et les eaux quittaient la terre s'en allant et se retirant, et
les eaux diminuèrent...
(Genèse, 8, 1-3, trad. H. A. Perret-Gentil)
Mais la conjonction «et» n'est pas la seule à fournir des polysyndètes: dans
ces vers de Mallarmé, les termes sont reliés par la conjonction «ni», la structure
polysyndétique se compliquant encore d'un «et» conclusif qui précède le dernier ni:
Rien, ni les vieux jardins re/létés par les yeux
Ne retiendra ce cœur qui dans la mer se trempe
O nuits! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.

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(Brise marine)
Enfin, dans ce passage de Racine où Phèdre tente d'avouer son amour à
Hippolyte, la polysyndète s'appuie cette fois sur la conjonction «mais» (on
notera par ailleurs qu'aucune énumération n'apparaît ici):
Oui, Prince, je languis, je brûle pour Thésée,
Je l'aime, non point tel que l'ont vu les enfers,
[...]
Mais fidele, mais fier, et même un peu farouche...
Signalons pour finir qu' assurément il serait faux de parler d'asyn-dète
chaque fois que deux mots sont juxtaposés, et de polysyndète dès qu'on
rencontre une coordination. Comme toute figure, ces procédés correspondent a
un écart par rapport à la norme c'est bien cet écart qui seul nous permet de
repérer l'asyndète ou la polysyndète.
L'ELLIPSE ET LE ZEUGME
L'ellipse (etymologiquement “manque, défaut de quelque chose”) consiste
à supprimer certains éléments d'une phrase sans en modifier ou en amoindrir le
sens. Elle permet ou bien une exprèssion plus vive, parce que plus brève
(aboutissant à la brachylogie, c'est-à-dire là la brièveté dans le discours, dans le
style) – ou bien le rapprochement de deux termes qui, sans elle, seraient séparés
l'un de l'autre, et dont la confrontation est frappante à un titre quelconque.
Souvent ces deux effets se combinent.
Elle abonde dans le style relâché de la conversation courante (que R.
Jakobson appelle un “sous-code brachylogique”, lequel est aussi marqué par
l’anacoluthe), mais elle ne prend véritablement son caractère de figure que
lorsqu'un de ses effets particuliers, concision ou rapprochement expressif de
deux mots, est recherché.
Elle constitue un atout majeur de toutes les formules qui tirent leur force
de leur brièveté – les aphorismes:
Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au delà.
(Pascal, Pensées, 294)
ou les dictons:
Araignée du soir, espoir.
Elle permet aussi d'éviter certaines répétitions qui alourdiraient
l'expression; tel était le cas dans l'aphorisme de Pascal – et dans cette phrase
extraite de la correspondance de Marcel Proust, l'ellipse permet de ne pas répéter
le verbe «retenir» dans la parenthèse:
Pour le règlement d'une question fort douteuse il retient préalablement en
gage (comme les Allemands en Belgique) quelque chose qui m'appartient.
Toutefois, la manipulation de cette figure peut se révéler délicate. Mal
maîtrisée, elle peut obscurcir la pensée, aboutir à une ambiguïté:
Chocolat commence par «c» et finit par «f».
L’ellipse (malicieuse en l'occurrence) du verbe commencer dans la
seconde proposition (“et finit [commence] par f”) provoque ce qu'on appelle une

50
amphibologie, ou construction ambiguë. Cette ambiguïté est d'ailleurs aussi le
résultat du jeu sur le mot finit, qui ici, au lieu de signifier “finir”, se désigne lui-
même en tant que mot de cinq lettres commençant par un.
Mais bien utilisée, l'ellipse peut donner une grande force à l'expression,
comme en témoigne, dans Andromaque, cette réplique d'Hermione à Pyrrhus, qui
constitue l'une des ellipses les plus célèbres – et les plus brutales – de notre littérature:
Je t'aimais inconstant ; qu'aurais-je fait fidèle?
où le mot fidèle remplace à lui seul toute la proposition “si tu avais été fidèle”.
LE ZEUGME
Abordons une sorte d'ellipse qui joue aussi sur le sens, et non plus
seulement sur la construction. Il s'agit du zeugme (du grec zeugma qui signifie
“attelage” – il arrive d'ailleurs qu'on utilise la forme non francisée du mot, ou au
contraire sa traduction). L‘ellipse d'un mot ou d'un groupe de mots qui devraient
normalement être répétés a pour conséquence, dans le cas d'un zeugme de mettre
sur le même plan syntaxique deux éléments appartenant à des registres
sémantiques très différents. Un célèbre exemple de cette figure apparaît dans le
vers où Victor Hugo décrit un personnage…
Vêtu de probité candide et de lin blanc...
Même si candide signifie “blanc” en latin – et bien sûr Hugo joue aussi sur
ce sens étymologique – il est clair que les deux expressions “probité candide” et
“lin blanc” relèvent, sur le plan sémantique, de registres tout différents: la
première appartient à un registre abstrait; la deuxième à un registre concret. Ces
deux expressions sont pourtant rattachées par le même lien syntaxique à l'unique
participe vêtu, dont elles constituent les deux compléments. On peut donc dire
qu'elles sont toutes deux attelées au même mot – d'oû le nom de la figure. C'est
évidemment le contraste entre une construction identique et un écart sémantique
qui rend frappante l'expression et donne, au vers toute sa vigueur.
On voit par ailleurs comment cette figure se rattache à l'ellipse – ici celle
d'un second vêtu. Si ce mot avait été répété devant de lin blanc (“vêtu de probité
candide et vêtu de lin blanc”), l'aspect majeur du zeugme, cet attelage qui le
caractérise, aurait disparu.
Mais même si cette ellipse - qui est toujours celle d'un mot qui devrait être
répété – accompagne dans la plupart des cas notre figure, ce n'est pas elle qui
définit le zeugme, comme le montre par exemple cette phrase de San Antonio où
l'identité de construction s'oppose bien à la différence des registres sémantiques,
sans qu'une réelle ellipse apparaisse:
Vous désirez me demande-t-elle en souriant et en espagnol.
(op. cit.)
Il serait en effet bien difficile ici de répéter me demande-t-elle devant en
espagnol.
L’essentiel de la figure repose donc dans ce jeu permettant d'associer des
éléments qui, comme dans l'exemple d'Hugo ci-dessus, se répartissent entre
registre abstrait et registre concret. C'est encore une répartition de ce type qu'on

51
trouve dans une phrase que Rousseau, dans La Nouvelle Héloïse, fait écrire à
Julie à propos des arie italiennes qu'elle apprend à chanter:
Cette musique [...] est précisément celle qu'il faut à mon cœur et à mes
poumons.
Julie veut dire que cette musique l'émeut (registre abstrait), et qu'elle épargne
son souffle (registre concn'l). La figure, on le voil, touche au calembour (figure sur
laquelle nous reviendrons), en ceci qu'elle jonc sur le double sens du mot cœur, qui
désigne ou bien l'organe que l'on sait, ou bien le siège des sentiments.
DOUBLE SENS, DOUBLE CONSTRUCTION
Mais ce double sens caractérise bien plus souvent le mot qui commande la
double construction. Nous avons par exemple rencontré dans le prémier chapitre
cette annonce d'un restaurateur:
Retenez cette date et votre table.
Le verbe retenir est ici employé à la fois dans le sens de se rappeler et
dans celui de réserver. De la même manière, la Julie de Rousseau utilise le verbe
donner dans des sens assez différents quand elle affirme que, dans le cas d'une
grossesse, son père lui “donnerait la mort ou [s] un amant”. Maupassant, lui,
joue sur la variété des constructions – et par conséquent des sens – qu'admet le
verbe prendre dans cette phrase où le zeugme comporte exceptionnellement trois
termes (prendre, quelque chose, prendre des nouvelles, prendre peur):
Il resta quelques heures à causer dans les six maisons qui forment le
centre du pays, prit son pain et des nouvelles, et un peu de cette peur épandue
sur la campagne.
(Conte de Noël)
Enfin, dans l'exemple de Victor Hugo que nous citions plus haut, le mot
vêtu, pour pouvoir s'accorder avec probité puis avec lin, devait être pris d'abord
au sens métaphorique, puis au sens propre (ce qui constitue d'ailleurs une sorte
de syllepse – cf. p. 113).
On peut pousser le jeu plus loin encore. Un humoriste dira par exemple:
La route a été détournée par un chemin de campagne et (par) la
gendarmerié.
La préposition «par» introduit d'abord un complément de lieu, ensuite un
complément d'agent (et l'on voit que le zeugme est évidemment plus frappant si
l'on va jusqu'à ne pas répéter cette préposition).
Les effets humoristiques ne manquent d'ailleurs pas d'apparaître avec une
figure qui peut si facilement provoquer des rapprochements incongrus. Nous les
avons rencontrés plus haut chez San Antonio (“en souriant et en espagnol”) – et
les retrouvons chez le chanteur Renaud qui, contant les malheurs de “la Pépète”,
nous la montre qui se console en allant “manger une pizza au jambon et au
centre commercial”...
Ces exemples montrent en tout cas que l'ellipse est loin de suffire à définir
le zeugme dans son emploi actuel. Fort de son double jeu sémantico-syntaxique

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et des effets spécifiques et variés qu'il produit, celui-ci est bien une figure
autonome – dont l'usage est en outre, comme on vient de le voir, assez répandu.
L’APPOSITION
L'APPOSITION, FIGURE EXPANSIVE
L’apposition est un nom, ou un groupe nominal, qui s'ajoute, séparé de lui
en général par une virgule, a un nom qu'il fait alors se déployer dans une
direction particulière: Rome, capitale de l’Italie. Contrairement à l'ellipse, qui
condensait le discours, l'apposition est donc, au même titre que le pléonasme, la
périphrase, une figure expansive, et ce qui la caractérise comme expansive, c'est
qu'elle n'est jamais nécessaire sur le plan syntaxique: si on la supprimait, la
phrase, bien entendu, aurait en quelque sorte moins de sens, mais resterait
absolument correcte grammaticalement.
L’apposition sert souvent à préciser et à mettre en lumière les connotations
du mot initial sur lesquelles on veut insister. C'est notamment le cas avec un nom
propre qui, n'ayant pas de sens en lui-même, peut ainsi être cerné: par ex. le
journaliste Hector Bianciotti dans les colonnes du Monde écrit: «Schopenhauer –
ce pessimiste professionnel qui possédait toutes les œuvres de Rossini et qui,
assure-t-on, les jouait tous les jours les unes après les autres- parle, lui...»
On remarque qu'ici, vu la longueur de l'apposition, l'écrivain a préféré,
selon l'usage moderne, les tirets aux virgules.
Mais il n'y a évidemment pas que les noms propres qui admettent une
apposition. Cette dernière peut être accolée à un nom commun, comme dans
cette phrase de Victor Hugo, extraite de L'Homme qui rit:
La grammaire, cette logique, n'admet pas de singulier pour les ténèbres.
Enfin, l'apposition peut servir à introduire cette forme de la métaphore que
nous avions appelée métaphore explicite ou par combinaison… Nous citions à
cette occasion l'apostrophe – cette interpellation brutale qui interrompt le
discours – d'Apollinaire dans Zone “Bergère ô tour Eiffel...”, ou bien le “blanc
cheval aurore”. Ces exemples montrent qu'aucune pause n'y sépare l'apposition
du mot qu'elle complète, si bien que les deux termes, le mot apposé comme le
mot complété, sont exactement placés sur le même plan et ne peuvent plus se
distinguer. L’ apposition permet alors de faire coexister dans le discours le terme
propre et le terme métaphorique, ce qui illustre le rôle connotatif que nous
reconnaissions plus haut à cette figure.
Termes à retenir:

personnification f – олицитворение
tautologie f – тавтология
hyperbole f – гипербола
antiphrase f – антифразис

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ЗАДАНИЯ К СЕМИНАРСКИМ ЗАНЯТИЯМ

Семинарское занятие № 1 «Images métaphoriques et métonymiques»

1. Notion de l’expressivité. Notions du trope et de la figure.


2. Sources linguistiques des tropes. Notion de l’actualisation de l’unité de la
langue. Actualisation lexicale, actualisation grammaticale.
3. Typologie des tropes. Métaphore et metonymie, problème de leur distinction.
4. Types des métaphores: métaphores pures, filée, brisée, explicite.
5. Types des métonymies: synécdoque, antonomase.
6. Fonctions et particularités des métaphores et des métonymies dans de différants
styles fonctionnels: analyse des textes contenant des tropes en question.

Семинарское занятие №2 «Figures de lexique de nature tropéique»

1. Allégorie
2. Symbole
3. Personnification
4. Comparaison imagée
5. Hyperbole
6. Litote
7. Epitète: types, fonctions (caractérisante, expressive, axiologique).

Семинарское занятие № 3 «Figures non tropéique»

1. Types des figures: figures de l’ordre de mots, figures du lexique, figures de


construction.
2. Variantes de l’inversion (verbe/sujet, verbe/complément, nom/complément
du nom).
3. Répétition (anaphorique, épiphorique, épanalepse).
4. Chiasme.
5. Euphémisme. Tautologie. Réticence. Digression.
6. Antiphrase, antithèse.
7. Reprise et anticipation. Anacoluthe.
8. Procédés stylistiques de nature différente: analyse des textes littéraires.

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Семинарское занятие № 4 «Style officiel»
1. Notion du style fonctionnel. Style fonctionnel et régistre de la langue.
2. Typologie des styles fonctionnels. Problèmes de la classification des styles
fonctionnels.
3. Developpement et évolution des styles fonctionnels au cours de l’histoire de
la langue française.
4. Différenciation et frontières entre les styles fonctionnels. Notion de la norme
interne d’un style langagier.
5. Style officiel: caractéristique générale.
6. Style officiel dans sa forme éctite oralisée.
7. Style officiel: lexique et vocabulaire.
8. Style officiel: morphologie et syntaxe.

Семинарское занятие № 5 «Style scientifique»


1. Style scientifique: caractéristique générale.
2. Style scientifique: lexique et vocabulaire.
3. Style scientifique: morphologie et syntaxe.
4. Analyse des échantillons du style.

Семинарское занятие № 6 «Styles publisiste et publicitaire»

Style publisiste : caractéristique générale.


2. Particularités du style publisiste au niveau du lexique.
3. Particularités du style publisiste au niveau de morphologie et de syntaxe.
4. Genres du style publisiste : éditorial, reportage, interview.
5. Principes d’oganisation du message publicitaire. Particularités lexicales et
grammaticales. Moyens d’expression employés dans des textes de la publicité.
9. Analyse des échantillons des styles étudiés.

Семинарское занятие № 7 «Français parlé et ses variations»

1. Français parlé: généralités.


2. Problème de la typologie des styles parlés: différenciation du langage familier,
argo et langage populaire.
3. Particularités linguistiques des styles parlés: phonétique et lexique.
4. Particularités linguistiques des styles parlés: morphologie et syntaxe.
5. Fonctions des jargons dans la communication.
6. Analyse des échantillons des styles étudiés.

55
Семинарское занятие № 8 «Effects stylistiques dans le texte»

1. L’auteur et le narrateur dans le texte littéraire.


2. Niveaux discoursifs du texte : textes autodiégétique, homodiégétique et
hétérodiégétique.
3. Types d’organisation de discours dans des textes des belles lettres : discours
directe, discours indirecte, discours indirecte libre.
4. Voix du personnage dans le texte : comment peut-on la reconnaître.
5. Analyse complexe du texte littéraire donné.

Семинарское занятие № 9 «Analyse des effects pragmatique dans le texte


littéraire»

1. Notion de stylisation. Variétés de texte stylisé : parodie, travestie, périphrase.


2.Typologie des styles littéraires : styles des mouvements littéraires, styles des
genres littéraires, styles individuels.
3. Méthodes d’’analyse textuelle : approche génétique, approche immannente
des oeuvres littéraires, approche perceptive.
4. Structure du texte : titre, épigraphe, début, partie finale. Notion de la position
forte dans la structure du texte.

56
ТЕКСТЫ ДЛЯ АНАЛИЗА
Текст № 1. «Texte de loi»
LOIS
LOI n 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive
des majeurs et des mineurs (1)
NOR: JUSX0755260L

L'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté,


Vu la décision du Conseil constitutionnel n 2007-554 DC du 9 août 2007;
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit:

Chapitre Ier
Dispositions relatives aux peines minimales
et à l'atténuation des peines applicables aux mineurs

Article 1
Après l'article 132-18 du code pénal, il est inséré un article 132-18-1 ainsi rédigé:
«Art. 132-18-1. – Pour les crimes commis en état de récidive légale, la peine
d'emprisonnement, de réclusion ou de détention ne peut être inférieure aux seuils
suivants:
«1 Cinq ans, si le crime est puni de quinze ans de réclusion ou de détention;
«2 Sept ans, si le crime est puni de vingt ans de réclusion ou de détention;
«3 Dix ans, si le crime est puni de trente ans de réclusion ou de détention;
«4 Quinze ans, si le crime est puni de la réclusion ou de la détention à perpétuité.
«Toutefois, la juridiction peut prononcer une peine inférieure à ces seuils en
considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur
ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
«Lorsqu'un crime est commis une nouvelle fois en état de récidive légale, la
juridiction ne peut prononcer une peine inférieure à ces seuils que si l'accusé
présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion.»

Article 2
Après l'article 132-19 du code pénal, il est inséré un article 132-19-1 ainsi rédigé:
«Art. 132-19-1. – Pour les délits commis en état de récidive légale, la peine
d'emprisonnement ne peut être inférieure aux seuils suivants:
«1 Un an, si le délit est puni de trois ans d'emprisonnement;
«2 Deux ans, si le délit est puni de cinq ans d'emprisonnement;
«3 Trois ans, si le délit est puni de sept ans d'emprisonnement;
«4 Quatre ans, si le délit est puni de dix ans d'emprisonnement.

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«Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée,
une peine inférieure à ces seuils ou une peine autre que l'emprisonnement en
considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur
ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.
«La juridiction ne peut prononcer une peine autre que l'emprisonnement lorsque
est commis une nouvelle fois en état de récidive légale un des délits suivants:
«1 Violences volontaires;
«2 Délit commis avec la circonstance aggravante de violences;
«3 Agression ou atteinte sexuelle;
«4 Délit puni de dix ans d'emprisonnement.
«Par décision spécialement motivée, la juridiction peut toutefois prononcer une
peine d'emprisonnement d'une durée inférieure aux seuils prévus par le présent
article si le prévenu présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de
réinsertion. «Les dispositions du présent article ne sont pas exclusives d'une
peine d'amende et d'une ou plusieurs peines complémentaires.»

Текст № 2. «Lettre d’affaires»


Emilie Chevrier
11 bis, rue Portalis
75008 Paris
06/03 02 63 54
emchevrier@hotmail.com

Paris, le 14 juin 2007

A l’intention de Mme Kolmogorova, Université pédagogique de Kouzbass.

Objet: candidature à un emploi de lectrice à l’Université pédagogique de


Kouzbass.

Madame,

Etudiante en deuxième année de Dulco de Russe à l’INALCO Paris


(Institut National des Langues et Civilisations Orientales), je me permets de
présenter ma candidature spontanée pour le poste de lectrice à l’Université
pédagogique de Kouzbass. En espérant que vous ayiez un tel poste à pourvoir, je
pense remplir toutes les conditions requises pour ce type d’emploi.
Fiable et motivée, j’ai déjà de l’experience dans l’éducation et ai, en
particulier, déjà travaillé comme lectrice dans une université étrangère.
J’ai passé une année scolaire dans le département de français de Rhodes
College, à Memphis (Etats-Unis). Entre autres attributions, je devais enseigner le
français dans le cadre de cours de grammaire pour les élèves débutants et de cours

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de conversation pour les élèves de niveau avancé. Je devais, en outre, participer à
l’organisation de toutes les activités culturelles francophones sur le campus.
De septembre 2004 à juin 2005, j’ai fait du bénévolat dans une
association s’occupant de soutien scolaire aux élèves en difficulté, tout
particulièrement en français.
Enfin, j’occupe à présent – depuis septembre 2006 et jusqu’à juin 2007 –
le poste d’assistante d’éducation dans un collège à Paris, ma mission centrale
étant le soutien scolaire individualisé, à hauteur de 6 heures par semaine.
Avant de partir travailler aux Etats-Unis, j’ai suivi les cours préparatoires
aux Grandes Ecoles littéraires, puis ai étudié l’anglais. C’est lors de mon séjour
à Memphis que j’ai commencé à étudier le russe. Emballée par cette langue, j’en
ai continué l’apprentissage l’année suivante à Sciences Po’ – dont j’ai été
diplomée à l’été 2005, puis, en cursus complet à l’INALCO.
Etre lectrice pour le département de français de votre université me
permettrait de mettre en pratique plusieurs de mes intérêts: l’enseignement du
français, l’apprentissage de langues étrangères, la découverte d’une région du
monde au sujet de laquelle je ne connais encore que très peu de choses. La situation
géographique de la région du Kouzbass, en particulier son éloignement des grandes
métropoles de la Russie occidentale, est un élément fort, motivant ma candidature.

En vous remerciant d’avance de bien vouloir prendre en compte ma


candidature, je me tiens à votre entière disposition pour tout renseignement
complémentaire.
Je vous prie d’agréer, Madame, l’expression de mes salutations les meilleures.

Emilie Chevrier

Текст № 3. «CV»
Geoffroy Yrieix BLETTON
Né le 2 Juin 1976 (30 ans)
Nationalité Française
Célibataire
Objectif: Enseignant de Français Langue Étrangère
EXPÉRIENCE PROFESSIONNELLE
2005-2007: - Lecteur de Français à la Chaire de Philologie Française de
l’Université d’État de Kemerovo, Russie, Cours de Compréhension et
Expression, Oral et Ecrit, Civilisation Française, Littérature, Mass-médias;
étudiants de 3ème, 4ème, 5ème année
- Enseignant de Français à la Faculté de Langues Étrangères de l’Université
Technique du Kouzbass, à Kemerovo, Russie, Cours de Français des Affaires,
Français Juridique, Français du Tourisme; étudiants de 2ème à 5ème année

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- Enseignant de Français à l’école de langues étrangères Bénédict, Kemerovo,
Russie, Cours d’Expression et Compréhension, Oral et Ecrit, Phonétique,
Grammaire, Civilisation; étudiants débutants et intermédiaires
1999-2007: Professeur particulier de Français pour étudiants non-
francophones (en France et en Russie), Cours d’Initiation et de
Perfectionnement, Compréhension et Expression, Oral et Écrit, Cours
individuels ou pour petits groupes
2004-2005: Enseignant stagiaire à l’Institut de Linguistique de l’Université
Paris 3-la Sorbonne Nouvelle, Cours de FLE pour étudiants étrangers,
débutants et avancés, Oral et Ecrit, Compréhension et Expression, Grammaire,
Phonétique, Civilisation
2003: Journaliste Assistant à la Rédaction de France 3, Télévision Nationale,
Paris, Réalisation de sujets, interviews et reportages, recherche d’images et de
données
1996: Animateur pour enfants (4-12 ans), Stage BAFA au centre aéré de
Buthiers, France
FORMATION
2005: Mention Didactique du Français Langue Étrangère de Licence
Sciences du Langage à l’Université Paris III la Sorbonne Nouvelle
2004: Master de Sciences de l’Information et de la Communication à
l’Université Paris III la Sorbonne Nouvelle
2003: Maîtrise de Philosophie à l’Université Paris I Panthéon-la Sorbonne
2001: DEUG de Lettres Modernes à l’Université Paris VII Denis Diderot
1999: double DEUG Philosophie et Histoire à l’Université Paris I Panthéon-la
Sorbonne
1996: Baccalauréat Scientifique (Spécialité Physique-Chimie) au Lycée
François Ier à Fontainebleau, France
LANGUES ET INFORMATIQUE
Anglais: Lu, Écrit, Parlé, Entendu
Allemand: Connaissances scolaires
Russe: Apprenant
Informatique: Dreamweaver, Quark X-Press, Photoshop, Office Suite, Lotus Suite
CENTRES D’INTÉRÊT
Littérature du XIXème siècle, Photographie, Escalade, Karaté, Équitation

Текст № 4. «Article scientifique»


Jon Arild Olsen
Université d’Oslo
De l’analyse stylistique considérée comme explication intentionnelle // XV
Skandinaviske romanistkongress. Nr. 16 – 2002/2 Oslo 12.-17. august 2002.
Introduction

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Les conceptions du style actuellement dominantes sont résolument anti-
intentionnalistes. Selon ces conceptions, le style serait une question d’écart ou
de déviation par rapport à une norme donnée. Quant à la nature de cette norme et
la fonction de cet écart, les opinions sont divergentes. Ainsi, faut-il déterminer
l’écart par rapport à un hypothétique usage normal de la langue ou par rapport à
une norme immanente à l’oeuvre particulière dont on se propose de décrire le
style? Ensuite, quelle est la fonction des écarts ainsi déterminés? Est-elle
sémantique, expressive ou plutôt affective ? Autant de questions sur lesquelles
règne le plus grand désaccord. Sur une chose, cependant, on tombe
généralement d’accord, à savoir que le style est une propriété qui peut être
décrite sans qu’aucune mention ne soit faite des intentions de l’auteur.
La définition que je proposerai ici est en revanche intentionnaliste. Selon
cette définition, le style comprend toutes les propriétés de l’oeuvre qui sont
intentionnelles sans pour autant être communiquées. Cette définition nous
permettra de contourner la principale objection adressée aux conceptions
courantes du style, à savoir qu’elles ne permettent pas de distinguer les
propriétés stylistiques des propriétés sémantiques de l’oeuvre. Toute phrase
consiste effectivement en certains choix opérés parmi les disponibilités de la
langue. Chaque choix se caractérise par certaines différences par rapport aux
autres choix qui auraient pu être faits à sa place; en ces différences consiste
justement sa valeur sémantique spécifique. D’où l’objection aux conceptions
traditionnelles du style que l’on peut formuler sous forme de la question
suivante: Dire la même chose autrement, n’est-ce pas simplement dire autre
chose? Ou pour formuler la question en d’autres termes: Les propriétés
prétendument stylistiques de l’oeuvre ne sont-elles pas productrices de sens
autant que les propriétés sémantiques?
Cette question souffre cependant d’une certaine ambiguïté en raison des
usages multiples du mot sens. On parle en effet aussi couramment du sens d’une
action ou d’une conduite que du sens d’un énoncé ou d’un discours. Dans les
deux cas, on ne parle pourtant pas de la même chose. Le sens d’une action est
l’intention qui permet de comprendre pourquoi l’agent accomplit cette action.
Comprendre le sens d’un énoncé consiste également à attribuer au locuteur des
intentions, mais celles-ci possèdent un autre statut et une autre fonction que les
intentions qui permettent d’expliquer des conduites non communicatives. Or, à
mon avis, les intentions stylistiques relèvent de la catégorie des intentions
permettant d’expliquer des conduites non communicatives.
Pour mieux expliquer cette différence de statut et de fonction entre
intentions stylistiques et intentions sémantiques, je me servirai d’abord de la
théorie de la communication élaborée dans Sperber et Wilson 1989. Je montrerai
ensuite comment ma définition du style se distingue des définitions courantes
sur un certain nombre de points précis.

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Текст № 5. «Annotation»
Treize à la table du crime
Franois Rivière.
Publié le 02 aoùt 2007
Actualisé le 02 aoùt 2007: 10h44

Mystères à huis clos présenté par


Roland Lacourbe Omnibus, 1 144 p.
Roland Lacourbe, un spécialiste du genre
présente treize histoires de meurtres en
chambre close, du classique Dickson Carr
à l'excentrique Anthony Boucher.
L'ENIGME du meurtre commis en
«chambre close» fascine depuis toujours les
amateurs de fiction policière restés sous le
charme du Double assassinat dans la rue
Morgue de Poe et du Mystиre de la chambre
jaune de Gaston Leroux. Au point que
certains auteurs, assez téméraires, se sont
appliqués à repousser les limites d'une
pratique devant tout autant à l'illusionnisme
façon Houdini qu'au jeu avec les mots cher à
Raymond Roussel. L'un de ceux-ci fut le
regretté Pierre Boileau qui, avant de s'associer
avec Narcejac, produisit quelques excellents romans à huis clos dont Le Repos de
Bacchus, justifiant son travail en ces termes: «Le qui et pourquoi ne pouvant plus,
depuis longtemps, réserver de grande surprise au lecteur, le comment reste la
seule question possédant un réel pouvoir d'envoûtement, la seule revêtant un défi
à la logique et créant un lien étroit entre le policier et le fantastique.»
Roland Lacourbe s'est depuis des années fait l'archiviste d'une veine
prodigue en tours de force pour la plupart d'origine anglo-saxonne. L'orfèvre en
la matière demeure John Dickson Carr, auteur de La Chambre ardente et d'un
certain nombre de titres où se confirme l'analyse de Boileau: Gideon Fell,
détective amateur créé par Dickson Carr sur le modèle physique de G.K.
Chesterton – lui-même auteur des funambulesques enquêtes du Père Brown-,est
souvent amené а résoudre des énigmes placées d'emblée sous le sceau du
surnaturel. La sagacité du lecteur subit du même coup un trouble dont le
romancier abuse évidemment avec toute la rouerie nécessaire.
Les territoires de l'énigme criminelle
Les textes rassemblés dans Mystиres à huis clos nous permettent d'explorer
méthodiquement un certain nombre de territoires de l'énigme criminelle où
l'impossible devient possible, à commencer par d'incontournables classiques tels
Le Mystиre de Big Bow d'Israel Zangwill, chaоnon manquant entre Poe et Leroux,

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ou le roman très excentrique de l'Américain Anthony Boucher injustement
méconnu chez nous, La Malédiction des neuf fois neuf. Mais le plus stupéfiant des
récits exhumés par Lacourbe demeure le bien nommé Trompe-l'oeil de Marcel F.
Lanteaume, qui raconte avec une précision maniaque l'escamotage d'un des plus
gros diamants du monde et plonge le lecteur dans un véritable vertige.

Текст № 6. «Reportage»
Des loups, des Mongols et des Chinois
FRANÇOIS HAUTER.
Publié le 02 août 2007
Actualisé le 02 août 2007 : 12h40

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La haine entre Mongols et Chinois est ancestrale, tenace et perceptible tous les
jours dans les rues d'Oulan-Bator. Les mots sont rudes et les coups volent bas.

Tout semblait harmonieux en Mongolie. Les grandes plaines d'un vert


tendre étaient balayées des vents du printemps, parfois tièdes, parfois glacés.
Cela mettait les nerfs à rude épreuve, avant la brève saison d'été. À l'horizon, des
hommes talonnaient leurs montures, la houle des troupeaux formait des taches
blanches mouvantes entre les feutres tendus des yourtes de bergers dispersées
dans le paysage. Un monde magnifique et cruel. Des femmes et des enfants
attendaient interminablement des camions au pied des collines, dans l'ombre
d'un froid pétrifiant. Les troupeaux et les hommes allaient bientôt se mettre en
mouvement vers d'autres pâturages, pour engraisser les animaux. Au long des
pistes, des ossements de loup séchaient au soleil, car la nature ne connaît que la
vie ; la mort, pour elle, est une péripétie sans lendemain, elle en fait disparaître
les traces en un clin d'oeil, sous des prairies tapissées de fleurs éblouissantes.
Du lac Koshghol, dont les eaux plus transparentes que celles des lagons
du Pacifique alimentent le Baïkal jusqu'aux grands cimetières de dinosaures du
Bayanzag, le pays semblait plongé dans son équilibre ancestral. Ce n'était qu'une
trompeuse apparence. Car les solides espoirs des richesses minérales du pays
surgissaient au moment où les Mongols avaient perdu la boussole. Ils se
demandaient qui ils étaient.
À Oulan-Bator, la population avait gonflé démesurément, car, depuis des
hivers et des hivers, des tempêtes effarantes avaient ruiné des clans entiers, figeant
des troupeaux et des hordes de chevaux, debout, dans les glaces. Les nomades
payaient cher les dérèglements du climat. Les survivants s'étaient réfugiés en ville.
Leurs enfants s'installaient dans notre monde. Ils regardaient MTV sous les yourtes.
Les villes, en Mongolie, sont des îles posées au milieu d'océans de steppe.
Elles ne correspondent à rien de sain, de naturel, de respectable. Elles sont, pour les

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nomades, des lieux déconnectés de leurs dieux et du mouvement profond,
nourricier, de la nature. Des univers factices, des constructions échafaudées comme
des bric-à-brac où l'on pose ici un Opéra – on y donne Madame Butterfly depuis un
demi-siècle -, là une Bourse (vide), et finalement un Palais du peuple, interdit aux
nobles habitants des prairies. Pour les Mongols, la demeure c'est la plaine. Et la
maison, c'est dehors. Le monde grand ouvert. Tout le reste est désordre.
Oulan-Bator avait grandi, s'était modernisée depuis mon dernier passage,
cinq ans auparavant. Au petit matin, dans la rue, je ne trouvais plus les troupeaux
de vaches paissant sous la statue de Lénine, au coeur de la ville. Au soir tombant,
les cavaliers pressés, droits sur leurs petites montures qu'ils fouettaient, ne
traversaient plus la place principale devant la statue de Gengis Khan. Ils étaient
remplacés par des embouteillages de 4 × 4. Le trajet en voiture restait périlleux, les
chauffeurs freinant au dernier moment, comme s'ils tiraient sur les rênes de leurs
chevaux. Les visages des nomades avaient encore la brillance de pommes bien
rouges. Mais, à l'intérieur des têtes, c'était un volcan. Une cacophonie. Un désarroi.
Les 2,8 millions de Mongols, dispersés sur un territoire grand comme la
moitié de notre Europe, ne savaient plus qui ils étaient. Et c'étaient leurs voisins,
les Chinois, qui faisaient les frais de cette colère. Ils se dissimulaient en Mongolie,
conscients du danger. Dès qu'ils montraient le bout du nez, ils risquaient une
raclée. Certaines voitures portaient des croix gammées, des chansons aux accents
fascisants grimpaient dans le hit-parade des steppes, les associations nationalistes
se multipliaient. La haine contre les Chinois débordait comme le lait. Elle
s'exprimait ouvertement. Même chez les intellectuels les plus policés.
Dans le café français d'Oulan-Bator, rendez-vous fut pris avec M.
Baasandorj, journaliste au Mongol News, et commentateur respecté de la vie
politique locale. L'homme, austère dans un costume gris de bonne coupe, évoqua
immédiatement «l'invasion chinoise», alors que l'on ne voyait pas le moindre
«Fils du Ciel» dans les rues. «Pas de Chinois ici?, s'exclama-t-il, furieux. Les
Chinois sont ici beaucoup plus arrogants qu'auparavant. Dix fois, ces derniers
mois, ils ont frappé des Mongols! Les Chinois sont des traîtres!» Pour détendre
l'atmosphère, je hasardai: «Et vous, n'avez-vous pas envahi la Chine en
massacrant quelques centaines de milliers de vos voisins il y a quelque temps?»
Réponse indignée de l'Alain Duhamel mongol: «Non, la Chine n'était qu'une
courte étape. Notre but, c'était le monde! Si Gengis Khan avait vécu plus
longtemps, vous y seriez tous passés!»
Les habitants d'Oulan-Bator avaient déjà attaqué les restaurants chinois,
brisant les enseignes et les lampions couverts de signes en pinyin, rossant les
propriétaires, piétinant les bougies rouges, effaçant du paysage urbain tout ce
qui semblait à la mode de Pékin.
L'air de La Mongolie aux Mongols! était chanté sur tous les tons. M.
Purevsvren, 47 ans, directeur de l'association La Mongolie unie, un ancien militaire
formé en URSS, revendiquait des troupes fortes de plusieurs dizaines de milliers
d'adhérents. Son discours, il le martelait en tapant du poing sur la pauvre table

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devant nous: «C'est une invasion rampante! Nos usines ferment, tout appartient aux
Chinois ! Nos hommes boivent et nos femmes vendent leurs corps. Il faut que la
Mongolie reste aux Mongols! Les étrangers n'ont pas le droit d'attaquer cette
culture. Les Chinois nous mangent en nous habituant aux plats chinois! Le danger
vient directement d'eux. De toutes les façons, on est ennemis depuis toujours!»
Azaa, une jeune femme coquette de 32 ans, avait décroché un emploi de
cadre dans une entreprise américaine, et tenait financièrement sa famille entière à
bout de bras. Les tempêtes des grands hivers précédents, le manque de
médicaments lui avait enlevé cinq frères. La mort était familière dans son entourage.
«Si je meurs, ma famille s'effondre», répétait-elle. Elle me fit rencontrer son dernier
frère survivant qui travaillait dans une usine chinoise de vêtements, pour douze
euros de salaire par semaine. La moitié du smic local. Le garçon faisait 16 heures
d'usine par jour pour se nourrir. Et le soir, il fabriquait des sacs en cuir dans son
studio, qu'il vendait le week-end au marché pour l'équivalent de quelques euros
supplémentaires. Il avait le teint gris, ses propos n'étaient qu'amertume et
impuissance. Il était plongé dans un univers dont il ne maîtrisait aucune des règles.
Je cherchais des responsables de l'empire du Milieu pour en discuter. Dans
la société chinoise, il y a toujours un «responsable», et celui-ci est le seul habilité
à s'exprimer au nom de tous. Mais en Mongolie, «les responsables» se
dissimulaient. L'immense ambassade d'Oulan-Bator était bouclée comme un
coffre-fort. La réceptionniste vous crachait de brèves excuses pour refuser tout
contact. «On les voit peu, ils sont très discrets», confirmait un diplomate allemand.
Les usines, bien gardées, ne se visitaient pas elles non plus. «Ils se savent détestés.
Ils vivent dans des banlieues ou bien dans les cours des chantiers», affirmait Azaa.
Un haut diplomate mongol avoua que son métier n'était pas de tout repos,
dès lors qu'il s'agissait des relations avec Pékin: «Il y a toujours des complications
avec notre gigantesque voisin, je ne vous le cache pas. Trop de préjugés de part et
d'autre. Les Mongols ne savent pas où ils vont. On se cherche et, si l'on se trouve
demain, l'objectif sera clair. Mais c'est un processus difficile.»
Un chaos douloureux. Les Mongols avaient perdu leur mode de vie
ancestral – un quart seulement d'entre eux sillonnaient encore les steppes - et,
après quinze années seulement d'indépendance réelle, coincés entre le gros ours
russe au Nord et le gigantesque dragon du Sud, ils se demandaient comment
accrocher leur pays solidement sur la carte de la planète. Et, surtout, quelles
sortes d'hommes ils allaient devenir!
Les Chinois, ces sédentaires, leur servaient de repoussoir. Les Mongols
passaient de la yourte aux HLM, ils se voyaient soudain sédentaires comme leurs
voisins. Ils détestaient leur reflet dans ce miroir, leur mutation. Non, ils ne
voulaient pas se transformer en «petit frère de la Chine», comme on le disait à
Pékin. Leur désespoir était proportionnel au mépris que le mode de vie de leur
ennemi héréditaire leur inspirait. Et à leur degré de dépendance vis-à-vis de ce
voisin. Celui-ci était réel: 40 % du commerce extérieur de la Mongolie dépendait
de la Chine; le seul port disponible était celui de Tianjin; les Mongols s'inventaient

65
une diplomatie du «troisième voisin», en augmentant leurs échanges avec le Japon,
la Corée, les États-Unis et l'Europe. Mais l'ambassade de Chine n'écoutait pas,
faisait comme si ce «troisième voisin» n'existait pas. Aucun dialogue ne semblait
possible. Munkh-Orgil, un ancien ministre des Affaires étrangères, me le fit bien
comprendre: «Les Chinois sont foncièrement ancrés dans leurs terres. Nous avons
des perceptions opposées du monde. Tout ce qu'ils disent, on tente de le traduire
dans notre langue, celle des gens de la civilisation nomade.»
À l'origine, le mot civilisation signifie simplement «vivre en ville». Le
mot «nomade» désigne «pâturer». Dans toutes les cultures, ces deux mondes – la
ville et le mouvement – s'opposent violemment. «Arabe» signifie «celui qui vit
sous la tente», «bazar», celui qui vit dans une maison. Le citadin est l'homme
qui amasse et compte, celui qui a perdu sa nature d'humain face au nomade
généreux et large d'esprit. Bien sûr, les nomades n'ont jamais rien ajouté aux arts
de nos civilisations, bien au contraire parfois. Mais d'Abraham à Moïse en
passant par Lao-Tse, leur puissance vient d'évocations plus larges. «Personne ne
devient prophète sans avoir été berger avant», dit Mahomet. Bouddha, en
mourant, a ce dernier message: «Poursuivez votre chemin!»
Chinois et Mongols s'affrontaient depuis 800 ans dans cette vision
dichotomique, fondamentale, du monde. Les Mongols souffraient, perdus de
devoir basculer irrémédiablement dans la «civilisation» tant méprisée. Ils
s'accrochaient à leur liberté, aux vastes mouvements de leurs ancêtres, alors que
la Chine tentait de les infiltrer d'un mouvement lent et insidieux. C'était
cependant une course qui commençait. Entre le lièvre et la tortue. J'avais assez
tourné autour du pot. Je me suis embarqué pour Pékin en pleine tempête de
neige, au mois de mai. Je devais aller en Chine pour tenter de comprendre ce qui
bougeait vraiment au coeur de ce prétendu «empire immobile».

Текст № 7.
Antoine de Saint-Exupéry
VOL DE NUIT
La femme du pilote, réveillée par le téléphone, regarda son mari et pensa:
– Je le laisse dormir encore un peu.
Elle admirait cette poitrine nue, bien carénée, elle pensait à un beau navire.
Il reposait dans ce lit calme, comme dans un port, et, pour que rien n'agitât
son sommeil, elle effaçait du doigt ce pli, cette ombre, cette houle, elle apaisait
ce lit, comme, d'un doigt divin, la mer.
Elle se leva, ouvrit la fenêtre, et reçut le vent dans le visage. Cette
chambre dominait Buenos Aires. Une maison voisine, où l'on dansait, répandait
quelques mélodies, qu'apportait le vent, car c'était l'heure des plaisirs et du repos.
Cette ville serrait les hommes dans ses cent mille forteresses; tout était calme et
sûr;mais il semblait à cette femme que l'on allait crier: «Aux armes!» et qu'un

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seul homme, le sien, se dresserait. Il reposait encore, mais son repos était le
repos redoutable des réserves qui vont donner. Cette ville endormie ne le
protégeait pas: ses lumières lui sembleraient vaines, lorsqu'il se lèverait, jeune
dieu, de leur poussière. Elle regardait ces bras solides qui, dans une heure,
porteraient le sort du courrier d'Europe, responsables de quelque chose de grand,
comme du sort d'une ville. Et elle fut troublée. Cet homme, au milieu de ces
millions d'hommes, était préparé seul pour cet étrange sacrifice. Elle en eut du
chagrin. Il échappait aussi à sa douceur. Elle l'avait nourri, veillé et caressé, non
pour elle-même, mais pour cette nuit qui allait le prendre. Pour des luttes, pour
des angoisses, pour des victoires, dont elle ne connaîtrait rien. Ces mains tendres
n'étaient qu'apprivoisées, et leurs vrais travaux étaient obscurs. Elle connaissait
les sourires de cet homme, ses précautions d'amant, mais non, dans l'orage, ses
divines colères. Elle le chargeait de tendres liens: de musique, d'amour, de fleurs;
mais, à l'heure de chaque départ, ces liens, sans qu'il en parût souffrir, tombaient.

Текст № 8.
Voila ca faisai lonten ke javé plus fait darticle fo dire ke lé cour on repris et ke le
sport ossi alor ca+ca+ca plus le temps de blogé lol bref...
Sinon tous ce ki me connaisse save ke jme pose bocou de kestion existentiel lol...

Alors jen ai une otre... CROYAIS VOUS O MIRACLE???


Pfff comment jpourrai dire non avec ce ki mé arrivé samedi matin...
Jdormé a moitié et jenten le parlofone sonné...
Dun coup ma mere entre dan la chambre en me secouant en me disant c STEVE
c STEVE...
Moi 2de tens steve...
Jme leve tt le monde me connai o reveille tt le monde c ke le temps ke jcapte ce
ki marriv jvé a la porte et la jvoi ki mon frere...
Maleurrrrrrrr jy croyai tro pas 3ans sans voir ca petite figur de NOUNOURS
DAMOUR...
Et puis bein voila un cou de tete il desen sur canne pr voir MON DOUDOU et
moi...
Pfff c tro bo...VOILA UN VRAI AMI...

Putain mon frere tu mavai tro manké un truc de fou...


On a passé une trop bonne journé et puis ossi il ma ramené un petit lézar
damour...
Tro marran alala...
Meme si la vie et dur il y a tjs d petit rayon de soleil ki vienne vous illuminé kan
vous deprimé... Alor merci a la vie merci a toi steve de tjs pensé a moi...
Avoir un grand frere kom toi lol garde du corps ossi c merveilleux...

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JE TAIME GRAN FRERE... KAN A TOI PETIT LEZAR TRO CONTENTE DE
TAVOIR CONNU OUBLI PAS JSUI UNE LEZAR MOI OSSI LOL TU C PK...

Petite dedicass a mon doudou a mon frere sans ki ojourdui jorai perdu le
sourire...
JE VOUS AIMEEEEEESSS

Текст № 9.
À la récré, les instits écoutent les enfants
L'omniprésence des médias et de la violence influence l'argot des
cours de récréation
De «J't'ai cassé» à «Trop génial», en passant par «Tchô!», des institutrices
ont étudié l'argot des cours de récréation.
Le verbe est souvent cruel dans les cours de récréation d'aujourd'hui, et ce
dès le plus jeune âge. Altercations, moqueries et insultes y sont fréquentes, à grand
renfort de «cassé!», popularisé par le film Brice de Nice, ou du plus classique «t'es
nul!». Le tout pimenté d'un «Même pas en rêve» très usité ou du fameux «trop pas».
Des institutrices ont voulu mieux connaître ce langage et ses règles.
Toutes volontaires, elles ont observé, de janvier à mars dernier, 1 018 élèves de
7 à 11 ans, du cours élémentaire au cours moyen, dans les cours de récréation
d'écoles privées et publiques. Elles ont répertorié 263 expressions, tout au long
de cette étude lancée dans six académies (Paris, Lyon, Lille, Toulouse, Rennes
et Nice) par «l'observatoire des cours de récréation» dépendant de l'institut privé
Junior City. Et les résultats sont plutôt édifiants.
Les filles, «plus dans le lien social et la relation aux autres», analyse
l'étude, ont ainsi une prédilection pour l'injure «pétasse» et le traditionnel «Je ne
te cause plus» qui parfois va au-delà de la simple provocation: «Je ne suis pas ta
chienne.» Chamailleuses mais affectives, elles se flattent aussi entre elles d'un
«ma puce», ou d'un «t'es belle».
«Sans émotion affichée»
Les garçons, eux, donnent des ordres, se traitent de «mytho» ou de «tête de
con», se provoquent avec des «J'vais t'atomiser». Ils se lancent aussi des
«atchemele» (Tais-toi). «Tournés davantage vers leurs centres d'intérêts, sans
émotion affichée, les garçons ont plus de mal à trouver les mots», analyse l'institut.
Autre constat: «Les enfants expriment plus facilement un sentiment négatif que
positif.» L'adverbe «trop» est mis à toutes les sauces. Pour se plaindre comme dans
l'expression «C'est trop moche». Mais aussi dans un sens plus positif («trop
génial»), avec dans ce cas la concurrence de «ça déchire» ou «c'est de la bombe».
Lorsque «ça boume» ou «ça twiste», venu tout droit des années 1960, c'est
plutôt bon signe. Un «ça me saoule» est en revanche synonyme de mauvaise
nouvelle. Lors d'une rencontre, la tendance générale est au «Salut», indémodable,

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suivi d'un «Ça farte?», allusion, là encore, au cultissime film Brice de Nice et
aux exploits de surfeur de son héros.
«Pour un tiers des enfants interrogés déclarant l'employer, le code est
nécessaire pour exclure les adultes ou tout autre fâcheux.» Il permet en outre de
créer un rapprochement au sein d'un groupe. Jeux de ballon ou jeux collectifs sont
le berceau de nombreuses expressions qui permettent d'exprimer la joie ou
l'incitation à gagner: ainsi «Cours Forrest Gump!», allusion à la comédie
américaine multidiffusée à la télévision dans laquelle le héros, un simple d'esprit,
passe son temps à courir. Car le cinéma et la télévision sont bien la première source
d'inspiration pour ces enfants. Titeuf, le petit écolier, héros d'une bande dessinée
très en vogue, a quant à lui réussi à populariser son «Tchô» en guise de salut.
Pas d'injures trop directes
Dans l'étude, chaque univers de la vie de l'enfant a été décortiqué, comme
les expressions qu'il emploie pour parler de nourriture: «dégueullatissime» ou
«Miam miam». Quant à la musique, les enfants la «kiffent» (apprécient) ou pas.
Sont aussi évoquées les expressions jugées «has been» (démodées) mais
néanmoins toujours utilisées: «crétin», «minus», «tu t'es vu», «y'a pas d'arête dans
le beefsteak», «à plus», «flûte», «Seigneur» ou, à Marseille surtout, bien sûr,
«Bonne Mère». Les injures trop directes comme «Trou du c...» restent censurées,
tempère l'étude, probablement parce que «toute forme de langage perçue comme
vulgaire ou guerrière est refusée par les parents». Elle observe cependant
ironiquement que le jargon des enfants illustre l'environnement dans lequel ils
évoluent, «caractérisé par une omniprésence des médias et de la violence».

Текст № 10.
D’un fourré, près de la porte, sortit un homme de taille moyenne, mais
énorme. Il portait un uniforme vert et un képi. À sa ceinture était suspendu un étui
de cuir d’où sortait la crosse d’un revolver d’ordonnance. Il tenait en laisse, au bout
d’une chaîne, un chien affreux, celui que nous avions si longtemps redouté.
C’était un veau à tête de bouledogue. Dans son poil ras d’un jaune sale, la
pelade avait mis de grandes tâches roses, qui ressemblaient à des cartes de
géographie. Sa patte gauche arrière restait en l’air, agitée de saccades
convulsives, ses épaisses babines pendaient longuement, prolongées par des fils
de bave, et de part et d’autre de l’horrible gueule, deux canines se dressaient,
pour le meurtre des innocents. Enfin, le monstre avait un œil laiteux, mais
l’autre, énormément ouvert, brillait d’une menace jaune, tandis que de son nez
glaireux sortait par intervalles un souffle ronflant et sifflant. Le visage de
l’homme était aussi terrible. Son nez était piqueté de trous, comme une fraise, sa
moustache blanchâtre d’un côté, était queue de vache de l’autre, et ses paupières
inférieures étaient bordées de petits anchois velus. Ma mère poussa un
gémissement d’angoisse, et cacha son visage dans les roses tremblantes.

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La petite sœur se mit à pleurer. Mon père, blême, ne bougeait pas. Paul se
cachait derrière lui, et moi, j’avalais ma salive…
L’homme nous regardait sans rien dire ; on entendait le râle du molosse.
«Monsieur, dit mon père…
Que faîtes-vous ici? hurla soudain cette brute. Qui vous a permis d’entrer
sur les terres de M. le Baron ? Vous êtes ses invités, peut-être, ou ses parents?»
Il nous regardait tour à tour, de ses yeux globuleux et brillants. Chaque
fois qu’il parlait, son ventre tressautait, en soulevant le revolver. Il fit un pas
vers mon père.
«Et d’abord, comment vous appelez-vous?»
Je dis soudain:
«Esménard Victor.
• Tais-toi, dit Joseph. Ce n’est pas le moment de plaisanter.»
À grand peine, à cause de ses paquets, il sortit son portefeuille, et tendit sa
carte. Cette brute la regarda, puis se tournant vers moi:
«En voilà un qui est bien dressé! Il sait déjà donner un faux nom!»
Il regarda de nouveau la carte, et s’écria:
«Instituteur public! Ca, c’est le comble. Un instituteur qui pénètre en cachette
dans la propriété d’autrui! Un instituteur! D’ailleurs, ce n’est peut-être pas vrai.
Quand les enfants donnent de faux noms, le père peut donner une fausse carte.»
Joseph enfin retrouva la parole, et fit une assez longue plaidoirie. Il
parla de la «villa» (qu’il appela, pour la circonstance, le cabanon), de la santé
de ses enfants, des longues marches qui épuisaient ma mère, de la sévérité de
M. l’Inspecteur d’Académie…
Il fut sincère et pathétique, mais piteux. J’avais le sang aux joues et je
brûlais de rage.

( tiré du roman de M. Pagnol «Les Chateaux de ma mère»)

Текст № 11.
La femme du pilote, réveillée par le téléphone, regarda son mari et pensa:
– Je le laisse dormir encore un peu.
Elle admirait cette poitrine nue, bien carénée, elle pensait à un beau navire.
Il reposait dans ce lit calme, comme dans un port, et, pour que rien n'agitât
son sommeil, elle effaçait du doigt ce pli, cette ombre, cette houle, elle apaisait
ce lit, comme, d'un doigt divin, la mer.
Elle se leva, ouvrit la fenêtre, et reçut le vent dans le visage.
Cette chambre dominait Buenos Aires. Une maison voisine, où l'on dansait,
répandait quelques mélodies, qu'apportait le vent, car c'était l'heure des plaisirs et
du repos. Cette ville serrait les hommes dans ses cent mille forteresses; tout était
calme et sûr; mais il semblait à cette femme que l'on allait crier: «Aux armes!» et
qu'un seul homme, le sien, se dresserait. Il reposait encore, mais son repos était le

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repos redoutable des réserves qui vont donner. Cette ville endormie ne le
protégeait pas: ses lumières lui sembleraient vaines, lorsqu'il se lèverait, jeune
dieu, de leur poussière. Elle regardait ces bras solides qui, dans une heure,
porteraient le sort du courrier d'Europe, responsables de quelque chose de grand,
comme du sort d'une ville. Et elle fut troublée. Cet homme, au milieu de ces
millions d'hommes, était préparé seul pour cet étrange sacrifice. Elle en eut du
chagrin. Il échappait aussi à sa douceur. Elle l'avait nourri, veillé et caressé, non
pour elle-même, mais pour cette nuit qui allait le prendre. Pour des luttes, pour
des angoisses, pour des victoires, dont elle ne connaîtrait rien. Ces mains tendres
n'étaient qu'apprivoisées, et leurs vrais travaux étaient obscurs. Elle connaissait
les sourires de cet homme, ses précautions d'amant, mais non, dans l'orage, ses
divines colères. Elle le chargeait de tendres liens : de musique, d'amour, de fleurs;
mais, à l'heure de chaque départ, ces liens, sans qu'il en parût souffrir, tombaient.
Il ouvrit les yeux.
– Quelle heure est-il?

(tiré du roman de A. de S. Exupéry «Vol de nuit»)

Текст № 12.
Rosanette voulut qu'on arrêtât, pour mieux voir le défilé. Mme Arnoux
pouvait reparaître. Il cria au postillon:
– «Va donc! va donc! en avant!»
Et la berline se lança vers les Champs-Elysées au milieu des autres
voitures, calèches, briskas, wursts, tandems, tilburys, dog-carts, tapissières à
rideaux de cuir où chantaient des ouvriers en goguette, demi-fortune que
dirigeaient avec prudence des pères de famille eux-mêmes. Dans des victorias
bourrées de monde, quelque garçon, assis sur les pieds des autres, laissait pendre
en dehors ses deux jambes. De grands coupés à siège de drap promenaient des
douairières qui sommeillaient; ou bien un stepper magnifique passait, emportant
une chaise, simple et coquette comme l'habit noir d'un dandy. L'averse
cependant redoublait. On tirait les parapluies, les parasols, les mackintosh; on se
criait de loin: «Bonjour! – Ca va bien? – Oui! – Non! – A tantôt!» et les figures
se succédaient dans une vitesse d'ombres chinoises. Frédéric et Rosanette ne se
parlaient pas, éprouvant une sorte d'hébétude à voir auprès d'eux
continuellement, toutes ces roues tourner.
Par moments, les files de voitures, trop pressées, s'arrêtaient toutes à la fois
sur plusieurs lignes. Alors, on restait les uns près des autres, et l'on s'examinait.
[...] Puis tout se remettait en mouvement; les cochers lâchaient les rênes,
abaissaient leurs longs fouets; les chevaux, animés, secouant leur gourmette,
jetaient de l'écume autour d'eux; et les croupes et les harnais humides fumaient,
dans la vapeur d'eau que le soleil couchant traversait. Passant sous l'Arc de
triomphe, il allongeait à hauteur d'homme une lumière roussâtre, qui faisait

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étinceler les moyeux des roues, les poignées des portières, le bout des timons, les
anneaux des sellettes; et, sur les deux côtés de la grande avenue, – pareille à un
fleuve où ondulaient des crinières, des vêtements, des têtes humaines – les arbres
tout reluisants de pluie se dressaient, comme deux murailles vertes. Le bleu du
ciel, au-dessus, reparaissant à de certaines places, avait des douceurs de satin.
Alors, Frédéric se rappela les jours déjà loin où il enviait l'inexprimable
bonheur de se trouver dans une de ces voitures, à côté d'une de ces femmes. Il le
possédait, ce bonheur-là, et n'en était pas plus joyeux.

(tiré de Flaubert, l'Education sentimentale, deuxième partie, chapitre IV)

Текст № 13.
Accroupi devant, figé comme un animal qui va mordre, je l’ai enfin repéré.
Lui. Linnel. A pied d’œuvre. Il a presque fallu qu’il bouge pour que je puisse
identifier un corps humain au milieu de ce cataclysme bariolé. Il l’est jusque
dans le cou, lui aussi, avec son tee-shirt blanc et son jean suintants de vert et de
noir. J’ai bien compris, il cherche à se confondre avec le reste. Tactique de
caméléon. Il a cru m’échapper, camouflé, immobile, perdu dans la luxuriance de
son travail. Il reste accroupi, totalement seul, à des milliers de kilomètres de mes
yeux, tout tendu et aimanté vers l’espace blanc.
Tout à coup il s’allonge entièrement dans la mélasse des journaux et
renverse un verre d’eau, sans y prêter la moindre attention. Et se relève, d’un
bloc, pour tremper un pinceau dans un pot bavant de jaune. Le pinceau
dégouline jusqu’à une planchette et plonge dans une grasse couche de blanc.
Linnel se met face à la toile, bras tendu.
Et à cette seconde-là, sa main s’est envolée.
Je l’ai vue tournoyer dans l’espace et piquer comme une guêpe, çà et là,
faisant surgir des touches claires et disparates, je l’ai vue butiner partout, loin du
reste du corps, en créant une géométrie anarchique et évidente. Je l’ai vue
effleurer, aérienne, une zone oubliée, puis changer d’avis, brusquement, pour
retourner prendre de la couleur. Plus fébrile que jamais elle est revenue par
saccades, lâchant des arcs noirs partout, la plupart brisés au même endroit, en
revenant sur certains pour les rendre plus lisses ou plus courbes.
Linnel est revenu à lui, son regard a glissé partout pour débusquer un
autre pinceau, plus épais. Même mélange, même rapidité, d’autres bavures par
terre. De retour à la toile, sa main s’est écrasée dessus pour tracer une longue
bande jusqu’à l’épuisement du pinceau. Furieuse, coulante de jaune, elle s’est
mise à claudiquer en longeant la ligne, dérapant par endroits et se rattrapant à
l’horizon qu’elle venait juste de créer.

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Je me suis assis dans l’herbe froide.J’ai posé la tête sur un montant de
métal sans quitter des yeux la main qui, quelques secondes, est retombée,
fatiguée, ballante, avec le pinceau.
Linnel l’a lâché, n’importe où, puis a retourné le pot de blanc presque vide.
Avec une tournevis il s’est agenouillé près d’un autre, gros et neuf. Le couvercle
arraché, il a mélangé la pâte avec un bâton et y a trempé une large brosse qui
s’est gorgée de blanc. Des deux mains, cette fois, il a balayé toute la toile d’un
voile presque trensparent. J’ai assisté, en direct, à la métamorphose. Tout le
travail précédent s’est mis à renaître sous le voile. Les touches encore humides
ont éclos, les arcs se sont rejoints d’eux mêmes, la trame de la bande sombre
s’est figée dans l’unicité ambiante, et les zigzags, en bordure, ont tous dénivelé
dans le même sens, comme pour s’échapper du cadre.
Linnel s’allonge sur le ventre, en bégayant un râle absurde. Je pose mon
front contre la vitre. De ma vie je n’ai vu un spectacle aussi bouleversant.

(tiré du roman de Tonino Benacquista «Trois carrés rouges sur fond noir»)

Текст № 14.
Alice s’approcha lentement du bureau aux lignes dures et sévères, derrière
lequel trônait une femme d’une trentaine d’années. Ses cheveux tombaient sur
ses épaules, en paquets fauves. Ses yeux étaient d’un bleu vif et ses traits
rayonnaient d’une aura d’intelligence et de féminité.
Impressionnée par l’élégance et la force intérieure qui se dégageaient de la
jeune femme, Alice glissa jusqu’au bureau comme dans une rêve, les jambes
cotonneuses, la respiration suspendue. Elle prit à peine conscience que le jeune
flic de service s’effaçait et que la porte se refermait derrière elle.
Elle fit face à l’inspecteur Anita Van Dyke qui la regardait d’une manière
grave, mais pas méchante, ni sévère, ni fermée. Elle se détendit un peu et
attendit que la jeune flic parle. Elle lui jeta un regard à la dérobée, tentant de se
familiariser avec sa présence.
– Assieds-toi, ma petite.
La voix était légèrement voilée, chaude, amicale.
Elle indiqua une des chaises noires, aux lignes austères, qui faisaient face
à son vieux fauteuil de cuir. Alice choisit celle de gauche et s’y tint, très droite,
comme une élève modèle de collège privé. Elle se concentrait totalement sur la
situation, tâchant de ne pas perdre le contrôle. Ce qu’elle avait à faire était assez
difficile comme ça.
Anita Van Dyke plongea ses yeux dans ceux d’Alice qui se sentit passer
au scanner.
C’est normal, pensait-elle, en essayant de conserver son calme, elle veut
juste savoir si je mens, si je raconte des histoi...
– Comment te nommes-tu, ma petite?

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Alice avait légèrement sursauté, juste parce qu’elle s’était laissée aller à
rêvasser stupidement alors qu’il fallait rester vigilante...
– Alice Barcelona Kristensen.
Elle s’était parfaitement reprise et avait répondu presque aussitôt.
– Barcelona?
La voix était toujours douce et sans intonations suspectes.
Alice comprit que la flic essayait de la mettre en confiance, tout en lui
arrachant doucement quelques renseignements à droite, à gauche.
– C’est mon père qui a eu l’idée, il adorait Barcelone, mais vous
savez, vous pouvez me questionner tout de suite pour les meurtres, je n’ai pas
peur... C’est pour ça que je suis venue.
Elle sembla se détendre un peu plus et elle relâcha le sac de sport en
émettant une sorte de soupir.
Anita Van Dyke observa attentivement la jeune adolescente.
Alice Kristensen regardait un point placé dans l’espace quelque part entre
le bureau et elle.
– Bon d’accord, alors qu’est-ce que c’est que cette histoire de
meurtres, dis-moi?
Alice Kristensen ne répondit pas tout de suite. Elle tritura nerveusement la
lanière de son sac de sport qui était retombée sur ses genoux. Puis en relevant
légèrement la tête et en regardant l’inspecteur par en dessous, comme si elle
avait honte de ce qu’elle avait à dire, elle se remordit la lèvre inférieure et lança
d’une voix blanche:
– Ce sont mes parents.
Anita Van Dyke attendit la suite mais rien ne vint. Alice se perdait dans
une profonde réflexion intérieure.
– Qu’est-ce qu’il y a Alice ? Qu’est-ce que tu veux dire avec tes
parents ? Ils ont vu un meurtre ? Quelque chose s’est passé chez toi ? Il faut que
tu me dise vite de quoi il s’agit si tu veux que je puisse t’aider efficacement.
Alice tritura de nouveau la sangle du sac et sans même regarder le policier:
– Non ... ce n’est pas ça. Heu... Les meurtres... Ce sont mes parents.
Ce sont eux qui tuent des gens.
Anita Van Dyke retint son souffle dans le silence qui clouait la pièce
comme un cercueil.

(tiré du roman de Maurice G. Dantec «La sirène rouge»)


Текст № 15.
L’odeur de la tarte aux pommes devenait insupportable. Peggy décida de se
lever. Entortillée dans son drap, elle clopina jusqu’au miroir pour découvrir sa tête
du matin. Elle avait un visage aux pommettes marquées, presque slaves, et une
grande bouche gourmande au sourire maladroit. Une crinière jaune paille
auréolait cette figure d’une pâleur laiteuse que ne piquetait aucune tache de
rousseur, et qui paraissait depuis toujours hésiter entre l’éclat de rire nerveux et le

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sanglot. Une crinière de cheveux drus, dont elle n’avait jamais su quoi faire.
D’ailleurs, comme elle le répétait à ses rares amis, on lui avait livré ce corps sans
mode d’emploi, et, au cours des trente années qui venaient de s’écrouler, elle avait
été bien embarassée d’y habiter. En dépit de cela, elle était jolie pour qui savait la
regarder. Avec quelque chose de frémissant et de douloureux.Une grâce un peu à
vif, comme ses lèvres qu’elle mordillait sans cesse, à son insu. Quatre ans plus tôt,
elle avait été potelée, «moelleuse», tapissée de rondeurs à la Marilyn Monroe,
mais la misère y avait mis bon ordre, la débarassant des quelques petits kilos
qu’elle avait en trop, telles ces stars des années cinquante qu’on trouvait à
l’époque si «sexy», et qu’on jugerait aujourd’hui en état de «préobésité».
Il lui sembla qu’elle avait encore maigri, c’était inévitable avec le régime
forcé que lui imposaient ses ressources. Si elle voulait suivre avec la mince
allocation mensuelle que lui octroyait son éditeur, elle devait rogner sur la moindre
dépense. Le plus souvent elle se nourrissait de toastes tartinés de margarine et de
café largement étendu d’eau. La plus grande partie de sa mensualité était dévorée
par le loyer du studio. Pour les livres, dont elle faisait une grande consommation,
elle se fournissait désormais à la bibliothèque municipale, usant les cartes de lecture
à une vitesse phénoménale. Ses vêtements les moins râpés dataient de quatre ans, et
lorsqu’elle surprenait son reflet dans la vitrine d’un magasin, elle se trouvait l’allure
d’une Annie Hall attardée. La mode grunge qui se profilait à l’horizon, avec son
assemblage de hardes savamment déchirées, allait sûrement lui rendre service, bien
qu’elle fût un peu âgée pour ce genre d’extravagances.
Elle se détourna du miroir, passa un peignoir d’éponge volé dans un grand
hôtel, du temps de sa brève splendeur, et jeta un regard par la fenêtre. Une voiture
de patrouille barrait la rue, une centaine de mètres en amont, le gydrophare allumé.
Des flics entouraient un homme à terre, un de plus. Ce ne serait sans doute pas le
dernier de la journée. Ce pouvait être n’importe qui: un dealer poignardé, un
gamin de treize ans appartenant à un gang, une assistante sociale battue à mort...
Peggy remonta le col du peignoir sur sa nuque et sortit dans le couloir pour se
rendre à la salle de bains collective de l’étage. A cette heure tardive personne ne
l’utilisait, mais il n’y avait plus guère d’eau chaude dans le ballon. En refermant
sa porte, elle songea qu’ailleurs, dans un autre immeuble, une fille n’aurait jamais
osé quitter son logement à moitié nue pour aller prendre une douche au bout de
cet interminable corridor, si propice aux agressions.
«Ce confort, pensa-t-elle, tu le dois à ce bon Monsieur Grubb dont tu dis
tant de mal. As-tu conscience de ton ingratitude? Hein?»

(tiré du roman de Serge Brussolo «Armés et dangereux»)

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Текст № 16.
Secret à propos d’un secret

Photo de George Hoyningen-Huene.


Lee repose sur un transatlantique. Elle porte une chemise d’étoffe écrue,
large aux manches. Le col ouvert est souligné par un double revers. Visage incliné,
plus proche, en appui sur une main. Le sourcil est crayonné, les lèvres très
déssinées. On la devine distante, incomprise, un peu garçonne. Le photographe a
recherché la beauté américaine, le derme sain. Un souvenir de Cape Cod.
Photo de George Hoyningen-Huene.
En arrière-fond, deux vases au col fin d’où sortent des lys. Lee porte une
robe de soie et de satin qui tombe sur sa cheville. La robe est drapée en vagues,
froncée à la taille par une ceinture à nœud anglais. On discerne la pointe du sein
droit sous le tissu. Les mains sont ramenées en avant, les poignets ceints de
bracelets strassés. Epaules et bras nus. Là où la découpe brise, la peau apparaît.
Le visage a pris une inclination latérale très gracieuse. Le profil marque la ligne
de partage entre ombre et lumière. Les cheveux flottent mi-longs, cendrés. Le
fond est noir, avec des reprises d’ombre sur la robe.
Auprès de Man c’était une vie insoucieuse, pleine de nuits blanches. Le
ministère Tardieu, le scandale Oustric, la mort de Conan Doyle , ils s’en
contrefichaient. Je crois tout simplement qu’ils se sont beaucoup amusés.
Les fenêtres s’ouvraient sur les avenues d’été. Paris était une enfilade de
nuits où l’on dansait. Soirées aux terrasses, dans les rues, banquettes de
moleskine des brasseries, arbres de l’avenue de l’Observatoire, virées dans la
forêt de Fontainbleau, appartements de la cité Vaneau, cafés de la rue Boulard, il
y avait les pommiers en fleur sur les routes de Normandie et la Marne au
crépuscule, la main de Man dans la sienne et les sourires dans la rue, l’aube sur
les façades de la rue Cassini, et toujours, dans les bals de quartier où les filles
s’appelaient Louise ou Suzy, les matchiches et les tangos, les valses avec ces
passes, ces voltes incroyables, les Françaises avaient le jarret civilisé, étrange
troupe folklorique de cette province qu’était Paris, le cœur abstrait des choses,
l’absolue légèreté du monde.
En amour aussi, Man prisait les jeux. Il aimait l’éclairage oblique sur une
peau nue, les silences de l’ombre. Ses amis surréalistes lui parlaient du Marquis
avec des mines de bookmaker vantant le bon lévrier. Mais il ne fut pas question
de cela entre eux; ou il en fut question autrement. Ce qui ressemble le plus à la
mort, c’est l’exaltation de l’enfant pervers au fond de soi. Lee aimait la vie. Elle
ne retirait rien de l’humiliation et tout du consentement. Ce à quoi elle cosentait,
c’était à sa propre honte.

Cape Cod [kapk d]


 Conan Doyle [k nαd il]
 bookmaker [bukmεkœr]

76
Un soir, plus loin sur le chemin, elle me raconterait en passant, mais ses yeux
ne fuyaient pas, ceci qu’elle voulait que je sache. Cette chose qu’elle portait en elle
et que chaque homme faisait peser. Quand elle était une petite fille de sept ans, si
belle, si blonde, Lee avait été violée par un jeune homme de dix-huit ans.
C’était une petite fille. C’était une femme. La flétrissure de ses sept ans
avait enfoncé en elle une fleur noire dont les pétales s’ouvraient dans les
tréfonds. Elle recherchait désespérément le moment où la honte enfouie
deviendrait acceptation. Ce moment-là advint, du moins je le devine, dans
l’amour que Man lui portait. Man ramenait à la surface cette part d’elle que tout
blâmait, il aimait sa honte et l’attisait par des gestes secrets. Qu’en poussant les
choses au pire elle soit pourtant aimée, aimée absolument. Que la blessure
paraisse aux yeux d’un homme qui accepte tout, qu’en allant au plus bas elle
rencontre un être qui ne juge pas, alors elle serait sauvée. Ce que Lee trouva au
fond d’elle-même, au bout de sa honte, c’était l’amour de Man.
Cet amour ressemblait à une chambre noire. Lee travaillait des heures dans le
studio de Man, avec lui, ou bien seule. Elle y exécutait avec soin des opérations
devenues familières. Et dans ce ballet resserré entre les cuvettes, la lanterne,
l’agrandisseur, les flacons et les pinces, sous la lumière ambrée qui baignait la pièce,
elle se sentait étrangement exaltée, libre, et prisonnière aussi, comme rendue à un
monde de mémoire qui la hantait. Elle procédait à ces manipulations comme un
cambrioleur répète un hold-up, elle était l’ officiante d’un mystère qui passait la
raison: comment capturer une image, comment tirer d’un même négatif un nombre
infini d’épreuves identiques. Cela ressemblait à du vol, cela n’était pas si loin de
l’amour. Elle aimait dans la photographie ce qui évoquait les débuts, l’art des
pionniers – le grain fort des calotypes au chlorure d’argent, l’odeur des papiers
huilés, les salures de Brébisson. Les effluves d’émulsions entraient en sympathie
avec d’autres mélanges acides, odeurs fortes des ateliers de chimistes, alacrité
d’une terre fraîchement retournée par l’averse. Les rumeurs du boulevard Raspail
montaient dans le lointain, étouffées par les murs. La nuit avançait. En trempant les
plaques dans le bain fixateur, elle surprenait parfois un reflet rendu par l’eau
trouble, venu de l’autre côté des images. Lee voyait se dessiner un masque
recouvert de feuilles d’or. Une figure d’idole immergée. Elle devinait, dans ce
primitif d’elle-même, le souvenir d’un jeu de surfaces attaquées par la lumière d’où
était sortie un siècle plus tôt une première image, incertaine mais irréfutable. Man
Ray lui avait longuement détaillé cette enfance de la photographie, la pierre de
Munich, le jardin de Niepce, le procédé de Fox Talbot, parce qu’il sentait que ce
récit d’une origine apaiserait en Lee les craintes de la débutante. Lee s’était sentie
requise plus qu’elle n’aurait dû par cet artisanat d’encres grasses et acides
élémentaires; puis elle avait compris ce qui l’attirait dans ces bleus actiniques, ces
plaques de verre, ces vieux daguerréotypes: c’est qu’ils lui rappelaient son père
dans son laboratoire, nimbé de ce clair-obscur qui restait pour elle la couleur de
 hold-up [ ldœp]
 Munich [mynik]

77
l’enfance, et celle du remords. Elle songeait à ce que Man lui avait décrit, les
balbutiements d’un métier, les photographies du siècle précédent, comme pour y
trouver la trace du jeune homme que son père avait été avant même qu’elle ne
puisse se souvenir de lui. Ainsi, disait Man, le bitume de Judée des premiers
photographes était-il dissous dans l’essence de lavande, puis étendu sur une
plaque d’étain. On versait sur la surface impressionnée un dissolvant qui attaquait
les parties non insolées, celles où s’étaient indurées les valeurs sombres. Sur
l’image achevée, les blancs étaient donnés par le bitume pâli, et les noirs par le
métal mis à nu sous solution d’acide. Enfin on tirait les épreuves en taille-douce;
Lee aimait ce mot français, taille-douce. Il lui semblait que sa vie était à l’image
de ces grains qu’un éclat pigmente par violents assauts de lumière sur une surface
sensible. Dans le studio, elle scrutait le mystère des gestes arrêtés: les tirages
figeaient l’allure de cette autre indéchiffrable qu’elle était pour elle-même.
La photographie était un secret à propos d’un secret.

(tiré du roman de Marc Lambron «L’œil du silence»)

Текст № 17.
D’ailleurs, quand les hommes lient connaissance, après la question
«comment t’appelles-tu?» vient tout de suite: «que fais-tu?» «combien gagnes-
tu?». Et si un homme ne réussit pas à gagner de l’argent, ça veut dire que c’est
un benêt ou un type qui n’a pas de chance, de toute façon, un minus. [...]
De vrais poules, quoi! Les poules ont beau savoir que chacune d’elles aura
le couteau en travers de la gorge, elles n’en continuent pas moins à glousser et à
gratouiller pour trouver leur nourriture. Et on peut bien en prendre une pour
l’égorger, ça n’empêchera pas les autres de gratouiller.
Ainsi, jour après jour, Poddouïev arpentait le vieux parquet dont les lames
ondulaient sous son poids, mais il n’arrivait aucunement à éclaircir la question:
comment faut-il donc accueillir la mort?
Inventer la réponse? Ça n’était pas possible… La recevoir de quelqu’un?
Personne n’était capable de la donner… Quant aux livres, c’était bien la dernière
chose qu’Ephrem aurait pensé à consulter…
Jadis il avait été à l’école primaire, puis à une école du bâtiment, mais il
n’avait jamais senti personnellement le besoin de lire: la radio lui remplaçait les
journaux; pour ce qui est des livres, ils lui semblaient parfaitement inutiles dans
la vie de tous les jours.
Dépenser de l’argent pour des livres ou bien encore, se fatiguer à aller les
chercher dans une bibliothèque lui semblait tout bonnement ridicule. Et si,
d’aventure, il lui en tombait un sous la main pendant un voyage ou dans une
salle d’attente, il en lisait vingt à trente pages, et toujours il finissait par
abandonner, n’ayant rien trouvé qui traitât du juste emploi de la vie.

78
Ici aussi, à l’hôpital, il y en avait sur les tables de nuit et sur le rebord des
fenêtres, mais il n’y touchait même pas. Et il n’aurait pas non plus touché à ce
petit livre bleu avec des arabesques dorées, si Kostoglotov ne le lui avait pas
refilé un certain soir, encore plus vide et plus écœurant que les autres soirs. [...]
Ajoutons qu’il n’aurait pas entamé la lecture si ç’avait été un roman. Mais
c’était de petits contes de rien du tout où tout était dit en cinq, six pages et
quelquefois en une seule. La table des matières fourmillait de titres [...]: «Le travail,
la mort et la maladie.» «La loi essentielle.» «La source.» «Qui sème le vent récolte
la tempête.» «Trois cœurs.» «Marchez dans la lumière tant qu’il y a de la lumière.»
Ephrem en chercha un plus court que les autres. Il le lut. Ca lui donna
envie de réfléchir. Il réfléchit. Il eut envie de relire. Il relut. Et à nouveau, il eut
envie de réfléchir. Et il réfléchit à nouveau.
La même chose se produisit avec le second récit. [...] Dans l’obscurité, il
raconta une fois encore à Akhmadjan la vieille fable d’Allah qui avait divisé la
vie en plusieurs parts, et comment l’homme avait reçu en partage beaucoup de
parts inutiles (d’ailleurs lui-même n’était pas d’accord, aucune part de vie ne lui
semblait inutile, à condition qu’on ait la santé). Puis, avant de s’endormir, il
réfléchit encore à ce qu’il avait lu. [...]
Déjà, hier au soir, Ephrem avait remarqué le titre suivant: «Qu’est-ce qui
fait vivre les hommes?» Ca, c’était un titre bien envoyé, à croire qu’Ephrem lui-
même l’avait trouvé. Car tout en arpentant le parquet de l’hôpital, à quoi d’autre
pensait-il donc ces dernières semaines, sinon à cette question, encore
informulée: «Qu’est-ce qui fait vivre les hommes ?».

(tiré du roman d’Alexandre Soljénistyne «Le Pavillon des cancéreux»)

Текст № 18.
C'etait une femme originale et solitaire. Elle entretenait un commerce
étroit avec les esprits, épousait leurs querelles et refusait de voir certaines
personnel de sa famille mal considérées dans le monde où elle se réfugiait.
Un petit héritage lui échut qui venait de sa soeur. Ces cinq mille francs,
arrivés à la fin d'une vie, se révélèrent assez encombrants. II fallait les placer.
Si presque tous les hommes sont capables de se servir d'une grosse fortune, la
difficulté commence quand la somme est petite. Cette femme resta fidèle à
elle-même. Près de la mort, elle voulut abriter ses vieux os. Une véritable
occasion s'offrait à elle. Au cimetière de sa ville, une concession venait
d'expirer et, sur ce terrain, les propriétaires avaient érigé un somptueux caveau,
sobre de lignes, en marbre noir, un vrai trésor à tout dire, qu'on lui laissait pour
la somme de quatre mille francs. Elle acheta ce caveau. C'était là une valeur
sûre, à l'abri des fluctuations boursières et des événements politiques. Elle fit
aménager la fosse intérieure, la tint prête à recevoir son propre corps. Et, tout
achevé, elle fit graver son nom en capitales d'or.

79
Cette affaire la contenta si profondément qu'elle fut prise d'un véritable
amour pour son tombeau. Elle venait voir au début les progrès des travaux. Elle
finit par se rendre visite tous les dimanches après-midi. Ce fut son unique sortie
et sa seule distraction. Vers deux heures de l'après-midi, elle faisait le long trajet
qui l'amenait aux portes de la ville où se trouvait le cimetière. Elle entrait dans le
petit caveau, refermait soigneusement la porte, et s'agenouillait sur le prie- Dieu.
C'est ainsi que, mise en présence d'elle-même, confrontant ce qu'elle était et ce
qu'elle devait être, retrouvant l'anneau d'une chaîne toujours rompue, elle perça
sans effort les desseins secrets de la Providence. Par un singulier symbole, elle
comprit même un jour qu'elle était morte aux yeux du monde. A la Toussaint,
arrivée plus tard que d'habitude, elle trouva le pas de la porte pieusement jonché
de violettes. Par une délicate attention, des inconnus compatissants devant cette
tombe laissée sans fleurs, avaient partagé les leurs et honoré la mémoire de ce
mort abandonné à lui-même.
Et voici que je reviens sur ces choses. Ce jardin de l'autre côté de la fenêtre,
je n'en vois que les murs. Et ces quelques feuillages où coule la lumière. Plus
haut, c'est encore les feuillages. Plus haut, c' est le soleil. Mais de toute cette
jubilation de l'air que l'on sent au-dehors, de toute cette joie épandue sur le
monde, je ne perçois que des ombres de ramures qui jouent sur mes rideaux
blancs. Cinq rayons de soleil aussi qui deversent patiemment dans la pièce un
parfum d'herbes séchées. Une brise, et les ombres s'animent sur le rideau. Qu'un
nuage couvre puis découvre le soleil, et de l'ombre émerge le jaune éclatant de ce
vase de mimosas. I1 suflit: une seule lueur naissante, me voilà rempli d'une joie
confuse et étourdissante. C'est un après-midi de janvier qui me met ainsi en face
de l'envers du monde. Mais le froid reste au fond de l'air. Partout une pellicule de
soleil qui craquerait sous l'ongle, mais qui revêt toutes choses d'un éternel sourire.
Qui suis-je et que puis-je faire, sinon entrer dans le jeu des feuillages et de la
lumière ? Être ce rayon où ma cigarette se consume, cette douceur et cette passion
discrète qui respire dans l'air. Si j'essaie de m'atteindre, c'est tout au fond de cette
lumière. Et si je tense de comprendre et de savourer cette délicate saveur qui livre
le secret du monde, c'est moi-même que je trouve au fond de l'univers. Moi-
même, c'est-a-dire cette extrême émotion qui me délivre du décor.
Tout à l'heure, d'autres choses, les hommes et les tombes qu'ils achètent.
Mais laissez-moi découper cette minute dans l'étoffe du temps. D'autres laissent
une fleur entre des pages, y enferment une promenade où l'amour les a effleurés.
Moi aussi, je me promène, mais c'est un dieu qui me caresse. La vie est course et
c'est péché de perdre son temps. Je suis actif, dit-on. Mais être actif, c'est encore
perdre son temps, dans la mesure où l'on se perd. Aujourd'hui est une halte et mon
cour s'en va à la rencontre de lui-même. Si une angoisse encore m'étreint, c'est de
sentir cet impalpable instant glisser entre mes doigts comme les perles du
mercure. Laissez donc ceux qui veulent tourner le dos au monde. Je ne me plains
pas puisque je me regarde naître. A cette heure, tout mon royaume est de ce
monde. Ce soleil et ces ombres, cette chaleur et ce froid qui vient du fond de l'air:

80
vais-je me demander si quelque chose meurt et si les hommes souffrent puisque
tout est écrit dans cette fenêtre où le ciel déverse la plénitude à la rencontre de ma
pitié. Je peux dire et je dirai tout à l'heure que ce qui compte c'est d'être humain et
simple. Non, ce qui compte, c'est d'être vrai et alors tout s'y inscrit, l'humanité et
la simplicité. Et quand donc suis-je plus vrai que lorsque je suis le monde? Je suis
comblé avant d'avoir désiré. L'éternité est là et moi je l'espérais. Ce n'est plus
d'être heureux que je souhaite maintenant, mais seulement d'être conscient.
Un homme contemple et l'autre creuse son tombeau: comment les
séparer? Les hommes et leur absurdité? Mais voici le sourire du ciel. La lumière
se gonfle et c'est bientôt l'été? Mais voici les yeux et la voix de ceux qu'il faut
aimer. Je tiens au monde par tous mes gestes, aux hommes par toute ma pitié et
ma reconnaissance. Entre cet endroit et cet envers du monde, je ne veux pas
choisir, je n'aime pas qu'on choisisse. Les gens ne veulent pas qu'on soit lucide
et ironique. Ils disent: "ca montre que vous n'êtes pas bon". Je ne vois pas le
rapport. Certes, si j'entends dire à l'un qu'il est immoraliste, je traduis qu'il a
besoin de se donner une morale; à l'autre qu'il méprise l'intelligence, je
comprends qu'il ne peut pas supporter ses doutes. Mais parce que je n'aime pas
qu'on triche. Le grand courage, c'est encore de tenir les yeux ouverts sur la
lumière comme sur la mort. Au reste, comment dire le lien qui mène de cet
amour dévorant de la vie à ce désespoir secret. Si j'écoute l'ironie, tapie au fond
des choses, elle se découvre lentement. Clignant son oil petit et clair: "Vivez
comme si...", dit-elle. Malgré bien des recherches, c'est là toute ma science.
Après tout, je ne suis pas sûr d'avoir raison. Mais ce n'est pas l'important
si je pense à cette femme dont on me racontait l'histoire. Elle allait mourir et sa
fille l'habilla pour la tombe pendant qu'elle était vivante. I1 paraît en effet que la
chose est plus facile quand les membres ne sont pas raides. Mais c'est curieux
tout de même comme nous vivons parmi des gens pressés.

(Albert Camus «L'envers et l'endroit»)

81
ТЕСТОВЫЕ ЗАДАНИЯ

1. Le mot «style»provient du mot «stylus» qui appartient à la langue


А) latine B) italienne
C) grècque D) anglaise

2. Liez le nom de stylisticien avec le nombre des branches de la stylistique


qu’il distingue:
1. Z.I. Khovanskaïa
2.K.A. Dolinin
3. Морен, Тетеревникова A) stylistique pratique, stylistique déscriptive
B) stylistique déscriptive/fonctionnelle/génétique/comparée
C) stylistique linguistique/ littéraire littéraire

3. Mettez en ordre chronologique les noms des savants qui s’occupaient des
problèmes du style:
A) François de Malherbes B) Virgile C) Aristote D) Nicolas Boileau

4. Reliez le nom et la fonction d’un des trois styles essentiels distingués


parVirgile:
1. le style neutre
2. le style épique
3. le style simple A) pour parler de la vie de tous les jours B) pour parler
du travail du laboureur
C) pour décrire les exploits des héros

5. Quel nom est-il associé au purisme français:


A) François de Malherbes B) Albert Séchéhaye
C) Nicolas Boileau D) Charles Bally

6. Dans sa conception de la stylistique Charles Bally exclut de la sphère


d’intérêt de celle-là:
A) la langue littéraire B) la langue parlée
C) la langue publiciste D) la langue de la
science

7. Complétez l’affirmation: «La valeur stylistique a ... composantes»

8. Disposez les mots en essayant de bien restituer la gradation accendante:


A) un sciècle B) un mois C) un an D) une semaine

82
9. Cochez le mot à valeur stylistique dont la composante imagée peut être
facilement perçue:
A) flatteur B) gentilhomme
C) lèche-bottes D) avare
10. Reliez la composante de la valeur stylistique et l’explication de son
contenue:
1. composante imagée
2. composante axiologique
3. composante socio-symbolique A) indique les conditions communicatives
B) c’est la forme interne du mot
C) traduit l’appréciation subjective

11. Mettez les signes de la composantes axiologique en ordre


d’accroissement de l’appréciation positive:
A) «ironique» B) «péjoratif» C) «terme de tendresse» D)
«injure»

12. Complétez l’affirmation: «Quand on représente la situation du côté


subjectif en y mêlant de l’affectivité, des éléments axiologiques et imagés,
quand on emploie du lexique à valeur stylistique où le lexique neutre en
changeant son contenu sémantique, quand le contenu de tout l’énoncé
s’enrichit en comparaison de son équivalent neutre, alors il s’agit du cas de la
réalisation de la fonction ................................................................ des unités
de la langue»:

13. De quel approche de la norme s’agit-il dans l’exemple suivant: «on ne


porte aucun jugement de valeur, mais parlent de ce qui est standard
(statistiquement habituel) et non standard (statistiquement inhabituel)».
A. déscriptive B) présciptive
C) esthétique D) informative

14. Rangez les types de la norme de la plus étroite à la plus large:


A) norme de la langue B) norme littéraire
C) norme communicative D) norme interne d’un style
fonctionnel

15. Complétez l’affirmation: «La norme....embrasse ce qui est autaurisé par


le système même de la langue».

16. Quand seul le mot a vieilli et non la notion et quand ce mot est surplanté
dans son emploi par un mot nouveau c’est bien le cas du:
A) dialectisme B) néologisme

83
C) archaïsme D) argotisme

17. Rangez les ressources de la langue selon l’accroissement de leur degrès


de déviation de la norme de langue litéraire:
A) langage populaire B) argot C) jargon D) langage familier

18. Complétez la définition: «...c’est un ensemble des faits d’expression de la


langue qui sont considérés comme typiques dans un milieu mal éduqué, peu
instruit et ne peut être défini que par rapport au bon usage».

19. Rangez en ordre acsendant les styles foctionnels d’après la rigueur de


leur norme interne:
A) style publiciste B) style officiel
C) style des belles lettres D) langage de la publicité

20. Est-ce que les notions du style fonctionel et du régistre de la langue sont-
elles équivalentes?
A) oui, elles désignent la même chose
B) ce sont des termes des matières différentes
C) non, elles sont basées sur des critères différents
D) l’un de ces termes n’existe pas

21. Complétez la définition «Le langage _______________ est employé dans


la sphère de la vie quotidienne où le statut social des communicants n’a pas
de grande importance ou bien les communicants ont le même statut»

22. La chute du pronom il et de la négation ne est une des caractéristiques du:


A) langage de la presse
B) style scientifique
C) style officiel
D) langage de la presse

23. Complétez la définition «Le style __________________ est employé


dans la communication entre les ministères, les administrations publiques ou
privées, les magistratures, les entreprises industrielles, les maisons de
commerce, entre ces organismes et la population»

24. Dans quelle partie de la lettre officielle emploie-t-on le cliché suivant:


«Je vous prie d’agréer, Madame, l’expression de mes salutations les
meilleures»?
A) au début de la lettre
B) au milieu de la lettre
C) à la fin de la lettre

84
D) sur l’enveloppe

25. Rangez les marqueurs argumentatifs en suivant la logique de l’article


scientifique:
A) «en guide de conclusion» B) «premièrement»
C) «au début de l’article...» D) «deuxièmement»

26. Reliez les styles et leurs particularités grammaticales:


A) style scientifique B) emploi du pluriel dit «de modestie»
C) style de la pressel D) du Futur simple pour marquer les actions
passées
27. La fonction estétique est propre:
A) à l’unité lexicale
B) à un énoncé
C) à un passage du texte
D) à une oeuvre littéraire en son intégralité

28. Emploi plus au moins fréquant des tropes individuels est une des
caractéristiques du:
A) style des belles lettres
B) style scientifique
C) style officiel
D) langage parlé

29. Complétez: La phrase «Je cherche un toit» prononcé par celui qui veut
trouver un logement est un exemple de la
___________________________________.

30. Rangez les tropes et les figures au fur et au mesure de leur apparition
dans des phrases suivantes: “Le gris qui a un grain”; Hâtez-vous lentement
Dormir avec Kenzo Dîner avec Saint-Laurent Séduire avec Cacharel
(publicité d’un grand magasin); Adolphe essaie de cacher l’ennui que lui
donne ce torrent de paroles qui commence à moitié chemin de son dimicile et
qui ne trouve pas de mer où se jeter.
A) métonymie B) paronomase C) oxymore D) métaphore

31. Reliez le phénomène stylistique et son exemple:


1. chiasme A) Ô triste, triste était mon âme
2. inversion B) Il était plus le fils de sa mère qu’elle était la mère de son
fils

32. Reliez le type de la répétition et son schéma:


1. anaphore A) A———/A———

85
2. épiphore B) ____A/____A

33. Reliez le nom du phénomène stylistique en français et sa traduction en


russe:
1. l’attente trompé A) обманутое ожидание
2. position forte B) сильная позиция

34. L’un des romans de Marc Lambron porte le titre «L’oeil du silence». A
quel procédé stylistique l’auteur fait-il recours dans ce cas-là?
A) comparaison imagée B) personnification
C) métonymie D) oxymore

35. Complétez la définition: «Le terme de __________ vient du verbe


latin reticere, composé de tacere, “se taire” : aussi désigne-t-il l'action de ne
pas dire quelque chose, de le garder par-devers soi en se taisant.

36. Rangez les procédés stylistiques dans l’ordre de leur apparition dans le
texte suivant: «C’était une petite fille. C’était une femme. La flétrissure de
ses sept ans avait enfoncé en elle une fleur noire dont les pétales s’ouvraient
dans les très fonds. Elle cherchait désespérément le moment où la honte
enfouie deviendrait acceptation».
A) anaphore B) métaphore C) antithèse D) métaphore

37. Le terme «la métaphore filée» a comme équivalent russe:


A) персонификация B) эксплицитная метафора
C) сквозная метафора D) стёршаяся метафора

38. L’exemple de l’énumération c’est:


A) “Le gris qui a un grain”; Adolphe essaie de cacher l’ennui que lui donne
ce torrent de paroles qui commence à moitié chemin de son dimicile et qui ne
trouve pas de mer où se jeter.
B) Hâtez-vous lentement
C) Dormir avec Kenzo Dîner avec Saint-Laurent Séduire avec Cacharel
(publicité d’un grand magasin)
D) Fuyards, blessés, mourants, caissons, brancards, civieres,
On s'écrasait aux ponts pour passer les rivières.

39. Dans le texte littéraire les séries de points de suspention servent


habituellement à marquer le phénomène stylistique tel que:
A) la réticence B) la synecdoche
C) l’énumération D) la métaphore

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40. Le principe «La partie pour tout» se réalise dans tel procédé stylistique de
nature tropéique que:
A) personnification B) périphrase
C) synecdoche D) métaphore pure

41. La métaphore est-elle un procédé de nature tropéique?


A) oui B) ce n’est pas un procédé du tout
C) non D) ce terme «métaphore» n’existe
pas.

42. L' __________________________________________


c’est le procédé par lequel on dit le contraire de ce qu'on veut faire entendre.

43. L’euphémisme sert à:


A) renforcer une idée B) enjoliver le discours
C) atténuer une idée déplaisante D) mentir
44. Quel partie du texte ne peut pas être considérée comme position textuelle
forte:
A) épigraphe B) partie finale
C) titre D) septième page

45. Reliez le phénomène stylistique et son explication:


A) hyperbole B) dire la même chose
C) tautologie D) exégération

46. «Je meurs de honte» – c’est un exemple de:


A) hyperbole B) énumération
C) tautaulogie D) réticence

47. Rangez dans l’ordre ascendant les unités linguistiques suivantes:


A) le mot B) le texte C) le paragraphe D)
l’énoncé

48. L’antiphrase et l’antithèse sont:


A) des synonymes C) des termes différentes
B) des antonymes D) des homonymes

49. L’équivalent russe du terme français «énoncé» c’est:


A) высказывание B) сложноподчинённое предло-
жение
C) предложение D) абзац

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50. Traité du stylistique française publié en 1909 et devenue la déclaration de
stylistique comme discipline linguistique à part a été écrite par
A) Charles Bally
B) Albert Séchéhaye
C) Nicolas Boileau
D) Jules Marouzeau

51. Le terme de «valeur stylistique» a comme équivalent russe le terme:


A) стилистический синоним
B) стилевая черта
C) стилистическая окраска слова
D) характеристика стиля

52. Reliez la marque stylistique accompagnant le mot dans le dictionnaire et


son équivalent russe:
1. «fam» A) « разговорн.»
2. «pop» B) «простореч.»

53. Complétez la phrase: La fonction............................. consiste en ce que


l’auteur en faisant le choix particulier des faits d’expression de la langue, en
employant les procédés stylistiques de nature différente crée une idée
essentielle qui se fait voir au lecteur à travers tout le texte et qui exerce une
certaine influence sur le lecteur et même change sa perception du monde et
de ses valeurs essentielles.

54. Reliez les nominations synonymiques:


A) norme effective B) norme quantitative
C) norme idéale D) norme qualitative

55. Dites si c'est vrai ou faux: des archaïsmes se trouvent en dehors de la


norme de la langue.
A) vrai
B) faux

56. Dites si c'est vrai ou faux: la norme littéraire est appelée parfois par les
liguistes français «le bon usage»
A) vrai
B) faux

57. Le mot …...................... c’est le mot qu’ une personne bien instruite et
bien élevée peut introduire dans son discours sans risquer sa réputation et
sans avoir peur d’être blâmé par son milieu.

88
58. L’équivalent russe du terme français « style familier » c’est:
A) разговорный стиль B) диалект
C) просторечие D) арго

59. L’antiphrase et l’euphémisme sont:


A) des synonymes B) des termes différents
C) des antonymes C) des homonymes

60. Métaphore incohérente et la métaphore brisée ce sont:


A) des synonymes B) des termes différants
C) des antonymes D) des homonymes

89
ВОПРОСЫ К КОЛЛОКВИУМАМ

Questions de contrôle pour le colloque №1

1. Déterminez la notion du style.


2. Quel mot est considéré comme mot-clé de la stylistique?
3. Précisez les problèmes qui forment le champ de recherches de la
stylistique.
4. En combien de branches ce champ peut-il être subdivisé?
5. De quel science antique la stylistique a –t –elle beaucoup hérité?
6. Nommez quelques réthoriciens antiques qui ont fait une grande contribution
au developpement de la stylistique au corp de la réthorique antique.
7. Parlez du purisme français. Quel était le but de ce mouvement?
8. Qu’est-ce qui était considéré comme un bon échantillon de la langue
française par les puristes français?
9. Par quoi Nicolas Boileau est-il devenu célèbre et quand?
10.Quel ouvrage a-il marqué le début de la stylistique comme science
linguistique?
11. Formulez les postulats essentiels de la conception stylistique de Charles
Bally.

Questions de contrôle pour le colloque №2

1. Précisez la notion de la valeur stylistique.


2. Combien de composantes comprend-t-elle?
3. Parlez de chaque composante.
4. Comment ces différantes composantes sont-elles marquées dans des
dictionnaires?
5. Qu’est-ce qui sert de base pour la valeur stylistique: le mot, la phrase,
l’extrait du texte, tout le texte?
6. Qu’est-ce que c’est que la fonction stylistique?
7. Qu’est-ce qui lui sert de base pour la réalisation?
8. Comment peut-t-on distinguer l’énoncé à fonction stylistique de l’énoncé
à fonction stylistique zéro?
9. Précisez la notion de la fonction esthétique.

90
ВОПРОСЫ К ЗАЧЁТУ:

1. L’objet de la stylistique française.


2. L’histoire de la stylistique.
3. Valeur et fonction stylistiques.
4. Catégorie de la norme.
5. Notions du régistre et du style fonctionnel.
6. Typologie des styles fonctionnels.
7. Styles parlés.
8. Style officiel
9. Style scientifique.
10. Langue de la presse.
11. Langue des belles-lettres.
12. L’aspect stylistique des faits de grammaire.
13. Métaphore (personnification et allégorie).
14. Figures du voisinage (périphrase, euphémisme, pléonasme).
15. Antithèse, chiasme et oxymore.
16. Comparaison imagée.
17. L’ellipse et zeugme.
18. Néologismes et archaismes.
19. Métonymie (synecdoque, antonomomase).
20. Litote et hyperbole.
21. Variantes de la répétition.
22. L’analyse stylistique du texte littéraire.

91
МЕТОДИЧЕСКИЕ РЕКОМЕНДАЦИИ

Методические рекомендации для студентов

Овладение студентами знаниями и умениями, необходимыми для


стилистического анализа текстов различной жанровой принадлежности,
чрезвычайно важно для формирования полноценной языковой и филоло-
гической компетенции обучаемых. Знания и умения, полученные в курсе
стилистики французского языка, являются базой, основой для последую-
щего овладения тонкостями филологического анализа.
Режим и характер видов учебной работы по данному курсу:
1. Лекции: наиболее важным в теоретическом отношении является
понимание и усвоение проблематики стилистики. Для их решения вводят-
ся элементы продуктивной деятельности в конце лекции или в начале сле-
дующей – в форме вопросов или небольших заданий, направленных на
определение лингвостилистической вариативности.
2. Семинарские занятия: семинарские занятия рекомендуются прово-
дить с опорой на общие вопросы теории, изложенные в лекционном курсе
и списке обязательной литературы.

Этапы подготовки к семинарским занятиям:


1. Обработка информации по изучаемой теме (конспекты лекций,
специальная литература).
2. Подготовка устного сообщения на французском языке по соответ-
ствующей теме семинара.
3. Закрепление общетеоретических положений с помощью конкрет-
ного речевого материала.
4. Совместный поиск истины на основе предложенных семинарских
заданий и тестов. Обсуждение найденных вариантов.
5. Семинарские рекомендации преподавателя для подготовки к сле-
дующему семинару (возможны индивидуальные задания).

Рекомендации по работе с литературой:

Поскольку существует несколько монографий по стилистике француз-


ского языка, характеризующихся разными подходами и терминологическим
аппаратом, то предлагаются те авторы, труды которых отражают большую
семинарскую направленность – учебники З.И. Хованской и К.А. Долинина.

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Для подготовки к каждому семинарскому занятию дается список
обязательной и дополнительной литературы, как на русском, так и на
французском языках.
Так как тематика курса отражается в разных учебниках, в планах се-
минарских занятий указывается необходимые главы и параграфы.
Кроме того, предлагается дополнительная литература, которая может
служить для написания рефератов, темы которых разрабатываются препо-
давателем и обсуждаются индивидуально в форме консультаций.
Результатом аудиторной работы по стилистике французского языка
является конспект лекций с изложением основных аспектов темы с пре-
имущественной установкой на те из них, которые представляют трудности
при переходе к семинарскому анализу текстов различной стилевой при-
надлежности. Активное участие в обсуждении проблем на семинарских
занятиях обеспечивает формирование стойких навыков идентификации
стилистических феноменов в тексте.
Обязательными компонентами самостоятельной работы студентов
являются:
- заучивание наизусть определений основных понятий темы;
- анализ единиц разных уровней языка с целью установления их роли
в формировании стилевой специфики текста;
- иллюстрация теоретических положений собственными примерами;
- выполнение семинарских заданий по изучаемой теме;
- репродуктивное чтение основной литературы по контрольным во-
просам;
- работа с дополнительной литературой;
- ознакомление с научными трудами отечественных и зарубежных
лингвистов.
Кроме того, следует обратить особое внимание на подготовку к кол-
локвиумам и итоговому тестированию. Последнее требует от обучающих-
ся повторения всего пройденного материала, верификации основной тер-
минологии. Подготовка к презентации стилистического анализа текста, ко-
торый даётся на дом, требует тщательного анализа языкового материала, а
также неоднократного обращения к лекционному материалу и привлече-
ния дополнительных источников, в том числе, интернет-ресурсов.

Методические рекомендации для преподавателей

Настоящий курса стилистики французского языка предназначен для сту-


дентов факультетов иностранных языков, изучающих французский язык в
качестве первого языка.

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Основная задача курса заключается в систематическом изложении
теоретических основ современной стилистики. В основе концепции курса
лежат традиции отечественной романистики, а также важнейшие достиже-
ния отечественной и зарубежной лингвистики последних лет.
Курс «Стилистика (французский язык)» является важным звеном под-
готовки по направлению подготовки «Лингвистика», так как является акту-
альным и динамически развивающимся направлением современной науки,
совмещающим в себе последние новационные достижения лингвистики и
генристики. В результате изучения дисциплины студент должен знать основ-
ной категориальный аппарат стилистики, свободно владеть терминами и по-
нятиями, представлять проблематику изучаемой науки, связанные с ней зада-
чи и направления исследования. Студент должен также знать методы работы
с текстами различной стилевой принадлежности, иметь представление о ме-
ханизме формирования культурных смыслов, уметь находить стилистически
значимые единицы в речевом потоке и рефлектировать их коннотацию.
При обучении используются следующие формы организации занятий:
чтение лекций, выполнение студентами самостоятельных и творческих ра-
бот, подготовка сообщений по заданной тематике. Большой объем инфор-
мации дается студентам в форме лекции. Материал отличается достаточно
высоким уровнем сложности и носит специализированный характер, требу-
ет от студентов дисциплинированности в усвоении знаний, активного и ре-
гулярного посещения лекционных и семинарских занятий. Обязательным
компонентом курса является регулярная подготовка и презентация студен-
тами стилистических анализов текстов различной жанровой природы.
Объяснение нового материала осуществляется в лекционной форме.
Вся необходимая информация визуализируется в форме слайд-
презентаций.
Навыки работы с текстами различной стилевой принадлежности и
языковыми единицами приобретаются студентами в ходе семинарских за-
нятий, где предоставляется возможность для закрепления теоретических
знаний на практике (выполнение упражнений, стилистический анализ тек-
стов, подбор и анализ языкового материала) и развития творческих спо-
собностей (презентация анализов текстов, самостоятельное написание мо-
дельных текстов того или иного жанра).

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СПИСОК ЛИТЕРАТУРЫ

Основная

1. Береговская Э.М. Хрестоматия по французской стилистике. М., 1986.


2. Кузнецов В.Г. Функциональные стили современного французского
языка (публицистический и научный). М., 1991
3. Морен М.К., Тетеревникова Н.Н. Стилистика современного фран-
цузского языка. М., 1970.
4. Потоцкая Н.П. Стилистика современного французского языка. М.,
1974
5. Степанов Ю.С. Французская стилистика. М., 1965.
6. Синицин В.В. Стилистика французского языка: курс лекций. Тула,
2007. 125 с.
7. Хованская З.И., Дмитриева Л.Л. Стилистика французского языка. М.,
1991
8. Combes D. Les genres littéraires. P., 1992
9. Henry A. Métonymie et métaphore. P., 1984
10.Riffaterre M. Essais de stylistique structurale. P., 2014.
11.Molinié G. La stylistique. P., 1993
12.Toborov Fs. Les genres du discours. P., 1978.
13. Zufferey S., Moeschler J. Initiation à la stylistiaue française. P. : Colin,
2013. 186 p.

Дополнительная

1. Адмони В.Г. Система форм речевого высказывания. С.-П., 1994


2. Виноградов В.В. Проблемы русской стилистики. М., 1997
3. Виноградов В.В. О теории художественной речи. М., 1971
4. Дюбуа Ж. и др. Общая риторика. Перевод с французского. М., 1986

Сайтография

Пособия по интерпретации текста . URL: www.edu.icc.dgu.ru (дата обра-


щения: 25.03.2014).
Справочный материал. URL: www.sng.edu.ru(дата обращения: 25.03.2014).
Справочная литература. URL: www.soip-catalog.informika.ru(дата обраще-
ния: 25.03.2014).
Словари. URL: www.linguanet.ru (дата обращения: 25.03.2014).

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Тексты для анализа. URL:
www.espacefrancais.com/style_litteraire.html(дата обращения: 25.03.2014).
Материалы по нормам современного французского языка. URL:
http://www.scribd.com/doc/55618840/7/%C2%A7-6-La-norme-de-la-langue-et-
la-stylistique (дата обращения: 25.03.2014).
Филологический портал. Philology.ru. URL: http://www.philology.ru (дата
обращения: 25.03.2014).
Портал научных публикаций на французском языке. URL:
http://www.persee.fr (дата обращения: 25.03.2014).
Долинин К.А. Стилистика французского языка. Электронный ресурс. URL:
http://philologos.narod.ru/dolinin/dolinin1987.htm (дата обращения:
25.03.2014).

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