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La Revue de médecine interne 31 (2010) 277–286

Mise au point

Hyponatrémie : de la physiopathologie à la pratique


Hyponatremia: From physiopathology to practice
A. Passeron a,∗ , S. Dupeux a,b , A. Blanchard c
a Service de médecine interne, AP–HP, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France
b Service d’hospitalisation à domicile, AP–HP, 14, rue Vésale, 75005 Paris, France
c Centre d’investigation clinique, AP–HP, hôpital européen Georges-Pompidou, 20, rue Leblanc, 75015 Paris, France

Disponible sur Internet le 11 février 2010

Résumé
L’hyponatrémie est un trouble hydroélectrolytique très fréquent, parfois silencieux, pouvant être le premier signe d’une maladie néoplasique ou
un marqueur de gravité dans l’insuffisance cardiaque et la cirrhose décompensée. L’identification de la cause de l’hyponatrémie est indispensable à
une prise en charge adaptée reposant sur une démarche physiopathologique systématique. Il convient de confirmer l’hypo-osmolarité plasmatique,
d’évaluer la réponse rénale avec l’osmolarité urinaire et d’apprécier le volume extracellulaire en s’aidant de la natriurèse. Cette analyse permettra
de distinguer les hyponatrémies par intoxication à l’eau avec réponse rénale normale de celles liées à la persistance de sécrétion d’hormone
antidiurétique soit par stimulus volémique soit par sécrétion inadéquate. Le recours aux solutés hypertoniques (sérum salé 3 %) doit être restreint
aux hyponatrémies aiguës (< 48 h) ou ayant des signes de souffrances cérébrales ; leur prise en charge est alors une urgence. En cas d’hyponatrémie
chronique peu ou pas symptomatique, la correction doit être prudente pour éviter le risque de myélinolyse centropontine et doit s’adapter au méca-
nisme retenu : apport sodé ou restriction hydrique. Une nouvelle classe thérapeutique d’inhibiteurs des récepteurs V2 de l’hormone antidiurétique
des cellules tubulaires rénales (les vaptans) est disponible aux États-Unis dans le traitement des hyponatrémies avec volume extracellulaire normal
ou augmenté. La place de ces molécules aquarétiques dans l’arsenal thérapeutique reste à définir, en particulier leur impact sur la morbimortalité.
© 2010 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Hyponatrémie ; Vasopressine ; Hormone antidiurétique ; Antagoniste des récepteurs de l’hormone antidiurétique

Abstract
Hypotonic hyponatremia is the most common electrolyte abnormality encountered in hospitalized patients. It is often asymptomatic but associated
with increased mortality and morbidity. Prompt recognition of the underlying cause using a systematic physiology based approach and careful
evaluation the chronicity of the hyponatremia is mandatory for an optimal management. One should first document hypotonicity, and then assess
the renal response to hypotonicity to exclude water intoxication, and the extracellular volumes. The further step will identify hyponatremia due to
volemic stimulation of vasopressin associated to extracellular dehydration (corrected by isotonic saline infusion) or to oedematous states. After
exclusion of hypocorticism and hypothyroidism, one would conclude to inappropriate secretion of antidiuretic hormone whose etiology would have
to be established. The use of hypertonic saline solutions should be restricted to the treatment of acute and severe hyponatremia with evidence of
brain damage. Chronic hyponatremia should be correct slowly to avoid the risk of osmotic demyelination syndrome. Water restriction is commonly
recommended in inappropriate secretion of antidiuretic hormone or in hypervolemia with a questionable effectiveness. The recent development
of vasopressin receptor antagonists (vaptans) will modify our therapeutic approaches. Yet, further studies are needed to document their additional
impact on morbidity and mortality.
© 2010 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Hyponatremia; Vasopressin; Antidiuretic hormone; Vasopressin receptor antagonist

1. Introduction

L’hyponatrémie est le trouble hydro-électrolytique le plus fré-


∗ Auteur correspondant. quemment observé à l’hôpital et chez les patients âgés [1,2]. Sa
Adresse e-mail : amelie.passeron@egp.aphp.fr (A. Passeron). prévalence varie de 3 à 20 % en fonction de la définition choisie

0248-8663/$ – see front matter © 2010 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.revmed.2009.03.369
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Fig. 1. Représentation schématique des compartiments intracellulaire et extracellulaire dans les conditions normale et avec les différents états d’hyponatrémies.
Les cercles blancs représentent le sodium, les cercles noirs le potassium, les gros carrés les osmoles non mesurables ne diffusant pas, les petits carrés les osmoles
autres que le sodium diffusant librement à travers la membrane. La ligne brisée entre les deux compartiments représente la membrane cellulaire et la zone hachurée
dans le compartiment extracellulaire le volume intravasculaire.
A. Normalement, le VEC représente 40 % de l’eau totale et le volume intracellulaire 60 %. B. Dans la sécrétion inappropriée d’HAD (hormone anti-diurétique), l’excès
d’eau libre augmente les deux compartiments. C. La rétention d’eau peut donner une hyponatrémie hypotonique sans hypo-osmolarité par accumulation d’osmoles
diffusibles (comme l’urée dans l’insuffisance rénale). D. La présence d’osmoles non diffusibles entraîne une sortie d’eau du compartiment intracellulaire avec une
hyponatrémie hypertonique. E. La déplétion en sodium diminue le volume intravasculaire, entraînant une rétention d’eau par stimulation volémique de l’HAD et
une augmentation du volume intracellulaire. F. Une hyponatrémie hypotonique associée à un excès de sodium entraîne une augmentation des deux compartiements.
G. L’excès de sodium associé à une perte de potassium et à un défaut d’excrétion rénale de l’eau se voit dans l’insuffisance cardiaque traitée par diurétique avec
augmentation du volume extracellulaire et diminution du volume intracellulaire.
D’après Adrogue HJ et Madias NE [1], avec l’autorisation du New England Journal of Medecine .

et du service étudié [3,4]. L’hyponatrémie doit être reconnue non physiologiquement diffusibles à travers la membrane cellulaire.
seulement pour sa morbidité potentielle mais également parce L’osmolarité s’exprime en mOsm/L de plasma et l’« osmolalité »
qu’elle peut être le premier signe d’une maladie non connue, en mOsm/kg d’eau ; elles sont considérées comme équivalentes
en particulier, cancéreuse. Sa prise en charge diagnostique et en pratique clinique sauf dans les pseudo-hyponatrémies.
thérapeutique est complexe puisque cette anomalie peut refléter Le chlorure de sodium (NaCl) est le déterminant essentiel
des états d’hydratation opposés et nécessite une prise en charge de l’osmolarité efficace plasmatique (ou tonicité), responsable
parfois urgente dans les hyponatrémies aiguës ou progressive des mouvements d’eau entre les secteurs intra- et extracellulaires
dans les hyponatrémies chroniques. [5,6]. L’eau diffuse librement à travers les membranes cellulaires
pour maintenir l’équilibre osmotique entre les différents secteurs
2. Rappels physiologiques (Fig. 1). Un tiers se répartit dans le secteur extracellulaire et
deux tiers dans le secteur intracellulaire. L’Osm pl, comme la
L’osmolarité plasmatique (Osm pl) reflète la concentration natrémie, reflète l’équilibre hydrique de l’organisme [1].
des substances dissoutes dans le plasma représentées par La volémie représente le volume vasculaire appartenant au
le sodium (95 %), l’urée et le glucose, ces derniers étant volume extracellulaire (VEC).
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2.1. Régulation de l’osmolarité plasmatique L’osmolarité urinaire (Osm u) peut donc varier de 60 mOsm/L
(dilution maximale en l’absence d’HAD) à 1200 mOsm/L
C’est l’Osm pl et non la natrémie qui est finement régulée par (concentration maximale lorsque l’HAD est élevée).
différents mécanismes. La modulation de la soif par des osmo-
récepteurs thalamiques permet en cas d’hyper-osmolarité une 2.2. Osmorégulation des cellules cérébrales
augmentation de l’ingestion d’eau mais à l’inverse, le dégoût de
l’eau en cas d’hypo-osmolarité plasmatique est variable et peu L’hyponatrémie aiguë (< 48 h) entraîne une augmentation de
sensible, la prise de boisson dépendant beaucoup des habitudes volume des cellules par influx d’eau, particulièrement grave
de chacun. Le contrôle de l’excrétion rénale de l’eau se fait grâce pour les cellules cérébrales en raison de la boite crânienne
à l’hormone antidiurétique (HAD), appelée également arginine- inextensible. L’œdème cérébral est responsable des signes
vasopressine (AVP). L’HAD est un nanopeptide produit dans de souffrance cérébrale. En revanche, quand l’hyponatrémie
les noyaux supranucléaires de l’hypothalamus et sécrétée par la s’installe progressivement, des mécanismes cellulaires compen-
post-hypophyse. Son premier stimulus est l’augmentation de la sateurs se mettent en place en 48 heures : sortie de potassium des
tonicité plasmatique. Mais sa production va également augmen- cellules modification des osmoles organiques cellulaires : myo-
ter, malgré une osmolarité normale ou basse, quand le volume inositol, glycérophosphorylcholine, phosphocréatine/créatine,
plasmatique est diminué (baro- et volo-récepteurs). Après fixa- glutamate, glutamine et taurine [8,9]. Le risque d’une correc-
tion sur les récepteurs V2 des cellules principales des tubes tion trop rapide de l’Osm pl est alors l’apparition de lésions de
collecteurs rénaux, l’HAD induit la phosphorylation et le trans- démyélinisation osmotique.
fert au pôle apical des aquaporines-2, entraînant la réabsorption
passive d’eau libre en fonction du gradient de concentration dans 2.3. Physiopathologie de l’hyponatrémie hypo-osmolaire
la médullaire rénale et l’excrétion d’urine concentrée (Fig. 2).
En l’absence d’HAD, l’épithélium du tube collecteur est imper- Quatre-vingt-dix pourcent des hyponatrémies hypo-
méable à l’eau. Les urines émises sont diluées au maximum. osmolaires sont liées à une sécrétion d’HAD :

• soit par stimulus volémique : hypovolémie vraie des pertes


digestives, rénales, cutanées ou hypovolémie efficace des
insuffisances cardiaques congestives, des cirrhoses décom-
pensées ou des syndromes néphrotiques ;
• soit par production inadéquate.

Plus rarement, l’hyponatrémie est le témoin d’une intoxica-


tion à l’eau : la sécrétion d’HAD est absente ; les urines sont
diluées au maximum mais les apports d’eau dépassent les capa-
cités de dilution du rein.
La Fig. 3 résume les grands mécanismes de l’hyponatrémie.

3. Diagnostic positif d’hyponatrémie

L’hyponatrémie est définie par une natrémie inférieure à


135 mmol/L ; elle est considérée comme modérée jusqu’à
130 mmol/L et profonde au-dessous de 120 mmol/L. La méthode
de mesure la plus fiable est la mesure par potentiométrie grâce
à une électrode spécifique directe sur l’eau plasmatique. L’Osm
pl est mesurée par cryoscopie (N : 280–290 mOsm/L).
Les Osm pl et Osm u peuvent être calculées par les formules
suivantes :

• osm pl(mOsm/L) = ([Na pl](mmol/L) + [K pl](mmol/L) ) × 2 + [urée


pl](mmol/L) + [glucose pl](mmol/L) ;
• osmolarité efficace = Tonicité = ([Na pl](mmol/L) × 2) +
[glucose pl](mmol/L) (N : 285 mOsm/L) ;
• osm u(mOsm/L) = ([Na pl](mmol/L) + [K pl](mmol/L) ) × 2 + [urée
Fig. 2. Effet de la vasopressine sur son récepteur V2 des cellules principales du u](mmol/L) .
tube collecteur : production d’AMP cyclique, phosphorylation de l’aquaporine
2 (AQ2) qui va être exprimé au pôle apical de la cellule et la rendre perméable
Le trou osmolaire (TO) correspond à la différence entre l’Osm
à l’eau
D’après Klussmann E et Rosenthal W [7], avec l’autorisation de Kidney pl mesurée et l’Osm pl calculée : TO = osmolarité mesurée –
International. osmolarité calculée. Il est normalement inférieur à 10 mOsm/kg
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Fig. 3. Approche diagnostique physiopathologique d’une hyponatrémie. Légendes : HAD : hormone antidiurétique ; IC : insuffisance cardiaque, SIADH : sécrétion
inadéquate d’hormone antidiurétique.

d’eau. Elevé, il signe la présence d’osmoles non mesurées des troubles mnésiques et de l’équilibre [14], une apathie, des
comme le mannitol. nausées, une anorexie, des crampes musculaires, des céphalées,
une confusion. L’apparition de signes de souffrance cérébrale
4. Clinique nécessite une prise en charge urgente, comparable à celle des
hyponatrémies aiguës.
La présentation clinique est extrêmement variable en fonction
de la rapidité d’installation de l’hyponatrémie et de sa profon- 4.3. Lésions cérébrales démyélinisantes
deur. Son pronostic, en revanche, dépend essentiellement de la
cause, plus sévère dans l’insuffisance cardiaque congestive, la L’apparition de lésions cérébrales démyélinisantes, dont
cirrhose décompensée, les causes multiples et chez les sujets la myélinolyse centropontine (MCP), est le risque majeur
âgés [10]. de la correction trop rapide d’une hyponatrémie chronique
(> 12 mmol/L au cours des premières 24 heures) [15], favorisée
4.1. Hyponatrémie aiguë par l’hypokaliémie, la dénutrition, l’alcoolisme. La MCP cor-
respond à une démyélinisation symétrique de la protubérance.
L’hyponatrémie aiguë (< 48 h) est une urgence thérapeu- Après une amélioration neurologique initiale et un intervalle
tique : la baisse de l’osmolarité extracellulaire rapide entraîne libre de un à six jours, des signes neurologiques apparaissent à
un mouvement d’eau rapide vers les cellules et ne permet pas la des degrés divers avec mutisme, dysarthrie, somnolence, quadri-
mise en place des phénomènes d’adaptation des cellules céré- parésie spastique, paralysie pseudo-bulbaire locked in syndrome.
brales. Les signes de souffrances cérébrales [11], témoins de Des lésions extrapontines sont associées dans 10 % des cas. Le
l’œdème cérébral, sont au premier plan : agitation, confusion, diagnostic est confirmé par l’IRM cérébrale [16] qui montre
convulsions, torpeur, coma, dyspnée de Cheyne-Stokes, arrêt un hyposignal T1 et un hypersignal T2 de la protubérance mais
cardiorespiratoire. La femme en âge de procréer aurait une plus les images peuvent apparaître de façon retardée. Le pronos-
grande susceptibilité cérébrale à l’hyponatrémie [12]. L’hypoxie tic est grave avec l’absence de régression dans 71 % des cas
cellulaire semble aggraver la souffrance cérébrale des patients [17]. La régression des signes de MCP a été décrite après
hyponatrémiques [13]. Affirmer le caractère aigu est facile si un réinduction rapide d’une hyponatrémie par des solutés hypo-
résultat récent de natrémie est disponible ou si un apport impor- toniques et un analogue de la vasopressine (desmopressine)
tant d’eau libre est retrouvé (polydipsie, perfusion hypotonique). [18].
Sinon, ce sont les signes de souffrance cérébrale qui imposeront
la mise en route d’un traitement urgent. 5. Démarche diagnostique

4.2. Hyponatrémie chronique Quand l’hyponatrémie est chronique ou peu symptomatique,


un diagnostic étiologique est nécessaire à un traitement adapté
L’hyponatrémie chronique (> 48 h), même profonde, est sou- [19]. Le raisonnement repose sur l’appréciation de la tonicité
vent peu ou pas symptomatique. Elle peut se manifester par plasmatique (sodium et glucose), de la réponse rénale avec
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l’Osm u et de l’évaluation du VEC en s’aidant de la natriurèse membranes cellulaires et une sortie des osmoles intracellu-
sur échantillon [20] (Fig. 3). Cette démarche se fait en plusieurs laires [23].
étapes :
5.2. Évaluer la réponse rénale
• évaluer l’Osm pl et la tonicité ;
• rechercher une prise de diurétique, essentiellement les thiazi- 5.2.1. L’osmolarité urinaire est adaptée à l’hyponatrémie
diques ; si elle est inférieure à 150 mOsm/L
• évaluer la réponse rénale ; En cas de bilan hydrique positif, le taux d’HAD devrait
• évaluer le VEC. être indétectable. Les reins diluent les urines au maximum
(Osm u < 80 mOsm/L). Si les apports osmotiques sont nor-
5.1. Analyse de l’osmolarité plasmatique maux (1000 mOsm/24 h), le débit urinaire maximal sera alors de
12 L/24 h. Chez les personnes âgées, le pouvoir de dilution dimi-
L’hyponatrémie reflète normalement une hypo-osmolarité nue (150 mOsm/L) et pour des apports osmotiques faibles (par
plasmatique (< 280 mOsm/L) traduisant une hyperhydratation exemple 300 mOsm/24 h), la diurèse maximum sera de 2 L/24 h.
intracellulaire. Une hyponatrémie avec une Osm u adaptée (< 150 mOsm/L)
traduit une réponse normale de l’HAD et du rein et signe une
intoxication à l’eau. Dans l’insuffisance rénale avancée, le pou-
5.1.1. Éliminer les pseudo-hyponatrémies voir de dilution peut s’altérer (dilution maximum des urines de
La mesure de la concentration plasmatique de sodium par 300 mOsm/L). Les apports hydriques doivent être adaptés à la
potentiométrie a permis de s’affranchir presque complètement diurèse.
des pseudo-hyponatrémies, iso-osmolaires et isotoniques,
décrites essentiellement avec la méthode de dosage par spec- 5.2.2. L’osmolarité urinaire est inadaptée à l’hyponatrémie
trophotométrie qui mesure la natrémie en mmol/L de plasma si elle est supérieure à 150 mOsm/L ou supérieure à
après dilution de l’échantillon [21]. Les pseudo-hyponatrémies l’osmolarité plasmatique
se voient dans les hypertriglycéridémies (pancréatite aiguë) ou L’absence de dilution maximale des urines témoigne d’une
les hyperprotidémies majeures supérieures à 90 g/L (myélome, sécrétion d’HAD persistante. L’HAD peut être sécrétée soit par
maladie de Waldenström) qui augmentent la phase solide du stimulus volémique (hypovolémie vraie ou relative) soit sans
plasma en diminuant sa phase liquide. Elles ne reflètent aucun stimulus volémique : sécrétion inappropriée de HAD (SIADH)
déséquilibre entre le capital sodé et le capital hydrique et ne ou insuffisance endocrine. Il faut donc évaluer le VEC.
nécessitent aucun traitement.
5.3. Évaluer le volume extracellulaire
5.1.2. Les hyponatrémies avec osmolarité normale ou haute
L’Osm pl et la tonicité augmentent en cas d’hyperglycémie L’évaluation de l’état d’hydratation d’un patient est sou-
aiguë ou en présence de substances osmotiquement actives. La vent difficile [24] : les signes cliniques et biologiques sont peu
présence d’un TO élevé, égal ou supérieur à 10 mOsm/kg d’eau sensibles et peu spécifiques [25]. Les modifications récentes
signe la présence d’osmoles non mesurées : mannitol, éthylène du poids sont des éléments importants d’évaluation et de sur-
glycol. . . veillance du VEC. Les signes cliniques de VEC augmenté sont
Les hyponatrémies hyperosmolaires entraînent une sortie une prise de poids récente, les œdèmes déclives, mous et prenant
d’eau des cellules et reflètent une déshydratation intracellulaire. le godet, une ascite. Les signes cliniques évoquant un VEC dimi-
Les principales causes sont : nué sont une hypotension orthostatique (baisse de la pression
systolique de 20 mmHg lors du passage de la position couchée
• l’élévation rapide de la glycémie. En effet, l’hyperglycémie à la position debout, après trois minutes), une élévation de la
aiguë, par carence insulinique, a un pouvoir osmotique transi- fréquence cardiaque de plus de 30 battements par minute entre
toire, entraînant une diurèse osmotique. On peut calculer une la position couchée et debout, un pli cutané, une sécheresse
natrémie corrigée [22] : chaque augmentation de 5,5 mmol/L axillaire, une perte de poids récente.
(1 g/L) de la glycémie diminue la natrémie de 2,4 mmol/L ; La protidémie et l’hématocrite permettent de rechercher une
natrémie corrigée = natrémie + (glycémie – 5)/5,5 × 2,4). Il hémoconcentration ou une hémodilution. La comparaison avec
est plus facile de calculer la tonicité (Na × 2) + glucose en des chiffres antérieurs ou l’évolution des chiffres avec le traite-
mmol/L, normalement comprise entre 280 et 295 mOsm/L ; ment permettent de ne pas être induit en erreur par une anémie
• les perfusions de solutés hyperosmolaires (Mannitol, ou une dénutrition.
Dextran. . .) ; Une urée plasmatique élevée et un rapport urée/créatinine
• la réabsorption accidentelle de glycocolle au cours des résec- plasmatique en ␮mol/l supérieur à 100 sont des marqueurs
tions de prostate ; d’hypovolémie vraie ou relative [26].
• les intoxications au méthanol, à l’éthanol, à l’alcool frelaté ; Une diminution de la concentration de l’acide urique plasma-
• le syndrome des membranes malades (sick cell syndrome) qui tique inférieure à 240 ␮mol/L [27] ou une fraction d’excrétion
peut se voir dans des situations d’agression sévère, en réani- de l’acide urique supérieure à 12 % semblent être des signes
mation essentiellement, entraînant un dysfonctionnement des intéressant pour le diagnostic de SIADH [28], la clairance de
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l’acide urique augmentant avec l’expansion volémique mais 6.1.3. Pertes rénales de sel
leurs valeurs diagnostiques sont à confirmer. Une natriurèse supérieure à 30 mmol/L témoigne d’une perte
La natriurèse basse (< 30 mmol/L) est un signe discrimi- rénale de sel. Les causes en sont fréquentes.
nant d’hypovolémie [29] reflétant la stimulation du système
rénine-angiotensine-aldostérone (RAA) en réponse à une baisse 6.1.3.1. Le surdosage en diurétiques. Le surdosage en diuré-
de la volémie vraie par perte extrarénale (hyponatrémie de tiques autres que thiazidiques est beaucoup plus rare. Il existe
déplétion) ou efficace dans les insuffisances cardiaques et les alors une déshydratation extracellulaire et souvent une alcalose
cirrhoses décompensées (hyponatrémie de dilution). L’analyse hypokaliémique.
de la natriurèse sur échantillon est suffisante. La natriurèse des
24 heures est souvent difficile à obtenir. Elle s’interprète en 6.1.3.2. L’insuffisance surrénale aiguë. C’est une complication
fonction du régime sodé et d’un éventuel traitement diurétique. rare mais grave d’une insuffisance surrénale basse, connue ou
Une hyponatrémie avec une natriurèse supérieure à 30 mmol/L pas. Il existe au premier plan une déshydratation extracellu-
oriente vers des pertes rénales de NaCl, une SIADH ou une laire pouvant aller jusqu’au collapsus par perte rénale de sel
insuffisance endocrine. liée au déficit en minéralocorticoïdes. Il existe également une
hyperkaliémie constante et parfois une acidose métabolique,
6. Les principales causes d’hyponatrémies une éosinophilie, une hypoglycémie. Le dosage du cortisol per-
hypo-osmolaires met de poser le diagnostic. Un traitement par hémisuccinate
d’hydrocortisone doit être débuté sans attendre les résultats au
6.1. Hyponatrémie avec volume extracellulaire diminué moindre doute diagnostique associé à des apports de sérum salé
à 0,9 %.
L’hyponatrémie avec VEC diminué reflète une perte de NaCl
plus importante que la perte d’eau (Fig. 1E). 6.1.3.3. Les néphropathies tubulo-interstitielles. Les néphro-
pathies tubulo-interstitielles avec perte de sel se voient
transitoirement lors de la reprise d’une diurèse après une insuf-
6.1.1. Pertes extrarénales de sel fisance rénale aiguë ou une levée d’obstacle urologique ou sont
Une natriurèse inférieure à 30 mmol/L témoigne de chroniques dans les néphropathies tubulo-interstitielles comme
l’hypovolémie par pertes extrarénales : la maladie kystique de la médullaire, la néphropathie des analgé-
siques, les uropathies obstructives, l’acidose tubulaire proximale
• pertes digestives : diarrhées sécrétoires, fistules digestives, de type 2.
vomissements. Rarement, chez des patients ayant des vomis-
sements et une alcalose métabolique, une bicarbonaturie peut 6.1.3.4. Le cerebral salt wasting syndrome. Le cerebral salt
survenir. Le bicarbonate est un anion non réabsorbable favo- wasting syndrome est décrit dans les services de neurochirurgie
risant l’excrétion obligée de cations, si bien que dans cette [32]. Survenant chez des patients ayant des lésions céré-
situation la concentration urinaire de sodium peut être supé- brales (traumatisme, infection, tumeur, hémorragie), le tableau
rieure à 20 mmol/L malgré une hypovolémie sévère. Dans ce biologique est celui d’un SIADH mais le secteur extracel-
cas, cependant, la concentration urinaire de chlore est infé- lulaire est diminué. La physiopathologie pourrait impliquer
rieure à 10 mmol/L ; l’augmentation du peptide natriurétique d’origine cérébrale, res-
• constitution d’un troisième secteur : péritonite, pancréatite, ponsable d’une polyurie et d’une natriurèse élevée associée à une
iléus ; mauvaise gestion des apports hydro-sodés.
• perte cutanée : brûlures étendues, dermatose bulleuse ;
• sudation du marathonien compensée par des apports hypoto- 6.2. Hyponatrémie avec volume extracellulaire augmenté
niques.
C’est une hyponatrémie avec un excès relatif d’eau
6.1.2. Prise de thiazidiques plus important que l’excès de sel (Fig. 1F). Normalement,
Les hyponatrémies imputables aux diurétiques thiazidiques l’augmentation de la pression dans l’oreillette gauche dimi-
sont fréquentes ; elles sont parfois très aiguës survenant dans nue la sécrétion d’HAD et augmente celle du peptide atrial
les jours suivant l’introduction du traitement mais elles peuvent natriurétique ce qui entraîne une augmentation de la sécrétion
aussi se voir après un traitement prolongé. Il semble qu’un âge d’eau et de sodium. Dans l’insuffisance cardiaque chronique,
avancé, le sexe féminin et un index de masse corporel bas soient ces réflexes sont abolis. La stimulation du système RAA et du
plus fréquemment associés à la survenue d’hyponatrémies sous système sympathique augmente la réabsorption tubulaire proxi-
thiazidiques [30,31]. L’hyponatrémie est alors la conséquence male de l’eau et du NaCl expliquant le syndrome œdémateux et la
de l’altération de l’activité du segment cortical de dilution natriurèse basse. L’hyponatrémie est le témoin de la production
des urines aggravée par le déficit potassique et de la sécré- d’HAD, stimulée par l’hypovolémie efficace et l’angiotensine
tion inadéquate d’HAD. Une déshydratation extracellulaire peut II. Elle se voit dans l’insuffisance cardiaque congestive, la cir-
contribuer à cette hyponatrémie, mais elle n’est pas obliga- rhose décompensée et le syndrome néphrotique. Il s’agit d’un
toire. marqueur pronostique péjoratif dans la cirrhose et l’insuffisance
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Tableau 1 Tableau 2
Critères diagnostiques de sécrétion inadéquate d’hormone antidiurétique Causes de syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique.
(SIADH).
Pathologies tumorales
Critères majeurs Carcinomes : poumon à petite cellule, mésothéliome, oropharynx, estomac,
Osmolarité plasmatique diminuée < 280 mOsm/L duodénum, pancréas, uretère, vessie, prostate, endomètre
Osmolarité urinaire inadaptée > 150 mOsm/L Lymphomes, sarcomes
Volume extracellulaire normal : pas d’hypotension orthostatique, de Affections pulmonaires
tachycardie, d’œdème ou d’ascite Infections bactériennes, virales, tuberculose, aspergillose
Natriurèse > 30 mmol/L en régime normosodé Asthme
Fonctions thyroïdiennes et surrénales normales Mucoviscidose
Critères mineurs Affections du système nerveux central
Pas de prise récente de diurétique Infections : encéphalite, méningite, abcès cérébral, infection par le VIH
Absence de correction de la natrémie après perfusion de sérum salé 0,9 % Tumeurs cérébrales
Correction de la natrémie après restriction hydrique Traumatisme crânien, hydrocéphalie, thrombose du sinus caverneux
Sclérose en plaques, syndrome de Guillain-Barré, syndrome de sevrage,
porphyrie aiguë intermittente
cardiaque, retrouvé chez plus de 20 % des patients avec une Médicaments augmentant la production d’HAD par l’hypothalamus
Antidépresseurs : tricycliques, inhibiteur de la recapture de la sérotonine,
maladie avancée [33,34].
IMAO
Anti-psychotiques : phénotiazine, halopéridol
6.3. Hyponatrémie avec volume extracellulaire normal Anti-épileptiques : carbamazépine, acide valproïque
Anti-cancéreux : alacaloïdes, sels de platine, agents alkylants, méthotrexate,
C’est une hyponatrémie reflétant un excès d’eau responsable interféron, anticorps monoclonaux
Antalgiques opiacés : tramadol, morphine
d’une hyperhydratation intracellulaire pratiquement pure par
Divers : inhibiteurs de la pompe à proton, nicotine, « ecstasy » (MDMA),
persistance d’une « antidiurèse » (Fig. 1B). clofibrate
Médicaments potentialisant l’effet de l’HAD
6.3.1. Hyponatrémies d’origine endocrine Anti-épileptiques : carbamazépine, lamotrigine
Devant un tableau biologique de SIADH, il faut impé- Anti-diabétiques : chlorpropamide, tolbutamide
Anti-cancéreux : cyclophosphamide intraveineux
rativement rechercher une insuffisance surrénale [35] par Anti-inflammatoires non stéroïdiens
un dosage de cortisol plasmatique à huit heures suivi d’un Médicaments ayant une activité HAD
test au synacthène immédiat (réponse normale si le corti- Desmopressine, ocytocine, vasopressine
sol plasmatique une heure après l’injection est supérieur à Autres
550 nmol/L). L’insuffisance surrénale périphérique avec défi- Génétique : mutation activatrice du récepteur de l’HAD
Idiopathique
cit en minéralo- et glucorticoïdes s’accompagne d’une perte Transitoire : exercice d’endurance, stress, nausées, douleurs, anesthésie
rénale de sel et d’une tendance à l’hyperkaliémie. L’ACTH
est élevée. Dans l’insuffisance surrénale centrale avec déficit HAD : hormones antidiurétiques ; IMAO : inhibiteurs de la mono-amine-
oxydase.
en glucorticoïdes, l’hyponatrémie est inconstante, plus modé-
rée, expliquée par une stimulation non volémique d’HAD. Il
n’y a pas d’hypokaliémie et l’hypoglycémie est fréquente. Un
et recueil des urines pendant quatre heures : normalement, 80 %
traitement substitutif par hydrocortisone est toujours indispen-
de la charge aqueuse est éliminée) et un dosage de l’HAD sont
sable. Le traitement par fludrocortisone est réservé aux formes
justifiés devant une SIADH sans cause. Une mesure d’HAD
périphériques.
effondrée plaidera pour le diagnostic de syndrome d’antidiurèse
La recherche d’une hypothyroïdie est classique par le dosage
inapproprié néphrogénique par mutation activatrice du récep-
de la TSHus même si le mécanisme de l’hyponatrémie dans
teur V2 de l’HAD [38]. Une SIADH avec un dosage d’HAD
l’hypothyroïdie est mal connu.
normal et un test de charge aqueuse normal plaidera pour le
diagnostic de reset osmostat décrit pendant la grossesse et dans
6.3.2. La sécrétion inadéquate d’hormone antidiurétique
différentes pathologies (sarcoïdose hypothalamique, encépha-
(SIADH) ou syndrome d’antidiurèse inapproprié
lite, psychose).
Le diagnostic de SIADH est un diagnostic d’exclusion mais
est très fréquent. Les critères diagnostiques de SIADH sont
résumés dans le Tableau 1 [36,37]. La mesure de la concen- 6.3.3. Intoxication à l’eau
tration sérique d’HAD n’est pas recommandée en routine. L’absorption excessive d’eau est rarement suffisante, si le
L’Osm u supérieure à 150 mOsm/L, inadaptée à l’Osm pl, signe rein est normal, pour entraîner une hyponatrémie. Il faut que les
« l’antidiurèse inappropriée ». La concentration d’HAD est le capacités de dilution du rein soient diminuées ou que les apports
plus souvent élevée par production hypothalamique ou ecto- quotidiens en osmoles soient faibles. L’Osm u est adaptée à
pique, indépendamment de l’Osm pl. Les étiologies des SIADH l’Osm pl basse, inférieure à 150 mOsm/L. L’intoxication à l’eau
sont nombreuses (Tableau 2). Une cause médicamenteuse doit se rencontre :
toujours être recherchée. Les causes pulmonaires, neurologiques
et les syndromes paranéoplasiques sont les plus courants. Un test • dans la polydipsie primitive, soit d’origine psychogène (schi-
de charge aqueuse (absorption en 15 minutes de 15 ml/kg d’eau zophrénie) avec stimulation de la soif, aggravée par la
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sécheresse buccale secondaire à certains traitements psycho- supérieure à 18 mmol/L chaque 48 heures. La natrémie doit être
tropes et ingestion massive d’eau [39], soit dans les atteintes surveillée de façon très rapprochée.
hypothalamiques du centre de la soif (sarcoïdose [40]) ;
• chez le patient dénutri : un apport osmotique (urée, sodium) 7.2. Traitement des hyponatrémies chroniques
faible réduira la quantité d’eau maximale pouvant être éli-
minée. Chez les sujets âgés, la capacité de dilution diminue. Il n’y a pas d’urgence à entreprendre un traitement et la
L’intoxication à l’eau peut alors se voir pour une ingestion démarche diagnostique est un préalable indispensable sauf en
d’eau modérée ; cas de symptômes neurologiques. Pour diminuer le risque de
• chez le buveur de bière : la bière est une boisson hypo- démyélination osmotique, il ne faut pas dépasser une élévation
osmolaire, pauvre en sodium et en protides, riche en sucre. de natrémie de 12 mmol/L dans les 24 premières heures et de
Une ingestion importante de liquide hypotonique associée à 18 mmol/L dans les 48 premières heures [43,44]. Les patients
une diminution des apports osmolaires peut provoquer une ayant une hyponatrémie associée à une volémie basse ou liée
hyponatrémie sévère [41] ; à la prise de desmopressine ou d’un thiazidique, sont particu-
• chez l’insuffisant rénal lorsque le débit de filtration gloméru- lièrement à risque de myélinolyse centropontine car une fois la
laire est inférieur à 20 ml/min. Les apports hydriques doivent cause corrigée, la sécrétion d’HAD s’arrête brutalement ; une
être adaptés à la diurèse journalière ; diurèse aqueuse peut alors survenir avec le risque d’une correc-
• iatrogène après perfusion intraveineuse de solutés hypo- tion trop rapide de la natrémie. Il faut alors apporter des solutés
toniques (glucosé 5 %), surtout en période postopératoire hypotoniques.
(sécrétion d’HAD dans les états de stress).
7.2.1. Traitement des hyponatrémies avec volume
7. Traitement de l’hyponatrémie hypo-osmolaire extracellulaire bas
Le traitement repose sur un apport de NaCl qui va rétablir
L’hyponatrémie aiguë symptomatique est une urgence. la volémie. En cas d’hypovolémie mal tolérée avec hypotension
L’hyponatrémie chronique doit être respectée en attendant un artérielle ou mettant en jeu le pronostic vital, une perfusion de
diagnostic étiologique, puis corrigée lentement. sérum salé isotonique 0,9 % doit être faite jusqu’au contrôle ten-
sionel. En cas d’hypovolémie bien tolérée ou de difficulté pour
7.1. Traitement des hyponatrémies aiguës ou avec signes évaluer le VEC, on peut apporter 0,5 à 1 L de sérum salé isoto-
de souffrances cérébrales nique en intraveineux soit un apport oral de sel (six grammes
par jour en comprimés). L’arrêt des diurétiques et le traitement
Ce sont des urgences vitales et l’hospitalisation en réani- étiologique des pertes sodées sont indispensables. Du chlorure
mation doit être envisagée. Une correction rapide doit être de potassium par voie orale ou intraveineuse doit être apporté
entreprise jusqu’à disparition des symptômes de souffrances en cas d’hypokaliémie associée.
cérébrales. Le traitement repose sur l’administration de sérum Un patient ayant fait une hyponatrémie imputée aux thiazi-
salé hypertonique 3 % associé si besoin au furosémide. Ce trai- diques est à risque de récidive et cette classe de diurétique doit
tement est interrompu dès la disparition des symptômes. En être contre-indiquée.
2005, une conférence de consensus a proposé, dans les intoxi-
cations à l’eau des marathoniens, de faire 100 ml de soluté salé 7.2.2. Traitement des hyponatrémies des sécrétion
à 3 % pour augmenter la natrémie de 2 mmol/L [42]. La formule inadéquate d’hormone antidiurétique (SIADH)
d’Adrogué et Madias [1] permet de calculer le volume à per- Les médicaments susceptibles de donner un SIADH doivent
fuser d’un soluté en fonction de la modification de natrémie être arrêtés et les causes curables traitées. Une restriction
souhaitée : Na pour un litre de soluté = ([Na]mmol/L perfu- hydrique de 750 ml/j permet un bilan négatif en eau si on
sée – [Na]mmol/L du patient) / (eau totale + 1), l’eau totale considère que les pertes obligatoires (urine et pertes insen-
étant estimée par le poids × 0,6 chez l’homme, ×0,5 chez la sibles) représentent 1 L/j mais elle n’est pas toujours efficace,
femme. et l’observance est difficile au long cours. D’autres traitements
Par exemple, pour 1 litre de sodium à 3 %, chez une patiente peuvent être proposés. La déméclocycline (600 à 1200 mg/j),
de 70 kg ayant une natrémie à 110 mmol/L, le (Na attendu est dérivé des tétracyclines et le lithium provoquent un diabète insi-
de (30 × 17) – 110/(70 × 0,5 + 1) = 11 mmol/L. pide néphrogénique mais avec des effets secondaires rénaux
Une autre formule peut estimer le volume de NaCl 3 % importants [45,46]. Des sachets d’urée (30 g/j/per os) peuvent
à perfuser par heure en multipliant le poids du patient par également être prescrits, en utilisant un jus de fruit pour en
« l’augmentation » désirée de la natrémie en mmol/L par heure masquer le goût désagréable [47].
[42]. Par exemple, pour un patient de 70 kg, si l’on souhaite
augmenter sa natrémie de 1 mmol/L par heure, il faut perfu- 7.2.3. Traitement des hyponatrémies dans l’insuffisance
ser (1 × 70) = 70 mL de sérum salé 3 % en une heure. Si l’on cardiaque et la cirrhose
souhaite augmenter la natrémie de 0,5 mmol/L par heure, il L’hyponatrémie est un marqueur pronostique péjoratif dans
faudra perfuser (0,5 × 70) = 35 ml. Ce traitement doit être inter- ces deux pathologies et reflète un stade avancé de la maladie. Le
rompu dès que les symptômes ont régressé, si la concentration traitement consiste en une restriction hydro-sodée souvent insuf-
de sodium est supérieure à 120 mmol/L ou si la correction est fisante. Les diurétiques de l’anse sont intéressants dans la prise
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Tableau 3
Les antagonistes des récepteurs V2 de l’hormone antidiurétique testés dans les essais.
Nom générique Tolvaptan Lixivaptan Statvaptan Mozavaptan Conivaptan

Administration Oral Oral Oral/i.v. Oral i.v.


Posologie 15–60 mg/j 50–100 mg × 2/j 5–25 mg/j 30–60 mg × 2/j 40–80 mg/j
Liaison protéique 99 % 99 % 88–90 % 98,5 %
Demi-vie (h) 6–8 7–10 14–17 3,1–7,8
Métabolisme Hépatique Hépatique Hépatique Hépatique Hépatique
CYP3A4 CYP3A4 CYP3A4 –90 % CYP3A4 CYP3A4
CYP2D6 –10 %
Élimination Selles Selles Selles Selles Selles

en charge des hyponatrémies car ils permettent une excrétion des ces essais mais des cas d’hypernatrémies. Les effets secon-
d’eau plus importante que l’excrétion de NaCl. daires sont la soif et la polyurie. L’utilisation des vaptans n’est
pas indiquée dans les hyponatrémies de déplétion et les études
7.3. Les antagonistes des récepteurs à la vasopressine actuelles ne peuvent en recommander l’utilisation dans les hypo-
natrémies aiguës avec souffrance cérébrale. Le Tolvaptan vient
7.3.1. Récepteur à l’hormones antidiurétiques (HAD) d’obtenir une autorisation de mise sur le marché européenne
Ces récepteurs sont couplés à la protéine G activant une phos- dans les hyponatrémies par SIADH. Son bénéfice clinique reste
pholipase C [48]. Il existe plusieurs types de récepteur. RV1a à confirmer.
active la vasoconstriction et l’agrégation plaquettaire. RV1b
stimule la production d’ACTH. RV2 est situé sur les cellules 8. Conclusion
principales des tubules distaux des reins. La fixation de l’HAD
sur ce récepteur va induire la phosphorylation des aquaporines L’hyponatrémie est un trouble hydroélectrolytique fréquent
2 et leur transport à la membrane du pôle apical des cellules. Ces et parfois négligé, nécessitant une démarche diagnostique rigou-
aquaporines forment des canaux perméables à l’eau [49]. reuse afin d’en adapter au mieux le traitement. Les causes les
plus fréquentes sont les hyponatrémies liées à la prise de thiazi-
7.3.2. Antagonistes des récepteurs à l’hormones diques, les hyponatrémies en réponse à un stimulus volémique
antidiurétiques (HAD) de l’HAD et les SIADH.
Ce sont des antagonistes spécifiques non peptidiques des Aiguë, le risque majeur est l’œdème cérébral et le traitement
récepteurs de la vasopressine, s’opposant à son action anti- urgent repose sur des apports de solutés hypertoniques avec sur-
diurétique : ce sont donc des diurétiques spécifiques de l’eau, veillance fréquente de la concentration plasmatique en sodium.
appelés aquarétiques [50]. Leur dénomination commune inter- Chronique, elle est souvent peu symptomatique et sa correction
nationale se termine par vaptan (pour vasopressin antagonist). trop rapide expose à des lésions démyélinisantes cérébrales. Une
Quatre molécules sont en cours de développement : le coni- nouvelle classe thérapeutique, antagoniste des récepteurs V2 de
vaptan, antagoniste de RV1a et RV2 dont l’administration est l’HAD, devrait modifier la prise en charge des hyponatrémies à
intraveineuse, le lixivaptan, le satavaptan et le tolvaptan, anta- volémie normale ou augmentée.
gonistes de RV2 dont l’administration est orale (Tableau 3). Ils
inhibent tous le cytochrome P450 3A4. Le conivaptan a obtenu
l’autorisation de mise sur le marché aux États-Unis par la FDA Conflit d’intérêt
en décembre 2005 pour les hyponatrémies à volémie normale et
en février 2007 pour les hyponatrémies avec hypervolémie. Des Aucun.
essais randomisés contre placebo ont montré l’efficacité de ces
molécules sur l’augmentation de la natrémie dans les hyponatré- Références
mies de dilution (SIADH, cirrhose, insuffisance cardiaque) [51].
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