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COURANTS MÉTHODOLOGIQUES
ET ANALYSE DE MANUELS
COURS
COURANTS
MÉTHODOLOGIQUES
ET ANALYSE DE MANUELS
COURS
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par le CNED avec l’autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie (20, rue des Grands Augustins, 75006 Paris).
© CNED 2019
Table des matières
Avant-propos................................................................................................................... 5
Chapitre 1
Chapitre 2
L’approche communicative.................................................................................... 19
L’émergence de l’approche communicative................................................................ 19
Objectif : apprendre à communiquer........................................................................... 21
Les travaux du niveau seuil............................................................................................ 23
Quelques retombées pédagogiques des principes évoqués................................... 26
Chapitre 3
Chapitre 4
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Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
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Avant-propos
Objectifs du cours
Ce cours est orienté d’une part vers l’étude des différents courants méthodologiques
qui ont marqué la didactique des langues jusqu’à nos jours avec une focalisation sur
l’approche communicative et la perspective actionnelle, et d’autre part vers l’étude des
manuels de français langue étrangère (Fle), les deux étant bien entendu liées.
L’étude des courants méthodologiques permettra d’aborder plusieurs aspects de l’ensei-
gnement/apprentissage des langues étrangères : les conceptions qui sous-tendent cet
enseignement depuis des décennies ; les notions apparues progressivement dans la ter-
minologie didactique. Ces aspects touchent tant la langue (au plan linguistique), que la
culture et la didactique de cet objet spécifique.
Ce retour sur les méthodologies passées doit, en outre, permettre de comprendre com-
ment une méthodologie a pu être déterminée ou influencée par des facteurs sociaux et
politiques et par les recherches dans les domaines linguistique et psychologique. Enfin,
le recul historique peut conduire à relativiser les innovations dans telle ou telle approche
et montrer que certaines options méthodologiques délaissées un temps peuvent être
remises au goût du jour plus tard.
Dans le cadre de ce cours, nous travaillerons sur l’observation et l’analyse de manuels
récents pour la plupart. L’un de nos objectifs est de vous permettre d’accéder au fonction-
nement des manuels de Fle, de vous fournir les outils pour les analyser, les comparer, les Courants
évaluer. En effet, il est formateur, les premières années d’enseignement, d’essayer de com- méthodologiques et
prendre la cohérence des manuels qu’on utilise, d’entrer dans leur logique de progression analyse de manuels
afin de mieux saisir les outils de notre quotidien d’enseignant. Toutefois, il ne s’agit pas
de s’y enfermer mais plutôt d’apprendre à les utiliser et les voir pour ce qu’ils sont : des Page 5
aides à l’enseignement et à l’apprentissage. Il est important de comprendre d’abord que
ces derniers ne sont pas simplement des « livres de ressources d’activités ». En effet, un
manuel bien construit propose davantage qu’une succession d’activités juxtaposées ; tout
un travail a été fait par les concepteurs pour donner une cohérence aux unités didactiques
et pour trouver une progression dans les contenus proposés. Ce sont ces dimensions qu’il
est très important de percevoir afin d’être en mesure, ensuite, de soi-même concevoir des
séquences pédagogiques et de construire un cours, avec ou sans manuel.
Modalités d’évaluation
Vous rédigerez un dossier dans lequel vous comparerez deux unités didactiques de deux
manuels différents.
Une proposition d’unités à comparer vous sera fournie sur l’espace de suivi en ligne du
cours (voir modalités d’accès dans votre Guide de travail). Deux sujets seront proposés :
l’un pour la première session, l’autre pour la deuxième. Avec ces sujets seront spécifiées
les unités qui ne doivent pas être étudiées car elles l’auront déjà été les années précé-
dentes, ceci afin d’éviter que les bons dossiers puissent circuler et être « repris » par
d’autres d’une année sur l’autre.
Si vous ne pouvez pas vous procurer les manuels comprenant les unités proposées, ce sera
à vous de choisir ces deux unités parmi la liste de manuels fournie ci-dessous. La princi-
pale contrainte pour faire votre choix résidera dans les unités choisies : elles devront être
approximativement de même taille. Il ne s’agit pas, par exemple, de comparer une unité
(ou leçon) d’une ou deux doubles-pages avec une unité de huit doubles-pages. En outre,
l’idéal est de pouvoir comparer des unités comprenant quelques objectifs d’apprentis-
sage communs.
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Pour réaliser votre étude, vous devrez vous appuyer sur les deux unités choisies mais aussi
sur les outils de présentation des manuels : avant-propos, tableau des contenus, guide
pédagogique.
Vous vous attacherez à montrer notamment les points communs et les divergences dans
la façon de concevoir la progression : d’une part la progression interne à l’unité, d’autre
part la progression sur l’ensemble du manuel précisément par rapport aux contenus tra-
vaillés dans l’unité à analyser. Vous vous demanderez comment sont construites les unités
(cohérence et structuration), comment sont formulés les objectifs. Vous analyserez éga-
lement les activités et tâches permettant d’atteindre ces objectifs et vous demanderez si
elles sont articulées, ou non, entre elles.
Vous ne pourrez pas traiter de tous les aspects développés dans le cours mais il faudra
aborder et approfondir certains points spécifiques tels que l’approche de la grammaire,
du lexique, la place et le traitement des différentes aptitudes (ou activités langagières),
l’approche socioculturelle, l’évaluation, etc.
Attention, le principal écueil dans un tel travail est d’oublier l’analyse des documents
ciblés et de se lancer dans de grandes généralités sur les manuels dont ils sont extraits.
Votre analyse doit s’appuyer sur des références précises aux documents (ex : numéro de
page, d’exercice, etc.). Un deuxième écueil consiste à se contenter d’un niveau descriptif
sans rentrer dans l’analyse, cette dernière passant nécessairement par des références à
des notions théoriques. Il est donc important d’appuyer vos analyses sur vos connais-
sances en didactique des langues et d’utiliser les notions abordées dans le cours. En
outre, vous pourrez très certainement vous appuyer sur des apports d’autres cours du
master.
Courants
méthodologiques et Le travail rendu sera intégralement rédigé et comprendra un sommaire. Vous utiliserez
analyse de manuels des titres et intertitres pour le structurer. Votre dossier devra faire environ 20 000 signes
(espaces non compris) + ou - 20 % (ce qui fait entre 8 et 12 pages), hors annexes. Le
Page 6 dossier devra être imprimé si possible en mode recto-verso et être simplement agrafé, il
est inutile de faire une reliure.
Liste des manuels parmi lesquels choisir les unités à analyser (seule l’année de parution
du niveau A1 est indiquée mais vous pouvez choisir de comparer deux unités de niveau
A1, A2, B1 ou B2) :
Forum, Hachette FLE, 2000
Accord, Didier, 2000
Studio 100, Didier, 2001
Escales, CLE international, 2002
Campus, CLE international, 2002, 2006 (nouvelle édition)
Taxi !, Hachette FLE, 2003
Connexions, Didier, 2004
Rond Point, Éditions Maison des Langues, 2004
Tout va bien, CLE international, 2005
Festival, CLE international, 2005
Métro St Michel, CLE international, 2006
Ici, CLE international, 2007
Latitudes, Didier, 2008
Scénario, Hachette FLE, 2008
Echo, CLE international, 2008
Echo A1, CLE international, 2010
Le nouveau Taxi, Hachette FLE, 2009
A propos, PUG, 2009
Version originale, 2009
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Nouveau Rond Point, Éditions Maison des Langues, 2011
Ligne directe, Didier, 2011
Amical, CLE international, 2011
Pour adolescents :
Sac à dos, Éditions Maison des Langues, 2004
Belleville, CLE international, 2004
Et toi, Didier, 2007
Le kiosque, Hachette FLE, 2005
Pourquoi pas ?, Éditions Maison des Langues, 2008
Amis et compagnie, CLE international, 2008
Entrée en matière, 2005
Le Mag’, Hachette FLE, 2006
Adosphère, Hachette FLE, 2011
es méthodes Alors ? et Alter Ego ne peuvent être étudiées dans le cadre du dossier
OLcar elles sont largement explorées dans le cours. Si vous décidiez de travailler sur
un autre sujet que celui qui vous sera proposé sur le forum du cours et sur d’autres
manuels que ceux qui figurent dans la liste, il faudra en faire la demande sur le
forum de suivi du cours et, dans tous les cas, fournir dans votre dossier les photoco-
pies des unités analysées ainsi que celles des avant-propos et tableaux de contenus
des deux manuels.
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Un tableau synoptique1 pourra vou aider à visualiser quelques grandes lignes de l’ana-
lyse méthodologique des courants d’après-guerre.
Le chapitre 5 : utiliser un manuel de Fle
Il présente les outils qui permettent de comprendre et d’utiliser les manuels : avant-pro-
pos, tableau de contenu, guide pédagogique, mais aussi ressources complémentaires en
ligne.
Le chapitre 6 : construction d’un manuel : progression et unité didactique
Il se concentre sur les notions d’unité didactique et de progression, nécessaires à la
compréhension du fonctionnement des manuels, et plus globalement, de la façon de
concevoir un cours de langue.
Le chapitre 7 : les activités langagières (ou compétences/aptitudes) : l’exemple de la
compréhension orale.
Il s’intéresse aux activités langagières décrites par le CECR et prend l’exemple du traite-
ment de l’une d’elles (la compréhension orale) dans des manuels.
Le chapitre 8 : les compétences culturelles et interculturelles
Il se focalise sur les compétences culturelles et interculturelles telle qu’elles sont envisa-
gées dans certains manuels.
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La bibliographie finale dépasse largement le contenu du cours, mais elle pourra vous être
utile par ailleurs, dans vos études ou dans l’exercice de votre profession. Les ouvrages les
plus importants pour le cours sont listés ci-dessous.
Recommandations bibliographiques
ffBesse, H. (1985), Méthodes et pratiques des manuels de langue, Paris, Didier.
ffBertocchini, P., Costanzo E. (2008), Manuel de formation pratique pour les professeurs
de FLE, CLE International.
ffCourtillon, J. (2003), Élaborer un cours de FLE, Paris, Hachette.
ffCuq, J.-P. (dir) (2003), Dictionnaire de didactique du français langue étrangère et se-
conde, Asdifle, CLE International.
ffCuq, J.-P. et Gruca, I. (2002), Cours de didactique du français langue étrangère et se-
conde, Grenoble, PUG.
ffGermain. C. (1993), Évolution de l’enseignement des langues: 5000 ans d’histoire, Paris,
CLE International.
ffPuren, C. Bertocchini, P., Costanzo, E. (1998), Se former en didactique des langues, Paris,
Ellipses.
ffRosen, E. (coord.) (2009), « La perspective actionnelle et l’approche par les tâches en
classe de langue », Le français dans le monde, Recherches et applications, n°45, janv.
2009.
ffTagliante, C. (2006) (rééd. de 1994), La classe de langue, Paris, CLE International.
Courants
méthodologiques et
analyse de manuels
Page 9
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Chapitre 1
Quelques repères avant de
commencer
Plan
Repères terminologiques : méthodologie, méthode, manuel
Principales méthodologies ayant précédé l’approche communi-
cative
Découvrir
8 1121 TG PA 00
Sens 2
Dans cette acception, le mot « méthode » est défini par C. Puren comme un
« ensemble cohérent de procédés, techniques et méthodes qui s’est révélé capable, sur une période histo-
rique et chez des concepteurs différents, de générer des cours relativement originaux par rapport aux cours
antérieurs et [relativement aussi] équivalents entre eux quant aux pratiques d’enseignement-apprentissage
induites ». (Puren, 1988 : 17).
Tous ces principes sont sous-tendus par une certaine vision de l’apprentissage et de l’en-
seignement d’une langue étrangère. Dans vos lectures vous pourrez rencontrer l’expres-
sion « méthodologie audiovisuelle » ou « méthode audiovisuelle » mais pour notre part,
nous choisissons comme C. Puren d’utiliser le terme « méthodologie ».
Sens 3
Ce sens, qui relève de la pédagogie générale, peut s’appliquer au domaine de l’enseigne-
ment des langues comme à toute autre matière. Ainsi par exemple, la méthode directe se
traduit en sciences naturelles par la leçon de choses et en langue étrangère par le contact
direct – sans traduction – avec la langue. La méthode active renvoie à tout ce qui permet
de susciter et maintenir l’activité de l’apprenant jugée nécessaire à l’apprentissage. Dans
le domaine des langues, une méthode renvoie aux procédés ou techniques utilisés par un
enseignant pour mettre en œuvre un principe méthodologique unique ; on peut parler
de méthode pédagogique.
La méthode active et la méthode directe ont donné nom à deux courants méthodologiques
successifs dans l’enseignement des langues vivantes en France (sens 2) ; en revanche
les méthodes pédagogiques de type « analytique », « intuitive », « interrogative »,
Chapitre 1 « imitative », auxquelles C. Puren a souvent recours dans son analyse des méthodologies,
Quelques repères n’ont pas étés retenues par la didactique des langues pour désigner des courants
avant de commencer méthodologiques.
Page 12 Dans le cadre de ce cours, nous utiliserons le terme « méthodologie » pour désigner
ce qui a été défini dans le sens 2 et le terme de « méthode » pour renvoyer à ce qui a
été présenté dans le sens 3 mais aussi parfois dans le sens 1. En effet, nous parlerons
alternativement de méthode ou de manuel pour renvoyer à un matériel didactique utilisé
pour l’enseignement d’une langue étrangère.
V Activité 1 (p. 17)
8 1121 TG PA 00
Rappelons maintenant quelques points forts de certaines de ces méthodologies.
La méthodologie traditionnelle
Même si la méthodologie traditionnelle est censée avoir quasiment disparu des pra-
tiques d’enseignement-apprentissage des langues, en Europe du moins, on sait que
celle-ci perdure dans de nombreux pays, en Afrique par exemple, notamment lorsque
les effectifs sont nombreux et les enseignants peu formés. Et sans aller si loin, on sait
également qu’elle est mise en œuvre dans des cours de langues vivantes, autres que le
français, dispensés dans certains départements LANSAD (Langues pour les spécialistes
d’autres disciplines) à l’université. Peut-être avez-vous eu l’occasion, dans le cadre de
votre apprentissage d’une langue nouvelle en licence, d’expérimenter la méthodologie
traditionnelle où l’apprentissage de la forme reste déconnectée du sens.
La fonction formatrice de l’apprentissage des langues, dominante dans le cadre de la
méthodologie traditionnelle, a été complètement rejetée et remise en cause par les
courants méthodologiques qui ont suivi. Au nom des besoins des apprenants, d’une
utilisation effective des langues en contexte, c’est une vision fonctionnelle ou instru-
mentalisée de l’apprentissage des langues qui a pris le dessus par la suite. Cependant,
les travaux récents du Conseil de l’Europe, autour des valeurs du plurilinguisme et
du dialogue interculturel notamment, invitent à une prise en compte de la fonction
formative de l’apprentissage des langues. Ainsi, dans un entretien réalisé et diffusé
par le site « Francparler », D. Coste (2010) s’interroge : « De quelle société voulons-
nous – étant entendu qu’il s’agit de sociétés ayant des dynamiques diverses dans des
contextes divers ? Les langues peuvent-elles faire partie d’un projet éducatif ambitieux
tenant compte de ces valeurs ? Ou sont-ce de simples auxiliaires pour les individus, les Chapitre 1
entreprises, le commerce international ? C’est l’enjeu fondamental ». À ces différentes Quelques repères
avant de commencer
questions, il répond : « Il faut dire ce que l’on attend des langues, sortir d’une vision ins-
trumentalisée de l’apprentissage des langues, pour se réinterroger sur ce qui a été très Page 13
longtemps leur fonction formatrice. »
Il est donc intéressant de souligner qu’il y a aujourd’hui un retour à une réflexion sur
les bénéfices de l’apprentissage des langues pour la formation générale des individus,
même si ces atouts ne portent pas sur les mêmes aspects que ceux qui étaient mis en
avant dans le cadre de la méthodologie traditionnelle (former l’esprit des apprenants en
développant leurs capacités à raisonner et analyser).
La méthodologie directe
La méthodologie directe n’a pas duré au-delà de la première guerre mondiale, période
à laquelle elle fut remplacée par une méthodologie éclectique, appelée méthodologie
active et qui proposait un compromis entre la méthode grammaire-traduction (accès
au sens par la traduction ; étude raisonnée de la grammaire) et la méthode directe
(approche de la langue étrangère sans passer par la traduction). L’un des manuels par-
ticulièrement représentatifs de cette méthodologie mixte a été le Cours de langue et
civilisation française de G. Mauger paru en 1953.
Cette méthodologie fait appel à l’activité des apprenants ; en effet ces derniers sont
sans cesse sollicités grâce au jeu de questions-réponses conduit par l’enseignant. Et cette
démarche qui se fonde sur les interactions orales entre les apprenants et l’enseignant
ainsi que sur la prise en compte de ce que savent déjà les apprenants pour progresser
ne sera plus remise en cause par la suite dans l’enseignement-apprentissage des langues
étrangères.
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La méthodologie structuro-globale audiovisuelle (SGAV)
Communiquer oralement
Dans l’histoire de l’enseignement/apprentissage des langues en Europe, l’objectif pra-
tique de communication devient prioritaire avec la méthodologie SGAV (sauf en Grande-
Bretagne où est appliquée la méthodologie audio-orale comme aux États-Unis).
Contextualisation
Dans la méthodologie audiovisuelle, grâce aux dialogues enregistrés et aux images
exploités simultanément, la langue est présentée et approchée globalement, en
contexte (perception globale du langage). Les techniques audiovisuelles (magnétophone
et projecteur de diapositives) permettent de rendre compte de la langue conçue comme
un ensemble acousticovisuel. Il s’agit d’étudier la parole en situation et tous les éléments
qui l’accompagnent doivent être pris en compte : le cadre spatio-temporel, la gestuelle,
les mimiques des personnages véhiculés par les images d’une part, et l’intonation et le
rythme (qui peuvent renseigner sur l’état psychologique des personnages) transmis par
les dialogues d’autre part. Ainsi, plonger l’apprenant dans une situation de communica-
tion doit favoriser l’accès au sens. Vous pourrez prendre connaissance d’un extrait de la
méthode De vive voix grâce au document 32.
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La fonction de ces exercices était de fixer et d’automatiser les structures indépendam-
ment de tout travail sur le sens. Ils étaient exécutés à rythme rapide et intensivement,
pendant la classe et/ou dans des laboratoires de langue.
Dans la méthodologie SGAV, on retrouve la même perspective générale d’un ensei-
gnement grammatical structural car c’est grâce aux structures que l’on considère que
la grammaire peut être assimilée. Mais, alors que les méthodes audio-orales se conten-
taient de faire percevoir les analogies entre les phrases d’une même série, les méthodes
audiovisuelles cherchaient à privilégier la relation énoncé-contexte.
Le professeur audiovisuel s’efforçait de trouver des situations ou des contextes suscep-
tibles d’entraîner chez l’élève une structure, une forme ou une notion qui étaient l’objet
de son enseignement, soit en s’appuyant sur les images, soit en créant ou évoquant une
situation soit en faisant appel plus directement à son expérience. Avec la méthode De
vive voix (1972), il était aidé dans sa tâche par un guide pédagogique très détaillé de 488
pages. Les différentes techniques auxquelles il pouvait avoir recourt sont les suivantes :
– Il fait parler sur image.
Exemple : « Trop de... » Leçon 11 :
- Pourquoi est-ce que la couleur est trop foncée ?
=> Il y a trop de peinture verte.
- Qu’est-ce qu’il faut faire alors ?
=> Mettre de la peinture blanche
- Beaucoup ? Un peu pas trop
Chapitre 1
– Il évoque ou simule des situations pour faire réemployer une structure, une notion. Quelques repères
avant de commencer
Exemple : « Trop de... », « pas assez » Leçon 11
- On vous donne un très gros morceau de pain Page 15
=> Vous me donnez trop de pain
- Vous fumez beaucoup vous avez mal à la tête
=> Je fume trop de cigarettes.
- Vous êtes cinq à table. Il y a quatre verres seulement.
=> Nous n’avons pas assez de verres.
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Dans un entraînement grammatical de ce type :
– l’élève est sans cesse sollicité à participer oralement ;
– les structures et notions dont l’appropriation est visée sont liées si possible à une
situation qui leur donne du sens ;
– il n’y a pas une seule réponse possible et l’erreur peut donc y apparaître, elle n’est
pas considérée comme un obstacle à l’apprentissage.
Ces exercices dits de « réemploi » se différencient des exercices écrits des méthodes
traditionnelles mais aussi des pattern drills des méthodes audio-orales. Ils sont, écrit
Gérard Vigner en 1982,
« à l’origine d’une très longue évolution, poursuivie encore aujourd’hui, qui consiste à inscrire la produc-
tion linguistique dans une situation de communication susceptible à la fois d’en éclairer le sens et d’en
motiver l’usage ».
En revanche l’entraînement structural au laboratoire de langues à partir de séries
d’exercices structuraux s’apparente aux séries audio-orales (modèle de fonctionnement
+ phrase stimulus enregistrée + réponse de l’élève + écoute par l’élève de la réponse).
Rappelons que c’était alors le seul usage qui était fait du laboratoire de langues.
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S’entraîner
Activité 1
Lisez l’extrait du Cours de didactique du français langue étrangère et seconde de J.-P.
Cuq et I. Gruca (2005) présentant les différentes méthodologies qui ont précédé l’ap-
proche communicative4.
À partir de ce document et des connaissances dont vous disposez déjà à propos des dif-
férentes méthodologies d’enseignement du FLE, remplissez le tableau ci-dessous.
Tableau : principales caractéristiques des courants méthodologiques précédant l’ap-
proche communicative5
Méthodologie
traditionnelle Méthodologie Méthodologie Méthodologie
ou grammaire- directe audio-orale SGAV
traduction
Période
Objectif général
Chapitre 1
Théories sous-jacentes
Quelques repères
en linguistique ou avant de commencer
conception de la langue
Théories sous-jacentes Page 17
en psychologie
ou conception de
l’apprentissage
Statut de l’enseignant
Place de l’oral
et de l’écrit
Place et approche
de la grammaire
Conception
de la culture
Progression
Activités pédagogiques
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Retenir
Bibliographie
Entretien de Daniel Coste intitulé « Ce que l’on attend des langues » (2010) sur le site
francparler : http://www.francparler-oif.org/
Vigner, G. (1982), « L’exercice en français langue étrangère », Études de linguistique
appliquée n°48, p. 62-79.
Laurens, V. (2010), « Apprendre à organiser un cours de FLE selon une trame métho-
dique repère », Communication orale dans le cadre du colloque CEDIL, Université
Stendhal-Grenoble 3, 29 juin-2 juillet 2010.
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Chapitre 2
L’approche communicative
Plan
L’émergence de l’approche communicative
Objectif : apprendre à communiquer
Les travaux du niveau-seuil
Quelques retombées pédagogiques des principes évoqués
Ce sont les travaux de ce groupe d’experts, qui vont déboucher sur la publication
des niveaux seuils dans les années 1970 et qui vont déterminer bon nombre de
principes de l’approche communicative, sur lesquels s’appuieront notamment les
premières méthodes se réclamant de cette approche : Cartes sur table (1981) et
Archipel (1982).
Découvrir
6 La fonction émotive (ou expressive) du langage correspond à l’une des six fonctions du langage du schéma
de la communication de Jakobson (1963). Elle renvoie à l’expression des sentiments du locuteur.
8 1121 TG PA 00
Même dans De vive voix, la dimension psychosociologique des dialogues est insuffisante
pour « « authentifier » les échanges verbaux » (Moirand, 1974, 12). S. Moirand prend
l’exemple des conflits qui sont à la fois rares et peu réalistes dans le sens où les deux
personnages principaux acceptent toujours avec résignation les difficultés qu’ils ren-
contrent. Dans ces dialogues, la fonction référentielle du langage est privilégiée. Par
ailleurs, les dialogues sont surchargés en faits linguistiques d’un certain type en fonction
des objectifs de la leçon. Ainsi, dans De vive voix on a affaire à une langue trop standard,
aseptisée, manquant de vraisemblance communicative et/ou de naturel.
En outre, à partir d’un entretien réalisé auprès de jeunes étudiants étrangers en France
ayant travaillé avec De vive voix, S. Moirand (1974) montre bien l’inadéquation des sujets
traités (la maison, la gare, la poste,..) avec les centres d’intérêt des étudiants de l’époque
(problèmes sociaux, politiques, etc.). Par ailleurs, à travers les thèmes traités, la méthode
ne répond pas aux besoins des apprenants pour la communication quotidienne et la vie
sociale en France (par ex. : la police, les papiers administratifs). Enfin, les relations entre
les personnages illustrées dans cette méthode (notamment le couple Pierre-Mireille)
paraissent dépassées et donc non motivantes pour des étudiants de 20 ans. Globalement,
on peut donc dire que les thèmes sont trop limités et en décalage avec les besoins et les
intérêts des apprenants, tout au moins pour ceux qui vivent en France et qui sont impli-
qués dans la réalité sociale et culturelle du pays.
La didactique des langues va donc prendre appui sur des champs disciplinaires variés tels que :
• la sociolinguistique et l’anthropologie du langage grâce à des auteurs comme W.
Labov et D. Hymes ;
• la philosophie du langage (J. L. Austin, J. R. Searle, P. Grice) ;
• différents domaines de la linguistique en émergence à cette période : la pragma-
tique linguistique (une branche de la linguistique qui s’intéresse à l’usage du lan-
gage en lien avec un contexte), la linguistique de l’énonciation, la linguistique tex-
tuelle, l’analyse de discours. Vous pouvez découvrir ces différents domaines dans
d’autres cours de ce master.
Ainsi, comme le souligne M.-L. Chalaron dans son cours (p. 55), « la didactique dans le
sillage de la linguistique élargit son champ d’études :
• de l’oral à l’écrit ;
• de l’étude de la langue à l’étude de la parole ;
• de la phrase au texte ;
• d’une grammaire formelle à une grammaire sémantique ;
• de l’étude de la norme à celle des variations. »
8 1121 TG PA 00
Comme nous le verrons dans la suite de ce chapitre, grâce à ces différents emprunts,
la conception de la langue évolue ; elle est envisagée prioritairement comme outil de
communication.
Conception de l’apprentissage
La théorie de la gestalt et le behaviorisme, aux fondements des méthodologies audio-
visuelles sont remplacés par la psychologie cognitiviste et la psychologie constructiviste.
Cette dernière considère que l’apprenant est au centre du processus d’apprentissage et
qu’il est partie prenante de celui-ci. Dans la conception cognitiviste, la pensée joue un
rôle fondamental pour la découverte des règles qui permettent de produire des énoncés
nouveaux. Les activités cognitives de l’apprenant consistent à former puis à tester des
hypothèses par des productions verbales. Ces productions amènent à faire des erreurs
qui sont considérées comme faisant partie du processus d’apprentissage. Cette concep-
tion va aboutir à une évolution du statut de l’erreur auparavant considérée comme à
éviter car envisagée comme une interférence avec la langue maternelle, dans une vision
où l’élève passait de la langue maternelle à la langue étrangère. Dans la perspective de
la psychologie cognitive, l’erreur donne des indications sur le système intermédiaire ou
l’« interlangue » de l’apprenant. Celle-ci correspond à :
« la nature et la structure spécifiques du système d’une langue cible intériorisé par un apprenant à un stade
donné. Ce système est caractérisé par des traits de la langue cible et des traits de la langue source (langue
maternelle ou autres langues acquises postérieurement ou simultanément). » (Cuq, 2003, 139-140).
L’acquisition d’une langue se fait donc par étapes et chaque fois que de nouvelles données
interviennent, elles sont réintégrées dans un système provisoire que se construit l’apprenant.
Chapitre 2
Outre la prise en compte de l’erreur, envisagée comme révélatrice du processus d’appren-
L’approche
tissage (l’apprenant vérifie ses hypothèses sur le fonctionnement de la langue apprise), communicative
le cognitivisme va offrir de nouvelles perspectives en didactique des langues :
• il n’y a pas une seule manière d’apprendre, les apprenants développent et mettent Page 21
en œuvre des stratégies d’apprentissage diverses ;
• l’acquisition ne se fait pas grâce à la simple répétition de mécanismes langagiers ;
l’apprenant a une capacité de découverte et de structuration ;
• une progression imposée et préétablie (dans un manuel par exemple) ne correspond
pas nécessairement à l’ordre naturel dans lequel le sujet va intégrer les données. On
fait la différence entre progression d’enseignement et progression d’apprentissage.
La situation de communication
C’est principalement grâce aux travaux de D. Hymes, sociolinguiste, que se développent
ces deux notions. Ce chercheur a initié un courant de recherche appelé ethnographie de
la communication. Le langage y est envisagé comme une pratique sociale et culturelle,
ce qui signifie que la connaissance du système linguistique ne suffit pas pour participer
efficacement à des échanges. En effet, la prise en compte de la situation de communica-
8 1121 TG PA 00
tion, et donc de ses différents paramètres, est nécessaire pour y parvenir. Hymes (1984) a
créé un modèle d’analyse des situations de communication en définissant les différentes
composantes de celle-ci ; il s’agit du modèle SPEAKING :
• Setting – le cadre spatio-temporel. Par exemple en classe, à la poste, dans le bureau
d’un supérieur hiérarchique, au café, etc.
• Participant – les participants : qui parle à qui ? : rôle, statut, relations.
• End – finalités : buts de l’échange. Par exemple : acheter quelque chose, obtenir
des renseignements, discuter simplement entre amis, etc.
• Act – le(s) thème(s) de l’échange.
• Key – tonalité : harmonieuse, conflictuelle, humoristique, etc. Ton léger, grave,
sérieux, comique.
• Instrument – le canal de communication : écrit/oral, gestuel, face à face/distance,
direct/différé.
• Norm – normes : peuvent être de différentes natures : règles de production d’un dis-
cours (règles morphologiques et combinatoires, internes aux systèmes linguistiques
et qui permettent aux locuteurs de produire des énoncés grammaticaux et intelli-
gibles), normes discursives (contraintes thématiques, contraintes de connexion et
d’enchaînement), normes interactionnelles (gestion des tours de parole), normes
sociales (liées aux règles de politesse par exemple).
• Genre – genre : ce paramètre renvoie à la variété de genres interlocutifs à l’oral par
exemple : échanges transactionnels (au guichet, chez un commerçant), échange en
classe, consultation chez le médecin, interview, entretien, conversation informelle,
Chapitre 2 cours en amphi, journal radiophonique ou télévisé, etc. Les discours écrits et les dis-
L’approche cours oraux monologaux ont également fait l’objet de nombreuses typologies. On
communicative peut retenir celle qui tente de distinguer les discours en fonction de leur visée com-
municative : les discours explicatifs, descriptifs, narratifs, injonctifs et argumentatifs.
Page 22
C’est avec tous ces éléments que doit se familiariser un apprenant de langue étrangère
pour apprendre à communiquer. Exploité en didactique des langues, ce modèle permet
de mettre en relation des réalisations linguistiques avec des aspects de la situation de
communication. En d’autres termes, on peut rattacher la formulation de tel énoncé avec
un contexte spécifique :
« on apprend à communiquer en apprenant à savoir adapter les énoncés linguistiques en fonction de la
situation de communication (statut social des interlocuteurs, rang, âge, lieu de l’échange, canal) et en fonc-
tion de l’intention de communication (demander une information, donner un ordre, convaincre, etc.) ».
(Cuq, Gruca, 2005, 266).
La compétence de communication
À partir des travaux de Hymes, la notion de compétence de communication, définie
comme la capacité à utiliser efficacement la langue en situation, a été rapidement
reprise et précisée en didactique des langues. Plusieurs propositions ont été faites pour
définir et déterminer les contenus de la compétence de communication. Les plus célèbres
sont celles de S. Moirand (1982) et de Canale et Swain (1980).
En règle générale on retient 4 composantes essentielles de cette compétence (Cuq,
Gruca, 2005, 265) :
– une composante linguistique, c’est-à-dire la connaissance des règles et des structures
grammaticales, phonologiques, du vocabulaire, etc.
– une composante sociolinguistique qui renvoie à la connaissance des règles sociocul-
turelles d’emploi de la langue et qui impose de savoir utiliser les formes linguistiques
appropriées en fonction de la situation de communication. C’est cette composante qui
permet de prendre en compte la variation langagière.
– une composante discursive, c’est-à-dire la connaissance des différents types de discours
8 1121 TG PA 00
(oraux ou écrits) et de leur organisation en fonction des paramètres de la situation
de communication dans laquelle ils s’insèrent. Par exemple, connaître l’organisation
spécifique de certains textes comme les articles de journaux (rubrique, titre, chapeau,
intertitre, etc.), savoir que certains types de texte sont spécifiques à certaines cultures,
comme le commentaire composé en France.
– une composante stratégique, constituée par la capacité d’utiliser des stratégies ver-
bales et non verbales pour compenser des défaillances ou des ratés de la communica-
tion. Ex : simplification, contournement, etc.
Vous pourrez comparer ces définitions et ce découpage avec ceux que proposent les
auteurs du Cadre européen commun de référence (2001) pour définir la compétence à
communiquer langagièrement (cf. chapitre 3 de ce cours).
8 1121 TG PA 00
Ainsi, le croisement des indications relatives au public et aux domaines permet de déga-
ger les besoins spécifiques de tel ou tel public et de déterminer des priorités dans les
objectifs. On parlera d’objectifs fonctionnels comme l’explique E. Bérard (1991, p. 32) :
« La prise en compte de l’apprenant dans une démarche qui consiste à identifier des besoins => définir des
objectifs => définir des contenus => choisir des supports pédagogiques, correspond à ce que l’on identifie
comme enseignement fonctionnel du français ».
La réflexion sur les besoins langagiers des apprenants a été menée dans un premier
temps par rapport à des publics de professionnels et donc par rapport à la langue de
spécialité. Puis les didacticiens ont pris conscience du fait que même pour des publics non
professionnels il pouvait être utile de fixer des objectifs langagiers précis pour l’appren-
tissage.
Cette centration sur l’apprenant et ses besoins entraîne une profonde modification de
ce que signifie apprendre une langue ; il ne s’agit plus, en effet, de faire atteindre à
l’apprenant une compétence se rapprochant de celle d’un natif. Les experts du « projet
langues » du Conseil de L’Europe reconnaissent la légitimité de connaissances restreintes
et ciblées en fonction de besoins spécifiques. Cette idée est d’autant plus importante
qu’elle sera très largement reprise et approfondie dans le Cadre européen commun de
référence notamment à travers la notion de « compétence partielle ».
Faites l’activité 2 pour vous interroger sur les besoins des apprenants en contexte d’ap-
prentissage captif.
Chapitre 2
V Activité 2 (p. 31)
L’approche
communicative
La notion d’acte de parole
Page 24
Cette notion qui sert de fondement à l’ouvrage qu’est le Niveau Seuil provient de la
notion d’« acte de langage » créée dans le domaine de la philosophie du langage par J.
Austin (1962) puis par J. Searle (1972). Ces chercheurs américains mettent en avant le fait
que le langage n’est pas simplement un outil servant à informer ou décrire le monde,
mais avant tout un outil qui sert à agir. Ainsi, en situation d’interaction, tout énoncé
peut être envisagé comme un acte de langage, c’est-à-dire un moyen mis en œuvre par
un locuteur pour agir sur son interlocuteur et donc sur son environnement. Les catégo-
ries d’actes sont nombreuses ; il peut s’agir d’actes d’ordre, de promesse, de requête, de
demande d’information, d’excuse, etc. Transposé en didactique des langues, le concept
d’acte de langage est devenu celui d’acte de parole directement lié à celui de situation
de communication. En effet, un même acte de parole peut avoir différentes fonctions
(on dira aussi valeurs) suivant les situations. Par ailleurs, les actes de parole sont formulés
de façon plus ou moins directe et il faut souvent connaître la situation de communication
pour pouvoir comprendre la véritable valeur d’un acte de parole.
À l’inverse, un même acte, c’est-à-dire une même fonction langagière, peut être réalisé
de différentes façons (différents énoncés) en fonction de la situation de communication.
Ainsi, le Niveau Seuil propose un inventaire des actes de parole (ou « fonctions langa-
gières ») et, pour chacun d’eux, une série d’énoncés possibles pour le réaliser en fonction
des situations.
8 1121 TG PA 00
• Exemple : Conseiller
Je vous conseille de lui en parler.
Parlez-lui en !
Si je peux me permettre de vous donner un conseil
Si vous voulez un conseil
Je n’ai pas de conseil à vous donner mais vous devriez lui en parler.
Si j’étais à votre place, je lui en parlerais.
Moi, je lui en parlerais.
Dans le Niveau Seuil, certains actes considérés comme des actes rituels sont regroupés
sous l’étiquette « d’actes sociaux » : saluer, prendre congé, présenter quelqu’un, répondre
à une demande, souhaiter, etc. Enfin, sont regroupés sous l’étiquette « opérations discur-
sives » des actes qui renvoient au discours comme : citer, raconter, résumer, etc.
Ainsi, apprendre à communiquer dans une langue étrangère, c’est notamment
apprendre à produire différents actes en respectant les normes de communication de la
langue étrangère. Cette nouvelle conception du langage a joué un rôle essentiel dans la
définition des objectifs d’apprentissage et dans le découpage de la matière à enseigner
d’abord dans l’élaboration du Niveau Seuil, puis dans les manuels d’apprentissage qui
s’en inspireront. Si vous consultez différentes tables de contenus de manuels post Niveau
Seuil, vous pourrez vérifier que les objectifs visés dans chaque unité sont, dans la majo-
rité des cas, avant tout communicatifs, les objectifs linguistiques étant subordonnés aux
premiers.
Chapitre 2
L’approche
Approche notionnelle et approche sémantique de la grammaire communicative
Dans l’introduction d’un numéro du Français dans le monde consacré à la grammaire,
Moirand, Porquier, Vivès (1989, 5-6) affirment que : Page 25
« la grammaire, entrant à part entière dans les capacités communicatives d’un locuteur (en compréhension
comme en production), associe nécessairement des formes à des valeurs sémantiques et des intentions
pragmatiques. Les dissocier entrave l’acquisition, voire l’apprentissage. »
Ces auteurs soulignent ici les liens nécessaires entre la forme et le sens que l’on va trou-
ver notamment à travers une approche notionnelle de la grammaire. Ainsi, la quatrième
section du Niveau Seuil intitulée « Grammaire » est composée d’une liste de notions
ou catégories sémantico-grammaticales telles que quantité, espace, durée, fréquence,
détermination, personne, associées aux moyens linguistiques qui les expriment. Les
catégories grammaticales sont donc classées par rapport aux notions qu’elles servent à
exprimer.
Dans l’avant-propos du livre du professeur de la méthode Archipel, J. Courtillon et S.
Raillard expliquent qu’en adoptant une approche notionnelle,
« on s’interroge prioritairement sur la ou les notions qu’une forme peut exprimer. Par exemple, l’article
défini français peut exprimer deux notions différentes : la notion d’objet unique, particulier (ou spécifique)
dans passe-moi le crayon, et la notion de classe d’objets, d’ensemble ou de genre d’objets (notion géné-
rique) dans l’homme est mortel, j’aime le chocolat. De même, le présent français peut véhiculer la notion
d’action particulière ou spécifique : il dort, il est en train de dormir en ce moment, ou la notion d’action
générique ou répétitive : L’eau bout à 100 degrés. La terre tourne autour du soleil. Elle fume. Il boit. »
(Courtillon, Raillard, 1982, 20-21).
Cependant, le terme de « notions » n’a pas vraiment perduré, c’est la notion d’acte de
parole et une approche fonctionnelle de la langue qui se sont imposées et qui ont pré-
sidé à l’organisation des contenus d’apprentissage dans les manuels. Ainsi, des formes
grammaticales sont regroupées en fonction de leur rôle et de leur utilité dans la commu-
nication, le plus souvent autour d’actes de parole :
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« Par exemple, on pourra rapprocher certaines formes du présent, du futur et de l’impératif pour l’enseigne-
ment de la direction (cf. unité 3 apprendre à indiquer le chemin) » (Courtillon, Raillard, 1982, 20).
On utilise souvent de façon plus ou moins équivalente les expressions « objectif commu-
nicatif » et « objectif fonctionnel ».
Qu’on soit sur une approche notionnelle et/ou fonctionnelle de la grammaire, la pers-
pective d’enseignement-apprentissage de la grammaire est sémantique c’est-à-dire que
l’étude des formes linguistiques doit être reliée à du sens. Deux ouvrages importants
sont représentatifs de cette approche : La grammaire du sens et de l’expression de P.
Charaudeau et Grammaire pour l’enseignement/Apprentissage du FLE de G. de Salins.
8 Les documents semi-authentiques sont des documents fabriqués par les concepteurs de méthode ou par
les enseignants mais qui se rapprochent cependant le plus possible de documents authentiques.
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Les activités de production orale
Dans l’approche communicative, la communication ou l’interaction langagière sont à la
fois une finalité (être capable d’interagir efficacement et de façon adaptée en fonction
des situations) mais également un moyen pour développer cette compétence, d’où la
nécessité de favoriser au maximum les interactions langagières dans la classe. D’une
manière générale, les activités de production sont conçues pour amener l’élève de la
production semi-contrainte à une production de plus en plus libre, c’est-à-dire de la
réalisation de jeux de rôles à partir de canevas, à la participation à des jeux ou à des
simulations et à l’accomplissement de tâches complexes, telles que réaliser un sondage,
produire une saynète ou faire une compte-rendu d’article.
Le dernier exemple concerne la production écrite mais il faut retenir que des tâches plus
ou moins complexes à accomplir en groupe doivent être proposées aux apprenants afin
de les amener à s’engager personnellement en participant à des échanges porteurs de
réels enjeux communicatifs.
À propos des activités de production orale, P. Bertocchini et E. Costanzo (2008) proposent
une typologie dont on peut s’inspirer pour présenter les activités de productions orales
présentes dans les manuels de FLE depuis les années 80 : les activités de reproduction
orientées vers le réemploi de formes grammaticales (cf. exercices de réemploi dans
méthodologie SGAV) ou d’actes de parole, les activités de simulation et les activités de
production réelle ou authentique ou libre.
8 1121 TG PA 00
Une distinction est parfois faite entre jeu de rôle et simulation considérant que dans une
simulation, l’apprenant joue son propre rôle dans un scénario écrit à l’avance, alors que
dans un jeu de rôle il joue un autre rôle que le sien (Cuq, 2003, 142). Cependant, cette
distinction n’est pas toujours reprise dans les manuels et ne convient pas à la définition
de ce qu’est une simulation globale (cf. point suivant).
Exemple d’un canevas de jeu de rôles très guidé dans Archipel (Livre du professeur,
unité 5, p. 42)
« Dans une épicerie une personne demande du vin.
– L’épicier demande quelle sorte de vin.
– Le client demande un bon vin.
– L’épicier veut savoir quel cru (Bourgogne, Bordeaux, Beaujolais ou crus locaux).
– Le client ne sait pas.
– L’épicier demande ce qu’il mange avec.
– Le client répond.
– L’épicier propose un vin.
– Le client demande le prix.
– L’épicier répond.
– Le client trouve le vin trop cher.
– L’épicier dit que c’est une très bonne année.
- Le client demande autre chose.
Chapitre 2 – L’épicier propose un vin de qualité inférieure.
L’approche
communicative
– Le client accepte ou refuse. »
Page 28 Exemple d’un canevas de jeu de rôles très guidé dans Libre échange 2 (unité 5) :
« Deux jeunes motocyclistes, sans casque, sont arrêtés par un agent de ville :
– l’agent de ville donne un coup de sifflet ;
– la moto s’arrête ;
– l’agent salue les jeunes sur la moto et il leur fait remarquer qu’ils ne portent pas
de casque ;
– les jeunes expliquent que les casques sont dans le porte-bagages ;
– l’agent dit que le port du casque est obligatoire
– les jeunes justifient leur comportement comme ils peuvent ;
– l’agent donne ou ne donne pas de contravention. »
Exemple d’une simulation peu guidée dans Café Crème 1(unité 12, p. 114)
« Vous arrivez en retard (au travail, à votre cours de français, à un rendez-vous, etc.).
A deux, préparez des excuses et expliquez la cause de votre retard. Jouez ensuite
la scène. »
Exemple d’un jeu de rôle peu guidé dans Alter ego 1 (Dossier 6, leçon 3, p. 107)
« Jouez la scène par petits groupes. Vous travaillez à l’office du tourisme de votre
ville. Des touristes très différents viennent vous demander des idées de visite ou de
promenade. »
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Les activités de production libre
Au cours des activités de production libre les apprenants peuvent être amenés à parler
de ce qu’ils connaissent, de leurs expériences, à donner leur point de vue sur des ques-
tions de société en participant à un débat par exemple, à raconter un film, etc.
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Faites l’activité 3 pour approfondir vos connaissances concernant les simulations globales.
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« L’expérience montre que quand la priorité accordée au sens devient un dogme, elle est source de fossilisa-
tion des erreurs les plus courantes, d’où, depuis une dizaine d’années, un attrait nouveau pour la forme. »
(Cuq, Gruca, 2005, 384-385)
S’entraîner
Activité 2
L’analyse de besoin a pour objectif de répondre à des « besoins de formation pour des
publics divers à la fois dans leurs objectifs, dans leurs habitudes d’apprentissage, dans
leur fonctionnement communicatif et culturel. » (Bérard, 1991, p. 33) Que peut-on pen-
ser de cette prise en compte des besoins des apprenants lorsqu’on se situe en contexte
scolaire ou universitaire d’apprentissage d’une langue ?
Activité 3
Allez sur le site Francparler.org et lisez le dossier consacré aux simulations globales
(http://www.francparler-oif.org/FP/dossiers/simulations_intro.htm).
Repérez la présentation d’un canevas type et l’exemple donné pour l’île et l’immeuble.
Relevez les différents atouts pédagogiques de cette technique. Relevez la différence qui
est faite entre « simulation réaliste » et « simulation fiction ». Lisez enfin l’un des comptes
Chapitre 2
rendus d’expérience de simulation globale en classe de FLE ou en classe d’accueil pour les
L’approche
élèves nouvellement arrivés en France (ENAF).
communicative
(Activité de renforcement personnel – pas de corrigé prévu)
Page 31
Activité 4
Observez 3 extraits de méthodes9 et étudiez l’approche adoptée pour l’enseignement de
la grammaire par rapport à la dimension implicite/explicite d’une part et la dimension
inductif/déductif d’autre part. Voici quelques consignes et questions pour guider votre
observation :
• Repérez les points communs et les différences dans la façon de mettre en œuvre
cette approche.
• Identifiez d’abord les points de grammaire visés dans ces 3 extraits.
• Quel est le type de corpus proposé aux apprenants pour travailler sur les objectifs
grammaticaux visés ?
• Quelles sont les consignes d’observation données aux apprenants ?
• Place et degré d’explicitation des règles de grammaire par rapport aux activités
d’observation.
Petites précisions importantes concernant les extraits proposés :
• Dans Libre échange 2, il faut noter que la rubrique « Découvrez les règles » se situe
à la page 62 du manuel alors que la présentation des règles de grammaire se situe
p. 70-71. Ces deux rubriques sont séparées par plusieurs pages d’exercices.
• Concernant Mosaïque, aucune autre explication grammaticale n’est fournie dans
le reste de l’unité en plus de ce qui est présenté p. 138-139.
Voir fascicule autocorrection.
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Activité 5
Faites le point sur vos connaissances concernant différentes notions qui ont été évoquées
au cours de ces deux chapitres proposant un retour sur les principales méthodologies qui
ont marqué l’histoire de l’enseignement-apprentissage des langues jusqu’au CECR.
Accès (direct) au sens
Approche globale
Automatismes
Compétences (les 4)
Contexte
Progression (des contenus)
Erreur /faute
Exercices (structuraux, de réemploi)
Grammaire implicite/explicite
Grammaire inductive/déductive
Linguistique appliquée
Mémorisation
Métalangage
Méthode/méthodologie active
Mimo-gestualité
Non verbal
Phase d’explication/compréhension
Phase d’exploitation
Chapitre 2
Phase de transposition
L’approche
communicative
Présentation (des données)
Sélection (des données)
Page 32 Situation(s)
Traduction
Unité didactique
Variations langagières
Besoin des apprenants
Documents authentiques
Situation de communication
Acte de parole
Objectif communicatif
Compétence de communication
Jeux de rôles
Simulation
Conceptualisation
(Activité de renforcement personnel – pas de corrigé prévu)
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Retenir
Bibliographie
Courtillon, J. (1989) « L’approche notionnelle de la grammaire ». Grammaire et fran-
çais langue étrangère. Acte du colloque ANEFLE. Grenoble.
Moirand, S. (1974), « Audiovisuel intégré et communication(s) », Langue française,
n°24.
Moirand S., Porquier R., Vivès R. (dir.) (1989) « … Et la grammaire », Le français dans
le monde, Recherches et applications, fev.-Mars 1989. Chapitre 2
Austin, J. (1970), Quand dire c’est faire, Paris, Seuil. L’approche
communicative
Hymes, D. (1984), Vers la compétence de communication, Paris, Credif-Hatier.
Page 33
Salins de, G. (1996), Grammaire pour l’enseignement/Apprentissage du FLE¸ Paris,
Didier/Hatier.
Charaudeau, P. (1992), La grammaire du sens et de l’expression, Paris, Hachette-
Éducation.
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Chapitre 3
Le Cadre européen commun de
référence pour les langues
Plan
Présentation générale : un outil pour apprendre, enseigner et
évaluer les langues étrangères
Notions-clés du Cadre
L’évaluation
Dans les années 90, nombre de didacticiens considèrent que la didactique des
langues se situe dans une ère de l’éclectisme. Ce point de vue est notamment
développé par C. Puren dans un ouvrage intitulé : La didactique des langues
étrangères à la croisée des méthodes. Essai sur l’éclectisme (1994). Cette notion,
issue de la philosophie, rend compte d’une approche selon laquelle il est préfé-
rable de choisir certains éléments dans différents systèmes de pensée, à condi-
tion que ceux-ci soient cohérents entre eux, plutôt que de créer un système Chapitre 3
entièrement nouveau. En didactique, cela signifie qu’il n’y a pas de nouvelle Le cadre européen
méthodologie dominante proposant un modèle unique de l’enseignement/ commun de référence
pour les langues
apprentissage des langues, mais que l’on emprunte aux diverses méthodologies
constituées (traditionnelle, directe, SGAV, approche communicative). Page 35
Dans ce contexte, le CECR a relancé la réflexion méthodologique en didactique
des langues et a ouvert de nouvelles perspectives dans le domaine, sans pour
autant mettre en place un nouveau courant méthodologique.
Pour commencer nous vous invitons à faire l’Activité 6 consistant en un remue-
méninges à propos du CECR. Après cette activité, il faudra, si vous ne l’avez déjà,
vous procurer le CECR10 diffusé très largement et en accès libre sur plusieurs sites
dont celui du Conseil de l’Europe : http://www.coe.int/
ou précisément à l’adresse suivante : www.coe.int/T/DG4/linguistic/Cadre1_fr.asp
Deux chapitres de ce cours sont consacrés au CECR, le chapitre 4 sera réservé à la
perspective actionnelle et à la notion de tâche, tandis que le chapitre 3 est consa-
cré à diverses notions fondatrices telles que compétences, activités langagières,
niveaux, descripteurs, etc. Une dernière partie de ce chapitre, spécifiquement
consacrée à la question de l’évaluation, permettra de présenter le portfolio,
autre outil issu des travaux mis en place par le Conseil de l’Europe.
10 Trim, J. L., Coste, D., North, M. B. & Sheils, M. J. et al., Un Cadre européen commun de référence pour les
langues - Apprendre, Enseigner, Évaluer, Paris, Éditions Didier, 2001.
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Dans ce chapitre, nous vous proposerons parfois de simples recherches d’infor-
mations dans le CECR, celles-ci ayant pour but de vous faire manipuler cet outil,
parfois considéré comme un peu opaque11. Si vous avez déjà une bonne connais-
sance du Cadre, certaines de ces activités ne vous seront pas utiles.
Découvrir
11 D
eux ouvrages en particulier peuvent vous aider à comprendre et à rentrer dans le Cadre :
- Dictionnaire pratique du CECR, J.-P. Robert, E. Rosen, (2010).
- Guide pour les utilisateurs du Cadre, sur le site du conseil de l’Europe : tapez « CECR, guide pour les
utilisateurs » dans un moteur de recherche.
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Principaux objectifs
Des niveaux de références.
Dans la continuité des travaux sur les niveaux seuils des années 70, le CECR reprend
et développe la question des niveaux de compétences tout en intégrant les résultats
de recherches sur les processus d’acquisition, les stratégies d’apprentissage, etc. Trois
niveaux de compétences sont établis : niveau A : utilisateur élémentaire ; niveau B :
utilisateur indépendant ; niveau C : utilisateur expérimenté. Chaque niveau est ensuite
subdivisé en 2 sous-niveaux.
Ces niveaux doivent favoriser la transparence et la cohérence entre les diplômes et les
certifications des pays européens et faciliter ainsi la mobilité éducative et professionnelle.
« L’apprentissage de la langue est un processus à long terme et il est important de l’étalonner pour diverses
raisons telles que planifier des cours et décerner des diplômes. L’établissement de normes communes est la
justification première de l’adoption du Cadre de référence. » (Trim et al., 2001, p. 16).
Un point de vue théorique sur l’usage de la langue comme action et pour l’action
La perspective théorique privilégiée dans les travaux du CECR est qualifiée d’emblée
comme étant « de type actionnel » :
« en ce qu’elle considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une langue comme des acteurs sociaux ayant
à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des circonstances et un environnement
donné, à l’intérieur d’un domaine d’action particulier. » (CECR, 2001, p. 15).
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Structure du Cadre
Voici une présentation simplifiée du Cadre établie à partir du synopsis du CECR fourni
sur le site du Conseil de l’Europe : http://www.coe.int/
Le chapitre 1 définit les objectifs et les fonctions du Cadre de référence à la lumière de la
politique générale en langues du Conseil de l’Europe et, en particulier, de la promotion
du plurilinguisme en réponse à la diversité linguistique et culturelle de l’Europe.
Le chapitre 2 développe l’approche retenue, à savoir la perspective actionnelle.
Le chapitre 3 introduit les niveaux communs de référence. Ils sont présentés au moyen
de descripteurs exprimés en termes positifs (ex : je peux…).
Le chapitre 4 expose les catégories nécessaires à la description de l’utilisation de la
langue par l’apprenant utilisateur :
• les domaines et les situations qui constituent le contexte de l’utilisation de la langue ;
• les tâches, buts et thèmes de la communication ;
• les activités de communication langagière et les stratégies : c’est là que l’on trouve
les tableaux de descripteurs de « capacité à faire » ;
• les opérations de communication et les textes, en particulier en relation avec les
activités et les supports.
Le chapitre 5 décrit le modèle de compétences du Cadre qui distingue les compétences
générales et communicatives de l’utilisateur/apprenant.
Chapitre 3 Le chapitre 6 traite de la relation entre acquisition et apprentissage, de la nature et du
Le cadre européen développement d’une compétence plurilingue ainsi que des options méthodologiques
commun de référence
pour les langues
en relation avec les catégories exposées dans les Chapitres 3 et 4.
Le chapitre 7 présente plus en détail le rôle des tâches dans l’apprentissage et l’ensei-
Page 38 gnement de la langue.
Le chapitre 8 s’intéresse à la nature et au développement d’une compétence plurilingue
et à ses implications en termes de politiques éducatives.
Le chapitre 9 présente les diverses finalités de l’évaluation et les types d’évaluation qui
y correspondent.
Sont ensuite proposées une bibliographie et 4 annexes :
• la première commente l’élaboration des descripteurs de compétence langagière ;
• la deuxième donne une vue d’ensemble du projet qui a permis, en Suisse, de for-
muler et d’étalonner les exemples de descripteurs ;
• la troisième contient les descripteurs pour l’auto-évaluation d’une série de niveaux
adoptés par le Projet DIALANG de la Commission européenne pour Internet (tapez
DIALANG dans un moteur de recherche) ;
• la quatrième contient les descripteurs entrant dans la constitution des seuils fonc-
tionnels d’apprentissage élaborés par ALTE (Association des centres d’évaluation
en langues en Europe).
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Notions-clés du Cadre
La perspective actionnelle ainsi que la notion de tâche seront traitées de façon appro-
fondie dans le chapitre suivant.
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Les activités langagières peuvent être réalisées dans différents contexte ou « domaines » :
« Un utilisateur de la langue s’engage dans un acte de communication avec un ou plusieurs interlocuteurs
afin de répondre à un ou des besoins dans une situation donnée. Dans le domaine privé, l’intention peut
être de faire la conversation avec un visiteur pour échanger des informations sur la famille, les amis, ce
qui plait et ce qui ne plait pas, […]. Dans le domaine public, l’échange sera souvent de type commercial,
par exemple, pour acheter des vêtements de bonne qualité à un prix raisonnable. Dans le domaine profes-
sionnel, il pourra s’agir de comprendre un règlement et ses conséquences sur un client ; dans le domaine
éducationnel, de participer à un jeu de rôle ou à un séminaire ou d’écrire un article sur un sujet spécialisé
pour un colloque ou une revue, etc. » (CECR, 2001, p. 46).
12 Ellis, R. (1994). The study of second language acquisition, Oxford University Press.
13 Les stratégies d’apprentissage seront abordées dans la partie suivante sur les compétences à propos de
l’ « apprendre à apprendre ».
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Il est intéressant de se demander si les manuels de FLE prennent en compte le dévelop-
pement des stratégies de communication et/ou d’apprentissage chez les apprenants.
Descripteurs et référentiels
Faites l’activité 7 afin de réfléchir à l’évaluation de vos compétences dans une langue
étrangère.
Faites l’activité 8 pour découvrir les descripteurs pour l’interaction orale et pour l’inte-
raction écrite.
À force de lire ces descripteurs de compétences tels qu’ils sont envisagés et présentés par
le CECR, vous aurez sans doute remarqué certaines de leurs caractéristiques (cf. p.148-
150, Annexe A). On peut observer en effet que ces derniers doivent être :
• formulés de façon positive. Le descripteur positif
« correspond à une évaluation des compétences positives, qui valorise ce que l’apprenant sait faire. Elle ne
s’intéresse pas à ce qu’il ne sait pas faire, contrairement à ce qui se passe habituellement dans une situation
d’apprentissage scolaire, où une bonne partie de l’activité d’enseignement consiste à corriger les fautes,
remettre à niveau, combler les lacunes, etc. […] ». (Frath, 2008, p. 13) ;
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Faites l’activité 9 afin de vous familiariser avec les descripteurs de compétences rapportés
aux différents niveaux pour la compréhension et la production écrite.
Ces énoncés ont sans doute une efficacité communicative voisine mais il y a d’évidentes
Chapitre 3 différences entre eux. On constate donc que les descripteurs disent peu de choses sur la
Le cadre européen maitrise de la morphologie, de la syntaxe et du lexique en langue cible. C’est la raison
commun de référence pour laquelle des travaux, prolongeant ceux du CECR, ont été entrepris sur les référen-
pour les langues
tiels de compétences dans le cadre du Conseil de l’Europe par les mêmes linguistes et
Page 42 didacticiens.
Ces référentiels constituent des inventaires de formes linguistiques considérées comme
des contenus possibles d’enseignement, en lien avec tel ou tel niveau défini par le CECR.
Dans l’introduction du premier référentiel (B2), on peut lire que l’objectif
« est de transposer les descriptions du Cadre, établies en termes de compétences (ou éléments de compé-
tence) et de niveaux (ou degrés) de maitrise dans une compétence en inventaire de signes linguistiques. La
maitrise de ceux-ci par les utilisateurs, est réputée permettre, en français, la pratique de ces compétences
à un niveau donné. » (Beacco, Bouquet, Porquier, 2004, p. 9)
Le premier référentiel est paru en 2004 pour le niveau B2, suivi des référentiels A1.1
(public adulte peu francophones, scolarisés, peu ou non scolarisés) en 2006, puis pour
A1 en 2007 et A2 en 200815.
L’inventaire de formes langagières se fait au moyen d’une classification : fonctions,
notions générales, notions spécifiques, grammaire, matière sonore, matière graphique.
Les fonctions recouvrent, comme dans le Niveau-Seuil, les actes de parole.
15 Précisons que d’autres référentiels ont été conçus, notamment celui de l’Alliance Française qui regroupe
tous les niveaux en un seul ouvrage (cf. bibliographie du chapitre).
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Les notions spécifiques renvoient au lexique.
Exemples pour le niveau A1 : perceptions et sentiments, caractéristiques physiques, nourriture et boissons, etc.
Grammaire
Exemple : morphologie et structure des énoncés et des phrases
« Il ne s’agit pas de proposer ici une description grammaticale du français, mais un inventaire de struc-
tures et de formes à enseigner. » (Beacco, Porquier, 2007, p. 91).
Ainsi, pour le niveau A1, est visée la connaissance des structures de phrases simples
telles que : c’est -, il y a- , voilà-
Ainsi, lorsque les manuels annoncent qu’ils couvrent tel ou tel niveau (ce qu’ils font tous)
et qu’ils s’appuient sur les référentiels de compétences, on doit pouvoir y trouver des
contenus relativement précis. Pour l’instant peu de méthodes affirment s’appuyer sur les
référentiels16 mais ceci s’explique sans doute en partie par leur parution récente.
On peut conclure avec J.-C. Beacco et R. Porquier (2007, p. 10) en disant que le référentiel
de compétences communicationnelles proposé par le Cadre et les référentiels de formes
linguistiques sont complémentaires et nécessaires pour construire des programmes, des
formations, des évaluations.
Chapitre 3
Le cadre européen
Les compétences générales et les compétences à communiquer commun de référence
langagièrement pour les langues
« Toutes les compétences humaines contribuent, d’une façon ou d’une autre, à la capacité de communi- Page 43
quer de l’apprenant et peuvent être considérées comme des facettes de la compétence à communiquer »
(CECR, p. 82).
C’est ainsi que le CECR prend en compte, tout en les distinguant, les compétences lin-
guistiques proprement dites et les compétences générales qui ne sont pas directement
en relation avec la langue. La partie sur les compétences générales individuelles nous
donnera l’occasion de nous arrêter de façon approfondie sur la question du « savoir-
apprendre » et de l’autonomisation des apprenants que le Cadre met en avant sans que
cette perspective soit nouvelle.
16 La méthode Alors ? conçue notamment par J.-C. Beacco, affirme s’appuyer sur les référentiels du niveau
correspondant.
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• Les savoir-faire
Il s’agit des aptitudes sociales liées à la capacité à se conduire de façon appropriée grâce
aux connaissances socioculturelles ou savoir-faire interculturels (exemple : entrer en
contact avec des natifs, savoir éviter les malentendus interculturels)
• Les savoir-être
Ils sont liés aux traits de la personnalité, manières d’être. (exemple : être bavard, avoir
confiance en soi, avoir le désir de communiquer, etc.).
« Cette prise en compte des savoir-être des apprenants est fondamentale dans l’enseignement/apprentis-
sage des langues : on ne doit pas attendre d’un apprenant qu’il change sa personnalité lorsqu’il apprend
une langue, mais on doit plutôt l’aider à trouver les moyens d’exprimer et de développer cette personnalité
profonde, de manière harmonieuse, dans une langue et dans un contexte différents. » (Rosen, 2007, p. 25).
« Le développement de la personnalité est en soi une finalité éducative et l’accroissement de la conscience
de soi et de la confiance en soi peut être l’un des objectifs de l’enseignement de la communication langa-
gière ». (Guide pour utilisateurs, p. 36)
• Le savoir-apprendre
En défendant l’idée qu’une langue s’apprend tout au long de la vie et pas uniquement
dans la classe, le Cadre insiste sur la nécessité d’apprendre à apprendre et donc de déve-
lopper des stratégies d’apprentissage.
« Ces savoir-apprendre se manifestent par une prise de conscience de la manière dont fonctionne la langue
et la communication, […] ou bien encore par des aptitudes à l’étude ou à la découverte (c’est par exemple
savoir aller dans un centre de ressources, y consulter les bases de données disponibles pour trouver les
informations que l’on cherche. » (Rosen, 2007, p.25-26).
Chapitre 3
C’est sans aucun doute cette dernière composante des compétences générales, outre les
Le cadre européen
savoirs socioculturels et la prise de conscience interculturelle, qui trouve le plus grand
commun de référence
pour les langues écho dans les méthodes de français langue étrangère. Cela se traduit par des manuels
de plus en plus centrés sur celui qui apprend et sur le développement de son autonomie.
Page 44
Voici quelques extraits d’avant-propos de méthodes récentes où il est question du déve-
loppement de cette compétence :
« Vous allez y retrouver des manières d’apprendre que vous utilisez déjà pour d’autres langues. Il faut
juste du temps pour apprendre, car on apprend une langue et les langues toute sa vie. Il faut juste aimer
à apprendre et apprendre à apprendre tout seul » (Avant propos, Alors ? 2)
« La démarche de Latitudes vise à mener l’apprenant vers une autonomisation en le rendant responsable
et conscient de son apprentissage. Par la mise en place de diverses stratégies, il va rapidement acquérir des
aptitudes nécessaires pour accomplir des tâches dans les domaines variés de la vie sociale, […] » (Avant-
propos, Latitudes 1).
« Alter ego se propose d’entrainer l’apprenant à une véritable évaluation formative, c’est-à-dire centrée
sur l’apprentissage : des fiches de réflexion permettent à l’apprenant de porter un regard constructif sur
son apprentissage, […] » (Avant-propos, Alter ego 1)
« Il est rare que l’étudiant adulte d’aujourd’hui ait la disponibilité nécessaire pour apprendre une langue
étrangère uniquement en suivant des cours. ECHO lui donne la possibilité de travailler seul. Le cahier per-
sonnel d’apprentissage, accompagné d’un CD, permet de retrouver le vocabulaire nouveau, d’en noter le
sens, de vérifier la compréhension d’un texte ou d’un document sonore étudié en classe et d’automatiser
les formes linguistiques. Ce cahier s’utilise en relation avec les autres outils de référence nombreux dans
les leçons et dans les pages finales du livre (tableaux de grammaire, de vocabulaire, de conjugaison). »
(Avant-propos, ECHO 1).
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créés dans cette même perspective d’autonomisation de l’apprenant : portfolio17 (Tout
va bien, ECHO, A propos), carnet de route invitant l’apprenant à un retour réflexif sur
son parcours d’apprentissage (Ici), lexique personnalisé (Ici), CD des documents audio
de la méthode fourni avec le livre de l’élève (Latitudes, Alors ?), fiches d’autoévaluation
(Latitudes).
Outre les outils mis à disposition des apprenants pour leur permettre d’apprendre en
autonomie, les méthodes peuvent aussi s’efforcer de les amener à développer des straté-
gies d’apprentissage et de communication. Là encore, cette approche n’est pas nouvelle
puisque l’une des premières méthodes de l’approche communicative, Cartes sur table
(1981), se donne comme objectif prioritaire d’apprendre à apprendre aux apprenants,
comme le montrent les propos liminaires des auteurs :
« Tout d’abord, et c’est pour nous le plus important, nous aimerions que les apprenants avec Cartes sur
table, apprennent non seulement une langue étrangère mais aussi et surtout comment on peut l’ap-
prendre. Cela signifie qu’il faut tout mettre en œuvre pour les aider à découvrir et à développer ce que l’on
nomme les stratégies d’apprentissages qui peuvent être décomposées en démarches à suivre, attitudes à
adopter, moyens et trucs à utiliser pour résoudre un problème de grammaire, et de communication. Il nous
paraît en effet fondamental que, confronté avec la question de l’acquisition du vocabulaire, par exemple,
on n’apprenne pas seulement les mots, mais aussi comment on peut se les rappeler, comment on peut en
deviner le sens, comment on peut de façon permanente enrichir ses connaissances lexicales. De même,
lorsqu’on lit ou on écoute un texte, ce qui nous paraît important, ce n’est pas tellement son contenu mais
plutôt les démarches, attitudes, moyens qui vont en faciliter la compréhension orale ou écrite, et cela pour
des textes de nature différente.
Enfin ce n’est pas tellement la maîtrise de telle ou telle situation de communication qui nous intéresse
mais plutôt l’acquisition des moyens qui permettent de faire face à l’imprévisible de la communication et
de se débrouiller, en fonction des possibilités de chacun dans des situations différentes. Ainsi, pour nous Chapitre 3
les contenus ne devraient pas être enseignés pour eux-mêmes, mais devraient toujours être l’occasion
Le cadre européen
d’apprendre quelque chose de plus et d’autre. » (Guide d’utilisation).
commun de référence
Le grand intérêt de cette méthode est de faire suivre cette déclaration d’intention par pour les langues
des propositions pédagogiques cherchant à diriger les enseignants dans cette voie, ce qui
n’est pas toujours le cas18. Page 45
Faites l’activité 10 afin d’identifier les « règles du jeu » pour l’enseignant à partir de
celles de l’apprenant.
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• qu’on doit /qu’on peut s’appuyer sur ce qui est connu : « Lisez et écoutez. Qu’est-ce que
vous avez compris ? Soulignez ce que vous avez compris. » (Cartes sur table 1, p. 39) ;
• qu’il est bon de s’interroger sur ses propres stratégies : « Que faites-vous quand
vous ne comprenez pas ? » (p. 81) « Vous n’avez pas compris ? Qu’est-ce que vous
pouvez faire ? » (p. 99) ;
• et aussi qu’il existe différents objectifs d’écoute, différents types d’écoute (photos
d’une étudiante qui prend des notes, d’une standardiste, d’un concert, d’un audi-
teur de radio stylo en main).
Toutes ces activités de conscientisation ont le même objectif : autonomiser l’apprenant
dans ce domaine de l’apprentissage en lui donnant de nouvelles habitudes d’écoute.
Elles sont accompagnées d’activités d’écoute guidée.
Dans les manuels Espaces (1990) et le Nouvel Espaces (1995), c’est dans le domaine de
l’écrit que les auteurs font des propositions intéressantes du point de vue du dévelop-
pement de stratégies d’apprentissage par les apprenants. Pour accroitre leur capacité de
lecture ils formulent des consignes guidant l’observation et proposent des techniques de
lecture : balayage du texte, repérage d’informations, anticipation, stratégies d’inférence.
Il s’agit de « leur donner des habitudes de lecture non linéaire et de construction pro-
gressive du sens ». En matière de production écrite, ils sont aidés grâce à des techniques
de recherche d’idées (listes, réseaux, remue-méninges, débats, dramatisations…).
Cet approfondissement concernant les questions d’autonomie et de stratégies d’appren-
tissage aura permis de montrer que ces préoccupations ne sont pas nouvelles dans le
Chapitre 3 domaine de la didactique du FLE, même si elles sont centrales aujourd’hui comme le
Le cadre européen montre, par exemple, le succès remporté par l’outil Portfolio dans les manuels de langue.
commun de référence Nous y reviendrons dans la partie suivante sur l’évaluation. En attendant, après l’évo-
pour les langues cation des différentes compétences générales individuelles, telles que définies par le
CECR, nous abordons les compétences plus classiquement évoquées dans le domaine de
Page 46 l’apprentissage des langues : les compétences communicatives langagières.
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– la compétence fonctionnelle a trait à la maitrise des actes de parole (« micro-
fonctions ») pour une utilisation fonctionnelle de la langue à travers des
énoncés simples (exemple : établir des relations sociales : attirer l’attention,
s’adresser aux gens, saluer, se présenter…). Elle renvoie aussi à la connaissance
des grands types de discours oral ou de textes écrits (exemple : description,
narration, instruction, argumentation, etc.),
– la compétence de conception schématique concerne la maitrise des schémas
qui sous-tendent la communication. En effet, les situations de communication
interactive reposent sur des suites d’actions qui s’enchainent dans un ordre
plus ou moins récurrent qu’il faut connaitre pour participer efficacement à
ces échanges.
Exemple : la rubrique « Répliques » dans l’unité 4 de Alors ? (p. 57)20 vise l’acquisi-
tion d’un schéma très simple (puisqu’il s’agit du début du niveau A1) concernant le
déroulement d’un achat simple.
L’évaluation
« Évaluer » constitue l’un des trois termes clés du sous-titre du Cadre européen pour les
langues. La question de l’évaluation occupe depuis les travaux du niveau seuil une place
majeure en didactique des langues. Vous découvrirez ce champ de façon approfondie si
vous continuez en master 2 mais en attendant, nous vous proposons de nous arrêter sur
certains aspects de celui-ci21.
Évaluation et certifications
Les travaux du niveau seuil dans les années 80 ont d’abord permis de prendre conscience
que l’on pouvait viser telle ou telle compétence et non l’ensemble des compétences en
langue cible. À partir de là, on ne s’est plus limité à la prise en compte de la correction
linguistique, on a cherché à mesurer séparément les habiletés langagières (CO et CE, PO
et PE) et les différentes composantes de la compétence linguistique : syntaxe, lexique,
phonétique.
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Le DELF (diplôme d’étude de langue française) et le DALF (diplôme approfondi de
langue française), premières certifications officielles en FLE créées en 1986, sont en par-
tie issus des travaux du niveau seuil. Ces diplômes sont mis en place pour faire face à
l’hétérogénéité et au très grand nombre d’examens existant en France et à l’étranger,
sans qu’aucun ne puisse constituer une référence fiable par rapport à la diversité des
situations d’enseignement-apprentissage en France et dans le monde.
Le CECR a poursuivi dans cette même voie ; en établissant six niveaux de compétence
pour l’ensemble des langues (A1, A2, B1, B2, C1, C2), il a permis d’une part d’harmoniser
les programmes de langue dans les systèmes scolaires notamment, et d’autre part de
comparer les diplômes et surtout les résultats à ces diplômes ou aux tests d’évaluation en
langue. De nombreux tests de connaissance et certifications en français langue étrangère
sont désormais calés sur le CECR. Le CIEP, chargé de l’organisation des examens institués
par le ministère français de l’Éducation nationale pour évaluer l’enseignement du fran-
çais langue étrangère, a conçu ces dernières années deux nouveaux diplômes : le test de
connaissance du français (TCF) et le diplôme initial de langue française (DILF) qui sont
calibrés sur les 6 niveaux du CECR. Le DELF et le DALF sont eux aussi harmonisés depuis
2005 sur les critères du Cadre.
• L’évaluation sommative
Elle contrôle les acquis à la fin d’un cours ou d’une formation et se matérialise par une
note ou un rang attribuée aux apprenants. Elle prend la forme d’un bilan qui teste les
connaissances des apprenants en fin d’apprentissage. Les certifications comme DELF et
DALF entrent dans cette catégorie. Dans le cadre de ce type d’évaluation, une grille
d’évaluation est particulièrement indispensable au correcteur pour bien définir les cri-
tères sur lesquels repose l’évaluation.
• L’autoévaluation
Elle doit permettre aux apprenants d’évaluer eux-mêmes où ils en sont dans leur appren-
tissage. Son plus grand intérêt
« réside dans ce qu’elle est un facteur de motivation et de prise de conscience : elle aide les apprenants à
connaître leurs points forts et leurs points faibles et à mieux gérer leur apprentissage. » (CECR, 2001, p. 145)
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Un outil au service de l’autoévaluation : le portfolio européen
des langues
Présentation
À côté du CECR, les travaux du Conseil de l’Europe ont abouti également à la conception
de portfolios pour les langues. Un portfolio se présente sous la forme d’un petit livret
dans lequel toute personne qui apprend ou a appris une/des langue(s) peut consigner
ses connaissances linguistiques et ses expériences culturelles. Les portfolios ont été expé-
rimentés pendant deux ans avant d’être généralisés pendant l’année européenne des
langues en 2000. Il en existe différentes versions pour différents groupes d’âge et diffé-
rents pays et régions. Élaborés dans une quarantaine de pays, les portfolios ont une base
commune et doivent répondre à un certain nombre de principes afin d’être homologués
par le Conseil de l’Europe.
En France, trois niveaux sont disponibles :
• mon premier portfolio primaire ;
• Portfolio européen des langues collèges ;
• Portfolio européen des langues – Pour jeunes et adultes.
Avant de poursuivre la lecture du cours, nous vous invitons à prendre connaissance par
vous-même de présentations et d’extraits des différents portfolios sur le site du Conseil
de l’Europe (http://www.coe.int/t/dg4/education/elp/default_fr.asp) ou sur le site des édi-
tions Didier (http://www.editionsdidier.com/) et à répondre aux questions de l’activité 11.
Chapitre 3
Si vous êtes particulièrement intéressés par le portfolio Primaire, vous pouvez vous Le cadre européen
reporter au site compagnon22 créé à destination des parents et des enseignants pour commun de référence
présenter ce portfolio et faire des propositions d’exploitation (http://www.portfoliopri- pour les langues
maire.editionsdidier.com/).
Page 49
Faites l’activité 11 afin de découvrir ce qu’est un portfolio européen des langues.
22 Les sites compagnon de méthodes permettent d’accéder en ligne à des ressources complémentaires à la
méthode : des activités, des liens vers d’autres sites, une version numérique de la méthode pour tableau blanc
interactif (TBI) etc.
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Selon le Conseil de l’Europe la biographie langagière :
« donne à l’apprenant l’occasion d’établir ce qu’il/elle sait faire dans chaque langue et de mentionner les
expériences culturelles vécues dans le contexte éducatif officiel ou en dehors de celui-ci ; elle est organisée
en vue de la promotion du plurilinguisme c’est-à-dire, le développement de compétences dans plusieurs
langues ». (site internet du Conseil de l’Europe)
Elle n’est pas censée être présentée, elle a un rôle de carnet de route ou de carnet de
bord. En résumé, elle concerne les expériences des apprenants en lien avec les langues
ainsi que les démarches d’apprentissage.
La biographie langagière est suivie d’une grille d’autoévaluation conçue en accord avec
les descripteurs du Cadre européen commun de référence pour les différentes activités
langagières.
• Le dossier
Il s’agit d’une partie vide du portfolio et il constitue la partie la plus ouverte, complétant
la biographie langagière. Il rassemble les attestations de diplômes, de certifications, de
stages, etc. de l’apprenant mais il peut également contenir des travaux personnels réali-
sés par ce dernier lui permettant d’attester de ses acquis et de ses expériences mention-
nées dans la biographie langagière ou le passeport. Ainsi, selon D. Little et R. Perclova
(2001, p. 2)23 :
« Le dossier est la partie du PEL qui se rapproche le plus du portfolio de l’artiste. Pour les jeunes apprenants,
ce dossier pourra se concrétiser par un album dans lequel seront rassemblés des documents en langue
étrangère en complément ou en «illustration» de la méthode utilisée. […] Les apprenants un peu plus âgés
peuvent inclure dans leur dossier les résultats de projets pouvant être plus ou moins étroitement liés aux
compétences sanctionnées par les examens officiels. Adultes, les apprenants souhaiteront probablement
Chapitre 3 faire preuve de leur aptitude à exécuter certaines tâches authentiques dans la/les langue(s) cible(s). Leur
Le cadre européen dossier sera donc éventuellement constitué de lettres, circulaires, comptes-rendus et autres documents de
commun de référence ce type. Les détenteurs d’un PEL pourront naturellement souhaiter faire preuve de leurs compétences tant
pour les langues à l’oral qu’à l’écrit, et ce en joignant notamment une cassette audio ou vidéo à leur dossier. »
L’objectif principal du dossier est de rendre concrets et visibles les acquis langagiers des
Page 50
apprenants.
• Le passeport des langues
« […] donne une vue d’ensemble des capacités de l’apprenant en différentes langues à un moment donné ;
cette vue d’ensemble est définie en termes de capacités en relation avec les niveaux de compétence du
Cadre européen commun de référence ; le Passeport mentionne les certifications officielles et fait état des
compétences langagières et d’expériences d’apprentissage linguistiques et interculturelles significatives ;
il inclut des informations sur les compétences partielles et spécifiques ; il réserve une place à l’auto-éva-
luation, à l’évaluation par des enseignants et des institutions scolaires, ainsi que par des organismes de
certification. Il exige que soit mentionné explicitement sur quelle base, quand et par qui l’évaluation a été
réalisée (site internet du Conseil de l’Europe). »
En somme, le passeport des langues constitue un résumé de la biographie langagière et du
Dossier. Vous pouvez le télécharger gratuitement à partir du site du Conseil de l’Europe.
Il s’agit d’un document complètement séparé des autres parties du portfolio qui constitue
un bilan voire une carte de visite ; l’apprenant doit donc y faire figurer des informations
valorisantes à présenter. Il s’adresse à des apprenants âgés de plus de seize ans.
23 Little, D., Perclova, R. (2001). Le portfolio européen des langues: guide à l’attention des enseignants et des
formateurs d’enseignants, en ligne sur le site du Conseil de l’Europe.
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Principales fonctions du portfolio
Deux fonctions principales sont dégagées par les auteurs du Guide à l’attention des
enseignants et des formateurs d’enseignants (2001).
• Une fonction pédagogique
L’idée en amenant les apprenants à rendre compte de leurs apprentissages est de leur
faire prendre conscience de leurs progrès et de susciter ainsi leur motivation. Par ailleurs,
« connaître les efforts qui restent à faire permet de planifier son apprentissage, de réfléchir aux degrés de
compétences que l’on souhaite acquérir, fussent-ils partiels. » (Tagliante, 2005, p. 76). Il s’agit donc d’ame-
ner les apprenants à :
« développer leur capacité de réflexion et d’autoévaluation et leur permettre aussi progressivement de
prendre de plus en plus en charge leur propre apprentissage. Cette fonction coïncide avec l’objectif du
Conseil de l’Europe qui est d’encourager le développement de l’autonomie des apprenants et de promou-
voir la perspective d’un apprentissage tout au long de la vie » (Little, Perclova, 2001, p. 15)
Outre ces deux grandes fonctions, d’autres objectifs du portfolio sont pointés par cer-
tains auteurs (Tagliante, 2005, p. 76-77). Ainsi, la conception de cet outil vise à promou-
voir la cohérence et la transparence des programmes et des diplômes. Par ailleurs, le Chapitre 3
portfolio peut permettre aux parents de suivre et d’encourager les progrès linguistiques Le cadre européen
des enfants. Enfin, et surtout, en permettant aux apprenants de rendre compte de leurs commun de référence
apprentissages dans différentes langues il vise à encourager le plurilinguisme et le déve- pour les langues
loppement interculturel dès le plus jeune âge.
Page 51
Si vous êtes intéressé par cet outil vous pourrez prendre connaissance d’exemples d’inté-
gration du portfolio dans des pratiques d’enseignement dans le Guide à l’attention
des enseignants et des formateurs d’enseignants réalisé par D. Little et R. Perklova.
Concernant son exploitation, on peut noter très brièvement que le portfolio doit être
adapté aux apprenants, notamment à travers une reformulation des descripteurs du
Cadre parfois un peu obscurs. Comme le souligne C. Tagliante (2005, p. 78)
« Estimer ses propres compétences pour la première fois de sa vie est une tâche difficile à mener, autant
pour un adulte que pour un enfant. »
Prenant l’exemple de Mon premier Portfolio des langues (niveau primaire), cet auteur
explique qu’il est possible de transformer les descripteurs en questions (est-ce que tu es
capable de … ?) et de fournir à l’élève des fiches d’autoévaluation l’invitant à réfléchir à
des critères concrets pour évaluer ses compétences. Ainsi par exemple :
« Pour la compétence « Savoir décrire sa famille », l’élève peut réfléchir sur « je suis capable de décrire
ma mère », ou sur « je peux parler du métier de ma sœur » ou sur « je peux dire où habitent mes grands-
parents » (Tagliante, 2005, p. 78).
L’auteur note que d’autres aides peuvent être fournies à l’apprenant afin de l’aider à
prendre conscience de ce qu’il sait faire et de ce qui lui reste à apprendre pour savoir.
À présent, nous allons évoquer les types d’évaluation présents dans les manuels de FLE,
notamment les portfolios.
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L’évaluation dans les manuels
Tous les manuels de FLE récents accordent une place importante à l’évaluation ; celle-
ci est le plus souvent présentée par les auteurs dans l’avant-propos et différents types
d’évaluation sont en général proposés.
La méthode Latitudes, par exemple, en propose trois :
• des bilans d’autoévaluation à la fin de chaque module (toutes les 3 unités) proposent
« de courtes activités très ciblées sur des compétences communicatives » (Latitudes 1,
Guide pédagogique, p. 4). Les apprenants ont à disposition les corrigés à la fin du livre,
un barème leur est proposé pour se situer ainsi que des renvois à certaines activités
du livre et du cahier d’exercices pour retravailler les points qui ont posé problème24 ;
• une double page de préparation au DELF (A1, A2, B1 suivant les niveaux étudiés)
où sont évaluées les compétences de communication orales et écrites de l’appre-
nant. Il s’agit de familiariser l’apprenant avec les épreuves de ce diplôme. Les acti-
vités doivent être faites, en partie au moins (pour la production orale) en présence
de l’enseignant, et doivent dans tous les cas être corrigées par ce dernier ;
• des tests sommatifs pour chacune des unités fournis aux enseignants dans le guide
pédagogique avec un barème de notation et un corrigé.
On trouve dans certains manuels quelques formes d’évaluation originales. On peut citer
par exemple le cas des évaluations réalisées sous forme de jeu en équipe dans la rubrique
« Faisons le point » de la méthode A propos. Dans ce cas, l’évaluation est collective et
prend une forme ludique25.
Chapitre 3
Le cadre européen
On peut citer également l’exemple des co-évaluations (ou évaluations par les pairs) dans
commun de référence Tout va bien, où les productions type jeu de rôle sont évaluées par les pairs. La co-éva-
pour les langues luation concerne surtout la production orale et les auteurs la présente comme « plus
attrayante que l’évaluation individuelle et plus facile à réaliser avec des débutants »
Page 52 (Tout va bien 1, Livre du professeur, p. 11)26.
Plusieurs manuels récents proposent des portfolios (Tout va bien, Echo, A propos, Ici, Le
nouveau Taxi sur DVD-rom). Nous nous focaliserons sur l’étude de deux d’entre eux (Tout
va bien et A propos) à travers l’activité 12.
Faites l’activité 12 pour observer et comparer les portfolios de deux méthodes.
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S’entraîner
Activité 6
Avant de démarrer ce chapitre, nous vous invitons à faire un rapide remue-méninges
concernant le CECR. Notez tous les termes qui vous viennent à l’esprit par rapport au
CECR. Une fois que vous aurez terminé de travailler sur les chapitres 3 et 4, vous pourrez
revenir sur ces notes et vérifier si les termes que vous aviez notés ont bien été vus dans
le cours.
(Activité de renforcement personnel, pas de corrigé prévu).
Activité 7
Commencez par prendre connaissance du tableau présentant globalement les 6 niveaux
communs de référence27. À l’aide de la grille pour l’autoévaluation28, évaluez vos com-
pétences dans une langue étrangère que vous connaissez. Votre niveau est-il différent
selon le type d’activité langagière ?
(Activité de renforcement personnel, pas de corrigé prévu).
Activité 8
Afin de vous familiariser avec ces descripteurs, nous vous proposons de lire les descrip-
teurs des échelles et sous-échelles pour l’interaction orale et pour l’interaction écrite Chapitre 3
au niveau A2 (CECR, chapitre 4, p. 61-69). Quelle observation pouvez-vous faire ? Pour Le cadre européen
réaliser cette activité, vous travaillerez à partir de la version du CECR que vous aurez commun de référence
pour les langues
téléchargée sur internet ou de la version papier dont vous disposez.
Page 53
Activité 9
L’activité que nous vous proposons est inspirée d’une activité proposée par Bertocchini
et Costanzo (2008, p. 83-85). Elle a pour objectif de vous familiariser avec les descripteurs
de compétences rapportés aux différents niveaux.
Vous trouverez ci-dessous la description globale des compétences qui apparaît dans le
Cadre pour le niveau B228, suivie des descripteurs spécifiques à la compréhension écrite
prévue pour une échelle d’autoévaluation (DIALANG29). Lisez les deux documents et
faites l’activité qui suit.
Document 1
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Document 2
Dans la liste ci-dessous, sont mélangés les descripteurs pour la production écrite de tous
les niveaux. En tenant compte de la description globale des compétences pour le niveau
B2 (doc. 1 ci-dessus) et de l’exemple fourni pour la compréhension écrite, identifiez les
descripteurs qui concernent le niveau B2.
Chapitre 3
Le cadre européen Production écrite – Les descripteurs pour l’autoévaluation de DIALANG (liste
commun de référence non exhaustive)
pour les langues
1. Je peux décrire ma famille, mon environnement, mon passé scolaire, mon travail
actuel ou précédent.
Page 54
2. Je peux faire une synthèse d’informations et d’arguments de sources différentes.
3. Je suis capable d’écrire des messages simples à des amis.
4. Je peux structurer ce que j’écris de manière adéquate afin de faciliter le lecteur à
repérer les points significatifs.
5. Je peux décrire le lieu où j’habite.
6. Je peux construire un raisonnement argumenté.
7. Je peux développer et défendre mes points de vue en donnant d’autres argu-
ments, raisons ou exemples appropriés.
8. Je peux écrire une carte postale simple.
9. Je peux donner une information claire et détaillée sur des sujets complexes.
10. Je peux écrire des lettres et des messages courts à l’aide d’un dictionnaire.
11. Je peux écrire des notes et des messages simples et courts concernant la vie quo-
tidienne.
12. Je peux écrire des rapports, des articles ou des dissertations complexes, logiques
et clairs ou faire la critique de propositions ou d’œuvres littéraires.
13. Je peux expliquer en quoi une chose me plait ou me déplait.
14. Je peux écrire des lettres personnelles très simples pour remercier et m’excuser.
15. Je peux juger des idées différentes ou des solutions liées à un problème.
16. Je peux remplir une fiche de renseignements personnels.
17. Je peux décrire des projets et fixer par écrit les dispositions prises.
18. Je peux peser les causes et les conséquences et argumenter sur des situations
hypothétiques.
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19. J e peux développer méthodiquement un raisonnement en insistant sur les points
significatifs et en fournissant des preuves à l’appui.
Activité 10
Dans le tableau ci-dessous, vous pourrez lire dans la colonne de droite les règles du jeu
pour l’apprenant proposées dans Cartes sur table, formulez les règles du jeu correspon-
dantes pour l’enseignant.
Activité 11
Quelles sont les différentes parties d’un portfolio ? Dans quels buts a été élaboré le port-
folio ? Pour qui et à quoi peut-il servir ?
(Pas de corrigé prévu : les réponses se trouvent dans le cours.).
Activité 12
Observez les extraits des portfolios proposés par deux méthodes différentes : Tout va
bien30 et A propos31. Comment sont-ils composés ? Quelles sont leurs fonctions, notam-
ment par rapport au Portfolio européen des langues ? Qu’en pensez-vous ?
Voir fascicule autocorrection.
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Retenir
Les trois principaux apports du Cadre européen de référence pour les langues sont
la mise au point de 6 niveaux de référence, un projet éthique et de politique linguis-
tique lié à la défense d’une Europe plurilingue et pluriculturelle et une conception
de l’usage de la langue comme action et pour l’action.
Le Cadre parle d’activités langagières pour désigner ce que l’on rencontre le plus
souvent sous les termes d’aptitudes ou de compétences langagières : communica-
tions écrite et orale, productions orale et écrite. Il y ajoute par ailleurs : interaction
et médiation. Le terme de compétences est réservé par le Cadre aux savoirs et
savoir-faire langagiers et non langagiers qu’un apprenant/utilisateur d’une langue
met en œuvre dans les activités langagières. Cette distinction entre activités langa-
gières d’une part et compétences d’autre part est importante à saisir, cependant il
faut savoir que la plupart des manuels, et même des ouvrages en didactique, conti-
nuent à parler de compétences pour évoquer CO, PO, CE, PE.
Le Cadre élargit les compétences à prendre en compte dans le cadre de l’enseigne-
ment-apprentissage des langues à des compétences non langagières.
Les travaux initiés par le Conseil de l’Europe concernant l’enseignement-appren-
tissage des langues étrangères ont abouti à la réalisation du Cadre ainsi qu’à celle
d’autres outils tels que les référentiels et le Portfolio européen des langues.
Chapitre 3
Le cadre européen
commun de référence
pour les langues Aller plus loin
Page 56
Bibliographie
Beacco, J.-C., Bouquet, S., Porquier, R. (2004), Niveau B2 pour le français, un référen-
tiel, Division des politiques linguistiques, Strasbourg, Paris, Didier.
Beacco, J.-C., Porquier, R. (2007), Niveau A1 pour le français, un référentiel, Division
des politiques linguistiques, Strasbourg, Paris, Didier.
Chauvet, A. (2008), Référentiel de programme, Paris, Alliance Française / CLE interna-
tional.
Little, D., Perclova, R. (2001), Le portfolio européen des langues : guide à l’attention
des enseignants et des formateurs d’enseignants, en ligne sur le site du Conseil de
l’Europe.
Castellotti, V., Coste, D., Moore, D., Tagliante, C. (2004), Portfolio européen des lan-
gues, collège, Paris, Didier.
Dossier sur l’évaluation sur le site www.francparler-oif.org
8 1121 TG PA 00
Chapitre 4
Tâche et perspective actionnelle
Plan
Conception de l’usage et de l’apprentissage de la langue : la
perspective actionnelle
Types de tâches
De l’approche communicative à la perspective actionnelle :
continuité ou changement ?
Les tâches dans les manuels
Les auteurs du Cadre affirment à plusieurs reprises l’idée selon laquelle le Cadre
ne vise pas à imposer ou défendre de façon exclusive des principes méthodolo-
giques. Ainsi peut-on lire qu’il
« n’a pas pour vocation de promouvoir une méthode d’enseignement particulière mais bien de présenter
des choix. » (CECR, 2001, p. 110)
« se veut aussi exhaustif que possible, ouvert, dynamique et non dogmatique ». (2001, p. 21)
Dans ce chapitre nous nous efforçons de clarifier ces deux notions et d’étudier
leur exploitation dans quelques manuels de FLE récents.
Découvrir
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La tâche est définie en plusieurs endroits dans le CECR. Nous retiendrons deux définitions
qui permettront d’en pointer certaines caractéristiques.
« Est définie comme tâche toute visée actionnelle que l’acteur se représente comme devant parvenir à un
résultat donné en fonction d’un problème à résoudre, d’une obligation à remplir, d’un but qu’on s’est fixé.
Il peut s’agir tout aussi bien, suivant cette définition, de déplacer une armoire, d’écrire un livre, d’emporter
la décision dans la négociation d’un contrat, de faire une partie de cartes, de commander un repas dans
un restaurant, de traduire un texte en langue étrangère ou de préparer en groupe un journal de classe. »
(2001, p. 15-16)
«Les tâches ou activités sont l’un des faits courants de la vie quotidienne dans les domaines personnel,
public, éducationnel et professionnel. L’exécution d’une tâche par un individu suppose la mise en œuvre
stratégique de compétences données, afin de mener à bien un ensemble d’actions finalisées dans un cer-
tain domaine avec un but défini et un produit particulier […]. La nature des tâches peut être extrêmement
variée et exiger plus ou moins d’activités langagières.» (2001, p. 121)
La première caractéristique de la tâche dans l’acception qu’en propose le CECR est
qu’elle n’est pas nécessairement de type langagier. Dans l’extrait suivant, E. Bérard sou-
ligne bien la distinction entre les tâches faisant ou non appel à des activités langagières
et les tâches aboutissant ou non à un résultat de type langagier.
« Les tâches peuvent faire appel au langage ou non ; ainsi une tâche du quotidien, comme conduire une
voiture et effectuer un trajet ne fait pas appel au langage mais demande de maitriser certaines règles rele-
vant du code de la route : reconnaissance de panneaux, signalisations écrites. Elles peuvent également être
basées uniquement sur le langage : par exemple téléphoner pour obtenir un renseignement administratif.
Entre les deux, il existe un éventail de tâches qui font appel au langage de différentes façons, (par exemple
mettre en marche un appareil à partir d’une notice) et aux différentes aptitudes (écouter, lire, parler, écrire,
traduire, interpréter, reformuler). De la même manière, le résultat d’une tâche peut être langagier ou non,
ainsi, acheter un billet de train suppose de passer par un certain nombre d’activités langagières, mais le
résultat quant à lui ne sera pas de l’ordre du langagier. » (Bérard, 2009, p.39)
Chapitre 4 Bien entendu, en contexte de classe, les tâches proposées aux apprenants auront presque
Tâche et perspective toujours une dimension langagière. Mais il est important d’avoir conscience qu’une
actionnelle tâche intègre souvent des aspects langagiers et des aspects non langagiers, comme de
la manipulation par exemple, lorsque l’on fait une recherche ou que l’on écrit seul ou à
Page 58 deux sur un ordinateur.
Le deuxième point à retenir de ces définitions de la tâche concerne les paramètres
constitutifs de celle-ci : un résultat à atteindre en fonction d’un but ou d’un problème
à résoudre. Les didacticiens qui se sont depuis penchés sur cette notion ont pu ajouter
d’autres paramètres qui seront évoqués plus tard.
Un autre point important concerne l’extrême variabilité des tâches possibles, celles-ci
pouvant être simples ou extrêmement complexes. Et si une tâche est complexe, elle
nécessitera d’avoir recours à des tâches intermédiaires qui nécessiteront différentes acti-
vités langagières.
Types de tâches
Le chapitre 7 du Cadre consacré aux tâches et à leur rôle dans l’enseignement des lan-
gues présente notamment différents types de tâches (p. 121). On trouve ainsi des :
–«
tâches « cibles » « de répétition » ou « proches de la vie réelle » [...] choisies en fonction des besoins des
apprenants hors de la classe que ce soit dans les domaines personnel ou public en relation à des besoins
plus particulièrement professionnels ou éducationnels » (CECR, 2001, p. 121).
Il s’agit des tâches de jeu de rôle et de simulation typiques de l’approche communica-
tive qui peuvent renvoyer à des tâches ciblées liées à l’acquisition d’un acte de parole
comme « demander un renseignement », « commander un plat dans un restaurant »
ou des activités plus vastes comme « savoir négocier un contrat en français » dans le
cas d’étudiants en commerce.
– t âches pédagogiques communicatives [dans lesquelles] « les apprenants s’engagent dans un « faire-
semblant accepté volontairement » pour jouer le jeu de l’utilisation de la langue-cible dans des activités
centrées sur l’accès au sens […] » (CECR, 2001, p. 121).
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Ces tâches peuvent être éloignées de la vie réelle des apprenants et de leurs besoins
en dehors de la classe mais elles se fondent sur la communication dans la classe
considérée comme espace social à part entière. Cela signifie qu’elles doivent impli-
quer les apprenants dans une communication réelle avec les autres apprenants et
être pertinentes pour les apprenants dans la situation formelle d’apprentissage. Les
apprenants engagés en coopération dans la réalisation d’une tâche ne simulent pas
un événement communicatif, ils sont investis dans un événement communicatif qui a
du sens pour eux.
Deux types de tâches ayant a priori peu d’utilité face aux réalités quotidiennes sont :
• les activités ludiques (ex : le jeu du mensonge consistant à guider un camarade
dans un labyrinthe représenté sur une feuille de papier) ;
• les tâches d’écriture créatives qui sont des tâches stimulantes pour les apprenants,
leur permettant d’explorer les subtilités de la langue.
Le Guide pour les utilisateurs mentionne en outre les « tâches de précommunication
pédagogiques » « constituées d’exercices spécifiquement axés sur la manipulation
décontextualisée des formes. » (Trim, dir, 2002, p. 164).
Ce type de tâche renvoie en fait à la définition de l’exercice et l’emploi du terme « tâche »
pour des activités de ce type n’aide pas à une clarification des notions. Ainsi préfèrerons-
nous retenir et utiliser le terme « exercice » pour celles-ci, dans le cadre de ce cours. Un
exercice peut être ludique mais vise la maîtrise d’un aspect formel de la langue comme
la morphologie du démonstratif, les pronoms relatifs, l’emploi des temps du passé, etc.
La tâche n’exclut pas l’exercice mais dans une perspective actionnelle, l’exercice doit être
intégré à la tâche et au service de celle-ci. Il doit apporter des ressources linguistiques Chapitre 4
nécessaires à la réalisation de la tâche. Tâche et perspective
actionnelle
Faites l’activité 13 afin d’observer quels sont les types de tâches proposées par le manuel
Rond Point. Page 59
Faites l’activité 14 afin de vous interroger sur ce qu’est, selon vous, une « communication
réellement authentique » en classe de langue.
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langagières sont étroitement liées à d’autres activités non langagières, ce qui jusqu’à
présent n’était pas retenu dans l’enseignement. Pour autant, selon lui :
« Il ne s’agit pas de faire de l’« approche actionnelle » et d’une « centration sur la tâche » (comme naguère
sur « l’apprenant ») les piliers d’une méthodologie prétendument nouvelle » (Coste, 2009, p.16)
Il souligne que plusieurs approches par le passé ont porté des principes de la perspective
actionnelle. On peut citer principalement :
• Task based learning
Le concept de tâche n’est pas nouveau dans la didactique des langues : dès l’apparition
du communicatif, dans le domaine anglo-saxon, le concept de tâche était avancé pour
démarquer le communicatif des méthodologies précédentes et pour souligner la préé-
minence du sens sur la forme dans un faire social. L’approche actionnelle est née il y a
une quinzaine d’années avec la « task based approach » aux États-Unis. R. Ellis (2003) et
D. Nunan sont des représentants de cette approche. D. Nunan insiste, dans sa définition,
sur la focalisation des apprenants sur le sens :
“The communicative task [is] a piece of classroom work which involves learners in comprehending, manipu-
lating, producing or interacting in the target language while their attention is principally focused on
meaning rather than form. The task should also have a sense of completeness, being able to stand alone
as a communicative act in its own right.” (Nunan, 1989 : 10)32.
• La pédagogie du projet
Cette option méthodologique qui relève des méthodes actives est ancienne. Elle a été
préconisée au début du siècle dernier par de nombreux pédagogues : J. Dewey (États-
Unis, 1859-1952), A. Ferrière, C. Freinet (France, 1896-1966) entre autres. À travers cette
Chapitre 4 approche, il s’agit de susciter la motivation des élèves, de les impliquer dans des tâches
Tâche et perspective ayant du sens à leurs yeux et qui leur permettent de transférer leurs connaissances dans
actionnelle des situations extra-scolaires. Il s’agit de projets tels que la préparation d’un voyage sco-
laire, la rédaction d’un journal, un concours d’écriture, une représentation théâtrale, la
Page 60 préparation d’une interview. L’un des principes est qu’en réalisant diverses actions en vue
d’aboutir à un résultat final, les apprenants sont amenés à prendre seuls des initiatives
et à être acteurs de leur propre apprentissage.
La pédagogie de projet qui a toujours fait partie des pratiques scolaires n’a pas été très
exploitée par les publications pour le FLE de la période audiovisuelle et communicative,
si l’on excepte par exemple les unités « Projets » dans un manuel comme Panorama ou
quelques ouvrages spécifiques comme les simulations globales (cf. chapitre 2 de ce cours).
On peut souligner enfin que certains domaines d’enseignement du français comme le
français sur objectifs spécifiques ou certaines approches de l’enseignement/apprentis-
sage comme l’apprentissage des langues assisté par ordinateur exploitent les tâches
depuis plus longtemps que l’enseignement du FLE traditionnel. Le premier parce que
les tâches permettent de confronter les apprenants à des situations qu’ils rencontreront
dans leur contexte professionnel, le second grâce aux atouts d’Internet qui offre une
possibilité d’accès aisé à de multiples ressources authentiques ainsi que des potentialités
d’échanges variés permettant aux apprenants de sortir du contexte de la classe.
Dans son article, après avoir évoqué la pédagogie du projet, les méthodes actives, le
français sur objectifs spécifiques et même les simulations globales, D. Coste ajoute que :
« Même si la notion de tâche n’est ni centrale ni toujours thématisée dans ces courants méthodologiques
ou démarches pédagogiques, on perçoit bien des proximités, des continuités, y compris avec telle ou telle
variante des approches communicatives : conception de l’apprentissage reposant sur l’activité de l’appre-
nant, souci de motiver ce dernier en l’impliquant dans des activités qui aient un sens et qui importent à ses
32 Notre traduction : La tâche communicative [est] une unité de travail dans la classe qui implique les appre-
nants dans la compréhension, la manipulation, la production ou l’interaction en langue cible pendant que leur
attention se focalise principalement sur le sens et non sur la forme. Elle doit avoir un sens à part entière et
constituer un acte communicatif en soi.
8 1121 TG PA 00
yeux. À quoi on ajoutera le choix fréquent de se référer à des modèles d’apprentissage où la dimension
collective et l’inscription sociale, voire la co-construction aient toute leur place, où les acquis et l’expérience
antérieure des apprenants ne soient pas oblitérés, mais où interviennent aussi souvent la médiation d’un
autre acteur social (enseignant, adulte, parent, expert, natif, etc.). » (Coste, 2009, p. 16)
Ces quelques lignes de D. Coste et le rappel de certains courants et pratiques de classe
qui ont précédé l’approche actionnelle et qui étaient porteurs de nombreux principes
actuellement remis à l’honneur, valorisés, renforcés sont importants pour éviter de bas-
culer dans l’idée un peu simpliste selon laquelle une approche méthodologique efface
la précédente, se trouve être complètement nouvelle, etc.
On verra cependant que pour certains auteurs, comme C. Puren, qui adoptent une
conception très radicale de la tâche, la perspective actionnelle offre une approche véri-
tablement nouvelle en méthodologie des langues. Mais avant cela, nous allons nous
pencher sur le point de vue d’un autre didacticien célèbre qui se démarque en propo-
sant, toujours à partir du Cadre, une « approche par compétences », dans la lignée de
l’approche communicative.
33 Le guide pédagogique des différents niveaux d’Alors ? est téléchargeable gratuitement à partir du site de
Didier : http://www.editionsdidier.com/discipline/fle/
8 1121 TG PA 00
le principe fondateur de l’approche communicative qui est d’articuler les compétences
autour de leurs spécificités propres. Vous pourrez observer la concrétisation de cette
approche en consultant l’unité 4 de la méthode34. Vous constaterez que les auteurs ont
structuré les unités didactiques par activités langagières (ou compétences) : interaction
orale, réception orale, réception écrite, production écrite (la production orale continue
n’est pas proposée pour le niveau A1). En outre, chaque activité langagière est travaillée à
partir de supports spécifiques afin d’amener les apprenants à découvrir les caractéristiques
de tel ou tel genre de discours. Par exemple dans l’unité 4, le travail d’écoute s’effectue
à partir d’un enregistrement de titres d’informations à la radio tandis que l’interaction
orale est travaillée à partir d’un dialogue (enregistré) proposant une transaction commer-
ciale puisque l’objectif d’apprentissage visé est « acheter, demander des informations ».
Changements
Dans un de ses nombreux articles consacrés à la perspective actionnelle (FDLM n°347,
2006), C. Puren souligne les différents points par rapport auxquels approche communi-
cative et perspectives actionnelles se distinguent.
1. L’activité de référence de l’approche communicative (AC) était la simulation, où on
demandait à l’apprenant de faire comme s’il était un usager, de communiquer en
classe comme s’il était en train de communiquer en société. Ainsi, les objectifs d’ensei-
gnement/apprentissage étaient visés à travers des simulations de tâches communica-
tives que l’apprenant avait besoin de réaliser ou devrait réaliser dans les domaines
personnel, public ou professionnel. Ces activités revenaient parfois à inciter les appre-
nants à communiquer pour communiquer.
Chapitre 4
Tâche et perspective
Exemples
actionnelle • décliner son identité, épeler son nom, dire sa date de naissance… (domaine per-
sonnel ;
Page 62 • écrire des lettres de candidature, comprendre les règles de prudence et sécurité,
communiquer de manière appropriée avec un supérieur… (domaine professionnel) ;
• lire des pancartes et instructions, faire un achat… (domaine public).
À l’inverse, dans la perspective actionnelle (PA), on rapproche « apprentissage » et
« usage » (« apprenant » vs « usager ») ; l’apprenant est usager de la langue dans le
contexte de la classe et hors de la classe. Dans le cadre de la réalisation de tâches, les
apprenants doivent être amenés à déployer les mêmes processus communicatifs que
ceux du monde réel, même si c’est à travers des tâches distinctes de celles qu’un individu
peut avoir à accomplir en dehors de la classe.
2. « L’AC privilégiait les tâches langagières – et parmi celles-ci les seules tâches communicatives, d’où le nom
de cette approche. » (Puren, 2006, p. 37).
On affirme dans la PA que les tâches ne sont pas seulement langagières. Les tâches
communicatives, considérées comme une finalité de l’apprentissage, s’inscrivent dans
l’accomplissement d’une action plus vaste. La communication est au service de l’action
qui lui donne sens. Ainsi par exemple, le fait d’apprendre à se présenter correspond à
l’un des moyens nécessaires pour « faire connaissance ».
3. « L’agir de référence des AC était un agir sur l’autre par la langue » (Puren, 2006, p. 37), à travers la
notion d’acte de parole.
=> L’agir de référence du CECR est un agir avec l’autre.
C’est ce que C. Puren explique en ces termes dans un autre article :
« Il ne s’agit plus de communiquer avec l’autre (de s’informer et d’informer) mais d’agir avec l’autre en
langue étrangère. La langue n’est plus (ou plus seulement) un instrument de communication, mais un ins-
trument d’action sociale. » (Puren, 2004)
8 1121 TG PA 00
E. Rosen qui adopte le point de vue de C. Puren souligne que le CECR et la perspective
actionnelle auraient permis de passer d’une centration sur l’individu à une centration sur
le groupe. On observe ainsi selon elle :
« le passage d’un apprentissage individuel (que l’on peut associer à la centration sur l’apprenant, caracté-
ristique de l’approche communicative et qui s’exerce parfaitement lors des jeux de rôle et des simulations)
à un apprentissage collaboratif et solidaire misant sur un agir social et communicationnel (que l’on peut
associer, pour tenter le parallèle, à une centration sur le groupe qui trouve son expression dans la pédago-
gie du projet.) ». (Rosen, 2009, p. 8)
Ces affirmations peuvent paraître un peu excessives, néanmoins la notion de tâche au
sens de projet implique un travail collectif nourri par les interactions entre les individus.
En ce sens, C. Puren parle même de perspective « co-actionnelle » (faire ensemble) et
celle-ci s’inscrit, de son point de vue, dans l’idée d’un nouveau progrès de l’intégration
européenne : préparer des gens qui s’apprêtent à vivre et travailler avec des natifs de
langue-culture étrangère.
« Il s’agit désormais de former les citoyens de sociétés multilingues et multiculturelles capables de coha-
biter harmonieusement (et les classes de FLE/S en France sont des mini-sociétés de ce type), ainsi que des
étudiants et des professionnels capables de travailler avec d’autres dans la longue durée en langue-culture
étrangère. » (2009, p. 124).
Toujours selon C. Puren, le « nouvel agir d’apprentissage » peut se réaliser dans le « pro-
jet pédagogique » :
« le projet est désormais le nouvel agir social de référence, aussi bien dans les entreprises que dans les
administrations ; c’est pourquoi dans la perspective de l’agir social en didactique des langues-cultures, il
devient forcément le nouvel agir social de référence, ce qui doit au sein de l’unité didactique, lui donner
un autre statut que celui de simple prétexte à proposer des situations de communications simulée assurant
le réemploi final plus ou moins libre de ses contenus ». (2009, p. 126)
Dans la pédagogie du projet, l’accent est mis non seulement sur les résultats mais sur les Chapitre 4
moyens et les processus pour produire. Tâche et perspective
« […] au lieu d’apprendre d’abord en un temps séparé pour faire ensuite selon un modèle d’application, on actionnelle
pose que l’on apprend parce que l’on fait et par ce que l’on fait. » (Halté, in Richer, 2010, p. 40)
Page 63
À l’occasion d’un chat sur la perspective actionnelle organisé par le site francparler.org
avec C. Puren, ce dernier donne des exemples de projets qui peuvent être réalisés en
classe de langue.
« L’idée fondamentale est de faire réaliser par les apprenants une action qui ait un sens pour leur collec-
tivité et/ou pour la société extérieure. Organiser une sortie commune, rédiger un livret à l’intention des
futurs élèves de l’école, organiser un voyage en commun. Mais ça peut être très ponctuel et adapté à la
première heure de classe avec des débutants, comme à la fin de l’Unité 1 de Version Originale 1 (Difusion,
2009) : rédiger et accrocher des affiches avec la liste des élèves et les mots-clés de la classe. Il faudra sans
doute dans ce cas laisser une place à la L1. » (Puren, 14 avril 2010, chat sur francparler.org)
Ainsi, selon C. Puren, l’approche actionnelle apporte un renouveau dans la méthodologie
d’enseignement/apprentissage des langues pourvu que la notion de tâche recouvre celle
de projet35 et que l’enseignement/apprentissage s’organise à partir de projets collectifs,
c’est-à-dire qu’ils soient retenus « comme principe d’unité de chaque unité didactique »
(Puren, 2009, p. 120). Cet auteur considère Rond-Point comme un manuel représentatif de
cette approche. Nous vous invitons vivement à consulter cette méthode si vous ne l’avez
déjà fait. Si vous ne disposez pas d’un exemplaire papier, vous pourrez consulter une unité
disponible en ligne sur le site de l’éditeur36. Vous pouvez également lire un extrait de la
table des matières37 qui remplace le tableau de contenu. La présentation de chaque unité
commence par l’annonce de la tâche à réaliser (exemple unité 3 : « nous allons élaborer
des vacances en groupe ») suivie de la liste des contenus lexicaux et morphosyntaxiques
étudiés et des objectifs fonctionnels visés. Ainsi, toutes les activités de l’unité sont censées
être orientées par et vers la réalisation de la tâche finale qui doit amener les apprenants à
mobiliser toutes les ressources travaillées dans les rubriques précédentes.
8 1121 TG PA 00
Afin d’affiner votre compréhension de la perspective actionnelle et de ses options
méthodologiques par rapport à l’approche communicative, lisez le tableau synthétique
proposé par E. Rosen (2009)38.
S’entraîner
Activité 13
La méthode Rond-Point revendique d’être
« la première à appliquer la perspective actionnelle retenue par le Cadre européen commun de réfé-
rence pour les langues (CECR). Son objectif est de favoriser une acquisition de la langue qui s’appuie sur
d’authentiques processus de communication en proposant une séquence didactique basée sur les tâches
communicatives » (Rond-Point 1, Avant-propos, 2004)
Chapitre 4 Voici les sous-titres des unités didactiques de la méthode Rond-Point 1 correspondant aux
Tâche et perspective
tâches à réaliser dans chaque unité :
actionnelle 1. N ous allons avoir un premier contact avec la langue française et les pays où l’on parle
français et nous allons mieux connaître les personnes qui suivent ce cours.
Page 64
2. Nous allons placer à table les invités à un repas de mariage.
3. Nous allons organiser des vacances en groupe.
4. Nous allons élaborer un guide pour mieux vivre.
5. Nous allons sélectionner des candidats pour quatre emplois.
6. Nous allons organiser une fête d’anniversaire et nous allons chercher des cadeaux pour
nos camarades de classe
7. Nous allons faire un recueil de cuisine avec nos meilleures recettes.
8. Nous allons mettre au point les détails d’un voyage.
9. Nous allons discuter les problèmes d’une ville et proposer des solutions en établissant
une liste de priorités.
Que pensez-vous des tâches de Rond-Point ? S’apparentent-elles à des tâches que les
apprenants auront à réaliser en dehors de la classe ? S’agit-il de tâches de simulation ?
Pouvez-vous distinguer deux types de tâches parmi elles ?
Activité 14
Que pensez-vous de cette affirmation extraite de l’avant-propos du manuel Rond-Point
1 : « La mise en pratique de la perspective actionnelle, telle que nous l’avons conçue
pour Rond-Point, entraine des conséquences importantes pour la classe vu que la com-
munication qui s’établit au cours de l’exécution des tâches est enfin authentique. »
Que signifie « communication authentique » selon vous ? Que pensez-vous de l’emploi
du terme « enfin » ?
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Activité 15
Vous allez observer dans 2 manuels (Alors ? 1 et Alter Ego 1), la place faite à la tâche et
ce que recouvre cette notion. Pour cela, lisez les avant-propos du livre de l’élève39 et les
unités figurant dans le fascicule « Documents »40.
Questions pour vous guider dans l’observation :
• Les auteurs font-ils référence à l’approche actionnelle dans l’avant-propos ? De
quelle façon ?
• Le manuel propose-t-il des tâches ? De quel type de tâche s’agit-il ? Sont-elles du
même type que les tâches proposées par Rond-Point ?
• Quelle place ont-elles dans l’unité didactique ?
• Quelles sont les modalités de travail proposées pour la réalisation des tâches ?
Voir fascicule autocorrection.
Retenir
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Aller plus loin
Bibliographie
Beacco, J.-C. (2008), « Tâches ou compétences ? », Le français dans le monde n° 357,
Paris, mai-juin 2008, p. 33-35.
Bérard, E. (2009), « Les tâches dans l’enseignement du FLE : rapport à la réalité et dimen-
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Coste, D. (2009), « Tâche, progression, curriculum », Le français dans le monde
Recherches et applications n° 45, p. 15-24.
Mangenot, F., Penilla, F. (2009), « Internet, tâches et vie réelle », Le français dans le
monde Recherches et applications n° 45, p. 82-90.
Nunan, D. (1989), Designing Tasks for the Communicative Classroom, Cambridge
University Press.
Puren, C. (2004), « L’évolution historique des approches en didactique des langues-
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l’Association pour la Diffusion de l’Allemand en France (ADEAF), École Supérieure de
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français dans le monde n° 347, p. 37-40.
Chapitre 4
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conception des manuels de langue », in P. Liria et L. Lacan, L’approche actionnelle
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L. Lacan, L’approche actionnelle dans l’enseignement des langues, Barcelone,
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Sitographie
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« Des projets pour la classe », dossier du francparler.org : http://www.francparler-oif.
org
ite de l’éditeur Difusion pour consulter des extraits de la méthode Rond Point :
S
http://www.difusion.com
ite de Didier pour consulter des extraits d’Alors ? : http://www.editionsdidier.com/
S
discipline/fle
Site d’Hachette pour consulter des extraits d’Alter ego : http://www.fle.hachette-
livre.fr
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Chapitre 5
Utiliser un manuel de Fle
Plan
Les outils de présentation
Les guides pédagogiques
Les ressources numériques complémentaires
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V Activité 16 (p. 73)
Tableaux de contenus et modes d’emploi
La très grande majorité des manuels propose un tableau de contenus en début ou, plus
rarement, en fin d’ouvrage mais l’organisation de ces tableaux n’est pas standardisée.
Elle est importante à observer car elle donne des informations sur le découpage du maté-
riau langagier, la délimitation et la dénomination des contenus, leur regroupement et
leur ordre de présentation (la progression). Une précision importante : la structuration
du tableau de contenus ne correspond pas à la structuration des unités.
Faites l’activité n°17 afin de découvrir quelles sont les rubriques et les items utilisées
dans les tableaux de contenus de trois manuels et ce qu’ils peuvent nous apprendre sur
certains choix des auteurs.
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Orientations méthodologiques des auteurs
Les principes méthodologiques des concepteurs de manuels sont présentés tout au long
des guides pédagogiques. S’ils sont tout d’abord exposés dans leurs grandes lignes dans
l’avant-propos, comme cela a été vu plus haut, la mise en application ou non de ces prin-
cipes va se retrouver dans la description du déroulement des activités et dans les conseils
donnés aux enseignants. Ainsi, par exemple, les auteurs de Latitudes 1 affirment dans leur
avant-propos (p. 3) pratiquer une « pédagogie de la découverte », qu’ils définissent ainsi :
« Le travail s’effectue sur l’observation, la réflexion, le réemploi, la systématisation et la production.
L’apprenant est toujours actif, découvre lui-même les règles de fonctionnement de la langue et se sent
ainsi valorisé dans son apprentissage. »
Ce processus qui renvoie à une approche inductive de la langue est certes mis en pra-
tique dans le déroulement des activités de Latitudes, mais parfois, notamment en ce qui
concerne la grammaire, les phases de découverte et de réflexion peuvent être limitées
par le fait que le tableau de systématisation, qui n’est censé être lu que plus tard par
les apprenants, se trouve juste à côté du corpus d’observation. Il faut donc prendre de
la distance avec ce qui est annoncé par les auteurs dans les avant-propos ou les guides
pédagogiques et aller voir dans les activités elles-mêmes si les principes annoncés sont
réellement mis en œuvre.
Les guides pédagogiques sont plus ou moins longs. Ainsi, leur nombre de pages peut
varier d’une centaine de pages (Ici, Rond-Point…) à deux cents (Scénario, Latitudes…).
Dans les guides pédagogiques, certains auteurs choisissent de mettre l’accent sur des
choix méthodologiques et pédagogiques particuliers. Ainsi, par exemple, dans l’avant-
propos du guide pédagogique d’Ici 1, les auteurs présentent de façon détaillée des
modalités de travail et d’interactions langagières diversifiées (travail individuel, en Chapitre 5
binôme, en groupe classe et en petit groupe) en précisant dans quels cas utiliser tel ou Utiliser un manuel
tel dispositif en fonction de l’activité et de l’objectif recherché. Nous vous invitons vive- de Fle
ment à lire cette présentation, intéressante pour tout enseignant en formation, quelle
que soit la méthode qu’il sera amené à utiliser par la suite. En effet, ces principes sont Page 69
valables, non seulement pour travailler avec le manuel Ici mais pour prendre conscience
des différentes modalités d’organisation des activités de classe43.
Autre exemple : pour les enseignants qui parlent la langue maternelle des apprenants, le
guide pédagogique de Campus 1 propose au début de l’ouvrage une page « Enseigner
sans utiliser la langue maternelle » (p. 10) qui liste « Quelques règles simples » à suivre
pour réussir une classe « tout en français » : par exemple « expliquer les mots et les
formes grammaticales en utilisant les mots déjà connus, le dessin, le mime, les mimiques,
la gestuelle et surtout les connaissances générales de l’étudiant. »
Dans le guide pédagogique de Tempo 2 (rubrique « Conseils… Suggestions…
Remarques… ») les auteurs expliquent de façon très claire la façon dont ils envisagent
la correction des activités :
« Les corrections sont des moments importants de la classe de langue s’ils favorisent les échanges entre
élèves et s’ils permettent d’expliquer précisément la façon dont ils ont compris les documents de base. La
classe devient alors un lieu de communication réelle. Il est donc important que vous ne donniez pas tout
de suite les réponses mais que vous gériez les interactions entre élèves dans la confrontation de leurs hypo-
thèses. » (Tempo 2, guide pédagogique, p. 128)
Enfin, le guide pédagogique de Studio 100 niveau 2 contient une rubrique « Point for-
mation » portant sur des « questions liées à la grammaire, au lexique, à l’évaluation, à
la communication, et de manière générale, à toutes les options pédagogiques adoptées
par Studio » (p. 5). On y trouve par exemple un point sur « Utiliser la chanson » (p. 108)
ou encore « Gérer une activité de production orale » (p. 112).
Ainsi, les guides pédagogiques peuvent être, notamment pour des enseignants novices,
des outils de formation et aider à une pratique réflexive de l’enseignement.
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Conduite des activités et activités complémentaires
Outre le corrigé des différentes activités et les principes méthodologiques des auteurs, le
guide pédagogique présente, de façon plus ou moins détaillée, la façon de conduire des
activités et d’exploiter des documents. Il propose souvent de nombreuses idées d’activités
à faire en amont ou en aval de l’activité elle-même. C’est le cas du guide pédagogique de
Connexions 1. Par exemple, l’activité 21 (p. 36) du livre de l’élève a pour consigne :
« Écoutez ces personnes et complétez le tableau. ». Et dans le guide pédagogique, les auteurs proposent
plusieurs activités préparatoires à l’écoute (p. 51) :
faire observer les logos des chaînes de télévision françaises présents sur la page, demander
aux apprenants s’ils aiment regarder la télévision et quels types d’émissions, faire lire
le tableau « À la télévision » pour découvrir les différents types d’émission. Ce n’est
qu’après ces différentes étapes qu’il est proposé de passer à l’écoute du document et
donc à l’activité 21.
Dans certains cas, la consigne d’une activité peut ne pas être donnée du tout dans le
livre de l’élève et seule la lecture du guide pédagogique peut permettre à l’enseignant
de savoir quelle est l’activité à proposer aux apprenants à partir d’un document du livre.
Faites l’activité n°18 pour réfléchir aux activités pédagogiques possibles à partir d’un
document donné sans consigne dans un manuel.
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L’activité en ligne, qui est aussi une activité à faire en groupe, propose aux apprenants
de chercher sur Internet des recettes de plats pouvant convenir à des personnes ayant
des contraintes ou des préférences alimentaires (végétarienne, diabétique, préférant la
cuisine traditionnelle, etc.). Là encore, il s’agit d’une activité d’enrichissement du lexique
et de découverte culturelle. Des liens sont fournis à l’enseignant pour l’orienter vers des
sites intéressants.
Apport de contenus
Les guides pédagogiques fournissent également des contenus complémentaires de diffé-
rentes natures : des contenus en termes de savoirs dans les domaines lexical, grammati-
cal, culturel…, des activités complémentaires et des tests pour l’évaluation.
Le guide pédagogique de Campus 1, par exemple, propose de petits encadrés sur un
point grammatical (la conjugaison pronominale, la place de l’adjectif) ou culturel (les
rythmes de la journée en France, la télévision) traité dans la leçon. L’encadré grammatical
apporte un plus par rapport au tableau grammatical déjà présent dans le livre de l’élève
dans la mesure où il fournit des conseils à l’enseignant sur la manière de présenter le
point grammatical. Par exemple, au sujet de l’article partitif (p. 79), les auteurs écrivent :
« On parviendra à conceptualiser le sens de du, de l’, de la en l’opposant :
1) à la pluralité
j’achète de la bière / des bouteilles de bière
2) à l’objet singulier
je bois du café / un café
Chapitre 5
3) à la vision abstraite (et non quantitative) de la chose Utiliser un manuel
j‘aime le café / je bois du café » de Fle
Un autre exemple, tiré du guide pédagogique d’Alter Ego 1 (p. 34), montre la précision Page 71
avec laquelle le guide pédagogique peut guider l’enseignant dans la manière de procé-
der pour expliquer un mot :
« Si l’explication du mot « rêve » semble difficile, il peut être utile de s’appuyer sur la
notion opposée, « réalité » (transparent dans beaucoup de langues, notamment en
anglais, connu par beaucoup d’apprenants). Par exemple : « La réalité : je ne connais pas
Paris (ou l’Egypte, la Grèce…) ; mon rêve ? Connaître Paris/l’Egypte/la Grèce… » »
Les guides pédagogiques donnent aussi des informations culturelles qui sont susceptibles
de manquer à un enseignant non francophone (mais pas seulement !) et qui, intervenant
dans un contexte hétéroglotte et ne disposant pas d’Internet, ne pourrait pas trouver
immédiatement ces informations. Ainsi, le guide pédagogique de Connexions 1 propose
un encadré « i » qui donne des informations culturelles.
Faites l’activité n°19 afin de vous mettre dans la peau d’un concepteur de manuel qui doit
sélectionner des informations culturelles à fournir aux enseignants utilisateurs du manuel.
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Les ressources numériques complémentaires
De plus en plus d’éditeurs proposent des ressources numériques complémentaires aux
méthodes papier.
Les sites compagnons existent depuis l’apparition d’Internet ; ils proposent des activités
gratuites et en libre accès pour compléter les méthodes. L’avantage est qu’ils sont « prêts
à l’emploi » pour les enseignants et qu’ils sont accessibles partout, dans un laboratoire
de langue comme chez soi, ce qui permet de faire travailler certains apprenants de façon
individuelle et autonome sur telle ou telle activité pendant la classe en fonction de leurs
besoins et permet même aux apprenants de travailler de leur propre initiative sur cer-
tains exercices en dehors de la classe.
On peut citer comme exemple la méthode Accord (2001)46, qui propose sur son site
compagnon des exercices de compréhension écrite, de grammaire et de lexique. Ces
exercices sont autocorrectifs (évaluation immédiate) et ne nécessitent pas d’intervention
de l’enseignant. Ils bénéficient en plus d’une présentation bilingue (français/anglais) et
même d’une version japonaise.
Faites l’activité n° 20 afin de repérer les différents types d’activités proposés par trois sites
compagnons : Reflets (Hachette), Tout va bien (CLE International) et Latitudes (Didier).
46 http://www.didieraccord.com/
47 http://versionoriginale.emdl.fr/
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Outre les sites compagnons, de plus en plus d’éditeurs proposent des manuels numériques
qui peuvent être utilisés en complément ou en remplacement de la méthode papier et qui
répondent à une nouvelle demande croissante de produits adaptés aux salles équipées
avec des vidéoprojecteurs et/ou des tableaux blancs interactifs (TBI). Ce sont des outils le
plus souvent payants dont on peut trouver des extraits ou des démos sur Internet48.
Pour terminer, il faut indiquer qu’il existe des méthodes proposées uniquement en ligne.
On peut citer par exemple « Première classe », sur le site de TV5, « Tapis volant 1 et 2 »
créé en Australie, ou encore « Ma France », cours de français de la BBC basé sur des vidéos.
S’entraîner
Activité 16
Relevez les principaux points qui sont abordés à la fois dans l’avant-propos d’Alors ? 149,
d’Alter Ego 150 et d’Echo 151 et pointez ensuite les questions spécifiques évoquées par
l’un ou l’autre des avant-propos.
Activité 17
À partir des tableaux de contenus des manuels Alors 152 et Alter Ego 153 et Latitudes 154
relevez les entrées communes à tous les manuels ou celles qui se rapprochent bien qu’uti-
lisant une terminologie différente. Notez également les entrées qui n’existent que dans
l’un ou l’autre manuel. À partir de l’observation de ces entrées et des contenus proposés
Chapitre 5
pour chaque catégorie, faites des hypothèses sur les choix méthodologiques des auteurs
Utiliser un manuel
et sur les compétences qu’ils semblent vouloir mettre en avant. de Fle
Activité 18 Page 73
Que proposeriez-vous comme activités à partir de la page pêle-mêle du manuel A propos
A2 (dossier 1 « Au fil du temps »)55 ? Comparez ensuite avec celles proposées dans le
guide pédagogique en consultant le document 2956.
(Activité de renforcement personnel, pas de corrigé prévu)
Activité 19
Lisez la double-page « Civilisation » intitulée « Les jeux des Français » du manuel
Connexions 157. À votre avis, quelles connaissances culturelles pourraient manquer à un
enseignant, non francophone en particulier, souhaitant utiliser cette double page avec
sa classe ? Comparez ensuite vos réponses avec les informations données dans le guide
pédagogique58.
(Activité de renforcement personnel, pas de corrigé prévu)
48 Vous pouvez visionner par exemple une présentation des ressources numériques pour le TBI de la méthode
Alex et Zoé (CLE international) sur Youtube en tapant : TBI CLE FLE.
49 Fascicule « Documents », document 19, p. 65
50 Fascicule « Documents », document 20, p. 67
51 Fascicule « Documents », document 21, p. 69
52 Fascicule « Documents », document 22, p. 70
53 Fascicule « Documents », document 23, p. 71
54 Fascicule « Documents », document 24, p. 75
55 Fascicule « Documents », document 28, p. 83
56 Fascicule « Documents », document 29, p. 84
57 Fascicule « Documents », document 32, p. 89
58 Fascicule « Documents », document 33, p. 91
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Activité 20
Sur Internet, repérez les différents types d’activités proposés par trois sites compagnons :
Reflets (Hachette)59, Tout va bien (CLE International)60 et Latitudes (Didier)61.
Voir fascicule autocorrection.
Retenir
Afin de prendre connaissance du contenu d’un manuel, il est utile de lire le tableau
de contenus, qui sera bien sûr un document de référence lors de son utilisation,
mais qui peut également être consulté lors du choix du manuel. On y découvre les
choix des auteurs concernant le découpage du matériau langagier à apprendre par
les apprenants, les compétences qui peuvent être privilégiées et l’ordre (donc la
progression) dans la présentation des contenus.
Outre le corrigé des activités proposées dans le livre de l’élève, les guides pédago-
giques présentent les conceptions méthodologiques et pédagogiques des auteurs
et peuvent constituer de précieux outils de formation pour les enseignants. Ils com-
prennent également des aides à la conduite des activités, des propositions d’activi-
tés complémentaires ainsi que des apports de contenus linguistiques et/ou culturels.
De nombreuses méthodes sont accompagnées de ressources numériques complé-
mentaires en ligne. Les sites compagnons proposent essentiellement des exercices
Chapitre 5 autocorrectifs. Il faut souligner l’originalité du site compagnon de Version originale
Utiliser un manuel qui propose des tâches ouvertes à publier en ligne.
de Fle
Même si les auteurs affirment un certain nombre de principes méthodologiques et
Page 74 pédagogiques dans l’avant-propos du livre de l’élève et dans le guide pédagogique,
il est important de ne pas toujours prendre ces affirmations pour « argent comp-
tant » et d’être capable d’adopter un point de vue critique et distancié par rapport
à ces affirmations, parfois dues à des contraintes éditoriales.
59 http://www.hachettefle.fr
Cherchez la méthode Reflets et cliquez sur « Site internet de la collection ».
60 http://www.cle-inter.com/sites-compagnons/toutvabien.html
61 http://www.didierlatitudes.com/
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Chapitre 6
Construction d’un manuel :
progression et unité didactique
Plan
La progression
L’unité didactique
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Découvrir
La progression
La progression, qui est « controversée mais incontournable, insaisissable mais indis-
pensable » selon S. Borg (2001), est une notion dont on ne peut se passer lorsque l’on
veut construire un cours en tant qu’enseignant ou concevoir un manuel en tant que
concepteur. Pour commencer, il importe de distinguer les progressions (ou progrès) de
l’apprentissage qui sont propres à chaque apprenant et les progressions d’enseignement
qui correspondent aux stratégies mises en place par les enseignants et les concepteurs
de manuel, notamment en ce qui concerne l’ordre des faits langagiers présentés, pour
atteindre les objectifs visés. Tout ne peut pas être enseigné en même temps (cf. Puren
ci-dessus), les faits linguistiques sont donc présentés dans un certain ordre, dans le sens
d’un accroissement.
« Le concept de progression est resté traditionnellement très important jusqu’aux méthodologies audio-
orale et aux théories SGAV. La conception qui prévalait peut être qualifiée de linéaire parce qu’on tentait
d’étager les items selon plusieurs axes : du facile au difficile, du semblable au différent, du régulier à l’irré-
gulier, de l’utile à l’accessoire. ». (Cuq, Gruca, 2005, p. 193)
Dans la méthodologie traditionnelle où primait avant tout une progression allant du
plus simple au plus compliqué, on traitait par exemple des temps simples avant les temps
composés, de l’indicatif avant le subjonctif, des articles définis avant les articles partitifs,
etc. De la même façon, on traitait de la vie quotidienne avant d’aborder l’expression des
sentiments ou des idées. Puis, avec la méthodologie SGAV, la progression a été établie
Chapitre 6 sur le critère de fréquence des mots, les mots les plus fréquents s’enseignant au niveau 1.
Construction d’un
manuel : progression Par la suite, bon nombre de principes de l’approche communicative comme l’idée selon
et unité didactique laquelle l’apprenant doit lui-même construire ses savoirs, la prédominance des objectifs
fonctionnels sur les objectifs linguistiques et l’introduction des documents authentiques
Page 76 remettent complètement en question l’idée de progression, ou en tout cas de progres-
sion linéaire. Cette remise en cause est particulièrement illustrée par la méthode Archipel
(1982), l’une des premières de l’approche communicative. Celle-ci met en œuvre pour la
première fois une organisation modulaire, souple et non linéaire. Ainsi, dans ce manuel,
hormis les deux premières unités, l’enseignant n’est pas tenu de respecter l’ordre des
dossiers, pas plus qu’il n’est tenu d’épuiser les contenus d’une unité. Avec Archipel les
outils linguistiques sont subordonnés aux objectifs notionnels-fonctionnels :
« ce qui met partiellement en cause le principe de progression linguistique graduée ; ce principe est
d’autant plus malmené que de nombreux documents authentiques sont introduits et qu’il est difficile de
concilier progression et authenticité » (cours de Marie-Laure Chalaron).
Cependant, cette méthode a fait exception et dans les manuels issus de l’approche
communicative comme dans les manuels plus récents, c’est une progression en spirale
(on revient sur les points abordés tout au long de la méthode en les approfondissant)
qui a été privilégiée. C’est le cas par exemple d’Alter Ego (2006). Ses auteurs expliquent
dans l’avant-propos que : « Les principaux contenus communicatifs et linguistiques sont
travaillés et enrichis de manière progressive, dans différents contextes et thématiques. »
(Alter Ego, p. 7). Cette organisation spiralaire est visible dans le tableau des contenus62.
Ainsi, l’objectif communicatif « Se présenter (1) » est abordé dans le dossier 0 puis dans
le dossier 1 (« Se présenter (2) » « Indiquer ses goûts (1) ») et enfin dans le dossier 3 sous
l’intitulé « Parler de ses goûts et de ses centres d’intérêt (2 ) ».
Les objectifs grammaticaux obéissent également à cette règle de reprise. Ainsi, la place
des adjectifs qualificatifs, par exemple, est d’abord vue dans le dossier 6 avec les adjectifs
pour caractériser un lieu (p. 104). Il est simplement demandé aux apprenants de remar-
quer que « les adjectifs qualificatifs sont avant ou après le nom ». Ce point est repris
au dossier 8 (p. 139) avec d’autres adjectifs et notamment une petite liste d’adjectifs
(« beau, nouveau, petit et bon ») se plaçant avant le nom.
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On retrouve ce principe pour le travail de certains points de phonétique, comme par
exemple l’« intonation de la question » qui est vue une première fois dans le dossier 2
(p. 39), puis reprise dans le dossier 4 (p. 75) sous l’intitulé « le questionnement » dans le
tableau des contenus.
Dans l’avant-propos de Latitudes (2008), les auteurs annoncent que
« les points abordés sont traités dans leur totalité, afin de respecter au mieux les processus d’apprentissage.
Chaque point de langue est ainsi travaillé en profondeur, de la présentation jusqu’à la phase de fixation
par les apprenants ». (Latitudes, p 3).
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Les apprenants japonais, par exemple, se sentent à l’aise avec cette méthode qui est très
rassurante : il y a peu de mots nouveaux par leçon, ils peuvent donc tout comprendre ;
les points de grammaire sont introduits de manière très progressive et repris tout au
long de la méthode, ainsi l’apprenant ne se sent-il pas « noyé » sous une avalanche
d’informations.
À l’inverse, certaines méthodes proposent une progression beaucoup trop rapide
pour des apprenants dont la langue première est éloignée de la langue cible. C’est un
reproche souvent adressé au manuel Alter Ego, qu’il est très difficile d’utiliser avec de
vrais débutants de langue maternelle éloignée du français.
L’unité didactique64
Cette partie sur la construction et la cohérence des unités didactiques dans les manuels a
pour objectif de renforcer votre connaissance du fonctionnement des manuels bien sûr,
mais aussi de vous amener à prendre conscience des critères à prendre en compte pour
concevoir des séquences pédagogiques (entendues au sens d’unités didactiques65) pour
un cours de FLE. En effet, nombre d’enseignants sont amenés à concevoir leurs séquences
mais pour cela, un certain nombre de principes sont à respecter.
L’unité didactique correspond au regroupement de différents contenus par des concep-
teurs de manuel ou par un enseignant préparant son cours. Elle est construite autour
d’objectifs d’apprentissage66 et confronte l’apprenant à des données sélectionnées en
lui proposant des activités et des exercices langagiers ordonnés. Une unité didactique
Chapitre 6 constitue un parcours d’apprentissage censé reposer sur des principes de structuration
Construction d’un et de cohérence.
manuel : progression
et unité didactique Étudier une unité didactique doit donc inviter à comprendre quelle est la logique qui
sous-tend la sélection des données, leur organisation dans tel ou tel ordre, leur présen-
Page 78 tation sous telle ou telle forme (choix des documents, de leur présentation et de leur
exploitation). En général, la/les logique(s) d’organisation sont exposées au début du
manuel, dans les tableaux de contenus et/ou dans le mode d’emploi présent dans la
plupart des manuels récents.
Après avoir abordé les modalités de découpage des manuels, nous étudierons la
construction des unités didactiques en montrant ce qui fait leur cohérence et la façon
dont elles peuvent s’organiser (structuration et progression interne).
64 Cette partie a été rédigée par Violaine Bigot (Université Paris 3) et Charlotte Dejean-Thircuir dans le cadre
d’un cours de master 1 pour l’université d’Angers.
65 Comme le souligne J. Courtillon (2003, p. 32) : « Ces étapes ne se confondront pas avec les leçons dont la
durée (de 30 minutes à trois heures selon le contexte) ne permet pas d’accomplir un parcours d’apprentissage
mais simplement de procéder à quelques activités jalonnant ce parcours ».
66 Il est d’ailleurs intéressant d’observer comment et où ces objectifs sont présentés aux apprenants dans une
unité.
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Comme le montre le tableau ci-dessous, il existe une très grande variabilité dans les
modes de découpage et la manière de nommer les différentes parties d’un manuel.
Chapitre 6
V Activité 21 (p. 84) Construction d’un
manuel : progression
et unité didactique
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Exemple : Libre échange 2, 1991 (unité 3, p. 73).
Titre de l’unité : « Famille je vous aime »
Objectifs fonctionnels : expression des points de vue, désirs, refus
Objectifs grammaticaux : verbes pronominaux, subjonctif, plus-que-parfait.
Civilisation : les nouveaux parents, les relations intergénérationnelles
Les poèmes de la rubrique « Amusement sonore » :
Ainsi, même si l’unité 3 de Libre échange 2 n’est pas monothématique, elle a une cohé-
rence thématique forte qui constitue son fil rouge en reliant entre elles des activités qui,
sinon, poursuivent des objectifs très éloignés et difficiles à articuler.
Le développement d’une thématique sur l’ensemble de l’unité permet en outre une meil-
leure intégration des objectifs culturels qui ne sont plus confinés à des pages « Culture »
plus ou moins isolées. On peut même trouver des activités de comparaison interculturelle
ou plus largement de réflexion d’anthropologie culturelle à partir de supports proposés
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pour des activités plus langagières, comme par exemple les proverbes exploités pour un
travail prosodique dans l’unité 3 de Libre échange 2 (« Il faut bien que jeunesse se passe
! Grands enfants Grands tourments ! ») ou l’article « Familles, je vous aime ! » avec la
présentation de la vie d’une famille monoparentale, donné en compréhension écrite en
introduction de l’Unité 10 de Café Crème.
Enfin, cette organisation en « thématiques » permet d’articuler de manière privilégiée
certains thèmes avec certains contenus fonctionnels et grammaticaux. On trouve dans de
très nombreux manuels une unité où le travail sur les habitudes alimentaires s’articule
avec un travail sur le partitif. De même, le travail sur le passé composé (et éventuellement
l’imparfait) est très souvent associé aux « récits de vie », « biographies de personnages
célèbres », « CV » (Unité 9 de Café Crème intitulée « La vie professionnelle », Dossier 9
de Espaces 1 « Qu’avez-vous fait », Unité 22 de Escales « Finalement j’ai choisi »).
Mais parfois, la cohérence thématique est totalement abandonnée pour certaines acti-
vités. Cela peut être le cas notamment (mais pas forcément) lorsqu’il y a des activités de
grammaire conçues, comme les exercices structuraux, hors de toute situation de commu-
nication. Les activités de phonétique sont aussi souvent déconnectées de la thématique
de l’unité.
Certains manuels privilégient une autre logique, fonctionnelle et non thématique, pour
fonder la cohérence des unités. C’est le cas du manuel Panorama qui organise ses uni-
tés principalement autour d’objectifs fonctionnels. Dans l’unité 5 de Panorama 1 par
exemple, c’est l’expression du futur et la formulation de projets (d’études, profession-
nels, personnels) qui donne une cohérence à la majorité des documents supports et des
activités. Par contre, les pages « civilisation » sont consacrées au système politique fran- Chapitre 6
çais et donc complètement déconnectées du reste de l’unité. Le manuel Espaces place Construction d’un
manuel : progression
aussi la notion de « situation de communication » et de « fonction de communication » et unité didactique
au cœur de sa logique. Ainsi, l’unité 9 de Espaces 1 est-elle centrée sur des récits de vie.
Plusieurs des supports proposés sont des récits de vie ou des biographies de personnes Page 81
célèbres issues de différents domaines de la vie publique (Coco Chanel, Christian Lacroix,
Christian Dior, le Commandant Cousteau) et l’activité de production écrite finale invite
à rédiger un autre récit de vie. Même si la mode constitue une thématique importante
de l’unité, elle n’en constitue pas le fil rouge ; l’unité est gouvernée par une logique
fonctionnelle et communicative.
Pour les manuels qui revendiquent une approche actionnelle et qui introduisent des
tâches ou fondent la construction des unités sur une tâche finale à réaliser (cf. Rond-
Point), il faut se poser également la question de ce qui constitue la cohérence principale
de l’unité. La réponse n’est pas toujours simple, ni toujours celle donnée par les auteurs
dans l’avant-propos ou le livre du professeur. On voit ainsi souvent, dans les unités de
manuels mettant en œuvre une démarche actionnelle, d’autres logiques : travail autour
de situations de communication dans une logique fonctionnelle, fil rouge thématique,
qui parfois devient la principale justification au choix de tel support plutôt que de tel
autre, etc.
8 1121 TG PA 00
situation d’échange de type commercial par exemple, il est logique d’avoir fait travail-
ler les apprenants sur la compréhension du refus et de l’hésitation et sur la capacité à
reformuler une demande avant de proposer comme activité de production finale un jeu
de rôle à exécuter sur la base d’un canevas analogue à celui des situations étudiées. De
même, J. Courtillon explique qu’un apprenant :
« n’apprendra pas à faire un exposé ou à écrire un texte sans avoir préalablement repéré les formulations
et l’organisation des arguments dans des discours authentiques s’adressant à des publics définis. Le dis-
cours, aussi bien que la langue, s’apprend en situation et non à partir de listes de mots ou de formules. »
(Courtillon, 2003, p. 34)
En examinant les unités de certains manuels, vous pourrez constater que les apprenants
ne disposent pas toujours des outils linguistiques ou des modèles discursifs nécessaires à
l’accomplissement de telle ou telle activité ou tâche de production.
Par exemple, dans l’unité 6 de la méthode Rond-Point 2, la tâche ciblée est l’organisation
et la participation à un débat ; l’objectif est donc de faire travailler les apprenants sur
l’argumentation et sur le genre discursif « débat ». Mais l’un des supports sonores est un
enregistrement d’un débat artificiel, dépourvu des caractéristiques de la langue parlée :
pas d’hésitation ni de reprise, pas d’interruption entre les locuteurs, les invités parlent
chacun à leur tour, sans s’interrompre et sans intonation expressive. Par ailleurs, il n’y a
pas de travail sur la variation et les registres de langue, toutes les personnes participant
au débat enregistré s’expriment de la même façon. Pourtant, les documents sonores,
même s’ils sont fabriqués, peuvent reproduire certaines caractéristiques d’un échange
authentique, intégrer les marqueurs spécifiques du discours oral et certaines variations
sociolinguistiques (cf. chapitre 7 de ce cours), surtout pour le niveau A2-B1.
Chapitre 6
Construction d’un
En outre, comme le souligne encore J. Courtillon, il est important de ne pas confondre
manuel : progression le thème et la fonction :
et unité didactique « Par exemple, on ne peut pas apprendre à faire une lettre de réclamation à partir d’un article de journal
où sont décrits les abus de l’administration. S’il existe un rapport thématique entre ces deux types de texte,
Page 82 il n’y a pas de rapport fonctionnel. Une lettre de réclamation à l’administration comporte une organisation
discursive obéissant à des règles d’usage qu’il faut connaitre. Le récit et la description possèdent des règles
d’organisation textuelle qui n’ont rien à voir avec la lettre de réclamation. » (Courtillon, 2003, p. 34)
Cet exemple illustre bien le fait qu’une activité de production doit être préparée par une
confrontation à des données langagières et discursives de même type.
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traitement cognitif dans les situations d’oral et d’écrit, et par des travaux de sociolinguis-
tique qui permettaient de comprendre la pertinence de ces questions dans une approche
de la variation de la langue. La distinction entre le travail de compréhension écrite vs
compréhension orale et production écrite vs production orale est devenue fondamentale
pour la structuration des unités. À ces 4 aptitudes (ou activités langagières), est venue
s’ajouter, depuis le CECR, la compétence (ou activité langagière) interactionnelle, qu’un
manuel comme Alors ? s’efforce de prendre en compte.
Le travail de ces différentes compétences peut être repéré dans les manuels de deux
manières.
Tout d’abord, les manuels ont souvent recours à des pictogrammes qui indiquent si
l’apprenant est en situation de production orale (par exemple une bouche ouverte), de
production écrite (un stylo par exemple), de compréhension orale (un casque ou une
oreille), de compréhension écrite (un livre). Quelques manuels ont fait de l’articulation
entre compétences un principe didactique. Ainsi, dans Studio 100, on voit le plus souvent
les activités proposées mettre en jeu au moins deux compétences : on écoute pour rédi-
ger un message, on lit pour pouvoir rendre compte de ce qu’on a lu, etc.
Par ailleurs, au-delà du simple repérage de la nature de la ou des compétences travail-
lées, la distinction entre les compétences sous-tend parfois l’ensemble de la structure des
unités. Ainsi, dans un manuel comme Espaces, chaque unité est divisée en 3 parties de 4
pages. Après quatre pages de « découverte » des objectifs de l’unité, alternant écrit, oral
et travail systématique sur la langue, quatre pages, indiquées par un petit pictogramme
représentant un micro sont consacrées à la communication orale puis quatre pages, repé-
rables par un pictogramme représentant un stylo, sont consacrées à la compréhension Chapitre 6
et à la production écrite. Dans Alors ?, la structuration des unités se fait également à Construction d’un
manuel : progression
partir de la notion de compétences (cf. chapitre 4 de ce cours). Ainsi, chaque unité est et unité didactique
composée de 4 « séquences communicationnelles » (Alors ? 1, Guide pédagogique, p.10)
permettant de travailler chacune des compétences : interaction orale, réception orale, Page 83
production écrite, réception écrite (au niveau 1, les auteurs ont considéré qu’une com-
pétence de production orale continue n’avait pas sa place et que seule la compétence
interactionnelle pouvait vraiment être travaillée). Ces 4 séquences sont précédées d’une
séquence consacrée à la compétence culturelle (double page « Découvertes »).
Cette distinction entre compétences ne gouverne pas la structuration des unités de tous
les manuels. Une autre logique peut s’y superposer ou s’y imbriquer, le plus souvent de
type « cognitive ».
La logique cognitive
Cette logique d’organisation est liée aux étapes par lesquelles doit passer un apprenant
pour s’approprier des données langagières. Le parcours peut être résumé en 3 étapes :
• découverte/compréhension (exposition à des données nouvelles) ;
• systématisation et mémorisation ;
• production ou réemploi.
Ainsi, il est souvent annoncé que l’apprenant sera, dans un premier temps, invité à
découvrir les outils langagiers qui constituent les objectifs de la leçon dans des situations
de communication (c’est un des rôles des doubles pages de « découverte » dans Espaces
ou dans Café crème ou des activités de « Mise en route » dans Tempo, Didier, 1997).
Bien souvent, les auteurs de manuel annoncent ensuite un travail d’« analyse des régu-
larités » (cf. démarche inductive) et de « systématisation » (voire « d’automatisation »).
L’analyse du fonctionnement de la langue peut-être conduite dans le cadre des activités
de « découverte » ou regroupée avec les activités de systématisation (la section « boîte
à outils » dans Café Crème mêle ainsi présentation des règles sous forme de tableau et
8 1121 TG PA 00
application de ces règles dans des exercices systématiques). Ce travail d’analyse et de
pratique ciblée de la langue est parfois exclusivement consacré à une grammaire clas-
sique de la phrase, mais le plus souvent, il laisse de la place au vocabulaire et/ou à une
approche fonctionnelle empruntant à la théorie des actes de langage (observation des
différentes formulations d’un même acte de langage, invitation à les utiliser dans des
microsituations dialoguées, etc.).
Les phases de « réemploi » (pour reprendre la terminologie SGAV) ou de production,
peuvent prendre plus ou moins d’importance dans l’unité. Elles peuvent apparaître
(du point de vue des intentions déclarées des auteurs ou de la dynamique observable
de l’unité), comme des « activités » (des « tâches » pour les manuels plus récents) qui
fondent toute la démarche d’enseignement-apprentissage. C’est ce que revendiquent les
auteurs de manuels se réclamant de la perspective actionnelle et proposant une tâche
finale en fin d’unité. Dans ces cas, comme nous l’avons déjà souligné, il sera important de
se demander si la notion de tâche placée au cœur de la logique interne des unités per-
met de donner du sens aux apprentissages et de ne pas apparaître a posteriori comme
la justification finale des objectifs d’apprentissage.
C’est cette logique cognitive qui impose un certain ordre dans la réalisation des activités
d’une unité. Le plus souvent en effet, les enseignants sont invités à suivre l’ordre de pré-
sentation des étapes et des activités prévu par les concepteurs sauf si le traitement des
compétences est véritablement autonome à l’intérieur d’une unité (cf. A propos) et si la
progression interne n’est pas spiralaire (reprise et approfondissement d’un exercice ou
d’une activité sur l’autre des contenus vus précédemment).
Chapitre 6 Certains manuels, tout en s’appuyant sur la logique cognitive qui vient d’être évoquée,
Construction d’un proposent une structuration particulière de leurs unités. C’est le cas de Libre échange
manuel : progression
et unité didactique qui décompose ses unités en un « itinéraire recommandé » (situation 1) et un « itinéraire
bis » (situations 2 et 3). La situation 1 est dans un registre de langue standard, alors que
Page 84 les situations 2 et 3 présentent aux apprenants des situations de communication dans
un style familier et dans un style soutenu. En fonction de ses objectifs et du nombre
d’heures de cours dont il dispose, l’enseignant pourra se limiter à la situation 1 ou bien
exploiter également l’itinéraire bis.
S’entraîner
Activité 21
Observez le mode d’emploi des manuels Le nouveau Taxi ! 1 et Ici 167 et dites si ces
manuels vous paraissent plutôt adaptés à un cours intensif (par exemple : trois à quatre
heures de cours par jour, cinq jours par semaine, sur une période allant de quinze jours à
six mois) ou à un cours extensif (par exemple : une ou deux séances de deux heures par
semaine pendant un semestre ou une année). Justifiez votre réponse.
Voir fascicule autocorrection.
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Retenir
Bibliographie
Puren, C. (2004), « L’évolution historique des approches en didactique des langues-
cultures, ou comment faire l’unité des unités didactiques », Congrès annuel de Chapitre 6
l’Association pour la Diffusion de l’Allemand en France (ADEAF), École Supérieure de Construction d’un
manuel : progression
Commerce de Clermont-Ferrand, 2-3 novembre 2004. Consultable en ligne : http:// et unité didactique
www.tesol-france.org/articles/Colloque05/Puren05.pdf
Courtillon, J. (2003), Élaborer un cours de FLE, Hachette FLE. Page 85
Borg, S. (2001), La notion de progression, Didier.
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Chapitre 7
Les activités langagières
(ou compétences/aptitudes) :
l’exemple de la compréhension orale
Plan
Place de la compréhension orale
Supports et types de discours
Spécificités de la langue orale et variations langagières
Démarches
La compétence de réception orale, comme l’affirme Louis Porcher,
« est de loin la plus difficile à acquérir et c’est pourtant la plus indispensable. Son absence est anxiogène
et place le sujet dans la plus grande “insécurité linguistique” ».68
Nous verrons dans ce chapitre, notamment à travers l’exemple de deux manuels Chapitre 7
Les activités
récents de niveau 1, Alter Ego et Alors ?, quelle est la place de la compréhension langagières (ou
orale et de quelle façon cette compétence est traitée. compétences/
aptitudes) : l’exemple
L’idéal serait que vous puissiez vous procurer ces deux manuels. Sinon, nous vous de la compréhension
invitons à vous reporter aux tableaux de contenu d’Alors ? 1 et d’Alter Ego 169 ainsi orale
qu’aux deux unités proposées dans le fascicule, qui seront étudiées en priorité70.
Page 87
Vous pourrez également consulter les transcriptions des enregistrements sonores
de ces unités71. Enfin, nous vous conseillons de consulter les guides pédagogiques
disponibles sur Internet72 de ces deux manuels auxquels ce chapitre fait référence.
Découvrir
68 Porcher L. Le Français langue étrangère, Hachette Éducation, CNDP/Ressources Formation, 1995, p. 45.
69 Fascicule « Documents », documents 22 et 23, p. 70 et 71.
70 Fascicule « Documents », documents 6 et 11, p. 25 et 34.
71 Fascicule « Documents », documents 34 et 35, p. 94 et 95.
72 Le guide pédagogique d’Alors ? 1 est téléchargeable gratuitement sur le site des éditions Didier http://www.
editionsdidier.com et celui d’Alter Ego 1 sur le site des éditions Hachette FLE http://www.hachettefle.fr
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tiques, un pictogramme « écouter » (qui représente une oreille) est disposé après le
numéro de chaque activité relevant de cette compétence ce qui facilite le repérage par
les apprenants.
Le tableau des contenus d’Alors ? 1 spécifie sous l’entrée « Compétence de communi-
cation », les différentes activités langagières travaillées. Comme on l’a vu en effet dans
le chapitre 4, les auteurs se réclament de l’approche par compétences en dissociant le
traitement de chacune d’elle. C’est ainsi que dès le tableau des contenus, on trouve une
rubrique « Réception orale » aux côtés d’« Interaction », de « Réception écrite » et de
« Production écrite ». Les contenus de la rubrique « Réception orale » sont toujours for-
mulés de la même façon : « comprendre » (une annonce, les titres du journal à la radio,
un jeu radiophonique, une description…).
Le cahier d’activités d’Alter Ego 1 ne propose aucune activité de compréhension orale, à
l’inverse d’Alors ? 1, qui joint au cahier d’exercices un CD encarté sur lequel se trouvent
les enregistrements qui servent de supports à ces activités.
En nous intéressant plus spécifiquement à une unité didactique issue des deux manuels
(la leçon 3 du dossier 1 d’Alter Ego 1 et l’unité 4 du Module 2 d’Alors ? 1), nous allons
étudier la place de la compréhension orale dans chacune des unités.
Dans le Guide pédagogique d’Alter Ego 1, les objectifs et savoir-faire de la leçon 3 annon-
cés par les auteurs sont les suivants : « Être capable de comprendre un extrait d’émission
Chapitre 7 de télé (jeu-concours) et de comprendre et donner des informations personnelles (âge,
Les activités études/profession, pays de naissance/domicile, goûts et rêves)». Dans la leçon, trois acti-
langagières (ou
compétences/
vités sont précédées du pictogramme « écouter » : 2, 3 et 8. Le dialogue qui sert de base
aptitudes) : l’exemple aux activités 2 et 3 est transcrit entièrement sur la page de gauche, comme c’est le cas
de la compréhension chaque fois qu’un dialogue sert de document d’ouverture d’une leçon. C’est un choix des
orale auteurs de donner d’emblée la transcription aux apprenants alors que dans la plupart
des méthodes actuelles, la transcription n’est disponible qu’à la fin du manuel, pour que
Page 88 les apprenants ne soient pas tentés de s’appuyer d’emblée sur la transcription pour faire
l’activité. L’activité 8, quant à elle, est basée sur un autre enregistrement, dont la trans-
cription se trouve cette fois à la fin du manuel.
Dans l’unité 4 d’Alors ? 1, on trouve des dialogues enregistrés dans la partie « Des conver-
sations » (p. 56) et ce dialogue est transcrit car comme l’expliquent les auteurs dans le
guide pédagogique, ce n’est pas la compréhension orale qui est ici visée : « la phase
d’écoute des échantillons peut prendre appui sur le texte des conversations (puisque
l’on n’entraîne pas à la compréhension orale pour elle-même : ici, on « écoute » pour
« parler ») et les illustrations). » (Alors 1, guide pédagogique, p. 11).
La rubrique « De l’écoute », quant à elle, « entraîne uniquement à la compréhension à
partir de sons entendus, sans aide visuelle, comme ce peut être le cas pour des films ou
des émissions de télévision. » (p. 13). Dans l’unité 4 du module 2, l’objectif est de « com-
prendre les titres du journal à la radio ». La transcription n’est disponible qu’à la fin du
manuel.
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Supports et types de discours
Alter Ego 1 et Alors ? 1 ne contiennent aucun document oral authentique, les enregistre-
ments authentiques présentant souvent une trop grande difficulté pour des apprenants
débutants. C’est en général à partir du niveau B1 que les manuels en proposent.
Les documents sonores utilisés pour les activités de compréhension orale sur l’ensemble
des deux manuels peuvent être classés selon une typologie proposée par Puren,
Bertocchini et Costanzo (1998, p. 104). On trouve ainsi dans les deux manuels : des
conversations informelles en face à face, des conversations téléphoniques, des messages
par haut-parleur, des tables rondes radiophoniques, des jeux radiophoniques ou télé-
visés. Alter Ego 1 propose par ailleurs des interviews ou enquêtes et des récits de vie
et Alors ? 1 des chansons et des conversations radiophoniques speakers-auditeurs, des
informations radiophoniques, des publicités et des visites guidées. Aucun de ces deux
manuels n’exploitent de documents sonores de type cours ou conférences, poèmes, dis-
cours officiels, prévisions météorologiques, horoscopes, ni de textes littéraires oralisés.
Les poèmes sont parfois présents dès le niveau 1 de certains manuels comme par exemple
d’Ici 1 qui propose dans sa double page « à lire à dire » des comptines, des poèmes mais
aussi des chansons qui sont disponibles à l’écoute sur le CD encarté à la fin du livre de
l’élève.
Les prévisions météo et les horoscopes sont souvent présents dans les manuels de niveau
Chapitre 7
1 : c’est le cas par exemple dans Connexions 1 avec un bulletin météorologique à écouter
Les activités
dans l’Unité 12 et dans Taxi ! 1 avec un horoscope dans l’Unité 9. langagières (ou
Par contre, les genres de discours tels que des cours, des conférences, des discours offi- compétences/
aptitudes) : l’exemple
ciels ou des textes littéraires oralisés sont rarement proposés dans les niveaux A1 et A2 de la compréhension
parce qu’ils présentent des difficultés trop importantes. orale
Page 89
Spécificités de la langue orale et variations langagières
Travailler sur la compréhension orale en classe de langue étrangère implique notamment
de faire prendre conscience aux apprenants des traits spécifiques de la langue orale et
ainsi, des variations langagières en fonction des types de discours et des situations de
communication. On va donc examiner si les documents sonores proposés aux étudiants
dans les manuels étudiés sont porteurs de certains traits d’oralité. Les traits spécifiques
de la langue orale sont par exemple : les hésitations, les répétitions, les phrases inache-
vées ou incomplètes, les constructions disloquées73, les apostrophes, les onomatopées, les
phatiques (hein, tu vois), les marqueurs de structuration de la conversation74 (bon, ben,
enfin) et enfin la multimodalité (gestes, postures et mimiques accompagnant la parole).
Dans les manuels, c’est en général dans les rubriques consacrées à la phonétique que
sont abordés certains phénomènes tels que les contractions et élisions de syllabe ou la
chute du « ne » dans la négation par exemple.
Voici quelques exemples de marques spécifiques de l’oralité relevées dans les deux
manuels étudiés :
– des phrases inachevées :
« les jeunes apprennent à vivre ensemble, mais, bon… » (Alors ?, p. 134)
« Alors, à ton père, offrez-lui six bouteilles de bon vin et à ta mère… » (Alter Ego, p. 122)
73 La construction disloquée correspond à un syntagme qui se trouve à la droite ou à la gauche d’une pro-
position et qui est représenté dans cette proposition par un pronom ou un adjectif coréférentiel. Une telle
construction est omniprésente à l’oral. Elle permet à l’énonciateur d’indiquer de quoi il va parler, de donner le
thème par rapport auquel il organise son énoncé. Une autre construction spécifique de l’oral est l’extraction :
c’est …qui/ c’est… que.
74 Terme désémantisé qui sert à ponctuer une prise de parole.
8 1121 TG PA 00
– des constructions typiques de l’oral :
« Ça, c’est très grave. » (Alors ?, p. 146),
« Eh ben, moi, ma mère, quand elle fait des courgettes, je déteste ça ! » (Alter Ego, p. 114)
« Il est très bien, ce vin. » (Alter Ego, p. 141),
« Une soirée à l’opéra, ça c’est bien ! » (Alter Ego, p. 122),
– des phatiques :
« Oui, et on ne sourit pas, hein ! » (Alors ?, p. 116),
« J’en prends deux, pour ce soir hein ! » (Alter Ego, p. 132)
– des hésitations et des reprises :
« Bonjour, euh… » (Alors ?, p. 26)
« Oh, comme d’habitude : supermarché, lavage de la voiture, télé…ah non…dimanche,
bricolage de mon ordinateur ! » (Alors ?, p. 116)
« Euh…quelle est votre adresse ? » (Alter Ego, p. 23),
– des marqueurs de structuration de la conversation :
« Hum… c’est vrai, il est très parfumé, ce melon ! » (Alter Ego, p. 132),
« Voilà ! Bon, je compte sur toi ! » (Alter Ego, p. 91)
les élisions :
« J’me suis réveillée », « tu t’es l’vée » (exercice de phonétique dans Alter Ego, p. 91)
La variation lexicale liée à la diversité des situations de communication est illustrée dans
Chapitre 7 un dialogue d’Alors ? (p. 86) à travers différentes façons d’exprimer sa joie. À l’annonce
Les activités par sa petite-fille de la réussite de ses examens, une grand-mère réagit ainsi : « Oh !
langagières (ou
compétences/
Quelle bonne nouvelle ! Enfin… Super ! Génial, comme vous dites. ». Elle se reprend en
aptitudes) : l’exemple utilisant un langage plus familier et les auteurs pointent ces différentes formulations
de la compréhension possibles dans un encadré, sur la page où figure le dialogue. Cependant, dans Alors ?,
orale on constate une présence limitée du registre familier au plan lexical malgré l’occurrence
de certains termes (par exemple : « Je flippe ! » (p. 74), « Tonton » (p. 104)).
Page 90
Le registre familier fait partie des objectifs lexicaux d’Alter Ego 1. Il est abordé une pre-
mière fois dans le dossier 3 (p. 58) avec quelques termes comme ciné, restau, sympa…,
puis à nouveau dans le dossier 8 (p. 135) dans le « Point langue » où il est demandé aux
apprenants de retrouver des expressions en français familier dans le dialogue à partir de
phrases en français standard (travail/boulot, fatiguée/crevée, ça ne doit pas être bien/ ça ne
doit pas être terrible, drôles/marrants), puis de réfléchir sur les spécificités de l’oral familier.
Sur le plan phonétique, la variation aurait pu être introduite en faisant intervenir des
locuteurs ayant différents accents régionaux ou étrangers dans les enregistrements mais
cela n’est pas le cas. Même dans le jeu télévisé de la leçon 3 du dossier 1 d’Alter Ego 1
(p. 26), les participants qui sont pourtant tous étrangers, mais francophones (Québec,
Madagascar, Gambie, Sénégal, Tunisie) s’expriment sans accent dans l’enregistrement.
Différents traits spécifiques de la langue orale sont présents dans les manuels étudiés
mais ils ne sont pas en très grand nombre, notamment dans Alors ?. D’une façon géné-
rale, les acteurs qui jouent les dialogues ont un débit lent et un phrasé très clair, même
si le débit et la variété des intonations semblent un peu plus proches de la réalité dans
Alter Ego 1. Alors que les auteurs d’Alors 1 annoncent dans le guide pédagogique que
les « conversations ont été inventées de manière à respecter la vraisemblance linguis-
tique du français vivant et celle de la vie sociale » (p. 11), elles se rapprochent souvent
d’un écrit oralisé. Ces constats ne sont pas étonnants compte tenu du fait qu’il s’agit
de deux manuels de niveau A1. Cependant, d’autres manuels75, comme par exemple A
propos A1, font le choix d’enregistrer certains dialogues « sur le vif », c’est-à-dire sans
75 Les auteurs du manuel Libre échange (1991) avaient adopté une approche originale en matière de varia-
tion langagière, dès le niveau 1, puisque dans chaque unité étaient proposés trois dialogues correspondant à
des registres différents : standard, familier, soutenu.
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comédien professionnel et sans dialogue préalablement écrit mais avec simplement une
trame, ce qui permet aux intervenants d’improviser ou au moins d’être plus « naturels ».
Les marques de l’oral, comme les hésitations, les répétitions, les phrases inachevées, sont
alors très nombreuses et le débit est parfois assez rapide. Cela constitue un bon entraî-
nement, notamment pour les apprenants résidant en France qui sont confrontés à cette
manière de parler et à ce débit tous les jours, mais aussi une difficulté supplémentaire
pour les apprenants qui peuvent se sentir déstabilisés.
Démarches
Nous vous proposons d’examiner dans cette partie les différentes démarches proposées
par les manuels étudiés pour faire travailler la compréhension orale.
Face à un document sonore, selon les types d’écoute proposés aux apprenants : glo-
bale, sélective, détaillée, linéaire, les activités cognitives des apprenants vont être dif-
férentes. L’écoute globale consiste à identifier le type de document et à retrouver les
principaux éléments de la situation de communication : « Qui parle à qui ? », « Où ? »,
« Pourquoi ? », « Quand ? », « De quoi ? ». Dans le cas de l’écoute sélective, il s’agit
de relever des informations précises en fonction des consignes données (par exemple,
retrouver l’horaire d’un film à partir de l’écoute d’un enregistrement vocal présentant le
programme d’un cinéma). La compréhension détaillée vise, comme son nom l’indique, à
comprendre de façon exhaustive un document. Quant à l’« écoute linéaire », moins cou- Chapitre 7
rante que les précédentes, elle est présentée par Bertocchini et Costanzo (2008, p. 96-97) Les activités
langagières (ou
comme visant à faire comprendre le fonctionnement du discours oral aux apprenants. compétences/
Ce travail peut se faire par exemple en donnant des transcriptions à corriger ou à com- aptitudes) : l’exemple
pléter, en faisant observer la différence de traitement d’un même événement dans une de la compréhension
information radio et dans un article de journal. orale
Outre le type d’écoute proposé aux apprenants dans les activités de compréhension Page 91
orale, il est important de se demander si l’écoute proprement dite est précédée d’une
phase de préécoute qui permet aux étudiants de contextualiser le document à écouter,
d’anticiper un certain nombre d’éléments et de faire des hypothèses sur le document. Ce
travail est systématiquement proposé dans Alter Ego 1, non pas dans le livre de l’élève
mais dans le guide pédagogique. Les apprenants sont invités à formuler des hypothèses
à propos du document en s’appuyant sur les images qui l’accompagnent. Par ailleurs, les
activités de compréhension sont souvent suivies d’activités visant le réemploi ou le trans-
fert des acquis dans d’autres contextes. C’est le cas à nouveau d’Alter Ego, avec l’activité
10 (p. 29) par exemple, où le travail de production orale est en lien direct avec l’activité
de compréhension orale, puisque les apprenants doivent se prêter à une simulation
(« Vous participez à l’émission rêves et réalité pour gagner un voyage à Paris. Présentez-
vous à la classe et dites votre rêve ») et reproduire un discours semblable à celui qui a
été entendu et travaillé avec le support audio au début de l’unité. Dans une autre unité,
c’est une activité de production écrite (n° 14, p. 93) qui amène les apprenants à réinvestir
certains savoirs appris au cours de l’activité de compréhension orale qui précède. D’une
manière générale, le document sonore (constitué le plus souvent d’un ou plusieurs dialo-
gues) situé en ouverture des leçons est exploité de façon assez « classique », en compré-
hension d’abord, puis pour aborder certains points de langue visés dans l’unité et enfin
comme support de référence pour une production. Il n’y a donc pas d’indépendance de
traitement des compétences en fonction du support, contrairement à Alors ? comme
nous le verrons par la suite.
8 1121 TG PA 00
Pour ce qui est des activités de compréhension orale proprement dites, dans Alter Ego
1, elles n’ont pas de place définie dans la leçon et leur nombre peut varier d’une leçon
à une autre. Elles sont par ailleurs très variées. Il peut s’agir :
• d’associer des dialogues à des dessins ou à des photos (p. 18, p. 34, p. 51) ;
• de compléter un tableau (p. 26) ;
• de répondre à un QCM (p. 66, p. 165) ;
• de compléter un document écrit lacunaire (p. 38, p. 58, p. 74) ;
• de tracer un itinéraire sur un plan (p. 40) ;
• de répondre à des questions en justifiant sa réponse (p. 45, p. 55) ;
• de répondre à un vrai ou faux (p. 58) ;
• de mettre des répliques dans l’ordre pour reconstituer une conversation (p. 82) ;
• de noter l’essentiel des réponses à une interview (p. 99) ;
• de répondre à des questions : qui parle ? de quoi ?, etc. (p. 98, p. 123) ;
• de relever les explications des personnes (p. 116), dire si les appréciations sont posi-
tives ou négatives (p. 118, p. 149) ;
• d’associer une phrase/situation à un dialogue (p. 136) ;
• d’associer un enregistrement à une petite annonce (p. 155).
Chapitre 7 Les activités du début du manuel sont très guidées (associations, QCM, tableaux à com-
Les activités pléter…), puis on passe progressivement à des questions ouvertes, où les apprenants
langagières (ou doivent justifier leurs réponses ou identifier l’opinion des personnes qui parlent.
compétences/
aptitudes) : l’exemple Dans le guide pédagogique, les auteurs donnent des pistes aux enseignants sur la
de la compréhension façon de conduire les activités. Ainsi, pour les activités 2 et 3 de la leçon 3 du dossier 1
orale (p. 26-27), les auteurs proposent de « poser le contexte » avant l’écoute. Ils suggèrent
ensuite de faire une première écoute et de « vérifier la compréhension globale en posant
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des questions à l’ensemble de la classe », puis de « faire réécouter l’enregistrement, en
veillant à ce que les apprenants ne lisent pas la transcription, pour effectuer l’activité. »
(Alter Ego 1, guide pédagogique, p. 34). Ils proposent éventuellement de partager la
classe en trois sous-groupes, pour que chacun pratique une écoute ciblée et sélectionne
seulement l’information qui l’intéresse (âge, ville/pays ou profession).
Concrètement, certaines recommandations des auteurs semblent un peu difficiles à
mettre en œuvre : comment empêcher les apprenants de regarder la transcription du
dialogue alors que le tableau à compléter pour l’activité 2 se trouve juste à côté ? Pour
l’activité 8, il faut faire la première écoute avant de lire la consigne, ce qui est possible
mais demande donc que les apprenants fassent la première partie de l’activité livre fermé.
Dans la partie consacrée à la phonétique (p. 29), les objectifs d’apprentissage visés (discri-
mination des sons [s] et [z]) sont abordés à travers des phrases qui ont un rapport direct
avec les activités de compréhension orale de la leçon ; elles reprennent le lexique déjà
vu et entendu (ex : Vous êtes canadien. Nous allons tirer au sort…), ce qui contribue à la
cohérence de l’unité.
Dans Alors ? 1, le travail lié à la mise en œuvre de l’activité de réception orale se situe
dans la partie « De l’écoute ». Dans l’unité 4, l’objectif est de « Comprendre les titres du
journal à la radio ». Dans le guide pédagogique, les auteurs indiquent que le lien entre
cette séquence et celle centrée sur l’interaction (partie « Des conversations ») est « assu-
rée par les contenus (journaux, titres) » (p. 79). La démarche proposée par les auteurs est
décrite en ces termes : il s’agit de repérer et d’interpréter des indices qui conduiront à
des hypothèses de sens, puis à recouper et à vérifier, en revenant plusieurs fois à l’enre-
gistrement. Les apprenants pourront aussi se servir des photos pour ce premier repérage.
La première activité proposée est un QCM (activité 26 p. 61) qui mêle des questions de
compréhension globale (1, 3) et des questions de compréhension ciblée (2, 4). On peut
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souligner l’importance des photos comme soutien à cette première activité de repérage.
Par ailleurs, les questions ne sont pas exactement dans l’ordre d’apparition des réponses
dans l’enregistrement. L’activité 27 est à nouveau un QCM (très utilisé tout au long du
manuel) qui vise à « assurer une compréhension plus détaillée du bulletin en s’appuyant
sur les mots transparents, comme le nom des pays, d’organismes internationaux (UE =
Union européenne) et des mots transversaux à beaucoup de langues, comme budget. »
(Alors ? 1, guide pédagogique, p. 80).
Tout au long des unités, les activités proposées pendant une écoute sont invariablement
des QCM ou des questions vrai/faux visant à contrôler la compréhension. Dans la mesure
où seule la compétence de compréhension orale est ici visée, les auteurs ne proposent
que très rarement une activité qui amènerait les apprenants à mettre en œuvre une
autre aptitude langagière (à l’écrit ou en production orale) à partir du document sonore
étudié.
En revanche, dans la rubrique « Des conversations », écoute et production sont liées car
le document sonore est envisagé comme un « modèle » d’échange fourni aux appre-
nants pour qu’ils puissent ensuite interagir oralement. Dans l’unité 4, l’objectif de cette
rubrique est d’apprendre à « Acheter (demander un produit, un article, s’informer) ».
Dans le guide pédagogique, les auteurs proposent une activité de préécoute décrite
ainsi : « les apprenants simuleront, dans leur langue, une situation comme celle de la
photo (au kiosque) entre un client et un vendeur. Ils expliqueront leurs habitudes de
politesse et de socialité, qui accompagnent cet acte social ordinaire (acheter). » (Alors ? Chapitre 7
1, guide pédagogique, p. 73). Rien n’est dit pour les cas des classes multilingues, où les Les activités
langagières (ou
apprenants n’ont que le français comme langue commune. compétences/
Les apprenants écoutent ensuite l’échantillon de conversation avec la transcription, puis aptitudes) : l’exemple
des activités de compréhension, globale puis détaillée, sont proposées, de nouveau sous de la compréhension
la forme de QCM. orale
Page 93
S’entraîner
Activité 22
Analysez la place de la compréhension écrite et les activités orientées vers cette activité
langagière dans Alors ? 1 et Alter Ego 1. Appuyez-vous sur les tableaux de contenu de
ces deux manuels et sur les deux unités qui sont à votre disposition dans le fascicule des
documents si vous ne pouvez vous procurer ces deux manuels. Pour l’analyse, vous pou-
vez vous aider de la grille de C. Puren, P. Bertocchini et E. Costanzo76.
Voir fascicule autocorrection.
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Retenir
Quand on étudie les activités langagières dans un manuel, on peut observer la place
qu’elles occupent dans le tableau des contenus et dans les unités, les supports utili-
sés, les types de discours présentés et les activités.
Pour la compréhension orale, les supports des enregistrements sont en général
fabriqués dans les niveaux A1 et A2 et sont parfois authentiques à partir du niveau
B1. Les variations langagières et les spécificités de la langue orale sont peu présentes
au niveau A1.
La diversité des démarches varie d’un manuel à l’autre. Une grande diversité des
activités semble intéressante parce que motivante pour les apprenants et l’ensei-
gnant, cependant la régularité des activités proposées d’une unité à l’autre peut
être rassurante pour l’apprenant.
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Chapitre 8
Les compétences culturelles
et interculturelles
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Découvrir
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Les compétences d’ordre culturel se retrouvent aussi dans la compétence sociolinguis-
tique qui :
« porte sur la connaissance et les habiletés exigées pour faire fonctionner la langue dans sa dimension
sociale » (CECR, 2001, p. 93).
Elle renvoie à la connaissance et la maitrise des marqueurs de relations sociales, des
règles de politesse, des différences de registre, mais aussi des expressions de la sagesse
populaire et des dialectes et des accents.
Quant à la compétence interculturelle, dans le CECR, elle est explicitée tant au niveau des
« savoirs » qu’au niveau des aptitudes et savoir-faire interculturels (5.1.2.2.), et même à
celui des savoir être (5.1.3.) où le « développement d’une personnalité interculturelle »
(p. 85) est présenté comme objectif éducatif possible.
Concernant les savoirs, il est question de « prise de conscience interculturelle » :
« La connaissance, la conscience et la compréhension des relations, (ressemblances et différences distinc-
tives) entre « le monde d’où l’on vient » et « le monde de la communauté cible » sont à l’origine d’une
prise de conscience interculturelle. » (2001, p. 83)
Ainsi, pour acquérir une compétence interculturelle, l’apprenant doit en premier lieu
prendre conscience des différences et des ressemblances entre sa propre culture et la
culture cible.
Elle inclut la conscience de la « diversité régionale et sociale des deux mondes ».
=> La tolérance vis-à-vis d’autres cultures passe par la prise de conscience de sa propre
culture. En observant les attitudes et les comportements de leurs concitoyens, les appre-
nants prennent ainsi conscience de la complexité de leur propre culture. Chapitre 8
Les compétences
Enfin,
culturelles et
« la conscience interculturelle englobe la conscience de la manière dont chaque communauté apparaît dans interculturelles
l’optique de l’autre, souvent sous la forme de stéréotypes nationaux » (p. 83).
Page 97
En résumé, une sensibilisation aux faits culturel et interculturel, conduira l’apprenant à
évoluer dans sa relation au contact de l’autre culture et à prendre conscience de l’exis-
tence des stéréotypes77.
L’apprenant construit sa compétence interculturelle par rapport au monde de la langue
cible mais également par rapport à sa propre culture.
Les aptitudes et savoir-faire interculturels comprennent la capacité :
• « d’établir une relation entre la culture d’origine et la culture étrangère » ;
• « de reconnaître et d’utiliser des stratégies variées pour établir le contact avec des gens d’une autre
culture » ;
• « de jouer le rôle d’intermédiaire culturel […] et de gérer efficacement des situations de malentendus
et de conflits culturels » ;
• et « à aller au-delà de relations superficielles stéréotypées » (CECR, p. 84).
Ainsi, ce qui rend compte de la compétence interculturelle d’un individu, ce n’est pas
prioritairement sa connaissance de la culture de l’autre mais sa capacité à rencontrer
l’autre, à entrer en contact avec lui et à échanger, à être médiateur et à dépasser les
stéréotypes.
77 Le stéréotype, « désigne les catégories descriptives simplifiées par lesquelles nous cherchons à situer autrui
ou des groupes d’individus » (Fischer, 1987). Les stéréotypes correspondent donc à des traits ou des compor-
tements que l’on attribue à autrui de façon arbitraire. En ce sens, les stéréotypes sont une manifestation des
préjugés.
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Les compétences culturelles et interculturelles dans les référentiels
Dans le Cadre, les compétences interculturelles ne font pas l’objet d’un classement par
niveaux :
« [elles] ne reçoivent pas de traduction au moyen de descripteurs, ni pour elles-mêmes ni en tant que com-
portant une dimension langagière. » (Beacco, Porquier, 2007, p. 156)
Ceci s’explique par le fait que :
« Les compétences culturelles et interculturelles mises en jeu dans la découverte d’une autre culture et uti-
lisées pour comprendre celle-ci ou pour agir en son sein sont largement indépendantes de la compétence
langagière en langue cible des apprenants. » (Beacco, Porquier, 2007, p. 155)
Ainsi, dans les différents Niveaux pour le français, les compétences culturelles/intercultu-
relles indiquées ne sont pas nécessairement conformes au niveau linguistique des appre-
nants. Comme l’expliquent Beacco et Porquier (2007), le niveau « A1 culturel », présenté
dans leur ouvrage Niveau A1 pour le français, un référentiel, peut convenir à des appre-
nants ayant un niveau B1 du point de vue des compétences langagières mais n’ayant :
« aucune expérience directe de l’altérité ou de l’étranger, alors que pour des apprenants déjà largement
multiculturels, il sera sans doute opportun de se fixer des objectifs culturels de niveau B1 ou B2, même si
leurs compétences langagières sont encore limitées (A1 ou A2). » (Beacco, 2007 p. 155)
Dans ce dernier cas, il sera sans doute opportun que pour la réalisation d’activités à visée
culturelle et interculturelle, la langue de travail ne soit pas nécessairement la langue
cible, cette dernière ne permettant pas aux apprenants de s’exprimer suffisamment
finement sur ces questions78.
Outre l’expérience de l’altérité des apprenants, l’âge de ces derniers peut également
Chapitre 8 constituer un critère important pour déterminer les activités à visée culturelle et inter-
Les compétences culturelle à mettre en œuvre.
culturelles et
interculturelles Ainsi, pour ce qui est des objectifs culturels une certaine liberté est laissée à l’enseignant
en fonction de son contexte-classe et des besoins et intérêts des apprenants.
Page 98
78 On peut citer l’exemple du projet d’échanges interculturels Cultura (http://cultura.mit.edu/) pour lequel les
concepteurs ont choisi que les apprenants français et étasuniens s’expriment chacun dans leur langue afin que
chacun puisse rendre compte avec finesse de ses représentations concernant la culture d’origine et la culture
cible.
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• documents iconographiques : photos, publicités, peintures, cartes de France, cartes
touristiques, plans de villes, etc. ;
• documents audiovisuels.
Dans les premiers volumes des méthodes, on trouve très majoritairement des docu-
ments iconographiques et moins de documents écrits. Les documents ne sont pas tous
exploités dans une perspective interculturelle, certains sont uniquement présents dans
un souci d’illustration ou d’apprentissage linguistique mais ils contribuent néanmoins à
véhiculer une image de la France/Francophonie. J.-C. Beacco parle à ce propos de « stra-
tégie d’appropriation par imprégnation non systématique » (Beacco, 2000, p. 77). Ainsi,
même si dans les manuels récents, et ce depuis l’approche communicative, des pages
sont spécifiquement consacrées aux dimensions culturelles et interculturelles dans les
unités didactiques, la présence de nombreux documents authentiques sur l’ensemble
des pages des manuels montre que cette compétence est traitée de manière intégrée et
prend toute son importance aux côtés des compétences linguistiques. On peut préciser
par ailleurs, qu’à partir du niveau B1, les unités ne comprennent plus aussi systématique-
ment une rubrique à part pour traiter de ces dimensions ; celle-ci est alors complètement
intégrée à l’ensemble de l’unité, sauf par exemple dans Latitudes 3 (niveau B1) où les
auteurs ont choisi de présenter une dimension culturelle particulière, en l’occurrence
la diversité culturelle du monde francophone, regroupée sur deux pages intitulées
« Francophonies » dans chaque unité.
Contenus
Nous vous soumettons quelques remarques issues de l’observation de certains manuels Chapitre 8
récents par rapport aux réalités culturelles abordées dans ces derniers. Les compétences
culturelles et
Il faut préciser que les contenus culturels annoncés dans les tableaux de contenus des interculturelles
manuels ne recouvrent pas toujours l’ensemble des contenus socioculturels abordés dans
une unité. Ainsi, dans Alors ? 1, seuls les contenus traités dans les pages culture sont pré- Page 99
sentés alors que de nombreuses réalités de la vie sociale et du patrimoine français sont
abordées tout au long des unités à travers les documents authentiques. Dans l’unité 9
par exemple, sous l’entrée « compétence culturelle », est annoncé le thème suivant : « la
génération des 20-30 ans ». Celui-ci renvoie au contenu des pages culture qui introduisent
l’unité mais ne recouvre pas l’ensemble des contenus socioculturels de cette unité. Dans
le tableau de contenus, l’entrée « Compétence lexicale » complète l’information sur ce
point (« sujets de discussion, problème politique, social, économique, de l’environnement,
valeurs ») mais n’évoque pas les questions précisément abordées dans l’unité à savoir : le
service militaire et civil, le vote des immigrés aux élections municipales, les référendums,
les nouveaux types de cafés (bars à bières, bars à vin, karaoké, cafés philosophiques, etc.).
Ce constat nous amène à souligner le fait qu’un tableau de contenus n’informe pas tou-
jours de façon exhaustive sur les contenus culturels abordés dans un manuel.
Comme nous l’avons souligné au début de ce chapitre, le patrimoine occupe peu de
place dans les manuels, ces derniers sont plus axés sur ce que N. Auger appelle la :
« socioculture (représentations communes de la vie intime, de la culture, de l’immigration, de la techno-
logie et de la jeunesse) et tentent également de rendre compte de l’air du temps ». (Auger, 2007, p. 244).
Pour les niveaux A1 et A2 notamment, on retrouve plus ou moins les mêmes sujets d’un
manuel à l’autre : la gestion du temps, la famille, les fêtes, les générations, les loisirs,
le cadre de vie (ville ou campagne), les habitudes alimentaires, etc. Ces sujets sont uni-
versels dans le sens où ils rendent compte des différents domaines d’expérience de tout
être humain. Ils ont été nommés « universels-singuliers » par L. Porcher qui les définit
en ces termes :
« Ce sont des réalités universelles mais que chaque société vit et voit à sa manière, et qui, de cette façon,
réconcilient la culture-source (celle de l’apprenant) et la culture-cible en leur conférant un point commun »
(Porcher, 1994, p. 10)
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Autrement dit, comme l’explique Amandine Grisard dans un mémoire de master 1 intitu-
lé Les documents authentiques dans les manuels de FLE : un outil pour le développement
d’une compétence interculturelle chez l’apprenant ?79, l’intérêt de ces sujets :
« se situe dans la tension qui se crée entre l’universalité et son actualisation particulière dans chaque
société, actualisation qui fonde les différences culturelles et, par là, la problématique interculturelle »
(Grisard, 2010, p. 49)
Dans son étude portant sur quelques manuels récents, A. Grisard constate également
que dans les thématiques abordées comme dans les documents sélectionnés, notamment
pour les niveaux A1 et A2, ce sont essentiellement les aspects positifs de la vie actuelle
en France qui sont traités ; les problèmes de société et le passé de la France sont peu
abordés.
« On cherche ainsi à montrer une image valorisante et intéressante d’une France moderne dans ses pra-
tiques et ses modes de pensée, qui est destinée à être diffusée dans le monde et favorise les ventes de
manuels. » (Grisard, 2010, p. 51)
À propos des thèmes traités, il faut souligner que les auteurs sont parfois soumis à des
contraintes des éditeurs. Ainsi, certains sujets considérés comme tabous ou polémiques
peuvent-ils être refusés par ces derniers par crainte de déplaire dans certaines parties
du monde. Dans le manuel A propos A2 par exemple, les auteurs n’ont pas pu aborder
la question du PACS pour les homosexuels. Et dans le dossier 7 sur la découverte de la
France, « Douce France », ils n’ont pu conserver le dessin humoristique qu’ils avaient ini-
tialement choisi pour illustrer les travers des Français à l’étranger car ce dernier renvoyait
une image trop négative de la France.
Néanmoins, ces contraintes sont évidemment plus fortes chez les petits éditeurs, qui ont
Chapitre 8 besoin de faire connaitre et apprécier leurs produits dans le plus grand nombre de pays
Les compétences possible afin de conquérir le marché, que dans les grandes maisons d’édition comme CLE
culturelles et
interculturelles international ou Hachette qui occupent déjà le marché mondial. En outre, il faut relati-
viser ces contraintes imposées par les éditeurs puisque dans A propos A1, le chapitre 8
Page 100 aborde des thèmes rarement traités à ce niveau-là : les associations, la discrimination :
chômeurs, handicapés, homosexuels.
Enfin, précisons que certaines thématiques, parce qu’elles sont plus complexes à aborder
et nécessitent des compétences linguistiques plus avancées ne sont traitées qu’à partir du
niveau B1. Les sujets qui relèvent du patrimoine et de la culture cultivée interviennent
aussi plutôt à partir de ce niveau.
Démarches
La présence de documents authentiques porteurs de contenus culturels dans les manuels
peut largement contribuer à l’acquisition de savoirs socioculturels par l’apprenant, à
condition que ces documents soient présentés et explicités par l’enseignant. En revanche,
des démarches doivent être mises en place pour développer sa compétence sociolinguis-
tique, sa prise de conscience interculturelle, ses aptitudes et savoir-faire interculturels.
Quelles sont les démarches, c’est-à-dire les activités proposées par les auteurs pour
développer les compétences culturelles et interculturelles des apprenants ? C’est ce que
nous allons présenter dans cette partie en nous appuyant sur une typologie proposée par
A. Grisard (2010).
Précisons préalablement que si les activités culturelles et interculturelles peuvent être
regroupées dans les pages culture, elles peuvent aussi se mêler à des activités langagières
dans les pages consacrées à ces dernières. Ainsi, dans A propos A2, les questions à visée
interculturelle se situent le plus souvent dans l’activité « Echanges » dans la rubrique
consacrée à l’interaction orale « Parler-interagir ». Dans Alors ?, les questions visant à
79 Grisard, A. (2010), Les documents authentiques dans les manuels de FLE : un outil pour le développement
d’une compétence interculturelle chez l’apprenant ?, Mémoire de Master 1, Université Stendhal-Grenoble 3.
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susciter une réflexion interculturelle sont placées dans les pages consacrées à la com-
préhension écrite, la compréhension orale, etc., suite à l’exploitation d’un document
porteur d’un contenu culturel, d’une question de société. Pour les rendre plus facilement
repérables, ces questions ont été présentées sous forme de bulles dans Alors ? 2.
Voici trois types d’activités récurrentes dans les manuels.
• Observation et repérage
L’activité la plus fréquente dans les pages culture consiste en un repérage d’indices à
partir de supports authentiques ou semi-authentiques afin de comprendre une pratique
culturelle. Grâce à ces activités de repérage et de compréhension, les apprenants vont
surtout acquérir des connaissances culturelles.
• Comparaisons et mise en perspective
Le deuxième type d’activité invite à une comparaison entre la culture française et celle
des apprenants.
« La démarche de comparaison s’établit sur une double approche : la différenciation et l’identification,
qui correspond à la problématique des « universels-singuliers » […]. Repérer les singularités de chaque
culture est selon N. Auger (2007) la première étape dans la construction de soi et la reconnaissance de
l’autre. Il faut se différencier pour affirmer son identité. L’identification et le rapprochement avec l’Autre
interviennent dans un deuxième temps, et sont d’autant plus facilitées que les auteurs des manuels, de par
les thèmes qu’ils traitent, « cherchent à montrer à l’apprenant quels sont les éléments susceptibles de les
rapprocher de celui dont il apprend la langue. » (Auger, 2007, p. 160). » (Grisard, 2010, p. 55)
Cette démarche de comparaison au cours de laquelle l’apprenant est censé adopter un
regard sur l’Autre et sur soi-même pourrait entrainer un phénomène de décentration
et permettre à l’apprenant de relativiser ses propres comportements culturels. En outre, Chapitre 8
fondée sur le fonctionnement des universaux singuliers, cette démarche Les compétences
culturelles et
« favorise le développement d’une humanité tout en respectant les spécificités selon les contextes, les
interculturelles
milieux de vie. » (Auger, 2007, p. 215).
Il faut rappeler que lorsque la classe rassemble des apprenants d’origine différente, en Page 101
milieu homoglotte80 notamment, les comparaisons s’élargissent et s’enrichissent grâce aux
diverses cultures d’origine représentées dans la classe. Ainsi, la rencontre interculturelle
se produit d’abord au sein de la classe, dans le cadre des travaux de groupe notamment.
Voici quelques exemples d’activités tirés de divers manuels81:
– « Chez vous, quels sont les loisirs chics ou populaires ? » (Alors ? A1, p. 55)
– « Dans votre pays aussi, le portable est très diffusé ? Est-ce qu’il fait partie des
objets à la mode ? » (Alors ? A2, p. 29)
– « Les lieux de cette liste caractérisent les villages français. Et chez vous, quels sont
les lieux caractéristiques des petits centres ? (Alors ? B1, p. 31)
– « Présentez ce que vous connaissez du temps de travail et des congés dans votre
pays. » « Ces problèmes existent-ils dans votre pays ? Discutez-en avec vos voisins. »
(Ici 2, p. 32-33).
– Selon vous, quels monuments représentent le mieux votre pays ? (A propos A2, p. 82)
– « Quels sont les symboles qui représentent votre pays ? » (A propos A2, p. 82)
– « Est-ce que la colocation est populaire dans votre pays ? » (A propos A1, p. 50)
–À la suite d’une observation à partir de photos, du baisemain, de l’accolade, d’un
baiser amoureux dans la rue : « Est-ce que ces comportements sont courants ou
possibles dans votre pays ? » (Alter Ego 1, p. 62)
80 En contexte homoglotte, la langue étrangère est apprise dans le pays où elle est parlée alors qu’en
contexte hétéroglotte, la langue enseignée n’est pas utilisée en dehors de l’espace classe.
81 Toutes ces questions sont formulées à la suite de la phase d’observation et de repérage évoquée précé-
demment.
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Ces activités de comparaison prennent en général la forme de discussions informelles ou
de conversations libres entre les apprenants et comme l’explique J.-C. Beacco, elles sont
polyvalentes dans le sens où il peut s’agir de :
« susciter la parole pour elle-même, de comparer ou de faire comparer les avis ou réactions des apprenants
entre eux ou de mettre en relation les deux ensembles culturels-nationaux, par exemple ». (Beacco, 2000, p. 78)
–« Vous êtes une femme ? Vous êtes un homme ? Pour les tâches ménagères, vous
préférez vivre en France ou dans votre pays ? Justifiez. » (Alter Ego 1, p. 79).
– « Que pensez de la situation des femmes ici ? Et chez vous ? » (Alors A1, p. 85)
– À propos du phénomène de migration des citadins vers les campagnes : « Est-ce
qu’il y a le même phénomène dans votre pays ? Qu’en pensez-vous ? » (Alors A1,
p. 145)
En répondant à ces questions, les apprenants sont conviés à donner leur point de vue et à
se positionner de façon subjective mais on peut se demander si cette démarche va suffire
pour susciter une décentration.
« Sauront-ils adopter une attitude de décentration alors que le manuel leur demande principalement de
parler d’eux-mêmes ? Sauront-ils relativiser leur point de vue simplement pour avoir vu l’existence d’autres
Chapitre 8
pratiques et s’être engagés dans un débat ? Sauront-ils s’ouvrir à l’autre et le comprendre simplement parce
Les compétences qu’ils ont été en contact avec des documents authentiques et les auront analysés ? » (Grisard, 2010, p. 62-63).
culturelles et
interculturelles Ces interrogations nous conduisent à évoquer maintenant les limites et les difficultés des
démarches qui viennent d’être présentées.
Page 102
Difficultés de ces démarches
Ces démarches, qu’il s’agisse des activités de comparaison ou des débats d’opinion,
surtout lorsque les apprenants s’expriment en langue étrangère, comportent certains
risques car elles peuvent donner lieu à des jugements de valeur et au renforcement de
stéréotypes.
Le stéréotype est associé au préjugé qui a « évolué vers le sens d’un jugement « défavo-
rable porté d’avance ». » (Auger, 2003, p. 29). N. Auger explique que :
« ces jugements figés ont une justification psychologique permettant « à chacun de catégoriser autrui sur
la base de caractéristiques facilement identifiables ». » (Flye Sainte Marie A, 1994). Ainsi, l’individu peut
s’identifier à son groupe de référence et se distinguer des autres groupes. Il s’agit donc de se rassurer tout
en opérant une pensée à l’économie. Il serait donc vain de dire aux élèves qu’ils ne doivent pas émettre de
stéréotypes, cette pratique étant inhérente à l’activité humaine. L’objectif est plutôt de leur montrer quand
et pourquoi les stéréotypes émergents. Car le problème du stéréotype est qu’il ne laisse pas la place à la
réflexion : les choses semblent fixées pour toujours et, plus grave encore, les gens, la langue, le pays sont
caractérisées intrinsèquement. » (Auger, 2003, p. 29).
Il existe des activités de sensibilisation classiques par rapport aux stéréotypes. Il s’agit
ainsi de :
« les répertorier à partir des apprenants (à l’aide de tests, par exemple) ou d’autres sources, mettre en évi-
dence leur mode de circulation et de transformation, les opposer entre eux pour mieux les relativiser, propo-
ser aux apprenants des stéréotypes venus d’ailleurs concernant leur propre société. » (Beacco, 2000, p. 120)
Dans leur Manuel de formation pratique pour le professeur de FLE, Bertocchini et
Costanzo proposent un exemple de ce type d’activité :
« a) d
ans un premier temps, on demande d’associer, individuellement et sans réflexion aucune, un mot et
une série d’items tels que : la France, les Français, des Français célèbres d’hier et d’aujourd’hui, des
inventions françaises, des produits français, etc ;
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b) à
partir des éléments les plus fréquents qui apparaissent dans les associations et qui nous disent aussi
quelles sont les catégories les plus riches (ex : cuisine, art, histoire..) on identifie le stéréotype collectif
du groupe et on évalue le résultat en termes d’attitude plus ou moins positive ;
c) o
n essaie de remonter à l’origine des différentes réponses (contact direct, média, histoire des relations
entre les deux pays, récit des amis qui ont voyagé dans le pays…) ;
d) o
n peut refaire le remue-méninge avec des items sur le pays d’origine des élèves pour identifier les sté-
réotypes internes et comparer ensuite les résultats.
L’objectif de cette activité est la prise de conscience de l’origine de ses propres représentations et du fait
que le groupe-classe est porteur dans son ensemble de stéréotypes positifs ou négatifs sur la France. À cela
s’ajoute un deuxième objectif (si on intègre le point d), celui de faire prendre conscience de l’existence de
stéréotypes internes pour son propre pays. » (Bertocchini, Costanzo, 2008, p. 156)
Ce type d’activité adaptable à d’autres thèmes peut permettre une prise de conscience
de représentations superficielles ou erronées, d’autant plus si les échanges se déroulent
en langue source, comme le proposent les auteurs d’Alors A1, dans une activité sur les
stéréotypes proche de celle qui vient d’être présentée : « Alors, la France pour vous c’est :
» (Alors A1, p. 13). Cependant, comme le souligne Beacco (2000, p. 120) « il n’est pas
certain que les représentations des apprenants se trouvent réellement déplacées par ces
remises en cause ouvertes ».
Dans un article intitulé « Manuels et stéréotypes », N. Auger explique que durant l’éla-
boration d’un manuel de FLE en Afrique en collaboration avec des professeurs nigérians
pour des étudiants :
« des visions différentes, et donc des représentations et des stéréotypes variés sur des thèmes majeurs de
la société tels que l’éducation, la famille, etc. ont été rassemblées. Un maximum de «témoignages » sur la
Chapitre 8
France, les Français et la langue ont été « croisés ». En même temps, l’apprenant est incité, par un ensemble
de questions, à avoir une attitude réflexive sur ses propres pratiques » (Auger, 2003, p. 31) Les compétences
culturelles et
Le compte-rendu de cette expérience nous conduit à évoquer une autre façon de tra- interculturelles
vailler sur les stéréotypes, qui consiste à faire prendre conscience aux apprenants de la
diversité interne d’un ensemble culturel (objectif défini dans les « savoirs » par le CECR). Page 103
Les concepteurs de manuel peuvent y contribuer en introduisant de la variation dans les
sujets traités, c’est-à-dire en rendant compte de la variété des points de vue et des pra-
tiques individuelles chez les Français eux-mêmes. On peut prendre l’exemple de l’unité 9
d’Alors ? A1 qui présente les différentes opinions des jeunes en matière d’éducation
familiale ou encore celui du manuel A propos A2 qui dans la double page « Rencontre
avec… » propose systématiquement des témoignages de Français ayant des opinions ou
des pratiques très différentes à propos d’un thème ou d’une pratique donnée (logement,
consommation de vin, évolution de la langue, etc.). Dans le dossier 3 par exemple, sur
le thème « La radio et vous », un des témoins n’écoute jamais la radio et télécharge la
musique sur Internet, un autre écoute différentes stations du matin au soir et le dernier
est fidèle à une station de radio.
La méthode Ici propose également une démarche intéressante sur cette question.
Conçue au départ pour être utilisée dans un milieu francophone, elle propose un
« fichier découvertes » grâce auquel les apprenants doivent réaliser des tâches d’obser-
vation et d’échanges en dehors de la classe pour découvrir leur environnement. Pour
répondre à la demande des éditeurs qui souhaitaient que la méthode puisse être utilisée
en milieu hétéroglotte, les auteurs de ce manuel ont été amenés à réaliser une version
internationale du « fichier découvertes ». Dans cette adaptation du fichier à un contexte
non francophone, les auteurs ont, entre autre, cherché à proposer des tâches (à réaliser
en dehors de la classe) permettant aux apprenants de prendre conscience de la diversité
culturelle inhérente à leur groupe d’origine.
8 1121 TG PA 00
Concernant les activités d’observation à partir de documents authentiques, A. Grisard
remarque :
« On demande aux apprenants de comprendre les informations présentes dans ces documents mais les
consignes ne proposent jamais d’analyse de la validité et de la portée de ces propos, de la source énoncia-
tive. » (Grisard, 2010, p. 59).
Comme l’explique J.-C. Beacco :
« Dans le cas des enseignements de langues, on pourrait croire que l’origine nationale du document
authentique suffit à en garantir la validité : il proposerait une information vraie parce qu’originelle. »
(Beacco, 2000, p. 81).
Or « Questionner l’énonciation permettrait notamment de relativiser l’image et le discours proposés car ils
comportent parfois des aspects réducteurs. » (Grisard, 2010, p. 59).
Pour conclure :
« On peut être certains que l’apprenant est bien informé, mais les manuels de FLE ne peuvent prétendre à
eux seuls faire de ce dernier un médiateur culturel. Ils peuvent tout au plus ouvrir cette voie, en proposant
une démarche « en miroir » autour de réflexions et de débats dans l’espace de la classe. Et d’autres acti-
vités que celles qu’ils proposent actuellement pourraient mener plus loin les apprenants dans cette voix.
G. Zarate proposait déjà en 1986, de faire un journal de bord qui documenterait les étapes de l’appren-
tissage interculturel de l’apprenant, permettrait de suivre son évolution et pourrait servir à l’auto-évalua-
tion. » (Grisard, 2010, p. 63).
À propos de cet exemple du journal de bord proposé par G. Zarate en 1986, il faut évo-
quer le « journal de vie » intégré au « fichier découvertes » du manuel Ici. À la fin de
chaque unité, l’apprenant est invité à raconter des expériences en remplissant ce journal
de vie présenté comme « le carnet de voyage de son apprentissage du français avec ses
Chapitre 8 rencontres, ses difficultés et ses petits bonheurs… » (Ici 1, p. 5).
Les compétences
culturelles et Même si certains manuels s’efforcent de proposer des démarches intéressantes du point
interculturelles de vue du développement des compétences culturelles et interculturelles, notamment
grâce aux informations complémentaires et aux suggestions d’activités fournies dans les
Page 104 guides pédagogiques, c’est à l’enseignant de compléter ces démarches en tenant compte
du contexte dans lequel il enseigne.
Enfin, en contexte d’enseignement/apprentissage d’une langue, l’interculturel se situe
d’abord au sein même de la classe, dans la manière d’appréhender le rapport à l’autre,
notamment dans les classes hétérogène du point de vue de l’origine des apprenants mais
pas seulement.
S’entraîner
Activité 23
Quelles questions formuleriez-vous afin d’étudier le traitement des dimensions cultu-
relles et interculturelles dans les manuels de FLE ?
Voir fascicule autocorrection.
Activité 24
À partir de l’observation de deux ou trois manuels récents dont vous disposez, répondez
aux questions suivantes :
–À
propos des contenus culturels abordés, y a-t-il des points communs d’un manuel à
l’autre ? Est-ce que « culture cultivée » et culture du quotidien sont tout autant repré-
sentées ? Est-ce qu’il vous semble que les apprenants vont pouvoir développer leurs
« savoirs socioculturels » (cf. CECR) grâce à ces manuels ?
8 1121 TG PA 00
–Q
uelle place est faite à la compétence interculturelle dans l’avant-propos du manuel ?
Quels sont les types d’activités proposés pour la mettre en œuvre et la développer ?
Des éléments de réponse à ces questions sont proposés dans le cours directement.
Si vous ne pouvez vous procurer facilement des manuels, vous pouvez faire cette activité
en vous appuyant sur les extraits de manuels mis à votre disposition dans le fascicule de
documents82. Mais dans ce cas, il ne vous sera pas possible de répondre aux questions
concernant les activités proposées.
(Activité d’enrichissement personnel, pas de corrigé prévu).
Retenir
Les principales démarches pour développer les compétences culturelles et intercul- Page 105
turelles des apprenants proposées par les manuels sont :
a) observation et repérage ;
b) comparaisons et mise en perspective ;
c) expression de son opinion et analyse.
Les limites de ces démarches proviennent de ce qu’elles peuvent contribuer à ren-
forcer des stéréotypes, d’où l’importance, mais aussi la difficulté, pour l’enseignant,
de mettre en place un travail sur ces représentations figées.
82 Fascicule « Documents », documents 19, 20, 22 et 23, p. 65, 67, 70, et 71.
8 1121 TG PA 00
Aller plus loin
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Chapitre 8 http://www.francparler-oif.org
Les compétences
culturelles et
http://www.edufle.net/La-dimension-interculturelle-dans.html
interculturelles
Page 106
8 1121 TG PA 00
Pour finir…
La première partie de ce cours sur les courants méthodologiques avait notamment
pour objectif de montrer que la rédaction du CECR puis sa diffusion au niveau mondial
a provoqué une redynamisation des recherches et des réflexions méthodologiques en
didactique des langues. La principale question soulevée est celle de l’existence d’un
paradigme dit « actionnel » qui remplacerait l’approche communicative. Mais d’autres
thèmes suscitent le débat ; J.-L. Chiss83 (2010, p. 94) évoque par exemple :
« la critique de la notion d’acte de parole dans sa capacité à organiser les contenus linguistiques à ensei-
gner, la grammaire congruente avec la dimension communicative restant encore à (re)construire ; le choix
à opérer entre approche globaliste et approche par compétences spécifiques (Beacco, 2007) ».
Cette vague de questionnements et de recherche sur certains principes méthodolo-
giques, impulsée par le Cadre, ne semble pas prête de s’arrêter. Ainsi, d’ici à ce que ce
cours sur les courants méthodologiques soit mis à jour, de nouvelles perspectives et de
nouvelles propositions auront sans aucun doute été faites dans ce domaine.
Pour achever ce cours nous souhaitons vous inviter à réfléchir à la question du choix
d’une méthodologie et/ou d’un manuel.
Pour cela, nous vous proposons de vous demander, en vous appuyant sur vos expériences
d’apprenant et/ou d’enseignant, quelle est la méthodologie ou quels sont les principes
méthodologique(s) les plus efficaces selon vous pour favoriser l’apprentissage.
En guise de réponse à cette question, deux étudiantes de master 1 ont confronté sur un
forum leur expérience de l’utilisation de la méthode Reflets (imposée par l’institution où
elles travaillaient) en tant qu’enseignantes avec des apprenants chinois en Chine84. Pour
l’une, qui enseignait auprès d’un public d’étudiants des beaux-arts ayant pour objectif
de venir étudier en France, l’utilisation de ce manuel fut une réussite :
« Ce qui est super c’est que tout le monde est au même niveau de compréhension dès le Page 107
départ. Par exemple : au début d’un épisode, on regarde quelques photos et on imagine
ce qui peut se passer. »
« c’est une excellente façon d’aborder le français ! et chaque intro d’un nouvel épisode
enthousiasme les étudiants car ils ont de plus en plus de moyens pour raconter et donc
imaginer !! »
Pour l’autre enseignante, l’exploitation de ce manuel avec son public fut beaucoup plus
difficile et laborieuse :
« Comme toi, j’ai enseigné à des étudiants chinois avec Reflets et mes étudiants ont mis
pas mal de temps à s’adapter au manuel parce qu’ils n’étaient pas habitués à écouter et
regarder, et de manière plus générale, à faire confiance à leur intuition. »
« Il a fallu d’abord que je leur explique clairement ce que j’attendais d’eux et comment
le manuel fonctionnait (je n’ai jamais eu à le faire avec mes étudiants américains qui sont
habitués à intervenir en classe). Ensuite, on s’est habitué à prendre la parole en classe et
à faire des jeux de rôles, à entrer dans la peau de quelqu’un d’autre. En fait, adopter une
approche communicative a été un vrai défi dans un contexte où la culture pédagogique
dominante était très différente. »
83 Chiss, J.-L. (2010), « La didactique des langues : contacts et méthodologies », Synergie Brésil n° spécial 1,
p. 93-96, p. 94.
84 Ces témoignages font état de l’utilisation d’un manuel et non de la mise en œuvre d’une méthodologie
mais à travers l’évocation du manuel en question, il est bien sûr question de certains principes méthodolo-
giques de l’approche communicative et de leur concrétisation dans les pratiques pédagogiques. Reflets est un
manuel communicatif orienté vers la communication orale et fondé sur l’utilisation de la vidéo proposant des
épisodes d’une histoire suivie à la manière d’un feuilleton.
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La confrontation de ces témoignages est intéressante à deux titres.
D’une part, on aurait pu imaginer a priori, qu’étant donnée l’origine des apprenants et
leur culture éducative, le recours à des principes méthodologiques issus de l’approche com-
municative à travers le manuel Reflets aurait été difficile dans les deux cas. Or, le témoi-
gnage de la première enseignante montre qu’il n’en a rien été et que ce manuel a tout de
suite convenu à son groupe d’apprenants chinois. Cette réussite peut être due à différents
facteurs comme le type d’étudiants (peut être une plus grande souplesse et adaptabilité
de la part d’étudiants des beaux-arts), leur projet d’étudier en France ou la personnalité de
l’enseignante. Ainsi, même si la culture d’apprentissage est un facteur essentiel à prendre
en compte en situation d’enseignement, d’autres facteurs sont évidemment décisifs et il
est difficile de dire lequel a une influence déterminante dans telle ou telle situation.
D’autre part, le second témoignage illustre la difficulté d’utilisation de manuels universa-
listes créés en France. Dans certains contextes étrangers, il est nécessaire de prévoir un temps
d’adaptation au manuel soit par un travail préalable, soit en limitant la vitesse d’avancement.
À chaque enseignant de développer son « approche du manuel ». L’exportation de manuels
et donc de principes méthodologiques ne peut tenir compte des spécificités de tous les pays
importateurs85. C’est donc à l’enseignant d’essayer de prendre en compte le contexte qui,
outre les caractéristiques des apprenants (profil, culture d’apprentissage, motivations, etc.),
intègre des données comme l’éloignement de la langue première par rapport à la langue
cible ou les ressources humaines et matérielles disponibles. Cette prise en compte peut éviter
un « plaquage » d’approches méthodologiques inappropriées. Ceci ne signifie surtout pas
qu’il faille défendre un immobilisme méthodologique mais qu’il importe de commencer par
essayer de comprendre certaines données du contexte afin de réfléchir aux principes métho-
dologiques qui peuvent être repris et adaptés86. Actuellement, des recherches en didactique
sont conduites dans cette perspective sous l’appellation de « contextualisation didactique »87
(Blanchet, en ligne) ou « didactique en contexte ».
Page 108 À l’issue de ce cours il nous semble donc important de rappeler qu’il existe différentes
méthodologies qu’il ne faut pas rejeter a priori. Bien entendu, passant en revue les dif-
férentes méthodologies qui ont marqué la didactique des langues, nous nous sommes
arrêtées plus longuement sur les apports du CECR et notamment la perspective action-
nelle. Pour autant, il serait regrettable d’en arriver à considérer qu’en dehors de la pers-
pective actionnelle « point de salut » car cela comporte des risques. Comme l’explique
J.-M. Robert à propos de l’approche communicative :
85 Dans le cadre de ce cours, nous n’avons travaillé qu’à partir d’exemples de méthodes dites « universa-
listes » parce qu’elles ne tiennent pas compte d’un contexte ou d’un public spécifique mais sont destinées au
plus grand nombre. Néanmoins, on peut citer le cas particulier d’Ici qui tout en se voulant universaliste a fait le
choix, dans sa première version, de s’adresser spécifiquement à un public d’apprenants en milieu homoglotte.
Il faut souligner, en outre, que des projets d’adaptation de manuels universalistes dans des contextes particu-
liers existent. Ainsi, un projet d’adaptation de la méthode Connexions pour des lycéens au Kenya est en cours.
L’adaptation, dans ce cas, concerne spécifiquement les aspects culturels qui dans les méthodes universalistes ne
sont pas suffisamment (ou pas du tout) orientées vers les réalités culturelles de l’Afrique francophone intéres-
santes pour un public africain.
86 Par exemple, dans des situations d’enseignement à des grands groupes (une soixantaine d’étudiants par
exemple), il est difficilement envisageable de mettre en œuvre des pratiques de classe privilégiant avant tout
l’expression orale des apprenants. En revanche, certains principes de l’approche communicative comme l’uti-
lisation de documents authentiques, le travail des quatre aptitudes, l’enseignement explicite et inductif de la
grammaire peuvent être maintenus.
87 Blanchet, P. (2009), « « Contextualisation didactique » : de quoi parle-t-on ? », Extrait du Bulletin « Le
français à l’université ». http://www.bulletin.auf.org
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« Dans les centres de didactique, on a servi aux étudiants le plat unique : approche communicative et,
aujourd’hui approche actionnelle. Les jeunes enseignants n’ont connu que ça et se sont trouvés fort
désorientés devant des étudiants chinois rétifs à cette méthode, incapables de leur proposer autre chose,
persuadés qu’ils étaient que c’était là la vérité pédagogique à mettre en œuvre. »88.
Rappelons donc avec J.C. Beacco que « la pertinence des choix méthodologiques s’appré-
hende par rapport à des apprenants et à des contextes d’enseignement précis » (2007).
C’est également ce qu’affirment les auteurs du CECR dans les termes suivants :
« Le conseil de l’Europe a pour principe méthodologique fondamental de considérer que les méthodes à
mettre en œuvre pour l’apprentissage, l’enseignement et la recherche sont celles que l’on considère comme
les plus efficaces pour atteindre les objectifs convenus en fonction des apprenants concernés dans leur
environnement social. L’efficacité est subordonnée aux motivations et aux caractéristiques des apprenants
ainsi qu’à la nature des ressources humaines et matérielles que l’on peut mettre en jeu ». (CECR, 2001, p.18)
Pour terminer, nous vous invitons à lire un article de D. Abry89. Cet article nous semble
constituer une très bonne conclusion de ce cours, d’une part, parce qu’il pointe les dif-
férents paramètres à prendre en compte dans le choix d’un manuel, d’autre part, parce
que les différentes questions posées par l’auteure peuvent constituer une sorte de grille
d’analyse susceptible de vous aider dans la réalisation de votre dossier.
Nous vous souhaitons un très bon travail !
Page 109
88 Robert, J.-M., (2010), « Pour des stratégies d’apprentissage différenciées », Le français dans le monde
n°368. Sur la question des cultures pédagogiques et cultures d’apprentissage vous pouvez consulter l’ouvrage
suivant : Beacco, Chiss, Cicurel Véronique eds. (2005), Les cultures éducatives et linguistiques dans l’enseigne-
ment des langues, Paris, PUF.
89 Abry, D., (2009), « Manuel de FLE un choix délicat », Le français dans le monde n° 363. Fascicule
« Documents », document 37, p. 100.
8 1121 TG PA 00
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