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2020 12:37

Lien social et Politiques

Inégalités sociales de santé : quels impacts sur l’accès aux soins


de prévention ?
Social Inequalities of Health : What Consequences for Access to
Preventive Care ?
Jean Pascal, Hélène Abbey-Huguenin et Pierre Lombrail

La santé au risque du social Résumé de l'article


Numéro 55, printemps 2006 En abordant la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé sous
l’angle exclusif de l’amélioration de l’accès aux soins des populations les plus
URI : https://id.erudit.org/iderudit/013229ar « vulnérables », les politiques et programmes de santé considèrent une seule
DOI : https://doi.org/10.7202/013229ar dimension de ces inégalités, alors qu’elles traversent l’ensemble de la
hiérarchie sociale. Or, si les disparités d’accès aux soins préventifs ne
constituent pas le déterminant principal des inégalités sociales de santé, dans
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un modèle de soins français essentiellement curatif, elles ne sont pas
négligeables dans leur production. Cependant, les mesures visant à élargir
l’accès aux soins de prévention ne sont pas les seules à mettre en oeuvre pour
Éditeur(s) réduire les inégalités sociales de santé, qui traversent l’ensemble de la
hiérarchie sociale.
Lien social et Politiques

ISSN
1204-3206 (imprimé)
1703-9665 (numérique)

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Pascal, J., Abbey-Huguenin, H. & Lombrail, P. (2006). Inégalités sociales de
santé : quels impacts sur l’accès aux soins de prévention ? Lien social et
Politiques, (55), 115–124. https://doi.org/10.7202/013229ar

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Inégalités sociales de santé : quels impacts sur l’accès †

aux soins de prévention ? †

Jean Pascal, Hélène Abbey-Huguenin et Pierre Lombrail

Inégalités sociales de santé tion, du sexe ou de l’origine ethnique. lement, la mortalité prématurée évi-
Ainsi, les disparités constatées (de table y est la plus forte, notamment
Les différences sociales d’état de consommation médicale, de prise en chez les hommes (HCSP, 2002). Ce
santé sont qualifiées d’inégalités charge…) ne peuvent être qualifiées paradoxe trouverait en partie son
sociales de santé, dans la mesure où d’inégalités sociales que dans la explication dans un système de santé
elles concernent un objet socialement mesure où elles ont des effets négatifs marqué par de profondes inégalités
valorisé (la santé), où elles renvoient sur la santé en rapport avec des rela- sociales de santé (Lombrail et al.,
à une hiérarchie sociale et où le prin- tions sociales hiérarchiques. Sinon, il 2005). Ainsi, quels que soient les
cipe de justice sociale est en cause s’agit simplement de différences. indicateurs de santé considérés : mor-

(Aïach et al., 2004). Ainsi, pour par- talité, morbidité, incapacités, santé
ler d’inégalités sociales de santé, quel Les inégalités sociales de santé perçue ou qualité de vie, apparais-
que soit l’objet considéré, deux sont constatées tout au long de sent d’importants gradients selon les
conditions doivent être réunies. l’échelle sociale et ne concernent pas milieux sociaux, la profession, le
D’une part, il doit s’agir d’un objet seulement les plus défavorisés, niveau d’études… Les enquêtes suc-
socialement valorisé, comme la santé même ci ces derniers sont particuliè- cessives de l’IRDES sur la santé et la
par opposition à la maladie, mais ce rement concernés (Leclerc et al., protection sociale des assurés
peut être également le sentiment de 2000). Elles sont le résultat d’inéga- sociaux français, montrent une nette
bien-être par rapport à la souffrance, lités sociales structurelles qui carac- dégradation de l’état de santé au fur
ou des soins efficaces par rapport à térisent un pays à un moment donné et à mesure que le niveau d’études
d’autres qui ne le sont pas. D’autre de son histoire et de son développe- baisse, et le lien étroit entre niveau
part, cet objet socialement valorisé ment économique. Elles ont pour ori- de revenu du ménage et morbidité,
doit concerner des groupes sociaux gine des choix de société en matière même après correction de l’effet de
hiérarchisés dans une position domi- d’emploi, de logement, d’éduca- l’âge et du sexe (Auvray et al., 2001;
nant-dominé : les classes sociales, les
† tion… Si la France présente de bons Auvray et al., 2003). L’épidémie
catégories socioprofessionnelles, les indicateurs globaux de santé et que d’obésité frappe inégalement suivant
groupes différenciés en fonction du l’espérance de vie féminine y est une l’appartenance sociale : sa préva-

revenu, de la richesse, de l’instruc- des plus élevées d’Europe, paradoxa- lence atteint 17 % des foyers dispo-

Lien social et Politiques–RIAC, 55, La santé au risque du social. Printemps 2006, pages 115-124.
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LIEN SOCIAL ET POLITIQUES–RIAC, 55 loin d’être tous élucidés. De nom- chosociaux intermédiaires. Ces inter-
breux modèles s’appuyant sur des actions peuvent survenir tout au long
Inégalités sociales de santé : quels impacts
théories sociales et les résultats de de la trajectoire de vie des individus.

sur l’accès aux soins de prévention ? †

recherches en épidémiologie sociale Ainsi, les problèmes vécus lors de


ont été proposés pour les expliciter l’enfance auraient des répercussions
(Chauvin, 1998; Mackenbach et al., sur l’état de santé à l’âge adulte,
2002). Ils intègrent, d’une part, les notamment dans les milieux sociaux
déterminants « classiques » de la
† † défavorisés (Menahem, 1994;
santé des populations et des indivi- Menahem, 2004).
dus que sont les facteurs environne-
mentaux, sociaux et physiques, les Les déterminants intermédiaires
déterminants biologiques, les déter- auraient un impact sur l’état de santé
116 minants relatifs au mode de vie, par le biais de facteurs plus « proxi-

l’offre de services de santé et les maux » que sont les comportements


déterminants du recours et de l’ac- de santé et les modalités d’accès aux


sant d’un revenu mensuel inférieur à soins. Les disparités d’accès aux
900 euros contre 8,1 % de ceux cessibilité à ces services, et, d’autre

part, des déterminants « intermé- soins peuvent être source d’inégalité


vivant avec plus 5300 euros par mois †

sociale dans la mesure où elles ont


diaires » ou « psychosociaux ».
(Blanchard, 2006). C’est vrai dès
† † †

des effets sur la santé des groupes


l’enfance : chez les 5-12 ans, 23 %
† †
Les travaux de recherche ont, en sociaux en rapport avec des relations
des enfants d’ouvriers et de chô- effet, souligné l’importance des sociales hiérarchiques (Surault,
meurs sont en surpoids, contre 6,5 % †
caractéristiques psychosociales et 2004). C’est le cas, par exemple,
des enfants de cadres et de profes- comportementales individuelles et lorsque les besoins de soins ne sont
sions libérales. Plus spécifiquement, celle du réseau social dans la déter- pas suivis d’accès ou lorsque les
si on considère que le travail est un mination de l’état de santé (Berkman soins délivrés ne conduisent pas à
« privilège » des personnes en bonne
† †
et al., 2000). Ainsi, l’estime de soi et des résultats de santé identiques
santé, il n’en est pas moins un fac- les capacités d’adaptation, la place selon la situation sociale des per-
teur de dégradation de la santé, et occupée dans la hiérarchie sociale, la sonnes (Lombrail et al., 2004).
cela de manière très inégale selon la richesse du réseau social construit
catégorie socioprofessionnelle et la autour de l’individu, la satisfaction Inégalités sociales d’accès aux
catégorie d’emploi. Les résultats de au travail, le degré de maîtrise ou soins
l’étude Sumer 2003, portant sur l’ex- d’impuissance face à son avenir, les
position aux produits cancérogènes L’expression accès aux soins est
représentations de la santé et l’atten-
de 17,5 millions de salariés français, polysémique et désigne tout autant
tion portée à sa santé, la hiérarchisa-
montrent que si plus de 2 millions une possibilité ou accessibilité,
tion des besoins de santé par rapport
sont exposés, 70 % sont des ouvriers, notamment en termes de droits
† aux autres besoins jugés importants
et les hommes sont 4 fois plus expo- sociaux, que l’usage ou recours qui
par la personne, l’intériorisation des
sés que les femmes (DARES, 2005). en est fait ou pas. Il est classique de
normes médicales et les expériences
Ce sont les jeunes de moins de 25 se référer au concept d’accessibilité
antérieures ou familiales de maladie
ans, les apprentis ou les personnes en développé par Andersen (Andersen
et de recours aux soins seraient autant
contrat de formation, les intérimaires et al., 1977). L’accès aux soins se
de facteurs associés à l’état de santé.
ou les CDD qui sont les plus touchés, décline en « accès potentiel » ou pos-
† †

justifiant d’ailleurs la nécessité de Ces modèles se distinguent en sibilité d’accéder aux soins (accessi-
prendre en compte ce que certains fonction de l’importance qu’ils bilité) et en « accès réalisé » ou
† †

appellent « la nouvelle question



accordent aux différents facteurs, recours aux soins. L’accès aux ser-
sociale ». †
mais considèrent tous que les déter- vices de santé est décrit comme la
minants sociaux interagissent sur résultante de trois ordres de facteurs : †

Les mécanismes par lesquels les l’état de santé selon un mécanisme déterminants sociétaux, caractéris-
inégalités sociales produisent des de causalité en chaîne faisant inter- tiques du système de soins et déter-
inégalités de santé sont complexes et venir les différents déterminants psy- minants individuels (Andersen et al.,
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1978). Les déterminants individuels sion : l’orientation majoritairement


† qualifiés, mais le taux d’hospitalisa-
recouvriraient, outre l’état de santé curative du système de soins fran- tion est plus faible. L’enquête
perçu, des facteurs prédisposants çais; le manque de personnel, notam- Baromètre santé 2000 du Comité
(caractéristiques démographiques, ment social, dans les hôpitaux, français d’éducation pour la santé
niveau d’instruction, catégorie socio- empêchant un accompagnement (actuel Institut national de promotion
professionnelle, opinions et croyances adapté des publics défavorisés; la et d’éducation pour la santé) souligne
des individus) et des facteurs favori- conception que les médecins ont de que, si le recours aux différents pro-
sants (correspondant à la capacité leur mission; les difficultés rencon- fessionnels de santé est très fréquent
des individus à se procurer des ser- trées par les médecins généralistes parmi les 18-75 ans, quels que soient
vices de soins en fonction de leurs libéraux pour toucher les patients les l’âge et le sexe, des différences appa-
besoins : le niveau de revenu, le type
† plus à risque; la perception que les raissent selon le niveau d’études ou
de protection sociale, l’existence personnes défavorisées ont de leur de revenu. Les plus diplômés avaient
d’une source de soins habituelle). En état de santé. Les inégalités par significativement moins consulté de 117
termes de référence, l’institut de « construction » résultent de l’ab-
† † médecins généralistes au cours des
médecine des États-Unis a défini sence de prise en compte des inégali- 12 mois précédant l’enquête, mais
l’accès aux soins comme l’utilisation tés dans l’élaboration de certains étaient plus nombreux à être allés
en temps utile des services de santé programmes ou recommandations. Il chez un gynécologue ou un autre
par les individus de façon à atteindre s’agit, par exemple, de l’absence de médecin. Par ailleurs, la proportion
le meilleur résultat possible en prise en compte de la situation de consultants de spécialistes, en par-
termes de santé (Lurie, 1997). sociale des personnes. Il en est ainsi ticulier des gynécologues, était plus
L’accès aux soins est décliné en de certaines recommandations de élevée pour les personnes disposant
« accès primaire », c’est-à-dire l’en-
† † pratiques médicales visant des de plus forts revenus.
trée dans le système de soins ou son pathologies pour lesquelles la situa-
degré d’utilisation, et en « accès † tion sociale conditionne la probabi- Dans l’exemple de la prévention
secondaire », correspondant à la
† lité de leur survenue et (ou) de leur secondaire du cancer du sein, la litté-
manière structurellement déterminée prévention (Lang, 2005). rature montre que les femmes parti-
dont se déroulent les soins après un cipant moins aux programmes de
premier contact. Les modalités d’accès aux soins et dépistage organisé du cancer du sein
la nature des soins consommés sont plus âgées, ont un niveau
Si l’on considère le rôle du sys- varient en fonction de la situation d’études plus bas et appartiennent à
tème de soins dans la genèse d’in- sociale des individus (Leclerc et al., une catégorie socioéconomique
égalités sociales de santé, le rôle de 2000). Lorsque l’on monte dans la moins élevée que les autres
l’accessibilité secondaire aux ser- hiérarchie sociale, les soins sont de (Makdessi-Raynaud, 2005). Les
vices de santé nous semble avoir plus en plus spécialisés, avec davan- femmes qui bénéficient le moins de
longtemps été sous-estimé. Pourtant, tage d’analyses biologiques, de frottis de dépistage du cancer du col
les inégalités d’accès secondaire aux recours aux médecins spécialistes, de l’utérus sont, de même, celles qui
soins peuvent revêtir deux formes : † aux kinésithérapeutes, aux dentistes, ont les plus bas niveaux de revenu, et
inégalités par « omission » et inégali-
† † et un moindre recours aux médecins le plus bas niveau d’études (Chan
tés par « construction » (Lombrail et
† † généralistes, aux infirmières ou à Chee et al., 2005). En l’absence de
al., 2004). Les inégalités par « omis- † l’hospitalisation. Dans les milieux possibilité de prévention primaire de
sion » sont liées au fonctionnement
† modestes, en termes d’accès aux ce cancer, seul un diagnostic précoce
même du système de soins, dans soins primaires, les personnes ont permet une prise en charge thérapeu-
lequel dominent les soins curatifs. plus tendance à recourir à l’hôpital tique plus précoce et une améliora-
Elles sont non intentionnelles et qu’à la médecine de ville (Surault, tion de son pronostic. Les travaux de
résultent essentiellement d’un défaut 2004). L’enquête sur la santé et la l’Institut national de veille sanitaire
de coordination entre professionnels protection sociale menée en 2000 (InVS) montrent que le délai de prise
ou structures, au cours des trajec- (Auvray et al., 2001) montre que le en charge après dépistage est trop
toires des patients ou des contacts recours au médecin spécialiste chez long dans notre pays (Ancelle-Park
élémentaires. Plusieurs éléments par- les cadres est près de deux fois plus et al., 2002). Si l’objectif final est de
ticiperaient à ces inégalités par omis- fréquent que pour les ouvriers non réduire la mortalité évitable, il fau-
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LIEN SOCIAL ET POLITIQUES–RIAC, 55 Les politiques publiques mises en sociales de santé, mais elles ne sont
œuvre et susceptibles de contribuer à pas négligeables dans leur produc-
Inégalités sociales de santé : quels impacts
la réduction des inégalités sociales de tion, en aggravant les inégalités face

sur l’accès aux soins de prévention ? †

santé sont avant tout des politiques à la maladie (HCSP, 2002). Les taux
orientées vers la lutte contre les de fumeurs les plus élevés s’obser-
exclusions (Loi d’orientation relative vent dans les milieux sociaux défa-
à la lutte contre les exclusions, 1998), vorisés (Auvray et al., 2001). La
reposant sur une logique assistan- consommation d’alcool varie en
cielle et visant à garantir aux plus fonction de la catégorie socioprofes-
démunis l’égalité d’accès aux soins, à sionnelle et elle est plus élevée chez
l’exemple de la mise en place de la les ouvriers et les artisans (Brixi et
Couverture maladie universelle, en al., 2000). Le Baromètre santé
118 2000 (loi du 27 juillet 1999, titre II). adultes 1995-1996 mettait en évi-
dence que les personnes de plus haut
La réduction des inégalités niveau d’études et des catégories
drait que les suites d’un dépistage sociales de santé dans notre pays socioprofessionnelles les plus éle-
positif soient gérées au mieux pour serait essentiellement envisagée par vées avaient plus souvent été vacci-
qu’une prise en charge de qualité le politique sous l’angle de l’accès nées dans les dix ans que les autres
suive dans les meilleurs délais. Or, ce primaire aux soins, en privilégiant (Janvrin et al., 1997). Ces disparités
n’est pas proposé par le système de une approche par populations spéci- sociales n’apparaissaient pas dans le
soins français, à la différence de ce qui fiques en direction des plus démunis, Baromètre santé 2000. Cependant,
se passe dans d’autres pays de essentiellement définis comme étant parmi les femmes, les plus diplô-
l’Europe, et laisse donc le libre en situation de précarité sociale. Cela mées avaient un meilleur niveau de
champ, par exemple, à de fortes inéga- est bien illustré par la loi du 9 août connaissance sur le vaccin ROR que
lités d’accès aux soins secondaires 2004 relative à la politique de santé les autres (Guagliardo et al., 2001).
(Lombrail et al., 2005). L’enquête sur publique. Cependant, les mesures
la santé, les soins et la protection visant à améliorer l’accès aux soins Les disparités sociales constatées
sociale publiée, en 2000, par le des plus démunis ne sont pas les dans le domaine de la prévention
CREDES montrait que les femmes seules à mettre en œuvre pour réduire relèvent du domaine des représenta-
dont les conditions de vie étaient les les inégalités sociales de santé qui tions et attitudes vis-à-vis de la pré-
plus difficiles avaient à la fois un traversent l’ensemble de la hiérarchie vention, des comportements à risque
moindre recours et un recours retardé sociale. Elles ne se superposent pas, pour la santé, de l’accès aux soins
à l’examen gynécologique et à la la précarité sociale définissant une préventifs et de l’attitude des profes-
mammographie (Auvray et al., 2001). situation et une catégorie, la hiérar- sionnels de santé. Ce dernier point
chie sociale caractérisant un état est peu étudié. Pourtant, des études
Réduction des inégalités sociales structurel et un fait relationnel. Ainsi, ont montré que les pratiques de pré-
d’accès aux soins de prévention des mesures systémiques de portée vention des professionnels de santé
plus générale sont également néces- différaient en fonction du profil
La reconnaissance par les pouvoirs socioéconomique des patients. Des
saires, pour améliorer l’état de santé
publics des inégalités sociales de actes de prévention, comme le dépis-
de l’ensemble de la population
santé est relativement tardive : la hié- tage des cancers gynécologiques ou
(Mackenbach et al., 2002) : d’une

rarchisation par catégories sociopro- la dispense de conseils pour l’arrêt


part, des mesures visant les autres
fessionnelles (CSP) de la mortalité du tabac, seraient moins souvent réa-
déterminants (les conditions de tra-
objectivée par les premiers résultats lisés pour les populations défavori-
vail notamment), d’autre part, des
de l’enquête longitudinale de sées (Heremans et al., 1999). En
mesures favorisant l’accès secondaire
l’Institut national de la statistique et outre, les médecins généralistes ont
aux soins, notamment, préventifs.
des études économiques (INSEE), parfois du mal à adapter leur pratique
publiés à partir de 1965, n’a pas été Certes, les disparités d’accès aux vis-à-vis des patients en situation de
perçue comme une composante des soins préventifs ne constituent pas le précarité sociale, qui ont des
inégalités sociales (Drulhe, 2000). déterminant principal des inégalités demandes complexes et des plaintes
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multiples faites de souffrance phy- conduite ou de style de vie. Or, la qualité du système de santé, qui
sique, psychique et sociale. Les façon dont les comportements sont donne au droit sanitaire français une
consultations avec ces patients conceptualisés détermine la façon définition précise de la politique à
nécessitent plus de temps pour bien dont ils seront pris en compte par la suivre en matière de prévention. Elle
comprendre la situation, résoudre les santé publique (Mann, 1998). inscrit celle-ci dans le Code de la
problèmes sociaux et convaincre les santé publique (article L1417-1). Cet
Les modèles théoriques accordent
patients d’adhérer aux soins. En l’ab- article précise que la politique de
plus ou moins d’importance à tel ou
sence de structuration du système prévention a pour but d’améliorer
tel facteur, et ils sont plus ou moins
sanitaire et social local, ces l’état de santé de la population en
bien adaptés en fonction du type de
contraintes peuvent décourager le évitant l’apparition, le développe-
comportement étudié (recours aux
médecin de s’engager dans une telle ment ou l’aggravation des maladies
services de soins, comportement en
démarche (Dubreuil et al., 1998). ou accidents et en favorisant les
général ou spécifiquement en lien
Les soins préventifs ne sont alors pas comportements individuels et collec- 119
avec la santé…). Il existe ainsi une
la priorité, et la prise en charge est tifs pouvant contribuer à réduire le
vingtaine de modèles visant à expli-
réduite au strict nécessaire. risque de maladie et d’accident. Il
citer les comportements. D’autres
introduit la notion de promotion de la
facteurs psychosociaux, pas toujours
Les facteurs de recours aux soins santé, qui doit donner à chacun les
bien intégrés dans ces modèles, peu-
de prévention moyens de protéger et d’améliorer sa
vent influencer notablement les com-
propre santé. Ainsi définie, la poli-
Des modèles théoriques ont été portements, comme le stress perçu
tique de prévention a, notamment,
construits par les chercheurs en ou le soutien social. Ainsi, plus
pour vocation d’améliorer les condi-
sciences psychosociales pour explici- récemment des modèles ont été
tions de vie et de réduire les inégali-
ter pourquoi les personnes adoptent développés par les tenants de la psy-
tés sociales et territoriales de santé.
ou non un comportement donné, chologie de la santé qui s’intéressent
La loi invite à l’instauration de pro-
notamment en matière de recours à la à l’étude de l’adoption des comporte-
grammes prioritaires nationaux de
prévention (Godin, 1991). Par ments favorables à la santé, notam-
prévention (article L1417-2) et pré-
ailleurs, des cadres conceptuels ont ment en matière de prévention
voit la mise en place d’un comité
été élaborés pour expliciter l’utilisa- individuelle, tel que développé dans
national technique de prévention
tion des services de santé. Les études le modèle intégratif et pluri-factoriel
(article L1417-3). Elle crée un éta-
menées pour identifier les facteurs (Bruchon-Schweitzer, 2002).
blissement public de l’État, l’Institut
liés à la participation aux programmes national de promotion et d’éducation
de prévention, en particulier de dépis-
Politique de prévention
pour la santé (INPES), destiné à être
tage, ou les motifs de résistance ou L’appropriation du concept de l’opérateur des pouvoirs publics
d’adhésion se sont appuyées sur ces prévention dans le droit sanitaire dans le domaine de la prévention et
théories et cadres conceptuels. français est relativement tardive (les de la promotion de la santé.
pays anglo-saxons ont agi plus tôt).
Différents types de facteurs peu- Plus récemment, la loi du 9 août
Il en est initialement question, de
vent influencer les comportements 2004 relative à la politique de santé
façon indirecte, dans le Code de la
de santé. Il est classique de distin- publique reprend ce concept de pré-
sécurité sociale confiant, en 1988,
guer des facteurs génétiques, sociaux vention et le replace dans le cadre
une mission de prévention aux
(telle l’incitation sociale) et émotion- plus large d’une politique de santé
Caisses d’assurance maladie (article
nels (par exemple quand l’adoption publique. Elle énonce que cette poli-
L262-1), puis plus récemment dans
d’un comportement est source de tique de santé publique concerne,
la loi de 1998 relative à la lutte
plaisir immédiat), les croyances et notamment, la prévention des mala-
contre les exclusions instaurant des
les représentations, la santé perçue et dies, des traumatismes et des incapa-
programmes d’accès à la prévention.
les croyances et représentations des cités. Ce choix renvoie à la définition
Cependant, il s’agit de références
professionnels. Les comportements classique retenue par l’OMS et élar-
générales à la prévention.
ne sont d’ailleurs pas indépendants git le champ de la prévention aux
les uns des autres, de sorte que cer- C’est la loi du 4 mars 2002, rela- actions d’information et d’éducation
tains auteurs utilisent la notion de tive aux droits des malades et à la à la santé. Cette loi prévoit, en outre,
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LIEN SOCIAL ET POLITIQUES–RIAC, 55 progressif des liens sociaux tradi- monétaires avec d’autres, notam-
tionnels, la proportion de personnes ment ceux relatifs au logement et à
Inégalités sociales de santé : quels impacts
confrontées à des situations de fragi- l’emploi, pour avoir une idée plus

sur l’accès aux soins de prévention ? †

lité sociale a crû progressivement. précise des caractéristiques des


Parallèlement, le concept de « frac-† familles touchées par la pauvreté. En
ture sociale » est apparu dans le dis-
† 2001, selon l’INSEE, le seuil de pau-
cours politique. Ainsi, en France, les vreté, correspondant en France à la
politiques de réduction des inégalités demi-médiane du revenu par unité de
de santé privilégient des approches consommation, variait de 602 euros
dirigées vers des groupes « vulné-
† pour une personne seule à 1505
rables ». Pour pouvoir mettre en

euros pour un couple avec deux
œuvre des interventions ciblées en enfants de plus de 14 ans. Le nombre
120 direction de catégories de popula- de personnes pauvres était estimé à
tions spécifiques, à l’exemple de 3,6 millions, soit près de 6 % de la

programmes de prévention tels que population française.


l’existence de programmes de préven-
préconisés dans la loi relative à la
tion, dans le cadre desquels sont pré- La grande pauvreté est définie par
politique de santé publique, il est
vus des consultations médicales l’INSEE comme l’état d’un foyer
nécessaire, d’une part, de définir les
périodiques de prévention et des exa- dont le revenu est inférieur ou égal à
limites de ces populations et, d’autre
mens de dépistage. Si elle ne permet un tiers du revenu médian. Elle est
part, d’essayer de les identifier. Les
pas de préjuger de l’engagement des termes de pauvreté, de grande pau- souvent associée à d’autres situations
pouvoirs publics français en la vreté, d’exclusion ou de précarité socioéconomiques : une pauvreté

matière, elle énonce que la réduction sociale sont souvent employés de héritée ou ancienne; une accumula-
des inégalités de santé est une des res- façon indifférenciée, en particulier tion de plusieurs handicaps dans des
ponsabilités de l’État et un des neuf par le politique ou les médias, alors domaines essentiels comme la santé,
principes à l’origine de la politique de qu’ils renvoient à des réalités le logement ou l’éducation; l’apparte-
santé publique. L’article L1411-1-1 sociales différenciées et évoluent en nance à un groupe ethnique vivant en
énonce ainsi que « l’accès à la préven-

fonction du contexte social et poli- France depuis moins de dix ans; une
tion et aux soins des populations fra- tique et des représentations sociales histoire marquée par des ruptures
gilisées constitue un objectif (Paugam, 1996). Il devient néces- importantes; un sentiment de diffé-
prioritaire de la politique de santé. saire de préciser des définitions, rence, de non-appartenance, de rejet
Les programmes de santé publique notamment s’il s’agit de repérer ces conduisant à la marginalisation.
mis en œuvre par l’État ainsi que par populations, afin de répondre en par-
les collectivités territoriales et les L’exclusion est à la fois un pro-
tie à la question, tout en sachant qu’il
organismes d’assurance maladie cessus et un état, consacrant un
s’agit d’un processus dynamique qui
prennent en compte les difficultés défaut d’intégration (ONPES, 2000).
peut évoluer dans le temps.
spécifiques des populations fragili- Elle est notamment caractérisée par
sées ». Elle réaffirme, par ailleurs,

C’est l’assistance qu’une per- l’absence (pendant une période plus
l’obligation de mettre en œuvre dans sonne reçoit publiquement de la col- ou moins longue) de la possibilité de
chaque région des Programmes régio- lectivité qui détermine son statut de bénéficier des droits attachés à la
pauvre, critère de son appartenance situation sociale et à l’histoire de
naux pour l’accès à la prévention et
sociale à une strate spécifique de la l’individu concerné. Un « exclu » est
aux soins (PRAPS).
† †

population (Paugam, 2006), à un une personne qui se trouve dans un


Des populations ciblées moment donné de son existence. état de pauvreté et ne bénéficie pas
L’approche descriptive et quantita- — parce qu’elle n’en a pas le droit,
Suite aux profonds changements tive des pauvres renvoie classique- ignore ses droits, ou n’a pas l’énergie
socioéconomiques auxquels est sou- ment à des indicateurs monétaires, et de faire les démarches nécessaires —
mise la société française depuis plus les pauvres sont définis par rapport à des possibilités d’aide correspondant
de vingt ans, tels la dégradation du un seuil de pauvreté. Il est toutefois le plus à sa situation (revenu, loge-
marché du travail ou le délitement nécessaire de croiser ces indicateurs ment, école, santé). L’exclusion
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recouvre donc la dimension écono- La précarité recouvre ainsi des al., 2004). Toutefois, nous avons été
mique (absence d’emploi et insuffi- situations sociales très diverses, amenés à construire et évaluer un
sance répétée de ressources), la conséquences de processus de préca- outil de repérage des personnes en
non-reconnaissance ou le non-usage risation d’origine variée : précarisa-
† situation de précarité sociale venant
des droits (sociaux, civils et poli- tion de l’emploi et du travail, érosion consulter à l’hôpital (Pascal et al.,
tiques) et les relations sociales. En des solidarités familiales, fragilisation 2006). Cette démarche a été conduite
1998, « les exclus » représentaient
† †
due à la maladie ou à la faible santé… dans le cadre d’un Programme hospi-
0,5 % de la population française, soit

Ces processus, caractérisés par l’in- talier de recherche clinique national,
300 000 personnes (HCSP, 1998). stabilité des situations, correspondent sur les pertes de chances médicales
à un enchaînement d’événements et des patients en situation de précarité
La précarité ne doit pas être d’expériences qui débouchent sur des sociale venant consulter à l’hôpital
confondue avec l’exclusion ou la situations de fragilisation écono- public; il s’agissait aussi d’identifier
pauvreté. Elle touche en réalité une mique, sociale et familiale. Ainsi, dès et de proposer des modèles de rattra- 121
partie de la population française qui lors qu’une fragilité dure et qu’elle se page des inégalités sociales de soins
va bien au-delà des populations cumule avec d’autres fragilités, soit de prévention à l’échelle de l’hôpital
pauvres ou exclues. En France, les acquises précédemment, soit surgis- et du territoire de santé concerné.
acteurs sociaux font souvent réfé- sant à l’occasion de la difficulté prin-
rence à la définition retenue par le cipale, le risque de précarisation croît Alors qu’il s’agit d’un phénomène
Conseil économique et social, en fortement. Ces processus sont dyna- en perpétuel mouvement, caractérisé
1987, donnée par Wresinski : « La † † miques et évoluent constamment. Les par l’instabilité des trajectoires de vie
précarité est l’absence d’une ou plu- situations de précarité sont donc sus- individuelles, souvent transitoire, la
ceptibles d’être transitoires et réver- catégorisation présente la précarité
sieurs des sécurités permettant aux
sibles (HCSP, 1998; Parizot, 1998). comme un phénomène statique, ce qui
personnes et aux familles d’assumer
Elles touchent des individus issus de pourrait paraître paradoxal au vu de sa
leurs responsabilités élémentaires et
tous les milieux sociaux et profes- définition. Elle expose au danger
de jouir de leurs droits fondamen-
sionnels, bien que frappant plus forte- d’une stigmatisation de ces popula-
taux. L’insécurité qui en résulte peut
ment les plus démunis. Ces situations tions, risquant de renforcer les phéno-
être plus ou moins étendue et avoir
étant complexes et difficiles à caracté- mènes de précarisation : résistance des

des conséquences plus ou moins


riser, il est difficile de connaître préci- acteurs du soin, prise en charge médi-
graves et définitives. Elle conduit à
sément la proportion de personnes cale cloisonnée ou différentielle,
la grande pauvreté quand elle affecte exclusion d’une procédure de soins
plusieurs domaines de l’existence, touchées. Les données économiques
et sociales disponibles laissent suppo- pour non-appartenance à une catégo-
qu’elle devient persistante, qu’elle rie (Lombrail et al., 2004). Cette
compromet les chances de réassumer ser cependant que la précarité au sens
large proposé par le Haut Comité de démarche, plus ancienne, existe par
ses responsabilités et de reconquérir rapport à la mesure de la pauvreté et
ses droits par soi-même, dans un santé publique est un phénomène
massif, qui toucherait 20 % à 25 % de de l’exclusion et a évolué en fonction
avenir prévisible » (Wresinski,

† †

des conceptions et des représentations,


1987). En 1998, dans le champ de la la population française, soit 12 à 15
millions de personnes (HCSP, 1998). objectivée par la diversité des indica-
santé, le Haut Comité de santé teurs produits pour décrire ces situa-
publique a donné une définition plus L’absence de définition précise de tions (Paugam, 1996). Catégoriser
large de la précarité : elle correspond

la précarité sociale rend difficile constitue à un moment donné un outil
à un processus de fragilisation l’identification des populations en nécessaire pour l’action (Lebas et al.,
conduisant à une plus grande vulné- situation de précarité sociale, notam- 1998; HCSP, 1998). Dans la prise en
rabilité face à un certain nombre de ment dans l’application des poli- charge sociale ou sanitaire des usa-
handicaps sociaux, coûteux pour tiques de santé, dans la perspective gers, les professionnels du soin ont
l’individu et susceptibles d’entraîner de la mise en œuvre d’interventions besoin à un moment donné de décrire
un glissement vers des situations de rattrapage des conséquences les populations qu’ils prennent en
plus durables et plus dramatiques, (pour la santé, par exemple). Peu charge, mais aussi d’évaluer leurs
proches de la grande pauvreté et de d’outils de repérage de ces popula- actions; les décideurs des établisse-
l’exclusion (HCSP, 1998). tions ont été développés (Pascal et ments de soins ont besoin d’informa-
LSP 55 corrigée-3 26/05/06 09:10 Page 122

LIEN SOCIAL ET POLITIQUES–RIAC, 55 mité susceptibles d’être en contact une liste de priorités d’actions à
avec ces populations, tels les tra- mener pour améliorer l’accès à la pré-
Inégalités sociales de santé : quels impacts
vailleurs sociaux, les bénévoles du vention et aux soins des personnes les

sur l’accès aux soins de prévention ? †

milieu associatif ou les professionnels plus démunies, plus particulièrement


de santé de premier recours (méde- en situation de précarité sociale, et
cins généralistes, professionnels des sont destinés à coordonner l’ensemble
services d’accueil des urgences, des des initiatives locales, départemen-
centres d’examens de santé, des tales et régionales en la matière.
centres de soins gratuits, des plan-
nings familiaux, de la protection Par ailleurs, dans le cadre des tra-
maternelle et infantile) font partie des vaux d’élaboration des Schémas
personnes les mieux placées pour par- régionaux d’organisation sanitaire de
troisième génération (SROS III), une
122 ticiper à la mise en œuvre de ces inter-
ventions ciblées. L’efficacité de ces réflexion a été engagée dans chaque
interventions nécessite, par ailleurs, région française sur la définition de
tion pour définir des priorités d’ac- territoires de santé, correspondant à
une bonne coordination de ces
tion, planifier, adapter l’offre de soins une échelle territoriale pertinente
acteurs. Les caractéristiques et les
de leurs établissements et évaluer pour l’organisation de l’offre de soins
besoins des populations en situation
leurs effets. En 2005, le Centre tech- et la répartition des activités, tenant
de précarité sociale sont fortement
nique d’appui et de formation des compte des réalités locales. Ces terri-
conditionnés par le contexte socioé-
centres d’examens de santé (Cetaf) conomique et l’environnement local, toires de santé (régionaux, départe-
publiait dans un rapport d’étude un et sont donc très variables en fonction mentaux) rassemblent plusieurs
score de précarité individuel, le score des bassins d’emploi considérés. territoires de proximité de premier
EPICES, construit à partir des popula- recours aux soins, infradépartemen-
tions spécifiques fréquentant les L’échelle territoriale choisie pour taux. « Ce niveau de proximité doit

centres d’examens de santé (CES). En définir les programmes d’intervention permettre de répondre aux besoins de
effet, les personnes en situation de en santé devrait donc permettre de la population tant sur le plan des
précarité constituent une des cibles répondre de façon adaptée aux soins que sur celui de la prévention »

prioritaires des actions de soins de ces besoins spécifiques des populations (Circulaire n°101/DHOS/O/2004 du
centres, telles que définies par l’ar- ciblées et de coordonner efficacement 05 mars 2004 relative à l’élaboration
ticle 2 de l’Arrêté ministériel du 20 les acteurs. Le département paraît de des SROS de 3e génération). Les
juillet 1992, qui en donnait une défi- ce fait être un territoire pertinent pour SROS III seront construits à partir
nition plutôt restrictive, centrée essen- définir les programmes d’intervention des projets médicaux de territoire
tiellement sur la situation par rapport (c’est notamment le cas des pro- élaborés par les acteurs sanitaires et
à l’emploi (Cetaf, 2005). grammes de dépistage organisé des sociaux de ces territoires. On devrait
cancers), leur mise en œuvre pou- pouvoir décliner au niveau de chacun
Des territoires d’action vant être modulée au niveau infradé- des territoires, de santé de façon pré-
partemental, en fonction des cise, les orientations stratégiques
L’amélioration de l’accès aux soins particularités locales. Ainsi, le définies dans les SROS afin d’amé-
et à la prévention des populations « les †
département constitue souvent le liorer l’organisation sanitaire. Le
plus démunies », en situation de « pré-
† †
niveau de mise en œuvre opération- champ d’action de la prévention
carité sociale », « confrontées à l’ex-
† †
nelle des Programmes régionaux de devrait y trouver plus de place,
clusion » ou « fragilisées », selon
† † †
santé (PRS) instaurés par les ordon- puisque ces échelles territoriales
l’expression employée, nécessite, nances de 1996, dont font partie les trouvent, elles aussi, leur légitimité
pour être efficace, de définir les Programmes régionaux pour l’accès à dans la loi relative à la politique de
limites des populations ciblées et de la prévention et aux soins (PRAPS) santé publique. Une des orientations
connaître leurs besoins spécifiques, introduits quelques années plus tard stratégiques du SROS III de la
notamment en matière de santé, afin par la loi d’orientation de lutte contre Région des Pays de la Loire réaf-
d’élaborer des programmes d’inter- les exclusions du 29 juillet 1998. Les firme le principe de l’accessibilité
vention adaptés. Les acteurs de proxi- PRAPS ont pour objectif d’identifier « géographique » (proximité des
† †
LSP 55 corrigée-3 26/05/06 09:10 Page 123

soins, filières de soins, réseaux de sociale est concernée par les inégali- States », Milbank Memorial
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† †

Realized and potential », Medical Care,


Pays de la Loire, 2006). En réponse, du moins une partie plus large que †

16 : 533-546.

un de ces plans d’action s’attache à les populations en situation de préca-


AGENCE RÉGIONALE DE L’HOSPI-
développer les Permanences d’accès rité sociale, sont nécessaires.
TALISATION DES PAYS DE LA
aux soins de santé (PASS) dans les LOIRE. 2006. Schéma régional d’orga-
hôpitaux, mesure préconisée par le Quelle que soit l’approche consi-
nisation sanitaire 2006-2010. Nantes,
PRAPS de cette région, destinées à dérée, il semble nécessaire en France ARH des Pays de la Loire.
l’amélioration de la prise en charge de mener une réflexion plus large sur
AUVRAY, L., A. DOUSSIN et P. LE FUR.
médico-sociale des usagers en situa- les causes des inégalités sociales de 2003. Santé, soins et protection sociale
tion de vulnérabilité sociale, plus santé et sur les moyens d’y remédier. en 2002. Enquête sur la santé et la pro- 123
particulièrement de précarité. En Il est nécessaire de poursuivre et de tection sociale (ESPS) France 2002.
matière de périnatalité, l’améliora- développer des travaux de recherche, Paris, Centre de recherche, d’étude et de
d’une part, sur les facteurs explica- documentation en économie de la santé.
tion de l’orientation et de la prise en
charge des femmes en situation de tifs des barrières à l’accès aux soins, AUVRAY, L., S. DUMESNIL et P. LE
et, d’autre part, sur les déterminants FUR. 2001. Santé, soins et protection
fragilité sociale passe par la formali- sociale en 2000. Enquête sur la santé et
sation de réseaux de proximité, sani- sociaux et psychosociaux de l’état de
la protection sociale, France 2000.
taires et sociaux, publics et privés, santé, pour pouvoir élaborer et Paris, Centre de recherche, d’étude et de
des acteurs concernés, sensibilisés à mettre en œuvre des politiques et documentation en économie de la santé.
la prise en charge de ces publics, programmes de santé adaptés, éven- BERKMAN, L. F., T. GLASS, I.
avec l’appui des PASS, notamment tuellement ciblés selon ces facteurs. BRISSETTE et T. E. SEEMAN. 2000.
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