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Sujet 

: Progression du texte et continuité

1. La cohérence

Les théories concernant l’analyse du discours et du texte font une importante distinction entre les
notions de cohérence, de cohésion et de connexité. Toutes permettent d’apprécier, selon des critères voisins
mais bien distincts, le caractère d’un énoncé saisi dans une séquence spécifique.
Dépendant des conditions d’interprétation d’une suite d’énoncés selon un contexte donné, la
coherence n’est pas directement soumise aux propriétés linguistiques du texte : seul le jugement du
récepteur permet d’évaluer l’adéquation de ce dernier par rapport à la situation d’énonciation. C’est l’acte de
parole lui-même qui sera estimé cohérent ou non en fonction d’une attente, d’une demande d’information
plus ou moins précise. Ainsi est parfaitement cohérente la réponse qu’apporte Charles Bovary à la question
que lui fait la jeune Emma Rouault : « Cherchez-vous quelque chose? demanda-t-elle. — Ma cravache, s’il
vous plaît, répondit-il. » (Madame Bovary). La cohérence va ici de pair avec un enchaînement syntaxique
caché, puisque le groupe nominal ma cravache est complément d’objet du verbe en ellipse (je cherche ma
cravache).
Mais le maintien de rapports cohérents n’exige pas des corrélations formelles aussi fortes. C’est a
travers d’une induction logique que la suite Pierre grossit. Il mange trop peut être jugée cohérente : elle
s’appuie en fait sur une proposition préalable (Quand on mange trop on grossit) qui justifie ce cas
particulier. Des critères extralinguistiques peuvent en outre ménager une suffisante cohérence dans le cadre
d’un échange discursif nettement limité. À la question Quelle heure est-il? des réponses du type Le voisin
vient de partir ou Le facteur est en bas ou encore Le journal télévisé commence tout juste apportent des
informations déplacées mais néanmoins pertinentes. Elles supposent chez l’allocutaire une connaissance des
phénomènes invoqués et la capacité de les situer dans le temps quotidien {le voisin part chaque jour à 8 h.
le facteur passe à 9 h, le journal télévisé débute à 13 h, etc.).
Il y a cependant des textes négligeant ces conventions à tel point que la communication entre les
partenaires du dialogue finit par échapper au lecteur. Ainsi, le théâtre de l’absurde enchaîne des répliques
selon une logique du passage sans raison, bizarre d’un sujet a l’autre :
Mme SMITH : Dans la vie, il faut regarder par la fenêtre.
Mme MARTIN : On peut s’asseoir sur la chaise, lorsque la chaise n’en a pas.
M. SMITH : Il faut toujours penser à tout.
M. MARTIN : Le plafond est en haut, le plancher est en bas.
Mme SMITH : Quand je dis oui, c’est une façon de parler.
Mme MARTIN : À chacun son destin.
M. SMITH : Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux.
(Ionesco, La Cantatrice chauve)
La cohérence de ces répliques demeure inaccessible au lecteur/spectateur, mais semble absolument
transparente pour les interlocuteurs. C’est parce qu’il se donne pour cohérent que le discours absurde suscite
un doute, une inquiétude interprétative chez celui qu’il tient à l'écart de la compréhension.

2. La cohésion

La cohésion du discours s’appuie sur les relations sémantiques et, plus largement, linguistiques qu’il
instaure entre les énoncés. Les enchaînements syntaxiques, les reprises anaphoriques, mais aussi les
récurrences thématiques ou référentielles et l’organisation temporelle des faits évoqués donnent au texte une
forte dimension cohésive. De même qu’une séquence peut être à la fois cohérente et libre d’indices de
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cohésion (Pourquoi es-tu si triste?—La vie ne vaut pas d’être vécue), de même une suite cohésive peut
apparaître dépourvue de cohérence : Pierre ne s’est pas rendu à son travail hier. Il y est arrivé avec une
heure de retard. Ni la double représentation pronominale (Pierre/Il et à son travail/y) ni la commune visée
chronologique du passé composé ne permettent d’annuler la contradiction entre les deux prédicats successifs
(ne s’est pas rendu/est arrivé). Ni nécessaire ni suffisante, du point de vue de l’organisation textuelle, la
cohésion est néanmoins un paramètre utile à la bonne formation des discours. Dans la suite Mon frère Jean
est malade ; elle ne viendra pas aujourd’hui, il interdira par exemple de relier Mon frère Jean et le pronom
elle, qui renvoie inévitablement à une personne de sexe féminin, préalablement identifiée dans le discours.
La notion d’isotopie est à ce titre essentielle. Elle est comprise comme la répétition réglée d’unités
sémiques au fil d’un ou plusieurs énoncés et assure une compréhensibilité fondamentale du discours. Dans
la phrase Cet enfant s’est endormi en lisant, les traits /animé/ et /humain/ rendent respectivement isotopes
les couples de termes enfant et endormi d’une part, enfant et lisant d’autre part. La cohésion assurée par le
deuxième sème disparaîtrait avec un sujet comme ce chien (un animé non humain ne saurait lire); la
cohésion assurée par le premier disparaîtrait également avec un sujet comme ce camion (un non animé ne
saurait dormir). Du reste bien des textes à caractère surréaliste (entre autres) jouent sur des inconvenances
propres à briser la continuité isotopique. Ainsi fait Desnos dans le poème intitulé « Un jour qu’il faisait nuit
» (Langage cuit) :
Il s’envola au fond de la rivière. [...]
Le compas traçait des carrés et des triangles à cinq côtés.
Après cela il descendit au grenier. [...]
Alors nous avancions dans une allée déserte où se pressait la foule.
Quand la marche nous eut bien reposé nous eûmes le courage de nous asseoir puis au réveil nos
yeux se fermèrent et l’aube versa sur nous les réservoirs de la nuit.
La pluie nous sécha.
C’est la constante recherche de contradictions logico-sémantiques qui, par association de termes à
priori incompatibles, caractérise cette écriture contradictoire. Elle repose sur des inversions lexicales
clairement repérables („s’envola/plongea, monta/ descendit,séchai trempa, etc.) et sur des caractérisations
absurdes (des carrés et des triangles à cinq côtés, désertes où se pressait la foule). Malgré cela, l'aspect
évident de ces déviations ne permet pas de reconstituer une cohésion satisfaisant aux critères de la logique
commune. Le texte constitue un espace de signification autonome, un champ de relations sémantiques dont
la pertinence n’est plus soumise aux contraintes du discours standard.
De façon beaucoup plus traditionnelle, la poésie établi des isotopies provenues, par le biais de figures
rhétoriques. Les expressions imagées grâce auxquelles Baudelaire désigne la chevelure de la femme aimée
ne sont pas isotopes si l’on examine leur seule dénotation : « forêt aromatique », « mer d’ébène », « ce noir
océan », « pavillon de ténèbres tendues » n’entrent pas en relation immédiate avec l’objet visé (cf. « La
Chevelure » dans Les Fleurs du mal). Mais la couleur brune des cheveux, leur épaisseur, leur parfum et leur
aspect ondulé justifient ces multiples métaphores.

3. La connexité

Il s’agit de l’ensemble des relations linguistiquement marquées, au moyen de termes appelés


connecteurs, qu’entretiennent des énoncés successifs. Entre des propositions ou des phrases, les liens
sémantiques, logiques ou pragmatiques peuvent être manifestés par des éléments appropriés : conjonctions
de coordination ou de subordination (car, mais, parce que, comme, avant que...), adverbes ou prépositions
(d’abord, ensuite, après, toutefois, finalement...), présentatifs (c’est, voici/voilà) ou locutions diverses
(autrement dit, c’est-à-dire, d’une part! d’autre part). Ces éléments démarcatifs ne sont pas toujours
indispensables. Ils soulignent un rapport qui, sans eux, demeurerait implicite : Pierre joue, (mais) Paul s’en-
nuie; Marie mange peu, (alors que) Jean est glouton ; Je vais me coucher, (car) je suis fatigué', Pierre est
travailleur, (donc) il réussira. Ils jouent un rôle complémentaire à celui de la ponctuation, en évitant toute
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ambiguïté (cf. M. Riegel et ai, Grammaire méthodique du français, PUF, 1994, p. 616-623).
Du point de vue fonctionnel, il y a lieu de distinguer les connecteurs qui, organisant la représentation du
référent discursif, rendent compte de relations
- SPATIALES (plus haut / bas, devant / derrière, à droite / gauche, au- dessus/dessous, etc.), selon un point
de vue descriptif particulier
- ou TEMPORELLES (d’abord, et, ensuite, alors, après/avant, puis, soudain, tout à coup, enfin, etc.) :
D’un autre type sont les connecteurs qui, structurant le discours lui-même, y délimitent les étapes de
-l’ÉNUMÉRATION, en marquant l’addition (et, ou, aussi, également), la progression {en outre, en plus) ou
le rang dans une série (en premier! second! dernier lieu, tout d’abord/puis, etc.). Ils fonctionnent notamment
comme des organisateurs de description :
- la REFORMULATION (bref, en d’autres termes, au total, au juste, etc.) :
-1’argumentation : ils ont en ce cas valeur d’opposition/concession (mais, pourtant, cependant, toutefois,
malgré tout, en revanche, au contraire, du moins, etc.), d’explication/justification (car, parce que, puisque,
en effet, de fait, au juste, au vrai, etc.), d’adjonction (or, non seulement... mais encore, en outre, par
surcroît, de plus, qui plus est, d’ailleurs, du reste) ou de marqueurs conclu- sifs (enfin, en résumé, somme
toute, finalement, en définitive, etc.).
Ces classes n’ont rien de clos car bien des connecteurs spatio-temporels interviennent dans le cadre, par
exemple, d’une énumération (d’abord, puis, enfin), d’une reformulation (enfin, en fin de compte) ou d’une
explication (d'une part! d’autre part). Quelle que soit leur valeur ponctuelle, ils jouent un rôle à la fois de
liaison, de mise en ordre et de hiérarchisation textuelle. En sorte que leur absence laisse au lecteur le soin de
reconstituer, par lui-même, la logique de ces relations.

4. Les anaphores textuelles

Tandis que les marqueurs de connexité contribuent à manifester la progression structurée du texte, les
processus anaphoriques garantissent sa continuité (dans sa cohésion) grâce à la reprise d’éléments
préalablement introduits.
Il est préférable de ne pas confondre l’anaphore et la coréférence. Ces deux phénomènes caractérisent la
propriété qu’ont des éléments linguistiques de viser un même référent, dans un contexte précis. Mais la
coréférence repose sur une relation symétrique repérable entre des termes qui, ne dépendant pas l’un de
l’autre, se laissent interpréter de façon autonome : un nom propre et une expression descriptive (Napoléon!
le vainqueur d’Austerlitz; Marie-Laure/l’élue de mon cœur) ou encore deux expressions descriptives (le
vainqueur d’Austerlitz/le vaincu de Waterloo ; mon frère/mon vieux confident).
L’anaphore, en revanche, instaure une relation dissymétrique entre des éléments de statut différent, dont
l’un (le représentant) dépend de l’autre (le représenté) dans un environnement limité : Napoléon <— ce
farouche conquérant, le nouvel empereur <— il. Selon les cas, le pronom ou la formule descriptive sont
susceptibles de s'appliquer à des référents multiples, qui seront identifiés grâce à un repère lui-même
variable (César, Bismarck, le chef des rebelles argentins, etc.). Alors que la coréférence n’impose, dans le
discours, aucun ordre d’apparition des éléments, l’anaphore établit une dépendance orientée. Suivant le type
d’orientation ainsi déterminée, on distingue l’anaphore proprement dite (renvoyant à ce qui précède) et la
cataphore (renvoyant à ce qui suit : Il est revenu le temps du muguet), l’une et l’autre constituant ensemble
les procédés dits diaphoriques. Mais il est courant de considérer anaphore comme un terme générique
recouvrant la diversité de ces phénomènes, qu’ils entraînent un rappel d’informations antérieures ou qu’ils
anticipent sur des données ultérieures.
Si elle constitue assurément une reprise, la connexion anaphorique ne se limite jamais à une pure
répétition. Parce qu’elle n’est pas statique mais dynamique, elle requiert du lecteur une participation qui met
en jeu sa mémoire et sa compétence interprétative. Les principaux modes d’articulation peuvent se classer

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d’après la nature grammaticale du représentant et d’après la représentation qu’il propose de son antécédent.
Il y a représentation stricte quand l’anaphorique renvoie précisément à un segment figurant dans
l’environnement textuel. Il peut être alors de nature :
- nominale : Un homme très âgé entra dans le hall... Peu après, CET/NOTRE/L’HOMME (très âgé) se
dirigea vers la sortie. Comme elle s’accompagne d’une substitution de déterminant (l’article indéfini est
remplacé par un démonstratif, un possessif ou un article défini), la reprise du groupe précédent peut se
limiter au seul noyau (homme). Il y a nominalisation quand la reprise concerne un verbe ou un groupe
verbal : Un homme entra... CETTE ENTRÉE fut très remarquée',
- pronominale : Je lirai le livre QUE tu as acheté. Un homme âgé entra... IL/CELUI- CI se dirigea... La
représentation est totale puisque chaque pronom renvoie à la globalité du groupe nominal. Parfois, un
adjectif seul fait l’objet de la reprise : Pierre est courageux, mais son frère ne L’est guère. Idiot QUE tu es !
Enfin, les pronoms le et en, comme les démonstratifs ceci/cela/ce/ça, peuvent représenter un énoncé entier :
Marie viendra, je LE garantis/]’EN suis sûr/CELA est certain',
- verbale : Si Pierre range sa chambre, je n’aurai pas à LE FAIRE. Le verbe faire tire sa valeur du verbe
ranger. Associé à un pronom lui-même anaphorique, il représente l’intégralité du groupe verbal;
- adverbiale (Je viens d’acheter une maison', c’est LÀ que je passerai l’été. Il parla d’un ton sec et elle
lui répondit PAREILLEMENT) ou adjectivale : Vous serez gracié, car TEL est mon bon plaisir.
Il y a représentation déformée quand le terme anaphorique entre en relation indirecte avec son
antécédent. Celle-ci s’effectue alors au moyen :
- de pronoms possessifs ou démonstratifs (J’ai perdu mon livre, prête-moi LE TIEN/CELUI-CI), ou de en
(Paul a mangé deux gâteaux, Sylvie EN a mangé plus). Si le signifié de l'antécédent se trouve bien représenté
par l’anaphorique, le réfèrent visé est désormais différent. L’anaphore peut aussi n’être que partielle quand
l’anaphorique représente une partie seulement du référent initial : Il a beaucoup d'argent, mais il EN gaspille
souvent. Tous les étudiants sont là, mais CERTAINS sont arrivés en retard;
- d’éléments lexicaux qui, de façon plus ou moins lâche, font référence à l’antécédent. L’anaphore repose
alors sur une équivalence synonymique (Jacques repeint les volets... CE labeur le fatigue) ou sur un rapport
d’inclusion (une voiture <— le véhicule', Marcel Proust -- ce grand prosateur). On parle d’anaphore
conceptuelle lorsqu’un groupe nominal résume toute une séquence textuelle (phrase, paragraphe, voire
chapitre entier) : Pierre a préféré partir avant minuit', cette décision est regrettable. On appelle enfin
anaphore associative la relation synecdochique (de la partie au tout) qui unit le représentant à son
antécédent : Ma voiture est trop vieille', le moteur est fragile.
Il apparaît en somme que les procédés anaphoriques ne se limitent pas à la reprise d’éléments
préalablement insérés dans le discours. Tout en préservant un continuum sémantique et référentiel, ils
participent à la progression textuelle chaque fois qu’ils introduisent, à l’aide de formulations différenciées,
des informations nouvelles.

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