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Ne traitez pas vos soldats comme des

mercenaires !

Un récent débat sur Europe 1 a soulevé la problématique du traitement et du suivi des


blessés de guerre. Certains d'entre eux, de retour du théâtre afghan, ont manifesté une
déception forte, faute d'avoir reçu la considération qui leur semblait due. Ce manque de
reconnaissance illustre la méconnaissance des blessés de guerre par notre société.
Pour ne pas creuser davantage le fossé avec son armée, la nation doit parvenir à porter
un regard solidaire.

L'histoire de la France s'est principalement forgée par les armes et jusqu'à il y a peu, le
soldat mort au combat était, non pas une victime, mais un héros. Ce lien entre la nation
et son armée a atteint son apogée après la guerre de 14-18 avec des anciens
combattants dont Clémenceau a dit "ils ont des droits sur nous". La défaite de 1940 et
les guerres coloniales ont altéré cette image idéalisée du guerrier qui a achevé de se
déliter avec la suppression du service militaire en 1996 et la professionnalisation des
armées. A cela s'ajoutent aujourd'hui d'autres facteurs qui creusent encore le fossé entre
le soldat et la nation :

- L'évolution de la notion de défense qui perd son sens premier rattaché au soldat. La
société ne se sent plus en danger à ses frontières. La menace majeure que les citoyens
appréhendent est celle du terrorisme, contre laquelle le soldat n'est pas perçu comme le
recours prioritaire. Parallèlement, la notion de guerre se décline davantage aujourd'hui
vers des domaines économiques, financiers ou technologiques.

- L'évolution dialectique de notre société. On observe clairement une réticence, souvent


pour des raisons juridiques, à utiliser le terme de guerre en matière de conflits armés. Ce
fut vrai pour l'Algérie et le pas n'est toujours pas franchi à propos de l'Afghanistan où les
actions de combat s'en apparentent pourtant bien. En outre, le concept de "soldat de la
paix" entraîne inconsciemment le rejet de la notion de combattant.

- L'évolution de notre politique de défense. L'engagement de la France se réalise le plus


souvent dans le cadre d'une alliance ou d'une coalition (OTAN, UE). Cette
"internationalisation-dénationalisation" du soldat obscurcit les raisons pour lesquelles il
se bat, d'autant que les engagements sont désormais loin de nos frontières.

- Le recours à des sociétés militaires privées. De telles organisations pour remplir des
missions militaires de plus en plus larges, brouillent l'image du soldat et portent atteinte à
la notion de combattant au service de la nation.

LE DEVOIR DE MÉMOIRE
A ces facteurs, s'ajoute l'immuable image des anciens combattants véhiculée à travers
nos commémorations nationales. Remplissant un devoir nécessaire de mémoire, ces
cérémonies oublient souvent les blessés des guerres récentes et négliger les plaies
ouvertes d'aujourd'hui, c'est souvent empêcher qu'elles se referment demain.

Aujourd'hui demeure donc l'impression que les militaires sont payés pour faire la guerre
et en assumer toutes les conséquences. Or nos soldats ne sont pas des mercenaires, ils
se battent au nom de leurs concitoyens. Si le soldat a la caractéristique de donner la
mort et s'il est blessé au combat, c'est bien au nom de la République. Il est donc du
devoir de la nation de l'accompagner dans cette épreuve. Redonner tout son rang au
blessé de guerre devrait ainsi être une priorité nationale. Deux mesures peuvent l'y
aider, la création d'une entité pour la coordination et le suivi sur le long terme et
l'évolution du devoir de mémoire par nos anciens combattants.

Pour l'armée de terre, la cellule d'aide aux blessés, en lien avec les unités dont ils sont
originaires, prend en charge la phase initiale d'un retour à une vie "normale" (plus de 200
depuis le début de l'année). Pourtant, même soutenues par différentes associations
d'anciens combattants, la difficulté pour ces blessés et leurs familles croit au fur et à
mesure que le temps passe. En outre, cantonner cette charge uniquement aux militaires
revient à déresponsabiliser davantage la société vis-à-vis de ses blessés, à un moment
où justement le lien fondamental entre la nation et son armée devrait prendre toute sa
dimension. C'est pourquoi, si une cellule de proximité d'armée proche de ses blessés
reste absolument indispensable, une entité de coordination et d'accompagnement pour
le long terme, placée auprès du ministre, et capable de fédérer plus facilement
l'ensemble des services de différents ministères autour d'une mobilisation nationale,
semble aujourd'hui indispensable.

Mais un défi fondamental reste à relever, celui de la sensibilisation de l'opinion publique


au devoir de reconnaissance envers ceux qui ont gagné le respect de la nation. Le
regard et le soutien portés par certains de nos alliés envers leurs combattants pourraient
d'ailleurs servir d'exemple. Les armées, l'éducation nationale, le monde associatif, les
réserves, les mouvements de jeunesse, les média, la justice, … tous doivent prendre
leur part pour donner du sens à nos engagements militaires dans le monde. C'est par
cette nécessaire sensibilisation que pourra découler une estime naturelle envers ceux
qui, quels que soient leur grade ou leur origine sociale, se battent au nom de la France
et des Français.

A cet effet, le devoir de mémoire entourant les combattants d'hier doit évoluer pour
honorer les combattants d'aujourd'hui. Au-delà des inscriptions sur les monuments aux
morts, un jour unique de commémoration pour l'ensemble des blessés et victimes de
guerre d'hier et d'aujourd'hui pourrait être institutionnalisé. Les combattants de la Grande
Guerre ayant tous disparu, le 11 novembre serait tout désigné pour remplir ce rôle, à
l'instar de ce qui se réalise déjà dans certaines communes.
Le moment est venu de redynamiser le lien fondamental entre la nation et son armée
vis-à-vis de nos blessés de guerre. A cet effet, la notion d'anciens combattants doit se
moderniser à travers la mise en place d'une vraie "politique des blessés de guerre" qui
leur permettra de trouver leur place dans notre société. Indirectement, le recrutement et
la fidélisation dans nos armées pourraient en tirer quelques bénéfices !

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