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LA TRADUCTION DE LA MÉTALANGUE :

LA PROBLÉMATIQUE TERME/MOT EN CONTEXTE

Béchir OUERHANI
Université de Carthage
Institut supérieur des langues appliquées et d’informatique de Nabeul
Tunisie

Résumé : L’une des spécificités fondamentales de la terminologie linguistique est qu’elle puise ses sources
dans les mots de la langue, d’où sa dimension autonymique. Le résultat est que les emplois de la terminologie
vacillent selon les contextes entre terme et mot. Il s’ensuit qu’une définition rigoureuse du contexte est exigée
pour que la définition de l’unité soit mieux cernée. Cette problématique conditionne la qualité de la traduction
de ces textes d’une langue en une autre. Si on n’en tient pas compte, les risques de confusions sont énormes et
la qualité de la traduction s’en ressent. Nous partirons d’exemples précis empruntés à certaines théories et à
des textes traduits du français vers l’arabe pour illustrer notre problématique.
Mots-clés : terme, contexte, traduction, terme linguistique.

INTRODUCTION
Notre exposé partira du fait suivant : l’une des spécificités fondamentales de la terminologie
linguistique est qu’elle puise ses sources dans les mots de la langue. Le résultat est que les emplois
de la terminologie vacillent selon les contextes (1) entre terme et mot.
Par ailleurs, il est possible de répartir les termes linguistiques en deux groupes selon leur « degré
de spécialisation », c’est-à-dire le degré d’appropriation au domaine d’utilisation. Nous allons
essayer de montrer que les difficultés que rencontre le traducteur de la terminologie linguistique – à
travers la traduction des textes – varient selon ce « degré de spécialisation ».
Notre propos s’appuiera sur l’analyse d’exemples précis empruntés à des textes traduits du
français vers l’arabe et de l’arabe vers le français.

1. UN PREMIER GROUPE : LES TERMES « HYPERSPÉCIALISÉS »


L’examen de ces termes, aussi bien dans l’emploi au sein d’une langue donnée que lors de leur
traduction, montre qu’ils ne posent pas de problèmes particuliers puisque les domaines de leur
emploi sont plutôt restreints.

1. 1. Au sein de la même langue :


L’emploi de ce type de terme est lié à un contexte bien déterminé : ce sont des termes qui
impliquent leur définition à travers l’implication d’un cadre théorique, d’une école ou d’un linguiste.
En effet, les contextes dans lesquels ces termes sont utilisés sont extrêmement marqués. Une fois
utilisés, ces termes impliquent tout de suite des textes de référence ou les cadres théoriques desquels
ils sont issus. On remarque ce phénomène aussi bien dans les textes linguistiques que dans les
dictionnaires de linguistique. Mais c’est dans ces derniers que ce fait est plus marquant vu le
caractère métalinguistique du contenu de ce type de textes. Tel est le cas, par exemple de la plupart
des termes guillaumiens ou certains termes fortement liés à l’école générativiste ou

1
transformationnelle. Ainsi, pouvons nous lire dans le Dictionnaire des sciences du langage de
F. Neveu (2004) pour les termes Chronotype, Monème et structure profonde, à titre d’exemple :
[1] Chronotype : « CHRONOTYPE [psychomécanique] […] La notion de chronotype est
développée par Gustave Guillaume à partir de 1929 dans Temps et verbe. Elle désigne chacune
des deux parcelles de temps que prélève le présent pour sa constitution, notamment en
français… ».
Monème : « MONÈME […] La notion de monème a été utilisée par André Martinet pour
désigner les unités significatives minimales, qui constituent la première articulation du langage ».
Structure profonde : « STRUCTURE PROFONDE Dans le cadre théorique de la grammaire
générative et transformationnelle, le domaine syntaxique est organisé en deux composantes […] ».
Dans ces trois passages, on voit clairement que la définition de ces termes est tout de suite liée au
cadre théorique dans lesquels ils s’inscrivent. Cela suffit pour lever toute ambiguïté du côté du
lecteur, puisque seulement deux cas de figure sont possibles : soit il a une certaine idée sur le cadre
théorique évoqué, soit il n’en a pas. Dans les deux cas, le lecteur n’est pas confronté au problème de
la détermination du statut du terme : il n’a pas à trancher s’il s’agit d’un emploi de la langue
courante (il est donc en présence d’un mot) ou d’un emploi spécialisé (il a affaire, dans ce cas, à un
terme), puisque le statut est tout de suite rappelé par l’évocation du cadre théorique ou de l’auteur.
Dans les textes linguistiques, soit l’auteur s’inscrit de façon explicite dans le cadre théorique
qu’implique le terme en question, soit il adhère à certaines analyses proposées. Dans les deux cas,
on y trouve souvent des renvois aux définitions ou aux textes de référence concernant telle ou telle
théorie. Notons que même en cas d’absence de ces renvois, ces termes impliquent chez le lecteur
leurs propres définitions vu leur « haut degré de spécialisation ».
Sur le plan sémantique, nous pouvons évoquer la question de la transparence de ces termes. En
effet, ces termes hyperspécialisés ne posent pas généralement de problème puisqu’ils réfèrent
chacun à un concept bien déterminé et n’ont pas d’emploi dans la langue courante. Ils sont très
proches alors du principe de la monosémie exigé pour les termes techniques, très cher à la littérature
sur les langues de spécialité (Voir, entre autres Lerat 1995 : Ch. VIII).
Qu’en est-il alors de leur traduction ?

1. 2. Sous l’angle de la traduction :


Pour les raisons évoquées dans le paragraphe précédent, la traduction de ce type de termes ne
pose pas de problèmes particuliers. Nous pourrions affirmer simplement que leur transfert est
toujours lié au contexte qu’ils évoquent et aux cadres théoriques qu’ils impliquent. Si l’on prend, par
exemple, l’expérience de notre équipe de traduction, nous constatons que les difficultés de la
traduction de ces termes hyperspécialisés concernent plutôt :
- la formation du terme (si l’équivalent existe ou s’il faut recourir à la néologie). Nous rappelons à
ce propos que pour une langue comme l’arabe, nous sommes tout le temps confronté à cette
question vu l’énorme quantité de savoir à transférer, et par conséquent le nombre important de
concepts nouveaux et de termes qui les désignent.
- l’harmonisation du terme proposé avec le paradigme des termes traduits et avec la grille des
termes liés au terme en question par un lien quelconque (même cadre théorique, spécification,
niveau de l’analyse, etc.).
- la prise en compte des paradigmes de terminologie linguistique déjà existants, nous entendons
par là notre système terminologique hérité d’une grammaire arabe ancienne de plus de quatorze

2
siècles. En effet, la tradition grammaticale dispose souvent d’un terme qui rend compte,
totalement ou partiellement, de la notion en question. Dans d’autre cas, il est possible de prendre
un terme déjà existant et d’en modifier le contenu. (Pour certains aspects de ces questions, nous
renvoyons à Neveu & Ouerhani, à paraître).
En voici quelques exemples : les termes guillaumien cinétisme et cinèse sont traduits par des
néologismes :
[2]
Cinétisme  
 ara : kijja

Cinèse  
 ara : ka

et cela ne nécessite pas une précision particulière quant au contexte puisqu’il est
automatiquement impliqué par le simple fait de les employer.
Quant au terme Monème, il a été traduit depuis très longtemps par le terme  lafam qui
est une composition du mot laf (l’équivalent de « terme » dans la langue courante) et le suffixe
Amê, traduction du suffixe « ème » :
[3] Monème :   (lafam)

Vu le caractère monosémique de ces termes, le traducteur n’est pas confronté au problème de la


dualité mot/terme.
Pour conclure ce premier point, nous nous permettons d’insister sur le fait que ces termes
impliquent tout de suite lors de leur emploi leurs contextes : en un mot, quand on les traduit, ils sont
transférés avec leurs contextes d’emploi et avec leurs implications propres (définition, cadre
théorique, historique, etc.). Il s’ensuit que la dualité mot/terme ne se pose pas à leur égard.
Examinons à présent le deuxième groupe défini au début de notre exposé.

2. UN DEUXIÈME GROUPE : LES TERMES PUISÉS DANS LA LANGUE


COURANTE
Ces termes sont employés par ailleurs en tant que mots de la langue courante. Vu leur
appartenance initiale au lexique général d’une langue donnée, ils sont généralement polysémiques.
Ce qui revient à dire qu’ils ont plus d’un emploi et que les différentes significations auxquelles ils
renvoient sont spécifiées selon le contexte d’emploi. De ce fait, leur statut de terme spécialisé ou de
mot de la langue courante est déterminé par le contexte. Nous pensons à la grande majorité des
termes linguistiques qui viennent de la langue courante. Cela semble concerner toutes les langues
naturelles. En voici quelques exemples du français et de l’arabe :
(4)

Mot  kalima

Lettre 
 arf

Phrase  umla

3
Nom   ism

Adjectif  
sifa

Etc. . 

Prenons, à titre d’exemple, le terme arabe sifa (5e dans le tableau ci-dessus). Ce terme est
employé en arabe dans le sens de :
« qualité » quand il s’agit d’attribuer une qualité à quelqu’un :
[5]    

Li-zajd-sifa : t-asana
A- Zayd- qualités bonnes
Zayd a de bonnes qualités
« adjectif » quand il s’agit d’analyse ou de terminologie linguistiques :
[6] " "    

“mari:d”-sifa-isna:dijja-fi:-zajd-mari:d
« malade »- adjectif- prédicatif- dans- Zayd- malade
« malade » est un adjectif prédicatif dans Zayd est malade
Si l’on applique l’analyse selon le schéma d’arguments, nous constatons que -sifa:t dans [5] est
un prédicat dont le premier argument est le nom propre « Zayd ». Il est par ailleurs en position
d’argument d’un prédicat de rang supérieur : asana. Cet « environnement » impose donc
l’attribution du statut de « mot » de la langue courante au terme en question.
Dans [6], il s’agit d’une métalangue comme l’indique la présence de guillemets, des termes sifa-
isna:dijja attribués au terme en question, et, enfin, la présence d’un exemple sur lequel porte ce
commentaire. Il s’agit donc d’un emploi spécialisé du terme sifa.
Sur le plan conceptuel, nous sommes en présence de deux emplois différents. En effet, si
l’emploi courant renvoie à une signification, il y a derrière l’emploi terminologique un et un seul
concept qui se situe dans tout un réseau de relations entre concepts appartenant à la même
discipline.
Sous l’angle de la traduction, la détermination rigoureuse du contexte est nécessaire pour décider
du statut (mot/ terme) de l’élément en question. Pour le traducteur, ce type de termes pose donc plus
de problèmes que ceux du premier groupe.
Dans ce qui suit, nous allons examiner de près certains cas de ces termes qui vacillent entre mot
et terme selon le contexte. Nous allons voir que la détermination du contexte d’emploi (courant ou
spécialisé, ou même selon les spécialités) est nécessaire pour garantir la réussite à l’opération de
transfert.

2. 1. Du français vers l’arabe :


2. 1. 1. « terme » et « terme »
Selon qu’il s’agit de langue de spécialité ou de langue courante, le mot, ou justement le terme
terme, peut renvoyer soit à une unité appartenant au « lexique général », soit à une unité appartenant

4
à un vocabulaire technique spécifique à une discipline. Mais si nous quittons déjà la langue courante
pour examiner de près son emploi dans les textes linguistiques, nous remarquons que les deux
emplois existent. Nous avons choisi d’illustrer cela à partir de l’ouvrage de G. Gross et M. Prandi et
de sa traduction arabe sur laquelle notre équipe est en train de travailler :
[7] La finalité (p.4):
– « Chacun des termes prédicatifs appartenant aux trois aires, en outre, peut aussi bien entrer dans la
construction de la phrase complexe, incorporé dans l’une de ces structures que la tradition appelle
locutions prépositionnelles (…), qu’orienter l’interprétation d’une juxtaposition en tant
qu’expression anaphorique ».
En examinant de près ce passage, nous observons que le terme « terme » est utilisé ici dans le
sens d’« unité du lexique général » et non pas dans le contexte de langue spécialisé. En effet, les
auteurs parlent des unités lexicales prédicatives d’une manière générale et il ne s’agit nullement de
termes spécifiques à une discipline quelconque. C’est pour cela que nous l’avons traduit en arabe
par ! laf (l’équivalent de « terme » dans la langue courante) que nous avons vu plus haut :
#"  % ! ! # "'" ! ! !" '  ' !' #  ! &! % !  !!   ! &! '"#"! ' # !
'!! $'"' '! &#! & ' "#"  " %$ ' #" '"! !'%  $%' # % )…( '   
."'   
Jumkinu-li-kulli-wa:idin-min-al-alfa:…” (alfa:=pluriel de laf)
Plus loin, au début du premier chapitre, les auteurs disent :
– « Nous utilisons le terme de relation transphrastique pour référer à des relations entre procès
comme la cause, la concession, le but ou la conséquence » (p. 13).
Il s’agit là d’une unité lexicale utilisée dans un domaine spécifique pour renvoyer à un concept
donné, celui des relations entre procès. Ceci est renforcé par la présence :
- du prédicat « utiliser » dont l’argument est le terme « terme » ;
- de l’expression du but (introduite par « pour ») et qui contient le verbe « référer à » dont l’un des
arguments est « les relations entre procès » ;
nous sommes donc en présence d’un terme renvoyant à un concept dans le domaine de la
linguistique. Ce qui détermine notre choix pour la traduction : le terme mustala (équivalent de
terme dans le domaine des langues de spécialité) :
!"# ##"!"'  ! #-"'#! % $! %   ! % ! !" ! " ! #'   !! &! !  !! '!"
nanu-nastamilu-mustalaa-ala:qa-bajn-umlijja…
Les exemples concernant la problématique de la dualité mot/terme dans la traduction de textes
linguistiques en arabe sont multiples. Pour ne citer que quelques-uns, nous renvoyons à la traduction
des cours de F. de Saussure réalisée par S. Garmadi, M. Chaouech & M. Ajina (1985), l’article de
L. Guilbert « La néologie », GLLF et sa traduction arabe réalisée par T. Baccouche & S. Mejri
(1993), ainsi que la traduction des Clefs pour la linguistique par T. Baccouche (1993).

2. 1. 2. Le terme proposition entre langue courante et langues de spécialité


Selon les contextes, ce terme a en français un emploi courant (lié à la construction faire une
proposition) et plus d’un emploi spécialisé selon la discipline, et donc selon le réseau conceptuel
auquel appartient le concept qui réside derrière le terme. Ainsi, il y a une différence d’emploi entre
la proposition dans le domaine de la logique et la proposition dans le cadre de l’analyse de la phrase
complexe, par exemple, même si on pourrait affirmer l’existence d’un certain lien entre les deux
concepts. Cette différence est bien explicite quand il s’agit de traduire le terme vers une langue

5
comme l’arabe. Il suffit de regarder, par exemple, dans les dictionnaires de langue bilingues et dans
les dictionnaires de linguistique bilingues ou les glossaires qui accompagnent les ouvrages traduits
et les travaux de recherche. En voici quelques échantillons :
[8]
– Al-Manhal (dictionnaire bilingue français/arabe) :
Proposition sf.

  
      (…)

taqdi:m, ard, iqtira:, muqtara

Faire des_s à une femme   

ra:wada-mraatan

_(Maths.)  

iftira:d (litt. Hypothèse)

_(Log.)  

qadijja (litt. Affaire)

_(Gramm.) 

umla (phrase)

Notons que ce dernier emploi (Gramm.) est plutôt traduit chez les linguistes arabes par :
- qawl en linguistique générale et dans le contexte des grammaires logiques.
- umla-sora: dans un contexte concernant la phrase complexe, ce qui veut dire littéralement
petite phrase par opposition à la umla (la principale) (cf., à titre d’exemple M’seddi 1984).
Observons, par ailleurs, que dans le cadre de notre équipe de traduction, le terme linguistique
proposition est systématiquement traduit par : qawl. Dans le contexte de la logique et notamment
des syllogismes, il est traduit par qadijja.
Déterminer le contexte avec précision est donc indispensable pour réussir la traduction de ce
terme en arabe. Examinons à présent le cas du passage de l’arabe vers le français.

2. 2. De l’arabe vers le français


Nous allons voir quelques termes en arabe dont le statut dépend du contexte et dont la traduction
par la suite est déterminée par ce statut :
[9]  iba:ra

6
Littéralement, ce terme signifie « expression », c’est d’ailleurs sa traduction la plus courante en
français. Examinons toutefois ces exemples :
[9] ’     
la:-toibuni:-ha:ihi-l-iba:ra
négation plaire-moi cette-la- expression
Cette expression ne me plaît pas (langue courante)
[9]'‘     
      
mafhu:mu-l-iba:ra-asa:sujjun-fi:-dira:sati-a:hirati-t-takallusi
notion-la-locution- fondamentale- dans- étude- phénomène-le-figement
La notion de locution est fondamentale dans l’étude du phénomène du figement
Dans le premier exemple, le contexte nous présente un mot de la langue courante, même s’il est
utilisé par ailleurs en tant que terme linguistique. En effet, nous déduisons de la présence du prédicat
toibu (« plaire »), dont le terme iba:ra est le premier argument et dont le locuteur est le second
argument, qu’il s’agit d’un jugement que fait un locuteur « ordinaire » concernant un énoncé, ou une
partie d’un énoncé. Le contexte a donc déterminé la traduction par le terme expression dans le sens
de la langue courante. Tandis que dans le second exemple, le contexte d’emploi est spécifié : nous
sommes en présence d’un commentaire linguistique concernant le terme de iba:ra qui est utilisé
comme tête de paradigme dans des termes composés tels que :
[10]

- locution prépositionnelle -  

– locution verbale –  

etc. .

[11]   Le a:l (litt. État)


Examinons les deux emplois suivants :
[11]’     
haa-l-muarrik-fi:-a:l-ajjida
ce- le- moteur- dans – état- bon
Ce moteur est dans un bon état
[11]'‘ 
 …          
tadullu-l-a:lu-ala:-hajati-l-fa:il-aw-l-mafu:l-aw-kajfijjat-wuqu:i-l-ada…
désigne- le- état- prép.- attitude- le- sujet- ou- le- objet- ou- manière- déroulement- action
Le a:l désigne l’état du sujet ou de l’objet, ou la manière du déroulement de l’action
(procès)…(Manuel scolaire de l’enseignement de base).

7
Dans ces deux phrases, nous sommes en présence de deux emplois différents du terme a:l. Le
premier relève de la langue courante et le terme renvoie à une signification non spécialisée. Quant
au second, il appartient à une langue de spécialité, la terminologie grammaticale arabe et renvoie à
un concept : celui de l’équivalent de l’adverbe de manière en français. Ce deuxième emploi est
précisé par le contexte qui indique clairement qu’il s’agit d’une métalangue.
Notons que ceci n’a pas empêché un certain nombre de confusions chez certains écrivains de
grammaires arabes pour étrangers. En fait, certains ont traduit le terme spécialisé a:l par son
emploi courant et ont proposé donc « état » pour le français par exemple.
Observons aussi que le problème de l’emploi et de la traduction du a:l est doublé par une autre
difficulté qui vient s’y ajouter, quand on est dans le domaine de la terminologie grammaticale : on
est en fait tenté de le traduire par le terme adverbe, ce qui n’est pas pertinent vu que le phénomène
du a:l arabe ne couvre qu’une partie de la notion de l’adverbe en français. Nous nous contentons
de rappeler rapidement que l’aire que couvre l’adverbe français est répartie en arabe entre plusieurs
phénomènes, dont chacun possède son propre terme (cf. Mosbah S., à paraître ; Ouerhani B., à
paraître) :
- a:l (litt., État, équivalent de l’adverbe de manière),
- mafu:l mutlaq (équivalent de l’objet interne, exprimant souvent l’intensité),
- tamji:z (sorte de spécifieur exprimant la qualité ou la quantité par rapport à la prédication ou à
l’un de ses éléments).
" ]12[Le fa:il
Le cas du fa:il est un cas typique du double emploi d’un terme (courant et spécialisé), doublé de
deux usages selon le contexte, au sein même de la langue de spécialité. Ce qui lui donne à la fin trois
emplois distincts.
– dans la langue courante, le mot fa:il signifie l’idée générale de « celui qui a fait quelque
chose ».
– dans la terminologie grammaticale, il est l’équivalent :
 de la fonction sujet en français.
 de l’agent, à un niveau d’analyse autre que celui des fonctions syntaxiques.
Il faut donc déterminer avec précision le contexte d’emploi pour pouvoir décider par quel terme
le traduire. Réciproquement, le problème se pose aussi quand on part dans l’autre sens, c’est-à-dire
quand on veut traduire en arabe les termes de sujet et d’agent, puisque l’arabe ne dispose que d’un
seul terme pour renvoyer aux deux concepts. Ainsi, dans la traduction de Pour une logique de sens
(R. Martin), nous avons été confronté à ce problème. Le choix que nous avons opéré était de garder
le même terme fa:il pour traduire et le sujet et l’agent.
Pour en finir avec ce cas, nous observons que le même terme de fa:il est utilisé dans le domaine
de la morphologie dérivationnelle arabe pour désigner un schème très productif de l’arabe : celui du
nom d’agent(2).
En ce qui concerne notre équipe de traduction, nous avons choisi donc de garder l’unique terme
arabe et de compter sur le contexte pour séparer les emplois. Derrière ce choix réside le fait que ce
terme, avec tous ses emplois, est très ancien et stabilisé aussi bien dans la langue courante que dans
la terminologie grammaticale.

8
3. CONCLUSION
En regardant la grande confusion qui règne actuellement sur la terminologie linguistique arabe,
nous ne pouvons qu’insister sur l’importance de la prise en compte du contexte aussi bien dans « le
sens large » que dans « le sens étroit » du terme. C’est dans cet esprit que nous proposons que
l’élaboration de dictionnaires de linguistique pour l’arabe doit nécessairement passer par la
traduction des termes dans leurs contextes d’emploi.
C’est dans cette perspective que notre équipe travaille sur la traduction de textes linguistiques
« fondateurs » qui serviront de base à l’élaboration de dictionnaires de linguistique ou à tout travail
terminologique. La traduction de certains textes fondateurs de la grammaire arabe en français
s’inscrit également dans le même cadre.

9
BIBLIOGRAPHIE

Baccouche (T.) & Mejri (S.), 1996 : « La problématique du système de terminologie linguistique arabe. Échantillon
méthodologique » dans Études linguistiques, 1, Publications de l’ATL, Tunis, p. 9-23 (en arabe).
Gross (G.) & Prandi (M.), 2004 : La finalité, fondements conceptuels et genèse linguistique, Duculot.
Guilbert (L.), 1986 : « La néologie », dans GLLF, p. 3584-3594.
Idriss (S.), 2002 : Al-Manhal, dictionnaire bilingue français/arabe. Beyrouth, 30e édition.
Le Petit Robert électronique, éd. 2002.
Lerat (P.), 1994 : « Dérivation lexicale et dérive terminologique » dans Méta, XXXIX, 4, p. 581-588.
Lerat (P.), 1995 : Les langues spécialisées, Puf, Linguistique Nouvelle.
M’seddi (A.), 1984 : qa:mu:s-al-lisa:nijja:t(en arabe), Maison Arabe du Livre, dictionnaire de linguistique arabe français/français
arabe, avec une introduction théorique sur la terminologie.
Manuels scolaires : manuels de langue (7e et 8e de l’enseignement de base), Ministère de l’Éducation Nationale, CNP, Tunis (2000).
Martinet (A.), 1966 : « Le mot », Problèmes de langage, Gallimard, Collection Diogène, p. 39-53.
Mehiri (A.), 1973 : Les théories grammaticales d’Ibn Jinn, Publications de l’Université de Tunis.
Mejri (S.), Baccouche (T.), 1993 : Du mot, Tunis Dar Eljanoub (en arabe).
Mejri, (S.), 2003 : « La traduction linguistique : problème terminologique ou construction conceptuelle ? » dans Traduire la langue,
traduire la culture. Actes du Colloque « Traduction Humaine, Traduction Automatique, Interprétation », Tunis 28-29-30
septembre 2000, p. 177-190.
Mounin (G.), 1993 : Clefs pour la linguistique, Trad. Ar. Par T. Baccouche, mafa:ti:-al-alsunijja, Ed. Sidane. Tunis.
Neveu (F.) & Ouerhani (B.), à paraître, « Les unités terminologiques de forme complexe en linguistique (étude comparée du
français et de l’arabe) », Journées scientifiques tenues à Sousse en juin 2004 dans le cadre du projet AUF Problèmes théoriques
et épistémologiques de la traduction des terminologies linguistiques (français/arabe).
Neveu (F.), 2004 : Dictionnaire des sciences du langage, Armand Colin, Paris.
Ouerhani (B.), à paraître : « La problématique de l’exemple dans la traduction de la métalangue » dans Journées scientifiques La
terminologie linguistique : problèmes traductionnels, conceptuels, épistémologiques. Caen, 12 et 13 mai 2005.
Saussure (de) (F.), 1985 : Cours de linguistique générale, trad. Ar. Garmadi (S.), Chaouech (M.) & Ajina (M.), Addaar Al-arrabya
lil-Kitaab.

1
Notes

(1)
Nous observons que nous utilisons ce terme dans son acception la plus générale et indépendamment du débat – parfois vif – sur la
définition de ce qu’on entend par « contexte » (Cf., par exemple certaines communications présentées ici-même). En ce qui concerne
notre centre d’intérêt, le contexte va de l’environnement de droite et gauche d’un terme donné jusqu’au type de discours, puisqu’ils
participent tous à la détermination du statut du terme en question et déterminent, par la suite, notre choix pour la traduction.
(2)
Nous rappelons que les « schèmes » peuvent être définis comme des combinaisons de consonnes et de voyelles correspondant à des
significations différentes et qui servent de moules pour la formation régulière de différents dérivés appartenant au même type à partir de
la matière consonantique. C’est la raison pour laquelle la morphologie dérivationnelle de l’arabe est quasi systématique.

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