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Jacoby
Jacoby D. Jean Lascaris Calophéros, Chypre et la Morée. In: Revue des études byzantines, tome 26, 1968. pp. 189-228.
doi : 10.3406/rebyz.1968.1406
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_0766-5598_1968_num_26_1_1406
JEAN LASCARIS CALOPHEROS,
CHYPRE ET LA MORÉE
Jean Lascaris Galophéros est sans doute un des personnages les plus
étranges de son époque 1. Il tombe en disgrâce, sous le règne de Jean V
Paléologue, pour avoir voulu épouser Marie Cantacuzène, une nièce
de l'empereur. A la suite de la conclusion de ce mariage, qui ne fut
jamais consommé 2, il est forcé de s'exiler, en 1363 au plus tard 3,
et, par la suite, ne retourne plus en terre d'Empire. En Occident
ce Byzantin de naissance se fait intituler miles Constantino politanus
et se fait passer pour un descendant de la dynastie impériale des
Lascaris4. N'empêche qu'il devient tour à tour citoyen de Gênes, puis
de Venise 5. Ami intime de Démétrius Cydonès et converti comme lui
***
6. Urbain V en fait déjà état le 18 avril 1.365, dans une lettre adressée à Pierre
Thomas, patriarche latin de Constantinople : Reg. Vat. 247, fol. 79 r. Autres lettres
où il en est question : ibid., fol. 81 v.-82 r., dont le texte a été publié par O. Halecki,
op. cit., p. 363-364 (n° 5) ; cf. également, dans ce même ouvrage, p. 97.
7. En particulier par O. Halecki et Giov. Mercati; cf. supra, n. 1.
8. Cf. infra, n. 10 et 11.
9. Pour cette date, cf. N. Jorga, op. cit., p. 259.
10. Reg. Vat. 247, fol. 81 r.-v., publié par O. Halecki, op. cit., p. 361-363 (n° 4),
et cf. p. 98, où il en est question. Calophéros désire habiter in aliquo loco vestro
de partibus Grecie, donec ad gratiam Imperatoris prefati redierit.
11. Reg. Vat. 247, fol. 129 r. : dictus miles reconciliationem eandem in nullo alia
loco quam in terra vestra Pere valeat commodius procurare.
D. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 191
Marguerite, qui avait épousé Léon de Lusignan en mai 1369 24. Selon
un acte de Grégoire XI, du 23 mars 1373, les deux chevaliers chy
priotes s'étaient emparés, « avec des complices », de biens et revenus
ayant été détenus par Marie de Mimars, d'une valeur supérieure à
100.000 florins 25. Il y a tout lieu de croire que Janot de Soissons avait
agi en plein accord avec ses sœurs et les maris de celles-ci, ou, du
moins, leur avait [cédé une partie des biens dont il s'était emparé :
des sentences prononcées à leur sujet, et dont il sera question plus
loin, indiquent en effet que Janot et ses sœurs détenaient chacun une
part des biens qui avaient constitué le douaire de leur mère.
Janot employa d'autres moyens pour faire valoir ses revendicat
ions, profitant en particulier de la mort de Pierre Ier, protecteur de
Calophéros. Il a probablement été un des instigateurs de l'accusation
formulée contre notre personnage, selon laquelle celui-ci aurait remis
une somme d'argent aux patrons de deux navires génois, à l'encontre
des intérêts du roi, de la reine et du royaume 26. Cette accusation doit
être mise en rapport avec les événements de 1370. Eleonore, veuve de
Pierre Ier, nourrissait des plans de vengeance, en particulier à l'égard
de Jean de Lusignan, régent du royaume et véritable détenteur du
pouvoir dans l'île. Elle fit écrire des lettres au pape, au roi de France,
ainsi qu'à d'autres princes d'Occident, accusant les chevaliers d'avoir
assassiné son mari et demandant l'envoi de navires génois pour lui
permettre de venir, avec le jeune Pierre II, auprès du pape. Ces lettres
devaient sans nul doute être expédiées par des navires génois, puisqu'on
en trouva d'autres, adressées à Gênes et demandant une intervention
armée contre l'île, chez le Génois Marco Grimaldi. Celui-ci fut empri
sonné et les lettres furent confisquées. Dénoncé le 29 août 1370, le
notaire qui les avait rédigées fut condamné comme traître et pendu
en septembre 1370 27. Il est vraisemblable que Calophéros avait été
effectivement mêlé aux plans d'Éléonore, puisque, à son départ de
Chypre pour l'Occident, en 1372 ou 1373, il fut chargé par elle de
transmettre un message oral à son père, le franciscain Pedro d'Ara-
gona 28. Fait significatif, Calophéros n'infirma pas la véracité des
24. Pour la date de ce dernier mariage, cf. Jean Dardel, Chronique d'Arménie,
Rec. Histor. des Croisades, Histor. arméniens, II, Paris, 1906, p. 39. Sur Léon,
cf. également infra.
25. Beg. Aven. 189, fol. 26 v. ; Täutu, Acta Gregoni XI, p. 122-124, n° 65.
26. D'après la lettre du 24 novembre 1374, adressée par Grégoire XI à Eleonore
de Chypre : Reg. Vat. 270, fol. 180; D. C, I, p. 185, n° 7, 1. 20-23.
27. Résumé des événements par G. Hill, A History of Cyprus, II, The Prankish
Period. 1192-1432, Cambridge, 1948, p. 377-378.
28. G. Golubovich, Biblioteca bio-bibliografica delta Terra Santa e delVOriente
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faits dont il était accusé, mais invoqua qu'il avait été forcé de remettre
l'argent aux patrons génois 29. Cette explication ne convainc guère :
on ne voit en effet pas qui aurait pu l'y obliger. Il y a tout lieu de croire
que Calophéros fut emprisonné à cette époque, peut-être en été 1370,
à la suite des accusations formulées contre lui, la double intervention
d'Urbain V en sa faveur se plaçant peu après 30.
C'est vraisemblablement en relation avec ces événements que
se situe une initiative des sœurs de Janot de Soissons, Alise et Marguer
ite. Sans doute de connivence avec Janot, elles intentèrent un procès
au sujet des biens détenus par leur mère de son vivant et obtinrent de
la Haute Cour un verdict favorable, qui sanctionna leur action précé
dente 31. L'issue de cette action judiciaire ne doit guère nous surprend
re, puisque la politique poursuivie par le régent Jean de Lusignan
visait à révoquer diverses mesures prises par son frère Pierre Ier32_
Calophéros était toujours en prison le 1er mai 1371, ainsi qu'en
témoigne la lettre de Grégoire XI, dont il a été question plus haut33.
Il fut libéré par la suite et quitta Chypre pour l'Occident. En cours de
route, il s'arrêta en Morée 34, mais ne dut pas s'y attarder longtemps,
étant chargé d'une mission par Eleonore, reine de Chypre 35. On
pourra donc placer sa libération en 1372 36, puisque, le 20 février 1373,
francescano, V, Quaracchi, 1927, p. 164 : aliqua... quae scripto non çult commen-
dare (lettre de Grégoire XI à ce sujet, en date du 20 février 1373). Cf. O. Halecki,
op. cit., p. 272.
29. D. C, I, p. 185, n° 7, 1. 23-25 : et ipse firmiter asseratur hoc se non gratis,
sed contra eius voluntatem fecisse.
30. Cf. supra, n. 21.
31. Lettre de Grégoire XI à Domenico de Gampofregoso, doge de Gênes :
Reg. Vat. 270, fol. 182; D. C, II, p. 419-420, n° 1. Cf. aussi D. C, I, p. 185, n° 7,
1. 4-6 : quedam sententie post obitum clare memorie Pétri régis Cipri... late fuerint.
Indication chronologique imprécise, mais tout de même précieuse, puisqu'elle
permet de placer la mort de Marie de Mimars, ainsi que les agissements de Janot
de Soissons, après la mort du roi. La spoliation de Calophéros a eu lieu avec l'asse
ntiment du roi et du régent : Reg. Aven. 193, fol. 505; Täutu, op. cit., p. 246, n° 130
(lettre du 19 décembre 1374).
32. D'après Dardel, p. 39-40, le prince d'Antioche rappella tous les fiefs que le roy
Pierre, son frère, avoit donné aus forains et en leva et pris les revenues. Il s'agit ici
de biens du domaine royal.
33. Cf. supra, p. 192.
34. Il en sera question plus loin.
35. Cf. supra, p. 193.
36. R.-J. Loenertz, D. C, I, p. 70-71, attribue la lettre n° 37 de Cydonès à
l'hiver 1371-1372. Elle est certainement postérieure au 28 octobre 1371, jour de la
rentrée de Jean V à Constantinople (cf. ibid., note de la 1. 40). Cette lettre, envoyée
de Constantinople, fait déjà mention de la libération de Calophéros. Compte tenu
des arguments invoqués ici, la lettre doit avoir été rédigée en 1372.
D. JA.COBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 195
46. Reg. Aven. 189, fol. 26 v. ; Täutu, op. cit., p. 122-124, n° 65. Arguments
identiques dans deux autres lettres, mentionnés infra, n. 49.
47. Cf. supra, n. 41.
48. Reg. Vat. 270, fol. 180 r.-v. Le premier de ces actes a été édité dans D. G'.,
I, p. 185-186, n° 7; les deux autres sont signalés par G. Mollat, Lettres secrètes et
curiales du pape Grégoire XI (1370-1378) intéressant les pays autres que la France,
Paris 1962-1963, II, p. 83, n° 2997, et p. 84, n° 3001.
49. Reg. Aven. 193, fol. 441 v. et 505, lettres de Grégoire XI, respectivement du
12 et du 19 décembre 1374 : Täutu, op. cit., p. 242-243, n° 127, et p. 246-249,
n° 130. Le dernier de ces actes mentionne, pour le montant des dommages, 243 577
au lieu de 243 567 besants.
Π. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 197
50. Reg. Vat. 270, fol. 182 r.-v. Le premier de ces actes a été édité dans D. C,
II, p. 419-420, n° 1; les deux autres sont signalés par G. Mollat, op. cit., n,
p. 83, n° 2990 et 2993.
51. Actes de Grégoire XI, des 26 novembre, 27 et 31 décembre 1374, ainsi que du
1er janvier 1375; Reg. Vat. 270, fol. 74 r.-75 r., 191 r.-v.; à l'exception du premier
d'entre eux, ces actes sont signalés par L. Mirot, H. Jassemin et J. Vielliard,
Lettres secrètes et curiales du pape Grégoire XI (1370-1378) relatives à la France,
Paris, 1935-1955, col. 1127, 1131-1133, n° 3570, 3573, 3574 (ce dernier acte a été
publié par F. Cesaroli, Gregorio XI e Giovanna I, regina ai Napoli; Documenti
inediti delV Archivio Vaticano, Archivio storico per le provincie napoletane 24 (1899),
p. 419, n° GLI); cf. également G. Mollat, op. cit., II, p. 94, n° 3077.
52. Dans l'acte du 27 décembre 1374, il est question de vivres pouvant suffire
pro tribus mensibus , eundo et redeundo.
53. Son séjour dans l'île, dans les premiers mois de 1375, pourrait expliquer
son inclusion dans la liste des chevaliers chypriotes qui ne furent pas déportés
par les Génois à Chio ou à Gênes, l'année précédente : Mâcheras, p. 317-318;
Strambaldi, p. 238.
54. Cf. L. de Mas Latrie, Histoire de Vîle de Chypre sous le règne de la maison de
Lusignan, Paris, 1852-1861, II, p. 365, n. 3.
55. Ce que semble indiquer l'intervention d'un de ses ambassadeurs, à la fin
de 1375 : cf. injra.
56. D. C, II, p. 421, 1. 24-26 : in civitate lanuensi dolose et sine causa rationabili
capi fecit et carceribus mancipari. Janot de Soissons se trouvait à Gênes le 21 mai
1375, date à laquelle l'amiral établit un acte concernant les biens que lui avait
cédés ce dernier en toute propriété : Genova, Archivio di Stato, Notaio Antonio
Credenza (1375-1418) fol. 4. (Cf. N. Jorga, op. cit., p. xxxm-xxxiv et D. C,
II, p. 420, n. 2). Le 1er janvier 1375, Grégoire XI recommandait Calophéros à
198 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
également trempé dans cette affaire, puisqu'il détenait des biens reven
diqués par Calophéros.
Bien que celui-ci eût obtenu l'appui de la justice ecclésiastique,
il ne put recouvrer ses biens et demanda à plusieurs reprises l'inte
rvention du pape. Fin novembre et début décembre 1375, après que
Calophéros eût été libéré par les autorités génoises, Grégoire XI
chargeait des envoyés, dont celui du roi de Chypre, d'intervenir en
sa faveur auprès du doge de Gênes et de l'amiral 57; le 30 avril de l'année
suivante, il enjoignait aux évêques de Nicosie et de Rhodes d'exécuter
le verdict prononcé contre Janot de Soissons 58.
A une date située entre fin avril 1376 et juillet 1388, un accord
à l'amiable intervint entre Calophéros et Janot de Soissons. Celui-ci
s'engagea à payer, sur les revenus des biens qu'il détenait et détenus
autrefois par Calophéros, des annuités jusqu'à concurrence d'une
certaine somme, dont le montant ne peut être précisé. Le 5 juil
let 1388, quand notre personnage établit son testament à Venise,
cette somme n'avait pas encore été entièrement acquittée. Janot
de Soissons était mort entretemps. A son fils Janot II, encore
mineur 59, Calophéros légua 6 000 besants, à percevoir sur la somme qui
lui était due et à payer en une fois, après acquittement de la dernière
annuité 60. Par ailleurs, il légua 3 000 besants à la fille de Baudouin
de Nores et d'Alise de Soissons, ce qui indique qu'un accord était
également intervenu avec ceux-ci 61. La première de ces sommes
permet de supposer que les annuités étaient supérieures à 6 000 besants.
Les sommes perçues par Calophéros, à la suite de cet accord, expliquent
dans une certaine mesure l'origine des capitaux qu'il investit dans
diverses affaires commerciales, dont il sera question plus loin.
En revanche, aucun accord n'était intervenu entre Calophéros
Pierre II, Eleonore de Chypre et Jean de Lusignan, notre personnage étant envoyé
à Gênes, en mission au sujet du royaume de Chypre : Reg. Vat. 270, fol. 191 r.-v.,
signalé par G. Mollat, op. cit., II, p. 94, n° 3077.
57. Reg. Vat. 271, fol. 201 ν. et 202 r. (28 novembre 1375), 205 r. (1er décembre
1375) : actes signalés par G. Mollat, op. cit., II, p. 165, n° 3609; p. 166, n° 3616.
Ce dernier a été publié par Täutu, op. cit., p. 362-363, n° 184, sous la date erronée
du 13 décembre 1375. Il n'y est pas question de l'incarcération de Calophéros;
de toute évidence, il avait été libéré auparavant.
58. Reg. Vat. 288, fol. 185-186; D. C, II, p. 420-424, n° 2 et Täutu, op. cit.,
p. 398-402, n° 202.
59. D. C, I, p. 187-194, n° 10, I. 9, 40, 46; en outre, 1. 41.
60. Ibid., 1. 38-40 : semel tantum solvenda in ultimis terminis anni quo tota, summa
peccunie per ipsum testatorem de dictis bonis dicti quondam domini Iohannis de
Soysons percipienda compleverit et finierit. Cf. également 1. 41-43.
61. Ibid., 1. 45-49. Λ la 1. 47, il faut lire trium au lieu de decem.
1). .lACOBY : JEAN LASC.ARIS CALOPHÉHOS 199
Calophéros n'a été mêlé à l'histoire de la Morée qu'à une date rel
ativement tardive. On a vu plus haut qu'il était arrivé en Chypre en
1365, accompagnant le roi Pierre Ier, et n'a quitté l'île, pour regagner
l'Occident, qu'après avoir été libéré de prison en 1372 63. Le 20 février
1373, Calophéros est depuis quelque temps déjà en Avignon 64. Le
23 mars suivant, Grégoire XI fait état de son mariage à Lucie, une
des filles d'Erard III Mavros, seigneur d'Arcadia 65, qui, dès 1344,
62. Barcelona, Archiva de la Corona de Aragon, reg. 1952, fol. 31. ν.- Ι ne copie
de cet acte nous a été communiquée par À. T. Luttrell, et nous tenons à l'en remerc
ierici.
63. Cf. supra, p. 19Ί-195.
61. Cf. supra, p. 19:]. n. 28 et ρ. Ι91-195.
fi."). D'après une lettre de Grégoire XI à l'évèque de Modon Reg. Aveu. 189,
:
fol. 21 v., publiée par Tau lu, op. cit., p. 1.1 9-1 20, n° 63.
200 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
87. Ibid., p. 426, 1. 79-86 ; non obstante quod cause ipse de earum natura ad Roma-
num curiatn devolvende et in ea tractande et finiende non essent. (1. 84-86).
88. Cf. supra, p. 196.
89. Ibid., p. Ί26-Ί27, 1. 86-1.28.
90. Reg. Vat. 288, fol. 136 r.-138 ν. Cet acte a été publié par Täutu, op. cit.,
p. 392-398, n1J 20:1, mais avec la date erronée du 30 avril 1376, ayant lu II. kal.
maii. Or, au-dessus du nom du mois figure un signe d'abréviation, qui indique
qu'il faut lire martii. Double erreur, de date et de foliotation, dansl). C, II, p. 427,
n. t. Cf. également ibid., p. 427, 1. 128-130.
91. Ibid., 1. 130-136.
92. Cf. R. J. Loenertz, Hospitaliers et Navarrais en Grèce, 1376-1383, Regestes
et documents, Orienta lia Christiana Periodica 22 (1956), p. 329-330, n° 1. Un acte
de Grégoire XI, adressé à Juan Fernandez de lleredia et à d'autres destinataires,
mentionne que Jeanne reine de Naples, a déjà offert de céder diverses terres à
ceux qui préparent un passagium contre les Turcs, alin qu'ils puissent s'y réunir,
in custodiam et regiminem pro quinque annis [ces trois derniers mots en surlig'ne]
proxime secutum (sic!), sub certis pactis et conditionibus inter vos et eandem regi-
nam ordinatis seu ordinandis (Reg. Aven. 203, fol. 27 r.-v.). Le haut du fol. 27 v.
présentant une tache d'humidité, une partie de la date de cet acte est illisible.
Il est toutefois aisé de la compléter, grâce aux deux actes qui précèdent celui-ci
au fol. 27 r. Ils traitent également du passagium, ont été établis au même endroit,
et portent la date suivante : VI kal. junii, soit le 27 mai 1377. L'acte dont il a été
question ci-dessus ne constitue manifestement pas une confirmation de l'accord
entre Jeanne et les Hospitaliers, et on ne peut donc pas en conclure que celui-ci
a été signé vers cette date, ainsi que l'affirme A. Luttrell, Interessi fiorentini nelV
economia e nella, politica dei Cavalieri Ospedalieri di Rodi nel Trecento. Annali délia
Scuola Normale Superiore di Pisa : lettere storia e fdosofia, ser. 2, 28 (1959), p. 322,
n° 13, et The Principality of Achaea in 1377, Byzantinische Zeitschrift 57 (1964),
p. 341-342, — · A. Luttrell prépare une étude détaillée sur le chronologie de l'inte
rvention des Hospitaliers en (irèce. de 1377 à 1381.
204 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
93. Cf. notre étude Quelques considérations sur les versions de la « Chronique de
Morée » (citée supra, n. 66), n. 124.
94. Libro de los fechos et conquistas del principado de la Morea, éd. A. Morel-
Fatio, Genève, 1885, § 725-726. Erard III n'est pas mentionné explicitement,
mais aucun doute n'est possible à cet égard.
95. Sur ces dernières, cf. R.-J. Loenertz, loc. cit., p. 331-333, n° 10, 11, 14, et
infra. On ne trouve aucune trace de conflit avec Erard. Cf. infra, p. 211, ainsi que
notre étude sur les versions de la « Chronique de Morée » (citée supra, n. 66).
96. D. C, II, p. 37-39, n° 167.
97. Venezia, Archivio di Stato (= A. S. V.), Senato, Misti, reg. 35, fol. 164 r.,
publié partiellement dans D. C, I, p. 187, n° 9. D'après la date de la résolution, on
peut déduire que le problème avait été évoqué dans une lettre envoyée au plus
tard en février de Modon à Venise. Il fallait en effet près de vingt jours pour
relier ces deux villes : cf. F. Thiriet, La Romanie vénitienne au moyen âge, Paris,
1959, p. 188. Il est vraisemblable que Calophéros se trouvait déjà à Modon depuis
quelque temps, ce qui ne manqua pas d'éveiller des soupçons. On pourra donc
placer son arrivée vers la fin de 1376.
D. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 205
payée à partir du 1er janvier 1376 106. Le pape s'en occupa à plusieurs
reprises, postérieurement à cette date, le paiement de la pension
n'étant pas effectué régulièrement 107. N'empêche que celle-ci ne pou
vait pas suffire à alimenter des affaires, dont on mesurera bientôt
l'ampleur. Par ailleurs, Galophéros n'a bénéficié de revenus provenant
de Chypre qu'en 1376 au plus tôt, sinon plus tard.
Le 7 novembre 1374, peu avant son départ pour Gênes et pour
Chypre, Calophéros obtint du pape des permis de commercer avec
Alexandrie et, en général, avec les terres du sultan mamelouk. Il y
était autorisé pendant une année, à compter de la date à laquelle il
enverrait une galée chargée de marchandises. A sa demande, le pape
lui accorda de répartir celles-ci en plusieurs cargaisons, six au maxi
mum. De nombreuses copies du permis furent établies, afin que Calo
phéros puisse en faire usage dans les ports d'où il comptait les expédier.
Parmi ceux-ci se trouvait Gênes, comme en témoigne l'autorisation,
accordée à l'archevêque de la ville, d'établir plusieurs copies 108.
Malheureusement, il est impossible de savoir dans quelle mesure Calo
phéros fit usage de ces permis. Remarquons qu'en prévision de ce
même voyage, Calophéros obtenait du pape de choisir cent personnes,
autorisées à effectuer un pèlerinage en Terre-Sainte109. Le même jour,
soit le 24 novembre 1374, une faveur identique était accordée à Eleo
nore de Chypre, veuve de Pierre Ier no.
Le 30 janvier 1376, Calophéros obtenait à nouveau un permis de
commercer, analogue à celui de 1374. Il pourrait envoyer de l'argent
et des marchandises d'une valeur totale de 10 000 florins, dedans trois
années, à compter du 1er août suivant 1U. On peut en déduire qu'il
projetait un voyage vers cette date, vraisemblablement en Morée,
où il arriva effectivement dans le courant de la même année ou au
début de l'année suivante 112. Le 7 février suivant, il obtenait l'autori-
106. Reg. Aven. 193, fol. 458 r.-v.; Täutu, op. cit., p. 225-228, n° 119-120.
De même, Reg. Vat., 277, fol. 98 v.-99 r.
107. Respectivement le 5 février 1376, [1er et 22 octobre 1377 : Reg. Vat. 279,
fol. 14 v.-15 r. et 288, fol. 16 r.-v. ; Täutu, op. cit., p. 376-379, n° 191-191 c. — Reg.
Aven. 201, fol. 232 V.-233 r.; Täutu, op. cit., p. 474-479, n° 240-240 a — Reg. Aven.
201, fol. 460; Täutu, op. cit., p. 479-483, n° 240 b-240 c.
108. Reg. Aven. 192, fol. 253 v., 288-290; Reg. Aven. 193, fol. 458; Reg. Vat.
285, fol. 83, 86 V.-87 r., 123 Γ.-124 v.; cf. Täutu, op. cit., p. 229-232, n° 121-121 a.
109. Reg. Aven. 192, fol. 290 = Reg. Vat. 285, fol. 124 V.-125 r. ; Täutu, op. cit.,
p. 239-240, n° 125.
110. Reg. Vat. 270, fol. 184; cf. G. Mollat, op. cit., p. 84, n° 3002.
111. Reg. Vat. 288, fol. 15 v.; Täutu, op. cit., p. 373-374, n° 189.
112. Cf. supra, p. 204.
D. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 207
sation de répartir les biens envoyés sur plusieurs navires, six au total 113,
et, le 27 avril, Grégoire XI lui accorda un autre permis, pour l'envoi
de biens d'un montant de 4 000 florins, également pendant trois
années 114.
Calophéros n'a vraisemblablement pas fait usage de ces permis,
lors de son séjour à Modon, puisque, le 2 septembre 1377, de retour
en Occident, il obtint leur renouvellement, pour une période de cinq
années, invoquant que beaucoup de temps était passé depuis qu'ils
lui avaient été accordés 115. A sa demande, il fut autorisé de répartir
la cargaison de deux navires sur douze petits bâtiments au maximum.
En outre, l'évêque de Modon devait exécuter plusieurs copies de ces
permis116, preuve évidente que Calophéros projetait de se rendre à
nouveau dans cette ville.
Faute de témoignages, on ne peut préciser s'il en fut ainsi. En revanc
he,une lettre écrite le 15 décembre 1379 par Aldobrando Baroncielli
à Lorenzo Acciaiuoli mentionne, de façon assez obscure, une vente
à Jean Lascaris Calophéros effectuée à Rhodes par Busone da
Fabriano, agent au service de la famille Acciaiuoli. Elle mentionne,
en outre, l'arrivée d'un envoyé de Calophéros en Morée, avant décemb
re 1379, ce qui confirme que notre personnage n'y séjournait pas à
cette époque 117. Il n'est pas exclu qu'on trouve allusion à ces affaires
dans une lettre de Démétrius Cydonès, écrite en 1382 ou 1383, où il
est question de voyages effectués par Calophéros dans divers pays,
dont l'Egypte et Rhodes 118.
Des renseignements plus précis figurent dans deux actes : le premier
a été rédigé le 19 mars 1382, sur l'ordre de Pierre IV d'Aragon, et, le
second, le 10 février 1383, sur l'ordre des conseillers de la ville de Barce-
lone 119. Compte tenu de leur intérêt, il y a lieu de les examiner atten
tivement.
Le 23 janvier 1381, le notaire Henri Slucherth de Groleo, proche
collaborateur de Calophéros 120, dressait un acte, par lequel ce dernier
déclarait avoir reçu de Johannes Fabri, marchand de Perpignan, la
somme de 1 258 ducats, comme paiement pour une quantité équiva
lentede soie grège. Le 4 mars suivant, le même notaire établissait
un autre acte, confirmant que Calophéros avait reçu de Béranger Mira,
marchand de Perpignan, la somme de 225 ducats, contre 200 livres de
soie, ainsi qu'un billet de la main de Raynaut Olivier de Majorque,
par lequel celui-ci s'obligeait envers Béranger de payer un reliquat de
101 ducats à Calophéros. Par la suite, Béranger Mira reprit toute la
soie achetée à son propre compte 121. En outre, Pietro de Justis, de
Bologne, Raynaut Oliver et Estaci de Bellvacho prenaient en com-
mende 1 800 livres de Modon de soie grège, d'une valeur de 2 935 ducats
environ 122.
La mention de la livre de Modon permet de déduire que les contrats
de vente dont il a été question ont été dressés dans cette ville. La soie
y fut chargée à bord d'un navire castillan en partance pour l'Occi
dent123. Non loin du cap Passero 124, situé à la pointe sud-est de la
Sicile, ce dernier rencontra trois navires aragonais, commandés par
Eiximen Père d'Arenos et Roger de Montcada. Ceux-ci donnèrent
l'ordre de s'emparer de force, entre autres, de la cargaison de soie pro
venant de Modon, afin d'assurer par sa vente la solde de leurs équi
pages 125. Le 9 avril 1381, soit quelques jours plus tard, tous ces navires
tions du traité de Turin, signé en 1381 136. La Vita Caroli Zeni signale
qu'en 1379, il passa par Modon : en 1381, Carlo Zeno importa des
marchandises de Grèce, alors qu'il était à Venise; au cours de la même
année, il apparût deux fois à Modon et, vraisemblablement en septemb
re, y chargea des marchandises avant de rentrer à Venise 137. Il n'est
donc pas exclu que l'affaire jugée par la Curia mobilium remonte à
1381, quand Calophéros séjourna à Modon.
Calophéros a été mêlé, de 1381 à 1388, à une série de tentatives,
effectuées par divers prétendants à la principautés de Morée, d'y éta
blir leur autorité. L'activité débordante de notre personnage à cet effet
semble avoir eu, entre autres, un but précis : l'acquisition de terres en
Morée ou dans ses dépendances, afin d'assurer la condition de son fils
Erard Lascaris. Les circonstances de l'année 1381 allaient lui fournir
une première occasion d'intervenir.
Au printemps ou en été 1381, frère Dominique d'Allemagne, lieute
nant du grand-maître des Hospitaliers en Italie, se trouve dans la
principauté de Morée, dont il remet le gouvernement aux officiers
de Jeanne de Naples, au terme de la période de cinq années, prévue
par le contrat de bail passé entre l'Ordre et la reine, en 1376 138. Le
16 juillet, la reine, assiégée dans le Château-neuf de Naples, se rend à
Charles III d'Anjou-Durazzo 139. Le vide créé en Morée à la suite de
ces événements permet à Jacques des Baux de faire valoir ses préten
tionssur l'empire latin de Constantinople, ainsi que sur la Morée et ses
dépendances M0.
Dans le dernier trimestre de 1381, les chefs de la Compagnie navar-
raise et les hommes liges de la principauté, dont Erard Mavros, Centu-
rione Zaccaria et Jean Misito, reconnaissent Jacques des Baux comme
empereur de Constantinople et prince de Morée 141. L'appui de la
Compagnie, seule force militaire de la principauté, explique la nomi-
149. Cf. R.-J. Loenertz, loc. cit., p. 348-349, n° 66. Un acte inédit, signalé par
J. Longnon, JJ Empire latin, p. 335, n. 2, permet de déterminer cette date.
150. Cf. J. Longnon, op. cit., p. 340.
151. Ce que confirme également une lettre de Cydonès (n° 359), dont il sera
question plus loin. Cf. aussi infra, η. 154.
152. Le traité de 1382 a été publié par L. de Mas Latrie, Documents concernant
divers pays de ΓΟ rient latin, 1382-14 13, Bibliothèque de: Γ École des Chartes 58 (1897),
p. 81-87. Il est précédé, dans A.S.V., Commemoriali, reg. 8, fol. 117 r., de la notice
suivante (publiée ibid., p. 81, n. 3) Copia pactorum initorum inter castellanos Coro-
nis et Mothonis et bailum imperialem principatus Achaye et alios barones et nobiles
dicti principatus ; que copia habita est ab ambaxatoribus dicti principatus, qui vene-
runt Venecias, M. CCC LXXXVI , de novembre. — Remarquons qu'en fait le traité
ne mentionne pas les feudataires moréotes. L'auteur de la notice a sans doute été
influencé par l'acte de procuration présenté par les ambassadeurs, qui, lui, en
faisait mention, et dont le texte est reflété par un acte du doge Antonio Venier;
cf. infra, n. 154. L'allusion au baile a sans nul doute trait à Pierre de Saint-Supéran,
qui assume cette fonction en 1386, mais qui figure en tant que capitaine de la
principauté dans le traité de 1382.
153. Sur celles-ci, cf. .1 Lo\gnon:, /.''Empire latin, p. 340.
.
154. Texte publié par L. de Mas Latrie, loc. cit., p. 87-98. 11 comprend la procu
ration du doge Antonio Venier [ibid., p. 88-89) qui autorise des pourparlers cum...
Peilt» de Santo Scverano (sic! ) \'icirio ßetierali principatus Achaye et prelatis. baro-
mbus et li.gits diet ι principatus.
214 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
affaires et de celles de son fils 155. Leur nature n'est pas spécifiée à cette
occasion; elle est toutefois révélée par deux faits importants. Dans le
testament de Calophéros, établi à Venise le 5 juillet 1388, il est stipulé
qu'au cas où son fils Erard mourrait sans héritiers légitimes, avant
d'avoir atteint l'âge de dix-huit ans, tous ses biens devaient être remis
à la Camera imprestitorum de Venise 156.
Cette disposition testamentaire, particulièrement favorable à
la Commune, suggère que Calophéros en avait obtenu des avantages
substantiels. Or, dans la documentation vénitienne postérieure à sa
mort, ce personnage est qualifié de Vénitien, ainsi que son fils
Erard 157. On peut en déduire que l'octroi de la citoyenneté véni
tienne à Calophéros, postérieur à 1377, quand celui-ci apparaît en
tant que Grecus et Januensis 158, se situe à l'époque de son séjour à
Venise, au cours de l'hiver 1386-1387. De cette manière, notre per
sonnage s'assurait la protection de la Commune, ainsi qu'à son fils.
Il estimait sans doute que seule Venise, à la fois maîtresse de Modon,
où il possédait vraisemblablement une maison 159, et voisine de la
Morée franque, était en mesure de l'accorder efficacement. Ainsi
s'explique également l'inclusion des procurateurs de Saint-Marc
parmi les exécuteurs testamentaires, chargés de gérer les biens légués
à la Camera imprestitorum 160.
Le 16 janvier 1387, au cours du même séjour à Venise, Calophéros
obtint un verdict favorable dans le procès qu'il avait intenté à Carlo
Zeno devant la Curia mobilium 161. Peu après, en février 1387 au plus
tard 162, Calophéros se rendit auprès d'Amédée de Savoie, seigneur de
Piémont, et, pendant quelque temps, il fut étroitement mêlé aux
tractations diplomatiques visant à établir l'autorité de ce prince en
Morée franque 163. Amédée était intervenu à la Cour pontificale dès
155. D. C, II, p. 302-303, n° 359, 1. 11 : εν ταΐς περί των πραγμάτων και του υίέος
φροντίσιν έσόμενος.
156. Ibid., Ι, ρ. 193, 1. 72-73 : ...quod omnia ipsa bona spectantia ipsi Arardo
ponantur ad cameram imprestitorum Communis Venetiarium.
157. Cf. infra, p. 227.
158. Cf. supra, p. 204.
159. Cf. supra, p. 210.
160. II en sera question plus loin. — Malgré de patientes recherches à VArchivio
di Stato de Venise, nous n'avons retrouvé aucune trace du privilège de citoyenneté
de Calophéros.
161. Cf. supra, p. 210.
162. Cf. infra, n. 164.
163. Sur celles-ci, cf. R. Cessi, Amedeo di Acaia e la rivendicazione dei domini
sabaudi in Oriente, Nuovo Archivio Veneto, N.S. 37 (1919), p. 5-64. Résumé
commode de la situation, avec renvois aux études et sources publiées, dans
D. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 215
ibid., p. 341. En 1391, Port-Jonc était détenu par deux feudataires (cf. Ch. Hop!,
CGR, p. 230), mais il n'est guère certain qu'il en était déjà ainsi en 1387.
179. Gh. Hopf, CGR, p. 502, n° 1, fait de Genturione Ier Zaccaria le seigneur
de Damala, Chalandritza, Lisarea et Maniatochori, de 1336 à 1382. Nous n'avons
pu retrouver sur quoi repose l'affirmation de Hopf quant à cette dernière localité,
mais il est probable que, conformément à un procédé qui lui est cher, cet auteur
a fait un usage arbitraire d'une indication à son propos. Un acte vénitien du
27 janvier 1411 révèle que Maniatochori était détenu en partie par Genturione II
Zaccaria, prince de Morée, en partie par son frère Benedetto et peut-être d'autres
feudataires : C. N. Sathas, Documents inédits relatifs à V histoire de la Grèce au
moyen âge, Paris, 1880-1890, I, p. 39-40, n° 37 (l'éditeur indique à tort le millé
sime 1410, n'ayant pas tenu compte que la date était énoncée more veneto).
Il est évident que Centurione en détenait une partie et avait inféodé l'autre, en tant
que prince de Morée et héritier du domaine princier, ce que confirme la détention
de Port-Jonc par le même Centurione. Cette situation ne peut remonter au-delà
du 20 avril 1404, date à laquelle ce dernier obtint le titre princier, et ne justifie
nullement les affirmations de Hopf relatives à une époque antérieure.
180. Sur celle-ci, cf. infra, p. 219.
181. Nisi prius adepta et consecuta per eundem dommun nostrum principem vel
suos aut alium suo nomine reali et pacifica possessione dicti principatus Achaye. Et
quousque ipsam realem et pacificam possessionem adepti fuerint et consecuti, ipsam
promissionem et ipsius effectum dicto domino nostro principi et suis pro nobis et
nostris totaliter remittimus per présentes .
182. L. de Mas Latrie, loc. cit., p. 92.
183. D.C., I, p. 191, 1. 56 : magnificum et potentem dominum Arardum, dominum
D. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 219
signalé comme vivant, et sa mort doit donc être placée peu après
cette dernière date. Sa baronnie, qui comprenait Arcadia, Saint-Sauveur
et Aquilla ou Aétos 184, ne fut pas partagée après sa mort, ce qui aurait
été contraire aux règles de succession du droit féodal moréote 185,
mais échut intégralement à sa fille aînée, sans nul doute Catherine,
promise en 1368 à Léon de Lusignan, mais devenue par la suite l'épouse
d'Andronic Asên Zaccaria 186. La détention d'Arcadia par leur fils
Centurione II le confirme amplement. Quand celui-ci accorda sa
propre fille Catherine à Thomas Paléologue, en 1429, il lui donna pour
dot ce qui restait de la principauté de Morée, « excepté Γ Arcadia
côtière », soit la partie proche de la côte et comprenant le château
d'Arcadia 187. Thomas s'en empara de force en 1432, après la mort
de son beau-père 188. Le seigneur de VArcadie, dont il est question dans
le tableau des fiefs de 1391, est donc Andronic Asên, le mesrre Assane
cité en relation avec son frère189; c'est lui qui tint Porcelle, Chastel-
de-Fer ou Sidérokastron, ainsi que la Praye, trois localités du domaine
princier situées dans l'Escorta 190. Son identification est d'autant plus
sûre, que, dans cette liste, on ne trouve aucune mention de grand
connétable, fonction revêtue en 1391 précisément par le même Andronic
Asên 191.
Archadie. Il ne faut pas le confondre avec Erard, fils de Calophéros, cité à sa suite
parmi les exécuteurs testamentaires : Arardum Lascari suprascriptum (1. 57).
184. Cf. L. de Mas Latrie, ibid., ainsi que la liste des fiefs de 1376 ou 1377,
rééditée par A. Luttrell, loc. cit., p. 344.
185. Cf. notre étude Les archontes grecs et la féodalité en Morée franque, Travaux
et mémoires du Centre de recherche et d'histoire et civilisation byzantines de la
Sorbonne, 2 (1967), p. 447.
186. Son identité ressort du nom de sa petite-fille; cf. infra. Sur le projet de
mariage avec Léon de Lusignan, cf. supra, p. 200. Catherine devait être l'aînée
des enfants vivants, puisqu'elle hérita de la baronnie et la transmit à son fils.
Ch. Hopf, CGR, p. 472, n° Xlllb, ne le spécifie pas dans les généalogies des barons
de Saint-Sauveur et d'Arcadia, mais bien dans celles des Zaccaria, ibid., p. 502,
n° 1. Le mariage de Catherine et d'Andronic Asên est donc antérieur à la mort
d'Erard III Mavros. Par ailleurs, Andronic Asên ne peut avoir été baron d'Arcadia
dès 1386, comme l'affirme Hopf, CGR, p. 472, n° Xllb, mais à partir de 1388 au
plus tôt.
187. Laon. Chalcocondyle, De rebus turcicis, V; Bonn, p. 242, 1. 2-9, et en parti
culier ceci : πλην της παραλίου 'Αρκαδίας. Aétos et Saint-Sauveur sont à quelque
distance de la côte. Entretemps Aétos avait été occupé par les Grecs : cf. D.A.
Zakythinos, op. cit., I, p. 206. Le sort de Saint-Sauveur n'est pas connu.
188. Laon. Chalcocondyle, ibid.
η» 189.
XII ft.Et non Erard Lascaris, comme l'affirme à tort Ch. Hopf, CGR, p. 472,
190. Ibid., p. 229-230.
191. Si une telle mention y figurait, il aurait été question de deux personnages
différents.
220 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
192. Galophéros ne la mentionne pas dans son testament; elle y aurait sans doute
figuré, parmi les exécuteurs testamentaires, si elle avait encore été vivante en
1388.
193. Hopf fait d'Erard un prétendant sur Arcadia {GG, II, p. 49a) ou sur une
partie de la baronnie {CGR, p. 472, n° Xllè); ailleurs, il prétend qu'Brard en
détint une partie (CGR, ibid. et GG, II, p. 87a) et même que son père Galophéros
le précéda comme héritier de cette partie [G G, II, ibid.). Tout ceci est pure fan
taisie. Hopf est à l'origine d'une erreur fort répandue, reprise récemment encore
par R.-J. Loenertz, Correspondance de Manuel Calécas, p. 86, et D.C., II, p. 303,
note à la 1. 11, in fine, selon laquelle Erard était héritier d'Arcadia par sa mère.
N. Jorga, Philippe de Mézières, p, 280, n. 6, en fait un co-seigneur d'Arcadia.
194. Pour l'usage de ces dénominations, cf. Pegolotti, Pratica, p. 116-117, et
J.A. C. Buchon, Nouvelles recherches historiques sur la principauté française de
Morée et ses hautes baronnies, Paris, 1843, II, p. 75, 1. 1-3.
195. D.C., I, p. 187-194; nous renvoyons ci-dessous aux lignes de ce texte.
196. Ibid., 1. 83; cf. 1. 3 : nunc Venetiis moram trahens in contrôla sancti Angeli.
197. Pour le premier, cf. 1. 14-16; pour le second, 1. 16-22, 58-62, 74, et supra,
p. 208.
198. Ibid., 1. 23-28, 68-70, 78; la servitrix Catherine ayant une fille (1. 51-52)
est sans doute identique à l'esclave de ce nom. Le nom grec ne prouve pas qu'elles
étaient d'origine grecque. Il était d'usage de donner des noms chrétiens aux
esclaves baptisés.
199. Ibid., 1. 28-34 : Georgius Caludi, Iohannotus Glava et Georgius Borile.
Ce dernier ne suivit pas Calophéros en Chypre, mais resta à Venise, où, le 30 mai
1396, il obtint la citoyenneté vénitienne : Simile, privilegium annorum, octo habi-
1). JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 221
215. Pour la biographie du premier, cf. R.-J. Loenertz, Les recueils de lettres
de Démétrius Cydonès, p. 108-122 (Essai de chronologie) et la bibliographie, ibid.,
p. ix-x; en outre, du même, Correspondance de Manuel Calécas, p. 53-57, et D.C.,
I-II. Sur Chrysoloras, cf. G. Gammelli, Manuele Crisolora, I dotti bizantini e le
origini dell'u mânes imo, I, Firenze, 1941, et R.-J. Loenertz, Calécas, p. 63-71.
216. Georgio Monomacho de Constantinopoli consanguineo dicti testatoris (1. 35;
cf. aussi 1. 36 et 60); Léonce Mâcheras, p. 196, 247, 318; Chronique d'Amadi, éd.
R. de Mas Latrie, Paris, 1891, p. 457; Strambaldi, p. 146, 184, 238.
217. Cf. la lettre signalée supra, p. 214, n. 155. Sur ce personnage, cf. R.-J. Loe
nertz, Calécas, p. 86-89, mais il n'est pas prouvé qu'il était l'homme d'affaires
de Calophéros, comme l'affirme cet auteur.
218. Et ceci, donec ipsi Dimitrius et Henricus vel alter eorum non fuerit in Ma
terra et loco ubi erunt ahi cornmissari dicti testatoris (1. 61-62). Cf. également 1. 73-74,
et supra, p. 222.
219. Cf. supra, p. 198-199, et, sur l'amiral, G. Hill, op .cit., II, p. 436-437. II
n'est pas exclu que les accords de Calophéros avec Janot et Alise de Soissons
224 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
{supra, p. 198) ont été conclus sous l'égide de Jacques Ier, roi de Chypre depuis
1382.
220. Cf. Ch. Hopf, CGR, p. 379, et supra, p. 204-205.
221. Acte publié dans D.C., II, p. 436, n° 4; l'année précédente, il s'était occupé
des affaires de Négrepont : R.-J. Loenertz, Hospitaliers et Navarrais, p. 358-359
(acte du 12 septembre 1383).
222. D'après les comptes d'Amédée de Savoie : cf. R. Cessi, loc. cit., p. 60,
n° 83-85.
223. D.C., I, p. 196, n° 12, 1. 22-27.
224. Ibid., 1. 28-32, et en particulier ceci : fuerit facta et fabricata post mortem
dicti Arardi, habita notitia de morte domini Iohannis Laschari, qui decessit in par-
tibus Cipri, et ceci, prêter mentem et scientiam dicti Arardi. — Bertuccio de Tarento
semble être resté à Venise, quand Calophéros partit en Chypre, en 1390, et y entra
au service d'Erard Lascaris.
225. Hopf est à l'origine de l'erreur fort répandue, selon laquelle Erard serait
mort en 1409; CGR, p. 472, n° XUb. A noter que, dans GG, II, p. 74a, il adopte
la date de 1408!
D. JACOBY I JEAN LASCARIS CALOPHÉROS 225
226. D.C., I, p. 196, 1. 34-42; pour cette clause du testament, cf. ibid., p. 193,
1. 72-73 et supra, p. 214 et 221-222.
227. Ibid., p. 194-195, n° 11, 1. 7-8. Marie, femme de Pierre de Saint-Supéran
à cette date, ne peut être identique à Marie Zaccaria, sœur d'Erard III (ainsi
Ch. Hopf, CGR, p. 502, n° 1). Erard Lascaris étant qualifié nepos de Marie, celle-ci
ne peut-être qu'une tante, fille d'Erard III et sœur de Lucie, mère d'Erard Lasc
aris. On pourra en déduire que Pierre de Saint-Supéran épousa d'abord Marie,
fille d'Erard III Mavros, morte après le 2 janvier 1393, puis Marie, sœur d'Andro-
nic Asên Zaccaria.
228. D. C, I, p. 194, 1. 3-4.
229. C'est lui qui, le 5 juillet 1387, établit la procuration des feudataires de
Morée en faveur de Pierre de Saint-Supéran, en vue des négociations avec les châ
telains de Coron et de Modon, au cours desquelles il a été présent; L. de Mas Latrie,
Documents (cité supra, n. 152), p. 94, 1. 10, et p. 98, 1. 13-14. Le 11 décembre
1390, il est nommé ambassadeur par les barons de Morée, en vue des négociations
finales avec Amédée de Savoie, et il figure parmi les témoins de l'accord conclu le
5 juin 1391 ; J. A. C. Buchon, Recherches et matériaux pour servir à une histoire de la
domination française aux XIIIe, XIVe et XVe siècles dans les provinces démemb
réesde l'empire grec à la suite de la quatrième Croisade, Paris, 1840, I, p. 289,
1. 11-12, et p. 294, en note, col. 1, 1. 17-18 du bas. Le 12 octobre 1397, il établit
un acte d'inféodation à la demande de Guillaume Hugot, feudataire lige de la
principauté : E. Gerland, Neue Quellen zur Geschichte des lateinischen Erzbis
tumsPatras, Leipzig, 1903, p. 185-186, n° 7, et cf. p. 186, 1. 10-13. Dans un acte
vénitien du 12 juillet 1414, il apparaît comme ambassadeur de Centurione Zaccar
ia : C. N. Sathas, Documents inédits, III, p. 61, 1. 31-32.
230. Parochianum Lille (1. 4). Cette localité figure dans deux actes vénitiens,
respectivement de 1454 et 1456 : C. N. Sathas, Documents inédits, I. p. 221, 1. 23,
et p. 235, 1. 10-11.
231. D. C, I, p. 196, n° 12, 1. 12-15, 38-41.
226 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES
232. Ibid., p. 195, 1. 30-31. Dans cette note, ajoutée au bas de la procuration,
il n'est pas question du testament, mais il est évident que celui-ci a été transféré
à la même occasion.
233. Ibid., p. 194, n° 10, 1. 90-91.
234. Cf. infra,
235. D. C, I, p. 196-197, n° 12, 1. 4-46 : A. S. V., Avogaria di Comun, Raspe,
reg. 6, pars 1, fol. 56 v.-57 r.
236. Ibid., p. 197, 1. 47-69, et en particulier ceci (1. 57-61) Et quia in dicta parte
continentur aliqua ultra incessionem et annulationem testamenti, que non potuerunt
poni ullo modo, determinatum fuit per infrascriptos consiliarios quod dicta pars non
fuit posita nec convenu cum ordine.
237. Avogaria di Comun, Raspe, reg. 6, pars 1, fol. 57 r. : quatenus secundum
formant consilij debeant solvisse libras decem pro quolibet, amodo usque ad octo dies
proximos, et se removisse a quadam terminatione per eis facta, per quam termina-
verunt quod quedam pars posita per advocatores Comunis... non iverit cum ordine. —
Cette partie de l'acte n'a pas été publiée par R.-J. Loenertz. Il en est de même du
texte cité à la note suivante.
238. Ibid. : propter placitare dominorum advocatorum comunis revocata et can-
cellata fuit suprascripta terminatio tanquam facta contra id quod fieri poterat et
debebat per suprascriptos nominatos consiliarios, qui se removerunt.
D. JACOBY : JEAN LASCARIS CALOPHEROS 227
239. Il ne peut évidemment être question que de ces biens; pour ceux de Chypre,
cf. infra.
240. A. S. V ., Senato, Misti, reg. 46, fol. 166 r. : quod juditium cause pertineat
dicto domino imperatori.
241. Cf. note précédente et Senato, Sécréta, reg. IV, fol. 87 r. Résumés dans
F. Thiriet, Régestes, II, n° 1176 et 1362. Cf. également note suivante.
242. Senato, Misti, reg. 49, fol. 108 v. : bona que requirit non erant ipsius domini
Johannis Lascari, qui sicut patet erat civis noster, ymo fuerunt Henrardj Lascarj
filij sui, similiter civis nostri, cui ipse dominus Johannes de ipsis bonis donationem
fecit, ut patet per publicum instrumentum donationis, et tanquam bona dicti Enrardi
civis nostri intromissa fuerunt per nostros offrtiales et facte sunt terminationes
et alij actus fudicanj, prout apparuit, secundum leges et ordines nostros.
243. Senato, Sécréta, reg. 6, fol. 4 v. : qui eundem similiter clare informabunt quali-
ter processerunt facta predicta.
244. A. S. V., Privileggi, reg. 1, fol. 113 v. : Dimitri Scarano filio quondam
Theodori qui fuit de Constantinopoli. Ce fait n'est pas mentionné dans la biographie
de Scaranos, retracée par R.-J. Loenertz, Calécas, p. 86-89.
245. R.-J. Loenertz, op. cit., p. 86.
246. Sur cet accord, cf. supra, p. 239.
228 REVUE DES ÉTUDES BYZANTINES